La crise liée au COVID-19 a des incidences régionales et locales très hétérogènes, ce qui entraîne des implications importantes sur les plans de la gestion de crise et de l’action publique. Le présent document examine en détail l’impact territorial de cette crise dans ses différentes dimensions : sanitaires, économiques, sociales et budgétaires. Il présente un panorama détaillé des mesures prises par les gouvernements nationaux et infranationaux pour gérer les campagnes de vaccination à travers les différents niveaux de gouvernement, et atténuer les répercussions territoriales de la crise. Enfin, il propose une analyse prospective en soulignant les leçons à tirer de cette crise sur le plan de la gouvernance pluri-niveaux, et soumet aux responsables publics un certain nombre d’aspects à prendre en compte pour construire des régions plus résilientes.
L’impact territorial du COVID-19 : Gérer la crise et la reprise aux différents niveaux d’administration
Abstract
Messages clés
La pandémie de COVID-19 oblige les gouvernements à tous les niveaux à agir dans un contexte de grande incertitude et de fortes tensions économiques, budgétaires et sociales. Face à l’émergence, dans de nombreux pays, de nouvelles vagues de contaminations depuis la mi-2020 et face à l’apparition de variants, les pouvoirs publics se heurtent aux limites de leur aptitude à ordonnancer l’action publique. Les gouvernements locaux, régionaux et centraux constatent qu’ils ne peuvent pas suivre une démarche linéaire pour gérer la crise, la sortie de crise et le relèvement d’après-crise. Ils doivent au contraire intervenir sur tous les fronts simultanément et de façon synchronisée. Ce besoin de flexibilité et d’adaptabilité conduit les pouvoirs publics à revoir leurs systèmes de gouvernance pluri-niveaux et à redéfinir leurs priorités en matière de développement régional.
Vacciner la population mondiale contre le COVID-19 constitue la seule stratégie de long terme pour contenir la crise liée à cette pandémie (OMS, 2021[1]). Les campagnes de vaccination ont débuté en décembre 2020 et se sont accélérées au cours du premier trimestre 2021. Néanmoins, elles posent d’importantes difficultés d’ordre logistique dans l’ensemble des pays, et elles se doublent d’implications notables sur le plan territorial et en lien avec la gouvernance pluri-niveaux. Au 10 mai 2021, 12 % des habitants des pays de l’OCDE étaient partiellement vaccinés, et 15.8 % étaient intégralement vaccinés. Ces pourcentages étaient, respectivement, de 2.5 % et 1.6 % dans les pays en développement. Pour l’ensemble de la population mondiale, les taux de vaccination partielle et totale s’établissaient à 4.2 % et 4.1 %, respectivement.
L’impact territorial de la crise du COVID-19
La crise du COVID-19 comporte une forte dimension territoriale. En effet, elle n’a pas touché toutes les régions de la même façon, et ses incidences à moyen et long terme ne seront pas les mêmes partout.
Crise sanitaire. Au sein d’un même pays, les incidences de la crise sanitaire sont très variables selon les régions et les municipalités, tant du point de vue des cas déclarés que des décès dus au virus. Sur le plan des taux de mortalité, les disparités régionales sont fortes dans certains pays, ce qui reflète un accès hétérogène aux services de santé, des niveaux différents de vulnérabilité face à la maladie (en raison de critères démographiques, de taux différents de comorbidités, etc.) et des situations socioéconomiques très diverses selon les territoires. Au premier stade de la pandémie, ce sont les zones urbaines densément peuplées qui ont été les plus touchées. En revanche, au second semestre 2020 et en 2021, le COVID-19 s’est propagé aux zones moins denses de certains pays. Il apparaît de plus en plus clairement que, dans de nombreux pays, ce sont les régions situées en bas de l’échelle des revenus et les quartiers défavorisés qui connaissent les taux de mortalité les plus élevés.
Crise économique. Les incidences économiques de la crise du COVID-19 diffèrent selon les régions. Les régions spécialisées dans des secteurs directement ou indirectement exposés à la crise ou participant aux chaînes de valeur mondiales ont subi un impact plus fort, surtout celles qui comptaient une proportion importante de PME (OCDE, 2021[2]). L’impact sur les régions varie également selon les possibilités plus ou moins grandes de télétravailler, qui reflètent en grande partie les fractures numériques. Toutefois, indépendamment de ces fractures, le pourcentage d’emplois se prêtant au télétravail est plus élevé de 13 points dans les villes que dans les zones rurales, en moyenne. Dans de nombreuses régions de l’OCDE, le chômage était beaucoup plus élevé au deuxième semestre 2020 qu’au deuxième semestre 2019, avec des écarts régionaux très marqués au Chili, en Espagne, en Grèce, au Mexique et en République tchèque, par exemple. Dans ces pays, le taux de chômage a progressé deux fois plus dans les régions les plus touchées que dans l’ensemble du pays.
Finances infranationales : les données pour 2020 confirment l’impact négatif de la crise sanitaire et économique sur les dépenses et les recettes des gouvernements infranationaux. Dans certains pays tels que l’Allemagne, l’Espagne, la Finlande, la France et le Japon, cet impact est toutefois moins important que ne le laissaient présager les premières enquêtes. Ce phénomène s’explique, au moins pour partie, par les importantes mesures prises par le gouvernement central ou fédéral pour soutenir les finances locales, ainsi que par des économies réalisées sur les dépenses et par le report ou l’annulation de projets d’investissement. Toutefois, des incertitudes considérables persistent à plus long terme, pour différentes raisons. En premier lieu, il existe des inconnues au niveau de la situation sanitaire et de la campagne de vaccination. En deuxième lieu, de nombreuses dépenses essentielles reportées en 2020 ne pourront pas être repoussées indéfiniment. En troisième lieu, dans de nombreux pays, les recettes fiscales de 2020 reflétaient l’activité de 2019, et non de 2020. En quatrième lieu, l’impact que la crise produira sur les finances infranationales en 2021 et 2022 dépendra de la poursuite et de l’ampleur du soutien assuré par les échelons supérieurs de gouvernement.
La relance post-COVID : l’action des pouvoirs publics
L’impact régional différencié de la pandémie appelle une action publique territorialisée sur les fronts sanitaire, économique, social et budgétaire, ainsi qu’une forte coordination entre les différents niveaux de gouvernement.
La dimension territoriale de l’action sanitaire
De nombreux pays ont d’abord adopté une approche uniforme appliquée au niveau national quand la crise a éclaté, au printemps 2020, avant de passer à une approche plus territoriale et différenciée selon les régions. Ce changement de cap leur a permis d’adapter l’action publique aux besoins locaux et de limiter les coûts liés aux confinements nationaux. Dans de nombreux pays, afin de limiter les répercussions économiques de la crise, des mesures différenciées ont été adoptées selon les localités ou les régions en matière de port du masque, de fermeture des établissements scolaires et des restaurants ou encore de confinement. Tel a notamment été le cas en Allemagne, en Australie, au Canada, en Colombie, en Espagne, en Finlande, en France, en Italie et au Royaume-Uni. Une telle approche territoriale différenciée, qui est naturelle dans les pays fédéraux, où les responsabilités sont largement décentralisées dans le domaine sanitaire, est de plus en plus fréquemment constatée dans des pays unitaires. Depuis la mi-2020, les gouvernements locaux et régionaux adoptent elles aussi une démarche plus active d’adaptation de leurs mesures au contexte local.
Le déploiement et la mise en œuvre des campagnes de vaccination, qui ont débuté en décembre 2020, ont également une part forte dimension territoriale et en lien à la gouvernance pluri-niveaux. Ces campagnes sont, pour la plupart, pilotées par les gouvernements centraux. Toutefois, elles sont généralement mises en œuvre en concertation avec les gouvernements et agences sanitaires infranationaux, de façon à mieux répondre aux besoins locaux et aux spécificités démographiques de chaque territoire (c’est-à-dire à la proportion d’habitants appartenant à des catégories prioritaires pour la vaccination). Des difficultés peuvent apparaître quand les gouvernements infranationaux ont été insuffisamment associées à la conception de la campagne de vaccination. Certains pays envisagent actuellement de territorialiser leur campagne de vaccination en l’axant sur les territoires ou les régions présentant un plus haut niveau de risque ou une plus forte incidence de cas de COVID-19.
Au premier trimestre 2021, la campagne de vaccination s’est heurtée à d’importants obstacles. On peut notamment citer l’insuffisance du nombre de doses de vaccin disponibles dans certaines économies avancées et dans la plupart des pays en développement, en raison d’une capacité limitée de production, et une répartition hautement inéquitable et inefficiente des doses existantes entre les pays. Le lancement des campagnes de vaccination a aussi été entravé par d’autres difficultés, parmi lesquelles des capacités inégales à planifier et à exécuter des campagnes massives, un manque de coordination entre les différents niveaux de gouvernement et l’apparition de variants préoccupants quant à l’efficacité des vaccins actuels.
Au sein des pays, les écarts régionaux dans l’accès aux vaccins sont généralement limités. Cela montre qu’un effort a été fait pour rendre l’accès au vaccin universel à l’ensemble des régions, mais aussi que les régions présentant les plus fortes incidences n’ont pas été servies en priorité. Dans les pays présentant d’importantes disparités régionales, celles-ci s’expliquent souvent par des facteurs sanitaires ou démographiques et, donc, par des proportions différentes d’habitants prioritaires. Le taux d’administration des vaccins peut aussi varier selon les régions en fonction de différences en termes de préférences ou d’acceptation du vaccin par les populations.
La dimension économique
Les autorités publiques ont mobilisé un soutien budgétaire massif pour protéger les entreprises, les ménages et les populations vulnérables. Ce soutien budgétaire s’élève, au total, à 13 800 milliards USD, dont 7 800 milliards USD de dépenses supplémentaires et de manque à gagner et 6 000 milliards USD d’injections de capitaux, de prêts et de garanties depuis mars 2020. Il est largement supérieur au soutien qui avait été apporté pendant la crise financière mondiale de 2008. De nombreux pays, ainsi que l’UE, consacrent de nouveaux financements et réorientent des fonds publics vers les priorités découlant de la crise, à savoir le soutien au secteur de la santé, aux PME, aux populations vulnérables et aux régions particulièrement touchées par la crise. Les gouvernements infranationaux, qui sont responsables d’une partie des dépenses de protection sociale dans de nombreux pays, ont un rôle crucial à jouer aux côtés des populations vulnérables, qui sont très exposées aux risques sanitaires et économiques. Les gouvernements infranationaux jouent aussi un rôle important — et grandissant — dans le soutien aux PME et aux travailleurs indépendants. Ainsi, dans l’Union européenne, 30 % des gouvernements infranationaux interrogées ont déclaré avoir fourni un important soutien direct aux entreprises et aux travailleurs indépendants en 2020.
Au départ, les réponses budgétaires ont été centrées sur la protection des travailleurs, des chômeurs et des populations vulnérables. Toutefois, à partir du deuxième semestre 2020, de nombreux gouvernements ont annoncé de vastes de plans de relance axés sur l’investissement public. Dans le cadre de ces plans de relance, les investissements ont ciblé des domaines jugés prioritaires, els que la transition vers une économie neutre en carbone ; la transformation numérique ; le renforcement des systèmes de santé ; et les infrastructures sociales. Au vu des disparités territoriales constatées concernant l’impact du COVID-19, et au vu du poids des gouvernements infranationaux dans l’investissement public (57 %), il est crucial que les stratégies de relance intègrent explicitement une dimension territoriale, et que tous les échelons infranationaux y soient associés à un stade précoce de leur mise en œuvre. Si c’est déjà le cas dans certains pays, cela demeure un défi dans beaucoup d’autres.
La crise du COVID-19 a accéléré la prise de conscience, à tous les niveaux de gouvernement, de l’urgence de s’orienter vers une économie neutre en carbone. Les stratégies de relance post-crise sont, pour les pouvoirs publics, une occasion unique d’affecter des fonds à des initiatives durables et de prendre des mesures pour réduire l’intensité carbone des activités économiques. Toutefois, on constate souvent des décalages importants entre les intentions et les mesures concrètement adoptées. À l’échelon national, l’analyse des plans de relance des Membres et des Partenaires clés de l’OCDE montre que les 340 milliards USD de mesures de relance verte annoncés jusqu’à présent restent largement inférieurs aux montants globaux consacrés aux mesures de relance : les dépenses destinées à la relance verte représentent environ 17 % des dépenses totales affectées à la relance, ou encore 2 % de l’ensemble des dépenses engagées face au COVID-19, par les pays de l’OCDE, le Costa Rica (pays candidat), l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Indonésie (OCDE, 2021[3]). À l’échelon infranational, les réponses à une enquête menée auprès de 300 régions et municipalités de l’Union européenne ont montré que, si plus des deux tiers des collectivités interrogées indiquaient que la transition vers une économie à faible teneur en carbone devrait être un objectif majeur des politiques de développement régional à long terme, moins de la moitié d’entre eux envisageaient de s’appuyer sur les stratégies de relance pour réaliser des objectifs d’ordre environnemental.
Différents instruments ont été mis en œuvre pour maintenir ou accélérer les projets d’investissement public à l’échelon infranational, y compris, par exemple, l’amélioration de la capacité d’autofinancement, l’assouplissement des règles budgétaires, l’augmentation des transferts en capital et des subventions, l’accès facilité à des financements à long terme sur le marché des crédits bancaires et les marchés financiers, et l’accompagnement dans la préparation et la mise en œuvre des projets. D’autres mécanismes de financement pourront être activés à l’avenir, comme les programmes de partenariat public-privé ou le financement par apport de capitaux propres.
Les finances infranationales
En 2020, presque tous les pays de l’OCDE ont instauré des mesures de soutien aux finances infranationales. Il s’agissait de mesures portant sur les recettes, sur les dépenses, des mesures de gestion financière ainsi que des mesures relatives aux règles budgétaires et d’endettement, visant notamment à faciliter le financement par l’emprunt à court et à long terme. Les mesures les plus fréquemment employées semblent avoir été celles qui portaient sur les recettes et sur les règles budgétaires et d’endettement. Les perspectives pour 2021-22 sont très incertaines. Certains pays ont annoncé la poursuite de leurs plans de soutien en 2021. Néanmoins, ces plans pourraient aussi être réduits, ou ciblés sur les gouvernements infranationaux les plus touchés par la crise (p. ex. en Autriche, au Chili, en Corée, au Costa Rica, en France, en Italie, en Norvège, en Slovénie et en Suède). Les plans de gestion de crise et de relance offrent aussi à certains pays (tels que, p. ex., l’Espagne, la France, l’Islande et le Royaume-Uni) la possibilité de lancer ou d’accélérer des réformes des finances locales.
Principales recommandations
1. Garantir l’accès équitable et en toute sécurité l’accès aux vaccins dans toutes les régions des pays, en s’appuyant sur des dispositifs efficaces de coordination entre les gouvernements nationaux et infranationaux, y compris, par exemple, le partage des prévisions relatives aux livraisons de doses. Cela est particulièrement important du fait que tous les niveaux de gouvernement doivent anticiper une forte augmentation des arrivées de vaccins et adapter leur logistique et leurs infrastructures à l’accélération des livraisons de doses. Il convient d’associer les gouvernements infranationaux aux campagnes de vaccination pour mieux couvrir le territoire, plus rapidement. Il est essentiel d’associer les acteurs locaux, qui connaissent mieux la population et les infrastructures locales, pour réussir à toucher les habitants ayant besoin d’être vaccinés en priorité (p. ex. les personnes âgées, les personnes présentant des comorbidités et les professionnels de santé) et pour atténuer les tensions qui s’exercent sur le système de santé.
2. Envisager l’adoption d’une approche territorialisée pour les politiques de relance. Mettre en place des structures de coordination pluri-niveaux ou activer/réorienter les structures existantes afin de limiter au maximum le risque de dispersion des efforts. Mettre à profit ces structures pour affiner les stratégies, élaborer des solutions et atteindre le consensus dans les domaines à fort impact économique, social et sociétal. Améliorer la qualité des micro-données régionales et interrégionales pour mieux comprendre la crise et ses effets.
3. Renforcer la coopération entre municipalités et régions pour mieux coordonner les interventions et limiter la concurrence autour de l’accès aux ressources en période de crise. Faciliter la coopération inter-municipale pour soutenir les stratégies de relance en assurant la cohérence des instructions de sécurité/d’atténuation des risques, en mutualisant les ressources et en offrant des possibilités accrues d’investissement, par exemple grâce à des emprunts communs. Rechercher et promouvoir de façon active la coopération transfrontière afin de favoriser la cohérence de la politique de relance sur un large territoire (p. ex. en ce qui concerne la fermeture/réouverture des frontières, les mesures de confinement, les stratégies de sortie de crise et les travailleurs migrants).
4. Renforcer le soutien national et infranational aux groupes vulnérables afin de limiter toute nouvelle dégradation de leur situation et afin garantir une relance inclusive. Cela implique notamment de simplifier et de faciliter l’accès aux programmes d’aide, de bien cibler la fourniture des services publics, de mettre en place des programmes de soutien budgétaire adaptés et/ou innovants et de définir les besoins en matière de révision des politiques de péréquation budgétaire. Utiliser les possibilités offertes par le numérique (p. ex. santé en ligne, éducation en ligne) pour contribuer à la continuité de l’offre de services, en tenant compte des disparités territoriales, économiques et sociales dans l’accès aux services.
5. Éviter de supprimer brutalement les mesures de soutien budgétaire. À l’heure où la crise du COVID-19 place les gouvernements infranationaux face à un double défi, avec, d’un côté, des recettes qui baissent et, de l’autre, des dépenses qui augmentent, il est important de continuer de les aider afin d’éviter toute réduction brutale de leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement, ce qui entraînerait le sous-financement ou le non-financement de leurs responsabilités. Favoriser l’association des gouvernements infranationaux aux plans de relance. Favoriser une démarche pluri-niveaux et pluri-acteurs de dialogue et de coordination budgétaire, par exemple avec les associations nationales de gouvernements locaux et régionaux ou d’autres instances consultatives. Promouvoir des réponses coordonnées face à l’impact budgétaire de la crise, à la lumière d’éléments probants et de données mutualisés, et favoriser une démarche tournée vers l’avenir.
6. Alléger la charge administrative pesant sur les gouvernements locaux et régionaux et sur les services de soutien aux PME et aux travailleurs indépendants. Les gouvernements infranationaux, qui connaissent très bien les situations locales, peuvent intervenir en tant qu’intermédiaires pour superviser le soutien financier destiné aux PME et aux travailleurs indépendants. Aider les PME à adopter de nouvelles méthodes de travail, et notamment les technologies numériques. Les pratiques innovantes qui ont émergé dans le service public suite à la crise, y compris dans le secteur de la transition vers une économie plus verte et circulaire, peuvent permettre de faire la liaison entre l’action des gouvernements infranationaux et l’environnement des PME (OCDE, à paraître[4]).
7. Coordonner les plans de relance par l’investissement public menés par les différents niveaux de gouvernement, conformément à la Recommandation de l’OCDE sur l’investissement public efficace entre niveaux de gouvernement. Tout au long de la phase de relance, il faudra retenir les grands enseignements de la crise financière de 2008. Il faudra notamment coordonner l’action des gouvernements aux différents niveaux, renforcer les capacités d’investissement des gouvernements infranationaux, investir au bon échelon et éviter que la relance s’effectue au détriment des bonnes pratiques d’investissement et de gestion des risques. Enfin, il conviendra d’associer les gouvernements locaux et régionaux à la mise en œuvre territoriale des stratégies nationales d’investissement, et ce dès leur conception.
8. Concilier les objectifs de relance à court terme et les priorités à long terme (comme la durabilité, la résilience et les infrastructures intelligentes). À tous les niveaux de gouvernement, affecter des fonds de relance à la transition vers une économie neutre en carbone. Intégrer aux plans de relance et d’investissement post-crise des mesures visant à combler le fossé numérique, et accroître le soutien du gouvernement central aux processus de transformation numérique, notamment pour les PME, les territoires urbains défavorisés et les territoires ruraux isolés. Contribuer à positionner les stratégies d’investissement public au service des priorités écologiques, numériques et inclusives grâce à des clauses de conditionnalité.
9. Soutenir l’investissement public infranational à moyen terme afin d’éviter les coupes massives pratiquées après la crise de 2008. En plus d’améliorer la capacité d’autofinancement, il est possible d’employer d’autres moyens, y compris divers instruments budgétaires classiques comme l’assouplissement temporaire des règles budgétaires en matière de dépenses d’investissement, l’augmentation des transferts en capital et des subventions, un accès facilité aux financements de long terme sur le marché du crédit et les marchés de capitaux, et l’accompagnement dans la préparation et la mise en œuvre des projets.
10. Repenser la politique de développement régional afin de bâtir des régions plus résilientes et plus aptes à faire face aux chocs à venir. Cela implique de réévaluer les objectifs de la politique régionale, y compris sur les plans de l’équilibre entre monde urbain et monde rural, de l’impératif climatique, de la fracture numérique et de l’équilibre entre actifs corporels et incorporels.
Perspectives
La pandémie de COVID-19 a conduit les pouvoirs publics à actionner immédiatement un maximum de leviers dans les domaines du développement régional et de la gouvernance régionale. Elle a fait apparaître encore plus clairement qu’auparavant la nécessité d’une approche territorialisée de la gestion de crise et de la relance d’après-crise, ainsi que l’importance d’un leadership efficace. Elle a prouvé le caractère essentiel de la coordination, de la consultation et d’une collaboration entre tous les acteurs, gouvernementaux et non gouvernementaux. Cette crise a aussi mis en relief l’importance de la confiance dans les institutions publiques — non seulement pour la gestion de crise, mais aussi pour la situation sanitaire — et l’intérêt d’une réelle communication avec les citoyens et les parties prenantes.
La crise liée au COVID-19 agit à la fois comme un révélateur et comme un accélérateur des nouvelles tendances des politiques de développement régional.
Cette crise a été un révélateur, car elle a éclairé d’un jour nouveau un manque de résilience régionale et amplifié des faiblesses préexistantes, y compris des disparités territoriales dans l’accès aux soins de santé et au logement, des évolutions démographiques et des fractures numériques à l’échelle des zones métropolitaines et des zones rurales. Dans de nombreux pays, cette crise a mis en relief les conséquences de plus d’une décennie de sous-investissement dans les régions et les municipalités. Il existe un risque que ces faiblesses persistent à moyen terme.
Cette crise a été un accélérateur considérable de plusieurs mégatendances telles que la transformation numérique et l’impérative transition vers une économie sobre en carbone. Le développement du télétravail pourrait bouleverser l’équilibre territorial entre zones urbaines et rurales, avec des conséquences importantes sur le plan des politiques de développement régional.
Les incidences inégales du COVID-19 selon les territoires, les régions et les pays sont en train de susciter un débat plus large sur la marche à suivre pour renforcer la résilience et pour mieux se préparer aux futurs chocs sanitaires, économiques, sociaux ou climatiques. À tous les échelons territoriaux, les gouvernements sont amenés à entamer ou à reprendre une réflexion sur la mise en place de service essentiels plus accessibles quel que soit le lieu d’habitation, sur la réduction des fractures numériques ou encore sur l’atteinte de la neutralité carbone.
L’impact territorial du COVID-19
Le COVID-19 a provoqué la plus grave crise sanitaire depuis un siècle et la plus grave crise économique depuis la Seconde Guerre mondiale. La pandémie s’est répandue dans presque tous les pays et a touché plus de 140 millions de personnes dans le monde, causant 3 millions de décès en date d’avril 2021. Les gouvernements du monde entier ont soudain et simultanément dû faire face à des défis sanitaires, économiques et sociaux.
La stratégie de sortie de crise n'est pas linéaire et les stratégies adoptées sont différentes selon les régions du monde. En Europe, les pays ont opté pour une stratégie d’atténuation qui alterne les périodes d’arrêt et de redémarrage de l’activité, et il est probable que cela perdure jusqu'à ce qu'une part importante de la population ait reçu des vaccins approuvés. En Asie-pacifique, plusieurs pays ont adopté une stratégie de l’élimination (zéro cas) qui exige des contrôles plus sévères aux frontières et des confinements stricts localisés pour éteindre les nouveaux foyers du virus.
Les campagnes de vaccination ont commencé en décembre 2020 dans plusieurs pays. Si l’OMS n’a pas donné d’estimation précise du pourcentage de la population qui doit être vacciné pour atteindre l'immunité de groupe (OMS, 2021[1]), but qui pourrait bien être hors de portée, la vaccination de la population mondiale contre le COVID-19 est la seule stratégie à long terme pour contenir la crise du coronavirus en protégeant les populations. Cette stratégie présente, cependant, un défi logistique important dans tous les pays avec, en conséquence, des implications territoriales et sur la gouvernance pluri-niveaux.
Au-delà de la tragédie humaine et sanitaire du COVID-19, la pandémie a déclenché la plus grave crise économique depuis la Seconde Guerre mondiale. La plupart des secteurs économiques sont touchés, que ce soit par les mesures de confinement, la perturbation des chaînes d'approvisionnement mondiales, le fléchissement de la demande intérieure et extérieure de biens et de services, le ralentissement du tourisme international (OCDE, 2020[5]) ou encore la diminution des voyages d’affaires. Les mesures visant à contenir la propagation du virus ont particulièrement touché les PME et les entrepreneurs (OCDE, 2020[6]). Les niveaux de chômage et le nombre de personnes à la recherche d'un emploi ont augmenté, parfois de façon spectaculaire.
La production mondiale devrait atteindre son niveau pré-pandémique d'ici la mi-2021, mais cela dépendra en grande partie de la course entre les vaccins et les nouveaux variants du virus (OCDE, 2021[7]). Si les projections macroéconomiques mondiales se sont nettement améliorées dans certains pays grâce au déploiement efficace de la vaccination et aux mesures de relance budgétaire supplémentaires, le PIB réel mondial ne devrait retrouver son niveau d'avant la pandémie qu'au second semestre 2021 (Graphique 1), avec une répartition hétérogène entre les pays et les régions, en fonction de la rigueur des mesures de confinement et du degré de déploiement des vaccins. Les estimations des Perspectives économiques de l'OCDE de mars 2021, indiquent que le PIB réel mondial s'est contracté de 3.4 % en 2020, mais prévoient une croissance de 5.6 % en 2021 et de 4.0 % en 2022. Le chômage dans l'OCDE a atteint 7,2 % en 2020, contre 5.4 % en 2019 (OCDE, 2020[8]) et devrait culminer à 7.4 % en 2021 avant de redescendre à 6.9 % en 2022 (OCDE, 2021[7]).
Compte tenu du caractère multiforme et de l'ampleur sans précédent de la crise du COVID-19, les comparaisons avec les crises antérieures, et notamment la crise financière de 2008‑2009, présentent des limites importantes. La crise actuelle est inédite car elle provoque un choc à la fois sur l’offre et sur la demande et touche tous les secteurs et toutes les régions du monde. L'incertitude reste élevée depuis le début de la crise, même si les campagnes de vaccination se poursuivent. Les gouvernements sont confrontés depuis des mois à des défis très difficiles : gérer simultanément la reprise économique et atténuer l'impact de vagues supplémentaires d’infections virales.
La crise du COVID-19 présente une forte dimension territoriale, lourde d’implications pour les pouvoirs publics qui doivent en gérer les conséquences. De ce point de vue, deux aspects essentiels sont à prendre en considération par les responsables de l’action publique :
L'impact régional et local de la crise est très hétérogène au sein de chaque pays. Certaines régions, et en particulier les plus fragiles comme les zones urbaines défavorisées, ont été frappées plus durement que d'autres. Certaines populations vulnérables ont été elles aussi plus touchées. En termes économiques, l'impact de la crise diffère selon les régions. Les facteurs de différenciation incluent la dépendance de chaque région vis-à-vis des secteurs exportateurs, son exposition aux chaînes de valeur mondiales et son degré de spécialisation dans les secteurs d’activité exposés, tels que le tourisme, l'hébergement et la restauration, l'extraction minière, pétrolière et gazière. Sur le plan social, on observe aussi des disparités régionales concernant l'accès aux services de santé et d'éducation ainsi que les tarifs des produits de base.
Les gouvernements infranationaux (régions et communes) sont en charge de responsabilités essentielles pour la mise en œuvre des mesures de confinement et de la campagne de vaccination, des soins de santé, des services sociaux, du développement économique et de l’investissement public, ce qui les place en première ligne dans la gestion de la crise. Ces responsabilités étant partagées par les différents niveaux de gouvernement, une coordination de leurs actions est indispensable.
L’impact territorial de la crise sanitaire
Comme toutes les pandémies, celle du COVID-19 a une dimension spatiale dont il faut tenir compte (McCoy, 2020[10]). Bien qu'il existe des différences dans la manière dont les pays font le décompte en termes de cas déclarés et de décès dus au COVID-19, le schéma général révèle des résultats très différents non seulement selon les continents et les pays, mais aussi d’une région ou d’une commune à l’autre au sein d’un même pays. Dans l’ensemble, les régions d’Asie‑Pacifique ont été moins touchées que celles d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Amérique latine (Graphique 2).
Les taux de mortalité liés au COVID-19 présentent de fortes disparités régionales (Graphique 3). Au sein d’un même pays, le nombre de décès dus au COVID-19 pour 100 000 habitants peut être très variable, particulièrement dans les pays les plus touchés. Les disparités régionales, mesurées par l'écart interquartile des taux de mortalité, sont particulièrement élevées en Croatie, en France, en Italie, au Portugal, en Espagne et au Royaume-Uni.
Un certain nombre de facteurs contribuent expliquer l’impact différencié du COVID-19 selon les territoires. Un premier facteur est lié au lieu où se sont développés les premiers foyers de contamination. Dans nombre de cas, les grandes villes, du fait de liaisons internationales denses (notamment liées aux marchés internationaux, aux voyages d’affaires et au tourisme, etc.) ont souvent été les points d’entrée du virus en 2020 et ont été particulièrement touchées. Dans les grands centres urbains, la proximité favorise la propagation du virus si des mesures de prévention, de protection ou de confinement ne sont pas appliquées suffisamment tôt.
Cependant, il est impossible d’en conclure qu’une forte densité va de pair avec une forte incidence de la maladie. Certaines villes d’Asie à très forte densité de population comme Hong Kong (7.5 millions d’habitants), Séoul (9.8 millions), Singapour (5.6 millions) et Tokyo (9.3 millions) ont connu une diffusion limitée du COVID-19 grâce à la fois à une action précoce très volontariste, au port du masque et à un dépistage à grande échelle (OCDE, 2020[34]). Il semble que la densité de la population devienne un problème lorsque d'autres facteurs prévalent, tels que l'absence de mesures appropriées (par exemple, le confinement, le suivi des contacts), des conditions de logement précaires et, en particulier, pour les ménages situés au bas de l’échelle de la distribution des revenus, la capacité limitée de télétravail et d'accès aux soins de santé ainsi qu’aux services numériques.
Les zones rurales ont elles aussi été des lieux d’émergence de « premiers foyers » et les régions comptant une forte proportion de personnes âgées ont été plus sérieusement touchées. Les régions rurales ont tendance à disposer d’un nombre de lits d’hôpitaux plus limité que les zones métropolitaines et leurs périphéries. En 2018, le rapport du nombre de lits d’hôpitaux pour 1 000 habitants était presque deux fois plus élevé dans les régions situées en périphérie des grandes métropoles que dans les régions isolées. Cet écart s’est considérablement amplifié depuis 2000 (OCDE, à paraître[35]).
Au sein des pays, les zones urbaines à forte densité de population auraient été les plus touchées au premier semestre 2020, mais au second semestre 2020, le COVID-19 s’est propagé dans des régions moins peuplées. Dans les zones rurales, les taux de mortalité enregistrés dus au COVID‑19 auraient particulièrement augmenté à partir d'août 2020. Les différences socio-économiques entre les zones rurales et urbaines expliquent en partie pourquoi, au second semestre 2020, l'épidémie a été plus meurtrière dans les zones rurales aux États-Unis, en France et en Italie (Graphique 4).
Aux États-Unis, les zones rurales sont plus exposées, car les habitants des comtés ruraux sont plus âgés et présentent en moyenne, par rapport aux habitants des zones non rurales, des taux plus élevés de maladies chroniques ou de handicaps (CDC, 2021[36]) tandis que les infrastructures de soins de santé sont plus limitées et financièrement affaiblies (Healthline, 2020[37]). De plus, les comtés ruraux comptent une part plus importante d’emplois ayant une possibilité de télétravail limitée et un risque accru d'infections comme dans les industries agricoles et agroalimentaires. Dans les zones rurales, les habitants sont donc plus vulnérables au COVID‑19 et les taux de mortalité ont augmenté en flèche lorsque le virus s'est propagé dans ces communautés. Les comtés ruraux non adjacents à une zone métropolitaine ont enregistré le plus grand nombre de décès (en proportion de leur propre population, sur une moyenne mobile de 7 jours) en décembre 2020, avec des décès quotidiens atteignant 1.7 pour 100 000, contre 0.11 en mai 2020 et 0.90 dans les zones métropolitaines à la même époque.
Il existe également des disparités régionales dans les réponses des gouvernements infranationaux aux épidémies locales de COVID‑19, par exemple en ce qui concerne la rigueur et la durée des confinements. En Australie, où les gouvernements des États gèrent les politiques de respect des distances de sécurité et les confinements, la durée des confinements stricts varie considérablement. Dans l'État le plus touché, l'État de Victoria, une épidémie survenue en juillet 2020 a donné lieu à un deuxième confinement majeur de 111 jours. En conséquence, l'État de Victoria a enregistré la plus forte baisse annuelle de la consommation des ménages de tous les États et territoires australiens aux troisième et quatrième trimestres de 2020 (Australian Bureau of Statistics, 2021[43]).
La pandémie n’a pas été un grand « niveleur social ». La densité sociale associée à la pauvreté, à de mauvaises conditions de logement, à la ségrégation socio-économique, à la participation au marché du travail ainsi qu'à l'accès limité aux services de santé sont des déterminants forts des taux de mortalité interrégionaux, comme le montre une étude réalisée aux États-Unis (Basset, 2020[44]). Dans les villes, ce sont souvent les quartiers où vivent les populations aux revenus modestes comme le Bronx à New York, qui sont le plus touchés tandis que Manhattan, qui possède pourtant la plus forte densité de population et le plus haut revenu par habitants, n’a pas été le plus durement touché.
Les données du Royaume-Uni montrent que, pendant la première vague, les régions les plus défavorisées d’Angleterre et du Pays de Galles ayant des densités de population élevées, ont enregistré des taux de mortalité dus au COVID-19 disproportionnés par rapport à d’autres régions moins défavorisées (Iacobucci, 2020[45]). En avril 2021, les autorités locales couvrant le dernier décile de la distribution des revenus nets en Angleterre avaient enregistré 250 décès dus au COVID-19 pour 100 000 habitants, contre 194 dans les déciles supérieurs et 167 dans le premier décile. De même, en France, les taux de mortalité sont deux fois plus élevés dans les communes du dernier quartile de la distribution du revenu national que dans les communes des quartiles supérieurs (Brandily, 2020[46]).
La plupart des régions n’étaient pas suffisamment préparées
La plupart des pays, des régions et des villes n’étaient pas bien préparés pour cette pandémie, et ce pour plusieurs raisons : i) ils ont sous-estimé le risque lors de l'apparition des premiers cas ; ii) nombre d’entre eux n’avaient pas de plans de gestion de crise en cas de pandémie ; iii) ils manquaient d’équipements essentiels comme les masques et iv) dans certains pays, la capacité du système de santé à réagir à la crise du coronavirus avait été affaiblie par plusieurs années de stagnation, voire de diminution, des dépenses publiques et des investissements dans les soins de santé/hôpitaux au lendemain de la crise financière mondiale. Par exemple, entre 2008 et 2018, le nombre de lits d’hôpitaux par habitant a baissé dans la quasi-totalité des pays de l’OCDE, de 0.7 % par an en moyenne (OCDE, 2020[47]).
En outre, dans certains pays, les disparités régionales en matière d'accès aux soins de santé peuvent être importantes, comme le montre le nombre de lits d'hôpitaux et de médecins en activité pour 1 000 habitants.(Graphique 5). Par exemple, aux États-Unis, le Dakota du Nord compte plus de 5 lits d'hôpitaux pour 1 000 habitants, alors que le Nouveau-Mexique en compte moins de 2. De telles disparités semblent être indépendantes de la décentralisation ou non des dépenses de soins de santé dans les pays (voir Encadré 1).
Encadré 1. Décentralisation et disparité des soins de santé
Certaines études tendent à montrer que les disparités régionales en matière de santé ne se sont pas accentuées en Espagne et en Italie après la décentralisation des dépenses de santé (Lopez-Casasnovasa, Costa-Font et Planas, 2005[48] ; Bianco et Bripi, 2010[49]). De plus, une étude de 2019 du Réseau sur le fédéralisme financier de l’OCDE a montré que les coûts hospitaliers sont plus faibles dans les pays où la décentralisation administrative est plus importante, même en tenant compte de soins spéciaux (Kalinina et al., 2019[50]). Les débats portant sur la concentration et la décentralisation doivent établir une distinction entre les différentes catégories de soins, notamment entre soins de base et soins intensifs. Pour les soins les plus spécialisés, des raisons évidentes de qualité militent en faveur d'une concentration (mais pas nécessairement d’une centralisation) des services. Dans ces cas, il convient néanmoins de s’assurer que les durées de déplacement vers les centres de soins ne font pas obstacle à l’accès aux services.
Les gouvernements infranationaux sont en première ligne dans la gestion de crise
Depuis l'apparition de la pandémie début 2020, les gouvernements locaux et régionaux sont en première ligne dans la gestion de la crise sanitaire du COVID-19 et de ses incidences économiques et sociales, reflet des responsabilités importantes qui leur incombent dans un certain nombre de domaines, notamment ceux particulièrement touchés par la crise du COVID-19. Dans de nombreux pays, les gouvernements infranationaux gèrent des composantes essentielles du système de santé allant des soins primaires aux soins secondaires, y compris la gestion des hôpitaux. Ils représentent en moyenne 25 % des dépenses publiques de santé (Graphique 6). Les gouvernements infranationaux ont largement assuré le suivi, le dépistage et l'isolement des patients et mettent désormais en œuvre les stratégies nationales de vaccination au niveau local.
Les gouvernements infranationaux sont responsables de près de la moitié des dépenses d'éducation et ont joué un rôle actif dans la gestion de la fermeture et de la réouverture des écoles, en toute sécurité et dans le respect de mesures sanitaires très strictes. Ils sont souvent responsables des services et des transferts sociaux.
Il est également important de noter le rôle qu’ils jouent dans les services publics essentiels, comme la distribution d'eau et l'assainissement, la collecte et le traitement des déchets, le nettoyage des rues et la salubrité publique, les transports publics, l'ordre et la sécurité publics, et les services administratifs de base, dont la bonne exécution est fondamentale pour gérer la pandémie. Dans certains pays, les services d’urgence et de police sont gérés par l’État, les régions et les communes et ces derniers ont été mobilisés lors du confinement pour assurer des opérations de contrôle, de sécurité et de secours.
Les gouvernements infranationaux interviennent pour maintenir les services essentiels ou pour les réajuster s’il n’est pas possible de les assurer intégralement, et pour développer ou améliorer l'accès aux services à distance (consultations de télémédecine, enseignement à distance). Enfin, la situation d'urgence a conduit nombre d'entre eux à prendre des initiatives dans des domaines qui ne relevaient pas de leurs compétences normales, soit en réponse à la demande du gouvernement central, soit pour faire face à l’urgence de la situation.
L’impact territorial de la crise économique
La crise du COVID-19 a fait l'objet de nombreuses comparaisons avec la crise financière mondiale de 2008, mais l’ampleur, l’origine – endogène en 2008, exogène en 2020 – et les effets de ces deux crises sont radicalement différents, tout comme leurs incidences territoriales, la crise du coronavirus ayant un impact territorial plus différencié que la crise financière de 2008.
Les répercussions économiques de la crise du COVID-19 varient aussi d’une région à l’autre en fonction d’un certain nombre de facteurs, tant internes (tels que la spécialisation et l'exposition de la région aux secteurs les plus touchés par les mesures de confinement et ses capacités d'adaptation aux restrictions) que mondiaux (tels que le degré d'intégration de la région dans les chaînes de valeur mondiales et son degré de dépendance vis-à-vis du tourisme). Les régions entourant la capitale et les autres régions métropolitaines sont relativement plus exposées à un risque de dégradation de l'emploi que les autres régions, notamment à court terme, mais elles présentent en même temps des capacités d'adaptation plus élevées, par exemple par l'adoption d'outils numériques (OCDE, 2020[52]).
Aux États-Unis (Graphique 7), la spécialisation économique régionale explique en partie les différences interrégionales en termes d’impact économique, au-delà des variations en termes de taux d'infection et de restrictions. Au cours des trois premiers trimestres de 2020, les États durement touchés par le choc négatif de la demande en produits de base ont été ceux pour lesquels l'extraction minière, l'exploitation de carrières et l'extraction de pétrole et de gaz représentent une part importante de la valeur ajoutée brute (Oklahoma, Wyoming, Dakota du Nord et Virginie occidentale). Les États où le tourisme domine (Hawaï, Nevada) ont été touchés par l’interdiction de voyager et les fermetures obligatoires. En revanche, les États où l'activité économique est davantage diversifiée, ou spécialisée dans des secteurs qui ont bénéficié de la crise, comme les technologies de l'information, ont pu atténuer l'impact sur le PIB, comme à Washington, en Californie et au Colorado.
La crise a également un impact territorial différencié sur l’emploi. Le chômage a augmenté de façon spectaculaire dans de nombreuses régions des pays de l'OCDE au cours du second semestre de 2020 par rapport à la même période en 2019 (Graphique 8). Le chômage a augmenté de plus de 2 points de pourcentage dans la majorité des États américains. Les différences régionales ont été plus contrastées, au Chili, en Espagne, en Grèce, au Mexique et en République tchèque. Dans ces pays, les variations du taux de chômage dans les régions les plus touchées ont été deux fois plus importantes que dans l'ensemble du pays. Les pertes d'emploi sont particulièrement importantes dans de nombreuses régions insulaires telles que les îles Baléares (Espagne), les îles Ioniennes (Grèce) et Hawaï (États-Unis), les taux de chômage ayant augmenté de 6 points de pourcentage dans ces régions en moyenne sur la période.
Des mesures alternant fermeture et réouverture continueront d'être appliquées jusqu'à ce que la vaccination permette de protéger l’ensemble de la population. L'impact économique total sur les régions pour 2020 n'a pas encore été calculé. Des travaux antérieurs de l'OCDE montrent que le redressement des régions de l'OCDE après la crise financière mondiale de 2008 a nécessité plusieurs années : dans plus de 40 % des régions de l'OCDE et de l'UE, le PIB par habitant est resté inférieur aux niveaux d'avant la crise pendant plus de 7 ans.
Atténuation des effets du confinement et application des distances de sécurité : l'impact du télétravail
La possibilité d’exercer des activités professionnelles à distance joue un rôle important dans l’atténuation de l’impact économique et du coût des mesures de confinement du COVID-19, et les données montrent de fortes différences régionales en la matière. Les zones urbaines (41.6 %) comptent, par exemple, 11 points de pourcentage de plus de professions pouvant être exercées à distance par rapport aux zones rurales (30.5%) (OCDE, 2020[53]).
Dans la plupart des cas, ce sont les grandes villes et les régions autour des capitales qui offrent les plus larges possibilités de télétravail dans les pays (Graphique 9). Cela peut contribuer à rendre des territoires plus résilients que d’autres. En moyenne, l’écart entre les régions où les possibilités de travail à distance sont les plus élevées et celles où elles sont les plus faibles est de 15 points de pourcentage ; il est supérieur à 20 points de pourcentage aux États-Unis, en France, en Hongrie et en République tchèque. Il est important de noter que ces résultats supposent que tous les travailleurs - quel que soit leur lieu de travail - aient accès à une connexion internet efficace et à l’équipement nécessaire. Néanmoins, il existe souvent des disparités importantes en termes de capacités entre les régions de l'OCDE : souvent dans les régions rurales, l’accès aux connexions à haut débit est plus faible et l'adoption du numérique moins répandue, de sorte que les écarts réels peuvent même être plus importants : un ménage sur trois dans les zones rurales n'a pas accès au haut débit en moyenne dans 26 pays de l'OCDE (OCDE, 2020[47]).
Les incidences budgétaires sur les gouvernements infranationaux
Les incidences budgétaires sur les gouvernements infranationaux sont asymétriques
Dès le début de la crise en 2020, il est rapidement apparu que l'impact sur les finances infranationales serait important, étant donné l'exposition des gouvernements infranationaux aux effets de la crise et leur engagement à y faire face.
En juin-juillet 2020, une enquête menée conjointement par l'OCDE et le Comité européen des régions (CdR) auprès de 300 représentants des autorités régionales et locales dans 24 pays de l'Union européenne (CdR-OCDE, 2020[54]) a indiqué qu'à court et moyen termes, 85 % des gouvernements infranationaux interrogées s'attendaient à ce que la crise du COVID-19 ait des effets fortement ou modérément néfastes sur leurs finances, avec un dangereux « effet de ciseau » dû à la hausse des dépenses et la baisse des recettes. Au-delà de l'Union européenne, d'autres enquêtes ont fait état d'effets similaires. Par exemple, aux États-Unis, la National League of Cities a rendu compte de graves et durables répercussions sur les villes américaines, avec une perte de recettes propres atteignant 21.6 % en 2020 (US National League of Cities, 2020[55]).
Les données concernant l'ensemble de l'année 2020 confirment ces effets négatifs, bien que de façon moindre par rapport aux chiffres de certaines enquêtes préliminaires, en partie en raison des mesures importantes prises par le gouvernement central/fédéral pour soutenir les finances locales (par exemple, par le biais de subventions d'urgence et d’indemnisations compensatoires ou de la couverture de certains types de dépenses) et en procédant à des économies dans les dépenses et à des reports ou annulations de projets d'investissement.
Cependant, si les effets ont été moindres que ce que l'on craignait au départ, une incertitude considérable demeure à plus long terme, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, en raison des incertitudes liées à la situation sanitaire. Si les déploiements de vaccins commencent à avoir des effets positifs pour contenir la pandémie (mais représentent également des coûts pour les budgets infranationaux), on ne sait toujours pas à quelle vitesse ils peuvent être déployés, ni à quelle fréquence ils devront être administrés (à plus long terme, par exemple pour les rappels ou pour faire face à de nouvelles souches).
En second lieu, parce que de nombreuses dépenses essentielles reportées en 2020 (y compris en matière d'investissement) ne peuvent être reportées indéfiniment et, en outre, parce que, dans de nombreux pays, les recettes fiscales de 2020 reflétaient des activités menées en 2019 et non en 2020.
En troisième lieu, parce que les conséquences sur les finances infranationales en 2021 et 2022 dépendront beaucoup de la poursuite et de l'ampleur du soutien qui sera apporté par les niveaux supérieurs de gouvernement. Un retrait trop rapide de l'aide aux gouvernements infranationaux (qui continueront de supporter les coûts liés à la crise, notamment les baisses de recettes) et l'introduction de mesures d'assainissement budgétaire strictes pour faire face à l'augmentation des emprunts de 2020 auraient un impact significatif sur les finances et les investissements publics infranationaux et, de fait, sur la fourniture de services essentiels, ce qui aurait une incidence sur la croissance à plus long terme, comme ce fut le cas après la crise financière de 2008, lorsque les investissements publics furent fortement réduits dans de nombreux pays de l'OCDE.
En outre, ces impacts, tant en 2020 qu'à l'avenir, sont asymétriques au sein des pays, du fait de cinq facteurs principaux (Encadré 2), qui viennent s’ajouter à des facteurs tels que la situation géographique et les modèles socio-économiques.
Encadré 2. Des incidences différenciées sur les finances des gouvernements infranationaux
Les incidences du COVID-19 sur les finances infranationales sont variables selon les pays, les niveaux de gouvernement, les régions et les communes. Ces différences sont dues à cinq grands facteurs, qui doivent tous être pris en compte pour analyser et comparer l'impact budgétaire de la crise sur les régions et les communes, à savoir :
1. L'importance et la nature des responsabilités en matière de dépenses : le rôle des régions et des villes dans la gestion de crise peut varier en fonction du degré de décentralisation des dépenses et de l’étendue des compétences infranationales (qui peuvent inclure la santé, la protection sociale, le développement économique, etc.) ;
2. La nature des ressources des gouvernements infranationaux, et en particulier leur sensibilité aux fluctuations économiques (par exemple, la baisse des recettes fiscales collectées sur l'activité, les revenus et la consommation, la diminution des redevances et droits d'usage) et aux décisions politiques (par exemple, les exonérations, les abrogations, les reports) ;
3. La souplesse budgétaire : l'impact dépendra de la capacité des gouvernements infranationaux à absorber des tensions exceptionnelles, à adapter leurs dépenses et leurs recettes aux besoins urgents et à leurs possibilités d’accès à des financements extérieurs ;
4. La santé budgétaire ou la situation financière d’avant la pandémie : l’impact dépendra du solde budgétaire et de l’endettement d’un gouvernement local donné avant la crise ainsi que de son niveau de trésorerie et de sa constitution de réserves ;
5. L’étendue et l’efficacité du soutien gouvernemental : l'impact sur les finances dépend également beaucoup de la portée et de l'efficacité des politiques de soutien des niveaux supérieurs de gouvernement et de l'existence de mécanismes de péréquation/solidaires.
Les effets diffèrent selon le pays, les différents niveaux de gouvernement infranationaux (par exemple, les régions ou les villes) ainsi qu'entre les gouvernements infranationaux de même niveau.
