L’Islande se remet d’une crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 relativement bénigne. Le nombre de victimes et les tensions sur le système de santé sont restés faibles. Une stratégie intelligente de dépistage et de traçage a permis aux autorités de détecter précocement les cas d'infection et de mettre en œuvre des mesures sanitaires ciblées. Les restrictions visant à contenir l'épidémie ont été de courte durée et moins sévères que dans de nombreux autres pays et toutes les mesures prises au niveau national ont été levées à la fin juin 2021 (Graphique 1.1). Les écoles maternelles et primaires ont fonctionné de manière quasiment ininterrompue, tandis que l’apprentissage à distance s'est généralisé dans l'enseignement secondaire et supérieur. Les frontières internationales sont restées ouvertes à l’espace Schengen, les règles en matière de dépistage et de quarantaine étant progressivement assouplies à partir du printemps 2021. La campagne de vaccination progresse rapidement, tous les individus de 16 ans ou plus devant recevoir au moins une dose de vaccin d’ici au début de l’été.
Études économiques de l’OCDE : Islande 2021 (version abrégée)
1. Principaux éclairages sur l’action publique
L’impact de la pandémie sur l’économie a été prononcé, mais contenu par l'action publique (Graphique 1.2). Du fait des confinements et des restrictions de déplacement mis en place dans le monde entier, le tourisme international s’est effondré, les arrivées d’étrangers sur le territoire en 2020 correspondant à seulement un quart environ du nombre enregistré l’année précédente. Incapables de voyager à l’étranger, les Islandais ont visité leur propre pays, mais ce tourisme local n'a qu’en partie compensé le manque à gagner. Comme dans d'autres pays, le gouvernement a pris rapidement une série de mesures pour parer aux difficultés de l'économie, mettant notamment en œuvre un dispositif de chômage partiel visant à aider les ménages et les entreprises (Encadré 1.1). Les baisses de taux d’intérêt et le soutien à la liquidité décidées par la banque centrale ont contribué à préserver la stabilité financière. Grâce à ces mesures, la demande intérieure totale n'a reculé que de 1.3 %. La récession a été de 6.6 % en 2020 – un chiffre certes considérable, mais inférieur à ce qui avait été observé durant la crise financière mondiale.
Les événements dramatiques liés à la pandémie ont éclipsé des changements structurels plus profonds à l’œuvre dans l’économie islandaise. Le tourisme, dont la croissance fulgurante a tiré la reprise après la crise financière de 2008/09, avait déjà atteint un sommet en 2018, tandis que la deuxième compagnie aérienne du pays était déclarée en faillite en 2019. Alors que le tourisme pourrait connaître une expansion plus lente à moyen terme, d'autres secteurs prennent sa place en tant que relais de croissance. L’industrie pharmaceutique poursuit son développement rapide, et les exportations de services numériques comme le traitement et le stockage des données s’envolent, grâce à la faiblesse locale des prix de l’énergie et au climat islandais, frais et venteux. La pêche connaît une montée dans la chaîne de valeur, les fruits de mer frais et l'aquaculture ayant le vent en poupe. Les technologies innovantes de capture du carbone permettent une réduction des émissions et peuvent générer des revenus à l’export. Néanmoins, les évolutions structurelles sont freinées par un déficit de compétences adéquates et une réglementation trop stricte.
Encadré 1.1. Les mesures gouvernementales ont soutenu les ménages et les entreprises tout au long de la pandémie
À la mi-mars 2020, peu après avoir mis en place les premières mesures d’endiguement du virus, le gouvernement a adopté un programme d'aide visant à éviter un effondrement du revenu des entreprises et des ménages. Ce programme a été élargi en avril, et prolongé en novembre, certaines mesures devant expirer à la mi-2021. Visant d'abord à apporter une aide immédiate aux ménages et aux entreprises, ainsi qu’au système de santé, le programme a été ensuite progressivement réorienté pour encourager l’investissement public et privé en vue de soutenir la reprise et la croissance à long terme.
Parmi les mesures les plus importantes ont figuré un dispositif de chômage partiel ; des allocations familiales et prestations pour enfant à charge supplémentaires ; l'autorisation accordée aux ménages de puiser dans leur épargne-retraite du troisième pilier ; un soutien spécial pour les catégories vulnérables ; et les reports de paiement de l’impôt sur le revenu et de la TVA pour une période d'un an au maximum. Les entreprises dont le chiffre d’affaires accusait une baisse de plus de 40 % ont fait l’objet d’une aide financière, les secteurs très touchés du tourisme et de l’aviation bénéficiant d'un soutien spécifique. Les mesures budgétaires discrétionnaires se sont montées à 9 % du PIB de 2020 en 2020-21, les stabilisateurs automatiques (baisse des recettes fiscales, allocations chômage) représentant quant à eux 8 % du PIB. Le gouvernement a par ailleurs lancé un programme d’investissement quinquennal axé sur les infrastructures et la recherche-développement, pour un montant égal à environ 0.5 % du PIB chaque année. L’État a accordé un nombre limité de garanties, ce qui a permis de maintenir sous contrôle les passifs éventuels.
