Israël est très vulnérable aux effets du changement climatique, qui exacerbent les tensions sur les ressources en eau déjà rares. Pour que son économie à forte croissance dispose d'un approvisionnement en eau fiable et suffisant, le pays investit massivement dans les infrastructures à l’appui de ses réformes institutionnelles et réglementaires. Le réemploi à grande échelle des eaux usées et le dessalement d’eau de mer, conjugués à l’envoi de signaux par la réglementation et les prix, ont permis à Israël d’atténuer progressivement le phénomène de surexploitation des ressources en eau douce et de gagner en résilience face au changement climatique.
Israël : des plans pour une gestion durable de l’eau
Abstract
Défis
Israël est très vulnérable aux effets du changement climatique. Depuis quelques années, les phénomènes météorologiques extrêmes sont plus fréquents et durent plus longtemps, notamment les années excessivement humides ou sèches. Dans un scénario d’émissions élevées, la hausse de la température moyenne annuelle pourrait atteindre 4.4 °C d’ici à la fin du siècle et les jours de chaleur constituer 60 % de l’année. Dans l’intervalle, le total des précipitations annuelles pourrait baisser de 25 % et varier grandement d'une année sur l’autre, en fonction des conditions de sécheresse (OMS et CCNUCC, 2022). Entre autres conséquences, cela ralentira la recharge des aquifères souterrains et nuira aux écosystèmes d’eau douce ; le niveau du lac Kinneret baissera et son degré de salinité augmentera ; de même que le sud d’Israël continuera de se désertifier. Le pays a à faire à une multiplicité de risques et à une grande incertitude climatique.
À ce jour, Israël est déjà confronté à un fort stress hydrique et le désert couvre plus de la moitié de sa superficie. Or, la grande majorité de ses citoyens est directement raccordée au réseau national d'alimentation en eau. Cet accès est toutefois menacé, compte tenu des prévisions de croissance démographique et de diminution de l’approvisionnement en eau des sources naturelles. Par exemple, des dizaines de milliers de Bédouins qui vivent dans des villages non reconnus du Néguev n’ont que partiellement accès à l’eau.
Malgré le recours généralisé aux technologies d'irrigation, environ la moitié de l’eau utilisée à des fins agricoles est de l’eau douce, ce qui contribue au niveau élevé de stress hydrique. Le pays doit progressivement diminuer la surexploitation des ressources en eau douce et mieux répartir l’eau entre les secteurs au profit de la nature, tout en veillant à une distribution équitable des rares ressources en eau douce du pays.
Approche
Pour que son économie à forte croissance dispose d'un approvisionnement en eau fiable et suffisant, Israël investit massivement dans les infrastructures à l’appui de ses réformes institutionnelles et réglementaires. Le réemploi à grande échelle des eaux usées et la désalinisation de l’eau de mer, conjugués à l’envoi de signaux par la réglementation et les prix, ont permis à Israël d’atténuer progressivement le phénomène de surexploitation des ressources en eau douce.
Tous ces efforts procèdent du schéma directeur national à long terme du secteur de l’eau défini en 2012 pour l’horizon 2050. Y sont indiqués la vision, les buts et objectifs d’Israël pour le secteur national de l’eau, ainsi que la ligne de conduite à suivre à l’égard des grandes problématiques de l’eau. Il contient des prévisions à moyen et long terme sur l'équilibre des ressources en eau du pays, le but étant d’anticiper les difficultés à attendre dans le domaine de l’eau et de remédier à l'incertitude climatique.
Un système national de transport d’eau en vrac garantit une alimentation optimale depuis plusieurs sources, sollicitées en fonction de la demande. De vastes campagnes d’information ont été menées pour mettre en exergue la valeur de l’eau. Grâce à la présence quasi-universelle de compteurs d’eau, il est possible de vérifier le respect des quotas de prélèvement d’eau. Israël s’est doté d'un réseau d’infrastructure moderne qui assure le bon acheminement de l’eau, du nord au sud et d’est en ouest, avec un taux de perte proche de zéro.
