Abstract

Cette note revient sur les orientations publiées par le Secrétariat de l’OCDE en avril 2020 concernant l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les conventions fiscales.

Pour lutter contre la pandémie de COVID-19, les pouvoirs publics ont imposé ou recommandé des mesures sans précédent, notamment des restrictions aux déplacements et la réduction des activités des entreprises (désignées ci-après par l’expression générale « mesures de santé publique »), qui ont été appliquées dans la plupart des juridictions sous des formes diverses et à des périodes différentes pendant la majeure partie de l’année 2020. Cette situation devrait perdurer en 2021. Ces orientations ont pour but d’accroître la sécurité juridique pour les contribuables durant cette période exceptionnelle.

Elles reflètent le point de vue du Secrétariat sur l’interprétation des dispositions des conventions fiscales (chaque juridiction restant libre de définir ses propres orientations afin de garantir une plus grande sécurité juridique en matière fiscale à ses contribuables). Elles traduisent la démarche générale adoptée par les juridictions et expliquent les mesures prises par certaines d’entre elles en réponse aux conséquences du COVID-19 sur la situation fiscale des individus et des employeurs.

Ces orientations ne s’appliquent qu’au contexte de la pandémie de COVID-19 lorsque des mesures de santé publique sont en vigueur. Elles visent à éviter les situations de double imposition, mais ne peuvent pas être invoquées pour créer des situations de double non-imposition. L’analyse porte essentiellement sur les circonstances dans lesquelles les administrations fiscales doivent se prononcer sur des éléments factuels et ces orientations ne prétendent pas remplacer leur appréciation à cet égard.

 Introduction

1. Les conséquences de la maladie du coronavirus (« COVID-19 ») sont considérables. La propagation rapide du virus a mis à rude épreuve les infrastructures médicales locales, a entraîné des restrictions aux déplacements et aux interactions sociales et a provoqué un bouleversement sans précédent de l’économie mondiale.

2. Durant la pandémie, bon nombre d’entreprises ont été confrontées à une réduction d’activité et ont dû fermer leurs bureaux et autres locaux, ce qui les a obligées à modifier leur mode de fonctionnement (mise en place du travail à domicile, par exemple). Dans un grand nombre de juridictions, les voyages internationaux ont été suspendus ou fortement limités pendant plusieurs semaines, certaines personnes restant bloquées dans des pays où elles ne se seraient pas normalement trouvées. Cette délocalisation temporaire peut avoir des conséquences fiscales pour les individus ainsi que pour les entreprises qui les emploient.

3. Compte tenu de ces circonstances exceptionnelles, le 3 avril 2020, le Secrétariat de l’OCDE a publié des orientations sur l’application des règles prévues par les conventions fiscales internationales aux circonstances dans lesquelles des travailleurs frontaliers ou des individus sont bloqués dans une juridiction qui n’est pas leur juridiction de résidence. Ces orientations ont été publiées pour répondre aux demandes urgentes des juridictions concernées qui, en raison de la pandémie de COVID-19, avaient pris des mesures inédites affectant la mobilité des individus, notamment des restrictions aux déplacements et des mesures de quarantaine strictes. C’est pourquoi ce document est publié sous la responsabilité du Secrétaire général de l’OCDE et les opinions qui y sont exprimées et les arguments qui y sont avancés ne reflètent pas nécessairement les points de vue officiels des pays membres de l’OCDE.

4. Ces mesures sans précédent imposées ou recommandées par les pouvoirs publics, notamment les restrictions aux déplacements et la réduction de l’activité des entreprises (désignées ici par l’expression générale « mesures de santé publique ») ont été appliquées dans la plupart des juridictions sous des formes diverses et à des périodes différentes pendant la majeure partie de l’année 2020. Cette situation devrait perdurer en 2021. Ces orientations ont pour but d’accroître la sécurité juridique pour les contribuables durant cette période exceptionnelle au cours de laquelle des mesures de santé publique sont en vigueur ; elles traduisent la démarche générale adoptée par les membres et expliquent les mesures prises par certaines juridictions pour répondre aux conséquences du COVID-19 sur la situation fiscale des personnes physiques et des employeurs. Ces orientations reflètent le point de vue du Secrétariat sur l’interprétation des dispositions des conventions fiscales (chaque juridiction restant libre de définir des orientations différentes)1.

5. Par ailleurs, ces nouvelles orientations ne s’appliquent qu’aux situations occasionées par la pandémie de COVID-19 alors que des mesures de santé publique sont en vigueur pour freiner la propagation du virus. Elles sont, par nature, temporaires et visent uniquement à faire face aux circonstances exceptionnelles de la pandémie de COVID-19. Leur but est d’éviter les cas de double imposition, mais elles ne peuvent pas être invoquées pour créer des situations de double non-imposition. L’analyse porte essentiellement sur les circonstances dans lesquelles les administrations fiscales doivent se prononcer sur des éléments factuels et ces orientations n’ont pas vocation à remplacer l’appréciation des administrations fiscales dans ces situations.

6. Les restrictions uniques et presque sans précédent imposées par les pouvoirs publics face à la pandémie de COVID-19 ont été source de difficultés pratiques pour les entreprises et les travailleurs. Ainsi, selon la localisation d’un employé pendant la durée des restrictions liées au COVID-19, de nouveaux droits d’imposition sur ses revenus peuvent naître dans d’autres juridictions. Ces nouveaux droits d’imposition peuvent se substituer aux droits d’imposition existants et impliquer le remboursement de certains impôts prélevés à la source. Les pouvoirs publics ont abordé, d’un point de vue pratique, les conséquences des restrictions liées au COVID-19 dans ce contexte et ont publié des orientations spécifiant la manière dont les règles seront appliquées. Ces orientations ont été accueillies favorablement par les entreprises.

7. Lorsque le Secrétariat de l’OCDE a publié la première version des orientations (en avril 2020), une incertitude pesait sur la durée des restrictions et bon nombre des situations analysées dans ce cadre ne devaient être que temporaires. Plus de huit mois se sont écoulés depuis cette publication et certaines des mesures et restrictions décrites sont toujours en vigueur. Les auteurs de ce document examinent des situations supplémentaires qui n’avaient pas été abordées en détail en avril, se demandent également si l’analyse et les conclusions exposées en avril restent applicables lorsque les circonstances examinées persistent pendant une longue période ou deviennent la « nouvelle norme » et s’interrogent sur les pratiques et orientations adoptées par les juridictions pendant cette période de COVID-19.

8. Les sections qui suivent portent sur l’application des règles existantes et des Commentaires de l’OCDE dans les cas suivants :

  • la création d’établissements stables (bureau situé au domicile, établissement stable découlant de l’activité d’un agent dépendant) et l’interruption des chantiers de construction ;

  • les changements de résidence des entités et des personnes physiques et l’application de clauses de départage en cas de double résidence ; et

  • les revenus d’emploi, à savoir les paiements effectués dans le cadre de plans de relance, les travailleurs confinés, les travailleurs frontaliers et le télétravail depuis un pays étranger.

 Inquiétudes relatives à la création d’établissements stables

9. Certaines entreprises peuvent craindre que le fait que leurs employés soient délocalisés dans des pays autres que ceux dans lesquels ils travaillent régulièrement, ou travaillent depuis leur domicile pendant la pandémie de COVID-19, ne conduise à la création d’un établissement stable dans ces pays, ce qui leur imposerait de nouvelles obligations fiscales et déclaratives.

10. Comme expliqué ultérieurement, ce changement temporaire et exceptionnel du lieu de travail des lié à la crise du COVID-19, notamment lorsqu’ils travaillent depuis leur domicile, ne devrait pas conduire à la création de nouveaux ES pour leur employeur. De même, la conclusion, à titre temporaire, de contrats au domicile d’employés ou d’agents en raison de la crise du COVID-19 ne devrait pas conduire à la création d’ES pour les entreprises concernées. Enfin, il ne devrait pas être considéré qu’un ES constitué par un chantier de construction cesse d’exister lorsque les travaux sont temporairement interrompus. Les juridictions peuvent cependant envisager « d’arrêter le compteur » lorsqu’elles déterminent si le seuil temporel applicable à l’ES a été atteint durant certaines périodes au cours desquelles les activités ont été suspendues du fait des mesures sanitaires destinées à prévenir la propagation du COVID‑19.

11. Néanmoins, il peut arriver que les seuils applicables en vertu du droit interne (y compris et notamment de la législation des états/provinces) à partir desquels une entreprise est tenue de s’enregistrer à des fins fiscales, soient plus bas que ceux applicables en vertu d’une convention fiscale. En outre, tous les impôts sur le revenu ne sont pas couverts par la convention fiscale applicable (notamment les impôts sur le revenu propres à chaque État aux États-Unis).

12. Plusieurs administrations fiscales ont publié des orientations pour déterminer si les modifications des habitudes de travail induites par la pandémie de COVID-19 peuvent avoir pour effet la création d’un ES. En cette période d’incertitude sans précédent, les entreprises ont apprécié la sécurité juridique accrue fournie par ces orientations. L’Encadré 1 présente un modèle d’orientation.

13. Les juridictions sont invitées à envisager l’adoption d’une approche similaire.

 
Encadré 1. Modèle d’orientation publié par les juridictions sur la création d’un ES

L’Administration fiscale australienne a publié des orientations1 indiquant que les conséquences du COVID-19 ne suffiront pas à elles seules à ce qu’une entreprise soit considérée comme ayant un ES australien si elle réunit toutes les conditions suivantes :

  • L’entreprise constituée à l’étrangern’avait pas d’établissement stable en Australie avant l’apparition des effets du COVID-19.

  • Aucune autre modification n’affecte la situation de l’entreprise.

  • La présence imprévue d’employés en Australie est une conséquence de courte durée de leur délocalisation temporaire ou de leur restriction de voyage en raison du COVID-19.

Les orientations confirment que l’Administration fiscale australienne ne mettra pas en œuvre des ressources en matière de conformité pour déterminer si l’entreprise a un établissement stable en Australie, si :

  • l’entreprise n’avait pas par ailleurs d’établissement stable en Australie avant l’apparition des effets du COVID-19

  • la présence temporaire des employés en Australie demeure la conséquence exclusive des restrictions aux déplacements dues au COVID-19

  • les employés présents temporairement en Australie quitteront le pays dès que possible après l’assouplissement des restrictions aux voyages internationaux

  • l’entreprise n’a pas reconnu que ces employés constituent un établissement stable ou génèrent un revenu de source australienne en Australie aux fins de la législation fiscale d’une autre juridiction.