Source : Outil de suivi des politiques relatives au COVID-19 (COVID-19 Policy Tracker) de l’OCDE (base de données).
L’Islande demeure l’une des économies les plus égalitaires de l’OCDE grâce au taux d’activité élevé des hommes comme des femmes, et à une distribution des salaires étroite (Graphique 1.3). Après la crise financière mondiale, les bas salaires ont augmenté plus rapidement que les salaires les plus élevés, renforçant encore le caractère égalitaire de l’économie islandaise. Le système de protection sociale, retraites comprises, est bien ciblé, réduisant davantage encore les inégalités. L'accès à l’éducation et aux soins de santé est universel, et le statut socio-économique semble avoir une moindre influence sur les résultats en termes d'éducation et de santé que dans la plupart des autres pays de l’OCDE. Il existe un domaine cependant où l’Islande présente l’inégalité la plus forte des pays de l’OCDE, à savoir le nombre d’heures de travail des hommes par rapport à celui des femmes (Graphique 1.16). En conséquence, l'écart salarial entre les sexes n’est que légèrement inférieur à la moyenne de l’OCDE.
Dans ce contexte, les principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
Soutenir une reprise résiliente, inclusive et durable de l’économie et engager un processus d'assainissement des finances publiques, ainsi qu’il est prévu, lorsque la reprise sera fermement engagée.
Encourager l’instauration d’un cadre réglementaire favorable aux entreprises, améliorer les compétences et stimuler l’innovation en offrant un soutien ciblé aux activités de recherche-développement des entreprises, et promouvoir les services de l’administration en ligne.
S’orienter vers une économie bas carbone au moyen d’une tarification efficace du carbone, investir dans des infrastructures bas carbone et encourager la recherche et l’innovation dans les technologies vertes.
L’économie se redresse
L’économie se redresse (Graphique 1.4). Le tourisme connaît un rebond à la faveur de l’assouplissement des règles de dépistage et de quarantaine. Les exportations de produits de la pêche restent dynamiques, en particulier dans les fruits de mer frais et l'aquaculture à haute valeur. Certains secteurs comme la pharmacie ou le stockage et le traitement des données continuent d’enregistrer une croissance rapide. L’investissement des entreprises profite du rattrapage de la demande et du programme d’investissement public quinquennal. Les politiques monétaire et budgétaire soutiennent les entreprises. La consommation des ménages demeure solide grâce à l'augmentation des salaires, au regain de confiance et à l’utilisation de l’épargne accumulée pendant la pandémie. L’inflation progresse sous l’effet de la hausse des salaires et des prix du pétrole, et du maintien d'une politique monétaire accommodante.
Après s’être contractée en 2020, l’activité économique reprend peu à peu de l'élan. Si la situation sanitaire semble sous contrôle et la confiance a rebondi, le tourisme continue de pâtir des effets de la pandémie. Le dispositif de chômage partiel a pris fin à la mi-2021, tandis que la plupart des mesures d'aide mises en place au début de la crise ont été prolongées jusqu’à la fin 2021. Le programme d’investissement public devrait continuer de soutenir l’investissement des entreprises et la croissance à long terme au-delà de cette date. La croissance du PIB devrait s’établir à 3 % en 2021, puis à 4 % en 2022 (Tableau 1.1).
Un degré élevé d’incertitude et de risque pèse sur les prévisions. La reprise du secteur touristique dépend fortement des arrivées internationales et donc, des conditions économiques et sanitaires à l’étranger. L’économie pourrait être confrontée de nouveau à des événements imprévus, notamment à des chocs sur l’offre tels que la disparition de certaines ressources halieutiques, ou à une suspension des liaisons internationales en raison d’une éruption volcanique (Tableau 1.2). Le Brexit pourrait également avoir une incidence négative sur l’économie islandaise, en dépit de l’annonce récente d’un accord commercial avec le Royaume-Uni. Toutefois, l’écart par rapport aux prévisions pourrait également jouer dans un sens positif : en effet, des campagnes de vaccination plus rapides que prévu à l’étranger pourraient donner un coup de fouet aux voyages et au tourisme.
