Abstract

La crise du COVID‑19 a engendré une augmentation significative de l’apprentissage en ligne par les adultes. La plupart des formations qui avaient débuté en mode présentiel, dans une salle de classe, se sont poursuivies à distance. De plus, les travailleurs qui bénéficient du chômage partiel sont encouragés à mettre à profit leur temps libre en suivant de nouvelles formations. Ainsi, la crise constitue une occasion idéale pour évaluer tout ce que l’apprentissage en ligne peut apporter. Elle permet également de mettre à jour ses principales limites : la nécessité d’avoir au préalable des compétences numériques adaptées, un outil numérique et une connexion internet pour suivre une formation en ligne, la complexité de proposer un apprentissage pratique traditionnel en ligne, et les difficultés que rencontrent les enseignants habitués à la formation en classe. La présente synthèse examine comment l’apprentissage en ligne permet de proposer aux adultes de nouvelles occasions de se former et identifie certains problèmes majeurs mis en lumière par la crise. Résoudre ces difficultés pourrait contribuer à développer davantage l’apprentissage en ligne une fois la crise surmontée et à en rendre l’accès plus égalitaire.

 Introduction et messages principaux

La crise du COVID‑19 a engendré une augmentation significative de l’apprentissage en ligne par les adultes (Encadré 1). Une grande partie des formations qui devaient se dérouler en classe sont désormais suivies en ligne. De plus, les travailleurs qui bénéficient du chômage partiel sont encouragés à mettre à profit leur temps libre pour suivre des formations en ligne depuis chez eux et acquérir de nouvelles compétences jugées utiles une fois passée l’urgence sanitaire. Bien qu’il soit trop tôt pour effectuer une évaluation complète, les premières données et les observations ponctuelles indiquent une hausse conséquente de l’apprentissage en ligne. Dans la Région flamande, le nombre de participants aux formations en ligne proposées par le service public de l’emploi (VDAB) pendant la seconde moitié du mois de mars 2020 a été multiplié par quatre par rapport à la même période l’année passée.1 D’après les recherches sur internet, l’intérêt pour les formations en ligne a enregistré une poussée. Au Canada, en France, en Italie, au Royaume Uni et aux États-Unis, les recherches contenant les mots « formation en ligne » et « cours en ligne ouverts à tous », les MOOC, ont été multipliées par quatre entre la fin du mois de mars et le début du mois d’avril 2020, au moment où des mesures strictes de confinement étaient adoptées dans la plupart des pays de l’OCDE. Fin avril 2020, ces recherches étaient encore deux fois plus importantes qu’en temps normal.

Ainsi, la crise constitue une occasion idéale pour évaluer toutes les possibilités qu’offre l’apprentissage en ligne. Elle permet également de souligner ses principales limites : la nécessité d’avoir au préalable des compétences numériques adaptées, un outil numérique et une connexion internet pour suivre une formation en ligne, la difficulté de proposer un apprentissage pratique traditionnel en ligne, et les problèmes que rencontrent les enseignants habitués à la formation en classe.

La présente synthèse examine comment l’apprentissage en ligne permet d’élargir l’offre de formation proposée aux adultes et identifie certains problèmes majeurs mis en lumière par la crise. Résoudre ces difficultés pourrait contribuer à développer davantage l’apprentissage en ligne une fois la crise passée et à en rendre l’accès plus égalitaire.

 
Messages principaux
  • L'élargissement de l'offre de formation des adultes grâce à l'apprentissage en ligne présente des avantages importants. En particulier, l'apprentissage en ligne pourrait aider à atteindre un nombre beaucoup plus élevé d'apprenants avec un investissement moindre dans l'infrastructure éducative, ce qui en fait une solution rentable dans le contexte de la hausse du chômage due à la crise du COVID‑19. Cependant, pour que l'apprentissage en ligne représente une alternative valable à l'enseignement en face à face, il faut qu'il offre des opportunités de formation de haute qualité pouvant se traduire par des opportunités d'emploi durables pour les demandeurs d'emploi et des gains de productivité pour les entreprises et l'économie en général. Il faut également s'attaquer aux problèmes d'inclusion de l'apprentissage en ligne pour garantir que tous les adultes puissent en bénéficier, y compris les adultes ayant des compétences numériques moindres et un accès limité aux installations numériques et à Internet, les adultes moins motivés et autonomes et ceux nécessitant une formation de col bleu. Les leçons apprises pendant la crise du COVID‑19 peuvent aider à surmonter les limites existantes pour réaliser le plein potentiel de l'apprentissage en ligne.

  • Améliorer les compétences numériques de base permettra de généraliser l’apprentissage en ligne. Les principaux utilisateurs de l’apprentissage en ligne sont les adultes qualifiés et dotés de bonnes compétences numériques. Avant la crise du COVID‑19, 23 % des participants à la formation avec de compétences élevées en résolution de problèmes numériques, ont suivi une formation en ligne, contre 14 % des participants dont les compétences numérique sont très faibles. Plusieurs pays ont lancé des programmes pour doter les adultes de compétences numériques de base avant l’arrivée de la crise.

  • Motiver les apprenants à distance est essentiel pour qu’ils aillent jusqu’au bout. D’après les données sur les MOOC, 10 % seulement des participants vont au bout de la formation. Outre des compétences de base en informatique, les formations en ligne nécessitent une certaine autonomie et de la motivation. Dans le contexte de la crise, de nombreux organismes d’apprentissages et de formation professionnelle se sont efforcés de construire et entretenir la motivation des apprenants à distance.

  • Élargir l’éventail des cours en ligne est essentiel pour rendre l’apprentissage à distance plus inclusif. Peu de formations sont actuellement accessibles en ligne et elles ont tendance à porter sur les compétences recherchées dans les emplois intellectuels. En France, avant la crise, on estime que seulement 10 % des formations étaient accessibles à distance. Bien que la crise ait gonflé ce pourcentage, les formations aux métiers de l’artisanat et celles qui comportent une part d’application en milieu professionnel restent difficiles à proposer à distance.

  • Renforcer l’infrastructure numérique est un point fondamental relatif à l’environnement de travail pour que l’apprentissage en ligne puisse être envisagé. L’inégalité d’accès à internet risque d’exacerber les inégalités déjà en jeu dans l’enseignement et la formation. Pendant la crise du COVID‑19, plusieurs pays ont distribué des ordinateurs avec connexion Intérêt aux étudiants les plus désavantagés. Certains envisagent de financer l’accès à internet au même titre qu’un service de base auquel tous les citoyens peuvent accéder, y compris ceux qui vivent dans des régions rurales ou issus de milieux défavorisés.

  • Former les enseignants pour qu’ils proposent des cours en ligne bien construits est important pour améliorer la qualité des cours en ligne. Certains pays développent déjà des programmes pour doter les enseignants et les responsables des centres de formation des compétences nécessaires pour qu’ils puissent proposer leurs formations en ligne.