De plus, les orientations indiquent que cette approche est en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021.

Le ministère des Finances autrichien a publié des orientations précisant que la situation suivant laquelle un employé autrichien d’une entreprise étrangère exerce son activité à distance depuis un bureau situé au domicile (autrichien), pendant la pandémie de COVID-19 en raison des mesures recommandées par les autorités publiques concernées, s’analyse comme un cas de force majeure. Par conséquent, au vu du caractère exceptionnel de la pandémie de COVID-19 – et sous réserve que le travail à domicile ne devienne pas la norme – il n’y a pas de création d’un ES par une entreprise étrangère au sens de l’article 5 du Modèle de convention de l’OCDE, car le bureau situé au domicile n’est pas suffisamment à la disposition de l’entreprise. En outre, l’employeur fournit des bureaux qui sont habituellement à la disposition de ses employés.

Le ministère des Finances autrichien a également publié des orientations indiquant que les interruptions temporaires des sites de construction en raison de la pandémie de COVID-19 ne devraient pas, en principe, entraîner une suspension du délai visé au paragraphe 3 de l'article 5 du Modèle de convention fiscale de l’OCDE – sous réserve d’une convention bilatérale divergente (par référence à : Conventions fiscales et impact de la crise du COVID-19 : Analyse du Secrétariat de l’OCDE du 3 avril 2020, p. 3)

L’Agence du revenu du Canada a publié des Directives provisoires2 indiquant que d’un point de vue administratif, lorsque les employés d'une entité résidente dans un pays ayant conclu une convention doivent exercer leurs fonctions au Canada en raison des restrictions aux déplacements, elle ne considérera pas que cette raison est à elle seule suffisante pour que cette entité ait un établissement stable au Canada. En outre, lorsqu'un agent dépendant conclut des contrats au Canada au nom d'une entité non résidente durant les restrictions aux voyages, que ces activités sont limitées à la période durant laquelle ces restrictions sont en vigueur et que ces activités n'auraient pas eu lieu au Canada en l'absence desdites restrictions, elle ne considérera pas que cette raison est à elle seule suffisante pour que cette entité ait un établissement stable découlant de l’activité d’un agent dépendant au Canada. De plus, l’Agence du revenu du Canada appliquera ces lignes directrices au cas par cas en fonction des situations d’espèce.

Le ministère des Finances allemand a publié des orientations indiquant qu’une interruption de la construction et des travaux d’installation causée par la pandémie de COVID-19 ne sera pas prise en compte dans le calcul du seuil temporel applicable à un établissement stable prévu par le paragraphe 3 de l'article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, sous réserve que :

  • la durée de l’interruption soit d’au moins deux semaines.

  • le personnel de l’entreprise (ou le personnel mandaté) ait été retiré du site de construction ou l’ait quitté, et

  • le revenu concerné soit imposé, dans la juridiction de résidence de l’entreprise ou de son personnel par exemple, si, en raison de la suspension du délai, l’entreprise n’a pas d’établissement stable en Allemagne. À cet égard, des renseignements fiscaux peuvent être communiqués spontanément à l’administration fiscale de l’autre juridiction contractante.

Afin de déterminer le seuil temporel, l’Allemagne ne tiendra pas compte du délai d’interruption décrit dans les orientations mais cumulera le temps passé avant et après l’interruption (le critère de durée d’un ES ne repart pas de zéro après l’interruption liée à la pandémie).

L’Autorité indépendante pour les recettes publiques de la Grèce a publié des orientations3 précisant les points suivants :

  • Pour la période comprise entre le 18 mars et le 15 juin 2020, lorsqu’un employé est présent en Grèce et exerce son emploi en Grèce (à savoir le pays d’accueil) en raison des restrictions aux déplacements, elle ne considèrera pas que cette raison est à elle seule suffisante pour que cette entité ait un établissement stable. Ces orientations sont conformes à l’interprétation de l’OCDE selon laquelle une installation fixe ne peut pas être de nature purement temporaire, mais doit avoir un certain degré de permanence et l’employeur n’a pas imposé l’utilisation du domicile pour l’exercice d’une activité d’entreprise, mais pour se conformer aux recommandations gouvernementales. Pour les périodes antérieures au 18 mars et postérieures au 15 juin 2020, il convient d’évaluer si ces restrictions étaient en vigueur ;

  • Pour la période du 18 mars au 15 juin, lorsqu’un agent conclut des contrats en Grèce (à savoir la juridiction d’accueil) en son nom propre ou s’il est bloqué en Grèce, elle ne considèrera pas que cette raison est à elle seule suffisante pour que cette entité non-résidente ait un établissement stable, sous réserve que cette personne n’ait pas conclu habituellement des contrats pour le compte de l’entité non-résidente avant la pandémie de COVID-19. Le caractère « habituel » de cette condition est apprécié en fonction des faits de l’espèce et du degré. Pour les périodes antérieures au 18 mars et postérieures au 15 juin 2020, il convient d’évaluer si ces restrictions étaient en vigueur ;

  • Il n’est pas considéré qu’un chantier de construction cesse d'exister lorsque les travaux sont temporairement interrompus en raison des restrictions liées au COVID-19, mais la durée de cette interruption est prise en compte dans le calcul des seuils de durée d’existence d’un chantier de construction constituant un ES.

L’Administration fiscale de l’Irlande a publié des instructions4 invitant à ne pas tenir compte de la présence d’une personne physique en Irlande - et, le cas échéant, dans une autre juridiction - aux fins de l’imposition des bénéfices des sociétés dans le cas d’une entreprise pour laquelle cette personne est employée en tant que salarié, directeur, prestataire de services ou agent dès lors qu’il est démontré que cette présence résulte des restrictions de déplacement liées au COVID-19. Il conviendrait que la personne physique et l’entreprise conservent les pièces attestant des faits et circonstances qui justifient, de bonne foi, la présence de l’intéressé en Irlande, ou en dehors de son territoire, de façon à pouvoir les présenter à l’administration fiscale si celle-ci demande de prouver que cette présence est motivée par les restrictions aux déplacements liées au COVID-19.

L’Administration fiscale de la Nouvelle-Zélande a publié des orientations5 indiquant que le confinement ou la délocalisation des employés d’une entreprise en Nouvelle-Zélande ne conduira pas à la création d’un ES dans le pays en raison de la pandémie de COVID-19. Une entreprise non résidente ne tirera pas un revenu en Nouvelle-Zélande d’un ES existant pour une brève période. L’installation fixe d’affaires doit présenter un certain degré de permanence – et ne peut donc pas être de nature purement temporaire.

L’Administration fiscale du Royaume-Uni (HM Revenue & Customs) a publié des orientations6 précisant que les principes existants sont souples et énoncent clairement que l’administration fiscale britannique considère qu’une installation fixe d’affaires d’une entreprise non résidente, pendant une courte période, ne conduira pas à la création d’un ES au Royaume-Uni car un certain degré de permanence est requis. De même, les orientations confirment que, si la conclusion habituelle de contrats au Royaume-Uni conduit à la création d’ES découlant de l’activité d’un agent dépendant, l’évaluation du caractère « habituel » de cette condition est appréciée in concreto en fonction des faits de l’espèce.

L’Administration fiscale fédérale (Internal Revenue Service) des États-Unis a publié des orientations7 soulignant que pendant la Période d’urgence liée au COVID-19 d’une Personne visée (comprenant une seule période n’excédant pas 60 jours consécutifs, commençant le 1er février 2020 ou après cette date et le 1er avril ou avant cette date), il ne sera pas tenu compte des services ou autres activités exécutés temporairement par une ou plusieurs personnes présentes aux États-Unis pour déterminer si cela constitue un ES pour une entreprise non-résidente ou étrangère, à condition que les services ou autres activités de ces personnes n’aient pas pu avoir lieu aux États-Unis en l’absence de restrictions aux voyages liées au COVID-19, comme indiqué dans les orientations correspondantes. Les orientations précisent que : « Les individus qui n’ont pas contracté le virus COVID-19 et tentent de quitter les États-Unis peuvent être également confrontés à des annulations de vols et à des perturbations des autres modes de transport, des périmètres de sécurité, des quarantaines et fermetures de frontières, ou bien ne pas se sentir en sécurité lorsqu’ils voyagent pendant l’état d’urgence lié au COVID-19 en raison des recommandations relatives au respect de la distanciation sociale et à la limitation dela fréquentation des espaces publics (ces restrictions sont regroupées sous l’expression de perturbations des déplacements liées à la pandémie de COVID-19) ».

Note :

Le modèle d’orientation présenté à l’intention des juridictions inclut des informations à la fois sur le droit interne et l’application des conventions. Il est à noter que dans la plupart des juridictions, les orientations sur le droit interne n’affectent pas l’interprétation des dispositions conventionnelles et des Commentaires. Les références à des orientations sur la législation interne ne sont incluses que pour illustrer le propos et ne doivent pas laisser penser que le droit interne doit être appliqué ou interprété conformément au Commentaire.

Sources :

Chapitre 3, Orientations de l’Autriche relatives à l’application et l’interprétation de la Convention de double imposition pendant la pandémie de COVID-19, « Info zur Anwendung und Auslegung von Doppelbesteuerungsabkommen im Zusammenhang mit der COVID-19 Pandemie », Informations du ministère des Finances autrichien, 20.07.2020, 2020-0.459.612, https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=719aaa9a-fba3-4ad0-b331-ea4919b90f3b.

Chapitre 4, Orientations de l’Autriche relatives à l’application et l’interprétation de la Convention de double imposition pendant la pandémie de COVID-19, « Info zur Anwendung und Auslegung von Doppelbesteuerungsabkommen im Zusammenhang mit der COVID-19 Pandemie », Informations du ministère des Finances autrichien, 20.07.2020, 2020-0.459.612, https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=719aaa9a-fba3-4ad0-b331-ea4919b90f3b.

 Bureau situé au domicile

14. S’il convient de souligner que la question de l’existence d’un ES dépend des faits et circonstances propres au cas d’espèce, il n’en reste pas moins qu’un ES doit, de façon générale, présenter un certain degré de permanence et être à la disposition d’une entreprise pour être considéré comme une installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.

