S'attaquer avec succès au changement climatique et aux autres objectifs environnementaux est un défi pour les gouvernements démocratiques : ils doivent montrer qu'ils sont aptes à relever ce défi complexe et systémique à long terme, à atteindre des compromis difficiles et à obtenir de meilleurs résultats en matière de bien-être. Ce chapitre examine les changements de gouvernance publique nécessaires pour mettre en œuvre efficacement les politiques vertes urgentes et promouvoir d'autres priorités sociales et économiques. Il couvre plusieurs domaines clés, notamment la mobilisation de l’ensemble des pouvoirs publics à des fins de pilotage, d’obtention de consensus et de renforcement de la confiance pour la réalisation d’objectifs « verts », l'utilisation des bons outils pour l'action climatique et environnementale, et l'exemplarité par le verdissement du secteur public.
Instaurer la confiance et renforcer la démocratie
4. Gouverner vert : Préparer les gouvernements à l’action face à l’enjeu climatique et aux autres défis environnementaux
Abstract
4.1. Introduction
La dynamique en faveur d’une prise en compte du changement climatique, et plus largement des pressions environnementales, ainsi que l’urgence à traiter ces questions se renforcent. Selon le dernier rapport en date du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le changement climatique est « généralisé, rapide et d’intensité croissante » (GIEC, 2021[1]). Les données dont on dispose révèlent également que l'environnement, notamment la biodiversité et les écosystèmes, se dégrade de plus en plus et à un niveau inédit (IPBES, 2019[2]). La Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP 26) qui s’est tenue à Glasgow en novembre 2021 a marqué un tournant dans la promotion des efforts mondiaux pour se rapprocher d’un avenir sans carbone. La pandémie de COVID-19 et les attaques que la Russie a lancées unilatéralement contre l'Ukraine ont mis en évidence de nombreuses vulnérabilités, soulignant ainsi la nécessité pour les pays de se préparer à faire face à des risques sérieux de chocs majeurs. En 2022, la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 27) et la Conférence des Nations Unies sur la biodiversité (COP 15) réuniront les États pour définir des orientations en matière de climat et d'environnement. Des changements profonds sont nécessaires pour s’attaquer aux points de bascule liés au climat et à d’autres pressions environnementales interdépendantes, dont l'accélération de la perte de biodiversité, la pollution croissante de l’air et de l’eau, la production de déchets.
Le succès des initiatives de lutte contre le changement climatique et la réalisation des objectifs environnementaux représentent un défi pour les gouvernements démocratiques : en effet, ces derniers doivent montrer qu’ils sont capables de faire face à des défis à long terme, complexes, interconnectés et systémiques, à gérer des arbitrages difficiles et à obtenir des résultats plus étendus en matière de bien-être. Comme l’ont fait observer Figueres et Rivett-Carnac : « L’épreuve de vérité de la survie et de la prospérité de la démocratie au XXIe siècle sera la lutte contre le changement climatique » (Figueres et Rivett-Carnac, 2020[3]). Le sort des démocraties et des politiques publiques pour l’action en faveur du climat et de l’environnement sont liés. En parallèle, un certain nombre de personnes et de groupes se désolidarisent des processus démocratiques traditionnels, ce qui rend les choix à faire en matière de politique environnementale et d’action individuelle plus complexes.
Un défi majeur auquel sont confrontés les États démocratiques est de savoir comment mener à bien les profonds changements de gouvernance publique qui s’imposent pour mettre en œuvre les politiques vertes urgentes tout en les conciliant avec les autres priorités sociales et économiques. Le succès des politiques climatiques dépendra en grande partie de la confiance accordée aux institutions publiques. Dans les faits, le niveau de confiance et l’efficacité de l’action en faveur du climat et de l’environnement sont interdépendants. D’un côté, le manque de confiance dans les institutions publiques peut entraver la capacité des pouvoirs publics à mettre en œuvre une politique environnementale efficace. De l’autre, il y a un risque d’être aux prises d’un cercle vicieux où l’absence d’action efficace en la matière nourrirait le manque de confiance dans les institutions publiques et inversement. La variabilité du climat, les épisodes climatiques extrêmes, le recul de la biodiversité, les catastrophes écologiques d’origines naturelle et humaine, et les crises liées à l’eau sont autant de sources potentielles de chocs et de contraintes. La mauvaise gestion réelle ou supposée pour faire face à ces défis, ainsi qu’une moindre transparence de la prise de décisions concernant les principales actions à mener pour y remédier, pourraient éroder davantage la confiance à l’égard des institutions publiques.
L'enquête menée récemment par l'OCDE sur la confiance apporte quelques éléments de réflexion à cet égard. Dans les pays de l'OCDE, environ la moitié (50.4%) des personnes interrogées pensent que les gouvernements devraient donner la priorité au changement climatique. Le problème réside peut-être en partie dans le fait que les gens ne sont pas disposés à en accepter les coûts. La lutte contre le changement climatique implique des sacrifices immédiats et dans la durée en contrepartie de résultats d’une importance cruciale, mais diffus et à long terme. Autre facteur possible : la compétence des pouvoirs publics telle qu’elle est perçue. Nombre de personnes ne sont pas convaincues que les institutions publiques disposent des compétences et de la fiabilité requises pour mettre en œuvre des politiques de manière efficace, et dans la durée, suffisamment pour que cela porte ses fruits. En effet, en moyenne, seuls 35.5 % des personnes interrogées sont convaincues que les pays parviendront à réduire la contribution de leur pays au changement climatique en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. En d'autres termes, si environ la moitié des personnes interrogées pensent que le changement climatique est un problème sérieux pour les pouvoirs publics, elles sont un tiers seulement à penser que les pays atteindront réellement les objectifs fixés (Encadré 4.1 et Graphique 4.3).
Il est donc essentiel et urgent de préparer les États à la transformation verte. L’ampleur et l’urgence des défis environnementaux réclament des efforts d’envergure sur tous les fronts et de la part de tous les acteurs. En effet, le succès de la lutte contre les effets du changement climatique et la perte de biodiversité exigera des efforts conjugués des secteurs public et privé, des organisations internationales, des groupes de la société civile et de la population.
Pour autant, la réalisation des changements nécessaires à la transition verte ne pourra se faire qu’avec l’orientation et la mise en œuvre par l’État d’une action propice, tant sur le plan intérieur que sur la scène internationale. Seuls les gouvernements et les États sont capables d’assumer, du moins en grande partie, ces tâches essentielles (Giddens, 2009[4]). Celles-ci consistent notamment à arrêter, concevoir et mettre en œuvre des politiques et investissements destinés à répondre aux menaces environnementales, mais pas seulement : il s’agit également de fixer des attentes et des orientations à la population, au secteur privé et à la société civile dans son ensemble sur la manière de s’adapter pour avancer sur la voie de solutions et de résultats moins polluants et plus respectueux de l’environnement, ainsi que de renforcer la résilience face aux chocs futurs. Le changement climatique, la biodiversité et d’autres urgences environnementales dépassent les frontières nationales et ne sauraient être gérés sans une coopération internationale. Mais prendre des engagements écologiques et les mettre en œuvre incombe aux gouvernements, lesquels peuvent se révéler moins intéressés par ces questions de portée supranationale et moins capables de s’y attaquer.
Il est donc essentiel de s’intéresser non seulement à la teneur des politiques de transformation verte, mais aussi à la manière dont les États peuvent arrêter et concevoir des politiques optimales de lutte contre le changement climatique et faire face aux priorités en matière d’environnement, à la manière dont ils peuvent assurer leur mise en œuvre efficace et efficiente et leur financement et leur exécution durables, ainsi qu’à la manière dont ils peuvent agir pour recueillir le soutien transversal et le consensus de la société. Dans ce contexte, ce chapitre :
souligne le rôle essentiel de la gouvernance publique pour faire face au changement climatique et aux autres menaces écologiques ; et
met en lumière les principaux défis à relever par les pouvoirs publics pour s’assurer que la gouvernance publique appuie effectivement les actions en faveur de l’environnement tout en tenant compte des effets d’entraînement.
Sur la base des travaux existants de la Direction de la gouvernance publique de l’OCDE, le présent chapitre décrit certaines des transformations essentielles requises en matière de gouvernance publique pour garantir l’atteinte des objectifs écologiques.
Pour simplifier, il y a 5 dimensions essentielles pour lesquelles la gouvernance publique exercera une influence significative sur les transformations à l’échelle mondiale (Graphique 4.1).
4.1.1. Identifier les principaux défis en matière de gouvernance publique
En remplissant ces rôles clés, les gouvernements vont au-devant d’un certain nombre de défis et d’obstacles, compte tenu à la fois du contexte et de leurs propres capacités d’action.
Les pays doivent recueillir un consensus autour des transformations urgentes, dans un contexte de défiance et de mécontentement croissants de la population vis-à-vis des pouvoirs publics et des institutions démocratiques. De fait, les politiques qui sont indispensables exigent non seulement des gouvernements aptes sur le plan technique mais aussi capables de faire des choix difficiles. Ces choix qui aideront à préserver l’avenir collectif feront inévitablement des gagnants et des perdants. Les coûts et les répercussions du changement climatique, ainsi que les mesures pour lutter contre, ne seront pas répartis uniformément dans la société, entre les générations et entre les pays. Ainsi, les gouvernements doivent non seulement concevoir des politiques climatiques et environnementales appropriées, mais également bâtir un consensus fort autour de l’action à mener, tant dans l’ensemble de la société qu’au sein des institutions publiques qui sont appelées à traiter d’autres objectifs concurrents. Cet aspect est essentiel pour que les gouvernements disposent d’un mandat solide qui leur permette de surmonter les problèmes environnementaux collectifs, d’effectuer leurs arbitrages sur la manière de répartir les coûts de la réponse et de s’engager de manière crédible à entreprendre des politiques à long terme qui survivront à leur mandature.
La capacité des gouvernements à s’attaquer aux menaces pour l’environnement est fortement liée aux cadres démocratiques. Premièrement, le court-termisme inhérent au cycle politique dissuade de se concentrer sur des enjeux à long terme et transgénérationnels tels que le changement climatique et la perte de biodiversité (Linz, 1998[5]). Dans le même temps, les pressions environnementales à long terme participent de certains des défis auxquels les démocraties font face aujourd’hui. Ainsi, la lutte contre le changement climatique est une question d’ordre scientifique, mais les démocraties s’efforcent de promouvoir des politiques fondées sur des faits pour contrer la prolifération de la mésinformation et de la désinformation, le faible niveau de confiance dans les sources d’information traditionnelles – y compris les gouvernements et les médias grand public – ainsi que l’accès limité, la libre disponibilité et la réutilisation des données environnementales. L’action en faveur du climat réclame des mesures très ambitieuses qui peuvent être difficiles à adopter et mettre en œuvre par des gouvernements confrontés à la défiance (OCDE, 2021[6]). Les populations sont prêtes à exprimer leur mécontentement à l’égard de politiques qui exigent des changements mais ne satisfont pas aux critères de transparence, d’équité et de représentativité.
Dans cette économie politique complexe de la réforme, il existe aussi une série de lacunes classiques en matière de gouvernance publique qui, aujourd’hui, ont un impact considérable sur la capacité des gouvernements à atteindre les objectifs climatiques et plus généralement environnementaux. Elles vont des difficultés à gérer des priorités politiques qui évoluent rapidement, à mettre en cohérence l’élaboration des politiques dans les différents domaines et niveaux de l’action publique et à gérer les synergies et les arbitrages en résultant, à l’utilisation efficace d’instruments fondamentaux, mais aussi innovants, de la gestion publique (planification stratégique, budgétisation, réglementation, etc.). Ces difficultés sont perceptibles dans les plans de relance post-COVID-19 des pays, où les dépenses en faveur de mesures environnementales positives ne représentaient que 21 % du total des dépenses de relance (OCDE, 2021[7]).
En outre, les gouvernements rencontrent toujours des difficultés quand ils veillent à ce que les cadres et les compétences requis au niveau national et international soient en place afin de relever les défis transfrontières, notamment dans le domaine de l’environnement. Cela peut donner le sentiment que le gouvernement n’a ni les capacités ni les outils requis pour prendre pleinement en compte les questions qui sont cruciales et revêtent une importance croissante pour la vie des citoyens.
4.2. Plan du chapitre
L’OCDE a déjà produit des travaux sur un éventail de questions relatives à la gouvernance publiques et essentielles au regard des objectifs écologiques, notamment sur la budgétisation publique, les marchés publics, la gouvernance des infrastructures, la cohérence des politiques, la gouvernance pluri-niveaux, etc. En revanche, il manque encore une vision globale de la manière dont l’appareil administratif peut être préparé pour l’action en faveur de l’environnement et du climat. Le présent chapitre n'aborde pas la question de la gouvernance fiscale, qui est un élément central de la politique fiscale et un élément central des stratégies d'atténuation.
Le présent chapitre rassemble les travaux du Comité de la gouvernance publique, du Comité de la politique de la réglementation et du Comité des hauts responsables du budget de l’OCDE dans une série de domaines pertinents, afin de jeter les bases d’une meilleure compréhension des transformations de la gouvernance publique qui s’imposent pour réagir efficacement aux pressions environnementales et faire face en particulier au défi climatique. À cet effet, le rapport distingue trois grands domaines de transformation :
1. orienter, renforcer le consensus et la confiance pour obtenir des résultats en matière d’environnement dans la prochaine décennie ;
2. utiliser les bons outils dans la lutte pour le climat et l’environnement ; et
3. donner l’exemple : en bâtissant un secteur public plus écologique et plus résilient.
Ce chapitre contribue également au projet horizontal de l’OCDE sur le renforcement de la résilience climatique et économique dans la transition vers une économie à faible émission de carbone, qui fournit une perspective actualisée à l’échelle de l’ensemble de l’OCDE des principales dimensions et des grands dangers du changement climatique, en mettant l’accent sur la résilience économique et les politiques publiques nécessaires pour l’améliorer par des mesures d’atténuation du changement climatique et d’adaptation à ses effets.
4.3. Mobiliser l’ensemble des pouvoirs publics à des fins de pilotage, d’obtention d’un consensus et de renforcement de la confiance pour la réalisation d’objectifs « verts » au cours de la prochaine décennie
Dans les démocraties de l’OCDE, les pouvoirs publics seront plus à même de guider la collectivité vers l’obtention de résultats optimaux en matière environnementale s’ils sont capables de changer la façon dont ils élaborent les politiques, et suscitent la confiance et le consensus dans le domaine de l’action publique. Pour ce faire, ils peuvent notamment renforcer l’intégrité afin d’éviter les prises de décision partiales, améliorer la participation des parties prenantes aux décisions, accroître la redevabilité et utiliser l’ensemble des outils disponibles pour communiquer et aider à influencer le comportement des citoyens. Pour tenir la promesse de l’environnement, les pouvoirs publics devront mettre en place les aptitudes et les moyens d’adopter une perspective mondiale afin de remédier aux problèmes qui concernent directement les citoyens, mais qui ont une dimension mondiale. Ce point est abordé dans le Pilier 3 de l’initiative « Renforcer la démocratie » de l’OCDE (voir le Chapitre 3).
4.3.1. Les liens entre l’action climatique et la confiance à l’égard des institutions
Si l'on considère la seule question du changement climatique, dans de nombreux pays de l’OCDE, un large consensus se dégage sur le fait que le changement climatique constitue un problème majeur et qu’il nécessite une réponse des pouvoirs publics. Le changement climatique est perçu par 93 % des Européens comme un problème grave et presque par 20 % comme le problème le plus grave auquel le monde est confronté.1 Selon 75 % des Européens, leur gouvernement ne fait pas assez pour lutter contre le changement climatique (Union européenne, 2021[8]). Toutefois, le consensus sur l’opportunité de s’attaquer à la crise climatique n’est pas suffisant pour garantir des réponses efficaces des pouvoirs publics. Leur succès dépendra en grande partie de la confiance accordée aux institutions publiques, qui jouent un rôle essentiel dans la promotion de l’action collective. Les données de nombreux pays de l’OCDE montrent que la confiance dans l’État est un facteur important dans la volonté des citoyens de soutenir les politiques climatiques (Hammar et Jagers, 2006[9]) (Harring et Jagers, 2013[10]) (Rhodes, Axsen et Jaccard, 2017[11]). Les personnes ayant un faible niveau de confiance à l’égard de l’efficacité ou de l’équité des institutions publiques sont peu incitées à les solliciter pour trouver des solutions collectives aux problèmes environnementaux. Des institutions réactives, transparentes et équitables, quant à elles, contribuent à renforcer le consensus social. En outre, la mobilisation des citoyens facilite la création de larges coalitions en faveur de politiques de lutte contre le changement climatique qui vont au-delà des cycles électoraux.
De manière générale, la confiance dans les institutions publiques peut être renforcée en améliorant la perception qu’ont les citoyens de la compétence et des valeurs de l’État. En particulier, deux grands aspects de la confiance dans les institutions publiques influent sur le soutien du public aux politiques de lutte contre le changement climatique (OCDE, 2022[12]), à savoir :
La confiance dans la compétence de l’État (fiabilité) à élaborer des politiques durables à long terme. Il est possible que les politiques climatiques imposent aujourd’hui des coûts en contrepartie d’avantages potentiels pour les générations futures. Les résultats des enquêtes montrent que le soutien aux politiques climatiques tournées vers l’avenir dépend de la confiance des citoyens dans l’efficacité des institutions publiques. Si la plupart des citoyens sont convaincus que les politiques publiques d’atténuation du changement climatique permettront d’améliorer les conditions de vie futures, ils peuvent de ne pas les soutenir s’ils ont peu de confiance dans leurs effets (Fairbrother et al., 2021[13]). Les citoyens doivent être convaincus de la capacité des institutions publiques à mener efficacement leurs politiques pendant suffisamment longtemps pour générer des avantages, sinon ils ne seront pas disposés à en accepter les coûts.
La confiance dans les valeurs de l’État (équité) pour assurer l’acceptabilité des politiques environnementales. Les politiques publiques climatiques exigent des arbitrages compliqués et parfois coûteux. Le succès des politiques visant à faire face aux pressions environnementales dépendra du degré de confiance qu’aura la population dans la capacité des pouvoirs publics à planifier et à mettre en œuvre des politiques équitables, transparentes et réalisées selon des normes d’intégrité strictes. Une communication convaincante sur les coûts et les avantages en jeu sera déterminante pour obtenir l’adhésion du public (Brezzi et al., 2021[14]).
Des mesures de la confiance des citoyens à l’égard des politiques climatiques pourraient aider les pays à maximiser le soutien du public aux réformes vertes et leur acceptabilité en s’appuyant sur des données probantes. Il pourrait être utile de comprendre l’influence que peuvent exercer les déterminants de la confiance dans les institutions publiques sur le soutien en faveur de différentes politiques climatiques possibles : cela permettrait d’éclairer le type d’actions de gouvernance publique à prendre pour renforcer la confiance dans les différentes options. L’OCDE prend l’initiative à l’échelle internationale de mesurer la confiance des citoyens dans les institutions publiques et ses déterminants dans le cadre de son enquête sur les moteurs de la confiance dans les institutions publiques (Encadré 4.1).
C’est aux gouvernements qu’il revient d’instaurer un cercle vertueux en adoptant des mécanismes de gouvernance appropriés pour démontrer la fiabilité et l’équité des politiques climatiques. S’agissant des politiques climatiques, les individus et les entreprises doivent avoir confiance dans le fait que les institutions publiques poursuivront leurs efforts en matière d’atténuation du changement climatique à l’avenir (fiabilité) et qu’elles ne demandent pas d’efforts à un secteur ou à un groupe de la population tout en permettant à d’autres de se soustraire à leurs responsabilités (équité). L’intégration de considérations de durabilité à long terme est primordiale pour susciter la confiance dans les politiques.
Des données sur la confiance peuvent aider les pouvoirs publics à améliorer le processus de décision politique et leurs plans d’atténuation du changement climatique. Les pays se mettent à intégrer les expériences des citoyens, leurs attentes et des évaluations du secteur public dans la prise de décision, quoique d’une façon qui n’est pas encore systématique. Par exemple, l’Australie a mis à profit les résultats d’une enquête menée sur l’expérience des citoyens, qui avait révélé l’insatisfaction des jeunes envers les services publics et leurs préoccupations à l’égard de la politique environnementale, pour réorienter son cadre stratégique national pour la jeunesse. En outre, l’utilisation des données afin de rendre compte aux citoyens de l’action menée de manière transparente, participative et régulière peut être un moyen de renforcer la redevabilité de la gouvernance publique, d’aider à clarifier les arbitrages et de renforcer l’appropriation publique des mesures prises. D’autre part, le fait de surveiller l’acceptabilité des politiques environnementales et d’anticiper l’engagement des citoyens peut également aider les pouvoirs publics à planifier et à mettre en œuvre des réformes vertes tout en maintenant la confiance dans les institutions (voir l’exemple des enseignements des sciences comportementales du Canada à l’Encadré 4.15).
Encadré 4.1. Résultats de l’enquête de l’OCDE sur les moteurs de la confiance dans les institutions publiques
L’enquête de l’OCDE sur les moteurs de la confiance dans les institutions publiques (l’enquête sur la confiance) relève d’une démarche à l’échelle internationale de collecte de données sur les déterminants de la confiance du public. L’enquête sur la confiance introduit des questions sur la fiabilité des pouvoirs publics, notamment si les répondants pensent que leur gouvernement est préparé à faire face à des chocs systémiques, comme des catastrophes naturelles ou la propagation de maladies contagieuses.
Dans les pays de l'OCDE, environ la moitié (50.4%) des personnes interrogées pensent que les gouvernements devraient donner la priorité au changement climatique. Le problème réside peut-être en partie dans le fait que les gens ne sont pas disposés à en accepter les coûts. La lutte contre le changement climatique implique des sacrifices immédiats et dans la durée en contrepartie de résultats d’une importance cruciale, mais diffus et à long terme.
Autre facteur possible : la compétence des pouvoirs publics telle qu’elle est perçue. Nombre de personnes ne sont pas convaincues que les institutions publiques disposent des compétences et de la fiabilité requises pour mettre en œuvre des politiques de manière efficace, et dans la durée, suffisamment pour que cela porte ses fruits. En effet, en moyenne, seuls 35.5 % des personnes interrogées sont convaincues que les pays parviendront à réduire la contribution de leur pays au changement climatique en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. En d'autres termes, si environ la moitié des personnes interrogées pensent que le changement climatique est un problème sérieux pour les pouvoirs publics, elles sont un tiers seulement à penser que les pays atteindront réellement les objectifs fixés (Graphique 4.3).
Tous pays confondus, un niveau de confiance élevé dans la capacité des autorités publiques à s'engager dans la lutte contre le changement climatique influe sur la confiance qu’accordent les citoyens à ces autorités. L'analyse de l'enquête de l'OCDE sur la confiance révèle que la confiance des populations dans la capacité de leur pays à réduire les émissions de gaz à effet de serre a un lien positif et statistiquement significatif avec la confiance dont bénéficie l’administration nationale et, dans une moindre mesure, l’administration locale et la fonction publique. Autrement dit, investir dans la gouvernance publique afin d’instaurer des politiques plus efficaces de lutte contre le changement climatique peut s'avérer payant en garantissant plus de crédibilité et de confiance dans les pouvoirs publics. Ce lien se vérifie également à l'intérieur d'un pays donné ; les personnes qui sont convaincues que leur gouvernement peut s'engager de manière crédible à réduire les émissions de gaz à effet de serre sont plus susceptibles de faire confiance à celui-ci Graphique 4.4.
Certains défis exigent davantage qu’une administration nationale fiable et réactive et nécessitent en effet l'implication d'autres acteurs et partenaires. En moyenne, dans tous les pays, les personnes sont plus enclines à exprimer un intérêt en faveur d’une coopération mondiale en vue de re remédier à des problèmes tels que le changement climatique, le terrorisme et l’anticipation des pandémies. Pour autant, l’adhésion de l'opinion publique à l’idée d’une coopération mondiale afin de résoudre ces problèmes reste relativement faible : à peine la moitié des personnes interrogées appellent les différents gouvernants à lutter conjointement contre le changement climatique. Interrogés sur la manière de coopérer à l’échelle mondiale, les répondants ont majoritairement sélectionné (à 43.4%) la réponse « En unissant nos forces à celles d’autres pays à l’international », en moyenne, toutes nationalités confondues. Les trois autres choix de réponse le plus souvent sélectionnés (Associer les citoyens aux problématiques mondiales, Renforcer la coordination entre les services publics et Renforcer le rôle du pays au niveau des institutions internationales) ont été retenus par moins d'un répondant sur trois.