  • Concevoir des méthodes d’évaluation et de validation efficaces est important pour garantir que les formations, formelles ou non, soient valorisées sur le marché du travail. Les tests, les questionnaires et les évaluations commencent à occuper une place importante dans les formations à distance. Ils permettent de consolider les apprentissages et de mesurer l’efficacité du cours. Dans le domaine de la certification, une solution innovante est l'adoption de badges numériques: des dispositifs numériques transférables contenant des informations sur l'individu, les compétences acquises et l'émetteur du badge. La prolifération des certificats et des diplômes issus de l'apprentissage en ligne risque de diluer sa valeur sur le marché du travail et dans l'octroi de l'accès à une formation ultérieure. Une réglementation et une standardisation sont nécessaires pour garantir que les compétences acquises en ligne soient reconnues et valorisées par les entreprises et les établissements de formation.

  • Instaurer des mécanismes d’assurance qualité pour l’apprentissage en ligne est essentiel pour s’assurer que les participants retirent une juste contrepartie des formations suivies à distance en échange de l’argent et du temps consacrés. La crise du COVID‑19 sera l’occasion d’évaluer en contexte réel les répercussions de l’apprentissage en ligne sur l’emploi et les salaires, par rapport à l’enseignement en présentiel. Les résultats de cette évaluation permettraient d’identifier les aspects de l’apprentissage en ligne qui sont les plus susceptibles d’entraîner des retombées positives pour les participants, toutes choses étant égales par ailleurs. Ils permettraient également de mettre en évidence le fait que ces aspects diffèrent ou non de ceux identifiés dans l’enseignement en présentiel, justifiant, le cas échéant, l’instauration d’un système d’assurance qualité spécifique.

 Multiplier le nombre de participants à la formation des adultes grâce aux cours en ligne

Continuer à apprendre tout au long de sa vie professionnelle est essentiel pour suivre les évolutions du marché du travail. Cela permet de cultiver des compétences déjà existantes et d’acquérir celles qui sont recherchées (OCDE, 2019[1]). Dans la période qui fera suite au COVID‑19, il sera important, pour le nombre accru de chômeurs , de se former pour trouver du travail dans les professions et les secteurs en croissance. Pourtant, actuellement, chaque année dans les pays de l’OCDE seuls 40 % des adultes participent à des formations formelles ou non, en lien avec leur emploi2, et les adultes hautement qualifiés sont surreprésentés. Parmi les travailleurs peu qualifiés, seulement 20 % en moyenne suivent une formation (OCDE, 2019[2]). Les contraintes de temps, de calendrier et de distance ainsi que les contraintes financières font partie des principaux obstacles mentionnés par ceux qui ne suivent aucune formation (Graphique 1). Près de 28 % des adultes déclarent qu’ils ne participent à aucune formation parce qu’ils manquent de temps à cause de leurs engagements professionnels et 15 % invoquent un manque de temps à cause de leurs responsabilités familiales. Enfin, 16% mentionnent un manque de moyens financiers et 12 % des adultes signalent que la formation se déroulait à un endroit et un horaire peu pratiques.

 
Graphique 1. Obstacles à la participation aux activités de formation pour adultes
Raisons pour lesquelles ils ne participent pas aux formations pour adultes (% des adultes qui voulaient y participer mais ne l’ont pas fait)

Note : Moyenne des pays de l’OCDE qui participent au PIAAC. Les données correspondent à la participation à des formations formelles et non formelles pour adultes. La barre « Voulait participer mais ne l'a pas fait » fait référence au pourcentage d’adultes qui ont répondu ne pas avoir suivi une formation dans les 12 mois précédents l’enquête mais qu’ils auraient souhaité le faire.

Source : Calculs réalisés par le Secrétariat de l’OCDE à partir de l’Enquête sur les compétences des adultes, PIAAC (2012, 2015, 2017).

L’apprentissage en ligne permet de lever certains obstacles à la formation. Il permet aux apprenants de choisir un moment, un rythme et un lieu compatibles avec leurs contraintes professionnelles et familiales. La flexibilité qu’offrent les programmes de formation en ligne compte tout particulièrement pour les formations dont l’objectif est de changer de travail. Les formations destinées à améliorer les compétences d’un travailleur dans son emploi actuel sont plus généralement financées par les employeurs et peuvent plus facilement être réalisées pendant les heures de travail. En plus d'offrir plus de flexibilité, l'apprentissage en ligne a tendance à être moins onéreux qu’une formation en présentiel équivalente, ce qui pourrait aider à surmonter les éventuelles contraintes financières. Comme la crise du COVID‑19 l’a montré, l’apprentissage en ligne permet également d’offrir une continuité dans la formation lorsqu’elle ne peut plus se dérouler en mode présentiel. Malgré le manque actuel de données sur l’efficacité de ce dispositif par rapport à une formation en présence, la crise du COVID‑19 constituera une expérience concrète intéressante permettant de mesurer les répercussions sur l’emploi et les salaires.

L’#ApprentissageEnLigne permet de lever les contraintes de temps, d’organisation et de lieu qui font obstacle à la #FormationPourAdultes

 
Encadré 1. L’apprentissage en ligne : une définition

Les termes e-learning, apprentissage en ligne et apprentissage à distance sont souvent utilisés comme synonymes dans les médias et les discours politiques. Pourtant, il existe des différences importantes entre ces expressions :

L’apprentissage en ligne (souvent appellé e-learning) correspond à l’utilisation d’outils numériques pour délivrer un apprentissage. Cela ne se passe pas nécessairement à distance. Ces outils peuvent être utilisés en classe, en complément de méthodes pédagogiques plus traditionnelles, auquel cas il s’agit d’une mix-formation.

L’apprentissage à distance correspond à un apprentissage qui se déroule en dehors d’une salle de classe ou d’un lieu de travail. Il comprenait traditionnellement les cours par correspondance pour lesquels les élèves correspondent avec l’école par courrier postal. Aujourd’hui, il correspond principalement à un enseignement en ligne, délivré par un formateur qui donne des leçons et des devoirs par le biais d’outils numériques. La plupart des sources statistiques disponibles (y compris celles utilisées pour cette synthèse) recueillent des données sur l’apprentissage à distance – par opposition à l’apprentissage en ligne – qui englobent potentiellement des individus qui suivent une formation par correspondance bien que ce type de formation à distance disparaisse rapidement au profit de méthodes numériques.

Dans ce document, le terme apprentissage en ligne désigne essentiellement des activités de formation délivrées au moyen de ressources numériques et suivies à distance, surtout lorsqu’il s’agit d’examiner les mesures prises dans le contexte de la crise du COVID‑19 au cours de laquelle la plupart des formations en présentiel ont été interrompues pour garantir une distanciation sociale. Toutefois, certaines des leçons qui doivent être retenues pour développer l’apprentissage en ligne s’appliquent également à la mix-formation.