Entre pays, les effets diffèrent largement selon le degré de décentralisation. Il n'est peut-être pas surprenant que dans les pays où le niveau de décentralisation est élevé, l'impact sur les dépenses des gouvernements infranationaux soit également plus important, reflétant en grande partie la délégation de responsabilité en matière de dépenses dans les domaines les plus touchés par la crise (c'est-à-dire la santé, la protection sociale, l'éducation, les services publics, le développement économique, etc.) ; cela est également vrai pour les recettes, comme le confirme l'enquête OCDE-CdR (OCDE-CdR, 2020[56]). L'ampleur de l'impact diffère également en fonction de la solidité budgétaire sous-jacente du secteur public infranational avant la crise. Dans un certain nombre de pays, la situation budgétaire des gouvernements infranationaux était relativement bonne avant la crise du COVID-19 (par exemple, au Danemark, en République tchèque et en Suisse) et ils avaient en conséquence une meilleure capacité à absorber les chocs budgétaires (S&P Global Ratings, 2020[57]).
Entre les différents niveaux de gouvernement, l'impact dépend de leurs compétences respectives en matière de dépenses et de la structure de leurs recettes. Le niveau régional peut être plus affecté que le niveau local, et vice-versa. Par exemple, dans de nombreux pays, on estime que les municipalités ressentiront le choc financier surtout en 2020, car la perte de recettes provient principalement de la diminution des droits et des redevances d’usage et/ou des taxes locales, dont certaines sont temporaires (taxe de séjour) ou différées (ajournements). À l’avenir, les communes pourraient donc être plus épargnées que les régions, les revenus desquelles dépendent plus d’impôts sensibles à l’activité économique, à la consommation et aux revenus des particuliers. Pour de nombreuses régions, le choc budgétaire pourrait être décalé à 2021, voire 2022.
La crise peut également avoir un impact territorial différent au sein du même niveau de gouvernement. Différents paramètres ont des implications sur la nature des dépenses et des recettes infranationales, et donc sur le degré d'exposition budgétaire à la crise. Les gouvernements infranationaux seront plus ou moins vulnérables à la crise en fonction de leur localisation géographique (par exemple, s'ils sont situés dans une zone particulièrement touchée par la crise socio-économique ou sanitaire), de la densité de la population (grandes villes contre municipalités rurales), des caractéristiques sociodémographiques (par exemple, nombre de personnes âgées ou de groupes vulnérables, etc.), du profil économique (tourisme, industrie manufacturière, mines, etc.) et de la résilience de leurs économies locales. Par exemple, les régions et communes touristiques (régions côtières et stations de ski en Autriche, en France, en Italie et en Suisse, ainsi que les destinations touristiques urbaines) sont particulièrement touchées par les restrictions sur les voyages nationaux et internationaux, la réduction de la fréquentation touristique, la fermeture des hôtels, des centres d'exposition et de congrès, des sites touristiques (musées, parcs naturels, établissements de loisirs, etc.), des restaurants et des bars, des festivals et autres installations culturelles. Les villes portuaires sont particulièrement affectées par la crise, en raison non seulement de la baisse des activités de croisière, mais également du fort ralentissement des activités portuaires dans leur ensemble (transport maritime, pêche, chantiers navals, etc.), bien qu’elles aient maintenu des terminaux ouverts aux navires et continué d’assurer un niveau minimum d'activité.
La situation budgétaire des gouvernements infranationaux avant la crise joue également un rôle dans leur résilience. Certains peuvent présenter un faible niveau d’endettement et une réserve de liquidités importante. Aux États-Unis, le degré de préparation à une récession est inégal et certains États pourraient manquer de réserves pour absorber le choc budgétaire au-delà du court terme. Certains États sont plus exposés à la pression exercée par les chocs exogènes de par leurs paramètres de crédit comparativement plus faibles, notamment des niveaux de réserve plus bas, des flux de revenus cycliques et des coûts fixes élevés, liés aux retraites, au service de la dette et à d’autres avantages perçus après la perte d’emploi (Standard&Poors, 2020[58]).
Les incidences sur les recettes, les dépenses, la dette et les actifs sont également asymétriques
La crise du COVID-19 et les réponses politiques associées ont fortement pesé sur les finances des gouvernements infranationaux (Graphique 11) et ont été différentes selon les régions. La crise aurait eu un impact un peu plus important sur les recettes que sur les dépenses.
Incidence sur les recettes des gouvernements infranationaux
La crise du COVID-19 a engendré une chute importante des recettes pour les gouvernements infranationaux : recettes fiscales, redevances et droits d'usage et revenus des actifs physiques et financiers. Ainsi, il n'est pas étonnant que l'impact de la crise sur les finances infranationales dépende de la combinaison de ces sources de revenus dans chaque pays. (Graphique 12). Dans les pays où les gouvernements infranationaux sont largement financés par les transferts du gouvernement central (par exemple, en Estonie, Lituanie, au Mexique, en République slovaque), les conséquences négatives peuvent être moins importantes1. Toutefois, dans certains pays, notamment les pays fédéraux où la plupart des transferts aux collectivités locales proviennent du gouvernement de chaque État, on peut avoir quelque inquiétude sur la capacité de l’État à maintenir les transferts, comme aux États-Unis (Chernick, Copeland et Reschovsky, 2020[59]).
Dans l'Union européenne, selon les gouvernements infranationaux interrogés, les recettes fiscales devraient être la source de revenus la plus touchée, suivies par les redevances et droits d'usage. Les aides et subventions, ainsi que les revenus des actifs, devraient diminuer dans une moindre mesure, et probablement à moyen et long termes (OCDE-CdR, 2020[56]) (Graphique 13).
Incidence sur les recettes fiscales
La pandémie de COVID-19 devrait entraîner une forte baisse des recettes fiscales propres et partagées. La baisse de l’activité économique, de l’emploi et de la consommation due au COVID-19 – et notamment aux mesures de confinement – diminuera automatiquement les rentrées fiscales au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (IBS) et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ce phénomène pourrait s’amplifier sous l’effet des mesures fiscales contra-cycliques prises par les gouvernements nationaux et les gouvernements infranationaux dans le cadre des programmes de relance, comme les allègements et exonérations fiscales, les reports d’impôt et la baisse des taux d’imposition. Pour aider les ménages et les entreprises, de nombreux gouvernements locaux et régionaux ont également adopté des dispositifs d’allègement fiscal qui entraîneront une baisse des recettes fiscales dans les budgets des gouvernements infranationaux. Une augmentation des incidents de paiement pourrait également contribuer à diminuer les recettes fiscales. Les recettes des gouvernements infranationaux dépendant de l'activité de l'année précédente (par exemple, l'impôt sur le revenu), la plupart d'entre eux sont susceptibles de voir leur situation se détériorer en 2021, voire en 2022, quel que soit le degré de reprise au niveau national. Outre les impôts nationaux, propres ou partagés, le déclin de l’activité économique et les décisions fiscales pourraient également avoir une incidence sur de nombreuses autres taxes infranationales. Parmi ces dernières figurent :
L'impôt sur les sociétés. On peut citer en exemple l’impôt municipal sur les sociétés en Allemagne (Gewerbesteuer, 44 % des recettes fiscales municipales) et en Autriche (Kommunalsteuer, 68 % des recettes fiscales municipales), l’impôt commercial communal au Luxembourg (91 % des recettes fiscales municipales) et la contribution économique territoriale en France, comprenant la contribution foncière des entreprises (CFE) et la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Les taxes sur les activités économiques comme la taxe régionale sur les activités productives (IRAP) en Italie, l’impôt local sur le revenu en Corée et au Japon et la taxe de résidence au Japon, prélevée sur les revenus des personnes physiques et des sociétés.
Les impôts liés à l'activité immobilière comme les taxes sur les transactions immobilières, les permis de construire et droits de construction.
Les taxes liées à la consommation des ménages et des sociétés, par exemple les taxes sur les ventes, les carburants, les produits énergétiques, les véhicules automobiles et les loisirs, la publicité et les jeux, la taxe de séjour, etc.
Les recettes fiscales des secteurs producteurs de biens.
Les impôts récurrents sur le patrimoine foncier et la propriété immobilière devraient être moins touchés car il s'agit d'une source de revenus moins sensible aux fluctuations. Cela dit, s'ils sont calculés sur la base de la valeur de marché d’un bien, ils pourraient baisser, mais la réduction de valeur du bien apparaîtra ultérieurement dans les budgets (2021 ou 2022). Il convient toutefois de noter que l’immobilier a augmenté dans certaines régions en raison du nombre de nouveaux arrivants qui profitent du télétravail, en particulier dans les zones périurbaines ou rurales bien desservies par les transports (par exemple, les prix à Auckland ont augmenté d'environ 18 %).
Par ailleurs, les recettes fiscales tirées de l’impôt sur le patrimoine des sociétés risquent de baisser en raison de faillites d’entreprises. Les exonérations d’impôt et déductions fiscales pour certaines catégories de contribuables en difficulté financière, ainsi qu’une hausse des incidents de paiement, pourraient également entraîner une baisse des recettes. Les gouvernements infranationaux devront faire face aux reports de paiement de l’impôt foncier. D’éventuels reports jusqu’à l'exercice suivant pourraient peser sur les budgets et entraîner des tensions sur la liquidité dans les pays où cet impôt est la principale source de revenu des municipalités (par exemple : Australie, Canada, Estonie, États-Unis, Irlande, Israël, Lituanie, Pays-Bas et Royaume-Uni) (OCDE, à paraître[61]).
Les redevances et droits d’usage ont été fortement affectés, en particulier dans les régions urbaines
Les gouvernements infranationaux pourraient subir une forte baisse des redevances et droits d'usage causée par la fermeture d'établissements publics (équipements culturels et de loisirs, établissements d’enseignement et installations sportives comme les piscines, terrains de golf, etc.) et d'une moindre utilisation de services publics locaux comme les transports publics, les cantines scolaires, les parcs de stationnement, les péages, les crèches, les services administratifs, etc. Une progression des incidents et défauts de paiement (par exemple pour la collecte des déchets, l’assainissement, l’alimentation en eau, etc.) pourrait accentuer la baisse de ces recettes. Aux États-Unis, par exemple, le secteur des transports publics a subi une chute dramatique de ses revenus et une nette augmentation de ses dépenses en raison du COVID-19. D'après une étude préparée pour l’Association américaine des transports publics, le manque à gagner global pour les agences de transport public américaines sera de 48.8 milliards USD entre le deuxième trimestre de 2020 et la fin de l’année 2021. Au niveau national, la fréquentation des transports publics et les recettes tarifaires ont baissé respectivement de 73 % et 86 % en avril 2020 par rapport à avril 2019 (APTA/EBP, 2020[62]). Une diminution des redevances et droits d'usage est anticipée par 76 % des communes et 63 % des régions. Cette source de revenus (provenant de la fourniture de services publics au niveau local) est plus importante pour les premières que pour les secondes.
L’incidence sur le revenu issu des biens et des actifs varie beaucoup selon les pays. Le revenu des biens matériels et des actifs financiers pourrait diminuer en raison, par exemple, d’une chute des revenus locatifs, de pertes de dividendes des entreprises publiques locales, d’une baisse des revenus tirés des ventes immobilières et d’une diminution des redevances à la suite du ralentissement économique (comme la baisse des prix des matières premières et de la production). Les gouvernements infranationaux qui dépendent des recettes pétrolières pourraient également connaître une baisse importante de leurs revenus (par exemple en Australie, au Canada, au Mexique, en Norvège et en Russie) (S&P Global Ratings, 2020[63]). Près des deux tiers des gouvernements infranationaux s’attendent à une diminution des revenus issus des biens et des actifs.
De manière générale, les régions et les municipalités de l’Union européenne qui ont été interrogées s'attendent à ce que la crise ait un impact légèrement plus prononcé sur les recettes que sur les dépenses, particulièrement les grandes communes de plus de 250 000 habitants (dont les deux tiers anticipent des conséquences très négatives contre 41 % des communes de moins de 100 000 habitants) (OCDE-CdR, 2020[56]).
Incidence sur les dépenses des gouvernements infranationaux
Du fait de la crise, les régions et les villes sont amenées à accroître leurs dépenses dans de nombreux secteurs, l’impact étant, bien sûr, plus marqué pour les gouvernements infranationaux qui sont responsables des aspects essentiels des systèmes de soins de santé, notamment les services d’urgence et les hôpitaux. En 2018, les dépenses de santé représentaient, en moyenne pondérée, 18 % des dépenses infranationales au sein de l’OCDE. Les gouvernements infranationaux prennent également en charge les dépenses dans le domaine de la protection sociale, secteur particulièrement touché par la crise du COVID-19, et en particulier les aides et prestations sociales (14 % des dépenses infranationales). Au-delà de leurs responsabilités dans le domaine social et de la santé, les gouvernements infranationaux interviennent dans d'autres secteurs essentiels affectés par la crise, dont l'éducation (premier poste de dépenses au niveau infranational à 24 %), l'administration publique (15 %), le développement économique et le transport (13 %), l’ordre et la sécurité publics (7 %) et les services essentiels (déchets, eau, etc.). Dans ce contexte de crise, les gouvernements infranationaux doivent assurer un certain nombre de missions complexes et coûteuses. Ils ont tout d'abord dû gérer la fermeture totale ou partielle de certains services et installations puis leur réouverture, mais aussi veiller à la continuité des services publics essentiels, adapter ces services pour qu'ils puissent être assurés en personne (transports publics, collecte des déchets, nettoyage des espaces publics) ou à distance (consultations de télémédecine, enseignement à distance, paiement des impôts locaux, accès à l'information publiée par les gouvernements, etc.) et permettre à leurs responsables et agents de télétravailler. Enfin, dans de nombreux pays, les gouvernements infranationaux contribuent à la mise en œuvre des politiques de soutien aux petites et moyennes entreprises et aux travailleurs indépendants, ainsi qu’aux investissements dans les infrastructures.
Bien que certaines dépenses aient été temporairement réduites (en raison de l’annulation d’événements locaux et de la baisse de la consommation intermédiaire, par exemple l’essence) ou différées dans le temps, la plupart des dépenses infranationales ont augmenté à court terme (dépenses d'urgence) mais également à moyen terme, pour mettre en œuvre les stratégies de sortie de crise et les programmes de relance.
Selon l’enquête conjointe de l’OCDE et du CdR, plus de la moitié des gouvernements infranationaux anticipent une forte augmentation des dépenses dans les domaines des services sociaux et des prestations, de l’aide aux PME et aux travailleurs indépendants, ainsi que de la santé publique (Graphique 14). En revanche, la hausse devrait être plus modérée dans l’éducation, les technologies de l’information et la communication, l’adaptation des transports publics locaux, l’adaptation des services administratifs, ainsi que dans le secteur de l’ordre et la sécurité publics. Les régions de l'UE sont plus susceptibles que les municipalités de connaître une augmentation des dépenses en matière de services de santé, de soutien aux PME et aux indépendants, et d'adaptation des transports publics, ce qui reflète en grande partie leurs responsabilités plus larges dans ces domaines (OCDE-CdR, 2020[56]).
Une forte incidence sur les dépenses de santé
L’incidence de la crise du COVID-19 sur les dépenses de santé est importante. Dans un certain nombre de pays de l’OCDE, les États, les régions et les communes assument la charge des dépenses relatives aux services de santé et aux hôpitaux publics. Les dépenses de santé par les gouvernements infranationaux représentent 24.5 % environ du total des dépenses publiques de santé dans l’OCDE2 (Graphique 6) et 12 % du total des dépenses infranationales3. Cela dit, le degré de décentralisation du secteur de la santé est très variable. La typologie élaborée par l’OCDE pour rendre compte du niveau de décentralisation du secteur de la santé dans ses pays membres (voir l’annexe 1) se fonde sur la combinaison de trois ratios mesurant les dépenses de santé infranationales : i) en pourcentage du total des dépenses publiques de santé, ii) en pourcentage du total des dépenses infranationales et iii) en pourcentage du PIB.
Les régions et les autorités locales ont des responsabilités distinctes en ce qui concerne les services de santé. La crise aura en conséquence des retombées diverses dans le secteur public infranational. Dans la plupart des pays fédéraux, la santé est une mission importante des États, qui sont responsables des soins secondaires, des hôpitaux et des services médicaux spécialisés. Dans les pays unitaires où les soins de santé relèvent presque exclusivement des régions, les autorités régionales peuvent également jouer un rôle important (par exemple au Danemark, en Italie et en Suède). En général, les compétences des communes dans le domaine de la santé concernent plutôt les services de soins primaires et la prévention. Cela dit, dans certains pays, les communes ou les organismes de coopération intercommunaux peuvent avoir de vastes responsabilités en ce qui concerne les services et les infrastructures de santé.
Bien qu’il soit trop tôt pour présenter des données budgétaires, la crise sanitaire actuelle entraîne, pour les gouvernements infranationaux, d'importantes hausses des dépenses de santé, partiellement compensées par l’aide des États centraux dans de nombreux pays. Les dépenses publiques de santé pèsent particulièrement lourd sur les régions (69 % contre 44 % sur les communes), le plus souvent du fait des responsabilités plus importantes qu’elles y assument dans de nombreux pays de l’UE (OCDE-CdR, 2020[56]). Ces dépenses concernent l’acquisition des équipements et consommables de santé (masques, respirateurs, tests, équipements de protection, etc.), les dépenses de personnel (emploi de personnel soignant temporaire, paiement des heures supplémentaires, primes) et les dépenses liées aux tâches supplémentaires comme le nettoyage et la désinfection, la construction et la transformation d’installations temporaires en centres d’urgence, le transport médical, les vaccinations, etc. Les autorités locales participent aussi à la distribution de masques et aux programmes de dépistage et de recherche des cas contacts en partenariat avec les autorités régionales et les gouvernements nationaux.
L'incidence sur les dépenses sociales est importante et sera durable
La crise du COVID-19 pèse lourdement sur les dépenses de protection sociale car elle touche des groupes de population ayant des besoins divers et souvent complexes. C’est le cas notamment des personnes âgées et dépendantes, qui présentent des maladies chroniques ou de longue durée, des familles pauvres et à bas revenu, des sans-abris, des ménages sans assurance sociale, des travailleurs informels, des migrants, des jeunes, des étudiants et des enfants à risque, des personnes handicapées, des personnes isolées, des femmes et des enfants exposés à la violence domestique et des populations autochtones.
Dans les pays de l’OCDE, 14 % des dépenses publiques de protection sociale sont réalisées par les gouvernements infranationaux en moyenne (Graphique 6), mais ce pourcentage est bien plus élevé dans les pays où ces derniers ont d’importantes responsabilités dans ce domaine (par exemple, en Allemagne, Autriche, Belgique, Japon, dans les pays nordiques et au Royaume-Uni). Il existe de grandes disparités entre les pays de l’OCDE en matière de dépenses de protection sociale. En pourcentage des dépenses des gouvernements infranationaux, elles peuvent s’échelonner de 56 % pour le Danemark à environ 35 % pour l’Irlande et le Royaume-Uni et moins de 10 % dans dix pays de l’OCDE. Ces différences montrent que le niveau d’implication des gouvernements infranationaux en matière de services sociaux n’est pas le même partout, bien que l'échelon local soit souvent le premier recours des citoyens dans le besoin. Même si la protection sociale ne relève pas de leur compétence, ces gouvernements doivent souvent répondre aux urgences sociales.
Durant la crise, les gouvernements infranationaux ont pris des initiatives pour apporter une aide sociale ou un soutien aux populations vulnérables (OCDE, 2020[64]). À plus long terme, les dépenses sociales continueront probablement d'augmenter car il faudra financer davantage de prestations sociales du fait de la hausse du chômage et du nombre de demandeurs d’aide. Les allocations chômage, le revenu minimum garanti, les allocations familiales, les aides au logement, aides d’urgence, prestations de vieillesse, etc., pèseront davantage sur les dépenses sociales des gouvernements infranationaux.
L’incidence sur les dépenses relatives aux affaires économiques dépendra de l’implication des gouvernements infranationaux dans les plans de relance
Au sein de l’OCDE, le secteur des affaires économiques4 représente en moyenne 13.6 % des dépenses infranationales. Les gouvernements infranationaux y représentent près de 34 % du total des dépenses publiques dans le secteur (Graphique 6), bien que ce pourcentage soit supérieur à 50 % dans certains pays (par exemple, en Autriche, Belgique, Espagne et Japon) et atteigne 69 % aux États-Unis. Certains États fédérés et régions, ainsi que des gouvernements locaux, ont pris très tôt des mesures pour soutenir leurs économies locales et en particulier les PME, les travailleurs indépendants, les travailleurs informels et les secteurs durement touchés comme le tourisme, le commerce, la restauration, etc. À plus long terme, les gouvernements infranationaux pourraient également être appelés à participer en tant qu’investisseurs publics majeurs à des plans de relance axés sur l’investissement public pour compenser le recul de l’investissement privé.
Incidences sur le solde budgétaire et l’endettement des gouvernements infranationaux
Les effets sur les finances infranationales vont bien évidemment au-delà de l'impact immédiat sur les dépenses et les recettes ou de leurs conséquences directes sur les biens et actifs; ils ont également des incidences indirectes sur la valeur des actifs, qui peuvent nuire à la capacité d'emprunt. Les entreprises publiques locales subissent elles aussi les effets de la crise liée au COVID-19. Certaines ont souffert de l’arrêt ou du ralentissement de l’activité, en particulier dans le secteur du tourisme, de la culture, des loisirs et des transports. Les faillites d’entreprises ainsi que les menaces qui pèsent sur la capitalisation, les actions et autres participations concernent les gouvernements infranationaux en tant qu’actionnaires (Fédération des Epl, 2020[65]).
Les données préliminaires sur les comptes budgétaires 2020 montrent que l'impact sur les soldes budgétaires a été plus faible que prévu. Dans certains cas, les positions budgétaires se sont améliorées, grâce au soutien du gouvernement central/fédéral (qui a décidé de faire absorber la majeure partie du choc fiscal par l'économie nationale et qui, pour sa part, a vu ses soldes budgétaires se détériorer considérablement en 2020). En 2021, de nombreux pays prévoient une détérioration significative du solde budgétaire infranational. Les dépenses des gouvernements infranationaux pourraient continuer à augmenter dans de nombreux pays (dépenses liées à la relance, à la protection sociale et à la santé) tandis que le soutien du gouvernement central/fédéral ou des États fédérés diminuera probablement, réduisant ainsi son rôle stabilisateur.
En 2020, la dette des gouvernements infranationaux - à court et à long termes - a augmenté dans de nombreux pays, favorisée par des conditions de financement favorables, en particulier des taux d'intérêt bas (voir l’annexe 2). Les emprunts à court terme ont été utilisés pour combler les retards de recettes et couvrir un manque de liquidités en 2020. De nombreux gouvernements centraux ont facilité l'accès des gouvernements infranationaux aux emprunts à court terme et aux lignes de crédit, y compris à travers des lignes de crédit spécifiques pour le COVID-19 (Colombie, France). En juin 2020, 15 % des gouvernements infranationaux interrogés dans l'UE avaient augmenté leurs emprunts pour faire face à la crise et 24 % prévoyaient de le faire (Graphique 15). En juin 2020, les emprunts à court terme ont représenté plus de la moitié de leurs nouveaux emprunts dans l’Union européenne.
Selon des estimations récentes, les emprunts à long terme ont augmenté en 2020 et continueront d'augmenter en 2021 en raison des programmes de relance de l'activité des gouvernements infranationaux et des plans de stimulation de l'investissement public, de l'assouplissement des contraintes réglementaires sur les emprunts infranationaux à long terme et de l'accès facilité aux emprunts à long terme, notamment sur les marchés financiers (S&P Global Ratings, 2021[66]).
À l’avenir, les fonds empruntés par les gouvernements infranationaux dépendront de l'ampleur et de la durée de la crise, de la disponibilité et du montant des transferts de l’État et de l’appétence de ces gouvernements à mener une politique financière contra-cyclique pour soutenir la reprise. Ils dépendront également de leur capacité financière à accéder à de nouveaux emprunts. De nombreuses régions et communes sont déjà, et seront probablement, fragilisées par une dégradation de leur situation budgétaire et de leur solvabilité Dans certains cas, la capacité d’emprunt des gouvernements infranationaux est limitée par leur niveau actuel d’endettement.
Les emprunts des gouvernements infranationaux pourraient alors atteindre un nouveau record au niveau mondial. Ils pourraient atteindre 2 250 milliards USD en 2021, constitués à 40 % par la Chine, 20 % par les États-Unis, 8% par l’Allemagne, 6 % par l'Inde et 5 % par le Japon et le Canada. Les émissions obligataires mondiales pourraient atteindre une moyenne de 1 900 milliards USD entre 2020 et 2022, et près de 84 % des gouvernements locaux et régionaux pourraient y avoir recours. Environ la moitié de cette somme sera placée sur les marchés émergents - Argentine, Brésil, Chine, Inde, Mexique et Russie principalement - et l'autre moitié sera émise dans les pays développés (S&P Global Ratings, 2021[66]). L'augmentation des emprunts portera l'encours de la dette des gouvernements infranationaux à 14 600 milliards USD à la fin de 2021 et à 15 400 milliards USD à la fin de 2022. L'encours de la dette reste assez concentré. Les États-Unis et la Chine représentent chacun 29 % de l'encours de la dette mondiale, suivis par le Japon (10 %), le Canada et l'Allemagne (6 % chacun) et l'Inde (5 %).
Dans les économies développées,5 les emprunts bruts des gouvernements infranationaux ont augmenté et atteint un nouveau pic de 1 100 milliards USD en 2020, soit environ 20 % de plus que la moyenne pour la période 2015-2019, et devraient se maintenir à ce niveau en 2021, en grande partie en raison du creusement des déficits et des mesures budgétaires contra-cycliques prises pour soutenir les économies locales. (S&P Global Ratings, 2021[67]). Dans la plupart des pays, les emprunts bruts ont dépassé, en 2020, les projections d'avant la crise (annexe 2). L'Australie, le Canada, la France, l'Italie et le Japon devraient connaître une forte augmentation des emprunts bruts en 2021, tandis qu'aux États-Unis, les mesures de relance massives du gouvernement fédéral entraîneront probablement une diminution des emprunts des États et des collectivités locales. Les émissions d'obligations ont représenté environ 75 % des emprunts bruts en 2020 (S&P Global Ratings, 2021[67]). Dans l’ensemble, l’encours de la dette des autorités locales et régionales dans les économies développées atteindrait environ 9 200 milliards USD à la fin de 2021 et 9 400 milliards à la fin de 2022 et le montant des emprunts nets restera positif (Graphique 16), les États-Unis comptant pour 47 %, suivis par le Japon (15 %), l’Allemagne (10 %), le Canada (9 %) et l’Espagne (4 %) (S&P Global Ratings, 2021[67]).
Encadré 3. Les incidences budgétaires du CIVID-19 sur les gouvernements infranationaux
En Australie, les recettes fiscales des États et des collectivités locales ont diminué de 2.7 % (769 millions AUD) en 2020, selon les données récemment publiées par le Bureau australien des statistiques. Les charges prélevées sur les salaires ont été le flux de recettes fiscales le plus touché, avec une baisse de 17 % sur l'année. Cette situation reflète la poursuite des politiques d'allègement des charges sociales en réponse à la pandémie de COVID-19. Cette baisse a été compensée par l'augmentation d'autres recettes fiscales, telles que les droits de timbre et les impôts fonciers qui ont crû avec l'augmentation du volume des transferts et la hausse des prix de l'immobilier. Les États et les territoires ont enregistré un solde d'exploitation net négatif de 9.9 milliards AUD à la fin de 2020. Le solde net d'exploitation des États et des territoires a révélé de fortes variations régionales. L'État de l’Australie occidentale a été le seul à enregistrer un solde d'exploitation net positif en raison du fort flux ininterrompu des recettes provenant des redevances et des droits de timbre sur les moyens de transport. L'État de Victoria a enregistré la plus forte baisse de son solde net d'exploitation en raison d'une deuxième épidémie majeure de COVID-19 et d'un confinement de 111 jours qui ont été accompagnés de subventions et de dépenses supplémentaires pour les services de santé.
En Autriche, les répercussions de la pandémie ont pesé sur les finances publiques des États et des communes. Leurs parts de recettes sont directement affectées par la baisse de l'assiette fiscale et les reports d'impôt. La baisse des recettes devrait toucher de la même manière l’ensemble des Länder du fait du système de péréquation fiscale autrichien qui a un effet d’égalisation entre les régions (S&P Global Ratings, 2020[68]). Au niveau municipal, les dépenses supplémentaires nécessaires pour faire face à la crise pourraient, selon les estimations, coûter jusqu’à 2 milliards EUR en 2020. Cela correspondrait à une perte de recettes de 5 % à 11 % par rapport à 2019 (Wiener Zeitung, 2020[69]), due en partie à une baisse de la part municipale des taxes fédérales (taxe sur les ventes, impôt sur les salaires, impôt sur les sociétés) et à une baisse des recettes fiscales municipales (taxe communale et taxe de séjour, redevances pour prestations de services comme la garde d’enfants, etc.).
Au Canada, le secteur consolidé des administrations publiques a enregistré un déficit de 25.3 milliards CAD (1.1 % du PIB en 2019) pour l'exercice 2019 (se terminant le 31 mars 2020), contre un excédent pour l'exercice 2018. Le gouvernement fédéral et le bloc consolidé des gouvernements provinciaux, territoriaux et locaux ont contribué presque à parts égales au déficit. Les dépenses ont dépassé les recettes tant pour le gouvernement fédéral qu’infranational, les recettes consolidées ayant augmenté de 1.7 % par rapport à 2018, soit la plus faible croissance depuis la crise financière de 2008. Les subventions fédérales aux provinces et aux territoires ont augmenté de 2.1 %, totalisant 2 550 CAD par habitant pour les gouvernements provinciaux, territoriaux et locaux consolidés. Les communes pourraient avoir perdu entre 10 et 15 milliards CAD de recettes au cours des trois premiers trimestres de 2020 et ont supporté des coûts imprévus, liés notamment aux mesures de protection sanitaire et de soutien aux populations vulnérables (Fédération canadienne des municipalités, 2020[70]). Un rapport du directeur parlementaire du budget (DPB) a souligné l'impact fiscal asymétrique de la pandémie. À l’occasion de la mise à jour de l’évaluation de la viabilité des finances publiques, en particulier pour les gouvernements infranationaux (provinces, territoires, gouvernements locaux et autochtones), le DPB estime que la politique budgétaire actuelle n'est pas viable à long terme en raison de la hausse des coûts des soins de santé, de l'impact négatif de la pandémie et des effets des variations du prix du pétrole. Toutefois, les « manques budgétaires » varient beaucoup d'une province à l'autre : le DPB attribue une note de « politique budgétaire viable » au Québec, à l'Ontario et à la Nouvelle-Écosse, mais la retire aux autres provinces/territoires qui présentent des insuffisances budgétaires plus ou moins importantes (PBO, 2020[71]).
En République tchèque, malgré une forte baisse des recettes fiscales en 2020 (- 9.1 %) et une augmentation des dépenses courantes et en capital, les gouvernements infranationaux ont terminé l'année avec un excédent budgétaire. Cela s'explique par le soutien extraordinaire du gouvernement central qui a effectué des transferts supplémentaires, mais aussi par l’existence d'importantes réserves budgétaires et une bonne santé budgétaire avant la pandémie (Gouvernement de la République tchèque, 2020[72]).
En Finlande, en décembre 2020, le ministère des Finances estimait que le PIB finlandais diminuerait de 3.3 % en 2020 mais augmenterait de 2.5 % en 2021. En raison de la forte décentralisation de la Finlande, les communes ont été en première ligne pour lutter contre l'épidémie de COVID-19. Le ministère des Finances a estimé que l'impact budgétaire global pour les communes pour les années 2020 et 2021 était d'environ 5.1 milliard EUR, ce qui correspond à environ 6.6% de leurs dépenses pour cette période (Ministère des Finances, Finlande, 2020[73] ; Statistics Finland, 2021[74]). Alors que l'impact économique de la pandémie de COVID-19 sur les communes s'étalera sur une période beaucoup plus longue, et que l'impact final du point de vue financier est encore largement inconnu, l'année 2020 a été moins négative que ce qui était prévu au printemps 2020. Le COVID-19 n'a pas entraîné de diminution des recettes fiscales municipales aussi forte que le laissaient présager les prévisions du printemps et le gouvernement central a largement couvert les coûts supplémentaires encourus par les communes. Si le soutien du gouvernement central semble avoir bien compensé l'effet global du COVID-19 sur les communes en 2020 et 2021, la situation varie cependant considérablement au sein même de l’échelon municipal. Certaines communes ont probablement été surcompensées, ce qui leur a permis de constituer des excédents. Les communes les plus touchées par le COVID-19 ont une situation moins positive.
En France, selon une actualisation du rapport Cazeneuve publiée fin février 2021, l'impact total sur les finances des gouvernements infranationaux sera moins important que ce qui était prévu fin juillet 2020, grâce aux mesures prises par le gouvernement central en 2020 pour soutenir les finances locales. L’impact atteindrait 3.8 milliards EUR, au lieu de 7.5 milliards EUR. La perte de recettes et l'augmentation des dépenses ont été inférieures aux estimations initiales. La capacité d'autofinancement infranationale devrait diminuer d'environ 10.5 % (au lieu de 14.6 %) (Rapport Cazeneuve, 2020[75] ; Actualisation du rapport Cazeneuve, 2021[76]). Les recettes fiscales subissant les plus fortes baisses sont les droits de mutation à titre onéreux (transactions immobilières) (DMTO), la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la taxe sur le transport, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) (sa baisse sera toutefois limitée grâce à un mécanisme de garantie) et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). De fortes disparités subsistent entre les différents niveaux de gouvernement infranationaux ainsi qu'au sein d'une même catégorie de gouvernement (Actualisation du rapport Cazeneuve, 2021[76]). Selon de nouvelles estimations, l'impact budgétaire pèsera le plus sur les départements, puis sur les communes et les intercommunalités et sur les régions (Cour des Comptes, 2020[77]). Si les communes et les intercommunalités résistent mieux que prévu, les grandes municipalités sont plus touchées que les petites, notamment en raison de la baisse des droits d’usage. Une étude réalisée par France Urbaine, impliquant 78 grandes villes, montre en moyenne une baisse des recettes réelles de fonctionnement comprise entre 1 % et 9 % (contre 1 % en moyenne pour les communes) et une perte de capacité d'autofinancement comprise entre 20 % et 30%. Les métropoles françaises souffrent de la forte diminution d'une de leurs principales sources de revenus, la contribution versée par les entreprises pour financer les transports publics, appelée Versement Mobilité. Les communes touristiques et de montagne (stations de ski) sont également particulièrement touchées par la crise. On estime que près de 4 000 communes touristiques sont classées « à risque » en raison de la sensibilité de certaines recettes telles que la taxe de séjour ou celles provenant des casinos, des hippodromes, des remontées mécaniques et autres activités saisonnières (Sénat,, 2020[78]). Les départements et territoires d’Outre-mer sont également classés « à risque ». Les gouvernements de la Guadeloupe, de la Guyane, de La Réunion, de la Martinique et de Mayotte sont particulièrement touchés parce que leurs recettes sont particulièrement sensibles aux fluctuations économiques (par exemple, une TVA locale sur les importations, une taxe de séjour, etc.) et parce que leurs dépenses sociales sont élevées (AFD, 2020[79]). De même, certains départements souffriront plus que d'autres de la hausse des dépenses sociales, notamment des allocations individuelles de solidarité (AIS) qui ont augmenté de 5.3 % par rapport à 2019, accroissement lui-même largement dû à la hausse du revenu de solidarité active, RSA (+ 7.3 %).
En Allemagne, les données révisées publiées par le ministère fédéral des Finances en septembre 2020 indiquaient une perte de recettes fiscales moins importante que prévu : 5.5 % (au lieu de 11 % pour les Länder) et 9.8 % (au lieu de 15%) pour les communes. Cette révision reflète les prévisions du gouvernement fédéral selon lesquelles la croissance du PIB se contractera moins que prévu initialement en 2020. Le niveau local est affecté par une baisse significative des recettes issues de la taxe professionnelle (qui représente 44 % des recettes fiscales municipales) ainsi que de la part municipale de l'impôt sur le revenu. Toutefois, cette baisse a été atténuée par l’apport d’une aide supplémentaire du gouvernement fédéral et des Länder par le biais de transferts d'urgence, en application du Pacte de solidarité municipale. Ainsi, le gouvernement central et les fonds de sécurité sociale ont absorbé la majeure partie du choc porté en 2020 aux finances publiques. Selon les données provisoires publiées en février 2021, les gouvernements des Länder et les gouvernements locaux ont respectivement enregistré, en 2020, des déficits de 18 milliards EUR (contre un excédent de 16.6 milliards EUR en 2019) et de 1.3 milliard EUR (contre un excédent de 5.6 milliards EUR en 2019) à comparer à 139.6 milliards EUR pour l’ensemble des administrations publiques, soit 4.7 % du PIB (Destatis, 2021[80]). Il s'agit du premier cas de déficit depuis 2013 pour le secteur des Länder et depuis 2014 pour le secteur des collectivités locales. En réponse au déficit, la dette des Länder a augmenté de 7.7 % au cours des trois premiers trimestres de 2020 (Fitch ratings, 2021[81]). Pour 2021, les dernières estimations prévoient une reprise plus lente que prévu, et donc un impact encore négatif sur les finances infranationales.
En Islande, un rapport rendu public en août 2020 fait état d'une forte diminution des recettes municipales en 2020 du fait de la crise du COVID-19 ; elle est évaluée en tout à plus de 33 milliards ISK, soit 8.5 % des dépenses totales enregistrées par les municipalités en 2019 (et 1.1 % du PIB). Les recettes fiscales, qui représentent la principale source de revenus des municipalités, vont considérablement diminuer. En règle générale, c’est dans les régions touristiques que les incidences de l’épidémie sont les plus marquées, ainsi que dans les communes qui dépensent le plus pour les services sociaux et les aides financières (Ministry of Transport and Local Government, 2020[82]). Un rapport publié en février 2021 prévoit des déficits d'exploitation municipaux équivalant à 5.8 % des recettes pour 2021 et des déficits ininterrompus jusqu'en 2024 au plus tôt. Les réserves de trésorerie devraient diminuer, passant d'une moyenne de 13.4 % des recettes de 2010 à 2019 à 1 % des recettes en 2021. Dette et passif combinés devraient augmenter jusqu’à atteindre à 124 % des recettes municipales et continuer à augmenter jusqu'en 2024. (Icelandic Association of Local Authorities, 2021[83])
En Italie, les municipalités ont souffert d'une diminution des recettes fiscales (impôt sur le revenu des personnes physiques - IRPEF, taxes de séjour, impôt foncier IMU et Tosap/Cosap) et des droits d'usage, en même temps que d’une augmentation des dépenses. Les gouvernements régionaux rencontrent également des difficultés financières. L’essentiel de leurs dépenses est affecté à la santé (85 % en moyenne) et celles-ci ont considérablement augmenté. À cela s’ajoute une baisse des rentrées fiscales au titre de la taxe régionale sur les activités productives (IRAP), de la surtaxe régionale sur l’impôt sur le revenu et de la taxe régionale sur les véhicules. La baisse des recettes fiscales en 2020 a toutefois été atténuée par le soutien important apporté par le gouvernement central. Pour 2021, les gouvernements régionaux et locaux prévoient de nouvelles augmentations des dépenses, affectées notamment aux soins de santé et à l’investissement. Les dépenses d’investissement devraient atteindre 8.3 % des dépenses totales en 2021. Du côté des recettes, les gouvernements régionaux et locaux ne prévoient pas de dépasser le niveau de recettes fiscales pré-pandémie avant fin 2022, au plus tôt. Les recettes fiscales régionales devraient être moins affectées que les recettes fiscales municipales car elles sont davantage subventionnées par le gouvernement (Moody’s, 2021[84]).
Au Japon, le soutien ferme du gouvernement central a atténué la pression fiscale sur les dépenses locales et régionales, à travers plusieurs mesures, telles que des subventions pour couvrir les dépenses liées à la pandémie(Moodys, 2021[85]). Les préfectures ont également largement utilisé leurs fonds de réserve. En juillet 2020, les 47 régions avaient déjà utilisé 58 % de leurs réserves (Asahi Shimbun, 2020[86]). Bien qu'une reprise économique soit attendue au Japon pour l'exercice 2021, les recettes fiscales locales devraient diminuer de 6.5 % par rapport à 2020 en raison du décalage budgétaire d'un an. La baisse des recettes fiscales sera plus importante pour les préfectures que pour les villes car les préfectures dépendent davantage des impôts cycliques sur les sociétés (représentant 25 % de leurs recettes fiscales) tandis que les villes dépendent davantage des impôts fonciers (40 % de leurs recettes fiscales) qui sont plus stables. Les besoins en matière de dépenses resteront élevés, en particulier les coûts de la protection sociale liés au vieillissement de la population. Une augmentation des dettes locales et régionales est attendue en 2021, mais le poids du crédit devrait être limité par le faible niveau des taux d'intérêt (Moodys, 2021[85]).
Au Mexique, la pandémie a entraîné des pertes de recettes et des augmentations de dépenses pour les gouvernements infranationaux alors qu’ils disposent d’une capacité limitée à s'endetter à court terme pour couvrir leurs coûts de fonctionnement. En outre, l'année 2021 est une année électorale et la législation fédérale exige des gouvernements sortants qu’ils remboursent les dettes à court terme avant de quitter leurs fonctions (Ayala Espinosa, 2021[87]). On estime à 5 % la diminution des recettes propres des États et des municipalités en 2020 en raison de la pandémie et des mesures de confinement, alors que, dans le même temps, les transferts fédéraux inconditionnels ont diminué d'environ 5.6 %. (S&P Global, 2020[88]). Ces transferts représentent une part substantielle des recettes des États et des municipalités, respectivement 90 % et 65 %. Cette baisse des recettes a été amortie par les transferts du Fonds de stabilisation des revenus des entités fédérales (FEIEF) qui ont comblé 75 % du manque à percevoir. Les États ne devraient pas recevoir de transferts FEIEF supplémentaires en 2021, car ces derniers ne s'appliquent que si les transferts fédéraux diminuent par rapport à ce qui a été budgété pour l’année concernée. En 2021, sur la base du dernier budget fédéral, il est prévu une baisse annuelle réelle de 6.4 % des transferts fédéraux inconditionnels (S&P Global, 2020[88]).
En Nouvelle-Zélande, au début de 2020, le ministère de l'Intérieur a mis en place une Unité de réponse des gouvernements infranationaux au COVID-19 réunissant des représentants des autorités locales et de l'Agence nationale de gestion des urgences. Les axes de travail prioritaires ont porté sur le maintien des services essentiels des gouvernements locaux, la gouvernance interinstitutionnelle, le financement des gouvernements locaux et le bien-être social. Le groupe a évalué les répercussions financières sur les autorités locales et a noté que celles-ci n'étaient pas uniformément réparties entre les conseils municipaux. Il a été remarqué que l'Agence de financement des collectivités locales avait contracté plus d’emprunts qu’habituellement au nom des conseils locaux (Department of Internal Affairs, 2020[89]).
En Norvège, un groupe de travail composé de membres de l'association norvégienne des pouvoirs locaux et régionaux (KS) et du gouvernement central a été mis en place pour évaluer les conséquences fiscales de la crise du COVID-19 sur les finances municipales. En octobre 2020, un premier rapport a estimé que le coût pour les municipalités était d'environ 14 milliards NOK en 2020 (1.4 milliard EUR). Ce montant comprend des pertes de revenus (redevances et droits d'usage, taxes), des dépenses supplémentaires (par exemple, des dépenses plus élevées pour le contrôle des infections et du personnel temporaire) mais aussi des économies réalisées. L'impact diffère toutefois beaucoup d'une municipalité à l'autre. Le rapport sera actualisé en 2021 (Ministry of Local Government and Modernisation, 2020[90]).
En Russie, selon les données publiées par le Ministère russe des Finances, les gouvernements régionaux ont enregistré un déficit combiné de 5 % des recettes totales en 2020 et prévoient un déficit de 2 % en 2021 (après des budgets équilibrés ou excédentaires au cours des quatre années précédentes). Ce déficit a pour origine une baisse de 13 % des recettes de l'impôt sur les sociétés, source importante de revenus pour les régions, et une augmentation des dépenses liées à la pandémie. Malgré les transferts du gouvernement fédéral, les régions ont été contraintes de reporter une partie importante des dépenses prévues pour 2020. Le niveau d'endettement des régions a augmenté de 18 % en 2020 en raison des déficits et devrait encore s’accroître de 10 % en 2021. Le taux de croissance de la dette en 2020 a été plus faible que prévu, car les régions ont pu puiser dans leurs réserves de liquidités, mais ces réserves devraient être moins importantes en 2021 (Moodys, 2021[91]).
En Espagne, l'impact budgétaire du COVID-19 a été absorbé par le gouvernement central et, dans une moindre mesure, par la sécurité sociale, ce qui a donné lieu à une année très atypique pour les finances des gouvernements infranationaux. Le gouvernement central a pris la décision politique de protéger les communautés autonomes et les gouvernements locaux des impacts budgétaires de cette pandémie. Il a décidé de soutenir massivement les budgets régionaux et locaux et de compenser à la fois les dépenses supplémentaires en matière de santé et d'éducation et la baisse des impôts infranationaux. (BFF Banking Group, 2020[92]). D'importants transferts affectés aux budgets infranationaux par le biais du Fonds COVID-19, du Fonds social extraordinaire, des subventions du Plan national du logement, etc., ont permis de limiter la détérioration du solde budgétaire. Dans l'ensemble, on estime que le déficit des communautés autonomes se soldera à environ 0.6 % du PIB en 2020. Celui des collectivités locales sera proche de l'équilibre budgétaire, après avoir enregistré plusieurs années d'excédents. Ceci ne doit pas occulter le fait que les recettes des impôts régionaux et locaux ont sensiblement diminué (en particulier on constate une baisse de 23,8% de la perception des droits de timbre liés aux transactions immobilières) et que les dépenses régionales sociales et de santé dues au COVID-19 ont sensiblement augmenté - une augmentation estimée à plus de 6 milliards, soit 0.55 % du PIB jusqu’au mois d’octobre 2020 (Ministère des Finances, Espagne, 2020[93]). Pour 2021, l’Autorité indépendante pour la responsabilité budgétaire (AIReF) estime que le déficit augmentera, atteignant 0.8 % du PIB au niveau régional, avec un risque de déséquilibres plus grands en 2022 (AiREF, 2020[94]).
En Suède, globalement, les finances régionales et municipales se sont finalement bien portées en 2020 grâce au soutien considérable du gouvernement central. Les subventions accordées par le gouvernement général aux municipalités ont augmenté de 18.7 milliards SEK en 2020 par rapport à 2019, en réponse directe aux coûts liés à la pandémie et à la perte de recettes infranationales. Des subventions supplémentaires ont été accordées pour compenser les coûts des soins de santé et des services sociaux, y compris le dépistage et le suivi des cas contacts du COVID-19, pour un montant global de 19 milliards SEK. En termes de recettes, les municipalités et les régions s'attendent à une forte baisse des recettes des transports publics et des activités culturelles, mais aussi à une diminution des recettes des soins dentaires publics et à une perte d'impôts municipaux. Grâce à l’aide considérable accordée par le gouvernement central aux gouvernements locaux et régionaux, un excédent budgétaire est prévu pour les municipalités et les régions en 2020. Les années suivantes pourraient être plus difficiles sur le plan budgétaire en raison des effets à long terme et de la reprise plus longue que prévue, ainsi que du poids de l'évolution démographique (SKR, 2020[95]).
En Suisse, on observe des incidences du COVID-19 très différentes sur les recettes et dépenses des villes et des cantons, selon leur structure économique et la résilience de leur assiette d’imposition. Les recettes fiscales des cantons et municipalités pourraient baisser en 2020 de 6 % à 8 % en moyenne en glissement annuel si le PIB du pays se contracte de 6.5 % comme l’indiquent les prévisions actuelles. La baisse se poursuivra en 2021 car le recouvrement de l'impôt en Suisse s'étale sur plusieurs années. Les dépenses de santé des cantons ont considérablement augmenté car ces derniers prennent en charge 55 % du coût facturé des soins hospitaliers non-ambulatoires de leurs ressortissants ; ils sont également responsables des hôpitaux et de l’application des mesures de santé publique. Les cantons ont également commencé à soutenir l’économie locale. La crise entraînera une augmentation des besoins d’emprunt de l’ordre de 20 %. Toutefois, la plupart des gouvernements infranationaux suisses avait des budgets équilibrés avant la crise (S&P Global Ratings, 2020[57]).