Tableau 1.1. Indicateurs et prévisions macroéconomiques
|
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
---|---|---|---|---|---|---|
|
Prix courants (milliards ISK) |
Projections |
||||
Variation annuelle, en volume (prix de 2015) |
||||||
PIB aux prix du marché |
2 642.0 |
4.7 |
2.6 |
- 6.6 |
2.8 |
4.7 |
Consommation privée |
1 323.5 |
4.8 |
1.9 |
- 3.3 |
2.1 |
4.9 |
Consommation publique |
625.5 |
4.7 |
3.9 |
3.1 |
2.2 |
0.9 |
Formation brute de capital fixe |
575.2 |
1.2 |
- 3.7 |
- 6.8 |
8.0 |
3.4 |
Demande intérieure finale |
2 524.3 |
3.9 |
1.1 |
- 2.5 |
3.4 |
3.5 |
Variation des stocks1 |
- 0.8 |
0.2 |
- 0.5 |
1.2 |
0.0 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
2 523.5 |
4.2 |
0.3 |
- 1.3 |
3.4 |
3.5 |
Exportations de biens et de services |
1 208.2 |
1.7 |
- 4.6 |
- 30.5 |
6.5 |
12.0 |
Importations de biens et de services |
1 089.7 |
0.5 |
- 9.3 |
- 22.0 |
8.2 |
8.2 |
Solde extérieur1 |
118.5 |
0.6 |
1.9 |
- 4.9 |
- 0.6 |
1.2 |
Pour mémoire : |
||||||
Déflateur du PIB |
_ |
2.7 |
4.5 |
3.4 |
2.3 |
2.7 |
Indice des prix à la consommation |
_ |
2.7 |
3.0 |
2.8 |
4.1 |
2.5 |
IPC sous-jacent2 |
_ |
2.5 |
2.9 |
2.9 |
3.7 |
2.4 |
Taux de chômage (% de la population active) |
_ |
3.1 |
3.9 |
6.4 |
8.0 |
7.6 |
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) |
_ |
0.9 |
- 1.5 |
- 7.3 |
- 10.3 |
- 7.1 |
Dette brute des administrations publiques (% du PIB)³ |
_ |
60.4 |
61.5 |
69.1 |
78.7 |
84.0 |
Solde de la balance courante (% du PIB) |
_ |
3.8 |
6.4 |
1.0 |
-1.0 |
0.0 |
1 : Contributions aux variations du PIB réel, montant effectif dans la première colonne.
2 : Indice des prix à la consommation hors alimentation et énergie.
3 : À la différence de certains autres pays de l’OCDE, elle inclut les engagements non capitalisés des régimes de retraite de la fonction publique.
Source : Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE n° 109.
Tableau 1.2. Événements susceptibles de modifier sensiblement les perspectives
Choc |
Impact potentiel |
---|---|
Nouvelles restrictions, ou prolongation des restrictions existantes, à la circulation de touristes étrangers sous l’effet de nouvelles flambées de COVID-19. |
La croissance et la reprise économiques seraient affectées. |
Disparition de certaines ressources halieutiques. |
Baisse des recettes d’exportations. |
Éruption volcanique de grande ampleur. |
Perturbations potentielles des liaisons de transport intérieures et internationales freinant certaines activités. |
Le marché du travail se stabilise (Graphique 1.5). Le chômage, qui a culminé à plus de 8 % de la population active fin 2020, reflue rapidement. Le taux d’activité rebondit après avoir atteint le niveau le plus bas de son histoire. Le dispositif de chômage partiel a permis d'éviter une envolée du chômage au cours de la première vague épidémique au printemps 2020. Les taux de chômage des hommes comme des femmes sont restés quasiment identiques tout au long de la crise. En dépit d’une réorientation à la hausse au début de 2021, le taux de chômage des jeunes évolue conformément au chômage général, ce qui laisse penser que les évolutions sur le marché de l’emploi n'ont pas affecté la jeunesse de manière disproportionnée. La hausse actuelle du nombre d’étudiants laisse penser que le chômage des jeunes est absorbé par le système d’éducation. L’immigration a fortement baissé, et l’émigration a également ralenti, les perspectives d’emploi n’étant guère plus favorables à l’étranger.
La pandémie amplifie les déséquilibres sur le marché du travail. Le marché de l’emploi islandais est ouvert et flexible, ce qui facilite le redéploiement des ressources. Néanmoins, le chômage demeure élevé dans le tourisme et les secteurs qui lui sont associés, tandis que la main-d'œuvre qualifiée s’est raréfiée dans certains secteurs techniques et numériques. Pour soutenir le redéploiement de la main-d'œuvre, le gouvernement a mis en place un programme de formation professionnelle pour les activités en manque de travailleurs, en particulier les métiers techniques, de l’artisanat et du commerce, ainsi que le personnel de santé. Le gouvernement entend aussi faciliter l’accès aux permis de travail pour les travailleurs très qualifiés en dehors de l’Espace économique européen, afin de remédier aux déficits de main-d'œuvre. Les programmes de formation devraient être élargis afin de préparer les actifs à travailler dans des secteurs à forte demande de main-d'œuvre.