15. Il est précisé au paragraphe 18 des Commentaires sur l’article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE que, même si l’activité d’une entreprise peut être exercée pour partie dans des locaux tels qu’un bureau situé au domicile d’une personne, cela ne devrait pas conduire à la conclusion que ces locaux sont mis à la disposition de l’entreprise simplement parce qu’ils sont utilisés par une personne (notamment un salarié) qui travaille pour cette entreprise. L’exercice discontinu d’une activité au domicile d’un employé ne fait pas de ce domicile un endroit mis à la disposition de l’entreprise. Pour qu’un bureau situé au domicile soit considéré comme un ES mis à la disposition d’une entreprise, il doit être utilisé de manière continue pour l’exercice d’une activité de cette entreprise et l’entreprise doit généralement imposer à la personne d’utiliser les locaux concernés pour l’exercice d’une activité de l’entreprise.

16. Pendant la pandémie de COVID-19, les personnes qui restent à leur domicile pour travailler à distance le font généralement pour se conformer à des mesures de santé publique ; il s’agit d’un événement exceptionnel, et non d’une obligation imposée par l’entreprise. C’est pourquoi, eu égard au caractère exceptionnel de la pandémie de COVID-19, le télétravail depuis le domicile (autrement dit le bureau situé au domicile) en raison d’un événement exceptionnel ou de mesures de santé publique imposées ou recommandées par les pouvoirs publics ne conduit pas à la création d’un ES pour l’entreprise/l’employeur, soit parce que cette activité ne présente pas un degré suffisant de permanence ou de continuité, soit parce que, le bureau situé au domicile n’est pas mis à la disposition de l’entreprise. En outre, l’entreprise continue de mettre à la disposition des employés concernés un bureau autre que le domicile en l’absence de mesures de santé publique. Cette disposition s’applique que le lieu de travail temporaire soit situé au domicile de la personne ou bien qu’il s’agisse d’un logement temporaire dans une juridiction qui n’est pas son lieu de résidence principal.

17. Si une personne continue de travailler à domicile après la fin des mesures de santé publique imposées ou recommandées par les pouvoirs publics, il peut être considéré que le bureau situé au domicile a un certain degré de permanence. Néanmoins, ce changement ne conduit pas à lui seul à considérer qu’un ES constitué par une installation fixe d’affaires est nécessairement crée au bureau situé au domicile. Il faudra procéder à un examen complémentaire des faits et circonstances pour déterminer si le bureau situé au domicile est désormais à la disposition de l’entreprise à la suite de ce changement permanent des conditions de travail de cette personne.

18. Les paragraphes 18 et 19 des Commentaires relatifs à l’article 5 du Modèle de convention fiscale précisent que le facteur déterminant consiste à savoir si l’entreprise a imposé à la personne de travailler à domicile ou non. Le paragraphe 18 explique que lorsqu’un bureau à domicile est utilisé de manière continue pour l’exercice d’une activité d’entreprise et qu’il est clair, au vu des faits et des circonstances, que l’entreprise impose à la personne d’utiliser le bureauen question pour l’exercice d’une activité de l’entreprise (notamment en ne fournissant pas d’autre local à un salarié alors que la nature même de l’emploi l’exige clairement), le bureau à domicile peut être considéré comme étant mis à la disposition de l’entreprise. Le paragraphe 19 note, par exemple, que lorsqu’un travailleur transfrontalier exécute la majeure partie de ses tâches à partir de son domicile situé dans une juridiction et non à partir du bureau mis à sa disposition dans l’autre juridiction, il convient de ne pas considérer que son domicile est mis à la disposition de l’entreprise dans la mesure où ce n’est pas l’entreprise qui a exigé que le domicile soit utilisé pour l’exercice de ses activités.

19. En conclusion, le télétravail depuis le domicile (bureau situé au domicile) pour se conformer à des mesures de santé publique imposées ou recommandées par au moins un des gouvernements des juridictions concernées afin d’éviter la propagation du virus COVID-19 ne constitue par un ES sous la forme d’une installation fixe d’affaires pour l’entreprise/l’employeur.

 Agent constituant un ES

20. La question peut également se poser de savoir si une personne travaillant temporairement à domicile pour un employeur non-résident pourrait être qualifiée d’agent dépendant dont les activités donneraient lieu à la création d’un ES. Conformément au paragraphe 5 de l’article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, les activités d’un agent dépendant tel qu’un employé conduisent, pour une entreprise, à la création d’un ES si l’employé conclut habituellement des contrats pour le compte de l’entreprise. Aussi, pour pouvoir appliquer le paragraphe 5 de l’article 5 dans ces circonstances, il importera d’évaluer si l’employé exerce ces activités de manière « habituelle ».

21. Il est peu probable qu’une activité exercée par un employé ou un agent dans une juridiction soit considérée comme exercée de manière habituelle si la personne concernée ne travaille à domicile dans cette juridiction qu’en raison de circonstances exceptionnelles ou de mesures de santé publique imposées ou recommandées par les pouvoirs publics. Il est précisé au paragraphe 6 des Commentaires sur l’article 5 de la version de 2014 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE qu’un ES n’est censé exister que si les activités exercées présentent un certain degré de permanence et n’ont pas un caractère purement temporaire ou transitoire. Le paragraphe 33.1 des Commentaires sur l’article 5 de la version de 2014 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE prévoit que le critère selon lequel l’agent doit « habituellement » exercer des pouvoirs lui permettant de conclure des contrats signifie que la présence d’une entreprise dans une juridiction ne doit pas être simplement transitoire pour que l’on puisse considérer que l’entreprise possède dans cet État un ES, et qu’elle y soit donc redevable de l’impôt. De même, il est précisé au paragraphe 98 des Commentaires sur l’article 5 de la version de 2017 du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE que la présence d’une entreprise dans une juridiction ne doit pas être simplement transitoire pour que l’on puisse considérer qu’elle possède dans cette juridiction un établissement stable au sens du paragraphe 5 de l’article 5.

22. Toutefois, il peut être opportun d’adopter une approche différente si l’employé concluait habituellement des contrats pour le compte de l’entreprise depuis son domicile avant la crise du COVID-19.

23. De même, si un employé continue de travailler à domicile de manière habituelle pour un employeur non-résident après la pandémie de COVID-19 et de conclure des contrats pour le compte d’une entreprise, il est plus probable que l’on puisse considérer que cet employé conclue des contrats habituellement pour le compte de l’entreprise. Comme indiqué au paragraphe 98 des Commentaires sur l’article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE de 2014, l’ampleur et la fréquence d’une activité permettant de conclure qu’un agent conclut habituellement des contrats dépendent de la nature de ces contrats et de l’activité de l’entreprise. À cet égard, il serait pertinent de retenir le même type de critères que ceux pris en compte aux paragraphes 28 à 30 des Commentaires sur l’article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE. Ainsi, il est notamment indiqué dans ces paragraphes que même si les pratiques des pays membres n’ont pas été homogènes en ce qui concerne le critère temporel, l’expérience montre que l’on n’a pas normalement conclu à l’existence d’un ES lorsque l’activité avait été exercée dans un pays par l’intermédiaire d’une installation d’affaires tenue depuis moins de six mois (à l’inverse, la pratique montre que dans beaucoup de cas,l’existence d’un ES a été admise lorsque l’activité avait été exercée par l’intermédiaire d’une installation d’affaires pendant une durée excédant ce seuil de six mois).

24. En conclusion, l’activité d’un agent dans une juridiction ne devrait pas être considérée comme « habituelle » si cet agent a exceptionnellement commencé à travailler à domicile dans cette juridiction pour se conformer à des mesures de santé publique imposées ou recommandées par au moins un des gouvernements des juridictions concernées pour éviter la propagation du COVID-19 et ne devrait pas donner lieu à la qualification d’ES découlant de l’activité d’un agent dépendant sous réserve que cette personne ne poursuive pas ces activités lorsque les mesures de santé publique cesseront de s’appliquer.

 Chantier de construction constituant un ES

25. Il semble qu'un grand nombre d’activités exercées sur des chantiers de construction soient temporairement interrompues par la pandémie de COVID-19. La durée de cette interruption ne devrait toutefois pas entrer dans le calcul de la durée d'existence d'un chantier et ne devrait donc pas être prise en compte pour déterminer si un chantier de construction constitue un ES. En règle générale, un chantier de construction constitue un ES si sa durée dépasse douze mois conformément au Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, ou six mois conformément au Modèle de convention fiscale des Nations unies. Il est précisé au paragraphe 55 des Commentaires sur l’article 5(3) du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE qu’un chantier ne doit pas être considéré comme ayant cessé d’exister si les travaux ont été momentanément interrompus (les interruptions temporaires devant entrer dans le calcul de la durée d’existence d’un chantier). Les exemples d’interruptions temporaires donnés dans les Commentaires sont notamment le mauvais temps, un manque de matériaux ou des difficultés de main-d'œuvre.

26. Les Commentaires ne contiennent pas de critère précis pour qualifier une interruption de « temporaire ». Les juridictions peuvent donc avoir des avis divergents sur la durée d’une interruption « non temporaire » ainsi que sur les autres conditions qui la distinguent des exemples fournis dans le paragraphe 55 des Commentaires. En conséquence, certaines juridictions peuvent considérer que des périodes d’interruption particulières dues aux restrictions imposées dans le pays en raison de la pandémie de COVID-19 ne devraient pas être prises en compte dans le calcul des seuils de durée des chantiers de construction constituant un ES. Selon cette approche, les juridictions ne concluraient pas à l’existence d’un ES dès lors que le critère de durée ne peut être satisfait qu’en tenant compte des jours durant lesquels le chantier de construction n’a pas pu fonctionner en raison des restrictions liées au COVID-19. Comme indiqué plus haut, ces orientations ne peuvent pas être utilisées pour créer des situations de double non-imposition.

27. En conclusion, si l’interruption « temporaire » des travaux sur un chantier de construction ne permet pas de considérer qu’un ES constitué par ce chantier cesse d’exister, les juridictions peuvent estimer qu’eu égard aux circonstances exceptionnelles de la pandémie de COVID-19 et en fonction des faits et circonstances du cas d’espèce, certaines périodes au cours desquelles les opérations ont été interdites à titre des mesures de santé publique imposées ou recommandées par les pouvoirs publics du lieu où est situé le chantier afin de limiter la propagation du COVID-19, constituent un type d’interruption qui devrait être exclu du calcul des seuils de durée applicables aux chantiers de construction constituant un ES.