Alors que les risques liés au changement climatique se font de plus en plus pressants et que les coûts augmentent pour des bénéfices diffus et à long terme, les différents pouvoirs publics doivent mieux sensibiliser la population aux avantages d’une telle coopération pour relever ces défis. En effet, seule une coopération à l’échelle mondiale peut contribuer à les résoudre.
Source : OCDE (2022[15]), Instaurer la confiance pour renforcer la démocratie : Principales conclusions de l’enquête 2021 de l’OCDE sur les déterminants de la confiance dans les institutions publiques, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/f6a31728-fr
4.3.2. Rôle pilote des pouvoirs publics – Fixer des engagements et la voie à suivre pour les respecter
Pour les pouvoirs publics, assumer un rôle pilote est essentiel pour susciter le consensus et la confiance afin de garantir le succès des politiques climatiques et environnementales.
Il existe différents moyens de donner le signal d’un soutien politique fort à l’action climatique. Les engagements nationaux et internationaux audacieux, par exemple ceux visant à ramener à zéro des émissions à une date précise, sont peut-être les plus évidents (Jeudy-Hugo, Lo Re et Falduto, 2021[16]). Toutefois, l’incertitude inhérente aux projections du changement climatique et de son impact, les chocs externes non liés, les changements technologiques et les perspectives et préférences sociétales au fil du temps sont autant d’éléments qui entravent la capacité des pouvoirs publics à visualiser et à décrire des scénarios futurs sur lesquels les décisions peuvent être fondées (OCDE, 2021[17]) (Haasnoot et al., 2013[18]) (Butler et al., 2015[19]). Dans ce contexte unique, les pouvoirs publics ont parfois du mal à faire du climat et de l’environnement une priorité stratégique transversale qui articule le travail de l’ensemble de l’administration, en particulier lorsque les ressources sont limitées (GIEC, 2007[20]) (Noble, 2014[21]) (Guillén Bolaños, Manez Costa et Nehren, 2016[22]).
Cette difficulté apparaît déjà clairement dans les mesures de relance des États dans le cadre du COVID‑19. Bien qu’ils considèrent la relance comme l’occasion de « reconstruire sur de meilleures bases », en mettant l’accent sur la résilience climatique à long terme (Graphique 4.5), il n’en reste pas moins que, comme le montrent les chiffres de la base de données de l’OCDE sur la relance verte (OCDE, 2021[23]), en date de septembre 2021, « les mesures vertes ont certes augmenté en nombre et par leur taille budgétaire, mais elles continuent toutefois de ne représenter qu’une faible part du total des dépenses de la relance » ; en effet, les 667 milliards USD affectés à des mesures environnementales positives ne représentaient en réalité qu’environ 21 % des dépenses de relance annoncées par les pays (OCDE, 2021[7]).
Faire des politiques écologiques et de l’action climatique une priorité implique donc non seulement d’être explicite sur la nature et la portée des objectifs souhaités, mais aussi de veiller à ce qu’ils bénéficient des fonds adéquats (Rüdinger et al., 2018[24]) (Jones et al., s.d.[25]) (Andres et al., 2016[26]), non seulement pour obtenir des résultats sur le plan environnemental, mais aussi pour garantir la crédibilité de l’action publique et l’engagement à long terme. Pour atteindre les objectifs écologiques, un effort budgétaire massif sera nécessaire. L’OCDE estime que 6 900 milliards USD par an sont nécessaires jusqu’en 2030 pour atteindre les objectifs climatiques (OCDE, 2017[27]). Les objectifs de l’Accord de Paris appellent un changement radical des infrastructures, des technologies et des comportements (OCDE/La Banque mondiale/ONU Environnement, 2018[28]). Les prises de décisions relatives aux dépenses sont donc au cœur du rôle pilote de l’État en matière de climat et seront essentielles au succès des engagements climatiques et environnementaux à venir. À titre d’exemple, en Nouvelle-Zélande, le changement climatique compte parmi les cinq priorités que s’est donné le budget 2021 et il est demandé aux ministres de justifier leurs projets de loi à la lumière de ces priorités. Pour lier les priorités à un financement adéquat, il faut utiliser tous les outils de la politique budgétaire (budgétisation verte, examen des dépenses, etc.) afin de progresser vers les priorités climatiques. Ce point est abordé plus en détail dans le Domaine clé n° 2.
Lier les décisions et les plans majeurs en matière d’infrastructures aux objectifs climatiques peut donner la preuve d’un engagement fort et d’un rôle pilote assumé des pouvoirs publics. La transformation verte dépendra dans une large mesure de la capacité des pouvoirs publics à promouvoir des infrastructures durables, notamment dans les secteurs de l’énergie et des transports. Environ 30 % des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde sont produites par le secteur de l’énergie et 15 % par le secteur des transports (Institut des ressources mondiales, 2017[29]). La modernisation des bâtiments publics pour en améliorer le rendement énergétique, les réseaux intelligents et les infrastructures numériques sont autant d’exemples de décisions d’investissement des pouvoirs publics capables d’étayer et de rendre possible la transformation verte au sens large (OCDE, 2022[30]). La planification stratégique des infrastructures n’est pas seulement un outil pour gagner en efficacité dans le domaine de l’environnement (comme indiqué dans le Domaine clé n° 2), mais constitue un élément décisif de la transition.
Il est également possible de donner le signal d’un soutien politique fort en matière de politiques écologiques et d'action climatique au moyen d’autres mécanismes de gouvernance, par exemple en :
inscrivant le portefeuille climatique au centre du gouvernement (comme avec le conseiller national pour le climat de la Maison Blanche aux États-Unis ou le Secrétariat national sur le changement climatique à Singapour)
favorisant l’adhésion de tous les partis (comme avec le groupe bi-partisan de 35 représentants élus pour le développement durable créé au sein du parlement néo-zélandais ou la consultation multipartite de la loi générale de 2012 sur le changement climatique au Mexique)
établissant les cadres institutionnels nécessaires à l’engagement des citoyens (au Danemark, le Conseil danois de la technologie a reçu la mission de faciliter l’assemblée citoyenne du climat ; en Espagne, la participation du public fait partie intégrante de la législation sur le climat ; et la France a créé la Convention citoyenne pour le climat à titre d’initiative ponctuelle, voir l’Encadré 4.2).
Des membres de l’OCDE ont également mis au point tout un éventail de mesures institutionnelles pour veiller à ce que les décisions des États soient en accord avec les actions en faveur du climat. Les approches destinées à orienter, formuler et coordonner la stratégie sur le changement climatique varient, depuis des approches sectorielles fortement intégrées jusqu’à des approches centralisées imposées d’autorité (OCDE, à paraître[31]). En outre, le caractère juridiquement contraignant de l’action climatique peut également aider à renforcer la crédibilité, l’engagement et la continuité d’un cadre climatique dans le temps, qu’il s’agisse d’une mesure unique, d’un plan, d’une stratégie ou d’une loi sur le climat (Rüdinger et al., 2018[24]). L’expérience du Royaume-Uni avec sa loi sur le changement climatique de 2008 a montré qu’un cadre législatif complet pouvait être un outil précieux pour faire progresser l’action climatique et orienter les politiques et les programmes publics (Averchenkova, Fankhauser et Finnegan, 2018[32]). La loi chilienne 2022 sur le changement climatique constitue un autre exemple récent de législation sur le climat. Au Luxembourg, le Pacte Climat (un accord de coopération par lequel les collectivités locales s’engagent à mettre en œuvre des mesures liées à l’environnement et au climat) a contribué à améliorer la coordination entre l’administration centrale et les administrations locales en faveur d’actions conformes aux engagements nationaux d’atténuation du changement climatique.2
Les modèles de gouvernance doivent également faire en sorte que les décisions politiques relatives à l'action climatique permettent aux personnes les plus touchées par le changement climatique, telles que les populations autochtones, de jouer un rôle moteur. Il est essentiel de tenir compte du rôle de chef de file et des connaissances des peuples autochtones dans l'élaboration des politiques écologiques pour améliorer la légitimité et la durabilité de l'action climatique (Gouvernement du Canada, 2021[33]). Les mécanismes de gouvernance permettant aux populations autochtones de jouer un rôle de chef de file consistent notamment à garantir une participation effective à la conception et à la mise en œuvre des programmes écologiques, à créer des accords de gestion collaborative des zones protégées, à renforcer les capacités et à apporter un soutien financier (UICN, 2019[34]), ainsi qu'à garantir une protection juridique efficace des droits des populations autochtones (par exemple, le consentement préalable, libre et éclairé, la propriété foncière et le patrimoine culturel) et un accès équitable à la justice (y compris la coordination entre la justice autochtone et la justice non autochtone).
4.3.3. Participation des parties prenantes à la gouvernance verte
Compte tenu de l’ampleur des transformations requises pour agir dans la lutte contre le changement climatique et sur les autres enjeux environnementaux, les pouvoirs publics doivent favoriser le dialogue avec les parties prenantes et la participation des citoyens dans le processus de décision. Ce type d’engagement est indispensable pour rehausser la confiance du public dans les politiques climatiques. Il est indispensable d’échanger et de s’associer avec des acteurs variés, afin de garantir la prise en compte d’une large gamme d’expertises et de points de vue dans les actions et les mesures à venir. La transition climatique doit également pouvoir s’appuyer sur un espace civique protégé qui permette aux différentes parties prenantes de s’intéresser à des sujets complexes, de se rassembler pacifiquement, d’exprimer leurs points de vue dans un environnement sûr et de demander des comptes aux pouvoirs publics. Le Pilier 2 de l’Initiative de l’OCDE « Renforcer la démocratie » se concentre sur les principaux défis de la représentation et de la participation et sur la manière dont ils peuvent être traités pour regagner la confiance des citoyens et renforcer la démocratie (voir le Chapitre 2).
La collaboration stratégique avec la société civile tout au long du processus permettra d’ajuster les actions aux réalités locales, d’améliorer l’analyse des risques et de concevoir et mettre en œuvre des programmes et actions efficaces et durables. Le succès des initiatives visant à remédier aux pressions environnementales appelle la mobilisation d’une large gamme de parties prenantes, y compris les acteurs issus des secteurs public et privé, des organisations internationales, des OSC et du grand public. Cette collaboration permet d’instiller la confiance, de construire un consensus et de renforcer la légitimité des décisions prises par les pouvoirs publics en faveur de la transition climatique. Les OSC sont des intermédiaires essentiels entre les citoyens et l’administration publique du fait de leur capacité à rentrer en contact avec les minorités et les groupes marginalisés et à sensibiliser les communautés locales et la société dans son ensemble. Elles jouent un rôle unique en offrant la possibilité aux citoyens de prendre part aux décisions et d’influer sur les mesures qui affectent leur vie et leur futur. Pour leur donner les moyens d’agir dans ce sens, d’exploiter les connaissances locales et de déterminer les besoins des citoyens, les pouvoirs publics devraient adopter une approche non discriminatoire d’association des parties prenantes qui permette à tous les citoyens, en particulier ceux qui sont directement affectés par le changement climatique ou les politiques connexes, y compris les populations autochtones et les plus vulnérables, de dialoguer avec l’État de manière systématique et transparente, sur un pied d’égalité (OCDE, 2017[35]). Des réseaux mondiaux d’OSC, tels que la Convention sur la diversité biologique (CDB) et le Réseau action climat, peuvent jouer un rôle déterminant dans le renforcement des capacités des OSC locales et nationales.
De nouvelles formes de participation publique peuvent donner aux responsables publics de la légitimité lorsqu’ils doivent faire des choix difficiles et passer à l’action. Les processus délibératifs fonctionnent bien lorsque l’on touche à des questions complexes nécessitant des compris et la prise en compte des valeurs. Grâce à ces processus, les responsables politiques sont mieux à même de comprendre l’incidence des problématiques sur certains groupes et ce que les citoyens pourraient proposer pour remédier à ces difficultés. Les processus de délibération (assemblées, jurys et panels de citoyens) rassemblent des groupes de citoyens représentatifs de la société afin de s’attaquer à des questions stratégiques telles que la transition climatique (OCDE, 2020[36]). Ils sont conçus pour permettre au groupe d’avoir accès à une large gamme de ressources, d’entendre des experts et des parties prenantes, de délibérer ensemble et de trouver un terrain d’entente en vue d’ébaucher des recommandations collectives et éclairées sur des questions stratégiques. En ce qui concerne les enjeux climatiques, ils permettent aux pouvoirs publics d’impliquer concrètement des groupes de citoyens ordinaires afin que ces derniers déterminent les points sur lesquels les communautés sont prêtes à faire des compromis et des choix difficiles, y compris par exemple les modalités de financement de la transition climatique. Les données montrent une hausse marquée du nombre de processus délibératifs s’intéressant, ces dernières années, aux enjeux climatiques, y compris les assemblées citoyennes pour le climat qui se sont déroulées en Irlande entre 2016 et 2018, la Convention citoyenne pour le climat qui s’est tenue en France en 2019 et 2020 et l’assemblée citoyenne pour le climat qui a eu lieu en Allemagne en 2021 (Encadré 4.2).
La mobilisation et le renforcement des capacités des jeunes pour la lutte contre le changement climatique et la prise en compte des aspects intergénérationnels dans les fonctions clés des pouvoirs publics constituent des paramètres essentiels afin de garantir la durabilité des politiques sur le long terme. Les rassemblements de jeunes, tels que les Fridays for Future (« les vendredis pour le futur »), ont permis à la justice climatique de revenir sur le devant de la scène politique et montrent que les générations futures sont les premiers concernés par la dégradation environnementale. Les pouvoirs publics membres de l’OCDE ont instauré de nouveaux processus et créé de nouvelles institutions et structures pour permettre l’implication des jeunes. Un Conseil de la jeunesse pour le climat a par exemple vu le jour au Danemark, avec pour objectif d’offrir des recommandations aux pouvoirs publics sur la façon d’entreprendre, de manière efficace et rentable, la transition vers une économie à faibles émissions de carbone d’ici 2050 (OCDE, 2020[37]). En Irlande, les pouvoirs publics ont créé un Fonds pour la jeunesse en faveur de la justice climatique. Ce fonds, qui dispose de 500 000 EUR, permettra de financer les actions et les innovations impulsées par les jeunes en faveur de la justice climatique (Ministère de l’Enfance et de la Jeunesse de l’Irlande (Department of Children and Youth Affairs Ireland), 2020[38]).
Enfin, favoriser l’ouverture des données de l’administration publique peut encourager leur réutilisation par des acteurs clés en vue d’élaborer des actions conjointes, de comprendre les principales tendances et de renforcer la sensibilisation du public aux différentes facettes du changement climatique et à ses multiples répercussions.
Encadré 4.2. Exemples de processus délibératifs portant sur les enjeux climatiques
Convention citoyenne pour le climat en France (2019-2020)
La Convention citoyenne pour le climat est un processus délibératif ayant rassemblé, pendant sept week-ends sur une période de six mois, 150 citoyens représentatifs de la population française tirés au sort. Elle avait pour mandat de définir une série de mesures qui permettront à la France de réduire d’au moins 40 % (par rapport aux niveaux de 1990) ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 dans une logique de justice sociale. Après une délibération prolongée, les citoyens ont dressé une liste de 149 mesures à l’intention du gouvernement français.
Jury de citoyens de Besaya (2021)
Le jury de citoyens de Besaya a réuni 35 citoyens ordinaires tirés au sort parmi les 10 municipalités que compte cette région espagnole. Les citoyens se sont réunis en ligne et en présentiel au cours de six week-ends entre les mois de mai et de juillet. Il leur a été demandé d’élaborer des recommandations à l’attention du ministère régional de l’Économie sur la façon d’optimiser l’utilisation des Fonds verts pour le climat dans le bassin de Besaya de manière à créer et/ou à maintenir les emplois respectant les critères d’une transition écologique juste et inclusive. Les citoyens ont identifié 3 priorités stratégiques et 26 recommandations d’actions spécifiques.
Le Klima-Biergerrot (Bureau du citoyen pour le climat) à Luxembourg (2022)
Entre janvier et juillet 2022, le Klima-Biergerrot rassemblera un échantillon représentatif de 100 personnes vivant ou travaillant au Luxembourg en vue de discuter des engagements actuels du pays en matière de lutte contre le changement climatique et d’élaborer d’éventuelles mesures ou propositions supplémentaires. À l’issue de ce processus, les résultats seront présentés et débattus au Parlement luxembourgeois et influenceront vraisemblablement la nouvelle version du Plan national intégré en matière d’énergie et de climat (PNEC).
Sources : Besayaeuropa.es (2021), Besaya delibera en Europa, disponible à l’adresse : https://besayaeuropa.es/ ; Convention citoyenne pour le climat (2021), site officiel de la Convention citoyenne pour le climat, disponible à l’adresse : https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr/ ; https://www.klima-biergerrot.lu/fr.
4.3.4. Respecter les principes d’intégrité et de transparence dans la gouvernance climatique
Un meilleur engagement des parties prenantes appelle aussi le renforcement des règles d’intégrité afin d’empêcher certains groupes d’exercer une influence excessive, d’autant que certaines politiques sur l’environnement et le changement climatique porteront tort aux intérêts bénéficiant d’un statu quo. Il est impératif que les institutions publiques responsables de la gouvernance climatique soient dignes de confiance et répondent à des exigences d’intégrité et de transparence comme garantie de la légitimité et de l’acceptabilité des politiques qu’elles conçoivent. L’incapacité à combler les lacunes institutionnelles et de gouvernance qui rendent possible la corruption ou l’exercice d’une influence excessive aurait des conséquences particulièrement graves pour les communautés les plus touchées par le changement climatique et d’autres menaces environnementales.
Les États devraient être particulièrement attentifs au renforcement des normes d’intégrité dans les organismes publics impliqués dans les politiques écologiques. Même si la majorité des agents du secteur public font preuve d’une grande intégrité, des éléments probants montrent que les politiques liées au changement climatique, en particulier l’acheminement du financement climatique, sont sujettes aux manquements à l’intégrité, et notamment à la fraude, au détournement de fonds et à la corruption. L’adoption par les pouvoirs publics d’une approche fondée sur les risques pour l’examen et le renforcement des systèmes d’intégrité en place dans les organismes publics leur permet d’identifier les agents de la fonction publique intervenant dans l’élaboration, la mise en œuvre ou l’évaluation des politiques de lutte contre le changement climatique qui sont susceptibles d’être plus à risque et de prendre des mesures pour atténuer le risque. Les organismes de réglementation nationaux et internationaux, tels que les institutions qui régissent la gestion des ressources naturelles ou qui établissent les normes de pollution, par exemple, devraient observer de solides normes d’intégrité, notamment des mesures claires et proportionnées pour identifier et gérer les conflits d’intérêts. En outre, les États devraient établir des règles pour le recrutement dans la fonction publique de personnel issu du secteur privé et inversement, et instaurer des délais de carence tenant compte du niveau d’ancienneté (Williams, 2019[39] ; OCDE, 2021[40]).
La désignation des groupes d’experts de l’environnement et d’organes consultatifs sur le climat doit s’accompagner de garanties concernant la transparence et l’intégrité, afin d’assurer la légitimité des avis formulés. Pour atteindre les objectifs en matière de climat et de durabilité, les pays peuvent faire appel à des groupes d’experts et des organes consultatifs indépendants, tels que le Haut Conseil pour le climat en France, le Climate Change Advisory Council en Irlande et le Committee on Climate Change au Royaume-Uni. En fonction de leur statut et de leur mandat, ces acteurs peuvent avoir pour missions de présenter au parlement et/ou au gouvernement des analyses objectives sur les risques liés au climat, de suivre les progrès des engagements climatiques internationaux, ou encore de réaliser des modélisations et des planifications de scénarios. Ces organes peuvent être composés de chercheurs ou d’universitaires uniquement, ou compter dans leurs rangs des ingénieurs, des économistes, des directeurs de groupe de réflexion, ainsi que des fonctionnaires et des membres du secteur privé et de la société civile experts de la politique climatique (Weaver, Lotjonen et Ollikainen, 2019[41] ; Averchenkova, Fankhauser et Finnegan, 2018[32]). Les représentants du secteur privé qui participent à ces groupes ont directement accès aux processus décisionnels sans être considérés comme des lobbyistes externes, alors qu’ils peuvent, inconsciemment ou délibérément, favoriser les intérêts de leur entreprise ou de leur secteur, ce qui peut également accroître le risque de conflits d’intérêts. En 2019, seulement 47 % des pays fournissaient des informations sur les participants aux groupes consultatifs. Pour que le grand public ait un droit de regard, les informations sur la structure des groupes, leur mandat, leur composition et leurs critères de sélection doivent être mises en ligne. Ces groupes doivent également être dotés de règles de procédure, notamment en ce qui concerne les modalités de nomination, les normes de conduite et, surtout, observer des procédures de prévention et de gestion des conflits d’intérêts (OCDE, 2021[40]).
L’élaboration et la mise en œuvre de la politique climatique doivent être à l’épreuve du lobbying et d’autres pratiques d’influence qui peuvent induire en erreur les citoyens, les pouvoirs publics et les investisseurs, et entraver l’efficacité de l’action. En effet, dans le domaine de la politique climatique, un large éventail de secteurs économiques et d'industries sont directement concernés par le dénouement des débats et négociations. Il est par conséquent crucial pour les entreprises visées par les réglementations liées au climat d’interagir avec les décideurs publics. Comme le montrent régulièrement de nouveaux éléments, la dérive du lobbying et d’autres pratiques d’influence peuvent faire obstacle aux progrès de la lutte contre le changement climatique. Ainsi par exemple, une analyse de documents et de communications internes entre 1977 et 2014 d’un géant du pétrole et du gaz a révélé que, bien que ses propres recherches aient établi que le changement climatique était causé par l’activité humaine, l’entreprise s’est livrée à diverses pratiques, notamment la publication d’articles d’opinion dans la presse, destinées à semer le doute, à influencer l’opinion publique et à réduire la pression réglementaire à diminuer les émissions (Oreskes et Conway, 2010[42] ; Supran et Oreskes, 2017[43]). Les leçons du passé montrent également que les entreprises pétrolières et gazières ont été les principaux mécènes de groupes de réflexion et de groupes de pression remettant en cause la science climatique établie, ou qu’elles ont financé des publicités sur les réseaux sociaux ou des campagnes véhiculant une image de marque trompeuse de responsabilité écologique (Influence Map, 2019[44] ; Graham, Daub et Carroll, 2017[45]).
Pour renforcer la transparence sur les questions liées au climat et au lobbying, les pouvoirs publics peuvent envisager plusieurs solutions stratégiques. Tout d’abord, les pays qui disposent de registres de lobbying peuvent durcir les exigences de divulgation des activités de lobbying, afin que soient renseignés les objectifs de ces activités, leurs bénéficiaires, les décisions visées et les types de pratiques utilisées, y compris le recours aux réseaux sociaux comme moyen d’influence. Ensuite, les hauts responsables publics impliqués dans les processus de prise de décisions sur le climat et l’environnement (tels que le Ministre de l’environnement et les membres de cabinet, les dirigeants des organismes de protection de l’environnement et les membres des délégations dans les négociations sur le climat) pourraient diffuser publiquement leurs programmes d’action. Enfin, les États pourraient exiger que la façon dont sont prises les décisions législatives ou réglementaires soit divulguée a posteriori. Les informations ainsi révélées pourraient inclure l’identité des parties prenantes rencontrées, les fonctionnaires impliqués ainsi que l’objet et le résultat de leurs réunions, de même qu’une évaluation de la manière dont les contributions reçues ont été prises en compte dans la décision finale.
L’élargissement des divulgations sur les dons des entreprises à des partis politiques donnerait au public un droit de regard accru quant à la participation des entreprises à l’action climatique. Les entreprises concentrées dans les secteurs très gourmands en énergie et en combustibles fossiles (l’énergie et le transport) essuient des critiques de plus en plus vives de la part des investisseurs, des actionnaires et des consommateurs, qui leur reprochent de jouer les faux-semblants des engagements climatiques ou des politiques de durabilité afin de soigner leur image de responsabilité écologique, tout en se livrant parallèlement à un lobbying pour faire barrage aux politiques climatiques contraignantes ou les retarder, ou en versant des dons à des candidats opposés au renforcement de la réglementation sur le climat. Ces dernières années, la pression exercée par les investisseurs et les principaux gestionnaires d’actifs pour une meilleure prise en compte du financement politique et du lobbying par les entreprises en tant que risque pour leur performance sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) a eu une influence déterminante sur leurs stratégies. Dans le domaine de l’action climatique, le nombre de propositions d’actionnaires visant la divulgation par les entreprises d’informations à même d’éclairer leurs interactions avec le milieu politique a considérablement augmenté au cours de la dernière décennie, pour figurer parmi les résolutions d’actionnaires les plus fréquemment soumises au vote (InfluenceMap, 2021[46] ; Glass Lewis, 2021[47]). Une meilleure communication sur les dépenses de lobbying et les contributions politiques – avec une meilleure transparence sur les objectifs et les résultats en matière d’ESG – permettrait aux investisseurs et aux autres parties prenantes d’évaluer, entre autres, dans quelle mesure les objectifs des activités de lobbying et des dépenses politiques sont susceptibles de diverger de ceux des initiatives de durabilité. Aux États-Unis, la SEC (Securities and Exchange Commission) étudie actuellement les liens entre la divulgation des dépenses politiques et la performance en matière d’ESG, et examine la mise en œuvre d’obligations de divulgation (SEC, 2021[48]).