La position extérieure a été affectée par l’effondrement du tourisme étranger, qui représentait le principal secteur d’exportations de l’Islande avant la pandémie de COVID-19 (Graphique 1.6). L’excédent de la balance courante a diminué, mais le solde demeure positif, notamment parce que le recul des importations (spécifiquement, du tourisme islandais à l’étranger) a en partie contrebalancé les pertes de recettes liées au tourisme international. L’Islande fait partie des rares pays de l’OCDE à avoir connu des flux d’investissement direct étranger (IDE) négatifs au cours des dernières années et cette tendance pourrait s’être accélérée sous l’effet de la pandémie. Toutefois, sa position extérieure globale nette s’est améliorée, ce qui s’explique par des gains de valorisation sur les actifs qu’elle détient à l’étranger. Dans l’ensemble, l’ouverture de l’économie continue de régresser et demeure faible au regard de la petite taille du pays. Dans ce contexte, l’Islande devrait assouplir ses restrictions à l’entrée de capitaux étrangers, afin de financer des investissements dans les secteurs émergents et en croissance, ainsi que dans la lutte contre le changement climatique.
La composition des exportations avait changé ces dernières années avant même la pandémie, qui a fait reculer brutalement la part du tourisme (Graphique 1.7). La part des services touchant à la propriété intellectuelle, notamment ceux qui sont liés aux brevets de l’industrie pharmaceutique, a quant à elle progressé. Le traitement et le stockage de données, secteur très consommateur d'énergie, est évalué à quelque 2 % du PIB et semble également avoir connu une croissance rapide tirée par la faiblesse locale des prix de l’énergie et le climat frais et venteux du pays (Adalbjornsson, 2019[1]). La poursuite de son expansion est freinée par l’isolement géographique de l’Islande et ses contraintes de capacités, trois câbles sous-marins seulement reliant le pays à l’Europe et à l’Amérique du Nord. Accroître les capacités de transmission des câbles existants ou investir dans de nouveaux câbles, comme prévu, pourrait renforcer la concurrence et augmenter les recettes à l’exportation.
La croissance du tourisme intérieur a contribué à contrebalancer un peu la chute du tourisme étranger. Ce dernier avait commencé à diminuer en 2019, sous l’effet du ralentissement de la demande étrangère et de la faillite de la compagnie aérienne WOW Air. En 2020, la pandémie a ramené les arrivées internationales à un quart environ du nombre enregistré l’année précédente. De leur côté, les Islandais ont voyagé presque deux fois plus sur le territoire national, amortissant le choc sur d'autres services comme l’hébergement, la restauration et les activités culturelles (Graphique 1.8). En outre, comme les voyages à l’étranger représentent une part plus élevée des importations en Islande que dans la plupart des pays de l’OCDE, leur effondrement a compensé une partie des pertes liées à l’absence de touristes étrangers.
La politique monétaire a été assouplie en réponse à la crise du COVID-19
La politique monétaire a été assouplie depuis le début de la pandémie et demeure accommodante. À la mi-mai, la banque centrale a relevé son taux directeur de 0.25 point de pourcentage, à 1 % ; toutefois, les taux restent à des points bas historiques après la baisse de 2 points de pourcentage mise en œuvre depuis mars 2020 (Graphique 1.9) et sont inférieurs en termes réels à ceux de la zone euro. Dans le cadre d’un vaste train de mesures monétaires et financières, l’assouplissement monétaire a permis de contrer l’impact négatif de la pandémie et des mesures d’endiguement du virus sur l'activité économique, dans un contexte d’incertitudes élevées (Encadré 1.2).
L’inflation s’établissait autour de la cible de 2½ pour cent avant le début de la pandémie, mais a augmenté depuis en grande partie à cause de la dépréciation du taux de change et aussi, depuis peu, de la hausse des salaires et des prix des logements, de l’envolée des cours mondiaux des produits de base, des goulets d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement de certains secteurs et d’effets de base. Elle avoisinait 4 ¼ pour cent au premier trimestre de 2021 en glissement annuel. La couronne islandaise s’est légèrement appréciée ces derniers mois et la banque centrale s'attend à ce que l’inflation générale reflue à court terme, une fois que l'impact de la dépréciation du taux de change se sera dissipé, et alors que l'économie se caractérise par des ressources inemployées. Si les niveaux à long terme demeurent proches de l’objectif, les anticipations d'inflation à court terme ont augmenté et dépassent le taux cible. En outre, malgré la hausse du chômage liée à la crise sanitaire, la croissance des salaires réels s’est révélée vigoureuse, à 6 % environ au début de 2021 en glissement annuel, dans le sillage des conventions collectives conclues en 2019. À l’avenir, la politique monétaire devrait rester accommodante compte tenu des perspectives incertaines, mais les autorités devraient surveiller de près l'évolution de la situation et se tenir prêtes à intervenir pour garantir un bon ancrage des anticipations d’inflation.
Encadré 1.2. Mesures monétaires et financières mises en œuvre face à la crise du COVID-19
En réponse à la pandémie de COVID-19, la banque centrale a pris de nombreuses mesures visant à assouplir la politique monétaire et à renforcer les liquidités afin de soutenir la demande et l'accès au crédit, et de préserver la stabilité financière.
