La pandémie de COVID-19 a soulevé de nombreux problèmes pour l’Union européenne (UE) et souvent accentué des faiblesses qui existaient déjà. L’UE a été plus durement touchée que la plupart des autres régions économiques, puisqu’elle a connu en 2020 la plus grave récession de son histoire (Graphique 1.1). Les inégalités territoriales risquent de se creuser entre les pays et les régions, ce qui pourrait accentuer les divergences d’évolution économique observées au cours des dix dernières années. Les retombées disproportionnées de la crise sur les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre peu qualifiée, tels que l’hébergement et la restauration ou le commerce, pourraient entraîner une montée des inégalités et de la pauvreté.
Études économiques de l’OCDE : Union européenne 2021
1. Éclairages sur l’action publique
L’Union européenne doit relever différents défis
Face à la crise liée à la pandémie, l’UE a réagi de manière audacieuse et novatrice. Sur le front épidémique, malgré des tensions initiales, les frontières ont été gérées pour l’essentiel de manière coordonnée afin d’éviter les phénomènes de contagion, de même que les approvisionnements en vaccins et autres fournitures médicales, ce qui a permis d’éviter une surenchère entre pays. En raison de goulets d’étranglement dans les capacités de production de vaccins, la campagne vaccinale a été lente à monter en régime, mais les pays de l’UE affichent aujourd’hui des taux de vaccination parmi les plus élevés du monde. Sur le front économique, les autorités monétaires ont rapidement adopté des mesures de soutien et, grâce à l’activation de la clause dérogatoire générale du Pacte de stabilité et de croissance, les politiques budgétaires nationales ont pris une orientation fortement accommodante. En ce qui concerne les aides aux entreprises, l’utilisation intégrale des marges de manœuvre offertes par les règles relatives aux aides d’État a été autorisée. En outre, les gouvernements des pays de l’UE se sont mis d’accord pour la première fois pour procéder à l’émission de dettes communes, afin de financer un plan de relance économique de l’Union européenne, « Next Generation EU », prévoyant notamment l’octroi de subventions à ses États membres. Contrairement à ce qui s’était passé après la crise financière mondiale, la confiance à l’égard de l’UE a été préservée et même renforcée (Graphique 1.2) et les tensions sur les marchés de la dette souveraine ont été, jusqu’ici, rapidement dissipées.
Néanmoins, les plus gros problèmes soulevés par la crise pandémique pourraient être encore à venir. Les deux principaux volets du plan de relance, les transitions écologique et numérique, qui étaient déjà prioritaires avant la pandémie, sont devenus encore plus urgents. Des réseaux énergétiques aux batteries, en passant par l’économie circulaire, les possibilités d’investissement et d’innovation dans l’économie verte sont immenses. Le pacte vert pour l’Europe, une stratégie globale destinée à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre de l’UE d’ici à 2050 (Commission européenne, 2019a), est bienvenu, mais la question de sa mise en œuvre sera essentielle. Il est crucial d’intensifier la transformation numérique, en s’appuyant sur la nouvelle stratégie numérique pour l’Europe (Commission européenne, 2020a), pour l’investissement et la diffusion de l’innovation. Cela exigera également d’actualiser certains cadres réglementaires, tels que celui de la politique de la concurrence.
Pour tirer le meilleur parti du plan de relance et réussir les transitions écologique et numérique, l’UE a besoin de susciter la confiance, tant de la part de ses citoyens qu’entre ses États membres. Dans cette optique, il est essentiel d’éviter que le déploiement de fonds sans précédent qui caractérise le plan « Next Generation EU » soit entaché d’irrégularités ou de fraude. L’UE doit aussi réformer sa politique migratoire. Les migrations constituent de longue date une question hautement conflictuelle tant pour les États membres que pour l’opinion publique, mais elles constituent aussi un levier pour remédier aux déficits de compétences, en particulier en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC), qui sont essentielles pour la transition numérique.
Dans ce contexte, les trois principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
Il est essentiel d’accroître l’investissement pour accélérer la reprise. En tirant parti du plan de relance de l’UE, les pays devraient renforcer l’investissement public et privé, en particulier pour améliorer les interconnexions européennes, et intensifier la collaboration entre pays en matière de projets industriels innovants, notamment dans le domaine des soins de santé.
La transition vers la neutralité climatique et une économie circulaire va renforcer le bien-être et ouvrir des perspectives majeures de consolidation des points forts industriels européens. Une amélioration de la tarification des émissions de carbone, de nouveaux instruments de réglementation et un accroissement des financements consacrés à la recherche-développement (R-D) sont autant d’éléments qui vont contribuer à renforcer l’investissement et l’innovation verts.
Pour éviter un creusement des inégalités régionales, les régions les plus pauvres doivent améliorer leur spécialisation productive. Dans cette optique, il faut remettre à plat les politiques de cohésion et de développement rural pour les rendre plus efficientes, notamment en soutenant plus efficacement l’innovation.
La crise liée au COVID-19 risque d’aggraver la divergence des économies au sein de l’UE
L’UE a connu une récession sans précédent en 2020
La pandémie de COVID-19 a frappé les pays européens de plein fouet. Au printemps 2020, lorsque a eu lieu la première vague d’infections, les autorités ont pris des mesures sans précédent pour limiter la contagion, imposant souvent des confinements d’ampleur nationale accompagnés d’une suspension obligatoire des activités dans de larges pans de l’économie (Graphique 1.3). Les mesures d’endiguement plus strictes adoptées expliquent en partie l’ampleur des pertes de production constatées en termes de comparaison internationale (Graphique 1.4). Après la fin des mesures de confinement, l’activité a vigoureusement rebondi jusqu’au milieu de l’été. Du fait de la résurgence de la pandémie à l’automne, de nombreux pays ont progressivement réimposé des confinements, parfois même à plusieurs reprises, même si ceux-ci ont été souvent moins stricts qu’au printemps. Ces mesures d’endiguement sont généralement restées en place jusqu’au printemps 2021, ce qui a retardé le mouvement de reprise amorcé.
Les confinements imposés au printemps 2020, puis à l’automne de cette même année jusqu’au printemps 2021, ont entraîné la suspension d’une part significative des activités économiques, ce qui s’est traduit par une contraction du PIB nettement plus marquée qu’à la suite de la crise financière mondiale. Fait inhabituel pour une récession, la baisse de la production était imputable au premier chef à la consommation privée (Graphique 1.4), ce qui tenait avant tout à des restrictions d’accès prolongées à certains biens et (en particulier) à certains services, mais aussi à une vive augmentation de l’épargne de précaution. L’investissement s’est aussi fortement contracté, essentiellement en raison de l’atonie de la demande et d’une incertitude considérable. Dans un contexte marqué par les effets considérables de la pandémie sur les échanges internationaux, l’excédent des paiements courants de l’UE est resté globalement stable en 2020. Cet ample excédent tient à un ajustement asymétrique entre pays au cours des dix dernières années (Graphique 1.5) et à la faiblesse de l’investissement (évoquée ci-après).
Les effets induits sur les différentes branches d’activité ont été très variables, les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre et à main-d’œuvre peu qualifiée étant souvent les plus durement touchés. Les services ont été particulièrement affectés, notamment ceux fondés sur des contacts directs entre prestataires et clients (Graphique 1.4). Le tourisme, également touché par les restrictions de déplacement, l’illustre on ne peut mieux, en particulier lorsqu’il est tributaire des visiteurs internationaux. L’activité a également été considérablement entravée dans le secteur manufacturier et dans celui de la construction au printemps 2020, mais elle a mieux résisté à la deuxième vague de la pandémie, puisque la reprise soutenue tout au long du second semestre de 2020 a ramené ces secteurs à des niveaux de production proches de ceux d’avant la pandémie (sachant que ce rebond a été plus rapide dans la construction et plus progressif dans l’industrie des biens d’équipement). En revanche, les secteurs plus compatibles avec la distanciation sociale ou le télétravail, comme l’agriculture, la finance ou les services liés aux technologies de l’information et de la communication (TIC), sont ceux qui ont le moins souffert.
La pandémie a également pesé sur le marché du travail. Le nombre total d’heures travaillées a évolué parallèlement à l’activité, ce qui s’est traduit par un redressement vigoureux, mais incomplet au troisième trimestre de 2020 (Graphique 1.6). Le recours généralisé au chômage partiel et, la diminution de la population active, surtout au deuxième trimestre de 2020, ont limité la hausse du chômage. Cela étant, des mesures plus larges du sous-emploi de la main-d’œuvre font ressortir des augmentations un peu plus marquées, notamment liées à un accroissement du nombre de personnes disponibles pour travailler, mais ne recherchant pas d’emploi. La détérioration de la situation sur le marché du travail pourrait avoir des effets négatifs durables sur les jeunes et les femmes.
L’atonie de la demande globale, conjuguée à une multitude d’autres facteurs, a réduit l’inflation en 2020. L’inflation sous-jacente, qui avait longtemps oscillé entre 1 % et 1.5 %, a reflué au second semestre de 2020 (Graphique 1.6), essentiellement sous l’effet de l’évolution des prix des services (en particulier de ceux liés aux loisirs, aux transports, aux voyages à forfait et aux activités d’hébergement, durement touchés par la pandémie) ainsi que de la baisse temporaire de la TVA en Allemagne. Compte tenu de l’impact supplémentaire du recul des prix de l’énergie, l’inflation globale est tombée dans l’UE à un niveau à peine supérieur à zéro, et est même devenue négative dans la zone euro. L’appréciation de l’euro a également eu un effet désinflationniste. Au début de 2021, l’inflation sous-jacente s’est redressée quelque peu, même si ce redressement a été essentiellement transitoire, en partie en raison de l’annulation d’une baisse de TVA en Allemagne, de l’avancement de la période des soldes d’hiver et de la mise à jour annuelle des coefficients de pondération utilisés pour élaborer l’indice des prix à la consommation. Cette mise à jour, qui reflète des variations considérables dans la structure des dépenses en 2020, a tiré l’inflation vers le haut (tel a été le cas, par exemple, de l’augmentation de la pondération des dépenses d’alimentation, sachant que l’inflation a été relativement forte dans ce domaine). La remontée de l’inflation globale en 2021 se révèle plus durable du fait du renchérissement des prix de l’énergie.
La réaction énergique des autorités à soutenu la demande et réduit la fragmentation financière
La réaction des autorités européenne a été énergique et permis d’éviter une récession encore plus grave (Encadré 1.1). La BCE a fortement accru ses achats d’actifs et ses apports de liquidités. Pour soutenir davantage le crédit bancaire, différentes mesures d’allègement temporaire des exigences de fonds propres applicables aux banques ont été prises, et les mécanismes de garantie de la Banque européenne d’investissement (BEI) ont été étoffés. Des facilités de crédit assorties de conditions avantageuses ont été proposées aux États membres, puis un accord a été conclu sur un plan de relance de l’UE financé par l’émission de dettes communes, dans le cadre duquel les aides accordées aux pays prennent non seulement la forme de prêts mais aussi de subventions. Grâce à l’activation de la clause dérogatoire générale du Pacte de stabilité et de croissance, les politiques budgétaires nationales ont apporté un soutien considérable à l’activité, ce qui s’est traduit par d’importantes dépenses discrétionnaires en 2020 et 2021 et par des mesures de soutien aux liquidités et au crédit, telles que des garanties de prêts et des reports de paiement d’impôts. Les politiques macroéconomiques sont analysées de manière plus approfondie dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée à la zone euro.
Ces mesures ont réduit la fragmentation financière et soutenu l’offre de crédit. Après s’être exacerbées au début de la pandémie, les tensions sur les marchés de la dette souveraine se sont dissipées, et les écarts de rendement se sont réduits. Les mesures prises rapidement et avec détermination par la BCE ont été cruciales à cet égard, et elles ont été étayées ensuite par l’accord conclu sur le plan de relance de l’UE. Dans toute l’Union européenne, les entreprises non financières ont également bénéficié de la baisse et de la convergence des taux d’intérêt sur les nouveaux crédits, auxquels elles ont recouru pour remédier aux problèmes de manque de liquidités découlant de la pandémie (Graphique 1.7).
Encadré 1.1. Les mesures monétaires, financières et budgétaires prises par l’Europe face à la crise liée au COVID-19
La Banque centrale européenne (BCE) a étoffé son programme d’achat d’actifs en y consacrant 1 970 milliards EUR supplémentaires au total (soit 16.5 % du PIB de 2019 de la zone euro). Cela correspond pour l’essentiel au programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP, Pandemic Emergency Purchase Programme) de 1 850 milliards EUR, dont les achats nets devraient se poursuivre jusqu’à ce que la crise liée au COVID-19 soit considérée comme terminée, et en tout état de cause au moins jusqu’en mars 2022. En mars 2020, le Conseil des gouverneurs a annoncé qu’il envisagerait de réévaluer certaines des limites que la BCE s’est imposées dans la mesure nécessaire pour que son action soit proportionnée aux risques.
Pour préserver le crédit bancaire et la liquidité, la BCE a annoncé de nouvelles opérations de refinancement à plus long terme non ciblées, rendu plus favorables les conditions de financement offertes dans le cadre des opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO III), et assoupli les critères qu’elle applique pour déterminer quels sont les actifs admis en garantie.
Les ratios de fonds propres et de liquidité des banques ont été temporairement allégés. Les normes de fonds propres ont également été assouplies temporairement via des modifications apportées au règlement sur les exigences de fonds propres et l’instauration d’une certaine flexibilité en matière de traitement prudentiel des prêts non performants (PNP).
Dans le cadre du train de mesures de relance par les marchés des capitaux, des modifications ciblées ont été apportées aux règles qui s’appliquent à ces marchés – c’est-à-dire au règlement sur les prospectus, à la directive concernant les marchés d’instruments financiers (MiFID II) et aux règles relatives à la titrisation – notamment pour qu’il soit plus facile aux émetteurs de lever rapidement des fonds et pour faciliter le recours à la titrisation, y compris celle des PNP, afin que les banques puissent accorder davantage de crédits.
L’UE a activé la clause dérogatoire générale du Pacte de stabilité et de croissance (PSC), qui permet aux pays de s’écarter temporairement des objectifs budgétaires fixés par le PSC. D’après le paquet « Semestre européen » du printemps 2021, cette clause dérogatoire sera encore appliquée en 2022 et devrait être désactivée en 2023.
Deux initiatives d’investissement en réaction au coronavirus (CRII and CRII+) ont donné plus de souplesse et accéléré la mise en œuvre de la politique de cohésion, notamment en réduisant le cofinancement national et en élargissant l’éventail des investissements pouvant en bénéficier.
Des lignes de crédit fondées sur le mécanisme européen de stabilité (MES) ont été établies au titre d’un instrument de soutien dans le cadre de la crise pandémique ; elles permettront à chaque État d’emprunter jusqu’à concurrence de 2 % de son PIB national (ce qui représente une enveloppe globale de 240 milliards EUR environ) pour financer des dépenses de santé directes et indirectes, de traitement et de prévention, liées à la crise du COVID-19. Ces prêts auront une échéance moyenne maximale de 10 ans et seront assortis de conditions favorables. Pour l’instant, aucun pays n’a sollicité le bénéfice de ce dispositif.
Un nouvel instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) a été créé. Doté de 100 milliards EUR, SURE prévoit des prêts, accordés à des conditions favorables aux États membres pour les aider à financer leurs dispositifs de chômage partiel et d ‘autres mesures de soutien aux salariés et aux indépendants.
Les mécanismes de garantie de la Banque européenne d’investissement (BEI) ont été étoffés. Un Fonds de garantie européen doté de 25 milliards EUR a notamment été créé en vue de mobiliser jusqu’à 200 milliards EUR de financements (sous forme de dettes ou de fonds propres) pour les entreprises de toute l’Union européenne. Au moins 65 % de ces financements seront destinés à des petites et moyennes entreprises (PME).
Le plan de relance « Next Generation EU » apportera aux États membres une aide globale de 750 milliards EUR – soit environ 5.5 % du PIB de 2019 de l’Union européenne à 27 (UE-27) – sous forme de subventions et de prêts, financés par l’émission de dettes de l’UE. Ce plan de relance fait l’objet d’un examen plus approfondi dans l’encadré 1.5.
L’UE a également modifié à titre temporaire son régime des aides d’État pour permettre aux États membres d’apporter le soutien nécessaire aux entreprises.
La reprise est tributaire des perspectives sanitaires et est entourée de risques considérables
Dans l’attente d’une généralisation des campagnes vaccinales, la situation épidémiologique est restée délicate pendant la majeure partie du premier semestre 2021. La Commission européenne a négocié des contrats d’achat anticipé avec des fabricants de vaccins au nom des 27 États membres, donnant aux pays le droit d’acquérir un certain nombre de doses (proportionnel à leur population) lorsque des vaccins seraient disponibles. Cette approche a permis de préserver la coopération et l’égalité de traitement entre États membres, en mettant en exergue la valeur d’une action conjointe, y compris dans les domaines où l’UE n’a que des compétences limitées (Encadré 1.2), mais elle a pesé sur la rapidité initiale de la riposte (Encadré 1.3). Dans un contexte de goulets d’étranglement dans les capacités de production de vaccins au niveau mondial et d’exportations de doses très limitées (l’UE faisant exception à cet égard), la campagne vaccinale de l’UE a été lente à monter en régime, mais elle a largement rattrapé au cours des derniers mois celle des pays affichant les taux de vaccination les plus élevés du monde (Graphique 1.8).
Encadré 1.2. Répartition des compétences entre l’UE et ses États membres
Pour que l’UE puisse agir dans un domaine d’intervention donné, il faut que les États membres lui confèrent les compétences correspondantes dans les Traités. Si ces compétences ne lui sont pas conférées, seuls les États membres peuvent agir. Il en existe trois grandes catégories : les compétences exclusives, les compétences partagées et les compétences d’appui.