La lutte contre le commerce illicite de produits dangereux pour l’environnement doit également être au centre des préoccupations. Si la libéralisation du commerce international et la réduction des obstacles aux échanges ont été très bénéfiques, elles ont également multiplié les opportunités pour les adeptes du commerce de produits illicites, qui non seulement privent les États de recettes fiscales et autres, mais posent également des risques majeurs pour l’environnement. Ce commerce ou trafic illicite concerne notamment les espèces sauvages, les pesticides et produits chimiques de mauvaise qualité, le sable et les déchets (OCDE, 2016[49] ; OCDE, 2018[50] ; OCDE, 2019[51]). Les réseaux criminels adaptent rapidement leurs tactiques pour échapper à la détection et contourner les mesures policières. Aussi les États doivent-ils redoubler d’efforts, notamment en renforçant le partage international d’informations parmi les autorités chargées du maintien de l’ordre, en analysant les politiques susceptibles de créer par inadvertance des débouchés pour les criminels et en trouvant des moyens de resserrer le marché des produits illicites, de sorte à réduire leur demande de la part des consommateurs (OCDE, 2018[52]).
4.3.5. Une communication publique efficace sur l’action en faveur du climat et de l’environnement
La réalisation de la transition verte exige des pouvoirs publics qu’ils transforment l’usage qu’ils font de la communication publique afin d’informer la population, d’interagir avec elle, d’éviter la diffusion de la mésinformation et de la désinformation et d’y réagir. La communication publique constitue pour les États le principal moyen de fournir des informations et des données précises, fiables et à jour sur les pressions environnementales d’une manière qui puisse toucher la société. Une bonne communication publique favorise la prise de conscience, encourage un débat public éclairé, contribue à éviter la propagation de discours nuisibles et est propice à l’écoute et à la compréhension des demandes et préoccupations de la population (OCDE, 2021[53]). En ce qui concerne le changement climatique en particulier, l’élaboration et la mise en œuvre des politiques devraient reposer sur une libre circulation de l’information et des données entre le secteur public, le secteur privé, les citoyens et la société civile, y compris les journalistes, la communauté scientifique et le milieu universitaire. Le Pilier 1 de l’Initiative de l’OCDE « Renforcer la démocratie » est axé sur les principaux défis que les États doivent relever pour lutter contre la mésinformation et la désinformation (voir le Chapitre 1).
Les États doivent être capables de relayer un discours politique complexe de manière convaincante et constructive. Plusieurs pays prennent des mesures dans ce sens. En Écosse, la campagne intitulée Turning the Tide a mis en évidence les efforts déployés pour protéger la faune et la flore marines du Royaume-Uni et s’est attachée à expliquer clairement aux citoyens toute l’importance de cette question. La campagne Taking the Lead on Climate Change campaign (« Donner l’exemple en matière de changement climatique ») du Conseil de l’Union européenne délivre une information claire sur le changement climatique en Europe.
La communication publique doit contribuer à resserrer le lien entre sensibilisation, intention et action dans la lutte contre le changement climatique et les autres menaces environnementales. Les défenseurs de l’environnement n’ont pas toujours un comportement conforme aux idées qu’ils prêchent (Dryzek, Norgaard et Schlosberg, 2011[54] ; Eom, Kim et Sherman, 2018[55]). Si les données de l’OCDE montrent que la sensibilisation est le principal objectif de la fonction de communication publique, il peut être plus efficace de mettre davantage l’accent sur l’utilisation stratégique de la communication pour atteindre des objectifs comportementaux spécifiques (comme améliorer la prestation des services publics ou la mise en œuvre des réformes, ou mieux mobiliser les parties prenantes) (OCDE, 2021[56]). À cette fin, le gouvernement britannique a lancé sa campagne Plant for Our Planet dans le but d’encourager les citoyens, les entreprises et les communautés à mener des actions, telles que planter des arbres, dans le cadre de ses initiatives de préservation plus vastes.
Le partage de l’information n’est pas toujours suffisant pour entraîner un changement des comportements. Il appartient aux autorités publiques d’être attentives à la façon dont la mésinformation et la désinformation sur les politiques vertes risquent de nuire à un engagement fondé sur des éléments factuels et d’étioler l’adhésion aux réformes. Les efforts visant à créer un environnement d’information propice à des discussions constructives sur les mesures sont entravés par l’évolution rapide des modes de consommation et de partage de l’information par le public. Ces changements déterminent à qui et à quelles sources d’informations et de données les citoyens font confiance, tandis que l’essor des plateformes de réseaux sociaux, en particulier, a facilité la diffusion d’informations erronées ou mensongères (Matasick, Alfonsi et Bellantoni, 2020[57]). Dans le domaine du changement climatique, la désinformation peut chercher à discréditer la science du climat sur laquelle reposent les mesures prises ou à mettre en doute l’urgence de la crise, de sorte à compromettre l’appui aux réformes indispensables. En outre, des acteurs motivés par des considérations commerciales et politiques, tant nationaux qu’étrangers, peuvent utiliser les plateformes pour biaiser les débats publics. Les travaux de recherche suggèrent que la mise en évidence du consensus scientifique peut être un moyen de contrer la mésinformation et d’accroître l’acceptation par le public de la nécessité de lutter contre le changement climatique (Lewandowsky, 2020[58]).
Une communication efficace autour de l’urgence climatique et de la lutte contre la mésinformation qui y est liée nécessite préparation et prévention. Les enseignements tirés de la pandémie de COVID-19 seront utiles à cet égard. En effet, le discours des médias et le débat public sur les catastrophes naturelles créent un terreau propice à la distorsion des faits, comme on l’a constaté à la suite des feux de forêt, inondations et autres phénomènes météorologiques extrêmes. Il est important de préparer une stratégie de communication appropriée sur ces événements de plus en plus fréquents, et surtout d’anticiper les messages nuisibles et de les démentir à l’avance. Ces efforts contribueront à atténuer l’impact des propos mensongers et favoriseront le soutien et le respect des politiques vertes (Lewandowsky, 2020[58]).
Outre la riposte directe de la communication publique, les États doivent favoriser un partage efficace et en temps voulu des informations et des données, ainsi que sur les différentes solutions stratégiques qui s’offrent à eux pour lutter contre la désinformation sur le sujet des pressions environnementales, dont le changement climatique. L’une de ces options consiste à déterminer des réponses réglementaires et juridiques à la désinformation tout en protégeant la liberté d’expression. D’autres pistes sont possibles : établir des relations constructives et transparentes avec les plateformes en ligne et les vérificateurs de faits, étendre les initiatives d’éducation aux médias et à l’information, promouvoir la compréhension des données scientifiques et des compromis inhérents au débat sur le climat, favoriser la participation du public et le journalisme factuel ou encore élaborer un discours commun pour informer les citoyens et les orienter vers des sources fiables d’informations et de données. Il est important de veiller à ce que les messages sur le climat soient adaptés au public ciblé et que ceux chargés de les porter partagent ses particularités culturelles (Lewandowsky, 2020[58]).
Au nombre des mesures que les pouvoirs publics peuvent prendre pour lutter contre la désinformation et la mésinformation autour du changement climatique figurent l’adoption de normes communes en matière de données pour surveiller ce phénomène, la publication proactive - sans restriction d’accès - de données sur ce sujet afin d’en faire l’analyse et de les réutiliser,3 ainsi que l’établissement de la provenance des sources de données fiables et non fiables. Dernier point mais non le moindre, les enseignements des sciences comportementales peuvent être appelés à contribution pour renforcer la gouvernance de la communication publique et contrer cette mésinformation.
4.3.6. Redevabilité du « Gouverner vert »
Le renforcement des mécanismes de reddition de comptes du secteur public sera essentiel pour une action climatique efficace et la transition verte. Cela dit, mettre au point de tels mécanismes n’est pas toujours chose aisée, notamment parce qu’ils doivent impliquer une variété d’acteurs et d’actions, ainsi qu’un large éventail de données provenant d’un grand nombre d’institutions et de secteurs.
Au niveau international, il existe un certain nombre de mécanismes de reddition de comptes qui rendent l’action publique plus transparente. Par exemple, dans le cadre de son projet horizontal sur le renforcement de la résilience climatique et économique, l’OCDE a créé le Programme international pour l’action sur le climat (IPAC). Le tableau de bord de l’action climatique de l’IPAC comporte des indicateurs clés pour suivre les progrès accomplis sur la voie des objectifs climatiques et fournir un instantané de l’action climatique des pays.4 Faire en sorte que ces mécanismes disposent des bonnes modalités de gouvernance, outils et données constitue un défi majeur mais essentiel à leur crédibilité et à leur fiabilité.
Le suivi systématique des politiques et des engagements climatiques nécessitera l’accès aux données sur les enjeux climatiques et leur diffusion au sein du secteur public et entre les secteurs, aux niveaux national et international. Au sein du secteur public, il est essentiel que différents types de données (administratives, mais aussi sur l’agriculture, l’eau et les risques naturels) soient générées, partagées et accessibles dans différents formats (données géoréférencées, normalisées et ouvertes) et par différents moyens (infrastructures de données partagées, IoT, cloud, etc.). En 2018, seuls 16 pays sur 34 ont incluent les données environnementales utiles pour soutenir et suivre l’action face au changement climatique dans leurs politiques de données publiques ouvertes (Graphique 4.6). Le cadre de l’OCDE pour un secteur public axé sur les données (OCDE, 2019[59]) et les travaux de l’OCDE sur les données publiques ouvertes expliquent dans les grandes lignes comment instaurer l’accès aux données sur la transition verte et leur partage.
Il est indispensable d’améliorer les méthodes de suivi et de divulgation concernant l’action en faveur de l’environnement sur le plan national. Les gouvernements devraient rendre compte au public des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs climatiques et environnementaux, et la surveillance des organismes de réglementation est à cet égard essentielle pour recueillir les commentaires du public et promouvoir la sensibilisation aux résultats. L’on s’attache depuis peu à déterminer si et comment les entités du secteur public abordent la question du climat dans la présentation de leurs états financiers. La majorité des pays de l’OCDE qui pratiquent la budgétisation verte ont adopté des mesures de transparence et de reddition de comptes pour guider les institutions publiques dans la réalisation des objectifs verts. Ainsi, la France et l’Italie élaborent des déclarations de budget vert pour chacune des administrations afin de montrer comment l’enveloppe cadre avec ces objectifs. Une telle déclaration peut être utilisée par le parlement et les parties prenantes afin d’évaluer comment un budget contribue à atteindre les objectifs climatiques ou environnementaux. À cet égard, la transparence soutient la redevabilité. La budgétisation verte permet de doter les parlements de ressources supplémentaires lors de l’examen des propositions budgétaires. Elle fournit également des ressources aux fins du contrôle par des institutions indépendantes, telles que les conseils budgétaires et les commissions environnementales. Par exemple, en Irlande, le Conseil consultatif sur le changement climatique présente des recommandations au gouvernement, y compris sur la méthodologie utilisée, l’obligeant à respecter le principe « appliquer ou expliquer ».
Il faut souligner le rôle essentiel des fonctions d’audit interne et de contrôle de l’État, en tant que garantes de l’intégrité publique dans les politiques et les investissements climatiques, et pour vérifier qu’elles produisent les résultats escomptés. Les institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ISC) peuvent apporter une contribution importante, d’une part, en évaluant la préparation des administrations nationales aux effets du changement climatique et, d’autre part, en réalisant des audits de performance des programmes publics d’adaptation à ce phénomène et d’atténuation de son ampleur. Le défi des pouvoirs publics est de s’assurer que les ISC et les fonctions d’audit interne disposent des capacités et des moyens nécessaires pour éviter que les fonds publics alloués à ces programmes ne soient sujet à la fraude et d’autres risques pour l’intégrité.
Les systèmes judiciaires ont également un rôle à jouer dans l’amélioration de la redevabilité en matière d’action environnementale. Les poursuites pour infraction environnementale sont de plus en plus courantes, et la justice environnementale, auparavant spécialité du droit, est devenue une priorité stratégique. Le droit fondamental à un environnement sain est désormais inscrit dans les constitutions de plus de 100 pays, et il existe des milliers de traités environnementaux (multilatéraux et bilatéraux) entre pays (Base de données sur les accords internationaux sur l’environnement, 2021[61]). Pour faire face à la demande croissante découlant de ces dispositions juridiques, de nombreux pays ont créé des tribunaux spécialisés en matière d’environnement. Par exemple, le tribunal de l'environnement de Nouvelle-Zélande est composé de juges et de commissaires à l'environnement formés dans divers domaines scientifiques et techniques, commerciaux et agricoles, ainsi qu'à la médiation. Ainsi, il a été possible de créer une jurisprudence environnementale cohérente pour l'ensemble de la population, y compris pour les peuples autochtones. Dans la zone OCDE, on peut citer comme exemples le tribunal des affaires foncières et environnementales de l’État de Nouvelle-Galles-du-Sud en Australie et les tribunaux chiliens de l’environnement. Le PNUE estime que cette « explosion » des tribunaux de l’environnement constitue le changement le plus remarquable qu’ait connu la justice environnementale au XXIe siècle (PNUE, 2016[62]).
Les engagements environnementaux en nombre croissant adoptés par le biais de traités internationaux et de législations nationales nécessitent, aux fins de leur mise en œuvre, des systèmes judiciaires solides. La justice environnementale, de plus en plus plébiscitée par le public, passe obligatoirement par un système judiciaire réactif, capable de contraindre les administrations et les entreprises à respecter les réglementations environnementales et à protéger les droits fondamentaux à un environnement de qualité. Ces affaires se retrouvent déjà devant les plus hautes juridictions des pays. Plusieurs procès emblématiques ont récemment abouti à des verdicts en faveur du climat (Encadré 4.3). On constate également une prise de conscience croissante à l’échelle mondiale des questions intergénérationnelles que soulève le changement climatique dans les décisions de justice (OCDE, 2020[37]). Des pays comme l’Australie, les États-Unis, la Norvège, les Pays-Bas ou encore le Royaume-Uni nous fournissent des exemples de décisions judiciaires qui peuvent servir de référence aux futures décisions politiques en matière de justice intergénérationnelle. Ainsi, la Cour constitutionnelle suprême d’Allemagne a appelé le gouvernement du pays à prendre des mesures plus ambitieuses de protection du climat pour protéger les générations futures (Cour constitutionnelle fédérale d’Allemagne, 2021[63]).
Afin de concilier les différents intérêts en jeu dans ces affaires – probablement amenées à se multiplier – et d’offrir des voies de recours efficaces et rapides aux citoyens et aux entreprises cherchant à protéger leur droit à un environnement de qualité, des systèmes judiciaires plus efficaces et performants sont indispensables. Voici quelques mesures que les pays peuvent prendre pour y parvenir :
Promouvoir la spécialisation et la formation dans les affaires environnementales pour les juges. La spécialisation juridictionnelle s’est avérée bénéfique pour l’efficacité et la cohérence des jugements dans de nombreux domaines (Conseil de l'Europe, 2012[64]). Or, la majorité des magistrats ne sont actuellement pas formés aux lois environnementales internationales et nationales.
Investir dans l’efficience et l’efficacité globales du système judiciaire. La demande pour un règlement efficace des différends environnementaux ne cessant de croître, il est urgent d’investir dans la capacité du système à apporter des réponses adéquates.
Rendre le système judiciaire plus accessible et plus centré sur l’humain. Pour faire en sorte que les citoyens accordent leur confiance aux institutions publiques et faire face à l’urgence climatique, il est également nécessaire de leur garantir un accès à la justice pour les questions de droit de l’environnement (OCDE, 2019[65]).
Encadré 4.3. Affaires qui ont fait date en matière de justice environnementale
Australie
La Cour fédérale d’Australie a récemment estimé que le ministre fédéral de l’Environnement avait le devoir de protéger les jeunes des catastrophes potentiellement causées par le changement climatique. Dans un jugement considéré comme la première du genre, elle a statué que le ministre avait l’obligation de prendre en compte les effets des émissions nocives de CO2 résultant de l’extraction du charbon dans le cadre du projet Vickery Extension avant d’approuver celui-ci. La requête a été formée au nom de huit enfants australiens, en tant que représentants de « tous les enfants qui résident habituellement en Australie ». Le ministre a fait appel du jugement.
France
En juillet 2021, la plus haute juridiction administrative française, le Conseil d’État, a rendu sa première décision relative aux engagements environnementaux pris par le gouvernement dans le cadre de l’Accord de Paris. Saisi par la commune de Grande-Synthe (département du Nord), ville côtière qui pourrait être gravement touchée par la montée des eaux, et par plusieurs organisations œuvrant pour le climat (Oxfam France, Greenpeace France, Notre Affaire À Tous et la Fondation Nicolas Hulot), le Conseil a ordonné au gouvernement de « prendre toutes mesures utiles permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre (...) afin d’assurer sa compatibilité avec les objectifs » de la France, et ce au plus tard le 31 mars 2022. Compte tenu des niveaux actuels d’émissions de gaz à effet de serre, le pays est donc tenu de les réduire de 40 % dans les neufs mois.
Pays-Bas
L’affaire opposant la Fondation Urgenda à l’État des Pays-Bas (2019) a marqué un pas décisif en matière de justice climatique lorsque la Cour suprême néerlandaise a estimé qu’en ne réduisant pas ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 25 % avant fin 2020, le pays enfreindrait les articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. L’État néerlandais s’est donc engagé à réduire de 75 % la capacité de ses centrales électriques au charbon encore en activité et à mettre en œuvre un train de mesures à hauteur de 3 milliards EUR visant à réduire ses émissions à l’horizon 2020. Cette affaire a stimulé l’intérêt pour les droits de l’homme en tant qu’arguments juridiques dans les procédures de litiges climatiques.
Note : Il s’agit là d’un aperçu d’exemples marquants, qui ne se veut en aucun cas exhaustif des affaires d’importance dans le domaine du droit de l’environnement. Pour de plus amples informations, voir par exemple : le Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment et le Centre for Climate Change Economics and Policy de la London School of Economics and Political Science. (2020) Global trends in climate change litigation: 2020 snapshot.
Source : Sharma by her litigation representative Sister Marie Brigid Arthur v Minister for the Environment [2021] FCA 560, disponible sur fedcourt.gov.au ; Urgenda Foundation v. the Netherlands (2019) ECLI:NL:HR:2019:2006 (disponible ici) ; Le Conseil d’État statuant au contentieux (Section du contentieux, 6ème et 5ème chambres réunies) N° 427301 (jugement disponible sur : https://www.conseil-etat.fr/en/news/greenhouse-gas-emissions-the-government-must-justify-within-3-months-that-the-reduction-path-to-2030-can-be-achieved.
4.3.7. Liens entre la problématique femmes-hommes et les enjeux environnementaux
Le lien entre l'égalité des genres et la durabilité environnementale est de plus en plus reconnu. La dégradation de l'environnement affecte différemment les hommes et les femmes, souvent en raison des rôles et des comportements différenciés selon le genre dans la société, ainsi que de la plus grande représentation des femmes au sein de la population pauvre au niveau mondial (OCDE, 2021[66]). Comprendre comment le genre et l'environnement sont interconnectés peut contribuer à mettre en évidence les inégalités sous-jacentes dans de multiples domaines, notamment en ce qui concerne la propriété et le contrôle des ressources naturelles, l'énergie, les transports, l'eau, le logement et l'utilisation des terres. Bien souvent, les femmes et les filles n'ont qu'un accès limité aux éléments susmentionnés ou exercent un contrôle limité sur ceux-ci ; elles sont donc plus susceptibles d'être exposées aux risques liés aux catastrophes et moins à même de s'adapter à la dégradation de l'environnement. (OCDE, 2021[66]).
En outre, les femmes peuvent jouer un rôle clé dans la promotion du développement, de la production et de la consommation durables et dans la réalisation des objectifs environnementaux. Elles jouent souvent un rôle actif dans le domaine de l'environnement au niveau communautaire et local dans les pays du monde entier, et ont tendance à être surreprésentées parmi les principaux acteurs de la campagne de lutte contre le changement climatique à l'échelle mondiale (OCDE, 2021[66]).
4.3.8. Donner aux États les moyens d’agir au niveau international face aux défis environnementaux
Les phénomènes du changement climatique et de la perte de biodiversité se manifestent à l’échelle mondiale. Or, les moyens d’action des pays sont essentiellement circonscrits à leurs frontières nationales, d’où le caractère indispensable de la coopération et de la coordination internationales. Malgré la multiplication des efforts et l’obtention de certains résultats, les États peinent encore à mener une action concertée. Ce manque d’action collective peut donner l’impression que les gouvernements nationaux n’ont pas les outils ou la capacité nécessaires pour traiter les questions qui sont d’une importance critique et croissante pour la vie des populations.
Même s’il existe une gouvernance institutionnelle à l’échelon international des questions environnementales, dans le cadre notamment de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et de la Convention sur la diversité biologique (CDB) (qui dépasse le cadre du présent chapitre), les États doivent redoubler d’efforts pour être mieux à même tant d’agir à l’échelle mondiale que de gérer les conséquences nationales des questions qui dépassent leurs frontières. Il faut pour cela repenser les processus traditionnels de gouvernance publique et d’élaboration de règles, qui sont encore conçus en grande partie dans le cadre d’approches « cloisonnées ».
Renforcer la capacité d’agir des gouvernements au niveau international est indispensable, non seulement pour lutter contre le changement climatique, mais aussi pour relever un nombre croissant de défis devant lesquels les gouvernements agissant seuls resteront impuissants, comme la fiscalité internationale, les migrations, les échanges et le trafic illicite, pu encore la corruption internationale. Il leur faut pour cela accroître les capacités de la fonction publique, mettre en place des cadres et des processus pour gravir et descendre les échelons hiérarchiques concernant les questions d’ampleur mondiale et renforcer la perspective internationale de la réglementation. Le Pilier 3 de l’Initiative « Renforcer la démocratie » de l’OCDE (voir le Chapitre 3) examine plus largement la façon dont les gouvernements peuvent prendre en compte le caractère mondial des défis auxquels sont confrontées les institutions publiques.
Les approches nationales du changement climatique et du développement durable n’éclairent guère sur les effets transfrontières des actions des pays ou l’impact qu’elles ont sur la durabilité au niveau international. Il n’en reste pas moins qu’il existe un large éventail d’indicateurs régulièrement produits, par l’OCDE et d’autres organismes, sur les effets de nature économique (aide publique au développement, droits de douane, mesures de soutien à l’agriculture, etc.), sociale (par exemple, données sur les migrations et les transferts de fonds) et environnementale (par exemple, empreintes carbone et eau) de politiques intérieures dont le retentissement dépasse les frontières nationales. Les gouvernements pourraient en faire un meilleur usage pour élaborer et mettre en œuvre des politiques liées au climat cohérentes, qui profitent à davantage de personnes dans davantage de pays.
Plusieurs pays ont acquis de l’expérience en matière d’anticipation, d’évaluation et de suivi des impacts transfrontières dans le cadre de leurs efforts visant à améliorer la cohérence des politiques au service du développement durable. Cette expérience pourrait être appliquée à la transition verte, en étant complétée et renforcée par la coopération, des accords et des engagements à l’échelle internationale qui sont propices au développement durable partout dans le monde. Par exemple, dans le domaine de la pollution atmosphérique transfrontière, l’Accord Canada-États-Unis sur la qualité de l’air et la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance CEE-ONU montrent aux pays comment ils peuvent conclure des accords pour faire progresser la coopération sur des défis transfrontières (Kauffmann et Saffirio, 2021[67]).
