Comme la plupart des autres populations dans le monde, les Lettons ont beaucoup souffert de la pandémie de COVID-19. Après n’avoir enregistré quasiment aucun cas d’infection durant la première vague de la pandémie au printemps 2020, la Lettonie a été sévèrement touchée par une deuxième vague, puis par une nouvelle flambée des cas à partir de l’été 2021 (Graphique 1.1). Jusqu’à présent, la vaccination a été lente : seuls quelque 67 % des Lettons disposaient d’un schéma vaccinal complet à la mi-janvier 2022 (partie C), un niveau proche de la moyenne de l’Union européenne (UE), mais inférieur au taux moyen de la zone OCDE, sachant qu’il existe des disparités régionales importantes au sein du pays (Central Statistical Bureau, 2021[1]). La plupart des mesures d’endiguement imposées au début de la pandémie ont été levées à la fin juin, dopant l’activité économique, mais un état d’urgence de trois mois a été déclaré le 11 octobre, à la suite de la résurgence des infections pendant l’été…
Études économiques de l'OCDE : Lettonie 2022 (version abrégée)
1. Principaux éclairages sur l’action publique
La pandémie s’est superposée à des faiblesses structurelles et des problèmes sociaux connus de longue date. Bien qu’il continue de converger vers les niveaux dont jouissent les partenaires commerciaux de la Lettonie les plus prospères, le revenu par habitant en 2020, à parité de pouvoir d’achat, était encore inférieur de 22.5 % à la moyenne de l’OCDE et de près de 45 % à la moitié supérieure (Graphique 1.2). Le pays a toutefois continué de rattraper son retard pendant la crise liée au COVID-19 (au cours des 18 derniers mois).
Les inégalités de revenu et de patrimoine sont assez marquées : selon les dernières estimations, la Lettonie avait un coefficient de Gini de 34.5 en 2020, soit une valeur plus élevée que celle estimée pour la plupart des autres pays de l’OCDE (voir le Graphique 1.4 plus bas). La proportion du patrimoine net détenu par les ménages du quintile supérieur était d’environ 60 % en 2015, soit le quatrième taux le plus élevé parmi 27 pays de l’OCDE. La pauvreté absolue est très répandue, également en termes relatifs, en particulier parmi les personnes âgées (Graphique 1.3).
Dans ce contexte, les principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
L’économie lettone est en expansion, affichant en 2021 une croissance supérieure à son niveau potentiel grâce à l’orientation expansionniste de la politique budgétaire nationale et à la politique monétaire accommodante mise en œuvre dans la zone euro. De grandes incertitudes subsistent toutefois. En conséquence, les mesures de soutien budgétaire destinées aux entreprises et aux ménages touchés par les restrictions devraient être maintenues. Il conviendrait d’élaborer une stratégie budgétaire crédible pour préparer le pays aux enjeux liés au vieillissement démographique et au climat.
Les politiques publiques devraient être davantage axées sur l’inclusion et la durabilité environnementale. Bien que l’on observe une amélioration notable à long terme de la qualité de vie du Letton moyen, les écarts de revenu, entre autres, demeurent non négligeables. Une hausse des dépenses publiques en matière de retraites, de logements abordables, de santé et de soins de longue durée s’impose, mais devrait être financée par une augmentation des recettes collectées au titre de divers impôts. Le coût futur des retraites devrait être allégé par des relèvements supplémentaires de l’âge d’ouverture des droits à la retraite, outre ceux déjà prévus. Une partie des fonds destinés à la santé pourraient être dégagés en améliorant encore l’efficience du réseau hospitalier, mais des ressources bien plus importantes sont nécessaires pour financer la prévention, les soins primaires et à domicile et la prise en charge des troubles mentaux. Une plus grande attention devrait en outre être accordée aux résultats environnementaux et à la transition vers la neutralité carbone.
La stratégie de croissance de la Lettonie doit impérativement mettre l’accent sur les exportations, compte tenu des perspectives démographiques du pays. Cependant, la part de marché des exportations lettones de biens et de services est faible, ce qui tient peut-être à la structure sectorielle de l’économie, où les exportateurs s’appuient davantage sur la faiblesse des coûts de main-d’œuvre que sur l’innovation. Cela dit, la Lettonie est bien placée pour entreprendre les réformes structurelles nécessaires, dans la mesure où d’importants financements de l’UE seront mis à disposition au cours des prochaines années. Pour favoriser la croissance des exportations et leur diversification et pour attirer des IDE dans des secteurs d’activité plus complexes, les pouvoirs publics devraient se concentrer sur trois domaines d’action : l’environnement des entreprises (y compris les infrastructures), les compétences et l’innovation.
L’économie se redresse, mais les risques à la baisse demeurent importants
La crise liée au COVID-19 a interrompu la progression des revenus et de l’emploi en Lettonie. Le PIB par habitant est passé de 62 % de la moyenne de l’OCDE en 2015 à 71 % en 2021. Avant la crise, le taux de chômage était tombé en dessous de 6½ pour cent (son plus bas en 10 ans), tandis que le nombre d’emplois vacants augmentait rapidement. Par ailleurs, le contexte macroéconomique paraissait équilibré, avec une inflation largement maîtrisée et des politiques budgétaires prudentes. Dans le sillage de la pandémie de COVID-19, le taux de chômage a atteint un sommet d’environ 8.7 %, sachant que le nombre d’heures travaillées a diminué plus fortement pour les femmes que pour les hommes (Ciminelli, Schwellnus et Stadler, 2021[2]). Les nouveaux chômeurs sont essentiellement des jeunes adultes vivant à Riga. Le recul du PIB a toutefois été plus faible que dans la plupart des autres pays de l’OCDE du fait de l’ampleur relativement modérée de la première vague de contaminations par le COVID-19, ainsi que de la résilience de la demande des principaux biens d’exportation lettons, tels que le bois, les produits agricoles et le matériel électronique.
Malgré le caractère plus violent et plus meurtrier de la deuxième vague, l’activité a subi un choc moins brutal que durant la première vague. Les dépenses privées se sont redressées à compter du printemps de 2021, les ménages et les entreprises s’adaptant tout d’abord aux mesures de restriction encore en vigueur, puis à leur levée complète. Elles sont également soutenues par la forte progression des salaires, attribuable à l’augmentation du salaire minimum légal en janvier 2021, aux hausses de salaire dans le secteur public (notamment pour les professionnels de la santé et les enseignants), ainsi qu’aux pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs à forte intensité de compétences tels que les technologies de l’information et de la communication (TIC) et les services professionnels. Au deuxième trimestre de 2021, le PIB réel avait déjà retrouvé son niveau antérieur à la crise. Au cours du troisième trimestre, la croissance du PIB a de nouveau ralenti, l’activité dans certains secteurs restant modérée en partie à cause des mesures liées à la pandémie et au lent déploiement de la vaccination.
Malgré un confinement d’une durée d’un mois, le PIB s’est maintenu au quatrième trimestre. Il est resté presque inchangé par rapport au troisième trimestre et la croissance du PIB sur l’ensemble de l’année 2021 s’établit à 4.8%. Des possibilités de dépenses restreintes et une hausse des prix ont réduit la consommation privée. La croissance des exportations a ralenti mais elle est restée solide. Tirée par les produits minéraux, les produits chimiques, les métaux de base et les produits du bois, la valeur des biens exportés en décembre 2021 était 36% supérieure à son niveau de décembre 2020. En 2021, les secteurs d’activités qui ont augmenté le plus rapidement sont les technologies de l’information et de la communication, les services financiers et les soins de santé. En 2021, l’investissement dans les équipements a été solide mais est contrebalancé par une baisse importante dans le domaine du logement en raison de conditions météorologiques défavorables et d’une hausse des coûts. En baisse continuelle depuis le mois de juin 2021, le taux de chômage (corrigé des variations saisonnières) est reparti quelque peu à la hausse à partir d’octobre 2021 pour atteindre 7.3% en janvier 2022. La nécessité d’être vacciné pour travailler dans certains secteurs ainsi que l’inadéquation des compétences pourraient avoir empêché des bénéfices plus rapide en terme d’emplois. L’inflation, qui se maintient en territoire positif depuis mars 2021, a atteint 7.4 % en glissement annuel en janvier 2022, essentiellement sous l’effet de la hausse des prix des logements, des produits alimentaires et du gaz naturel, tandis que le taux d’inflation sous-jacente (hors énergie, alimentation, alcool et tabac) s’établissait à 3.7 %.
La croissance économique devrait être vigoureuse, mais les risques à la baisse demeurent importants. Selon les dernières Perspectives Économiques de l’OCDE (décembre 2021) le PIB devrait croître de 3.6 % en 2022 et de 4.8 % en 2023 (Tableau 1.1). Les exportations de marchandises resteront dynamiques, malgré des inquiétudes concernant les pénuries mondiales de certains composants essentiels (en particulier les semi-conducteurs) et la hausse des coûts du transport maritime par conteneur. Les secteurs les plus tributaires des contacts en tête à tête (notamment les voyages et le transport aérien) devraient se redresser plus lentement, ce qui devrait avoir des effets non négligeables sur le reste de l’économie. Une accélération des dépenses en capital, étayée par les financements de l’UE, notamment au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience, devrait soutenir la croissance à moyen terme. L’inflation globale marquera progressivement le pas en 2022, avant d’augmenter à nouveau en 2023 à mesure que le marché du travail se tendra.
L’incertitude est grande, compte tenu des importants facteurs de vulnérabilité et risques à la baisse pesant sur l’activité (Tableau 1.2), y compris ceux associés à la pandémie actuelle. Une vague massive de contaminations par le COVID-19 s’est déclarée à la fin de l’été 2021, conduisant à l’instauration d’un état d’urgence de trois mois le 11 octobre. Une autre vague a débuté à la fin de l’année 2021 et n’a atteint son sommet qu’au milieu du mois de février 2022. Parmi les autres risques à la baisse figurent les tensions géopolitiques et commerciales, ainsi que le processus de démondialisation que la crise liée au COVID-19 est susceptible d’encourager et qui pourrait remettre en cause la gestion des chaînes d’approvisionnement, engendrer des coûts supplémentaires pour les entreprises et nuire à la croissance de la productivité dans le monde entier. Ces risques pourraient entraîner une hausse de l’inflation en Lettonie, notamment dans le secteur du bâtiment, compte tenu de la vigueur de la progression des salaires dans un contexte de manque de capacités, en particulier de main-d’œuvre qualifiée. L’inflation pourrait devenir structurellement plus élevée que prévu à mesure que les prix se rapprochent de ceux des partenaires commerciaux les plus prospères.
Tableau 1.1. Indicateurs et prévisions macroéconomiques
Variation annuelle en pourcentage, en volume (aux prix de 2015)
2018 |
2019 |
2020 |
Estimations et prévisions |
|||
---|---|---|---|---|---|---|
À prix courants (milliards EUR) |
2021 |
2022 |
2023 |
|||
Produit intérieur brut (PIB) |
29.2 |
2.5 |
-3.8 |
4.8 |
3.6 |
4.8 |
Consommation privée |
17.3 |
0.2 |
-7.4 |
4.8 |
4.2 |
5.6 |
Consommation publique |
5.3 |
3.4 |
2.6 |
4.4 |
1.9 |
2.0 |
Formation brute de capital fixe |
6.4 |
6.9 |
0.2 |
3.0 |
6.2 |
7.4 |
Logement |
0.7 |
3.8 |
-1.9 |
-14.6 |
5.0 |
4.3 |
Demande intérieure finale |
29.0 |
2.3 |
-3.8 |
4.2 |
4.2 |
5.3 |
Variation des stocks1 |
0.3 |
0.9 |
0.0 |
5.0 |
-1.1 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
29.4 |
3.1 |
-4.0 |
9.2 |
2.9 |
5.1 |
Exportations de biens et de services |
17.9 |
2.1 |
-2.2 |
6.2 |
5.1 |
4.4 |
Importations de biens et de services |
18.1 |
3.0 |
-2.5 |
13.5 |
4.0 |
4.8 |
Solde extérieur1 |
-0.2 |
-0.6 |
0.2 |
-4.2 |
0.6 |
-0.4 |
Autres indicateurs (taux de croissance, sauf indication contraire) |
|
|
|
|
||
PIB potentiel |
.. |
3.0 |
2.8 |
2.7 |
2.8 |
2.8 |
Écart de production2 |
.. |
0.0 |
-6.2 |
-4.7 |
-4.0 |
-2.0 |
Emploi |
.. |
0.1 |
-1.9 |
-2.9 |
2.2 |
1.3 |
Taux de chômage (% de la population active) |
.. |
6.3 |
8.1 |
7.5 |
6.6 |
6.2 |
Déflateur du PIB |
.. |
2.6 |
-0.1 |
6.7 |
4.1 |
2.7 |
Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) |
.. |
2.7 |
0.1 |
3.2 |
4.9 |
2.7 |
IPCH sous-jacent³ |
.. |
2.2 |
0.9 |
1.9 |
3.8 |
2.7 |
Taux d’épargne net des ménages (% du revenu disponible) |
.. |
0.1 |
9.1 |
12.9 |
8.2 |
4.9 |
Solde des paiements courants (% du PIB) |
.. |
-0.7 |
2.9 |
-3.3 |
-2.1 |
-2.3 |
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) |
.. |
-0.6 |
-4.5 |
-8.7 |
-5.4 |
-3.9 |
Solde financier primaire sous-jacent des administrations publiques² |
.. |
0.1 |
-1.3 |
-6.2 |
-4.2 |
-3.9 |
Dette brute des administrations publiques (% du PIB) |
.. |
48.1 |
56.1 |
61.7 |
65.4 |
67.3 |
Dette brute des administrations publiques (au sens de Maastricht, % du PIB) |
.. |
36.7 |
43.3 |
49.0 |
52.6 |
54.6 |
Dette nette des administrations publiques (% du PIB) |
.. |
11.6 |
16.9 |
24.0 |
27.6 |
29.6 |
Taux du marché monétaire à trois mois, moyenne |
.. |
-0.4 |
-0.4 |
-0.5 |
-0.5 |
-0.5 |
Rendement des obligations d’État à 10 ans, moyenne |
.. |
0.3 |
-0.1 |
0.0 |
0.0 |
0.1 |
1. Contribution aux variations du PIB réel.
2. En pourcentage du PIB potentiel.
3. Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) hors alimentation, énergie, alcool et tabac.
Source : base de données des Perspectives économiques de l’OCDE n° 110 (décembre 2021), et mise à jour des données historiques.
Tableau 1.2. Facteurs de vulnérabilité de l’économie lettone
Facteur de vulnérabilité |
Conséquences possibles |
---|---|
Nouvelle vague de propagation massive de la pandémie dans le monde. |
Les autorités imposeraient très probablement de nouvelles mesures d’endiguement qui pèseraient sur l’activité économique et l’emploi et détérioreraient les finances publiques. On ignore l’impact que cela aurait sur le solde extérieur. |
Concrétisation des risques géopolitiques ou intensification des tensions commerciales mondiales. |
Des tensions géopolitiques ou des perturbations des échanges commerciaux pourraient mettre en péril les exportations et l’investissement. |
Perturbation, voire démantèlement, de certaines chaînes d’approvisionnement causée par le processus de démondialisation. |
Même si la Lettonie ne joue pas un rôle de premier plan dans les chaînes d’approvisionnement mondiales (chapitre 2), elle pâtirait d’effets stagflationnistes du fait de son intégration économique en Europe. |
Plusieurs facteurs influent sur la vigueur à moyen terme de la phase d’expansion et sur le rythme de convergence des niveaux de vie vers ceux des pays les plus prospères. Parmi ces facteurs, le plus proéminent est le recul démographique en cours (et les pertes des bénéfices d’agglomération qui en découlent) lié au déclin naturel de la population imputable à la faiblesse du taux de fécondité et à des soldes migratoires négatifs (bien que les projections officielles laissent entrevoir une inversion de cette tendance avec une légère augmentation nette de la population au cours des prochaines années). Jusqu’à présent, cette pression à la baisse a été faible du fait de l’entrée dans la population d’âge actif de la génération du modeste baby-boom des années 1980, mais elle devrait commencer à se faire sensiblement sentir à l’avenir. L’offre de main-d’œuvre pourrait aussi être affaiblie par le mauvais état de santé de certaines catégories de population, notamment les hommes seniors d’âge actif, dont les modes de vie néfastes pour la santé (notamment une forte consommation d’alcool) limitent trop souvent leur capacité de travail (voir plus bas).
Par ailleurs, certaines activités traditionnelles font ou feront probablement face à des chocs structurels négatifs. Le marché de transbordement de produits de base russes (notamment le charbon) en vue de leur réexportation par les ports lettons, ainsi que le marché de transactions financières entre l’est et l’ouest réalisées à partir des pays de la Communauté des États indépendants risquent notamment de disparaître à terme. Par ailleurs, des pressions s’exercent sur le secteur du camionnage, dans le cadre du paquet « Mobilité I » proposé par l’UE, qui obligerait le retour des camions vers l’État membre d’établissement toutes les huit semaines à compter du 21 février 2022, mais aussi sur le secteur des produits forestiers dans le cadre de la Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, ainsi que sur de larges pans de l’économie du fait de l’aggravation progressive des effets (principalement indirects) du changement climatique et de l’incertitude liée aux mesures qui seront prises par les pouvoirs publics pour y faire face.
De vastes perspectives pourraient toutefois s’ouvrir à la Lettonie si l’action publique était infléchie de manière appropriée. Grâce à des réformes et à des investissements, les entrepreneurs lettons seraient en meilleure position pour gravir les échelons de la chaîne de valeur, notamment dans les secteurs de l’alimentation (comme les produits laitiers) et du bois, où leur intégration en aval s’avère jusqu’à présent relativement limitée, et pour favoriser le développement des exportations de biens et services innovants, qui se trouve freiné par le manque de R-D (chapitre 2). D’importants financements, représentant en moyenne quelque 6 % du PIB par an, sont mis à disposition par l’UE et par l’État letton, d’une part dans le cadre de la Facilité pour la reprise et la résilience, dont une partie des fonds sera affectée à un Plan national de réindustrialisation, du Fonds de cohésion, de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche, et d’autre part grâce à la nouvelle marge de manœuvre budgétaire nationale prévue (voir plus bas). Ces financements pourraient aider le pays à remédier à des problèmes structurels, à condition que la sélection et l’exécution des projets soient satisfaisantes. Mais la Lettonie aurait aussi tout intérêt à utiliser une partie de ces fonds pour s’attaquer aux facteurs contribuant aux problèmes d’équité majeurs auxquels elle est confrontée.
Les politiques budgétaire et fiscale doivent viser en priorité à favoriser la croissance et l’inclusion
Les autorités budgétaires ont réagi de manière énergique pour lutter contre la pandémie
Fin 2019, à la veille de la pandémie de COVID-19, le déficit des administrations publiques de la Lettonie était inférieur à 1 % du PIB et la dette au sens de Maastricht s’élevait à 37 % du PIB. Détenant un grand volume d’actifs financiers (principalement sous forme de numéraire et de dépôts), la Lettonie affichait une dette publique nette inférieure à 12 % du PIB et la notation de sa dette souveraine s’était améliorée. Bien que près des trois quarts de sa dette publique soient détenus par des non-résidents, la proportion libellée en devises est nulle.
Pour lutter contre la pandémie, les autorités lettonnes ont déployé des mesures de soutien considérables, mais de moindre envergure que celles mises en œuvre dans la plupart des autres pays de l’OCDE (Graphique 1.4), et ce en grande partie parce que les besoins étaient moins importants en l’absence d’une première vague de COVID-19 de grande ampleur au printemps 2020. En 2020, le déficit s’est accru de 4 points de pourcentage du PIB et la dette d’environ 6.5 points. L’orientation expansionniste de la politique budgétaire est essentiellement imputable à la conjoncture. Toutefois, vers la fin de 2020, les autorités ont renforcé les mesures visant à renflouer les entreprises et à soutenir les finances des ménages, ce qui a entraîné une forte hausse du déficit (Encadré 1.1). Elles ont également pris des mesures destinées à neutraliser les effets de l’envolée des prix de l’énergie à la fin de 2021.
Encadré 1.1. Mesures prises par la Lettonie pour atténuer l’impact de la crise liée au COVID-19
Au début de la crise, les autorités ont élaboré une stratégie nationale visant à atténuer les effets négatifs de la crise liée au COVID-19. Le document a été publié le 26 mai 2020. Judicieusement pensée, cette stratégie n’avait pas pour seul objet de faire face aux répercussions à court terme de ce qui s’avèrera une récession d’une durée et d’une gravité inconnues. Elle allait plus loin en indiquant les mesures à moyen terme qui cadreraient avec les objectifs du gouvernement. Elle comportait cinq « axes d’intervention » – le capital humain, l’innovation, un environnement des entreprises propice à l’exportation, l’accès au financement et les infrastructures – devant être mis en œuvre en trois phases (stabilisation économique, réorientation et croissance). La stratégie a servi de base à l’établissement des Lignes directrices de la politique industrielle nationale pour la période 2021-2027, publiées en août 2020. Ce document fixe des objectifs quantitatifs précis et ambitieux en matière d’exportation et de R-D pour 2023 (lorsque les phases de stabilisation et de réorientation sont supposées être terminées) et pour 2027.