Il est également important de prendre en compte le fait que, au même titre que l’éducation en présentiel, l’apprentissage en ligne et à distance couvre un éventail très large de cours, allant des études universitaires suivies en ligne à des formations non formelles plus courtes qui portent sur des compétences spécifiques, en passant par les cours en ligne ouverts à tous (les MOOC), pour n’en citer que quelques exemples. Les recommandations données dans cette synthèse ne s’appliquent pas toutes de la même manière aux multiples types de cours. Par exemple, les conditions requises en termes de compétences et d’infrastructure numériques varient largement selon les formations, tout comme la flexibilité du calendrier, la certification et l’assurance qualité.

Malgré les possibilités qu’offre l’apprentissage en ligne, les données antérieures à la crise actuelle indiquent que, en temps normal, peu d’adultes profitent de ce type d’enseignement pour se former (OCDE, 2019[3]). Seul un adulte sur cinq participant à une formation non formelle l’a suivie en ligne. Toutefois, le pourcentage de participants qui se forment en ligne varie fortement d’un pays à l’autre, allant de 6 % en France à plus de 40 % en Lituanie et en Pologne (Graphique 2).

L’inclusion est une des questions centrales dans toute discussion concernant l’apprentissage en ligne. Alors que proposer des cours en ligne pourrait permettre à des adultes handicapés ou à ceux qui vivent en milieu rural de suivre plus facilement une formation, les compétences numériques de base requises, les outils numériques indispensables et une connexion Internet fiable peuvent constituer un frein important. Les données sur la formation à distance, tirées du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC)3, indiquent que, dans la plupart des pays, les participants aux formations qui possèdent de bonnes compétences en résolution de problèmes numériques sont plus susceptibles de choisir une formation à distance que les adultes qui maîtrisent peu les TIC (Graphique 3). Dans la zone OCDE, en moyenne, 23 % des participants à la formation avec des compétences élevées en résolution de problèmes numériques, ont suivi une formation en ligne, contre 14 % des participants dont les compétences en TIC sont très faibles. Il existe toutefois des exceptions et certains pays ont réussi à impliquer les adultes dont les compétences numériques sont limitées dans des activités d’apprentissage à distance. Aux Pays-Bas et en Nouvelle-Zélande, le nombre d’adultes dont les compétences en TIC sont faibles qui suivent une formation en ligne dépasse celui des adultes doués de compétences fortes en résolution de problèmes numériques. Ceci s’explique par des campagnes d’information plus fructueuses mais peut-être aussi par des basse conditions requises en matière de TIC pour les formations en ligne ou par le recours à des formations par correspondance.

Afin de mettre ces données en perspective, en moyenne dans les pays de l’OCDE, seulement 5 % des adultes se placent au meilleur niveau de compétences numériques dans le PIAAC alors que 15 % des adultes ne possèdent même pas les compétences informatiques les plus élémentaires (OCDE, 2020[4]).

 
Graphique 2. Incidence du recours à l’apprentissage en ligne parmi les participants à des activités de formation
Pourcentage de participants qui suivent des activités de formation non formelles qui ont assisté à au moins une formation à distance au cours des 12 derniers mois (%)

Note : Il n’est précisé que pour les formations non formelles si la formation a eu lieu en présentiel ou à distance. L’apprentissage à distance comprend les cours par correspondance, même si le pourcentage de ces cours est désormais minime dans la plupart des pays de l’OCDE. Les données pour la Hongrie, le Mexique et les États-Unis datent de 2017. Les données pour le Chili, la Grèce, Israël, la Lituanie, La Nouvelle-Zélande, la Slovénie et la Turquie sont de 2015. Pour tous les autres pays, les données sont de 2012.

Source : Calculs réalisés par le Secrétariat de l’OCDE à partir de l’Enquête sur les compétences des adultes, PIAAC (2012, 2015, 2017)

 
Graphique 3. Incidence de l’apprentissage en ligne, selon le niveau de compétence en résolution de problèmes numériques
Pourcentage de participants à des activités de formation pour adultes qui ont assisté à au moins une formation à distance au cours des 12 derniers mois, par niveau de compétence en résolution de problèmes numériques (%)

Note : La résolution de problèmes numériques correspond à la résolution de problèmes dans un environnement à forte composante technologique comme cela est mesuré dans le programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC). Les compétences dans ce domaine sont classées en quatre niveaux, du Niveau 3 (« Niveau le plus élevé de compétences en résolution de problèmes numérique » dans le graphique) au niveau inférieur au Niveau 1, avec également un groupe d’individus qui n’ont pas participé à l’évaluation parce qu’ils n’avaient pas un niveau suffisant en TIC (« Pas ou peu de connaissances en informatique » dans le graphique). Il n’est précisé que pour les formations non formelles si la formation a eu lieu en présentiel ou à distance. L’apprentissage à distance comprend les cours par correspondance, même si le pourcentage de ces cours est désormais minime dans la plupart des pays de l’OCDE.. Les données pour la Hongrie, le Mexique et les États-Unis datent de 2017. Les données pour le Chili, la Grèce, Israël, la Lituanie, La Nouvelle-Zélande, la Slovénie et la Turquie sont de 2015. Pour tous les autres pays, les données sont de 2012.

Source : Calculs réalisés par le Secrétariat de l’OCDE à partir de l’Enquête sur les compétences des adultes, PIAAC (2012, 2015, 2017).

 Passer à la formation en ligne pendant la crise du COVID‑19

Au fur et à mesure de la crise, une part importante des formations en cours, qui devaient se dérouler en présentiel, dans une salle de classe, ont dû être adaptées pour être poursuivies en ligne. Il s’agit des formations formelles, les formations dispensées dans les universités ou les établissements professionnels, ainsi que de certaines formations non formelles publiques, comme les formations pour les personnes en recherche d’un emploi.4

Les formations formelles prévues pour se dérouler en classe ont été maintenues dans la plupart des pays grâce au numérique. Pour endiguer la propagation du virus, les écoles, les universités, les collèges et les instituts d’enseignement supérieur ont fermé leurs portes dans la grande majorité des pays. À quelques exceptions près, les cours ont été proposés en ligne afin d’assurer une continuité pédagogique. Cette transformation concerne tous les adultes qui participent à des activités de formation formelles, comme les jeunes sortis prématurément du système éducatif qui ont repris des cours afin d’obtenir un diplôme de fin d’études, ceux qui étudient pour obtenir un diplôme universitaire après avoir passé un moment sur le marché du travail, et ceux qui se perfectionnent en suivant des cours universitaires ou des formations professionnelles.