Au Royaume-Uni, les autorités locales (councils) d'Angleterre prévoient un impact budgétaire de 13 milliards GBP pour l'exercice 2020‑21, sur la base des données de janvier 2021, collectées par retour d’informations auprès des councils et basées sur les prévisions de dépenses du ministère du logement, des communautés et des collectivités locales (Ministry of Housing Communities and Local Government, 2021[96]). Cette estimation est 42 % plus élevé que l'impact total de 9.1 milliards GBP qui était prévu par les autorités en mai 2020. Les councils ont prévu une perte de 5.7 milliards GBP au titre de la taxe d'habitation, de la taxe professionnelle et de revenus non fiscaux pour 2020‑21 en raison de la pandémie (National Audit Office, 2021[97]). D’après les données de février 2021, ces prévisions ont été diminuées de 35 % dues à la non perception de la taxe d'habitation pour l'exercice 2020‑21 (Rudgewick, 2021[98]) ; toutefois, cette réduction a été contrebalancée par une augmentation des pertes estimées provenant d'autres sources de revenu, à savoir les redevances et droits d'usage (Rudgewick, 2021[99]). S’agissant des dépenses, les autorités locales prévoient une augmentation des dépenses de 6.9 milliards GBP, notamment pour les prestations de services (National Audit Office, 2021[97]). De décembre 2020 à janvier 2021, les councils ont remarqué une augmentation de 5 % de leurs dépenses liées au COVID en raison de règles de confinement plus strictes, les dépenses de soins sociaux représentant 40 % des dépenses de janvier (Rudgewick, 2021[99]). D'autres analyses récentes estiment que les councils anglais devront faire face en 2020 à une augmentation de 7.9 % de leurs dépenses par rapport à celles d'avant la crise, et à une diminution de 5.1 % de leurs recettes (incluant taxe d'habitation, impôts fonciers commerciaux, frais, redevances et revenus commerciaux). S’agissant des dépenses, les autorités locales prévoient une augmentation de 15 % pour le secteur du logement et des sans-abris et de 12 % pour les services sociaux pour adultes (Institute for Government, 2020[100]). Les prévisions concernant les recettes locales en Angleterre varient toutefois considérablement d'un council à l'autre. Ainsi, les pertes de recettes pourraient représenter moins de 5 % des dépenses précédant la crise pour 30 % de ces autorités, mais aller jusqu'à 20 % pour 17 % d’entre elles. Les autorités locales les plus touchées sont les districts non métropolitains (shire districts), qui dépendent dans une large mesure des droits et redevances payés par les usagers des transports, ainsi que des activités commerciales (Institute for Fiscal Studies, 2020[101]). Londres et les grandes villes ont été particulièrement touchées par la crise économique. Les taux de recouvrement pour le Nord-Est de l'Angleterre ont diminué de 1.3 %, avec une baisse de 0.2 % dans le Nord-Ouest (Institute for Fiscal Studies, 2021[102]).
Aux États-Unis, l'état des finances publiques infranationales suscite plus d'optimisme qu'il y a quelques mois. Les recettes fiscales nationales plus importantes que prévu et le soutien budgétaire continu du gouvernement fédéral ont atténué la pression sur les finances des États et des collectivités locales (Moody’s, 2021[103]). Toutefois, la pandémie devrait encore coûter aux collectivités régionales et locales 467 milliards USD de recettes fiscales en moins entre 2020 et 2022 et entraîner une baisse de 17 % des recettes fiscales infranationales au cours du seul premier semestre de l'exercice 2022 (S&P Global, 2021[104]). Au niveau régional, les États font face à une forte diminution des recettes provenant de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, des taxes sur les ventes et de l'impôt sur les sociétés, de même qu’à une augmentation des dépenses de Medicaid. En 2021, ces dernières devraient augmenter d'un montant estimé à 29 milliards USD (Council of State Governments, 2020[105]). Au niveau des comtés, un rapport récent de l'Association nationale des comtés prévoit une diminution des recettes des comtés jusqu'à l'exercice 2021 (inclus), provenant d'une perte des recettes perçues par les comtés (par exemple, la taxe sur les ventes) et d'une baisse du financement accordé par l'État (National Association of Counties, 2020[106]). Au niveau municipal, des études récentes estiment une baisse des recettes de 5.5 % (34.2 milliards USD) pour le scénario le plus optimiste et de 9 % (55.3 milliards USD) pour le scénario le plus pessimiste (Chernick, Copeland et Reschovsky, 2020[59]). Cette baisse est due à la diminution des recettes propres, mais elle pourrait également résulter de la diminution (attendue) des transferts des États aux gouvernements locaux. Les résultats d'une enquête menée par la National League of Cities auprès de 901 municipalités indiquent qu'au cours des neuf premiers mois de la pandémie, les municipalités ont connu une baisse estimée à 21 % de leurs recettes et une augmentation de 17 % de leurs dépenses au cours de la même période. Ces pertes pourraient entraîner des compressions budgétaires importantes dans des secteurs tels que la sécurité et l’ordre public, les parcs et centres de loisirs, ainsi que des baisses de salaire et des suppressions d’emplois. Cela pourrait également affecter les investissements dans les infrastructures (National League of Cities, 2020[107]). Le récent plan de relance fédéral continue de fournir un soutien direct aux gouvernements locaux, ce qui, combiné à la reprise économique, devrait stimuler les recettes fiscales locales et aider à stabiliser les finances locales. (Moodys, 2021[108]) L'impact sur les États et les collectivités locales varie selon chacun d’eux, en fonction d’une variété de facteurs de risque et de résilience:
Un facteur de risque est par exemple la concentration des activités (en particulier dans le domaine des loisirs, du tourisme, de l'énergie et du commerce). Les États qui dépendent le plus du tourisme risquent davantage de voir se ternir leur notation de crédit à cause des pertes de recettes induites, des pics de chômage et de la réduction de l'activité économique, et sont susceptibles d’accuser un retard important lors de la reprise. Hawaï et le Nevada, par exemple, sont considérés comme les États les plus durement touchés compte tenu de la large part du tourisme dans leurs économies (S&P Global Ratings, 2020[109]).
Un autre facteur de risque est le niveau des réserves et des liquidités ainsi que la possibilité d'avoir accès à d’autres ressources disponibles pour répondre aux besoins de trésorerie à court terme (lignes de crédit, fonds de précaution et autres facilités de trésorerie). À titre d’exemple, un certain nombre d’États américains n’ont pas de réserves suffisantes pour supporter les pressions budgétaires au-delà du très court terme, bien que la plupart d'entre eux aient donné la priorité, après la récession mondiale de 2008, à la constitution de fonds de précaution pour faire face à un éventuel ralentissement économique. Entre 2009 et 2019, les réserves moyennes des États ont augmenté de 170 % pour atteindre près de 13 % des dépenses inscrites à leur budget (National Association of State Budget Officers, 2019[110]).
L’existence dans le budget de sources de recettes sujettes à fluctuations pose des difficultés immédiates aux gouvernements infranationaux. Par exemple, les pertes de recettes les plus lourdes devraient être supportées par les villes qui dépendent davantage des transferts de l’État, des taxes sur les ventes locales et de l'impôt sur le revenu, plutôt que par celles qui dépendent largement de l'impôt foncier, moins fluctuant (Chernick, Copeland et Reschovsky, 2020[59]).
D’autres facteurs de risque incluent les performances des investissements dans les fonds de pension, le niveau d’endettement, la hausse des dépenses du programme Medicaid, les allocations chômage à verser ainsi que le degré de préparation à une récession (Council of State Governments, 2020[105]).
Gérer l’impact territorial de la crise du COVID-19 et la relance
Les incidences économiques, budgétaires et sociales de la crise du COVID-19, de même que les risques qui y sont associés, ne sont pas les mêmes sur tous les territoires. Ces différences régionales appellent à une approche territoriale des réponses apportées par les pouvoirs publics sur les fronts sanitaire, économique, social et budgétaire, ainsi qu’à une solide coordination entre les gouvernements. La mise en place de mécanismes de coordination efficaces entre les niveaux de gouvernement est essentielle. « Une forte coordination entre tous les acteurs en charge de réagir aux niveaux central et régional est le fondement d'une réponse efficace. » (OMS, 2020[111]).
Sur le plan sanitaire, la stratégie du « suivi, isolement, dépistage et traitement » a permis aux pays d'adopter par la suite des approches territoriales de politiques obligeant le respect des distances de sécurité et le confinement, mais elle n'a pas empêché l’émergence de nouveaux foyers et des mesures successives d’arrêt et de redémarrage de l’activité. Les campagnes de vaccination ont commencé en décembre 2020 dans certains pays, à l’initiative des gouvernements nationaux et mises en œuvre en coordination avec les gouvernements infranationaux, ce qui a eu d’importantes implications en termes de logistique et de gouvernance pluri-niveaux.
Sur le front économique, de nombreux gouvernements à tous les niveaux ont réagi rapidement lorsque la crise a frappé en 2020. Les gouvernements ont apporté un soutien budgétaire massif pour protéger les entreprises, les ménages et les populations vulnérables. Le soutien budgétaire mondial s'élève à 13 800 milliards USD, dont 7 800 milliards USD de dépenses supplémentaires et de recettes perdues et 6 000 milliards USD d'injection de capitaux, de prêts et de garanties depuis mars 2020 (FMI, 2021[112]). De nombreux pays ainsi que l'UE, ont eu accès à de nouveaux financements et réaffecté des fonds publics dans les nouveaux secteurs prioritaires qui se sont imposés avec la crise, tels que les soins de santé, les PME, les populations vulnérables et les régions particulièrement touchées. Par ailleurs, presque tous les pays de l'OCDE ont adopté des mesures pour soutenir les finances des gouvernements infranationaux (à la fois au niveau des dépenses et des recettes) et ont assoupli les règles budgétaires.
Si les premières mesures financières visaient à protéger les travailleurs, les chômeurs et les populations vulnérables, de nombreux gouvernements ont aussi annoncé de vastes plans de relance centrés sur l’investissement public, bien supérieurs à ceux adoptés en 2008. Ces plans privilégient quatre axes d’action : i) renforcement des systèmes de santé ; ii) numérisation ; iii) accélération de la transition vers une économie neutre en carbone et iv) infrastructures sociales. Compte tenu des incidences territorialisées de la crise du COVID-19, il est capital que les stratégies de relance aient explicitement une dimension territoriale. Si cet aspect est plus visible dans certains pays que dans d’autres, il demeure un défi encore difficile à atteindre dans de nombreux autres. Un autre point très important est de permettre très tôt aux gouvernements infranationaux – non seulement aux municipalités, mais aussi aux régions – de participer activement à la mise en œuvre de ces stratégies.
Cette section présente les six catégories de mesures qui ont été prises par les gouvernements centraux et nationaux pour offrir des réponses territorialisées à la crise et à la relance :
1. Approche territoriale de la crise sanitaire
2. Mesures économiques et sociales
3. Utilisation des outils numériques
4. Soutien aux finances publiques infranationales
5. Stratégies de relance de l’investissement public à tous les niveaux de gouvernement
6. Coordination entre les différents niveaux de gouvernement
L’approche territoriale de la crise sanitaire
Conformément aux recommandations de l’OMS, le dépistage et le traçage sont au cœur de toutes les stratégies de gestion de la crise, avec divers degrés d’efficacité. Une stratégie de dépistage efficace, associée au respect des distances de sécurité entre les personnes, coûte moins cher que l’instauration d’un nouveau confinement tandis que la vaccination se déploie. Au printemps 2021, la stratégie adoptée en réponse à la crise est structurée autour du déploiement progressif des vaccins dans les différents pays et régions. En Israël, où le déploiement de la vaccination a été rapide, le gouvernement a assoupli les mesures de confinement. (OCDE, 2021[9]).
De nombreux pays sont passés d'une approche nationale lorsque la crise a éclaté au printemps 2020, à une approche plus territorialisée selon les régions, afin d'adapter les réponses à la crise aux besoins locaux et de limiter les coûts et la nécessité des mesures de confinement national. Au début de la crise, au printemps 2020, les gouvernements ont réagi à la crise sanitaire par des mesures largement centralisées et homogènes sur l’ensemble des régions. Dans quelques pays, ces mesures ont fait l’objet d’une recentralisation temporaire (Eurohealth, 2020[116]), par exemple en Italie et en Norvège, et dans des pays fédéraux comme l'Allemagne, l'Autriche, le Canada et la Suisse. Depuis la mi‑2020, les gouvernements nationaux ont adopté une approche de plus en plus territorialisée pour répondre à la crise sanitaire. Dans un grand nombre de pays, des mesures particulières concernant le port du masque, la fermeture des établissements scolaires et des restaurants et un confinement strict ont été appliquées uniquement dans certaines localités ou régions de manière à limiter l'impact économique, comme par exemple, en Allemagne, en Australie, au Canada, en Colombie, en Finlande, en France, en Italie et au Royaume-Uni. Si cette approche territorialisée est naturelle dans les pays fédéraux, dans lesquels les responsabilités en matière de santé sont largement décentralisées, elle devient de plus en plus répandue dans un certain nombre de pays unitaires. Les gouvernements locaux et régionaux se sont également davantage mobilisés depuis la mi‑2020 pour adapter leurs actions aux contextes locaux.
Dépistage et traçage
Les tests sont une composante essentielle des stratégies de sortie de confinement. Dès le début de la pandémie, l’OMS recommande un dépistage à grande échelle pour lutter contre le coronavirus (OMS, 2020[113]). Des tests fréquents permettent d’identifier et d'isoler les personnes contagieuses avant l'apparition de symptômes et de prévenir le risque d’une deuxième vague de contamination. Pour réduire le risque d'apparition de nouvelles vagues de l'épidémie, l’OCDE a estimé en 2020 que 70 à 90 % des personnes ayant été en contact avec une personne infectée devaient faire l'objet d'un traçage et d'un dépistage, et être mises en quarantaine si le test s’avérait positif (OCDE, 2020[114]). Cette approche nécessite d’étendre considérablement le dépistage et peut être coûteuse. Mais les difficultés et les dépenses que cela engendre sont dérisoires par rapport aux coûts d'un confinement. (OCDE, 2020[114]).
Le dépistage et le traçage des cas contacts ont été au cœur de la stratégie de la Corée, qui a ainsi réussi à gérer avec succès la première vague de contamination, les autorités locales étant responsables des centres de dépistage du COVID-19, ce qui a permis la réalisation rapide et en toute sécurité de tests ainsi que le suivi des personnes mises en quarantaine. Entre mai et octobre 2020, les pays européens ont considérablement accru leurs capacités et ont généralisé le dépistage pour les cas suspects. L’utilisation des autotests s’est également généralisée.
Dans les pays plus décentralisés, si les gouvernements centraux doivent apporter les moyens financiers nécessaires et coordonner les interventions, ce sont les gouvernements locaux et régionaux qui assurent la mise en œuvre des politiques. Même dans les pays où la prestation des services de santé est plus centralisée, les gouvernements infranationaux contribuent à l’organisation du dépistage et des mesures d'isolement, ce qui laisse suffisamment de place aux initiatives et expérimentations locales. Cela permet de gérer l’impact asymétrique de la pandémie qui nécessite souvent une réaction locale rapide pour identifier et contrôler les foyers de contamination.
Distance de sécurité entre les personnes
La distance de sécurité entre les personnes a été un élément central de la gestion de la crise dès le début de la pandémie et est susceptible d'affecter durablement les comportements et les politiques. La nécessité de respecter une distance de sécurité entre les personnes fait partie des recommandations établies par les autorités sanitaires nationales et l’OMS pour limiter la contagion. La consigne de mise à distance physique est applicable dans les transports publics, les établissements scolaires et plus généralement dans le cadre de la mobilité urbaine. L’un des plus grands défis à relever par les autorités locales a été d’organiser le retour à l'école dans les meilleures conditions possibles, en respectant les règles de mise à distance physique dans un contexte d’augmentation du nombre des cas. L'utilisation d'équipements de protection pour prévenir la transmission du virus a considérablement augmenté. De nombreuses autorités nationales et infranationales recommandent le port du masque dans les transports publics, les commerces et autres lieux publics.
La date de mise en œuvre des mesures de restriction compte au moins autant que leur durée. Lors de la première épidémie en mars 2020, les pays européens qui ont agi rapidement en appliquant des stratégies de confinement et d'atténuation avant que le virus ne se propage au sein des communautés ont limité le nombre de décès dus au COVID-19 (OCDE/Union européenne, 2020[115]). Les considérations concernant les rassemblements de masse (OMS, 2020[116]) et les consignes relatives à l’obligation de porter un masque (OMS, 2020[117]) doivent être respectées lorsque la transmission du virus s'accroît et exerce une pression supplémentaire sur le système de santé. Cela requiert de disposer de données précises et de stratégies de dépistage efficaces au niveau local. Pour limiter la propagation du virus et relancer l’activité économique, l’OMS recommande une intensification radicale du dépistage pour mieux cibler la mise en place d’une distance de sécurité entre les personnes.
Confinement local et national
Au début de la crise, les schémas de mobilité régionale étaient globalement uniformes, mais une fois les mesures de restriction régionalisées, lors de la première phase de sortie de crise, ils ont commencé à diverger au sein des pays (Allemagne, Autriche, Italie) (Graphique 17). Une coordination efficace entre les gouvernements infranationaux, les organismes de santé et le gouvernement central est indispensable pour gérer les foyers épidémiques locaux.
Exemples par pays
En Chine, la lutte contre les nouveaux foyers de COVID-19à la fin de 2020 et au début de 2021 a été menée à l'aide de tactiques localisées, ce qui a permis d'éviter les fermetures généralisées. La Commission nationale de la santé (CNS) a donné comme directive aux responsables locaux d’éviter les solutions «uniques ». Dans la province du Hebei, par exemple, qui a connu des centaines d'infections au début de l'année 2021, les responsables ont adopté le principe « un village, une politique » et élaboré des plans particuliers pour chaque communauté (Japan Times, 2021[119]). À Shanghai, bien qu'il n'y ait pas eu de nouveaux cas locaux récents, de nombreux immeubles résidentiels ont renforcé les restrictions d'entrée pour les coursiers et reconstruit les postes de contrôle qui étaient en place à l'extérieur de chaque lot immobilier au début de l'année dernière. Les autorités locales de la ville de Langfang ont placé leurs cinq millions d'habitants en quarantaine à domicile pendant sept jours, tout en organisant des tests dans toute la ville. Les autorités ont imposé des mesures similaires dans la capitale provinciale de Shijiazhuang, interdisant aux personnes et aux véhicules de quitter la ville et y interrompant les transports publics (BBC, 2021[120]). Plus de 20 provinces ont demandé aux citoyens de ne pas voyager pendant les vacances du Nouvel an lunaire à la mi-février (WSJ, 2021[121]).
En France, un couvre-feu général est appliqué depuis décembre 2021, mais des approches locales sont progressivement adoptées pour réglementer les politiques de confinement et de couvre-feu au niveau des régions, des départements et des municipalités. Une typologie a été élaborée pour classer les régions, et, à un niveau plus granulaire, les départements, afin de déterminer leur degré de vulnérabilité au virus, à partir de données telles que les taux d'incidence du virus et les taux d'occupation des lits d'hôpitaux. Depuis octobre 2020, Santé Publique France fournit également des données sur les contaminations par le COVID-19 au niveau des communes. Le 4 mars 2021, 23 départements français ont été placés sous « surveillance renforcée », le plus haut niveau de risque (Vie Publique, 2021[122]). Cela a impliqué la mise en œuvre de mesures supplémentaires dans ces territoires, comme la fermeture des grands centres commerciaux et la possibilité pour les préfets de restreindre l'accès aux zones à forte circulation pendant les week-ends. En raison d'indicateurs de niveau de risque particulièrement élevés, des mesures locales spécifiques ont également été prises pour instaurer un confinement localisé pour les autorités locales de Mayotte, et un confinement partiel pendant le week-end pour la ville de Dunkerque, le département du Pas-de-Calais et la plupart des villes du littoral du département des Alpes-Maritimes (Vie Publique, 2021[123]).
En Allemagne, le gouvernement a annoncé en mars 2021 l'intensification des tests et la mise en place de tests rapides gratuits afin que la population y ait recours massivement. (RKI, 2021[124]). Toute personne en Allemagne aura droit à un test hebdomadaire, effectué dans un centre de tests ou dans un cabinet médical ou sur le lieu de travail et administré par du personnel qualifié. Il s'agit d'un changement de stratégie important après la réduction des tests pendant l'hiver, avec la crainte que les laboratoires aient été dans l’incapacité de traiter tous les tests. En s’appuyant sur sa stratégie de dépistage révisée, l'Allemagne a envisagé début mars de sortir du confinement et certaines réouvertures progressives ont eu lieu au cours de ce même mois, mais ce, avec de grandes variations entre les Länder. Devant l'augmentation du nombre d'infections, le pays a toutefois décidé, le 23 mars 2021, de prolonger le confinement en cours jusqu'au 18 avril (Gouvernement Fédéral, Allemagne, 2021[125]). . Afin d'aider les décideurs politiques régionaux et locaux à évaluer de manière rationnelle les stratégies de quarantaine et de test en fonction du lieu, l'agence fédérale allemande de la santé (RKI) a développé en novembre 2020 un outil logiciel basé sur la réduction du risque général de transmission6.
Au Japon, les autorités locales sont chargées de mettre en œuvre la stratégie de dépistage par l'intermédiaire des institutions locales, des centres de consultation externes et des centres de dépistage locaux. Elles sont responsables du dépistage, du déploiement du personnel médical dans les services de consultation externes qui s’occupent des cas contact et des personnes de retour de l’étranger, ainsi que de la mise en place de structures de soins médicaux accessibles en voiture et pour les piétons sous de grandes tentes et dans des bâtiments préfabriqués (Prime Minister of Japan and His Cabinet, 2020[126] ; Gouvernement du Japon, 2020[127]).
En Corée, des Centres Infranationaux de Lutte contre les Pandémies ont été mis en place pour appliquer les mesures de confinement et assurer la coordination des mesures locales avec le gouvernement central. Les gouvernements infranationaux jouent un rôle important dans la stratégie de dépistage à grande échelle mise en œuvre par la Corée pour lutter contre le coronavirus et sont notamment chargées de la mise en place d’installations de dépistage en bord de route (Chung et Soh, 2020[128] ; Business Insider, 2020[129]). De nombreuses municipalités, suivant l’exemple de la ville de Goyang, ont mis en place des points de dépistage du COVID-19 accessibles en voiture où le personnel médical en tenue de protection prélève des échantillons sur les passagers des véhicules. Un foyer localisé dans la ville de Daegu a été éteint grâce à des mesures spécifiques de contrôle et de traçage prises conjointement par le ministère de la Santé et du Bien-être et le gouvernement local.
En Espagne, l'état d'alerte imposé par le gouvernement central sera maintenu jusqu'au 9 mai 2021. Toutefois, comme les infections ont diminué après la troisième vague et que le processus de vaccination a progressé au cours des premiers jours de mars, les communautés autonomes ont assoupli leurs restrictions respectives en fonction de la situation de chaque territoire (El Pais, 2021[130]). La grande majorité des régions maintiendra certaines mesures (comme les zones fermées au public et les couvre-feux), mais, par exemple, dans des communautés comme l'Andalousie, l'Aragon, les Asturies, la Cantabrie et la Catalogne, la capacité de clientèle et les heures d'ouverture des bars et des restaurants seront étendues. D'autres régions, comme la Castille‑La Manche, l'Estrémadure et La Rioja, ont commencé à assouplir les couvre-feux.
Aux États-Unis, le nouveau gouvernement a commencé à imposer de nouvelles mesures au niveau national, telles que l'augmentation du nombre de tests, la réorganisation de la collecte de données et l'obligation de porter un masque lors des déplacements entre États. (The New York Times, 2021[131]). Toutefois, la plupart des restrictions restent à la discrétion de chaque État (The New York Times, 2020[132]). Ainsi, depuis le mois de mars 2021, plus de 33 États imposent le port obligatoire du masque, tandis que 13 autres n’appliquent aucune restriction en la matière. D'autre part, la plupart des États ont maintenu leurs commerces ouverts et seuls 8 États conservent des mesures mixtes en fonction de chaque comté. Enfin, un seul État (Porto Rico) maintient l’obligation de rester chez soi, 7 États en font une recommandation et les autres États n’imposent pas de restrictions à cet égard.
Gérer les campagnes de vaccination aux différents niveaux de gouvernement
La vaccination de la population mondiale contre le COVID-19 est la seule stratégie à long terme pour contenir la crise du coronavirus. Dans plusieurs pays, les campagnes de vaccination ont commencé dès décembre 2020. Cependant, malgré la disponibilité de vaccins efficaces dans plusieurs pays, l’OMS ne sait pas si l'immunité collective mondiale contre le COVID-19 peut être atteinte et, en tout état de cause, ne s'attend pas à ce qu'elle le soit en 2021 (AP, 2021[133]), d'autant plus que le déploiement des vaccins prend du temps en raison des goulets d'étranglement en amont et en aval de la chaîne d'approvisionnement et de la concentration géographique de la production. (OCDE, 2021[134]). En particulier, des difficultés importantes ont entravé le déploiement des vaccins au début de 2021 : l'offre de vaccins était limitée dans certaines économies avancées et dans la plupart des pays en développement en raison de capacités de production restreintes et d'une répartition très inéquitable et inefficace de l'offre existante entre les pays. Pendant la phase initiale des campagnes de vaccination, la plus ou moins grande capacité de planifier et d'exécuter des campagnes de vaccination de masse, en particulier le manque de coordination entre les différents niveaux de gouvernement, et l’émergence des nouveaux variants viraux préoccupants (VOC - variants of concern) quant à l'efficacité des vaccins existants ont également posé des problèmes. Néanmoins, les gouvernements doivent anticiper l'augmentation de l'offre et préparer la logistique et les infrastructures : d'ici le troisième trimestre de 2021, les États-Unis et les États membres de l'UE auront probablement reçu plus d'une dose de couverture vaccinale complète par personne (OCDE, 2021[135]). Ils doivent également vaincre la méfiance et le scepticisme quant à l'innocuité et l'efficacité des vaccins afin de s'assurer que les populations soient disposées à se faire vacciner.
Au 10 mai 2021, 12 % de la population de l'OCDE avait été partiellement vaccinée et 15.8 % était totalement vaccinés (Graphique 18). Les taux de vaccination varient considérablement d'un pays à l'autre et il faudra attendre au moins la fin de l'année 2023 pour que suffisamment de doses soient fabriquées pour vacciner l'ensemble de la population mondiale (CGD, 2020[136]). Les pays à revenu élevé ont acheté 4.6 milliards de doses. Le centre COVAX, qui regroupe 92 économies à revenu faible ou intermédiaire, prévoit que l'offre mondiale de vaccins atteindra 1.8 milliard de doses en 2021, couvrant ainsi 27 % de leur population (GAVI, 2021[137]).
La gestion du déploiement de la vaccination comporte d'importantes implications au niveau territorial et en matière de gouvernance pluri-niveaux. Les stratégies de vaccination et la répartition des tâches entre les différents niveaux de gouvernement diffèrent d'un pays à l'autre (Encadré 4 et exemples de pays). Dans l'Union européenne, les États membres ont adopté une approche communautaire centralisée pour garantir l'approvisionnement et soutenir le développement des vaccins dans le cadre de la stratégie européenne en matière de vaccins (Commission européenne, 2020[138]). La stratégie de la campagne de vaccination est décidée au niveau national et mise en œuvre à tous les niveaux de gouvernement. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, les États et régions décentralisées disposent d'une certaine autonomie pour décider de la manière dont ils répartissent les doses au sein de la population. Au sein des pays, pour garantir un accès sûr et équitable aux vaccins en tous lieux, des mécanismes de coordination efficaces sont nécessaires entre les gouvernements centraux et infranationaux, les responsabilités desquels diffèrent mais qui doivent travailler ensemble pour permettre un déploiement sans problème des vaccins, par exemple en partageant les informations relatives aux prévisions de livraison des doses.
Les disparités régionales au sein des pays quant à l'accès aux vaccins contre le COVID-19 sont généralement faibles (Graphique 19), ce qui indique qu'un effort est fait pour rendre l'accès au vaccin universel entre les régions. Cependant, cela montre également que les régions qui présentaient la mortalité la plus élevée n’ont pas été prioritaires. Dans les pays qui présentent des disparités significatives entre les régions, celles-ci sont souvent dues à des facteurs sociaux, sanitaires et démographiques, comme l'âge de la population dans une région qui se traduisent par des proportions différentes de populations prioritaires. Les taux de vaccination peuvent également être différents : dans certains pays, les quartiers défavorisés enregistrent un moindre pourcentage de population vaccinée. En Angleterre et en France, au début de la campagne, les régions qui présentaient la plus forte proportion de personnes âgées ont enregistré des taux de vaccination plus élevés (NHS, 2021[139]) (Geodes, 2021[140]). Aux États-Unis, le gouvernement fédéral alloue des doses de vaccin aux États sur la base de leur population adulte, tandis que les groupes prioritaires sont définis au niveau des États (CDC, 2021[141]). En Israël, les disparités territoriales dans les taux de vaccination sont dues aux différences démographiques et socio-économiques entre les municipalités (Encadré 4). Certains pays étudient actuellement l'adoption d'une approche territoriale des campagnes de vaccination axée sur les communautés ou les régions qui présentent un niveau de risque plus élevé ou une incidence plus forte de cas de COVID-19 : certaines régions soumises à une pression importante ont reçu des doses supplémentaires, par exemple au Brésil, (CNN Brazil, 2021[142]), en France (France Bleu, 2021[143]) ou en Norvège.
Encadré 4. Campagne de vaccination contre le COVID-19 en Israël
Israël est le seul pays de l'OCDE dont plus de 60% de la population était entièrement vaccinée à la mi-mars 2021 et les effets de la vaccination sur la santé de la population y sont déjà visibles (OCDE, 2021[135]). La campagne de vaccination a commencé par cibler la population adulte âgée de plus de 60 ans, les personnes à risque en raison d'une pathologie préexistante et le personnel de santé en première ligne, puis a été progressivement étendue à l'ensemble de la population (Gouvernement d’Israël, 2020[158]). Le ministère de la santé a fixé l'objectif de 4 millions d'habitants (44 % de la population) vaccinés avec deux doses, dont 95 % seraient âgés de 50 ans ou plus, avant de commencer la réouverture complète de l'économie.
Depuis le début de la campagne de vaccination, les hospitalisations dues au COVID-19 chez les personnes âgées ont diminué plus rapidement que dans les autres groupes d'âge, ce qui suggère que les vaccins sont efficaces pour freiner les infections et prévenir les cas graves (Weizmann Institute of Science, 2021[159]) : entre le 15 janvier 2021 et le 8 février 2021, on signalait chez les 60 ans et plus, une baisse de 51 % des cas et de 29 % des patients gravement malades, tandis que dans le reste de la population, on observait une baisse de 19 % des cas mais une hausse de 31 % de patients gravement malades.
Les taux de vaccination ne sont pas uniformes d'un endroit à l'autre et les disparités entre les municipalités s'expliquent par plusieurs facteurs socio-économiques (Graphique 20) : la part de personnes âgées (plus de 75 ans) et la part de la population active (personnes ayant un revenu) dans la population municipale sont des facteurs évidents d’acceptation de la vaccination.
Ces disparités reflètent à la fois la stratégie nationale de vaccination, à savoir que les personnes âgées ont jusqu'à présent été prioritaires, mais aussi le fait que le taux d’acceptation de la vaccination varie selon les communautés. Il est essentiel de s'appuyer sur la confiance des citoyens en assurant un leadership et en présentant une analyse d'impact fondée sur des preuves. Le ministère de la Santé a mené des campagnes d'information publiques ciblées sur l’efficacité des vaccins en plusieurs langues (hébreu, arabe, russe et amharique) (Global Government Forum, 2021[160]).
Si la campagne de vaccination en Israël est centralisée, mais elle s'appuie sur les organismes de santé communautaires (HMO - Health Maintenance Organisation) pour atteindre les régions périphériques, les villages et les villes. Pour faire face aux contraintes logistiques, une bonne coordination entre le ministère de la Santé et les autorités locales est essentielle. Des camionnettes de vaccination et 150 complexes de vaccination ont été mis en place pour permettre de vacciner la population incapable d’accéder aux centres de vaccination (Ministère de la Santé, Israël, 2020[161]). Les fonctionnaires locaux, les chefs de communautés et les HMO, auxquels les citoyens ont tendance à faire davantage confiance qu'au gouvernement central, ont également contribué à faire accepter la vaccination par les populations (Israel Journal of Health Policy Research, 2021[162]).
Exemples par pays
En Argentine, le gouvernement a défini des groupes prioritaires et un processus de vaccination à partir de critères incluant le risque d'exposition ou la présence de comorbidités (Argentina Ministry of Health, 2020[163]). En outre, il prend en compte des critères de vulnérabilité, tels que l'appartenance à des quartiers populaires, le fait d'être sans abri, les peuples indigènes, etc. Les critères de distribution des vaccins ont été établis par consensus avec les provinces en fonction des populations cibles définies dans les plans opérationnels provinciaux et de la disponibilité des vaccins.
En Australie, la Politique de Vaccination contre le COVID-19 définit les rôles et responsabilités du gouvernement central et des gouvernements des États et territoires (Australia Department of Health, 2020[164]). Le premier est responsable de la sélection et de l'achat des vaccins et de leur transport depuis les fournisseurs jusqu’aux sites de stockage de l'administration, de la définition des groupes prioritaires et de la spécification des obligations minimales des sites de vaccination. Les gouvernements des États et des territoires sont, pour leur part, responsables de l'élaboration de leurs propres plans de mise en œuvre de la vaccination contre le COVID-19 dans leur juridiction : ils doivent notamment sélectionner le personnel et les sites de vaccination et faire respecter les règles de sécurité, d'éthique et d’enregistrement des données (Australia Department of Health, 2020[164]). Ils travaillent en étroite collaboration avec le gouvernement central pour vacciner les résidents des établissements de soins pour personnes âgées, les communautés indigènes et les personnes handicapées. L'allocation des doses est gérée par le gouvernement central en étroite collaboration avec les États et les territoires et dépend de la proportion des groupes prioritaires dans la population locale ainsi que de la dynamique des foyers locaux.
Au Brésil, le processus de vaccination est entrepris par le gouvernement fédéral en partenariat avec les gouvernements des États et le district fédéral pour coordonner la mise en œuvre physique dans les municipalités. Le gouvernement brésilien a indiqué le 15 février 2021 que le nord du pays serait prioritaire en commençant par l’État d'Amazonas, la nouvelle souche du virus étant particulièrement répandue dans le nord (CNN Brazil, 2021[142]). Le ministère de la Santé a indiqué qu'il espérait vacciner l'ensemble de la population à risque et toutes les personnes âgées de plus de 18 ans dans cette région, avant de poursuivre avec, dans l'ordre, les régions suivantes : Roraima, Acre, Amapá, Rondônia et Pará.
Au Canada, le Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) recommande de donner la priorité à la vaccination précoce de certaines populations clés (Gouvernement du Canada, 2021[165]). Au cours de l'étape 1, le CCNI recommande que les vaccins soient d'abord proposés : 1) aux résidents et au personnel des établissements d'habitation collective médicalisés pour les personnes âgées, 2) aux adultes âgés de 70 ans et plus, en commençant par les adultes âgés de 80 ans et plus, puis en diminuant la limite d'âge par tranches de 5 ans jusqu'à 70 ans, au fur et à mesure que l'approvisionnement devient disponible, 3) le personnel de santé (y compris les personnes qui travaillent dans des environnements où des soins sont prodigués et les aides-soignants qui sont en contact direct avec les patients), 4) les adultes vivant dans des communautés autochtones, notamment les Premières nations, les Métis et les Inuits où l'infection peut avoir des conséquences disproportionnées, ainsi que les personnes qui vivent dans des régions éloignées ou isolées où l'accès aux soins de santé peut être limité. Ces recommandations ne sont toutefois pas contraignantes et les gouvernements infranationaux ont la possibilité d'adapter l'éligibilité au vaccin selon les besoins. Par exemple, dans la ville de Toronto, l'éligibilité a été étendue à tous les résidents âgés de 18 ans et plus vivant dans 53 zones postales identifiées par le gouvernement provincial comme étant des zones à risque.
Au Chili, le plan national de vaccination est une stratégie centralisée visant à administrer (gratuitement et sans obligation) les vaccins contre le COVID-19 à l’ensemble de la population. Il est dirigé par une équipe de travail interministérielle comprenant le ministère des Sciences, le ministère de la Santé, le ministère des Affaires étrangères et la Présidence, qui s’appuie sur les avis du Conseil consultatif sur les vaccins et l'immunisation (CAVEI). Ce plan est divisé en trois phases (Ministère de la santé, Chili, 2021[16]). La première phase a commencé en décembre et était destinée au personnel de santé des unités de soins intensifs. La deuxième phase a commencé le 3 janvier et s'adressait à la population âgée de plus de 71 ans. La troisième phase est en cours et s’adresse au reste de la population (Ministère de la santé, Chili, 2021[166]). La programmation de la vaccination est entreprise par le gouvernement central et la logistique de distribution est gérée par les autorités locales.
En Finlande, la stratégie de vaccination a été préparée par le ministère des Affaires sociales et de la Santé (Ministère des Affaires Sociales et de la Santé, Finlande, 2020[167]) et la vaccination a commencé le 27 décembre 2020. La Finlande s'approvisionne en vaccins par le biais du système d'approvisionnement commun de l'UE. Les districts hospitaliers ont préparé le déploiement de la vaccination dans leur région et coordonnent les modalités de vaccination des professionnels de l'action sociale et de la santé de leur région. Les municipalités coopèrent entre elles et avec le district hospitalier, la médecine du travail et le secteur privé pour organiser la logistique. L'Institut finlandais de la santé et du bien-être (THL) contrôle la mise en œuvre, l'efficacité et la sécurité des vaccinations au niveau national.
En France, la Haute autorité de santé a émis des recommandations que le ministère de la Santé a suivies pour élaborer une stratégie nationale de vaccination en trois étapes qui vise à réduire la mortalité, à protéger le personnel de santé et à garantir la sécurité des vaccins (Ministère de la Santé, France, 2021[168]). Au cours de la première phase, les personnes âgées (75 ans et plus), les personnels de santé et les personnes à risque étaient prioritaires. Puis, les personnes âgées de 65 à 74 ans seront vaccinées avant que la campagne de vaccination ne soit ensuite étendue à la population générale. L’achat des vaccins est centralisé par l’Agence nationale de santé publique. Les régions ont proposé de mieux prendre en compte les disparités territoriales et de mettre en place des instances régionales de coordination pour gérer la stratégie nationale à leur niveau, ainsi qu'un « Conseil territorial de la vaccination COVID-19 » au niveau national (Régions de France, 2021[169]).
En Allemagne, la stratégie nationale de vaccination contre le COVID-19, élaborée par le ministère fédéral de la Santé, le comité permanent de la vaccination (STIKO), le conseil d'éthique allemand et l'Académie nationale des sciences Leopoldina, donne priorité à la vaccination des professionnels de santé et des infirmiers, des personnes âgées, des résidents des maisons de retraite et des personnes souffrant de maladies chroniques. Elle est mise en œuvre en trois phases : 1) une vaccination centralisée ciblée, 2) une vaccination centralisée élargie, 3) une vaccination de routine décentralisée généralisée (RKI, 2021[170]). Au cours des deux premières phases, l'emplacement et le nombre de centres de vaccination sont déterminés par les Länder et financés conjointement par les caisses d'assurance maladie règlementaires et les Länder. Alors que le gouvernement fédéral est responsable de l'achat et du financement des vaccins, conjointement avec l'UE, les Länder s'occupent du stockage et de la logistique au niveau local et financent l'équipement et les fournitures nécessaires. L'approche centralisée ainsi que les pénuries de fournitures et de personnel et les problèmes de distribution dans les Länder ont pu entraver le lancement de la campagne de vaccination. (International Long-term Care Policy Network, 2021[171]).
En Italie, le plan stratégique pour la vaccination contre le COVID-19 a été préparé par le ministère de la Santé, le commissaire extraordinaire pour la situation d’urgence COVID-19, l'Institut supérieur de la santé, l'Agence nationale italienne pour les services de santé régionaux et l'Agence italienne du médicament (AIFA). (Ministère de la Santé, Italie, 2020[172]). L'objectif de la campagne de vaccination est de garantir l'accès à tous, indépendamment du revenu et du territoire. La coordination entre le ministère de la Santé, le commissaire extraordinaire ainsi que les régions et les provinces autonomes assure la bonne gouvernance du plan de vaccination. La logistique, l'approvisionnement, le stockage et le transport sont sous la responsabilité du commissaire extraordinaire.
Au Japon, la campagne de vaccination a débuté dans la seconde moitié de février. Les personnels de santé en première ligne dans les hôpitaux publics sont les premiers à être vaccinés, suivis par 3.7 millions d'autres membres du personnel de la santé. Le gouvernement donne également la priorité aux personnes souffrant de maladies chroniques et au personnel soignant s'occupant des personnes âgées. Les gouvernements locaux ont commencé à vacciner 36 millions de personnes âgées de 65 ans et plus à partir d'avril 2021, puis les personnes âgées de 60 à 64 ans (Japan Times, 2021[173]). Tous les autres résidents âgés de 16 ans et plus seront vaccinés à partir de juillet 2021. En mars 2021, les autorités locales ont exprimé leur inquiétude quant au manque de partage d'informations de la part du gouvernement central sur les prévisions de livraison de vaccins, ce qui entravait les préparatifs au niveau local (Japan Times, 2021[174]). Les autorités locales sont responsables de la vaccination de leurs résidents et utilisent de vastes installations publiques, comme les gymnases des écoles, pour mener à bien la campagne. (Nikkei Asia, 2021[175]). Les livraisons à l'échelle nationale sont gérées par le système V-Sys, mis au point par le ministère de la santé, qui aidera les établissements médicaux à partager les informations avec les autorités, les fabricants de vaccins et les autres parties prenantes.
En Corée, la campagne de vaccination a débuté en février 2021. Le gouvernement a ciblé initialement le personnel de santé dont le travail est directement lié au COVID-19. Dans le même temps, il a été prévu de vacciner les personnes âgées dans les maisons de retraite et les établissements de soins de longue durée. La vaccination des groupes à haut risque, notamment les personnes âgées de 65 ans ou plus ont commencé en mai. Le gouvernement vise à atteindre l'immunité de groupe, fixée à un taux de vaccination de 70 % de la population, d'ici novembre 2021, mais les projections actuelles indiquent que la Corée du Sud fait partie des pays qui ne parviendront pas à une vaccination généralisée avant la mi-2022 (Economist Intelligence Unit, 2021[176]). Le gouvernement central a ordonné aux gouvernements locaux d’engager leur propre personnel et leurs propres infrastructures pour procéder aux vaccinations. Afin de faciliter la mise en œuvre de la stratégie, 250 centres de vaccination sont en cours d'installation dans les régions. Ces centres utiliseront les vaccins Pfizer et Moderna, qui nécessitent un stockage cryogénique. Les autres types de vaccins seront fournis dans des établissements médicaux privés présélectionnés, (Jung, 2021[177]), des cliniques et des hôpitaux. Les personnes s'inscrivent par le biais d'un système national et les autorités locales sont chargées de faire vacciner la population de leur district et de leurs municipalités.
Au Mexique, la « politique nationale de vaccination contre le virus SRAS-CoV-2 pour la prévention du COVID-19 », menée par la direction générale de la promotion de la santé, prévoit de vacciner au moins 70 % de la population mexicaine avant juillet 2022 (Gouvernement du Mexique, 2021[178]). Les groupes prioritaires pour le processus de vaccination sont : 1) le personnel de santé confronté au COVID-19, 2) les personnes âgées de 60 ans et plus, 3) les personnes présentant une comorbidité ou des comorbidités, 4) le personnel enseignant des entités fédérales, et 5) le reste de la population (16 ans et plus). Le ministère fédéral de la Santé a publié un décret le 25 janvier 2021 pour préciser les conditions dans lesquelles les administrations nationales et les acteurs privés peuvent participer à la campagne nationale de vaccination (« acquérir, importer, distribuer et vacciner ») afin d'accélérer le processus de vaccination. (Reuters, 2021[179]).
En Norvège, le gouvernement national décide de la distribution des vaccins, tandis que les municipalités sont responsables de la vaccination proprement dite. Les personnes âgées et les professionnels de la santé sont les premiers à être vaccinés, ce qui signifie que les zones rurales qui ont une population plus âgée, ont également inoculé le vaccin à une plus grande partie de leur population. Depuis le début du mois de mars 2021, certains quartiers de la capitale d’Oslo et des municipalités environnantes, touchés de façon persistante par le virus, ont reçu des doses supplémentaires. Un débat est en cours pour savoir s'il faut accorder une priorité encore plus grande aux régions les plus touchées de Norvège ou s'il faut procéder à une répartition uniforme en fonction de la population.
En Espagne, l'objectif de la stratégie est de réduire la morbidité et la mortalité liées au virus dans un contexte de disponibilité progressive des vaccins, tout en protégeant les groupes les plus vulnérables (Ministère de la Santé, Espagne, 2020[180]). Le Conseil interterritorial du système national de santé (CISNS) (qui réunit les conseillers des communautés autonomes et des villes en matière de santé et le ministre de la Santé) a préparé et coordonne la stratégie nationale de vaccination en s’appuyant sur les recommandations du groupe de travail technique sur la vaccination COVID-19 et du comité chargé des vaccins. L’Espagne a adopté une stratégie de vaccination commune à tous les territoires (Grupo de Trabajo Técnico de Vacunación COVID-19, 2020[181]). Le ministère de la Santé, les communautés autonomes et les villes travaillent ensemble à la mise en œuvre de cette stratégie, par exemple pour identifier les centres de vaccination. Le ministère finance et fournit les vaccins tandis que les gouvernements infranationaux financent les équipements et le personnel.
En Suède, il existe une étroite collaboration entre l'État et les régions pour assurer une vaccination efficace contre le COVID-19. Les 21 régions administratives sont responsables des soins de santé et mènent en conséquence la campagne de vaccination contre le COVID-19. L'Agence suédoise de santé publique a défini et réexamine régulièrement les groupes prioritaires de la stratégie nationale de vaccination pour conseiller les régions en fonction des conditions locales (situation épidémiologique, prévalence d'autres maladies, faible couverture vaccinale, etc.) (Agence de santé publique, Suède, 2021[182]). L'État est responsable de l'achat et de la distribution des vaccins et de l'indemnisation des régions pour les coûts liés à la campagne de vaccination, y compris les investissements d'infrastructure, de logistique et de communication liés à la vaccination (SALAR, 2021[183]). L'État affectera 400 millions SEK aux mesures de préparation et d’incitation à la vaccination : 700 millions SEK sous forme de compensation spéciale aux régions atteignant les objectifs de couverture vaccinale fixés dans l'accord et 275 SEK par dose administrée seront versés.
Au Royaume-Uni, la livraison des vaccins COVID-19 a été préparée par le groupe de travail sur les vaccins (Vaccine Taskforce), les services régionaux du NHS, Public Health England, les institutions de recherche et les forces armées, ainsi que les gouvernements locaux (Gouvernement du Royaume-Uni, 2021[184]). Les plans de vaccination ont été élaborés dans chacune des nations décentralisées du Royaume-Uni. En Angleterre, le NHS avait pour objectif de proposer, avant le 15 février 2021, une première vaccination à tous les résidents des maisons pour personnes âgées, aux personnes de plus de 70 ans, au personnel de la santé et des services sociaux en première ligne et aux personnes cliniquement vulnérables. Les autorités nationales, régionales et locales coopèrent pour servir au mieux les communautés en ce qui concerne le type de sites de vaccination (très grands centres, centres hospitaliers et services de vaccination locaux), l'identification de la population éligible, en particulier le personnel de santé et des services sociaux qui sont en première ligne, et le soutien aux personnes qui sont prioritaires pour recevoir un vaccin.
Aux États-Unis, les doses de vaccin sont allouées aux niveaux fédéral, national et local. Le gouvernement fédéral distribue les doses aux États sur la base de leur population adulte. Les États et les services de santé locaux ont mis au point leurs propres formules pour allouer les doses aux hôpitaux, cliniques et maisons de retraite localement, tout en suivant les directives du centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) pour donner priorité au personnel de santé en première ligne, aux personnes âgées et aux autres citoyens à risque (The New York Times, 2021[185]). Il existe des différences entre les États en ce qui concerne les critères d'attribution. Par exemple, alors que l'Oregon privilégie le personnel enseignant par rapport aux personnes âgées et que le Tennessee définit les comtés prioritaires à partir de la base de données du CDC sur les vulnérabilités sociales et sur l'impact sanitaire du COVID-19, le New Jersey a privilégié les fumeurs par rapport aux enseignants. La stratégie nationale de prévoyance contre les pandémies et de lutte contre le COVID-19, publiée par la nouvelle administration, souligne qu’atteindre les communautés dans les États, en particulier celles qui ont le plus besoin de vaccins, est la pierre angulaire de la stratégie nationale de vaccination (Gouvernement des États-Unis, 2021[186]). L'exploitation des données démographiques et des informations détenues par les organisations locales et communautaires permet de cibler les communautés les plus durement touchées. En outre, le gouvernement fédéral s'est engagé à augmenter les stocks de vaccins disponibles, en réduisant les réserves, en améliorant le processus d'attribution en fournissant aux États et aux localités des projections de livraison cohérentes et en les encourageant en conséquence à vacciner plus rapidement les groupes prioritaires. Le gouvernement fédéral travaille également avec les administrations publiques et les collectivités locales pour créer des lieux de vaccination (centres communautaires de vaccination gérés par le gouvernement fédéral, sites de vaccination gérés par les États et les collectivités locales, centres de santé communautaires, dispensaires ruraux, cliniques professionnelles mobiles, etc.) et, avec le CDC, pour soutenir la progression de la vaccination par des plans d'assistance technique destinés aux états, aux gouvernements locaux et aux prestataires. Dans les grandes agglomérations ou les zones plus densément peuplées, les collectivités locales sont davantage impliquées dans la distribution des vaccins ; elles y ont mis en place des dispensaires de santé publique, tandis que les régions moins densément peuplées et plus rurales s'appuient davantage sur les acteurs privés dans les centres commerciaux où se trouvent des pharmacies et des prestataires de soins de santé. Afin d'élargir la participation à la vaccination, le gouvernement fédéral finance l'approvisionnement en vaccins et permettra aux États et aux collectivités locales de rembourser les frais d'administration des vaccins, de main-d'œuvre sur place et d'équipement par le biais du fonds de secours de la FEMA (Agence fédérale de gestion des situations d’urgence).
