Le premier examen par les pairs de la Hongrie, réalisé par le Comité d'aide au développement de l’OCDE (CAD) et mené par la Grèce et l’Islande avec l’appui du Secrétariat de l’OCDE, a pour objectif d’accompagner la croissance rapide de la coopération hongroise de manière à optimiser son impact sur le développement. L’essor des activités de coopération pour le développement de la Hongrie a été rapide au cours de la dernière décennie. Membre du CAD depuis 2016 seulement, la Hongrie continue de renforcer ses capacités en vue d’appliquer les normes et méthodes de travail établies par le Comité. Les conclusions et les recommandations de l’examen par les pairs constituent une base de référence qui permettra de suivre et de guider ses progrès en ce sens.
La récente réorganisation intervenue dans le système hongrois de coopération offre une excellente occasion de poursuivre les réformes. Peu avant l’examen par les pairs, la Hongrie a confié le portefeuille humanitaire au ministère des Affaires étrangères et du Commerce (MAEC), qui a également pris en charge la supervision de l’agence Hungary Helps (créée en 2019). Cette mesure devrait stimuler les efforts en cours pour établir les normes et processus nécessaires à une coopération de qualité.
En s’appuyant sur des bases juridiques et stratégiques favorables, la Hongrie doit maintenant consolider son cadre d’action. La loi XC de 2014 et la stratégie de coopération IDC 2025 présentent les priorités et les principes généraux de la coopération du pays. Des stratégies et des orientations pour certains pays et domaines prioritaires permettraient de mieux cibler les interventions et de garantir leur qualité.
L’APD de la Hongrie a considérablement augmenté, mais le ciblage et la planification des financements pourraient être améliorés. Depuis 2010, la Hongrie a multiplié par quatre le montant de son aide publique au développement (APD) et plus que triplé la part de l’APD dans le revenu national brut, qui a atteint 0.29 % en 2021. Cependant, les orientations thématiques ne s’accompagnent pas d’une concentration géographique efficace. Les montants alloués sont répartis entre de nombreux pays et de nombreuses interventions de taille réduite et de courte durée, ce qui pourrait nuire à leur efficacité. À l’heure actuelle, la Hongrie ne planifie pas en avance les dotations de l’APD et s’appuie largement sur les réserves budgétaires. Les règles budgétaires affectent sa capacité à apporter des financements à plus long terme à ses partenaires, ce qui contribue à la fragmentation de son aide.
La Hongrie pourrait tirer parti de la récente réorganisation pour accroître l’efficacité et l’efficience de sa coopération pour le développement. Au moment de l’examen, les différents acteurs impliqués ne faisaient que peu d’efforts pour coordonner leur action. Un renforcement des synergies est donc possible. Dès lors que les fonctions et les responsabilités sont clairement définies, la désignation de Hungary Helps comme organisme d’exécution principal devrait permettre de regrouper l’expertise et de dégager des compétences en matière d’élaboration des politiques publiques au sein du MAEC. Un renforcement de la coordination au sein du ministère et de l’ensemble de l’administration publique sera toutefois indispensable.
La Hongrie pourrait s’appuyer davantage sur les progrès accomplis en matière d’engagement auprès des parties prenantes et de la population en général. Le pays a réalisé des progrès importants pour intégrer le développement durable au système d’éducation formel mais pourrait faire davantage pour améliorer la sensibilisation aux enjeux du développement en dehors du contexte scolaire. Une plus grande transparence et un discours reflétant mieux les avantages à long terme de la coopération conforteraient ses efforts appréciables dans le domaine de l'information publique. La mise en place d’une consultation systématique des parties prenantes permettrait d’apporter des éclairages et des retours d’information précieux.
Les partenariats avec les organisations de la société civile (OSC) auraient tout à gagner à bénéficier de financements plus souples et à plus long terme. La Hongrie s’appuie sur un nombre restreint d’OSC pour mettre en œuvre ses programmes et les possibilités de financement ne sont pas propices à la diversification des partenaires. Les financements sont essentiellement de courte durée et limités à l’exécution d’un projet, ce qui ne laisse guère de possibilité aux OSC de prendre des initiatives ou de renforcer leurs capacités. L’aide aux organisations locales et les financements d’urgence préaffectés témoignent de la disposition de la Hongrie à faire confiance aux OSC partenaires. Le pays pourrait s’appuyer sur cette confiance pour mettre en place des mécanismes de financement plus flexibles et à plus long terme pour ces organisations.