Une façon de prendre en compte les impacts transfrontières passe par la coopération réglementaire internationale (CRI). Pourtant, moins d’un cinquième des pays membres de l’OCDE intègrent systématiquement les dimensions internationales lorsqu’ils légifèrent au niveau national (OCDE, 2021[68]). Or s’ils adoptent des stratégies CRI qui s’accompagnent de rôles et de responsabilités clairement définis et s’ils appliquent systématiquement une perspective internationale dans la réglementation, les gouvernements seront mieux à même de contribuer à la coopération mondiale et d’en tirer des bénéfices dans la lutte contre le changement climatique. Les gouvernements peuvent apprendre les uns des autres et, au besoin, élaborer des ripostes réglementaires concertées et cohérentes tout en préservant leurs prérogatives nationales (Encadré 4.4).
La coopération internationale sera également cruciale pour aider les pays en développement à gérer les arbitrages à court terme qui sont associés à la transition verte. Pour cela, il sera essentiel de créer les conditions propices à la mobilisation d’investissements nationaux, internationaux et privés. Celles-ci reposent notamment sur un renforcement des financements et investissements verts internationaux et nationaux par un meilleur ciblage de tous les types de financement du développement, sur la promotion des technologies vertes et la coopération dans ce domaine, sur le développement des capacités d’innovation et d’adoption des technologies vertes au niveau national, mais aussi des régimes de droits de propriété intellectuelle, et sur la facilitation du commerce des biens et services verts par la suppression des obstacles tarifaires et non tarifaires.
Des structures innovantes de la fonction publique qui permettent des approches collaboratives pourraient être porteuses d’enseignements en matière de coopération internationale sur les questions climatiques. Il se peut que les institutions publiques en place et leurs approches ne suffisent pas à gérer des problèmes politiques transfrontières aussi complexes. Les États doivent trouver de nouvelles façons de collaborer, notamment en s’intéressant à d’autres modalités de gouvernance, en expérimentant des approches stratégiques internationales novatrices, en mobilisant le public mondial par des processus démocratiques, en mettant en place des systèmes interopérables pour la libre circulation des informations et des données, en élaborant collectivement de nouveaux types de politiques transfrontières et en fournissant des services à l’international.
Encadré 4.4. Transformer les procédures d’élaboration de la réglementation pour un monde interconnecté
1. Établir une stratégie de coopération réglementaire internationale (CRI) et sa gouvernance :
Élaborer une politique/stratégie pangouvernementale en matière de CRI
Créer au sein du gouvernement un mécanisme de coordination des activités de CRI afin de centraliser les informations pertinentes sur les pratiques et activités en matière de CRI, de bâtir un consensus et de définir un langage commun
Créer un cadre propice à la CRI, c’est-à-dire sensibiliser à la CRI, s’appuyer sur les plateformes de coopération existantes, dissiper les préjugés contre la CRI et mettre en place des mesures incitatives pour les décideurs et les régulateurs
2. Intégrer la CRI dans l’ensemble du processus national d’élaboration de la réglementation :
Recueillir et mettre à profit les connaissances et l’expertise internationales
Tenir compte des instruments internationaux existants lors de l’élaboration de la réglementation et documenter les arguments justifiant que l’on s’en écarte
Évaluer les effets à l’international
Collaborer activement avec les parties prenantes étrangères
Faire de la cohérence avec les instruments internationaux un principe directeur du processus d’examen du corpus réglementaire et de l’évaluation ex post
Procéder à l’évaluation ex ante des besoins de coopération pour assurer une mise en œuvre appropriée de la réglementation et simplifier les procédures « reconnaissables »
3. Coopérer au niveau international, aux différents niveaux :
Coopérer avec les autres pays afin de promouvoir l’élaboration et la diffusion des bonnes pratiques et des innovations en matière de politique et de gouvernance réglementaires
Contribuer aux travaux des instances internationales qui favorisent une meilleure coopération réglementaire
Appliquer le principe de reconnaissance mutuelle aux instruments internationaux
Aligner les attentes en matière de CRI sur les différents instruments politiques, y compris dans les accords commerciaux
Source: (OCDE, 2021[69]) et (OCDE, 2022[70])
Enfin, une dynamique propice à l’action climatique et environnementale au niveau mondial s’intensifie en dehors des organisations internationales. Les forums intergouvernementaux, tels que le G20, occupent une place plus importante et donnent souvent un élan politique à des négociations internationales de portée plus large. De plus, un nombre croissant de normes sont élaborées et adoptées au niveau mondial dans le secteur privé, et la société civile, par l’intermédiaire d’ONG et même de citoyens, rallie le soutien du public et influence les décisions internationales. Les gouvernements doivent donc adapter leur rôle dans l’orchestration des mesures internationales en faveur du climat et de l’environnement. Ils doivent aussi faire la synthèse des points abordés lors de ces multiples forums afin de relayer à leurs citoyens un message clair sur l’action internationale liée au climat et à l’environnement.
4.4. Domaine clé n° 2 – Utiliser les bons outils dans la lutte pour le climat et l’environnement
Les pouvoirs publics doivent faire le meilleur usage possible des outils de gouvernance disponibles pour réaliser les changements structurels nécessaires à la transition climatique. Il est nécessaire de déverrouiller la budgétisation verte, les réglementations, les procédures de planification des infrastructures et la passation de marchés publics afin d’aligner les politiques publiques, les investissements publics, la consommation et la fiscalité sur les objectifs écologiques. L’utilisation systématique de ces outils de gouvernance contribuerait également à renforcer la confiance dans l’action menée face au changement climatique en consolidant le cadre de gouvernance propre à cette question et en faisant preuve d’engagement. Pour ce faire, les gouvernements devront également améliorer la planification, s’assurer que les agents de la fonction publique disposent des compétences et affichent l’état d’esprit nécessaires et tirer parti d’approches de gouvernance innovantes.
4.4.1. Outils de transformation clés
Améliorer la gouvernance des infrastructures pour des équipements plus verts
Les infrastructures jouent un rôle unique dans les niveaux d’émissions. Des études à l’échelle internationale attribuent 50 % à 70 % des émissions de gaz à effet de serre aux infrastructures (Groupe de travail du G20 sur les infrastructures (à paraître), 2021[71]). Seulement 20 % environ de ce pourcentage est lié à la construction d’infrastructures physiques, les 80 % restants étant dus à l’exploitation et à l’utilisation des infrastructures (Saha, 2018[72]). Les décisions en matière d’infrastructures déterminent les modes d’utilisation, depuis les distances de déplacement jusqu’aux incitations à l’installation de panneaux solaires. Il est donc possible de réduire les émissions en ayant une influence sur le comportement des développeurs d’infrastructures, de leurs usagers et de l’économie. La part des infrastructures dans les émissions de carbone s’accroît, ce qui en fait un domaine essentiel de l’action face au changement climatique. La plupart des infrastructures existantes dans le secteur énergétique et des transports ont été conçues et construites pour un monde caractérisé par des combustibles fossiles abondants et bon marché, contribuant ainsi à la croissance économique de nombreuses régions, mais aussi aux émissions de gaz à effet de serre (GES). En Europe, le secteur de l’énergie représentait 27 % des émissions de gaz à effet de serre de l’UE en 2019, tandis que les émissions du secteur des transports (y compris les transports maritimes internationaux et l’aviation) atteignaient 32 %, contre 24 % en 2000.5
Au regard de la longévité des actifs d’infrastructure, les décisions d’investissement prises aujourd’hui sur le type d’infrastructures (à haute ou à faible intensité de carbone) détermineront si l’objectif du zéro émission nette sera réalisable, en particulier compte tenu du déploiement rapide des investissements de relance. À plus court terme, les choix faits en ce qui concerne les systèmes d’infrastructure et les dépenses publiques auront des conséquences immédiates sur l’objectif de mettre un terme à la perte catastrophique de biodiversité et de renforcer la résilience des infrastructures (Commission européenne, 2021[73]).
Le changement climatique a augmenté la fréquence des chocs liés au climat (inondations, températures extrêmes, aléas géologiques, menaces sécuritaires et autres risques) qui, à leur tour, mettent à l’épreuve les limites de la résilience des infrastructures. Par exemple, l’élévation du niveau de la mer affectera les zones bâties, tandis que des températures plus élevées nécessiteront une plus grande tolérance à la chaleur des infrastructures telles que les voies ferrées. Les actifs d’infrastructure sont déjà sujets à une dépréciation de leur valeur due à leur usure progressive ou à leur vieillissement, mais les défaillances d’infrastructure dues à des catastrophes liées au climat ont un impact immédiat sur la vie et le bien-être des citoyens et sur la continuité de la chaîne de valeur. Une planification et des investissements en amont sont nécessaires pour garantir que les infrastructures, tant nouvelles qu’existantes, puissent résister aux chocs externes tout au long de leur durée de vie prévue.
L’avènement d’économies et de sociétés résilientes, vertes et inclusives nécessite une nouvelle approche de la gouvernance des infrastructures, à savoir une complète transformation de la manière dont les infrastructures sont planifiées, réalisées et utilisées. Les infrastructures doivent être protégées des perturbations climatiques potentielles, y compris des impacts du changement climatique à proprement parler, et des évolutions de la conjoncture économique, telles que des difficultés budgétaires ou une augmentation de la dette publique. Le rapport de l’OCDE publié récemment sur le renforcement de la résilience, qui s’inscrit dans le droit fil du programme du G20 italien pour des infrastructures de qualité, propose une nouvelle approche de la gouvernance des infrastructures fondée sur la Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des infrastructures. Cette approche vise à tirer le meilleur parti d’un actif tout au long de son cycle de vie, pour toutes ses fonctions et tâches et sur l’ensemble du système/réseau d’infrastructure, en se servant des nouvelles technologies et de solutions fondées sur la nature (OCDE, 2020[74]) (Encadré 4.5).
Encadré 4.5. Rendre la gouvernance des investissements en infrastructures plus respectueuse de l’environnement
La gouvernance des infrastructures a un rôle clé à jouer dans l’élaboration d’une transition verte. Les décisions à venir en matière d’investissement devront éviter de verrouiller davantage les émissions de carbone et promouvoir des technologies écologiquement durables. Les cadres de planification et de prise de décision qui répondent à ces besoins et contextes en évolution rapide peuvent permettre aux administrations publiques de faire des choix d’investissement à l’épreuve du temps et d’améliorer la durabilité environnementale des infrastructures du pays.
La Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des infrastructures fournit des orientations aux responsables et aux principales parties prenantes sur les institutions, les processus et les outils d’action nécessaires pour atteindre efficacement les objectifs des politiques publiques sur le climat et l’environnement de manière intégrée, accélérer les avancées vers une reprise durable et inclusive, et garantir un accès abordable et équitable aux services d’infrastructure. La recommandation énonce dix piliers qui peuvent aider les administrations publiques à relier les décisions et les plans d’infrastructure aux objectifs climatiques afin de débloquer une transition verte.
Les principaux défis à relever pour favoriser le verdissement des infrastructures résident dans la capacité des pouvoirs publics à établir un lien entre la planification des infrastructures et les objectifs climatiques, à mettre en place des critères pour sélectionner les projets d’infrastructures en fonction des objectifs globaux, et à fournir, exploiter et entretenir les infrastructures de manière à minimiser leur empreinte carbone (ainsi que celle sur l’environnement au sens large), tout en ayant une influence sur le comportement des citoyens et des entreprises de manière à ce qu’ils fassent des choix plus durables.
Au cours de la phase de planification, l’élaboration d’une vision stratégique à long terme pour les infrastructures qui s’aligne sur les objectifs de l’action publique à long terme - y compris les engagements en matière de protection de l’environnement et d’atténuation du changement climatique - est essentielle pour aider les administrations publiques à déterminer les besoins en matière de services d’infrastructure et à y répondre d’une manière opportune et cohérente. Comme le souligne la Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des infrastructures, pour mettre en œuvre cette vision à long terme, les pays devraient élaborer un plan national d’infrastructure intégré, en donnant la priorité aux projets en fonction du ratio coûts/avantages le plus élevé sur la base de facteurs économiques, environnementaux et sociaux. Ce plan devrait intégrer l’entretien et la résilience (OCDE, 2021[75]), y compris la planification nationale de l’adaptation au changement climatique, les programmes de protection des infrastructures stratégiques et l’aménagement du territoire. Il devrait également couvrir tous les aspects d’un système solide de gestion des actifs, allant de la politique et de la stratégie de gestion des actifs aux principaux catalyseurs et opportunités, tels que les solutions naturelles et les innovations technologiques (OCDE, 2021[76]).
La plupart des pays de l’OCDE ont pris conscience de la nécessité d’assurer une cohérence entre les plans d’infrastructure et les objectifs de développement durable plus larges et 73 % d’entre eux alignent leur plan d’infrastructure à long terme sur les actions publiques en matière d’environnement et de climat (OCDE, 2021[6]). Dans la plupart de ces pays, l’objectif est d’investir dans des projets importants permettant la mise en œuvre d’initiatives de durabilité plus larges (67 %), suivi par l’adaptation des infrastructures existantes visant à améliorer les performances environnementales et l’identification de synergies intersectorielles afin de réduire les impacts environnementaux négatifs (57 %). En revanche, les pays sont moins nombreux à avoir adopté des objectifs en matière d’efficience de l’utilisation des ressources dans le domaine de la construction et de l’exploitation des infrastructures (40 %) ou de recherche et du développement visant à promouvoir des infrastructures respectueuses de l’environnement (33 %) (voir les indicateurs clés - Graphique 4.2, Panel D).
Il est impératif que la sélection et la priorisation des projets d’infrastructure intègrent les problématiques climatiques et environnementales. À la lumière des objectifs climatiques internationaux et nationaux et des nouvelles réglementations telles que l’Accord de Paris, le Pacte vert européen et la taxinomie de l’UE, il est primordial d’introduire ces considérations dans les nouveaux outils d’évaluation des investissements destinés à quantifier leurs impacts pour sélectionner et prioriser les projets. Il est indispensable en outre d’intégrer ces outils dans le processus d’investissement public. C’est aux États qu’incombe la lourde tâche de déterminer les possibilités d’investissement les plus susceptibles de contribuer à la réalisation des objectifs climatiques. Seuls 19 pays de l’OCDE font état d’une liste de projets prioritaires, dont la plupart sont impulsés sous l’effet d’une combinaison de résultats d’analyse coûts-avantages, de plans d’infrastructure et d’un solide soutien politique (OCDE, 2019[77]). Pour accélérer la transition climatique, les principaux instruments de hiérarchisation des priorités doivent intégrer pleinement les considérations climatiques, en faveur d’infrastructures à l’épreuve du changement climatique (Encadré 4.6).
Encadré 4.6. Infrastructures à l’épreuve du changement climatique et mise en œuvre des plans de relance
Les ambitions climatiques tout comme les plans de relance doivent être mises en œuvre avec succès et en temps utile. Il est impératif que les gouvernements transforment aujourd’hui leurs engagements en actions et stratégies politiques claires et crédibles. Les projets d’infrastructure sont un aspect essentiel de l’action climatique et devraient être conçus pour un avenir à neutralité climatique et à résilience au changement climatique. L’exploitation, l’entretien et le démantèlement final de tout projet devraient être effectués de manière neutre sur le plan climatique, ce qui implique également la prise en compte des principes de l’économie circulaire, tels que le recyclage ou la réutilisation des matériaux. Des mesures d’adaptation s’appuyant sur des évaluations des risques climatiques contribueront à garantir des projets d’infrastructure résilients au climat.
La Commission européenne (CE) a récemment publié une méthodologie de prise en compte des enjeux climatiques dans les infrastructures afin d’aider à intégrer les considérations climatiques dans les futurs projets d’investissement et d’infrastructure (y compris les bâtiments, les infrastructures de réseau, les systèmes et les actifs construits). Cette méthodologie est à suivre dans le cadre du programme de financement direct InvestEU afin de s’aligner sur l’Accord de Paris et les objectifs climatiques de l’UE.*
L’OCDE soutient les efforts des pays qui visent à renforcer les cadres de gouvernance des infrastructures pour faire avancer la transition verte. En Italie, un projet de collaboration entre l’OCDE, la CE et le Ministère des infrastructures durables et des mobilités soutient les réformes du Gouvernement italien dans le cadre du Plan de relance et de résilience et des fonds NextGenerationEU1 qui s’y rattachent. En Irlande, l’OCDE, la CE et le ministère des Dépenses publiques élaborent un cadre intégré et des outils méthodologiques appropriés pour prioriser les investissements et intégrer les considérations climatiques dans des secteurs tels que les transports et la protection côtière.
Note : comme l’exige l’article 8, paragraphe 6, du règlement InvestEU (Orientations techniques pour la prise en compte des enjeux climatiques dans les projets d’infrastructures pour la période 2021-2027).
1. L'équipe de l'OCDE qui soutient ce projet comprend la Direction de la gouvernance publique, la Direction de l'environnement et le Forum international des transports.
Source : UE (2021) Orientations techniques pour la prise en compte des enjeux climatiques dans les projets d’infrastructures pour la période 2021-2027.
La gouvernance des infrastructures est également nécessaire pour une prise de décision efficace et durable et l’acceptation des solutions écologiques. Ainsi, les solutions fondées sur la nature offrent des moyens novateurs de développer la durabilité et la résilience des infrastructures. De tels systèmes soutiennent tant les écosystèmes naturels que ceux aménagés qui fournissent des services d’infrastructure entraînant moins d’impacts négatifs sur l’environnement que les infrastructures traditionnelles « grises ». Toutefois, faute d’une gouvernance appropriée des infrastructures, de nombreuses solutions fondées sur la nature risquent de ne donner lieu qu’à des interventions ponctuelles et d’une échelle relativement modeste. Pour tirer pleinement parti de ces approches novatrices, les gouvernements doivent bien en comprendre les utilisations et les limites et moderniser leurs systèmes de prise de décision afin de tenir compte de solutions plus souples et durables.
Au cours de la phase d’exploitation et d’entretien, la surveillance des infrastructures joue un rôle déterminant pour en garantir la qualité et la résilience, ainsi que le suivi des progrès réalisés dans la réalisation des objectifs d’émissions climatiques. Un contrôle et un entretien efficients des infrastructures peuvent contribuer à ralentir la détérioration de ces actifs, à prévenir la perte de leur valeur et à réduire les coûts. Or les restrictions budgétaires exercent une pression croissante sur les collectivités locales afin qu’elles réduisent leurs coûts, ce qui se traduit parfois par un défaut d’inspection et de contrôle des infrastructures. Dans le même temps, les attentes des consommateurs en matière de qualité de service augmentent, les usagers des infrastructures réclamant des informations et une gestion de meilleure qualité.
L’utilisation des « mégadonnées » et de l’analyse de scénarios pour améliorer la surveillance des infrastructures contribuera à rendre possibles des interventions plus écologiques et plus agiles qui garantiront des services d’infrastructure efficaces, sûrs et accessibles. La nouvelle approche de l’OCDE en matière de gouvernance des infrastructures préconise l’utilisation des nouvelles technologies et des données, ainsi que des solutions fondées sur la nature pour les infrastructures (OCDE, 2021[78]). Elle montre comment les nouvelles technologies et la science des données transforment la façon dont les infrastructures sont conçues, exploitées et entretenues. En particulier, le contrôle en temps réel améliore la résilience des infrastructures face aux catastrophes liées au climat en garantissant le fonctionnement continu des réseaux stratégiques tels que les services collectifs, les transports et les télécommunications. L’automatisation et les smartphones réduisent les coûts de surveillance, offrant des alternatives à la conception, à la construction et à la maintenance traditionnelles des infrastructures, tandis que la maintenance prédictive permet de prolonger la durée de vie des actifs, tout en garantissant également une allocation efficiente du budget disponible et en évitant le renouvellement de projets coûteux et polluants. En outre, des capteurs et moniteurs compatibles InfraTech peuvent compléter les données administratives d’entrée et de sortie par de nouvelles données basées sur les résultats pour la surveillance et la prise de décision. Pourtant, l’adoption des technologies numériques appelle les administrations publiques à relever une série de défis, notamment des obstacles juridiques (par exemple, la qualité et l’adéquation des cadres réglementaires), des obstacles institutionnels (par exemple, les structures régissant le fonctionnement des régulateurs), la nécessité de revoir les processus décisionnels (en intégrant par exemple la gestion des risques) ou encore des risques technologiques (eu égard notamment au respect de la vie privée, à la protection des données et la sécurité).
Compte tenu des contraintes actuelles et de l’impact des programmes d’incitation à venir sur les budgets publics, des financements alternatifs et diversifiés sont nécessaires. Le traitement budgétaire joue un rôle crucial dans la planification et la garantie d’un financement stable des infrastructures, et les interventions publiques devraient se concentrer sur la création de systèmes de prime d’encouragement pour mieux mobiliser le financement privé. Les différents modèles de prestation (tarifs d’achat, tarifs préférentiels, quotas, marchés publics) et la qualité des régimes de soutien définissent le rôle du secteur privé dans la fourniture de services de construction, d’entretien et d’exploitation. Le traitement comptable des actifs, quant à lui, peut offrir aux propriétaires d’infrastructures des incitations à assurer la maintenance des actifs. L’adoption d’une approche fondée sur le cycle de vie pour la planification des infrastructures permettra non seulement aux États de mieux attirer les soutiens à long terme, tels que des investisseurs institutionnels par exemple, mais elle les aidera également à intégrer dans leur propre prise de décision une perspective à plus long terme sur les impacts environnementaux, ce qui aura pour effet de réduire les coûts globaux des projets.
Il est essentiel de veiller à ce que les investissements du secteur privé dans les infrastructures publiques favorisent la réalisation des objectifs écologiques, ce qui nécessite des adaptations de la part du secteur public comme du secteur privé. D’un côté, le secteur public doit fournir aux investisseurs dans les infrastructures des informations sur les objectifs de l’action publique et les caractéristiques requises des actifs en termes d’impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) à long terme. De l’autre, les investisseurs doivent intégrer dans leurs cadres d’investissement les considérations ESG afin de gérer les risques et les opportunités qui y sont liés (OCDE, 2021[79]). Le secteur public peut appuyer cela en fixant des objectifs environnementaux sur lesquels les investisseurs puissent aligner leurs stratégies d’investissement. Par exemple, grâce à la taxinomie de l’UE, il est possible de classer certaines activités économiques comme écologiquement durables. Du point de vue du secteur public, plusieurs normes et outils internationaux ont été élaborés pour intégrer les aspects de durabilité et de résilience dans le développement des infrastructures. Ces outils encouragent et récompensent les projets qui ont des impacts positifs sur le climat, l’environnement et la société, tout en réduisant leurs impacts négatifs. Les normes communes permettent aux administrations publiques : (i) d’identifier les impacts d’un projet ; (ii) d’introduire des mesures d’atténuation pour faire face à ces impacts ; et (iii) lorsque cela est possible, de reconnaître les possibilités d’améliorer la performance du projet en matière de durabilité (Commission européenne, 2021[80]).
Malgré une large reconnaissance de l’importance des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance et un intérêt croissant, tant de la part des administrations publiques que des investisseurs institutionnels, pour l’intégration de ces facteurs au sein des processus de prise de décision concernant l’investissement dans les infrastructures, l’application de ces critères dans l’évaluation des actifs n’en est qu’à ses débuts. Comme le soulignent les Principes du G20 en matière d’investissements dans les infrastructures de qualité élaborés en 2019, les impacts positifs et négatifs des projets d’infrastructure sur les écosystèmes, la biodiversité, le climat, les conditions météorologiques et l’utilisation des ressources devraient être incorporés dans le processus d’investissement dans les infrastructures. Une telle démarche peut être soutenue par un meilleur dialogue public-privé à propos de la convergence des normes ESG. À terme, la mise à disposition d’informations plus standardisées permettrait aux administrations publiques de mieux comprendre et de mieux répondre à l’intérêt des investisseurs.6
Tirer parti du pouvoir d’achat du secteur public : les passations de marchés écologiques
Les marchés publics sont l’une des façons dont le secteur public a un impact concret sur l’environnement dans lequel vivent les citoyens. Compte tenu de l’importance économique des marchés publics, de la position de l’État comme principal client du secteur privé dans de nombreux secteurs d’activité et de la variété considérable des achats publics, des stratégies de marchés publics fondées sur les résultats peuvent contribuer de manière significative à des sociétés et des économies plus vertes. De plus, tous les niveaux d’administration ont un rôle à jouer.