 Inquiétudes relatives au changement de résidence

28. La pandémie de COVID-19 peut susciter des inquiétudes concernant la possibilité que le « siège de direction effective » d’une entreprise change en raison de la relocalisation ou de l’incapacité de voyager des membres du conseil d’administration ou autres dirigeants. L’inquiétude porte sur le fait qu'un tel changement peut avoir pour conséquence une modification du pays de résidence de l’entreprise en vertu de la législation nationale applicable et avoir des conséquences pour le pays dont l’entreprise est censée être résidente aux fins de la convention fiscale.

29. Il est peu probable que la situation créée par la pandémie de COVID-19 entraîne un changement de résidence d’une entité en vertu d’une convention fiscale. Un changement temporaire de localisation des membres du conseil d’administration et autres directeurs généraux lié à une situation exceptionnelle et temporaire provoquée par la pandémie de COVID-19 ne doit pas entraîner de changement de résidence aux termes de la convention fiscale.

30. Plusieurs juridictions ont publié des orientations pour déterminer si des changements temporaires des habitudes de travail et de gestion de l’entreprise induits par la pandémie de COVID-19 peuvent avoir pour effet un changement de résidence de l’entreprise. L’Encadré 2 présente un modèle d’orientation.

 
Encadré 2. Modèle d’orientation publié par les juridictions sur la résidence d’une entreprise

L’Administration fiscale australienne a publié des orientations1 sur les critères retenus en droit interne pour déterminer qu’une entreprise est résidente fiscale en Australie (critère de la gestion et de la direction centralisées). Ces instructions mentionnent que si l’organisation des réunions du conseil d’administration en Australie ou la participation des membres à ces réunions depuis l’Australie ont pour seule causeles conséquences du COVID-19, l’administration fiscale australienne n’allouera pas de moyens pour déterminer si les fonctions de gestion et de direction centralisées de l’entreprise sont en Australie.

L’Agence du revenu du Canada a publié des orientations2 sur l’application du critère de départage du siège de direction effective et a fait observer que compte tenu des circonstances exceptionnelles liées aux restrictions aux déplacements, d’un point de vue administratif, lorsqu’un administrateur d’une entreprise doit participer à une réunion du conseil d’administration depuis le Canada en raison de restrictions aux voyages liées à la pandémie, elle ne considérera pas que l’entreprise est résidente au Canada pour cette seule raison.

L’Autorité indépendante des recettes publiques de la Grèce a publié des orientations3 précisant qu’aux fins de l’application de la règle de départage fondée sur le siège de direction effective pour la période comprise entre le 18 mars et le 15 juin 2020, le fait que les membres d’une équipe qui prennent les principales décisions sur le plan commercial et sur la gestion d’une entité soient localisés temporairement dans une juridiction différente de celle où sont habituellement prises les décisions n’entraînera pas de modification du lieu du siège de direction effective d’une entité, à condition que ce changement soit de nature temporaire et dû à des circonstances exceptionnelles. Dans tous les cas, les entités doivent conserver les pièces attestant les faits et circonstances qui justifient, de bonne foi, la présence de l’intéressé dans une juridiction différente en raison des mesures liées au COVID-19. Pour les périodes antérieures au 18 mars et postérieures au 15 juin 2020, il convient d’évaluer si ces restrictions étaient en vigueur.

L’Administration fiscale de l’Irlande a publié des orientations4 invitant à ne pas tenir compte de la présence en Irlande - et, le cas échéant, dans une autre juridiction - d’une personne physique employée d’une entreprise en qualité de directeur, dès lors qu’il est démontré que cette présence résulte des restrictions aux déplacements liées au COVID–19.

L’Administration fiscale de la Nouvelle-Zélande a publié des orientations5 sur les critères retenus en droit interne pour déterminer qu’une entreprise estrésidente fiscale en Nouvelle-Zélande (critère de la gestion et de la direction centralisées). Elles soulignent que la pandémie de COVID-19 ne conduira pas à conclure qu’une entreprise contribuable a sa résidence fiscale en Nouvelle-Zélande car ses directeurs y sont confinés ou bloqués. Les orientations soulignent également que le contrôle exercé temporairement par les administrateurs depuis la Nouvelle-Zélande, notamment dans le cadre d’une réunion du conseil, ne suffira pas à établir la résidence fiscale en Nouvelle-Zélande.

L’Administration fiscale du Royaume-Uni a publié des orientations6 précisant que la législation et les règles en vigueur sur la résidence d’une entreprise offrent déjà la flexibilité requise pour permettre d’adapter les activités des entreprises en réponse à la pandémie de COVID-19. Elle ne considère pas qu’une entreprise deviendra nécessairement résidente au Royaume-Uni (au titre du droit interne ou d’une convention de double imposition) du fait que quelques réunions du conseil d’administration se tiennent au Royaume-Uni ou que certaines décisions y sont prises pendant une courte période. Les orientations actuelles précisent clairement que l’Administration adoptera une vision globale des faits et circonstances propres à chaque situation. De même, elle n’estime pas qu’une entreprise deviendra nécessairement non-résidente du Royaume-Uni aux fins de l’impôt perçu au Royaume-Uni du fait que quelques réunions du conseil d’administration se tiennent en dehors du Royaume-Uni ou que certaines décisions soient prises à l’extérieur du Royaume-Uni pendant une courte période.

L’Administration fiscale fédérale (Internal Revenue Service) des États-Unis a publié des orientations qui prévoient un allègement pour certains individus non-résidents qui, en l’absence de perturbations de déplacement et autres liées à la pandémie de COVID-19, n’auraient pas séjourné suffisamment longtemps aux États-Unis en 2020 pour être considérés comme des résidents étrangers dans le cadre du « critère de présence substantielle » ou pour être exclus des avantages des conventions sur les revenus issus de prestations de services. Eu égard à l’allègement prévu dans le cadre du critère de présence substantielle, ces orientations définissent les procédures permettant à un individu d’appliquer une exception liée à la situation sanitaire pour exclure jusqu’à 60 jours consécutifs passés aux États-Unis pendant une période commençant le 1er février 2020 ou après cette date et le 1er avril ou avant cette date, la date de début précise devant être choisie par chaque individu. Elles prévoient également des procédures permettant à un individu d’exclure ces jours de présence afin de demander le bénéfice d’une convention fiscale sur le revenu concernant les revenus issus de prestations de services. Voir Rev. Proc. 2020-20, 2020-20 I.R.B. (11 mai 2020) (également indiqué dans l’encadré 4 de ce document à propos de l’exception de 183 jours pour les revenus du travail).7

Note :

Le modèle d’orientation présenté à l’intention des juridictions inclut des informations à la fois sur le droit interne et l’application des conventions. Il est à noter que dans la plupart des juridictions, les orientations sur le droit interne n’affectent pas l’interprétation des dispositions conventionnelles et des Commentaires. Les références à des orientations sur la législation interne ne sont incluses que pour illustrer le propos et ne doivent pas laisser penser que le droit interne doit être appliqué ou interprété conformément aux Commentaires.

31. Ce changement éventuel de circonstances peut entraîner un problème de double résidence (dans les cas où le changement de localisation du siège de direction effective conduit à considérer que l’entreprise est simultanément résidente de deux pays en vertu de leur législation nationale respective). Cependant, comme indiqué dans les Commentaires sur le Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, les situations de double résidence des entreprises sont relativement rares.

32. Même dans les situations de double résidence d’une entité, les conventions fiscales prévoient toutefois des règles de départage destinées à garantir que l’entité n’est résidente que d’une seule des deux juridictions. Si la convention contient une disposition similaire à la règle de départage du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE de 2017, les autorités compétentes résolvent le problème de la double résidence au cas par cas et d’un commun accord. Elles prendront en considération l’ensemble des faits et circonstances observé pendant la période sur laquelle porte la décision. La décision n’est pas fondée sur un facteur isolé, mais plutôt sur un ensemble de facteurs.

33. En particulier, le paragraphe 24.1 des Commentaires de l’OCDE sur l'article 4 décrit les divers facteurs que les autorités compétentes sont censées prendre en considération pour prendre une décision sur un cas de double résidence, tels que : le lieu où les réunions du conseil d’administration ou de tout autre organe équivalent se tiennent généralement ; le lieu où le directeur général et les autres dirigeants exercent généralement leur activité ; le lieu où s’exerce la gestion supérieure des affaires courantes de la personne morale ; le lieu où se situe le siège de la personne morale, etc. Il est également possible que les autorités compétentes s’entendent sur des cadres plus généraux pour prendre leur décision, par exemple dans des situations de faits particulières, conformément aux dispositions de l'article 25(3).

34. Dans les situations où la convention reprend la règle de départage du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE en vigueur avant 2017, le siège de direction effective sera le seul critère utilisé pour déterminer la résidence d’une entité ayant une double résidence aux fins de la convention fiscale. Conformément au paragraphe 24 des Commentaires sur l’article 4 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE de 2014, le siège de direction effective est le lieu où sont prises, quant au fond, les décisions clés sur le plan de la gestion et sur le plan commercial qui sont nécessaires à la conduite des activités de l’entité dans son ensemble. Tous les faits et circonstances pertinents doivent être pris en compte pour déterminer le siège de direction effective. Le paragraphe 149 des Commentaires sur l'article 29 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE explique que l’expression « siège de direction effective » a été interprétée par certains États comme étant d’ordinaire le lieu où la personne ou le groupe de personnes exerçant les fonctions les plus élevées (par exemple, un conseil d’administration) prend les décisions sur le plan de la gestion et sur le plan commercial qui sont nécessaires pour la conduite des activités de la société.

35. C’est pourquoi il conviendrait d’examiner, pour déterminer le siège de direction effective « habituel » et « ordinaire », tous les faits et circonstances pertinents, et non seulement ceux qui se rapportent à une période exceptionnelle comme celle de la pandémie du COVID-19.

36. En conclusion, il est peu probable que le fait que des individus participant à la gestion et à la prise de décisions d’une entité ne puissent pas voyager en raison de mesures de santé publique imposées ou recommandées par au moins un gouvernement des juridictions concernées ait une incidence sur le lieu de résidence d’une entité, en vertu d’une clause de départage présente dans une convention fiscale.

 Inquiétudes relatives au changement de résidence des personnes physiques

37. En dépit de la complexité des règles et de leur application à un large éventail de personnes physiques potentiellement concernées, il est peu probable que les restrictions aux déplacements liées au COVID-19 modifient le lieu de résidence fixé par la convention.

38. Les juridictions ont déjà publié des orientations utiles relatives aux répercussions du COVID-19 sur la détermination de la résidence d’une personne physique en vertu du droit interne et des conventions fiscales, et annoncé des mesures visant à alléger les formalités administratives. L’Encadré 3 présente un modèle d’orientation.