Les compétences exclusives correspondent aux domaines dans lesquels seule l’UE peut légiférer, les États membres ne pouvant alors qu’adopter des actes juridiquement contraignants si l’UE leur en a donné le pouvoir. Il s’agit des domaines suivants : l’union douanière, les règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur, la politique monétaire (pour les États membres de la zone euro), la conservation des ressources biologiques marines dans le cadre de la politique commune de la pêche, la politique commerciale commune et, dans certaines conditions, la conclusion d’accords internationaux.
Les compétences partagées correspondent aux domaines dans lesquels l’UE comme les États membres peuvent légiférer et adopter des actes juridiquement contraignants. Les États membres peuvent agir dans les domaines où l’UE n’exerce pas, ou a décidé de ne pas exercer, de compétence propre. Les domaines d’intervention concernés sont les suivants ; le marché intérieur, la politique sociale (dans certains de ces aspects), la politique régionale, l’agriculture et la pêche (à l’exception de la conservation des ressources biologiques marines, l’environnement, la protection des consommateurs, les réseaux transeuropéens, l’espace de liberté, de sécurité et de justice, les enjeux communs de sécurité en matière de santé publique (dans certains de leurs aspects), la recherche, le développement technologique, l’espace, la coopération au développement et l’aide humanitaire.
Enfin, les compétences d’appui désignent les domaines dans lesquels l’UE intervient uniquement pour soutenir, coordonner ou compléter l’action des États membres. La législation de l’UE ne peut exiger des États membres qu’ils harmonisent leur législation et leur réglementation. C’est le cas dans les domaines suivants : la protection et l’amélioration de la santé humaine, l’industrie, la culture, le tourisme, l’éducation, la formation professionnelle, la jeunesse, le sport, la protection civile et la coopération administrative.
En outre, l’UE peut agir pour que les États membres coordonnent leurs politiques économiques, sociales et de l’emploi ; par ailleurs, la politique étrangère et de sécurité commune se distingue par certaines spécificités institutionnelles. Dans tous les domaines, l’exercice des compétences de l’UE relève des principes de proportionnalité (l’action de l’UE ne peut aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs des Traités) et de subsidiarité (dans les domaines où l’UE et les États membres peuvent agir, l’UE ne peut intervenir que si les objectifs d’une action proposée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres, mais peuvent davantage l’être au niveau de l’UE).
Après une forte accélération initiée au second trimestre de 2021, la croissance économique devrait modérer son allure en 2022 mais néanmoins rester vigoureuse (Tableau 1.1 et Graphique 1.9). En 2021, la consommation privée devrait bénéficier de la levée des mesures de confinement et d’un rattrapage important de la demande, et l’activité sera encore soutenue par l’ampleur de la relance budgétaire et la vigueur du dynamisme des exportations. En 2022, la croissance continuera d’être stimulée par les exportations et la formation de capital, cette dernière s’appuyant sur une contribution importante de l’investissement public. Toutefois, l’épargne des ménages, quoiqu’en repli, devrait rester supérieure à son niveau d’avant la pandémie, et le redressement de l’investissement privé ne sera que modéré. Fin 2022, le chômage devrait retrouver des niveaux proches de ceux d’avant la pandémie, et l’inflation restera toujours modérée. Il est essentiel de mettre en œuvre rapidement des investissements et des réformes amplifiant la croissance afin de dynamiser l’activité et limiter les stigmates laissés par la crise, comme on le verra plus loin.
Même si l’ampleur de son impact a été bien moindre que celui de la pandémie, le recul des échanges imputable au Brexit pèsera également sur la reprise, le Royaume-Uni étant un grand partenaire commercial de l’UE (Graphique 1.10). Le Royaume-Uni est sorti de l’UE, de son union douanière et de son marché unique à la fin de janvier et en décembre 2020, respectivement. Bien que l’Accord de commerce et de coopération entre l’UE et le Royaume-Uni conclu à la fin de 2020 préserve des échanges de biens sans droits de douane ni contingents, on s’attend à ce que les flux commerciaux bilatéraux soient plus faibles que si le Royaume-Uni était resté dans le marché unique, principalement en raison de l’augmentation des obstacles non tarifaires (Encadré 1.4). Les échanges de services (financiers et autres) ne bénéficient plus de l’octroi de « passeports » et devraient être affectés par une augmentation des coûts liée à la divergence des réglementations. Outre ces effets négatifs à moyen terme, les coûts à court terme de l’adaptation aux nouvelles règles et procédures commerciales se sont également fait sentir, avec le recul marqué des échanges commerciaux bilatéraux entre l’UE et le Royaume-Uni début 2021.
Étant donné que le crédit bancaire joue un rôle essentiel dans le redéploiement des ressources, l’envolée probable des prêts non performants (PNP) au cours des prochaines années, notamment en raison de l’expiration de mesures d’aide telles que les moratoires sur les crédits et les garanties publiques de prêts, est particulièrement inquiétante. Certains des pays encore confrontés à des problèmes de PNP hérités du passé (Graphique 1.12) figurent parmi ceux où les dispositifs d’aide susmentionnés ont été les plus utilisés (ABE, 2020 ; Graphique 1.13). Des encours volumineux de PNP peuvent entraver la distribution du crédit et son redéploiement vers les entreprises les plus productives (BCE, 2020a ; Azevedo et al., 2018). Une vive augmentation des PNP pourrait aussi faire réapparaître des boucles de rétroaction négative entre les banques et les emprunteurs souverains au niveau national (Tableau 1.2). Des réformes permettant de remédier rapidement au problème des PNP sont décrites dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée à la zone euro.
Les effets de stigmate pourraient aussi s’aggraver si des entreprises aux perspectives de redressement limitées bénéficiaient de manière prolongée des dispositifs de chômage partiel, et en l’absence de renforcement des politiques actives du marché du travail et de l’investissement public. En outre, la levée attendue des mesures de confinement et le rebond de l’activité qu’elle entraînera pourraient être mis en péril si la vaccination se révélait inefficace face aux nouveaux variants du virus, ou si le nombre de personnes vaccinées s’avérait insuffisant. Outre une aggravation des pertes de production à court terme, la hausse du chômage et des faillites ajouterait à la difficulté de redéployer les ressources à moyen terme. En revanche, un déploiement rapide et efficace des plans nationaux pour la reprise et la résilience, axés sur les réformes structurelles pour attirer l’investissement privé et favoriser l’acquisition de compétences et les mesures d’activation, aurait pour effet de doper la confiance, de renforcer durablement la croissance et d’aider l’Europe à réussir ses transitions écologique et numérique.
Encadré 1.3. La riposte sanitaire de l’UE a reposé sur la coopération, mais elle a mis au jour des insuffisances en matière de capacités
Lorsque la pandémie de COVID-19 a débuté, des pénuries n’ont guère permis aux pays de l’UE de s’entraider en se livrant des fournitures médicales essentielles, et l’on a pu craindre une surenchère entre les gouvernements faute de coordination dans les achats nationaux. La réaction initiale de l’UE à la pandémie a mis l’accent sur l’acquisition commune d’équipements médicaux et le renforcement des capacités de protection civile. Des efforts ont également été déployés pour organiser des achats communs de vaccins. La Commission européenne a négocié, au nom des 27 pays de l’UE, des contrats avec plusieurs fabricants de vaccins pour précommander des doses, préservant ainsi l’égalité de traitement entre les États membres et garantissant un approvisionnement diversifié de plus de 4.6 milliards de doses. Ces contrats ont également pour objet d’avancer des fonds aux fabricants afin de leur permettre d’investir dans les capacités de production parallèlement aux essais cliniques. En outre, pour préserver une stratégie fondée sur la coopération et sur le respect des règles, des millions de doses produites dans l’UE ont été exportées vers un très grand nombre de pays tiers, notamment au titre de COVAX, le mécanisme international destiné à assurer un accès équitable aux vaccins entre nations riches et pauvres.
Cette approche par la coopération a eu un prix pour la souplesse et la rapidité de la riposte. La multiplicité des sources de fonds nationales et européennes a soulevé des problèmes de coordination et tout en étant substantielles, les ressources financières globales affectées à l’élaboration de vaccins ont été inférieures à celles mobilisées aux États-Unis (Aghion et al., 2020). En outre, l’UE a signé son premier contrat d’achat anticipé le 27 août 2020, soit plusieurs mois après l’Autorité pour la recherche et le développement avancés dans le domaine biomédical (BARDA, Biomedical Advanced Research and Development Authority) aux États-Unis.
Selon la répartition actuelle des compétences entre l’UE et ses États membres, en vertu de laquelle les politiques de santé incombent principalement à ces derniers, les propositions de renforcement des capacités de l’UE pour faire face aux menaces sanitaires internationales ont été récemment mises en avant (Commission européenne, 2020b). Il est notamment envisagé de créer une Autorité de l’UE de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA), qui aurait pour mission d’anticiper les menaces, de veiller à la disponibilité de réserves suffisantes et à la distribution de fournitures médicales, et d’assurer la coordination des capacités publiques et privées en matière de recherche-développement (R-D). Au-delà de l’amélioration de la préparation aux situations d’urgence – une des principales raisons de la mise en place de la BARDA en 2006 – la création de l’HERA pourrait aussi contribuer à endiguer la baisse de la compétitivité de l’UE en matière d’innovations biotechnologiques (Aghion et al., 2020). Pour ouvrir la voie à l’HERA, un programme pilote a été lancé en février 2021 pour faire face aux variants du coronavirus (« l’incubateur HERA »), ce qui est une bonne chose. On pourrait aussi envisager un élargissement du champ de compétences de l’UE dans le domaine de la santé publique.
Tableau 1.1. Indicateurs et prévisions macroéconomiques
Union européenne1, pourcentage de variation annuelle, en volume (prix de 2015)
|
2018 |
2019 |
Prévisions |
|||
---|---|---|---|---|---|---|
|
2020 |
2021 |
2022 |
|||
Produit intérieur brut (PIB) |
2.2 |
1.6 |
-6.3 |
4.2 |
4.4 |
|
Consommation privée |
1.8 |
1.6 |
-7.4 |
2.7 |
6.1 |
|
Consommation publique |
1.3 |
2.0 |
1.4 |
2.9 |
0.9 |
|
Formation brute de capital fixe |
4.0 |
5.2 |
-8.0 |
5.1 |
5.7 |
|
Demande intérieure finale |
2.2 |
2.5 |
-5.7 |
3.3 |
4.8 |
|
Demande intérieure totale |
2.3 |
2.0 |
-6.0 |
3.3 |
4.8 |
|
Exportations de biens et services |
3.8 |
2.9 |
-8.9 |
9.1 |
5.8 |
|
Importations de biens et services |
4.1 |
3.6 |
-8.5 |
7.6 |
6.7 |
|
Autres indicateurs (taux de croissance, sauf indication contraire) |
||||||
PIB potentiel |
1.3 |
1.3 |
1.1 |
1.0 |
1.0 |
|
Écart de production2 |
0.0 |
0.3 |
-7.0 |
-4.1 |
-0.8 |
|
Emploi |
1.2 |
1.0 |
-0.9 |
0.2 |
0.9 |
|
Taux de chômage |
7.5 |
6.9 |
7.3 |
7.6 |
7.2 |
|
Déflateur du PIB |
1.5 |
1.9 |
1.8 |
1.1 |
1.5 |
|
Indice des prix à la consommation |
1.8 |
1.3 |
0.6 |
1.9 |
1.5 |
|
IPC sous-jacent |
1.1 |
1.2 |
1.0 |
1.5 |
1.3 |
|
Taux d’épargne des ménages, net3 |
5.9 |
6.4 |
13.0 |
11.2 |
7.0 |
|
Solde des paiements courants4 |
3.3 |
3.2 |
3.1 |
3.6 |
3.4 |
|
Balance des opérations courantes4 |
-0.4 |
-0.6 |
-7.1 |
-7.1 |
-3.7 |
|
Solde budgétaire sous-jacent des administrations publiques2 |
-0.4 |
-0.6 |
-2.5 |
-5.0 |
-3.9 |
|
Solde primaire sous-jacent des administrations publiques2 |
1.2 |
0.8 |
-1.3 |
-3.9 |
-2.9 |
|
Dette brute des administrations publiques (Définition de Maastricht)4 |
82.3 |
80.6 |
94.3 |
97.0 |
95.8 |
|
Dette nette des administrations publiques4 |
57.8 |
57.8 |
69.8 |
73.1 |
72.4 |
|
Taux du marché monétaire à trois mois, moyenne |
-0.2 |
-0.1 |
-0.3 |
-0.4 |
-0.4 |
|
Dette brute des administrations publiques4 |
97.0 |
97.9 |
115.4 |
118.2 |
116.9 |
Note : 1. Pays de l’Union européenne qui sont également membres de l’OCDE (22 pays). 2. En pourcentage du PIB potentiel. 3. En pourcentage du revenu disponible des ménages. 4. En % du PIB
Source : OCDE (2021), « Perspectives économiques de l’OCDE, n° 109 », Perspectives économiques de l’OCDE : Statistiques et projections (base de données).
Encadré 1.4. Simulation des effets économiques de l’accord commercial conclu entre l’UE et le Royaume-Uni
Depuis le 1er janvier 2021, les règles du marché unique ne s’appliquent plus aux échanges commerciaux entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, qui sont régis par les dispositions du nouvel Accord de commerce et de coopération conclu entre les deux parties. Les échanges de biens restent sans droits de douane ni contingents, mais seront soumis aux règles d’origine, donneront lieu à des formalités aux frontières et devront satisfaire aux exigences de la réglementation de chacun des deux partenaires. Même si cet accord contient des dispositions en matière de coopération bilatérale et de facilitation des échanges, une certaine divergence réglementaire apparaîtra sans doute au fil du temps, créant des obstacles non tarifaires au commerce. Les principes de libre circulation des personnes et de libre prestation de services ont cessé de s’appliquer, et dans chaque pays, l’accès au marché des prestataires de services est subordonné à leur respect des règles nationales. Là encore, cela crée des obstacles aux échanges, même si l’accord va au-delà des dispositions de référence de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
L’outil de modélisation des échanges de l’OCDE (METRO, ModElling TRade at the OECD) a été utilisé pour simuler les effets de cet accord. Le modèle METRO est un modèle d’équilibre général calculable (EGC), qui a été calibré pour cette analyse à 30 régions (la plupart des pays encore membres de l’UE étant considérés isolément), 19 secteurs et 8 facteurs de production. Ces simulations correspondent aux effets à moyen terme (5 à 10 ans) induits dans un scénario où les facteurs de production sont mobiles entre secteurs, mais les ressources globales en main-d’œuvre et en capital restent fixes. Les différents obstacles aux échanges sont modélisés comme une augmentation des coûts commerciaux. Ainsi, pour les mesures non tarifaires affectant les biens, l’augmentation des coûts commerciaux est calibrée comme la moitié de l’équivalent ad valorem de ces mesures sur les biens importés dans l’UE depuis des pays tiers.
La divergence des réglementations et l’alourdissement des formalités aux frontières lors des échanges de biens et de services entre l’UE et le Royaume-Uni se traduiraient par une diminution du PIB de 0.44 % dans l’Union européenne par rapport à un niveau de référence correspondant au maintien du Royaume-Uni dans le marché unique (Graphique 1.11). La fin de la libre circulation des personnes devrait se traduire par une perte de production supplémentaire de 0.1 point de pourcentage. Ces estimations sont certes relativement modestes, mais elles sont probablement prudentes, étant donné que le modèle METRO ne tient pas compte des effets induits sur l’investissement direct étranger (IDE), l’offre de main-d’œuvre ou la productivité.
Tableau 1.2. Événements qui pourraient détériorer sensiblement les perspectives
Facteur de vulnérabilité |
Conséquences possibles |
---|---|
Nouvelles vagues de l’épidémie de COVID-19 due à des variants du virus résistant aux vaccins. |
Les mesures de confinement plus strictes deviendraient récurrentes et l’incertitude s’accentuerait, ce qui aurait des effets négatifs considérables sur la consommation et l’investissement privés. Le chômage et les faillites augmenteraient. |
Envolée des prêts non performants, sur fond de renforcement de l’aversion au risque. |
La distribution et le redéploiement du crédit pourraient être entravés, et les entreprises zombies pourraient proliférer. Le besoin accru de soutien public des banques pourrait accentuer les pressions sur les finances publiques et compliquer la tâche à la Banque centrale européenne (BCE) lorsqu’il s’agira de mettre fin progressivement à ses achats de titres de dette publique. Les portefeuilles de titres de dette souveraine nationale détenus par les banques augmenteraient probablement. |
Lenteur dans la mise en œuvre du plan de relance de l’UE et levée prématurée du soutien budgétaire. |
Une atonie persistante de l’investissement public ralentirait la reprise. Des tensions sur la dette souveraine pourraient resurgir. Si le plan de relance était considéré comme un échec, cela assombrirait les perspectives de cohésion et de poursuite de l’intégration de l’UE. |
Les divergences économiques entre les pays et les régions pourraient s’accentuer
Comme on l’a vu en 2020, les effets de la pandémie devraient rester asymétriques dans l’UE, ce qui pourrait creuser les écarts de prospérité entre pays, même si les perspectives d’une aggravation des divergences sont désormais moins fortes qu’aux premiers stades de la crise (Graphique 1.14). Les différences de spécialisation sectorielle sont un déterminant essentiel de cette asymétrie, les pays du sud de l’Europe étant désavantagés du fait de leur forte dépendance vis-à-vis du tourisme. En outre, ces pays comptent généralement une plus forte proportion de très petites entreprises, qui sont souvent plus vulnérables (OCDE, 2020a ; Doerr et Gambacorta, 2020). À l’inverse, les pays du nord de l’Europe, au tissu économique moins vulnérable, ont également bénéficié de stratégies de dépistage et de traçage mieux dotées en ressources, du moins pendant la première vague de la pandémie. Quant aux pays d’Europe centrale et orientale considérés dans leur ensemble, ils s’en sortent relativement bien, avec toutefois quelques disparités qui tiennent en partie à leur degré de dépendance vis-à-vis de l’industrie automobile, secteur fortement exposé aux perturbations dans les chaînes d’approvisionnement internationales, ainsi qu’à l’intensité variable des vagues de la pandémie depuis l’automne 2020.