Pistes d’action
Les vaccins devraient être entièrement déployés et accessibles à l'ensemble de la population dès que possible : il faut pour cela réserver les doses aux groupes prioritaires à court terme et anticiper l'augmentation de l'offre à moyen terme avec une logistique et des infrastructures adéquates (OCDE, 2021[135]).
Les gouvernements infranationaux devraient être davantage impliqués dans les campagnes de vaccination afin d'assurer une couverture territoriale plus rapide et plus large. Il est essentiel de s'appuyer sur les acteurs locaux, qui sont mieux informés sur la population et les infrastructures locales, pour réussir à atteindre les personnes qui ont le plus besoin de vaccins en premier, comme les personnes âgées, les personnes souffrant d'autres maladies et le personnel de santé, et pour alléger la pression sur le système de santé.
Le cas échéant, une réponse territoriale devrait être adoptée pour faire face à la crise sanitaire en fonction de la gravité ou de la propagation du virus dans une région, pour, par exemple, décider un confinement local.
Les plans de campagne de vaccination devraient être clairement et régulièrement communiqués au public par tous les niveaux de gouvernement, en établissant des lignes directrices facilement compréhensibles et explicites sur la vaccination, et en créant des plateformes pour les questions, les réponses et les échanges.
L’approche territoriale de la crise économique et sociale
Soutien aux PME et aux indépendants au niveau local et régional
Dans l’OCDE, les petites et moyennes entreprises (PME) représentent 99 % de l’ensemble des entreprises et 50 à 60 % de la valeur ajoutée. Elles sont particulièrement vulnérables à la crise (OCDE, 2020[6]). Outre les PME, les travailleurs indépendants représentent également une part considérable de l’emploi total dans un certain nombre de pays de l’OCDE. Légèrement inférieure à 15 % en moyenne, leur part est plus élevée en Grèce, en Italie et en Turquie où elle est supérieure à 20 % (OCDE, 2020[6]). Les travailleurs indépendants sont souvent moins bien protégés par le système d’allocations chômage que les travailleurs ordinaires.
Les restrictions mises en place pour combattre l'épidémie touchent directement et indirectement les entreprises locales et les indépendants. Certaines entreprises, comme les restaurants et les cafés, ferment lors des confinements, tandis que d'autres PME et travailleurs indépendants peuvent poursuivre leur activité, mais avec une demande très réduite. Dans certains cas, leurs employés sont mis au chômage technique, voire licenciés. Dans de nombreux pays, les entreprises locales ont pu relancer leur activité à plein régime en juin 2020 mais les nouveaux confinements décrétés en Europe – ainsi que ceux, ciblés, décidés ailleurs dans le monde – ont mis en péril la relance, en particulier dans le secteur des services.
Afin d'éviter les pénuries de liquidités et les faillites parmi les entreprises locales et les travailleurs indépendants, la plupart des gouvernements nationaux ont pris des mesures fortes pour soutenir les PME et les microentreprises, les indépendants, les artisans, les professions libérales et les commerçants. C’est particulièrement vrai dans les régions très touchées par l’épidémie, par exemple celles où les PME prédominent – comme dans le nord de l’Italie (Centre OCDE/LEED de Trente pour le développement local, 2020[187]) ou dont les économies sont très dépendantes du tourisme, de la culture, des activités de loisirs et de divertissement, des transports, de la construction, du commerce de gros et de détail, de l'hôtellerie et la restauration, de l’immobilier, des professions libérales et des services à la personne (par exemple les coiffeurs) (OCDE, 2021[2]).
Un grand nombre de gouvernements infranationaux ont également pris très tôt des mesures pour soutenir leurs économies locales, apportant de l’aide aux PME, aux artisans, aux commerçants et aux indépendants frappés par la crise. Les mesures d'urgence adoptées par les autorités locales et régionales sont très vastes, allant des aides financières à des dispositifs de soutien plus indirects, dont voici des exemples :
soutien financier : subventions non remboursables, prêts privilégiés à taux faible ou zéro, avances de trésorerie, accès facilité à des financements externes grâce à des garanties et report des échéances de prêts ;
mesures spéciales au profit des jeunes entreprises, qui sont souvent les plus touchées par la crise : financements relais, garanties, prêts, mesures fiscales, aide de trésorerie, prises de participation directes, capital-risque, etc.) ;
aides fiscales : report des impôts et charges, exonérations et allègements fiscaux ;
soutien administratif : assouplissement des procédures administratives ainsi que des réglementations et permis imposés aux entreprises, allègement de certaines restrictions ;
marchés publics : simplification et accélération des procédures ;
abaissement temporaire des loyers (report ou réduction de leurs montants lorsque les locaux appartiennent aux gouvernements infranationaux) et avances de règlements aux prestataires de services ;
assistance technique et services de soutien aux acteurs économiques locaux : services de conseil gratuits ou à tarif réduit pour les entreprises, séminaires en ligne et activités de formation similaires pour favoriser le développement des entreprises ; plateformes en ligne collaboratives (par exemple pour promouvoir « l'achat local » et les marchés locaux/régionaux, création de réserves de main-d’œuvre, etc.) (Comité européen des régions, 2020[188]).
Dans plusieurs pays, la mise en place des programmes d'aide aux travailleurs indépendants a été confiée aux gouvernements infranationaux car ce sont eux qui connaissent le mieux la situation et les besoins au niveau local. Ce type de soutien étant comparable à l'aide sociale aux familles et aux particuliers, qui relève en temps normal des gouvernements infranationaux, ces derniers sont organisés pour mettre en œuvre les mesures correspondantes (OCDE, 2020[189]).
Au sein de l’UE, 30 % des gouvernements infranationaux ayant répondu à l’enquête conjointe OCDE-CdR ont indiqué avoir mis en place une importante aide directe aux entreprises et travailleurs indépendants (comme des subventions et des fonds régionaux de capital-risque), en plus de la gestion d’urgence de la crise sanitaire. Parmi les gouvernements ayant répondu, 28 % ont déclaré fournir une assistance technique et des services de soutien aux acteurs économiques locaux, 26 % qu’elles accordaient déjà des incitations et allègements fiscaux aux entreprises et aux indépendants (exonérations, réduction ou report du paiement des loyers lorsque les locaux appartiennent aux gouvernements infranationaux), et pour finir, 25 % ont indiqué soutenir ces acteurs indirectement en offrant des lignes de crédit à conditions avantageuses, des dispositifs de garantie ou des avances remboursables (OCDE-CdR, 2020[56]). Dans ce domaine, les gouvernements régionaux et les communes de grande taille (OCDE, 2020[190]) ont été plus actifs que les autres du fait de leurs responsabilités plus larges en matière économique, en particulier dans les pays décentralisés.
Exemples par pays
En Autriche, les neuf Bundesländer ont mis en place des mesures d'aide aux PME qui complètent et élargissent les mesures prises par le gouvernement fédéral. Cela inclut des subventions non remboursables (au Burgenland pour couvrir les frais fixes et les loyers, au Tyrol avec un fonds de secours, à Vienne et à la Haute-Autriche), des garanties et des prêts-relais pour soutenir la trésorerie des PME (Burgenland, Styrie, Vorarlberg, Vienne, Haute-Autriche), des reports de paiement des impôts locaux et l’annulation des intérêts (Carinthie, Salzbourg), la couverture des frais de conseil pour les PME ayant besoin d’aide pour bénéficier des mesures de soutien fédérales (Carinthie), la couverture des coûts en matière d’infrastructure pour promouvoir le télétravail (Styrie, nouveau programme « Telearbeit!Offensive ») et la transformation numérique des PME (Tyrol). La Haute-Autriche et la Basse-Autriche ont en outre mis au point un programme d'aide aux jeunes pousses qui comprend un service spécial de conseil par l’organisation régionale « tech2b Inkubator », spécialisée dans le conseil et le soutien aux jeunes pousses (Haute-Autriche) et par la chambre de commerce (Basse Autriche) (OCDE, 2021[2]).
En Belgique, les gouvernements des régions de Bruxelles-Capitale, de Wallonie et des Flandres ont adopté plusieurs mesures, comme par exemple des subventions non remboursables pour les entreprises qui ont dû fermer pendant le confinement, des reports d’impôts (Bruxelles-Capitale, Flandres) et l’annulation des factures de services essentiels (par exemple, les factures d’énergie) (Wallonie et Flandres), des garanties sur les prêts bancaires et un accès facilité au crédit, ainsi que l’interdiction des expulsions (Flandres) (OCDE, 2021[2] ; Comité européen des régions, 2020[191]). Le 19 mars, Bruxelles-Capitale et les Flandres ont adopté, entre autres mesures, un versement de 4 000 EUR pour les entreprises qui doivent fermer leurs portes. La Wallonie verse 5 000 EUR (OCDE, 2021[2]).
Au Canada, le gouvernement fédéral a créé le Fonds d’aide et de relance régionale (FARR). Doté de près de 1 milliard CAD, ce fonds permet d'atténuer la pression financière qui pèse sur les entreprises et les organisations afin qu’elles puissent poursuivre leurs activités, y compris la rémunération de leur personnel et pour financer des projets de relance. Le FARR est déployé dans les différentes localités grâce à un réseau national de six agences de développement régional et a prévu une enveloppe d’aide supplémentaire de 1.7 milliard CAD, qui comprend plusieurs mesures de soutien aux petites entreprises et qui a été annoncé le 17 avril 2020 par le gouvernement. (OCDE, 2021[2]). De leur côté, les provinces ont créé leurs propres programmes de soutien. En Colombie-Britannique, par exemple, le gouvernement a mis en place, dans le cadre de son plan d'action contre le COVID-19, des garanties de revenu, des allègements fiscaux et des aides financières pour les particuliers et les professionnels dans le contexte de la pandémie. L'étape suivante est la mise en œuvre d'un plan de relance économique, baptisé « StrongerBC », dont l’un des objectifs est d’aider les entreprises de la province à rouvrir, à s'adapter, recruter, réembaucher et à se développer. Les nouvelles aides incluent notamment une subvention pour la relance des PME, un crédit d'impôt majoré de 15 % pour l’incitation à l’emploi, une exonération totale de la taxe de vente provinciale (TVP) sur l’achat d’une sélection de machines et d'équipements ainsi que des programmes de formation en accéléré. La Colombie-Britannique a également consenti une réduction temporaire de la TVP applicable sur une sélection de machines et d'équipements pour aider les entreprises à se remettre des répercussions financières de la pandémie (Gouvernement de la province de la Colombie-Britannique (Canada), 2020[192]).
Au Chili, le gouvernement central met en œuvre le plan de relance « paso a paso, Chile se recupera » (« pas à pas le Chili se rétablira »), qui, outre les incitations à l'emploi et le soutien aux investissements, accorde une place importante aux PME (Gouvernement du Chili, 2021[193]). Le système de prêts publics FOGAPE-COVID pour les petites entreprises a été créé. En août 2020, 228 000 prêts étaient enregistrés pour un montant de 10 523 millions USD. Divers programmes de formation technique mettant l'accent sur la facilitation de la transformation numérique des PME ont été promus, tels que « Numérisez votre PME », « PME en ligne » et « Route numérique » qui visent tous à développer les compétences numériques et à promouvoir l'adoption du commerce électronique et autres canaux de commercialisation technologiques. Différentes mesures d'allègement fiscal ont également été mises en œuvre, comme la réduction de la taxe de première catégorie de 25 % à 10 % et l'extension du délai de paiement de la TVA à 3 mois. Toutes ces mesures - ainsi que d'autres initiatives de récupération - sont gérées et supervisées au niveau central, bien que des tables rondes régionales aient été créées pour analyser les cas particuliers des territoires et conseiller les bureaux centraux. Le secteur du tourisme a intégré une importante composante territoriale, puisque le Plan national de promotion du tourisme, qui vise à encourager les voyages à l'intérieur du pays et la consommation intérieure, envisage des travaux coordonnés avec les gouvernements régionaux pour collecter les fonds nécessaires à son financement.
En Colombie, le gouvernement central, par le biais du Fonds national de garantie (Fondo Nacional de Garantías), garantira les crédits que les MPME acquièrent auprès du système financier pour le paiement des salaires et de leur fonds de roulement. (Gouvernement de Colombie, 2021[194]). Le gouvernement colombien a injecté 4.4 millions USD (16 milliards de dollars COP) pour : 1) soutenir les décaissements des banques privées pour couvrir la masse salariale mensuelle des petites entreprises, 2) soutenir les décaissements pour couvrir le fonds de roulement, et 3) offrir des prêts garantis souples aux travailleurs indépendants par le biais de banques privées et de sociétés fintech. Le gouvernement central a également instauré quelques jours d'exemption du paiement de la TVA (« Días sin IVA ») comme moyen d'alléger la pression fiscale sur les petites entreprises.
En Finlande, les communes versent aux travailleurs indépendants qui en font la demande – dans la localité où ils sont installés – une somme forfaitaire (Ministère des Affaires Économiques, Finlande, 2021[195]). Le montant de cette aide est de 2 000 EUR. Elle leur est accordée pour couvrir leurs frais de fonctionnement. Ils doivent mener une activité à plein temps qui doit être rentable avec un revenu annuel d’au moins 20 000 EUR sur plusieurs années. L'aide de la municipalité peut être cumulée aux allocations de chômage pour les entrepreneurs, versées par les institutions d’assurance chômage, mais le montant est pris en compte lorsque l’autoentrepreneur fait sa demande d’allocations. L'aide vise à faire en sorte que l'entreprise puisse continuer à fonctionner de manière rentable après la crise provoquée par le coronavirus. Les communes seront indemnisées par le gouvernement central pour l'aide qu'elles auront versé aux travailleurs indépendants. Outre la somme forfaitaire, certaines municipalités tentent également d'aider leurs PME et travailleurs indépendants locaux par des mesures volontaires de report de la perception des taxes, d’assouplissement des réglementations et des permis exigés des entreprises, d’abaissement temporaire des loyers et en avançant les paiements aux prestataires de services. Par exemple, au printemps 2020, la ville d'Helsinki a décidé de suspendre pour trois mois au plus les loyers des locaux commerciaux et autres locaux d'entreprise loués à la ville (City of Helsinki, 2021[196]). Actuellement, les entreprises qui ont fourni des services ou produit des biens à la ville d’Helsinki peuvent demander le paiement de la ou des factures qu'elles ont envoyées à la ville avant leur date d'échéance. La ville d'Helsinki a également mis en place un service de conseil aux entrepreneurs et aux jeunes pousses pendant la crise du COVID-19.
En France, l'État et les régions mènent une action conjointe face à la crise dans le cadre du nouveau Conseil économique État-Régions institué en décembre 2019. Dans ce contexte, des comités régionaux auxquels participent les banques de développement (BPI) ont été mis en place pour accélérer la mise en œuvre des mesures d’aide aux entreprises. Les régions ont par ailleurs débloqué une enveloppe de 250 millions EUR (en plus des 750 millions EUR alloués par l’État) pour alimenter le Fonds national de solidarité destiné aux artisans, commerçants et petites entreprises. Ce fonds a deux composantes : i) une aide mensuelle aux très petites entreprises, aux travailleurs indépendants, aux microentreprises et aux professions libérales enregistrant une baisse de leur chiffre d'affaires de plus de 50 % ; ii) une aide supplémentaire non renouvelable aux petites entreprises les plus fragiles. Presque toutes les régions de France ont mis en place des programmes de soutien pour les PME et les travailleurs indépendants (BPI France, 2020[197]). Elles sont plusieurs à avoir constitué des fonds régionaux additionnels pour compléter le Fonds national de solidarité créé conjointement par l’État français et les régions. La région Pays de la Loire a ainsi constitué le « Fonds territorial Résilience ». La région Grand Est a mis en place une plateforme baptisée « Plus Forts Grand Est » dont le but est de faciliter la mise en relation d’une cinquantaine de sociétés innovantes et des collectivités, des entreprises, des associations, des établissements de soins, etc. afin de détecter les produits et les services novateurs qui pourront aider à surmonter la crise et à rebondir (sites web des autorités régionales et de BPI France). (BPI France, 2020[197])
En Allemagne, outre l’aide du gouvernement fédéral, presque tous les Länder ont mis en place des programmes de soutien à l’intention des microentreprises, des PME, des jeunes pousses et des indépendants. Les principaux instruments constituant ces programmes sont notamment des subventions directes non remboursables (Hesse, Thuringe, Schleswig-Holstein, Brandebourg, Rhénanie du Nord-Westphalie, Hambourg, Bavière), des prêts (Rhénanie-Palatinat, Saxe, Schleswig-Holstein), des avances de trésorerie ou subventions (Bade-Wurtemberg, Brême, Mecklembourg-Poméranie-Occidentale), des garanties (Bade-Wurtemberg) ou un mélange de tous ces instruments (Saxe-Anhalt et Basse-Saxe) (Deloitte, 2020[198]). Le Bade-Wurtemberg et la Thuringe versent également aux indépendants un salaire dit fictif d'entrepreneur pouvant atteindre 1 180 EUR par mois. En réaction au dernier épisode de confinement, à Berlin et dans le Schleswig-Holstein, les bars et restaurants qui réalisaient normalement leur principal chiffre d'affaires en fin de soirée ou la nuit, mais qui sont actuellement touchés par le couvre-feu, peuvent recevoir une allocation pour leur loyer pouvant atteindre 3 000 EUR (Sparkasse, 2021[199]).
En Grèce, la région de Thessalie a constitué un fonds de 160 millions EUR (Thessaly NSRF 2014-2020) pour aider les entreprises locales à faire face à la crise du COVID-19. Ce fonds se répartit comme suit : 80 millions EUR pour le programme « Réinvestir et investir en Thessalie », 50 millions pour le personnel des entreprises fermées et 30 millions sous forme de subventions non remboursables pour assurer le fonds de roulement des petites entreprises touchées par la pandémie (ΑΠΕ-ΜΠΕ, 2020[200]).
En Italie, 14 régions ont adopté des mesures de simplification des procédures administratives et réglementaires pour les PME. Cela inclut le report des délais de dépôt de candidatures aux programmes de financement public et de présentation de rapports sur les plans d'investissement soumis à incitations publiques, ainsi que la simplification des procédures de passation de marchés publics (Centre OCDE/LEED de Trente pour le développement local, 2020[187]). De nombreuses autorités régionales ont en outre établi et renforcé des compléments au fonds national de garantie créé pour les PME par le gouvernement central. Des mesures spécifiques ont également été adoptées par un grand nombre de régions pour aider les PME locales dans six grands domaines : facilitation de l’accès au crédit bancaire et réduction des coûts y afférents ; financement public ; simplification des procédures ; travail et bien-être ; allègements fiscaux ; et planification et budgétisation. (Centre OCDE/LEED de Trente pour le développement local, 2020[187])
Au Mexique, 26 des 32 entités fédérées du pays ont mis au point des mesures fiscales pour aider les entreprises et les populations vulnérables à faire face aux conséquences économiques des dispositions visant à enrayer la propagation du COVID-19. La ville de Mexico a créé un programme intégré d'aide d’urgence et de relance économique dans le contexte de la pandémie. Le but est d’injecter 500 millions MXN dans le Fonds pour le développement social afin de pouvoir accorder 50 000 prêts de 10 000 MXN à des microentreprises. En septembre 2020, le gouvernement de la ville de Mexico a lancé le plan de réactivation économique pour le bien-être de la ville de Mexico. Le septième axe de ce plan, qui porte sur la numérisation, la simplification et l'accessibilité des crédits, poursuit trois objectifs visant à aider les PME : 1) aider les PME à adopter les services numériques et la vente en ligne ; 2) réduire les procédures obligatoires et le poids administratif de 2 400 procédures à 966 ; et 3) faciliter l'accès aux prêts en liaison avec les banques privées (City of Mexico, 2020[201]). Ce plan comprend également dans son premier axe sur le soutien direct aux habitants une série de microcrédits aux micro-entrepreneurs.
Aux Pays-Bas, le troisième plan de soutien économique annoncé le 28 août 2020 prévoit la prestation par les municipalités de nouveaux services à l’intention des travailleurs indépendants, tels qu’un service de formation et de réorientation qui débutera en janvier 2021. Cela s’inscrit dans le cadre du programme Tozo (Programme de transition temporaire pour les entrepreneurs indépendants) visant à apporter une aide temporaire aux travailleurs indépendants (Gouvernement des Pays-Bas, 2020[202]).
En Suède, le soutien aux PME et aux travailleurs indépendants (par exemple : aides de trésorerie, prêts et garanties, report d'échéances fiscales) relève de la responsabilité des services et ministères du gouvernement central (Gouvernement de la Suède, 2020[203]). Les régions et les municipalités fournissent quant à elles des aides « indirectes » aux PME dans leurs domaines respectifs, en proposant par exemple l'appui d’experts pour se réorganiser en interne ou concevoir de nouveaux modèles économiques (Region of Skane, 2020[204]). Les municipalités ont pour leur part reporté le paiement par les PME des factures et redevances pour services municipaux, instauré la gratuité du stationnement, assoupli les permis et réglementations, et avancé les règlements vis-à-vis de leurs fournisseurs.
En Espagne, les autorités régionales soutiennent activement les économies locales et mettent en place des dispositifs de grande ampleur pour aider les PME et les travailleurs indépendants, en complément des mesures adoptées par le gouvernement espagnol, conformément au décret-loi royal 8/2020. Ainsi, la communauté autonome des Asturies verse une aide non remboursable aux travailleurs indépendants, accorde un report d'impôts aux entreprises individuelles, aux PME et aux microentreprises, et consent une nouvelle ligne de crédit entièrement garantie par Asturgar pour améliorer la trésorerie des PME. Le gouvernement de la région de Madrid a quant à lui adopté un plan de 220 millions EUR afin d'aider les PME et les indépendants à faire face à la crise (aide économique et dispositifs de financement). De son côté, le Pays basque a pris toute une série de mesures : fonds extraordinaire à l’intention des PME et des indépendants ; ligne de crédit d’urgence à taux zéro par l’intermédiaire de l’Institut basque de financement (IVF) ; ligne de crédit pour fonds de roulement à taux zéro, garantie par la région ; refinancement et aménagement des conditions pour les avances remboursables ; et enfin, conseils techniques aux indépendants et PME pour la mise en œuvre du télétravail (Comité européen des régions, 2020[191]).
En Suisse, la garantie des prêts consentis aux jeunes pousses éligibles est assurée à 35 % par les cantons, en complément de la garantie à hauteur de 65 % fourni par le gouvernement fédéral (OCDE, 2020[6]). (OCDE, 2021[2]).
Au Royaume-Uni, outre l’Angleterre, les autres gouvernements décentralisés du pays ont reçu un soutien du gouvernement britannique pour lutter contre les effets de la pandémie, en particulier pour soutenir leur économie régionale. Le Pays de Galles a créé un fonds de résilience économique (Economic Resilience Fund - ERD) dont la troisième phase prévoit la constitution d’un fonds pour les entreprises confinées, qui sera distribué par les gouvernements locaux aux petites entreprises touchées par la crise (Gouvernement du Pays de Galles, 2020[205]). En Écosse, le gouvernement a mis en place une ligne téléphonique pour aider les petites entreprises à faire face à la pandémie et a créé à leur intention un dispositif de secours incluant : un allègement des impôts fonciers commerciaux pour les secteurs du commerce de détail, de l’hôtellerie-restauration et des loisirs ; des subventions pour les petites entreprises des secteurs les plus durement frappés par la crise économique du COVID-19 ; un fonds de secours pour les indépendants récemment installés ; un fonds de résilience pour les entreprises vitales (PERF), destiné à aider les PME vulnérables que le gouvernement juge essentielles pour l’avenir économique de l’Écosse ou pour les économies locales de l’ensemble du pays (OCDE, 2021[2]).
Aux États-Unis, en plus des mesures de soutien incluses dans le dispositif « Coronavirus Aid, Relief, and Economic Security » (CARES), de nombreux gouvernements fédérés et locaux ont mis sur pied leurs propres programmes à l’intention des petites entreprises (c’est le cas notamment du Nouveau-Mexique, de l’Ohio, du Maine, du Massachusetts, du Michigan, de New York, de l’Oregon, du Wisconsin et de la Floride). Plusieurs villes ont adopté des mesures pour suspendre ou reporter les obligations financières pesant sur les petites entreprises – comme le paiement des services essentiels, des impôts ou des redevances de licences –, par exemple en annulant les pénalités pour le paiement en retard des impôts ou en repoussant les échéances (Seattle, Nouvelle-Orléans, San Francisco). Les autres mesures de soutien incluent la création d'un fonds de secours associé à d'autres options de financement, par exemple à Jersey City (réaffectation des fonds de la dotation globale de développement local (CDBG) en direction des petites entreprises), Philadelphie (le fonds de secours pour les petites entreprises fournit des subventions et des prêts à taux zéro aux entreprises touchées), San Francisco (prêts à taux zéro et fonds municipal de résilience), Chicago (fonds de résilience pour les petites entreprises) ou Denver (aide d’urgence pour les petites entreprises). Certaines villes ont également créé une base centralisée de ressources et d'informations en ligne pour les PME – afin de fournir des conseils de haut niveau aux entreprises – ou ont accordé des prêts d'urgence remboursables à taux zéro (New York, Los Angeles) (US National League if Cities, 2020[206] ; OCDE, 2021[2]).
Pistes d’action
Étant donné le rôle des gouvernements infranationaux dans le soutien aux PME et aux entrepreneurs, il est important que les gouvernements nationaux et infranationaux coordonnent les réponses politiques afin d'éviter la duplication et la perte de transparence des mesures publiques.
Envisager d'accorder des aides fiscales et financières directes aux entrepreneurs et travailleurs locaux à court terme, puis de s’orienter vers d'autres formes de soutien économique à moyen et à long termes, comme l'établissement de prix fonciers et immobiliers favorables, la simplification des modalités de prêt et de garantie, l’assouplissement des permis et réglementations, et le financement sur fonds propres.
Envisager de concevoir de nouvelles politiques structurelles pour aider les PME à adopter de nouvelles méthodes de travail (comme le télétravail, les technologiques numériques et les pratiques écologiques) afin de renforcer leur résilience et celle de la région.
Adapter les systèmes de marchés publics pour apporter des réponses adéquates en cas d’urgence et de force majeure et soutenir le développement des PME.
Des approches territoriales en soutien aux populations vulnérables
Les populations vulnérables sont doublement pénalisées par la crise : d’une part, car ce sont souvent des populations à risque du point de vue sanitaire et d’autre part, car la crise économique les frappe de plein fouet. Les gouvernements infranationaux ont pris des initiatives pour gérer l’urgence et apporter de l’aide à ces populations, notamment les personnes âgées, celles atteintes de maladies chroniques ou de longue durée, les personnes handicapées, les ménages pauvres, les sans-abris, les élèves et les étudiants de milieux défavorisés, et les migrants, entre autres. Les ménages dépourvus d’assurance maladie sont aussi particulièrement vulnérables car ils n’ont pas toujours accès à un traitement médical et ne sont pas forcément inclus dans la comptabilisation des cas positifs au virus. Les populations autochtones sont elles aussi particulièrement fragiles. Dans ces communautés, des facteurs liés aux conditions de vie comme la précarité et le surpeuplement des logements ou l'absence d'accès à des équipements sanitaires adéquats accentuent la menace que représente le COVID-19. Bien souvent, les populations autochtones sont aussi les plus vulnérables face aux conséquences économiques de la crise (Lustig et Tommasi, 2020[207]).
La protection sociale est l’une des missions principales assurées par les gouvernements infranationaux (voir la section 1). Les communes, en particulier, plus proches de la population, jouent un rôle crucial dans la protection sociale des plus fragiles, qui sont physiquement et économiquement plus exposés à la pandémie (OCDE, 2020[190]).
Les mesures de soutien aux populations vulnérables sont très variées et incluent des programmes alimentaires destinés aux enfants et aux personnes âgées, la livraison de repas et de médicaments, des aides spécifiques pour les personnes âgées et handicapées, la mise à disposition d’abris provisoires et de logements d'urgence, la distribution de bons pour l’achat de biens essentiels, l’installation d'équipements sanitaires, l’exonération ou le report des loyers pour les occupants de logements sociaux, l’aide au paiement des hypothèques, la suspension ou l'annulation des factures des services essentiels (comme l’énergie et l’eau), la mise en place de lignes téléphoniques d’urgence, l’embauche de personnes au chômage dans des emplois d'utilité sociale, des subventions directes pour le paiement des services sociaux (par exemple la garde des enfants), l’interdiction des expulsions locatives, la distribution de masques, etc. Les dépenses des gouvernements infranationaux liées aux prestations et services sociaux devraient être, dans les régions et les communes de l’UE, le poste budgétaire qui sera le plus fortement impacté par la crise (OCDE-CdR, 2020[56]).
Dans certains pays, pour relever les défis sociaux, les gouvernements locaux travaillent conjointement avec le gouvernement central ainsi qu’avec des ONG et des bénévoles. Il n’est pas rare que les gouvernements infranationaux fournissent des aides financières pour assurer le bon fonctionnement des services fournis par les organisations de l’économie sociale (Comité européen des régions, 2020[188]). Ces dernières ont été elles aussi très touchées par la crise, alors qu’elles jouent un rôle crucial dans la gestion et l’atténuation des impacts de la pandémie sur les populations vulnérables (OCDE, 2020[208]).
Exemples par pays
En Australie, les gouvernements des États et des territoires ont annoncé des mesures de relance par voie budgétaire d’un montant de 11.5 milliards AUD (0.6 % du PIB) qui incluent des versements au comptant au profit des ménages vulnérables (FMI, 2020[209]).
Au Canada, le gouvernement fédéral a doublé les montants du programme « Vers un chez-soi » qui soutient financièrement les services aux sans-abris, tandis que les provinces et municipalités mettent en place des financements d'urgence par le biais de services d’assistance aux familles et à la population locale. Les Services aux Autochtones Canada (SAC) travaillent en étroite collaboration avec l’Agence de la santé publique du Canada, d’autres ministères et ses homologues à l’échelon provincial et territorial pour protéger la santé et assurer la sécurité des Premières nations et des Inuits et les aider à faire face aux menaces de santé publique, c dont le coronavirus fait partie.
Au Chili, le gouvernement central a mis en place deux programmes de soutien aux populations les plus vulnérables, qui s’appliquent en fonction des niveaux de revenus et de la municipalité de résidence de la famille (Gouvernement du Chili, 2021[210]). Le premier, le revenu familial d'urgence (IFE), est destiné aux 60 % de la population les plus vulnérables vivant dans des communes en phase 1 ou 2 (quarantaine et transition). Le second, le Bonus COVID, est une contribution monétaire que reçoivent automatiquement toutes les personnes soumises à l'allocation familiale (SUF) et qui résident dans des communes en phase 3 ou 4 (préparation et ouverture initiale).
En Colombie, le gouvernement de la ville de Bogotá a mis en œuvre le programme « Bogotá Solidaria en Casa » pendant la quarantaine, une initiative qui comprenait trois mesures destinées aux groupes les plus vulnérables de la région : 1) des transferts monétaires couvrant 65 % des dépenses mensuelles des familles les plus pauvres (jusqu'à 119 USD et 50 USD pour les ménages pauvres et à faible revenu, respectivement) ; 2) des bons échangeables contre des produits alimentaires et autres dépenses ; et 3) des transferts en nature pour les familles qui, pour différentes raisons, n'ont pas eu accès aux prestations susmentionnées (Bogota Como Vamos, 2020[211]). En plus du travail accompli par les gouvernements, les ONG ont joué un rôle important dans la coordination et la mise en œuvre des actions d'aide aux secteurs vulnérables, tant à Bogota que dans d'autres régions du pays. Des initiatives telles que « Solidarité en action » de l'organisation Ciudad en Movimiento et la campagne de collecte alimentaire de Querendona Cívica doivent tout particulièrement être mentionnées (France24, 2020[212]).
Au Costa Rica, au début de la pandémie, le gouvernement central a annoncé un ensemble de mesures pour aider les travailleurs et les PME. Certaines de ces mesures comprenaient des actions visant à : a) abaisser le coût du crédit ; b) assouplir le réajustement des dettes ; c) établir un délai fiscal temporaire ; et d) améliorer les options d'assurance (Gouvernement du Costa Rica, 2020[213]).
En France, les gouvernements infranationaux, et plus particulièrement les départements et les communes, assurent un suivi des besoins spécifiques des populations vulnérables, notamment les migrants, et y répondent. Depuis le début de la crise, les départements, en assurant la continuité des services sociaux, soutiennent activement les plus vulnérables, les protègent et les aident pour faire face à l’urgence sanitaire. Ils financent l’achat de masques, le renforcement des ressources humaines et financières dans les maisons de retraite, la création de centres d’urgence pour les jeunes et les enfants en difficulté, la mise en place de lignes téléphoniques dédiées, etc. (Assemblée des Départements de France, 2020[214]). Les villes françaises sont également des acteurs sociaux de premier plan, en particulier par l’intermédiaire de leurs centres communaux d’action sociale (CCAS). De nombreuses villes et régions métropolitaines ont pris des mesures pour faire face au problème de l'insécurité alimentaire. La municipalité de Brest a élargi son approvisionnement alimentaire d'urgence à la fin de l'année 2020, en lançant un système de référence pour identifier les personnes les plus vulnérables et leur envoyer des bons d’alimentation utilisables dans la plupart des épiceries (ONU, 2020[215]). Dans certaines municipalités, ces mesures ont été plus spécifiquement ciblées pour soutenir les jeunes, notamment les étudiants, qui ont été particulièrement touchés par la crise économique. La municipalité de Paris a ouvert l'aide alimentaire d'urgence aux étudiants, qui n'étaient pas concernés auparavant, et la métropole de Bordeaux et les municipalités voisines ont contribué conjointement au financement d'une banque alimentaire permettant la distribution d'un panier repas par semaine aux étudiants vulnérables. La métropole de Rennes a mis en place un fonds d'un million EUR pour soutenir les ménages vulnérables ayant du mal à payer leurs loyers, en collaboration avec le département d'Ille-et-Vilaine (Rennes Métropole, 2021[216]). Ce fonds d'urgence pour le logement est dédié aux personnes ayant subi une baisse de ressources en raison de la crise du COVID-19, en complément du fonds de solidarité logement déjà existant au niveau du département. La ville de Marseille a également adopté une série de mesures d'urgence pour les plus vulnérables, en allouant un budget de plus d'un million EUR en novembre 2020. Ces mesures comprennent un doublement de l'aide alimentaire pour les sans-abris, avec la distribution de 1 000 repas par jour, et une subvention de 200 000 EUR au centre communal d'action sociale (CCAS) pour aider les familles vulnérables à faire face à leurs besoins quotidiens.
En Grèce, l’Initiative du ministère de l’Intérieur, en coopération avec l’Union centrale des municipalités de Grèce et avec le soutien du ministère de la Gouvernance numérique, a lancé le hashtag #CitySolidarityGR, visant à apporter une assistance aux citoyens vulnérables en leur donnant accès aux produits et services proposés par des organisations volontaires. Dans le cadre des mesures d’urgence en vigueur, les gouvernements locaux doivent créer un registre des citoyens qui ont besoin d’assistance, notamment les personnes les plus démunies. Des auxiliaires de vie seront affectés aux ménages vulnérables ; ils veilleront à ce que ces derniers reçoivent les médicaments et les provisions nécessaires et à ce qu’ils aient accès aux services de soins et d’assainissement de base.
En Islande, les gouvernements central et infranationaux ont créé un fonds de réserve qui permettra de mener les actions nécessaires pour faire face aux conséquences sociales du COVID-19 et garantir la provision de services destinés aux groupes vulnérables (SAMBAD, 2020[217]).
En Corée, le gouvernement envisage d'inscrire l’accessibilité aux services médicaux au répertoire des normes nationales minimales relatives aux infrastructures de vie (initialement prévue en 2020), afin que les services médicaux ne soient pas négligés dans les régions en difficultés. Ces normes, qui font partie des mesures de soutien offertes par les gouvernements central et infranationaux aux groupes vulnérables, visent à faire en sorte que l’ensemble de la population ait facilement accès aux infrastructures essentielles dans leur vie quotidienne.
Au Mexique, le gouvernement fédéral a mis en place un site web centralisé pour répertorier l’ensemble des initiatives régionales. Le gouvernement de la ville de Mexico (par le biais d'un effort coordonné entre la ville elle-même, le secrétaire à la Santé, les services de santé publique de la ville et l'Agence numérique pour l'innovation publique des gouvernements locaux) a annoncé l'octroi d'une aide financière et en nature aux personnes malades ou présentant les symptômes du COVID 19 et à leurs proches, par le biais d'une procédure spécifique qui consistera en la remise d'un kit médical COVID-19, d'un colis alimentaire et d'une « carte d'aide » (avec paiement à la clé). En outre, au cours du mois d'août 2020, les autorités de la ville ont mis en œuvre un programme pour tous les jeunes des niveaux préscolaire, primaire et secondaire des écoles publiques de la ville de Mexico visant à leur fournir une aide pour l'acquisition de fournitures scolaires, dans le but d'alléger les budgets familiaux. Parmi les autres programmes de soutien, il convient de citer les primes de carburant, les bourses scolaires, les fonds de soutien au chômage, les programmes de soutien aux travailleurs non-salariés.
Au Portugal, la ville de Lisbonne a accordé un soutien financier à diverses organisations fournissant des aides sociales aux populations vulnérables (tels que les sans-abris, les personnes handicapées, les ménages à bas revenu, les enfants, etc.) afin de leur permettre d'assurer la continuité de leurs services pendant toute la durée de la crise. La capitale a accru la dotation du Fonds social d’urgence pour les familles et créé un réseau de bénévoles pour venir en aide aux groupes les plus vulnérables (les personnes âgées, les personnes souffrant de handicaps, les malades placés en quarantaine, etc.), notamment en effectuant leurs achats de nourriture et de médicaments, en s'occupant de leurs animaux de compagnie et en assurant un lien social (par exemple pour prévenir ou détecter les cas de violences domestiques) (Groupe PSE du CdR, 2020[218]).
Aux États-Unis, la loi sur les crédits d’aide supplémentaires en réponse au coronavirus (Coronavirus Response and Relief Supplemental Appropriations Act ) de 2021, qui a étendu les prestations et les programmes faisant initialement partie de la loi CARES (2020) (US Department of the Treasury, 2021[219]), a été conçue pour apporter un soutien économique direct aux travailleurs et à leur famille. La loi consiste à verser 600 USD par adulte et jusqu’à 600 USD par enfant éligible, de même qu’aux petites entreprises. En outre, deux programmes supplémentaires destinés aux populations vulnérables ont été adoptés en 2021. En janvier, le programme d'aide au logement d'urgence (Emergency Rental Assistance programme) a également été introduit, mettant à disposition 25 milliards USD pour aider les ménages qui ne sont pas en mesure de payer leur loyer et les services publics en raison de la pandémie de COVID-19 (US Department of the Treasury, 2021[220]). Les fonds sont alloués directement par le gouvernement fédéral aux différents États, aux territoires des États-Unis, aux gouvernements locaux et aux tribus indiennes. Les bénéficiaires les utilisent pour apporter une assistance aux ménages éligibles par le biais de programmes d'aide au paiement des loyers déjà en vigueur ou nouvellement créés. Le programme d'investissement d'urgence (ECIP) a été adopté en février pour encourager les institutions financières des communautés à faibles et moyens revenus à accroître leurs efforts pour soutenir les petites entreprises et les consommateurs (US Department of the Treasury, 2021[221]). Dans le cadre de ce programme, le Trésor américain versera directement jusqu'à 9 milliards USD de capitaux à des institutions financières de développement communautaire certifiées ou à des établissements de dépôt pour les minorités, afin de proposer des prêts, des subventions et des suspensions de paiement aux petites entreprises, aux entreprises appartenant à des minorités et aux consommateurs, en particulier dans les communautés à faible revenu et mal desservies, qui pourraient être touchées de manière disproportionnée par l'impact économique de la pandémie. En mars 2021, les États-Unis ont adopté un plan de relance économique de 1 900 milliards USD qui prévoit d'étendre le crédit d'impôt pour enfant, le portant à 3 600 USD par enfant jusqu'à 5 ans et à 3 000 USD pour les enfants âgés de 6 à 7 ans. Cette prestation serait entièrement accessible aux ménages à faible revenu qui ne sont actuellement pas éligibles ou ne reçoivent qu'une partie du crédit d'impôt pour enfant. Le plan prévoit également d'étendre le crédit d'impôt pour enfants et personnes à charge pour 2021. Il prolonge également le versement de 300 USD par semaine aux chômeurs, en complément des paiements liés au plan de relance de décembre 2020, en plus d'autres dispositions financières soutenant ceux qui ont perdu leur emploi et ont reçu des allocations de chômage en 2020 (The New York Times, 2021[222]).
Pistes d’action
Envisager de verser des dotations supplémentaires aux gouvernements infranationaux afin de financer les dépenses associées à l’augmentation des besoins en matière de services sociaux. En particulier, mettre en place des subventions temporaires basées sur des formules pour compenser les aides apportées par les gouvernements infranationaux aux groupes vulnérables durant la crise du COVID-19. Ces subventions pourraient, si nécessaire, être complétées par des subventions discrétionnaires et d'autres dispositifs de soutien visant à réduire la charge financière qui pèse sur les populations les plus vulnérables.
Communiquer régulièrement et clairement sur les aides destinées aux populations vulnérables et sur la marche à suivre pour en bénéficier ; simplifier l’attribution de ces aides.
Apporter un soutien financier aux organisations de l’économie sociale ou de la société civile qui viennent en aide aux populations vulnérables et mobilisent des réseaux de bénévoles.
Faciliter la coopération horizontale entre les gouvernements locaux pour faire face à l’augmentation des populations vulnérables et à l’évolution de leurs profils.
Développer des programmes à l’intention des populations autochtones.
Développer l’utilisation des outils numériques dans les régions et les villes
La crise du COVID-19 a accéléré plusieurs tendances et grandes transformations de fond, parmi lesquelles la transformation numérique. Les solutions développées en matière de gouvernance numérique à cette crise répondent à plusieurs échéances temporelles : réagir à court terme, traiter à moyen terme et réinventer sur le long terme (ONU, 2020[223]). Le partage d’informations, la participation en ligne et la communication bilatérale à l'aide de plateformes numériques ont permis de faire face à la crise sur le court terme. Des services publics comme l’éducation et la santé sont passés, en quelques semaines, au mode numérique. Parallèlement, le télétravail est un moyen efficace de renforcer la distanciation sociale et d’atténuer l'impact économique de la pandémie. Celle-ci a accéléré le passage au numérique dans l’administration publique et la prestation de services publics dans les régions, les villes et les zones rurales. Sur le moyen terme, les gouvernements infranationaux devraient tirer parti de cette expérience pour améliorer les services numériques au sein même des gouvernements, et développer des partenariats numériques avec les autres niveaux de gouvernement et le secteur privé. Cependant, si elle est mal préparée et incomplète, la transition numérique pose un certain nombre de défis aux gouvernements locaux et régionaux, qui n'ont pas tous les mêmes capacités pour la mettre en œuvre. La crise actuelle pourrait accentuer ces disparités, car de nombreux gouvernements infranationaux n’étaient pas nécessairement préparés à passer au numérique. Des difficultés particulières pourraient se poser dans les régions les plus rurales et isolées, si elles ne sont pas dotées des infrastructures d’information et de télécommunication adéquates. Sur le long terme, une plus grande convergence des accès à l’infrastructure numérique permettrait de combler la fracture entre les milieux rural et urbain et d'accroître la résilience en ce qui concerne la fourniture des soins de santé et des services publics (ONU, 2020[223]).
Les gouvernements infranationaux et l’utilisation des outils numériques pour assurer le suivi de l’épidémie
Les gouvernements locaux et régionaux font de plus en plus appel à des outils numériques pour suivre et stopper la propagation du coronavirus. Cette extension de l’usage des outils numériques à des fins de suivi et d'information dans le contexte de la pandémie a permis : i) d’informer les dirigeants, de les aider à adopter des mesures adéquates et d’endiguer la pandémie ; ii) de communiquer en toute transparence avec les citoyens et de renforcer la confiance, un élément essentiel pour assurer le respect des mesures de confinement.
Les outils numériques sont essentiels pour permettre aux régions et aux villes de mieux gérer leur réponse immédiate à la crise. Un certain nombre de nouvelles applications ont contribué à réduire la propagation du COVID-19 et accompagnent la levée progressive des mesures de confinement en indiquant aux citoyens s'ils ont été à proximité de personnes infectées par le virus et en les encourageant dans ce cas à en informer les autorités sanitaires, à s’isoler et à demander une assistance. Le suivi des données, ainsi que les signalements précis et rapides, sont des composantes essentielles de la gestion de crise et peuvent contribuer à prévenir, ou tout au moins à limiter les nouvelles vagues épidémiques. Un important effet de réseau peut en outre se faire sentir, l’efficacité des outils numériques augmentant avec le nombre des utilisateurs.
L’utilisation de ces outils soulève néanmoins des questions épineuses en matière de protection et de confidentialité des données. Les applications de suivi, dont il est reconnu qu’elles peuvent avoir une utilité dans la gestion de crise, touchent également à la liberté de chacun de maîtriser des informations le concernant. Alors que dans de nombreux pays, le cadre juridique n’autorise pas ce type d'utilisation des données, dans d'autres il a été plus simple à mettre en œuvre. Afin de minimiser les risques pour la vie privée et la protection des données, la Commission européenne a élaboré des lignes directrices et une boîte à outils pour le développement d'applications relatives au COVID-19 garantissant une protection suffisante des données à caractère personnel.7
L’utilisation d'outils numériques permettant le suivi et la transmission de données se révèle également essentielle pour tenir les citoyens informés et améliorer leurs échanges avec les autorités. De nombreux États et territoires ont créé des sites web spécifiques pour communiquer des informations sur l’évolution de la crise, qui indiquent quotidiennement le nombre de cas et les nouvelles mesures adoptées, par exemple. Même si elles n'ont pas toutes de site web dédié, la plupart des villes et régions du monde publient des informations concernant la situation épidémique sur leur propre site web et renvoient aux sites web du ministère de la Santé, à la plateforme nationale COVID-19 ou au site web de l’OMS. Dans ce domaine, les possibilités de tirer parti des avantages potentiels de la transformation numérique dépendent essentiellement de la pertinence, de la qualité et de la facilité d'utilisation des informations générées par les systèmes numériques et mises à la disposition du public. Pour un usage efficace et avantageux de ces systèmes, il est important de faire en sorte que les principales parties prenantes (organisations de la société civile et autres groupements d'usagers de services publics) soient associées très tôt à la conception de ces systèmes.
Accélération de la transformation numérique des services et fracture numérique au niveau local
Les mesures de confinement ont accéléré la transformation numérique des services et élargi l'éventail de services disponibles en ligne, parmi lesquels les services administratifs, d'éducation et de santé. Une tendance croissante à la dématérialisation des services s’observait déjà avant la crise du COVID-19. Dans les pays de l’OCDE, l’accès aux services publics par le biais de portails numériques a été multiplié par trois depuis 2006 (de Mello et Ter-Minassian, 2020[224]). Avant la crise, une enquête sur l’utilisation de systèmes numériques d'information par les gouvernements locaux a montré qu’en moyenne, la dématérialisation des services locaux était la plus importante dans les secteurs de l’aménagement du territoire, de la construction, du tourisme, de la culture et du sport, et moindre s'agissant des services sociaux.
Passage au numérique dans le secteur de l’éducation : avec plus de 1.5 milliard d’enfants concernés par la fermeture des écoles lors du confinement du printemps 2020 (plus de 60 % de la population étudiante dans le monde) d'après l’UNESCO, la crise du COVID-19 a entraîné un recours massif à l'enseignement à distance et aux cours en ligne à partir de mars 2020 (UNESCO, 2020[225]). Dans un grand nombre de pays, les gouvernements infranationaux doivent assumer d’importantes responsabilités dans la mise en œuvre des politiques éducatives, ce qui leur donne un rôle de premier plan dans le processus de transformation numérique, y compris dans le contexte de crise actuel. Avant la crise, certaines régions et villes, notamment du nord et de l’ouest de l’Europe, faisaient office de pionnières de la transformation numérique dans le secteur de l’éducation. Les régions nord-européennes, proposent un très large éventail de services numériques et d’applications en ligne pour les inscriptions et le suivi des progrès des élèves, ainsi que pour diffuser des matériels pédagogiques en ligne (de Mello et Ter-Minassian, 2020[224]). Les fermetures d'écoles ont conduit les villes à développer davantage l'utilisation d’outils numériques pour continuer à faire classe. Les gouvernements locaux doivent néanmoins relever le double défi d’assurer les cours en ligne et de garantir l’égalité d'accès à l’éducation pour tous, ce qui peut tourner au casse-tête, notamment dans les régions plus défavorisées. Certaines villes (Fuenlabrada, Gdansk, la Haye et Madrid) s’emploient à assurer l’égalité des chances entre les élèves en fournissant aux familles à bas revenu des équipements numériques pour permettre à leurs enfants de suivre les cours de leur établissement en ligne, depuis leur domicile.