 
Encadré 3.Modèle d’orientation sur la résidence des personnes physiques

L'Administration fiscale australienne a également publié des orientations1 précisant que lorsqu’une personne qui n’est pas un résident australien à des fins fiscales est temporairement présente en Australie pendant quelques semaines ou quelques mois en raison de la pandémie de COVID-19, elle ne devient pas pour autant résidente en Australie à des fins fiscales, sous réserve que cette personne :

  • réside habituellement en permanence à l’étranger

  • ait l’intention de rentrer dans son pays dès qu’elle le peut.

L’Agence du revenu du Canada a publié des orientations2 sur le critère retenu en droit interne pour déterminer qu’une personne est résidente au Canada. Ce critère englobe un critère de faits et de circonstances et un critère lié aux jours de présence. En ce qui concerne les faits et circonstances, les orientations indiquent que si un individu est demeuré au Canada uniquement en raison des restrictions aux déplacements, l'Agence du revenu du Canada ne considère pas que cet élémentsoit suffisant à lui seul pour que les conditions du test factuel de résidence de la common law soient remplies. S’agissant du critère du nombre de jours, les orientations précisent que, d'un point de vue administratif et à la lumière des circonstances exceptionnelles, l'Agence du revenu ne tiendra pas compte des jours durant lesquels une personne physique était présente au Canada et ne pouvait pas retourner dans sa juridiction de résidence uniquement en raison des restrictions aux voyages. Ces orientations s’appliquent lorsqu’une personne physique est, entre autres, résidente d’une autre juridiction, a l’intention d’y retourner et, dans les faits, y retourne dès que possible.

Les orientations de la Finlande3 précisent que la pandémie de COVID-19 n’a pas d'incidence sur la manière dont les autorités fiscales finlandaises déterminent la résidence fiscale d’un contribuable conformément au droit finlandais ou aux conventions fiscales.

La France a publié des orientations4 stipulant que la pandémie de COVID-19 n’a pas d’impact sur la manière dont l’Administration fiscale française détermine la résidence fiscale d’un contribuable conformément au droit français ou aux conventions fiscales.

L’Autorité indépendante pour les recettes publiques de la Grèce a publié des orientations5 faisant observer qu’en ce qui concerne les critères de résidence des particuliers pour la période du 18 mars au 15 juin 2020 : a) le critère du séjour habituel n’est pas affecté par les circonstances exceptionnelles liées au COVID-19 ; et b) les jours passés en Grèce durant cette période en raison des restrictions aux voyages ou à titre de mesure de protection et de sécurité personnelles peuvent être exclus du calcul pour déterminer la résidence (critère des jours de présence). Par ailleurs, les orientations renvoient également à l’application des règles de départage énoncées dans les conventions pour déterminer la résidence et précisent qu’une délocalisation temporaire liée à l’épidémie de COVID-19 n’a pas d’incidence sur le critère de séjour habituel. Pour les périodes antérieures au 18 mars et postérieures au 15 juin 2020, il convient d’évaluer si ces restrictions étaient en vigueur.

Le Département de l’impôt sur le revenu de l’Inde a publié des orientations6 confirmant que si un particulier n’a pas pu quitter l’Inde en mars 2020, il est possible d’exclure certains jours passés en Inde durant le mois de mars pour appliquer les règles internes de résidence fiscale. Les jours susceptibles d’être exclus du calcul dépendent des circonstances des restrictions imposées à la personne.

En Irlande, les orientations7 prévoient de qualifier de cas de force majeure les circonstances dans lesquelles une personne physique est empêchée de quitter le territoire le jour de départ prévu en raison de circonstances naturelles exceptionnelles.

L’Administration fiscale de la Nouvelle-Zélande a publié des orientations8 indiquant que les critères du nombre de jours de présence dans le pays pour établir la résidence ne sont pas appliqués de manière stricte lorsqu’un individu est présent en Nouvelle-Zélande ou absent de Nouvelle-Zélande en raison de la pandémie de COVID-19 sous réserve que cet individu quitte le pays dans un délai raisonnable lorsqu’il n’existera plus, en pratique, de restriction lui interdisant de le faire. La Nouvelle-Zélande a également publié des orientations9 relatives à l’application des conventions fiscales, soulignant que les critères de résidence des conventions fiscales sont interprétés de manière globale et intégrée et qu’il n’est pas prévu que des particuliers soient considérés comme résidents en vertu des conventions fiscales au seul motif de la situation d’urgence actuelle.

Le Royaume-Uni a publié des orientations10 concernant le nombre de jours passés sur son territoire qu’il est possible d’exclure du calcul de détermination de la résidence en raison de circonstances exceptionnelles. Le pays a également publié des instructions11 sur l’application du critère de départage énoncé dans les conventions fiscales pour déterminer la résidence et a fait observer que même si une personne peut devenir résidente du Royaume-Uni en vertu des critères de résidence prévus par la loi, une délocalisation temporaire de cette personne ne modifiera pas la résidence prévue par la convention fiscale.

L’Administration fiscale fédérale (Internal Revenue Service) des États-Unis a publié des orientations12 qui prévoient un allègement pour certaines personnes non-résidentes qui, en l’absence de perturbations de déplacement et autres liées à la pandémie de COVID-19, n’auraient pas séjourné suffisamment longtemps aux États-Unis en 2020 pour être considérées comme des résidents étrangers dans le cadre du « critère de présence substantielle » ou pour être exclues des avantages des conventions sur les revenus issus de prestations de services. Eu égard à l’allègement prévu en vertu du critère de présence substantielle, ces orientations définissent les procédures permettant à un individu d’appliquer une exception liée à la situation sanitaire afin d’exclure jusqu’à 60 jours consécutifs passés aux États-Unis pendant une période comprise entre le 1er février 2020 (inclus) et le 1er avril (inclus), la date de début précise devant être choisie par chaque individu. Elles prévoient également des procédures permettant à un individu d’exclure ces jours de présence afin de demander le bénéfice d’une convention fiscale sur le revenu concernant les revenus issus de prestations de services. Voir Rev. Proc. 2020-20, 2020-20 I.R.B. (11 mai 2020) (référence mentionnée également dans l’encadré 4 de ce document à propos de l’exception de 183 jours pour les revenus d’emploi).

Note :

Le modèle d’orientation présenté à l’intention des juridictions inclut des informations à la fois sur le droit interne et l’application des conventions. Il est à noter que dans la plupart des juridictions, les orientations sur le droit interne n’affectent pas l’interprétation des dispositions conventionnelles et des Commentaires. Les références à des orientations sur la législation interne ne sont présentes que pour illustrer le propos et ne doivent pas laisser penser que le droit interne doit être appliqué ou interprété conformément au Commentaire.

39. Deux situations principales sont envisageables :

  • Une personne qui a quitté temporairement son domicile (que ce soit pour des vacances ou pour des raisons professionnelles, pendant quelques semaines) se retrouve bloquée dans la juridiction où elle s’est rendue à cause de la pandémie de COVID-19, de sorte qu’elle est considérée comme résidente de ladite juridiction en vertu de son droit interne.

  • Une personne travaille dans une juridiction (sa « juridiction d’origine actuelle ») et a acquis le statut de résidente de ce pays, mais retourne temporairement dans sa « précédente juridiction d’origine ») en raison de la situation liée au COVID-19. Soit elle n’a jamais perdu son statut de résidente de sa précédente juridiction d’origine en vertu de la législation nationale dudit pays, soit elle peut retrouver son statut de résidente à son retour.

40. Dans le premier scénario, il est peu probable qu’elle acquière le statut de résidente du pays où elle se trouve temporairement en raison de circonstances exceptionnelles. Il existe toutefois des règles en droit interne selon lesquelles une personne est résidente d’une juridiction si elle y est présente pendant un certain nombre de jours. Même si la personne devient résidente de la juridiction en vertu de ces règles nationales, dans l’hypothèse où une convention fiscale est applicable, il est peu probable qu’elle devienne résidente de cette juridiction aux termes de la règle de départage de la convention fiscale. Une délocalisation temporaire de cette nature ne devrait donc avoir aucune conséquence fiscale dans une grande majorité de cas.

41. Dans le second scénario, il est à nouveau peu probable que la personne retrouve son statut de résidente en raison d’une présence temporaire et exceptionnelle dans la précédente juridiction d’origine. Même si la personne est ou devient résidente en vertu de telles règles, dans l’hypothèse où une convention fiscale est applicable, il est peu probable qu’elle devienne résidente de cette juridiction aux termes de la convention fiscale en raison de cette délocalisation temporaire si ses liens la rattachant à la juridiction d’origine actuelle sont plus forts que ceux qui la lient à la précédente juridiction d’origine.

42. Aux fins d’une convention fiscale qui régit l’attribution des droits d’imposer les revenus d’emploi, une personne physique peut être résidente d’une seule juridiction à la fois (la « résidence aux fins de la convention »). Les règles sont énoncées à l’article 4 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE. Le point de départ est le droit interne. Si la personne est résidente d’une seule juridiction, la question ne se pose pas. Si elle est résidente de deux juridictions selon les critères applicables en droit interne, les règles de départage énoncées à l’article 4 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE s’appliquent. Il existe une hiérarchie des critères, la question qui doit être posée en premier lieu étant celle de savoir dans quelle juridiction la personne dispose d’un foyer d’habitation permanent.

43. Dans le premier cas susmentionné, il semble probable que la règle de départage conduise dans la plupart des cas à attribuer la résidence aux termes de la convention à la juridiction d’origine. Et ce, parce qu’il est hautement improbable que la personne en question dispose d'un « foyer d’habitation permanent » dans la juridiction d’accueil. Mais si tel est le cas (et la location d’un appartement pendant une période suffisamment longue doit être prise en compte) et si l’intéressé a loué son propre logement dans sa juridiction d’origine, il doit être considéré comme résident de la juridiction d’accueil aux fins de la convention. Lorsqu’une personne dispose d’un foyer d’habitation permanent dans les deux juridictions, il semble probable que les autres critères utilisés aux fins de l’application de la règle de départage (centre des intérêts vitaux, lieu de séjour habituel et nationalité) conduiront à considérer que la résidence doit être attribuée à la juridiction d’origine.

