Ce rapport analyse les barrières réglementaires à la concurrence dans le secteur du tourisme en Tunisie, dans le but d'aider les autorités tunisiennes à réduire les atteintes à la concurrence et à favoriser une croissance durable. Ce rapport est basé sur une évaluation de la concurrence menée par l'OCDE identifiant les lois et réglementations susceptibles d'entraver la concurrence et l’efficacité des marchés dans les activités touristiques examinées. Cet examen comprend également des estimations de l'impact potentiel de la mise en œuvre de certaines recommandations sur l'économie. Il s'agit du deuxième examen d'évaluation de la concurrence mené par l'OCDE en Tunisie, après l'examen en 2019 des secteurs du transport de marchandises et du commerce de gros et de détail.
Examens de l’OCDE pour l’évaluation de l’impact sur la concurrence : Tunisie 2023
Résumé
Synthèse
L'examen d'évaluation de la concurrence des lois et réglementations dans le secteur du tourisme fait partie d'un projet plus large visant à favoriser les réformes pro-concurrentielles en Tunisie. Le tourisme est un élément clé de l'économie tunisienne et constitue depuis des années une source importante de création d'emplois et de valeur ajoutée. L’OCDE a réalisé cette évaluation de la concurrence afin d’identifier les règles et réglementations susceptibles de faire obstacle à la concurrence et à un fonctionnement efficient du marché dans le secteur du tourisme tunisien.
Le rapport contient 351 recommandations dont la mise en œuvre pourrait pallier les atteintes à la concurrence et ouvrir des perspectives d'accès au marché pour les entreprises proposant des activités liées au tourisme. Ces perspectives revêtent une importance particulière dans le sillage de la pandémie de COVID-19, qui a mis à mal le secteur du tourisme. Une réglementation favorable à la concurrence, évitant les coûts inutiles et ménageant une certaine souplesse est indispensable pour qu’une reprise durable s’installe.
Si elles sont mises en œuvre, les recommandations présentées dans ce rapport bénéficieraient aux consommateurs tunisiens et à l’économie du pays. L’OCDE a évalué l’impact économique de cette mise en œuvre à 1 392 millions TND, soit 1.2 % du PIB tunisien de 2018, en retenant une estimation prudente.
Une méthodologie éprouvée a été utilisée pour les besoins de ce projet, en l’occurrence le Manuel de l’OCDE pour l’évaluation de l’impact sur la concurrence. Elle a consisté à recenser et cartographier toute la législation applicable, puis à passer au crible à l’aide du Manuel tous les textes juridiques pour repérer les dispositions de nature à restreindre la concurrence. Il a ensuite fallu identifier les objectifs poursuivis par chaque disposition, puis réaliser une analyse approfondie de chacune d’elles, notamment déterminer si les restrictions étaient proportionnées à l’objectif visé. Pour mieux comprendre ces dispositions, leurs objectifs et les problématiques associées à chaque activité, l’OCDE a réalisé 65 entretiens avec des acteurs publics et privés et une enquête en ligne auprès des professionnels du tourisme. Lorsqu’une réglementation est jugée trop restrictive, le rapport propose des modifications pour supprimer ou faire évoluer les aspects qui risquent d’entraver l’accès au marché et le bon fonctionnement des activités. Les restrictions repérées peuvent être groupées en trois grandes catégories : un régime d’autorisation lourd et contraignant ; des conditions d’exercice coûteuses et trop détaillées ; l'influence des opérateurs historiques dans les organes de décision. Le projet a également contribué à la création du premier Compte satellite du tourisme pour la Tunisie.
Services d’hébergement et de bien-être
Les services d’hôtellerie et d’hébergement représentent la plus grande part du chiffre d'affaires du secteur du tourisme tunisien. Plusieurs réglementations sont susceptibles d’entraver la concurrence, l’efficience des entreprises et la croissance, notamment des procédures d’autorisation lourdes, les politiques de zonage et des conditions d’exercice coûteuses. Le rapport propose de revoir les politiques de zonage, de simplifier les procédures d’autorisation pour les projets hors zones touristiques, de supprimer les normes en matière d’hébergement lorsqu’elles sont inapplicables et lorsqu’elles n’ont pas d’objectifs clairs et de lever les obstacles à la prise de participation étrangère qui risquent de nuire à l’investissement dans le secteur. Les services liés au bien-être sont étroitement associés au secteur de l’hôtellerie et pourraient favoriser une diversification du secteur touristique tunisien. Des dispositions juridiques contradictoires et l'absence de cadres adéquats pour certains services de bien-être exacerbent l'incertitude juridique et étouffent les investissements. Le rapport propose des mesures de nature à simplifier et harmoniser le cadre réglementaire relatif à l’hydrothérapie et éliminer les dispositions juridiques contradictoires.
Services de restauration
Les restaurants touristiques sont soumis à des procédures d'autorisation et de classement semblables à celles applicables aux services d’hébergement. Le rapport recommande de supprimer le système de classement obligatoire, de même que les obligations autres que celles portant sur l’hygiène, la sécurité et la protection des consommateurs et d’envisager de transférer certaines normes dimensionnelles et fonctionnelles dans un guide de l’investisseur. Il conviendrait de revoir la procédure à suivre pour obtenir une licence autorisant à servir de l’alcool, qui doit également être suivie par les hôtels et établissements de divertissement, et de la simplifier lorsqu’elle s'inscrit dans le cadre d’un investissement pour ouvrir un restaurant ou autre établissement de restauration. Pour ce qui est des autres services de restauration, par exemple les restaurants traditionnels et les établissements de restauration rapide, le rapport propose de lever les contraintes sanitaires qui font supporter des coûts injustifiés aux petites entreprises et qui ne se rapportent pas à l'hygiène, à la sécurité et à la protection des consommateurs. Les autorités devraient également examiner d'autres solutions réglementaires concernant les vendeurs de restauration de rue qui souhaitent installer des food trucks (camions-restaurants), comme par exemple l’octroi d'autorisations temporaires d’occupation du domaine public.