Entre mars et novembre 2020, la banque centrale a abaissé de 2 points de pourcentage, petit à petit, son taux directeur, pour le ramener à 0.75 %
Des mesures ont été prises pour injecter des liquidités dans le système financier. En mars 2020, l’exigence moyenne de réserves pour les établissements de dépôt a été abaissée de 1 à 0 %. Des modifications ont également été apportées aux règles de liquidités concernant le traitement des réserves obligatoires fixes (1 %), de sorte que la banque centrale puisse autoriser l'utilisation de ces réserves en cas de sorties de liquidités. Les réserves fixes comptent à présent comme des volants de liquidités. Le volant de fonds propres contracyclique a également été abaissé de 2 à 0 % en mars. Par ailleurs, la banque centrale a réduit, puis supprimé, son offre de dépôts à un mois. Ces dépôts avaient compté parmi les principaux instruments des établissements financiers pour investir dans des actifs liquides libellés en couronnes islandaises et se conformer aux exigences de liquidités, l’offre d’obligations du Trésor étant limitée. Les banques commerciales détenaient une grande partie de leurs actifs liquides sur ses comptes, et les taux d’intérêt qui s’y appliquaient étaient légèrement supérieurs au taux d’intérêt principal de la banque centrale. En outre, une facilité de crédit garantie temporaire a été spécialement établie en avril 2020, assortie d'une longue liste de garanties admissibles.
La banque centrale a entamé des achats de bons du Trésor sur le marché secondaire face à l'augmentation des émissions de titres et pour assurer la transmission de l'assouplissement de la politique monétaire aux ménages et entreprises. Ces achats ont cependant été de faible envergure.
Depuis le début de la crise, la banque centrale est intervenue sur le marché des changes au comptant pour atténuer la volatilité du taux de change. En 2020, les ventes totales de devises par la banque centrale ont atteint 825 millions EUR, soit 37 % de l’ensemble de l'activité du marché. De plus, en septembre 2020, la banque centrale a lancé un programme régulier de ventes de devises sur le marché intérieur, déclarant vouloir ainsi augmenter la profondeur de ce marché et améliorer la formation des prix. Ce programme a été arrêté en mai 2021 après l’appréciation de la couronne islandaise, la banque centrale estimant que le marché des changes était parvenu à un meilleur équilibre.
Les autres mesures mises en place comprennent une suspension volontaire temporaire des achats de devises par les caisses de retraite, et du paiement de dividendes ou des rachats d'actions par les établissements financiers et les compagnies d'assurance.
Source : Banque centrale d’Islande (BCI).
Le système financier est jugé sain, mais la vigilance est de mise
L’assouplissement de la politique monétaire a bénéficié davantage aux ménages qu’aux entreprises. Les prêts aux ménages ont fortement augmenté en 2020, parallèlement au dynamisme de l’activité sur le marché immobilier (Graphique 1.10). Le nombre de primo-accédants a progressé rapidement, ceux-ci représentant un tiers des acheteurs de biens résidentiels au premier trimestre 2021, un niveau record (Central Bank of Iceland, 2021[2]). La hausse des prix des logements est toutefois largement conforme aux fondamentaux macroéconomiques, selon l'évaluation de la banque centrale. L’offre de logements s’est accrue avec l'arrivée sur le marché des constructions amorcées au moment du boom du tourisme. L'amélioration des conditions d’emprunt a encouragé le refinancement de prêts hypothécaires : la demande d’emprunts hypothécaires non indexés a augmenté, de même que la part de prêts à taux variable dans le total des prêts (Central Bank of Iceland, 2021[3]). En revanche, les prêts aux entreprises ont stagné, peut-être en raison d’un durcissement de l'accès au crédit lié à l’augmentation des risques, et/ou à une baisse de la demande, la crise du COVID-19 réduisant l'appétit des entreprises pour le risque (Central Bank of Iceland, 2020[4]). Les contraintes de trésorerie demeurent une source d'inquiétude surtout pour les entreprises du tourisme et des services à la personne, mais certains secteurs qui y sont liés, comme la location de biens immobiliers commerciaux, ont été affectés eux aussi. Les ratios dette/PIB des ménages et des sociétés non financières ont augmenté, en partie à cause de la contraction du PIB, même s’ils demeurent historiquement faibles (Graphique 1.10).