Les données les plus récentes (octobre 2021) sur les mesures de soutien adoptées en 2020-22 se trouvent dans le projet de loi de finances pour 2022 ( (Republic of Latvia, 2021[3]), tableau A). D’après les données du ministère des Finances datant du début janvier 2022, les mesures de soutien, dont l’appui budgétaire sectoriel, les aides aux particuliers, les reports de paiement d’impôts, les prêts et les garanties, ainsi que les dépenses au titre de fonds supplémentaires de l’UE, s’élevaient au total à 4.4 % du PIB en 2020 et à 7.2% du PIB en 2021, et devraient représenter 3.3 % du PIB en 2022. Les principales mesures mises en œuvre en 2021 étaient les suivantes : 1) un versement ponctuel de 500 EUR par enfant (188 millions EUR) ; 2) un versement ponctuel de 200 EUR aux retraités et aux personnes en situation de handicap (110 millions EUR) ; 3) des dépenses supplémentaires dans les secteurs de la santé (559 millions EUR, dont 165 millions EUR de primes versées aux médecins) et des transports (228 millions EUR) ; et 4) des prêts pour fonds de roulement d’une valeur correspondant à 30 % de la masse salariale en octobre-novembre 2021 jusqu’à concurrence de 100 000 euros par mois, octroyés aux entreprises dont le chiffre d’affaires a diminué d’au moins 20 % ou 30 % (en fonction d’autres critères) par rapport à la période correspondante en 2019/2020 (513 millions EUR jusqu’à présent). D’importantes allocations de chômage partiel (136 millions EUR) et subventions salariales (33 millions EUR) ont également été versées. Le coût global des mesures de soutien mises en œuvre en 2021 est estimé à 6.9 % du PIB (Republic of Latvia, 2021[3]) .
Compte tenu des hypothèses économiques de référence retenues pour les prévisions budgétaires 2022, le déficit devrait s’établir à 4.8 % en 2022, 2.1 % en 2023 et 1.3 % du PIB en 2024, après avoir atteint 9.3 % en 2021, tandis que la dette publique (au sens de Maastricht) devrait s’élevait à 51.7 % du PIB à la fin de 2022, dépassant de presque 15 points de pourcentage son niveau antérieur à la pandémie. La loi de finances comprend des mesures visant à financer des mesures liées au COVID-19 et des investissements publics supplémentaires en 2022 (0.8 % du PIB pour chacune), mais les dépenses en pourcentage du PIB diminueront de 4.2 points de pourcentage, notamment de 1 point dans les domaines de la santé et de l’éducation. Deux principales mesures de redistribution ont été prises. Premièrement, le seuil de non-imposition du revenu des personnes physiques a été porté de 300 EUR par mois (330 EUR pour les retraités) à 350 EUR par mois en janvier 2022 et sera porté à 500 EUR par mois en juillet 2022 ; une fois pleinement mise en œuvre, cette mesure représentera une enveloppe budgétaire annuelle de 153 millions EUR (soit près d’un demi pour cent du PIB). Deuxièmement, les allocations familiales ont été portées jusqu’à 100 EUR par mois par enfant pour les familles d’au moins quatre enfants (allocation réduite pour les familles ayant moins d’enfants), ce qui représente un coût annuel de 91 millions EUR (0.3 % du PIB).
Une certaine prudence s’impose toutefois dans l’évaluation des perspectives budgétaires à court et moyen termes. Premièrement, la loi de finances se fonde sur l’hypothèse d’une accélération importante et régulière de la croissance potentielle, à hauteur d’un point de pourcentage au cours des prochaines années, dont l’essentiel en 2022. La progression anticipée de la croissance effective pourra ainsi être absorbée sans exercer de trop fortes pressions sur les ressources et, partant, sur les taux d’intérêt lettons. Deuxièmement, les besoins budgétaires se multiplient, notamment pour l’allègement de la fiscalité du travail et l’augmentation de la rémunération des professionnels de santé et des enseignants (voir plus bas). Troisièmement, toute prolongation de la crise liée au COVID-19 pourrait peser plus lourdement sur le budget. Alors que le Conseil de discipline budgétaire avait anticipé très tôt que la dette pourrait dépasser 50 % du PIB déjà en 2022, ce scénario est à présent corroboré par les dernières Perspectives économiques de l’OCDE et par les prévisions budgétaires officielles. Enfin, les taux d’intérêt pourraient monter plus vite que prévu et faire ainsi augmenter le service de la dette. Le dernier rapport de l’UE sur la viabilité de la dette (Debt Sustainability Monitor, publié en février 2021) classe la Lettonie parmi les 11 pays exposés à des risques de tensions budgétaires à court terme, bien qu’aucun risque à moyen ou long terme ne soit anticipé malgré le recul et le vieillissement continus de la population. La Lettonie dispose depuis plusieurs années d’un ensemble de règles budgétaires (Encadré 1.2), qui ont pour l’essentiel été pleinement respectées (Bova et Manescu, 2020[4]). En raison de la crise liée au COVID-19, les règles budgétaires de l’Union européenne (et de la Lettonie) sont suspendues depuis 2020, et le resteront encore en 2022. À défaut, l’administration centrale aurait été tenue, conformément à la Loi sur la discipline budgétaire, de fixer son plafond de dépenses en fonction des règles budgétaires les plus strictes. Bien entendu, la Lettonie est nettement en deçà du plafond de 60 % du PIB, avec une dette publique (au sens de Maastricht) représentant environ 50 % du PIB (et une dette nette encore bien moindre). Des discussions sont actuellement menées à l’échelle de l’UE en vue de déterminer les règles qui s’appliqueront en 2023. Diverses propositions ont été avancées, mais deux méritent d’être évoquées, à savoir un relèvement du plafond de la dette au sens de Maastricht à 100 % du PIB, conjugué à une règle de dépenses fondée sur la croissance tendancielle de la production (Francová et al., 2021[5]), et le remplacement des règles budgétaires par des normes et une analyse stochastique de la viabilité de la dette (Blanchard et al., 2021[6]). La Lettonie aurait tout intérêt à adopter de nouveau des règles budgétaires nationales encore plus strictes afin de conserver une situation budgétaire saine, de réduire le caractère procyclique de la politique budgétaire et de renforcer l’efficience des dépenses publiques.
Encadré 1.2. Le cadre budgétaire de la Lettonie
La Lettonie disposait d’un ensemble complexe de règles budgétaires, qui ont été suspendues en 2020. Celles-ci comprenaient notamment : 1) la règle de l’UE du plafonnement du déficit des administrations publiques à 3 % du PIB et un objectif de solde budgétaire structurel fixé à -0.5 % du PIB ; et 2) des plafonds de hausse des dépenses réelles des administrations publiques (hors charges d’intérêt, fonds de l’UE, dépenses en capital lissées, dépenses cycliques au titre des prestations de chômage et mesures discrétionnaires en matière de recettes) n’excédant pas la croissance potentielle moyenne du PIB au cours de la décennie se terminant l’année t+4. Ces règles budgétaires sont subordonnées à une autre, « la règle de glissement des plafonds de dépenses » du précédent cadre budgétaire à moyen terme, qui se fonde sur les dernières augmentations de certains postes de dépenses, tels que les retraites, les dépenses sociales, les fonds de l’UE et les charges d’intérêt, qui peuvent faire varier le plafond de 0.1 % du PIB au maximum.
Les autorités devront non seulement décider que faire des importants financements de l’UE qui seront disponibles au cours des prochaines années et comment éviter des goulets d’étranglement dans les dépenses (Encadré 1.3), mais elles devront également élaborer une stratégie budgétaire crédible accompagnée de règles budgétaires efficaces, afin de résorber quasi entièrement le déficit structurel, si elles souhaitent restaurer une certaine marge de manœuvre pour faire face à des chocs futurs imprévus et maîtriser la dette à long terme (Graphique 1.5). Le rythme de l’assainissement prévu à court terme et le faible déficit qui sera permis ultérieurement (0.3 % du PIB, conformément à l’objectif à moyen terme du gouvernement) sont essentiels à la réalisation de cet objectif (même si la dette publique n’est pas complètement stabilisée) et permettront par ailleurs de financer plusieurs besoins de dépenses favorisant l’équité sur le budget, ainsi que les futures hausses prévisibles des dépenses liées au changement climatique, à la transition vers une économie bas carbone et au vieillissement démographique. Ces tensions sur les dépenses se feront pour l’essentiel sentir uniquement sur les dépenses consacrées à la santé et aux soins de longue durée (voir plus bas). Le cadre d’action actuel suppose que les taux de remplacement (bruts) des pensions publiques diminueront au cours du prochain demi-siècle pour passer de 55 % à 20 %, un niveau qui semble difficilement soutenable, même si l’on tient compte des régimes privés par capitalisation qui fourniront environ un tiers des pensions de retraite à l’avenir. Cela étant, le relèvement annuel prévu des prestations de retraite non contributives en fonction des revenus médians à compter de 2023 fera augmenter les coûts budgétaires, mais permettra d’éviter une aggravation de la pauvreté des personnes âgées. La stratégie budgétaire devrait viser aussi à améliorer l’efficience des dépenses. Un processus interinstitutionnel d’examen des dépenses, qui a démarré en 2016 et a permis de réaliser des économies cumulées de 341 millions EUR, contribue à cet objectif. La portée de l’examen est chaque année définie et approuvée par le gouvernement, tout comme le poste de destination de tout redéploiement des ressources. Les autorités ont également adopté des outils assurant les meilleures pratiques en matière d’accessibilité et de transparence budgétaire, qui permettent de communiquer aux contribuables de manière interactive et claire les domaines dans lesquels leur argent est dépensé, les montants dépensés et les résultats escomptés.
Encadré 1.3. Des investissements publics considérables devraient être réalisés grâce aux fonds de l’UE
La Lettonie devrait recevoir un volume important de ressources financières de l’UE sur la période 2021-2027. L’essentiel devrait provenir du Fonds de cohésion (près de 5 milliards EUR, soit environ 17 % du PIB de 2020). La Lettonie est en outre l’un des principaux bénéficiaires des financements accordés au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR), avec une enveloppe de 2.02 milliards EUR (environ 6.7 % du PIB de 2020), dont 1.85 milliard EUR a déjà été approuvé. Le reste sera alloué en 2023 en fonction de la situation économique. Selon le ministère des Finances, l’investissement public devrait atteindre son plus haut niveau en 2024, puis diminuer progressivement. Ces financements auront une incidence non négligeable sur le PIB réel : d’après des simulations réalisées par le FMI, une hausse des dépenses en capital de ½ pour cent du PIB par an pourrait améliorer la croissance du PIB réel de 0.7 % par rapport aux projections de référence à moyen terme. En conséquence, il serait judicieux de veiller à dégager une marge de manœuvre suffisante dans le budget national pour combler le vide engendré par la diminution des aides de l’UE au-delà de 2024.
Une part importante des ressources de la FRR sera consacrée à la lutte contre le changement climatique et à la transition numérique. Les autorités prévoient d’affecter 37 % des fonds à des initiatives climatiques, 20 % à la transition numérique, 20 % à la réduction des inégalités, 11 % aux soins de santé, 10 % à la transformation économique et 2 % au renforcement de l’État de droit. Plusieurs questions méritent d’être abordées pour garantir une allocation efficiente des ressources. Premièrement, comme l’a fait valoir le Conseil de discipline budgétaire, il faudrait coordonner l’utilisation de ces fonds avec d’autres instruments nationaux de planification, notamment le Plan national de développement, afin d’éviter des goulets d’étranglement dans les dépenses, de créer des synergies et de renforcer les multiplicateurs efficaces. Deuxièmement, toutes les dépenses devraient faire l’objet d’une analyse coûts-avantages rigoureuse et, si possible, être justifiées par une évaluation de leurs résultats stratégiques. Troisièmement, les autorités devraient s’attacher à corriger les manques d’efficience dans le processus de dépense publique, en particulier dans le cadre de l’évaluation des projets et de la gestion des partenariats public-privé. Quatrièmement, pour éviter la surchauffe du secteur de la construction, la Lettonie devrait faciliter la délivrance de permis de travail pour les travailleurs de ce secteur non ressortissants de l’UE et aider les entreprises à adopter les technologies numériques qui permettent d’accroître la productivité du travail (chapitre 2).
Source : (IMF, 2021[7]).
Encadré 1.4. Quantification de l’impact de réformes structurelles proposées sur le PIB et sur le budget
L’impact de certaines réformes structurelles essentielles proposées dans cette Étude est estimé ci-dessous à l’aide des relations entre réformes et taux de croissance observées par le passé dans l’ensemble des pays de l’OCDE (Tableau 1.3). Étant donné que cet exercice de simulation fait abstraction des modalités précises des recommandations formulées et du contexte institutionnel particulier de la Lettonie, les estimations ci-après sont données à titre purement indicatif.
Tableau 1.3. Estimation à titre indicatif de l’impact qu’auraient certaines réformes recommandées dans cette Étude sur l’économie au bout de 10 ans
|
PIB par habitant (%) |
Via l’emploi |
Via la productivité |
---|---|---|---|
Les dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail, par salarié, en pourcentage du PIB, sont portées à environ 75 % de la moyenne de la zone OCDE. |
1.4 |
0.9 |
0.5 |
Les dépenses consacrées aux activités de R-D des entreprises sont augmentées de 0.2 point de PIB. |
0.3 |
- |
0.3 |
L’âge de la retraite est relevé de six mois. |
0.5 |
0.5 |
- |
Les impôts sont augmentés pour financer les dépenses supplémentaires. |
-0.4 |
-0.2 |
-0.2 |
Total |
1.8 |
1.2 |
0.6 |
Note : On suppose que toutes les réformes sont mises en œuvre immédiatement.
Source : Modèle à long terme de l’OCDE ; et J. Arnold (2008), « Do Tax Structures Affect Aggregate Economic Growth?: Empirical Evidence from a Panel of OECD Countries », Documents de travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, n° 643, Éditions OCDE, Paris.
Les estimations ci-après (Tableau 1.4) offrent une quantification approximative de l’effet à long terme qu’auraient sur le budget certaines réformes structurelles suggérées dans la présente Étude. Étant donné que l’estimation de l’impact des réformes recommandées sur le PIB a été réalisée de façon neutre sur le plan budgétaire, elle intègre déjà les éventuels effets négatifs induits sur le PIB par les hausses d’impôts décrites dans cet encadré. Les estimations budgétaires présentées ci-après ne tiennent pas compte des éventuels effets produits par les réformes sur le PIB et, partant, sur les recettes budgétaires, ceux-ci paraissant trop incertains. La somme des réformes réduit délibérément le déficit, dans la mesure où la présente Étude préconise un assainissement budgétaire à terme.
Tableau 1.4. Estimation à titre indicatif de l’impact sur le budget des réformes budgétaires/structurelles recommandées
Mesure |
Impact sur le solde budgétaire (% du PIB) |
---|---|
Mesures creusant le déficit |
1.5 |
Augmenter le revenu minimum garanti et réduire progressivement cette prestation à mesure que le revenu augmente1 |
0.4 |
Accroître les dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail, notamment en matière de formation2 |
0.2 |
Accroître les dépenses consacrées aux soins de santé et de longue durée |
0.5 |
Accroître les financements publics consacrés au logement locatif abordable et au logement social, et/ou étoffer les allocations de logement3 |
0.2 |
Accorder davantage d’aides financières sous condition de ressources aux étudiants de l’enseignement supérieur |
0.1 |
Améliorer les salaires et les conditions de travail des chercheurs et les inciter à collaborer avec les entreprises |
0.1 |
Mesures fiscales compensatoires |
2.2 |
Relever les taux effectifs de l’impôt sur les sociétés |
0.3 |
Renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques4 |
0.2 |
Relever certains droits d’accise et supprimer les subventions accordées au secteur de l’énergie5 |
0.3 |
Revoir à la hausse les droits d’accise sur les types d’alcool et de tabac à fumer et autres produits contenant de la nicotine qui sont insuffisamment imposés |
0.1 |
Augmenter l’impôt sur le patrimoine immobilier, mettre en place des impôts sur les donations et les successions et/ou considérer que les plus-values sont réalisées au moment du décès6 |
0.5 |
Intensifier les efforts de lutte contre l’activité informelle et la fraude fiscale |
0.8 |
Note : Les modifications des politiques publiques retenues comme hypothèses pour cette estimation sont les suivantes :
1. Le revenu minimum garanti est porté à 20 % du revenu médian et il est réduit progressivement à mesure que le revenu augmente, suivant une variante du calcul effectué par (European Commission, 2018[10]) . 2. Les autorités augmentent les dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail mesurées en pourcentage du PIB (0.18 %) de 0.2 point de pourcentage, pour les porter à environ 75 % de la moyenne de l’OCDE (0.48 %) ; voir le Graphique 1.11ci-dessous. 3. Les autorités portent les dépenses publiques consacrées aux allocations de logement en pourcentage du PIB (0.05 %) au niveau de la moyenne de l’OCDE (0.27 %), par exemple. 4. La progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques est accrue, comme indiqué dans (Rastrigina, 2019[11]) . 5. La modification de la fiscalité de l’énergie consiste à harmoniser les taux d’imposition du gazole, des produits pétroliers et de l’essence, à supprimer les subventions au gaz naturel et à relever les droits d’accise sur le fioul domestique. 6. S’agissant de l’impôt sur le patrimoine immobilier en pourcentage du PIB, l’écart entre la Lettonie (0.9 %, selon les Statistiques des recettes publiques de l’OCDE) et la moyenne de l’OCDE (1.9 %) est réduit de moitié, par exemple.
Source : Calculs de l’OCDE.
La politique budgétaire pourrait contribuer davantage à réduire la pauvreté
Comme mentionné plus haut, la distribution des revenus et du patrimoine est inégale en Lettonie. Seuls les 2 % les plus pauvres de la population sont considérés comme « nécessiteux », par opposition aux ménages « à faible revenu », dont la définition est établie à l’échelle locale selon un critère de revenu. La redistribution budgétaire ne contribue que modérément à réduire les disparités de revenus marchands, et dans une moindre mesure que dans une majorité de pays de l’OCDE (Graphique 1.6). Le premier circuit de redistribution des revenus est la progressivité des dépenses publiques sous la forme de transferts monétaires aux ménages (hormis les dépenses sociales en nature consacrées à l’éducation et à la santé, qui sont exclues de cette analyse). Cependant, les prestations sociales sont faibles en proportion du PIB : elles sont inférieures à celles de la Lituanie (bien qu’elles s’en rapprochent) et nettement inférieures à celles de l’Estonie. Il existe également un revenu minimum garanti non imposable. Tous les Lettons peuvent prétendre à cette forme d’aide sociale, qui reste toutefois modeste, malgré ses revalorisations très récentes : le revenu minimum garanti correspond au montant nécessaire pour compléter le revenu jusqu’à un seuil de référence, fixé en 2021 à 109 EUR par mois pour la première personne du ménage et à 76 EUR par mois pour chaque autre membre du ménage. Cette prestation est soumise à des conditions de revenu ; diverses formes de revenus et d’actifs ne sont pas prises en compte. Le revenu minimum garanti est octroyé pendant trois ou six mois, bien que le renouvellement de cette prestation soit possible. Dans l’Étude économique de 2019, il était recommandé de consacrer 0.5 % du PIB au relèvement du revenu minimum garanti, pour le porter à 40 % du revenu médian (et non du revenu des ménages officiellement considérés comme « nécessiteux », dont le niveau est sensiblement plus faible) pour les bénéficiaires qui ne sont pas aptes au travail (et à 20 % pour ceux qui le sont), afin de faire baisser le taux de pauvreté de près de 9 points de pourcentage (OECD, 2019[12]).
Le deuxième principal circuit de redistribution est la fiscalité. L’impôt sur les sociétés en pourcentage du PIB est l’un des plus bas de la zone OCDE. La logique est d’attirer des activités commerciales, notamment sous la forme d’investissements directs étrangers. Cet impôt, prélevé uniquement sur les bénéfices distribués, est essentiellement supporté par les entreprises les plus prospères, par opposition aux taxes sur les biens et services, qui ont un poids croissant en pourcentage du PIB (la Lettonie se classe désormais au cinquième rang des pays de l’OCDE) et qui sont légèrement régressives (même s’il faudrait regarder aussi le côté positif du bilan pour apprécier les effets de la fiscalité sur la redistribution). Grâce à l’accord international sur l’imposition effective minimale des entreprises, la Lettonie pourrait voir ses recettes fiscales au titre de l’impôt sur les bénéfices des sociétés augmenter une fois que l’Union européenne aura publié la directive correspondante relative à la mise en œuvre des règles du pilier 2 (OECD, 2020[13]) : en effet, d’après des estimations réalisées récemment par le secteur privé, l’instauration à l’échelle mondiale d’un taux plancher de 15 % représenterait un gain de 100 millions EUR (plus de 30 %) (Barake et al., 2021[14]), tableau 2). Les taux de droit commun de l’impôt sur le revenu des personnes physiques sont devenus un peu plus progressifs depuis 2018 seulement, mais jusqu’à présent, l’impact de cette mesure n’a guère été démontré. À l’heure actuelle, la redistribution par la fiscalité prend la forme d’un impôt de solidarité de 25 % prélevé sur les salaires dépassant le seuil de versement des cotisations d’assurance sociale (fixé à 62 800 EUR en 2021), mais cet impôt est acquitté par un tout petit nombre de contribuables. De fait, le produit de l’impôt de solidarité ne devrait s’élever qu’à 57 millions EUR en 2021 (0.2 % du PIB). La progressivité est assurée par l’existence d’un seuil de non-imposition lié au revenu, c’est-à-dire un abattement d’impôt qui n’est pas applicable aux personnes dont le revenu excède un certain seuil, actuellement fixé à 1 800 EUR par mois. En principe, renforcer la progressivité des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (même si cela risque d’encourager la fraude et l’évasion fiscales et, de manière plus générale, de réduire les incitations au travail), relever le taux de l’impôt de solidarité ou élargir le seuil de non-imposition sont autant de mesures susceptibles d’accroître la redistribution budgétaire à moyen terme. En tout état de cause, le degré de redistribution assuré par le système de prélèvements et de prestations devrait faire l’objet d’un suivi régulier.
