Au cours des quatre dernières décennies, le rôle des établissements d’enseignement supérieur (EES) dans les écosystèmes qui les entourent a évolué. En plus de leur activité d’enseignement et de recherche, les EES collaborent avec des parties prenantes externes et soutiennent les entrepreneurs, et contribuent ainsi à la croissance et au bien-être, en particulier dans leurs propres communautés et réseaux. Les interconnexions entre les EES et leurs parties prenantes peuvent améliorer les performances et la résilience de toutes les parties concernées. Nous supposons que la proximité physique joue un rôle important dans la mise en relation des acteurs et l’alignement des agendas.1 C’est pourquoi il est possible de décrire ces « espaces » comme des « écosystèmes entrepreneuriaux » (ou écosystèmes locaux) et les EES comme des « universités entrepreneuriales ».
Etzkowitz définit l’université entrepreneuriale comme une université qui mène des activités au-delà de l’enseignement et de la recherche, afin de remplir sa « troisième mission » (Etzkowitz, 2013[1]).2 Gibb, Haskins et Robertson (2013[2]) affirment en outre que les universités entrepreneuriales se consacrent à « la création de valeur publique par le biais d’un processus d’engagement ouvert, d’apprentissage mutuel, de découverte et d’échange avec toutes les parties prenantes de la société : locales, nationales et internationales ». Désormais orientées vers les parties prenantes externes, les universités entrepreneuriales s’engagent dans leur écosystème, certaines universités étant devenues des moteurs du développement économique dans leurs propres régions.
Ces EES contribuent à motiver l’esprit d’entreprise des personnes en enseignant l’entrepreneuriat, en fournissant des espaces d’incubation et en se co-spécialisant dans leurs activités de recherche. L’Université de Stanford en Californie ou le Massachusetts Institute of Technology en sont deux exemples célèbres : ils attirent les talents, forment une nouvelle génération d’entrepreneurs et assurent la liaison avec les entreprises technologiques locales pour produire une recherche et une technologie de pointe (Jaffe, 1989[3]). Il ne faut toutefois pas les considérer comme des références absolues. Les EES peuvent être entrepreneuriaux de nombreuses manières, en promouvant des activités d’enseignement transdisciplinaires et en collaborant et en co-créant avec les parties prenantes de leurs communautés et de leurs réseaux.
Pour réussir, les EES entrepreneuriaux doivent cependant trouver un équilibre entre le soutien à leurs communautés régionales et la production de recherches (et de compétences) pertinentes au niveau international. La pandémie de COVID-19 a montré comment les universités entrepreneuriales et collaboratives peuvent jouer un rôle fondamental dans la fourniture de solutions fondées sur la connaissance et l’innovation scientifique et technologique dans leurs écosystèmes respectifs. Par exemple, de nombreux EES ont mobilisé des ressources scientifiques et médicales pour faire face à l’urgence sanitaire, et ont contribué ainsi à la recherche mais aussi à la production d’équipements médicaux (par exemple, respirateurs, masques, gels hydroalcooliques). Les EES peuvent poursuivre ce travail et aider leurs régions en proposant un enseignement et une recherche qui reflètent les possibilités entrepreneuriales et d’innovation. Ils ne doivent cependant pas devenir des agences de développement régional et il est important qu’ils génèrent des activités pertinentes au niveau international et qu’ils représentent une passerelle pour les communautés qui les accueillent. Dans l’idéal, les établissements d’enseignement supérieur sensibles au contexte local peuvent atteindre un équilibre durable entre la recherche axée sur la curiosité et la co-spécialisation, géré par une direction et une organisation entrepreneuriales qui utilisent les fruits de la recherche.