Le système financier a bien tenu face aux tensions liées à la pandémie et a permis d’amortir l’impact sur l'économie de la gravité du choc sanitaire au travers de moratoires sur les paiements et d’une hausse du crédit au secteur privé (Graphique 1.10, partie A). La réorganisation du système bancaire après la crise de 2008 ainsi que le recours accru aux instruments macroprudentiels ont placé le secteur bancaire sur des bases plus solides pour surmonter les effets négatifs de la pandémie (Graphique 1.11). La récente fusion de la Banque centrale d’Islande avec l’Autorité de surveillance financière (voir l’Étude précédente) devrait permettre de renforcer la surveillance globale du système financier. Les autorités estiment que les volants de fonds propres et de liquidités des banques sont robustes, les ratios d'adéquation des fonds propres des banques d'importance systémique se situant bien au-dessus des exigences et les banques disposant d'abondantes liquidités pour soutenir l'économie. Les ratios prêt/valeur et les ratios du service de la dette sur les nouveaux prêts bancaires ont diminué, malgré une augmentation de la part des banques sur le marché des emprunts hypothécaires destinés aux ménages au détriment d'autres prêteurs (Central Bank of Iceland, 2021[5]). Les indicateurs de la qualité du crédit sont généralement bien orientés. Malgré sa vigueur retrouvée, le marché immobilier ne devrait pas créer de risques pour la stabilité financière à court terme, même s’il convient d’en maintenir une surveillance étroite (Graphique 1.10). La crise pourrait entraîner des difficultés à plus long terme pour le marché immobilier du fait de l’évolution des habitudes et des pratiques liées au développement du télétravail, ce qui pourrait réorienter durablement la demande, en particulier dans l’immobilier commercial.
Plusieurs mesures ont été prises pour soutenir l'accès au crédit et préserver la stabilité financière. Les exigences de réserves ont été assouplies, de même que les volants de fonds propres contracycliques, et l'assouplissement quantitatif couplé aux interventions sur les marchés des changes ont contribué au relâchement des conditions monétaires (Encadré 1.2). En particulier, l'abaissement du volant de fonds propres contracyclique de 2 à 0 % en mars 2020 a conféré aux banques commerciales une marge de manœuvre pour accorder des crédits alors même qu’elles restructuraient leurs portefeuilles de prêts.
La crise du COVID-19 n’en crée pas moins des difficultés, et la vigilance est de mise. L’impact de la pandémie sur les bilans des établissements financiers requiert une surveillance attentive, même si le système bancaire semble avoir abordé la crise dans une position solide. Le ratio moyen de prêts non performants, par exemple, a légèrement augmenté, passant de 2.6 % à la fin de 2019 à 2.9 % à la fin de 2020. De premiers signes d’une hausse du risque de crédit se font déjà observer. Ainsi, la proportion de prêts « non performants » aux entreprises, sur la base d’une méthodologie très prudente (c’est-à-dire des prêts en souffrance depuis plus de 90 jours, gelés ou jugés peu susceptibles d’être remboursés), est passée de 5 % à la fin de 2019 à 18½ pour cent au début de 2021, le secteur du tourisme en affichant la part la plus élevée (Central Bank of Iceland, 2021[6]). Cette évolution tient avant tout au fait que de nombreux prêts auparavant protégés par des reports spéciaux de paiements liés à la pandémie sont désormais considérés comme non performants, selon la méthodologie employée (Central Bank of Iceland, 2021[3]). Si la reprise est faible, ou que les chocs associés à la pandémie perdurent, certaines entreprises fragiles pourraient devenir insolvables et le nombre de prêts aux entreprises en souffrance pourrait encore s’accroître. À l'avenir, il conviendrait de poursuivre le soutien aux liquidités destiné aux entreprises en difficulté qui sont jugées viables, jusqu'à ce que la reprise soit bien engagée. La part de prêts aux ménages non performants a connu une légère hausse entre la fin de 2019 et le début de 2021, mais reste faible, autour de 3 %. Néanmoins, comme les instruments à taux variables représentent maintenant une proportion relativement élevée des prêts immobiliers, le budget des ménages est exposé à des relèvements de taux d’intérêt, ce qui accroît les risques (Central Bank of Iceland, 2020[4]).
La précédente Étude économique recommandait de faire avancer les projets de privatisation dans le secteur bancaire. Deux des trois banques commerciales, représentant 97 % environ du marché des dépôts et considérées comme des établissements d’importance systémique, sont des banques publiques. Le programme de privatisation a commencé à être déployé, 35 % de la participation de l’État au capital d’Íslandsbanki ayant été cédée en juin 2021. Un mode adéquat d'actionnariat et de gestion après la privatisation sera essentiel pour minimiser les risques à l'avenir.