Les marchés publics constituent un outil stratégique important pour réaliser les objectifs environnementaux du gouvernement. À l’échelle des 22 pays de l’OCDE-UE pour lesquels des données sont disponibles, les dépenses liées aux marchés publics ont progressé de 13.7 % du PIB en 2019 à 14.9 % du PIB en 2020 (OCDE, 2021[6]). Les gouvernements peuvent montrer la voie à suivre en matière d’action environnementale en adoptant une approche plus écologique à l’égard des achats publics. Des pays ont déjà pris des mesures pour aligner leurs dépenses effectuées au titre de marchés publics sur des stratégies de lutte contre la crise climatique. Les États-Unis, par exemple, ont demandé au gouvernement fédéral, par le biais d’un décret, d’aligner sa gestion des marchés publics et des biens immobiliers fédéraux afin de parvenir à une économie fondée à 100 % sur l’énergie propre d’ici 2035 et d’atteindre l’objectif de neutralité en gaz à effet de serre au plus tard en 2050 (Bureau exécutif du Président, États-Unis, 2021[81]). De même, en Slovénie, l'adoption du Décret sur les marchés publics verts en 2011 oblige les pouvoirs adjudicateurs à respecter les critères environnementaux énoncés lorsqu'ils organisent une procédure de marché public pour l'un des 22 sujets écologiques spécifiés par le décret.
Les marchés publics constituent une incitation majeure pour les entreprises innovantes en leur permettant d’investir dans la R-D nécessaire sans subir l’incertitude de la demande. Lorsque les administrations publiques regroupent les besoins publics dans des marchés publics, elles donnent aux fournisseurs une certitude plus solide sur la demande en matière de produits écologiques innovants. Le secteur public peut créer, intensifier ou consolider des marchés verts innovants. Au-delà de rendre les opérations publiques plus respectueuses de l’environnement, l’administration publique joue également le rôle de consommateur principal et ces pratiques se diffusent ensuite sur les marchés et auprès des consommateurs privés.
Pour tirer parti du pouvoir d’achat des pouvoirs publics de manière à obtenir des avantages en matière d’environnement, une approche à l’échelle de l’ensemble de l’administration est nécessaire, étant donné que les dépenses liées aux marchés publics sont largement décentralisées dans les pays de l’OCDE : en effet, les administrations publiques locales sont responsables en moyenne de 63 % des dépenses totales liées aux marchés publics. Il est important de mettre au point une stratégie ou un cadre permettant de soutenir les objectifs environnementaux dans les marchés publics afin de garantir la cohérence et l’homogénéité des pratiques en matière de marchés publics à tous les niveaux de l’administration. Tous les pays de l’OCDE sont dotés d’une telle stratégie ou d’un tel cadre réglementaire pour promouvoir les objectifs environnementaux dans le cadre des marchés publics.
L’intégration de règles et de normes dans les évolutions au sein des offres peut contribuer à favoriser l’innovation et la durabilité dans le cadre des marchés publics. C’est le cas aux Pays-Bas, où seul le ciment durable est autorisé dans les projets de construction et où la méthodologie de l’offre économiquement la plus avantageuse est utilisée pour récompenser les offres qui incluent des réductions d’émissions et un impact environnemental global plus faible. De même, depuis 2021 au Royaume-Uni, les soumissionnaires de grands marchés publics (ceux supérieurs à 5 millions GBP par an) sont tenus de produire des plans de réduction des émissions de carbone indiquant comment l’organisation entend atteindre l’objectif de la neutralité en carbone d’ici à 2050.
Dans les secteurs où les pouvoirs publics constituent les consommateurs les plus importants, des normes élevées fixées en matière de durabilité dans le cadre des processus de passation de marchés profiteront également aux autres catégories de consommateurs. Cette situation pourrait se produire dans des secteurs tels que la santé et l’éducation, pour lesquels l’allocation des ressources peut être améliorée (OCDE, 2006[82]) (Sandra Black, 2021[83]). Les économies d’échelle peuvent également créer un marché qui rend les produits plus responsables, tels que les produits à faible taux d’émission, plus accessibles aux consommateurs (OCDE, 2019[84]). Dans ce contexte, la stratégie canadienne en matière de marchés publics écologiques (Gouvernement du Canada, 2018[85]) souligne que, lorsque des décisions sont prises pour atteindre des résultats environnementaux spécifiques par le biais des marchés publics, on s’attend à ce que ces décisions : i) permettent de faire ressortir un leadership sur la question de l’environnement et incitent l’industrie et les citoyens à utiliser des biens, des services et des processus plus respectueux de l’environnement et résilients au changement climatique ; et ii) stimulent l’innovation, le développement du marché et la demande de biens et de services plus respectueux de l’environnement, rendant ceux-ci disponibles et courants pour d’autres secteurs de la société (OCDE, à paraître[86]).
La passation de marchés pour les infrastructures numériques peut contribuer à une administration numérique verte en donnant la priorité aux fournisseurs qui réduisent leur empreinte climatique et en les responsabilisant dans le cadre des processus contractuels. Les pouvoirs publics peuvent créer des incitations à atteindre des émissions numériques non polluantes, par exemple en sélectionnant et en approuvant des fournisseurs respectueux de l’environnement et en favorisant la collaboration public-privé pour identifier et approuver des technologies numériques respectueuses de l’environnement qui contribuent à la transition écologique. La demande du secteur public peut avoir une incidence sur le renforcement des normes, notamment lorsque des critères environnementaux communs sont adoptés par de nombreux acheteurs publics. L’expérience montre l’importance de la participation sur le marché pour garantir que les fournisseurs sont en mesure de répondre aux exigences et que l’impact sur les coûts du cycle de vie des TIC est compris par l’organisation acheteuse. Par exemple, les critères irlandais de marchés publics écologiques pour les centres de données abordent un certain nombre d’aspects de la conception, de la durée de vie opérationnelle et de la gestion de la fin de vie qui peuvent réduire les coûts du cycle de vie et l’impact environnemental. Cette question est d’autant plus importante que la demande croissante de services auprès des centres de données a également des répercussions majeures sur l’environnement, notamment la consommation d’électricité des TIC dans les centres de données, les émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre (GES) liées à l’exploitation des centres de données ou l’utilisation de gaz à fort potentiel de réchauffement planétaire (PRP) dans les systèmes de refroidissement.
L’intégration des objectifs écologiques dans les pratiques de passation de marchés des pouvoirs publics reste cependant soumise à plusieurs défis :
La mise en œuvre efficace de ces stratégies et de ces cadres repose sur une main-d’œuvre en charge de la passation des marchés publics qui possède les aptitudes et les compétences nécessaires à la gestion d’achats toujours plus complexes, qu’il s’agisse de définir des critères impliquant l’évaluation des externalités environnementales ou de collaborer avec le marché en vue d’identifier des solutions aux besoins publics plus vertes. Plusieurs pays enregistrent des progrès à cet égard. La Commission européenne soutient ses États membres en développant un cadre de compétences évolutif pour les acheteurs publics, qui peut être adapté aux objectifs spécifiques promus par les pays.
Il est nécessaire que les marchés publics reflètent plus fidèlement les coûts du cycle de vie et les impacts environnementaux des biens et services achetés afin d’inciter le secteur privé à entrer en concurrence sur la dimension verte de leurs offres. En raison de l’asymétrie d’information sur les incidences environnementales précises des biens, services et travaux contractés et de l’absence d’instruments unifiés de tarification dans le domaine du changement climatique, les administrations publiques sont souvent incapables d’attribuer les marchés publics sur la base des coûts du cycle de vie (CCV) et des externalités. Une participation précoce au marché peut aider les pouvoirs publics à recueillir des données permettant de concevoir des outils de calcul des CCV, en comparant les différents impacts environnementaux des solutions proposées par les fournisseurs, et pour attribuer des marchés publics en tenant compte des avantages écologiques. Par exemple, le réseau Procura+ European Sustainable Procurement Network a mis au point un outil permettant de calculer les CCV et les émissions de CO2 en indiquant les informations que doit fournir le secteur privé en amont de la conception par les pouvoirs publics des cadres d’évaluation pour l’attribution des marchés publics. Une participation précoce au marché peut également aider les acheteurs publics à mettre en place des chaînes d’approvisionnement plus durables respectant les normes environnementales, en particulier lorsque l’application est assurée par des stratégies et des pratiques globales de gestion des contrats.
Les opérations de passation de marchés publics doivent garantir que tous les participants impliqués dans la chaîne d’approvisionnement respectent les mêmes règles, de sorte à agir comme un aiguillage positif, favorisant un environnement économique propice à une « course à l’excellence ». Un rapport récent de l’OCDE met en exergue que les sous-traitants et les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement souvent ne sont pas soumis aux mêmes obligations strictes en matière de critères environnementaux que les principaux fournisseurs (OCDE, 2020[87]). Plus particulièrement, la reconnaissance des efforts déployés par les entreprises pour intégrer des normes de conduite responsable des entreprises (CRE), y compris en matière environnementale, dans leurs modèles d’entreprise lorsqu’elles répondent à des marchés publics, peut contribuer à encourager des opérations de marché public plus écologiques (OCDE, à paraître[86]).
Les gouvernements désireux d’élargir l’utilisation de la passation de marchés publics écologiques devraient combler les lacunes en matière de données qui empêchent actuellement de mesurer de manière globale l’impact des stratégies de passation de marchés publics écologiques, non seulement pour permettre de comprendre les avantages environnementaux résultant d’activités publiques plus écologiques, mais aussi pour développer des économies plus durables. La Corée est actuellement l’un des rares pays de l’OCDE en capacité de mesurer l’impact des pratiques de passation de marchés à l’échelle des institutions publiques, d’évaluer la création d’emplois verts par le biais des passations de marchés publics et de rendre compte de ces résultats par rapport aux données antérieures (Encadré 4.7).
Encadré 4.7. Suivi de l’impact des marchés publics écologiques en Corée
La République de Corée est un pionnier en matière d’utilisation et d’interconnexion de systèmes et de plateformes de marchés publics en ligne pour la mise en œuvre et le suivi des marchés publics. La mise en œuvre précoce du système coréen de marchés publics en ligne (KONEPS), de centres commerciaux électroniques KONEPS et du système d’information sur les marchés publics écologiques de l’Institut coréen d’industrie et de technologies environnementales (KEITI), qui s’ajoute aux tout derniers développements du système de données sur les marchés publics, permet la collecte et la communication automatiques de données sur les marchés publics écologiques pour tous les niveaux de l’administration.
Une caractéristique importante des marchés publics écologiques en République de Corée tient à l’évaluation des instances d’achat à l’aune de leurs antécédents en la matière. La République de Corée encourage également l’association des fournisseurs et préconise des marchés publics écologiques dans le secteur privé, par des accords volontaires, Eco-Expo Corée et autres, répondant ainsi à un objectif de la politique publique de l’industrie verte qui vise l’expansion des marchés et entreprises écologiques coréens sur le marché mondial.
La République de Corée est, avec le Japon, l’un des rares pays à mesurer chaque année les résultats environnementaux des marchés publics écologiques.
Source : adapté de (PNUE, 2019[88])
Passer résolument à la « budgétisation verte »
Les budgets peuvent être un instrument très efficace pour aligner l’action publique sur les engagements environnementaux et climatiques aux niveaux national et mondial. Le terme « budgétisation verte » renvoie à l’utilisation d’outils d’élaboration de politiques budgétaires qui permettent aux responsables publics de mieux comprendre les impacts environnementaux et climatiques des choix budgétaires et les aident à atteindre les objectifs climatiques et environnementaux (OCDE, 2021[89]).
Des pratiques de budgétisation verte se généralisent dans les pays de l’OCDE. L’indicateur composite de l’OCDE sur les pratiques de budgétisation verte note qu’en 2021, 14 des 38 pays de l’OCDE (37 %) ont déclaré pratiquer la budgétisation verte (voir les indicateurs clés - Graphique 4.2, Panel A). Parmi ces 14 pays, les pratiques varient en termes de dispositifs institutionnels, d’outils, de mécanisme de reddition des comptes et de cadre d’action favorable : il n’existe pas d’approche universelle en matière de budgétisation verte. Les méthodes de mise en œuvre de la budgétisation verte ont beau être spécifiques à chaque pays, il n’en reste pas moins que les résultats de chaque élément de l’indicateur composite susmentionné sont raisonnablement similaires (Blazey, A. and Lelong, M., 2022[90]). Le nombre de pays pratiquant la budgétisation verte continue à augmenter.
Plusieurs pays ont eu recours à la budgétisation verte dans leurs efforts de relance liée au COVID-19, en donnant la priorité à des choix de politique verte pour promouvoir des objectifs environnementaux et accélérer les changements structurels vers la transition à faible émission de carbone (Graphique 4.7).
Les gouvernements ont différents moyens d’intégrer les considérations liées au changement climatique et à la protection de l’environnement dans l’élaboration des politiques budgétaires (Encadré 4.8). Il peuvent s’employer notamment : (i) à « écologiser » leurs cadres de politique budgétaire à moyen terme, en mettant en évidence les liens entre l’économie, la politique budgétaire et l’environnement ; (ii) à intégrer la question du changement climatique dans l’évaluation et la gestion des risques budgétaires ; (iii) à marquer les postes budgétaires qui contribuent - positivement ou négativement - à l’environnement ; (iv) à évaluer les politiques et les impacts sur l’environnement ; (v) à mettre en place des revues de dépenses « vertes » ; et (vi) à se doter d’états comptables « verts » (OCDE, 2021[89]) (Tableau 4.1). Pour aider les pays à développer leurs pratiques de budgétisation verte, la Commission européenne (CE), le Fonds monétaire international (FMI) et l’OCDE ont travaillé conjointement à définir les principaux éléments et caractéristiques de ces pratiques (Commission européenne/FMI/OCDE, 2021[91]). L’OCDE a également travaillé avec la CE sur un inventaire de pratiques de budgétisation verte au niveau local dans les pays de l’OCDE et de l’Union européenne afin d’aider les administrations infranationales à adopter ou améliorer la budgétisation verte (OCDE, 2022[92]).
Encadré 4.8. Cadre de l’OCDE pour la budgétisation verte
Le cadre de l’OCDE pour la budgétisation verte comprend quatre éléments fondamentaux (Graphique 4.8). Chaque élément fondamental permet de garantir l’intégration de la budgétisation verte dans le processus budgétaire des pouvoirs publics.
Dispositifs institutionnels : en lien avec les objectifs nationaux d’un pays en matière de climat et d’environnement. La budgétisation verte permet d’atteindre ces objectifs et se traduit par des instruments législatifs et des responsabilités institutionnelles qui sont intégrés dans le processus budgétaire.
Méthodes et outils: en lien avec les moyens par lesquels les pays peuvent analyser, mesurer, prévoir, modéliser et évaluer les politiques et propositions relatives aux objectifs climatiques et environnementaux du cadre stratégique.
Redevabilité et transparence : en lien avec les mécanismes utiles pour asseoir la budgétisation verte et en assurer la crédibilité, avec par exemple l’exercice d’un contrôle par le Parlement et des organes de surveillance, tels que les institutions budgétaires indépendantes.
Cadre d’action budgétaire favorable : en lien avec les pratiques de gouvernance budgétaire pertinentes au sein du ministère des Finances et des autres ministères pour donner toutes les chances à la budgétisation verte de produire des résultats.
Tableau 4.1. Outils communément utilisés par les pays qui pratiquent la budgétisation verte, 2021
Autriche |
Canada |
Colombie |
Danemark |
France |
Irlande |
Italie |
Luxembourg |
Mexique |
Pays-Bas |
Norvège |
Portugal |
Suède |
Royaume-Uni |
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Évaluations d’impact environnemental |
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Cotation environnementale du budget |
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Analyse coûts-avantages pour l’environnement |
Pour certaines mesures budgétaires individuelles |
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Pour l’ensemble des mesures budgétaires |
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Bilan carbone |
Pour certaines mesures budgétaires individuelles |
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Pour l’ensemble des mesures budgétaires |
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Ensemble du budget |
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Autres outils |
Tarification de la biodiversité/des services écosystémiques |
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Instruments de tarification du carbone (comprenant la taxation des carburants et du carbone et les systèmes d’échange de quotas d’émission) |
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Utilisation d’un prix virtuel du carbone pour évaluer les politiques et investissements publics |
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Réforme de la fiscalité environnementale |
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Examen régulier des dépenses fiscales et des subventions aux effets dommageable pour l’environnement |
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Intégration des considérations climatiques dans l’analyse de viabilité budgétaire à long terme |
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Bilan écologique |
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Audit environnemental ou validation du budget |
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Perspective écologique dans la définition de la performance ou la budgétisation de la performance |
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Perspective écologique dans l’examen des dépenses |
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Source : (OCDE, à paraître[94])
Malgré son utilisation croissante, les pays de l’OCDE restent confrontés à toute une série d’obstacles dans leur mise en œuvre de la budgétisation verte. Les plus courants tiennent à l’absence de méthodologies pour évaluer les effets environnementaux, à l’absence de cadre budgétaire pluriannuel moderne lié à la planification stratégique, au déficit de volonté politique de mettre en œuvre la budgétisation verte, et à un manque de temps et de personnel, avec des lacunes de connaissances et d’expertise technique pertinentes (Commission européenne/FMI/OCDE, 2021[91]). L’OCDE travaille sur le sujet avec les pays membres dans le cadre du Collaboratif de Paris sur les budgets verts, plateforme d’échange de bonnes pratiques et de regroupement de ressources sur la manière dont la budgétisation verte peut éclairer les décisions en matière de dépenses publiques (OCDE, 2021[89]) (Encadré 4.9).
Encadré 4.9. Collaboratif de Paris sur les budgets verts
Le Collaboratif de Paris sur les budgets verts a été lancé par l’OCDE lors du sommet One Planet qui s’est tenu à Paris le 12 décembre 2017. Il vise à créer de nouveaux outils, de nature innovante, permettant d’évaluer et de guider les améliorations à apporter afin d’assurer la mise en conformité des processus de dépenses et de recettes publiques au niveau national avec les objectifs climatiques et d’autres objectifs environnementaux. Il s’agit d’une étape d’une importance cruciale pour réaliser l’un des objectifs au centre de l’Accord de Paris sur le changement climatique, mais aussi des Objectifs d’Aichi pour la biodiversité et des Objectifs de développement durable des Nations unies – en alignant les cadres d’action nationaux et les flux financiers sur une trajectoire menant à de faibles émissions de gaz à effet de serre et à un développement écologiquement durable.
Source : (OCDE, 2021[95])
Le changement climatique induit des risques sur le plan de l’environnement, de la biodiversité et du climat pour les pays qui, à leur tour, ont des répercussions sur le budget et la dette. Les réponses de la politique budgétaire tendent à augmenter les déficits et les dettes publics. Pour que le cadre budgétaire à moyen terme soit crédible, les pouvoirs publics doivent renforcer la gouvernance budgétaire et décomposer et gérer l’intégration de ces risques. L’intégration en amont des risques de catastrophe et des risques climatiques dans les cadres de planification budgétaire et de budgétisation contribue à rendre les pays plus résilients sur le plan financier (OCDE/La Banque mondiale, 2019[96]).
À court terme, la fiscalité verte crée de nouvelles recettes pour les pays. Ces nouvelles recettes peuvent ensuite être utilisées de plusieurs manières, par exemple pour diminuer d’autres impôts, comme la fiscalité du travail, ou pour étendre les mesures budgétaires compensatoires à destination des ménages. Elles permettent également d’intensifier les dépenses consacrées aux investissements dans les secteurs verts, à l’innovation ou au financement des objectifs de développement durable (ODD). En France, par exemple, ces recettes ont servi à accroître le financement des énergies renouvelables au moyen d’un compte d’allocation spéciale.
Une meilleure prise en compte des considérations liées à l’environnement offre la possibilité d’intégrer les prévisions climatiques et environnementales dans l’élaboration des plans macro-budgétaires. La capacité des administrations publiques à estimer la quantité et l’incidence des dépenses liées au climat à moyen terme, puis à lier ces estimations à une base solide de prévisions macroéconomiques et budgétaires, est essentielle pour la budgétisation verte. Cependant, à quelques exceptions notables près, de nombreux modèles de prévision macro-budgétaire ne sont pas conçus pour tenir compte des coûts économiques, budgétaires et financiers imminents résultant du changement climatique. La mise au point d’outils de prévision permettant de refléter fidèlement les liens entre la politique budgétaire, l’économie et l’environnement pourrait être considérée comme une priorité étant donné l’importance accrue des objectifs liés au climat et à l’environnement dans le budget.
Les pays de l’OCDE commencent tout juste à s’intéresser à la surveillance de la comptabilité verte. Malgré la multiplication des actions et des projets mis en œuvre sur l’environnement et le climat, certains d’entre eux peinent à les mesurer en termes comptables et à en estimer la valeur. Les processus de comptabilité générale, analytique et budgétaire sont complémentaires et contribuent à assurer la crédibilité du budget et de son exécution. Bien que les normes comptables internationales prévoient des méthodes de suivi des actifs et des passifs environnementaux (soit au moyen de la comptabilité traditionnelle soit par la création de nouvelles catégories de comptes), peu de pays ont mis en place des systèmes de comptabilité verte spécifiques.
La prise en compte de l’environnement dans les données financières publiques devrait contribuer à améliorer la gouvernance budgétaire et financière des pays. En outre, l’adaptation de la comptabilité aux questions environnementales doit également se faire en phase avec des réformes comptables plus globales telles que la comptabilité d’exercice. La comptabilité verte pourrait être un levier puissant pour encourager les gouvernements et les administrations à accélérer leur adoption d’une budgétisation verte.
Pour s’assurer que le cadre budgétaire reste crédible et réduise l’incidence des imprévus à effets négatifs, les administrations publiques doivent analyser et gérer les risques liés au changement climatique et à la dégradation de l’environnement. Le changement climatique et les politiques connexes ont une incidence sur les risques de viabilité de la dette publique. À mesure que les événements météorologiques extrêmes s’accroissent en fréquence et en intensité partout dans le monde, les coûts économiques pour les secteurs public et privé augmentent eux aussi. Les États disposent de plusieurs moyens pour évaluer et gérer ces types de risques budgétaires (OCDE, 2021[89]). L’analyse budgétaire à moyen terme, les scénarios macro-budgétaires et les tests de résistance peuvent constituer des outils utiles. Une analyse de la viabilité à long terme tenant compte des questions environnementales et climatiques permet d’identifier les réformes de gouvernance nécessaires au sein de l’administration. Les résultats de ces analyses devraient inspirer les stratégies à moyen terme et les cadres budgétaires des pays, et y être intégrés.
Réinitialiser la politique réglementaire en faveur de la transition verte
La réglementation constitue un levier public fondamental en faveur de l’action climatique et de la transition verte. Pour autant, pour s’adapter à l’évolution des priorités des administrations publiques, la politique réglementaire doit elle aussi évoluer, en ajustant les outils traditionnels de la gestion réglementaire et en adoptant de nouvelles approches pour réaliser les objectifs liés à l’environnement.
La politique réglementaire fournit un ensemble d’outils efficaces qui, si on les applique à toutes les étapes du cycle de la politique réglementaire, devraient aider les gouvernements à mettre l’économie et la société sur une voie résiliente, durable et neutre sur le plan climatique. Au nombre de ces outils figurent les bonnes pratiques en matière de réglementation, comme les analyses d’impact de la réglementation (AIR), l’association des parties prenantes et l’évaluation ex post des réglementations existantes, qui doivent être adaptées aux défis et aux opportunités découlant des évolutions porteuses de transformation et plus axées sur les objectifs climatiques. Des pratiques plus récentes, comme la coopération réglementaire internationale (CRI), peuvent améliorer l’efficacité des réglementations qui visent à relever un défi transfrontière tel que le changement climatique (voir Domaine clé n° 1). Enfin, une plus grande mise en lumière des avantages des réglementations, une meilleure analyse des effets distributifs et de l’égalité et la présentation de données factuelles pour promouvoir les valeurs convenues par la société sont autant de pratiques susceptibles d’améliorer l’utilisation de mesures réglementaires en vue d’atteindre des objectifs verts.
L’AIR peut contribuer à assurer la cohérence des politiques et l’intégration des préoccupations environnementales dans différents domaines d’action. L’intégration des considérations liées au climat au stade de l’évaluation d’impact ex ante est essentielle en vue de l’élaboration de nouvelles lois pour contribuer à la réalisation des objectifs climatiques. Une série de questions doivent être prises en compte dans ces évaluations, notamment l’analyse des incidences climatiques et environnementales, l’établissement d’indicateurs de référence appropriés (les coûts de l’inaction), la durabilité et le capital naturel, les écosystèmes et la protection de la biodiversité, l’évaluation de la santé et le coût social des émissions de carbone. En outre, l’évaluation des impacts distributifs (à savoir l’identification des communautés ou des zones géographiques qui supporteront les coûts ou qui bénéficieront des avantages d’une réglementation) prend de plus en plus d’importance à la lumière de la crise climatique. Ces dernières années, les pays membres de l’OCDE et l’Union européenne ont exigé une prise en compte plus exhaustive des impacts environnementaux potentiels lors de l’élaboration des règles (voir les indicateurs clés - Graphique 4.2, Panel C). En général, les décideurs ont reçu des informations méthodologiques sur les éléments à inclure dans l’évaluation des impacts environnementaux potentiels et la manière de le faire. L’association de toutes les parties prenantes par le biais d’une consultation publique contribuera à garantir que l’action publique est appropriée, efficace et efficiente. Elle contribuera également à une meilleure acceptation et au respect des mesures réglementaires, parfois douloureuses, par toutes les parties prenantes. Un certain nombre de propositions de politiques liées à l’environnement ont été améliorées en conséquence de l’AIR (Encadré 4.10) et plusieurs pays progressent dans l’utilisation de cet outil pour identifier les effets sexospécifiques des politiques environnementales (OCDE, 2021[66]) (Encadré 4.11).
