La Norvège a soutenu le développement du logiciel District Health Information Software 2 (DHIS2) pour innover dans la gestion des données de santé. Grâce à la technologie open source, à l'adaptation aux pays partenaires et à l'engagement soutenu des partenaires au développement, DHIS2 est utilisé dans 73 pays. Une approche participative, un renforcement des capacités et un passage en temps opportun à des applications en ligne et mobiles ont été essentiels à la réussite.
Développer avec succès l’innovation fondée sur les technologies
Abstract
Défi
Les innovations peuvent avoir une incidence importante dans la réponse aux défis du développement. De nombreux membres du Comité d'aide au développement (CAD) soutiennent donc les efforts d’innovation et tirent parti des capacités d’innovation qui existent dans leur propre pays. Cependant, lorsque les innovations sont conçues dans et pour les pays à revenu élevé, leur transfert vers des pays à revenu faible ou intermédiaire aboutit souvent à des résultats sous-optimaux, car elles dépendent souvent d’infrastructures bien développées et sont conçues pour des utilisateurs ayant des comportements différents. L’approche traditionnelle du transfert de technologie Nord-Sud en matière d’innovation sous-évalue les capacités d’innovation locales et le potentiel des innovateurs locaux et frugaux, avec le risque de fausser les écosystèmes locaux d’innovation.
Approche
Depuis le lancement en 1994 du Programme des systèmes d’information sur la santé (HISP) dans l'Afrique du Sud d'après l’apartheid, l’Agence norvégienne de coopération pour le développement, Norad, a financé un projet de l’Université norvégienne d’Oslo et de l’Université sud-africaine du Cap-Occidental visant à développer le logiciel District Health Information Software 2 (DHIS2) pour gérer les données de santé dans les pays en développement. Pour accroître la probabilité d’une transposition à plus grande échelle du DHIS, la Norvège et l’équipe du projet ont veillé à :
Un haut degré d’appropriation par les pays : une approche adaptable qui peut compléter les systèmes existants des ministères de la Santé dans des contextes où les ressources sont limitées. La propriété des données appartient à chaque institution utilisatrice.
L'open source : cela évite les contraintes liées aux licences et aux redevances, tout en facilitant l’apprentissage et l’amélioration avec des contributeurs potentiels dans le monde entier. Une architecture ouverte et bien documentée facilite également l’interopérabilité avec les autres systèmes nationaux d’information.
Un renforcement des capacités : plus de 135 « académies » de DHIS2 ont dispensé une formation et apporté un soutien aux utilisateurs de la plateforme, en renforçant les capacités locales dans chaque pays de déploiement, tandis que des groupes de réseaux régionaux, coordonnés par l’Université d’Oslo, fournissent une formation et un soutien pour la mise en œuvre.
Un engagement durable : la Norvège soutient le logiciel DHIS2 depuis plus de deux décennies, en contribuant à son expansion et à son amélioration continue par le biais de projets pluriannuels qui sont renouvelés dès la réalisation d’objectifs prédéfinis. La Norvège plaide également pour que d’autres partenaires soutiennent le projet afin d’améliorer sa stabilité financière, de réduire le développement induit par les partenaires, de guider l’orientation stratégique et de réduire les risques.
Résultats
Le succès de l’initiative lui a permis de se développer et de soutenir sa croissance au fil du temps, et d’attirer des financements substantiels de la part de grands partenaires de la coopération pour le développement dans le secteur de la santé. Le logiciel DHIS2 est devenu le plus grand système de gestion d’informations de santé au monde, utilisé par 73 pays à revenu faible ou intermédiaire en 2021.
Grâce au DHIS2, les pouvoirs publics peuvent mieux planifier et coordonner leurs interventions dans le secteur de la santé. Par exemple, le Sri Lanka a utilisé le DHIS2 pour lancer rapidement un système national de suivi de la COVID-19, le Malawi utilise le DHIS2 pour surveiller les taux de rupture de stock et la consommation de fournitures de santé, et l’Afghanistan effectue des paiements aux prestataires de soins en fonction des performances à l’aide des tableaux de bord du DHIS2. Les acteurs de la chaîne de responsabilité peuvent aussi mieux évaluer les progrès accomplis, et les partenaires de la coopération pour le développement peuvent de la même façon planifier et suivre les effets de leur soutien.