L’Islande a réalisé des progrès considérables, ces dernières années, dans le renforcement de son régime de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (AML/CTF), après la publication de l’Évaluation mutuelle du Groupe d’action financière (GAFI) en 2018 (FATF, 2018[7]). Des mesures ont ainsi été prises pour renforcer la surveillance à la fois des établissements financiers (contrôlés par la banque centrale) et des sociétés ou professions qualifiées de non financières (contrôlées par les autorités fiscales). La banque centrale procède actuellement à l'évaluation systématique d’environ 80 entités sous sa tutelle (« entités concernées ») afin de garantir la mise en application des obligations de sanction financière ciblée au travers d’efforts exhaustifs de contrôle. Les ressources affectées à la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme ont été très fortement accrues au cours des deux à trois dernières années. La coopération et la coordination entre les autorités compétentes dans ce domaine ont également été renforcées et un Comité de pilotage a été nommé pour servir de mécanisme national de coopération et de coordination. Une Évaluation nationale du risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme est désormais publiée tous les deux ans, et suivie d’un plan d'action visant à répondre aux menaces et faiblesses. Par ailleurs, la banque centrale a accru ses efforts de conseil visant à sensibiliser les entités sous son contrôle aux risques AML/CFT. En novembre 2020, le rapport de suivi du GAFI a jugé la position de l’Islande « conforme » ou « largement conforme » dans 37 domaines prioritaires sur 40, et « partiellement conforme » dans les trois derniers domaines, y compris ceux liés aux actifs virtuels et aux fournisseurs de services d'actifs virtuels (FATF, 2020[8]). L’Islande est déterminée à poursuivre ses efforts avec le GAFI pour améliorer encore son régime AML/CTF.
La politique budgétaire soutient l’économie
Comme la plupart des pays, l’Islande a vu sa situation budgétaire se dégrader sous l’effet des programmes de soutien mis en œuvre face à la pandémie et du fonctionnement des stabilisateurs automatiques (Graphique 1.12. A). Le déficit budgétaire des administrations publiques a atteint 7.3 % du PIB en 2020, les stabilisateurs automatiques et les mesures discrétionnaires liées à la crise du COVID-19 représentant chacun la moitié environ de l’augmentation du déficit. La dette publique brute a grimpé à 69 % du PIB, un niveau toutefois inférieur au sommet atteint après la crise financière de 2008-09, tandis que la dette publique nette, qui tient compte des actifs financiers, demeure inférieure à 30 % du PIB. Le dispositif de chômage partiel, qui a constitué le principal programme d'aide sur le plan financier, a soutenu l’emploi en particulier au printemps de 2020 (Graphique 1.5 B). Un soutien direct a été apporté aux entreprises qui avaient perdu plus de 40 % de leur chiffre d'affaires, essentiellement dans les secteurs du tourisme et de l’aviation. Les passifs éventuels, liés principalement aux garanties publiques destinées au Fonds pour le logement, ont continué de diminuer, passant de 75 % en 2014 à 32 % à la fin de 2020. La révision menée récemment sur les statistiques financières des administrations islandaises pour les années 1998-2019 a abouti au reclassement de la plupart des éléments de passif éventuel en dette des administrations publiques.
Les autorités ont fait montre de courage et de souplesse dans leur réponse à la crise, tout en fixant une trajectoire de retour à la viabilité des finances publiques une fois la reprise engagée. À l’automne 2020, le parlement a suspendu la règle budgétaire chiffrée, dans un premier temps jusqu’en 2022 puis jusqu’en 2025, et approuvé un nouveau plan budgétaire quinquennal à l'horizon 2025. En mai 2021, il a approuvé un plan budgétaire actualisé courant jusqu’en 2026. Selon ce dernier, le déficit budgétaire des administrations publiques devrait atteindre 11.4 % du PIB en 2021, avant de reculer d’environ 2.5 % par an jusqu’en 2025, date à laquelle il s'établirait à 1.6 % du PIB. La dette publique brute au sens des comptes nationaux devrait se stabiliser en 2025 à 100 % du PIB, tandis que la dette nette resterait bien inférieure, au vu de l’ampleur des actifs publics (Graphique 1.12. B).
La politique budgétaire devrait continuer de soutenir les entreprises et les ménages fragiles jusqu'à ce que la reprise soit bien engagée, tout en évitant que la dette publique n'atteigne des niveaux non viables. La situation sanitaire s’améliorant, les restrictions étant peu à peu assouplies et de nombreux ménages se préparant à puiser dans leur épargne, la demande devrait repartir à la hausse. À l’avenir, les coûts liés au vieillissement démographique pourraient faire gonfler la dette jusqu’à des niveaux intenables, tandis que des réformes visant à maîtriser les dépenses, notamment celles du régime de l’invalidité, pourraient aider à contenir toute nouvelle augmentation de la dette (Graphique 1.13). Le soutien aux entreprises devrait être progressivement supprimé une fois que la reprise sera bien installée (OECD, 2021[9]). Des réformes structurelles devraient accompagner les mesures d'aide budgétaire afin d'accélérer la reprise.