Les disparités de revenu observées en Lettonie revêtent dans une large mesure une dimension géographique (voir plus bas). L’est du pays est beaucoup plus pauvre que la moyenne. Les trois quarts des recettes collectées au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques sont redistribués aux communes, ce qui devrait vraisemblablement leur permettre de résoudre de tels problèmes. Celles-ci se heurtent toutefois au système d’imposition, qui se fonde uniquement sur le lieu de résidence (une pratique courante dans les pays de l’OCDE). Ainsi, la ville de Riga se trouve de plus en plus dépourvue d’une assiette fiscale lucrative par rapport à la région qui l’entoure, Pieriga, où vit un grand nombre de navetteurs.
Enfin, la Lettonie a manqué certaines occasions d’assurer une distribution plus équitable des revenus et du patrimoine et d’accroître ses recettes fiscales. Premièrement, les impôts périodiques sur le patrimoine sont faibles par rapport à la moyenne de l’OCDE, tant en pourcentage du total des recettes fiscales qu’en pourcentage du PIB. Il était préconisé dans la précédente Étude de porter la proportion de cet impôt dans le PIB au niveau de la moyenne de l’OCDE, ce qui suppose une augmentation de 0.8 point de PIB. Cependant, les autorités estiment que la faiblesse des impôts périodiques sur le patrimoine immobilier est un facteur déterminant de la compétitivité du pays, du moins par rapport à ses voisins baltes : l’Estonie ne prélève pas du tout d’impôt de ce type, tandis que la Lituanie applique un taux nul pour les logements dont la valeur cadastrale est inférieure à 150 000 EUR. Elles craignent en outre qu’un grand nombre de propriétaires n’aient pas les moyens de supporter une charge fiscale supplémentaire, dans la mesure où ils ont acquis leur logement pour des sommes dérisoires lorsque le parc de logement public a été privatisé au moment de l’indépendance du pays. Cela dit, la question de compétitivité ne se pose sans doute que pour les impôts frappant les biens immobiliers commerciaux et industriels, si bien que dans le cadre d’une réforme destinée à accroître les recettes, les autorités pourraient s’abstenir d’imposer les biens immobiliers résidentiels de faible valeur en fixant un seuil minimum au-dessous duquel ces biens ne seraient pas imposés. Deuxièmement, l’efficacité redistributive du système fiscal letton est entravée par l’absence d’un impôt sur les donations ou les successions (OECD, 2021[15]), même si les bénéficiaires autres que le conjoint et les enfants du donateur/défunt sont assujettis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Par ailleurs, les plus-values latentes sont exonérées d’impôt au moment du décès et transmises après application d’une majoration par rapport à la valeur d’acquisition (il se peut que les plus-values latentes ne soient pas imposées sur plusieurs générations). La Lettonie pourrait soit adopter un système d’imposition des donations et des successions plus complet, soit considérer que toutes les plus-values sont réalisées au moment du décès (à l’instar de ce qui se pratique au Canada, par exemple), ou du moins ne pas appliquer une majoration (comme c’est le cas en Australie) afin d’éviter les transferts intergénérationnels, qui se traduisent par une concentration accrue des richesses. Il est toutefois difficile de déterminer le montant de recettes supplémentaires que de telles mesures permettraient de dégager malgré des coûts administratifs élevés, sachant également que celles-ci pourraient avoir des effets légèrement négatifs sur les incitations à l’épargne.
Tableau 1.5. Recommandations antérieures de l’OCDE en matière de fiscalité et de dépenses
Objet et résumé des recommandations |
Synthèse des mesures prises depuis l’Étude de 2019 |
---|---|
Accroître les recettes fiscales tirées de l’imposition du patrimoine immobilier et de l’énergie. Veiller à ce que la taxation de l’énergie soit uniforme pour l’ensemble des combustibles et des usages. |
La taxation de l’énergie est fortement limitée par les achats transfrontaliers, mais il est possible de relever progressivement les taxes sur le gaz naturel, le gazole et le fioul domestique. Les autorités estiment en outre que l’imposition du patrimoine est tributaire de questions de compétitivité, mais aussi d’accessibilité financière pour beaucoup de propriétaires ayant acquis leur logement au moment de l’indépendance du pays. |
Éliminer progressivement le régime fiscal applicable aux microentreprises. |
Ses caractéristiques deviennent moins attrayantes : les taux applicables ont été revus à la hausse en 2021 ; aucune nouvelle entreprise n’est admise ; seules les entreprises non constituées en sociétés peuvent en bénéficier ; et leurs salariés sont désormais assujettis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Les restrictions salariales ont toutefois été supprimées. Le nombre de déclarations et de salariés a fortement diminué ces dernières années, tombant respectivement à moins de 20 000 et 34 000 par trimestre. |
À plus long terme, envisager de prendre de nouvelles mesures pour renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. |
Un barème fiscal progressif a été instauré en 2018. Il se compose de trois taux d’imposition : 20 %, 23 % et 31 %. Mais le système fiscal dans son ensemble n’assure pas un degré de redistribution élevé. Une autre source importante de redistribution par la fiscalité est le seuil de non-imposition lié au revenu, qui a été porté de 300 EUR par mois (330 EUR par mois pour les retraités) en 2021 à 350 EUR par mois au premier semestre de 2022, puis à 500 EUR par mois pour le second semestre. |
Le système financier est sain, mais la distribution du crédit est perfectible
Les banques, spécialement les grandes banques, affichent une bonne santé
Les banques lettones sont bien capitalisées, elles disposent de liquidités abondantes et affichent une solide rentabilité et des coûts modérés. Aucune n’a été autorisée à verser des dividendes l’an dernier, pendant la crise liée au COVID-19. Pourtant, un certain nombre de banques qui avaient concentré jadis leur activité sur la clientèle étrangère, notamment de la CEI (Communauté des États indépendants), continuent de ressentir les pertes enregistrées sur cette partie de leur activité ces dernières années. Les actifs bancaires ont amorcé un repli en 2016 (même si ce repli a pris fin durant la pandémie, avec l’augmentation des dépôts des ménages et la participation des banques à la troisième série d’opérations ciblées de refinancement à plus long terme (targeted longer-term refinancing operations, TLTRO III) de la BCE. Parallèlement, les établissements non bancaires, notamment les entreprises de technologie financière (FinTech) (voir plus bas), gagnent des parts de marché, vraisemblablement du fait d’une tarification plus compétitive de leurs services. Cela étant, l’intermédiation bancaire a été peu active et les contraintes de crédit sont généralisées.
La hausse du crédit est modérée
La crise financière mondiale a durement frappé l’économie lettone, et singulièrement son système financier. La défaillance de la deuxième banque lettone en 2018 témoigne des difficultés qui en ont découlé, tandis qu’un autre signe de ces difficultés transparaît encore dans l’aversion très marquée au risque financier et au crédit. La majorité des ménages et des entreprises de Lettonie sont peu endettés et s’efforcent au maximum de ne pas avoir de retard dans leurs remboursements. Les banques continuent d’appliquer des normes de crédit restrictives et des écarts de taux d’intérêt importants dans leurs modèles d’évaluation des emprunteurs, en dépit d’une amélioration sensible de l’environnement des entreprises. Quoi qu’il en soit, l’encours des prêts sur salaire s’élève encore à 500 millions EUR, même s’il diminue ; le plafond réglementaire du taux d’intérêt leur étant applicable est de 0.07 % par jour (29.1 % par an).
La croissance de la demande de crédit a été lente pendant longtemps, comme le montre l’encours de prêts aux sociétés non financières, qui diminue en glissement annuel depuis la fin de 2019, tandis que l’encours de prêts aux ménages reste globalement inchangé depuis un certain temps maintenant (Graphique 1.7). En revanche, les sociétés non financières comme les ménages affichent, sur la même période, un taux de croissance à deux chiffres de leurs dépôts à faible risque, les restrictions imposées par les pouvoirs publics à cause de la pandémie ayant conduit à une limitation contrainte des dépenses et à l’accumulation d’une épargne involontaire. Le ratio de service de la dette des ménages est faible et plutôt stable pour l’ensemble des catégories de revenu, de patrimoine, d’âge et de taille des ménages. Les arriérés de remboursement (30-90 jours) augmentent légèrement pour les prêts aux sociétés non financières depuis les derniers trimestres, mais sont toujours orientés à la baisse pour les ménages, ainsi que pour les clients non résidents, pour lesquels ces arriérés demeurent toutefois d’un niveau toujours élevé. Les prêts non performants sont à leur plus bas depuis dix ans, avec un taux de 4.7 % pour les quatre premières banques en 2020, qui est toutefois nettement plus élevé que pour leurs concurrentes de taille plus modeste. Il ne semble pas que cette situation soit imputable aux moratoires sur le service de la dette, accordés dans le sillage de la pandémie et dont la quasi-totalité est parvenue à expiration à la mi-2021 ; les premières indications donnent à penser qu’aucun changement notable n’est intervenu depuis lors dans la qualité des actifs.
Certains signes indiquent toutefois que l’offre de crédit reste bridée. Le niveau relativement élevé des taux débiteurs en est l’un des signes : ainsi, les taux appliqués aux nouveaux prêts à des sociétés non financières en 2020 étaient deux fois plus élevés que les taux moyens pratiqués dans la zone euro. Qui plus est, la Lettonie (à l’instar de ses voisins baltes) figure parmi ces quelques pays qui n’ont pas observé de recul sensible de leurs taux durant les cinq dernières années. En principe, ce niveau pourrait s’expliquer par les risques encourus, mais des analyses récentes de la Banque de Lettonie montrent que la qualité du portefeuille de prêts des banques lettones, leurs coûts de financement et d’autres facteurs classiques, censés affecter le niveau des taux débiteurs, ne suffisent pas à expliquer ce niveau (Benkovskis, Tkacevs et Vilerts, 2021[16]): de fait, les taux débiteurs appliqués aux sociétés non financières baltes figurent parmi les plus élevés de la zone euro, une fois pris en compte l’ensemble de ces facteurs.
L’accès au crédit était restrictif avant la pandémie et il semble que cela soit toujours le cas. D'après l'enquête de la Banque centrale européenne (BCE) sur les finances et la consommation des ménages, 8.8 % de l’ensemble des ménages lettons voyaient leur accès au crédit limité en 2017, faisant de la Lettonie le cinquième pays le plus restrictif en la matière sur les 20 pays analysés. Selon cette enquête, les ménages nombreux et les jeunes ménages, les locataires et les personnes remboursant encore des prêts hypothécaires, les détenteurs d’un faible patrimoine net et les non-diplômés de l’enseignement supérieur figurent parmi les catégories les plus touchées (Bank of Latvia, 2020[17]). Même si, dans une enquête menée auprès de cadres dirigeants d’entreprises lettones à l’automne 2020, la question de l’accès au crédit est considérée comme relativement importante (15e rang) pour la stabilité du secteur financier (Sauka, 2021[18]), l’accès au financement constitue, selon une enquête de la Banque européenne d’investissement (BEI) menée à la mi-2020, un obstacle majeur à l’investissement et est cité comme tel par 14 % des 370 entreprises sondées, contre 6 % en moyenne dans l’UE (EIB, (2020[19])). Selon cette enquête, le coût du financement extérieur est source de mécontentement pour 16 % des entreprises interrogées, soit bien plus que les 5 % en moyenne dans l’UE, de même que le montant des sûretés exigées par les établissements de crédit, dont 14 % des répondants, c'est-à-dire le double de la moyenne de l’UE, se déclarent mécontents. Sans surprise, les microentreprises et les petites entreprises se disent plus mécontentes que les plus grandes. La faiblesse des taux de recouvrement des créances dans les procédures d’insolvabilité pousse, sans nul doute, les taux débiteurs vers le haut (chapitre 2).
Dans son Plan de développement 2021-2023 pour le secteur financier, le gouvernement répond aux enjeux structurels du retard du pays en matière de marchés financiers et de la construction d'une culture de l’investissement, y compris de la finance verte, notamment par le soutien au développement de la FinTech, et à l’évolution mondiale du secteur vers plus de numérique. Ces objectifs se recoupent largement avec celui d’une meilleure éducation financière, désormais l’objet d’initiatives qui ont pour point de départ les enfants des structures d’éducation préscolaire. Selon des éléments recueillis par l’OCDE, la population adulte lettone affiche un niveau de connaissances financières satisfaisant, mais ses comportements et attitudes dans le domaine financier sont d’un niveau inférieur à la moyenne (OECD, 2020[20]) ; il semble que les hommes fassent moins bien dans ce domaine que les femmes.
Les entreprises de la FinTech peuvent atténuer les difficultés d’accès que l’on vient de voir et stimuler la concurrence avec les prestataires de services financiers classiques, mais il est encore difficile de savoir jusqu’à quel point ces technologies permettront de réduire les coûts d’emprunt. Le secteur ne cesse de se développer en Lettonie. Des progrès sont intervenus en partie grâce à la Directive sur les services de paiement (DSP2), qui est entrée en vigueur dans sa majeure partie en janvier 2018 et a été conçue pour encourager à la fois la concurrence et l’innovation dans un monde en pleine mutation numérique. Le secteur comptait 91 start-up en Lettonie au printemps 2020 (Swedbank, 2020[21]), mais huit seulement de ces jeunes pousses employaient plus de 50 salariés. Selon cette enquête de Swedbank, les entreprises citent le plus souvent, parmi les premières motivations de leur installation en Lettonie, la facilité de faire des affaires, le vivier de talents, la souplesse de la réglementation et les aides publiques. Leurs principaux motifs de plainte tiennent à l’insuffisance des « bacs à sable » réglementaires et des incubateurs/accélérateurs, bien que l’on dénombre 13 incubateurs en Lettonie. Nombre de répondants soulignent la difficulté de recruter des spécialistes en technologies de l’information qui, selon eux, font défaut ou manquent des compétences requises (chapitre 2).
La sortie d’entreprises du marché est également un déterminant de l’allocation du capital. À cet égard, la Lettonie dispose d’un cadre de réglementation de la faillite qui favorise la liquidation (chapitre 2). Elle a à ce jour bénéficié d’un certain nombre d’autres réformes récentes, qui devraient porter leurs fruits à moyen et long terme (Tableau 1.6).
Tableau 1.6. Recommandations antérieures de l'OCDE concernant l’allocation du capital
Objet et résumé des recommandations |
Synthèse des mesures prises depuis l’Étude de 2019 |
---|---|
Améliorer la qualité des décisions de justice et la rapidité avec laquelle elles sont rendues en formant et en spécialisant les fonctionnaires de justice. |
Le tribunal économique a été inauguré le 31 mars 2021 et avait déjà examiné 85 affaires au début du mois de septembre. Ses juges ont été sélectionnés à l’issue d’une procédure en cinq étapes. Un nouveau centre letton de formation aux professions judiciaires va être mis en place et sera financé sur les ressources de la Facilité pour la reprise et la résilience (RRF). D’autres modifications d’ordre procédural sont en cours de mise en œuvre, conformément aux recommandations formulées par la Cour des comptes au début de 2021. |
Des progrès sont en cours dans la longue bataille livrée contre l’économie informelle et la corruption
L’emploi informel est d’un niveau préoccupant
L’économie informelle est un problème connu de longue date en Lettonie (OECD, 2019[12]) (Sauka et Putniņš, 2021[22]) et se manifeste en premier lieu par la sous-déclaration des heures travaillées et des salaires versés (les fameuses « enveloppes » de salaires versés en liquide et non déclarés), plutôt que par l’activité d’une main-d'œuvre travaillant complètement en dehors des registres comptables, c’est-à-dire sans contrat (même si cette main-d'œuvre représente tout de même 10.9 % du total, contre 8.3 % en Lituanie et 5.7 % en Estonie) (Sauka et Putniņš, 2020[23]). La taille de l’économie souterraine varie, selon les estimations, de 16.6 % du PIB (Medina, Schneider et Fedelino, 2018[24]) en 2015 à 25.5 % du PIB (Sauka et Putniņš, 2021[22]) en 2020, en hausse modérée par rapport à l’année précédente, peut-être à cause de la pandémie. L’objectif du gouvernement est de ramener ce taux à la moyenne de l’UE, soit 17 %, en 2022.
Un programme d’étude a été lancé au ministère des Finances en 2020 pour apporter un éclairage sur un futur plan d’action. Ce programme se propose d’évaluer les motifs de ces pratiques, y compris le rôle des politiques publiques dans l’imposition et les prélèvements obligatoires, ainsi que la législation et la réglementation du travail (et le renforcement de leur application). Ainsi en France, la mise en place d’un crédit d’impôt en faveur des particuliers employeurs s’est révélée tout à fait efficace pour lutter contre l'économie informelle dans les services à domicile.
L’avantage d’une régularisation plus massive de l’activité serait, bien évidemment, d’accroître les recettes fiscales, mais probablement aussi d’offrir de meilleures possibilités de formation et conditions de travail et plus de fiabilité dans les cotisations de retraite (ce qui concourrait à lutter contre la pauvreté à l’âge de la vieillesse). Le Service national des impôts (VID, Valsts ieņēmumu dienests) estime l’écart d’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) à environ 17 % au niveau global, mais à 30.7 % dans le secteur de la construction en 2019, en baisse toutefois par rapport à son niveau d’environ 40 % en 2015 (Sauka, 2020[25]). Outre un accord passé en 2019 avec les employeurs de ce secteur sur le versement d’un salaire horaire et mensuel minimum, un système spécial impose, depuis février 2020, à tous les salariés de pointer, grâce à une puce électronique, lorsqu’ils arrivent au travail et en repartent. À défaut, le VID exploite les informations bancaires pour rechercher les incohérences entre les dépenses et le revenu déclaré et maintient en place un groupe de travail permanent sur le risque que constituent les enveloppes de salaires en liquide pour la stratégie de lutte contre l’économie informelle. La facturation électronique sera obligatoire, à partir de 2025, pour toutes les transactions interentreprises. On observe également un écart d’impôt pour la TVA, dont l’ampleur est en net recul depuis 2010. Dans leur publication, Sauka et Putnins (2020[23]) estiment que 8.0 % de l’ensemble des entreprises en Lettonie ne sont pas déclarées, contre 9.2 % en Lituanie et 4.0 % en Estonie.
Les sanctions applicables à la fraude fiscale sont désormais plus sévères et cette faculté devrait être pleinement mobilisée dans la pratique, en appliquant avec plus de vigueur non seulement la réglementation et la législation fiscales, mais également le droit du travail. Si le montant ayant échappé à l’impôt est supérieur à 25 000 EUR, la fraude est réputée constituer une infraction pénale, pouvant être punie d’une peine d’emprisonnement de 10 ans au maximum. Une autre source de fraude potentielle a été interdite : depuis mai 2019, en effet, il est illégal d’utiliser des espèces dans les transactions immobilières. De même, depuis juillet 2019, la sortie de capitaux supérieurs à 10 000 EUR doit faire l’objet d’une déclaration. Enfin, un plan de lutte contre l’économie souterraine est en voie d’adoption au gouvernement (Republic of Latvia, 2021[26]). Son objet est de ramener la part de l’économie souterraine/informelle au niveau moyen observé dans les pays de l’UE, ce qui, selon une estimation, entraînerait un recul de 3.6 points de pourcentage du PIB (18 % environ de l’économie souterraine totale) ; ce plan est décliné en 41 mesures, relevant de cinq domaines d’action. Un rapport d’étape est prévu en 2023.
La corruption et les pots-de-vin sont toujours vus comme un problème endémique
Des progrès ont été accomplis dans la lutte contre la corruption, mais le problème demeure plus grave que dans la plupart des autres pays de l’OCDE (Graphique 1.8). Il semblerait que cela soit particulièrement vrai dans certaines administrations locales. La lutte contre la corruption a été inscrite dans le Plan national de développement et dotée d’un financement d’un montant indicatif de 74 millions EUR pour la période 2021-2027. L’objectif visé dans le plan est de rehausser le niveau de satisfaction des citoyens dans plusieurs domaines : le mode de fonctionnement de la démocratie, la participation citoyenne à la vie civique, la capacité d’influer sur la vie politique telle que perçue par les citoyens, leur confiance dans le système judiciaire, les forces de police et les services du parquet, et la rapidité des procédures en justice. Mesuré en 2019, le niveau de confiance dans les pouvoirs publics reste faible et dépasse seulement celui du Costa Rica et du Mexique parmi les pays de l’OCDE. Le tout dernier Indice de perception de la corruption de Transparency International (2021) montre que la Lettonie a amélioré son score depuis deux ans et est ainsi remontée de trois places, se classant 36e sur 180 pays (et 26e ex aequo sur les 37 pays de l’OCDE). Dans la toute dernière édition de son Baromètre mondial de la Corruption, Transparency International (Transparency International, 2021[27]) montre qu’à l’automne 2020, 81 % des Lettons interrogés considéraient la corruption comme un gros problème (contre une moyenne de 62 % dans l’UE), 66 % estimaient que le gouvernement ne réussissait pas à maîtriser le phénomène (49 % en moyenne dans l’UE), 49 % des Lettons craignaient des représailles en cas de signalement de faits de corruption (45 % dans l’UE) et 13 % seulement pensaient que les autorités prenaient en compte les points de vue des citoyens dans leurs processus de décision (30 % dans l’UE), soit le taux le plus bas de tous les pays de l’UE. En revanche, les répondants étaient moins nombreux à estimer que la situation s’était dégradée en un an plus qu’ailleurs (20 % contre 32 %).