Services de santé en ligne : dans un contexte où la distanciation sociale est un facteur majeur de prévention et d’endiguement de la maladie, les services de santé en ligne présentent des avantages importants et leur usage s’est largement répandu depuis mars 2020. C’est particulièrement le cas pour la prescription électronique et la télémédecine. Aux États-Unis, les résultats d’études préliminaires montrent que l’intérêt de la population pour la télémédecine croît à mesure que le nombre de cas de COVID-19 augmente. Les gouvernements locaux et régionaux peuvent faciliter cette évolution, notamment dans les pays où les soins de santé sont plus décentralisés. Les services de santé en ligne constituent également être un moyen de remédier aux inégalités territoriales en matière d’accès à la santé, dans la mesure où le gouvernement central intervient pour assurer la répartition équilibrée de ces services sur le territoire en favorisant le développement des capacités institutionnelles et techniques. Certains obstacles à un usage généralisé, comme l’accès au haut débit, seront difficiles à surmonter à court terme, d’où la nécessité de renforcer l’offre de soins de santé en milieu rural et dans les régions à faibles ressources (OCDE, 2020[226]).
La fracture numérique entre les régions et entre les zones rurales/urbaines
La pandémie a en outre mis en évidence la fracture numérique qui existe dans les pays et a accéléré dans certains cas les initiatives d'insertion numérique. Dans les pays OCDE, de grandes inégalités subsistent au sein des pays en matière d’accès et d’utilisation d’Internet. Les différences régionales dans le pourcentage de foyers ayant accès au haut débit sont très prononcées, aussi bien dans les pays qui ont un taux de pénétration des TIC élevé – comme les États-Unis, la France, Israël et la Nouvelle-Zélande – que dans ceux où le niveau moyen d’accès aux TIC est bas, comme le Mexique ou la Turquie (OCDE, 2018[227]). Aux États-Unis, par exemple, près de 25 % des jeunes de quinze ans issus de milieux défavorisés n’ont pas accès à un ordinateur. Dans les régions les plus pauvres de l’Italie, 42 % des ménages n’ont pas accès à un ordinateur/une tablette chez eux, ce qui est également le cas de 20 % des enfants de 6 à 7 ans. Il existe également un écart important pour ce qui est de l’accès à une connexion internet de qualité entre les ménages vivant dans les zones urbaines ou rurales. Dans les pays de l’OCDE, 85 % des premiers contre 56 % des seconds disposent d'un tel accès (OCDE, 2020[47]). Ces inégalités risquent de s’accentuer car certaines communes n’ont pas les moyens de poursuivre la transformation numérique à court et à moyen terme. Pour diminuer ce risque, les initiatives locales doivent s'accompagner d’initiatives nationales visant à combler le fossé numérique (de Mello et Ter-Minassian, 2020[224]).
La démocratie électronique au niveau local
La pandémie a encore accentué la tendance déjà croissante des gouvernements à adopter des outils de démocratie électronique (administration en ligne, gouvernance électronique, délibération électronique, participation en ligne et vote électronique). Les circonstances ont contraint certaines autorités locales et régionales à surmonter leur réticence à s’engager sur cette voie, pour assurer la continuité de leurs travaux. De nombreux conseils locaux et régionaux ont ainsi choisi d’autoriser, par exemple, le débat et le vote en ligne (de Mello et Ter-Minassian, 2020[224]).
Exemples par pays
L’utilisation des outils numériques pour assurer le suivi de l’épidémie
En Argentine, l’ensemble des provinces ont mis en place des solutions numériques diverses pour suivre la progression de la pandémie et apporter des informations utiles aux citoyens. Par exemple, la province de Santa Cruz a créé un canal Telegram (« Saber para prevenir ») permettant aux citoyens d’accéder à la documentation et aux communication officielles. Le gouvernement de Buenos Aires dispose pour sa part de sa propre plateforme d’information, où sont présentés le dispositif de détection « DetectAr » et la géolocalisation des points d’accès au service. Par ailleurs, le gouvernement central a, par le biais de son ministère de la Santé, mis en place un site web de surveillance des données et une application mobile (« Cuidar ») dédié à l’auto-évaluation des symptômes du COVID-19.
Au Brésil, le gouvernement fédéral a mis en place un portail, « Covid-19 No Brasil », qui offre différentes formes de visualisations des données ainsi que des outils numériques pour le suivi de la pandémie. Ce portail unique donne accès à des informations désagrégées par région et par municipalité. Des initiatives régionales et locales ont également vu le jour, comme la « Painel Coronavirus COVID-19 » mise en place par le gouvernement fédéral de Rio de Janeiro, grâce à laquelle la population peut suivre l’évolution de cas, vérifier sur la carte les zones à risque, accéder à des fichiers de données publiques et obtenir des informations sur la réglementation et les prestations de services.
En France, le ministère de la Santé dirige le programme « Répertoire opérationnel des ressources » (ROR) qui vise à établir un référentiel de données sur les ressources sanitaires (par exemple la disponibilité des lits hospitaliers) mis à jour automatiquement. Le ROR est géré de manière décentralisée : chaque région dispose de sa propre solution ROR, mais elles sont interopérables pour assurer les échanges entre régions. Durant la pandémie de COVID-19, le programme a été adapté pour permettre de recenser et d’organiser les unités de soins dédiées aux cas de coronavirus, ainsi que les ressources de santé habituelles pour continuer à assurer l’offre de soins réguliers (Ministère de la Santé, 2020[228]).
En Italie, plusieurs régions ont conçu des solutions numériques pour suivre et endiguer les infections à partir de l’analyse des données anonymes de déplacements et de rassemblements. La région du Latium a par exemple activé un portail intitulé « système d'alerte unique » pour la diffusion d'informations sur les rassemblements. Elle a également lancé l'application DrCovid, qui permet des communications texte-audio bidirectionnelles sécurisées par smartphone entre le patient et son médecin. Dans certains cas, elle s'accompagne de kits de diagnostic pour une surveillance à domicile. La Ligurie, la Lombardie, la Sardaigne et l’Ombrie ont commencé à analyser les enregistrements et communications téléphoniques. L’état de santé des citoyens fait l'objet d’un suivi dans des régions comme la Lombardie, qui a créé l'application « alerte LOM ». Le Piémont a conçu la plateforme « COVID-19 / région du Piémont » pour permettre à l'unité régionale de gestion de crise de suivre toutes les activités liées aux patients atteints du COVID-19. Les Pouilles et la Toscane disposent également de plateformes web régionales qui facilitent l’assistance, les soins et le suivi des patients à distance.
La Corée a élaboré un système intelligent de gestion du COVID-19 pour guider les enquêtes épidémiologiques. Ce système reprend les technologies des hubs de données développées par plusieurs villes intelligentes du pays, afin de recueillir et traiter de grands volumes de données urbaines. La Corée a mis en place ce système pour réaliser un vaste ensemble d'analyses statistiques permettant de retracer les déplacements des personnes infectées, d’établir les voies de transmission ou de localiser une source d'infection dans le cas d’une poussée épidémique de grande ampleur. Les données de localisation des personnes infectées couvrant la période antérieure au diagnostic sont collectées à partir des stations de base de téléphonie mobile, des transactions par cartes de crédit, etc. dans les limites autorisées par la loi sur la prévention et la lutte contre les maladies infectieuses. Dans le respect des règles de protection de la vie privée, les informations jugées nécessaires sont transmises de manière anonyme aux utilisateurs pour qu’ils puissent vérifier s’ils ont croisé la route de personnes infectées, et se faire dépister le cas échéant.
Au Mexique, la majorité des entités fédérales ont activé des numéros d'urgence pour apporter en continu une assistance et des informations à propos du COVID-19. À Chihuahua, Nuevo León et Querétaro, des applications ont été conçues pour informer, enregistrer et orienter les personnes présentant des symptômes ou déjà infectées. À Mexico City, le système « SMS COVID-19 » invite les personnes qui présentent des symptômes à répondre à quelques questions, ce qui permet d’identifier les cas possibles (aigus ou sévères) de coronavirus.
En Norvège, le gouvernement a lancé une application mobile appelée Smittestop, visant à aider les autorités sanitaires à limiter la transmission du coronavirus. À partir des données fournies par l'application, l’Institut norvégien de santé publique peut analyser les mouvements de population et mettre en place des mesures efficaces de prévention et de lutte contre l'infection.
Information et participation des citoyens
Au Chili, le gouvernement a mis en place un site web contenant des informations statistiques détaillées sur la progression de la pandémie, avec la mise à jour quotidienne, entre autres, du nombre de personnes infectées, de morts, de ventilateurs mécaniques et de lits d’hôpitaux disponibles, qui varient selon les régions et les municipalités. La plateforme permet également d’accéder à des rapports officiels, une visualisation en 3D et des fichiers statistiques contenant les données officielles. Par ailleurs, l’application Territorial Visor permet à la population de suivre les informations utiles relatives au Covid-19 grâce à un tableau de bord interactif de visualisation des données : résumé et évolution des chiffres quotidiens (cas actifs, décès, pourcentage de lits occupés, examens entrepris), statistiques géo-référencées, mesures de quarantaine appliquées par les municipalités, données sur l’évolution des cas à l’échelle du quartier, etc.
En Colombie, le ministère de la Santé et de la Protection Sociale propose deux sites web contenant des données afin que la population puisse suivre l’évolution de la pandémie. Mis à jour quotidiennement, les deux sites (l’un rattaché au ministère et l’autre à l'Institut national de la santé) présentent des tableaux de bord contenant plusieurs variables et des cartes SIG exhaustives indiquant la situation au niveau du département et de la municipalité. Au niveau local, il convient de souligner le travail du gouvernement de la ville de Bogota, qui a mis au point une plateforme web sur laquelle les habitants peuvent accéder non seulement à des tableaux de bord interactifs contenant des informations actualisées et téléchargeables sur les infections et d'autres statistiques quotidiennes, mais aussi à des informations sur les programmes d'aide sociale disponibles, les campagnes d'aide communautaire, les services funéraires accessibles et même une section de vérification des faits pour analyser et démentir les fausses informations.
En Estonie, la commune de Järva utilise une application destinée à renforcer les liens sociaux pour informer les citoyens des mesures prises au niveau local et national et diffuser des recommandations pour prévenir et stopper la propagation du coronavirus. Cette application publie des séries de questions ciblées et d’autres renseignements, le calendrier des mesures, des contenus publiés sur les réseaux sociaux et envoie des notifications. Les responsables municipaux peuvent également voir le nombre d'utilisateurs qui ont partagé l'information et quand (Partenariat pour un gouvernement transparent, 2020[229]).
En Corée, une page web interactive présentant des informations actualisées a été créée pour établir une cartographie des cas de COVID-19 dans le pays, et des lieux où les patients déclaraient s’être rendus. Les autorités ont eu recours à l’intelligence artificielle et à des techniques fondées sur les données de géolocalisation des téléphones mobiles, les transactions par cartes de crédit et les enregistrements de vidéosurveillance pour repérer les cas prioritaires et retracer le parcours des personnes infectées, et ont ensuite publié des listes extrêmement détaillées de leurs déplacements. Le dépistage à grande échelle a également été la stratégie privilégiée pour combattre le virus (Gouvernement de la Corée, 2020[230]).
La Norvège a mis au point une solution numérique permettant de recueillir les données pertinentes pour élaborer les politiques nationales et régionales concernant la lutte contre le COVID-19. L’Institut norvégien de santé publique a travaillé en collaboration avec l’Association norvégienne des gouvernements locaux et régionaux (KS) pour généraliser l'utilisation du logiciel d'information sur la santé au niveau du district DHIS2. Cette application pour téléphone portable permet de collecter des données hors ligne, et ainsi de réaliser des analyses sur la situation sanitaire en temps réel (Skjesol et Tritter, 2020[231]).
Vers une gouvernance électronique et des services numériques
Au Canada, la province de l’Ontario a élaboré son propre site web où les entreprises peuvent indiquer les équipements d'urgence (respirateurs, masques, etc.) qu’elles sont en mesure de fournir, proposer des solutions novatrices pour lutter contre le COVID-19, proposer des services virtuels de soutien à la santé mentale, donner des conseils financiers aux petites entreprises ou proposer des idées, d'autres produits ou services susceptibles d'aider les Ontariens. Le Canada a également introduit une loi autorisant les municipalités à organiser les réunions du conseil et des commissions locales de manière virtuelle, en ligne, dans les cas où l’état d’urgence est proclamé à l’échelon provincial et local, afin de permettre d'agir rapidement lorsque des réunions physiques ne peuvent avoir lieu.
Au Chili, de même que le gouvernement et certains ministères, de nombreux conseils municipaux et régionaux se réunissent à distance.
En Allemagne, la ville de Bamberg a mis en place une plateforme en ligne qui propose aux étudiants des exercices et de la documentation. Ces contenus ont une double fonction car ils portent aussi sur le patrimoine culturel de la ville. La ville de Düsseldorf se tourne également vers Internet et la téléphonie pour l'accompagnement éducatif et a mis en place une ligne téléphonique qui permet aux personnes âgées et autres populations à risque d’obtenir de l’aide et des conseils (Eurocities, 2020[232]).
En Italie, l'Institut pour l’éducation et les établissements d’enseignement (IES) de Bologne propose des ressources éducatives en ligne pour soutenir les familles d’enfants de 0 à 6 ans en leur proposant des divertissements, des enseignements et des exercices physiques qu’ils pourront suivre sans quitter leur domicile. La municipalité de Palerme a créé par l'intermédiaire de son bureau pour l'innovation une boîte à outils numérique contenant les outils, procédures et informations nécessaires pour travailler en ligne. Elle fournit également les informations essentielles pour permettre aux agents municipaux de travailler à distance depuis leur domicile. La boîte à outils explique notamment comment utiliser les applications nécessaires pour le télétravail et contient des tutoriels sur des sujets comme la signature numérique, l’organisation de visioconférences et la rédaction ou le partage de documents sur Google Drive, entre autres (Eurocities, 2020[233]).
Au Mexique, le gouvernement fédéral a mis en place un site web centralisant toutes les informations sur la progression de la pandémie dans le pays. Cette plateforme comprend un tableau de bord interactif permettant de suivre l’évolution des infections et d’autres variables au niveau national et au niveau local (villes et quartiers).
Aux Pays-Bas, la loi sur la prise de décisions numériques lors des réunions des conseils municipaux autorise ces derniers à prendre des décisions juridiquement contraignantes lors de réunions à distance.
En Espagne, la législation a été adaptée pour autoriser les représentants et organes directeurs des gouvernements locaux à tenir des réunions à distance par des moyens électroniques ou télématiques.
Relever les défis de la transformation numérique : combler le fossé numérique
En Islande, le gouvernement central prend des mesures pour renforcer les services numériques et leur utilisation par les gouvernements infranationaux, dans le cadre de la seconde phase des mesures économiques adoptées en réponse à la crise du COVID-19. Les régions vulnérables du pays font actuellement l'objet d'un repérage et d'une cartographie (Gouvernement de l’Islande, 2020[234]).
En Italie, la ville de Milan a recours à des tableaux de bord pour visualiser les possibilités de mise en relation des citoyens avec les entreprises proposant des services, selon leur localisation sur une carte de la ville. En s'appuyant sur ces données et en partenariat avec une société de télécommunications, la ville a pu proposer un accès internet gratuit aux familles vulnérables disposant d'une connexion (CGLU, 2020[235]). Le 4 août, la Commission européenne a approuvé un système de crédits de 200 millions EUR afin d'aider les familles à bas revenu à avoir accès à des services à haut débit et de fournir les équipements nécessaires. Le but est de réduire la fracture numérique en soutenant les activités de télétravail et en facilitant l’accès aux services éducatifs.
En Espagne, neuf régions ont bénéficié en septembre 2020 d'une réaffectation de 1.2 milliard EUR du Fonds européen de développement régional pour renforcer les capacités de leurs systèmes de santé, aider les PME et développer les TIC dans l’éducation dans le contexte du COVID-19.
Au Portugal, sept régions ont bénéficié en octobre 2020 d'une réaffectation de 1 milliard EUR du Fonds de cohésion de la Commission Européenne pour faire face à la crise du COVID-19. Cette enveloppe servira à financer la transformation numérique des écoles, des PME et du secteur du tourisme.
Pistes d’action
Recueillir et partager régulièrement et en temps utile des informations et des données entre les différents niveaux de gouvernement, de manière transparente.
Encourager la diffusion d'informations et de données entre États et territoires pour atténuer les disparités entre les juridictions et faire face à l’incertitude générée par la crise, ainsi que pour faciliter le partage de connaissances et l’échange de bonnes pratiques.
Améliorer la qualité des micro-données au sein et entre les régions pour mieux comprendre la crise et ses effets.
Exploiter les informations fournies par les outils numériques et les méga-données pour suivre et stopper la propagation du coronavirus, en prêtant une attention égale aux questions de confidentialité et de protection des données.
Utiliser les possibilités offertes par le numérique (santé en ligne, éducation en ligne) pour aider à maintenir la continuité de l'offre de services, en tenant compte des disparités territoriales, économiques et sociales dans l’accès à ces services. Encourager l’échange de bonnes pratiques en la matière, entre gouvernements locaux et usagers (professionnels de santé, enseignants, étudiants, etc.).
Intégrer dans les plans stratégiques de relance et les plans d'investissement des mesures visant à combler le fossé numérique et accroître le soutien des gouvernements centraux aux processus de transformation numérique, notamment pour les PME, les communes urbaines pauvres ainsi que les communes rurales isolées.
Inciter les gouvernements infranationaux à coopérer pour développer l’accès au numérique dans l’ensemble des territoires, par exemple au moyen de financements mutualisés.
Promouvoir la mise en place de projets pilotes de transformation numérique au niveau local pour tester, expérimenter et encourager les gouvernements infranationaux à innover.
Soutien aux finances infranationales
La crise du COVID-19 a une incidence considérable sur les dépenses des gouvernements infranationaux, notamment dans les pays où la prestation de services est décentralisée, mais son impact sur les recettes est encore plus fort. En l'absence de compensation suffisante des dépenses supplémentaires induites et des pertes de recettes occasionnées par le COVID-19, de nombreux gouvernements infranationaux pourraient être contraints de réduire fortement leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement. Cela pourrait compromettre les efforts de coordination des mesures de relance et nuire à la qualité des services ainsi qu’à l’équité de leur accessibilité entre les différents niveaux de gouvernement.
Soutien aux finances infranationales
Une majorité de gouvernements fédéraux ou centraux ont adopté différentes mesures en 2020 pour aider les gouvernements infranationaux à surmonter le choc financier. Les gouvernements d’états fédérés ont également mis en place des mesures de soutien budgétaire envers les gouvernements locaux. Dans plusieurs pays, tels que la République tchèque, la Finlande, la France, le Japon, l’Espagne ou la Suède, le soutien apporté par le gouvernement central/fédéral par le biais des fonds d’urgence et des subventions a limité les répercussions de la crise sur les finances infranationales (voir la section 1.3 « L’impact budgétaire sur les gouvernements infranationaux »).
En 2021, plusieurs pays ont annoncé la poursuite des programmes d’aide, mais ceux-ci pourraient être réduits, selon l’évolution de la situation aux niveaux national et infranational. De nombreux gouvernements centraux/fédéraux ont absorbé le choc budgétaire de la crise du COVID-19, ce qui a sensiblement augmenté leur déficit et leur dette. De plus en plus de gouvernements ciblent leur soutien aux gouvernements infranationaux les plus touchées par la crise et/ou confrontées à des défis socio-économiques spécifiques (Autriche, Chili, Costa Rica, France, Italie, Corée, Norvège, Slovénie, Suède, etc.). Jusqu’ici, l’aide était distribuée de manière plutôt uniforme en raison de l’urgence de la situation. À présent, les gouvernements ont une meilleure visibilité quant aux secteurs et aux types de gouvernements locaux qui ont le plus souffert pendant la crise.
La crise et les plans de relance ont également permis d’entamer ou d’accélérer des réformes des finances locales dans certains pays (France, Islande, Espagne, Angleterre/Royaume-Uni, etc.). Les objectifs sont divers. Il peut s’agir par exemple de la nécessité de trouver comment compenser la disparition (temporaire ou permanente) de certaines taxes locales afin d’accélérer la relance économique (par ex., taxes locales sur les entreprises en France, IRAP en Italie). Le but est aussi d’améliorer la résilience des systèmes financiers à l’échelon infranational afin d’affronter les futures crises et garantir une meilleure solidarité, grâce à des mécanismes de péréquation et de stabilisation (par ex., la réforme du Programme de stabilisation budgétaire au Canada). Les réformes peuvent aussi avoir pour objectif de mieux prendre en compte les défis de long terme, notamment démographiques, qui pourraient générer un déficit budgétaire pour les gouvernements infranationaux dans de nombreux pays, comme la Belgique, la Finlande, le Japon ou la Suède.
Quatre catégories de mesures de soutien
Les mesures mises en œuvre à ce jour dans les pays peuvent être classées en quatre catégories (Graphique 21). Elles incluent des mesures relatives aux recettes et aux dépenses (à la gestion financière, aux règles budgétaires et à l’endettement, y compris pour faciliter le financement par l’emprunt pour couvrir des besoins à court et à long terme). Les mesures relatives aux recettes et celles relatives aux règles budgétaires et à l'endettement semblent être les plus fréquemment utilisées, même si les dispositifs visant à améliorer la gestion financière sont également assez répandus. Par exemple dans l’UE, lors de l’enquête conjointe OCDE-CdR, 46 % des répondants ont indiqué en 2020 que certaines règles budgétaires avaient été assouplies ou allaient l’être (18 %) à court terme (OCDE-CdR, 2020[56]).
Les mesures relatives aux recettes comprennent la hausse des transferts intergouvernementaux pour les dépenses de fonctionnement et d’investissement existants ou la création de nouveaux fonds pour répondre à des besoins spécifiques (cas de nombreux pays, dont l'Allemagne, l'Autriche, la Bulgarie, le Chili, la Corée, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, les Flandres/la Belgique, la France, l'Italie, le Japon, la Lettonie, la Norvège, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Suède, etc.), l'accélération du versement des subventions, y compris l'augmentation et l'avance des fonds structurels de l'UE (Autriche), l'augmentation/l’avance des recettes non fiscales et des impôts, en particulier des parts infranationales des impôts nationaux (Autriche, Finlande, Canada, Lettonie, Pologne, Portugal), le développement de systèmes de compensation pour la perte de recettes fiscales et de redevances due à la récession ou à des décisions fiscales (Allemagne, Angleterre/Royaume-Uni, Wallonie/Belgique, Canada, Chine, Danemark, Estonie, France, Italie, Norvège, Pays-Bas, etc.), l'activation de fonds de secours et de réserves fiscales (États-Unis, Japon, Luxembourg, Mexique, République slovaque, République tchèque, etc.).
Dans certains pays, l’activation de mécanismes de péréquation a atténué disparités générées par la crise du COVID-19 entre les gouvernements infranationaux (Allemagne, Luxembourg, Suisse). Bien que les systèmes de péréquation puissent aider à atténuer les disparités régionales, leurs effets sont limités et dépendent de la formule de répartition utilisée. De surcroît, dans la mesure où un grand nombre de ces systèmes sont financés soit par des recettes perçues au niveau central soit part des transferts horizontaux entre les gouvernements infranationaux – tous susceptibles d’être affectés par la contraction de l’activité économique –, la durabilité de ces systèmes est sujet à questionnement. Dans une enquête du Réseau de l’OCDE sur les relations budgétaires, 8 répondants sur 17 s'attendent à une baisse du niveau total des transferts de péréquation. Au Canada, en revanche, un des deux systèmes de transferts existants devrait s’accroître (Formule de financement des territoires). Globalement, cela laisse entendre que les systèmes de péréquation pourraient avoir une influence pro-cyclique sur les finances des gouvernements infranationaux (OCDE, 2020[236]).
Les mesures relatives aux dépenses comprennent l’assouplissement des responsabilités en matière de dépenses (Slovénie), la réduction de certains postes de dépenses (taxes et contributions devant être pris en charge par les gouvernements infranationaux, par ex. en Pologne), le soutien temporaire à certains postes de dépenses (Allemagne), la sécurisation de projets d’investissement (Pologne), l’adaptation des procédures de passation des marchés publics (par ex., pour l’achat des équipements de protection personnelle, de test ou de traçage), et le soutien aux gouvernements locaux pour les aider à identifier des sources d’économies et d’efficience (Canada/Ontario).
Les règles budgétaires, qui visent à atténuer les risques au niveau infranational en fixant des limites à la politique budgétaire, sont susceptibles de générer des tendances pro-cycliques si elles sont trop rigides ou applicables sur une durée restreinte. Lors d'une crise, ces règles (règles d'équilibre budgétaire, seuils limites de dépenses, etc.), peuvent être assouplies de deux manières : en invoquant des clauses d’exceptions formelles dans des circonstances précises, et/ou en suspendant l'application effective des règles lorsque les gouvernements infranationaux ne peuvent raisonnablement pas les respecter (OCDE, 2020[236]). De nombreux pays ont eu recours à ces instruments : Allemagne, Flandre/Belgique, Chine, Danemark, Islande, Pologne, Portugal et République slovaque. Les mesures de soutien incluent aussi l’assouplissement des règles prudentielles en matière d’endettement (Colombie, Pologne, Portugal), la réduction du poids de la dette (Brésil, Italie) ainsi que la facilitation d’accès à l’emprunt à court terme et aux lignes de crédit (avec parfois des lignes de crédit COVID-19), le développement de l'accès à l’emprunt à long terme et aux marchés des capitaux (Mexique, obligations COVID-19 en Chine) en particulier pour les projets cofinancés par l’UE (Lettonie, Slovénie), ou l’établissement de facilités de trésorerie municipale (Réserve fédérale aux États-Unis, Italie).
Enfin, il existe diverses mesures liées à la gestion financière, comprenant par exemple la réduction du fardeau administratif par l'assouplissement des réglementations et la promotion de nouvelles pratiques. Cela couvre un large éventail de domaines, notamment la gestion budgétaire, la comptabilité (France, Italie, Pologne), le développement de l'utilisation des TIC dans la gestion financière, le soutien à la préparation d'analyses budgétaires prospectives infranationales et de plans de résilience budgétaire, l'introduction d'une plus grande flexibilité dans les pratiques de gestion du personnel et des contrats, l'aide aux gouvernements infranationaux pour lutter contre la fraude et l'évasion, le soutien aux entreprises publiques locales telles que les sociétés de transport public régionales et locales (Danemark, France, Italie).
Les mesures susmentionnées peuvent en outre être catégorisées selon leur durée de validité. Par exemple, l’attribution de subventions supplémentaires aux gouvernements infranationaux permet de compenser les pertes de recettes fiscales et d'accroître les recettes relativement rapidement. Le transfert ou la création de nouveaux impôts ou l’attribution de compétences fiscales élargies aux gouvernements infranationaux produisent des effets plutôt à moyen et à long terme, mais ne permettent pas toujours de répondre aux besoins immédiats. De même, le transfert de responsabilités au niveau infranational vers le niveau central en matière de prestation de services est un processus plus lent que le transfert de ressources supplémentaires aux gouvernements infranationaux pour assurer eux-mêmes ces services. Certaines mesures sont destinées à être temporaires tandis que d’autres peuvent être mises en œuvre de manière plus permanente.
Il est possible que les hausses des transferts des gouvernements centraux ou des états fédérés soient insuffisantes pour compenser pleinement les baisses des recettes issues des impôts et taxes, des redevances et droits d’utilisation et des revenus fonciers. À plus long terme, il est attendu que les gouvernements centraux réduiront probablement ces transferts pour rééquilibrer les budgets publics et restaurer la stabilité budgétaire, en ayant recours par exemple à des mesures d’austérité. Si, à court terme, le soutien des échelons supérieurs de gouvernement pourrait donc contribuer à combler le fossé budgétaire créé par la crise, les gouvernements infranationaux doivent se préparer à la phase de relance post-crise et à d'éventuels plans d’assainissement budgétaire. La crise devrait ainsi avoir des effets négatifs à moyen et long termes sur les finances des gouvernements infranationaux. En conséquence, il est important d’engager des réformes pour assurer la stabilité, la vigueur et la résilience des finances infranationales, ainsi que de les planifier et les mettre en œuvre avec soin.
Le soutien aux finances des gouvernements infranationaux peut également être indirect et prendre la forme d’un soutien apporté aux entités connexes comme les agences de transports publics ou les entreprises fournissant l’énergie ou d'autres services essentiels. En Allemagne, le gouvernement fédéral prendra en charge le coût des allocations de logement pour les bénéficiaires de l'aide sociale des municipalités (4 milliards EUR) et soutiendra les réseaux locaux de transports publics (2.5 milliards EUR) (BNP Paribas, 2020[237]). En Lettonie, les entreprises financées par des capitaux municipaux et dont le chiffre d'affaires a baissé de 50 % en raison de la crise du COVID-19 sont éligibles pour recevoir des crédits étatiques pour augmenter leur capital social et financer leurs frais d’entretien et de réparation. Aux États-Unis, la loi CARES prévoit une enveloppe de 25 milliards USD pour compenser une partie des pertes de recettes perçues par les agences de transport.
Les méthodes employées pour mettre en œuvre ces mesures varient d’un pays à l'autre, en fonction des relations budgétaires intergouvernementales existantes et de la culture et des pratiques en vigueur en matière de dialogue et de négociation entre les différents niveaux de gouvernement. Dans les pays où la coordination budgétaire est déjà bien développée et efficace, les mesures de soutien sont élaborées et examinées par les ministères compétents conjointement avec des représentants des gouvernements infranationaux. Dans plusieurs pays, les dispositifs d’aide d’urgence, les systèmes de compensation et les autres mesures financières ont ainsi été examinés et arrêtés en partenariat avec les associations nationales de collectivités locales, donnant lieu à des accords (formels ou informels).
Exemples par pays
En Australie, le gouvernement australien, les États fédérés et les territoires ont signé au début de la crise du COVID-19 un accord de partage des coûts couvrant les dépenses de santé publique engagées par les uns et les autres en lien avec la pandémie. Le 29 mai 2020, une nouvelle réforme du système de santé pour 2020-2025 a fait l'objet d'un accord entre le Commonwealth, les États et les territoires australiens. Cet accord fournit la garantie qu’aucun État ni territoire ne se retrouvera dans une situation plus difficile après la pandémie qu’il ne l’était avant (Federal Ministry of Health, 2020[238]). Par ailleurs, le gouvernement australien étudie en coopération avec les entités fédérées et les gouvernements locaux des moyens de mesurer l'incidence de la pandémie au niveau local et de cibler l’assistance nécessaire en matière de relance et de reconstruction à moyen et à long terme.
En Autriche, le Gouvernement a annoncé des mesures de soutien aux finances des états fédérés en 2021, parmi lesquelles des subventions exceptionnelles pouvant atteindre 1 million EUR pour financer des équipements dans le secteur de la santé. Les États fédérés devraient également être impliqués dans la mise en œuvre des nouveaux « tickets 1-2-3 » pour les transports publics, qui visent à favoriser la mobilité interrégionale (Ministère Fédéral des Finances, Autriche, 2020[239]). Au niveau municipal, le gouvernement fédéral a adopté un deuxième ensemble de mesures municipales en janvier 2021, en augmentant le soutien budgétaire aux municipalités de 1.5 milliard EUR pour atteindre un total de 2.5 milliards EUR. Cet ensemble se compose de trois mesures : une augmentation de la part des recettes fiscales municipales pour 2021, des avances exceptionnelles sur la part des recettes fiscales municipales, et une augmentation des fonds structurels pour les communautés particulièrement fragiles financièrement (Wiener Zeitung, 2021[240]).
En Belgique, les gouvernements régionaux ont annoncé des mesures de soutien aux finances locales. En Wallonie, les municipalités ont été autorisées en 2020 à accroître leur déficit budgétaire et encouragées à utiliser leurs réserves ou à recourir à l’emprunt pour favoriser la relance économique au niveau local (La Libre Belgique, 2020[241]). Du côté des recettes, la Wallonie apportera en 2021 une aide financière de 21 millions EUR aux municipalités et provinces sous sa juridiction, afin de compenser la disparition de plusieurs taxes et charges en 2020, notamment celles affectant les secteurs de la restauration, des loisirs et du tourisme (Wallonie Interieur SPV, 2020[242]). En Flandre, le gouvernement flamand a adopté plusieurs mesures en 2020 pour soutenir les municipalités, notamment : une subvention de 15 millions EUR pour réduire la pauvreté liée à la pandémie de COVID-19, un fonds d'urgence de 87 millions EUR pour soutenir les autorités locales dans les secteurs de la culture, de la jeunesse et des sports, un fonds pour encourager la mobilité durable (par exemple, à travers de nouvelles infrastructures locales pour faciliter les déplacements à pied et à vélo), et diverses subventions pour les infrastructures et le fonctionnement d'un centre de vaccination (Administration flamande, 2021[243]). Une plus grande flexibilité est aussi permise dans les budgets locaux (moyennant un suivi de l’incidence du coronavirus) (Gouvernement de Flandres, 2020[244]).
Au Brésil, en mai 2020, le gouvernement fédéral a adopté un plan de 120 milliards BRL comprenant diverses mesures en faveur des états fédérés et des municipalités. Dans le cadre de ce plan, les états ont reçu 30 milliards BRL en transferts non-affectés et 7 milliards BRL en transferts spécifiquement destinés à couvrir les coûts des soins de santé et des services sociaux ; les municipalités ont reçu 20 milliards BRL en transferts non-affectés et 3 milliards BRL en transferts affectés aux soins de santé et aux services sociaux. Le plan prévoit également la suspension et la renégociation des dettes auprès des banques fédérales, l'autorisation pour les gouvernements infranationaux de renégocier les prêts auprès des organismes internationaux et la suspension de la dette de l’organisme de sécurité sociale municipale (5.6 milliards BRL) (FTI Consulting, 2020[245]). De plus, en août 2020, le gouvernement fédéral a adopté une loi visant à indemniser les municipalités et les états pour les pertes de financement en provenance du Fonds de participation des municipalités et du Fonds de participation des états. Au début de la pandémie, le gouvernement fédéral avait utilisé une approche différente pour soutenir les municipalités, en réduisant la taxe à l'importation sur une liste de médicaments que les municipalités avaient jugés essentiels pour lutter contre la pandémie (KPMG, 2020[246]).
En Bulgarie, l'avant-projet de budget pour 2021 rendu public par le gouvernement central en octobre 2020 prévoit le versement de transferts supplémentaires aux communes pour compenser leurs dépenses engagées pour faire face à la crise du COVID-19. Dans ce contexte, 15 millions BGN seront transférés aux municipalités en 2020. En 2021, les ressources destinées à recouvrer les coûts engagés par les municipalités devraient s'élever à 30 millions BGN (National Association of Municipalities of Bulgaria, 2020[247]).
Au Canada, le gouvernement fédéral a soutenu les budgets municipaux en 2020 en fournissant des avances du Fonds fédéral de la taxe sur l'essence. Le gouvernement fédéral a fait part de son intention de réformer le Programme de stabilisation budgétaire afin d’en faire un filet de sécurité plus efficace pour les provinces qui font face à des baisses de revenus exceptionnelles. Depuis sa création en 1976, le Programme apporte un soutien financier à toute province qui subit une baisse de ses revenus non liés aux ressources naturelles supérieure à 5 %, ou à une baisse de ses revenus tirés des ressources naturelles supérieure à 50 %. Les versements sont actuellement plafonnés à 60 CAD par personne et par exercice fiscal (Gouvernement du Canada, 2020[248]). En outre, le gouvernement a également apporté un soutien direct aux provinces et aux territoires (24 milliards CAD), dans le cadre de l'accord Safe Restart, un accord fédéral-provincial visant à aider les gouvernements infranationaux à accroître les capacités de dépistage et de suivi des personnes infectées, à acheter des équipements de protection individuelle et à financer des mesures sanitaires renforcées pour protéger les personnes âgées et les plus vulnérables. Dans le cadre de ce financement, 2 milliards CAD sont destinés à aider les municipalités à couvrir les coûts de fonctionnement liés au COVID-19, et 2.4 milliards CAD sont destinés aux agences de transports publics. Le gouvernement fédéral a également créé le Fonds d’aide et de relance régionale (FARR), qui fournit des financements par le biais des agences de développement régional du Canada. Les provinces, qui sont responsables des municipalités situées dans leurs juridictions, ont commencé à leur verser une aide exceptionnelle. Ce soutien se poursuivra en 2021. Par exemple, la province de l'Ontario a annoncé au début de l'année 2021 un financement supplémentaire de 500 millions CAD pour les municipalités afin de les aider à faire face à la hausse des coûts de fonctionnement due à la pandémie et à maintenir les projets d'investissement. L'Ontario aide également les municipalités à réaliser des économies budgétaires et des gains d'efficacité grâce au Fonds de vérification et de responsabilisation et au Programme de modernisation des municipalités (Province de l’Ontario, 2021[249]).
Au Costa Rica, le gouvernement central a mis en œuvre certaines mesures visant à assouplir les seuils limites de dépenses des gouvernements infranationaux. Par ailleurs, le gouvernement central a établi un diagnostic des impacts économiques et fiscaux de la pandémie sur les gouvernements infranationaux afin d'apporter une réponse différenciée à chacun d’entre eux, en fonction de leurs besoins, et en coordination avec les eux (BID, 2020[250]).
Au Chili, le gouvernement a prévu le transfert de plus de 220 millions USD du Fonds de solidarité (Fondo Solidario) à 342 des 345 municipalités du pays afin de faire face à la crise du COVID et de contrer la baisse des revenus infranationaux. Une première enveloppe de 100 millions USD a été annoncée en mai 2020, et une seconde de 120 millions USD en juillet 2020 (SUBDERE, 2020[251]). Les montants transférés ont été établis en tenant compte de la population de chaque municipalité et de son niveau de vulnérabilité (SUBDERE, 2020[252]). Alors que les fonds étaient initialement destinés à couvrir les dépenses supplémentaires liées à la pandémie, telles que l'achat de médicaments, les conditions d’utilisation de la deuxième enveloppe ont été assouplies, permettant aux municipalités d’affecter les fonds à leurs dépenses générales de fonctionnement, à utiliser d’ici 2022. La loi de finances 2021 prévoit également une avance de trésorerie aux municipalités qui ont vu leurs recettes propres diminuer pendant la pandémie, et des modalités de remboursement plus souples (reportées à 2022). En novembre 2020, les maires des trois associations nationales de municipalités ont signé un protocole d'accord avec le gouvernement, afin de formaliser le soutien financier lié à la crise du Covid-19 (Portal Pirque, 2020[253]).
En Chine, le gouvernement poursuit la mise en œuvre planifiée des transferts de 2 000 milliards CNY aux gouvernements locaux pour lutter contre la pandémie (ODI, 2020[254]). Ce financement devrait être assuré en autorisant le ratio de déficit par rapport au PIB à dépasser 3.6 % (pour la première fois supérieur à 3 %) pour 2020, ce qui ajoute 1 000 milliards CNY au déficit budgétaire, et en émettant 1 000 milliards CNY d'obligations spéciales COVID-19 qui permettent aux gouvernements locaux d’affecter les fonds là où ils sont le plus nécessaires. Le gouvernement central a souligné que des mécanismes spécifiques de transfert seront mis en place pour accélérer la mise en œuvre de ces fonds, afin de garantir qu’ils ne soient pas retenus ou interceptés par l’échelon provincial (Yicai, 2020[255]). En février 2021, le gouvernement central a annoncé, pour 2021, l’objectif de ramener le ratio du déficit par rapport au PIB à 3.2 % et qu'aucune obligation spéciale COVID-19 ne serait émise cette année (S&P Global Ratings, 2020[256]).
En Colombie, le gouvernement a annoncé le 21 mai 2020 un ensemble de mesures budgétaires qui prévoient : une plus grande souplesse dans l’utilisation de plusieurs sources de recettes (recettes normalement affectées à des dépenses spécifiques) pour financer les dépenses de fonctionnement exceptionnelles ; la possibilité d’utiliser les ressources de la caisse de retraite nationale des entités territoriales (Fonpet) ; la possibilité de contracter des emprunts à court terme (lignes de crédit) qui ne seront pas pris en compte dans les taux d’endettement ; enfin, un assouplissement des règles en matière de dette.
En République tchèque, le gouvernement central a augmenté de 40 % ses transferts aux municipalités pour atténuer la baisse des recettes fiscales municipales en 2020. Chaque municipalité a reçu une prime de 1 250 CZK par habitant, sous forme de transfert non affecté (Gouvernement de la République tchèque, 2020[72]).
Au Danemark, les règles budgétaires ont été temporairement assouplies pour les municipalités, en levant les plafonds à la fois pour les dépenses de fonctionnement et d’investissements liées au coronavirus (Information, 2020[257]). Le gouvernement a également accordé un financement supplémentaire aux autorités locales afin de couvrir les dépenses liées à la pandémie (par exemple, pour financer les équipement de protection et de désinfection dans les écoles et les crèches) et de garantir le maintien du niveau de prestation de services (Ministère des Finances, 2020[258]). Après concertation entre le gouvernement central, l’association nationale des gouvernements locaux et les régions danoises, il a été décidé que les entreprises régionales de transport recevraient une compensation couvrant la totalité des dépenses supplémentaires et des pertes de recettes subies en 2020 à cause de la pandémie (KL, 2020[259])
En Estonie, les municipalités ont bénéficié d’un programme de soutien financier de 100 millions EUR du gouvernement central pour compenser les pertes de recettes, couvrir les coûts directs exceptionnels supportés par les municipalités du fait de la crise et financer des investissements publics supplémentaires pouvant favoriser la relance économique.
En Finlande, le gouvernement central a soutenu les municipalités en accordant des subventions temporaires relativement généreuses et en augmentant la part municipale de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Avec les décisions prises à la fin de l'année 2020, l'aide COVID-19 du gouvernement central aux municipalités s'élève à 5.1 milliards EUR en 2020 et 2021. Cela correspond à environ 6.6 % des dépenses totales des municipalités (Ministère des Finances, Finlande, 2020[260]). Le dispositif d’aide se compose de diverses mesures spécifiques de compensation et de soutien, définies pour la plupart à l'aide d'une formule de calcul. L'ensemble des mesures d'aide comprend, entre autres, une compensation de 600 millions EUR aux districts hospitaliers (qui sont des entités inter-municipales), une augmentation temporaire de 520 millions EUR de la part municipale des recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, une compensation de 2 milliards EUR des coûts directs causés par le COVID-19 pour les municipalités et une augmentation de 1.4 milliard EUR des subventions globales (Statistics Finland, 2021[261]). Les derniers rapports sur la situation économique des municipalités suggèrent que le soutien financier du gouvernement central a été suffisant pour couvrir à la fois les nouvelles dépenses et les pertes de revenus occasionnées par le COVID-19. Le système de compensation pour les municipalités repose sur des formules qui visent à mesurer les dépenses supplémentaires et les pertes de recettes auxquelles les municipalités ont dû faire face (Association of Finish Municipalities, 2020[262]).
En France, le plan d'urgence de 4.5 milliards EUR annoncé en mai 2020 a tenu compte de la situation budgétaire des différentes collectivités territoriales ainsi que des particularités de certaines (par ex., les communes touristiques). L'aide est principalement destinée aux communes (1.8 milliard EUR) et aux départements (2.7 milliards EUR) pour qu’ils puissent faire face aux besoins accrus en dépenses sociales. Le plan d'urgence comporte trois grands volets : i) les collectivités territoriales auront la possibilité d’enregistrer les dépenses de fonctionnement liées au COVID-19 dans un compte spécial et de les absorber sur trois années, voire de les financer par l’emprunt ; ii) l’actuelle dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) sera augmentée d’1 milliard EUR ; iii) les ressources garanties aux communes en 2020, reposant sur la compensation par le gouvernement des pertes de recettes fiscales et d'une partie des redevances d’utilisation (p. ex. stationnement) seront calculées en comparant les recettes de 2020 à la moyenne des recettes de 2017 à 2019. Ces mesures seront prolongées tout au long de l'année 2021, de même que de nouvelles mesures telles que l'indemnisation pour l'annulation des loyers et le soutien aux transports publics (Vie Publique, 2020[263]). L'annonce du plan de relance national en juillet 2020 a déclenché des mesures supplémentaires, notamment un soutien renforcé à l'investissement infranational, ainsi que de nouvelles mesures fiscales compensatoires suite à la baisse des impôts basés sur la production (notamment la taxe foncière sur les propriétés bâties - TFPB, et la contribution économique territoriale - CET, qui ont été réaffectées aux collectivités territoriales). Pour compenser cette perte, les mesures fiscales prévoient, entre autres, le transfert d'une partie de la TVA aux régions en remplacement de la part régionale de la CVAE, et une compensation basée sur la modification des bases d'imposition des taxes à la production pour les collectivités locales. Enfin, la stratégie de relance indique clairement qu'une plus grande attention sera accordée à l'orientation des ressources et des financements au niveau local plutôt qu'à partir du gouvernement central, et que les collectivités locales seront autorisées à élaborer des politiques publiques plus conformes aux besoins régionaux et à s'écarter des lois nationales, le cas échéant (Ministère des Finances, France, 2020[264]).
En Allemagne, le Parlement a suspendu le « frein à l'endettement » inscrit dans la Constitution, permettant ainsi aux Länder d'enregistrer des déficits pour répondre aux pressions budgétaires induites par la pandémie. En utilisant des allocations pré-approuvées de financement net, les Länder ont pu couvrir partiellement les déficits budgétaires en 2020, et ont la possibilité d'utiliser les fonds restants de ces allocations dans les années à venir pour financer les coûts et les pertes de revenus liés à la pandémie (Moody’s, 2021[265]). En outre, le gouvernement fédéral compense les pertes de recettes et verse des subventions supplémentaires pour compenser les dépenses liées à la crise. À l’échelle locale, le gouvernement fédéral et les gouvernements fédérés se sont mis d'accord en septembre 2020 sur un plan visant à aider les villes et les municipalités pendant la crise du COVID-19, et à maintenir la capacité d’investissement des municipalités au cours des prochaines années. En particulier, d'après ce plan, la première moitié des pertes de recettes subies par les municipalités en 2020 sera couverte par le gouvernement fédéral, et la seconde par les Länder. Par ailleurs, le gouvernement fédéral contribue également à compenser les coûts du logement et du chauffage des municipalités, augmente la participation fédérale aux dépenses d'aide sociale des municipalités, et accorde des subventions d’équipement supplémentaires pour les crèches, les hôpitaux, les transports publics, la transformation numérique et les services locaux de santé. Cette aide fédérale vient s'ajouter à celle apportée par les Länder aux autorités locales. Les Länder ont notamment décidé d'assouplir les règles budgétaires appliquées aux municipalités en suspendant la règle d'équilibre budgétaire et l’obligation d’adopter des mesures d’austérité et de gel des dépenses. La réglementation relative aux crédits à court terme a également été assouplie.
En Islande, conformément à la rallonge budgétaire de 2020, le gouvernement central verse aux municipalités une subvention supplémentaire de 30 millions ISK pour faire face aux difficultés engendrées par la crise du COVID-19 dans le domaine des services sociaux et de la protection des enfants. Cette aide s'adresse aux communes les moins peuplées du pays (Ministry of Transport and Local Governmment, Islande, 2020[266]). En décembre 2020, le gouvernement a lancé une consultation publique relative à un projet d’amendement de diverses lois relatives aux municipalités et au COVID-19. Le projet de loi a été rédigé par le ministère des Transports et des collectivités locales en collaboration avec l'Association des municipalités islandaises et le Fonds de la dette municipale. Il vise, entre autres, à garantir que les municipalités disposent d'une marge de manœuvre pour renforcer les investissements et faire face aux dépenses de fonctionnement imminentes induites par la pandémie. Il vise également à autoriser les municipalités à déroger à la règle de l'endettement et de l'équilibre de la loi sur les collectivités locales jusqu'en 2025, ainsi qu'à inclure des dispositions temporaires dans la loi sur le fonds d'emprunt municipal, afin de faciliter l'octroi de prêts aux municipalités (Icelandic Association of Local Authorities, 2021[267]).
En Italie, depuis mars 2020, trois plans budgétaires ayant un impact budgétaire direct en 2020 pour contrer les effets de la pandémie ont été adoptés, y compris des mesures de soutien aux gouvernements locaux et régionaux : le décret-loi nº 18 adopté le 17 mars (décret « Cura Italia ») ; le décret-loi nº 34 adopté en mai (décret « Recovery ») et le décret-loi nº 104 adopté en août 2020 (« Décret d'août »). Les mesures comprennent l’octroi de ressources supplémentaires pour compenser les coûts additionnels encourus par les gouvernements locaux et régionaux dans l’exercice de leurs fonctions. Au total, les fonds supplémentaires destinés aux gouvernements locaux s'élèvent à 5.17 milliards EUR pour 2020 (dont 4.22 milliards pour les municipalités), tandis que les fonds supplémentaires destinés aux autorités régionales et aux provinces autonomes s'élèvent à 4.3 milliards EUR (2.6 milliards pour les provinces autonomes et 1.7 milliard pour les régions de statut ordinaire). De plus, des ressources supplémentaires ont été allouées pour compenser la baisse des recettes des impôts locaux (86 millions EUR), pour soutenir les transports publics locaux et les chemins de fer régionaux, pour soutenir les autorités locales présentant un déficit structurel (180 millions EUR), et pour les litiges régionaux (210 millions EUR). Dans le cadre du Décret d’août, le Sud de l’Italie devrait bénéficier d’un traitement spécifique. Le décret n° 34/20 prévoit en outre la prise en charge de la dette des gouvernements infranationaux en leur permettant de renégocier ou de suspendre leurs hypothèques et autres types de prêts contractés auprès des banques, des intermédiaires financiers et de la Cassa Depositi e Prestiti en 2020. Le décret a également mis en place un fonds de 12 milliards EUR pour financer une avance de trésorerie permettant aux régions, provinces, gouvernements locaux et organismes de santé d'honorer une partie de leurs dettes liquides et arriérés de 2020. Des mesures de soutien à l'investissement infranational ont également été adoptées (Ministère des Finances, Italie, 2020[268]). Enfin, les règles comptables des collectivités locales ont été modifiées pour permettre aux gouvernements locaux d'utiliser la portion disponible de l'excédent de gestion, ainsi que le produit des permis de construire et des sanctions, pour financer les dépenses courantes liées à la gestion de la pandémie en 2021.