Le changement climatique a contraint le pays à s’adapter davantage encore aux phénomènes météorologiques extrêmes. En 2018, le gouvernement a adopté un plan stratégique de lutte contre la sécheresse pour 2018-30. Les principales mesures prévues consistent à intensifier la distribution d’eau dessalée, à abaisser la demande d’eau, à encourager la préservation de la ressource et à mieux protéger le lac Kinneret. Surtout, l’Autorité de l'eau a imposé aux systèmes d’irrigation raccordés au réseau national de distribution des réductions permanentes des quotas d’eau à usage agricole dans une proportion pouvant atteindre 41 %. Les agriculteurs ont la possibilité de renoncer de leur plein gré à une partie de leur quota en échange d'une aide.
En outre, pour rendre les systèmes naturels plus résilients, la Direction israélienne de la Nature et des Parcs, le ministère de la Protection de l’environnement et l’Autorité de l'eau ont conjointement promulgué en 2013 un plan directeur de l’alimentation hydrique du milieu naturel. Une équipe interministérielle a établi des plans fluviaux afin d’estimer la quantité d’eau dont les différents écosystèmes ont besoin. Y sont indiquées les quantités d’eau à prélever, à quelles fins et à quel moment. De tels plans ont été approuvés pour plusieurs grands cours d’eau. Certains prévoient un quota minimum pour les écosystèmes. Par ailleurs, les instances associées à l’établissement des plans de gestion de l’eau, de même que le cadre institutionnel et réglementaire dans lequel ils s’inscrivent, sont décrits dans un manuel.
Résultats
Israël a su s'adapter au climat aride, à des ressources en eau limitées et à l’incertitude climatique. Il fait partie des pays de l’OCDE qui consomment le moins d’eau par habitant (138 m3 contre 691 m3 dans la zone OCDE en 2020). Il est aussi celui qui recourt le plus aux effluents aqueux recyclés à des fins agricoles : plus de 87 % des effluents d’eaux usées sont réutilisées dans l'agriculture.
Les cinq usines israéliennes de dessalement, qui utilisent les technologies modernes d’osmose inverse et de génie des procédés, sont parmi les plus performantes au monde et fournissent plus de 80 % de l’eau de distribution (c’est-à-dire l’eau non destinée à l’irrigation). Le dessalement a toutefois des effets néfastes sur l’environnement.
Environ 94 % des eaux usées sont collectées et traitées : 87 % sont réutilisées, principalement à des fins agricoles. Dans l’ensemble, entre 2000 et 2018, la part des prélèvements d’eau douce à usage agricole est passée de 64 % à 35 % du total des prélèvements d’eau. La pollution des eaux souterraines par les éléments nutritifs, due à l’utilisation intensive des engrais en agriculture, continue de poser problème.
Israël a également grandement avancé s'agissant de mieux répartir l’eau entre les secteurs et au profit de la nature. Les plans de gestion de l’eau aident à établir le régime de débit, la qualité de l’eau et les mesures nécessaires pour protéger l’écosystème ou le remettre en état, en tenant compte des autres usages et besoins existants en amont et en aval.
Enseignements
Israël est à l’avant-garde de l’innovation dans la gestion durable de l’eau. Les plans dont le pays s’est doté à cet effet lui ont permis de réduire la surexploitation des ressources en eau douce et de mieux répartir l’eau entre les secteurs et au profit de la nature. Au fil du temps, Israël a accumulé une multitude d’innovations technologiques et de savoirs utiles pour gérer durablement l’eau dans tous les secteurs de l’économie. La diffusion de nouvelles technologies de production et de traitement de l’eau mais aussi d’outils modernes de gestion pourrait bénéficier à d’autres pays et régions arides en les aidant à se préparer en amont à s'adapter au changement climatique.
En savoir plus
OCDE (2023), Examens environnementaux de l'OCDE : Israël 2023, Examens environnementaux de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris. Publication à paraître
Publication à mettre en exergue
OCDE (2023), Examens environnementaux de l'OCDE : Israël 2023, Examens environnementaux de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris. Publication à paraître
Lien vers https://www.oecd.org/water
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