Les pouvoirs publics devront également veiller à ce que les innovations aptes à répondre aux problèmes environnementaux et sociaux les plus urgents ne soient pas freinées par des réglementations devenues obsolètes. Des pratiques agiles, souples et mieux coordonnées en matière de gouvernance et de réglementation sont nécessaires pour libérer le potentiel d’innovation tout en préservant les objectifs sociétaux interdépendants tels que la viabilité écologique, la santé et la sécurité et la justice sociale. La nouvelle Recommandation de l’OCDE en faveur d’une gouvernance réglementaire agile permettant de mettre l’innovation à profit fournit des orientations à ce sujet. L’objectif est d’aider les administrations publiques à adapter les outils de gestion de la réglementation pour s’assurer de l’adéquation des réglementations aux réalités de demain ; de mettre en place les bases institutionnelles permettant la coopération et les approches conjointes au sein des pays et entre eux ; de développer des cadres de gouvernance pour permettre l’élaboration d’une réglementation agile et adaptative ; et de s’assurer que l’application de la réglementation répond aux nouveaux besoins.
Des règles et des processus proportionnés aux risques sont essentiels pour faciliter la transition vers des sources d’énergie à bas carbone et réduire la consommation d’énergie. Les réglementations en faveur de l’efficacité énergétique et de la réduction des émissions doivent être appliquées de manière appropriée. Des réglementations rigides et frileuses à l’égard des risques peuvent bloquer le déploiement des technologies et des infrastructures de réduction des émissions de carbone : il est essentiel de rationaliser les règles techniques et les exigences d’autorisation pour garantir leur efficacité à prévenir et gérer les risques, mais de la manière la plus souple et la plus favorable à l’innovation possible. Cela signifie que des exigences d’autorisation ne doivent être imposées que lorsque les risques sont suffisamment élevés pour les justifier, et que ces exigences ne devraient pas être plus pesantes que celles appliquées aux technologies à forte intensité de CO2 pour un risque comparable. Cela suppose également que les processus doivent être aussi rationalisés que possible, et que des orientations claires et simples doivent être données aux régulateurs de première ligne et aux opérateurs économiques. En outre, l’inadéquation des règles et des procédures de mise en œuvre (autorisation, certification, inspection et mise en application) peut compromettre le succès des réglementations relatives à la maîtrise de l’énergie (des véhicules, des bâtiments, des appareils), et cela vaut également pour les règles visant à limiter les pratiques environnementales préjudiciables, par exemple dans le secteur des industries extractives. Il est essentiel de mettre en place des systèmes de prestation de l’action réglementaire axés sur les résultats, flexibles, fondés sur des données et faisant appel aux technologies. Il s’agit notamment d’une meilleure détection des problèmes liés à l’environnement grâce à la surveillance à distance des émissions, de la réallocation des ressources d’inspection et de mise en application aux zones de risque les plus « néfastes pour le climat », d’exigences en matière d’essai et de certification fondées sur des scénarios « réels » et à une meilleure surveillance du marché pour garantir que la certification par des tiers reste fiable, etc.
Il est essentiel de réaliser systématiquement une évaluation et un examen de la mise en œuvre ex post afin de faire en sorte que les lois en vigueur existantes soient conformes aux objectifs climatiques et environnementaux convenus au niveau national et mondial. Le nombre de lois et de règlements a connu une croissance rapide dans la plupart des pays. Cependant, les réglementations existantes n’ont pas toujours été soumises à une évaluation ex ante rigoureuse, et même lorsque c’est le cas, tous les effets ne peuvent être connus à l’avance. Les réglementations doivent être examinées périodiquement, à la fois pour tenir compte du fait que l’environnement initial justifiant la réglementation peut avoir changé, et pour regarder comment les réglementations ont fonctionné réellement dans la pratique. L’évaluation des réglementations existantes peut par ailleurs s’avérer riche d’enseignements quant aux moyens d’améliorer l’élaboration et l’administration des nouvelles réglementations (OCDE, 2020[97]).
Encadré 4.10. Comment l’AIR a contribué à améliorer les propositions de réglementation liées à l’environnement
Le gouvernement néo-zélandais a proposé un ensemble de mesures visant à restaurer et à protéger la santé des voies navigables du pays en renforçant le Te Mana o Te Wai en tant que cadre de gestion de l’eau douce1 ; en améliorant la santé de l’écosystème ; en renforçant la protection des zones humides et des estuaires ; en protégeant les sources d’eau potable ; en améliorant les pratiques en matière de gestion de l’eau et d’exploitation agricole ; en contrôlant les activités agricoles à haut risque et en limitant l’intensification agricole. Les politiques proposées ont été modifiées de manière significative à la lumière des commentaires de la consultation sur la version préliminaire d’AIR, des recommandations du groupe consultatif indépendant et en réponse aux nouveaux défis de mise en œuvre liés à la pandémie de COVID-19. La proposition mise à jour visait à protéger les masses d’eau douce en prévoyant des objectifs et des limites plus axés sur la conservation de l’environnement, à faire cesser toute dégradation supplémentaire des masses d’eau douce et à accroître les efforts de restauration aux endroits voués à ne plus pouvoir faire face aux demandes d’eau actuelles que les communautés et les conseils régionaux avaient identifiés.
Le ministère danois de l’Environnement a modifié la loi sur la protection de l’environnement en adoptant un décret sur la gestion des déchets. Le règlement d’application relatif à la gestion des déchets avait été initialement rédigé de telle sorte à soumettre les entreprises à une charge administrative de 24 millions DKK. À la lumière des résultats d’une AIR portant sur les contraintes administratives pesant sur les entreprises, le règlement a été réécrit pour limiter son champ d’application à un plus petit nombre d’entreprises, réduisant ainsi la charge à moins de 4 millions DKK.
1. Te Mana o te Wai se rapporte à la valeur essentielle de l'eau en tant que ressource précieuse. Ce concept souligne l'importance de maintenir l'intégrité et la santé de l'eau avant de la fournir pour l'usage humain, par le biais d'une hiérarchie d'obligations à trois niveaux : premièrement, l'obligation concerne l'eau elle-même, pour protéger sa santé et son mauri ; deuxièmement, l'obligation consiste à fournir les besoins humains essentiels, comme l'eau potable ; troisièmement, pour d'autres usages.
Source : Enquête de 2021 sur les indicateurs relatifs à la politique et à la gouvernance réglementaire, http://www.gazette.gc.ca/rp-pr/p1/2017/2017-05-27/html/reg1-eng.php ; https://www.mfe.govt.nz/action-for-healthy-waterways; https://www.retsinformation.dk/eli/lta/2019/224
Encadré 4.11. L’outil allemand d’évaluation de l’impact du changement climatique sur les femmes
Les AIR qui comportent une perspective de genre ont le potentiel de permettre aux législateurs d'évaluer les répercussions des politiques climatiques sur le genre et de contribuer à faire en sorte que les objectifs d'égalité de genre soient pris en compte dans le développement et la mise en œuvre des politiques climatiques.
L’Agence allemande pour l’environnement a mis au point un outil d’évaluation de l’impact du changement climatique sur le genre qui suit la méthodologie commune en deux étapes des études d’impact (test de pertinence et évaluation principale), mais qui s’appuie sur six dimensions sexospécifiques qui reflètent divers domaines de la vie où l’inégalité entre les sexes est (re)produite, comme le travail familial et domestique, l’économie du travail et les ressources publiques.
Fondées sur les « résultats empiriques de la recherche sur le changement climatique tenant compte du genre », les dimensions sexospécifiques servent de guide pour identifier et analyser les effets inégalitaires du point de vue du genre des politiques publiques liées au changement climatique. L’outil intègre également une approche intersectionnelle pour permettre la prise en compte de l’interaction entre genre et sexe, ainsi que d’autres facteurs d’inégalité et de marginalisation.
Source : (Sauer, 2018[98] ; OCDE, 2021[66])
4.4.2. Dispositifs favorisant la prise de décision
Le secteur public prend régulièrement des décisions qui ont des répercussions sur les objectifs climatiques à un grand nombre de niveaux différents, qu’il s’agisse des lois adoptées par les parlements, des stratégies à long terme annoncées par les administrations publiques, des décisions relatives aux nouvelles pistes cyclables ou encore de la passation de marchés pour les repas scolaires dans les diverses municipalités. Il n’est pas réaliste de vouloir contrôler ou même suivre toutes ces décisions, mais les pouvoirs publics peuvent établir des objectifs globaux et des mesures d’incitation pour avancer dans le sens souhaité.
Planification et prise de décision
La planification des politiques à moyen terme peut aider à aligner les priorités à court et à long terme et à faire en sorte que les évolutions et objectifs environnementaux à venir influencent les actions menées au présent. Les pays membres de l’OCDE ont des approches différentes de la planification des politiques à moyen terme, comprenant souvent de nombreuses stratégies sectorielles déterminées par les objectifs et les intérêts de domaines politiques individuels, tels que les transports, l’éducation ou l’énergie. Peu de gouvernements disposent de stratégies transversales sur la compétitivité ou le développement durable en fonction d’échéances variables. Ce n’est qu’au cours des dernières années que les objectifs en matière de climat ont pris de l’importance dans ces documents de planification et que les pays ont mis en place des procédures permettant un contrôle spécifique des nouveaux projets politiques au regard du climat. L’Autriche, par exemple, a élaboré une Stratégie 2050, par laquelle « les projets juridiques au niveau fédéral et provincial doivent faire l’objet d’un examen obligatoire au regard du climat afin d’éviter des effets négatifs indésirables sur ce dernier ». Bien qu’il n’existe pas d’approche universelle en matière de planification stratégique, il peut être utile de prendre en compte et d’intégrer plusieurs stratégies dans le cadre de l’approche globale de gouvernance adoptée par les pouvoirs publics. La planification stratégique doit être complétée par d’autres pratiques afin de garantir l’efficacité du processus décisionnel pendant la phase de conception et de mise en œuvre.
Les objectifs stratégiques des pouvoirs publics en matière de climat et d’environnement peuvent influencer la planification budgétaire et fiscale. Par exemple, à titre de première étape d’une budgétisation verte crédible, un pays devrait commencer par définir ses projets et stratégies au niveau national en matière de changement climatique et d’environnement. Ces projets et stratégies peuvent contribuer à orienter la planification budgétaire, l’élaboration des politiques publiques, les investissements et d’autres décisions relatives aux revenus et aux dépenses, afin de soutenir les priorités écologiques (voir la section Passer résolument à la « budgétisation verte »).
Les perspectives à plus long terme doivent guider la planification à moyen terme et l’élaboration des politiques publiques à court terme. Par exemple, les choix effectués en matière de systèmes d’infrastructures et de dépenses publiques au cours de la prochaine décennie seront déterminants pour atteindre les objectifs mondiaux et nationaux en matière de climat, tels que l’objectif de neutralité carbone ou de cessation de la diminution spectaculaire de la biodiversité. Environ 70 % des émissions de GES sont dus à des infrastructures existantes, telles que les centrales électriques, les bâtiments et les transports.
L’ampleur et l’urgence du défi posé par le changement climatique exigent une approche plus holistique et systémique de la gouvernance publique en matière de planification à moyen terme. L’intégration d’évaluations ex ante de l’impact sur le climat dans les initiatives de planification stratégique ou de critères de durabilité et de résilience dans la planification et la réalisation des infrastructures permet aux pouvoirs publics de mieux prendre en compte les changements climatiques et l’exposition aux chocs.
Mobiliser les pouvoirs publics dans leur ensemble
Il n’est pas simple de définir l’orientation globale et les priorités, de veiller à ce que des décisions cohérentes soient prises sur les arbitrages et d’établir des approches coordonnées et homogènes entre les secteurs et les multiples niveaux d’administration face à un défi qui concerne tous les acteurs. En effet, une coordination efficace entre les différents niveaux d’administration en matière de changement climatique a échappé à la plupart des pouvoirs publics ces dernières années. Des défis complexes comme celui posé par le changement climatique, mais aussi par l’actuelle pandémie de COVID-19, incitent les pouvoirs publics à sortir les institutions publiques de leurs cloisonnements pour mettre en place une approche cohérente et coordonnée.
Dans la plupart des pays, les processus de gouvernance et les dispositions institutionnelles en place ne sont pas idéalement adaptés à la lutte contre le changement climatique. Les difficultés que les États doivent traiter sont devenues plus complexes et transversales au fil du temps. Aujourd’hui, les pays organisent de plus en plus leur appareil administratif afin de réaliser les objectifs liés au climat. Les données préliminaires de l’OCDE font la lumière sur les tendances et les modèles qui entourent la prise de décisions en matière de lutte contre le changement climatique. Elles donnent également un aperçu des mécanismes en place pour orienter la stratégie globale de la lutte contre le changement climatique, coordonner ces actions horizontalement entre les institutions centrales et tenir les engagements internationaux en matière de suivi, d’information et de vérification (OCDE, à paraître[31]). S’agissant de la coordination de l’action et de la politique climatiques, on peut distinguer quatre grands types de rouages institutionnels :
une unité chef de file, qui se trouve au centre du gouvernement, comme organe principal chargé de la coordination ;
des conseillers spéciaux nommés pour coordonner l’action climatique dans l’ensemble de l’administration publique. Par exemple au Kenya, la loi de 2016 relative au changement climatique désigne un haut fonctionnaire chargé de coordonner l’intégration du changement climatique dans des stratégies sectorielles (Gouvernement du Kenya, 2016[99]) ;
des comités ou commissions intergouvernementaux permanents. Ainsi aux États-Unis, un groupe de travail national sur le climat, qui réunit 21 organismes publics, facilite le déploiement d’une « approche pangouvernementale pour lutter contre la crise climatique » (Gouvernement des États-Unis, 2021[100]) ; et
des « points focaux » climat au sein des ministères sectoriels et des organismes publics, chargés de combler les lacunes dans la coordination interinstitutions en matière de changement climatique.
Les organes de coordination des pouvoirs publics, et notamment ceux situés au centre du gouvernement, disposent d’un certain nombre d’outils pour veiller à une plus grande cohérence entre d’une part l’élaboration des politiques publiques et d’autre part l’intégration des questions environnementales dans les politiques sectorielles :
Ils peuvent piloter l’élaboration et le suivi de stratégies et de plans nationaux globaux visant à respecter les engagements en matière de climat et d’environnement, comme indiqué dans la section Domaine clé n° 2 sur la planification stratégique.
Ils peuvent faciliter le dialogue entre les principales parties prenantes, par exemple en mettant en place des groupes ou des comités de coordination des politiques publiques à l’échelle de l’administration, au niveau des ministres, des secrétaires d’État ou des directeurs (OCDE, 2018[101]). Par exemple, à Singapour, le Secrétariat national sur le changement climatique établi au sein du Cabinet du Premier ministre et chargé d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques de Singapour en matière de changement climatique fait également office de secrétariat pour le Comité interministériel sur le changement climatique.7 De même, en France, le Secrétariat général du Gouvernement au sein du Cabinet du Premier ministre appuie l’organisation et la préparation du Conseil de défense écologique présidé par le président et réunissant les ministères et organismes publics concernés par la transition verte.8
Ils peuvent offrir un cadrage bien défini pour l’évaluation ex ante des projets de loi relatifs au climat. En France, le Haut conseil pour le climat a recommandé la conduite d’une série d’étapes avant la présentation d’un projet de loi au Parlement : tout d’abord la mise en place d’une consultation publique des parties prenantes pour déterminer si le projet de loi nécessite une évaluation plus approfondie ; ensuite, la réalisation d’une étude d’impact détaillée par rapport à la stratégie nationale bas-carbone lorsque les dispositions peuvent avoir un impact significatif sur les objectifs en matière de climat ; et enfin la préparation par une autorité indépendante d’un avis sur la qualité de cette étude.
Ils peuvent héberger une infrastructure de gestion du savoir appropriée en vue d’uniformiser les règles du jeu entre les secteurs et de constituer une source commune de données probantes. En Allemagne, par exemple, le Conseil consultatif sur le changement mondial offre des orientations aux décideurs malgré les incertitudes qui subsistent, en évaluant les risques, en identifiant les options relatives aux mesures de précaution et en suscitant une prise de conscience pour inciter à l’action.
Les décideurs et les régulateurs devraient également réfléchir de manière anticipative aux moyens d’accroître stratégiquement les interactions entre les institutions du secteur public afin de coordonner et d’harmoniser les actions en rapport avec le climat sur le plan intersectoriel et transfrontière. Certains décideurs et régulateurs économiques ont déjà identifié des synergies entre des secteurs qui peuvent être mises à profit par le couplage sectoriel, ainsi que des co-bénéfices de la décarbonation qui dépassent le secteur en question (comme l’amélioration de la qualité de l’air qui découle des efforts d’atténuation du changement climatique). Certains régulateurs ont aussi cherché à dépasser les frontières nationales pour bénéficier de la coopération transfrontière. C’est le cas en Europe, par exemple, par l’intermédiaire des groupes de travail de l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) qui se concentrent sur la promotion de la durabilité auprès des régulateurs européens des communications électroniques. D’autres exemples de ce type de coordination et de collaboration intersectorielles pourraient contribuer à renforcer de telles pratiques.
La lutte contre le changement climatique nécessite également des actions et des politiques au niveau local qui s’alignent sur les objectifs et les cadres politiques au plan national et mondial (OCDE, 2021[102]). Les administrations infranationales ont des responsabilités dans plusieurs domaines qui ont un impact sur le développement économique et qui sont pertinents pour la politique climatique (Matsumoto et al., 2019[103]). Plus particulièrement, les administrations infranationales jouent un rôle important dans les trois piliers de l’action de lutte contre le changement climatique : l’énergie, l’utilisation des sols et la politique urbaine. En effet, ces piliers sont au cœur du développement régional. Les administrations infranationales sont responsables de secteurs déterminants en matière d’action face au changement climatique, notamment les bâtiments et certains équipements pour les transports, ainsi que d’autres infrastructures locales et la gestion des déchets. En 2019, les administrations infranationales ont été responsables de 63 % des dépenses publiques significatives pour le climat et de 69 % des investissements publics significatifs pour le climat, en moyenne, dans 33 pays de l’OCDE et de l’UE (OCDE, 2022[104]). De nombreuses décisions prises par les administrations infranationales ont des effets sur les émissions de GES, notamment la réglementation locale sur les transports, les mandats de construction des bâtiments, l’aménagement du territoire et les politiques économiques. Les collectivités locales et régionales jouent également un rôle essentiel dans le soutien aux populations les plus vulnérables, car elles possèdent une bonne connaissance des enjeux locaux. Elles facilitent la coordination entre les acteurs aux niveaux national et local, ainsi que la coopération entre les collectivités locales. En outre, les villes et les régions peuvent souvent servir de modèles en matière de réduction des émissions. En effet, elles peuvent servir de laboratoires où les actions en faveur du climat sont expérimentées avant d'être étendues à l'échelle nationale. Les Principes de l'OCDE sur la politique urbaine et la boîte à outils de mise en œuvre qui les accompagne incluent le principe de durabilité environnementale et visent à aider les gouvernements nationaux et infranationaux à rendre les villes aptes à faire face aux chocs climatiques actuels et futurs (OCDE, 2022[105]).
La transition vers la neutralité GES nécessite l’intégration des administrations infranationales dans la gouvernance en matière de politique climatique et la résolution des problèmes de coordination et de financement pour y parvenir. La réalisation des objectifs de neutralité GES nécessite une approche intégrée qui favorise la coordination des politiques sur le plan horizontal et vertical (OCDE, 2021[102]). Les pays prennent des mesures dans ce sens, par exemple en créant des plateformes pour coordonner les politiques nationales, régionales et locales relatives aux transports et à l’aménagement du territoire afin de parvenir à des transports neutres sur le plan du climat et de permettre le partage du savoir entre les différents niveaux d’administration. Bien que les administrations infranationales disposent déjà d’outils de budgétisation verte pour donner la priorité à leurs investissements à faible émission de carbone, des ressources financières supplémentaires sont requises pour permettre aux administrations infranationales de procéder à une réorientation efficace des dépenses vers des actifs neutres sur le plan du climat et d’augmenter les investissements. La Recommandation de l’OCDE de 2014 sur l’investissement public efficace entre niveaux de gouvernements énonce des principes visant à aider les administrations à évaluer les forces et les faiblesses de leurs capacités en matière d’investissement public et à établir des priorités en matière d’amélioration, notamment en ce qui concerne les objectifs climatiques et environnementaux.
Compte tenu de l’ampleur du défi, il peut être nécessaire de procéder à une analyse plus approfondie de la manière de renforcer l’efficacité de la coordination en matière de changement climatique entre les différents niveaux d’administration.
Donner les moyens aux institutions de promouvoir l’action en faveur de l’environnement et d’intégrer une « éthique verte » dans le service public
Dans des domaines tels que l’énergie, les transports, l’eau et les communications électroniques, les régulateurs de réseaux sont au cœur des efforts des pays pour réduire leurs émissions. Il est essentiel de veiller à ce que ces institutions disposent des mandats, des financements, des outils et des mécanismes de gouvernance appropriés pour atteindre les objectifs environnementaux. Plus généralement, le secteur public doit également veiller à ce que sa main-d’œuvre soit équipée de manière appropriée face au défi que représente le changement climatique.
Le champ d’action des régulateurs économiques de ces réseaux s’étend à une grande partie de la population mondiale : quasiment tout le monde utilise des services réglementés par des régulateurs économiques. Les secteurs de réseau ont également tendance à être très gourmands en ressources. La réglementation économique est un levier pour promouvoir le verdissement de ces secteurs, dans les limites du cadre politique qui régit les régulateurs économiques. Il faut donc veiller à ce que ces régulateurs disposent du cadre juridique adéquat (attributions, mandat, pouvoirs et leviers). Il existe un certain nombre de défis dans ce domaine que les pouvoirs publics pourraient chercher à relever :
Mandat – Le mandat classique de nombreux régulateurs économiques consiste à veiller au fonctionnement efficient des marchés, à assurer l’accès des consommateurs à des services de qualité, au maintien de la concurrence et à l’égalité des conditions de concurrence pour les acteurs du marché. Dans de nombreux cas, ce mandat ne s’étend pas à la durabilité, et des cadres adéquats pour encourager l’innovation ou d’autres éléments du cadre d’action leur manquent pour opérer contre le changement climatique. Par exemple, une analyse réalisée en 2020 des efforts des régulateurs (y compris des régulateurs économiques) pour anticiper et réagir aux technologies émergentes faisait observer le décalage qui existait souvent entre les mandats et les fonctions des régulateurs et les exigences de la réglementation des innovations (OCDE, 2020[106]). La prise en compte de ces mandats devrait également concerner les régulateurs qui ne sont généralement pas associés aux efforts climatiques (comme ceux en charge des communications électroniques) : en effet, les émissions ne se résument pas à un seul « problème énergétique ».
Investissements – Les régulateurs économiques exécutent tout un ensemble de fonctions qui influencent les investissements (OCDE, 2021[107]), notamment en fixant des règles et des incitations pour financer des investissements dans les infrastructures en accord avec des objectifs climatiques. Cependant, le cadre réglementaire ne permet pas toujours aux régulateurs de tenir compte des externalités comme les émissions lorsqu’il s’agit de prendre des décisions sur les infrastructures. Par ailleurs, il est important que le cadre réglementaire continue à encourager l’efficience et à répartir les coûts équitablement. Par exemple, l’autorité de régulation de l’électricité et du gaz en Grande-Bretagne, Ofgem, met à disposition des fonds spéciaux pour les investissements qui soutiennent l’objectif de neutralité GES du Royaume-Uni (Université Paris Dauphine-PSL, 2021[108]). De même, l’autorité de régulation de l’eau en Écosse, la Water Industry Commission for Scotland, conserve un fonds distinct pour les investissements dont le coût est plus élevé, mais dont la valeur est supérieure sur la base du cycle de vie complet, compte tenu d’externalités comme les émissions (WICS, 2020[109]) (Encadré 4.12). La Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des infrastructures reconnaît la nécessité de « promouvoir un cadre réglementaire cohérent, efficient et fiable » comme condition préalable à la mise en place d’infrastructures durables et de qualité (OCDE, 2020[74]).