Ces dernières années, le Bureau de prévention et de répression de la corruption (KNAB, Korupcijas novēršanas un apkarošanas birojs) est resté insuffisamment doté en ressources. Et pourtant, l’adhésion des responsables politiques et du public à la lutte contre la corruption est forte et le KNAB dispose désormais des financements nécessaires pour accroître d’un huitième sa dotation totale en effectifs et augmenter le niveau moyen des rémunérations mensuelles de 37 % d’ici 2023, ce qui facilitera les recrutements et le maintien en place d’un personnel de qualité. Le KNAB est à l’origine de l’ouverture de 39 procédures au pénal en 2020, dont 15 % concernaient des infractions à la réglementation sur le blanchiment de capitaux. Pour la première fois, deux affaires ont donné lieu à des poursuites pour corruption d’agents publics étrangers. Tous ces éléments sont repris dans le rapport de suivi de Phase 3 (OECD, 2021[28]), que la Lettonie a soumis, dans le délai de deux ans prévu, au Groupe de travail de l'OCDE sur la corruption pour faire suite aux 44 recommandations que celui-ci avait adressées à la Lettonie en 2019 (rapport d’évaluation de Phase 3) ; dans son rapport adopté le 15 octobre 2021, le Groupe de travail estime que 16 recommandations ont été pleinement mises en œuvre, 19 l’ont été partiellement et 9 ne l’ont pas été du tout. En outre, plusieurs affaires de corruption, mettant en cause des agents publics lettons de haut niveau, sont en instance.
Le KNAB et le VID devront se coordonner pour mobiliser leurs ressources disponibles et leurs pouvoirs conférés par la loi pour induire un changement de culture et faire en sorte que ces pratiques de corruption ne soient plus socialement admissibles. Après la mise en place, en mai 2019, d’une loi sur la protection des lanceurs d’alerte couvrant à la fois les secteurs public et privé, le KNAB déploie actuellement une plateforme en ligne destinée aux lanceurs d’alerte. Il multiplie également les initiatives pour sensibiliser le public aux effets néfastes de la corruption de façon à réduire la tolérance à l’égard de ces pratiques. Par ailleurs, le KNAB a diligenté une enquête menée auprès de 421 entreprises et 1 001 particuliers en février 2021, qui a constaté qu’au cours des deux années écoulées, un cinquième environ des individus dans chaque échantillon avaient envisagé de verser un pot-de-vin à un agent public. Du côté des particuliers, il s’agissait le plus souvent de pots-de-vin destinés à des professionnels de santé, à l’obtention d’un emploi dans la fonction publique ou au traitement de questions d’ordre immobilier ; du côté des entreprises, le règlement de problèmes en rapport avec la construction, les marchés publics et la délivrance de permis et d’autorisations en constituaient le plus souvent le contexte. Pour la majorité des entrepreneurs, la corruption a reculé ces quatre dernières années, mais bon nombre préconisent de sanctionner plus sévèrement les auteurs de faits de corruption, de recourir à des concours ouverts pour la nomination des agents publics et de veiller à plus d’ouverture et de transparence dans les activités de lobbying menées auprès des agents publics et dans le contrôle des marchés publics. Sachant toutefois qu'il faudrait veiller à ne pas imposer trop d’obstacles administratifs dans les procédures de marchés publics, qui sont déjà plutôt lentes.
Des études comparables, publiées par la Commission européenne en 2020 à l’issue d’un travail de terrain mené en 2019, montrent que 10 % des Lettons interrogés versent de l’argent en plus lorsqu’ils ont affaire avec les services de santé, soit le double de la moyenne de l’UE (European Commission, 2020[29]). Ils sont 25 % à considérer que ces versements d'argent supplémentaires sont « parfois acceptables » ou « toujours acceptables », contre 16 % en moyenne dans l’UE, de même que les cadeaux (pour 57 % des répondants, contre 23 % en moyenne dans l'UE) et le fait de recevoir un service (pour 38 % des répondants, 23 % dans l’UE). Les répondants sont 47 % à considérer que la corruption est un phénomène généralisé dans les procédures de délivrance de permis de construire, 45 % pensent que c’est le cas dans les marchés publics, 42 % dans les relations avec la police et des douanes et 39 % dans les relations avec les services de santé. En 2020, le Conseil des architectes d’Europe a observé que la plupart des entités auprès desquelles il a enquêté dans l’Union européenne jugent que les mesures de lutte contre la corruption, prévues actuellement dans le système de passation des marchés publics et fondées sur la Directive 2014/24 de l’UE, ont été inefficaces. En conséquence, le gouvernement a adopté, en février 2020, un plan d’action pour améliorer les procédures de marchés publics et en accroître la transparence ; il s’interroge actuellement sur l’idée de centraliser la passation des grands marchés complexes et déploie de nouveaux outils pour surveiller les risques y afférents. En outre, il met en place une base de données sur les contrats actuels et leurs amendements. Les futurs besoins de passation de marchés devraient y être pris en compte de façon à assurer la plus grande visibilité possible sur les procédures concernées. Enfin, la section lettone de Transparency International a récemment appelé les autorités à adopter des réformes plus audacieuses des services du parquet et une réglementation complète des activités de lobbying, et - même si le VID a désormais le pouvoir de démettre de leurs fonctions des agents publics pour conflit d’intérêts, dont la définition a été élargie et clarifiée - à mettre à niveau le système de déclaration d’intérêts et de patrimoine des agents publics de haut niveau (DELNA, 2021[30]). De fait, un groupe de travail au parlement élabore, depuis octobre 2019, un projet de loi sur le lobbying et une consultation publique s’est tenue récemment sur le sujet, mais aucune date n’a encore été fixée pour le vote final d’adoption du texte, qui pourrait entrer en application après les prochaines législatives en 2022.
Le processus mené au titre du Comité MONEYVAL du Conseil de l’Europe concernant la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) est au cœur de l’action judiciaire depuis quelques années. En juillet 2018, le rapport d’évaluation mutuelle de la Lettonie a constaté que le pays n’était pas « pleinement conforme » pour 34 des 40 recommandations du Groupe d'action financière (GAFI), même s’il ne s’agissait pas de non-conformité absolue dans aucun des cas. La Lettonie a donc fait l’objet de procédures de suivi renforcé. À l’occasion du premier rapport de suivi en décembre 2019 (Council of Europe, 2019[31]), les appréciations ont été revues et la Lettonie a été jugée « largement conforme » pour l’ensemble des 11 recommandations pour lesquelles l’appréciation initiale était seulement « partiellement conforme », et « pleinement conforme » pour l’une des recommandations pour laquelle l’appréciation initiale était « largement conforme ». Le pays continue de faire l’objet d’un suivi renforcé et un nouveau rapport est attendu cette année. Conséquence de ces progrès, la Lettonie n’a pas été inscrite sur la liste grise du GAFI en 2020. Le processus d’amélioration des systèmes de contrôle interne, y compris la surveillance des clients en fonction des risques, a néanmoins été continuel, ce qui a abouti à une nette baisse des dépôts bancaires de non-résidents, qui s’établissent désormais à moins de 7 % du total des dépôts, contre pas moins de 55 % encore à la fin de 2014.
Tableau 1.7. Recommandations antérieures de l'OCDE concernant l’économie informelle, la corruption et les pots-de-vin
Synthèse des mesures prises depuis l’Étude de 2019 |
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Continuer d'associer les partenaires sociaux à la lutte contre le secteur informel grâce à des accords sectoriels. |
Le Service national des impôts (VID) a signé sept nouveaux accords de coopération en 2020-21 avec des secteurs à forte activité informelle, et six autres accords ont été renouvelés selon de nouvelles modalités, ce qui porte leur total à 39. |
Le taux d’activité est élevé, tandis que la protection sociale reste limitée
Le marché du travail se caractérise de longue date par un taux d’activité élevé en Lettonie (même s’il ne l’est pas autant que chez ses voisins baltes), un taux d’emploi supérieur à la moyenne, mais un taux de chômage dans la moyenne (son point le plus bas remonte à 2007, où il s’était établi à 5.4 %). Néanmoins, les disparités entre régions sont considérables (voir ci-après) et les problèmes d’inadéquation des compétences sont importants, ce qui requiert une participation des employeurs à la formation plus forte qu’ailleurs (voir ci-après). Le taux d’emploi (des personnes âgées de 20 à 64 ans) a lentement diminué pour s’établir à 77.0 % en 2020, ce qui reste relativement élevé. Le seul groupe d’âge affichant un taux d’emploi inférieur à la moyenne de l’UE est celui des moins de 25 ans. En 2020, 16.8 % des 20‑24 ans n’étaient ni en emploi, ni scolarisés, ni en formation, soit une proportion supérieure à la moyenne de l’OCDE, qui était de 15.8 %. Ce pourcentage a toutefois nettement diminué par rapport à 2017, où il était supérieur à 20 %, en partie en raison de la prolongation du dispositif de garantie pour la jeunesse financé par l’Union européenne (UE), qui a donné de bons résultats.
L’évolution du marché du travail a été parallèle à celle du marché des produits depuis le début de la pandémie. Le chômage a vivement augmenté à la suite des mesures de restriction et des suspensions d’activités, sachant que les jeunes et les seniors ont été les plus durement touchés (Graphique 1.9). De nombreux travailleurs ont aussi été mis au chômage technique, en bénéficiant d’aides publiques généreuses pour la Lettonie jusqu’à la mi-2021, suscitant dans certains milieux la crainte d’une augmentation des attentes en termes de revenu qui réduirait l’offre de main-d’œuvre alors que le marché du travail se resserre. Des allocations de chômage technique d’un montant moyen de 974 EUR par mois ont été versées à partir de novembre 2020 à 55 200 bénéficiaires, ce qui représente une proportion de la population active plus faible que dans les autres pays baltes ; le montant total des allocations versées a été de 65 millions EUR, après environ 57 millions EUR au cours de la première vague de la pandémie. Le taux de chômage déclaré (qui est généralement inférieur à celui établi à partir de l’enquête sur la population active) s’est établi à 7.7 % en moyenne en 2020, mais l’existence d’un problème d’inadéquation entre l’offre et la demande de main-d’œuvre était mise en évidence par le taux d’emplois vacants, qui a atteint environ 3.5 % juste avant la pandémie, avant de refluer aux alentours de 2.3 % depuis lors.
Pendant la pandémie, le télétravail a été obligatoire dans l’administration publique, mais uniquement recommandé dans le secteur privé. D’après les données officielles, la proportion de personnes en télétravail a atteint un pic de 22.6 % au début de 2021, soit un niveau nettement supérieur à celui de 2-3 % indiqué par Eurostat pour les années ayant précédé la pandémie. D’après Eurostat, la proportion de personnes en emploi travaillant à domicile en 2020 s’établissait à 4.5 % en Lettonie, soit un niveau nettement inférieur à celui observé pour d’autres pays de l’UE, dans laquelle cette proportion était de 12.0 % en moyenne.
Assurer l’adéquation entre l’offre et la demande de main-d’œuvre
L’enjeu essentiel à long terme sur le marché du travail est d’assurer l’adéquation entre l’offre et la demande de main-d’œuvre, compte tenu de la diminution persistante de la population (voir ci-après). Les travailleurs à temps partiel ne semblent pas constituer une source prometteuse d’accroissement de l’offre de main-d’œuvre. Ils ne représentaient que 7.3 % de l’ensemble des emplois rémunérés en 2019, et il est possible que ce pourcentage soit encore plus faible en réalité, compte tenu du travail informel. Le taux d’imposition implicite du passage d’un emploi à temps partiel à un emploi à temps plein en 2019 (correspondant à une augmentation du temps de travail) variait de 25 % pour les personnes rémunérées au salaire minimum à 36 % pour les travailleurs gagnant le salaire moyen, ce qui est inférieur à la moyenne de l’OCDE. Il semble donc que le coin fiscal ne constituerait pas un obstacle majeur à ce type de transition, si la demande de main-d’œuvre était suffisante. Néanmoins, des données directes sur la population active montrent que le taux d’emploi à temps partiel subi s’établissait à 20.9 % en 2020, soit au-dessus de la moyenne de l’OCDE de 15.5 %.
Environ la moitié seulement de l’ensemble des travailleurs sans emploi a droit aux prestations contributives de chômage dégressives, les autres n’ayant pas cotisé suffisamment longtemps au régime d’assurance chômage, voire pas du tout. Les taux de remplacement initiaux s’établissent dans une fourchette de 50 % à 65 % (suivant le nombre d’années de cotisations d’assurance). Les prestations ne sont normalement versées que pendant une période qui a été ramenée de neuf à huit mois à la fin de 2019, où leur dégressivité a aussi été accentuée ; les prestations diminuent maintenant tous les deux mois, de sorte que le taux de remplacement s’établit à 55 % au bout de six mois. Les économies ainsi réalisées ont été utilisées pour financer une augmentation des pensions de vieillesse minimales ainsi que des pensions de base et des pensions d’invalidité minimales, même si les autorités ont instauré une période d’indemnisation supplémentaire de quatre mois, sous la forme d’une prestation temporaire d’assistance chômage versée jusqu’à la mi-2021 au taux forfaitaire de 180 euros par mois, compte tenu des perspectives limitées de trouver un emploi pendant la pandémie. Les travailleurs indépendants n’ont pas droit aux prestations de chômage, mais peuvent recourir au service public de l’emploi. Les personnes qui ne sont pas admissibles au bénéfice des prestations de chômage doivent se rabattre sur le revenu minimum garanti, qui est inférieur au seuil de pauvreté. Avant les dernières revalorisations, les prestations sociales versées à un célibataire sans enfant, d’une part, et à un couple avec deux enfants, d’autre part, représentaient respectivement 22 % et 32 % du revenu disponible médian, soit des niveaux similaires à ceux observés en Lituanie (18 % et 40 %) mais inférieurs à ceux mesurés en Estonie (29 % et 38 %). Au regard des valeurs observées dans la zone OCDE, le taux d’imposition effectif qui s’appliquait aux personnes recommençant à travailler après avoir perçu des prestations en 2019 était relativement modéré (78.1 %) pour les personnes rémunérées au salaire minimum, mais très élevé (88.6 %) pour les individus gagnant le salaire moyen, ce qui les dissuadait de revenir sur le marché du travail. Il est donc opportun que la durée de versement des prestations ne soit pas trop longue.
Néanmoins, l’incidence du chômage de longue durée est relativement élevée, malgré sa baisse tendancielle depuis près de dix ans : la proportion de chômeurs sans emploi depuis plus d’un an était de 28 % en 2020, comparée à moins de 20 % en Estonie et dans l’ensemble des pays de l’OCDE en moyenne (Graphique 1.10). Les chômeurs de longue durée bénéficient d’un accompagnement individualisé, notamment d’une aide à la mobilité de quatre mois en cas de déménagement à une distance de plus de 15 kilomètres, d’un programme de traitement des addictions et de formations.
En 2018, les dépenses de la Lettonie au titre des politiques actives du marché du travail ont représenté moins de 0.2 % de son PIB (Graphique 1.11). Ces dépenses étaient axées précédemment sur des programmes d’emploi dans le secteur public mais ont été réorientées vers le renforcement des incitations au travail et la réinsertion des chômeurs de longue durée, essentiellement au moyen de chèques formation. Selon une récente évaluation de l’OCDE, les chèques formation accordés aux chômeurs contribuent effectivement à accroître les chances de ceux qui suivent une formation grâce à ce dispositif d’obtenir un emploi et la rémunération qui l’accompagne, en particulier lorsqu’ils se conjuguent à d’autres mesures telles que l’aide à la mobilité, mais ils seraient plus efficaces si leur période de validité était plus longue (OECD, 2019[32]). Cela dit, les subventions salariales destinées aux personnes handicapées n’ont pas amélioré leur situation sur le marché du travail.
La situation de l’emploi peut également se dégrader lorsque la progression des salaires est plus rapide que la croissance tendancielle de la productivité. Le salaire minimum, à hauteur duquel étaient rémunérés jusqu’alors environ 18 % de l’ensemble des travailleurs, a été porté récemment à 500 euros par mois. Cela ne représente encore que deux cinquièmes du salaire moyen, qui a enregistré une forte augmentation tendancielle au cours des dix dernières années : néanmoins, la part du travail dans le revenu des facteurs s’est hissée de 44 % en 2011 à 60 % en 2020 (ce qui constitue une augmentation nettement plus forte et à un niveau plus élevé que dans les autres pays baltes), la progression des salaires réels ayant été constamment supérieure à la croissance de la productivité, suivant l’« effet Balassa-Samuelson ». Un quart des travailleurs est couvert par les conventions collectives, mais le taux de syndicalisation est nettement plus faible. Les négociations se déroulent essentiellement au niveau de l’entreprise, mais dans quelques cas, des accords contractuels ont été étendus à l’ensemble du secteur concerné, leur application devenant automatique si un nombre suffisant de salariés est couvert ; cela vaut par exemple pour le salaire minimum de 700 EUR par mois récemment négocié dans le secteur de la construction.
Enfin, les femmes constituent une autre source potentielle d’accroissement de l’offre de main‑d’œuvre. Néanmoins, le taux d’emploi féminin est déjà nettement supérieur à la moyenne de l’UE en Lettonie, et l’écart de taux d’emploi entre les hommes et les femmes plus modeste. Les incitations au travail des femmes sont cependant amoindries par la faiblesse de leur salaire moyen. L’écart de rémunération entre hommes et femmes augmente depuis 2000 environ, et il s’établissait à 22.3 % en 2020 (d’après les données nationales), ce qui place la Lettonie parmi les pays de l’Union européenne où cet écart est le plus marqué et au quatrième rang des pays de l’OCDE (Graphique 1.12). En dehors de la Lettonie, cet écart ne s’est creusé que dans cinq autres pays de l’OCDE au cours de cette période. La différence de rémunération entre hommes et femmes est un peu plus importante pour les salariés à temps plein que pour les personnes travaillant à temps partiel, et dans le secteur privé que dans le secteur public. Enfin, elle est plus marquée dans la partie médiane de la distribution par âge (par opposition aux jeunes et aux seniors).
Bien que cet écart de rémunération soit en partie imputable aux choix professionnels des femmes, des données récentes laissent à penser qu’une discrimination présumée entre les hommes et les femmes contribue de manière relativement importante à le déterminer en Lettonie (Ciminelli, Schwellnus et Stadler, 2021[2]), alors que le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale est inscrit dans la loi. Les représentations sociales des mères qui travaillent sont moins favorables que dans les pays voisins, même si d’après la dernière édition de l’indice d’égalité de genre (publiée en 2020), la valeur de cet indicateur est de 62.1 pour la Lettonie, ce qui est inférieur à la moyenne de l’UE de 68.0, mais supérieur au niveau atteint par tous les autres pays d’Europe de l’Est membres de l’Union européenne, exception faite de la Slovénie. En outre, le gouvernement a adopté un plan pour « la promotion de l’égalité des droits et des chances entre les hommes et les femmes 2021-2023 » en août dernier, qui vise principalement à assurer l’égalité entre hommes et femmes sur le marché du travail et dans le domaine de l’enseignement, à empêcher les violences sexistes et à intégrer les questions d’égalité hommes-femmes dans les politiques sectorielles. De même, bien que les responsabilités familiales reposent toujours de manière déséquilibrée sur les femmes, la Lettonie figure parmi les pays de l’OCDE où les coûts nets de garde d’enfants sont les plus faibles, ce qui exerce un bon effet d’incitation à travailler sur les deuxièmes apporteurs de revenu dans les couples avec enfants, et contribue à faire diminuer l’écart de rémunération entre hommes et femmes (Ciminelli, Schwellnus et Stadler, 2021[2]). Il existe d’autres instruments d’action couramment utilisés pour atténuer ce problème : assurer un suivi plus étroit de la situation des entreprises et la rendre publique (transparence des rémunérations) et élaborer un système de modèles d’identification pour lutter contre les stéréotypes sexistes et encourager les filles à s’orienter vers des emplois à rémunération élevée (OECD, 2021[33]). D’après les réponses au récent questionnaire de l’OCDE sur la transparence des rémunérations des hommes et des femmes, les employeurs publics sont tenus depuis 2018 de publier un rapport mensuel sur leurs niveaux de rémunération par sexe en Lettonie, mais il n’existe pas d’obligation de ce type pour les employeurs privés. Par contre, ni les uns ni les autres ne sont tenus de réaliser des audits relatifs aux rémunérations des hommes et des femmes.
Le vieillissement de la population nécessite d’ajuster le système de retraite
La population diminue rapidement
La population lettone diminue depuis qu’elle a atteint un pic de 2.7 millions d’habitants en 1990, et s’établissait à 1.9 million d’habitants en 2020 (Graphique 1.13, partie A), soit un taux de déclin moyen de plus de 1 % par an. Le degré de contraction prévisible varie selon les sources et aucune n’a été actualisée pour tenir compte de l’effet de la pandémie sur la fécondité (en baisse), la mortalité (en hausse) ou le solde migratoire (probablement que l’effet sur le solde migratoire est moins négatif, nombre de Lettons ayant décidé de rentrer dans leur foyer pendant la crise). Alors que les projections nationales tablent sur des baisses seulement mineures à l’horizon 2040, d’autres sources comme les Nations Unies et Eurostat prévoient des baisses plus conséquentes pour 2060 et 2100. Il est plus que probable que la population lettone aura diminué de moitié dans les 70 années qui auront suivi son pic.
