Le rapport Comment les immigrés contribuent à l’économie des pays en développement est le fruit d’un projet mené conjointement par le Centre de développement de l’OCDE et l’Organisation internationale du travail, avec le soutien de l’Union européenne. Il couvre les dix pays partenaires – l’Afrique du Sud, l’Argentine, le Costa Rica, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kirghizistan, le Népal, la République dominicaine, le Rwanda et la Thaïlande – de ce projet, « L’évaluation de la contribution économique des migrations de travail dans les pays en développement comme pays de destination », visant à apporter des preuves empiriques – à la fois quantitatives et qualitatives – des multiples façons dont les immigrés influent sur leurs pays d’accueil.
Ce rapport met en avant l’impact relativement limité des migrations de travail sur les performances des travailleurs autochtones sur le marché du travail, la croissance économique et les finances publiques dans les dix pays partenaires. Cela signifie que la crainte que les immigrés génèrent des effets négatifs s’avère souvent injustifiée, mais aussi que la plupart des pays de destination ne tirent pas suffisamment parti du capital humain et de l’expertise que les immigrés ont à offrir. Les politiques publiques peuvent jouer un rôle déterminant pour accroître la contribution des immigrés au développement de leur pays d’accueil.
Comment les immigrés contribuent à l'économie des pays en développement
Résumé
Synthèse
Avec plus d’un tiers des migrants internationaux résidant dans des pays en développement, l’immigration a une incidence de plus en plus importante sur le développement socio-économique des pays à revenu faible ou intermédiaire. Toutefois, le débat politique sur l’impact des immigrés dans leur pays d’accueil se fonde souvent davantage sur de simples opinions que sur des données concrètes. Une analyse plus systématique de l’impact économique des migrations de travail dans les pays en développement permettra de mieux informer les décideurs politiques pour l’élaboration de politiques visant à exploiter pleinement le potentiel de l’immigration dans les pays de destination.
Le projet « L’évaluation de la contribution économique des migrations de travail dans les pays en développement comme pays de destination » (ECLM) – mené conjointement par le Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Organisation internationale du travail (OIT), et cofinancé par l’Union européenne – a été conçu pour permettre une analyse de ce type. Le présent rapport synthétise les résultats de ce projet, mené entre 2014 et 2018 dans dix pays partenaires – l’Afrique du Sud, l’Argentine, le Costa Rica, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kirghizistan, le Népal, la République dominicaine, le Rwanda et la Thaïlande –, les replace dans le contexte d’une analyse globale, documente l’impact de l’immigration de travail sur le développement des pays d’accueil, et présente les principales recommandations stratégiques.
Contribution des immigrés à l’économie des pays en développement
À l’aide de méthodes d’analyse à la fois quantitatives et qualitatives, le présent rapport cible trois grandes dimensions de la contribution économique des immigrés dans les pays en développement : le marché du travail, la croissance économique et les finances publiques.
Marché du travail : Il existe un lien direct entre le degré d’intégration des immigrés sur le marché du travail de leur pays d’accueil et leur contribution économique dans ce pays. Dans la plupart des pays partenaires du projet, les immigrés ont des taux de participation à la main-d’œuvre et d’emploi supérieurs à ceux de la population née dans le pays. La qualité des emplois que les immigrés occupent reste toutefois source de préoccupation, car ils sont souvent confrontés à un manque d’emplois décents.
L’immigration a-t-elle une incidence – positive ou négative – sur les résultats de la population née dans le pays sur le marché du travail ? D’après l’analyse menée dans les dix pays en développement partenaires du projet, l’impact global de l’immigration est négligeable. Toutefois, les résultats varient et dépendent fortement du contexte. Ces conclusions concordent avec la plupart des recherches menées sur les pays de l’OCDE, qui ne mettent au jour qu’une incidence limitée.
Croissance économique : L’estimation de la contribution des immigrés au produit intérieur brut (PIB) va d’environ 1 % au Ghana à 19 % en Côte d’Ivoire, avec une moyenne de 7 %. La contribution des immigrés à la valeur ajoutée est supérieure à leur pourcentage dans la population active occupée dans la moitié des pays partenaires du projet. Dans les pays où ce n’est pas le cas, les différences sont minimes. Dans l’ensemble, l’immigration est peu susceptible d’entraîner une baisse du PIB par habitant. L’analyse de l’incidence de l’immigration sur la productivité met au jour des résultats moins clairs. Différentes méthodes de recherche ont été utilisées dans les différents pays selon la disponibilité des données.
