Édifier une culture fiscale, civique et citoyenne est tout aussi important aujourd’hui que lors de la publication par l’OCDE du premier ouvrage sur ce thème en 2015. Malgré les avancées significatives de la coopération fiscale internationale pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, de nombreux défis restent à relever pour mobiliser des ressources intérieures. La pandémie de Covid-19 a réduit l’activité économique tout en accroissant la pression exercée sur les États pour fournir des biens publics. Dans ce contexte, les Etats doivent recourir à des politiques fiscales ambitieuses, mises en œuvre avec détermination, pour mobiliser les recettes dont ils ont besoin. Les ressources humaines et financières des administrations fiscales demeurent cependant limitées et, bien que les vérifications fiscales, pénalités et autres mesures coercitives aient un rôle important à jouer, le respect des obligations fiscales doit être au cœur des systèmes fiscaux. Il est donc essentiel de renforcer le civisme fiscal à l’appui des efforts de mobilisation des recettes intérieures des pays.
Il est tout particulièrement important d’accompagner les efforts en faveur de l’éducation des contribuables consentis par les pays en développement, dont le nombre de contribuables par habitant, le niveau des recettes et le civisme fiscal sont relativement plus faibles. Lesdits pays rencontrent en effet de multiples difficultés : étroitesse des bases d’imposition (d’où un nombre moins élevé de contribuables), et faiblesse des recettes et du niveau déclaré de civisme fiscal. Ainsi, si les initiatives d’éducation des contribuables sont importantes pour tous les pays, elles le sont davantage encore pour les pays en développement. Ces initiatives permettent d’entrer en contact avec les nouveaux contribuables, d’expliquer le rôle de la fiscalité dans la société, de développer le civisme fiscal, et à terme, d’accroître les recettes. Cet ouvrage a par conséquent été essentiellement conçu à l’intention des pays en développement, même s’il s’adresse également à un public plus large.
Cet ouvrage s’appuie sur les travaux débutés en 2015 pour aider les administrations fiscales, des pays en développement en particulier, dans l’élaboration et la mise en œuvre d’initiatives d’éducation des contribuables. Pour répondre à des besoins exprimés par certains pays, il a été décidé d’en étendre la portée pour couvrir un plus large éventail de pays, de toutes catégories de revenus et de toutes les régions du monde. À cette fin, cet ouvrage s’appuie sur l’expérience de 59 pays, recueillie dans le cadre d’une enquête et dresse un panorama unique des initiatives en faveur de l’éducation des contribuables actuellement menées à travers le monde. Il propose également une méthodologie simple en quatre étapes, destinée à faciliter la conception et la mise en œuvre concrètes de telles initiatives.
L’éducation des contribuables peut prendre diverses formes, selon les besoins et les ressources propres à chaque pays. Les 140 initiatives couvertes dans le présent ouvrage attestent de la diversité des approches adoptées : des concours de rédaction d’essais à l’intention des étudiants aux ateliers sur les nouvelles réglementations fiscales ; des efforts engagés pour sensibiliser les contribuables de demain encore scolarisés au soutien apporté aux contribuables d’aujourd’hui pour les aider à remplir leur déclarations fiscales. L’éducation des contribuables ne consiste pas uniquement à dispenser des formations dans un environnement formel, il s’agit également de renforcer la communication entre citoyens et administrations fiscales, en rappelant notamment aux contribuables les principales échéances à respecter, mais aussi de faire preuve de transparence et d’expliquer de manière compréhensible pour les citoyens l’utilisation qui est faite des recettes fiscales. L’éducation des contribuables englobe également les mesures prises pour entrer en contact avec les groupes de citoyens qui n’ont que peu d’interactions avec les administrations fiscales, parce qu’ils sont vulnérables, résident loin des grandes villes ou n’ont pas suffisamment accès aux technologies. Les initiatives d'éducation des contribuables utilisent toute la palette des moyens de communication disponibles, aussi bien physiques que virtuels. Il est clair qu’il n’existe pas d’approche universelle, et les pays, eu égard aux contraintes pesant sur leurs ressources, entreprennent différentes initiatives pour atteindre leurs objectifs.