Cette asymétrie de l’impact de la pandémie pourrait aggraver les inégalités régionales dans l’Union européenne. Depuis le début des années 2000, les progrès dans la convergence régionale ont été mitigés. Globalement, les disparités du PIB par habitant d’une région à l’autre ont reculé sensiblement jusqu’à la crise financière mondiale, mais beaucoup plus lentement après (graphique 1.15). Le recul global des disparités s’explique par la réduction des inégalités entre pays, grâce au dynamisme de la croissance en Europe centrale et orientale, où la convergence s’est poursuivie même après la crise financière mondiale. En revanche, le sud de l’Europe a continué de perdre du terrain au cours des dix dernières années et les inégalités intrapays se sont même quelque peu creusées, témoignant de meilleurs taux de croissance des régions métropolitaines. Les inégalités territoriales peuvent être source de mécontentement social et politique (Rodríguez-Pose, 2018).
Soutenir la reprise et une plus forte convergence
Favoriser l’investissement et l’innovation
Les politiques budgétaires nationales doivent rester expansionnistes et accroître l’investissement public
Les politiques budgétaires nationales sont essentielles au rétablissement de l’activité après la crise. Si les initiatives prises au niveau européen apportent des financements indispensables et polarisent l’attention sur l’investissement et les réformes, ce dont il faut se féliciter (encadré 1.5), il appartient aux autorités nationales de décider des dépenses à engager pour soutenir la demande globale et promouvoir les réformes structurelles. Il faudra à cet effet mettre en application, rapidement et efficacement, les plans nationaux pour la reprise et la résilience, élaborés au titre de Next Generation EU, mais aussi les autres instruments de planification des investissements cofinancés par des subventions de l’UE, telles que celles mobilisées au titre de la politique de cohésion.
En parallèle, des efforts devront être consentis au niveau de l’UE pour se concentrer sur les réformes facilitant l’investissement et soutenir leur mise en œuvre. Les procédures d’évaluation et de suivi des plans nationaux pour la reprise et la résilience devront s’attacher à leur cohérence interne et leur efficacité à atteindre des objectifs suscitant une forte appropriation au niveau national, et ne pas se muer en un simple exercice bureaucratique et potentiellement source de conflits (Pisani-Ferry, 2021). La priorité devrait aller à des réformes qui lèvent les obstacles à l’investissement (réformes visant les obstacles réglementaires, les procédures d’autorisation, etc.), optimisent le rapport coût-efficacité des investissements (par des marchés publics plus concurrentiels, par exemple) et en augmentent les bénéfices (en renforçant la coordination entre les pays pour améliorer les interconnexions en Europe, par exemple), autant d’aspects qui sont examinés dans cette Étude. La Commission devrait ensuite fournir le soutien technique nécessaire à l’étude et au déploiement des réformes retenues (encadré 1.5).
Ainsi qu’il est précisé dans l’édition 2021 de l’Étude économique consacrée par l’OCDE à la zone euro, il faudrait que les politiques budgétaires nationales conservent une orientation expansionniste jusqu’à ce que la reprise se soit fermement installée. Dans l’intervalle, il faudrait procéder à une révision en profondeur du cadre budgétaire de l’UE, en prenant acte des défauts dans les règles actuelles et en renforçant l’appropriation de ce cadre au niveau national. Les pratiques les plus exemplaires dans chaque État membre de l’UE et dans les pays tiers devraient inspirer ces réformes.
En parallèle, la structure des dépenses budgétaires devrait évoluer vers plus d’investissement public, peu développé ces dix dernières années (graphique 1.16). La nécessité de développer l’investissement devient d’autant plus impérieuse que les évolutions vers la transformation numérique et l’atténuation du changement climatique s’accélèrent. Sans compter que le multiplicateur à court terme de l’investissement public, généralement élevé, fait de celui-ci un instrument efficace pour l’action publique dans les périodes de récession. L’investissement privé est lui aussi resté en demi-teinte pendant une bonne partie de la dernière décennie (ajoutant à l’impact sur le stock de capital), et a de nouveau plongé en 2020.
Encadré 1.5. Le plan de relance « Next Generation EU »
« Next Generation EU » (NGEU) est un plan de relance temporaire doté d’une enveloppe de 750 milliards EUR, destiné à stimuler la reprise de l’activité après la pandémie et à aider à la réalisation des objectifs de l’UE en matière d’environnement et de transformation numérique. La Facilité pour la reprise et la résilience, qui financera des prêts et des subventions pour soutenir les investissements et les réformes, en sera la pièce maîtresse. Next Generation EU apportera par ailleurs des ressources supplémentaires à la politique de cohésion et à un certain nombre d’autres programmes et fonds de l’UE, notamment en faveur du développement rural, de la R-D et de la transition industrielle pour sortir des activités à forte intensité en carbone (tableau 1.3).
Tableau 1.3. Composantes du plan de relance « Next Generation EU » (NGEU)
En milliards EUR, prix de 2018
Rubrique budgétaire |
NGEU |
Subventions autres financées sur le budget 2021-27 de l’UE |
|
---|---|---|---|
subventions |
prêts |
||
Facilité pour la reprise et la résilience |
312.5 |
360.0 |
- |
Politique de la cohésion (1) (ReactEU) |
47.5 |
- |
330.2 |
Fonds pour une transition juste |
10.0 |
- |
7.5 |
Développement rural |
7.5 |
- |
77.9 |
Autres (2) |
12.5 |
- |
84.8 |
Ensemble |
390.0 |
360.0 |
Note : 1. Les ressources NGEU au titre de la politique de cohésion (47.5 milliards EUR) incluent également un complément destiné au Fonds européen pour l’aide aux plus démunis (FEAD), qui ne relève pas de la politique de cohésion.
1. Cette rubrique regroupe les programmes InvestEU, Horizon Europe et RescEU. Les ressources destinées à InvestEU correspondent à des garanties plutôt qu’à des prêts.
Source : Commission européenne (2021).
La ventilation par pays des subventions au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience est établie à partir des chiffres de population, du PIB par habitant, du chômage et de l’impact de la pandémie sur le PIB en 2020-21. En principe, les pays du sud de l’Europe (Grèce, Italie, Portugal et Espagne) devraient recevoir la moitié environ du montant total. Quant aux prêts au titre de la Facilité, ils n’obéissent pas à une clé de répartition, mais ne doivent pas excéder 6.8 % du revenu national brut de chaque pays.
L’accord politique sur le plan de relance NGEU a été trouvé en juillet 2020, et ses modalités de fonctionnement ont été intimement liées à celles du nouveau cadre financier pluriannuel 2021-27 de l’UE. Le règlement de la Facilité, un document essentiel qui porte établissement de la Facilité, est entré en vigueur en février 2021. Après la soumission par les États membres de leurs plans nationaux pour la reprise et la résilience (les « plans ») exposant leur stratégie de réforme et d’investissement, la Commission a deux mois pour les évaluer. Ce n’est qu’après l’étape suivante, à savoir l’approbation des plans à la majorité qualifiée du Conseil, qu’un premier versement de préfinancement, à hauteur d’au maximum 13 % de chaque dotation nationale, pourra être effectué auprès des pays, ce qui pourra prendre encore deux mois. Ces étapes de la procédure sont exécutées à un rythme rapide, la plupart des plans nationaux ayant déjà été approuvés par le Conseil et les premiers versements ayant été effectués en août 2021.
Une condition indispensable, remplie en mai 2021, préalablement à la mise en œuvre du NGEU était la ratification, par tous les États membres, de la Décision relative aux ressources propres. Cette Décision est partie intégrante de l’arsenal législatif du cadre financier 2021-27 et permet à la Commission d’emprunter sur les marchés financiers pour financer le plan de relance. À terme, la mise en place d’un cadre permanent de stabilisation budgétaire commune, par exemple sous la forme d’un régime de réassurance chômage, tel qu’examiné dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée à la zone euro, permettrait d’intervenir avec plus de souplesse et d’efficacité face à des chocs futurs.
Les plans nationaux prévoient de consacrer au minimum 37 % de leurs investissements au climat et 20 % à l’appui de la transformation numérique. Outre la double transition écologique et numérique, les autres domaines éligibles à un financement au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience sont les suivants : croissance intelligente, durable et inclusive et emploi ; cohésion sociale et territoriale ; santé et résilience ; politiques en faveur de la prochaine génération, des enfants et des jeunes, notamment en matière d’éducation et de compétences. Dans tous ces domaines, les plans doivent suivre le principe de « ne causer aucun préjudice (climatique) important. » Concernant les réformes, les plans sont supposés prendre en considération les recommandations adressées spécifiquement à chaque pays.
S’il est louable d’insister sur les réformes structurelles, celles-ci devront être sélectives et s’accompagner, chaque fois que nécessaire, d’un soutien technique. La Direction générale de l’appui aux réformes structurelles (DG REFORM, anciennement Service d’appui aux réformes structurelles) a déjà réalisé de nombreux projets sur l’étude et la mise en œuvre de réformes dans un large éventail de domaines d’intervention et peut donc aider les États membres, au moyen de l’Instrument de soutien technique (STI), à déployer leurs plans de relance Entre autres interventions, la DG REFORM pourrait les aider à renforcer la capacité de leurs administrations nationales à gérer et à absorber les ressources du programme NGEU.
En plus de donner une impulsion temporaire à la demande, le NGEU pourrait accroître de manière permanente le PIB de l’UE. Cela suppose que les subventions et les prêts soient utilisés pour financer des dépenses publiques productives supplémentaires, dans les infrastructures ou la R-D, par exemple, qui attirent l’investissement privé. D’ici 2030, le PIB de l’UE pourrait alors être de 1 à 1.5 % supérieur à ce qu’il serait en l’absence du plan de relance (Bankowski et al., 2021 ; Commission européenne, 2020c).
Les réformes structurelles qui devraient l’accompagner pourraient avoir un impact positif durable non seulement sur le PIB mais aussi sur son taux de croissance. Ainsi, les mesures visant à favoriser la collaboration entre pays en matière de R-D et de projets industriels innovants, analysées dans le Chapitre 2, pourraient se traduire par une hausse continue de la R-D du secteur des entreprises. Une hausse de ces dépenses à hauteur de 0.4 point de PIB (ce qui serait suffisant pour combler près de la moitié de l’écart actuel avec les États-Unis) pourrait, pour donner un ordre de grandeur, engendrer une hausse de 0.6 % du PIB de l’UE par habitant d’ici à 2030 et un multiple de ce pourcentage sur le long terme (Egert et Gal, 2017).
Les besoins d’investissement sont très importants. Rien que pour remplir les objectifs environnementaux et climatiques, les investissements supplémentaires à consentir ont été estimés à 470 milliards EUR par an pour la prochaine décennie (soit 3½ pour cent du PIB de l’UE ; Commission européenne, 2020c), et cela avant même que des objectifs de réduction d’émissions plus ambitieux aient été fixés pour 2030 (voir plus loin). Les investissements dans la transformation numérique ajouteraient 125 milliards EUR par an à ce chiffre (Commission européenne, 2020c). Ces montants dépassent de loin les subventions de l’UE, ce qui rend primordial le fait que celles-ci ne se substituent pas au financement national des investissements publics, mais plutôt le complètent, et que les obstacles et contre-incitations à l’investissement privé soient supprimés.
Priorités d’investissement pour une Europe plus interconnectée
Les priorités d’investissement doivent être hiérarchisées de façon à exploiter les complémentarités entre le public et le privé et attirer ainsi de nouveaux investissements privés (BEI, 2019). Les investissements du secteur privé peuvent affluer une fois que les infrastructures essentielles sont en place, mais également que les obstacles réglementaires ont été levés. En même temps, les investissements doivent aussi tenir compte des externalités transnationales. Plusieurs priorités d’investissement revêtent en effet une dimension européenne, qui exige une coordination entre les pays et une action réglementaire au niveau de l’UE pour assurer l’interopérabilité des infrastructures et éviter la fragmentation du marché.
L’investissement, généralement public, dans les réseaux électriques doit plus que doubler dans les dix prochaines années pour que l’Europe puisse tenir ses objectifs de décarbonation (Commission européenne, 2020d). Le développement des réseaux est une condition préalable indispensable pour intégrer une plus forte proportion de renouvelables dans la production d’électricité, et constitue de ce fait un exemple de premier ordre de la complémentarité entre l’investissement public et privé. Les interconnexions internationales sont un axe essentiel de l’investissement dans les réseaux, et ont également pour avantages de renforcer l’intégration du marché et la sécurité d’approvisionnement. Or, la plupart des grandes économies de l’UE n’ont pas encore atteint le taux de 10 % fixé comme objectif d’interconnexion pour 2020 (graphique 1.17). Ainsi, les interconnexions entre la France et l’Espagne sont encore notoirement insuffisantes. Les réseaux en mer pour l’intégration des énergies renouvelables marines (éolienne, houlomotrice et marémotrice) constituent un autre axe de développement des infrastructures, dont le déploiement optimal exige que les pays se partageant le même bassin maritime se coordonnent. Qu’il s’agisse des réseaux ou de la production d’électricité de sources renouvelables, les procédures d’autorisation doivent être simplifiées : en effet, il n’est pas rare que la construction de lignes électriques transnationales soit bien en retard par rapport à la date prévue pour leur mise en service (Commission européenne, 2020e).
La décarbonation du transport exige elle aussi des investissements, tout en mettant en lumière les avantages de la transformation numérique des réseaux électriques et la nécessité d’une coordination au niveau de l’UE. Un réseau dense de points de recharge est primordial pour le développement de la voiture électrique, et doit se doubler de stations de recharge pour les poids lourds utilisant des combustibles bas carbone comme l’hydrogène (Commission européenne, 2020f). L’adoption des technologies numériques dans les infrastructures de recharge (« recharge intelligente ») permettra de mieux intégrer le système énergétique et de le rendre plus efficient grâce à la modulation de la demande dans la consommation d’énergie et aux flux bidirectionnels (AIE, 2020). Les flux des véhicules vers le réseau pourront ainsi aider à absorber un pic de consommation, ou bien à faire face à une baisse temporaire dans l’approvisionnement du réseau en renouvelables. Parallèlement, les stations de recharge doivent être opérables sur tout le territoire de l’UE : le défaut d’interopérabilité actuel entraîne la fragmentation du marché et constitue un obstacle majeur à une plus large diffusion des véhicules utilisant des combustibles alternatifs. Enfin, la définition de normes communes à l’échelle de l’UE aurait sans doute pour effet de réduire l’incertitude pour les investisseurs privés.
La généralisation du haut débit, alliant qualité et prix abordable, constitue l’un des fondements essentiels de l’innovation et de sa diffusion, et l’un des axes majeurs de la stratégie numérique européenne (Commission européenne, 2020a). Elle est également une condition préalable indispensable au télétravail, lequel réduit au minimum l’impact économique des situations d’urgences de santé publique et aide à répartir les externalités de productivité inhérentes à l’étalement des villes sur de plus vastes territoires périurbains. Des investissements considérables, surtout privés, seront nécessaires pour remplir les objectifs de connectivité fixés par l’UE pour 2025, qui visent des débits de connexion beaucoup plus rapides qu’aujourd’hui (d’au moins 100 Mbps pour l’ensemble des ménages, et 1 000 Mbps - ou 1 gigabit - pour l’ensemble des grandes entreprises et institutions publiques). Quant aux investissements dans le réseau, ils permettront ensuite aux entreprises d’investir dans leur transformation numérique.
Pour réduire les coûts de déploiement du réseau, les autorités publiques pourraient simplifier les procédures d’attribution de licence, faciliter l’accès aux édifices publics (aux toitures, par exemple) pour le déploiement des équipements et promouvoir le partage passif d’infrastructures (de gaines, par exemple) entre opérateurs, ainsi qu’il est envisagé dans le code des communications électroniques européen de 2018 et dans une recommandation récente de l’UE (Commission européenne, 2020g). Les régions rurales et reculées continuent de pâtir d’importants retards de connectivité (graphique 1.8) et risquent d’être peu attractives pour des investissements du secteur privé dans les infrastructures. Les pouvoirs publics pourraient donc investir eux-mêmes, ou bien soutenir les investisseurs privés (OCDE, 2020b). Une autre piste possible pour promouvoir la connectivité consiste pour les pouvoirs publics à favoriser la concurrence dans les télécommunications, laquelle permet de faire baisser les prix sans qu’il soit avéré que cette baisse ait un impact négatif sur l’investissement.