Finances publiques : Quelle incidence les immigrés ont-ils sur l’équilibre fiscal et la qualité des services publics dans les pays en développement ? Si les immigrés contribuent à accroître les recettes publiques globales, cette augmentation peut ne pas toujours être suffisante pour compenser les dépenses publiques qu’ils engendrent. C’est le cas dans deux pays partenaires du projet – au Kirghizistan et au Népal –, où le déficit est inférieur à 1 % du PIB. Dans les sept autres pays partenaires du projet disposant de données, l’impact fiscal direct net des immigrés est positif, mais inférieur à 1 % du PIB. Dans l’ensemble, la contribution fiscale nette des immigrés est donc en général positive, mais limitée. Ce constat concorde avec les données dont on dispose sur les pays de l’OCDE.
Comment les pays de destination peuvent-ils renforcer la contribution de l’immigration au développement ?
Si l’impact de l’immigration sur l’économie des dix pays partenaires du projet est limité, les politiques publiques peuvent jouer un rôle clé pour renforcer sa contribution au développement des pays de destination. Dans nombre de pays en développement, une attention disproportionnée a été accordée aux politiques visant à maximiser l’impact positif de l’émigration plutôt que de l’immigration. L’exclusion de l’immigration des stratégies de développement peut toutefois représenter autant d’occasions manquées pour les pays d’accueil. Sur la base des résultats des travaux recherche, le présent rapport illustre cinq priorités stratégiques pouvant être envisagées par les pays d’immigration :
Adapter les politiques migratoires aux besoins du marché du travail. La mise en œuvre de cadres de réglementation migratoire fondés sur les besoins du marché du travail peut être bénéfique aux pays en développement. La facilitation des entrées et l’offre de davantage de voies légales d’accès aux travailleurs migrants permettent d’augmenter le pourcentage d’immigrés en situation régulière et occupant un emploi dans le secteur formel, ce qui peut à son tour accroître sensiblement la contribution des immigrés à l’économie de leur pays d’accueil. Le suivi attentif des indicateurs du marché du travail, combiné à la mise en place de mécanismes de consultation, en particulier auprès du secteur privé, peut constituer un appui supplémentaire aux systèmes de gestion des migrations.
Tirer le meilleur parti de l’impact de l’immigration sur l’économie. Les pays de destination devraient envisager des interventions politiques visant à : i) favoriser l’employabilité des immigrés, par exemple au moyen d’un réseau élargi de services publics d’emploi ou de formation, et de possibilités d’apprentissage tout au long de la vie afin de perfectionner leurs compétences ; ii) encourager leur investissement en levant les obstacles à l’investissement et à la création d’entreprises ; et iii) maximiser la contribution fiscale des immigrés en soutenant la croissance du secteur formel ou en élargissant l’assiette fiscale et les contributions du secteur informel.
Protéger les droits des migrants et lutter contre la discrimination. Les conditions de vie et de travail des immigrés sont étroitement liées à la façon dont ils contribuent à l’économie de leur pays d’accueil. Dans les pays de destination, les pouvoirs publics, ainsi que les organisations de travailleurs et d’employeurs, doivent donc donner la priorité à la protection des droits des immigrés et à la lutte contre toute forme de discrimination et de racisme.
Investir dans l’intégration des immigrés. Nombre de pays en développement manquent de politiques globales pour faciliter l’intégration des immigrés. Or ce manque peut engendrer de graves problèmes de cohésion sociale et limiter la capacité des immigrés à contribuer au développement de leur pays d’accueil. Diverses mesures doivent être mises en œuvre dès l’arrivée des immigrés. Les autorités locales peuvent en outre prendre une part active à ce processus.
Assurer un meilleur suivi de l’impact économique de l’immigration. L’amélioration de la base de données et d’éléments probants disponibles peut permettre la mise en œuvre d’actions et de politiques publiques adéquates. Si la plupart des pays partenaires du projet collectent des données utiles pour l’étude de l’immigration, celles-ci sont souvent insuffisantes pour la réalisation d’une analyse exhaustive. Il est essentiel que les pays en développement investissent dans l’amélioration de la collecte des données relatives aux migrations et des analyses des impacts potentiels de l’immigration sur l’économie. La cadre analytique utilisé dans le présent rapport peut fournir des indications utiles à cet effet.