44. Dans le second cas, les mêmes règles prévues par la convention s’appliquent, mais leur application produit un résultat plus incertain parce que les liens rattachant la personne à la précédente juridiction d’origine sont plus forts. Dans les cas où les relations économiques et personnelles sont étroites dans les deux juridictions, mais où la règle de départage fait pencher la balance en faveur de la juridiction d’origine actuelle, le fait que la personne soit revenue dans la précédente juridiction d’origine pendant la pandémie de COVID-19 risque de la faire pencher du côté de cette dernière. La décision est généralement prise en fonction du critère du « séjour habituel ». Cependant, selon le paragraphe 19 des Commentaires sur l'article 4 du Modèle de convention de l’OCDE, le séjour habituel d’une personne est le lieu où elle vit habituellement, au sens où elle y est présente de façon courante ou régulière ; le critère ne sera pas rempli en se contentant de déterminer dans laquelle des deux juridictions contractantes la personne a passé le plus de jours au cours de cette période. L’expression « séjourner de façon habituelle » désigne la fréquence, la durée et la régularité de séjours qui font partie du rythme de vie normal d’une personne et qui ont donc un caractère plus que transitoire. Les jours passés par une personne dans sa précédente juridiction d’origine en raison des restrictions aux voyages imposées par l’un des gouvernements des pays concernés à titre de mesures de santé publique ne devraient pas entraîner de changement du lieu de séjour habituel de la personne. En outre, pour déterminer si une personne séjourne de façon habituelle dans une juridiction, l’examen doit porter sur une période suffisamment longue pour permettre d’évaluer la fréquence, la durée et la régularité de séjours qui font partie du rythme de vie normal de la personne.

45. En conclusion, en raison des changements majeurs et des circonstances exceptionnelles dus à la pandémie de COVID-19, les administrations fiscales et les autorités compétentes devront se focalisersur une période où les mesures de santé publique imposées ou recommandées par les pouvoirs publics ne s’appliquent pas pour pouvoir déterminer le statut de résident d’une personne. Si, dans le contexte et en raison de la pandémie de COVID-19, la présence temporaire d’un individu dans une juridiction lui confère une double résidence, il est peu probable que cela modifie le lieu de résidence de cette personne selon la règle de départage énoncée dans la convention applicable, étant entendu que cette règle exige la prise en compte de facteurs dont l’appréciation est également requise durant une période plus normale. La délocalisation d’une personne parce qu’elle ne peut pas rentrer dans sa juridiction d’origine en raison des mesures de santé publique imposées par l’un des gouvernements des juridictions concernées ne devrait pas en soi avoir une incidence sur la résidence de cette personne aux fins de la convention fiscale. Il peut être opportun d’adopter uneapproche différente si un changement de circonstances subsiste à l’issue de la levée des restrictions dues au COVID-19.

 Inquiétudes relatives aux revenus d’emploi

 Critère des jours de présence de l'article 15(2)(a)

46. L’article 15 (Revenus d’emploi) du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE régit l’imposition des revenus d’emploi, à savoir la répartition du droit d’imposition entre la juridiction de résidence de l’employé et celle où il exerce effectivement son emploi.

47. Le point de départ de l’application de la règle énoncée à l’article 15 du Modèle de convention de l’OCDE est que les « salaires, traitements et autres rémunérations similaires » ne sont imposables que dans la juridiction de résidence de la personne, à moins que « l’emploi ne soit exercé » dans l’autre juridiction. Il est précisé dans les Commentaires sur l’article 15 que l’emploi est exercé à l’endroit où le salarié est « physiquement présent lorsqu’il exerce les activités au titre desquelles les revenus liés à l’emploi sont payés ». Des conditions sont toutefois posées concernant le critère du lieu d’exercice des activités. L’autre juridiction (juridiction de la source) ne peut exercer un droit d’imposition que si l’employé séjourne pendant une période qui excède 183 jours2, ou si l’employeur est résident de la juridiction de la source ou si l’employeur a, dans la juridiction de la source, un établissement stable qui supporte la charge des rémunérations.

48. L’application de l'article 15 aux situations suivantes est examinée ci-après :

  • Subventions salariales et revenus similaires perçus par des travailleurs frontaliers qui ne peuvent pas exercer leurs activités en raison des restrictions.

  • Travailleur qui se retrouve bloqué dans une juridiction dans laquelle il n’est pas résident mais où il a exercé auparavant un emploi.

  • Travailleur qui télétravaille depuis une juridiction pour un employeur qui est résident d’une autre juridiction.

 Revenus des travailleurs frontaliers qui ne peuvent pas exercer leur emploi en raison des restrictions dues au COVID-19 (p. ex. subventions salariales versées aux employeurs)

49. Lorsqu’un État est intervenu pour subventionner le maintien d’un employé dans les effectifs d’une entreprise pendant la pandémie de COVID-19 alors que cet employé n’est pas en mesure de travailler, les revenus que cet employé perçoit de l’employeur devraient être attribués au lieu où l’emploi a été effectivement exercé. Dans le cas d’employés travaillant dans une juridiction, mais faisant la navette avec une autre juridiction dont ils sont résidents (travailleurs frontaliers), il s’agirait de la juridiction dans laquelle ils travaillent effectivement.

50. Certains programmes de relance adoptés ou proposés par les pouvoirs publics (notamment les subventions salariales versées aux employeurs) visent à maintenir les travailleurs dans les effectifs pendant la pandémie de COVID-19 en dépit des restrictions à l’exercice de leur emploi. Dans la mesure où ces versements peuvent être les derniers perçus dans le cadre de cet emploi, ils s’apparentent à des indemnités de licenciement. Ces points sont examinés au paragraphe 2.6 des Commentaires sur l'article 15 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE dans lequel il est précisé qu’ils devraient être considérés comme provenant de l’endroit où le salarié aurait travaillé en d’autres circonstances. Dans la plupart des circonstances, il s’agira du lieu où la personne travaillait effectivement avant la pandémie de COVID-19. Les paiements peuvent également s’apparenter à ceux qui sont habituellement perçus durant des périodes d’absence rémunérées, le droit à ces paiements étant établi par rapport au lieu où l’emploi a été exercé. Les congés payés, les congés de maladie payés ou les congés sans solde avec indemnisation font partie de ces paiements habituels et ne posent pas de difficulté connue sur le plan de la fiscalité internationale.

51. Lorsque la juridiction de la source a un droit d’imposition, la juridiction de résidence doit éviter la double imposition conformément à l’article 23 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE soit en exonérant les revenus, soit en les imposant et en accordant un crédit d’impôt d’un montant égal à l’impôt payé dans la juridiction de la source.

52. En conclusion, lorsqu’un employé qui est résident d’une juridiction et a exercé auparavant un emploi dans une autre juridiction perçoit une subvention gouvernementale liée au COVID-19 de la part de la juridiction où il travaille afin de maintenir sa relation de travail avec son employeur, le paiement sera attribué à la juridiction où l’emploi est exercé conformément à l'article 15 du Modèle de convention de l’OCDE.

 Travailleur bloqué : dépassement du plafond de jours de présence en raison des restrictions aux déplacements

53. En raison de la pandémie de COVID-19, certaines personnes qui sont résidentes d’une juridiction et exercent un emploi dans une autre juridiction sont restées bloquées dans cette dernière. Si une personne qui est résidente d’une juridiction et exerce un emploi dans une autre juridiction :

  1. a)

    est empêchée de quitter cette autre juridiction à cause des restrictions liées au COVID-19, et

  2. b)

    aurait, dans d’autres circonstances, quitté cette autre juridiction et aurait pu prétendre à l’exonération de l’imposition selon le principe de la source prévue par le paragraphe 2 de l’article 15,

certaines juridictions estiment qu’il est approprié, compte tenu des circonstances exceptionnelles, de ne pas inclure les jours auxquels ces conditions s’appliquent dans le calcul du droit d’imposition selon le critère des 183 jours (voir Encadré 4).

54. Lorsqu’un employé est résident d’une juridiction et exerce un emploi dans une autre juridiction (juridiction de la source), la juridiction de la source peut imposer la rémunération de cet emploi dans certaines circonstances, notamment lorsque cet employé séjourne dans la juridiction de la source pendant plus de 183 jours. Le paragraphe 5 des Commentaires sur l'article 15 explique que tous les jours de présence comptent (jours de travail ou non) – et donne plusieurs exemples, notamment les « jours de maladie ». Il contient toutefois une exception : si ces jours de maladie « empêchent le salarié de partir alors qu’il aurait eu normalement droit à l’exonération », ils ne sont pas inclus dans les calculs des jours de présence selon l’article 15(2)(a).

55. Compte tenu de la nature des mesures de santé publique prises par de nombreux gouvernements pour lutter contre la pandémie de COVID-19, on peut considérer que cette exception s’applique lorsque les conditions (a) et (b) ci-dessus sont remplies. Il peut s’agir des situations dans lesquelles un employé est empêché de voyager parce qu’il est placé en quarantaine après avoir été exposé au virus COVID-19. En outre, cette exception peut s’appliquer aux circonstances dans lesquelles il n’est pas possible de voyager, soit parce que l’un des gouvernements l’a interdit, soit parce que, dans les faits, les vols sont annulés. En sont exclues en revanche les circonstances dans lesquelles un individu ne voyage pas en raison d’une simple recommandation des pouvoirs publics pour éviter des déplacements inutiles. Toute décision consistant à ne pas inclure les jours passés dans une juridiction de la source en raison des restrictions liées au COVID-19 peut avoir pour conséquence que la juridiction de la source n’exerce pas les droits d’imposition auxquels elle pourrait prétendre en vertu d’une convention de double imposition.

56. En conclusion, lorsqu’un employé est empêché de voyager en raison des mesures de santé publique prises par l’un des gouvernements concernés pour lutter contre la pandémie de COVID-19 et reste dans une juridiction, il serait raisonnable que cette juridiction n’inclue pas les jours supplémentaires passés sur son territoire en raison de ces circonstances dans le calcul des 183 jours prévus au paragraphe 2, point a de l’article 15 du Modèle de l’OCDE. Certaines juridictions peuvent cependant adopter une approche différente ou publier des orientations spécifiques décrivant leur manière de procéder dans ces circonstances3. Les contribuables qui sont dans cette situation sont invités à se mettre en relation avec l’administration fiscale concernée.