La mise en place de partenariats stratégiques avec les pays pourrait renforcer la capacité de la Hongrie à contribuer aux objectifs à long terme de ses partenaires. Le programme mené en Ouganda marque une évolution positive vers des programme-pays plus complets, mais demeure une exception. En concentrant ses efforts, la Hongrie pourrait viser des résultats à plus long terme, gagner en efficacité et libérer des capacités pour investir fructueusement dans le dialogue politique et la coordination des partenaires. Pour contribuer à l’objectif consistant à ne laisser personne de côté, la Hongrie doit approfondir sa compréhension de la manière dont ses interventions peuvent lutter contre la pauvreté et les inégalités, et veiller à ce que le soutien aux minorités tienne compte du contexte.
La Hongrie souhaite se doter des moyens d’intervenir dans les contextes fragiles. La stratégie de la Hongrie face aux crises se fonde notamment sur une solide capacité de gestion des catastrophes, des programmes humanitaires axés sur la résilience et des opérations de maintien de la paix. Des partenariats étroits avec des organismes confessionnels lui permettent de soutenir les interventions menées localement. L’articulation entre ces opérations demeure cependant insuffisante et elles sont trop dispersées pour faire face à des problèmes complexes. L’intégration de l’aide humanitaire au sein du MAEC est une excellente occasion de progresser.
Les bourses d’études constituent l’essentiel des programmes bilatéraux de la Hongrie, mais une plus grande lisibilité de leur impact sur le développement serait nécessaire. Le programme « Stipendium Hungaricum » s’est considérablement développé, apportant un soutien financier à plus de 11 000 étudiants en 2021 – même si peu d’entre eux proviennent des pays les moins avancés. Un autre programme, de plus faible ampleur, apporte une aide financière aux élèves provenant de pays touchés par un conflit. La Hongrie aurait tout à gagner à évaluer son programme de bourses afin de mesurer et de renforcer son impact. Cibler les élèves les moins favorisés et renforcer les liens avec les anciens élèves pourraient en outre permettre d’améliorer les résultats en matière de développement.
La Hongrie doit continuer à investir dans ses systèmes internes pour renforcer ses capacités. Le recours à des analyses plus approfondies et à des conseils d’experts afin de prendre en compte les situations de fragilité, les défis complexes et les problèmes transversaux lors de la conception des projets permettrait de renforcer l’assurance qualité. Le déploiement systématique des nouveaux mécanismes de gestion des risques permettrait à la Hongrie d’appréhender l’ensemble des risques, y compris en matière de corruption. Les efforts substantiels déployés par le pays pour suivre les résultats des projets doivent également porter sur les réalisations et les retombées des projets. Comme cela avait été souligné lors de son adhésion au CAD, la Hongrie doit également mener des évaluations pour éclairer la prise de décision et favoriser l’apprentissage et la redevabilité.
Tout en s’appuyant sur une équipe resserrée de jeunes collaborateurs motivés, la Hongrie devra impérativement investir dans les capacités et les compétences pour améliorer son programme de développement. La récente réorganisation permettra de regrouper les effectifs, ce qui peut donner lieu à des gains d’efficience. Néanmoins, compte tenu du taux de rotation élevé du personnel et du nombre limité de spécialistes du développement, le pays devra attirer du personnel qualifié, assurer une formation systématique et améliorer la gestion des connaissances.
La Hongrie doit dissocier la participation du secteur privé de l’APD liée à des entreprises nationales. La Hongrie favorise l’engagement de son secteur privé dans les pays en développement en finançant des études de faisabilité et des projets pilotes. Une grande partie des projets de coopération de la Hongrie sont liés à des fournisseurs hongrois, ce qui empêche les pays partenaires d’optimiser l’utilisation de leurs ressources. Le pays doit étudier comment ouvrir progressivement ses projets à la concurrence. La promotion d’une conduite responsable des entreprises serait un complément important de ses efforts actuels.
La Hongrie doit s’efforcer de concilier ses objectifs à l’échelle nationale avec ses objectifs de développement international. Sa diplomatie de l’eau et sa participation active aux instances multilatérales montrent que le pays peut apporter des contributions importantes au dialogue international sur le développement. Néanmoins, ses positions vis-à-vis de l’immigration et de l’égalité des genres font parfois obstacle au consensus et les frictions avec l’UE risquent de compromettre les possibilités de mener des actions collectives en faveur du développement durable lors de sa présidence du Conseil de l’UE en 2024. En définissant des priorités claires, en réfléchissant attentivement à ses positions et en s’investissant dès le départ dans la présidence de l’UE, la Hongrie pourrait se forger une solide réputation dans le domaine du développement durable.
Le Profil de coopération au développement de la Hongrie (https://doi.org/10.1787/a80b014d-en) fournit des informations complémentaires sur les activités du pays dans ce domaine. Les bonnes pratiques nationales susceptibles d’inspirer d’autres membres du CAD et acteurs du développement sont présentées sur la plateforme d’apprentissage consacrée aux Outils, enseignements et pratiques de la coopération pour le développement (www.oecd.org/cooperation-developpement-apprentissage/).