Les programmes professionnels caractérisés par des stages en entreprise ont été fortement touchés pendant la période de confinement. Comme les stages en entreprise ne sont plus possibles dans la plupart des cas et que les formations pratiques ne sont pas facilement réalisables en ligne, la plupart des programmes ont simplement dû être interrompus. L’Espagne et la Corée ont allongé les périodes de formation afin de tenir compte de la pause pendant le confinement et l’Australie, l’Allemagne, l’Irlande et la Suisse ont étendu la couverture des dispositifs de chômage partiel aux stagiaires (OCDE, 2020[5]). Toutefois, certains pays ont engagé des mesures afin de protéger une partie de la formation en entreprise grâce à l’enseignement à distance :

  • Dans de nombreux pays proposant des programmes de formation mixte – où la formation se passe en alternance hors du poste de travail et sur poste – les prestataires ont été autorisés à poursuivre la partie théorique et à repousser la partie qui se déroule en entreprise. L’Australian Skills Quality Authority a recommandé aux organismes de formation de revoir leur organisation afin de commencer par la partie théorique, proposée en ligne (https://www.asqa.gov.au/covid-19). L’Angleterre a permis que les parties de la formation qui devaient se dérouler en milieu professionnel soient réduites, lorsque cela était possible, et remplacées par un enseignement théorique plus long, dispensé en ligne. Par conséquent, les apprentis qui ont suivi suffisamment d’heures de formation avec un employeur ont été autorisés à terminer leur programme de formation en ligne. Certains pays, comme l’Espagne, ont laissé aux prestataires la possibilité de choisir comment réorganiser leurs programmes de formation professionnelle.

  • En Italie, Italymobility – une initiative du Centro Studi « Cultura Sviluppo », une organisation sans but lucratif de premier plan dans le secteur de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels (EFTP) – a développé des stages virtuels de longue durée en réponse au confinement imposé par le COVID‑19 (http://italymobility.com/). Ces stages virtuels de longue durée permettent de mettre en œuvre de réelles expériences professionnelles à distance, de réaliser de réelles tâches avec un tuteur et un soutien pédagogique concret au sein d’une infrastructure numérique d’apprentissage spécifique. Cette solution concerne en priorité les professionnels en lien avec les technologies numériques - comme les concepteurs de sites internet, les négociants en réseaux sociaux, les développeurs de logiciels – mais comprend également toute une gamme d’activités qui relèvent de métiers plus « traditionnels » - comme comptable, décorateur d’intérieur, concepteur mécanique.

  • Dans l'État de Santa Caterina (Brésil), la formation en apprentissage dispensée par le SENAI - le Service national pour la formation industrielle, un réseau d'écoles professionnelles de niveau secondaire à but non lucratif créées et maintenues par la Confédération brésilienne de l'industrie - s'est poursuivie grâce à l'utilisation de la réalité virtuelle. Dans certains cas, des outils de travail ont été expédiés à l'adresse des étudiants afin qu'ils puissent s'exercer lors de sessions virtuelles avec des formateurs situés dans des laboratoires de formation, dans le plein respect des règles de distanciation sociale.

  • En Suisse, certains apprentis ont continué leur formation en ligne mais ce nouveau mode d’enseignement a impliqué la modification de leur contrat d’apprentissage qui excluait précisément la réalisation des stages en ligne.

Il est difficile de suivre des #FormationsEnMilieuProfessionnel et des #Apprentissages avec l’#ApprentissageEnLigne

Les services publics de l’emploi (SPE) ont continué, pendant la crise, de former les chercheurs d’emploi par voie numérique. La plupart des SPE des pays de l’OCDE ont suspendu leurs formations en présentiel peu après l’adoption des mesures de confinement. Certains pays les ont remplacées par des formations en ligne qui étaient déjà disponibles avant la crise (c’est le cas en Estonie, aux Pays-Bas, en Autriche, au Danemark, dans certaines régions d’Italie et dans les trois régions de Belgique) moyennant un investissement minime (OCDE, 2020[6]). D’autres pays ont enrichi leurs offres de formations en ligne. Au Danemark, une modification de la législation permet désormais aux communes d’offrir de nouvelles formations qualifiantes numériques et, en France, plus de 150 nouvelles formations ont été mises à disposition en ligne sur l’« Emploi Store ». La Suède utilisera une partie du financement supplémentaire du SPE et d’autres acteurs majeurs pour renforcer l’apprentissage en ligne et l’enseignement par internet.

Dans certains cas, le SPE collabore avec des prestataires de formation privés afin d’aider les chercheurs d’emploi à se former à des emplois très demandés pendant la crise. Le SPE d’Estonie, en coopération avec les acteurs concernés, a su rapidement développer une formation en ligne pour les aides soignants, très recherchés pendant la crise. Aux États-Unis, le programme Rapid Skilling a pour objectif de reconvertir plusieurs travailleurs professionnels et techniques dont l’emploi a été supprimé pour les diriger vers les professions actuellement recherchées. Le programme est né d’une collaboration entre 180skills - un organisme de formation aux compétences techniques et non techniques pour les secteurs de la fabrication et de la logistique en Amérique du Nord - des administrations d’États, des partenaires universitaires, et des employeurs qui ont un besoin urgent de travailleurs compétents. Les secteurs ciblés comprennent l’industrie manufacturière, la logistique et la distribution, la vente au détail, et les secteurs en lien avec la sécurité industrielle. L’innovation repose sur le recours à des formations en ligne fondées sur les compétences, réunies en programmes très courts nécessitant un niveau de compétences minime pour débuter. Les programmes ciblent plus particulièrement les adultes peu qualifiés, à bas revenu et sont proposés à un coût très faible.

D’autres centres de formation publics qui accueillent des adultes issus de groupes défavorisés – en particulier les adultes peu qualifiés, inactifs ou issus de l’immigration – n’ont pas tous poursuivi leurs formations en ligne avec les mêmes capacités. La formation aux compétences de base, comme la formation en langues et en calcul, a été plus souvent maintenue que la formation pratique liée à l'emploi. En Italie, plusieurs centres provinciaux d'éducation des adultes (CPIA), qui fournissent généralement une formation de base aux adultes défavorisés, ont continué de fonctionner par vidéoconférence. De même, la Fondation Het Begint met Taal aux Pays-Bas - une plate-forme nationale soutenant 170 organisations proposant un coaching linguistique (https://www.hetbegintmettaal.nl/) - a mis en ligne son offre formative. En Angleterre, la West Midlands Combined Authority, responsable du budget de £126 millions pour l'éducation des adultes de la région, a converti en ligne des modules de formation en présenciel, en particulier ceux axés sur l'employabilité, les mathématiques fonctionnelles et l'anglais. En revanche, la formation a été moins souvent assurée dans les établissements de formation axés sur la formation pratique liée à l'emploi. Par exemple, les Centres d'insertion socioprofessionnelle (CISP) de la Région wallonne de Belgique, qui dispensent une formation pratique pour préparer les adultes peu qualifiés à des emplois dans des secteurs tels que l'hôtellerie, la restauration et la construction, ont interrompu l'offre de formation.

 
Utilisation de l’apprentissage en ligne pendant le COVID‑19
  • L’enseignement formel a dû passer de la salle de classe à un dispositif en ligne.

  • Les mesures de confinement ont eu une incidence négative sur les formations en milieu professionnel et les apprentissages, pour lesquelles, dans la plupart des cas, seuls les cours théoriques ont été poursuivis.