 Dispositions spéciales contenues dans certaines conventions bilatérales concernant la situation des travailleurs frontaliers

57. Le fait que le lieu où les travailleurs frontaliers exercent leur emploi change peut aussi avoir des répercussions sur l’application des dispositions spéciales contenues dans certaines conventions bilatérales concernant la situation des travailleurs frontaliers. Ces dispositions prévoient l’application d’un traitement spécial aux revenus d’emploi des travailleurs frontaliers (et, dans certains cas, à la compensation de la perte de revenu comme l’indemnité de chômage partiel) et contiennent souvent des limites au nombre de jours pendant lesquels un travailleur peut travailler en dehors de la juridiction où il travaille régulièrement sans que cela ne déclenche un changement de statut.

58. Certaines juridictions ont adopté des dispositions conventionnelles spéciales avec les juridictions voisines dans lesquelles les employés se rendent chaque jour pour travailler. Ces dispositions attribuent les droits d’imposition différemment de l'article 15 du Modèle de convention fiscale. Ainsi, en vertu de certaines dispositions, les employés qui se rendent au travail dans une juridiction voisine sont imposables sur leurs revenus d’emploi uniquement dans leur juridiction d’origine sous réserve que l’activité exercée ailleurs dans le cadre de leur emploi soit limitée à la durée maximale indiquée (généralement comprise entre 4 à 6 semaines de travail). Certaines conventions contiennent des dispositions selon lesquelles les jours de télétravail sont considérés comme des jours travaillés dans la juridiction de travail. Certaines juridictions ont décidé de considérer la pandémie de COVID-19 comme un cas de force majeure ou relevant de circonstances exceptionnelles et excluent, par conséquent, la durée télétravaillée par un employé dans sa juridiction d’origine du calcul du nombre de jours maximum passés en dehors du périmètre de la juridiction de travail aux fins de la convention4.

 Télétravail depuis l’étranger, à savoir le travail à distance depuis une juridiction pour un employeur d’une autre juridiction

59. Un changement de lieu où l’emploi est exercé peut entraîner un changement d’attribution des droits d’imposition prévus par les dispositions conventionnelles applicables.

60. En conséquence, si la juridiction où l’emploi était précédemment exercé devait perdre son droit d’imposition du fait de l’application de l’article 15, d’autres difficultés, au regard du respect de leurs obligations, se présenteraient tant pour les employeurs que pour les employés. Les employeurs ont parfois l’obligation d’effectuer des prélèvements à la source qui ne seraient dès lors plus justifiés par un droit d’imposition sous-jacent. Ces prélèvements devraient donc être suspendus ou faire l’objet d’un remboursement à l’employé par un moyen quelconque. L’employé serait également redevable, dans sa juridiction de résidence, d’un montant d’impôt nouveau ou supplémentaire, ce qui induirair des obligations déclaratives complémentaires.

61. Quelques exemples illustrant ces changements d’attribution des droits d’imposition sur les revenus d’emploi sont présentés ci-dessous :

  • Avant la pandémie de COVID-19, un employé résident d’une Juridiction A exerçait habituellement son emploi dans une Juridiction B. Cet employé a commencé à exercer son emploi depuis la Juridiction A en raison de la pandémie de COVID-19. Conformément à l'article 15 :

    • si l’employeur était résident de la Juridiction B, cette dernière est en droit d’imposer les revenus perçus durant la période au cours de laquelle l’employé avait une présence physique dans la Juridiction B (diminution des droits d’imposition de la Juridiction B) ;

    • si l’employeur n’était pas résident de la Juridiction B ou ne supportait pas le coût de la rémunération de cet employé par l’intermédiaire d’un ES dans cette juridiction, il est probable que la Juridiction B perde le droit d’imposition conféré par une convention si l’employé y a séjourné moins de 183 jours (perte complète des droits d’imposition de la Juridiction B).

  • Avant la pandémie de COVID-19, un employé résident d’une Juridiction A se retrouve bloqué dans une Juridiction B et commence à y exercer son emploi. En vertu de l'article 15, la Juridiction B serait en droit d’imposer les revenus d’emploi si l’employeur est également résident de cette juridiction ou s’il assume le coût de la rémunération de l’employé par l’intermédiaire d’un ES dans cette juridiction. Dans les cas où l’employeur est résident d’une autre juridiction, la Juridiction B serait en droit d’imposer les revenus d’emploi uniquement si l’employé a dépassé le plafond de 183 jours.

62. Les circonstances exceptionnelles nécessitent une coordination exceptionnelle entre les juridictions afin d’alléger les coûts de conformité et les charges administratives que les employés et les employeurs devraient supporter du fait d’un changement involontaire et temporaire du lieu d’exercice des emplois. Il conviendrait, s’il y a lieu, d’appliquer la procédure amiable de manière efficace et pragmatique pour contribuer à régler les difficultés liées à la pandémie de COVID-19. Les juridictions ont publié des orientations utiles et pris des mesures d’allègement administratif pour atténuer les conséquences fiscales imprévues de la pandémie de COVID-19 et les charges supplémentaires éventuelles qui peuvent en découler. L’encadré Encadré 4 présente un modèle d’orientation.

63. En conclusion, les changements de juridiction dans laquelle un employé exerce son emploi peuvent avoir une incidence sur le lieu d’imposition des revenus d’emploi : de nouveaux droits d’imposition sur les revenus d’un employé peuvent naître dans d’autres juridictions et se substituer aux droits d’imposition existants. Les impôts sur les salaires étant souvent retenus à la source, l’application de ce changement se traduira par un accroissement des coûts de conformité et des charges administratives. Certaines juridictions ont publié des orientations et pris des mesures d’allègement administratif pour réduire cette charge supplémentaire.

 
Encadré 4.Orientations sur l’imposition des revenus d’emploi et modèle de dispositions des autorités compétentes

L’administration fiscale australienne a publié des orientations1 indiquant que le COVID-19 est à l’origine d’une succession de circonstances particulières dont il doit être tenu compte pour apprécier la source des revenus d’emploi d’un non-résident qui travaille habituellement à l’étranger, mais qui exerce ce même emploi en Australie en raison des circonstances exceptionnelles liées au COVID-19. L’administration fiscale australienne est disposée à accepter que lorsque l’aménagement du télétravail est de courte durée (moins de trois mois), les revenus tirés de cet emploi ne seront pas de source australienne ; en revanche, lorsque l’aménagement du télétravail dure plus de trois mois, il convient d’examiner les circonstances concernées pour déterminer si l’emploi a un lien avec l’Australie. Pour définir si le revenu est de source australienne, un facteur pertinent consiste à se demander si les restrictions liées au COVID-19 sont le seul motif expliquant le travail du non-résident en Australie. Cependant, les orientations font également observer que les revenus d’emploi perçus par un résident d’un autre pays alors qu’il travaille en Australie peuvent être considérés par une convention fiscale comme ayant leur source en Australie et toute convention applicable doit être examinée avec soin car la formulation, les conditions et les durées varient d’une convention à l’autre.

Le ministère des Finances autrichien a publié des orientations indiquant qu’une subvention gouvernementale compensant une diminution du temps de travail des employés (jusqu’à 100 %) qui est reversée par un employeur à ses employés est imposable dans la juridiction où l’activité visée par la subvention aurait été exercée, conformément à une disposition fondée sur le principe de causalité énoncé à l'article 15 du Modèle de convention de l’OCDE. Néanmoins, si une convention de double imposition contient une disposition séparée sur les revenus de l’assurance sociale obligatoire ou des revenus similaires, les orientations précisent que la rémunération procurée par ce type de subvention ne rentre pas dans le champ d’application de l’article 15 du Modèle de convention de l’OCDE, mais relève d’une disposition spéciale correspondante de la convention de double imposition qui, en règle générale, attribue le droit d’imposition à la juridiction de financement2.

Le ministère des Finances autrichien a publié des orientations indiquant qu’en vertu du paragraphe 2, point a de l’article 15 du Modèle de convention de l’OCDE, les jours de présence ayant pour origine une maladie ne doivent pas être inclus dans le calcul si cette maladie empêche l’employé de quitter le pays et, en conséquence, une exonération fiscale ne sera plus possible dans cette juridiction. Cette interprétation s’applique également lorsqu’un employé est empêché de quitter une juridiction en raison du COVID-19, dans les circonstances suivantes :

  • l’employé est empêché de quitter la juridiction en raison du COVID-19, et

  • il ne travaille pas pendant la période durant laquelle il est empêché de quitter la juridiction.

En conséquence, les orientations mentionnent que les journées de séjour supplémentaires dues au COVID-19 seront exclues du calcul de la durée de séjour et la juridiction de résidence aura le droit d’imposition exclusif conformément à la règle des 183 jours.

Le ministère des Finances autrichien a publié des orientations soulignant qu’en vertu de l'article 15, paragraphe 4 de la convention de double imposition entre l’Autriche et le Liechtenstein (dispositions spéciales sur les travailleurs frontaliers), les personnes qui appartenaient auparavant à la catégorie des travailleurs frontaliers, car elles se rendaient « en règle générale, chaque jour » sur le lieu de travail, mais qui travaillent actuellement depuis leur domicile pour éviter la propagation de la pandémie de COVID-19 (notamment en raison des recommandations formulées par les gouvernements respectifs) ne perdent pas leur statut de travailleurs frontaliers.

L’Autriche et l’Italie ont conclu un accord entre autorités compétentes en réponse à la pandémie de COVID-19, qui porte sur l’application du paragraphe 4 de l’article 15 de la convention de double imposition concernée (disposition spéciale sur les travailleurs frontaliers). Selon cet accord, les « contribuables qui se rendent habituellement chaque jour sur leur lieu de travail, mais qui travaillent depuis leur domicile pour lutter contre la propagation du COVID-19 demeurent des travailleurs frontaliers au sens du paragraphe 4 de l’article 15 ».

L’Autriche et l’Allemagne ont conclu un accord entre autorités compétentes dans le contexte du COVID-19 concernant l’application du paragraphe 6 de l’article 15 de la convention de double imposition applicable (disposition spéciale sur les travailleurs frontaliers). En conséquence, les jours travaillés où des salaires sont versés et pendant lesquels les travailleurs frontaliers n'exercent leur activité que depuis leur bureau à domicile du fait des mesures de lutte contre la pandémie COVID-19 ne seront pas pris en compte pour les besoins de la règle des 45 jours3. L’accord entre autorités compétentes prévoit en ce qui concerne l’application du paragraphe 1 de l'article 15 de la convention de double imposition visée, « les jours de travail [...] pendant lesquels l’emploi est exercé exclusivement à domicile en raison des mesures prises pour lutter contre l’épidémie de COVID-19, peuvent être considérés comme des jours de travail passés dans l’État contractant où l’employé aurait exercé son emploi en l’absence de telles mesures ».