En Corée, le gouvernement a mis en œuvre plusieurs programmes pour stimuler l’économie, y compris des mesures visant à soutenir les gouvernements locaux. Le premier plan de relance de 4 000 milliards KRW incluait une aide relative aux taxes domestiques et aux impôts locaux. La rallonge budgétaire d'un montant de 11 700 milliards KRW en 2020 prévoyait notamment un soutien à la ville de Taegu et à la province du Gyeongsang du Nord, très durement touchées par la pandémie (MOEF, 2020[269] ; Gouvernement de la Corée, 2020[230]). Le New Deal coréen inclut également un soutien aux gouvernements locaux, en particulier pour amorcer leur relance.
En Lettonie, le projet de stratégie budgétaire 2021 prévoit une augmentation de la subvention spéciale aux gouvernements locaux de 10 % par rapport à l'année précédente, ainsi qu'une redistribution de l'IR entre les gouvernements locaux et le gouvernement central (respectivement 75 % et 25 %, contre 80 % et 20 % en 2020). Le gouvernement a également augmenté le plafond d'emprunt des autorités locales (Ministère des Finances, Lettonie, 2021[270]).
Au Luxembourg, dans une circulaire de mai 2020, le ministère de l’Intérieur a indiqué la possibilité d'activer plusieurs mécanismes pour limiter les déficits budgétaires municipaux et couvrir les besoins en matière de dépenses, y compris à travers le recours à des fonds de précaution, l’activation d’un Fonds communal de péréquation conjoncturel (FCPC) et l’emprunt.
Au Mexique, le Fonds de stabilisation des recettes pour les entités fédérées (FEIEF) est un fonds de précaution géré par le gouvernement fédéral. En juillet 2020, le gouvernement fédéral a transféré 10 milliards MXN aux entités fédérées par le biais de ce fonds, afin de compenser la baisse des subventions du gouvernement central due à la crise économique (El Economista, 2021[271]). 20 % de ce montant est affecté à l’aide aux municipalités (Aristegui Noticias, 2020[272]). Le fonds est toutefois alimenté par les revenus pétroliers et les contributions fédérales, qui sont en baisse (Fitch Ratings, 2021[273]). Pour atténuer l'impact sur les gouvernements des états, le transfert des ressources du Fonds est effectué mensuellement, plutôt que trimestriellement. Le gouvernement envisage des mesures supplémentaires pour alléger la pression budgétaire sur les gouvernements fédérés et les municipalités, telles que des transferts fédéraux et une modification de certaines réglementations pour accroître les possibilités de financement sur les marchés financiers.
Aux Pays-Bas, le gouvernement central et l’association des municipalités (VNG) ont conclu des accords pour compenser les diverses dépenses supplémentaires et baisses de recettes dues à la crise du COVID-19 au niveau local. Des accords spécifiques ont en outre été conclus localement concernant le mode d'évolution des niveaux de compensation au fur et à mesure de la crise, par exemple pour compenser : les pertes de recettes ainsi que l'augmentation des coûts des services de santé municipaux (GGD) et des services de sécurité ; les dépenses supplémentaires résultant de la loi provisoire anti-COVID-19, notamment en matière de contrôle et de répression ; la hausse des coûts liés aux transports publics ; enfin, la garantie de revenu temporaire et le dispositif de prêts pour les travailleurs indépendants (Tozo).
En Norvège, les municipalités ont reçu une enveloppe de 17.7 milliards NOK pour compenser les effets de l'épidémie de COVID-19. Un soutien financier supplémentaire direct a été apporté aux municipalités et aux comtés pour compenser les dépenses liées au COVID et la perte de recettes infranationales. Le financement est assuré sous forme de subvention, avec une part de fonds discrétionnaires. Un fonds spécifique a été mis en place pour les municipalités les plus vulnérables. Le ministre des Collectivités locales et de la Modernisation a demandé aux gouverneurs des comtés de dresser une carte de la situation dans leur comté afin d'identifier les municipalités ayant subi des coûts particulièrement élevés en raison de la crise du COVID-19, et de déterminer celles qui recevront les fonds (Ministry of Local Government and Modernisation, 2020[274]). Ces mesures ont été conçues en collaboration avec des représentants du gouvernement central et des gouvernements locaux, par l'intermédiaire d'un groupe de travail créé par le gouvernement pour évaluer les conséquences économiques de la pandémie pour les municipalités, dont les travaux se poursuivront jusqu'en août 2021. (Ministry of Local Government and Modernisation, 2020[275]).
En Pologne, le gouvernement central a mis en place des dispositifs anti-crise nommés « Bouclier anti-crise ». En mars 2021, il s’agissait de la version 8.0. Des mesures de soutien aux autorités locales étaient incluses dans le « Bouclier anti-crise 4.0 » adopté en juin 2020. Afin de compenser la diminution des recettes, en particulier des recettes fiscales, la loi comprend une série de mesures destinées aux gouvernements infranationaux : augmentation de la part des comtés et des villes ayant le statut de comté dans les recettes provenant de la gestion des biens immobiliers du Trésor public ; possibilité pour 2020 de dépasser le ratio d'équilibre des recettes et des dépenses de fonctionnement à hauteur du montant de la perte de recettes causée par l'épidémie de COVID-19 ; assouplissement des règles relatives à la dette (possibilité d'augmenter le plafond de la dette à hauteur de la diminution des recettes fiscales ; possibilité de reporter les paiements effectués par les autorités locales (ex. les taxes versées par les autorités locales au Trésor public) ; augmentation de la flexibilité dans l’utilisation des fonds provenant de la taxe sur les boissons alcoolisées en 2020 et des paiements anticipés sur les subventions (Gouvernement de la Pologne, 2020[276]). Le gouvernement a également mis en place un Fonds d’investissement local (voir ci-dessous).
Au Portugal, il a été annoncé que les dépenses municipales engagées pour surmonter la crise du COVID-19 dépasseront les limites d’endettement prévues dans la loi de finances locales. Un assouplissement des règles d'équilibre budgétaire et des règles en matière de dépenses a été approuvé, ainsi que le report du remboursement au Fonds de recouvrement des municipalités (Ministère des Finances, 2020[277]). Par ailleurs, la procédure d'approbation des prêts à court terme a été simplifiée et le recours à l’emprunt à moyen et à long terme a été facilité (aucune autorisation préalable n’est nécessaire pour les assemblées municipales). De plus, les gouvernements locaux peuvent demander le versement à l’avance/rapide de la part des impôts nationaux qui leur est allouée. Le soutien aux trésoreries municipales inclut également la possibilité d’utiliser le solde cumulé des exercices antérieurs.
En Russie, le soutien aux gouvernements infranationaux relève de deux catégories : des mesures structurelles, et des mesures de soutien à la trésorerie. Les mesures structurelles comprennent l'augmentation des transferts du gouvernement fédéral et la suppression temporaire des limites légales aux déficits budgétaires et au poids de la dette (S&P Global, 2020[278]). Au cours des huit premiers mois de 2020, les régions ont reçu 2.13 billions RUB de transferts du gouvernement fédéral, soit une augmentation de 697 milliards RUB par rapport à la même période de 2019. Pour 2021, les régions devraient recevoir 100 milliards RUB de subventions du gouvernement fédéral (Intellinews, 2020[279]). Les mesures de soutien à la trésorerie comprennent le report des paiements des crédits budgétaires, une facilité de trésorerie à court terme et la possibilité pour les régions de s'accorder des crédits budgétaires entre elles (S&P Global, 2020[278]). Le report des paiements des crédits budgétaires s’étendra jusqu’en 2034, les sommes nouvellement libérées étant utilisées par les régions pour soutenir les mesures de lutte contre la pandémie (Klimanov et al., 2020[280]).
En République slovaque, le plan Lex Korona annoncé le 31 mars prévoit des mesures de soutien aux municipalités et aux entités territoriales de niveau supérieur (régions) pour les aider à financer leurs dépenses extraordinaires et à combler la perte de recettes fiscales. Jusqu’à la fin 2021, les autorités locales pourront recourir aux fonds de réserve, aux revenus du capital et à l’emprunt pour couvrir leurs dépenses de fonctionnement. Par ailleurs, plusieurs règles budgétaires ont été assouplies, dont la possibilité de percevoir des avances de fonds publics, ainsi que les règles de discipline budgétaire (notamment la possibilité d’enregistrer un déficit budgétaire) (Ministère des Finances, République slovaque, 2020[281]).
En Slovénie, le projet de budget pour 2021 indique le niveau de financement adéquat pour les municipalités et souligne leurs besoins. Il reconnaît que le développement du pays dépend du potentiel de développement des communes et de leur rôle dans l’absorption des fonds européens. En novembre 2020, la commission parlementaire chargée des affaires intérieures, de l’administration publique et des collectivités locales autonomes a examiné et approuvé le projet de loi d'aide financière aux municipalités (ZFRO). Ce texte prévoit en substance que l’État financera à la place des communes l'assurance santé obligatoire des ressortissants slovènes et des étrangers sans emploi. Les autres mesures incluent notamment le versement d'aides supplémentaires pour les communes ayant des camps de Roms, l’autorisation pour les municipalités d’emprunter pour des projets européens d’investissement immatériel, et l'utilisation plus flexible par les communes des aides à l’investissement provenant du gouvernement central, sous forme de transferts (ZMOS, 2020[282] ; République de Slovénie, 2020[283]).
En Espagne, le décret-loi royal 8/2020 portant sur les mesures d’urgence extraordinaires visant à faire face aux conséquences économiques et sociales du COVID-19 prévoit une mesure de soutien aux finances locales. Les gouvernements locaux sont autorisés à utiliser leurs excédents budgétaires pour financer leurs dépenses au titre des services sociaux. Un fonds social extraordinaire a également été créé. Au niveau régional, un fonds dédié a été mis en place pour que les Communautés autonomes puissent lutter contre le coronavirus et atténuer les conséquences économiques de la crise. Ce fonds est affecté à trois grandes catégories de dépenses : les soins de santé (9 milliards EUR), l'éducation (2 milliards EUR) et la compensation de la baisse de l'activité économique (5 milliards EUR). Les fonds sont distribués en fonction de divers critères, notamment l'incidence du virus dans les territoires, les admissions en soins intensifs et la population. Ce fonds COVID-19 ne sera pas comptabilisé comme une dette publique régionale, et les communautés autonomes sont responsables de son affectation sur leur territoire (OMS, 2021[284]). Les différentes communautés autonomes ont, en parallèle, développé des programmes de soutien pour les municipalités relevant de leur compétence. Le gouvernement catalan a développé un flux de financement pour couvrir les dépenses des gouvernements locaux liées au COVID-19. L'Andalousie a dévoilé un programme de collaboration financière exceptionnelle, destiné aux gouvernements locaux dont la population est égale ou inférieure à 1 500 habitants, dans le but de renforcer et de garantir la prestation de services publics dans ces territoires pendant la crise (Junta de Andalucia, 2021[285]).
En Suède, le gouvernement central a présenté en septembre 2020 des amendements au budget de l’année ainsi que son projet de budget pour 2021. Il a également approuvé une enveloppe supplémentaire de 10 milliards SEK pour 2021 sous forme de transferts non affectés aux municipalités (qui recevront 70 % du montant total) et aux régions (30 %), et de 5 milliards SEK pour 2022. Cette dotation s'ajoute aux 5.5 millions SEK versés aux communes pour les aider à couvrir les dépenses liées au COVID-19 en 2020, notamment dans le cadre de la gestion de crise ainsi que pour les conseils et le soutien psychologique au personnel travaillant dans le secteur de la santé et des soins aux personnes âgées. Le gouvernement central investit en outre 250 millions SEK sur 2021-2023 pour mettre en place une nouvelle délégation municipale. Le but est d'apporter de l'aide aux communes et aux régions confrontées à de grosses difficultés (Ministère des Finances, Suède, 2020[286]).
Au Royaume-Uni, des ressources supplémentaires sont attribuées aux trois nations investies de compétences déléguées pour couvrir les dépenses de santé, de soutien aux gouvernements locaux et les dépenses relatives aux transports publics. L’enveloppe globale de près de 19 milliards GBP pour 2020 se répartit comme suit : 9.7 milliards GBP pour le gouvernement écossais, 5.85 milliards GBP pour le gouvernement gallois et 3.3 milliards GBP pour l’exécutif nord-irlandais. Les fonds restants sont alloués selon la formule Barnett, en plus des allocations régulières. Un montant supplémentaire de 2.4 milliards GBP a été annoncé pour 2021-22, à répartir selon la formule Barnett (1.2 milliard GBP pour le gouvernement écossais, 740 millions GBP pour le gouvernement gallois, 410 millions GBP pour l'exécutif d'Irlande du Nord), et 1.4 milliard GBP de financement en dehors de la formule Barnett (HM Treasury, 2021[287]). Les nations décentralisées décident des mesures de lutte contre le COVID-19 sur leur territoire, et son responsables d’une aide financière d'urgence pour les gouvernements locaux (Institute for government, 2021[288]). En ce qui concerne les conseils locaux d'Angleterre, le gouvernement britannique leur a accordé une aide financière d'un montant maximal de 10 milliards GBP, répartie entre une première enveloppe de 7 milliards GBP en 2020 et une enveloppe supplémentaire d'environ 3 milliards GBP en 2021. L’enveloppe de 2021 est le résultat d'une consultation publique lancée début 2021. Sur les 3 milliards GBP en 2021, 52 % sont transférés sous forme de subventions non affectées aux conseils locaux, 27 % font partie d'un système de garantie visant à compenser 75 % des pertes fiscales locales pour 2020-21 et 22 % sont consacrés au soutien des conseils engagés dans la réduction des factures d'impôts locaux. Les nouvelles mesures comprennent également la prolongation du régime de soutien aux revenus perçus sur les ventes, les tarifs et les charges jusqu'en juin 2021. Ce régime vise à indemniser les conseils locaux pour les pertes générées par le recul des prestation de service, couvrant jusqu'à 75 % de la perte déclarée, y compris une franchise de 5 % (Gouvernement du Royaume-Uni, 2021[289]). Les nations décentralisées ont également mis en œuvre leurs propres mesures pour soutenir les gouvernements locaux sous leur juridiction. Au Pays de Galles, cela a consisté principalement à augmenter les transferts du gouvernement gallois vers les autorités locales de 3.8 % en 2021-22 (Parlement du Pays de Galles, 2021[290]). Le gouvernement écossais, quant à lui, a mis en place un fonds discrétionnaire de 30 millions GBP, qui est distribué sous forme de subvention unique à chaque autorité locale pour les aider à apporter un soutien supplémentaire aux entreprises de leur région. Ce fonds vise à permettre aux autorités locales d'apporter un soutien financier supplémentaire à la communauté des entreprises, lorsqu'elles le jugent nécessaire, sur la base de critères spécifiques de leurs économies locales. (Gouvernement de l’Écosse, 2021[291]).
Aux États-Unis, sur les 2 000 milliards USD du plan CARES (Coronavirus Aid, Relief, and Economic Security), 150 milliards USD ont été affectés sous forme de subventions dans le cadre du fonds d'aide pour le coronavirus (CRF) afin d’aider les gouvernements fédérés et locaux à couvrir les dépenses directement liées au coronavirus. Le CARES Act a également affecté 30.75 milliards USD au Fonds de stabilisation pour l’éducation. Les fonds du CRF ont été généralement transférés aux gouvernements fédérés en fonction de leur population, ou pouvaient être directement acheminés vers les gouvernements locaux dont la population était supérieure à 500 000 habitants. Initialement, le CRF pouvait être utilisé pour couvrir les dépenses non budgétées liées au coronavirus, engagées entre le 1er mars et le 30 décembre 2020 (Congressional Research Service, 2021[292]). Par ailleurs, la « Families First Coronavirus Response Act » (loi « Familles d'abord » dans la lutte contre le coronavirus) a augmenté de 6.2 points de pourcentage la part du programme Medicaid allouée aux États. La date d'utilisation des fonds a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2021 par le Consolidated Appropriations Act de 2021 (US Department of the Treasury, 2021[293]). Pour aider les gouvernements fédérés et locaux à faire face aux tensions sur leur trésorerie provoquées par la pandémie, la Réserve fédérale a mis en place une facilité de trésorerie municipale, accordant jusqu’à 500 milliards USD de prêts aux États et aux municipalités (Federal Reserve, 2020[294]). Ces mesures ont été complétées par la législation sur les fonds de redressement fiscal des états et des gouvernements locaux, adoptée en février 2021 dans le cadre de la loi sur le plan de sauvetage américain de 1 900 milliards USD. Le projet de loi comprend une enveloppe de 350 milliards USD (répartis entre 195.3 milliards USD pour les États, 65.1 milliards USD pour les comtés et 65.1 milliards USD pour les municipalités, 20 milliards USD pour les nations tribales et 4.5 milliards USD pour les territoires américains). Les formules de répartition varient selon les types de gouvernements infranationaux: les dotations de chaque état seront basées sur la proportion de chômeurs, tandis que celles des municipalités seront principalement basées sur la population et la pauvreté, et celles des comtés sur la part de chaque comté dans la population totale des États-Unis (Center on Budget and Policy Priorities, 2021[295]).
Pistes d’action
Encourager le dialogue et la coordination budgétaire entre les différents niveaux de gouvernement et les parties prenantes – notamment avec les associations nationales de gouvernements locaux et d’autres organes consultatifs – concernant l’incidence de la crise sur les budgets, en s'appuyant sur des éléments et données partagés, dans une démarche prospective.
Continuer à soutenir les gouvernements infranationaux pour réduire le déficit lié à la baisse des recettes et à la hausse des dépenses pendant la crise du COVID-19, afin d’éviter le sous-financement ou le non-financement de leurs mandats, et d'éventuelles compressions importantes des dépenses de fonctionnement et d’investissement infranationales, et aider ces autorités à participer aux plans de relance.
Mettre en place des programmes spéciaux de subvention des gouvernements centraux et fédérés dans les pays fédéraux, pour aider à combler les déficits budgétaires.
Étudier la possibilité de mettre en place d’autres instruments et mesures budgétaires – notamment des dispositifs fiscaux, un assouplissement des règles budgétaires, un accès facilité au financement externe (dette) – et adopter des outils de gestion financière plus souples, modernes et innovants. Certaines mesures devraient rester temporaires tandis que d'autres pourraient être plus permanentes.
Promouvoir les réformes de la gestion financière au niveau infranational, et l’amélioration de l’efficacité des dépenses et des recettes pour rétablir la stabilité budgétaire et accroître la résilience sur le moyen et le long terme.
Entreprendre une révision approfondie des mécanismes de financement des gouvernements infranationaux, afin d’améliorer la résilience et la souplesse budgétaires à l’aide d'un meilleur équilibrage des sources de revenus (impôts, subventions, prêts et autres) et des postes de dépenses, ainsi que d'une plus grande autonomie et réactivité, de manière à pouvoir s'adapter aux besoins de financement et aux baisses des recettes survenant en particulier en temps de crise, mais aussi de prendre en compte les défis à plus long terme (par exemple, les grandes tendances démographiques).
Prendre en considération l’impact différencié de la crise dans le soutien national aux gouvernements infranationaux :
Évaluer le degré d'asymétrie et différencier les aides pour qu’elles tiennent compte des impacts différenciés du COVID-19.
Répartir l'aide financière aux gouvernements infranationaux de manière transparente.
Envisager d’accorder un poids plus important aux collectivités locales dont la population compte un nombre plus important de personnes âgées, d’enfants et de groupes vulnérables, afin de tenir compte du coût plus élevé qu’ils représentent en termes de dépenses lors de la crise du COVID-19.
Réviser et renforcer les mécanismes de péréquation existants pour lisser les effets de la crise et réduire les disparités locales et régionales tout en favorisant la cohésion sociale.
Veiller à ce que les programmes d'aide liés au COVID-19 soutiennent les gouvernements infranationaux au-delà de l’horizon 2020-2021, et promouvoir des approches pluriannuelles :
Concevoir des programmes d’aide pouvant être mis en œuvre et ajustés sur plusieurs années pour tenir compte des effets différés.
Évaluer l’efficacité des mesures d’aide.
Encourager une planification et une budgétisation pluriannuelles au niveau infranational pour pouvoir adapter les systèmes budgétaires à l’évolution des recettes et des besoins en matière de dépenses.
Mettre en place des fonds de stabilisation, de précaution, et des réserves, ou encourager les gouvernements infranationaux à le faire à titre individuel.
Améliorer la collecte, la diffusion et l’échange de données fiables et transparentes sur les finances infranationales (flux financiers, actif et passif).
Encourager les gouvernements infranationaux à réaliser des analyses budgétaires prospectives/prévisionnelles et à élaborer des plans de financement d'urgence.
Investir dans les TIC et les outils d’administration électronique pour la gestion budgétaire et financière, ainsi que dans le recrutement d’administrateurs pour la gestion et les décisions financières, en particulier en temps de crise budgétaire.
Stratégies de relance de l’investissement public
Stratégies nationales de relance de l’investissement public
En premier lieu, les mesures budgétaires prises pour lutter contre le COVID-19 ont privilégié les entreprises et les ménages. Depuis juin 2020, de nombreux gouvernements nationaux ont annoncé de vastes plans de relance économique axés principalement sur l’investissement public. Next Generation EU, le plan de relance de l’UE (Encadré 1), met l’accent sur la relance de l’investissement public. Ces plans de relance de l’investissement cherchent à stimuler l’emploi et la croissance économique, tout en maintenant trois axes d’action sur le long terme : i) le renforcement des systèmes de santé ; ii) la transformation numérique ; iii) l’accélération de la transition vers une économie neutre en carbone. L’OCDE et le FMI ont lancé un vibrant appel à l’accroissement de l’investissement public pour relever les défis posés par la crise du COVID-19. Les gouvernements infranationaux jouent un rôle majeur en la matière, puisqu’ils sont responsables de 57 % de cet investissement dans les pays de l’OCDE.
Il est important que les stratégies de relance de l'investissement aient explicitement une dimension territoriale. Si cet aspect est plus visible dans certains pays (par exemple en Australie, au Canada ou en France), il est encore négligé dans le plus grand nombre. Un autre point très important est de permettre très tôt aux gouvernements infranationaux – non seulement les municipalités mais aussi les régions – de participer activement à la mise en œuvre de ces stratégies.
L'investissement dans des infrastructures de qualité fait partie des réponses à apporter à la crise actuelle (OCDE, à paraître[296]). Les gouvernements centraux et infranationaux doivent investir davantage, d'une part en faisant un meilleur usage des ressources budgétaires existantes et potentielles, et d'autre part en mobilisant les ressources du secteur privé. Selon le Moniteur des finances publiques du FMI, une hausse de l’investissement public de 1 % du PIB dans les économies avancées et les marchés émergents permettrait d'accroître le PIB de 2.7 % et l'investissement privé de 10 %, ainsi que de créer entre 20 et 33 millions d’emplois, à la fois directement et indirectement (FMI, 2020[209]). Les gouvernements locaux, régionaux et centraux doivent en outre investir de façon plus intelligente en classant les besoins par ordre de priorité, en mettant l’accent sur les domaines qui seront prioritaires après la crise (santé, infrastructures numériques et environnementales) et en améliorant la gestion de l’investissement public à tous les niveaux de gouvernement (OCDE, à paraître[296]).
Les besoins en infrastructures étaient déjà forts avant la crise du COVID-19, tant du point de vue des nouvelles constructions que de l’exploitation et de l’entretien du parc existant. Par exemple, l’OCDE avait estimé en 2017 que 95 000 milliards USD d’investissements publics et privés seront nécessaires dans les infrastructures énergétiques et hydrauliques et les infrastructures de transport et de télécommunications au niveau mondial entre 2016 et 2030 (OCDE, 2017[297]). Les villes et régions ont des besoins élevés en maintenance des infrastructures et en nouveaux investissements dans les énergies renouvelables, les bâtiments sobres en carbone, l’efficacité énergétique, les systèmes de gestion de la pollution et des déchets ainsi que les transports publics propres. Les pays développés devront investir massivement dans les infrastructures, notamment pour entretenir, améliorer ou remplacer les infrastructures existantes (souvent obsolètes). Aux États-Unis, par exemple, selon la American Society of Civil Engineers, les besoins d’investissement s’élèvent à 4 500 milliards USD d’ici 2025 pour réparer les routes, ponts, barrages et autres infrastructures du pays, tout comme les établissements scolaires et les aéroports. Les problématiques sont similaires en Europe. En Allemagne, la KfW, banque d'investissement de l’État allemand, estime que les municipalités devraient dépenser au moins 138 milliards EUR pour combler le déficit d’investissements urgents dans les infrastructures.
Les programmes d'investissement public aux niveaux national et infranational visent à stimuler l'emploi et la croissance économique à court et moyen terme, tout en répondant aux priorités à long terme et en maintenant de bonnes pratiques d'investissement. Les gouvernements ont une marge de manœuvre sur ces priorités, de par leurs choix et stratégies en matière d’investissement. Les grands projets d'investissement, tels que les nouvelles infrastructures de transport, nécessitent de nombreuses années de planification et de réalisation, ce qui signifie que tout effet de stimulus sera effectif sur une longue période (Forum international des transports, 2021[298]). Les projets d'investissement plus petits, ou les programmes d'investissement évolutifs, peuvent être mis en œuvre plus rapidement, mais ils doivent néanmoins répondre à des priorités de long terme et éviter d'être mis en œuvre sans coordination intergouvernementale. Pour équilibrer ces priorités, de nombreux gouvernements cherchent à réaliser des investissements publics rapidement en utilisant les cadres d'investissement existants et en distribuant directement des fonds supplémentaires aux gouvernements locaux et régionaux (par exemple, aux États-Unis, en Australie et dans l'Union européenne). Investir dans les retards de maintenance identifiés (lorsque l'infrastructure sous-jacente ne devient pas obsolète) peut aider à répondre aux priorités à long terme et permettre l'utilisation des cadres d’investissement existants, ce qui peut favoriser des investissements rapides et de meilleure qualité. Le fait de cibler et de décentraliser les responsabilités en matière d’investissements aux gouvernements locaux et régionaux peut permettre de mettre en œuvre des stratégies d’investissement territorialisées pour la relance, qui répondent aux besoins locaux, et peut constituer l'un des moyens les plus rapides de réaliser les investissements (Forum international des transports, 2021[298]).
Les stratégies de relance de l’investissement doivent cibler un petit nombre de domaines prioritaires, à travers une approche coordonnée entre les différents niveaux de gouvernement, et une bonne gestion, comme le souligne la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur l’investissement public efficace entre niveaux de gouvernement (OCDE, 2014[299]). Ces stratégies doivent aller de pair avec des politiques publiques ambitieuses et conçues sur le long terme pour lutter contre le changement climatique et les atteintes causées à l’environnement. Les stratégies de relance post-crise sont pour les États une occasion unique d'allouer des fonds à des initiatives durables et de prendre des mesures pour réduire l'intensité carbone des activités économiques. Des infrastructures technologiquement avancées, durables et résilientes peuvent poser les jalons d’une reprise économique post-COVID qui soit inclusive (WEF, 2020[300]). Au-delà de l’investissement dans les infrastructures matérielles, les besoins d'investissements dans la formation professionnelle, l’innovation et la recherche-développement doivent également être pris en compte. Il faudra veiller en particulier à ce que les investissements découlant des programmes de relance n’engendrent pas des coûts importants pour l’économie dans les décennies à venir en raison de la dévalorisation des actifs, et éviter par exemple les investissements qui misent sur des technologies en perte de vitesse ou implantent des projets dans des zones à haut risque d’inondation (Banque mondiale, 2020[301]).
Lors de la réflexion sur les stratégies de relance de l’investissement à mettre en œuvre dans le contexte du COVID-19, il est important de tirer les enseignements des erreurs commises au moment de la crise de 2008 afin d’éviter de les reproduire (OCDE, 2020). Bien que de nombreux projets d'investissement public puissent être lancés sur le court terme, il convient d’être prudent et de ne pas se précipiter. Un équilibre doit être trouvé entre la répartition des financements sur des projets d’infrastructure de faible ampleur, dans le but de dépenser l’argent rapidement, et l’investissement dans des priorités de long terme (telles que la durabilité et la résilience). Lors de la mise en œuvre des stratégies de relance de l’investissement en 2008-09, le financement a été parfois alloué de façon fragmentée à de petits projets à l’échelle municipale (et non régionale). En Espagne, par exemple, alors que le plan de relance de 2008 autorisait les demandes groupées de fonds publics pour des investissements locaux, la plupart des municipalités n’en ont pas profité. Seules six communautés de communes sur plus d'un millier ont sollicité un financement mutualisé. Dans le contexte de la crise du COVID-19, les stratégies nationales de relance de l’investissement devraient mettre à contribution les niveaux intermédiaires de gouvernement, à savoir les régions, les états fédérés et les provinces. Il convient d'aider les autorités régionales et locales à développer les capacités requises pour gérer les programmes d'investissement lorsqu'elles n'en disposent pas encore.
Soutien de l’investissement public au niveau infranational
L'investissement public des gouvernements infranationaux sera une composante majeure de la relance à l’issue de la crise du COVID-19. Les gouvernements infranationaux représentent en moyenne 57 % de l’investissement public dans les pays de l’OCDE et elles sont en première ligne pour gérer la crise. Ils sont en outre en mesure d'apporter une dimension territoriale aux plans de relance, qui tienne compte des chocs sociaux et économiques sur les économies locales, ce qui est particulièrement important étant donné les impacts hétérogènes du COVID-19 au niveau régional. Les gouvernements infranationaux sont en revanche très vulnérables aux répercussions financières de la crise du COVID-19 et peuvent avoir besoin de renforcer leurs capacités pour pouvoir mettre en œuvre des investissements publics efficaces.
Les conséquences de la crise du COVID-19 sur les budgets infranationaux dépendent dans une large mesure du soutien apporté par le gouvernement central ou fédéral pour maintenir ou dynamiser l'investissement infranational à l’aide de plans de relance (des transferts de capitaux) ainsi que pour renforcer la capacité des gouvernements infranationaux à accéder à des prêts de longue durée. Bien qu’ils soient attentifs à la viabilité des finances publiques sur le long terme, les pays doivent absolument éviter de reproduire le scénario qui a eu lieu après 2010, lorsque la baisse radicale de l’investissement public infranational a eu un effet pro-cyclique empêchant la relance. Dans certaines villes et régions, des projets d’investissement public ont ainsi d’ores et déjà été annulés ou reportés.
Plus des deux tiers des gouvernements infranationaux ayant répondu à l’enquête OCDE-CdR en juillet 2020 indiquent que la transition vers une économie durable et à faible teneur en carbone devrait constituer un volet majeur de la politique du développement régional sur le long terme. En revanche, moins de la moitié des répondants envisageaient alors d’utiliser les plans de sortie de crise et les stratégies de relance pour promouvoir une politique plus orientée vers l’écologie ou le développement durable. Or, il est capital que les gouvernements infranationaux tirent au mieux parti des plans de relance, en y intégrant des priorités écologiques et climatiques.
Différents instruments et leviers ont été activés pour maintenir, voire accélérer, les projets d'investissement public au niveau infranational (Graphique 22). Outre l’amélioration de la capacité d’autofinancement, c’est-à-dire l'épargne brute, ces mécanismes incluent divers instruments budgétaires classiques comme l’assouplissement des règles budgétaires, l’augmentation des transferts et des subventions d’investissement, l’accès facilité à des financements de long terme sur les marchés financiers et le marché du crédit, et l’accompagnement dans la préparation et la mise en œuvre de projets. D'autres mécanismes de financement pourront être activés à l’avenir, comme les programmes de partenariat public-privé ou le financement sur fonds propres.
Dans l'UE, seule une minorité de gouvernements centraux ont activement impliqué les gouvernements locaux et régionaux dans les consultations relatives aux plans nationaux de relance et de résilience (CdR-CCRE, 2021[302]). Leur participation au processus de gouvernance semble encore plus faible que les années précédentes, en raison du peu de volonté des gouvernements centraux d'impliquer les gouvernements infranationaux, de la forte centralisation des décisions et du faible niveau de dialogue entre les différents niveaux de gouvernement. Dans certains pays, les gouvernements infranationaux reçoivent des transferts des niveaux supérieurs selon une formule de subvention globale, comme aux États-Unis (Vox, 2021[303]). Dans les pays où les gouvernements locaux sont invités à demander des subventions spécifiques, comme c'est le cas en France, ils peuvent être confrontées à des délais serrés ou ne pas disposer des ressources techniques et humaines nécessaires pour postuler aux programmes de relance nationaux et recevoir effectivement les fonds supplémentaires. Les disparités entre les régions peuvent entraîner une dynamique inégale des investissements publics à court terme.
Dans certains cas, les gouvernements centraux ont imposé des conditions au soutien financier apporté aux investissements publics infranationaux. Cette démarche vise à aligner les investissements financiers sur les priorités nationales ou supranationales à plus long terme. Citons par exemple le plan de relance du Conseil européen (Conseil européen, 2020[304]), qui a alloué une partie des fonds de relance à des objectifs liés à la santé, au numérique et au climat.
Générer des capacités d’investissement public au niveau infranational
Pour être efficace, l'investissement public des gouvernements infranationaux doit s’appuyer sur des capacités adaptées. Conformément aux lignes directrices du manuel de l’OCDE à l’usage des décideurs publics sur la décentralisation (Making Decentralisation Work: A Handbook for Policy-Makers), les capacités infranationales sont nécessaires pour soutenir l'exécution des fonctions de manière efficace, efficiente et durable. Les capacités des gouvernements infranationaux varient énormément au sein d'un même pays. Les petites municipalités sont entravées par l’inadéquation des équipes de gestionnaires, de techniciens et de prestataires de services. Les grandes municipalités, quant à elles, sont confrontées à des problématiques complexes en matière de transport, d'urbanisme et d'infrastructures et ne disposent pas toujours d’une main-d'œuvre qualifiée pour s'acquitter efficacement de ces tâches. Dans certains pays, les gouvernements infranationaux disposent de capacités de gestion des investissements publics moindres que les gouvernements centraux (Banque interaméricaine de développement, 2020[305]).
Exemples par pays
Stratégies nationales de relance de l’investissement public
En Australie, le fonds de secours et de relance doté de 1 milliard AUD est destiné aux régions, gouvernements locaux et secteurs d'activité ayant été les plus durement frappés par la crise du COVID-19. Il inclut une enveloppe de plus de 550 millions AUD visant à aider les régions (au titre du budget 2020-21) et principalement à soutenir leur secteur touristique, l’accès au haut débit et les services de santé dans les zones rurales, les industries primaires et l’agriculture. Entre autres avantages, cette initiative a déjà permis d'allouer 4.8 millions AUD à la prestation de services gratuits de conseil financier aux petites entreprises régionales en difficulté, et 100 millions AUD au financement de partenariats pour la relance régionale, qui coordonneront les investissements avec d'autres niveaux de gouvernement pour soutenir la relance et la croissance dans 10 régions (Gouvernement de l’Australie, 2021[306]). Par ailleurs, en juin 2020, le gouvernement australien a annoncé un plan de relance de 1.5 milliard AUD qui, dans le contexte de la pandémie, financera des projets d'infrastructures routières et d’équipements collectifs qui seront mis en œuvre par les gouvernements locaux : 1 milliard AUD de financement pour les projets prêts à l'emploi et 500 millions AUD pour les travaux ciblés de sécurité routière réalisés par les états et les territoires (Gouvernement de l’Australie, 2020[307]).
Au Chili, le chapitre sur les investissements publics du plan « Paso a Paso » prévoit un montant supplémentaire de 4 500 millions USD par rapport au budget ordinaire des ministères pour les investissements publics entre 2020 et 2022. Entre autres choses, le portefeuille de projets à financer donnera la priorité au soutien direct aux municipalités et renforcera la mobilité et l'intégration des villes. Les 125 millions USD de ressources supplémentaires seront allouées aux municipalités pour le développement d’initiatives d’investissement local (Gouvernement du Chili, 2021[308]). Ces ressources seront utilisées dans le cadre du programme d'amélioration des quartiers, qui vise à fournir des conditions sanitaires minimales (égouts, eau potable et électrification), et du programme d'amélioration urbaine, qui vise à la réalisation d’infrastructures mineures (places, parcs, terrains et pistes cyclables).
En Estonie, une partie de l’enveloppe de 100 millions EUR accordée par le gouvernement vise à aider les municipalités à financer des investissements publics supplémentaires pouvant stimuler la reprise économique.
En France, le gouvernement a doublé les fonds alloués à son 4e Plan d’investissement d’avenir (PIA4) régionalisé, de 250 millions EUR à 500 millions EUR (Gouvernement de la France, 2021[309]). L'accord-cadre État-Régions concerne la mise en œuvre territoriale du PIA4 et soutiendra de nouveaux modèles de développement territorial par le biais d'initiatives telles que Territoires d'innovation ou Territoires numériques éducatifs. Le gouvernement a également décidé d'augmenter la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), qui soutient le financement des grandes priorités d'investissement des communes par le biais de 570 millions EUR de subventions par an, avec un budget complémentaire exceptionnel de 950 millions EUR pour les exercices 2020 et 2021 (Gouvernement de la France, 2021[310]). Le gouvernement a également maintenu les subventions d'investissement aux communes et intercommunalités, comme la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) de 1.046 milliard EUR (France Relance, 2021[311]). Le gouvernement encourage également le développement de fonds régionaux pour renforcer les bilans des PME avec une subvention soutenant les fonds d'investissement régionaux. (Gouvernement de la France, 2021[312]). Certaines régions ont décidé d'accorder aux communes et aux intercommunalités une aide régionale exceptionnelle pour financer l'investissement public local : dans les Pays de la Loire, le gouvernement régional apporte un soutien de 182 à 232 millions EUR aux gouvernements locaux (Région Pays de la Loire, 2021[313]). Le gouvernement simplifie et unifie également les systèmes de contractualisation existants en deux niveaux de contractualisation : les Contrats de plan État-région (CPER) et les Contrats de relance et de transition écologique (CRTE) pour les intercommunalités (EPCI et groupements). Les CRTE visent à soutenir les projets favorisant la cohésion territoriale et la transition écologique (Ministère de la Cohésion des Territoires, 2020[314]). Ils sont proposés à chaque territoire pour coordonner le plan de relance national avec les autorités locales et assurer une approche différenciée et décentralisée de l'effort de relance (Gouvernement de la France, 2020[315]). Les CRTE formaliseront les aides financières de l'État aux collectivités locales et donneront la priorité au soutien immédiat à l'activité économique des territoires sur le court terme, tout en définissant une approche sectorielle de la transformation territoriale à moyen terme.
En Allemagne, outre le vaste plan de relance économique lancé en juin 2020, le gouvernement fédéral a présenté en janvier 2021 son projet de plan de relance, qui correspond aux objectifs clés du plan de relance européen Next Generation EU, et de sa Facilité pour la reprise et la résilience (Gouvernement Fédéral, Allemagne, 2021[316]). Le plan de relance met l'accent sur la lutte contre le changement climatique et la transformation numérique. Les mesures respectueuses du climat couvrent un large spectre du plan, de la décarbonisation par le recours à l’hydrogène d’origine renouvelable, à la mobilité verte et la construction respectueuse du climat. Les mesures pour la transformation numérique couvrent l’investissement dans la transformation numérique rapide des infrastructures, les partenariats avec le secteur privé ainsi qu’une initiative nationale pour l’enseignement numérique.
En Islande, le gouvernement et les municipalités lancent un programme d’investissement spécial qui s’inscrit dans le cadre d’un ensemble de mesures économiques adoptées en réponse à la crise du COVID-19. Ce programme sera axé sur le transport, le secteur de la construction et les infrastructures technologiques. Il prévoit également un soutien financer au secteur du tourisme. D'autres mesures visent à faciliter l’investissement municipal. Elles englobent un remboursement temporaire de TVA pour les travaux réalisés jusqu’à fin 2020, un soutien spécial aux projets municipaux relatifs au réseau d’assainissement et des dotations du fonds de péréquation des collectivités locales pour financer des projets de construction améliorant l'accès des personnes handicapées aux bâtiments, aux structures et aux espaces extérieurs municipaux. Les communes sont autorisées à déroger temporairement aux règles d'équilibre budgétaire et d’endettement pour disposer d’une plus grande marge de manœuvre en matière d'investissements (Parlement de l’Islande, 2020[317]).
En Corée, le New Deal annoncé en juillet 2020 prévoit d’investir 160 000 milliards KRM et de créer 1.9 million d’emplois à l’horizon 2025. Il repose sur trois grands volets - l’écologie, le numérique et l’équilibre régional – et vise à renforcer le filet de sécurité sociale et de protection de l'emploi, d'accroître la résilience face aux incertitudes économiques et de rectifier les inégalités de développement entre les zones urbaines et rurales (The Diplomat, 2021[318]). Le New Deal est fortement axé sur la relance économique locale et vise à garantir que le développement économique futur sera équilibré entre les régions, en investissant la moitié du budget total en dehors de la région du Grand Séoul (KDI, 2021[319]). Lors de la sélection des projets gagnants de l'offre publique du New Deal, le ministère de la Sécurité et de l'Administration publique entend promouvoir les projets qui prennent en compte les questions de développement régional. Les autorités locales et régionales seront chargées de développer les projets en collaboration avec les organisations publiques implantées à travers le pays. Une série de discussions a été organisée par le Comité de planification des politiques dans les régions afin de définir les besoins spécifiques des citoyens dans chaque localité, et de les intégrer dans les propositions du New Deal. Les initiatives locales porteront notamment sur la conception de villes intelligentes et des systèmes de gestion des catastrophes naturelles. En mars 2021, la plupart des 17 gouvernements régionaux avaient mis en place leurs propres plans du New Deal et soumis des propositions de projet ; la province de Gangwon, par exemple, a le projet de développer des technologies utilisant de l’hydrogène comme combustible. La gestion par les gouvernements locaux des questions relatives au New Deal sera facilitée grâce à la création par le gouvernement central d'un organisme dont la mission sera de les aider à concevoir des projets équilibrés et à recruter du personnel spécialisé dans ces sujets (Korea Policy Planning Committee, 2020[320]). L’État prendra en charge la majorité des dépenses, en couvrant 114 000 milliards KRW, tandis que les gouvernements locaux et le secteur privé complèteront ces fonds en déboursant 46 000 milliards KRW.
En Lituanie, le gouvernement a élaboré un programme de relance économique comportant une enveloppe de 1 milliard EUR pour stimuler l’économie. Le plan d’action économique et financier prévoit l’accélération des programmes d’investissement, des paiements, et l’augmentation des flux de financement.
Au Mexique, le projet de budget de l’État fédéral pour 2021 (Proyecto de Presupuesto de Egresos de la Federación, PPEF) évalue les dépenses d’investissement public à quelque 830 millions MXN. Ce montant se répartit comme suit : 85 % (707.7 millions MXN) correspondent à des investissements matériels ; 2 % (14.4 millions MXN) sont des subventions pour les services sociaux et le secteur privé, ainsi que pour les états fédérés et les municipalités ; les 13 % restants (107.2 millions MXN) sont affectés à d'autres projets d'investissement. Les investissements concernent la rénovation urbaine ainsi que des projets de construction : l’aéroport General Felipe Ángeles (déjà commencé), des axes routiers et la voie ferroviaire interurbaine entre Mexico et Toluca (Mexican Secretariat of Finance and Public Credit, 2020[321]). En octobre 2020, le gouvernement mexicain a annoncé un plan d'investissement en collaboration avec le secteur privé d'un montant de 14 milliards USD pour atténuer les effets du COVID-19. Ce plan débutera par 39 projets dans les secteurs des communications, de l'énergie et de l'environnement et devrait générer jusqu'à 190 000 emplois, principalement dans le secteur de l'énergie.
Aux Pays-Bas, le gouvernement a débloqué 255 millions EUR pour cofinancer les programmes de l’UE ayant trait au développement régional, à l’innovation, au développement durable et à la transformation numérique.
En Nouvelle-Zélande, le budget 2020 a investi 1.1 milliard NZD dans des programmes de protection de l'environnement afin de lutter contre les effets du Covid-19 et de créer des emplois régionaux (Department of Conservation, 2020[322]). Ce financement a notamment permis de soutenir de nouveaux projets environnementaux régionaux et de renforcer la biosécurité et la lutte contre les mauvaises herbes et les parasites dans toute la Nouvelle-Zélande. Une partie des fonds a été allouée à des trusts caritatifs tels que QEII et Landcare Trust, qui travaillent directement avec les communautés locales sur des projets environnementaux.
Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a annoncé en mars 2021 The American Jobs Plan, un programme d'investissement de 2 000 milliards USD pour reconstruire les infrastructures et créer des emplois suite à la crise du COVID-19 (White House, 2021[323]). Le plan, s'il est approuvé, fournira un financement substantiel aux états (environ 300 milliards USD ont été détaillés) et aux gouvernements locaux pour les programmes de transport, d'eau, d'électricité, de numérique et de logement. Le plan porte sur les éléments clés suivants :
621 milliards USD de programmes d'infrastructures de transport et de résilience • ;
50 milliards USD d'investissements pour améliorer la résilience des infrastructures ;
111 milliards USD d’investissements dans les infrastructures d’eau ;
100 milliards USD d’investissements dans les infrastructures numériques ;
100 milliards USD d’investissements dans les infrastructures électriques ;
213 milliards USD dans des logements abordables et durables.
Le plan propose d'orienter les investissements vers des priorités durables, numériques et inclusives au niveau central, fédéré et local. Le plan propose de créer des incitations pour que les gouvernements fédérés soutiennent des investissements durables et inclusifs, notamment pour la construction d'un réseau de 500 000 stations de recharge pour véhicules électriques, et cherche à imposer des incitations aux États pour leur permettre de recevoir certains financements. Par exemple, la proposition vise à ce que les États suppriment les règlements restrictifs d’utilisation des sols (exclusionary zoning) dans le cadre de l'investissement de 213 milliards USD dans des logements abordables et durables.
Encadré 5. Le plan de relance UE
En décembre 2020, le Conseil européen a approuvé un plan de relance de 750 milliards EUR et un budget 2021-2027 de 1 074 milliards EUR pour aider l'UE à se reconstruire après la pandémie, et soutenir les investissements dans les transitions écologique et numérique (Conseil européen, 2020[304]). Le plan de relance et le budget sont accompagnés d'exigences de bonne gouvernance et du principe de conditionnalité qui visent à garantir que les dépenses atteignent les objectifs convenus dans les domaines de dépenses prioritaires. Le budget à long terme de l'UE, le cadre financier pluriannuel, couvre une période de sept ans et met l'accent sur le numérique, la résilience, la cohésion et les objectifs environnementaux. Le plan de relance - Next Generation EU - vise à relever les défis posés par la crise du COVID-19. Les dépenses seront dirigées vers les pays et les secteurs les plus durement touchés par la crise. 70% du financement doit être engagé en 2021 et 2022. Il est axé sur sept domaines de dépenses :
Facilité de relance et de résilience : 672.5 milliards EUR (prêts : 360 milliards EUR, subventions : 312.5 milliards EUR)
ReactEU : 47.5 milliards EUR
Horizon Europe: 5 milliards EUR
InvestEU: 5.6 milliards EUR
Développement rural : 7.5 milliards EUR
Just Transition Fund (JTF) : 10 milliards EUR
RescEU: 1.9 milliard EUR (Conseil européen, 2020[324]).
30% des dépenses du budget de l’UE à long terme et du plan de relance combinés contribueront à des projets liés au climat. Dans le cadre du plan de relance Next Generation EU, 37 % sont réservés au soutien à la transition écologique et 20 % au soutien des initiatives numériques. Ces dépenses doivent être conformes à l'objectif de neutralité climatique de l'UE d'ici 2050, aux objectifs climatiques de l'UE pour 2030 et à l'accord de Paris. Des outils de budgétisation verte sont nécessaires pour suivre les dépenses, notamment en recourant à la taxonomie du financement vert de l'UE pour classer les projets verts (EURACTIV, 2020[325]). Dans le cadre de la gouvernance du programme, les États membres sont tenus de préparer des plans nationaux de relance et de résilience qui contribuent aux transitions écologique et numérique, stimulent la croissance et l'emploi, et renforcent la résilience économique et sociale. Le versement des subventions est subordonné à la réalisation des objectifs convenus.
Le plan de décembre 2020 s'ajoutait à des engagements antérieurs pris au cours de l'année 2020 qui ont rapidement réorienté des fonds pour aider les États membres à faire face à la crise du COVID-19, par exemple :
37 milliards EUR provenant du budget de l’UE pour soutenir les systèmes de soins de santé, les PME et les marchés du travail au moyen de l'Initiative d’investissement en réaction au coronavirus ;
Jusqu’à 28 milliards EUR de fonds structurels issus des enveloppes nationales 2014-2020, mais non encore alloués à des projets pour réagir à la crise ;
Jusqu’à 800 millions EUR issus du Fonds de solidarité de l’UE dirigés vers les pays les plus durement touchés, grâce à une extension du champ d'application du fonds aux crises de santé publique.