Favoriser l’innovation dans toute l’UE
Que cela soit pour développer des technologies nouvelles pour la transition vers la neutralité climatique, la transformation numérique et d’autres enjeux de société, ou pour se saisir des opportunités qui en découlent pour la compétitivité industrielle, l’UE a besoin d’investir davantage dans la recherche et l’innovation. Cela fait longtemps maintenant que l’UE investit moins que les États-Unis et désormais, moins que la Chine, dans la R-D sur les technologies de l’information et de la communication (TIC) et sur le climat, ainsi que dans la R-D totale des entreprises (BEI, 2019). Sans compter que les synergies entre les initiatives menées par les États membres de l’UE en faveur de l’innovation demeurent limitées. Ainsi qu’il est examiné plus avant au chapitre 2, il serait tout à fait justifié de combiner des financements publics et privés pour promouvoir la collaboration entre pays en matière de R-D et autour de projets industriels très innovants. Les domaines les plus prometteurs en la matière sont les batteries, l’hydrogène propre (deux secteurs dans lesquels des initiatives conjointes sont d’ores et déjà en cours), la cybersécurité et les technologies numériques de santé (Forum stratégique pour les grands projets d’intérêt européen commun (IPCEI), 2019).
Promouvoir une large participation aux projets industriels innovants dans toute l’UE aiderait à en répartir les bénéfices. La convergence régionale exige que les régions plus pauvres montent en gamme dans leur spécialisation productive et qu’elles innovent pour développer des activités nouvelles, en prenant appui sur leurs atouts et leurs forces. Un plus gros effort d’investissement dans la R-D dans ces régions, que la politique de cohésion devrait aider à financer, s’impose pour favoriser l’innovation et la diffusion de la connaissance, et faciliterait les partenariats avec des interlocuteurs plus prospères.
Favoriser l’innovation exige aussi de maintenir des marchés compétitifs, en dépit des nouveaux enjeux de la politique de la concurrence. Par exemple, le régime de contrôle des fusions ne peut pas toujours éviter que de grandes entreprises ne rachètent des concurrents de taille plus modeste pour parer à l’avance à toute concurrence future, donnant parfois un coup d’arrêt au développement des projets innovants de leurs rivaux. En outre, la politique de la concurrence doit être modernisée pour mieux répondre à la transformation numérique de l’économie. Par exemple, de nouveaux outils et de nouvelles réglementations applicables à la concurrence pourraient se révéler nécessaires pour pouvoir s’attaquer aux positions dominantes solidement ancrées sur les marchés numériques, dues notamment à de puissants effets de réseau, à des marchés captifs ou à l’absence d’accès aux données. Le chapitre 2 s’intéresse plus avant à ces questions.
Améliorer l’efficience de l’investissement public
Les bénéfices à moyen et long terme de l’investissement public seront d’autant plus importants que celui-ci générera une demande non pas auprès de fournisseurs inefficients, mais auprès d’entreprises innovantes et très productives, sélectionnées selon des procédures de mise en concurrence. La politique de cohésion, par exemple, y gagnera en efficacité pour promouvoir la convergence régionale. Les procédures de passation de marchés jouent un rôle important à cet égard. Souvent, ces procédures ne sont pas assez compétitives dans les pays de l’UE, où l’on observe une forte prévalence des marchés à soumissionnaire unique et fréquemment, un manque de transparence. Les marchés sont souvent attribués à des fournisseurs du même pays, voire de la même région, que l’acheteur (Herz et Varela-Irimia, 2017). Ces pratiques peuvent faire monter les prix sans qu’il y ait compensation sur d’autres aspects (qualité, innovation ou incidences sur l’environnement), voire elles peuvent alimenter la fraude et la corruption (Cour des comptes européenne, 2015). En renforçant la centralisation des marchés publics et en favorisant le professionnalisme des agents publics concernés et en faisant de la qualité un critère de sélection plus important, les marchés publics deviendront plus concurrentiels et propices à l’innovation. Une plus grande ouverture aux soumissionnaires d’autres pays de l’UE contribuera également à la réalisation de ces objectifs.
Le soutien à l’investissement privé devrait être axé sur des projets parfaitement compatibles avec les objectifs des pouvoirs publics et qui, en l’absence de cofinancement public, ne seraient pas réalisés. La politique de cohésion, par exemple, devrait introduire plus de mise en concurrence dans les procédures de sélection (plutôt que de sélectionner les projets sur la base du « premier arrivé, premier servi »), en mettant l’accent sur la contribution de chacun aux objectifs de développement régional. Il faudrait à cet effet que les capacités administratives soient renforcées dans les agences de gestion, lesquelles devraient aussi s’efforcer d’élargir le nombre de candidatures en adaptant leurs appels à projets à la capacité de réponse des bénéficiaires potentiels et en les aidant à combler leurs déficits de capacités.
Étant donné la multitude des instruments de financement au niveau de l’UE (encadré 1.5), l’efficience des investissements exige également des stratégies intégrées, regroupant des politiques européennes complémentaires. Un exemple en est fourni par l’investissement dans les régions rurales éligibles à des aides au titre à la fois de la politique de développement rural et de la politique de cohésion, dont les interventions ont souvent été mal coordonnées.
Rendre les politiques migratoires davantage propices à la croissance
Les migrations internationales ont souvent un impact positif sur la croissance de l’économie d’accueil, notamment en atténuant les pénuries de compétences. Si des arguments théoriques peuvent étayer le contraire, la plupart des études empiriques constatent des effets positifs de l’immigration sur la croissance (Alesina, Harnoss et Rapoport, 2016 ; Jaumotte, Koloskova et Saxena, 2016), qui sont souvent d’autant plus importants que le niveau de qualification des immigrés surpasse celui des travailleurs nés dans le pays (Dolado, Gloria et Ichino, 1994, OCDE, 2010). Par exemple, les immigrés hautement qualifiés et les étudiants étrangers déjà diplômés ont apporté une contribution positive à l’innovation et aux activités de dépôt de brevet aux États-Unis (Hunt et Gauthier-Loiselle, 2010 ; Kerr et Lincoln, 2010). Les immigrés hautement qualifiés jouent également un rôle important dans le secteur de la santé et contribuent à combler les pénuries de compétences (OCDE, 2015a ; OCDE, 2020c). Ces cinq dernières années, les médecins et infirmiers formés à l’étranger représentaient respectivement 18 % et 7 % environ des personnels soignants dans les pays de l’OCDE, et plusieurs de ces pays ont fait appel à un contingent supplémentaire de professionnels de santé étrangers pour faire face à la crise du COVID-19 (OCDE, 2020c).
D’autres répercussions économiques de l’immigration, par exemple sur l’emploi et les salaires des autochtones et sur les finances publiques, occupent une place importante dans le débat public. Les données empiriques indiquent que l’effet de l’immigration sur les salaires est limité (OCDE/OIT, 2018) et dépend de la structure des qualifications de la main-d’œuvre issue de l’immigration (Borjas, 2014 ; Edo et Toubal, 2015). De même, l’impact de l’immigration sur les finances publiques est proche de zéro en moyenne dans la zone OCDE (OCDE, 2013).
Toutefois en dépit d’impacts économiques globalement modérés et de la baisse des du nombre de demandeurs d’asile (Graphique 1.19), l’immigration reste une question très controversée dont l’importance politique n’a cessé de croître (MPC-OPAM, 2018). Les Européens sont divisés au sujet des conséquences de l’immigration et de leur volonté d’accepter des personnes originaires de pays pauvres non membres de l’UE (graphique 1.20). Cette polarisation de l’opinion s’explique par les inquiétudes liées à un manque supposé de maîtrise de l’immigration et de contrôle des frontières extérieures (Jeannet et al., 2019 ; MPC-OPAM, 2018),), qui laisserait les pays de destination finale dans l’incapacité de déterminer l’ampleur et la composition des arrivées. Ce phénomène a potentiellement des conséquences majeures pour les politiques de l’UE, comme la protection des frontières extérieures (Frontex), la détermination de l’État membre chargé d’examiner une demande d’asile (règlement de Dublin), le dispositif de la carte bleue européenne pour attirer une main-d’œuvre hautement qualifiée, ou encore l’acceptation de l’espace Schengen de libre circulation. Avec le ralentissement de la pandémie et la reprise des déplacements internationaux, les arrivées d’immigrés vont probablement augmenter, ce qui pourrait raviver des tensions dans l’UE, en particulier dans un contexte de chômage encore élevé.
La répartition des demandeurs d’asile entre les États membres de l’UE reste une question épineuse. En 2016, un ensemble de propositions a été présenté pour réformer le régime d’asile européen commun (RAEC), mais le processus s’est enlisé en raison d’un désaccord politique portant notamment sur la réforme du règlement de Dublin. Ce règlement définit les critères permettant de déterminer l’État membre chargé d’examiner une demande de protection internationale, cette responsabilité étant généralement attribuée au premier pays par lequel les demandeurs d’asile entrent dans l’UE. Ces dispositions font peser une charge disproportionnée sur les pays se trouvant en première ligne. Un projet de réforme visant à fixer des quotas obligatoires pour la relocalisation des demandeurs d’asile a reçu une vive opposition de la part de certains États membres en 2016 (MEDAM, 2018). Afin de sortir de cette impasse politique, la Commission européenne (2020h) a récemment proposé un nouveau Pacte sur la migration et l’asile, dont l’objet principal est de remplacer le règlement de Dublin par un cadre assoupli, permettant de répartir plus équitablement les responsabilités et fondé sur la participation obligatoire, mais souple, des États membres. Il s’agit d’une initiative bienvenue, qui pourrait également permettre de conclure les négociations sur l’harmonisation et une plus grande convergence des décisions des conditions d’octroi de l’asile, ce point faisant partie de l’ensemble de propositions datant de 2016 sur lequel un accord temporaire a été trouvé mais qui n’a pas abouti au sujet du règlement de Dublin. Le processus d’harmonisation vise à remédier aux fortes disparités actuelles entre les États membres en matière de procédures d’asile et de propension à accorder l’asile. Ainsi, en 2020 le taux de reconnaissance du statut de réfugié a oscillé entre 35 % dans certains pays et 100 % dans d’autres. En ce qui concerne les Afghans, ces disparités ont été encore plus importantes. La transformation du Bureau européen d’appui en matière d’asile en une Agence de l’Union européenne pour l’asile, pour laquelle un accord a été intervenu récemment, permettra à cet organisme de mieux contribuer à la gestion des flux migratoires et d’apporter un soutien accru aux pays membres.
Contrer l’immigration illégale dans l’UE tout en préservant l’accès des réfugiés à une protection nécessite de coopérer étroitement avec les pays d’origine et de transit. Cette action suppose également de protéger plus fermement les frontières extérieures de l’UE, ce à quoi vont contribuer les projets de renforcement de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex). En effet, Frontex a récemment commencé à recruter les effectifs de son corps permanent, que la Commission propose de porter à 10 000 membres d’ici 2024. La coopération avec les pays d’origine en matière de retour, de réadmission et de réintégration s’est souvent avérée insuffisamment efficace, ces pays voyant souvent le retour forcé de leurs ressortissants comme une question difficile à défendre sur le plan politique. À cette fin, le nouveau Pacte sur la migration et l’asile (Commission européenne, 2020h) propose de renforcer la coordination et la coopération avec les pays tiers en créant un système commun de l’UE en matière de retour, lequel prévoit un rôle accru pour l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, la désignation d’un nouveau coordinateur de l’UE chargé des retours, ainsi qu’une stratégie de retour volontaire et de réintégration. En outre, la coopération en matière de retour, de réadmission et de réintégration s’inscrira dans le cadre de partenariats avec les principaux pays tiers d’origine et de transit.
En vue de renforcer la coopération avec les pays d’origine, les partenariats de compétences dans le cadre d’une formation professionnelle, qui débouchent sur un emploi soit dans le pays d’origine soit dans l’UE, constituent un outil important (Triandafyllidou, Bartolini et Guidi, 2019). Ces partenariats présentent un avantage supplémentaire, car ils peuvent également contribuer à combler les pénuries de compétences. L’accord de partenariat entre l’Allemagne et la Tunisie en matière de compétences dans le secteur de la santé en est un bon exemple (Clemens, 2015). Dans le cadre de ces partenariats, il est important de faciliter le retour (obligatoire ou volontaire) des immigrés après une certaine période d’activité en Europe. À cette fin, les immigrés qui retournent dans leur pays d’origine pourraient être épaulés dans leur recherche d’emploi (MEDAM, 2018). Le nouveau Pacte sur la migration et l’asile prévoit de mettre en place des partenariats de talents avec les principaux pays non membres qui répondront aux besoins de main-d’œuvre et de compétences de l’UE.
L’Europe a réussi à attirer un nombre croissant de travailleurs hautement qualifiés grâce au dispositif de la carte bleue européenne (Graphique 1.21) – un système de permis de travail à l’échelle de l’UE pour les ressortissants de pays non membres – mais les effectifs restent très faibles. Par exemple, le nombre de ressortissants de pays tiers admis au titre de la carte bleue européenne en 2018 représente moins de 0.01 % de la population totale de l’UE (sans tenir compte des dispositifs nationaux ; voir ci-dessous), alors qu’au Canada et en Australie les personnes qui arrivent chaque année constituent 0.4 et 0.5 % de la population, respectivement (Commission européenne, 2018a). En outre, la pénurie de compétences, en particulier dans le domaine du numérique, a été signalée de façon persistante comme une question très problématique dans les enquêtes auprès des entreprises, compromettant l’investissement et la compétitivité future de l’UE (BEI, 2019 ; BEI, 2021). L’efficacité du dispositif de la carte bleue européenne a été affaiblie par ses conditions restrictives et par la concurrence de dispositifs nationaux offrant des conditions beaucoup plus favorables aux entreprises (MEDAM, 2018). De fait, la plupart des pays membres admettent davantage de travailleurs hautement qualifiés par le biais de dispositifs nationaux qu’au titre de la carte bleue européenne (OCDE/UE 2016). En 2016, la Commission a proposé d’assouplir les conditions d’admission au titre de la carte bleue européenne et de supprimer les dispositifs nationaux analogues (MEDAM, 2018). Toutefois, certains pays se sont opposés à cette suppression (Commission européenne, 2018a, Tableau 1.4). L’UE devrait en effet assouplir les conditions d’accès à la carte bleue européenne. En outre, au lieu de supprimer les dispositifs nationaux, l’UE devrait permettre aux travailleurs hautement qualifiés qui bénéficient d’un dispositif national d’accéder à la carte bleue européenne par le biais de formalités réduites. Cette démarche faciliterait un accès ultérieur à la carte bleue européenne et favoriserait la mobilité des immigrés hautement qualifiés dans l’ensemble de l’UE.
Tableau 1.4. Recommandations antérieures et mesures prises concernant les politiques migratoires
Rendre effective la simplification proposée des conditions d’éligibilité et des procédures d’obtention de la Carte bleue européenne pour les travailleurs migrants très qualifiés. |
Après avoir été dans une impasse depuis 2018, les négociations relatives à la proposition de 2016 de la Commission de réviser la Directive sur la carte bleue européenne ont repris fin 2020 après l’adoption de la Communication de la Commission relative à un nouveau Pacte sur la migration et l’asile. |
Intensifier la lutte contre la corruption
La corruption a un coût économique et social important. Elle renchérit les procédures de marchés publics et peut donc causer de larges pertes d’efficience de la dépense publique. En outre, les distorsions qui en résultent peuvent peser sur l’investissement privé et brider l’innovation, ce qui a pour effet de ralentir la croissance économique (Mauro, 1995 ; Schleifer et Vishny, 1993). Certaines estimations donnent à penser que la corruption pourrait coûter à l’UE plus de 1 % de son PIB par an (European Parliamentary Research Service, 2016). Plus généralement, elle pèse sur beaucoup d’autres dimensions du bien-être. Elle porte atteinte à la crédibilité des institutions publiques, tend à creuser les inégalités sociales, voire peut mettre en danger la santé et la sécurité publiques lorsqu’elle permet de contourner les règles fixées dans ces domaines (OECD, 2015b ; Svensson, 2005). Toutes ces considérations sont de plus en plus d’actualité dans le contexte de la pandémie où la nécessité de mettre en œuvre rapidement des mesures d’action publique, parfois en urgence, accroît les risques de corruption (OCDE, 2020d) et où les exigences accrues relatives aux budgets publics placent au tout premier plan l’efficacité de la dépense.
Le niveau de perception de la corruption étant très variable d’un pays de l’UE à l’autre, il est d’autant plus important que le déploiement des ressources issues d’un pot commun, comme celles issues du budget de l’UE et du plan pour la reprise et la résilience, s’accompagne d’un renforcement des mesures anticorruption. En moyenne, le niveau de perception de la corruption dans l’UE et dans l’ensemble des pays de l’OCDE est assez proche (graphique 1.22). Ce niveau varie cependant amplement selon les pays de l’UE dont certains comptent parmi les mieux classés de l’OCDE alors que les autres font partie des moins performants. Ces indices étant des mesures subjectives, une certaine prudence est de mise. À cet égard, des initiatives devraient être prises pour élaborer des approches quantitatives de l’évaluation des phénomènes de corruption. En effet, en plus des autres coûts engendrés par la corruption, l’ampleur de ces disparités au sein de l’UE peut saper la confiance mutuelle entre les pays et les dissuader d’aller encore plus loin dans leur intégration économique.
La lutte contre la corruption est une compétence commune de l’UE et de ses États membres et pose des problèmes de coordination considérables, dans la mesure où chaque pays est responsable, à son niveau, des actions répressives, des poursuites et des mesures judiciaires à prendre. Les initiatives de l’UE en matière de lutte contre la corruption sont généralement centrées sur la protection des intérêts financiers de l’Union en ce qui concerne le budget de l’UE, tant sous l’angle des dépenses que sous celui des recettes. Même si cette priorité est plus ciblée que ne l’est le phénomène de la corruption en général, ces initiatives sont aussi susceptibles d’aboutir à une amélioration des cadres juridiques et opérationnels de lutte contre la corruption de chaque pays membre. Ainsi, certaines d’entre elles couvrant les domaines de la prévention et de la détection, du respect de l’État de droit et de la protection des lanceurs d’alerte (voir plus loin) peuvent renforcer l’efficacité de la lutte contre la corruption dans les affaires de corruption nationales, même lorsque celles-ci n’ont aucune conséquence directe sur le budget de l’UE.