Les causes de ce déclin sont doubles : tout d’abord, la faiblesse du taux de fécondité qui, après avoir atteint son plus bas à 1.1-1.2 enfant vers la fin des années 1990, s’est quelque peu redressé à la faveur d’un âge moyen de procréation qui s’est stabilisé grâce à l’amélioration de la situation macroéconomique, et aussi, peut-être, aux politiques publiques familiales (notamment aux allocations pour enfant à charge) ; ensuite, la stabilité du solde migratoire que l’allongement de l’espérance de vie ne fait que légèrement compenser (Graphique 1.13, partie D). L’espérance de vie à la naissance a augmenté d’environ cinq ans ces deux dernières décennies, mais reste globalement parmi les plus courtes de l’OCDE, de même que l’espérance de vie à 65 ans. Selon des projections officielles, l’espérance de vie à la naissance devrait à nouveau s’allonger de 5.2 ans à l’horizon 2040.
Les résidents de Lettonie ont toujours quitté massivement le pays depuis que celui-ci a pris son indépendance vis-à-vis de l’URSS ; à l’origine, bon nombre de ces départs étaient le fait de soldats de l’Union soviétique, remplacés plus tard par des russophones retournant dans la Communauté des États indépendants (CEI), même si cette émigration diminue aujourd'hui. Plus récemment, les États membres de l’Union européenne, à laquelle la Lettonie a adhéré en 2004, sont devenus les principaux pays de destination de l’émigration lettone. Les flux d’émigration se sont peu à peu taris durant la dernière décennie grâce à une croissance robuste du revenu par habitant, qui a permis un rattrapage constant des niveaux de vie dans le pays. De fait, le solde migratoire en 2020 (-3 150) a été le plus bas enregistré depuis l’indépendance et dans ses projections, le ministère de l’Économie table sur une compensation à hauteur de 30 % du solde naturel, donnant un solde migratoire modeste au cours des prochaines années, comme dans les pays baltes voisins.
Ainsi qu’il était recommandé dans la dernière Étude économique, le gouvernement a pris la mesure du potentiel démographique que constituent les quelque 400 000 Lettons de la diaspora : ils sont désormais l’objet d’un plan trisannuel associant sept ministères, qui a vocation à convaincre en particulier les familles avec enfants de retourner dans leur pays d’origine, principalement dans les régions en dehors de Riga. L’immigration est une autre source de main-d'œuvre. Les ressortissants de l’UE peuvent entrer facilement dans le pays, souvent dans le cadre d’un détachement depuis leur pays, tandis que les ressortissants d’autres pays doivent réussir un test d’embauche et se voient offrir un emploi rémunéré 1 000 EUR au minimum par mois. Le gouvernement devrait envisager d’accélérer le recrutement de candidats à l’immigration exerçant des professions essentielles, notamment dans les technologies de l’information ou dans la recherche-développement (chapitre 2).
La population a également vieilli
Les incidences économiques de ces perspectives démographiques difficiles sont multiples. L’incidence la plus probable est ce que l’on désigne habituellement par « vieillissement démographique », que l’on mesure le plus souvent par le taux de dépendance des personnes âgées (autrement dit la population des 65 ans et plus en proportion de la population adulte, c’est-à-dire ici de 20 ans et plus) ou par son pendant, la « charge démographique » (cette fois-ci, le dénominateur n’est pas la population adulte totale, mais seulement celle d’âge actif) (Graphique 1.14). Ce ratio a commencé à augmenter nettement, passant de moins de 20 % vers la fin des années 1980 à 35.5 % en 2020, soit l’un des taux les plus élevés de l’OCDE. Selon la variante moyenne des projections démographiques des Nations Unies, la charge démographique augmentera de plus de 1 point de pourcentage par an dans les années 2020, avant de ralentir, puis de culminer ensuite à 61.5 % en 2060, un taux certes assez élevé, mais nettement inférieur à ceux des pays de l’OCDE où la population est la plus âgée.
Le déclin démographique constitue un contexte défavorable au dynamisme économique et à la croissance. Au-delà de la reprise de l’économie au sortir de la crise actuelle, les pénuries de main-d'œuvre qualifiée, imputables à une insuffisance de l’offre de main-d'œuvre elle-même aggravée par le manque de formation des adultes, risquent de se révéler délicates à gérer, en particulier dans certains secteurs et pour certaines compétences : les employeurs lettons disent ainsi manquer d’ores et déjà de plus de deux milliers de diplômés universitaires en technologies de l’information par an. Le nombre de jeunes Lettons de la cohorte des 20-24 ans a diminué d’environ 60 % entre les années 1980 et l’année 2020, en particulier après 2008. Étant donné que les cohortes de sexagénaires sont bien plus nombreuses, la population d’âge actif diminue, selon les calculs de l’OCDE, d’environ 1 % par an. À plus long terme, la situation devrait s’améliorer légèrement en raison d’un rebond modeste des chiffres de population au début des années 2030, avant une nouvelle décrue vers 2040. Cela étant, le déclin démographique affaiblit également la demande intérieure, ce qui rend d’autant plus important le développement des exportations comme source potentielle de débouchés commerciaux (chapitre 2).
Le dépeuplement a frappé plus durement les zones rurales, creusant de fortes disparités entre les régions
Le dépeuplement revêt également une dimension régionale, avec des conséquences importantes pour le développement. Avant que la tendance au vieillissement ne commence à se profiler vers les années 1990 et jusque vers les années 2000, Riga était la plus grande ville de la région baltique/nordique, plus grande que Stockholm, Oslo ou même Helsinki, par exemple. Or, la population a diminué de 18 % depuis lors et Riga n’est plus qu’à la cinquième place, en partie parce que la ville s’est « vidée » de ses habitants partis s’installer à sa périphérie (appelée « Pieriga », seule région de la Lettonie à voir sa population augmenter). Si l’on excepte la région du Grand Riga, la population vivant dans les autres régions a diminué de près de la moitié, malgré les efforts considérables consentis par les autorités pour y attirer des résidents et des activités économiques grâce, notamment, à un fonds de péréquation des ressources des administrations locales, d’une valeur de 119 millions EUR (0.4 % du PIB) en 2019. Toutefois, ces aides sont calculées en fonction des recettes locales de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, plutôt que du coût local de prestation des services publics, ce qui ne fait qu’accentuer les inégalités (OECD, 2019[12]). La région pauvre de Latgale, au sud-est du pays, est ainsi la plus touchée et pourrait perdre, d’ici 2030, 22 % de sa population de 2016, selon le Think Tank CERTUS. On peut supposer que les gens quittent ces régions parce que les salaires y sont bas et les possibilités d’emploi rares.
Les disparités entre régions sont marquées dans la plupart des dimensions mesurables. Il en va ainsi du PIB par habitant, qui variait de 171 % de la moyenne nationale dans la région de Riga à 47 % dans celle de Latgale en 2018. Le ratio du PIB par habitant entre la région (de niveau TL3) définie comme la plus riche et la région la moins riche était de presque trois en 2018, soit l’un des écarts les plus notables parmi 27 pays de l’OCDE (OECD 2020a, graphique 2.9). Les écarts sont également considérables en termes de taux d’emploi, qui variait de moins de 6 % à 9.5 % entre les six régions en 2020, ainsi qu’en matière d’ouverture commerciale ( (OECD, 2020[34]), Graphique 2.14). Les taux de risque de pauvreté correspondent également aux différences de revenu moyen, les chiffres variant de 15 % environ dans la région de la capitale à plus de 40 % dans celle de Latgale. Les établissements scolaires dans les régions rurales sont généralement plus petits, ce qui signifie un revenu inférieur pour les enseignants et des résultats nettement plus mauvais aux tests d’évaluation scolaire normalisés, qu'ils soient nationaux ou internationaux, comme les tests du programme PISA (CERTUS, 2021[35]). Cet écart se répercute jusque dans les taux de diplômés de l’enseignement supérieur, qui sont nettement plus élevés (autour de 48 %) dans la région de Riga que dans d'autres régions (où ils peuvent descendre à 30 %). On retrouve le même type de disparités dans l’offre de services de professionnels médicaux, avec Riga bénéficiant d’une offre bien supérieure à la moyenne et sa région environnante de Pieriga étant nettement moins bien dotée, ainsi que dans le taux de vaccination contre le COVID-19 (voir plus haut). De même, de nombreuses régions périphériques manquent de logements de qualité (voir plus bas). En revanche, l’infrastructure numérique (haut débit) semble répartie de manière égale sur l’ensemble du territoire et ne constitue donc pas un obstacle aux décisions d’implantation des entreprises.
Selon les Orientations de politique régionale 2021-2027, l’objectif du gouvernement est de favoriser un développement équilibré des régions, toutes devant atteindre un PIB par habitant d’au moins 75 % de la moyenne nationale d’ici les 20 prochaines années. Le plan national de développement 2021-2027 (NDP 2027) préconise d'affecter 0.4 % du PIB environ par an à cet objectif. L’un des défauts de cet objectif chiffré est qu’il ne tient pas compte de la main-d'œuvre qui transite chaque jour vers des localités où la production et les salaires sont supérieurs, les PIB régionaux étant calculés en fonction du lieu de résidence, non du lieu de travail. Pour autant, si l’on admet que la plupart des trajets domicile-travail s’effectuent autour des grandes villes, une priorité de politique régionale est donc de créer des emplois très productifs et bien rémunérés dans les régions moins développées, et d'éviter ainsi les déplacements pour aller travailler.
La réforme territoriale de la mi-2021, qui aboutit à un regroupement massif des communes, constitue un changement récent utile à cet égard. Les communes sont à l’origine de 28 % du total des dépenses publiques de la Lettonie et sont dotées de compétences étendues en matière de développement économique, d’éducation, de santé et de prise en charge sociale. Les dernières réformes ont réduit leur nombre, passé de 500 en 2009 à 119 en 2020, et dorénavant à 43, et la taille minimum de leur population est de 3 100 habitants, contre un millier auparavant. Les coûts d’administration sont proportionnels à la taille de la commune et présentent un potentiel d’économies d’échelle évident ; la qualité de la gouvernance locale est problématique dans certaines localités. Il serait indiqué de recourir plus souvent à des mécanismes intégrés de gouvernance locale, en particulier dans la région du Grand Riga, par exemple pour les transports publics. La toute dernière réforme est fondée sur une triple stratégie de concentration de l’activité économique autour des centres de développement nationaux et régionaux, d'une offre de services publics de qualité, calibrée en fonction des évolutions démographiques et incluant le logement abordable, et de promotion de la mobilité. La politique officielle des transports pour 2021-2027 préconise que le rail constitue l’épine dorsale d’un réseau multimodal de transport de voyageurs, le bus n’étant une option que lorsque le trafic ne peut justifier le recours au train.
Plus important encore, il conviendrait de recourir plus largement au fonds de péréquation des ressources entre les administrations locales et d'élaborer des instruments de soutien permanents financés par l’État, les communes n’ayant guère de ressources à mobiliser pour le développement économique local et le logement abordable, ce qui est une condition préalable pour attirer les populations. Nombre d’entre elles font face à la fermeture de leurs lycées et de leurs hôpitaux et à la difficulté de financer le développement de leur voirie et de leurs routes. L’État pourrait envisager de délocaliser entièrement certaines de ses agences nationales depuis Riga vers d’autres villes, ce qui donnerait un coup d’accélérateur à l’activité économique dans ces localités et réduirait l’empreinte carbone des bâtiments publics dans la capitale. Toutefois, le bilan de décisions comparables au Royaume-Uni, en Norvège et en Corée montre que la productivité de ces administrations de l’État peut être sérieusement freinée pendant plusieurs années à cause du refus de leur personnel d’être délocalisé. Il faudrait évaluer en outre cette proposition à la lumière du développement récent du travail à distance et des tendances de l’administration en ligne. Par ailleurs, le système de gouvernance régionale pourrait être amélioré et de nouveaux regroupements de communes opérés, sachant que même après la toute dernière réforme territoriale, la planification du développement est encore une compétence partagée entre les villes et leurs communes environnantes, ce qui rend intéressants de nouveaux regroupements de juridictions au sein de pôles d’activité économique ou le renforcement des mécanismes de coopération intercommunale.
En dehors des effets que l’on vient d’examiner sur l’offre de main-d'œuvre et le développement régional, l’érosion démographique en cours se répercutera directement sur :
la structure des dépenses et très probablement aussi, de la production : la part des services progressera aux dépens des biens, de même que la consommation au détriment de l’investissement (notamment l’investissement dans le logement), les personnes âgées ayant déjà accumulé suffisamment de biens et ayant plutôt besoin de services de proximité et de loisirs ;
les besoins en services publics de santé (notamment pour le traitement des démences) et de prise en charge sociale de longue durée (voir plus bas) ;
la nécessité de transferts budgétaires et autres, sous la forme de pensions de retraite ;
la nature des effets des activités humaines sur l’environnement et les ressources naturelles, qui seront moins délétères ;
les gains de productivité, les effets d’agglomération et la dynamique des entreprises, qui subiront les effets négatifs de l’érosion démographique, dont quelques études montrent qu’ils seront relativement mineurs pour la Lettonie entre 2014 et 2035 (Aiyar, Ebeke et Shao, 2016[36]).
Ajuster le système de retraite est primordial pour gérer les tensions démographiques
De prime abord, un pays dont la population est particulièrement âgée aura des difficultés à servir des pensions à sa population âgée, sauf si des ressources substantielles ont été accumulées, éventuellement dans des fonds de réserve pour les retraites. La Lettonie ne saurait affirmer l’avoir fait d’une quelconque manière : le solde de ses paiements courants est négatif depuis la majeure partie des vingt dernières années, par exemple - bien qu’il tende clairement à se redresser - tandis que sa position extérieure globale nette a été négative, et ce de plus en plus fortement, jusqu’en 2011, au moment où la tendance s’est inversée : les dernières données d’Eurostat présentent un solde à -31 % du PIB. À la différence de nombreux pays de l’OCDE aujourd’hui, les personnes âgées en Lettonie sont plus pauvres que la population moyenne.
Afin de ne pas faire peser une charge excessive sur la population d’âge actif, le système public de retraite actuel (mis en place en 1996) n’assure qu’un revenu de base plutôt modeste aux retraités. Il est composé d’un régime de comptes notionnels à cotisations définies et d’un régime par capitalisation à cotisations définies, auquel sont allouées 30 % des cotisations (qui totalisent 20 % du revenu). Le régime par capitalisation, non encore arrivé à maturité, représentait 2.1 % du PIB à la fin de 2020, soit moins que dans la plupart des pays de l’OCDE dotés d’un tel régime, dégageant un taux de rendement moyen faible, de 2.4 % en termes réels en 2020, c’est-à-dire moins que le rendement médian de 4.5 % et la moitié environ du rendement dégagé dans les voisins baltes de la Lettonie (OECD, 2021[37]). Les taux de rendement moyens réalisés durant les 15 dernières années ont été légèrement négatifs en termes réels, essentiellement à cause du niveau élevé des frais de gestion. Cela étant, dans le sillage d’une réforme de 2017, les frais de gestion appliqués aux fonds de retraite du second pilier ont été amputés de quasiment les deux tiers et s’établissent désormais à 0.5 % par an.
La question de l’adéquation des pensions se pose de plus en plus. Les taux de remplacement nets futurs des pensions de retraite pour une carrière pleine commencée en 2018 ont été estimés à 54.3 %, soit moins que la moyenne de l’OCDE, de 58.6 % (Graphique 1.15, partie A). À terme, les cotisations brutes en pourcentage du PIB diminueront de 1.6 point de pourcentage dans les 50 années à venir, du fait de la diminution de la population et du niveau d’emploi, tandis que les pensions servies augmenteront de 1.0 point de pourcentage en montant brut, grâce aux pensions du régime privé obligatoire égales à 2.2 % du PIB. Un actif ayant cotisé pendant 40 ans et prenant sa retraite à l’âge de 65 ans en 2059 pourra espérer une pension représentant seulement 41.7 % de son revenu net lorsqu’il était en activité. Qui plus est, la plupart des retraités - singulièrement les hommes - ne bénéficient pas longtemps de leur pension de retraite à cause du faible niveau de leur espérance de vie à 65 ans. Dernier point : le système de retraite est peu redistributif et les taux de remplacement sont assez constants, quels que soient les niveaux de rémunération.
La couverture du système de retraite est également réduite : il faut avoir cotisé pendant 15 ans pour percevoir une pension ordinaire, ce délai devant être porté à 20 ans en 2025, contrairement à une recommandation antérieure de l’OCDE, qui préconisait d’abaisser la durée minimum de cotisation (OECD, 2018[38]). Les personnes n’ayant pas cotisé assez longtemps perçoivent une pension de vieillesse, fixée à 64 EUR par mois de 2006 jusqu’en 2021, année où elle a été portée à 109 euros ; toutefois, il existe par ailleurs une prestation distincte de revenu minimum garanti, ouverte à toutes les catégories d’âge, ainsi qu’une pension minimum pour ceux ayant cotisé au-delà de la durée minimum de cotisation. Les travailleurs indépendants relèvent d’un traitement différent de celui des salariés : s’ils profitent de la possibilité de n’acquitter que la cotisation minimum obligatoire (ce qu’ils font à une majorité écrasante, comme d’ailleurs en Pologne, en Slovénie et en Espagne), leur manque à gagner par rapport à un salarié rémunéré au salaire moyen est de 46 %, soit un écart plus de deux fois supérieur à la moyenne de 21 % dans l’OCDE (OECD, 2019[12]). À la mi-2021, toutefois, un système de cotisation minimum obligatoire à l’assurance sociale a été mis en place à titre universel (incluant les travailleurs indépendants), dont la base de calcul correspond au salaire mensuel minimum. Les possibilités de prise en compte des interruptions de carrière sont très réduites : huit mois tout au plus seulement pour les périodes de chômage et 18 mois pour l’éducation des enfants. Les prestations du filet de sécurité en faveur des personnes âgées et les pensions minimums ont été gelées de 2009 à 2012, puis maintenues constantes en termes réels de 2013 à 2019, période pendant laquelle les salaires réels ont considérablement augmenté. Cela étant, une forte hausse est intervenue en 2021, après une revalorisation modeste en 2020. S’agissant des autres pensions de vieillesse du système public, leur montant est indexé chaque année à hauteur de 50 % du salaire mensuel moyen de l’année précédente (actuellement de 470 euros). Des versements compensatoires sont prévus pour la hausse des prix à la consommation, auxquels s’ajoute un pourcentage des revalorisations en termes réels des salaires pris en compte dans la base de calcul des cotisations. Le taux plancher est à 50 % pour les retraités ayant cotisé moins de 30 ans et est relevé par palier jusqu’à 80 % pour ceux ayant cotisé au moins pendant 45 ans.
Les dépenses publiques de retraite se sont établies à 7.1 % du PIB en 2020. Quelque 7 % des bénéficiaires ont perçu cette année-là moins de 150 euros par mois (mais des revalorisations substantielles ont été accordées en janvier et octobre 2021). En conséquence, la Lettonie a affiché en 2020 le deuxième plus fort taux de pauvreté (relative) des personnes âgées dans l’OCDE (Graphique 1.15, parties B et C). La pauvreté relative a considérablement augmenté parmi la population âgée depuis le gel des pensions et est particulièrement présente chez les femmes (39 % sont concernées, contre 20 % des hommes). Outre le traitement des interruptions de carrière pour se consacrer à l’éducation des enfants, évoqué plus haut, cette pauvreté relative peut s’expliquer aussi en partie par des pensions de réversion très modestes, qui se bornaient jusqu’à une date récente à une somme forfaitaire équivalente à deux mois de pension de la personne décédée, même si ce montant a été réévalué et équivaut désormais au versement d’une demi-pension (suppléments compris) pendant un an. Cette pauvreté des personnes âgées est également due au fait que les titulaires d’une pension ordinaire n’ont pas (beaucoup) profité de la croissance des revenus réels, leur pension ayant été indexée sur l’inflation, mais très peu (jusqu’à ces dernières années) sur l’évolution des salaires réels. Assurer une telle revalorisation de façon régulière (ainsi qu’il est prévu à partir de 2023), tout en allongeant la durée de vie active et si possible, en relevant les taux de cotisation, permettrait d’éviter une nouvelle progression de la pauvreté à l’âge de la vieillesse.
Repousser l’âge de départ à la retraite, actuellement de 64 ans et dont le relèvement est en cours, à raison de trois mois par an jusqu’à atteindre 65 ans à l’horizon 2025, constitue un autre levier d’action pour alléger la charge des retraites sur le budget et atténuer les effets du recul de l’offre de main-d'œuvre. Toutefois, il n’est pas prévu officiellement de poursuivre sur cette voie ultérieurement. Il est essentiel de maintenir ce cap et de lier automatiquement l’âge de la retraite à l’espérance de vie, comme l’on fait plusieurs pays de l’OCDE, de manière à éviter d’avoir à faire voter régulièrement une législation dans ce sens. Bien entendu, un mécanisme d’ajustement automatique ne résout pas tous les problèmes de financement des retraites ((OECD, 2021[39]), chapitre 2). Dans le cas de la Lettonie, compte tenu de la courte espérance de vie à l’âge de 65 ans et d’un système de santé insuffisamment doté en ressources, l’inconvénient de cet ajustement automatique sera que bon nombre de retraités ne profiteront que d’une brève retraite, notamment s’ils font partie des catégories de revenus modestes et/ou s’ils vivent dans des régions où l’espérance de vie est spécialement courte. Dans tous les cas, il convient de renforcer les systèmes de réadaptation professionnelle des personnes en invalidité, afin d’aider celles qui sont en capacité de travailler à continuer de le faire et d’accompagner correctement celles qui ne le sont pas.