L’architecture simple et ouverte ainsi que l’utilisation généralisée du logiciel DHIS2 ont permis des applications intersectorielles, comme dans l’eau et l’assainissement, l’agriculture, l’éducation et d’autres secteurs. Cette initiative est soutenue par une communauté robuste d’utilisateurs, d’agents de mise en œuvre et de développeurs du logiciel, dont la croissance a été facilitée par les « académies » de DHIS2 et d’autres activités de renforcement des capacités.
Enseignements tirés
Les chercheurs qui ont participé au DHIS2 ont identifié un certain nombre de facteurs de réussite :
La flexibilité et la modularité de la conception ont permis une personnalisation adaptée aux différentes exigences des cas d’utilisation.
Le développement du DHIS2 a été motivé par les retours d’information des utilisateurs et la recherche de suivi. Cette approche ouverte et participative a contribué à la pertinence, à l'adéquation et à l’innovation.
L’apprentissage par la participation pratique a permis de renforcer les capacités locales et a contribué à l’acceptation des projets dès les premiers stades. La formation continue sur le DHIS2 favorise la réussite à long terme.
La mise en place d’un réseau d’experts régionaux, qui apportent aux pays un soutien sur le DHIS2, a contribué à aider les pays à étendre, maintenir et adapter leurs systèmes DHIS2 face à des nouveaux besoins et des nouvelles crises (comme celle de la COVID-19).
Grâce à la souplesse des besoins de financement, le projet a pu progresser graduellement.
Le projet s’est progressivement déplacé vers des applications en ligne et mobiles, ce qui lui a permis de rester pertinent.
Une approche de plateforme a permis à l’équipe de projet de s’appuyer sur les connaissances et l’expertise d’institutions autres que les partenaires du projet, notamment de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), du secteur privé et des organisations de la société civile.
Un large éventail d’utilisateurs peut conduire à une standardisation. L’adoption à grande échelle de la technologie a incité d’autres pays à l’adopter et l’OMS à élaborer des normes de mesure au sein de la plateforme.
Informations supplémentaires
Adu-Gyamfi, E., P. Nielsen et J. I. Sæbø (2019), « The dynamics of a global health information systems research and implementation project », LiU Electronic Press, Sweden https://ep.liu.se/ecp/161/013/ecp19161013.pdf.
Dehnavieh et al (2019), « The District Health Information System (DHIS2): A literature review and meta-synthesis of its strengths and operational challenges based on the experiences of 11 countries », Health Information Management Journal, vol. 48, n° 7, https://www.researchgate.net/publication/325762722_The_District_Health_Information_System_DHIS2_A_literature_review_and_meta-synthesis_of_its_strengths_and_operational_challenges_based_on_the_experiences_of_11_countries.
DHIS2, « DHIS2 as a Data Warehouse in Afghanistan », https://dhis2.org/dhis-data-warehouse-afghanistan.
DHIS2, « Integrating HMIS and eLMIS systems for better decision making in Malawi », https://dhis2.org/malawi-logistics-integration.
Digital Public Goods Alliance, DHIS2 – A Digital Public Goods Case Study, https://digitalpublicgoods.net/blog/launching-dhis2-pathfinding-pilots.
Exemplars in Global Health, « Scaling DHIS2 in Sri Lanka: Early action to track and prevent COVID-19 », https://www.exemplars.health/emerging-topics/epidemic-preparedness-and-response/digital-health-tools/sri-lanka.
Health Information Systems Programme (HISP) (site web), http://hisp.uio.no.
Muhaise, H. et A.H. Ejiri (2016), « Factors influencing district health information software version 2 success – A case of the greater Bushenyi districts, Uganda », American Scientific Research Journal for Engineering, Technology and Sciences, vol. 26, n° 1, https://asrjetsjournal.org/index.php/American_Scientific_Journal/article/view/1815.
PATH, An Interim Review of the Health Information Systems Programme—University of Oslo— with Recommendations for Future Action, https://www.mn.uio.no/ifi/english/research/networks/hisp/hisp-assessment-report.pdf.
University of Oslo, DHIS2 (site web), https://dhis2.org.
« Ghana: Worldwide collaboration on health information systems », https://www.youtube.com/watch?v=gFnnNWC55Iw.
Ressources de l’OCDE
OCDE (2019), OECD Development Co-operation Peer Reviews: Norway 2019, Examens de l'OCDE sur la coopération pour le développement, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/75084277-en.
Pour en savoir plus sur la coopération norvégienne pour le développement, voir :
OCDE (2021), « Norvège », dans Les profils de coopération au développement, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/39bf9d4a-fr.