En 2017, la Directive relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal (« Directive PIF ») a été adoptée en remplacement de la Convention PIF de 1995. Pour mieux protéger les intérêts financiers de l’UE, la Directive PIF harmonise les définitions, les sanctions et les délais de prescription (après lesquels il n’est plus possible d’engager des poursuites) applicables à certaines infractions pénales portant atteinte à ces intérêts (comme la fraude, le détournement de capitaux et le blanchiment de capitaux). La date limite de transposition de la Directive PIF dans le droit interne a expiré le 6 juillet 2019. Fin 2020, 24 États membres ont fait savoir qu’ils avaient transposé l’intégralité de ses dispositions.
En 2017 a également été mis en place le Parquet européen qui a pour mission d’enquêter sur les infractions énumérées dans la Directive PIF, d’engager des poursuites et d’ouvrir une action en justice à l’encontre de leurs auteurs, prérogatives qui relevaient jusque-là des autorités nationales. Actuellement, 22 pays de l’UE participent au Parquet européen, qui est entré en fonction le 1er juin 2021. Le règlement modifié relatif à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), entré en vigueur en janvier 2021, n’améliore pas seulement l’efficacité des enquêtes administratives menées par l’OLAF, mais simplifie également son articulation avec le Parquet européen. Tous deux seront en outre aidés par le Centre européen de lutte contre la criminalité financière et économique (EFECC) créé au sein d’Europol en juin 2020 en vue de mutualiser les compétences dans ce domaine et de fournir un soutien opérationnel aux États membres et aux instances de l’UE (Europol, 2020).
Ces réformes contribuent à mettre fin à certaines limitations qui entravaient la lutte contre la fraude et la corruption visant le budget de l’UE. Les enquêtes administratives de l’OLAF sont en effet bridées par des contraintes opérationnelles. Grâce à la révision du règlement relatif à l’OLAF, l’Office a désormais accès aux informations sur les flux financiers et les comptes bancaires, accès qu’il n’avait pas auparavant. En outre, certains États membres, invoquant leur droit interne, ont mis en doute la compétence de l’OLAF concernant la conduite de contrôles sur place (pourtant prévue par les règlements de l’UE). Le règlement révisé précise dans quelle mesure le droit de l’UE ou le droit national s’applique s’agissant de l’exécution de ces contrôles. De plus, lorsque l’OLAF conclut des enquêtes et transmet ses conclusions aux pays concernés pour que ceux-ci ouvrent une action judiciaire, ses recommandations ne sont guère suivies d’effet : de 2015 à 2019, 39 % des affaires communiquées aux autorités judiciaires nationales seulement ont donné lieu à des mises en examen (OLAF, 2020).
En dépit de ces avancées bienvenues, l’efficacité des enquêtes dépendra encore du respect, par les pays membres, de leur obligation d’aider l’OLAF. D’autres modifications seraient également souhaitables, notamment celles visant à renforcer la recevabilité des preuves, recueillies par l’OLAF pour le compte du Parquet européen, par les tribunaux nationaux (Cour des comptes européenne, 2019a). Si la mise en service du Parquet européen contribue à renforcer la répression judiciaire, en particulier dans les affaires concernant plusieurs États membres, toutes les difficultés n’auront pas disparu pour autant sachant qu’il est nécessaire de tenir compte de l’articulation entre les tribunaux nationaux et les instances de l’UE, mais aussi entre le droit interne et le droit de l’UE (Erkelens et al., 2015 ; Weyembergh et Brière, 2016 ; Bachmaier Winter, 2018).
Pour protéger encore plus le budget de l’UE, la Commission a proposé un règlement pour la période 2021-27, relatif à un régime général de conditionnalité et visant à protéger le budget de l’Union (baptisé « conditionnalité de l’État de droit »), qui doit permettre de suspendre les paiements au titre du budget de l’Union ou d’imposer d’autres mesures financières à des États membres en cas de défaillances généralisées de l’État de droit. La suspension des paiements ou l’imposition d’autres mesures pourraient ainsi être activées si ces défaillances devaient nuire, par exemple, aux poursuites visant des actes de fraude et de corruption en rapport avec l’exécution du budget de l’UE, ou à une coopération effective et rapide avec l’OLAF et le Parquet européen. Cette proposition a suscité certaines inquiétudes quant au pouvoir discrétionnaire qui serait ainsi dévolu à la Commission (Cour des comptes européenne, 2018 ; Vita, 2018) ainsi qu’une très vive controverse entre les pays. Le règlement, tel qu’approuvé, apporte plus de clarté sur les sources d’information (notamment les rapports de l’OLAF et du Parquet européen) dont la Commission peut disposer pour mener à bien ses évaluations, limite le champ des éventuelles défaillances à examiner et fixe des règles de vote plus exigeantes en Conseil concernant une suspension des paiements ou toute autre mesure à imposer à un État membre. Malgré cela, la controverse ne s’est pas éteinte.
En guise de compromis, les pays se sont entendus sur un ensemble de principes d’application du règlement nouvellement adopté, ce qui a permis son adoption en même temps que d’autres instruments juridiques du Budget 2021-27 de l’UE. Si le texte du nouveau règlement n’a pas changé, celui-ci ne s’appliquerait qu’aux engagements budgétaires pris dans le cadre du budget 2021-27 ou du plan « Next Generation EU » d’après les conclusions du Conseil européen (Conseil européen, 2020), ce qui exclut les paiements exceptionnels financés sur le budget 2014-20. En outre, en vertu du nouveau règlement, les manquements à l’État de droit visés exigent qu’il y ait une relation directe avec les répercussions négatives que ces manquements ont eues sur les intérêts financiers de l’UE. Étant donné que deux États membres ont contesté la validité du nouveau règlement, la Cour de justice de l’Union européenne rendra un arrêt qui sera pris en compte par la Commission. Le moment venu, il conviendra d’évaluer l’efficacité des mesures prises en vertu du nouveau règlement et d’envisager, le cas échéant, de durcir cette règle de conditionnalité de l’État de droit.
Des améliorations sont également encore possibles dans le domaine de la prévention et de la détection des fraudes et de la corruption. Ayant pour objet la détection des personnes et des entités représentant un risque pour les intérêts financiers de l’Union, le système de détection rapide et d’exclusion (EDES) de l’UE permet d’empêcher ces personnes et entités d’accéder aux fonds de l’Union relevant d’un mode de gestion directe ou indirecte, tandis que les États membres de l’UE devraient également tenir compte de ces informations lorsqu’ils attribuent des marchés dans le cadre d’un mode de gestion partagée. Cela étant, le nombre d’affaires rendues publiques est très limité étant donné que conformément aux dispositions de la Charte des droits fondamentaux, la législation de l’UE limite la publication d’informations aux affaires les plus graves (au nombre de neuf seulement à la date de septembre 2020, contre des centaines d’entités ayant publiquement fait l’objet d’une exclusion par la Banque mondiale, par exemple). Un recours accru aux outils d’exploration des données (voir le chapitre thématique) et une élaboration plus systématique, par les États membres, de stratégies officielles de lutte contre la fraude et de mesures de prévention de la fraude, accompagnées de mécanismes d’évaluation de leur efficacité, sont d’autres leviers permettant de renforcer la prévention et la détection (Cour européenne des comptes, 2019b).
Le blanchiment de capitaux a également fait l’objet de directives successives de l’UE depuis 1990. Toutefois, en partie du fait du minimum d’harmonisation recherchée, l’efficacité des mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux est toujours jugée très variable selon les États membres (graphique 1.23). En 2018, la 5e Directive de lutte contre le blanchiment de capitaux a modifié les règles d’accès aux registres des bénéficiaires effectifs, mis en place par la 4e Directive antiblanchiment de 2015, afin que le public ait accès à des informations sur les bénéficiaires effectifs de personnes morales, tout en élargissant le périmètre des structures juridiques relevant de l’obligation d’enregistrer les noms de leurs bénéficiaires effectifs. La 5e Directive antiblanchiment a également amélioré l’efficacité de la coopération entre les autorités nationales. Toutefois, de récentes affaires très médiatisées de blanchiment de capitaux ont mis en évidence la nécessité d’intensifier la supervision de la lutte contre le blanchiment de capitaux, qui relevait jusque-là de l’Autorité bancaire européenne (ABE), en sa qualité de plateforme de coordination et de convergence des instances de surveillance nationales. En réponse à cette nécessité, un plan d’action de la Commission européenne visant à renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, présenté par la Commission en mai 2020 (Commission, 2020i), prévoit d’introduire plus d’harmonisation dans les règles et d’instituer directement au niveau de l’UE une autorité de supervision de la lutte contre le blanchiment de capitaux. Il convient de saluer cette initiative, car elle aboutira à la création d’un cadre d’action plus solide sur le plan réglementaire et institutionnel. L’une des grandes priorités de l’autorité de supervision instituée au niveau de l’UE est d’améliorer la surveillance dans les affaires transnationales, les dispositions actuelles n’étant pas satisfaisantes (Commission européenne, 2020i). En tout état de cause, cette nouvelle autorité de supervision devrait être dotée de ressources adaptées à ses missions. Un projet de législation présenté en juillet 2021 vise à mettre en œuvre le plan d’action : il propose notamment la création d’une nouvelle autorité européenne de lutte contre le blanchiment d’argent, chargée de la surveillance directe, dès 2026, de certains établissements financiers sélectionnés en fonction de leur catégorie de risque et de leurs activités transfrontières.
La lutte contre le blanchiment de capitaux, les infractions sous-jacentes et le financement du terrorisme gagnerait aussi à une exécution plus efficace des mesures de gel et de confiscation des biens mal acquis. Dans l’UE, selon les estimations, seulement 1 % des produits tirés d’activités criminelles est confisqué (Europol, 2016) et la coopération transnationale est entravée par les différences entre les droits nationaux. Un règlement de 2018, relatif à la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation, a pour objet de s’attaquer à ces obstacles et la création du Centre européen de lutte contre la criminalité financière et économique (EFECC), rattaché à Europol, vise à favoriser la coopération des services de répression en la matière.
Par ailleurs, des mesures rigoureuses de protection des lanceurs d’alerte sont essentielles pour accroître les probabilités de détection des agissements répréhensibles. Une Directive de 2019 accroît la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union (qui couvre donc le blanchiment de capitaux et les infractions concernant le budget de l’UE, entre autres) et harmonise les dispositifs de protection des États membres. Ainsi, certains d’entre eux n’assurent que la protection des lanceurs d’alerte travaillant dans le secteur public quand d’autres n’offrent de protection que dans les affaires de corruption. Les États membres sont désormais appelés à transposer rapidement toutes les dispositions de cette Directive dans leur droit interne (d’ici décembre 2021). Ils devraient en outre tirer parti de cette transposition pour renforcer également leur dispositif national de protection des lanceurs d’alerte signalant des infractions à leur droit interne.
Gros plan sur le changement climatique et l’économie circulaire
Ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre à l’horizon 2050
L’un des objectifs du Pacte vert pour l’Europe est de ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre de l’UE d’ici à 2050. Sa réalisation nécessitera d’accélérer sensiblement la réduction des émissions (graphique 1.24), car d’après les projections, elles devraient baisser de seulement 60 % à cette échéance par rapport aux niveaux de 1990 en cas de politiques inchangées (Commission européenne, 2019a). L’UE est également convenue d’objectifs intermédiaires plus ambitieux que ceux définis précédemment, dont la réduction des émissions nettes non plus de 40 %, mais d’au moins 55 %, à l’horizon 2030.
Progresser vers l’objectif de neutralité en gaz à effet de serre nécessitera une stratégie ciblant un large éventail de secteurs, dont la production d’électricité, la construction, les transports, l’industrie et l’agriculture (OCDE, 2019). Il faudra à la fois électrifier la plupart des utilisations finales de l’énergie et produire la majeure partie de l’électricité à partir de sources décarbonées. Des énergies faiblement carbonées devront être mises au point pour les secteurs difficiles à électrifier, le captage, le stockage et l’utilisation du carbone (CSUC) devront être développés et l’efficacité énergétique devra progresser de façon générale. Le récent train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 » (Fit for 55) visant à atteindre l’objectif de réduction des émissions de 55 % d’ici à 2030 contient des propositions législatives dans bon nombre de ces domaines (Box 1.6 ; Commission européenne, 2021a).
Cette section se penche sur la décarbonation des transports et de l’agriculture, secteurs dans lesquels la réduction des émissions s’avère peu aisée, et sur celle des bâtiments, où l’efficacité énergétique joue un rôle primordial. Elle analyse également l’importance d’un recensement clair des activités respectueuses de l’environnement ainsi que de la réglementation et de la surveillance financières pour orienter l’investissement vers des actifs plus verts. Ce sont là des défis que doit relever la majeure partie, voire la totalité de l’Union européenne.
À l’inverse, d’autres défis lancés par la décarbonation ont une dimension plus régionale en ce sens qu’ils sont concentrés dans des territoires particuliers et ont de lourdes conséquences pour la spécialisation de la production. C’est le cas, par exemple, de l’abandon de l’extraction de charbon et de la sortie des industries énergivores, que nous examinons dans le chapitre thématique. Il conviendrait d’élaborer des plans de transition à long terme pour les régions concernées, en faisant largement intervenir les parties prenantes. Ces plans devraient accorder une attention particulière au recyclage et à l’amélioration des compétences, de même qu’aux mesures d’aide à la recherche d’emploi et à l’existence de filets de protection sociale adaptés pour les travailleurs ayant perdu leur emploi, qui sont souvent relativement âgés dans les secteurs à fortes émissions de carbone.
Encadré 1.6. Concrétiser le Green Deal européen : le paquet politique « Ajustement à l’objectif 55 » (Fit for 55)
En juillet 2021, la Commission européenne a présenté Fit for 55, un ensemble de propositions pour que l'UE réduise ses émissions de GES d'au moins 55 % d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990 et atteigne la neutralité climatique d'ici 2050. Les propositions de la Commission incluent des la tarification du carbone et des réglementations plus strictes pour réduire les émissions, avec un accent majeur sur le secteur des transports.
Le système d'échange de quotas d'émission (ETS) de l'UE sera renforcé par l'élargissement de son champ d'application aux émissions du secteur maritime, une diminution plus rapide du plafond annuel des émissions et la suppression progressive des quotas gratuits, y compris dans le secteur de l'aviation. Les États membres sont tenus d'affecter tous leurs revenus du SEQE à des projets liés au climat et à l'énergie.
Les émissions du transport routier et des bâtiments seront tarifées à partir de 2026 grâce à la création d'un système d'échange de droits d'émission distinct basé sur la distribution des carburants dans ces secteurs. Les plafonds d'émission conduiront à une réduction de 43 % des émissions ciblées en 2030 par rapport à 2005.
Des normes d'émissions plus strictes seront appliquées dans le secteur des transports. D'ici 2030, les émissions moyennes des voitures neuves (fourgonnettes) devraient être inférieures de 55 % (50 %) à celles de 2021, contre un précédent objectif de réduction de 37,5 % (31 %). En outre, la réduction devrait atteindre 100 % d'ici 2035. Cela s'accompagnera de nouvelles exigences pour les États membres de fournir des points de recharge électrique et de ravitaillement en hydrogène adéquats. Des exigences plus strictes et un accès plus facile aux carburants durables s'appliqueront également aux secteurs de l'aviation et du transport maritime.
Un mécanisme d'ajustement aux frontières carbone s'appliquera à une sélection de produits à forte intensité de carbone (fer et acier, ciment, engrais, aluminium et production d'électricité) pour aligner les prix du carbone pour la production nationale et les importations et éviter les fuites de carbone. Ce mécanisme sera conforme aux règles de l'OMC et sera mis en place progressivement à partir de 2026, après une période de transition de trois ans au cours de laquelle les importateurs des biens sélectionnés devront déclarer les émissions intégrées respectives. L'allocation gratuite de quotas ETS aux secteurs couverts sera progressivement supprimée.
La directive sur la taxation de l'énergie sera mise à jour pour fixer des taux minimaux de taxation de l'énergie qui encouragent l'efficacité énergétique et l'utilisation de carburants durables. Plusieurs exonérations fiscales et taux réduits sur les combustibles fossiles seront progressivement supprimés.
De nouveaux objectifs ambitieux sont fixés pour l'élimination du carbone (y compris une stratégie forestière de l'UE visant à planter 3 milliards d'arbres dans toute l'UE d'ici 2030), la part des énergies renouvelables (40 % de la production d'ici 2030) et l'efficacité énergétique (les objectifs d'économie d'énergie étant presque doublé, avec des objectifs annuels de rénovation des bâtiments publics).
Un Fonds social pour le climat soutiendra les ménages vulnérables et les micro-entreprises dans la transition vers une meilleure efficacité énergétique et des systèmes de chauffage, de refroidissement et de mobilité plus propres. Financé par le budget de l'UE à hauteur de 25 % des recettes attendues du nouveau SEQE pour le transport routier et les bâtiments, le Fonds pourra apporter une aide temporaire aux revenus et contribuer au financement des investissements dans l'efficacité énergétique.