En 2020, contrairement à ce qui s’est passé lors de la crise financière de 2008, l’UE s’est largement appuyée sur la politique de cohésion pour lutter contre la crise du COVID-19, annulant ou modifiant les règles applicables aux fonds structurels et d'investissement européens. En octobre 2020, plus d'une centaine de programmes ont été modifiés pour faire face à la pandémie (Conseil européen, 2020[326]). L'UE a en outre adopté des mesures visant à assurer une plus grande souplesse dans l'utilisation des fonds structurels. Grâce à l'initiative d'investissement Plus en Réaction au Coronavirus, les États membres ont pu opérer des transferts entre différents fonds pour répondre à leurs besoins. Les ressources peuvent être réorientées vers les régions les plus touchées, à la suite d'une suspension des conditions d'accès des régions au financement. Enfin, les États membres ont pu demander un financement – pouvant aller jusqu'à 100 % – au titre du budget de l'UE entre le 1er juillet 2020 et le 30 juin 2021 pour les programmes destinés à faire face aux conséquences de la pandémie.
L'UE a accordé une souplesse maximale dans l'application de ses règles concernant :
Les mesures d'aide d’État visant à soutenir les entreprises et les travailleurs ;
Les politiques en matière de finances publiques et de fiscalité, par exemple pour faire face aux dépenses exceptionnelles.
Mesures spécifiques de soutien à l'investissement public au niveau infranational
En Autriche, une enveloppe de 1 milliard EUR a été débloquée pour soutenir l’investissement municipal en augmentant les transferts de capitaux fédéraux de 25 % à 50 % de l’investissement municipal (Loi de 2020 sur l’investissement municipal). Elle peut être utilisée pour les projets qui débutent entre juin 2020 et décembre 2021 (Parlement de l’Autriche, 2020[327]). Cette subvention d'investissement à des fins spéciales vise notamment à promouvoir les investissements dans la transition écologique et numérique, y compris dans des secteurs tels que les transports publics, la construction de centrales de production d'énergie renouvelable, l'approvisionnement en eau et l'assainissement, l'extension des réseaux à large bande et les infrastructures de recharge pour l'e-mobilité. (Ministère Fédéral des Finances, Autriche, 2020[328]).
Au Canada, le gouvernement fédéral a adapté un programme d'investissement public existant pour répondre aux impacts de la pandémie. Un nouveau volet temporaire COVID-19 Résilience du programme a été mis en place, avec plus de 3 milliards CAD de fonds existants à la disposition des provinces et des territoires pour financer des projets à court terme et à démarrage rapide visant à améliorer la résilience climatique et sanitaire. Les gouvernements provinciaux et les territoires peuvent canaliser jusqu'à 10 % des fonds provenant des allocations faites dans le cadre du programme d'investissement initial pour soutenir leurs projets de résilience (Gouvernement du Canada, 2021[329]). À l'échelon provincial, le gouvernements d'Alberta accorde un financement de 500 millions CAD aux municipalités et aux communautés Métis pour la réalisation d’investissements en infrastructures dans le cadre de son programme de stimulation des municipalités (Gouvernement de la province d’Alberta, 2020[330]). L’Accord sur la relance sécuritaire (juillet 2020) a acté un effort fédéral de plus de 19 milliards CAD visant à aider les provinces et les territoires à relancer leur économie en toute sécurité. Plusieurs priorités seront ainsi financées au cours d'une période de six à huit mois, à savoir : dépistage et recherche des cas contacts ; renforcement des capacités des systèmes de soins de santé ; garde d’enfants pour les parents retournant au travail ; congés maladie ; soutien aux municipalités, notamment pour services de transports publics. Une autre initiative fédérale, le Fonds d’aide et de relance régionale (FARR), permet de soutenir les différentes communes grâce à un réseau de six agences de développement régional réparties sur l’ensemble du territoire. (Gouvernement du Canada, 2020[331])
En Chine, le gouvernement a approuvé un montant de 3.75 trillions CNY pour de nouvelles obligations spéciales que les gouvernements locaux peuvent émettre en 2020 (CITIC, 2021[332]). Ces obligations doivent financer en priorité de nouvelles infrastructures et des projets d'urbanisation (S&P Global Ratings, 2020[256]). Fin septembre, environ 30 % de ces nouvelles obligations locales spéciales étaient utilisées pour des projets d'infrastructures urbaines (y compris le développement du réseau technologique 5G), 20 % étaient allouées aux transports et environ 20 % aux services publics sociaux. La part des projets d'aménagement du territoire et de reconstruction de logements a sensiblement diminué en 2020 par rapport à 2019. Le gouvernement central a annoncé en février 2021 que l'ampleur des obligations locales spéciales pour cette année sera de 3.65 trillions CNY, soit un peu moins qu’en 2020. Il a également souligné que les projets en cours seront classés par ordre de priorité.
Au Danemark, le plafond de l'investissement des municipalités et des régions a été relevé, ce qui s’est traduit par une hausse des investissements évaluée à 0.1 % du PIB en 2020. Les projets pouvant démarrer rapidement et, en guise de critère, être terminés en 2020, sont ciblés pour soutenir l’emploi. Les régions et communes sont encouragées à avancer les projets d’investissement qui étaient prévus pour 2021 ou 2022 (Programme de stabilité du Danemark 2020).
En Colombie, la Banque de développement territorial (FINDETER) a lancé la ligne de crédit « Compromiso Colombia », dotée d'un fonds total de 199 millions USD (713 milliards COP) qui, en plus d'injecter des ressources pour stimuler le secteur privé, offre des avantages aux gouvernements infranationaux (municipalités et départements) pour financer des investissements publics dans des domaines tels que le développement énergétique, le tourisme, l'environnement, les TIC, l'eau potable et l'assainissement de base, les sports, les loisirs et la culture, et les industries créatives.
En France, dans le cadre de son plan d'urgence et de relance, le gouvernement augmentera de 0.6 à 1.6 milliard EUR l’actuelle dotation de soutien à l’investissement local, qui fera une large place aux investissements dans les secteurs de la santé, de la transition écologique et de la protection du patrimoine. Afin de renforcer le soutien aux investissements infranationaux en faveur de la transition écologique, le gouvernement a également élaboré en novembre 2020 un nouveau cadre contractuel entre l'État et les territoires, avec la création des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) (France Urbaine, 2021[333]). Le plan de relance comprend également un ensemble de mesures visant à promouvoir les investissements infranationaux axés sur le développement régional et la cohésion (par exemple, l'inclusion numérique, l'extension du plan pour le haut débit afin d'accélérer le déploiement de réseaux en fibre optique dans tout le pays, etc.) Outre leur caractère transformateur, ces investissements apporteront un soutien à court terme destiné à stimuler l'activité à la sortie de la crise (Gouvernement de la France, 2020[334]). En décembre 2020, le gouvernement français a publié un « Guide à destination des maires pour gérer le plan de relance ». (Gouvernement de la France, 2020[335]). Ce guide a été conçu pour rendre les mesures du plan de relance lisibles et accessibles aux maires, en listant les mesures appropriées, les financements disponibles et les détails pratiques pour chaque catégorie d'investissement. En outre, un site internet dédié a été créé, sous le nom de France Relance, qui compile toutes les mesures à la disposition des gouvernements infranationaux dans le cadre du plan de relance. Alors que la contraction des recettes douanières et liées à la mobilité pour les Régions entrave leur capacité d'investissement, la loi de finances 2021 soutient les décisions d'investissement d'avant la crise avec une subvention d'investissement régionale de 600 millions d'euros pour financer la rénovation de la performance énergétique des bâtiments, développer des solutions de mobilité douce et de nouveaux moyens de transport. Cette subvention sera gérée par les préfets de région en coordination avec les conseils régionaux (Le Sénat, 2021[336]).
En Italie, une série de mesures visent à encourager les investissements infranationaux. En particulier, les ressources précédemment prévues pour l'année 2030 ont été réaffectées à la période 2020-24. La loi de finances 2020 a créé de nouveaux fonds d'investissement : le fonds d'investissement du gouvernement central, le fonds Green New Deal et le fonds de relance des investissements pour le développement durable des infrastructures des municipalités. Le « Plan Sud 2030 » a également été présenté pour soutenir les investissements publics dans le sud de l'Italie, en mettant l'accent sur l'éducation, les infrastructures sociales, le renforcement des engagements du Green New Deal dans le sud et les régions intérieures, le développement de l'innovation et le renforcement des zones économiques spéciales (ZES). Des subventions ont été attribuées aux municipalités pour des investissements dans des projets de régénération urbaine (8.5 milliards EUR en 2021-2034) et pour la sécurité des bâtiments et des terrains (8.8 milliards EUR en 2021-2034), ainsi qu'aux régions (environ 3.3 milliards EUR en 2021-2034) pour des projets en lien avec la sécurité routière et le développement des systèmes de transport public. En outre, des ressources seront allouées aux régions, villes métropolitaines et aux gouvernements locaux afin d'acheter de nouveaux bus écologiques (Ministère de l’Économie et des Finances, Italie, 2020[337]).
En Lettonie, le gouvernement a augmenté la limite d'emprunt des municipalités à 150 millions EUR pour les projets d'investissement locaux en 2020, afin de soutenir les investissements infranationaux prêts à démarrer, en particulier ceux cofinancés par les fonds de l'UE et d'autres aides financières étrangères, ainsi que les projets d'investissement soumis par le ministère de la Protection de l'environnement et du Développement régional (Conseil de l’Europe, 2020[338]).
En Pologne, le gouvernement a mis en place le « Fonds d’investissement local », un programme de financement public destiné à des projets d’investissement publics et privés prêts à démarrer, visant à améliorer les infrastructures telles que les routes locales, les ponts, la modernisation des écoles, le développement du numérique, la transformation énergétique, la protection de l’environnement et les infrastructures municipales. En décembre 2020, le Fonds avait alloué 12 milliards PLN de subventions non remboursables (Gouvernement de la Pologne, 2020[276]). Il est composé de ressources nationales, indépendantes de l’aide de l’UE. Cependant, la flexibilité proposée par l'UE pour l'utilisation des fonds de cohésion est également mobilisée.
Au Portugal, sept régions ont bénéficié en octobre 2020 d'une réaffectation de 1 milliard EUR du Fonds de cohésion pour faire face à la crise du COVID-19. Les fonds ont atténué l'impact à court terme, à savoir permettre les paiements aux bénéficiaires, rendre les dépenses rétroactivement éligibles et favoriser l'adaptation des PME. Il a également apporté un soutien financier supplémentaire aux entreprises, au secteur de la santé et aux marchés de l’emploi, notamment dans le secteur du tourisme.
Au Royaume-Uni, plusieurs mesures ont été annoncées pour soutenir la relance COVID-19 au niveau local en Angleterre, notamment par le lancement de trois programmes d'investissement : le Levelling Up Fund, de 4.8 milliards GBP, le UK Community Renewal Fund de 220 millions GBP, et le Community Ownership Fund de 150 millions GBP. Ces programmes feront partie du Fonds pour la prospérité partagée (Shared Prosperity Fund) du Royaume-Uni et devraient être mis en œuvre directement au niveau local par les conseils municipaux (Gouvernement du Royaume-Uni, 2021[339]). En Écosse/Royaume-Uni, le gouvernement écossais a associé les gouvernements locaux à la stratégie de relance, en créant deux fonds d'un montant total de 4 millions GBP : le City Centres Recovery Fund et le Regional Recovery Fund. Les villes et les organismes régionaux peuvent solliciter chacun de ces fonds en soumettant des propositions axées sur la planification de la relance, la création d'emplois au niveau local, l'accélération de la mise en œuvre des investissements de la City Region et du Growth Deal et l'élaboration de plans de relance régionaux (Gouvernement de l’Écosse, 2021[340]).
Aux États-Unis, la loi CARES alloue une enveloppe de 1.5 milliard USD à l’Administration du développement économique (EDA) du Département du Commerce américain pour des programmes d'aide au développement économique visant à contribuer à la prévention, à la préparation et à la réponse au coronavirus au niveau local. L’EDA travaille directement avec les gouvernements fédérés et locaux, les établissements d’enseignement supérieur, les organismes à but non lucratif et les tribus reconnues par le gouvernement fédéral afin de promouvoir les stratégies élaborées localement pour accroître le potentiel de développement économique en tenant compte de la conjoncture et des besoins des entreprises au niveau local. Les subventions versées par l’EDA seront destinées à divers usages : l’assistance technique et l’aide à la planification apportées aux districts de développement économique (EDD) de l’EDA, aux bénéficiaires des tribus et aux centres universitaires, entre autres ; la capitalisation et la recapitalisation des fonds de crédit renouvelable (RLF) pour donner aux entreprises un accès aux capitaux ; les subventions pour l’innovation et la construction d’infrastructures, ainsi que d'autres projets de développement économique. En outre, le plan de sauvetage américain, d'un montant de 1 900 milliards USD, alloue 350 milliards USD de fonds d'urgence aux autorités des États, des collectivités locales et des territoires pour créer des emplois, soutenir la distribution de vaccins et maintenir les services vitaux. Le financement des états fédérés et des gouvernements locaux est soumis à diverses conditions, notamment le financement adéquat de l'éducation et la protection des étudiants des communautés à faibles revenus. L'Administration du développement économique s'est vu accorder 3 milliards USD pour soutenir les initiatives communautaires de développement économique, par le biais de subventions aux entités locales et fédérales, aux institutions tribales et aux organisations à but non lucratif. Une enveloppe de 5 milliards USD pour aider les foyers à payer les factures d’eau et d’énergie comprend également une aide aux états afin qu'ils investissent dans des projets d'énergie propre et d'efficacité énergétique visant à réduire les factures des ménages les plus défavorisées (White House, 2021[323]).
Plusieurs gouvernements d’états fédérés et régionaux lancent également des initiatives pour soutenir l’investissement public sur leur territoire et les projets d’investissement des gouvernements locaux.
En Belgique, la ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics a annoncé des investissements dans la mobilité d'un montant de 2.2 milliards EUR destinés à couvrir près de 924 projets visant à donner un nouvel essor économique et social au secteur de l’ingénierie hydraulique et routière mais également à l'économie tout entière, dans le cadre de la relance. Les domaines prioritaires sont la sécurité routière, les voies navigables et le réseau ferroviaire, les transports publics (bus hybrides, trams, systèmes de charge pour bus électriques) et les mesures pour le climat et contre les nuisances sonores (passage à l'éclairage LED, installation de plantes fonctionnelles et d'écrans antibruit, contrôle des arbres, etc.) (Intelligent Transport, 2020[341]).
En Allemagne, plusieurs États fédéraux (la Bavière, le Bade-Wurtemberg, la Hesse, la Rhénanie du Nord-Westphalie, la Saxe et la Saxe-Anhalt) ont annoncé des dispositifs d’aide prévoyant notamment des mesures en faveur de l’investissement dans les infrastructures. En outre, de nombreux Länder apportent un soutien supplémentaire aux municipalités pour réaliser des investissements, afin de combler la baisse des recettes fiscales et l'augmentation des dépenses contra-cycliques liées à la pandémie. En outre, dans certains Länder, et notamment dans le Mecklembourg-Poméranie occidentale et dans la Hesse, une discussion est en cours pour que les fonds publics fournis aux municipalités soient affectés à des secteurs précis telles que l'éducation, l'économie durable et la protection du climat (KommunalWiki, 2021[342]).
En Italie, la région Lombardie a adopté un plan d'investissement sur trois ans d'un montant de 3 milliards EUR. 400 millions EUR sont affectés aux gouvernements locaux et 2.6 milliards EUR au soutien à l’économie locale (dont 400 millions EUR pour les investissements stratégiques). Sur les 400 millions EUR destinés aux gouvernements locaux, la ville de Milan et ses environs recevront 51 millions EUR pour la réalisation de travaux publics (routes et écoles) ; les fonds restants pourront être utilisés par les autres communes pour financer l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, la rénovation urbaine et le développement durable, la mobilité durable, le patrimoine et les ouvrages hydrogéologiques, par exemple. La région prévoit par ailleurs de recourir aux « obligations lombardes » pour financer 10 millions EUR destinés à la production d’équipements de protection médicale et individuelle et 82 millions EUR pour le versement de primes au personnel de santé engagé dans la lutte contre l’urgence épidémiologique (Comité européen des régions, 2020[343]) (Varese News, 2020[344]) (First Online, 2020[345]).
Pistes d’action
Les stratégies nationales de relance de l’investissement national devraient comporter explicitement une dimension territoriale, de manière à gérer l'impact différencié du COVID-19 sur les territoires, et à permettre des complémentarités entre les secteurs, comme le souligne la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur l’investissement public efficace entre niveaux de gouvernement (OCDE, 2014[299]).
Les programmes d'investissement public doivent répondre aux objectifs de relance à court terme tout en maintenant les bonnes pratiques d'investissement et en répondant aux priorités à plus long terme (par exemple, la durabilité, la résilience, les infrastructures intelligentes). Les programmes d'investissement visant à rattraper les retards en termes de maintenance des infrastructures peuvent être un moyen efficace d'équilibrer ces objectifs à court terme.
Les gouvernements infranationaux doivent être impliquées très en amont dans la mise en œuvre des stratégies d'investissement nationales, tant au niveau régional que municipal. Les critères d'attribution des fonds doivent être guidés par les priorités stratégiques régionales.
Des enseignements doivent être tirés de la crise de 2008 puis appliqués à celle du COVID-19 et aux stratégies de relance de l’investissement qui sont déployées, afin d'éviter de reproduire les erreurs du passé. Les principaux enseignements sont les suivants : assurer la coordination intergouvernementale, renforcer les capacités d'investissement des gouvernements infranationaux, investir au niveau de gouvernement le plus pertinent et éviter que les mesures de relance ne se fassent au détriment des bonnes pratiques d'investissement et de gestion des risques.
Assurer la conformité entre les mesures d’urgence prises à court terme et les objectifs économiques, sociaux et environnementaux à long terme ainsi que les engagements internationaux (Accords de Paris, Objectifs de développement durable, etc.).
Contribuer à orienter les stratégies d'investissement public vers des priorités écologiques, numériques et fédératrices en introduisant des conditionnalités sur les investissements.
Encourager les gouvernements locaux et régionaux à investir dans les infrastructures numériques, dans la perspective d’une couverture territoriale complète et en veillant à accorder une importance suffisante à l'insertion numérique au niveau régional.
Maintenir un équilibre entre l'investissement public dans les infrastructures et celui dans la formation professionnelle, l’innovation, la recherche-développement et d'autres domaines immatériels.
À l’issue de la crise du COVID-19, les gouvernements infranationaux doivent éviter d'utiliser l’investissement public comme une variable d'ajustement. Cela pourrait nécessiter un soutien supplémentaire du gouvernement central.
Les investissements publics devraient privilégier le renforcement de la résilience régionale et le soutien au développement des infrastructures locales.
Les gouvernements centraux doivent identifier différents leviers pour soutenir l’investissement public au niveau infranational. Outre l’amélioration de la capacité d’autofinancement, ces mécanismes incluent divers instruments budgétaires classiques comme l’assouplissement des règles budgétaires, l’augmentation des transferts et des subventions d’investissement, l’accès facilité à des financements à long terme sur les marchés financiers et par l’emprunt, et l’accompagnement dans la préparation et la mise en œuvre de projets. D'autres mécanismes de financement pourront être activés à l’avenir, comme les programmes de partenariat public-privé ou le financement sur fonds propres.
Les gouvernements centraux peuvent contribuer à renforcer les capacités des gouvernements infranationaux afin de garantir la mise en œuvre d’investissements publics efficaces.
L’indispensable coordination intergouvernementale
Si la coopération internationale est essentielle pour lutter contre le défi mondial que représente la crise du COVID-19, la coordination interne entre les différents niveaux de gouvernement ne l’est pas moins, en particulier pour régler les problèmes socio-économiques qui se manifestent à l’échelle locale et régionale, et pour assurer la reprise économique sur le long terme. Une riposte coordonnée à tous les niveaux de gouvernement peut limiter les défaillances de la gestion de crise. Une coordination efficace entre les gouvernements centraux et infranationaux – ainsi qu’entre les différents territoires – est requise dans tous les pays, qu'ils soient unitaires, fédéraux, centralisés ou décentralisés, et dans tous les domaines touchés par la crise (sanitaire, économique, social et budgétaire).
Pour faire face à la crise, des mécanismes et des organes de coordination ont été réactivés dans certains pays afin d'associer les gouvernements régionaux et les associations de municipalités au processus de décision ou de consultation (Conseil de l’Europe, 2020[346]). Parmi les gouvernements infranationaux de l’UE ayant répondu à l’enquête OCDE-CdR, 71 % ont indiqué que le manque de coordination (verticale et horizontale) avec les autres niveaux de gouvernement était l’une des principales difficultés rencontrées dans la gestion de la crise sanitaire (OCDE-CdR, 2020[56]). L'efficacité des mécanismes de coordination a été limitée pendant la première phase de la crise (Graphique 23).
Coordination verticale entre le gouvernement central et les gouvernements infranationaux
Comme l’a indiqué l’Organisation mondiale de la santé (OMS) au début de la pandémie, la coordination entre le gouvernement central et les gouvernements infranationaux constitue la première étape d'une riposte efficace. L’absence de coordination entre les différents niveaux de gouvernement peut créer des risques collectifs comme le renvoi de responsabilités vers d'autres échelons et donner lieu à une concurrence de mesures potentiellement incompatibles entre elles. Dans les pays où les gouvernements infranationaux ont un degré d'autonomie important, les mesures risquent d’être encore plus fragmentées. À l’inverse, dans les pays où la coordination et la communication de la base vers le sommet sont limitées, les pouvoirs publics auront davantage tendance à recourir à des mesures « passe-partout » qui ne répondront peut-être pas aux besoins locaux. Une coordination verticale efficace permet d’éviter ou d’atténuer ces problèmes.
De nombreux pays ont rencontré des problèmes de coordination entre les niveaux central et infranational. Moins de la moitié (49 %) des représentants des gouvernements infranationaux de l’UE ayant répondu à l’enquête estiment que les mécanismes de coordination verticale ont été efficaces pour gérer la crise du COVID-19 dans leur pays (OCDE-CdR, 2020[56]).
Les associations de collectivités locales et régionales jouent un rôle important de ce point de vue. D’une part, elles servent d'interlocuteurs entre les gouvernements centraux et infranationaux. D'autre part, elles contribuent à coordonner les politiques, à définir des solutions et à soutenir la mise en œuvre des mesures d'urgence. Un dialogue régulier entre ces associations et le gouvernement central peut se révéler particulièrement utile pour faire face aux conséquences économiques et sociales de la crise à l’échelle de tout un pays. Les organes de coordination établis pendant la crise doivent continuer à être mobilisés pour coordonner et communiquer les stratégies de réponse et de relance.
Pour soutenir la sortie de crise, les gouvernements centraux peuvent utiliser ou adapter les cadres et processus de la gouvernance pluri-niveaux existants pour orienter les investissements publics vers le niveau infranational. Le recours aux processus existants peut favoriser une adoption plus rapide des plans de relance et offrir une plus grande certitude quant aux résultats, car les mécanismes existants font déjà l'objet d'une compréhension commune. En outre, il est préconisé que les gouvernements centraux continuent à favoriser la coordination verticale affichée pendant la crise pour soutenir la planification et l'exécution des stratégies de relance. Il s'agit notamment de clarifier au mieux les rôles et les responsabilités des différents niveaux de gouvernement et d'établir des lignes directrices cohérentes pour chacun d’entre eux, tout en faisant en sorte de maintenir une flexibilité suffisante pour s’adapter aux situations locales.
Exemples par pays
Mesures sanitaires : coordination verticale
En Australie, le gouvernement a mis en place un Cabinet National composé du Premier ministre et des Premiers ministres de chaque état fédéré et territoire australien. Ce cabinet est chargé de régler les questions sanitaires et économiques liées à la gestion de la crise du COVID-19 et de la relance. Le Cabinet National est conseillé par le Comité principal de protection de la santé, groupe parallèle composé de tous les responsables de la santé des États et territoires australiens et présidé par le chef des services médicaux de l’Australie. En mai, le Cabinet National a publié une stratégie de sortie de crise en trois étapes, qui indique aux états et territoires la marche à suivre pour protéger la population contre le COVID-19 d'une manière qui soit le plus adaptée possible aux spécificités locales. Les états et territoires peuvent passer d'une étape à l’autre à des stades différents, en fonction de la situation de santé publique et des conditions locales, et décider du moment où chaque étape sera mise en œuvre au niveau local (Prime Minister of Australia, 2020[347]).
Le Canada a lancé une action commune à l’ensemble des gouvernements, qui repose sur sept principes directeurs, parmi lesquels le principe de collaboration. Tous les niveaux de gouvernement et tous les acteurs concernés sont appelés à travailler en partenariat pour apporter une réponse efficace et cohérente à la crise. Les principes directeurs s’appuient sur les enseignements tirés d’événements passés, et en particulier de l’épidémie de SRAS en 2003, qui ont conduit le pays à se doter d’une législation, de plans, d’infrastructures et de moyens spécifiques pour être en mesure de détecter une future pandémie et d’y réagir (Gouvernement, 2020[348]).
Au Chili, le gouvernement a mis en place un Comité social pour le COVID-19 (Mesa social por COVID-19) constitué de représentants des associations municipales (maires) et d’instances gouvernementales, d’universitaires et de professionnels du secteur de la santé. Ce comité se réunit deux fois par semaine pour renforcer le Plan d’action COVID-19 (Gouvernement du Chili, 2020[349]). Des comités analogues ont également été institués à l’échelon régional (Gouvernement du Chili, 2020[350]).
Au Costa Rica, lors d'une réunion entre le gouvernement et les maires, l'UNGL a indiqué que des actions seraient coordonnées au niveau local - la plupart par l'intermédiaire de la police municipale - pour mettre en œuvre les directives sanitaires émises par le gouvernement central, tant au niveau de la prévention que du contrôle.
En Corée, l’approche du gouvernement consistant à mobiliser toutes les composantes concernées du gouvernement dans la lutte contre le COVID-19 a été renforcée. Le Premier ministre préside la Commission centrale de gestion de crise au sein de laquelle tous les ministères centraux sont représentés, ainsi que les dix-sept provinces et grandes villes du pays (Gouvernement de la Corée, 2020[230]).
Au Portugal, le gouvernement a mis en place une plateforme qui permet aux communes de répondre aux questions d’autres communes. Elle est gérée par la Direction générale des autorités locales (DGAL) du ministère de la Modernisation de l’État et de l’Administration publique. La DGAL a publié sur le portail Autárquico des directives à l’intention des communes. Elle a également chargé les communes, les zones métropolitaines et les organismes inter-municipaux d’établir des plans d’urgence conformément à ces directives.
En Espagne, la Conférence des présidents est une instance de coopération multilatérale entre le gouvernement central et les gouvernements respectifs des communautés autonomes. Elle est devenue l’instrument opérationnel du dialogue pluri-niveaux et facilite la communication sur les mesures de confinement tout en assurant la coordination des ressources en fonction des besoins territoriaux.
En Turquie, les agences de développement au niveau régional mettent en œuvre le programme de soutien financier pour la résilience et la lutte contre le COVID-19 (doté de près de 30 millions EUR). Les projets qu’elles financent privilégient : i) la maîtrise et la limitation de la propagation du virus ; ii) la préparation aux situations d'urgence et les interventions de santé publique ; iii) la réduction des incidences de l’épidémie sur l’économie nationale et régionale. Ces agences détermineront également les incidences sociales et économiques de l’épidémie dans les provinces et définiront des stratégies pour les secteurs nécessitant une intervention.
Mesures économiques et sociales : coordination verticale
En Australie, le Premier ministre a annoncé la création d'un nouveau Conseil national de réforme de la Fédération (NFRC), qui remplacera le Conseil des administrations australiennes (COAG) et dont l’institution centrale restera le cabinet national. Le NFRC a été approuvé par les Premiers ministres et ministres en chef des États et territoires, et par le Premier ministre. Une fois par an, les représentants du cabinet national, du CFFR et de l’Association des autorités locales australiennes (ALGA) se réuniront en personne pour aborder les questions prioritaires du pays. Ce nouveau modèle de fonctionnement a pour vocation de simplifier les procédures, et ainsi d'améliorer la collaboration, la communication et l’efficacité. Le Conseil national s'est réuni tous les quinze jours pendant la pandémie de COVID-19, et prévoit de se réunir tous les mois une fois la pandémie terminée. Les précédentes réunions du COAG avaient lieu deux fois par an, avec un ordre du jour plus détaillé (ABC, 2020[351]).
Mesures budgétaires coordonnées
Au Costa Rica, le gouvernement central a informé en juillet 2020 l'Union nationale des autorités locales (UNGL) et l'Association nationale des maires et des intendants (ANAI) des détails et des raisons pour lesquelles le budget des transferts aux provinces et aux municipalités avait été réduits en raison de la baisse des recettes fiscales causée par la pandémie (Gouvernement du Costa Rica, 2020[352]).
En France, le rapport Cazeneuve préconise la création d’un observatoire de suivi de l’impact de la crise du COVID-19 sur les finances locales sur la base d’un partage de l’information financière en temps réel (réactualisation tous les deux mois) et d’une méthode partagée de calcul des coûts de la crise.
En Italie, le ministère de l’Économie et des finances a mis en place en mai 2020 un comité technique (Tavolo tecnico) qui, présidé par le vérificateur général des comptes de l’État, est composé de représentants de l’État et des régions. Sa tâche est d’examiner l’impact de la pandémie sur le fonctionnement de base des pouvoirs publics, en se référant aux éventuelles pertes de recettes par rapport aux besoins financiers de chacune des entités8.
En Suède, les Conseils administratifs de comtés sont chargés de coordonner les actions de l’État, des régions et des municipalités en matière de contrôle des contaminations, ainsi que de veiller à ce que les fonctions sociales importantes continuent d’être assurées dans le pays. Ces Conseils sont utilisés par l’Agence suédoise de santé publique pour connaître les difficultés et la situation dans chaque région, afin de pouvoir gérer les foyers de contamination au COVID-19. Le 1er juillet 2020, le gouvernement suédois a créé la Commission Corona, chargée d'évaluer les actions engagées par l’État, les organismes gouvernementaux, les régions et les municipalités au regard du COVID-19, ainsi que de comparer la stratégie nationale avec celle des autres pays. Un rapport préliminaire devrait être rendu public fin novembre 2020, avec une version finale prévue pour février 2022 (Government Offices of Sweden, 2020[353]).
Au Royaume-Uni, le gouvernement écossais a créé un groupe de travail sur la relance des centres urbains, dirigé par le secrétaire à l'économie et mis en œuvre par la Scottish Cities Alliance, un partenariat entre le gouvernement écossais et sept villes d'Écosse, afin d'améliorer la coordination pluri-niveaux et entre les différentes parties prenantes tout au long du processus de relance (Gouvernement de l’Écosse, 2021[340]).
Pistes d’action
Mettre en place des structures de coordination pluri-niveaux ou activer/réorienter les structures existantes, afin de minimiser le risque de dispersion des efforts. Mettre à profit ces structures pour affiner les stratégies, élaborer des solutions et s’entendre sur les décisions qui ont des incidences économiques, sociales et sociétales importantes.
Encourager la coordination entre les différents niveaux de gouvernement afin de concevoir des solutions communes et garantir l'acceptation des mesures à tous les niveaux.
Mobiliser les organes de coordination pour coordonner et communiquer sur les stratégies d’intervention, de sortie de crise et de relance entre les différents niveaux de gouvernement et au sein des territoires. Prendre en compte et consulter les organes techniques qui peuvent aider à traduire les réflexions stratégiques en plans opérationnels.
Clarifier les rôles et responsabilités des différents niveaux de gouvernement pour optimiser l’utilisation des ressources ainsi que les stratégies d’intervention, de sortie de crise et de relance.
Établir des lignes directrices cohérentes qui pourront être suivies par chaque niveau de gouvernement, tout en faisant en sorte qu’elles offrent une flexibilité suffisante pour pouvoir être adaptées aux situations locales.
Travailler avec les associations nationales de régions et/ou de municipalités pour renforcer la coordination verticale en situation de crise – par exemple pour diffuser l’information, trouver et partager des solutions aux problèmes urgents, faciliter la mise en œuvre des mesures d'urgence et s'accorder sur des programmes de relance budgétaire. Encourager le partage de connaissances entre membres. Maintenir le partage de connaissances pendant la relance.
Soutien à la coopération entre autorités compétentes
La coopération horizontale entre les gouvernements – qu’il s’agisse des pays, des régions ou des gouvernements locaux – est tout aussi importante que la coopération verticale, notamment dans les pays fédéraux et les pays décentralisés où les approches sont plus différenciées selon les territoires. Les effets induits par le coronavirus sont si nombreux qu'aucun territoire ou pays ne peut les gérer à lui seul. Une coordination entre les régions est indispensable pour éviter des mesures disparates ou contradictoires, qui constituent somme toute un risque collectif. Dans les systèmes fédéraux, par exemple, les circonscriptions territoriales ne sont sans doute guère incitées à apporter une aide (mise en commun du matériel, du personnel qualifié, etc.) à une circonscription voisine si cela risque de compromettre leur propre aptitude à réagir à une situation de crise. Or, la coopération n’est pas une option mais un impératif. Les gouvernements centraux peuvent contribuer de manière significative à limiter les défauts de coordination et à assurer la cohérence des approches, même dans les pays fédéraux.
La coopération entre les juridictions est fondamentale pour limiter les risques de voir apparaître de nouvelles vagues de contamination ou, si elles surviennent, pour atténuer leur impact. Les informations concernant les nouveaux cas et les foyers de contamination doivent être communiquées extrêmement rapidement pour éviter la propagation du virus entre États et régions, et en particulier entre communes appartenant à une même zone urbaine fonctionnelle.
La coopération entre les juridictions est également essentielle pour soutenir la relance et éviter les approches fragmentaires en matière de relance de l'investissement public. La coopération entre les gouvernements peut encourager une meilleure planification des investissements voisins, soutenir des programmes d'emprunt conjoints, assurer une meilleure coordination des ressources pendant la relance, soutenir la normalisation des lignes directrices et encourager le partage des connaissances. Les gouvernements locaux et régionaux peuvent tirer des enseignements des succès et des échecs enregistrés par les autres territoires pendant la relance.
L'évaluation par les gouvernements infranationaux de l’UE de l’efficacité des mécanismes de coopération horizontale est très hétérogène selon les catégories : 75 % des structures inter-municipales et 55 % des régions considèrent avoir été efficaces dans la gestion de la crise, contre 42 % des municipalités (OCDE-CdR, 2020[56]).
Cette coopération s'étend aussi au-delà des frontières. Un problème majeur est apparu dans les régions transfrontalières où la coopération a été compliquée par la fermeture des frontières, les restrictions à la mobilité (celle des travailleurs transfrontaliers notamment), et l’absence de dispositifs de coordination efficaces. Dans de nombreux cas, les États membres de l’UE ont, sans concertation, décidé de fermer les frontières et pris des mesures unilatérales. Dans les pays nordiques, l'incapacité à tirer parti des plateformes de coordination collaborative existantes et le manque de communication entre les États ont discrédité la capacité des gouvernements locaux à fournir des services essentiels le long des frontières (Nordregio, 2021[354]). Dans l’enquête OCDE-CdR, l’absence de coordination transnationale est citée comme l’un des problèmes les plus importants. Près d'un tiers des répondants ont indiqué que la coopération transfrontalière entre les gouvernements infranationaux était soit globalement inefficace, soit inexistante, alors que seuls 22 % d'entre eux l’ont jugée efficace ou très efficace (OCDE-CdR, 2020[56]). Cela dit, plusieurs mécanismes de coopération transfrontalière ont bien fonctionné durant la crise et auraient apparemment permis une plus grande résilience et posé les bases d’une coopération accrue (Comité européen des régions, 2020[188]).
Exemples par pays
De nombreux pays, régions, villes et associations de collectivités locales ont mis en place des mesures spécifiques pour favoriser la coopération horizontale et transfrontalière. Quelques exemples sont présentés dans les paragraphes suivants.
Coopération entre municipalités
Au Danemark, les municipalités se sont regroupées pour acheter des équipements de protection pour leurs agents. À l’initiative de la municipalité d’Aarhus, les 98 municipalités danoises ont créé la Kommunalt Værnemiddel Indkøb (Unité collaborative d'achat de matériel de protection pour les municipalités) (Aarhus Kommune, 2020[355]).
Au Chili, au cours des premiers mois de la pandémie, les maires de plusieurs municipalités, rassemblés par le biais d'organisations telles que l'Association des municipalités du Chili (AMUCH), ont largement dirigé les stratégies de réponse immédiate aux besoins des populations sur leurs territoires. Même sans disposer des prérogatives nécessaires pour déployer des stratégies sanitaires ou faire un usage discrétionnaire des budgets d'urgence, les réponses rapides et efficaces des municipalités ont révélé le rôle important des gouvernements infranationaux pour gérer, plus efficacement que le gouvernement national, une part importante des responsabilités en matière de politiques publiques. Dans ce contexte, des groupes de maires ont mis en garde à plusieurs reprises contre les inégalités territoriales que la crise du COVID révélait sur l'ensemble du territoire national et, à la suite de ce débat, de nombreux articles ont été publiés dans la presse pour réclamer une plus grande autonomie des municipalités. Cette question est devenue un enjeu majeur dans le cadre du processus constitutionnel en cours au Chili, et divers acteurs réclament une plus grande autonomie des gouvernements infranationaux dans la nouvelle constitution. Au Chili, la « Fundación Chile Descentralizado » (Fondation Chili décentralisé) a conduit le débat sur le transfert de plus amples attributions institutionnelles aux gouvernements régionaux et municipaux et, au cours des derniers mois, a consacré une part importante de ses efforts à mettre en évidence la relation entre la crise déclenchée par la pandémie et l'importance d'avancer vers une plus grande décentralisation. Ces derniers mois, des dizaines d'articles ont été publiés sur le sujet et la fondation, en alliance avec d'autres organisations, a organisé des entretiens et des conférences pour débattre de la question.
En France, les intercommunalités ont de grandes responsabilités et un important budget alimenté par leurs propres recettes fiscales. Dès le début de la crise, elles ont multiplié les initiatives pour aider leurs municipalités-membres, les citoyens, les ONG et les acteurs économiques locaux. Grâce à leurs capacités fédératives, leurs compétences et leurs moyens techniques/financiers, ces structures jouent souvent le rôle de plateforme, mais aussi d’acteur opérationnel en lien direct avec les besoins locaux (Assemblée des Communautés de France, 2020[356]).
En Israël, les gouvernements locaux mettent en commun leurs connaissances par l’intermédiaire du ministère de l’Intérieur, de l’Union des collectivités locales et de l’Initiative nationale 265 pour le développement et le partage du savoir au service de la transformation numérique des collectivités locales. Ce site web a été créé en collaboration avec le ministère de l’Intérieur. Il existe d'autres instances informelles consacrées aux échanges d’information et aux projets communs des gouvernements locaux, parmi lesquelles le groupe consultatif des responsables de la planification stratégique et des programmes de travail au sein des collectivités locales, qui tient des consultations fréquentes (Tel Aviv-Yafo Municipality, 2020[357]).
En Lettonie, huit municipalités ont établi de solides relations de travail lors de la pandémie de COVID-19, pour mieux gérer la crise mais également l’après-crise. En conjuguant leurs efforts et en mettant en commun du matériel, les municipalités du sud de la Courlande ont pu fournir gratuitement des équipements de protection aux personnes âgées de la région (Stoyanov, A., 2020[358]).
En Suède, les quatre plus grandes municipalités du pays se sont associées pour garantir un crédit de 500 millions SEK, émis par Kommuninvest pour SKL Commentus. Ce crédit servira à l’achat d'équipements de protection pour l’ensemble des communes suédoises, lesquels seront distribués en fonction des besoins établis par le conseil administratif de comté dans le cadre de sa mission de coordination.
Coopération entre régions
En Belgique, le gouvernement fédéral et les entités fédérées ont décidé de mieux coordonner la distribution globale d'équipements de protection personnelle au secteur du soin, notamment en échangeant des informations sur les fournisseurs fiables, le niveau des stocks, les commandes, livraisons, etc. Ils ont également créé un stock de solidarité accessible à toutes les entités fédérées pour répondre aux besoins urgents dans les régions.
En Suisse, la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC) participe à la coordination des activités liées à la crise du COVID-19 avec le Conseil Fédéral, mais aussi entre les cantons. Elle coordonne notamment des conférences spécialisées qui permettent aux 26 cantons de se réunir régulièrement pour évoquer divers sujets liés à la crise (Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), 2020[359]).
Aux États-Unis, des initiatives de coordination entre les états fédérés ont émergées. Les gouverneurs des États de New York, du New Jersey et du Connecticut ont élaboré des lignes directrices communes sur la distanciation sociale et la restriction des activités de loisirs, que la Pennsylvanie a également adoptées par la suite (New York State, 2020[360]). Les gouverneurs de la Californie, de l'Oregon et de Washington ont accepté de travailler à une approche commune pour la réouverture de leurs économies après le premier confinement au printemps 2020. Bien que chaque État dispose de son propre plan, ils se sont également engagés à respecter une série de principes qui guident ces plans et qui sont énoncés dans le Western States Pact (Office of the Governor of California, 2020[361]). Ces principes consistent à donner la priorité à la santé des habitants de chaque état, à utiliser les résultats sanitaires et la science pour guider la prise de décision et à travailler avec les dirigeants locaux. En outre, le pacte énonce une série d'objectifs communs pour contrôler le virus : protéger les populations vulnérables, garantir aux états suffisamment d'équipements et de travailleurs médicaux pour fournir des soins appropriés (pour le COVID-19 et d'autres pathologies), atténuer l'impact non sanitaire du COVID-19, en particulier sur les communautés défavorisées, et développer une stratégie pour tester, suivre et isoler les cas de COVID-19 afin de protéger le grand public.
Coopération transfrontalière
Le ministre-président du Land de Rhénanie-Palatinat a créé un groupe de travail transfrontalier avec les régions néerlandaises et belges pour coordonner les interventions contre le nouveau coronavirus. En France, l’État et la région Grand Est prennent part à cette coopération.
L’Eurorégion composée du Tyrol, du Sud-Tyrol et du Trentin, située à la frontière entre l’Italie et l’Autriche, a rencontré plusieurs difficultés liées aux restrictions des déplacements mises en place par les autorités à la fois italiennes et autrichiennes suite au confinement et à la fermeture des frontières. Elle a réussi, malgré cela, à conserver un très haut niveau de coopération pendant la crise. Une unité de coordination a été créée en son sein en février. Le Sud-Tyrol a envoyé des équipements de protection au Tyrol et au Trentin, tandis que les villes tyroliennes d’Innsbruck, de Hall et de Lienz ont accueilli des patients du Sud-Tyrol en soins intensifs. Dans les pays nordiques, en raison du degré élevé de dépendance entre les municipalités de la région du golfe de Botnie, qui s'étend sur la Finlande et la Suède, les gouvernements ont accordé des exceptions aux mouvements transfrontaliers. À Svinesund, les travailleurs frontaliers des secteurs clés ont été autorisés à traverser la frontière suédo-norvégienne.
Pistes d’action
Renforcer la coopération entre communes et régions pour mieux coordonner les interventions et limiter la course aux ressources en temps de crise et pendant la relance.
Faciliter la coopération intercommunale pour soutenir les stratégies de relance en apportant des directives cohérentes en matière de sécurité et d’atténuation des risques, en assurant une mutualisation des ressources et en offrant des possibilités accrues d’investissement, par exemple avec le recours aux emprunts mutualisés.
Promouvoir la collaboration interrégionale ou intercommunale pour les commandes publiques, notamment dans des situations d'urgence (centrales d’achat, réseaux, accords-cadres, organismes centraux d’achat). Encourager l’utilisation des outils de l’administration électronique ainsi que l’innovation numérique pour simplifier, harmoniser et accélérer les procédures d’achat au niveau infranational.
Mettre en œuvre activement et promouvoir la coopération transfrontalière afin que les mesures adoptées pour la reprise soient cohérentes sur l’ensemble d'un territoire (par exemple en ce qui concerne la fermeture/réouverture des frontières, le confinement, les stratégies de sortie de crise et les travailleurs migrants).
Voir plus loin : comment le COVID-19 transforme la gouvernance pluri-niveaux et le développement régional
La crise du COVID-19 transforme les systèmes de gouvernance pluri-niveaux et modifie les grandes priorités du développement régional. L'apparition du COVID-19 a mis en évidence l’importance d'une gouvernance à plusieurs niveaux, et en a même montré la nécessité : celle d’une approche de la gestion de crise et de la relance différenciée selon les territoires ; d'un équilibre entre les approches centralisées et décentralisées de la gestion de crise ; d'une direction efficace contrebalancée par de véritables mécanismes de coordination et de consultation ; d'un travail de collaboration entre les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux. Cela montre de façon manifeste l’importance de la confiance dans les institutions publiques – que ce soit sur le plan de la gestion de crise ou des risques sanitaires – et la force d’une communication efficace avec les citoyens et les parties prenantes.
Pendant la crise, tous les niveaux de gouvernement ont dû faire preuve de flexibilité et d’adaptabilité. Ils ont été confrontés à un défi d’ordonnancement des tâches qui a nécessité l'adoption de nouveaux dispositifs de coordination et d’action publique. Pendant la relance, les gouvernements devront s'attacher à poursuivre l'adaptation des dispositifs de gouvernance et des politiques de développement régional afin qu'ils soient ciblés pour faire face aux impacts territoriaux.
La crise du COVID-19 agit comme un « révélateur » et un « accélérateur » des nouvelles tendances dans l’élaboration des politiques de développement régional.
Révélateur : la crise a fait apparaître sous un jour nouveau la faible résilience des régions, notamment en amplifiant des faiblesses préexistantes, comme celles liées aux disparités territoriales en matière d'accès aux soins de santé et au logement, aux changements démographiques, à la fracture numérique entre les zones métropolitaines et rurales et aux conséquences, dans de nombreux pays, d'une décennie de sous-investissement dans les municipalités et les régions. Il n’est pas exclu que ces effets d'amplification se prolongent à moyen et long terme.
Accélérateur : la crise du COVID-19 a considérablement accéléré plusieurs mégatendances, telles que la transformation numérique et l'impératif de transition vers une économie à faible émission de carbone. L'augmentation du travail à distance pourrait changer la donne sur le plan de l'équilibre spatial entre les zones urbaines et rurales, et avoir des répercussions importantes sur la politique de développement régional.
Cela conduit par ailleurs les gouvernements à recourir davantage au développement régional comme un moyen de renforcer la résilience des régions, notamment en facilitant l’accès aux services de base où que ce soit, en réduisant la fracture numérique, en se rapprochant de l’objectif de « zéro émission » et en s'appuyant sur les possibilités offertes par la mondialisation. Les impacts différenciés du COVID-19 entre les communes, les régions et les pays ouvrent un débat plus large sur la manière de renforcer la résilience des territoires et de mieux se préparer aux futurs chocs sanitaires, économiques, sociaux ou climatologiques.
Gérer l’urgence : flexibilité et adaptabilité de la gouvernance pluri-niveaux
La pandémie de COVID-19 oblige tous les niveaux de gouvernement à agir dans un contexte de grande incertitude ainsi que d’intense pression économique, budgétaire et sociale. Depuis la mi-2020, et en particulier depuis l’émergence dans de nombreux pays de nouvelles vagues de contamination, une nouvelle difficulté est apparue : la capacité limitée des pouvoirs publics à ordonnancer l'action. Les gouvernements à tous les niveaux réalisent qu’ils ne peuvent pas utiliser une approche linéaire pour gérer d’abord la crise, puis la sortie de crise et enfin la relance. Ils doivent au contraire intervenir sur tous les fronts simultanément et de façon synchronisée.
Le besoin de flexibilité et d’adaptabilité conduit les gouvernements à revoir leurs systèmes de gouvernance pluri-niveaux, à réévaluer les instruments qu’ils utilisent et à redéfinir leurs priorités en matière de développement régional. En période d’urgence, la clé du succès réside dans les éléments suivants :
Mobilisation et coordination entre les secteurs d’intervention et entre les différents niveaux e gouvernement.
Adoption d’une approche territorialisée face aux crises sanitaires et économiques.
Conduite claire, contrebalancée par des processus de coordination et de consultation efficaces, ainsi que par une collaboration entre tous les acteurs, gouvernementaux et non gouvernementaux.
Renforcement de la confiance dans les institutions publiques, en prenant appui sur une communication régulière avec les parties prenantes et les citoyens.
La situation actuelle met en évidence l’importance d'une gouvernance pluri-niveaux efficace pour gérer les crises. Cela amène les pays à réévaluer leurs systèmes de gouvernance et leurs instruments d'action régionaux afin de les rendre plus adaptés à l’objectif, plus flexibles et mieux à même de répondre aux besoins différenciés des régions. Cette démarche pourrait atténuer la difficulté à ordonnancer les tâches en aidant les gouvernements infranationaux à gérer simultanément de nouvelles vagues de contamination ou d'autres urgences, à se relever de la crise et à acquérir une plus grande résilience.
Comme nous allons le voir ci-après, l’équilibre entre une gestion territoriale centralisée ou décentralisée est en train d’être reconsidéré, de même que les mécanismes de coordination. La crise du COVID-19 montre bien la nécessité fondamentale d'apporter une réponse coordonnée aux situations d’urgence et leurs conséquences, de même qu’elle accentue les risques associés à l’absence de coordination et/ou à une approche très bureaucratique de la gestion de crise – que l'on soit dans un État fédéral, unitaire, centralisé ou décentralisé.