Tarifs – L’établissement des tarifs est un outil dont disposent un grand nombre de régulateurs économiques. Lorsqu’il s’agit de déterminer comment réglementer les tarifs, les régulateurs tiennent compte de toute une série de facteurs, qui peuvent inclure des objectifs sociaux et environnementaux. Les principes de l’équité intergénérationnelle suggèrent qu’il y a lieu pour les clients actuels et futurs d’assumer leur « juste part » des besoins d’investissement à long terme. Dans les cas où ce sont les tarifs qui financent des investissements dans les infrastructures, il y a lieu de s’interroger sur les mécanismes d’élaboration de la réglementation des prix. L’« optimisation » des investissements peut impliquer d’investir aujourd’hui dans des infrastructures plus coûteuses pour en faire profiter les clients de demain (et en ajustant les tarifs en conséquence), tout en continuant de prévoir des incitations en faveur de l’efficacité du capital. Dans le secteur écossais de l’eau, où les tarifs financent en grande partie les investissements dans les infrastructures du secteur, cette question s’est trouvée au centre de la dernière révision des prix par le régulateur (Encadré 4.12).
Innovation – Le cadre réglementaire des régulateurs économiques devrait encourager les technologies et les modèles d’entreprise innovants, susceptibles de soutenir les objectifs politiques tels que la réduction des émissions. Certains régulateurs ont déjà permis la réalisation d’expérimentations en soutenant ou en mettant en œuvre des essais, des bacs à sable réglementaires, des projets pilotes et des réglementations pilotes. Par exemple, l’Ofgem a alloué des fonds spécifiques à des essais sur les réseaux de gaz à l’hydrogène, conformément aux objectifs de réduction des émissions (Université Paris Dauphine-PSL, 2021[108]).
Ciblage des opérateurs et du comportement des consommateurs – Les régulateurs économiques peuvent également être habilités à fixer des objectifs ou des exigences pour que les entreprises évaluent et agissent sur la durabilité ou la résilience, notamment par le biais d’octroi de licences, de mise en place de codes et de normes. Par exemple, le régulateur brésilien de l’électricité exige un rapport annuel de responsabilité sociale et environnementale de la part des concessionnaires, des titulaires de permis et des titulaires d’autorisations opérant dans les domaines de la production, du transport et de la distribution (OCDE, 2021[110]). En outre, les régulateurs économiques peuvent jouer un rôle en incitant les consommateurs à adopter un comportement conforme aux objectifs politiques. Le régulateur colombien des communications, par exemple, exige maintenant que les fournisseurs mettent à la disposition des consommateurs des informations sur leur consommation passée (OCDE, 2017[111]). Il s’agit là d’une intervention comportementale qui est couramment incluse dans la série d’actions menées dans le secteur de l’énergie pour optimiser la consommation d’énergie (AIE, 2021[112]).
Encadré 4.12. Révision stratégique des redevances 2021-27 par la Water Industry Commission of Scotland (WICS), Royaume-Uni
Tous les six ans, la Water Industry Commission of Scotland (WICS) se prête à un processus de fixation des prix dans le cadre de principes et d’objectifs généraux définis par l’administration écossaise. La révision stratégique des redevances 2021-27 (SRC21) a commencé en 2017 et devait reposer sur une révision transparente et collaborative des prix, en tenant compte des défis à long terme auxquels le secteur est confronté en raison de la nécessité de passer à la neutralité GES d’ici 2040 et de remplacer les infrastructures vieillissantes d’une manière financièrement viable. La décision finale a fixé le plafond de sorte que les investissements du fournisseur de services public suffisent à atteindre plusieurs de ces objectifs tout en maintenant les attentes en matière de niveaux de service. La SRC21 a introduit un nouveau cadre réglementaire conçu pour relever ces défis, en favorisant un dialogue ouvert et en cherchant à établir une base factuelle à l’appui des exigences. L’accent mis précédemment sur l’établissement d’une contrainte budgétaire rigoureuse comme moyen d’assurer une utilisation efficiente des ressources sur une période réglementaire définie - bien qu’efficace à court terme - n’avait pas permis de mettre suffisamment l’accent sur les besoins en actifs sur le long terme, y compris les questions liées à l’équité intergénérationnelle, la prise de décision en matière d’investissement sur la base de l’utilisation immédiate de trésorerie minimale, etc.
La SRC21 a entraîné des modifications du cadre réglementaire qui privilégient une perspective à long terme et permettent la reconduction de décisions d’investissements en fonction des priorités fondées sur des bases factuelles et de leur valeur. Comportant un plan stratégique à long terme, le nouveau cadre réglementaire s’éloigne de l’ancienne approche rigide, selon laquelle l’entreprise et les régulateurs convenaient préalablement d’une liste d’investissements nécessaires. Le nouveau processus favorise une prise de décision en fonction de la plus haute priorité et de la plus grande valeur, plutôt que de fixer des résultats définis et de chercher ensuite à les réaliser au moindre coût à court terme.
Dans le nouveau cadre réglementaire applicable au SRC21, le régulateur a travaillé conjointement avec les parties prenantes du secteur de l’eau tout au long du processus afin de garantir une appropriation commune de l’approche, qui visait à obtenir les meilleurs résultats pour les clients, les communautés et l’environnement.
Source : WICS (2020[109]), 2021-27 Final Determination Strategic Review of Charges, Commission écossaise du secteur de l’eau (Water Industry Commission for Scotland), https://wics.scot/system/files/publications/2021-27%20Final%20Determination.pdf (consulté le 28 septembre 2021).
De manière plus générale, la conception et la mise en œuvre de politiques permettant aux pouvoirs publics de mener et de faciliter l’action face au changement climatique feront appel aux idées collectives et aux efforts coordonnés d’un personnel de la fonction publique compétent, bien informé et résilient. Les objectifs ambitieux de neutralité carbone des pays de l’OCDE nécessitent des employés disposant d’un large éventail d’aptitudes et de compétences, travaillant avec des dirigeants qui fixent des objectifs systématiques et insufflent des comportements propices, le tout au sein d’un système qui favorise et encourage l’action et l’innovation.
La mise en place de politiques ayant un impact direct sur les objectifs climatiques est un important moyen par lequel la fonction publique contribue à la transition verte. La « chaîne de valeur » de la recherche, de la conception et de la mise en œuvre d’une politique de durabilité exige une gamme complexe d’aptitudes, de compétences et d’expertise, comme la maîtrise du sujet, la collecte et l’analyse de données, la communication et la collaboration avec des groupes extérieurs, et la gestion du changement. La mise en place d’une fonction publique soucieuse de l’environnement nécessitera de réunir des ensembles de compétences d’une manière nouvelle. Par exemple, les experts en budgétisation devront peut-être acquérir des connaissances en matière d’évaluation de l’impact sur l’environnement, le personnel administratif aura probablement besoin de compétences numériques pour se passer de papier ou travailler à distance, et les gestionnaires de marchés publics devront peut-être renforcer leurs capacités pour choisir les fournisseurs en fonction non seulement de la qualité, de la fiabilité et du prix, mais aussi de leurs pratiques en matière de durabilité.
Un autre ensemble de compétences à intégrer dans la fonction publique, peut-être tout aussi important, concerne la conscience et la prise en compte des impacts environnementaux de toutes les politiques et actions publiques, et non pas seulement celles visant des initiatives vertes. L’intégration d’une pensée systématique et d’une « culture de la transformation » (Jacob et al., 2021[113]) à tous les niveaux de l’organisation est une stratégie à long terme mais hautement efficace pour relever ces défis immenses. Si les employés du secteur public se considèrent comme des gardiens de l’environnement, ils tiendront compte des répercussions climatiques non seulement de leurs propres actions, mais aussi de chaque politique et programme qu'ils contribuent à mettre en œuvre et des actions des organisations dont ils font partie.
Les compétences nécessaires peuvent être acquises dans le cadre de parcours professionnels au sein de la fonction publique, mais nombre d’entre elles peuvent également être trouvées chez des candidats à l’emploi en dehors du secteur public - en particulier concernant les besoins liés à une spécialisation scientifique ou technique. Cela met un accent accru non seulement sur l’amélioration des compétences et la formation, mais aussi sur les méthodes de recrutement et de partenariat. Les lacunes ou les déficits en matière de connaissances spécialisées peuvent limiter la prise de décisions intuitive fondée sur l’expertise (Hanif, Ahsan et Wise, 2020[114]), ce qui incite à intégrer de manière significative des experts en la matière au sein de la fonction publique, à la fois dans des rôles d’orientation et de direction. Les administrations devront peut-être faire appel à de nouvelles sources de recrutement et embaucher à différents niveaux d’ancienneté le long des parcours professionnels, afin de s’assurer que la fonction publique dispose des capacités nécessaires en matière d’écologie. Elles pourraient également envisager de créer au sein de la fonction publique des possibilités de partenariats de collaboration avec des experts extérieurs. Que ce soit par le biais du recrutement et de la spécialisation interne, ou de partenariats et d’externalisation, il est essentiel que les administrations se dotent des moyens de bénéficier de l’expertise nécessaire.
Le leadership au niveau de l’organisation et de l’équipe est essentiel aussi pour réaliser l’objectif de durabilité et de pensée écologique à l’échelle de l’organisation et des employés. Les « leaders en matière d’écologie » peuvent expliquer la priorité accordée à la politique climatique, fixer des attentes et des objectifs concrets en matière d’environnement, renforcer les capacités organisationnelles au sein de la main-d’œuvre et encourager l’adoption généralisée de pratiques et de modes de pensée durables. Ils peuvent également impliquer et collaborer avec les parties prenantes extérieures et les communautés. À cet égard, une capacité de leadership particulièrement importante consiste à « cartographier le système » pour identifier les moyens de coopérer avec d’autres organismes compétents (Gerson, 2020[115]). Le personnel de niveau supérieur dans la fonction publique est donc un acteur essentiel de la transition verte, en assurant la mise en œuvre réussie des politiques climatiques, en jouant un rôle clé non seulement dans la conception des politiques, mais aussi dans la planification et l’organisation des efforts collectifs en dehors de l’administration. Les dirigeants de la fonction publique peuvent également accompagner leurs services dans les périodes de changement et créer des systèmes de formation et de perfectionnement qui préservent les compétences de la main-d’œuvre et récompensent le type de réflexion innovante nécessaire pour résoudre des questions climatiques complexes.
Les administrations publiques peuvent envisager plusieurs domaines d’action pour créer une fonction publique plus écologique :
Afin de faire de la durabilité une compétence de base pour tous les employés des services publics chargés de la conception des politiques et des services, des évaluations environnementales peuvent être intégrées dans le processus d’approbation de chaque nouvelle politique ou programme (même ceux qui ne sont pas directement liés à la durabilité).
Effectuer une analyse des compétences vertes pour identifier les lacunes existantes ainsi que les compétences qui seront nécessaires à l’avenir. Mettre en place des programmes de formation, de perfectionnement et de recrutement pour répondre à ces besoins.
Envisager le leadership sous l’angle de la durabilité. Le leadership en matière d’écologie est une composante essentielle de l’intégration de la fonction de gardien de l’environnement au sein d’une organisation.
Prendre des mesures, le cas échéant, pour appliquer de nouvelles modalités de travail qui réduisent la propre empreinte du service public. La flexibilité en matière de télétravail et la tenue de davantage de réunions à distance permettent de réduire pratiquement l’utilisation des ressources et la nécessité de se déplacer.
Systématiser les approches innovantes en matière de gouvernance
L’innovation à orientation précise est devenue l’un des principaux moyens de relever les défis complexes auxquels les administrations publiques sont confrontées aujourd’hui, notamment la réalisation d’objectifs climatiques ambitieux au cours des prochaines décennies. L’innovation à orientation précise s’attaque à des défis complexes comme la transition verte à l’échelle mondiale en adoptant une approche de façonnage du marché orientée vers un but précis : le secteur public joue un rôle actif en rassemblant et en coordonnant les acteurs et les ressources autour des questions complexes, intersectorielles et transnationales qui ne peuvent être résolues par des acteurs individuels seuls. Ces mesures peuvent concerner différentes étapes du cycle de l’innovation, de la recherche jusqu’au déploiement sur le marché, conjuguer les instruments de l’offre et de la demande, et recouper plusieurs domaines d’action, secteurs et disciplines (Larrue, 2021[116]). Bien qu’il existe des exemples d’innovation à orientation précise dans des domaines aussi variés que la santé et la numérisation, cette approche s’impose progressivement pour relever les défis du changement climatique. La Commission européenne a adopté le cadre de l’innovation à orientation précise, quatre des cinq missions énoncées étant liées aux questions climatiques (à savoir : l’adaptation au changement climatique, y compris les transformations sociétales ; la santé des océans, des mers, des eaux côtières et intérieures ; les villes neutres en carbone et intelligentes ; la santé des sols et l’alimentation). Le Fonds pour l’innovation du Danemark a lancé un appel à financement pour la recherche et l’innovation vertes axées sur les missions afin de coordonner et de gérer la diversité des mesures politiques, des partenariats et des solutions nécessaires pour faire face aux enjeux du changement climatique.
Une approche qui suscite un intérêt croissant à l’appui de la politique climatique consiste à adopter des mécanismes de gouvernance plus prospectifs. Les administrations publiques doivent constamment appréhender, comprendre l’avenir et agir sur ce dernier tel qu’il se dessine dans le présent ; cette pratique est connue sous le nom de prévision stratégique (Tõnurist et Hanson, 2020[117] ; OPSI, 2021[118]). Cela peut favoriser les débats au sein des secteurs publics sur la manière de rendre des avenirs alternatifs « plus verts » réalisables grâce aux actions menées aujourd’hui. Cette approche aide les pouvoirs publics à prendre des décisions plus solides en tenant compte d’une série de faits nouveaux, en restant attentifs aux signaux de changement et en améliorant leur prise de conscience et leur compréhension des perspectives d’avenir. Ainsi, les administrations publiques peuvent intégrer des plans d’urgence et de préparation dans les dispositifs environnementaux et améliorer leur résilience globale face aux évolutions inattendues. L’intégration de ces perspectives plus larges et plus systémiques dans la planification stratégique et la prise de décision est appelée gouvernance à caractère anticipatif et peut permettre une planification plus efficace des politiques sans créer de rigidité ni de contraintes de sentier (Encadré 4.13).
Encadré 4.13. Exemples d’approches de gouvernance à caractère anticipatif visant à orienter les politiques climatiques et environnementales
Les administrations publiques du monde entier utilisent des approches prévisionnelles et anticipatives pour alimenter les débats sur les politiques et leur élaboration en réponse à de nombreux enjeux, dont le changement climatique et la diminution de la biodiversité.
Dans le cadre de ses nouvelles fonctions en matière de relations interinstitutionnelles et de prospective, la Commission européenne fait prendre conscience de l’importance des mégatendances environnementales dans tous les domaines de la gouvernance publique. L’Agence européenne pour l’environnement, l’Allemagne (ministère fédéral de l’Environnement), l’Irlande (ministère de l’Environnement, du Climat et des Communications), les Pays-Bas (agence d’évaluation environnementale) et le Royaume-Uni (ministère de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales), entre autres, ont recours à la prospective stratégique en matière de politique environnementale. Pourtant, une lacune importante subsiste : l’écart entre la prévision et l’action en termes d’impact. Trop souvent, les résultats du travail de prévision sont trop intangibles, indirects ou séparés de la prise de décision pour avoir un impact. Dans le cadre de son projet horizontal sur la résilience climatique et économique, l’OCDE élabore une boîte à outils pour aider les pays à élaborer des plans de transition vers la neutralité GES plus adaptés à l’avenir. Les travaux de l’OCDE sur la gouvernance à caractère anticipatif visent à combler cette lacune en examinant les structures et les processus qui doivent être modifiés dans les fonctions de gouvernance afin de favoriser l’anticipation et la prévision. Par exemple, grâce à des approches pionnières en matière de prototypage anticipatif dans le secteur public en Slovénie, l’OCDE catalyse la mise au point d’initiatives concrètes (OPSI, 2021[119]).
L’utilisation des enseignements des sciences comportementales peut également aider les administrations à garantir l’efficacité des politiques vertes grâce à des approches « axées sur la personne humaine » qui tiennent compte des obstacles et des biais comportementaux à tous les stades de l’élaboration des politiques publiques. Pour relever les défis posés par le changement climatique, les pouvoirs publics devraient encourager l’adoption de comportements à caractère plus durable parmi les individus, les communautés, les entreprises et les décideurs à proprement parler. Certaines des interventions fondées sur les enseignements des sciences comportementales les plus réussies ont permis de modifier les contextes pour favoriser des habitudes quotidiennes plus écologiques [voir OCDE (2017[120]) ; (2017[121]) et (2019[122])]. Les enseignements des sciences comportementales peuvent aider les décideurs à adopter une approche fondée sur les comportements pour promouvoir des politiques durables et vertes (Encadré 4.14).
Encadré 4.14. Utiliser les enseignements des sciences comportementales pour mieux concevoir et mettre en œuvre des politiques vertes
Les enseignements des sciences comportementales peuvent être utilisés conjointement avec les outils traditionnels d’élaboration des politiques publiques afin d’améliorer les effets directs de tous les types d’actions publiques visant à promouvoir des résultats verts en permettant de :
prendre en compte la manière dont les individus sont susceptibles de réagir à des mesures politiques spécifiques et à des réformes vertes ;
fournir une base factuelle plus complète à l’appui des propositions de politiques vertes ;
utiliser des modèles fondés sur les enseignements des sciences comportementales pour évaluer l’impact de la politique verte ;
anticiper les problèmes de mise en œuvre et d’évaluation des réformes vertes.
D’autres travaux sur les enseignements à tirer des sciences comportementales doivent être menés afin de rendre la gouvernance publique verte plus efficace et efficiente. Les décideurs devraient ainsi envisager les mesures suivantes :
Examiner les comportements à un stade plus précoce du processus d’élaboration des politiques, lors de la conception de celles-ci, de la rédaction des lois et des règlements et de la consultation des parties prenantes. La prise en compte des enseignements des sciences comportementales dans la conception des politiques et des programmes implique, par exemple, d’examiner de quelle manière le calendrier, la présentation, l’étiquetage et les mesures d’incitation - financières ou autres - se répercutent sur le succès d’une mesure politique.
Intégrer des solutions en matière de politiques tenant compte du comportement qui vont au-delà des simples « encouragements » pour favoriser des résultats durables. Il s’agit notamment de promouvoir la conformité au moyen de l’action réglementaire et d’améliorer l’évaluation des décisions politiques passées au moyen d’examens a posteriori comprenant une évaluation des obstacles et des biais comportementaux éventuels non diagnostiqués ou involontaires.
Déployer les enseignements des sciences comportementales pour améliorer stratégiquement l’acceptabilité des réformes vertes. L’économie comportementale démontre l’existence d’une tendance à préférer les récompenses immédiates aux gains futurs. Le temps écoulé entre les avantages tirés de politiques écologiques (par exemple, la réduction des émissions de CO2) et des comportements plus immédiats (par exemple, la réduction de la consommation de viande) entraîne ce que l’on appelle la préférence temporelle. La compréhension de ces fondements psychologiques peut aider les décideurs à mieux évaluer la mesure dans laquelle les individus perçoivent la nécessité des réformes vertes. Le Canada fournit un bon exemple de la façon dont les pouvoirs publics peuvent utiliser les expérimentations dans les enseignements tirés des sciences comportementales pour promouvoir l’acceptabilité et l’adoption de politiques vertes (Encadré 4.15).
Appliquer les enseignements tirés des sciences comportementales aux décideurs. Les administrations publiques sont créées et dirigées par des êtres humains qui peuvent rencontrer les mêmes obstacles et biais que les particuliers dans la société, notamment le biais de disponibilité, les coûts de friction, le biais du présent, l’effet de rareté, l’aversion pour le risque et les écarts entre intentions et comportements. L’OCDE a commencé à recenser les éventuels enjeux comportementaux auxquels sont confrontés les responsables de l’élaboration des politiques réglementaires du point de vue de la gouvernance réglementaire, qui inclut une évaluation des défis et des opportunités pour les institutions, des processus et des outils utilisés pour prendre des décisions en matière de politique réglementaire (voir (Drummond, Shephard et Trnka, 2021[123])).
Encadré 4.15. Enseignements des sciences comportementales et acceptation des politiques vertes par les citoyens – l’expérience de l’enquête PRAAC au Canada
Les expérimentations dans le domaine des enseignements des sciences comportementales donnent aux pouvoirs publics les moyens de mieux comprendre l’acceptation par les citoyens des politiques vertes et leur adhésion à celles-ci et d’évaluer l’efficacité des actions vertes en cours ou proposées. Elles fournissent aussi des données empiriques pour mieux anticiper les défis futurs liés au changement climatique et s’y préparer.
Reconnaissant l’influence des enseignements des sciences comportementales sur la conception et la mise en œuvre de l’action publique, l’Unité de l’impact et de l’innovation (UII) du Bureau du Conseil privé au Canada a lancé une enquête longitudinale qui utilise les enseignements des sciences comportementales pour mesurer et promouvoir l’acceptabilité et l’adoption des mesures climatiques et des politiques vertes chez les Canadiens.
L’enquête tire des éclairages auprès d’un échantillon représentatif de Canadiens à l’échelle nationale pour tester :
les connaissances, les attitudes et la perception des Canadiens à l’égard du changement climatique ;
les intentions autodéclarées des Canadiens et leur volonté d’adopter des comportements écologiques ou durables sur le plan de l’environnement ;
des éléments indicateurs de soutien à des politiques vertes ou durables ; et
la segmentation comportementale envers le changement climatique au sein de la population.
L’enquête s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche appliquée sur l’action pour le climat au Canada (PRAAC Canada) et est réalisée en partenariat avec Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) et Ressources naturelles Canada (RNCan).
Les résultats de l’enquête permettront de mieux comprendre les obstacles et catalyseurs comportementaux qui se répercutent sur l’action verte et les politiques visant le changement climatique.
Gouvernance du risque : renforcer les capacités à anticiper les chocs environnementaux et à coordonner une réponse sociétale
Les effets du changement climatique se manifestent déjà par l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des catastrophes météorologiques et il faut s’attendre à une hausse du risque d’événements extrêmes. Les températures élevées et les faibles précipitations ont été les principaux facteurs à l’origine de saisons d’incendies de forêts extrêmes en Amérique du Nord, en Europe et en Australie en 2019-20. En Europe, la survenance d’incendies de forêt n’est pas seulement un risque en été. En 2020, des feux de forêt d’hiver ont brûlé des Pyrénées en France jusqu’au delta du Danube en Roumanie et, avec les feux de printemps, ont fait passer la superficie totale brûlée en Europe au-dessus de la moyenne régionale au cours de la décennie précédente (San-Miguel-Ayanz et al., 2021[124]). En 2021, des inondations dévastatrices ont touché le Japon, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas et, dans certains cas, ont entraîné un nombre historiquement élevé de pertes en vies humaines et de dommages sur des infrastructures d’importance vitale (Service Copernicus de gestion des urgences, 2021[125] ; Gouvernement du Japon - Bureau du Cabinet, 2022[126]).
La prise en compte du changement climatique dans les évaluations nationales du risque (ENR) peut favoriser l’appropriation des risques par l’ensemble des administrations publiques et la société en général. La plupart des pays de l’OCDE n’ont pas intégré d’évaluations des risques climatiques à plus long terme dans leurs ENR (OCDE, 2018[127]). Or l’utilisation de tels outils de gouvernance des risques permettrait de tirer profit de la sensibilisation accrue aux risques majeurs que la pandémie de COVID-19 a produits. La Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des risques critiques invite les pays à utiliser les évaluations nationales des risques pour parvenir à une compréhension commune des risques et de leur prise en compte dans l’ensemble des ministères, des autorités locales et régionales et de la société en général à court, moyen et long terme. Une meilleure communication sur les évaluations des risques à long terme liés au changement climatique peut aussi encourager les communautés et le secteur privé à investir dans des mesures de résilience, à se préparer aux chocs à venir et à saisir les opportunités que les changements climatiques peuvent offrir.