  • Les SPE les plus réactifs ont rapidement proposé des formations en ligne aux chercheurs d’emploi ; certains ont réorienté leurs formations vers les métiers fortement demandés dans le contexte du COVID‑19.

  • Le soutien des pouvoirs publics en faveur de la formation en ligne a été essentiel pour de nombreux prestataires de formation et pour les utilisateurs finaux, que ce soit avec des partages de plateformes ou la mise à disposition de ressources gratuites et de matériel pour améliorer les compétences numériques pour les enseignants et les apprenants.

  • Les autorités, les services publics de l’emploi et les partenaires sociaux ont encouragé le recours à la formation en ligne pendant le confinement.

 Le soutien des autorités a été crucial afin que les formations se poursuivent en ligne

Le soutien des autorités afin de garantir une continuité de l’activité de formation par l’apprentissage en ligne s’est manifesté dans plusieurs pays sous différentes formes.

Le soutien des autorités grâce au partage de ressources est essentiel pour que les organismes de formation proposent un #ApprentissageEnLigne

Certains pays ont créé des plateformes pour les prestataires de formation afin de favoriser le partage des ressources existantes et la prestation de formations en ligne ; d’autres ont mobilisé les ressources déjà en place :

  • La Corée du Sud a encouragé l’utilisation de sa plateforme de formation virtuelle - Smart Training Education Platform (STEP – https://step.or.kr/). Cet outil permet aux prestataires de formation de mettre leurs cours en ligne, en plus des 300 cours déjà disponibles. Des subventions et des dispositifs de l’assurance qualité apportent une aide supplémentaire.

  • En France, le ministère du Travail, également responsable de la formation professionnelle, a mis en place une plateforme avec des ressources à disposition des professionnels de ce secteur afin de faciliter la continuité des activités de formation (https://travail-emploi.gouv.fr/formation-professionnelle/coronavirus/formation-a-distance/). Plusieurs partenaires du ministère du Travail se sont portés volontaires pour mettre gratuitement à disposition des contenus pédagogiques de formation. Parmi les contenus disponibles figurent des MOOC, proposés par l’AFPA – un organisme de formation – dans le domaine de la cuisine (cuisine, pâtisserie, etc.) et un accès aux outils du CNED (Centre national pour l’enseignement à distance) pour les matières centrales dans les domaines technologiques. Afin d’aider les formateurs dans leur enseignement ou formation à distance, le ministère a également publié une liste de solutions techniques, comprenant des outils de conférence par internet, collaboratifs, des services de transfert de fichiers et d’autres outils nécessaires pour permettre aux intervenants des formations de garantir une continuité pédagogique.

  • En Allemagne, le ministère de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sports de l’État fédéral du Bade-Wurttemberg propose à une sélection d’organismes de profiter de sa plateforme d’apprentissage numérique (Digitaler Weiterbildungscampus – https://www.digitaler-weiterbildungscampus.de/) pour les aider à se tourner vers l’enseignement à distance. La plateforme est opérée par une entreprise privée et propose une infrastructure centrale pour permettre un enseignement et un apprentissage coopératif, modulable et tourné vers les compétences. Elle n’est pas propre à un organisme et peut être partagée entre plusieurs établissements. Le ministère cofinance entre 50 et 70 % des coûts de fonctionnement de la plateforme pour les prestataires. Les organismes qui peuvent prétendre au financement sont les organismes de formation qui font partie de l’Alliance pour la formation tout au long de la vie (Alliance for Lifelong Learning) et d’autres prestataires reconnus qui proposent une continuité de l’enseignement général et professionnel dans le Bade-Wurttemberg.

Plusieurs pays ont proposé des formations en ligne gratuites ou subventionnées pendant la période de confinement :

  • Sur la même plateforme mentionnée ci-dessus, la France propose des cours de formation professionnelle (EFP) gratuits sur une période de trois mois, comprenant les enseignements de base des écoles professionnelles et les principaux programmes de formation permettant d’obtenir des qualifications professionnelles. Des initiatives similaires ont été lancées en Irlande, Belgique, Espagne, Croatie et Roumanie, entre autres.

  • La Suède, dans son programme de crise pour les emplois et la transition, a mis en œuvre des dispositifs pour étoffer le financement et l’aide complémentaire apportés aux prestataires de formations en ligne dans les filières d’EFP de l’enseignement supérieur.

De nombreux pays proposent des aides aux enseignants et aux formateurs à travers des formations, des ateliers et des séminaires à distance (UNESCO, 2020[7] ; Banque mondiale, 2020[8]). L’objectif est d’améliorer les compétences en informatique des enseignants et des formateurs et de les aider à préparer les contenus pédagogiques à mettre en ligne. Ces mesures de soutien ont également pour objectif de les aider à préparer et organiser des cours en ligne et à utiliser les plateformes numériques.

  • Plusieurs pays ont créé des portails numériques pour apporter de l’aide aux enseignants. Au Danemark, le ministère de l’Éducation a créé un portail pour aider les enseignants en leur proposant des ressources numériques pour l’enseignement et l’apprentissage en ligne (https://emu.dk/). Au Chili, le ministère de l’Éducation propose des aides techniques et de gestion aux enseignants pour les accompagner dans leur utilisation des plateformes numériques et leur conception de matériels numériques, les assister sur les méthodes d’enseignement, les évaluations et la manière de créer des enquêtes pour obtenir des retours d’expérience de la part des élèves (https://www.aptus.org/). En Irlande, le Service de développement professionnel des enseignants permet aux enseignants d’accéder à un ensemble de ressources pour leur permettre d’assurer une continuité pédagogique pour les élèves et les étudiants pendant la crise du COVID‑19.

  • D’autres pays ont organisé un partenariat avec des prestataires privés ou offrent un accès gratuit aux ressources pédagogiques existantes. Au Canada, l’Ontario Schoolboard s’est associé à Apple pour proposer des vidéos, des applications et des manuels pour aider les enseignants à concevoir des cours qui motivent les élèves à étudier chez eux. Un accompagnement individuel virtuel et gratuit par des spécialistes de la formation professionnelle est également disponible.

  • Dans certains cas, des cours d’enseignement certifiés sont disponibles en ligne. Au Mexique, le gouvernement s’efforce de soutenir la formation des enseignants grâce à son programme d’enseignement et de formation numérique (http://formacionycapacitaciondigitales.televisioneducativa.gob.mx/). Cette aide se traduit par un soutien aux enseignants sous forme de formations à distance avec des MOOC, des cours et des conférences en ligne. Une certification est délivrée aux enseignants qui terminent avec succès ces formations.

Des programmes d’assistance aux compétences numériques ont été mis en œuvre pour aider les utilisateurs de ressources en ligne. La France a lancé un site internet pour aider les adultes qui rencontrent des difficultés avec les outils numériques au quotidien ou dans le cadre professionnel (https://solidarite-numerique.fr/).