La coordination s'impose comme nécessaire aussi bien entre les différents niveaux de gouvernement et au sein de ces derniers qu’entre les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux, y compris avec les citoyens. Des actions différenciées faisant valoir les avantages potentiels de l’expérimentation et de stratégies territorialisées de sortie de crise et de relance sont la solution pour faire face aux incidences inégales de la pandémie.
La réussite passe également par un partenariat solide entre les gouvernements centraux et infranationaux, ainsi qu’avec les secteurs privé et associatif, la société civile et la population. Les facteurs contribuant à un partenariat réussi comprennent une direction efficace au niveau central – notamment pour définir une stratégie et des lignes directrices permettant d'assurer la cohérence des interventions et de limiter la concurrence entre les territoires –, en répartissant clairement les rôles et les responsabilités, et en veillant à ce que les gouvernements infranationaux soient dotées des capacités nécessaires pour intervenir non seulement conformément aux besoins immédiats mais aussi aux priorités à long terme de leurs territoires.
La pandémie de COVID-19 montre également comment gouvernements centraux peuvent accompagner les gouvernements locaux et régionaux dans la gestion de la crise et de la relance. Parmi les 300 régions et municipalités ayant participé à l’enquête réalisée conjointement par l’OCDE et le Comité européen des régions (CdR) en juin 2020, 75 % ont répondu que le financement était l'un des leviers les plus utiles pour gérer la prochaine crise (OCDE-CdR, 2020[56]). Cela montre l’importance croissante des finances infranationales, en adéquation avec les mandats dévolus. Cela ouvre la voie, d’une part, vers un réexamen possible des sources budgétaires classiques, ou encore vers la recherche de sources de financement externes. L’aide du gouvernement central est considérée comme particulièrement bienvenue dans la définition claire des rôles et des responsabilités entre les niveaux de gouvernement (58 %) ainsi que pour fournir des incitations à mener des politiques ou des programmes pilotes dans les secteurs ayant acquis une importance grandissante du fait du COVID-19 (52 %) (Graphique 24). La modification de la façon dont les responsabilités sont définies et financées entre les niveaux de gouvernement – notamment en ce qui concerne les interventions et la gestion de la crise –, ainsi que le recours accru à l’expérimentation au travers de mesures et d'initiatives pilotes, pourraient accroître la souplesse des systèmes de gouvernance pluri-niveaux et faciliter la mise en place de réponses territorialisées.
Centralisation ou décentralisation : trouver le bon équilibre
La crise du COVID-19 a mis en évidence à la fois les avantages et les inconvénients d'une approche très centralisée et d'une autre très décentralisée. Dans la gestion urgente de certains aspects de santé publique, une approche centralisée peut par exemple favoriser une réponse rapide et uniforme dans tout le pays en faisant fi des inégalités éventuelles, que ce soit en termes de ressources disponibles ou de traitement des individus (par exemple la mise en quarantaine des personnes rentrant d'un pays, d'un État, d'une région ou d'une province donnés). C’est le cas lorsque les gouvernements centraux décident de transférer des patients hospitalisés entre des régions très touchées par l'épidémie et d'autres qui le sont moins, comme ce fut le cas en France. Au début de la pandémie, par exemple, le gouvernement français a transféré des patients des hôpitaux des régions les plus touchées (comme le Grand Est) vers les régions moins touchées dans le sud. Une approche centralisée peut également faciliter les échanges rapides d’informations et de connaissances, essentiels en temps de crise (Silberzahn, P., 2020[362]). Un système décentralisé peut quant à lui offrir plus de souplesse et de possibilités d’expérimentation dans un contexte incertain, favorisant ainsi des approches novatrices partant du niveau local (Silberzahn, P., 2020[362]) qui pourront être appliquées ailleurs avec les adaptations nécessaires si elles portent leurs fruits. En Italie, la stratégie à plusieurs niveaux adoptée par la Vénétie pour lutter contre le COVID-19 tire son origine de celle mise au point par la ville italienne de Vò-Euganeo, qui a d’abord été étendue à l’ensemble de la Vénétie puis appliquée, en totalité ou en partie, dans d'autres régions italiennes. Les approches décentralisées permettent aussi aux gouvernements locaux et régionaux de réagir et d’intervenir rapidement. Les réseaux décentralisés de laboratoires en Allemagne ont par exemple été essentiels pour la mise en œuvre de la stratégie de dépistage proactive adoptée par le pays.
Un autre effet de la crise du COVID-19 est de faire de la centralisation/décentralisation non pas un but mais un moyen d'atteindre des objectifs (OCDE, 2019[363]). En témoigne le fait que, pour gérer la crise, certains gouvernements décident de recentraliser temporairement et d’autres de décentraliser. De nombreux pays ont adopté des lois sur l’état d’urgence qui transfèrent certaines responsabilités infranationales aux gouvernements centraux ou fédéraux. D'autres, au contraire, ont décidé de déléguer, du moins temporairement, des compétences supplémentaires aux gouvernements infranationaux. La Suisse a par exemple recentralisé temporairement la gestion de la santé pour faire face à la crise. Dès le début de la pandémie, le Royaume-Uni a temporairement décentralisé la gestion sanitaire et, alors que la crise se poursuit, le gouvernement britannique réfléchit à la façon de collaborer davantage avec les nations décentralisées.
L’efficacité des mesures prises à court, moyen et long terme en réponse à la crise provoquée par le coronavirus a peu à voir avec le fait que le pays soit fédéral ou unitaire, ou avec son degré de décentralisation. Ce qui compte, en revanche, ce sont les mécanismes de coordination en place et la capacité des pouvoirs publics à harmoniser les priorités, à appliquer des mesures communes, à se soutenir mutuellement et à favoriser l’échange d'informations, notamment avec la population (OCDE, 2019[363]). La crise montre également l’importance d'une stratégie de gestion des risques, d’une compréhension et d'une répartition claires des responsabilités entre les différents niveaux de gouvernement – d'autant plus nécessaires en période de crise –, mais aussi d’un financement adéquat des missions au niveau infranational. Cela permet non seulement de répondre aux besoins immédiats qui ne cessent d'apparaître, mais aussi de s’assurer de pouvoir le faire à l’avenir.
Les situations d'urgence ou de crise exigent une capacité de réaction rapide pour éviter leur aggravation et limiter leurs effets néfastes. La capacité d’adaptation au changement et à l’incertitude et la capacité à rectifier la stratégie s’il y a lieu deviennent indispensables pour une gestion de crise efficace. Le niveau local étant celui où les effets de la crise se font sentir en premier, les gouvernements locaux et régionaux doivent disposer d'une marge de manœuvre suffisante pour réagir rapidement, efficacement et de manière responsable, qu’ils opèrent dans un système centralisé ou décentralisé. Or, dans bien des cas, cela n'est possible que si le contexte leur offre la souplesse et la latitude nécessaires pour mobiliser des ressources, pour prendre et faire appliquer des décisions permettant d’atténuer les effets négatifs de la crise, ou d’en éviter d’autres. Un allègement temporaire ou permanent des contraintes et formalités administratives peut également faciliter l’exercice des compétences et la prise de décisions par les gouvernements infranationaux et simplifier l'accès des entreprises et des citoyens aux aides d'urgence auxquelles ils peuvent prétendre.
Enfin, l’hétérogénéité des effets de la crise du COVID-19 oblige à faire preuve d’une certaine souplesse pour pouvoir adopter des mesures qui soient territorialisées, permettent de répondre aux besoins les plus pressants et s’adaptent au degré de préparation des différentes localités. Cela peut aider une région à engager des actions non pas consécutives mais cohérentes, en répondant aux besoins en matière de gestion d’urgence, de confinement et de relance en fonction de l’évolution de la pandémie au niveau régional. Ces approches territoriales différenciées s'observent et ont tout autant leur place dans les pays fédéraux ou hautement décentralisés que dans les pays unitaires ou hautement centralisés. L’importance de l’adoption d'une approche territorialisée pour faire face à la crise sanitaire a progressivement fait son chemin. Dans un grand nombre de pays, des mesures particulières concernant les masques, la fermeture des établissements scolaires et des restaurants et un confinement total/partiel sont appliquées dans certaines localités et régions – plutôt qu'à l’échelle nationale –, de manière à limiter l'impact économique.
Une bonne coordination minimise le risque d’une gestion de crise défaillante
Une réponse coordonnée à tous les niveaux de gouvernement peut limiter les défaillances de la gestion de crise, tant dans les systèmes fédéraux que dans les systèmes unitaires. Nombre de pays ayant acquis une expérience en matière de gestion de crise semblent mieux préparés face à la crise du COVID-19 sur le plan de la coordination. En temps de crise, le défaut de coordination risque avant tout de se traduire par un renvoi des responsabilités vers d’autres niveaux de gouvernement, ce qui peut entraîner une réponse désordonnée et provoquer un risque collectif. Dans un système fédéral, par exemple, les territoires ne sont probablement guère incités à coopérer (mise en commun de matériel, de personnel qualifié, etc.) si cela risque de compromettre leur propre capacité à apporter une réponse adéquate à une situation de crise. Une coordination horizontale est essentielle pour harmoniser le plus possible les efforts et éviter leur dispersion, qui peut conduire à un risque collectif. Les approches des pays sont très diverses en la matière et font intervenir différents niveaux de gouvernement.
Lorsqu’ils sont interrogés sur la stratégie efficace de sortie de crise, les gouvernements infranationaux ayant répondu à l’enquête OCDE-CdR considèrent comme très importantes (pour 90 % d’entre elles) la coordination de la conception et de la mise en œuvre des mesures entre tous les niveaux de gouvernement, et (pour 79 % d’entre elles) la disponibilité de ressources financières supplémentaires. La communication avec la population et la possibilité d'adapter les mesures à la situation locale sont également citées comme des éléments essentiels pour une sortie de crise réussie (Graphique 25). Bien que les résultats de l’enquête soient globalement homogènes entre les différentes catégories de gouvernements infranationaux, les régions et les municipalités ont des priorités légèrement différentes. Les régions mettent plus l’accent sur l'adaptation des mesures de sortie de crise au contexte local (76 % contre 68 %), alors que les municipalités privilégient davantage la nécessité de disposer de ressources humaines supplémentaires (48 % contre 33 %).
Plus un pays est décentralisé, plus il doit mobiliser ses plateformes de coordination pour éviter une dispersion des efforts. Les associations nationales de collectivités locales contribuent également aux initiatives de coordination verticale par la diffusion d’informations, la recherche et le partage de solutions, ainsi que l’assistance à leurs membres dans la mise en œuvre des mesures d’urgence. Les réponses efficaces à la crise montrent que la mise en place de mécanismes solides de coordination verticale et horizontale est plus importante que jamais.
L'utilité des partenariats et de la communication pour la gestion de crise et au-delà
Aucun gouvernement, ou niveau de gouvernement, ne peut répondre à lui seul aux impératifs de la gestion de crise. Par son étendue, la crise du COVID-19 exige de tous les niveaux de gouvernement qu’ils renforcent leurs partenariats avec les autres niveaux, avec les secteurs privé et associatif et avec la population. Un programme d’aide efficace aura plus de chances de voir le jour si les priorités sont définies d'un commun accord et les initiatives conçues en assurant un échange d'informations suffisant entre ceux qui les développent et ceux qui les mettent en œuvre. Cela suppose bien entendu de la coordination, mais aussi une définition claire et une parfaite compréhension et acceptation des rôles et responsabilités de chacun, ainsi que du respect mutuel à court, moyen et long terme.
La mobilisation rapide de tous les acteurs concernés du secteur public, privé et associatif peut aider les gouvernements à accroître l’efficacité de leur réponse à la crise. Cette idée est mise en application de différentes manières. Les pays asiatiques, comme la Corée, s'appuient sur leur expérience du SRAS. En Attique (Grèce), le gouvernement régional travaille avec l'association médicale d’Athènes pour mettre en place des mesures de prévention contre le coronavirus (Comité européen des régions, 2020[364]). En Asie et dans les pays nordiques, par exemple, les plans de gestion de crise contribuent à la mobilisation rapide de divers acteurs pour répondre aux problèmes découlant d'une crise comme cette pandémie.
Une communication claire, transparente, rapide et précise entre toutes les parties prenantes est fondamentale à bien des égards. Tout d'abord, elle permet au gouvernement et au personnel d'urgence de mener des interventions ciblées. En Nouvelle-Zélande, l'unité de réponse au COVID-19 des gouvernements locaux en est un exemple (Gouvernement de la Nouvelle-Zélande, 2020[365]). Une bonne communication favorise également le partage de connaissances, ce qui permet d’appliquer des solutions plus efficaces. Au Portugal, la Direction générale des pouvoirs locaux a mis en place une ligne de contact pour favoriser l'échange d'informations et l'apprentissage mutuel entre les municipalités. En Angleterre, l’Association des gouvernements locaux met à la disposition des conseils municipaux des modèles de communication pour le partage de bonnes pratiques et l'échange d'informations (Local Government Assocciation, 2020[366]). Enfin et surtout, la communication contribue à la confiance envers les institutions et envers ceux qui pilotent les opérations de gestion de crise, ce qui peut atténuer les incidences négatives de la crise. L’efficacité de la communication de crise dépend des relations des différents niveaux de gouvernement entre eux et avec le secteur public et privé. Cette communication doit être claire, rapide et régulière, et son message doit être cohérent. Les gouvernements infranationaux doivent savoir ce qui les attend et ce que l’on attend d’elles : leur rôle doit être bien défini. Les citoyens et les entreprises doivent avoir l’assurance que le gouvernement a mis en place des stratégies pour toutes les phases de la crise. Comme gouvernements infranationaux, ils ont besoin de savoir ce que l’on attend d’eux, et se sentir soutenus dans une période difficile (Smith, N., 2020[367]). Une étude montre que face à la crise du COVID-19, la population attend du gouvernement qu'il prenne la direction des opérations dans tous les domaines touchant à la pandémie – confinement, diffusion d'informations, aide d'urgence et soutien économique –, qu'il les aide à faire face à la crise et ramène le pays à la normale (Edelman, 2020[368]). Les attentes sont moindres de la part des entreprises, des ONG et des médias.
L'un des aspects les plus positifs d'un partenariat est la capacité à définir des priorités, des stratégies et des objectifs communs. Des décisions prises unilatéralement peuvent entraîner au mieux le non-respect des mesures, au pire des manifestations ou des protestations de plus grande ampleur, comme cela s’est produit pendant la crise en Espagne, aux États-Unis, en France (Marseille), en Italie et au Royaume-Uni. Le fait de réunir les différents niveaux de gouvernement actifs sur un même territoire pour fixer des objectifs et concevoir des actions collectivement peut renforcer la mise en œuvre des mesures de confinement et des efforts de relance. Un autre point important est de consulter en temps voulu et de façon suffisante les autres parties prenantes, y compris les chefs d’entreprise, les prestataires de services, les enseignants, les parents d'élèves et la société civile. Cela peut contribuer à une plus grande acceptabilité des mesures prises – malgré la « lassitude du virus » – et faire émerger des initiatives innovantes et appropriées au contexte local. Une enquête réalisée en septembre 2020 sur la perception par les citoyens de l’UE du rôle des gouvernements locaux et régionaux dans la gestion de la crise du COVID-19 ainsi que de leur influence sur la politique et les mesures de l’UE montre qu’environ deux tiers des Européens estiment que les gouvernements en question n’ont pas assez d’influence sur les décisions prises au niveau de l’UE (Comité européen des régions, 2020[188]). Les Européens aimeraient en particulier que les gouvernements locaux et régionaux aient plus de poids sur les dispositions concernant la santé (45 %), l’emploi et les affaires sociales (43 %), l’éducation, la formation et la culture (40 %). De plus, 58 % des Européens interrogés considèrent qu'une influence accrue des gouvernements locaux et régionaux aurait des effets positifs sur la capacité de l’UE à résoudre les problèmes (Comité européen des régions, 2020[188]) dont, implicitement, ceux associés au coronavirus.
L’importance de la confiance à tous les niveaux de gouvernement
Dans certains pays, la confiance à l’égard du gouvernement central a augmenté dans le contexte de la crise actuelle. Lorsque ce n’est pas le cas, le déficit est souvent comblé par une confiance accrue envers les gouvernements infranationaux (qui, en général, bénéficient d’un niveau de confiance plus élevé même hors période de crise) (Edelman, 2020[368]). Les Européens ont tendance à avoir davantage confiance dans leurs gouvernements locaux et régionaux (52 %) qu’en l’UE (47 %) ou leur gouvernement national (43 %) (Comité européen des régions, 2020[188]). 48 % des Européens estiment que les gouvernements locaux et régionaux prennent – et vont continuer à prendre – les mesures qui conviennent pour surmonter les répercussions économiques et sociales de la pandémie de COVID-19. La confiance des citoyens à l’égard du gouvernement peut permettre d'atténuer le sentiment de « lassitude à l'égard du virus » qui entraîne du laxisme dans le respect des mesures de contrôle du virus (confinement, distanciation physique et port du masque) et menace le succès des dispositifs d’urgence et des campagnes de vaccination.
La confiance des citoyens à l’égard du gouvernement génère une meilleure adhésion aux mesures d’urgence qui sont prises. Les mesures de restriction de la mobilité sont plus efficaces lorsque la confiance est élevée. Cette relation est valable entre et à l'intérieur même des pays. Aux États-Unis par exemple, une politique rigoureuse est associée à une baisse plus importante de la mobilité lorsque la confiance est relativement forte et donc, très probablement, à une baisse plus importante de la propagation de la pandémie. En Europe, l’adhésion aux politiques de la santé est également meilleure lorsque la confiance est élevée (Bargain et Aminjonov, 2020[369]). L'efficacité des restrictions sur la réduction des taux de mortalité du COVID-19 dépend de l'effet médiateur de la confiance entre la restriction et la mobilité/les interactions sociales.
Ces résultats confirment une fois de plus l'importance d'une gouvernance pluri-niveaux réussie. Les différents niveaux de gouvernement dépendent les uns des autres pour plusieurs aspects de la conception et de la mise en œuvre des actions publiques et des services visant à faire face à la crise du COVID-19. Néanmoins, le succès des actions engagées dépend dans une large mesure des gouvernements infranationaux et de leur capacité à trouver des solutions. La confiance des citoyens peut aider au respect des mesures de confinement et atténuer les effets de la « lassitude du virus ». Dans ce contexte, il est donc important de s'assurer que les gouvernements infranationaux bénéficient d'un soutien suffisant et adapté des plus hauts niveaux de gouvernement pour mettre en œuvre des solutions et préserver la confiance des citoyens.
Même si cette crise génère peut-être une hausse des niveaux de confiance, l’enjeu pour les responsables de l’action publique sera de les renforcer et les maintenir. Tous les niveaux de gouvernement risquent d’avoir besoin de dresser un bilan et d’évaluer les mesures prises pour accroître la confiance. Si de nombreuses années peuvent être nécessaires pour susciter la confiance, la perdre peut aller très vite (Edelman, 2020[368]).
Repenser les politiques de développement régional après la pandémie
L’impact différencié du COVID-19 sur les individus, les communes et les régions, ainsi que le risque qu’elles n’entraînent des disparités territoriales, rendent d’autant plus urgente l’adoption d’une approche territorialisée de la relance, avec des mesures bénéfiques à tous. Le rôle joué par des partenariats efficaces et l’existence d'un climat de confiance entre différents types d'acteurs, le besoin de flexibilité et d’adaptabilité, ainsi que l’importance d'un équilibre entre les actions descendantes et ascendantes renforcent ce caractère d’urgence. La crise relance également le dialogue sur les politiques à suivre pour accroître la résilience des régions. La pandémie et les besoins qu’elle suscite à tous les niveaux de gouvernement entraînent une modification des priorités en matière de développement régional allant dans le sens d'un renforcement de la résilience des régions (Graphique 26).
Accroître la résilience des régions signifie dans un premier temps s’assurer de leur capacité à absorber les conséquences du choc économique, environnemental, politique et social ou les pressions chroniques et/ou à s’y adapter (ou à rebondir), puis de leur capacité à continuer à répondre aux besoins des citoyens et des entreprises de la même manière – et idéalement, mieux – qu’avant la crise.
Dans l’après COVID-19, l’objectif de résilience risque de susciter des investissements nationaux et infranationaux accrus dans le secteur de la santé et d’autres services publics. Au sein de l’UE, 76 % des gouvernements infranationaux interrogés considèrent que les stratégies de développement régional devraient mettre davantage l’accent sur l’accès à des services publics de qualité – notamment en matière sanitaire – sur tous les territoires (OCDE-CdR, 2020[56]).
Le renforcement de la résilience des régions pourrait également entraîner une réévaluation des objectifs de la politique régionale, y compris en ce qui concerne l’équilibre entre les zones urbaines et rurales, la fracture numérique, l’équilibre entre les actifs matériels et immatériels (les infrastructures telles que le haut débit, les transports publics et les logements sociaux, la R-D, l’innovation, le bien-être et la culture, la productivité et les profils industriels), ainsi que la meilleure façon d'atteindre des finalités plus ambitieuses, notamment concernant l'impératif du changement climatique.
L’équilibre spatial entre les zones urbaines et rurales et le rôle du télétravail
L'avenir du télétravail peut avoir un impact significatif à long terme sur le développement urbain et rural. La pandémie du COVID-19 ainsi que ses conséquences pourraient contribuer à renforcer les liens entre les zones urbaines et rurales. Le télétravail est un facteur important dans la capacité d'un territoire à atténuer le volet économique de la crise. Il a nécessité des investissements et de l’adaptation (notamment culturelle et comportementale) de la part des employeurs et de leur personnel. Si la question de savoir si le développement du télétravail conduira les individus à quitter les grandes villes pour s’installer dans des villes plus petites ou à la campagne est actuellement en débat, l’attrait des villes n’a pas disparu, notamment en ce qui concerne les opportunités d’emploi et l’accès aux services et aux équipements. Cela dit, les villes de taille moyenne pourraient connaître un véritable engouement, de même que les petites villes situées à la périphérie des grandes. L'impact à long terme de la crise sur l’équilibre spatial entre les zones urbaines/rurales est difficile à prédire, même si le télétravail, ou d’autres formats de travail plus flexibles, risque de s’installer de façon plus ou moins permanente.
En Islande, par exemple, le COVID-19 a accentué l’intérêt d'un programme d'emploi public visant à garantir que 10 % de tous les emplois publiés dans les ministères ou leurs institutions ne soient pas associés à un lieu spécifique. En d'autres termes, le lieu de résidence ne doit pas influencer la sélection du personnel du ministère ou la prise en compte de l'opportunité d'emploi par un candidat. L'attention est plutôt portée sur l'emploi en question. Si un membre du personnel est nommé et que le lieu de son domicile est trop éloigné pour effectuer quotidiennement le trajet vers le ministère ou l'institution qui recrute, l'employeur doit essayer de trouver des installations de travail adéquates plus proches du domicile. D'ici à la fin de 2021, 5 % de tous les emplois annoncés ne devraient pas être rattachés à un lieu fixe, pour atteindre 10 % d'ici à 2024. La mesure du succès est le nombre d'emplois dans les différents ministères et institutions qui sont effectués hors site par rapport au 1er janvier 2018. Cette initiative est dirigée par le ministère des Finances et des Affaires économiques.
Participation aux chaînes de valeur mondiales et à la politique industrielle
La mondialisation a une relation ambivalente avec la résilience dans la crise du COVID-19 et face au défi climatique (OCDE, 2021[370]). L’impact de la pandémie sur les économies locales, régionales et nationales conduit les responsables gouvernementaux à repenser les politiques industrielles et les processus de production, ainsi que leur insertion dans les chaînes de valeur mondiales. Les possibilités de relocalisation des secteurs stratégiques sont à l'étude. Dans le domaine des matières premières, par exemple, cela pourrait permettre de redynamiser les économies rurales accueillant ces activités. Un autre aspect bénéfique pour ces économies serait la création potentielle d’emplois dans le cas des entreprises qui, non seulement fabriquent des produits, mais aussi fournissent des services. Le fait de privilégier les processus de production locaux peut raccourcir les délais de production et les chaînes d'approvisionnement, rendant ces dernières plus durables en réduisant les émissions de carbone, un argument séduisant pour les consommateurs.
Pour autant, les difficultés ne manquent pas et varient en fonction de la configuration industrielle de chaque région. À titre d’exemple, les régions possédant de grands ports ou pôles logistiques, de même que celles dont une part importante de l’emploi se trouve dans le secteur manufacturier ou d'autres secteurs exportateurs risquent d’être plus touchées par les perturbations des chaînes de valeur mondiales. Par ailleurs, la relocalisation ou la production au niveau local peut s’avérer plus coûteuse que la délocalisation. Les changements de production peuvent également être plus difficiles à mettre en œuvre si la région concernée manque de ressources ou de compétences. D'un autre côté, les régions dont la productivité repose principalement sur les PME peuvent avoir une résilience moindre face aux perturbations (comme le COVID-19) car ce type d’entreprise intervient souvent sur un nombre limité de marchés et travaille avec un éventail réduit de fournisseurs et d'acheteurs.
Malgré ces difficultés, la crise du COVID-19 peut être l’occasion d'accélérer la reconstruction des processus de production, des industries et des régions qui étaient à l’arrêt ou ne connaissaient qu’une croissance modérée. Elle peut aussi être un moment opportun pour accroître l’investissement en réorganisant les méthodes de production dans des domaines qui n’existaient pas lors des précédentes crises (par exemple : impression et production 3D, commerce électronique, technologies numériques facilitant le télétravail, etc.). La crise du COVID-19 pourrait également susciter des bouleversements spectaculaires, par exemple au regard de l’économie circulaire, de la relocalisation de la production, des circuits courts, de la réorganisation logistique et de la transformation numérique des entreprises (Assemblée des Communautés de France, 2020[371]). Enfin, il est possible que cette crise favorise l’amélioration et l’extension des services, contribuant alors à l’attractivité des régions rurales et isolées.
L'impératif du changement climatique : intégrer les objectifs de neutralité carbone dans les plans de relance à tous les niveaux
Le changement climatique présente des risques pour les fondements du bien-être humain, notamment la santé, avec de potentiels effets d’entraînement systémiques. Ces effets varient d'une région à l'autre et d'une ville à l'autre et, comme dans le cas de la crise du Covid-19, exigent une réponse territorialisée (OCDE, 2021[370]). Les régions et les municipalités occupent une position idéale pour tisser des liens entre les plans de relance liés au COVID-19 et les politiques associées au changement climatique. Elles sont en effet responsables de quelque 64 % de l’investissement public destiné aux initiatives climatiques et environnementales. La crise du COVID-19 pourrait, là aussi, fournir l’occasion d’utiliser ces prérogatives pour investir dans la transition écologique et chercher à répondre aux besoins locaux. Par exemple, l’investissement visant à réduire les risques sanitaires peut renforcer – ou être renforcé par – l’investissement dans la réduction de la pollution car la santé et la propreté de l’environnement peuvent être positivement corrélés et contribuer à la résilience d'une collectivité. Il convient que les régions et les municipalités lient les infrastructures d'urgence aux objectifs à long terme.
Si les priorités écologiques sont annoncées par de nombreux gouvernements comme étant au cœur de la relance, il existe encore des écarts importants entre la théorie et les mesures politiques concrètes qui sont adoptées. Pourtant, reporter des décisions audacieuses peut avoir des coûts énormes. Au sein du G20, seuls 16 % des mesures de relance destinées aux secteurs importants pour les villes (énergie, transports et déchets) sont durables, comme le montre l'indice de relance verte (Coalition for Urban Transitions, 2020[372]), ce qui représente environ 1 % du total des mesures de relance. Les dépenses allouées aux mesures vertes représentent environ 17 % des dépenses de relance ou 2 % des dépenses totales liées au COVID-19 dans les pays de l'OCDE, au Costa Rica (adhésion) et au Brésil, en Afrique du Sud, en Chine, en Inde et en Indonésie (OCDE, 2021[3]).
Adopter de nouveaux instruments de politique régionale et renforcer les systèmes de gouvernance pluri-niveaux.
Les nouveaux enjeux issus de la crise, et d'autres qui l'ont précédée, appellent des réponses territorialisées. Le manque de confiance dans les gouvernements, en particulier dans le gouvernement central, pose des questions démocratiques et conduit à une montée en puissance d'une « géographie du mécontentement ». Les niveaux élevés de la dette publique nationale et l'augmentation de la dette publique infranationale créent une marge de manœuvre budgétaire limitée à moyen terme, au-delà des plans de relance. Les disparités s'amplifient entre les territoires qui disposent des capacités administratives, fiscales et stratégiques pour attirer les financements privés et ceux qui n'en disposent pas.
Ces obstacles créent des opportunités pour l'adaptation de nouveaux instruments de politique régionale et pour le renforcement des systèmes de gouvernance pluri-niveaux. Les priorités pendant la relance sont les suivantes:
Renforcer les systèmes de gouvernance pluri-niveaux flexibles et adaptables requis pendant la phase d'urgence pour pouvoir continuer à répondre rapidement aux défis territoriaux, et apporter des réponses différenciées aux besoins des régions, tout en maintenant des pratiques de bonne gouvernance pendant la phase de relance.
Renforcer la culture du partenariat – avec les autres niveaux de gouvernement, avec les secteurs privé et associatif et avec la population – afin de surmonter les nouvelles difficultés collectives.
Réévaluer la façon dont les responsabilités sont attribuées et financées, et évaluer les domaines à améliorer pour mieux gérer les futurs chocs.
Développer des stratégies de gestion des risques à tous les niveaux pour construire des régions plus résilientes à l'avenir.
Identifier de nouvelles sources de financement, allant des sources budgétaires traditionnelles aux sources de financement externes et à la collaboration avec le secteur privé.
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[159] Weizmann Institute of Science (2021), Patterns of COVID-19 pandemic dynamics following deployment of a broad national immunization program, https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.02.08.21251325v1.full.pdf.
[439] White House (2021), Fact sheet: The American Jobs Plan, https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2021/03/31/fact-sheet-the-american-jobs-plan/ (consulté le 31 mars 2021).
[313] White House (2021), « President Biden Announces American Rescue Plan », Briefing Room, https://www.whitehouse.gov/briefing-room/legislation/2021/01/20/president-biden-announces-american-rescue-plan/ (consulté le 22 mars 2021).
[241] Wiener Zeitung (2021), « 1,5 Milliarden Euro mehr Corona-Hilfe für Gemeinden », https://www.wienerzeitung.at/nachrichten/politik/oesterreich/2088292-15-Milliarden-Euro-mehr-Corona-Hilfe-fuer-Gemeinden.html.
[69] Wiener Zeitung (2020), Cities and municipalities face loss of revenue of up to 2 billion, https://www.wienerzeitung.at/nachrichten/politik/oesterreich/2059518-Staedten-und-Gemeinden-droht-Einnahmenverlust-bis-zu-2-Milliarden.html.
[121] WSJ (2021), China Reimposes Covid-19 Lockdowns as It Battles Worst Outbreak in Months, https://www.wsj.com/articles/china-reimposes-covid-19-lockdowns-as-it-battles-the-worst-outbreak-in-months-11610449154.
[256] Yicai (2020), 新增2万亿资金直达市县,总理为何说会触动部门利益, https://www.yicai.com/news/100651964.html.
[293] ZMOS (2020), The Financial Relief Act was amended and approved by a parliamentary committee.
[201] ΑΠΕ-ΜΠΕ (2020), Thessaly Region: Plan to support local businesses and employees, https://www.capital.gr/oikonomia/3480314/perifereia-thessalias-sxedio-gia-ti-stirixi-ton-topikon-epixeiriseon-kai-ton-ergazomenon.
Annexe 1. La décentralisation du secteur de la santé dans les pays de l’OCDE
Les pays sont répartis en trois catégories, selon que le niveau de décentralisation des soins de santé y est élevé, moyen ou faible (Graphique 27). Dans la plupart des pays fédéraux (à l’exception de l’Allemagne et de la Belgique) et quelques pays unitaires (Italie et trois pays nordiques), le secteur de la santé est fortement décentralisé. À l’autre extrémité, 15 pays unitaires, plus l’Allemagne et la Belgique, constituent le groupe où la santé relève essentiellement de la responsabilité des autorités centrales ou fédérales ou des fonds de sécurité sociale. Cette interprétation peut être nuancée, dans la mesure où les dépenses de santé des pays unitaires sont parfois des dépenses déléguées effectuées pour le compte du gouvernement central, les gouvernements infranationaux n’ayant pas ou peu de choix quant à leur affectation. Dans les pays fédéraux, en revanche, les gouvernements central et des états fédérés se partagent quelquefois les responsabilités décisionnelles (OCDE, 2019[373] ; Beazley et al., 2019[374] ; OCDE, 2020[236]). La part publique des dépenses de santé peut également être financée par les régimes d'assurance sociale et non directement par les autorités centrales ou fédérales. En Allemagne, en Belgique, en France et au Luxembourg, l’assurance sociale représentait entre 85 % et 95 % des dépenses publiques en 2017. Il convient aussi de reconnaître que si la prestation des soins de santé relève généralement de la responsabilité du secteur public, le secteur privé joue souvent un rôle important dans la production des services, aux côtés du secteur public.
Source : OCDE, sur la base de (OCDE, 2020[375])
Annexe 2. Emprunts infranationaux (2018-2022)
Annexe 3. Définition des décès liés au COVID par pays
Pays |
Définition |
Source |
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Australie |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. |
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Autriche |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un cas de COVID-19 confirmé en laboratoire et dont l'issue est le décès, pour lequel le statut « rétabli » n'a PAS été présent entre le statut « maladie » et le statut « décès ». |
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Belgique |
Un décès dû au COVID-19 est défini comme un décès dans un cas probable ou confirmé de COVID-19. Il s'agit des décès rapportés par les autorités sur la base, à compter du 24 mars 2020, des données communiquées par les hôpitaux. Dans un premier temps, seuls les décès des cas confirmés par un test de laboratoire ou un scanner thoracique évocateur du COVID-19 ont été rapportés. Depuis le 5 mai 2020, les décès des cas probables á l’hôpital sont également inclus. Les décès de cas possibles sont des patients qui n'ont pas eu de test de diagnostic pour le COVID-19, mais qui répondaient aux critères cliniques du médecin pour la maladie. Les décès en dehors des hôpitaux (par exemple, dans les maisons de retraite, les autres communautés résidentielles, au domicile, etc.) sont rapportés par les autorités régionales et comprennent les décès des cas confirmés et possibles. Les décès liés au COVID-19 en Belgique sont classés par région en fonction du lieu du décès. |
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Brésil |
Tout décès d'une personne dont le diagnostic de COVID-19 est confirmé, non concluant ou écarté (test négatif) doit être immédiatement notifié au système de surveillance épidémiologique local. Selon le document, la confirmation du décès par le COVID-19 et l'inclusion dans les statistiques de l'État et du pays dépendent du résultat des tests de laboratoire qui attestent de la présence du virus. |
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Canada |
Statistique Canada et les organismes provinciaux et territoriaux de statistiques de l'état civil utilisent deux codes pour identifier le COVID-19 déclaré comme cause de décès : U071 pour le COVID-19 spécifié comme confirmé par un résultat de test positif et U072 pour le COVID-19 décrit comme « possible », « probable » ou « en attente d'un résultat de test (positif) ». Le nombre total de décès liés au COVID-19 est déterminé en additionnant les chiffres de ces deux catégories. La première catégorie comprend également les décès pour lesquels le certificat ne précise pas s'ils sont « positifs », « possibles », « probables » ou « en attente ». Au Canada, la majorité des décès liés au COVID-19 a été classée en U071 (86 %). |
https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/45-28-0001/2020001/article/00087-eng.htm |
Chili |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès résultant d’une pathologie clinique compatible, dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. Les décès sont enregistrés par région de résidence. |
https://www.minsal.cl/nuevo-coronavirus-2019-ncov/informe-tecnico/ |
Colombie |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès résultant d’une maladie cliniquement compatible, dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. |
|
Croatie |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès causé par une maladie cliniquement compatible dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. Les décès dus au COVID-19 ne peuvent pas être attribués à une autre maladies (par ex. un cancer) et doivent être comptabilisés séparément des pathologies préexistantes suspectées d'être des déclencheurs des formes graves du COVID-19. Les décès liés au COVID-19 sont classés géographiquement en fonction du lieu de résidence. |
https://www.hzjz.hr/wp-content/uploads/2021/03/Smjernice-za-%C5%A1ifriranje-uzroka-smrti-COVID-19.pdf / https://www.koronavirus.hr/zupanije/139 |
République tchèque |
Un décès dû au COVID-19 est défini comme le décès des personnes qui ont été testées positives au COVID-19 (par test PCR), quelles que soient les causes de leur décès, et dont le décès est survenu à l'intérieur ou à l'extérieur de l'hôpital. Les décès liés au COVID-19 sont rapportés par centre sanitaire régional. |
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Danemark |
Un décès dû au COVID-19 est défini statistiquement par l'autorité sanitaire danoise comme un décès survenu dans les 30 jours après qu'une personne a été testée positive au SRAS-CoV-2 par test PCR. Cela signifie que le COVID-19 n'est pas nécessairement la cause sous-jacente du décès. Le nombre de décès COVID-19 rapportés par le SSI est collecté à partir du système danois d'enregistrement civil (CPR) et du registre des causes de décès, ce qui peut générer un certain délai entre la date du décès (telle qu'indiquée dans ces registres) et la date à laquelle les décès sont inclus dans les mises à jour du SSI. La répartition géographique repose sur le lieu de résidence des personnes décédées. |
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France |
Les décès liés au COVID-19 sont rapportés par Santé Publique France qui compile les données transmises par différents canaux. Le nombre comprend les décès à l'hôpital (obtenus via le Système d'information sur le suivi des victimes (SI-VIC) par le biais de certifications électroniques), en plus des décès dans les établissements médico-sociaux, qui sont déclarés séparément par ces derniers. Les décès en maison de retraite (EHPAD) sont également rapportés séparément. Un décès dû au COVID-19 est défini comme le décès des personnes diagnostiquées au COVID-19 par test PCR ou scanner thoracique, indépendamment de la cause initiale de l’admission à l’hôpital du patient (pour le décompte hospitalier). Les décès sont enregistrés dans la commune où ils surviennent (et non au lieu de résidence du défunt). |
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Allemagne |
Les statistiques du RKI comprennent les décès dus au COVID-19 pour lesquels il existe des preuves confirmées en laboratoire de la présence du SRAS-CoV-2 (détection directe de l'agent pathogène) et qui sont décédés en relation avec cette infection. Sont actuellement enregistrées les personnes décédées directement de la maladie (« décédé de ») et les personnes atteintes de maladies antérieures qui ont été infectées par le SRAS-CoV-2 et pour lesquelles il n'a pas été possible de prouver de manière concluante la cause du décès (« décédé avec »). De manière générale, il est toujours à la discrétion du département de la santé de décider si un cas est considéré comme décédé ou transmis au RKI avec le COVID-19 ou non. |
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Italie |
Pour définir un décès comme étant dû au COVID-19, tous les critères suivants doivent être réunis : 1) Le décès est survenu chez un patient définissable comme un cas confirmé de COVID-19 (un cas avec une confirmation en laboratoire de l'infection par le SRAS-CoV-2, effectuée au laboratoire national de référence de l'Institut national de la santé (ISS) ou par les laboratoires régionaux de référence, indépendamment des signes et symptômes cliniques.). Cette définition est conforme au flux d'informations du système national de surveillance du COVID-19 qui est basé sur la collecte des cas confirmés par les laboratoires de référence régionaux avec des tests moléculaires du SRAS-CoV-2 et parmi lesquels des décès sont signalés ; 2) Présence d'un tableau clinique et instrumental suggérant le COVID-19 ; 3) Absence d'une cause claire de décès autre que le COVID-19 ou en tout état de cause non attribuable à l'infection par le SRAS-CoV-2 (par ex. un traumatisme). Une maladie préexistante est définie comme toute maladie qui a précédé l'infection par le SRAS-CoV-2 ou qui a contribué au décès sans faire partie de l'enchaînement des causes qui ont conduit au décès lui-même. 4) Absence de période de rétablissement clinique complet entre la maladie et le décès. |
https://www.istat.it/it/files//2020/06/Rapporto-ISS-Istat-cause-di-morte-COVID-19-49_2020.pdf |
Japon |
La définition des décès liés au COVID varie selon les autorités locales. Dans certaines préfectures, les cas jugés comme ayant d'autres causes de décès sont exclus du décompte, tandis que dans d'autres, les autorités locales les comptabilisent tous comme des décès liés au COVID-19, quelle que soit la cause de décès. Depuis l'annonce faite le 8 mai 2020, la source de données pour les cas domestiques (à l'exclusion de ceux liés aux vols charter) correspond au cumul des données publiées par les municipalités concernées sur leurs sites web. Avant cela, les données correspondaient au cumul des enregistrements individuels collectés par le ministère de la Santé (MHLW). Les cas domestiques ne comprennent pas les cas de mise en quarantaine à l’aéroport, indépendamment du fait qu'une municipalité (la source de données) ait pu décompter ces chiffres dans ses publications. Le nombre total de décès calculé en cumulant les cas individuels peut différer des chiffres donnés dans les communiqués de presse des municipalités. Lorsqu'une municipalité révise le décompte des cas dont le lien avec le COVID-19 n'est pas clair et l'annonce sur son site web, la date à laquelle la municipalité a annoncé et mis à jour ces chiffres sera la date déclarée, conformément à l'annonce faite par le gouvernement le 17 juin 2020. |
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Corée |
Les décès dus au COVID-19 enregistrés correspondent au nombre de patients décédés dont l’infection au COVID-19 a été confirmée. Pour déclarer un cas confirmé, les 5 éléments suivants doivent être satisfaits : 1) Fièvre de 38℃ ou plus persistant pendant plus de 24 heures chez les enfants et les adolescents de moins de 19 ans ; 2) Preuve en laboratoire d'une inflammation (ESR, CRP, fibrinogène, procalcitonine, D-dimères, ferritine, LDH, interleukine 6, élévation des neutrophiles, hypoalbuminémie, etc.) ; 3) État grave nécessitant une hospitalisation et envahissant au moins deux organes ou systèmes physiologiques (cœur, rein, poumon, sang, tractus gastro-intestinal, peau, système nerveux) ; 4) D’autres agents pathogènes causant l'inflammation n'ont pas été identifiés ; 5) Preuve d'une infection actuelle ou récente par le COVID-19 * Résultat positif du test de diagnostic (test PCR, test d'anticorps, test antigénique) (ou ) En cas d'exposition au Covid-19 dans les 4 semaines précédant l'apparition des symptômes. Les décès sont classés en fonction du lieu où chaque cas a été reporté. |
http://ncov.mohw.go.kr/upload/140/202010/1601875824179_20201005143024.pdf |
Mexique |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès résultant d’une maladie cliniquement compatible, dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. |
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Pays-Bas |
Nombre de patients décédés rapportés par jour au moment de la publication. Le nombre réel de patients décédés du COVID-19 est plus élevé que le nombre de rapports inclus dans la surveillance, car tous les patients décédés ne sont pas testés. Répartition municipale basée sur le code postal du lieu de résidence du patient, codé selon la CBS. Depuis le 1er janvier 2021, une reclassification municipale est en cours. Jusqu’au 7 janvier 2021, l’ancienne classification municipale a été utilisée pour les données ouvertes relatives au COVID-19. Les relevés à compter du 7 janvier 2021 ont été compilés selon la nouvelle classification des municipalités : les municipalités d'Appingedam, Delfzijl et Loppersum ont été fusionnées dans la nouvelle municipalité d'Eemsdelta Gr. La municipalité de Haaren a fusionné avec les municipalités de Oisterwijk, Tilburg, Vught et Boxtel. Avec la division de Haaren, la zone de sécurité de Midden- en West-Brabant s'est légèrement agrandie, au détriment de la zone de sécurité de Brabant-Noord. |
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Pologne |
L'Institut national de la santé publique indique que le COVID-19 doit être déclaré comme suit dans les certificats de décès : 1) Si la cause du décès par le COVID-19 a été confirmée par des tests, le COVID-19 doit figurer dans le certificat de décès comme cause sous-jacente du décès ; 2) S’il y a suspicion de décès dû au COVID-19, le certificat de décès doit mentionner « COVID-19 suspecté » comme cause sous-jacente du décès et le médecin peut également ajouter l'une des descriptions suivantes : « résultat de test équivoque » ou « échec du test » ou « décès survenu avant l'obtention du résultat du test » ; 3) Si le résultat du test est négatif, le COVID-19 ne peut pas être enregistré comme cause du décès. |
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Portugal |
Chaque décès d'une personne ayant une infection confirmée par le SRAS-CoV-2 est un décès dû au COVID-19. Les personnes décédées sans diagnostic à domicile ou dans des maisons de santé ne sont pas comptabilisées dans les décès dus au COVID-19. Tous les décès dus au COVID-19 sont rapportés aux autorités sanitaires locales et collectés quotidiennement. |
https://www.lse.ac.uk/social-policy/Assets/Documents/PDF/working-paper-series/10-20-Anne-West.pdf |
Espagne |
Un décès dû au COVID-19 est défini, à des fins de surveillance, comme un décès résultant d’une maladie cliniquement compatible, dans un cas probable ou confirmé de COVID-19, à moins qu'il n'existe une autre cause claire de décès qui ne saurait être liée au COVID-19 (par ex. un traumatisme). Il ne doit pas y avoir de période de rétablissement complet du COVID-19 entre la maladie et le décès. Une autopsie n'est pratiquée que dans les cas de mort violente ou de suspicion de criminalité ou dans tout autre cas où une procédure judiciaire a été engagée. |
https://www.cgcom.es/sites/default/files/u183/n.p._cerfificaciones_de_defuncion.28032020.pdf |
Suède |
Les statistiques sur les personnes décédées sont basées sur les données communiquées jusqu'à présent à l'Agence suédoise de santé publique, et il existe des différences avec les rapports régionaux. Les statistiques indiquent le nombre de personnes décédées dont l’infection au COVID-19 a été confirmée en laboratoire, quelle que soit la cause du décès, et qui sont déclarées comme décédées dans la base de données SmiNet. Les décès ont été rapportés par le médecin traitant, ou sont survenus, selon le registre de la population, dans les 30 jours suivant un diagnostic de COVID-19. Dans un petit nombre de cas, il arrive que l'unité de contrôle des infections sache que la cause du décès n'était pas liée aux Covid-19 et le décès est alors retiré des statistiques. L'enregistrement des cas au niveau municipal se fonde sur les données du registre de la population avec les informations qui étaient disponibles début mai 2020, ce qui signifie qu'il peut y avoir des écarts entre le rapport régional et les données présentées ici. |
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Suisse |
L’OFSP considère que tout décès pour lequel une infection a été confirmée en laboratoire a été causé par le SRAS-CoV-2. |
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Royaume-Uni |
Les décès enregistrés correspondent au nombre de personnes ayant eu un résultat positif au test COVID-19 et décédées dans les 28 jours suivant le premier test positif. |
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États-Unis |
Un cas confirmé ou un décès confirmé est défini par la présence de résultats de laboratoire positifs au COVID-19. |
https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/cases-updates/about-us-cases-deaths.html |
Remerciements
Cette note a été élaborée par Dorothée Allain-Dupré, Isabelle Chatry, Antoine Kornprobst, Maria-Varinia Michalun et Courtenay Wheeler avec les précieuses contributions de Manuel Barros, Sandra Hannig, Charlotte Lafitte, Antti Moisio, Kate Power, Stephan Visser, Yingyin Wu et Isidora Zapata du Centre de l'OCDE pour l'entrepreneuriat, les PME, les régions et les villes (CFE), dirigé par Lamia Kamal-Chaoui. Le report a été supervisé par Dorothée Allain-Dupré. Les auteurs tiennent à remercier Nadim Ahmad, Directeur adjoint du CFE, pour ses observations et orientations, ainsi qu’Enrique Garcilazo, Eric Gonnard, et Paolo Veneri du CFE pour leurs commentaires. Les délégués du Comité des politiques de développement régional de l’OCDE ont également apporté de précieux commentaires.
Personnes à contacter :
Lamia Kamal-Chaoui (✉ Lamia.KAMAL-CHAOUI@oecd.org)
Dorothée Allain-Dupré (✉ Dorothee.ALLAIN-DUPRE@oecd.org)
Contact médias : Olivier Puech ( ✉ Olivier.PUECH@oecd.org)
Notes
← 1. En pratique, la situation peut être difficile si les subventions du gouvernement central sont financées par des recettes fiscales nationales qui auront probablement diminué.
← 2. Les 24.5 % correspondent à la moyenne non pondérée pour les pays de l’OCDE. Si l’on prend les moyennes pondérées (en fonction de la population), les gouvernements infranationaux supportent 31.8 % des dépenses publiques de santé non consolidées et 38 % des dépenses consolidées.
← 3. Les 12 % correspondent à la moyenne non pondérée pour les pays de l’OCDE. Si l’on prend les moyennes pondérées (en fonction de la population), les dépenses de santé représentent 18 % des dépenses infranationales.
← 4. Le secteur des affaires économiques comprend principalement le transport, mais inclut également les affaires commerciales et l’emploi, les interventions économiques, l’agriculture, l’énergie, les industries extractives et manufacturières, la construction et d'autres secteurs.
← 5. 17 pays : Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni, Suède et Suisse.
← 6. L’outil est en accès libre à l’adresse : https://github.com/CovidStrategyCalculator/CovidStrategyCalculator
← 7. Le 13 mai 2020, les États membres de l’UE, avec le soutien de la Commission européenne, ont adopté des lignes directrices sur l'interopérabilité des applications mobiles de traçage des contacts approuvées au sein de l’UE.