Les différences internationales en matière de tarification du carbone pourraient entraîner une réorientation des industries à forte intensité de carbone vers les juridictions où le prix du carbone est bas, ce qui pourrait atténuer les effets d’une hausse des prix nationaux du carbone sur les émissions mondiales de CO2 à cause du phénomène de délocalisation de carbone (qui voit la baisse des émissions au niveau national compensée en partie par une hausse des émissions à l’étranger). Il existe pour le moment peu de données sur ce phénomène de délocalisation de carbone induite par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE), mais le phénomène pourrait devenir plus préoccupant si les prix du carbone augmentaient en Europe, mais pas dans le reste du monde (Dechezleprêtre et al., 2018), ce qui serait le signe de différences en matière d’ambition climatique. Dans ce contexte, un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) pourrait être utile pour limiter la délocalisation des émissions de carbone, avec pour avantage de ne pas affaiblir les incitations nationales à diminuer les émissions. Ce MACF devrait être conçu de manière conforme aux règles de l’OMC et en tenant compte à la fois de la teneur en carbone des importations et du prix du carbone qui a déjà été payé dans le pays de production. Afin d’éviter toute impression de protectionnisme et de garantir des conditions équitables, le prix du carbone imposé aux importateurs et aux producteurs étrangers devrait être aussi proche que possible du prix du carbone payé par les producteurs nationaux, et les coûts administratifs pour importateurs et les producteurs étrangers devraient être réduits au minimum. Le renforcement de la coopération internationale en matière de réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre devrait rester la priorité de l’action publique dans ce domaine.
Dans le cadre du train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 », la Commission européenne a proposé récemment de créer un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui devrait être mis en place progressivement à compter de 2026 et s’appliquer dans un premier temps à un nombre limité de secteurs énergivores et exposés aux échanges commerciaux qui sont couverts par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’UE (Commission européenne, 2021b). Le mécanisme proposé vise à appliquer aux importations une tarification du carbone équivalente à celle qui porte sur la production nationale. À cette fin, les importateurs achèteront, au même prix des quotas du SEQE, un nombre de certificats carbone correspondant à la quantité d’émissions générées par la production de la quantité de biens importés et les producteurs hors UE auront la possibilité de déduire les prix du carbone déjà payés dans des pays tiers. Durant la période 2026-2035, la mise en œuvre progressive du MACF se fera au même rythme que la suppression progressive de l’attribution de quotas d’émission à titre gratuit dans les secteurs concernés, de façon à éviter une redondance des instruments visant à lutter contre la délocalisation des émissions de carbone et l’avantage qui en découle pour les producteurs nationaux (OCDE, 2020e). La possibilité de déclarer les émissions effectives générées lors de la production (au lieu d’utiliser des valeurs par défaut) et de déduire le prix du carbone payé dans les pays d’origine renforce les incitations à produire de manière respectueuse de l’environnement dans ces pays, mais les mécanismes de vérification et de certification requis pourraient s’avérer laborieux.
La tarification du carbone doit s’accompagner d’interventions ciblées dans certains secteurs
Étant donné l’augmentation des émissions des transports enregistrée ces dernières années (graphique 1.25), des mesures tarifaires et réglementaires décisives devront être prises pour atteindre les objectifs. Dans le cadre d’un train de mesures plus général, inclure le transport dans le Système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) permettrait d’assurer que les transports contribuent à la réalisation des objectifs d’émission à un coût raisonnable (Tableau 1.5). Dans le même ordre d’idées, le train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 » propose la création d’un système d’échange de quotas d’émission distinct pour les carburants utilisés dans le transport routier et pour le chauffage et le refroidissement des bâtiments. Les récentes réformes du SEQE-UE existant, notamment celles concernant la réserve de stabilité du marché, ont rendu le système plus efficace, augmenté le prix des quotas (graphique 1.26) et réduit l’instabilité. Le train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 » prévoit aussi d’autres réformes, dont une réduction plus rapide du plafond global d’émissions, l’intégration du transport maritime et la suppression progressive de l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit, ce qu’il convient de saluer.
Tableau 1.5. Recommandations antérieures et mesures prises pour lutter contre le changement climatique
Augmenter le prix des émissions de gaz à effet de serre et envisager d’intégrer dans le Système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) toutes les utilisations de combustibles, notamment les transports. |
Les États membres ont convenu de relever la cible de la réduction des émissions de gaz à effet de serre à 55 % par rapport à 1990 (contre un précédent objectif de réduction fixé à 40 %). Pour parvenir à ces réductions supplémentaires, la Commission a présenté en juillet 2021 un train de mesures complet (« Ajustement à l’objectif 55 ») dans le but de réviser, s’il y a lieu, tous les instruments d’action pertinents liés au climat. Ce train de mesures comprend des réformes du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) existant, telles que la réduction du plafond global d’émissions, l’intégration du transport maritime et l’élimination progressive de l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit, y compris au secteur de l’aviation. Il prévoit également la création d’un système d’échange de quotas d’émission distinct pour les carburants utilisés dans le transport routier et pour le chauffage et le refroidissement des bâtiments. |
Relever les taux d’imposition minimums des utilisations de combustibles fossiles n’entrant pas dans le périmètre du SEQE, en particulier dans les cas où ces taux sont actuellement faibles ou nuls. |
La Commission a présenté en juillet 2021 une proposition de révision de la directive sur la taxation de l’énergie, notamment une modification de la structure des taux et une rationalisation du recours aux exonérations et allégements fiscaux optionnels. |
Pour décarboner le transport, des instruments réglementaires et des incitations tarifaires devraient être activés ensemble et des changements plus systémiques de la mobilité (grâce aux formules de covoiturage fondées sur les technologies numériques, examinées ci-dessous, par exemple) devraient être encouragés. Le segment des voitures particulières produit la plus grande part des émissions imputables à la combustion d’énergie dans le secteur des transports (graphique 1.25), et c’est aussi celui où les technologies décarbonées sont les plus facilement accessibles. L’intégration proposée des transports routiers dans un système d’échange de quotas d’émission et la promotion de la concurrence dans la fourniture d’électricité pour recharger les véhicules renforceraient l’incitation tarifaire en faveur des voitures électriques. S’agissant des instruments de réglementation, le train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 » prévoit l’établissement de normes d’émission à moyen terme plus ambitieuses pour les voitures particulières et les camionnettes neuves, qui devraient tous devenir à zéro émission à partir de 2035 (encadré 1.6)Cette obligation est bienvenue : sachant que la vie utile d’une voiture est de 15 ans en moyenne et que l’échéance pour ramener à zéro les émissions nettes est fixée à 2050, l’arrêt des ventes de voitures neuves à moteur thermique en 2035 éviterait une dépréciation prématurée des modèles achetés neufs après cette date. Plusieurs pays s’étaient déjà engagés à mettre fin à ces ventes, le plus souvent entre 2030 et 2040. Selon une étude récente, l’achèvement de la transition en 2030 permettrait de réduire les coûts, sans même parler des bénéfices considérables que cela procurerait en termes de baisse de la pollution de l’air (UK Committee on Climate Change, 2019). À mesure de l’électrification du parc automobile, des réformes fiscales progressives dans le secteur routier, prévoyant une structure évolutive des taxes et des recettes qui proviendraient de plus en plus souvent de la taxation de la distance parcourue, pourraient renforcer la viabilité à long terme de la politique fiscale (OCDE/FIT, 2019).
L’expérience de la Norvège illustre certains des arbitrages qu’impose la décarbonation des transports. Ce pays se classe au premier rang mondial pour le nombre de voitures électriques rapporté à la population et ambitionne de mettre fin dès 2025 aux ventes de voitures autres que celles à émissions nulles. Grâce à l’exonération de TVA et de taxe d’immatriculation et aux tarifs réduits de péage et de stationnement qui leur sont accordés, les véhicules électriques y coûtent souvent moins cher que les modèles équivalents à moteur essence ou diesel. Cependant, la réduction des émissions de carbone se fait à un coût implicite élevé qui la rend inefficiente, comme expliqué dans l’Étude économique 2019 de la Norvège publiée par l’OCDE. Le risque de tensions sociales pour cause de flambée des prix des carburants a été évité. Cela étant, les avantages fiscaux offerts aux acquéreurs de voitures électriques ont surtout profité aux ménages aisés.
Malgré les ambitions environnementales élevées de la politique agricole commune et une réduction de 20 % des émissions de GES dans l’agriculture depuis 1990, quasiment aucun progrès n’a été accompli depuis les 15 dernières années (graphique 1.24). Durant la période 2014-20, près de 20 % des paiements directs aux agriculteurs étaient censés concourir à l’action climatique, et au moins 30 % des dépenses de développement rural, contribuer à des objectifs environnementaux (climatiques et autres) (Cour des comptes européenne, 2020). Toutefois, l’efficacité des instruments sous-jacents a été insuffisante (DeBoe, 2020). Comme les critères de versement des paiements de verdissement (qui font partie des paiements directs) correspondaient en grande partie à des pratiques déjà appliquées par les agriculteurs (le maintien de prairies permanentes, par exemple), ces paiements n’ont guère fait bouger les choses (Banque mondiale, 2017 ; Henderson et al., 2020). D’autres paiements directs (système de conditionnalité) ont bien souvent été attribués sur la base de critères peu ambitieux et avec une surveillance insuffisante (Commission européenne, 2018b ; DeBoe, 2020). C’est pour des raisons similaires, et aussi parce que l’attention s’est portée davantage sur les pratiques agricoles que sur les résultats environnementaux, que les mesures agroenvironnementales appliquées dans le cadre de la politique de développement rural n’ont contribué que modestement à la réduction des émissions (Commission européenne, 2018b ; Henderson et al., 2020). Surtout, certains paiements directs qui sont laissés à la discrétion des États membres et largement employés restent liés à la production de produits particuliers et ont tendance à être préjudiciables au climat ; c’est notamment le cas des subventions en faveur des ruminants, animaux d’élevage qui constituent une importante source d’émissions de méthane (Henderson et Lankoski, 2019).
Conformément au Pacte vert pour l’Europe et aux objectifs fixés pour parvenir à un système alimentaire durable, tel que prévu dans la stratégie « De la ferme à la fourchette » (Commission européenne, 2020j), il est envisagé, en vertu du récent accord politique relatif à la politique agricole commune 2021-27, de renforcer le lien entre les paiements directs aux agriculteurs et l’amélioration des résultats environnementaux (au travers de « programmes écologiques » auxquels les pays doivent allouer en général au moins 25 % de leur enveloppe de paiements directs). Cette démarche est bienvenue et les pays devraient utiliser ce nouvel instrument pour renforcer les incitations à réduire les émissions de méthane d’origine animale, notamment au moyen de nouvelles méthodes d’alimentation. De telles incitations auraient aussi pour effet de réduire le risque de transfert d’émissions de carbone par l’intermédiaire des importations si, comme cela est souhaitable, les paiements directs au titre de la production sont progressivement éliminés (Jansson et al., 2020). Par ailleurs, les États membres devraient mettre fin à la pratique encore très répandue consistant à subventionner les carburants et combustibles à usage agricole (OCDE, 2019a).
Les bâtiments entrent pour 40 % dans la consommation d’énergie, et l’amélioration de leurs performances énergétiques est donc essentielle pour progresser vers la décarbonation. L’efficacité énergétique des habitations est aussi un important vecteur de santé et de bien-être en ce qu’elle améliore la qualité de vie des occupants (OCDE, 2019b), en particulier ceux qui n’ont pas aujourd’hui les moyens de se chauffer suffisamment. À compter de 2021, tous les bâtiments neufs à l’intérieur de l’UE doivent avoir une « consommation d’énergie proche de zéro », même si tous les États membres n’ont pas transposé cette obligation de la même façon (Climate Action Tracker, 2018). En 2018, il a en outre été décidé que tous les bâtiments devront respecter ce critère en 2050. Pour atteindre cet objectif, le taux annuel de rénovation, qui varie actuellement entre 0.4 % et 1.2 % selon les États membres, devra au minimum doubler (Commission européenne, 2019a). À cet égard, le train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 » propose d’exiger du secteur public qu’il rénove 3 % de ses bâtiments chaque année. Une plus grande uniformité et une application plus rigoureuse de la prescription de consommation d’énergie quasi nulle des bâtiments auraient pour effet d’améliorer l’information et d’éviter un morcellement du marché dans l’UE.
Les investissements et les réformes destinés à faire progresser les performances énergétiques des bâtiments devraient être prioritaires dans le cadre des plans de relance nationaux. Sur le long terme, les investissements en faveur de l’efficacité énergétique sont souvent largement amortis (AIE, 2018) grâce aux avantages qu’ils procurent aux propriétaires (augmentation de la valeur de leur bien) et aux occupants (baisse de la consommation d’énergie). La rénovation en profondeur des bâtiments publics de tous les niveaux d’administration est l’occasion d’ouvrir la voie à une meilleure intégration des différents vecteurs énergétiques (électricité, chaleur...) et des secteurs consommateurs (bâtiments, industrie...) (AIE, 2020). Par exemple, le chauffage et le refroidissement peuvent être planifiés en exploitant les synergies avec les filières de recyclage et les industriels locaux. Qui plus est, les actions portant sur l’efficacité énergétique devraient être combinées à l’adoption des principes de circularité tout au long du cycle de vie des bâtiments pour réduire la consommation de matériaux, comme on le verra plus loin. En plus de favoriser la création d’emplois dans les secteurs spécialisés, la rénovation des bâtiments publics peut aider à démontrer aux propriétaires privés les avantages d’une meilleure efficacité énergétique. Pour promouvoir l’investissement privé dans la rénovation énergétique, les pouvoirs publics peuvent utiliser, éventuellement en association, des subventions, des prêts, des garanties et des services d’assistance technique. Il convient en outre de lever les obstacles réglementaires à la rénovation des logements locatifs, et ce en autorisant les propriétaires sur les marchés locatifs réglementés qui investissent pour améliorer les performances énergétiques à augmenter les loyers, comme c’est le cas au Danemark et en Allemagne, par exemple.
Un renforcement des incitations tarifaires s’impose par ailleurs, sachant que les combustibles de chauffage sont souvent faiblement taxés (OCDE, 2019a). Dans le cadre de révision de la directive sur la taxation de l’énergie, qui s’inscrit aussi dans le train de mesures « Ajustement à l’objectif 55 », il est envisagé d’éliminer progressivement des exonérations et allégements fiscaux qui reviennent à subventionner la consommation d’énergies fossiles. En outre, l’intégration proposée des bâtiments dans un système d’échange de quotas d’émission aidera à mettre les incitations tarifaires en phase avec les objectifs de réduction des émissions de l’UE. Comme dans le cas des mesures destinées à favoriser les investissements évoquées ci-dessus, un soutien ciblé aux ménages défavorisés sera indispensable. La proposition de créer un Fonds social pour le climat pour remédier aux répercussions sociales négatives du nouveau système d’échange de quotas d’émission pour les bâtiments et le transport routier est donc à saluer. La proposition de créer un Fonds social pour le climat (encadré 1.6) pour faire face aux impacts sociaux négatifs du nouvel ETS pour les bâtiments et le transport routier est donc la bienvenue.
Orienter les financements publics et privés vers des investissements durables
Pour mobiliser des financements publics et privés en faveur de la transition vers une économie bas carbone, il faut commencer par recenser clairement les activités écologiquement viables. Ce recensement sert, par exemple, de base pour l’émission d’instruments financiers verts tels que les obligations ou les prêts, et il réduit au minimum le risque d’écoblanchiment (c’est-à-dire d’affirmations trompeuses concernant le caractère durable d’un produit d’investissement). La stabilité de la réglementation demeure cruciale : à changer les critères réglementaires, on risque de modifier le profil risque-rendement des investissements sur le cycle de vie des projets et de saper ainsi la confiance des investisseurs (BIAC, 2016). Dans ces conditions, l’adoption en 2020 de la taxinomie de l’UE a été judicieuse. Pour être considérée comme durable dans le cadre de ce système de classification, une activité économique doit contribuer de manière substantielle à au moins un des six objectifs environnementaux définis (parmi lesquels l’atténuation du changement climatique et la transition vers une économie circulaire), et elle ne doit nuire de façon significative à aucun d’entre eux. Les critères techniques de sélection correspondant à chaque objectif seront définis dans des actes délégués élaborés en 2021 et 2022, ce qui permettra de dresser concrètement la liste des activités économiques durables.
La taxinomie représente un important outil de verdissement des dépenses budgétaires de l’UE. Trente pour cent du budget 2021-27 (et du plan de relance « Next Generation EU ») sera consacré à la lutte contre le changement climatique, contre 20 % dans le budget 2014-20. Cependant, il a été reproché à la méthodologie de traçage des dépenses climatiques employée par la Commission européenne de surévaluer sans doute la contribution réelle du budget, surtout dans le cas de la politique agricole commune (Cour des comptes européenne, 2020). Ainsi, dans le cadre de cette politique et d’autres, les dépenses préjudiciables au climat ne sont pas comptabilisées. Il est primordial d’éviter que le budget de l’UE finance des investissements incompatibles avec la transition vers une économie bas carbone, du moins lorsque ces investissements n’ont aucune externalité positive forte par ailleurs ou qu’il existe d’autres solutions moins émettrices de carbone. De manière plus générale, les considérations environnementales devraient être systématiquement prises en compte dans les plans budgétaires nationaux, moyennant la promotion des pratiques de budgétisation verte et des marchés publics verts.