L’agence du revenu du Canada a publié des orientations4 précisant que certains résidents des États-Unis qui exercent régulièrement leur emploi au Canada, mais qui ne sont normalement pas présents au Canada pour plus de 183 jours (et dont le revenu d'emploi n'est pas imposable au Canada pour cette raison) se voient désormais contraints d'exercer leurs fonctions au Canada pour une durée prolongée en raison des restrictions aux voyages. Les orientations confirment que jusqu’à la première des dates énumérées, telles que le jour où l’employé est retourné ou a pu retourner dans sa juridiction de résidence et le 31 décembre 2020, ces jours ne seront pas pris en compte dans le calcul du critère des 183 jours prévu par la convention fiscale sur le revenu signée entre le Canada et les États-Unis. Le Canada adoptera également cette approche pour l’application du critère des jours de présence prévus par les autres conventions fiscales.

L’Administration fiscale de la Finlande a publié des orientations5 indiquant que la pandémie de COVID-19 ne modifie pas l’interprétation que font les autorités fiscales finlandaises des articles de la convention sur les revenus d’emploi. Ces mêmes orientations décrivent la manière dont les règles internes relatives à la force majeure peuvent conduire à ne pas prendre en compte les jours passés en Finlande s’agissant de l’application de la règle interne des six mois lorsqu’un résident finlandais qui était affecté à l’étranger est rentré en Finlande en raison de la pandémie de COVID-19.

Le ministère des Finances allemand a conclu un accord amiable6 entre les autorités compétentes avec l’Autriche, la Belgique, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne et la Suisse, qui contient un accord mutuel sur un scénario temporaire et factuel. Durant la période pendant laquelle les autorités sanitaires maintiennent leur recommandation de travail à domicile en raison du risque élevé de contamination, les jours où les travailleurs frontaliers travaillent à distance peuvent être considérés comme des jours de travail effectués dans l'État dans lequel ils auraient exercé cet emploi en l’absence de mesures liées au COVID-19. Toutefois, ce scénario ne s’applique pas aux jours qui auraient été travaillés à domicile ou dans un autre État en l’absence de telles mesures. Ce scénario est facultatif c’est-à-dire qu’un travailleur transfrontalier pour lequel il serait désavantageux est en droit d’appliquer les dispositions actuelles de la convention fiscale. En ce qui concerne l’Autriche, il a été convenu également que les jours où les travailleurs frontaliers télétravaillent en raison des mesures liées au COVID-19 ne devraient pas leur faire perdre leur statut de « frontalier ». Par ailleurs, les accords amiables conclus avec l’Autriche, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas contiennent également une disposition relative au traitement des paiements de sécurité sociale reçus pendant les jours non travaillés passés à domicile (p. ex. les indemnités de chômage partiel - « Kurzarbeitergeld »). Il est entendu que ces paiements relèvent du champ d’application de l’article de la convention concernée régissant les paiements de sécurité sociale.

L’Autorité indépendante pour les recettes publiques de la Grèce a publié des orientations7 indiquant qu’en vertu de la convention fiscale, les paiements que les employés perçoivent de leurs employeurs en dépit des restrictions à l’exercice de leur emploi (subventions salariales) rentrent dans le champ d’application de l’article 15 du modèle de convention de l’OCDE et doivent être attribués au lieu où l’emploi était effectivement exercé avant la pandémie de COVID-19.

L’Administration fiscale irlandaise a publié des orientations8 relatives au droit interne confirmant qu’elle n’envisage pas d’imposer des obligations salariales irlandaises aux employeurs étrangers dans les situations où il apparaît de bonne foi qu’un employé qui travaillait à l’étranger pour le compte d’une entité étrangère avant le COVID-19 est délocalisé temporairement en Irlande pendant la pandémie et exerce son emploi pour le compte de son employeur étranger durant son séjour en Irlande.

L’Administration fiscale de la Nouvelle-Zélande a publié des orientations9 sur le droit interne stipulant qu’une personne non-résidente sera assujettie à l’impôt sur les revenus d’emploi en Nouvelle-Zélande si elle exerce son emploi en Nouvelle-Zélande pendant 92 jours ou plus. Les orientations soulignent qu’en raison de la pandémie de COVID-19 des employés pourraient être amenés à séjourner en Nouvelle-Zélande plus de 92 jours malgré leur intention de partir. Selon ces orientations, si un employé quitte le pays ou rentre dans sa juridiction dans un délai raisonnable après la levée des restrictions pratiques de voyages, il ne sera pas tenu compte des jours supplémentaires (en plus des 92 jours) durant lesquels la personne n’a pas pu partir.

L’Administration fiscale du Royaume-Uni a publié des orientations10 stipulant que l’article sur l’emploi demeure inchangé et que son application dépendra de la situation de l’employé. Le Royaume-Uni accepte qu’un non-résident ne soit pas soumis à l’impôt sur des revenus afférents à un emploi exercé au Royaume-Uni pendant la durée d’un séjour imprévu et contraint par la pandémie de COVID-1911.

L’Administration fiscale fédérale des États-Unis a publié des orientations12 confirmant qu’aux fins du calcul des jours de présence aux États-Unis selon la règle des 183 jours énoncée dans la clause sur les revenus des services dépendants des conventions des États-Unis, il ne sera pas tenu compte des jours de présence (comprenant une seule période n’excédant pas 60 jours consécutifs, commençant le 1er février 2020 ou après cette date et le 1er avril ou après cette date) où une personne n’a pas pu quitter les États-Unis en raison des perturbations de déplacement liées à la pandémie de COVID-19, selon l’expression employée dans les orientations.

Note :

Le modèle d’orientations des juridictions inclut des instructions à la fois sur le droit interne et l’application des conventions. Il est à noter que dans la plupart des juridictions, les orientations sur le droit interne n’affectent pas l’interprétation des dispositions conventionnelles et des Commentaires. Les références à des orientations sur la législation interne ne sont présentes que pour illustrer le propos et ne doivent pas laisser penser que le droit interne doit être appliqué ou interprété conformément aux Commentaires.

2.

Voir, par exemple, l’accord correspondant entre les autorités compétentes conclu entre l’Autriche et l’Allemagne concernant l’application du paragraphe 2 de l’article 18 de la convention de double imposition concernée : https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=4f45c5a9-4d31-4258-b0ed-367159caffee.

3.

La limite de 45 jours a été adoptée antérieurement par l’Autriche et l’Allemagne en ce qui concerne le statut des travailleurs frontaliers. Elle fait référence aux jours où les employés ne traversent pas réellement la frontière (travail à domicile). Le dépassement de cette limite entraîne la perte du statut de travailleur frontalier. Les dispositions générales de l’article 15 seraient alors applicables dans ce contexte.

4.

Voir : https://www.canada.ca/en/revenue-agency/campaigns/covid-19-update/guidance-international-income-tax-issues.html (applicable jusqu’à la première des dates suivantes : le jour où l’employé non-résident est retourné ou a pu retourner dans sa juridiction de résidence, le jour indiqué sur une dispense à l’article 102 du Règlement ; le jour où l’employeur non-résident a été reconnu par la ministre à titre d’employeur non-résident admissible et où l’employé non-résident était également un employé non-résident admissible ; le 31 décembre 2020).

6.

Voir : https://www.bundesfinanzministerium.de (en allemand) « COVID-19, Konsultationsvereinbarung ».

Sources :

Chapitre 2, Orientations de l’Autriche relatives à l’application et l’interprétation de la Convention de double imposition pendant la pandémie de COVID-19, « Info zur Anwendung und Auslegung von Doppelbesteuerungsabkommen im Zusammenhang mit der COVID-19 Pandemie », Informations du ministère des Finances autrichien, 20.07.2020, 2020-0.459.612, https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=719aaa9a-fba3-4ad0-b331-ea4919b90f3b.

Chapitre 1.1, Orientations de l’Autriche relatives à l’application et l’interprétation de la Convention de double imposition pendant la pandémie de COVID-19, « Info zur Anwendung und Auslegung von Doppelbesteuerungsabkommen im Zusammenhang mit der COVID-19 Pandemie », Informations du ministère des Finances autrichien, 20.07.2020, 2020-0.459.612, https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=719aaa9a-fba3-4ad0-b331-ea4919b90f3b.

Chapitre 1.3, Orientations de l’Autriche relatives à l’application et l’interprétation de la Convention de double imposition pendant la pandémie de COVID-19, « Info zur Anwendung und Auslegung von Doppelbesteuerungsabkommen im Zusammenhang mit der COVID-19 Pandemie », Informations du ministère des Finances autrichien, 20.07.2020, 2020-0.459.612, https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=719aaa9a-fba3-4ad0-b331-ea4919b90f3b.

Accord amiable entre les autorités compétentes sur les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur le paragraphe 4 de l’article 15 de la Convention de double imposition entre l’Autriche et l’Italie, Konsultationsvereinbarung zu den Auswirkungen der COVID-19-Pandemie auf die Grenzgängerregelung iSd Art. 15 Abs. 4 DBA-Italien”, https://findok-intra.bmf.gv.at/findokintra?execution=e3s2.

Paragraphe 3, Accord amiable entre les autorités compétentes concernant la convention de double imposition entre l’Autriche et l’Allemagne dans le contexte de la lutte contre la pandémie de COVID-19, 15.4.2020, « Konsultationsvereinbarung zum DBA-Deutschland betreffend Arbeitnehmer und im öffentlichen Dienst Beschäftigte im Homeoffice sowie Kurzarbeitergeld und Kurzarbeitsunterstützung iZm der COVID-19-Pandemie », https://findok.bmf.gv.at/findok?execution=e100000s1&segmentId=4f45c5a9-4d31-4258-b0ed-367159caffee.

Notes

1.

Le Groupe de travail n° 1, réuni dans son format du Cadre inclusif, a examiné ces orientations et soutient leur publication.

2.

Selon la convention, la période peut atteindre 183 jours durant l’année fiscale considérée ou durant toute période de douze mois commençant ou se terminant durant l’année fiscale considérée.

3.

La Suède a adopté une approche différente et les juridictions citées dans l’encadré 4 ci-après ont publié des orientations spécifiques sur leur manière de procéder.

4.

Voir le Protocole additionnel relatif aux travailleurs frontaliers et relatif à la Convention franco-belge préventive de la double imposition : https://finances.belgium.be/fr/Actualites/%EF%83%98belgique-france-r%C3%A9gime-travailleurs-frontaliers-%E2%80%93-coronavirus-covid-19.

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