Services de transport de voyageurs
Le transport est le deuxième contributeur au chiffre d'affaires du secteur touristique tunisien, dont il constitue un segment vital. L'activité de transport touristique occupe une place importante en Tunisie, mais reste soumise à plusieurs restrictions. Elle n’est accessible qu’à des agences de voyage de « catégorie A », et les véhicules ne peuvent être conduits que par une personne titulaire d’une carte professionnelle, qui n’est elle-même délivrée qu’à certaines conditions. Le rapport recommande de mettre fin à l’exclusivité dont jouissent les agences de voyage en ce qui concerne l’offre de services de transport touristique et de lever les conditions associées à la carte professionnelle qui faussent la concurrence. Il propose aussi de lever certaines obligations qui imposent des contraintes excessives aux entreprises de location de véhicules, à savoir les obligations en matière de qualification et d’exigences minimums de véhicules, ainsi que la limite d’âge. Les services de taxis et de transport public routier non régulier jouent aussi un rôle fondamental dans le secteur du tourisme tunisien. L’évaluation réalisée laisse penser qu’il faudrait réformer la réglementation pour que ces activités s’exercent dans un environnement favorable à la concurrence et pour alléger les contraintes qui pèsent sur les acteurs du marché. Le rapport recommande d’éliminer les obligations d’autorisation qui font double emploi, de modifier et de revoir plus régulièrement les critères sur lesquels repose la définition des quotas appliqués aux taxis.
Agences de voyage et autres services de réservation
Les agences de voyage jouent un rôle essentiel pour le tourisme national comme international. Malgré l’introduction d’un cahier des charges, la réglementation continue de créer des barrières à l’entrée, y compris des obligations relatives aux équipements et conditions d’exercice, aux qualifications professionnelles, ou l’imposition d’un capital social minimum, faussant la concurrence et favorisant l’informalité. Le rapport contient plusieurs recommandations dont l’application intensifierait la concurrence. Il s'agirait d’ouvrir à la concurrence des services qui ne peuvent actuellement être proposés que par les agences de voyage, de supprimer la distinction entre les deux catégories d'agences, de supprimer le capital minimum spécifique obligatoire et d'imposer des conditions d’exercice proportionnées. Le cadre qui régit l’activité des guides touristiques est obsolète. Il prévoit des procédures d'autorisation lourdes et rigides et impose, outre des obligations coûteuses et inutiles, le renouvellement annuel de la carte professionnelle. Le rapport invite les autorités à simplifier les obligations relatives à la carte professionnelle, de même qu'à revoir la durée de validité et la procédure de renouvellement.
Services culturels
Le domaine des services culturels est celui qui recèle le plus gros potentiel à exploiter pour diversifier le tourisme en Tunisie. Les concessions patrimoniales sont au cœur de ce potentiel. Le rapport recommande de faire évoluer la réglementation pour réduire le plus possible le risque de conflit d’intérêts inhérent au modèle de gestion de l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle (AMVPPC) à travers une meilleure définition et une clarification de son rôle dans l’attribution des concessions. Il propose également de consolider le cadre qui régit actuellement les concessions et de veiller à ce qu’il soit plus ouvert à l’initiative privée, plus souple et propice à la concurrence. Les galeries, musées et ateliers d’art privés sont indispensables au dynamisme de l’environnement culturel. Le rapport propose de lever certaines obligations relatives au capital minimum, à l'allocation d’espace et aux qualifications et de supprimer l’obligation de notification des événements.
Services sportifs et autres services récréatifs
L’exercice d'activités sportives et récréatives est subordonné à l’obtention d’une autorisation délivrée au niveau local octroyant à l’administration un important pouvoir discrétionnaire et décourageant l’entrée de nouvelles entreprises. C’est l’une des raisons pour lesquelles l'investissement dans ces activités n’a pas dépassé 10 % du total de l’investissement touristique ces dix dernières années. Le rapport analyse une sélection de services et propose plusieurs modifications réglementaires.
Les marinas pourraient donner un nouvel élan au tourisme de plaisance tunisien. Le rapport recommande d’accélérer la publication des textes d'application du Code des ports maritimes afin d’éliminer les conflits de compétence entre les diverses autorités impliquées. Il formule également des recommandations visant les yachts et les bateaux de plaisance, par exemple la définition de conditions claires pour l’autorisation d’utiliser un yacht, la clarification des règles et procédures douanières pour l’utilisation de bateaux étrangers en vertu du régime d'importation temporaire et la simplification des formalités à accomplir pour pouvoir piloter un yacht. Il pourrait aussi être judicieux de simplifier les procédures d’autorisation auxquelles doivent se soumettre les centres de plongée et les bases nautiques, de publier des instructions claires et transparentes pour l’examen des demandes et d'adopter un cadre juridique approprié pour les inspections.
Enfin, un assouplissement de plusieurs contraintes administratives citées dans le rapport pourrait être bénéfique au tourisme. Le rapport contient plusieurs recommandations à suivre pour améliorer la qualité de la réglementation, simplifier les procédures d'autorisation des investissements et de contrôle et lever les obstacles à l’investissement étranger.
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