Par ailleurs, l’investissement dans les activités bas carbone profiterait d’une meilleure évaluation et d’une meilleure communication des risques liés à la durabilité pour les entreprises faisant l’objet des investissements et les participants aux marchés financiers. Les événements météorologiques extrêmes comme les inondations et les tempêtes, les feux de forêt et l’élévation du niveau des mers (graphique 1.27) causent des dégâts dont le coût pourrait atteindre 10 % du PIB mondial en 2100 (OCDE, 2015c), et entraînent une érosion des valeurs des garanties et des actifs et une hausse des engagements d’assurance. Outre ces risques physiques, il existe aussi des risques de transition. Ceux-ci découlent des politiques publiques et des avancées technologiques liées au processus d’ajustement à une économie bas carbone, et ils engendrent des actifs échoués (qui, parce qu’ils émettent des quantités importantes de carbone, doivent être passés en charges avant la fin de leur vie utile économique). Étant donné que beaucoup d’actifs ont une vie utile longue (bâtiments, centrales électriques ou même, comme évoqué plus haut, voitures), il importe de s’assurer que les investissements sont compatibles avec les objectifs de décarbonation.
La publication d’informations sur les risques liés à la durabilité en est encore à un stade peu avancé, mais elle progresse. En vertu de la directive sur la publication d’informations non financières, les entreprises cotées de plus de 500 salariés, dont les banques et les sociétés d’assurance, sont tenues depuis 2018 de publier des informations sur leurs politiques en matière de performance environnementale et sociale et de diligence raisonnable. En 2019, la Commission a publié des lignes directrices non contraignantes pour la notification d’informations relatives au climat conformément à cette directive. Elles reprennent les recommandations concernant les pratiques exemplaires formulées par le Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat (TCFD), et comportent des indicateurs reposant sur la taxinomie de l’UE. Dans le guide sur les risques liés au climat et les risques environnementaux qu’elle a publié en 2020 (BCE, 2020b), la Banque centrale européenne indique attendre des banques qu’elles respectent au minimum ces lignes directrices. Même si elles s’améliorent, les informations publiées par les banques en 2019 étaient encore loin d’être conformes à ces normes (BCE, 2020c). En 2022, la BCE procédera à un contrôle complet des pratiques des banques dans ce domaine. Au cours des derniers mois, la Commission a pris de nouvelles mesures pour améliorer la publication d’informations en matière de durabilité, dont un projet de loi visant à réviser la directive sur la communication d’informations non financières (proposition de directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises) et un acte délégué relatif à la taxonomie de l’UE concernant la divulgation de la part du chiffre d’affaires, des dépenses et des activités de financement et d’investissement des sociétés financières et non financières allouée à des activités économiques écologiquement viables (conformes à la taxonomie). En vertu de ces mesures, un plus grand éventail d’entreprises seront tenues de publier des informations conformément à la taxonomie.
Des données granulaires et de qualité devront être publiées pour permettre un test de résistance et éventuellement l’imposition de volants de fonds propres (CERS, 2016). Le prochain test de résistance prudentiel, que la BCE effectuera en 2022, portera également sur les risques liés au climat, ce qui est judicieux, mais ambitieux. Il faudra commencer par préciser les liens entre risques climatiques et stabilité financière. Il conviendra en outre d’allonger la période de projection (sachant que les tests de résistance portent généralement sur les risques susceptibles de se concrétiser dans les trois à cinq ans seulement) et de recourir à des méthodologies prospectives fondées sur des scénarios plutôt qu’à des analyses statistiques reposant sur des données rétrospectives (NGFS, 2018 ; Banque de France, 2019 ; BIS, 2019). Conformément à sa nouvelle stratégie de politique monétaire, évoquée dans l’Étude économique de la zone euro de l’OCDE, la BCE prévoit de perfectionner ses outils d’analyse pour évaluer les incidences du changement climatique dans le cadre d’un plan d’action détaillé sur le changement climatique à l’horizon 2024.
Parallèlement, il est nécessaire de prendre de nouvelles initiatives pour élaborer des normes mondiales pour la publication d’informations financières relatives au climat et à l’environnement. Des initiatives comme la Plateforme internationale sur la finance durable (IPSF), un forum de dialogue qui rassemble désormais l’UE et 16 pays tiers, sont utiles à cet égard. Les dernières années ont vu proliférer une multitude de cadres réglementaires, d’indicateurs et de méthodologies sur la publication d’informations, ce qui crée un risque d’éparpillement au niveau mondial pour l’élaboration des rapports sur le développement durable (OCDE, 2020f). D’importantes lacunes restent à combler au niveau des connaissances dans des domaines comme les taxinomies de la finance durable, avec une différenciation appropriée entre activités "vertes" et "grises", et les méthodologies permettant d’évaluer les incidences financières des risques environnementaux, en particulier à long terme. Même si l’attention porte dans un premier temps sur des normes pour la publication d’informations sur l’impact des risques climatiques et environnementaux sur la performance financière et la stabilité du système financier, il convient de s’intéresser aussi à l’impact des entreprises sur l’environnement, lequel peut avoir des incidences financières sur celles-ci au fil du temps.
Améliorer l’efficacité d’utilisation des ressources en évoluant vers une économie circulaire
La transition vers une économie plus circulaire peut faire baisser la consommation de matières premières et éviter ainsi toute une série de répercussions environnementales liées à leur extraction et à leur transformation. Ces répercussions, qui touchent le climat, la biodiversité et l’eau, ainsi que la santé par le biais de la pollution de l’environnement (OCDE, 2012), sont appelées à s’intensifier en cas de politiques inchangées ; d’ici à 2060, la progression des revenus et la croissance démographique, en particulier dans les pays pauvres, entraîneront une forte hausse de la demande mondiale de matières (graphique 1.28). En évitant le gaspillage des matières et en encourageant leur réutilisation, leur recyclage et leur utilisation partagée, une économie circulaire contribue à la réalisation d’un large éventail d’objectifs de développement durable (ODD), dont ceux relatifs à l’eau propre, aux villes durables, à la consommation et à la production responsables, à la lutte contre les changements climatiques et à la protection de la vie aquatique et terrestre.
Dans l’UE, la consommation de matières par habitant calculée sur la base de la demande finale (l’« empreinte matières ») a eu tendance à augmenter depuis 2000 (graphique 1.29, partie A). L’utilisation de matières est inférieure à l’empreinte matières, et l’écart correspond aux matières extraites et transformées pour produire les biens importés (graphique 1.29, partie B). Les minéraux non métalliques, qui servent principalement dans la construction, représentent le gros de la consommation de matières premières. Même si leur extraction et leur transformation polluent moins à masse égale que celles des métaux, ils ont d’importantes incidences environnementales durant leur cycle de vie (Wilts et al., 2014). Le béton, par exemple, émet de grandes quantités de gaz à effet de serre et il est difficile à décarboner. Il a un impact non négligeable sur la demande d’énergie, l’acidification des sols et l’utilisation des terres (OCDE, 2019c).
En moyenne, l’UE recycle une part plus élevée des déchets ménagers et en enfouit une proportion moindre que l’OCDE dans son ensemble (graphique 1.29, partie C). La part des produits hors d’usage recyclés atteint 40 %. Les programmes de responsabilité élargie des producteurs, qui font assumer aux producteurs de certains produits collectivement la responsabilité de leur gestion et de leur recyclage en fin de vie, ont été efficaces pour faire progresser le recyclage (OCDE, 2018). Malgré tout, les matières recyclées ne satisfont que 12 % de la demande (Agence européenne pour l’environnement, 2019). Dans les États membres de l’UE, les mesures réglementaires et les initiatives des entreprises ont porté principalement sur la gestion des déchets et le recyclage. La prévention des déchets au travers d’une action renforcée ciblant les premiers stades, comme la conception des produits, pourrait être plus avantageuse.
Pour aller plus loin, la Commission européenne a adopté deux plans d’action pour une économie circulaire, en 2015 puis en 2020 (encadré 1.7). Le second s’inscrit dans une stratégie plus vaste qui englobe aussi le Pacte vert pour l’Europe et les objectifs d’innovation et de développement industriels. Il annonce de nouvelles pistes d’action, comme la conception de produits économes en ressources et la mise à profit de la transformation numérique. Outre les plastiques, il cible d’autres chaînes de valeur qui posent d’importants problèmes de durabilité, comme la construction, le textile et l’électronique.
Encadré 1.7. Le plan d’action pour une économie circulaire présenté par l’UE en 2020
Le nouveau plan d’action pour une économie circulaire (Commission européenne, 2020k) fait fond sur le précédent et envisage les principales priorités suivantes :
Rendre de plus en plus durables les produits mis sur le marché de l’UE en définissant des critères portant sur des caractéristiques comme la longévité, la réutilisabilité, la réparabilité, la recyclabilité et la teneur en matières recyclées.
S’assurer que les consommateurs ont accès à des informations sur la longévité et la réparabilité des produits, notamment au moyen d’outils numériques.
Appliquer des mesures sectorielles dans les chaînes de valeur à fort potentiel de circularité, comme l’électronique et les TIC, les batteries et les véhicules, les emballages, les matières plastiques, le textile, la construction et les bâtiments, ainsi que l’alimentation.
Réduire les déchets et les transformer en matières premières secondaires de qualité pour lesquelles il existe un marché fonctionnel.
La fiscalité pourrait améliorer les incitations en faveur de l’efficacité d’utilisation des ressources
Des taxes sur les matériaux peuvent permettre d’internaliser les coûts environnementaux et créent des incitations en faveur d’activités économiques circulaires (Bibas et al., 2021). Il ressort de simulations macroéconomiques (Chateau et Mavroeidi, 2020) que la taxation de l’utilisation de matières premières primaires peut faire augmenter l’emploi dans les économies où les activités d’extraction ne jouent pas un rôle majeur, surtout si les recettes ainsi levées servent à alléger les impôts sur le travail. Des destructions d’emplois concentrées géographiquement seraient toutefois possibles du fait de la demande moindre de certaines qualifications. C’est pourquoi les pouvoirs publics devraient veiller à offrir des possibilités de revalorisation des compétences, y compris d’apprentissage tout au long de la vie, et des politiques régionales seraient nécessaires à l’appui des réformes structurelles (chapitre 2).
Les taxes sur les matières se heurtent à des limites dictées par l’économie politique et sont compliquées à concevoir. Si tous les pays ne les appliquent pas, l’érosion de la compétitivité peut entraîner une baisse de l’emploi net. La taxation des matières contenues dans les biens – y compris importés – destinés à la consommation finale pourrait atténuer les craintes pour la compétitivité, mais risque d’être impossible dès lors qu’on ne connaît pas la teneur en matières de chaque produit. Certaines solutions applicables consisteraient à fixer des taxes plancher sur les matériaux de construction non recyclés (Wilts et O’Brien, 2019) ou sur une utilisation non durable des plastiques. Les recettes fiscales ainsi levées pourraient financer, par exemple, un allégement de la fiscalité du travail. La construction est une activité qui n’est guère délocalisable en dehors de l’UE. Au Danemark, au Royaume-Uni et en Suède, les taxes appliquées aux matières premières primaires destinées à la construction ont fait baisser la consommation de matières premières (Soderholm, 2011 ; Stahel, 2013). En outre, l’établissement d’un inventaire des subventions dommageables à l’environnement dans les États membres de l’UE pourrait renforcer la dynamique en faveur de leur élimination (OCDE, 2019d). Un tel inventaire ne devrait pas se limiter aux subventions explicites aux énergies fossiles, mais devrait aussi intégrer les mesures de tarification en dessous du coût et les avantages fiscaux en rapport avec l’utilisation de biens ou de matières écologiquement sensibles, comme l’eau d’irrigation et les voitures de société. Des taxes de ce type et la suppression progressive des subventions dommageables à l’environnement pourraient s’inscrire dans le cadre d’une application plus ferme du principe pollueur-payeur pour plus d’efficacité dans la réalisation des objectifs environnementaux.
La transition vers une économie circulaire appelle des mesures pour abaisser les coûts d’information et de transaction
Vu les limites auxquelles se heurte l’application de taxes correctrices, d’autres instruments devraient être employés pour améliorer l’efficacité d’utilisation des ressources, tels que des normes. Lorsqu’elles sont bien conçues, celles-ci peuvent de surcroît être une source d’avantage compétitif (Bundgaard et al., 2014). Elles peuvent par exemple encourager l’innovation et permettre des économies de ressources dans les entreprises en aval. En imposant certaines normes aux produits liés à l’énergie, la directive de l’UE sur l’écoconception des produits a eu des retombées positives pour l’environnement. L’Écolabel européen a également eu des effets bénéfiques en permettant aux fabricants de certifier d’eux-mêmes que leurs produits répondent à certains critères environnementaux, comme la teneur en matières recyclées. Ces normes pourraient être étoffées avec, par exemple, des exigences de longévité et de recyclabilité, ce qui pourrait stimuler les modèles économiques circulaires et la réalisation des objectifs de circularité (Bundgaard et al., 2014). Le nouveau plan d’action pour une économie circulaire envisage des mesures en ce sens, ce qu’il convient de saluer (encadré 1.7)
Les mesures d’information sur la longévité des biens ont une influence notable sur les comportements de consommation (Börkey et Laubinger, 2021) en ce qu’elles corrigent des défaillances du marché qui empêchent les consommateurs et les entreprises en aval de choisir des produits de meilleure qualité. En l’absence d’informations sur les produits, les marchés s’en remettent à la réputation, laquelle dépend du pouvoir de marché des producteurs (Kreps, 1990). Pour informer sur la longévité des biens, il faut pouvoir s’appuyer sur une méthodologie solide (Börkey et Laubinger, 2021).
Les technologies numériques peuvent contribuer à réduire les coûts d’information et de transaction et encourager ainsi les activités économiques circulaires (Barteková et Börkey, 2021). Par exemple, les informations sur l’origine d’un produit, sa composition, ses possibilités de réparation et de démontage et sa gestion en fin de vie pourraient être consignées dans un passeport numérique (Commission européenne, 2019b ; 2020k), dans l’esprit de la proposition soumise récemment d’un passeport numérique pour les batteries. Les codes et étiquettes numériques permettent le traçage des matières et des composants le long de la chaîne de valeur. Les technologies numériques favorisent en outre des modèles économiques circulaires innovants. Par exemple, un système de mobilité partagée à la demande en temps réel, coordonné au moyen d’une plateforme numérique (et combiné à d’autres technologies comme l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique), peut répondre aux besoins de mobilité quotidiens satisfaits par les voitures en réduisant de près de 90 % le nombre de véhicules dans les villes, tout en améliorant la connectivité et en réduisant la pollution (FIT, 2018), à condition qu’il remplace pleinement l’autosolisme. La Commission européenne pourrait promouvoir un projet pilote en vue de la mise en place de solutions de mobilité partagée fondées sur les technologies numériques.