Ces initiatives, en dépit de leur diversité, partagent un certain nombre de caractéristiques, ce qui permet d’élaborer une taxonomie des programmes d’éducation des contribuables et d’identifier certaines approches, problématiques et solutions communes. Toutes les initiatives d'éducation des contribuables apparaissent centrées sur l’une de ces trois approches fondamentales :
1. Enseigner la fiscalité à travers un engagement constant et souvent de longue durée avec tout type de public qu’il s’agisse des plus jeunes, des adultes ou des entrepreneurs ;
2. Communiquer sur la fiscalité, à travers des campagnes de sensibilisation de haut niveau auprès des contribuables. Ces initiatives englobent les campagnes sur les réseaux sociaux, les foires fiscales et les émissions de télévision. Elles incluent également des approches plus scientifiques qui s’appuient sur l’économie comportementale pour adapter les communications afin de susciter des réponses positives ;
3. Fournir une assistance pratique et directe aux contribuables, notamment les plus vulnérables, pour faciliter l’utilisation des outils modernes de l’e-administration et pour les accompagner dans leurs obligations fiscales y compris déclaratives.
Cet ouvrage détaille chacune de ces approches, dont il identifie à la fois les difficultés communes et les solutions pour y remédier. Il s’agit d’une ressource précieuse destinée à inspirer et accompagner les acteurs en charge de la conception et la mise en œuvre des initiatives d’éducation des contribuables.
Les administrations fiscales ne s’engagent pas seules dans l’éducation des contribuables. Bon nombre des initiatives présentées dans cet ouvrage sont menées en partenariat, soit avec d’autres administrations, y compris des collectivités locales, soit avec d’autres institutions telles des établissements scolaires, des associations professionnelles ou des organisations non gouvernementales. Les partenariats offrent des opportunités d’expansion et de développement des initiatives d’éducation des contribuables qui pourraient autrement ne pas être possibles, surtout lorsque les ressources des administrations fiscales sont limitées. De plus, ces partenariats peuvent faciliter l’accès à des populations cibles, des compétences, des ressources spécifiques et du soutien logistique. Un certain nombre d’acteurs non gouvernementaux s’engagent également dans des activités d’éducation des contribuables indépendamment des administrations fiscales ; quoique de telles initiatives ne soient pas couvertes par l’enquête, l’ouvrage souligne le rôle important qu’elles peuvent jouer dans l’éducation des contribuables.
S’il existe des preuves tangibles que l’éducation des contribuables donne des résultats positifs, de plus amples efforts doivent être consentis pour mieux suivre et évaluer les initiatives dans ce domaine, en particulier sur le long terme. Les réponses à l’enquête menée par l’OCDE auprès de 59 pays ont montré que les initiatives d'éducation des contribuables ont eu un impact positif dans plusieurs domaines, le plus manifeste étant l’accroissement du civisme fiscal. Néanmoins, seule la moitié des initiatives couvertes par le présent ouvrage a fait l’objet d’une évaluation, d’où la nécessité de renforcer la collecte d’éléments factuels sur l’ impact des initiatives d’éducation des contribuables. D’autre part, les évaluations, lorsqu’elles existent, sont généralement centrées sur les impacts à court terme des initiatives, alors que nombre d’entre elles ont des objectifs à long terme. S’il peut être difficile d’évaluer ces initiatives, surtout sur le long terme, il est essentiel de mieux appréhender le fonctionnement de l’éducation des contribuables, ainsi que les moyens d’en améliorer l’efficacité.
Toutes les administrations n’ont pas encore totalement exploité le potentiel de l’éducation des contribuables, qui pour être pleinement réalisé, nécessite un renforcement du dialogue et une meilleure intégration au sein du système fiscal. L’ensemble des initiatives recensées dans l’ouvrage de 2015, à l’exception d’une seule, se poursuivent encore aujourd'hui. La plupart d’entre elles ont été étendues et les possibilités d’expansion restent considérables, comme en attestent les nouvelles initiatives recensées dans la présente édition. Les possibilités de recourir aux initiatives d'éducation des contribuables pour faciliter le retour d’informations sur les politiques de renforcement du civisme fiscal sont manifestes dans certains pays, mais sont loin d’être universelles. La disponibilité des ressources constitue un défi pour de nombreux pays, tandis que d’autres craignent que la priorité donnée à l’éducation des contribuables soit insuffisante.
L’OCDE continuera d’encourager la recherche et le développement dans le domaine de l’éducation des contribuables, et du civisme fiscal en général. Cet ouvrage s’inscrit dans le cadre de travaux plus vastes de l’OCDE qui conduit de nouvelles recherches et encourage le dialogue mondial sur divers aspects du civisme fiscal dans les pays en développement. Ces travaux, qui portent sur les entreprises et les particuliers, mettent en avant l’importance d’élaborer des outils et des approches adaptés pour développer la motivation intrinsèque à payer l’impôt, laquelle est essentielle pour garantir la pérennité des recettes sur le long terme.