19/12/2002 - Depuis l’entrée en vigueur de la Convention anticorruption de l’OCDE il y a plus de 20 ans, seulement deux personnes physiques ont été condamnées pour corruption transnationale en Espagne. Aucune personne morale n’y a fait l’objet d’une condamnation à ce titre. Les classements sans suite de ce type d’affaire y sont prématurés. Le parquet spécialisé ne dispose pas de suffisamment de temps pour mener à bien ses enquêtes en la matière et peine à mettre en œuvre des mesures d’enquête adéquates. L’Espagne doit régler ces problèmes sans tarder et améliorer la détection de l’infraction de corruption transnationale en prenant des dispositions législatives en faveur de la dénonciation volontaire et de la protection des lanceurs d’alerte.
Le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption (le Groupe de travail), qui rassemble 44 pays, vient d’achever son évaluation au titre de la Phase 4 de la mise en œuvre, par l’Espagne, de la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales et de ses instruments connexes. En sus des problèmes évoqués plus haut, le Groupe de travail expriment des préoccupations concernant l’interprétation restrictive de l’infraction de corruption transnationale par les juges espagnols, le délai de prescription excessivement court applicable aux actions intentées à l’encontre des personnes morales, ainsi que les modalités pratiques de déclenchement de la responsabilité pénale des personnes morales. Le Groupe de travail a adressé à l’Espagne une série de recommandations l’invitant à renforcer ses capacités de prévention et de répression de la corruption transnationale, et notamment :
- à adopter sans délai son projet de loi sur la protection des lanceurs d’alerte et à assurer la conformité de ce texte avec les normes définies dans la Recommandation anticorruption de 2021 ;
- à veiller à que les procureurs spécialisés disposent de suffisamment de temps pour mener efficacement leurs enquêtes et à ce que le seuil d’ouverture des enquêtes judiciaires portant sur des faits de corruption transnationale permette la conduite d’enquêtes et de poursuites efficaces dans ces affaires ;
- à appliquer le même délai de prescription aux personnes morales dans les affaires de corruption transnationale que celui s’appliquant aux personnes physiques ;
- à envisager d’instaurer des mécanismes d’accords hors procès dans ces affaires, en veillant à garantir que ces mécanismes respectent le droit à une procédure équitable et les principes de transparence et de responsabilité ; et
- à mieux sensibiliser les entreprises de toutes tailles à l’infraction de corruption transnationale, et à inciter les entreprises, en particulier les PME, à mettre en place des programmes de conformité anticorruption.
Les auteurs du rapport soulignent aussi un certain nombre d’évolutions positives et de bonnes pratiques, telles que l’augmentation du nombre d’enquêtes portant sur des affaires de corruption transnationale, la consolidation des dispositions légales relatives à l’infraction de corruption transnationale, la clarification du régime de responsabilité pénale des personnes morales suite à la réforme du code pénal menée en 2015, la détection accrue de la corruption transnationale au moyen des dispositifs de lutte contre le blanchiment de capitaux, ainsi que l’adoption d’une infraction de corruption transnationale aggravée qui porte à neuf ans, dans certains cas, la peine d’emprisonnement maximale applicable. Les autorités espagnoles font en outre preuve de beaucoup de diligence et d’expertise pour traiter les demandes d’entraide judiciaire qu’elles envoient ou auxquelles elles répondent.
Le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption a adopté le Rapport de Phase 4 consacré à l’Espagne le 8 décembre 2022. Ce rapport fait partie de la quatrième phase d’évaluation de ses membres lancée par le Groupe de travail en 2016. Au cours de la Phase 4 sont examinées les difficultés et les avancées propres au pays évalué. Il couvre également des questions telles que les activités de détection et de répression, la responsabilité des personnes morales et la coopération internationale, ainsi que les problèmes non résolus ayant été mis au jour dans les rapports rédigés au titre des phases précédentes. Dans ce rapport, le Groupe de travail recense, aux pages 97 à 102, l’ensemble des recommandations adressées à l’Espagne. Il y présente en outre une vue d’ensemble des mesures de mise en œuvre récentes ainsi que des caractéristiques juridiques, réglementaires et institutionnelles du dispositif espagnol de lutte contre la corruption d’agents publics étrangers. L’Espagne présentera dans un an (en décembre 2023) un compte rendu oral faisant le point sur l’état d’avancement de son projet de loi sur la protection des lanceurs d’alerte et sur les progrès de son action répressive dans le domaine de la corruption transnationale. Dans deux ans (en décembre 2024), elle présentera au Groupe de travail un rapport écrit présentant les mesures qu’elle aura prises pour mettre en œuvre l’ensemble des recommandations qui lui ont été adressées, ainsi que les actions répressives qu’elle aura menées. Le rapport de suivi sera également rendu public.
Pour plus d’informations, les journalistes sont invités à prendre contact avec Mme Amelia Godber, Chargée de communication, Division anticorruption de l’OCDE (+33 (0)1 45 24 85 75). Pour plus d’informations sur les travaux de l’OCDE consacrés à la lutte contre la corruption en Espagne, vous êtes invités à consulter https://www.oecd.org/fr/daf/anti-corruption/espagne-conventiondelocdesurlaluttecontrelacorruption.htm
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