La pandémie de COVID-19 et d’autres crises récentes ont révélé les lacunes dans la préparation aux risques majeurs qui peuvent être comblées dans le cadre d’une relance verte qui construit une société résiliente. La Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des risques majeurs constitue une norme permettant de tenir compte des enseignements tirés des expériences liées au COVID-19, avec des plans bien conçus, des capacités et des structures flexibles de gestion des crises, capables de s’adapter et de réagir aux imprévus :
Le deuxième principe de la Recommandation appelle les pays à renforcer leur état de préparation au moyen d’évaluations des risques éclairées par les prévisions afin de mieux anticiper des impacts complexes et de grande envergure. En améliorant leur compréhension des risques liés au changement climatique dans le cadre d’une approche holistique de la gouvernance du risque, les pouvoirs publics seront en mesure de susciter des changements positifs afin d’atténuer les risques émergents (tant à l’intérieur des pays que par-delà les frontières nationales) et de le hiérarchiser par rapport à d’autres risques majeurs. L’évaluation des effets en cascade du changement climatique sur d’autres risques importants pour la société permettra de mieux comprendre le large éventail d’impacts auxquels les pouvoirs publics doivent se préparer. L’analyse nationale des risques de catastrophes la plus récente produite par la Suisse en est un exemple (Office fédéral de la protection de la population (OFPP), 2020[128]).
Le troisième principe de la Recommandation encourage les membres à mener des actions de sensibilisation aux risques majeurs afin de mobiliser les ménages, les entreprises et les parties prenantes internationales et de favoriser les investissements dans la prévention et l’atténuation des risques. En définissant les mesures que les citoyens et les entreprises peuvent prendre pour améliorer leur propre résilience, les pouvoirs publics peuvent encourager les activités qui renforcent la résilience de la société à des risques liés au climat tout en assurant la transition vers une économie neutre en carbone.
Le troisième principe encourage également les membres à élaborer leur planification stratégique de manière à renforcer le mélange de protection structurelle et de mesures non structurelles destinées à réduire les risques. En travaillant avec les ministères sectoriels responsables des infrastructures d’importance vitale, les régulateurs sectoriels et les opérateurs d’infrastructures sur la manière d’exploiter les synergies entre la décarbonation et la résilience aux phénomènes météorologiques extrêmes, les pouvoirs publics peuvent renforcer la résilience des communautés et des réseaux d’infrastructures d’importance vitale. Par exemple, la résilience accrue de l’approvisionnement en électricité pourrait être favorisée en soutenant la microgénération au niveau communautaire en utilisant des énergies renouvelables.
La relance liée à la pandémie de COVID-19 offre une opportunité clé aux pouvoirs publics d’investir dans la résilience et de renforcer leur niveau de préparation face aux catastrophes liées changements climatiques à venir. La Recommandation de l’OCDE sur la gouvernance des risques majeurs met en exergue l’importance de la transparence et de la redevabilité dans le processus décisionnel lié aux risques, en recommandant de tirer en permanence des enseignements des événements chocs et en appliquant cette expérience à la réforme des politiques publiques. Alors que de nombreuses administrations publiques procèdent à des évaluations, des audits ou des examens de leurs stratégies de gestion des risques à la lumière des expériences de la pandémie de COVID-19, l’une de leurs priorités devrait être l’intégration plus explicite de l’adaptation au changement climatique dans le récit plus large sur la résilience de leur pays. L’utilisation des fonds de relance liés à la crise du COVID-19 pour favoriser la résilience climatique est une autre opportunité à ne pas manquer. Des initiatives telles que NextGenerationEU de l’Union européenne ou le cadre Build Back Better Framework des États-Unis sont autant d’exemples de politiques tournées vers l’avenir qui inscrivent la résilience au centre d’une relance verte.
4.5. Domaine clé n° 3 – Donner l’exemple : un secteur public plus écologique et plus résilient
Les pouvoirs publics devraient ouvrir la voie en matière de changement écologique, en prenant des mesures convaincantes véhiculant le message que le verdissement et l’adaptation sont une responsabilité partagée et que l’État peut jouer un rôle central à cet égard. Le secteur public est un acteur de premier plan dans chaque économie nationale, et un acteur dont l’empreinte environnementale doit être identifiée et progressivement réduite. Cette section se penche sur la façon dont le secteur public peut démontrer comment répondre aux pressions environnementales et se transformer lui-même pour faire face aux défis environnementaux.
Pour donner l’exemple, les pouvoirs publics doivent incorporer les considérations environnementales dans leurs dispositions institutionnelles concernant l’emploi public, les services publics et les biens immobiliers et autres actifs publics. Il leur faut donc réfléchir aux moyens d’utiliser leurs prérogatives d’employeur pour créer une organisation du travail plus respectueuse de l’environnement et leur rôle de fournisseur de services pour promouvoir des activités plus écologiques dans les administrations et stimuler les marchés de biens et de services écologiques. Les pressions environnementales poussent aussi les pouvoirs publics à repenser leur rôle en défendant une durabilité accrue grâce à des infrastructures plus résistantes, des utilisations innovantes des technologies et des données, ainsi que des services dématérialisés et des modèles de services plus durables. Pour agir vraiment sur ces aspects, les administrations devront disposer d’informations détaillées sur l’impact environnemental de leur travail dans les différentes agences, aux différents niveaux d’administration et dans le cadre des différents types d’activités.
Le changement climatique et d’autres pressions environnementales obligent également à transformer les pratiques et les activités courantes du secteur public. Les administrations publiques doivent veiller à disposer d’agents et de services publics plus résilients, capables d’assurer la continuité des activités tout au long des changements entraînés par le climat et d’autres menaces environnementales ou d’une autre nature. Un surcroît d’attention est aussi accordé aux biens immobiliers et aux actifs publics, en particulier au type d’activités et de maintenance nécessaires pour garantir les performances écologiques et la résistance au climat des infrastructures.
Les pouvoirs publics peuvent aussi donner l’exemple en imposant à leurs fournisseurs les exigences relatives aux chaînes d’approvisionnement responsables et en encourageant les chaînes d’approvisionnement à respecter les normes de CRE sous peine de ne plus pouvoir travailler avec le secteur public (voir le domaine n° 2, sur Tirer parti du pouvoir d’achat du secteur public : les passations de marchés écologiques). En tant qu’acheteur important de biens, le secteur public est bien placé pour influencer les pratiques dans les chaînes d’approvisionnement internationales, en exigeant des fournisseurs qu’ils tiennent compte des considérations et des recommandations relatives à la CRE. Dans ce contexte, les pays élaborent progressivement des cadres d’achats publics responsables prenant en compte les préoccupations environnementales, y compris pour les chaînes d’approvisionnement mondiales (voir les indicateurs clés - Graphique 4.2, Panel E) (OCDE, à paraître[86]).
Conscients de ces enjeux, certains pays ont déjà mis en place des stratégies pangouvernementales pour écologiser leurs activités et contribuer à ce que leurs engagements nationaux et internationaux concernant le climat et l’environnement soient tenus. Par exemple, le Canada a mis en place la stratégie pour un gouvernement vert afin d’appuyer l’engagement gouvernemental à atteindre zéro émission nette d’ici 2050, avec une cible intermédiaire correspondant à une réduction de 40 % des émissions d’ici 2025 pour les installations fédérales et le parc de véhicules conventionnels (Encadré 4.16). Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a reçu la consigne d’aligner la gestion des achats et des biens immobiliers fédéraux de sorte sur la réalisation de l’objectif de 100 % d’énergies propres d’ici à 2035 et de zéro émission nette au plus tard en 2050 (Bureau exécutif du Président, États-Unis, 2021[129]).
Encadré 4.16. Stratégie du Canada pour un gouvernement vert
La « Stratégie pour un gouvernement vert » appelle le gouvernement à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère et accroître la résilience de ses actifs, ses services et ses opérations en s’adaptant aux changements climatiques. Le gouvernement canadien prévoit de « passer à des opérations zéro émissions nettes et résilientes au climat, tout en réduisant les impacts environnementaux au-delà du carbone, y compris sur les déchets, l’eau et la biodiversité ». Le Centre pour un gouvernement vert (du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada) doit « assurer le leadership pour la réalisation d’opérations zéro émissions nettes, résilientes et écologiques du gouvernement ».
Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement canadien s’est engagé à agir dans les domaines suivants :
Mobilité et parcs de véhicules : adopter des solutions de mobilité à faibles émissions de carbone, déployer des infrastructures de soutien dans ses installations et moderniser son parc de véhicules. Par exemple, le gouvernement favorisera les possibilités d’opter pour des dispositifs d’aménagement du travail en mettant en place des solutions de télécommunication comme le télétraitement et des mesures de soutien pour les solutions informatiques.
Biens immobiliers : tenir un plan à jour pour le portefeuille de biens immobiliers zéro émissions nettes et résilients au climat afin de déterminer la voie la plus rentable pour la réalisation d’opérations immobilières zéro émissions nettes et résilientes au climat d’ici 2050 (partage d’installations, maximisation de l’efficacité énergétique et adoption de carburants à plus faible teneur en carbone). De plus, les administrations réduiront leur consommation d’eau et leur charge sur les réseaux municipaux et diminueront l’impact de leurs déchets sur l’environnement. Enfin, elles géreront leurs biens immobiliers de sorte à préserver et restaurer la biodiversité, atténuer les changements climatiques et s’y adapter, en entretenant et restaurant des zones sauvages ou presque sauvages qui conservent des populations saines d’espèces indigènes.
Opérations et services résilients au climat : réduire au minimum les perturbations et les dommages causés aux biens, aux services et aux opérations de l’administration par le changement climatique. Le Canada devrait augmenter la formation et le soutien fournis aux fonctionnaires pour évaluer les effets des changements climatiques, réaliser des évaluations des risques liés aux changements climatiques et concevoir des mesures d’adaptation, et faciliter la mise en commun des pratiques exemplaires et des leçons retenues.
Approvisionnement en biens et services : appuyer la transition vers une économie zéro émissions nettes et circulaire au moyen d’achats écologiques fondés sur les principes d’évaluation du cycle de vie et l’adoption de technologies propres et de produits et services écologiques.
Politiques : harmoniser les politiques opérationnelles pertinentes pour mieux intégrer le verdissement et la résilience climatique, et inclure les priorités de verdissement dans les responsabilités des hauts fonctionnaires, qui veilleront à ce que les enjeux climatiques soient pris en compte de façon globale tant dans la planification et que dans les opérations.
La surveillance et les outils de mesure des performances sont en place : ils doivent garantir que le gouvernement rendra compte de ses résultats en matière environnementale, dans le respect des principes de transparence et d’ouverture des données.
Dans la mesure où le secteur public est le premier employeur (et le premier budget) dans de nombreux pays de l’OCDE, « écologiser » ses pratiques peut peser dans la réalisation des objectifs environnementaux et orienter les comportements individuels en faveur de l’environnement. Le service public peut donner l’exemple en adoptant des dispositifs et des systèmes d’aménagement du travail sans incidence sur le climat. Une transition plus permanente vers le télétravail, par exemple, peut réduire les émissions produites par les trajets quotidiens et autres déplacements, y compris vers des plateformes gouvernementales centralisées sur le plan géographique dans les capitales, dont l’empreinte en termes d’émissions est substantielle. Comme il a été dit plus haut, il en va de même pour les besoins en équipements, y compris le mobilier de bureau, les consommables et les outils informatiques utilisés pour effectuer les missions de service public (voir le domaine n° 2, section sur Tirer parti du pouvoir d’achat du secteur public : les passations de marchés écologiques). La numérisation des services peut produire des effets similaires, en permettant aux citoyens d’accéder aux services publics ou de participer à des programmes gouvernementaux sans se déplacer ni utiliser de papier.
À l’inverse, le changement climatique et d’autres menaces pour l’environnement peuvent influencer et perturber les services et les activités des administrations et il faut donc renforcer la résilience des agents publics. Les enseignements tirés de la gestion des fonctionnaires pendant la pandémie de COVID-19 peuvent aider à identifier des possibilités de gérer et d’exploiter le changement en faveur d’une puissance publique plus durable (OCDE, 2020[130]).
Les États peuvent également montrer l'exemple en reconnaissant le lien entre le genre et l'environnement et en l'intégrant dans leur action environnementale. Il peut s'agir de faire un effort pour accroître l'équilibre entre les genres au sein du personnel des organes décisionnels du secteur public, ce qui permet de mettre en avant des expériences diverses en matière d'environnement et, potentiellement, de contribuer à des résultats environnementaux positifs. Par exemple, il a été prouvé que la présence des femmes dans la prise de décision politique se traduisait par des objectifs et des politiques climatiques plus ambitieux (OCDE, 2022[131] ; Mavisakalyan et Tarverdi, 2019[132]). De même, une étude portant sur les législateurs du Parlement européen a révélé que, si les hommes et les femmes manifestaient un intérêt similaire pour les questions environnementales, les législatrices étaient nettement plus susceptibles de soutenir la législation environnementale, même en tenant compte de la nationalité et de l'idéologie politique (Ramstetter et Habersack, 2019[133]).
4.5.1. Imaginer des services publics plus écologiques à l’ère du numérique
Alors que les gouvernements revoient la conception et la prestation des services publics à l’ère numérique, ils devraient réfléchir à leurs effets sur l’environnement et à leurs conséquences à plus grande échelle sur le climat. Les pays Membres de l’OCDE sont de plus en plus conscients que l’utilisation des technologies numériques et des données transforment complètement l’expérience des usagers des services publics et qu’il ne s’agit pas simplement de transférer en ligne des informations et des processus analogiques (OCDE, 2014[134] ; OCDE, 2020[135]).
Les pouvoirs publics devraient rechercher un équilibre entre les avantages que leur transformation numérique procure aux citoyens et aux entreprises et la préservation de l’environnement, en investissant dans des infrastructures numériques durables et écologiques. Il leur faut donc bien comprendre les conséquences que la conception et la prestation des services publics à l’ère numérique ont sur l’environnement, en étudiant soigneusement les types de technologies numériques et les modalités d’utilisation des infrastructures communes à toute l’administration (centres de données ou services dans le nuage, ordinateurs et équipements électroniques, etc.), les principales prescriptions techniques susceptibles d’influer sur l’empreinte environnementale du pays (consommation d’électricité, déchets électroniques, fabrication de matériaux, etc.) ainsi que les cycles de vie informatiques. Par exemple, compte tenu de l’intérêt croissant pour la chaîne de blocs et son utilisation de plus en plus fréquente, les pouvoirs publics devraient évaluer précisément l’empreinte environnementale des technologies de ce type et la rapporter aux avantages qu’ils en escomptent, et envisager d’autres options conciliables avec les politiques environnementales en cours (Lindman et al., 2020[136]). Les pouvoirs publics devraient être attentifs aux effets rebond de leurs efforts de numérisation, où les améliorations potentielles de l'efficacité des ressources peuvent, dans certains cas, conduire paradoxalement à une augmentation globale nette de l'utilisation desdites ressources.
Les pouvoirs publics ont déjà commencé à se préoccuper de l’impact sur l’environnement des infrastructures publiques numériques et des infrastructures de données, mais ces efforts doivent être intégrés et intensifiés. Le document de l’OCDE intitulé « Good Practice Principles for Data Ethics in the Public Sector » souligne les mesures qu’il y a lieu pour les États de prendre pour remédier aux incidences environnementales potentielles des infrastructures numériques et des infrastructures de données. Ils pourraient ainsi réduire leur empreinte carbone (entre autres en évitant la prolifération d’infrastructures de données inutiles, redondantes ou se chevauchant entre elles, comme les centres de données) et investir dans des infrastructures non polluantes et exploitant des énergies renouvelables » (OCDE, 2021[137]). En outre, la déclaration de l’UE faite à Berlin au sujet de l’administration numérique9 prévoit un principe de durabilité numérique et appelle à des actions concrètes pour atténuer les effets climatiques des administrations numériques. De même, la Stratégie du Canada pour un gouvernement vert (Encadré 4.16) comprend la promotion de la passation de marchés publics durables, des stratégies pour une informatique plus écologique et des initiatives en faveur d’une numérisation du secteur public respectueuse de l’environnement. En France, une mission interministérielle dédiée (ministère de la Transition écologique et Direction interministérielle du numérique, DINUM) met en œuvre l’initiative pangouvernementale Green Tech pour favoriser la transformation numérique écologique du secteur public (Encadré 4.17).
Les pays de l’OCDE s’attachent de plus en plus à appréhender les infrastructures numériques et les infrastructures de données sous l’angle de l’écologie. Cela nécessite d’adopter une démarche stratégique visant à administrer les infrastructures numériques en conformité avec les politiques environnementales plus globales et d’instaurer des mécanismes de gouvernance pour concilier la numérisation de l’administration et les actions en faveur du climat. Il s’agit pour cela d’améliorer l’harmonisation et la coordination des politiques entre l’administration numérique et les autorités environnementales pour identifier les synergies et mobiliser les ressources ; de plus, d’autres domaines d’action sont importants pour la répartition des ressources et l’acquisition d’infrastructures numériques (budgets publics, organismes traitant les achats publics, etc.).
Dans le cadre de cette démarche stratégique et compte tenu du coût et du cycle de vie des technologies numériques, réduire l’empreinte de l’administration numérique exige de planifier, sélectionner et hiérarchiser les investissements dans les technologies numériques respectueuses de l’environnement. Du point de vue de la gouvernance publique, il s’agit de tenir compte des variables environnementales au moment de la planification des projets d’administration numérique et de déterminer leur proposition de valeur (études de cas) afin de donner la priorité aux infrastructures numériques durables, de promouvoir l’économie circulaire et les produits remis à neuf et de réduire la production de déchets informatiques du secteur public.
Les gouvernements peuvent encore progresser dans leur compréhension des conséquences que la conception et la fourniture des services publics ont sur l’environnement à l’ère du numérique. Les gouvernements pourraient ainsi veiller à ce que les « normes de service », c’est-à-dire les principes à l’aune desquels la qualité des services publics est appréciée, incluent un élément vert. C’est déjà le cas pour un certain nombre de priorités des politiques publiques (inclusion, ouverture, sécurité, confidentialité et fiabilité) ; ajouter une dimension écologique à ces normes de qualité permettrait aux pouvoirs publics d’identifier les domaines où concentrer leurs efforts pour que la transition numérique respecte l’environnement.
Encadré 4.17. L’Initiative Green Tech de la France
Reconnaissant l’impact croissant des technologies de l’information et des technologies numériques sur les émissions de carbone, la France a lancé en mai 2020 l’initiative Green Tech, qui vise à accroître la sensibilisation à l’empreinte environnementale des technologies numériques, et à la réduire, dans la prestation des opérations et des services du secteur public. Créée sous la responsabilité de la mission interministérielle de réduction de l’impact environnemental numérique, qui regroupe le ministère de la Transition écologique et la Direction interministérielle du numérique (DINUM), l’initiative vise à mettre en place des services publics éco-responsables à l’ère du numérique grâce à 20 actions destinées à adapter les opérations publiques aux besoins environnementaux de l’avenir, ainsi qu’à des dispositions spécifiques sur les conséquences environnementales des technologies numériques dans le secteur public.
L’initiative comprend une feuille de route stratégique qui prévoit des objectifs et des activités spécifiques dans trois domaines :
Développer la connaissance de l’empreinte environnementale numérique, avec notamment des cadres de mesure et la collecte de données.
Réduire l’empreinte environnementale du numérique dans le secteur public, par exemple grâce à des achats numériques responsables, à l’écoconception de services numériques et à une sensibilisation, un soutien et une formation accrus en matière d’actions et d’utilisations numériques responsables.
Faire du numérique le levier de la transition écologique et solidaire, par la promotion de la gestion des déchets d’équipements électriques et électroniques et de l’économie circulaire.
Actuellement, Green Tech pilote l’impact environnemental des initiatives au sein de la stratégie numérique TECH.GOUV. Des ressources complémentaires sont en cours de développement pour en soutenir la mise en œuvre, notamment :
Cadre et conseils pour soutenir l’écoconception des services numériques
Guide pratique pour mettre en œuvre des achats numériques durables
Rationalisation de la méthode d’évaluation du projet de MAREVA2 avec un volet « numérique responsable » en cours).
Diffusion et adaptation de la méthodologie de calcul de l’empreinte environnementale des technologies numériques (en cours)
4.5.2. Suivre l’évolution de l’empreinte environnementale des administrations
Les gouvernements commencent à peine à recueillir des données sur les répercussions environnementales de leur empreinte écologique. Certains organismes publics ont des cibles à respecter en termes de consommation d’énergie, d’eau, de papier etc., mais ceux qui parviennent à retracer l’ensemble de leurs émissions de carbone ou autres facteurs de risque pour l’environnement sont assez rares. Des données à la disposition du public sur des indicateurs essentiels (émissions de carbone, par exemple) permettant de comparer les autorités régionales, les municipalités et les organismes publics (à la fois entre eux et dans le temps) aideront à focaliser l’attention des décideurs et des opinions. Le recours accru à l’informatique en nuage ou aux technologies pourrait aider les organismes du secteur public à combiner les ressources, à réduire les redondances et à mieux collaborer entre eux pour s’attaquer à la question du coût et de l’impact environnemental des services publics (qui découle par exemple de l’énergie qu’ils consomment ou des déchets électriques). Cela pourrait consister par exemple à réutiliser les systèmes d’arrière-plan plutôt que d’acheter ou concevoir de nouveaux systèmes, à renforcer l’hébergement avec des solutions de plateformes partagées pour réaliser des économies d’échelle ou à établir des services partagés pour assurer l’utilisation la plus rationnelle possible des actifs du secteur public.
Pour proposer des services publics plus respectueux de l’environnement, il faut aussi vérifier que la fourniture de ces services contribue effectivement à la réalisation des objectifs climatiques et environnementaux. Des indicateurs de performance et des incitations à cet égard permettent entre autres de surveiller les émissions ou la gestion des déchets solides (le recyclage, par exemple) ainsi que d’autres formes de pollution ou de dégradation de l’environnement pertinentes au regard des engagements nationaux et internationaux. Les pays qui tentent de réduire leur empreinte environnementale doivent mesurer et comprendre les effets sur l’environnement des activités du secteur public – de l’éducation à la défense – mais aussi mettre en place des incitations pour rendre les services publics plus vertueux en matière d’environnement, à tous les niveaux d’administration. Les gouvernements ont un système bien établi de production de comptes annuels et de rapports financiers. Ils pourraient ainsi envisager de publier des rapports annuels et des bilans qui révèlent l’empreinte environnementale des activités du secteur public.
4.6. Conclusions
Les éléments examinés dans ce chapitre montrent que l'avenir de la gouvernance démocratique etd'une action environnementale efficace sont intimement liés. Les citoyens attendent de plus en plus des gouvernements démocratiques qu'ils montrent qu'ils sont les mieux placés pour gérer les pressions environnementales, en particulier la menace climatique existentielle, tandis que le succès des politiques climatiques et environnementales dépend simultanément d'une gouvernance publique efficace et efficiente. Des efforts accrus sont nécessaires pour que les gouvernements soient en mesure d'orienter et de créer un consensus et un climat de confiance sur l'agenda vert, de transformer les outils de gouvernance publique pour l'action climatique et environnementale, et de montrer l'exemple grâce à un secteur public plus vert et plus résilient. En s’inspirant des bonnes pratiques existantes, l'OCDE a développé un plan d’action exposant les mesures concrètes que les pays peuvent prendre pour traiter les questions mentionnées dans ce chapitre par des réformes ambitieuses et efficaces : www.oecd.org/governance/reinforcing-democracy/.
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[39] Williams, D. (2019), « Building accountable resource governance institutions », U4 Anti-Corruption Resource Centre, Michelsen Institute, https://www.u4.no/publications/building-accountable-resource-governance-institutions.pdf.
Notes
← 1. Cette valeur varie selon les groupes de population ; 41 % des jeunes âgés de 15 à 39 ans pensent que le changement climatique est le problème mondial le plus préoccupant, contre 16 % pour les 55 ans ou plus.
← 3. Voir par exemple Open Data Charter’s Open Up Climate Data guide: Using Open Data to Advance Climate Action à cette adresse: https://open-data-charter.gitbook.io/open-up-guide-using-open-data-to-advance-climate-a/
← 6. L'initiative Blue Dot Network, qui s'appuie sur les Principes du G20 en matière d’investissements dans les infrastructures de qualité, propose une norme commune d'excellence des projets pour attirer les capitaux privés vers les projets d'infrastructure dans les pays en développement et les pays émergents.
← 7. irhttps://www.nccs.gov.sg/who-we-are/inter-ministerial-committee-on-climate-change/#:~:text=The%20Inter%2DMinisterial%20Committee%20on,the%20impacts%20of%20climate%20change