 Campagnes pour les formations en ligne pendant le confinement

Dans certains cas, les travailleurs qui bénéficiaient d’un dispositif de chômage partiel5 ont également été encouragés à profiter de cette période pour se former.

Certains États ont encouragé les adultes, en particulier les travailleurs en chômage partiel, à poursuivre la formation qu’ils avaient commencée, mais aussi à en suivre de nouvelles pendant le confinement, grâce à l’apprentissage à distance.

  • En France, le gouvernement a élargi le dispositif d’aide financière à la formation, précédemment octroyée uniquement aux chômeurs, aux travailleurs en chômage partiel. Conformément à cette élargissement, le coût de la formation pour les employeurs est remboursé à 100 %, quel que soit le programme de formation en ligne suivi, à l’exception des formations obligatoires – par exemple, sur la santé et la sécurité – et jusqu’à 1 500 EUR (Fiche ministère du Travail du 20 avril 2020).

Les États, les SPE et les partenaires sociaux ont encouragé les adultes à se former grâce à la #ContinuitéPédagogique lorsque le mot d’ordre était #RestezChezVous

  • Les SPE incitent également à suivre des formations en ligne en diffusant des informations à ce sujet et en aidant les organismes de formation pendant la crise. Les SPE sont des acteurs majeurs dans la diffusion des informations sur la formation en ligne et nombre d’entre eux ont rempli cette mission sur leur site internet et leurs comptes YouTube et Twitter (OCDE, 2020[6]). Dans plusieurs pays, les SPE ont également joué un rôle dans l’accompagnement et le soutien aux prestataires de formation privés en leur proposant des outils numériques pour délivrer leurs formations.

  • Au Royaume-Uni, Unionlearn – une initiative de la Trade Union Confederation pour favoriser le développement des compétences en milieu professionnel – a lancé sa nouvelle campagne Learning@home (https://www.unionlearn.org.uk/learning-home). Cette campagne a pour objectif d’aider les adultes qui travaillent ou ont été renvoyés chez eux à cause du COVID‑19. Elle donne accès à des formations en ligne, des ressources pédagogiques et des conseils sur la meilleure manière d’apprendre depuis chez soi.

 Voir plus loin : les grands enseignements de la crise

Les initiatives décrites ci-dessus mettent en évidence la vocation de l’apprentissage en ligne à s’inscrire de manière plus durable les systèmes de formation des adultes. Cependant, elles révèlent certains obstacles qu’il faudra lever afin d’élargir l’accès aux possibilités d’apprentissage en ligne et de permettre à un nombre plus important d’adultes de suivre des formations, en particulier parmi les chercheur d’emploi et les adults peu qualifiés :

  • Améliorer les compétences numériques de base permettra de généraliser l’apprentissage en ligne. Les principaux utilisateurs de l’apprentissage en ligne sont les adultes qualifiés et dotés de bonnes compétences numériques. Plusieurs pays ont lancé des programmes pour doter les adultes de compétences numériques de base avant l’arrivée de la crise. Au Royaume-Uni, le Partenariat pour le développement des compétences numériques (Digital Skills Partnership) rassemble le gouvernement, des employeurs nationaux et locaux ainsi que des organismes caritatifs pour tenter de résoudre les inégalités en matière de compétences numériques de manière plus collaborative. Depuis 2020, les adultes peu qualifiés du Royaume-Uni ont accès à des programmes de développement des compétences numériques entièrement pris en charge, en plus des programmes déjà existants sur les mathématiques et l’anglais. En Hongrie, l’amélioration des compétences numériques des adultes défavorisés fait partie du nouveau plan de développement national (https://www.palyazat.gov.hu/). L’objectif est d’offrir la possibilité de suivre une formation en compétences numériques à 260 000 adultes peu qualifiés issus des régions défavorisées.

  • Motiver les apprenants à distance est essentiel pour qu’ils aillent jusqu’au bout. D’après les données sur les MOOC, 10 % seulement des participants vont au bout de la formation (Rivard, 2013[10] ; Murray, 2 019[11]). Outre des compétences de base en informatique, les formations en ligne nécessitent une certaine autonomie et de la motivation. Dans le contexte de la crise, de nombreux organismes d’apprentissages et d’EFP se sont efforcés de construire et entretenir la motivation des apprenants à distance. Amazing Apprenticeships – la branche communication d’Apprenticeships UK – propose plusieurs webinaires sur son site internet pour motiver les apprenants. Les badges numériques permettent également de stimuler la motivation (Credly, Knight et Manning, 2013[12]) tout comme les moyens d’interaction entre les élèves et avec les enseignants. En Espagne, le programme Aula Mentor favorise cette interaction numérique.

  • Élargir l’éventail des cours en ligne est essentiel pour rendre l’apprentissage à distance plus inclusif. Peu de formations sont actuellement accessibles en ligne et elles ont tendance à porter sur les compétences recherchées dans les emplois intellectuels. En France, avant la crise, on estime que seulement 10 % des formations étaient accessibles à distance. Bien que la crise ait gonflé ce pourcentage, les formations aux métiers de l’artisanat et celles qui comportent une part d’application en milieu professionnel restent difficiles à proposer à distance. Afin de dépasser ces limites, les organismes de formation se tournent vers l’intelligence artificielle (IA). L’IA permet de concevoir des simulations et des expériences en réalité virtuelle qui facilitent l’apprentissage par la pratique (Minocha, Tudor et Tilling, 2017[13] ; Hwa Choi, Dailey-Hebert et Simmons Estes, 2016[14]). Aux États-Unis, la Morgan State University a recours à la réalité virtuelle dans le cadre de ses programmes de soins infirmiers en s’appuyant sur son expérience de l’utilisation de la réalité augmentée pour l’enseignement et l’apprentissage (Pomerantz, 2019[15]).

  • Former les enseignants pour qu’ils proposent des cours en ligne bien construits est important pour améliorer la qualité des cours en ligne. Les enseignants habitués à l’exercice des cours en présentiel pourraient ne pas être en mesure de proposer des cours à distance. Ceci s’est particulièrement vu pendant la crise du COVID‑19, lorsque certains enseignants, contraints de donner leurs cours en ligne, ont rencontré des difficultés liées à leurs compétences limitées en informatique et à leur manque de formation aux méthodes d’enseignement en ligne. Afin d’aider les enseignants, de nombreux organismes de formation au Royaume-Uni proposent des modules pour lui donner confiance, les aider à rester en poste et motivés face à leurs stratégies d’enseignement en ligne. En Corée, le ministère de l’Emploi et du Travail prévoit de concevoir et mettre en œuvre un programme d’enseignement pour doter les enseignants et les responsables des centres de formation des compétences nécessaires pour qu’ils puissent proposer leurs formations en ligne.