Les résultats sur le plan de la santé s’améliorent, mais il faut faire davantage
Les dépenses globales de santé sont faibles, ce qui explique en partie la courte espérance de vie ainsi que d’autres maux
Dans les grandes lignes, le système de santé de la Lettonie prévoit notamment la couverture universelle, la fourniture de services largement financés par l’impôt, la séparation des activités d’acheteur et de prestataire et une combinaison de prestataires publics et privés. Cependant, dans un certain nombre de dimensions, les résultats sont médiocres, notamment le niveau de satisfaction des patients.
En 2019, les dépenses de santé par habitant sont restées relativement modestes, même par rapport aux pays baltes voisins (Graphique 1.16, partie A). Si les dépenses par habitant ont augmenté de 57 % depuis 2010, elles restaient les plus faibles de l’Union européenne et ne représentaient qu’environ la moitié des niveaux moyens de l’OCDE (en PPA). Si l’insuffisance des dépenses s’explique en partie par le faible niveau du PIB par habitant en Lettonie et le niveau de prix bas qui en découle, les dépenses de santé en pourcentage du PIB (6.2 % en 2021, soit l’avant-dernier taux de la zone OCDE) sont également faibles (partie B). Les dépenses du ministère de la Santé ont fortement augmenté pendant la pandémie, mais elles devraient revenir à des parts du PIB proches de celles d’avant la pandémie dans les années à venir. Une part importante des dépenses (26.5 %) a été affectée aux produits pharmaceutiques, en partie en raison des prix élevés des génériques et, jusqu’à récemment, du manque d’incitations à les utiliser (OECD, 2020[39]). Il semble cependant que les réglementations entrées en vigueur en avril 2020 aient permis de plafonner les prix des génériques onéreux (ils ne peuvent excéder le double du prix des variantes les moins chères), d’encourager le recours à des médicaments meilleur marché et de réduire le ticket modérateur pour les patients : les produits de marque ne peuvent plus représenter plus de 30 % des prescriptions annuelles d’un médecin.
Le faible niveau de dépenses a des conséquences importantes en termes de résilience économique et explique en grande partie les mauvais résultats de la Lettonie en termes d’espérance de vie (totale) en bonne santé à la naissance, laquelle figure parmi les plus courtes d’Europe, s’établissant à 50.6 ans (70.1) pour les hommes et à 52.2 ans (79.7) pour les femmes ; concernant l’ensemble de la population, l’espérance de vie à la naissance était de 75.7 ans en 2020, soit environ cinq ans de moins que la moyenne de l’UE mais cinq ans de plus qu’en 2000, soit l’une des progressions les plus rapides de l’Union européenne (Graphique 1.17, parties A et B). L’écart d’espérance de vie entre les femmes et les hommes est le deuxième plus important de l’Union européenne et correspond à près du double de l’écart moyen de l’UE qui s’établit à 5.2 ans ; mais les femmes souffrent surtout de maladies chroniques et d’incapacités. L’écart d’espérance de vie est également beaucoup plus important que la moyenne à l’âge de 30 ans entre les groupes les moins instruits et les groupes les plus instruits ( (Murtin et al., 2017[40]) (OECD, 2019[41])). Le Plan national de développement 2021-2027 (NDP2027) a pour but d’allonger l’espérance de vie en bonne santé à la naissance pour les hommes et les femmes en la portant respectivement à 55 et 57 ans d’ici 2027, grâce à un financement cumulé indicatif de 558 millions EUR dédiés aux « soins de santé centrés sur le patient » (l’équivalent en moyenne d’un quart de point de pourcentage du PIB environ), dont environ les trois quarts proviennent de fonds de l’UE ; toutefois, certains financements alloués à d’autres fins auront également une influence sur les résultats en matière d’espérance de vie, par exemple ceux qui visent à améliorer la qualité de l’air (deux fois plus de Lettons meurent en effet de la pollution de l’air ambiant qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE). Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un objectif ambitieux aux implications budgétaires non négligeables : pour l’atteindre, il faudrait quasiment doubler le rythme d’amélioration enregistré depuis 2000. Enfin, l’espérance de vie à 65 ans pour les femmes est l’une des plus courtes de l’OCDE, tandis que les hommes se classent à l’avant-dernière place (partie C).
Les tensions à plus long terme sur les coûts vont très probablement s’accentuer de façon progressive au fil du temps sous l’effet du vieillissement de la population, parce qu’il sera nécessaire de recourir à des actes médicaux de plus en plus onéreux (aussi bien les technologies que les produits pharmaceutiques) et à une prise en charge sociale également plus coûteuse (notamment pour la part croissante de personnes atteintes de troubles démentiels), mais aussi sous l’effet de la « maladie des coûts de Baumol », qui sous-entend que les salaires du secteur des services augmenteront plus vite que la productivité de l’économie dans son ensemble, surtout dans une économie en situation de rattrapage. Le gouvernement lance un projet pilote pour fournir des soins intégrés aux patients atteints de démence ; ce projet doit être doté de moyens suffisants. Le nombre de personnes en attente d’être placées dans un établissement de soins de longue durée a été quasiment multiplié par trois entre fin 2015 et fin 2019, atteignant 11.6 % de la capacité d’accueil. En 2018, les dépenses annuelles par habitant consacrées aux soins de longue durée n’étaient que de 61 EUR, soit une petite fraction des 588 EUR alloués en moyenne dans l’Union européenne ( (OECD, 2019[41]), Graphique 9).
La mauvaise qualité des soins et les nombreux besoins non satisfaits sont également le signe que des améliorations sont nécessaires
Les améliorations à apporter pour moderniser le système de santé couvrent plusieurs autres aspects :
La qualité de la prise en charge reste un problème : les données les plus récentes (2018) sur les taux de mortalité évitable par prévention ou par traitement indiquent respectivement 326 et 196 décès pour cent mille habitants, soit le double des chiffres moyens de l’UE de 160 et 92 décès ; en 2019, la somme (qualifiée de mortalité évitable) est tombée à 405, soit encore le double de la moyenne de l’OCDE qui s’établissait à 199. Ces chiffres se sont améliorés plus rapidement que la moyenne de l’UE depuis 2011, et une partie de l’écart s’explique certainement par la mauvaise qualité de l’air en termes de concentrations de particules fines (voir ci-dessous).
Peu de Lettons estiment être en bonne santé : d’après les données de l’EU-SILC, en 2019, 47.1 % seulement de la population âgée de 16 ans et plus déclarait un état de santé au moins satisfaisant (la moyenne de l’UE était de 68.6 %), dont 12.6 % seulement des plus de 65 ans. L’écart de 44.3 points de pourcentage entre les adultes appartenant au quintile de revenu supérieur et ceux du quintile de revenu inférieur est plus élevé de 23 points de pourcentage que l’écart moyen dans les pays de l’OCDE (OECD/European Observatory on Health Systems and Policies, 2021[42]).
Les besoins non satisfaits autodéclarés en termes d’examens et de soins médicaux (en raison du coût, de la distance ou des listes d’attente) sont nombreux, quoiqu’en diminution : en 2019, ils ont concerné 4.3 % de la population (8.8 % pour le quintile de revenu le plus bas et 1.3 % pour le quintile de revenu le plus élevé), soit une amélioration sensible par rapport aux 16.1 % enregistrés en 2011, mais un taux encore supérieur à la moyenne de l’UE de 2.0 %, qui s’explique très probablement en partie par la couverture limitée du régime public d’assurance maladie, lequel prévoit des quotas cumulés de soins disponibles. Les problèmes d’accès se concentrent dans les zones rurales en raison d’une répartition géographique inégale des prestataires, du moins des médecins généralistes.
Le niveau élevé du reste à charge est un problème qui se pose depuis longtemps : en 2020, les versements directs des ménages ont représenté environ 36 % des dépenses totales de santé, soit le niveau le plus élevé de l’Union européenne, ce qui a entraîné des écarts considérables entre les différentes catégories de revenu en termes d’accessibilité et de bien-être (Graphique 1.18). Bien qu’un plafond annuel (570 EUR) soit fixé pour les cotisations individuelles obligatoires, pas moins de 15 % des ménages affichent des niveaux de dépenses de santé extrêmement élevés. Les efforts nationaux devraient être plus ambitieux que l’objectif du NDP2027 d’abaisser à 33 % la part du reste à charge à l’horizon 2027.
Le manque de ressources est à l’origine des effectifs limités de personnel médical et des longs délais d’attente
La pénurie de personnel médical qualifié est probablement l’une des principales raisons expliquant la courte espérance de vie, le grand nombre de décès évitables et les longs délais d’attente. Le nombre de médecins pour 1 000 habitants s’élevait à 3.3 en Lettonie en 2019, contre 3.5 en Estonie et 4.6 en Lituanie, tandis que le nombre d’infirmiers n’était que de 4.4 pour 1 000 habitants, soit moins qu’en Estonie avec 6.2, qu’en Lituanie avec 7.7 et que la moyenne de l’OCDE de 8.8 (Graphique 1.19). La démographie des professionnels de santé peut également paraître insurmontable : par exemple, la part globale des médecins âgés de plus de 65 ans atteint près de 30 % et pas moins de 42 % dans une seule spécialité. Le nombre de membres du personnel infirmier en exercice a chuté de plus d’un quart depuis 2006, ce qui a entraîné, d'une part, une réforme récente visant à moderniser les études et carrières des infirmiers et, d’autre part, la multiplication quasiment par deux du nombre de places de médecins résidents financées par l’État ces cinq dernières années. Un autre moyen possible de faire augmenter rapidement le nombre de professionnels de santé consiste à encourager le report du départ à la retraite par le biais de primes, par exemple. Les données nationales montrent une nette amélioration début 2020 du nombre de médecins en exercice et une légère augmentation du nombre d’infirmiers et d’assistants médicaux. Néanmoins, dans l’ensemble des spécialités médicales, environ un quart des professionnels diplômés ne sont pas en exercice. À l’origine de la pénurie se trouvent des niveaux de rémunération qui, jusqu’à récemment, étaient extrêmement bas. Cette situation a fait que les jeunes ont été de moins en moins nombreux à suivre une formation médicale quelle qu’elle soit, même si la Lettonie a récemment compté parmi les pays de l’OCDE qui ont formé le plus de médecins par habitant. La faible rémunération a également incité de nombreux professionnels de santé à émigrer à la recherche d’un meilleur niveau de vie, et d'autres à quitter leur profession en milieu de carrière pour exercer un autre métier.
Le NDP2027 vise à porter le nombre de médecins pour 1 000 habitants à 3.45 en 2027 et le nombre d’infirmiers à 4.6. Cela permettrait d’augmenter le nombre de consultations annuelles de patients par habitant (environ six, contre 7.6 en moyenne dans l’Union européenne) et de raccourcir les délais d’attente. Pour certains types d’interventions et les consultations de spécialistes, les données disponibles semblent indiquer un raccourcissement significatif des files d’attente au cours des dernières années qui ont précédé la pandémie. Cependant, les délais d’attente d’avant le COVID restaient longs pour la chirurgie non urgente, les soins de réadaptation et les consultations de spécialistes. L’association des tickets modérateurs, même modérés, et des longs délais d’attente, dus en partie aux quotas susmentionnés, a encouragé le développement des soins de santé privés : la part des lits d’hôpitaux dans les établissements privés, par exemple, est passée de 3.3 % en 2000 à 10 % en 2016, où elle reste située depuis.
Plus important encore, les salaires ont fortement augmenté ces dernières années, par exemple de 44 % cumulés pour les médecins (les portant à une moyenne de 1 862 euros par mois). Un modèle de salaire-cible a été élaboré mais n’a pas encore été approuvé par le gouvernement. Les augmentations annuelles proposées seraient de l’ordre de 10 à 12 % en moyenne pour les médecins et les infirmiers. Au total, ces mesures coûteraient 730.6 millions EUR (plus d’un demi-point de pourcentage du PIB) au cours des quatre prochaines années. Elles permettraient d’attirer les jeunes dans ces professions, à condition de ne pas trop privilégier les primes d’ancienneté et d’éviter des conditions de travail trop pénibles. C’est toutefois une allocation beaucoup plus basse qui a été prévue dans le budget 2022, qui permettra de procéder à des augmentations annuelles de seulement 4.4 % pour les médecins et 4.7 % pour les infirmiers.
L’efficience des dépenses de santé pourrait être améliorée
En plus de consacrer davantage de ressources aux dépenses de santé, les autorités pourraient en améliorer l’efficience. Selon une évaluation récente, le système est trop centré sur l’hôpital et gagnerait à transférer des ressources vers davantage de soins primaires et à domicile et vers des services de proximité (OECD/European Observatory on Health Systems and Policies, 2021[42]). La rationalisation de l’hôpital est en cours depuis un certain temps, et les autorités estiment qu’il n’est plus nécessaire de poursuivre les efforts dans ce domaine. De fait, le nombre d’hôpitaux est passé de 156 à 63 depuis la fin des années 90, mais aucun progrès supplémentaire n’a été accompli ces dix dernières années, contrairement au Luxembourg, par exemple, où ce nombre a diminué à un rythme constant, de 40 % au total, jusqu’à la moitié du niveau de la Lettonie. Pourtant, si l’on rapporte ces chiffres à la population, la Lettonie dispose d’un nombre moyen d’hôpitaux selon les normes de l’OCDE. On y compte toutefois un nombre excédentaire de lits d’hôpitaux - même s’il s’est réduit au fil du temps - ainsi qu’un taux d’occupation des lits plus faible et des séjours hospitaliers en moyenne plus longs que dans les pays les plus performants. Il n’est pas certain que ces lits excédentaires aient été un atout pendant la pandémie de COVID-19, car ils n’étaient sans doute pas suffisamment équipés ou dotés en personnel.
La transformation numérique du secteur se poursuit au rythme des pays plus avancés : par exemple, la prise des rendez-vous médicaux peut s’effectuer en ligne (même si, avec un taux de 8 %, elle est plus faible que presque partout ailleurs dans l’OCDE), de même que la délivrance des ordonnances. Cependant, il apparaît que la télémédecine était sous-développée avant la pandémie de COVID-19.
Une autre innovation génératrice de gains d’efficience en matière de prestation de services, qui a été adoptée avec succès dans plusieurs autres pays de l’OCDE, du moins dans les zones urbaines, consiste en la fourniture de soins ambulatoires par une équipe de soignants (Encadré 1.5). L’organisation des soins en équipe présente de nombreux avantages potentiels, notamment un accès élargi aux soins (des horaires de consultation plus étendus et des délais d’attente plus courts) ; la prestation plus efficace et plus efficiente de services complémentaires essentiels à la qualité des soins, par exemple l’éducation du patient, la santé comportementale, l’autogestion de la santé et la coordination des soins ; un niveau accru de satisfaction au travail pour les professionnels de santé ; et un environnement dans lequel tous les professionnels médicaux et non médicaux sont encouragés à effectuer des tâches qui correspondent à leurs capacités (Schottenfeld et al., 2016[43]). Les autorités devraient expérimenter une telle approche en Lettonie.
Encadré 1.5. Organisation de l’offre de soins en équipe
Depuis plus de 20 ans, l’un des principaux thèmes de la réforme des soins de santé dans les pays avancés est l’adoption de formes de prestation de services plus intégrées, en particulier pour les soins primaires. L’une des principales formes adoptées dans ce domaine est l’organisation des soins en équipe, qui associe de multiples professionnels exerçant dans différentes spécialités qui dispensent des soins de façon collaborative. L’idée était de générer ainsi des gains importants en termes de qualité des soins, si ce n’est en termes de coûts. En effet, une méta-analyse récente a examiné 167 articles de la littérature et conclu que cette approche conduisait à une amélioration perçue de la qualité des soins, à un niveau accru de satisfaction des patients et à un accès élargi aux soins (Baxter et al., 2018[44]). Certaines données indiquent aussi qu’elle permet de réduire le nombre d'erreurs médicales (Rosen et al., 2018[45]).
L’OCDE a également présenté la prestation des soins par une équipe pluridisciplinaire comme un élément clé de l’efficacité des soins dans le contexte de la pandémie actuelle, parallèlement aux nouvelles responsabilités des professionnels de santé, à l’intégration de l’offre de soins dans des services de proximité, au recours aux technologies numériques et à l’application d’incitations bien conçues (OECD, 2021[46]). Elle a notamment cité les exemples de la France, de l’Irlande, de l’Islande, du Royaume-Uni et de la Slovénie faisant preuve de son efficacité.
S’orienter vers plus de prévention
L’un des moyens d’améliorer en amont les résultats sur le plan de la santé consiste à mettre en œuvre des mesures préventives. Dans l’ensemble, la santé publique et la prévention ne représentent que 2.2 % du budget total de la santé en Lettonie, par rapport à une moyenne de l’UE de 3.1 %. En dépit des améliorations notables de ces dernières années, les taux de dépistage du cancer restent bien inférieurs aux normes de l’UE : par exemple, seulement 39.1 % des femmes de 50 à 69 ans ont été dépistées ces deux dernières années, contre 61.7 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. Une autre mesure préventive est la vaccination. Comme on l’a vu plus haut, le rythme de vaccination contre le COVID-19 en Lettonie est moins rapide que dans d’autres pays (voir plus haut) et la vaccination des personnes âgées contre la grippe pourrait être améliorée, mais le pays affiche de meilleurs résultats pour ce qui est de la vaccination contre les maladies infantiles. Une évaluation préalable à la pandémie a également conclu que les mesures de lutte contre les maladies transmissibles étaient généralement insuffisantes en Lettonie (OECD, 2019[41]) : par exemple, le taux de VIH y est parmi les plus élevés de l’Union européenne, même s’il a tendance à baisser. En bref, il faut redoubler d’efforts pour encourager le public à participer à ces mesures préventives, après s’être assuré de leur prise en charge par le régime public d’assurance maladie.
Comme dans de nombreux autres pays, la santé mentale ne fait pas l’objet d’une attention suffisante, même si la promesse a été faite de mener une enquête auprès de la population à ce sujet. Le taux de suicide figure parmi les plus élevés de l’Union européenne.
Les facteurs de risque liés au mode de vie pèsent lourd dans la balance et appellent des mesures plus énergiques de la part des pouvoirs publics
Les facteurs de risque liés au mode de vie (y compris la pollution atmosphérique) ont représenté 43 % de l’ensemble des décès enregistrés en Lettonie en 2019, soit bien plus que la moyenne de l’UE. Cet écart s’explique en grande partie par des facteurs liés à l’alimentation, qui est à l’origine de 24 % des décès, contre seulement 17 % en moyenne dans l’UE (OECD/European Observatory on Health Systems and Policies, 2021[42]). Face à ce problème, il convient par conséquent de suivre une approche multidimensionnelle, notamment en menant des campagnes de sensibilisation. Un élément clé consisterait à utiliser pleinement les droits d’accise pour décourager les comportements néfastes pour la santé. Leur efficacité pour réduire les achats lettons de cigarettes, de bière et de vodka a en effet été avérée (Pļuta et al., 2020[47]). Comme avec les carburants pour véhicules à moteur, le recours aux droits d’accise est limité par les achats transfrontaliers, étant donné que la plupart des habitants vivent non loin d’une frontière (Pļuta et al., 2020[47]). Dans la majorité des cas, ces droits sont actuellement similaires aux taux appliqués dans les voisins baltes de la Lettonie. Il existe néanmoins quelques produits pour lesquels les taux en vigueur des droits d’accise non applicables aux produits énergétiques sont inférieurs à ceux des pays voisins et pourraient être facilement relevés, notamment sur les boissons alcoolisées distillées (spiritueux), les bières des petites brasseries et le tabac à fumer. En tout état de cause, les taux des droits d’accise appliqués à tous les types de boissons alcoolisées et à tous les tabacs et produits contenant de la nicotine devraient être réexaminés à intervalles réguliers et révisés conformément aux objectifs nationaux en matière de fiscalité et de santé publique.