Tableau 1.6. Recommandations issues du chapitre Principaux éclairages sur l’action publique
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
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Soutenir la reprise et développer le potentiel de croissance |
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Favoriser l’investissement pour permettre les transitions écologique et numérique |
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Il a fallu environ un an pour préparer le plan de relance de l’UE. Les plans de relance nationaux associant investissement et réformes structurelles devraient permettre d’accélérer la reprise après la crise, mais aussi accroître le potentiel de croissance de l’UE, ce qui nécessitera de sélectionner rigoureusement les projets. |
Mettre en œuvre rapidement les plans nationaux pour la reprise et la résilience, afin d’engager des réformes structurelles et de réaliser des investissements fondés sur de solides analyses coûts-avantages. |
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L’investissement public a été modeste au cours de la dernière décennie, et parvenir à la neutralité climatique nécessitera des investissements massifs, avec une importante marge de coordination au niveau de l’UE ainsi qu’entre les secteurs public et privé. |
Investir dans les interconnexions européennes, par exemple les réseaux électriques et les infrastructures de recharge intelligentes pour l’électrification des transports. |
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Investir dans les infrastructures numériques et dans l’énergie nécessite souvent des autorisations compliquées à obtenir. |
Lever les obstacles à l’investissement privé à l’appui des transitions climatique et numérique en simplifiant les procédures d’autorisation. |
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Accroître la résilience face aux menaces sanitaires |
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La pandémie de COVID-19 a mis au jour l’impréparation face aux menaces sanitaires internationales et les lacunes dans la capacité à mobiliser rapidement des financements considérables pour la recherche médicale. D’une manière générale, les procédures sont lentes et lourdes. |
Mettre sur pied une agence autonome chargée de financer et de coordonner les réponses du secteur public et du secteur privé aux menaces sanitaires, y compris en matière de R-D. |
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Rendre les politiques migratoires davantage propices à la croissance |
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Le programme de Carte bleue européenne attire moins de travailleurs hautement qualifiés que des mécanismes similaires au niveau des États membres, ce qui réduit l’attrait de l’Europe et la mobilité entre les pays. |
Faciliter l’accès à la carte bleue pour les travailleurs bénéficiant déjà de mécanismes nationaux similaires. |
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La coopération avec les pays d’origine et de transit pour lutter contre l’immigration illégale et faciliter le retour et la réadmission s’est souvent révélée inefficace. |
Favoriser les partenariats de compétences dans le cadre d’une formation professionnelle avec les pays d’origine, lutter contre les pénuries de qualifications dans l’UE et prendre des mesures pour faciliter le retour des migrants après une période d’activité en Europe. |
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Intensifier la lutte contre la corruption |
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La corruption et la fraude nuisent à la croissance économique, affaiblissent les institutions et amoindrissent la qualité des dépenses publiques, y compris de celles qui sont financées sur le budget de l’UE. La plupart des leviers d’action pertinents en la matière sont contrôlés au niveau national. |
Renforcer les effets nationaux de lutte contre la corruption et la fraude, notamment en assurant une transposition rapide et complète des directives pertinentes, et en développant la coopération avec les organes de l’UE spécialisés dans cette lutte. Suspendre les paiements au titre du budget de l’UE ou toute autre mesure si les manquements visés à l’État de droit sont avérés. Évaluer, le moment venu, l’efficacité des mesures prises et envisager, le cas échéant, de durcir la règle de conditionnalité de l’État de droit. |
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Malgré une succession de directives, l’UE reste vulnérable au blanchiment de capitaux. Un projet de législation visant à lutter contre ce phénomène a été présenté en juillet 2021. |
Mettre en place une autorité de surveillance directe chargée de la lutte contre le blanchiment de capitaux au niveau de l’UE et intensifier la coopération entre les autorités nationales. |
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La protection des lanceurs d’alerte varie fortement d’un État membre de l’UE à l’autre. Une Directive européenne de 2019 étend la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’UE et harmonise la protection entre les pays. |
Veiller à ce que cette Directive soit transposée intégralement et rapidement dans les législations nationales et renforcer la protection des lanceurs d’alerte, y compris lorsque des manquements à une législation nationale sont en cause. |
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
---|---|
Parvenir à la neutralité climatique et évoluer vers une économie circulaire |
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Le Système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) couvre 40 % environ du total des émissions de gaz à effet de serre de l’UE. Le transport est responsable de plus de 20 % des émissions de l’UE, et leur réduction est particulièrement difficile. Les bâtiments représentent 40 % de la consommation d’énergie et une part notable de l’utilisation des ressources. En juillet 2021, la Commission européenne a proposé d’intégrer les émissions des transports maritimes dans le SEQE-UE et de mettre en place un nouveau système d’échange de quotas d’émission distinct pour le transport routier et les bâtiments. |
Envisager d’étendre la couverture du système d’échange de quotas d’émission de l’UE, notamment au transport et aux bâtiments. Renforcer les normes réglementaires en matière d’efficacité énergétique. |
L’investissement dans les activités bas carbone bénéficierait d’une amélioration de l’évaluation des risques liés au climat et d’une meilleure communication de ces risques aux entreprises et aux marchés financiers. Le récent projet de législation prévoit de rendre obligatoire la publication d’informations plus détaillées pour un plus large éventail d’entreprises. |
Rendre obligatoire la diffusion d’informations exhaustives sur les risques liés au climat et à l’environnement pour les intermédiaires financiers et les grandes entreprises non financières. Nouer une coopération internationale pour fixer des normes mondiales sur la publication de ces informations. |
Taxer les principales matières primaires et les pratiques non durables incite à réduire la consommation de ressources naturelles ainsi que les impacts environnementaux de celle-ci. |
Aller vers la tarification de l’utilisation des ressources naturelles et de ses impacts environnementaux, par exemple en introduisant une taxe harmonisée sur les matériaux de construction non recyclés ou sur une utilisation non durable des plastiques. |
L’absence d’information sur les matériaux utilisés et sur les caractéristiques des produits limite la capacité des marchés à recycler les biens et à les utiliser plus longtemps. Les technologies numériques peuvent contribuer à réduire les coûts d’information et de transaction et encourager des modèles économiques innovants. |
Rendre obligatoire l’utilisation d’outils numériques pour fournir des informations sur les produits, y compris sur leurs possibilités de recyclage et de réparation. Mener des projets-pilotes pour mettre en place des modèles économiques circulaires innovants, par exemple des systèmes de mobilité partagée fondés sur les technologies numériques. |
Malgré les obligations environnementales dont elles sont assorties, les aides directes aux agriculteurs en vertu de la Politique agricole commune n’ont absolument pas permis, à ce jour, de réduire les émissions. Durant la période 2021-27, la mise en œuvre par les pays d’un nouvel outil (« programmes écologiques ») pourrait permettre de remédier à ce problème. Les aides couplées à la production de produits spécifiques sont liées à des émissions plus fortes. |
Supprimer les aides aux agriculteurs liées à la production de produits spécifiques, et renforcer le lien entre les paiements directs aux agriculteurs et l’amélioration des résultats environnementaux, y compris la réduction des émissions de méthane d’origine animale. |
Les taux d’imposition effectifs du carbone hors consommation routière, concernant par exemple les combustibles utilisés pour le chauffage ou l’agriculture, sont souvent trop bas. La proposition de révision de la directive sur la taxation de l’énergie vise à éliminer progressivement certaines exonérations et réductions fiscales liées à la consommation d’énergie. |
Supprimer les exonérations et allégements fiscaux qui reviennent à subventionner la consommation d’énergies fossiles et les autres subventions préjudiciables à l’environnement. |
La hausse du prix du carbone en Europe peut déplacer la production à forte intensité de carbone vers les pays où les prix sont moins élevés, ce qui entraîne une fuite des émissions de carbone et peut pénaliser certaines régions de façon disproportionnée. Pour lutter contre la délocalisation des émissions de carbone, la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières a été proposée en juillet 2021. |
Dans le cadre des règles de l’Organisation mondiale du commerce, envisager des mesures de nature à prévenir le risque de délocalisation de carbone. |
Les informations sur la longévité des biens peuvent avoir une influence notable sur les comportements de consommation et peuvent ainsi contribuer à réduire l’utilisation de matières. |
Élaborer une méthodologie de communication d’informations sur la durabilité d’une sélection de produits et l’intégrer dans la Directive de l’UE sur l’écoconception des produits. |
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Annex 1.A. Progrès accomplis en matière de réformes structurelles
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS |
MESURES PRISES DEPUIS LA PRÉCÉDENTE ÉTUDE (2018) |
---|---|
Réformer le budget de l’UE pour favoriser une croissance plus inclusive |
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Envisager d’améliorer l’efficacité des dépenses et d’augmenter les recettes, et réévaluer la manière dont est financé le budget européen. |
Pour la période 2021-27, certaines réformes des recettes budgétaires de l’UE ont déjà été adoptées, comme une nouvelle contribution nationale basée sur les déchets d’emballages plastiques non recyclés et une simplification des ressources propres fondées sur la TVA. De plus, de nouvelles ressources propres seront introduites pour contribuer au financement du programme « Next Generation EU ». La Commission s’est engagée à proposer la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et d’un prélèvement sur le numérique. Elle proposera également une ressource propre fondée sur le système d’échange de quotas d’émission. Par ailleurs, la Commission proposera d’autres ressources propres nouvelles qui pourraient inclure une taxe sur les transactions financières et une contribution financière liée au secteur des entreprises, ou une nouvelle base commune d’imposition des sociétés. |
Supprimer progressivement les paiements basés sur la production au titre de la Politique agricole commune. |
Après avoir fortement augmenté sur la période 2014-18, les paiements basés sur la production se sont globalement stabilisés en 2019. |
Augmenter les dépenses de recherche-développement (R-D) |
Pour 2021-27, le budget du programme Horizon Europe (84.9 milliards EUR aux prix de 2018, y compris un complément venant de Next Generation EU) est supérieur de 9 % au budget initial d’Horizon 2020 (son prédécesseur pour la période 2014-20) et supérieur de 30 % au budget d’Horizon 2020 ajusté des réductions ultérieures de ressources et des dépenses allouées au Royaume-Uni. La Communication de la Commission sur l’Espace européen de la recherche 2020 : a) propose de réaffirmer l’objectif d’investissement dans la R-D de 3 % du PIB de l’UE ; b) propose un nouvel objectif d’effort public représentant 1.25 % du PIB et devant être atteint d’ici 2030 par les États membres ; c) intensifie la coopération entre les États membres avec la fixation d’un objectif d’affectation de 5 % des financements publics nationaux à des programmes conjoints de recherche et développement et à des partenariats européens d’ici 2030 ; d) propose que les États membres dont les investissements dans la R-D par rapport au PIB sont inférieurs à la moyenne de l’UE concentrent leurs efforts de façon à accroître leur investissement total dans la R-D de 50 % au cours des cinq prochaines années. |
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS |
MESURES PRISES DEPUIS LA PRÉCÉDENTE ÉTUDE (2018) |
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Réduire les disparités régionales en améliorant l’efficacité de la politique en faveur de la cohésion |
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Donner priorité aux les financements relevant de la politique de cohésion aux régions moins développées. |
En 2021-27, les régions les moins développées continueront de recevoir 75 % du total des fonds de cohésion, comme en 2014-20. Leur part dans le volet Emploi et croissance du Fonds européen de développement régional et du Fonds social européen plus augmentera, mais les montants alloués au titre du Fonds de cohésion, qui ne peut bénéficier qu’aux États membres les plus pauvres, diminueront. |
Mieux cibler les financements relevant de la politique de cohésion sur les dépenses qui ont des retombées sur la croissance à long terme (capital humain, innovation et infrastructures de réseau) et sur les projets qui créent des externalités claires par-delà des frontières. |
Les onze objectifs thématiques retenus pour la période 2014-20 ont été simplifiés et ramenés à cinq pour 2021-27 : 1. une Europe plus concurrentielle et plus intelligente par la promotion d’une transformation économique innovante et intelligente et de la connectivité des TIC au niveau de la région ; 2. une transition plus verte et sobre en carbone vers une économie à zéro émission nette et une Europe résiliente par la promotion d’une transition énergétique propre et équitable, des investissements verts et bleus, de l’économie circulaire, de l’atténuation du changement climatique et de l’adaptation à ses effets, de la prévention et de la gestion des risques, et d’une mobilité urbaine durable ; 3. une Europe plus connectée grâce à une mobilité améliorée ; 4. une Europe plus sociale et inclusive grâce à la mise en œuvre du Socle européen des droits sociaux ; 5. une Europe plus proche des citoyens grâce à des mesures favorisant le développement durable et intégré de tous les types de territoires et d’initiatives locales. Pour assurer que la politique de cohésion reste bien ciblée sur les priorités de l’Union, il est proposé que la plupart des ressources du Fonds européen de développement régional (entre 55 et 85 % selon les pays et les régions) soient concentrées sur les deux premiers objectifs stratégiques ci-dessus. |
Envisager de relever les taux de co-financement des pays pour encourager une meilleure sélection des projets en tenant compte de leur impact relatif et de la valeur ajoutée pour l’UE. |
Seuls des ajustements limités des taux de cofinancement nationaux ont été faits pour la période 2021-27 par rapport à 2014-20, notamment pour tenir compte du contexte de l’après-pandémie. |
Créer un « corpus réglementaire unique » pour les programmes de financement de l’UE. Recourir plus souvent à l’administration en ligne et à la passation électronique des marchés publics. |
Des progrès ont été accomplis sur la voie d’un corpus réglementaire unique avec l’aval d’une réglementation unique pour huit fonds de gestion communs. De plus, le cadre juridique proposé est beaucoup plus simple que celui de la période 2014-20, avec une rationalisation des chevauchements et des répétitions et une baisse significative du nombre des actes législatifs secondaires. Dans la mise en œuvre de la politique en faveur de la cohésion en 2021-27, l’échange électronique de données sera développé davantage, ce qui facilitera notamment les vérifications. Dans le contexte du Plan d’action sur la passation de marchés publics préparé par la Commission, certains États membres ont préparé des stratégies nationales d’amélioration de leurs pratiques en la matière, et un projet-pilote élaboré par la Commission en coopération avec l’OCDE a permis à la Slovaquie et à la Bulgarie de renforcer leurs capacités administratives en matière de marchés publics. |
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS |
MESURES PRISES DEPUIS LA PRÉCÉDENTE ÉTUDE (2018) |
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Exploiter au mieux les avantages du marché unique pour améliorer à long terme la croissance et les niveaux de vie |
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Simplifier les formalités administratives pour l’établissement et la prestation de services transfrontières et donner des orientations sur la mise en œuvre de la législation de l’UE en vigueur. |
En 2019-20, la Commission a intensifié ses efforts de mise en œuvre pour s’assurer que les États membres transposent et appliquent correctement la Directive révisée relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles. De plus, la Commission a systématiquement engagé des actions pour infraction au droit communautaire concernant la mise en œuvre de la Directive sur les services et les dispositions du Traité sur la liberté d’établissement et la liberté de prestation de services. Parmi les domaines qui constituent des sources de préoccupation, on peut citer des obligations documentaires excessives et disproportionnées, et l’absence de modalités électroniques pour les procédures de reconnaissance. Le Portail numérique unique, opérationnel depuis la fin de 2020, sera utile dans tous ces domaines. |
Poursuivre la coopération transfrontalière prévue pour l’exploitation des systèmes électriques et les échanges d’électricité, y compris les calculs de la capacité d’interconnexion et les marges de réserve. |
Le Règlement 2019/943/EU sur le marché intérieur de l’électricité stipule qu’à compter du 1er janvier 2020, au moins 70 % de la capacité d’interconnexion transfrontières devrait être disponible pour les échanges. Plusieurs options permettent une mise en œuvre progressive, mais en tout état de cause, l’objectif devrait être pleinement atteint d’ici la fin de 2025 au plus tard. Le Règlement contient également des dispositions visant à renforcer la coopération entre les opérateurs des réseaux de distribution et prévoit la création de centres de coordination régionaux pour les systèmes de transport. |
Mettre au point des outils pour aider les États membres à effectuer un suivi des besoins en compétences numériques. Fixer des normes au niveau de l’UE pour suivre le contenu des compétences et tâches numériques dans les professions. |
Le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (Cedefop), centre de référence de l’Union européenne pour la formation et l’enseignement professionnels, a été l’un des premiers à utiliser les analyses fondées sur les données massives pour étudier en temps réel les compétences attendues par les employeurs, au niveau sectoriel aussi bien que régional. Bien que ces travaux couvrent l’ensemble des compétences attendues, il est évident que les compétences numériques y occupent une place particulière. Au niveau sectoriel, le Plan de coopération sectorielle en matière de compétences lancé dans le cadre de la Stratégie européenne en matière de compétences de 2016 vise à constituer des parties prenantes au sein de partenariats sectoriels pour élaborer et mettre en œuvre des stratégies pour les compétences dans ces secteurs au service de la croissance. Les compétences numériques sont un volet commun à tous les projets sectoriels engagés au titre de ce Plan de coopération. Les cinq premiers projets ont été lancés en 2018 et deux autres phases ont eu lieu depuis, couvrant 21 secteurs au total. L’indice relatif à l’économie et à la société numériques (DESI) permet de suivre la performance globale de l’Europe dans le domaine du numérique et de mesurer les progrès accomplis par les États membres de l’UE en matière de compétitivité numérique. En particulier, la dimension « capital humain » de l’indice DESI permet de mesurer l’inclusion et les compétences dans le domaine du numérique et s’inspire de l’indicateur général des compétences numériques élaboré par la Commission européenne, qui est basé sur le nombre et la complexité des activités effectuées à l’aide d’outils numériques et/ou sur internet. L’indicateur des compétences numériques a été récemment revu. L’examen en cours des statistiques sociales de l’UE (par exemple l’Enquête sur l’éducation des adultes ou l’Enquête sur la population active) est assorti de propositions visant à recueillir des informations supplémentaires sur les compétences numériques. |
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS |
MESURES PRISES DEPUIS LA PRÉCÉDENTE ÉTUDE (2018) |
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Supprimer les obstacles au travail et favoriser la mobilité à l’intérieur de l’UE |
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Augmenter les dépenses consacrées à des programmes de mobilité comme Erasmus+, et en faciliter l’accès à tous, quel que soit le milieu socio-économique. |
Le financement du programme Erasmus+ augmentera d’environ 50 % en 2021-27 (à prix constants) par rapport à 2014-20, avec une extension des possibilités de mobilité pour l’apprentissage et la formation, y compris pour les adultes peu qualifiés. |
Favoriser l’harmonisation des contenus d’enseignement pour les professions au niveau de l’UE. |
La directive révisée sur la reconnaissance des qualifications professionnelles (directive 2013/55/UE modifiant la directive 2005/36/CE) prévoit la possibilité de mettre en place des « cadres communs de formation » et des « épreuves communes de formation », qui constituent un système volontaire de reconnaissance automatique des qualifications propres à des professions ou activités spécifiques. La Commission a adopté en 2019 une épreuve commune de formation pour les moniteurs de ski (Règlement délégué (UE) 2019/907 de la Commission du 14 mars 2019). La Directive 2013/55/UE prévoit également de déléguer des pouvoirs à la Commission aux fins d’actualiser certaines conditions minimales de formation pour des professions relevant du régime de reconnaissance automatique. En 2018, la Commission a lancé une enquête sur les critères de formation des infirmières. Elle a également engagé des travaux pour évaluer la nécessité de mettre à jour les critères de formation des pharmaciens et des dentistes. |
Faire en sorte que la carte professionnelle européenne soit disponible sous forme électronique pour tous les secteurs. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Intensifier les efforts au niveau de l’UE pour coordonner la conception et l’organisation d’activités de contrôle conjointes, au niveau transfrontière, dans le domaine du travail et de la fiscalité. |
L’Autorité européenne du travail (ELA) a été mise en place en 2019 et devrait être pleinement opérationnelle en 2024. Elle a pour mission de faciliter l’accès à des informations et leur échange entre pays, de promouvoir la coopération entre les pays de l’UE et de favoriser le renforcement des capacités pour l’application du droit européen concerné, et de servir de médiateur en cas de différends entre des autorités nationales. L’ELA est en train de préparer le lancement d’inspections conjointes et concertées au sein de l’UE (y compris dans les régions transfrontalières). |
Mieux protéger les citoyens de l’UE face au changement |
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Réviser les exigences et les procédures applicables aux demandes pour accélérer l’utilisation du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (EGF) et élargir l’éligibilité pour aider les travailleurs qui ont été touchés pour d’autres raisons, comme l’automatisation. |
Un projet de législation prévoit d’élargir la portée de l’EGF pour le rendre plus inclusif et plus réactif face aux évolutions économiques comme l’automatisation, la montée du numérique et la transition vers une économie bas carbone. Il est également proposé de mettre en place une procédure de mobilisation rationalisée qui permettrait un déploiement plus rapide du Fonds. |