  • Concevoir des méthodes d’évaluation et de validation efficaces est important pour garantir que les formations, formelles ou non, soient valorisées sur le marché du travail. Les tests, les questionnaires et les évaluations commencent à occuper une place importante dans les formations à distance. Ils permettent de consolider les apprentissages et de mesurer l’efficacité du cours. Plusieurs initiatives existent déjà. En France, la plateforme PIX (https://pix.fr/) permet aux utilisateurs de répondre à des tests dans 16 domaines qui touchent aux compétences numériques et de partager leur profile de compétences directement avec leur employeur. Il est également possible d’obtenir une certification de compétences numériques (après une session de certification dans un centre PIX). Une solution innovante consiste en l’adoption de badges numériques : des dispositifs numériques qui contiennent des informations sur les individus, l’émetteur de l’insigne (prestataire d’enseignement ou de formation), les critères d’obtention de l’insigne et des éléments de référence le cas échéant. Dans le secteur de l’enseignement formel, de nombreux pays s’interrogent sur la manière d’évaluer les formations suivies à distance. Pendant la crise du COVID‑19, la plupart des pays ont annulé leurs examens et prévoient d’évaluer les élèves uniquement d’après les cours suivis avant le confinement, c’est-à-dire avant que les cours ne soient proposés en ligne. Les pays qui ont maintenu leurs examens prévoient qu’ils se déroulent en mode présentiel. Les modalités d’une évaluation en ligne restent au cœur des réflexions.

  • Instaurer des mécanismes d’assurance qualité pour l’apprentissage en ligne est essentiel pour s’assurer que les participants retirent une juste contrepartie des formations suivies à distance en échange de l’argent et du temps consacrés. La question se pose de savoir si les formations en ligne nécessitent un système d’assurance qualité spécifique. Ceux qui se montrent favorables à l’instauration de critères de qualité adaptés ont proposé de multiples méthodes pour garantir la qualité de l’apprentissage en ligne, mais il existe peu de programmes qui les appliquent concrètement et aucun au niveau national (Butcher, 2013[16] ; Esfijani, 2018[17]). Aux États-Unis, le programme (privé) Quality Matters a instauré des valeurs de référence nationales pour les formations en ligne et est devenu un « processus reconnu au niveau national, centré sur les compétences et mené par les pairs, conçu pour certifier la qualité des cours à distance et des contenus en ligne ». En Europe, l’association européenne des universités à distance (EADTU) a créé OpenupEd, un des plus grands fournisseurs de MOOC pour l’enseignement supérieur. Les partenaires d’OpenupEd ont identifié 8 caractéristiques que les formations devaient présenter : être à l’écoute de l’apprenant, être libre et ouvert à tous les apprenants, proposer des outils numériques libres de droits, favoriser l’apprentissage en autonomie, faciliter les interactions par média interposé, offrir la possibilité d’être reconnu, être centré sur la qualité, refléter la diversité. En 2014, l’EADTU a créé un label de qualité pour les MOOC, adapté à la fois à l’apprentissage en ligne et à l’enseignement à distance (Rosewell, 2014[18]). Plus généralement, la crise du COVID‑19 sera l’occasion d’évaluer en contexte réel les répercussions de l’apprentissage en ligne sur l’emploi et les salaires, par rapport à l’enseignement en présentiel. Les résultats de cette évaluation permettraient d’identifier les aspects de l’apprentissage en ligne qui sont les plus susceptibles d’entraîner des retombées positives pour les participants, toutes choses étant égales par ailleurs. Ils permettraient également de mettre en évidence le fait que ces aspects diffèrent ou non de ceux identifiés dans l’enseignement en présentiel, justifiant, le cas échéant, l’instauration d’un système d’assurance qualité spécifique.

  • Renforcer l’infrastructure numérique est un point fondamental relatif à l’environnement de travail pour que l’apprentissage en ligne puisse être envisagé. L’inégalité d’accès à internet risque d’exacerber les inégalités déjà en jeu dans l’enseignement et la formation. Pendant la crise du COVID‑19, plusieurs pays ont envisagé de commencer à financer l’accès à internet au même titre qu’un service de base auquel tous les citoyens peuvent accéder, y compris ceux qui vivent dans des régions rurales ou issus de milieux défavorisés. Dans l’Ontario, les élèves des écoles et les familles qui en avaient besoin ont reçu gratuitement des iPad assortis d’un accès à internet. Il est également essentiel d’aider les enseignants de manière équitable à adapter leurs cours aux environnements numériques, par exemple en leur expliquant qu’il ne faut pas trop recourir à l’apprentissage à distance en temps réel pour ne pas pénaliser les élèves qui ne bénéficient pas d’un accès à internet de qualité, qui partagent leur outil de travail à la maison ou chez qui d’autres membres de la famille utilisent la connexion internet pour d’autres activités (Lederman, 2020[19]).

 
Actions pour élargir la portée de l’apprentissage en ligne pour les adultes

Améliorer les compétences numériques de base pour aider les adultes peu qualifiés à accéder à l’apprentissage en ligne.

Motiver les apprenants à distance pour les inciter à poursuivre la formation et améliorer les taux de réussite.

Concevoir des méthodes d’évaluation et de validation efficaces afin de s’assurer que l’apprentissage en ligne soit valorisé sur le marché du travail.

Enrichir l’offre de cours en ligne pour intégrer davantage les professions manuelles.

Former les enseignants des formations à distance pour améliorer la qualité des cours en ligne.

Instaurer des mécanismes d’assurance qualité pour l’apprentissage en ligne afin de s’assurer que les participants retirent une juste contrepartie des formations suivies à distance en échange de l’argent et du temps consacrés.

Renforcer l’infrastructure numérique et recourir à des méthodes pédagogiques qui limitent les besoins dans ce domaine.

 Travailler avec l’OCDE

L’équipe de l’OCDE sur les compétences participe actuellement à plusieurs projets qui portent sur différents aspects de la formation des adultes, notamment l’inclusion, la réactivité du système, l’assurance qualité, la certification et l’orientation professionnelle. Afin d’accompagner ces projets, elle a créé le tableau de bord sur les priorités de la formation des adultes, un outil interactif qui permet aux pays de comparer leur système de formation des adultes avec celui des autres et avec la moyenne des pays de l’OCDE ; et la base de données « Skills for Jobs » afin de mesurer les déséquilibres en matière de compétences parmi plus de 40 pays et régions, dans la zone OCDE et au-delà. L’équipe est également sur le point de s’embarquer sur un nouveau grand projet pour analyser les possibilités d’utilisation de l’IA dans le domaine de la formation. Comme cela est abordé dans cette synthèse, l’IA peut permettre d’augmenter la participation aux formations en ligne en adaptant le contenu et les méthodes d’évaluation à l’utilisateur. Elle a également la capacité d’enrichir l’offre de formations en ligne en proposant d’autres formations que celles traditionnellement destinées aux emplois intellectuels. Des examens par pays sur les priorités nationales et les défis à relever dans le domaine de la formation des adultes, de l’évaluation des compétences et des systèmes d’anticipation ont déjà été menés dans douze pays et contiennent des analyses des actions menées et des recommandations, formulées sur mesure.

