Dès l’âge de cinq ans, on observe de nets écarts d’apprentissage entre les enfants issus de milieux modestes et aisés (autrement dit, entre ceux qui se situent dans les quartiles inférieur et supérieur de l’indice de statut socio-économique défini par le niveau d’études des parents, leur profession et les revenus du ménage) sur toute une série d’indicateurs cognitifs et autres.

L’ampleur de cet écart dépend de l’indicateur, avec, en moyenne, huit mois pour la flexibilité mentale et 20 pour les compétences socio-émotionnelles - ces dernières étant essentielles pour s’adapter et réussir à l’école. L’écart au regard de l’acquisition de la lecture et de l’écriture - un des meilleurs indicateurs du niveau d’études ultérieur - est déjà de 12 mois. Il est nécessaire de combler ces écarts rapidement si l’on veut que les enfants de milieux défavorisés aient une chance de réussir aussi bien que leurs camarades privilégiés. La plupart n’y parviennent pas.

Plus les enfants grandissent, plus les inégalités s’enracinent– et plus il devient difficile de les éliminer. Il semble donc plus judicieux d’agir tant qu’ils sont encore jeunes, en mettant l’accent sur les besoins des enfants de milieux défavorisés avant le début de la scolarité obligatoire, puis au cours des premières années d’école.

Les services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants (EAJE) constituent une base solide pour l’apprentissage et le bien-être des enfants, et ont une incidence bénéfique nettement plus importante sur les enfants de familles modestes. La préscolarisation dans des structures d’EAJE de qualité favorise le développement cognitif, social et émotionnel des jeunes enfants, ainsi que leur autodiscipline. Les données mettent en évidence non seulement une amélioration des résultats scolaires et professionnels plus tard dans la vie, mais aussi un risque moindre de problèmes comportementaux et émotionnels à l’adolescence.

Pourtant, les enfants de milieux défavorisés sont moins susceptibles que leurs camarades mieux lotis de fréquenter des structures d’EAJE : dans les pays de l’OCDE, 74 % des premiers sont préscolarisés pendant au moins deux ans, contre 86 % des seconds.

Une politique visant à améliorer l’accès à des services d’EAJE de qualité pourrait faire la différence.

À cinq ans, les enfants issus de milieux défavorisés qui font preuve de résilience ont en commun un certain nombre de caractéristiques, dont la plus importante est la qualité de l’environnement pédagogique à la maison, lequel se définit par le type et le degré de mobilisation active des parents auprès de leurs enfants, mobilisation qui constitue un facteur essentiel du développement cognitif et socio-émotionnel.

Les données mettent en évidence l’influence déterminante de l’entourage et des parents qui lisent régulièrement des livres avec leurs enfants, qui ont des livres pour enfants à la maison et qui discutent régulièrement avec eux.

Les responsables de l’éducation et les décideurs peuvent aider les enfants de milieux défavorisés à atteindre un niveau de développement comparable à celui de leurs camarades plus privilégiés en favorisant des liens plus étroits entre les enseignants et les parents, en améliorant le cadre pédagogique à la maison et en facilitant l’accès à des services d’EAJE de qualité.

L’analyse des politiques menées montre que ce sont des liens plus étroits entre les structures, les individus et les processus qui caractérisent les systèmes éducatifs réactifs et résilients, autrement dit ceux qui parviennent à inscrire dans un ensemble cohérent les multiples facettes de l’expérience d’apprentissage tout au long de la vie.

Donner aux apprenants les moyens et la souplesse nécessaires pour définir eux-mêmes leur parcours éducatif en fonction de l’évolution de leur situation, de leurs intérêts et de leurs besoins leur offre les meilleures chances d’exploiter tout leur potentiel - tout en optimisant les opportunités et, donc, en renforçant l’équité. Il faudrait pour cela que les systèmes éducatifs deviennent beaucoup plus dynamiques face aux défis économiques et sociétaux qui se posent à court et à long terme.

Certaines des caractéristiques structurelles de ces systèmes compliquent l’amélioration des périodes de transition : dans plus de la moitié des pays et économies couverts par différentes enquêtes de l’OCDE en 2020, l’enseignement préprimaire (EAJE) n’était pas obligatoire et les élèves éprouvaient des difficultés lors des périodes de transition à différents âges. Au total, dans 21 % des systèmes éducatifs, au moins un cinquième des 25-29 ans étaient sans emploi et sortis du système éducatif.

En 2019, les dépenses d’éducation représentaient en moyenne 10.6 % des dépenses publiques totales dans les pays de l’OCDE, dont environ les trois quarts étaient destinés à l’enseignement non supérieur. S’agissant plus particulièrement de l’école primaire, cette part oscille entre 7.3 % en Afrique du Sud et 1.5 % en Allemagne (compte tenu de la diversité des systèmes d’enseignement primaire et des différences en termes de niveau de production économique en valeur absolue et de budget public).

L'équité dans l'éducation vise à créer des conditions égales pour tous les enfants en apportant un soutien à ceux qui en ont le plus besoin. L’amélioration des services d’enseignement préprimaire (EAJE) et du cadre pédagogique à la maison se révèle d’autant plus bénéfique pour les enfants de familles modestes, mais elle favorise également une résilience durable de la société et de l’économie. Les pouvoirs publics doivent cependant faire des choix difficiles quant aux financements qu'ils souhaitent allouer aux différentes composantes du secteur éducatif ainsi qu'à d'autres services publics essentiels.