En Lettonie, la consommation annuelle moyenne d’alcool par adulte (12.9 litres) est élevée, bien supérieure à celle des autres pays baltes et 50 % supérieure à la moyenne de l’OCDE (8.7 litres). L’écart est imputable aux hommes, qui consomment en moyenne 20.9 litres d’alcool par an (Graphique 1.20). En conséquence, près de 20 % des hommes de 15 ans et plus étaient alcooliques en 2016, soit la part la plus élevée de la zone OCDE (OECD, 2021[48]), Graphique 2.9). Le fait que l’alcool soit devenu 26 % plus abordable depuis 2013 n’aide pas, alors que son coût est resté quasi stable dans les pays baltes voisins (OECD, 2021[48]). L’impact estimé sur les dépenses de santé (+3.7 %), l’espérance de vie (-1.6 %) et la productivité et le PIB futurs (-3.6 %) n’est pas négligeable (OECD, 2021[48]). La gravité de la situation a conduit le gouvernement à adopter en juillet 2020 un Plan d’action national 2020-22 pour limiter la consommation de boissons alcoolisées et lutter contre l’alcoolisme. Le Plan va limiter la publicité pour les boissons alcoolisées, leur disponibilité, et les remises sur les achats de grandes quantités, imposer des obligations d’étiquetage pour les boissons alcoolisées, notamment au moyen de symboles d’avertissement (par exemple, sur la conduite en état d’ébriété ou les risques pour la femme enceinte), et améliorer la prise en charge de l’addiction à l’alcool et les services de réadaptation, entre autres mesures. Le processus législatif a débuté en vue de mettre en œuvre un certain nombre des mesures prévues dans le Plan d'action national. La fixation d’un prix unitaire minimum est une mesure complémentaire qui devrait être envisagée à l’avenir. L’OCDE (2021[48]) présente un train de mesures complet dont le coût ne s’élève qu’à 1.4 euro par personne et par an et dont les avantages économiques estimés atteindraient plus de 22 euros par personne. D’après l’OCDE, réduire la consommation à seulement 1-1.5 verre par jour aurait un impact significatif sur l’espérance de vie, les dépenses de santé et les revenus réels.
Près d’un quart des Lettons adultes (22.6 %) fument quotidiennement, un taux en baisse par rapport au tiers de fumeurs quotidiens comptabilisés en 2000 mais encore bien au-dessus des moyennes internationales (la moyenne de l’OCDE est de 16.5 %) ; cette habitude est beaucoup plus répandue chez les hommes que chez les femmes et elle est plus étroitement liée au niveau d’études que dans les autres pays de l’UE. La stratégie du ministère letton de la Santé pour les années à venir consiste à élaborer et à mettre en œuvre plusieurs politiques de lutte contre le tabagisme pour réglementer les patchs anti-tabac à la nicotine et les dispositifs à base de tabac chauffé, envisager s’il faut imposer ou non les emballages neutres pour le tabac et les produits contenant de la nicotine, et élaborer un programme de sevrage tabagique financé par les pouvoirs publics.
La prévalence de l’obésité chez l’adulte est également plus forte qu’en moyenne dans l’UE : en 2019, 22.3 % des adultes étaient considérés comme obèses (troisième taux le plus élevé de l’Union européenne, supérieur de plus de six points de pourcentage à la moyenne de l’UE), et près de 38 % supplémentaires étaient en surpoids (Graphique 1.21). Outre le manque d’exercice physique chez deux adultes sur cinq, on observe de façon générale de mauvaises habitudes alimentaires, notamment un régime alimentaire fortement carencé en fruits et en légumes (les Lettons sont respectivement derniers et avant-derniers de l’Union européenne en matière de consommation de fruits et de légumes par habitant) et une consommation élevée de boissons sucrées non alcoolisées. La Lettonie applique depuis 2000 une taxe sur ces boissons, qui est actuellement fixée à 7.4 euros pour 100 litres. Cette taxe a contribué à réduire la consommation quotidienne moyenne de ces boissons chez les enfants, en particulier les filles, mais elle a été beaucoup moins efficace auprès des adultes. Il est probable que la taxe de 0.025 EUR par portion soit tout simplement insuffisante pour avoir un impact réel. En 2022, elle devrait être quasiment multipliée par deux pour atteindre 14 euros pour 100 litres de boissons dont la teneur en sucre dépasse 80 g par litre. Il conviendrait toutefois de repenser cette approche de façon à inclure l’équivalent en édulcorants de substitution, lesquels sont sans doute tout aussi nocifs pour la santé. En outre, dans le contexte des Directives de santé publique prévues pour la période 2021-2027, il faudra faire davantage pour sensibiliser la population à l’importance de l’alimentation et d’une bonne hygiène de vie, notamment l’activité physique, pour rester en bonne santé. Il pourrait être utile de mettre en place dans ce cadre un système d’étiquetage des produits alimentaires avec des symboles pour alerter sur la forte teneur en sel, en sucres et en graisses saturées, comme cela a d’abord été fait au Chili en 2016 et en Israël en 2017 ; ce système permettrait de sauver près de 500 vies par an et d’économiser en outre 150 millions EUR sur les dépenses.
Tableau 1.8. Recommandations antérieures de l’OCDE sur les soins de santé
Objet et résumé des recommandations |
Mesures prises depuis l’Étude de 2019 |
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Réduire le montant des frais de santé restant à la charge des patients, en particulier en faveur des ménages modestes. |
Des ajustements mineurs ont été apportés au ticket modérateur applicable aux consultations chez un médecin ou un spécialiste en janvier 2020. Le ticket modérateur pour les médicaments a également été fortement réduit en avril 2020 : un recours accru aux génériques a été imposé et le prix de 388 médicaments remboursables a été abaissé. La définition des personnes dans le besoin auxquelles aucun ticket modérateur ne s’applique a été assouplie. Certaines personnes handicapées seront également exonérées du ticket modérateur à compter de 2022. Cependant, la pénurie de soins financés par le budget disponible oblige les patients à acheter des services auprès du secteur privé à des prix beaucoup plus élevés que le ticket modérateur applicable. |
Accroître l'efficacité des soins de prévention en élargissant l'éventail des actes que les infirmiers et les pharmaciens sont autorisés à pratiquer, notamment dans les zones rurales où les services de santé sont plus rares. |
Une nouvelle désignation pour le personnel infirmier en soins généraux devrait être établie en 2022. Ces soignants auraient des compétences élargies en termes de prise en charge thérapeutique, d’actes chirurgicaux et de soins ambulatoires et pourraient travailler indépendamment pour diagnostiquer les problèmes liés aux soins aux patients, offrir un soutien psychologique, et assurer, évaluer et analyser la qualité des soins aux patients. Des plans sont également en cours de préparation pour permettre aux pharmaciens de vacciner, ce qu’ils ne peuvent actuellement pas faire. Le personnel infirmier est d’ailleurs toujours en sous-effectif. |
Une grande partie du parc letton de logements est surpeuplée, ancienne, et de qualité médiocre
L’accessibilité financière et la qualité des logements constituent des problèmes urgents en Lettonie (OECD, 2020[49]). Une stratégie globale à long terme dotée de ressources suffisantes est nécessaire pour y remédier. Le parc de logements est vieillissant et dépourvu dans certains cas d’équipements de base : près de 9 % des ménages n’avaient pas accès à un WC intérieur équipé d’une chasse d’eau exclusivement réservé à leur usage en 2020, et 10 % d’entre eux n’avaient ni douche ni baignoire. Peu de bâtiments résidentiels ont été construits depuis 2010, et quasiment aucun en dehors de Riga et de Pieriga. Cela tient naturellement en partie à la diminution de la population, mais n’explique pas la faiblesse du nombre total d’unités construites, qui n’était que de 3 315 en 2019, par exemple, contre 7 014 en Estonie et 12 577 en Lituanie. De fait, le nombre moyen de pièces par personne s’établit à 1.2 seulement, ce qui est inférieur d’un tiers à la moyenne de l’OCDE, et le taux de surpeuplement des logements est conséquent (34.2 % en 2018), puisque les seuls pays de l’OCDE où il est plus élevé qu’en Lettonie sont la République slovaque, la Pologne et le Mexique, et que la moyenne de l’OCDE s’établit à 11 % (OECD, 2020[49]). Aux alentours de 2 % du PIB, l’investissement en logements a été l’un des plus faibles de la zone OCDE pendant la plus grande partie des 20 dernières années (Graphique 1.22). Alors que le nombre d’unités d’habitation est supérieur de 25 % à 30 % au nombre de ménages, beaucoup de logements sont vacants dans des zones isolées, où la demande a chuté à mesure que les habitants migraient vers les centres régionaux et la région de Riga (voir ci-avant). En termes de gouvernance de l’occupation des sols, la Lettonie se distingue par des règles particulièrement restrictives, ce qui se traduit par une très faible réactivité apparente de l’offre de logements à la demande.
S’agissant de l’accessibilité financière du logement, la Lettonie se caractérise par un « chaînon manquant » : ceux qui sont trop pauvres pour pouvoir contracter un emprunt hypothécaire leur permettant d’acquérir un appartement de 75 mètres carrés, tout en étant trop riches pour avoir droit aux allocations de logement (voir ci-après). Ces laissés pour compte représenteraient environ 44 % de l’ensemble des ménages (OECD, 2020[49]). Les banques sont dans l’incapacité de proposer des prêts hypothécaires d’une durée d’amortissement supérieure à 15 ans (sans assumer un risque de taux d’intérêt substantiel), alors que cette durée est trop courte pour de nombreux emprunteurs. En conséquence, le niveau des créances hypothécaires est modeste en proportion du PIB. Les hausses des prix des logements ont été supérieures à la moyenne de l’OCDE au cours des dix dernières années, mais ils avaient précédemment accusé une forte baisse au cours de la crise financière mondiale, et en termes réels, les prix ont à peine retrouvé le niveau record qu’ils avaient atteint en 2007 (Graphique 1.23). En 2017, de nombreux propriétaires occupants n’avaient pas non plus les moyens de réaliser les travaux d’entretien nécessaires (OECD, 2020[49]), mais un programme de prêts à long terme pour travaux d’entretien, assortis d’un taux d’intérêt fixe de 3.5 % par an, a été récemment mis en place. Cela dit, l’accessibilité financière du logement est améliorée par le faible niveau moyen des impôts périodiques sur la propriété immobilière résidentielle. Les valeurs cadastrales sont censées être actualisées tous les quatre ans. Leur prochaine révision est prévue par de récentes modifications de la loi sur le cadastre d’État des biens immobiliers adoptées par le Parlement le 6 juin 2021 et entrées en vigueur le 12 juillet 2021. La loi dispose que la base de calcul des valeurs cadastrales pour la période 2025-2028 devra être approuvée d’ici au 30 juin 2023, et qu’elle s’appliquera pour l’établissement des valeurs cadastrales à compter du 1er janvier 2025.
En outre, tant le segment privé que le segment social du marché du logement locatif sont étroits (Graphique 1.24), ce qui se traduit par une faible mobilité de la main-d’œuvre et le fait que des ménages restent dans des logements de qualité médiocre ou inadaptés (et donc par des pertes de bien-être). Malgré des données indiquant que la durée moyenne des trajets domicile-travail est longue (puisqu’elle s’établit à 36.5 minutes par jour, au lieu de 30.5 minutes en moyenne dans la zone OCDE), sur une période récente de cinq ans, 9.7 % seulement des ménages avaient déménagé ( (Causa et Pichelmann, 2020[50]); Graphique 3.1) – contre 21.6 % en moyenne dans l’ensemble de la zone OCDE – et ces déménagements n’étaient liés à des motifs professionnels que dans 0.5 % des cas. Cela a contribué à une augmentation des taux d’emplois vacants au cours des années qui ont précédé la pandémie. Un des facteurs ayant limité l’offre de logements locatifs privés résidait peut-être dans la réglementation des relations entre propriétaires et locataires, qui ne protège pas suffisamment les premiers depuis longtemps ; un nouveau régime est entré en vigueur en mai 2021 (OECD, 2020[49]). Cela dit, la rigueur de l’encadrement des loyers est comparable à celle observée généralement dans les pays de l’OCDE. En tout état de cause, il semble que le manque de logements de bonne qualité pouvant être occupés par leur personnel dissuade des entreprises investisseuses étrangères de s’implanter dans de nombreuses régions du pays.
Seuls 43 000 ménages reçoivent les allocations de logement non imposables, soit 7 % de l’ensemble des ménages et 18 % de ceux qui se trouvent dans le quintile inférieur de la distribution des revenus. Ces allocations de logement sont accordées à la fois aux ménages nécessiteux et à des ménages non nécessiteux, ayant de faibles revenus, qui remplissent les conditions requises. En 2020, les dépenses totales consacrées à ces prestations n’ont été que de 13.3 millions EUR. Mesurées en proportion du PIB, elles figurent parmi les plus faibles de la zone OCDE (Graphique 1.25). Le montant moyen des versements mensuels variait de 14 EUR pour un célibataire non nécessiteux ayant de faibles revenus à 26 EUR pour un ménage de plusieurs personnes. Néanmoins, en milieu d’année est entré en vigueur un système réformé, qui devrait élargir à 65 000 personnes environ la population admissible au bénéfice de ces allocations et uniformiser leur niveau à l’échelle nationale. Les prestations sont normalement accordées pour une durée de trois mois, à moins que le ménage ne compte aucun membre d’âge actif, auquel cas elles sont versées pendant une période deux fois plus longue de six mois. Les mêmes conditions de non‑prise en compte des revenus que celles relatives au revenu minimum garanti s’appliquent (voir ci‑avant). Malgré cette parcimonie, le taux de surcharge financière liée au coût du logement (c’est-à-dire la proportion de ménages à faible revenu consacrant plus de 40 % de celui-ci à leur loyer) est heureusement bas, puisqu’il s’établit à 14.2 %, alors que la moyenne de l’OCDE est de 35.2 %. Le sans-abrisme ne constitue pas non plus un problème majeur. Les 14 refuges pour sans-abri que compte le pays sont gérés par des communes urbaines, essentiellement à Riga. En 2019, 0.36 % de la population (des hommes dans une large mesure) occupait ces établissements, et 58 % de ces personnes avaient des problèmes d’addiction.
Le Plan de développement national 2021-2027 prévoyait à titre indicatif un financement de 480 millions EUR (environ 0.2 % du PIB) pour réduire la proportion de ménages confrontés à des difficultés financières liées au logement, vivant dans des conditions insatisfaisantes ou inscrits dans les registres communaux des bénéficiaires d’aides au logement, ainsi que pour accroître la proportion de ménages occupant des logements « rénovés », le nombre d’appartements mis en chantier et le nombre d’unités caractérisées par une meilleure efficacité énergétique. Le renforcement de l’efficacité énergétique du secteur du logement constitue une tâche d’une ampleur considérable, étant donné qu’elle est nettement inférieure à la moyenne de l’OCDE. En outre, une grande partie du parc est essentiellement chauffée à partir de biomasse (bois), si bien qu’environ deux tiers de la totalité des émissions de particules fines sont dus à l’immobilier d’habitation, et que le niveau des émissions de particules fines par habitant imputables au secteur du logement est quatre fois supérieur à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.26). À court terme, comme cela a été recommandé dans le rapport de 2020 de l’OCDE sur le logement abordable en Lettonie (OECD, (2020[49])), le gouvernement a l’intention d’utiliser des financements de la facilité de l’UE pour la reprise et la résilience afin de créer un fonds pour l’accessibilité financière du logement doté de 43 millions EUR ; il aura pour objet de financer sous forme de prêts à long terme et de subventions (à hauteur de 30 %) la construction d’au moins 700 unités de logement locatif abordables destinées au « chaînon manquant » évoqué précédemment, sachant que la moitié des loyers versés sera affectée à de futurs projets de construction de logements abordables une fois que les sommes empruntées auront été remboursées (suivant un mécanisme de fonds renouvelable). En utilisant des fonds du cadre financier pluriannuel, le gouvernement prévoit également de dépenser 61 millions EUR pour subventionner à hauteur de 85 % la construction ou la rénovation par les communes de 1 800 unités d’habitation, ainsi que de mettre en place un programme d’octroi de prêts pour la construction de logements qui seront loués au prix du marché. Il a déjà commencé à offrir des aides à l’achat d’un montant compris entre 8 000 EUR et 12 000 EUR (suivant le nombre d’enfants et l’efficacité énergétique du logement) aux familles nombreuses faisant l’acquisition de logements d’une valeur maximale de 250 000 EUR dans le cadre du programme « Balsts ».
Les autorités pourraient également mettre en place des mécanismes d’incitation pour favoriser la création d’associations ou de coopératives de logement, même si une telle initiative ne porterait probablement ses fruits qu’à long terme. La Suède est un exemple de pays qui utilise de longue date avec succès ce type de mécanismes en faveur de l’accessibilité financière du logement, et une coopérative allemande (Living in Metropolises SCE) est en train de monter un projet pilote à Jelgava (LiM - Living in Metropolises SCE, 2021[51]). Une autre option envisageable consiste à mettre en œuvre un programme de location-accession à la propriété immobilière, comme le préconise l’Association des collectivités locales. Quoi qu’il en soit, toutes les communes devraient avoir des stratégies clairement définies en matière de logement, notamment Riga, afin d’éviter que des tensions imprévues ne soient créées par le jeu des forces du marché. Il faudrait accorder à la densification urbaine une place centrale dans ces stratégies, afin de réduire la consommation d’énergie conformément aux impératifs de la politique climatique.
Tableau 1.9. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant la politique du logement
Thème et résumé des recommandations |
Résumé des mesures prises depuis l’Étude de 2019 |
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Encourager les organismes de gestion de logements à engager et à gérer des investissements en faveur de l’efficacité énergétique d’un vaste ensemble de bâtiments, et offrir aux propriétaires occupants de leur logement ayant de faibles revenus des aides permettant de couvrir jusqu’à 100 % des coûts. |
Altum, l’organisme public de financement du développement, gère 201 millions EUR destinés à financer des investissements en faveur de l’efficacité énergétique de 989 bâtiments résidentiels, cofinancés par le Fonds européen de développement régional (FEDER) dans le cadre de sa période de programmation 2014-20. En outre, un nouvel instrument doté de 229 millions EUR est en cours d’élaboration pour la période de programmation 2021-27. |
Mettre en place des incitations fiscales sous conditions de ressources pour la rénovation des équipements de base. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Accroître les financements publics consacrés au logement locatif abordable et au logement social |
Les autorités sont en train d’élaborer un nouvel instrument financier à long terme pour financer 700 appartements à loyer modéré en dehors de la zone de Riga. Il permettra aux promoteurs immobiliers de bénéficier d’un prêt à long terme comportant un élément de libéralité, et exigera un cofinancement de 5 % des coûts admissibles. Un nouveau dispositif de soutien du logement social financé par l’UE, doté de 61 millions EUR, intégrant un cofinancement local de 15 %, est également en cours d’élaboration ; il servira à rénover 1 200 appartements et à construire 600 unités de logement neuves. La priorité sera donnée aux endroits caractérisés par des délais d’attente en matière d’accès aux logements et l’existence de divers services sociaux de proximité. |
Demander aux promoteurs de logements d’en affecter une partie au parc d’unités d’habitation abordables. |
Aucune mesure n’a été prise. S’agissant des problèmes potentiels d’équité, dans l’hypothèse où cela renchérirait le logement pour d’autres acquéreurs, les autorités privilégient les acquisitions directes par l’État. |
La Lettonie a de grands défis environnementaux à relever
Le thème « Nature et environnement » fait partie des 18 axes d'action récemment retenus par le gouvernement letton dans son plan national de développement 2021-27, avec une enveloppe indicative de 1.37 milliard EUR, soit près de 0.7 % du PIB. Pour les besoins des activités de suivi, 10 indicateurs ont été sélectionnés, qui concernent le changement climatique, la pollution atmosphérique, la qualité de l’eau, l'élimination des déchets municipaux et dangereux, les zones protégées et la biodiversité ornithologique.
Peu d'évolution face au changement climatique et grave pollution atmosphérique
Le Plan national énergie-climat 2021-30 adopté début 2020 trace la voie à suivre pour réduire les émissions et exploiter davantage les puits de carbone afin qu’en 2030, la Lettonie ait, conformément à l’objectif national, ramené le niveau total des émissions de GES (hors secteur Utilisation des terres, changement d'affectation des terres et foresterie, UTCATF) à 65 % en dessous des niveaux d'avant-1990 et réduit celui des émissions imputables aux activités hors SEQE (système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre) de 6 % par rapport aux niveaux de 2005, le but étant de parvenir à la neutralité carbone en 2050 au plus tard. La réalisation de cet objectif suppose toutefois une accélération du déclin des émissions après 2030, par rapport au rythme actuel. De plus, l’Union européenne ayant, en 2021, relevé de 15 points de pourcentage l’engagement contracté pour 2030, la Lettonie est appelée à revoir à la hausse son ambition et à moins concentrer l’essentiel des efforts à fournir sur le long terme. Par ailleurs, en février 2021, Riga a signé la Déclaration de Paris sur le climat et rejoint ainsi d'autres villes européennes dans la course au zéro émission, son objectif étant de parvenir à la neutralité à l'horizon 2030.
L'objectif de réduire de 65 % les émissions nationales de GES était pratiquement atteint en 2000. Depuis, le niveau des émissions ne cesse de croître, tout en restant en deçà de la moyenne OCDE, qu’il soit exprimé par habitant ou par rapport au PIB (Graphique 1.27, partie A). La situation des émissions du secteur UTCATF s’est également inversée du fait de la hausse des récoltes forestières et du vieillissement des peuplements forestiers. La majorité des émissions (deuxième part la plus importante dans l’Union européenne) ne relèvent pas du système d'échange de quotas d'émission de l’UE et sont en premier lieu imputables aux transports (30 %, contre une moyenne OCDE de 24 %) et à l’agriculture (20 %, contre une moyenne OCDE de 10 %) (Graphique 1.28), et ce malgré la mise en place d’une taxe carbone dont le montant, initialement modeste (4.5 EUR par tonne en 2019), devrait s'élever à 15 EUR par tonne en 2022. L’Union européenne a décidé d’étendre le dispositif de la taxe carbone à la faveur de la révision de son cadre d'action en matière de climat, ce qui aidera la Lettonie à mieux réussir sa décarbonation.