Références

[8] Banque mondiale (2020), « How countries are using edtech (including online learning, radio, television, texting) to support access to remote learning during the COVID-19 pandemic », Brief, https://www.worldbank.org/en/topic/edutech/brief/how-countries-are-using-edtech-to-support-remote-learning-during-the-covid-19-pandemic (consulté le 28 avril 2020).

[15] Butcher, N. (2013), A Guide to Quality in Online Learning, Academic Partnerships.

[11] Credly, J., E. Knight et S. Manning (2013), The Potential and Value of Using Digital Badges for Adult Learners Final Report.

[16] Esfijani, A. (2018), « Measuring Quality in Online Education: A Meta-synthesis », American Journal of Distance Education, vol. 32/1, pp. 57-73, http://dx.doi.org/10.1080/08923647.2018.1417658.

[20] Eurostat (2016), Classification of learning activities (CLA) MANUAL 2016 edition, http://dx.doi.org/10.2785/874604.

[19] Fialho, P., G. Quintini et M. Vandeweyer (2019), Returns to different forms of job training: Factoring in informal learning, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/b21807e9-en.

[13] Hwa Choi, D., A. Dailey-Hebert et J. Simmons Estes (2016), Emerging Tools and Applications of Virtual Reality in Education, IGI Global.

[18] Lederman, D. (2020), How the shift to remote learning might affect students, instructors and colleges, https://www.insidehighered.com/digital-learning/article/2020/03/25/how-shift-remote-learning-might-affect-students-instructors-and (consulté le 25 avril 2020).

[12] Minocha, S., A. Tudor et S. Tilling (2017), Affordances of Mobile Virtual Reality and their Role in Learning and Teaching Conference or Workshop Item Affordances of Mobile Virtual Reality and their Role in Learning and Teaching, The Open University, http://oro.open.ac.uk/id/eprint/49441 (consulté le 29 avril 2020).

[10] Murray, S. (2 019), Moocs struggle to lift rock-bottom completion rates | Financial Times, https://www.ft.com/content/60e90be2-1a77-11e9-b191-175523b59d1d (consulté le 25 avril 2020).

[4] OCDE (2020), L’importance des compétences : Résultats supplémentaires de l’évaluation des compétences des adultes, Études de l’OCDE sur les compétences, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/176f15d3-fr.

[6] OCDE (2020), « Public employment services in the frontline for employees, workers and employers », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, http://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/public-employment-services-in-the-frontline-for-employees-jobseekers-and-employers-c986ff92/.

[5] OCDE (2020), « VET in a time of crisis: Building foundations for resilient vocational education and training systems », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, http://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/vet-in-a-time-of-crisis-building-foundations-for-resilient-vocational-education-and-training-systems-efff194c/.

[3] OCDE (2019), Dashboard on priorities for adult learning - OECD, http://www.oecd.org/employment/skills-and-work/adult-learning/dashboard.htm (consulté le 16 avril 2020).

[1] OCDE (2019), Getting Skills Right: Future-Ready Adult Learning Systems, Getting Skills Right, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264311756-en.

[2] OCDE (2019), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2019 : L’avenir du travail, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/b7e9e205-fr.

[14] Pomerantz, J. (2019), XR for Teaching and Learning, https://www.educause.edu/hp-xr-2. (consulté le 29 avril 2020).

[9] Rivard, R. (2013), Researchers explore who is taking MOOCs and why so many drop out, https://www.insidehighered.com/news/2013/03/08/researchers-explore-who-taking-moocs-and-why-so-many-drop-out (consulté le 25 avril 2020).

[17] Rosewell, J. (2014), OpenupEd label, quality benchmarks for MOOCs, http://e-xcellencelabel.eadtu.eu/. (consulté le 29 avril 2020).

[7] UNESCO (2020), « National learning platforms and tools », https://en.unesco.org/covid19/educationresponse/nationalresponses (consulté le 28 avril 2020).

Contact

Stefano SCARPETTA (✉ stefano.scarpetta@oecd.org)

Glenda QUINTINI (✉ Glenda.Quintini@oecd.org).

Notes

1.

Entre le 14 et le 30 mars 2020, 18 663 demandes de participation à des programmes de formation en ligne gratuits ont été reçues, contre 5 145 à la même période l’année passée (https://www.hildecrevits.be/nieuws/aantal-aanvragen-online-opleidingen-vdab-piekt/).

2.

Les formations formelles se déroulent généralement dans un établissement qui fait partie du système de l’éducation du pays et donnent lieu à l’obtention d’une qualification une fois la formation terminée. Les formations non formelles sont généralement organisées par les employeurs, des organismes de formation privés ou des organisations professionnelles (Eurostat, 2016[21]). Parmi les travailleurs, l’apprentissage informel – l’apprentissage par la pratique ou par des collègues et des supérieurs – représente une part importante des activités d’apprentissage et concerne près de 70 % des travailleurs sur une année, contre 40 % de travailleurs qui participent à une formation non formelle et 8 % qui suivent une formation formelle (Fialho, Quintini et Vandeweyer, 2019[20]).. Seules les formations formelles et non formelles peuvent être suivies en ligne. Par définition, l’apprentissage informel ne fait pas partie d’un cursus. De plus, on ne sait pas clairement comment l’apprentissage informel a été perturbé par le confinement et cette appréciation sort du champ de cette synthèse.

3.

Les données tirées du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC) correspondent à la participation à des activités de formation à distance non formelle, comprenant potentiellement des cours par correspondance. Comme ces cours sont devenus rares, les statistiques présentées donnent une valeur approximative fiable, bien qu’imparfaite, de l’incidence du recours à l’apprentissage en ligne parmi les participants à une activité de formation non formelle. Voir également les définitions de l’Encadré 1.

4.

Bien que les données ne soient pas disponibles, il est très probable que les formations non-formelles dispensées ou prévues par les employeurs aient été interrompues et reprogrammées, en particulier si elles devaient se dérouler sur le lieu de travail ou être dispensées par de petits organismes de formation qui n’ont pas la capacité suffisante pour adapter leurs formations et en faire des cours en ligne. Il est moins clair comment l’apprentissage informel, une forme d’apprentissage importante pour les travailleurs, a été touché par les mesures de confinement. Dans les métiers où le télétravail est possible, l’apprentissage par la pratique ou par des collègues et des supérieurs auraient pu, au moins en partie, se maintenir. Par définition, ceci n’est pas le cas des travailleurs qui bénéficient des dispositifs de chômage partiel ou qui ont été licenciés.

5.

Les dispositifs de chômage partiel prévoient des fonds supplémentaires pour que les employés puissent réduire leurs heures de travail sans devoir supporter une perte financière proportionnelle sur leur salaire net. Les employés perçoivent un salaire inférieur à celui qu’ils touchent lorsqu’ils travaillent à temps plein, mais supérieur aux allocations de chômage qu’ils auraient touchées.

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