Globalement, en 2018, le prix effectif du carbone appliqué par la Lettonie ne représentait que 29 % du total estimé à 60 EUR par tonne pour 2020 : c’est mieux que les derniers pays du classement OCDE (17 %), mais loin du premier rang occupé par la Suisse avec 69 % (OECD, 2021[52]). Il ressort de travaux de recherche empirique que, dans la durée, l’application d'un prix du carbone fait baisser les émissions de carbone de 7.3 % par tranche de 10 EUR. En conséquence, si la Lettonie se hissait au haut du classement, et rattrapait la Suisse (ou, autre hypothèse, si le pays faisait payer le coût total du carbone), ses émissions pourraient diminuer d’environ 18 % (31 %). La faiblesse des prix effectifs du carbone en Lettonie tient en partie aux subventions accordées aux énergies fossiles (fossilfuelsubsidiestracker.org). Certes, en 2019, leur montant était plus de deux fois moins élevé qu’en 2013 (où il avait culminé à 356 millions USD), principalement du fait de l’effondrement des dépenses fiscales en faveur du gaz naturel. Il n’empêche que le gaz naturel continue de faire l’objet de transferts de crédits budgétaires non négligeables et que les dépenses fiscales en faveur des produits du pétrole connaissent un certain rebond depuis 2016.
Le Plan prévoit 12 mesures interdépendantes : améliorer la performance énergétique des bâtiments, recourir davantage aux technologies à émissions négatives dans la production d'électricité, dynamiser l’utilisation des énergies renouvelables dans les transports, écologiser le système fiscal, moderniser l’infrastructure et intégrer les marchés régionaux de l’électricité et du gaz naturel en augmentant la puissance d'interconnexion (ce qui renforce le jeu de la concurrence, la sécurité énergétique et l’indépendance énergétique, qui ont déjà grandement bénéficié du fait que les importations ont été divisées par deux depuis 1990). Une centaine de mesures ont été recensées au total (soit entre trois et 14 par action), auxquelles s'ajoutent diverses initiatives horizontales. À titre indicatif, leur coût total s'élève à 8.26 milliards EUR, ce qui représente près de 4 % du PIB par an. Il sera difficile de mettre en œuvre l'intégralité de ces mesures. Il est prévu de faire le point de la situation en 2022. Une attention particulière sera accordée au secteur de l’agriculture, dont la part des émissions est supérieure à la moyenne mondiale (Climate TRACE, 2021[53]). La tâche s’annonce malaisée dans la mesure où les sols organiques drainés (sols tourbeux) fortement émetteurs occupent une place non négligeable en Lettonie et que la quantité d'émissions agricoles y est difficile à réduire en l’état actuel des technologies. Il serait néanmoins utile de s'intéresser davantage aux cultures qui nécessitent moins d’engrais.
Il n’y aura pas de neutralité carbone sans utilisation rationnelle de l’énergie. La Lettonie s’y emploie, notamment en modernisant la flotte du transporteur national, Air Baltic. De grands changements sont également prévus dans le secteur ferroviaire, en particulier dans le cadre du projet d'investissement de création Rail Baltic mené en partenariat avec l’Estonie et la Lituanie dans l’objectif de relier les États baltes au réseau ferroviaire du reste de l’Europe. Outre qu’ils seront entièrement électriques afin d'éviter les émissions de carbone, les nouveaux ouvrages seront construits à l'aide des technologies et matériaux les plus modernes, de même qu’ils satisferont aux règles de sécurité les plus strictes. Par ailleurs, une nouvelle partie du système ferroviaire existant devrait être électrifiée, vu le caractère relativement peu carboné de la puissance installée lettone. De plus, les fonds disponibles au titre de la FRR seront judicieusement employés de façon à réduire les émissions, notamment à financer les investissements dans les modes de transport public non polluants (train, tramway, bus électriques et pistes cyclables) pour les besoins de la réorganisation des transports dans l’aire métropolitaine de Riga.
Un autre moyen est de remplacer les énergies fossiles par les énergies renouvelables, dont la part dans la production d'électricité avoisine en moyenne 60 % depuis quelques années, ce qui est nettement supérieur à la moyenne OCDE (Graphique 1.27, partie B). L’essentiel de cette électricité est d’origine hydraulique. Jusqu’à une date récente, la Lettonie ne disposait pas de capacité solaire à proprement parler, en partie à cause de l’ensoleillement insuffisant, mais peut-être aussi en raison des lourdeurs administratives. En 2019, un premier grand parc solaire thermique a été commandé à Salaspils. Si les biocombustibles solides ont gagné du terrain au cours de la décennie écoulée, en particulier dans le secteur du chauffage urbain, les effets de cette ressource renouvelable sur le changement climatique sont encore incertains et probablement modestes. L’État mise sur l’éolien, en recourant pour l’essentiel à des mécanismes de mise aux enchères, notamment en vue de partager avec l’Estonie, d'ici à 2030, une puissance installée offshore comprise entre 700 MW et 1 000 MW (ELWIND) (qui satisfera jusqu’à 20 % de la consommation totale d'électricité). Cela dit, le public n’est guère favorable à ces initiatives qui feront grimper les prix, en raison des erreurs commises par le passé dans la conception du système des prix d’achat, opaque et entaché de soupçons de corruption. La Lettonie devrait également envisager de durcir les obligations d'information climatique, au moins celles applicables aux entreprises publiques, voire à l’ensemble des grandes entreprises du secteur privé, tel que recommandé par le Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat du Conseil de stabilité financière (2020[54]).
Bien qu’elle ait diminué d’environ 30 % depuis 2000, la pollution aux particules fines reste préoccupante en Lettonie : deux tiers de la population sont exposés à un niveau dangereux. L’exposition moyenne y est deux fois plus importante qu’en Estonie, par exemple (Graphique 1.27, partie C), ce qui explique le taux de mortalité élevé lié à la pollution atmosphérique ainsi que le raccourcissement de l’espérance de vie (voir plus haut). Vu l’ampleur des émissions dues au chauffage résidentiel (voir plus haut), il conviendrait de redoubler d’efforts pour encourager l'abandon du bois (et du charbon, certes moins employé) comme combustible de chauffage domestique.
Comme indiqué dans le plan national de réduction de la pollution atmosphérique 2020-30 que le gouvernement a adopté en avril 2020, plusieurs moyens vont être mis en œuvre pour remédier à ce problème. Un budget modeste de 23 millions EUR a été alloué à la mise en place d'un suivi supplémentaire et à la construction de nouvelles chaudières industrielles pour la période prévue de sept ans. Il a été entrepris d'indexer le montant de la taxe annuelle de circulation routière sur le volume d'émission de carbone imputable au véhicule, mais d'autres émissions produites par les véhicules sont actuellement omises (bien qu’il soit envisagé de modifier la loi) et seuls les modèles les plus récents sont actuellement visés par le régime (faute de données), alors que les véhicules de plus de 10 ans forment la très grande majorité du parc automobile. En outre, comme toutes les émissions imputables au secteur des transports découlent de l’utilisation des véhicules, il y a tout lieu de penser que les taxes et impôts assis sur la distance parcourue (comme ceux qui frappent les achats de carburant) sont plus à même d'internaliser ces effets induits. Par ailleurs, des incitations en faveur des véhicules à émission zéro ont été annoncées, de même que des initiatives locales sont encore de l’ordre du possible. Une taxe sur divers polluants émis par une source fixe est prélevée au cours de la période 2021-23. En revanche, il a été entrepris de réduire le montant de la taxe sur le gaz naturel utilisé comme carburant, ce qui, indépendamment du fait que l’essence et le gazole sont plus polluants, ne va pas dans le sens d'une décarbonation totale.
Malgré des progrès dans le domaine du traitement des eaux, la tâche s’annonce encore difficile dans ceux de l’élimination des déchets solides et de la biodiversité
Il y a matière à améliorer la qualité de l’eau en Lettonie, notamment du point de vue de la disponibilité de l’eau potable et de la fiabilité de la distribution (LV PEAK, 2020[55]). La pollution de l’eau est principalement due aux éléments nutritifs rejetés par des sources diffuses, qui sont le plus souvent agricoles. De plus, d'après les chiffres nationaux, seulement quelque 89 % des citadins sont raccordés aux services centralisés de traitement des eaux usées (cela dit, une proportion inconnue des eaux usées est traitée par ailleurs). Un certain nombre de projets ont été mis sur pied avec le concours financier de l’UE pour faire passer cette part à 92 %. Cette situation trouve plusieurs raisons : existences de zones faiblement peuplées, recul démographique et pauvreté (les canalisations sont parfois construites jusqu’à la limite foncière alors que les propriétaires n’ont pas les moyens de prendre en charge les frais de raccordement). Il ressort des données de l’OCDE que 80 % des eaux usées étaient traitées en 2018 (Graphique 1.27, partie D). Un autre plan d'investissement relatif à la gestion des eaux usées jusqu’en 2027 a été adopté en novembre 2020. Les compagnies locales des eaux sont pour beaucoup de taille trop modeste pour être rentables. La dernière réforme territoriale (voir ci-dessus) devrait aboutir à leur regroupement, ce qui implique d’évaluer en profondeur les coûts et avantages de la mise en place d’une compagnie nationale unique.
La production de déchets solides ne cesse de croître depuis le début du siècle, au rythme moyen de 3.6 % par an depuis 2013, dans le droit fil de la croissance réelle par habitant. Son volume était de 418 kg par habitant en 2019 (Graphique 1.27, partie E). La quasi-totalité des matériaux de conditionnement sont frappés par une « taxe sur les ressources naturelles », dont le montant est compris entre 0.24 centime d’euro par kilo (papier, carton et bois) et 2.2 centimes (polystyrène), ce qui est nettement moins qu’en Estonie, par exemple (entre 0.6 centime pour le verre et 2.5 centimes pour le plastique, le polystyrène et le métal). Ces dernières années, le recyclage des emballages a connu un véritable essor puisque le taux dépasse désormais la barre des 18 %. L'augmentation des barèmes fiscaux doit encourager les producteurs à trouver des moyens d’utiliser moins de matériaux. Les importations pourraient également être concernées.
Quelque deux tiers des déchets solides produits en Lettonie ne sont pas triés. Le pays est dépourvu de capacités d’incinération : les déchets municipaux solides sont soit recyclés, soit mis en décharge. La gestion des déchets relève actuellement de 10 organes régionaux. Leur nombre passera à cinq en 2022, ce qui donnera lieu à de nouvelles économies d'échelle. Le pays s’est par ailleurs doté d'un nouveau plan national de gestion des déchets pour 2021-27, qui repose sur la prévention et le recyclage des déchets. Pour promouvoir le recyclage, les systèmes de tri sélectif du verre, du papier et des biodéchets ont été élargis, mais sur la base du principe pollueur-payeur. À cela s’ajoute une taxe de 65 EUR par tonne mise en décharge (ou incinérée), qui passera à 95 EUR d’ici à 2023. Le produit de cette taxe permettra au secteur de la gestion des déchets de financer ses activités et investissements, dont le montant requis est estimé à près de 550 millions EUR jusqu’en 2035 inclus.
Les zones terrestres protégées couvrent environ 18 % du territoire national, ce qui est proche de la moyenne des États baltes, mais loin de la moyenne OCDE (24.6 %). La Lettonie n’ayant pas satisfait à l’intégralité des obligations qui lui incombent en vertu de la Directive habitats de l’UE, elle fait l'objet de plusieurs actions en manquement. Par ailleurs, dans la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 qu’elle a récemment présentée, la Commission européenne propose que tous les États membres visent l’objectif de transformer 30 % de la superficie terrestre en zones protégées. La Lettonie est par conséquent exposée à une forte pression pour accroître la proportion des zones terrestres protégées sur son territoire. Bien que l’initiative paraisse dans une certaine mesure raisonnable compte tenu du déclin démographique, il y a tout lieu de penser que l’industrie forestière lettone pâtirait de sa pleine mise en œuvre, en particulier si elle ne parvenait pas à progresser dans la chaîne valeur. L’exploitation des ressources forestières lettones s’est fortement intensifiée au cours de la décennie écoulée.
Le système fiscal est plutôt à vocation écologique : le produit des taxes environnementales représentait 3.4 % du PIB en 2019, contre une moyenne OCDE de seulement 1.5 % (Graphique 1.27, partie F). En plus de frapper davantage le carbone, comme dans d’autres membres de l’UE, la fiscalité devrait pouvoir améliorer les performances environnementales en réduisant le traitement relativement favorable réservé aux véhicules diesel, malgré les limites inhérentes au niveau d'imposition pratiqué dans les autres pays baltes. Pareillement, la fiscalité du carburant diesel destiné aux machines agricoles pose des questions de compétitivité. Sur ce point, en revanche, la Lettonie est allée plus loin que les règles de l’UE en appliquant un taux effectif plus élevé ainsi que des limites de volume par hectare définies selon la nature de la plante cultivée. Pour lutter contre la pollution, la Lettonie pourrait de surcroît augmenter la taxe d'accise appliquée aux combustibles de chauffage, qui reste favorable aux ressources carbonées. Riga devrait aussi envisager d'ajouter un péage de congestion dans l’arsenal de mesures déployé pour décourager l’utilisation de la voiture particulière et favoriser le recours aux autres modes, dont les transports publics. Une solution alternative pourrait être de créer des couloirs réservés aux bus, que les voitures particulières pourraient emprunter contre paiement d'une redevance de péage. Les recettes qui en résulteraient serviraient à financer l’investissement dans les transports publics. Ce faisant, il serait possible de tirer avantage d’un mécanisme de tarification du carbone agissant sur la demande de déplacements sans susciter d’opposition véhémente au sein de l’opinion et des milieux politiques (Cohen-Blankshtain, Bar-Gera et Shiftan, 2020[56]). En principe, la Lettonie pourrait aussi recourir à des mécanismes non fondés sur le marché pour atteindre les objectifs liés au changement climatique, mais la plupart des outils à employer à cet effet (règles et normes de produit) relèvent de l’Union européenne.
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (Principales recommandations en gras) |
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Soutenir la reprise et définir des politiques adaptées en termes de viabilité budgétaire et d’équité |
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L’augmentation du taux de vaccination s’est accélérée depuis l’été, si bien qu’il atteint près de 70 %, soit un niveau proche de la moyenne de l’Union européenne (UE). |
Continuer de déployer des efforts pour accélérer le rythme des vaccinations. |
Les règles budgétaires nationales et de l’UE semblent devoir être de nouveau suspendues en 2022. Les effets de la récession de 2020-21 liée au COVID-19 sur les soldes budgétaires se font encore sentir. La dette publique atteindra probablement 50 % du PIB d’ici à 2023. Des examens annuels des dépenses sont réalisés depuis cinq ans. |
Maintenir des aides budgétaires à court terme ciblées sur les ménages vulnérables et les secteurs les plus durement touchés par les restrictions liées au COVID-19. Élaborer une stratégie budgétaire crédible accompagnée de règles budgétaires efficaces, pour préparer le pays aux défis liés au vieillissement démographique et au climat. Poursuivre le processus d’examen annuel des dépenses. Veiller à la mise en œuvre effective des projets financés par la facilité pour la reprise et la résilience, et coordonner ce processus avec l’utilisation d’autres instruments nationaux de planification. |
Le système letton d’impôts et de transferts est peu redistributif, alors que les inégalités de revenu et de patrimoine sont considérables. Le taux de pauvreté est élevé parmi les personnes âgées. Le revenu minimum garanti est insuffisant pour assurer la subsistance de ses bénéficiaires. Les disparités géographiques sont marquées. |
Réviser régulièrement les seuils de revenu minimum et revoir à la hausse les prestations accordées aux groupes vulnérables, notamment aux personnes âgées. Accroître les recettes fiscales de manière propice à la croissance et progressive, en s’appuyant sur l’imposition de l’immobilier résidentiel, des sources de dégradation de l’environnement et du capital. Utiliser davantage le système de péréquation communale pour réduire les disparités. |
Le chômage de longue durée est élevé. Les politiques actives du marché du travail sont insuffisantes. Seule la moitié environ des chômeurs a droit à des prestations de chômage. |
Accroître les dépenses actives pour l’emploi. Allonger la période de validité des chèques-formation, au moins pour les jeunes adultes. Assouplir les conditions d’admission au bénéfice des prestations de chômage. |
L’écart de rémunération entre les hommes et les femmes, qui s’établit à 22 %, est un des plus marqués de l’UE et il a considérablement augmenté depuis 2011. Le gouvernement vient d’adopter un plan pour l’égalité des droits et des chances entre les hommes et les femmes. |
Mettre davantage en lumière les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes par secteur et par employeur, notamment dans les entreprises publiques, et poursuivre les efforts déployés pour remédier aux perceptions sexistes et faire appliquer les dispositions législatives contre la discrimination. |
Revoir les politiques publiques en matière de retraites, de soins de santé et de logement, afin de renforcer la protection sociale |
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Les perspectives démographiques semblent devoir continuer de se dégrader. Le fardeau du vieillissement de la population devrait peser essentiellement sur les retraités, compte tenu de la diminution des taux de remplacement assurés par les pensions. |
Continuer à relever l’âge de la retraite après 2025, en indexant automatiquement celui-ci sur l’espérance de vie. |
Rapportées au PIB, les dépenses publiques de santé sont modestes, même si l’on tient compte du faible niveau de revenu par habitant de la Lettonie. Le reste à charge des patients est exceptionnellement élevé, et les indicateurs de qualité des soins (tels que la mortalité évitable par prévention ou par traitement) et de satisfaction des patients (dont les besoins de soins non satisfaits) sont mauvais. Les soins de longue durée représentent une part modeste des dépenses totales. Les comportements à risque, en particulier la forte consommation d’alcool, sont très répandus et la prévalence de l’obésité est élevée. |
Accroître les dépenses publiques de santé et améliorer l’accès aux services médicaux et aux médicaments financés par l’État pour réduire les dépenses directes des ménages. Former et recruter davantage d’infirmiers(ères) que prévu actuellement. Rationaliser le réseau d’établissements hospitaliers au moyen de regroupements et recourir davantage au numérique dans le secteur de la santé. Augmenter les dépenses de santé consacrées à la prévention, aux soins primaires et à domicile, à la prise en charge des troubles mentaux et aux soins de longue durée. Relever certains droits d’accises pour limiter la consommation d’alcool et le tabagisme, et mieux informer les citoyens sur les effets bénéfiques qu’auraient une amélioration de leur régime alimentaire et la pratique d’exercices physiques. |
Une grande partie du parc letton de logements est ancienne, de qualité médiocre et surpeuplée. Le manque de logements abordables constitue un problème généralisé. |
Veiller à la réalisation des objectifs du Plan de développement national en matière de logement, notamment en étoffant l’offre de logements sociaux et abordables et en améliorant les systèmes de chauffage des habitations. |
Concevoir des politiques pour renforcer la durabilité environnementale |
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À divers égards, les résultats de la Lettonie laissent à désirer sur le plan environnemental. Les émissions de carbone augmentent régulièrement depuis 2000, et les taux d’imposition effectifs du carbone sont nettement inférieurs au coût estimé de ces émissions à l’échelle mondiale. Un cinquième des émissions totales de gaz à effet de serre (GES) est imputable à l’agriculture, soit le double de la moyenne de l’OCDE. La qualité de l’air est particulièrement médiocre du fait de la forte pollution par les particules fines. La pollution diffuse par les engrais nuit à la qualité de l’eau, de même que le caractère incomplet du système centralisé de traitement des eaux usées. La proportion du territoire couverte par des zones protégées est limitée. |
Relever peu à peu les taux d’imposition effectifs du carbone dans les secteurs non couverts par le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SEQE) de l’Union européenne, tout en éliminant progressivement les subventions au gaz naturel et en redistribuant le surcroît de ressources obtenu ainsi aux ménages pauvres. Mettre à exécution les projets nationaux de réduction des émissions imputables à l’agriculture. Favoriser une utilisation accrue des énergies renouvelables pour la production d’électricité, et renforcer les interconnexions électriques et gazières. Lutter contre la pollution par les particules fines en durcissant la réglementation applicable et en renforçant l’application des normes relatives aux systèmes de chauffage. Relever les taux des taxes appliquées aux emballages et aux combustibles de chauffage (les taxes prélevées sur ces derniers demeurant faibles au regard du prix du carbone) en phase avec la dernière proposition en date de la Commission européenne concernant la fiscalité de l’énergie, tout en mettant en place des transferts compensatoires sous conditions de ressources. S’efforcer de remédier aux lacunes du système de traitement des eaux usées en fusionnant les compagnies locales des eaux, éventuellement en une seule société nationale. |
Renforcer l’investissement et combattre la corruption pour accélérer la convergence |
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Une augmentation de l’endettement privé des Lettons a été évitée, ce qui limite les risques. Néanmoins, l’accès aux financements est problématique pour les emprunteurs, tant en termes de coût que de montant des garanties exigées. |
Créer une véritable culture de l’investissement, par exemple en améliorant les connaissances financières de tous les groupes d’âge et en renforçant la concurrence des établissements non bancaires, notamment des entreprises de technologie financière (FinTech), dans le secteur financier. |
L’emploi informel, la fraude fiscale et la corruption d’agents publics sont considérés comme des problèmes de longue date. Les perceptions de ces phénomènes laissent à penser que la situation s’est améliorée. |
Continuer de lutter contre la corruption, renforcer la transparence des procédures de passation des marchés publics et appliquer les lourdes sanctions prévues par la loi en cas de fraude fiscale et de corruption. Adopter le plan d’action destiné à faire reculer l’économie souterraine, et veiller à ce qu’il soit effectivement mis en œuvre. |
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