Les réformes des dépenses publiques devraient traiter les faiblesses dont pâtissent de longue date les finances publiques
La qualité des dépenses s’est progressivement dégradée au cours des 15 dernières années, pesant de ce fait sur la croissance, comme le montre la précédente Étude économique de l’OCDE (OECD, 2019[10]). En particulier, le régime des prestations d’invalidité est passé de 4.8 % des dépenses publiques à 7.4 % entre 2000 et 2015, du fait d’une incidence en hausse des troubles de la santé mentale parmi les jeunes demandeurs de ces prestations (Graphique 1.14). Le régime concerne désormais près de 9 % de la population d'âge actif. Par ailleurs, les subventions demeurent d’un montant élevé puisqu’elles représentent approximativement 3.5 % de la dépense publique, l’agriculture en absorbant la moitié environ. En revanche, les coûts du vieillissement restent faibles grâce à une population jeune, un âge tardif de départ à la retraite et un système de retraite bien capitalisé. Dans un tel contexte, le gouvernement devrait réformer le régime des prestations d’invalidité, en privilégiant le retour à l’emploi et le maintien en activité. De même, il conviendrait qu’il réduise les subventions, notamment dans l’agriculture. Il convient de saluer son projet d'accroître d’environ 0.5 point par an les investissements dans les infrastructures, la transformation numérique, la transition verte et la recherche-développement.
Les examens de dépenses publiques peuvent à la fois contribuer à la maîtrise des dépenses et encourager l’efficacité des services publics offerts. Les autorités ont réalisé des progrès en menant à bien ces examens dans les domaines de l'éducation, la prise en charge des personnes âgées et l’invalidité, s’inspirant des exercices de révision menés précédemment aux ministères de la Justice et de l’Industrie et de l’Innovation, ce qui constitue un point positif. Le ministère des Finances et des Affaires économiques est en train de mettre en place une division spéciale chargée de procéder à ce type d’examen, et apporte son aide aux participants. Dans ce contexte, les examens de dépenses publiques devraient devenir une composante systématique du processus budgétaire, comme le prévoit le gouvernement. Des procédures de révision régulière et approfondie, à l’image de ce que font les Pays-Bas et le Royaume-Uni, concourraient à résoudre les difficultés évoquées dans le chapitre thématique de la précédente Étude économique de l’OCDE (OECD, 2019[10]).
Tableau 1.3. Recommandations antérieures et mesures prises concernant les politiques monétaire, financière et budgétaire
Politiques monétaire et budgétaire |
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---|---|
Principales recommandations |
Mesures prises |
Ajuster les taux d'intérêt en fonction de l'évolution de l'inflation. |
La banque centrale a progressivement ramené son taux directeur de 4.5 % à la mi-2019 à 0.75 % en novembre 2020. En mai 2021, elle l’a relevé à 1 %. |
Mettre à exécution les projets de privatisation. |
L’État a cédé 35 % de sa participation au capital d’Íslandsbanki en juin 2021. |
Achever la réforme du secteur financier, tout en veillant à maintenir séparées les fonctions de réglementation et les fonctions opérationnelles. |
La réforme a été menée à bien. |
Politique budgétaire et finances publiques |
|
Suivre les règles de déficit du cadre budgétaire. Continuer de réduire la dette. |
Les mesures prises en réponse à l’impact de la pandémie de COVID-19 ont entraîné une augmentation des déficits et de la dette. Les règles budgétaires ont été temporairement suspendues. Les autorités entendent enrayer l’augmentation du ratio dette publique/PIB à l’horizon 2025. |
Procéder à des analyses coûts-avantages plus rigoureuses. |
Une nouvelle législation concernant les investissements publics est en cours d'élaboration. Un groupe de travail prépare un nouveau cadre budgétaire pour l’analyse coûts-avantages des projets d’investissement public. |
Augmenter les investissements dans les infrastructures de transport, énergétiques et numériques. |
Le gouvernement augmentera l’investissement d’environ 0.5 point de PIB. |
Mettre en place des péages routiers pour la gestion de la demande et le financement des infrastructures de transport. |
Un groupe de travail prépare des propositions relatives à la taxation des véhicules en fonction de leur utilisation. |
Réformer le régime d'invalidité en l'axant sur le retour à l'emploi, plutôt que sur le versement de prestations. |
À la lumière de la pandémie, des mesures ont été prises pour encourager le retour et le maintien dans l’emploi. |
Durcir les critères d'admission au bénéfice du régime et développer parallèlement les incitations à rester en activité. |
Des mesures ont été prises pour soutenir l’emploi durant la pandémie. |
Étendre les examens de dépenses à des sphères fondamentales de l'action publique comme l'éducation ou la santé, en s'appuyant sur l’expérience internationale. |
Trois examens de dépenses sont en cours, dans l'éducation des adultes, la prise en charge des personnes âgées et la protection sociale. La méthode suivie s’inspire des expériences étrangères et ces examens sont appelés à être conduits sur une base annuelle. |
Renforcer le rôle du conseil budgétaire et, si possible, le fusionner avec la Cour des comptes. |
Aucune mesure prise. |
Des réformes fiscales favorables aux ménages à faible revenu et à l’environnement sont en cours.
En Islande, la charge fiscale est supérieure à la moyenne de l’OCDE et proche de la moyenne des pays nordiques, si l’on tient compte de la cotisation obligatoire de 15.5 % prélevée sur les salaires et versée aux fonds de pension privés relevant du deuxième pilier (Graphique 1.15, partie A). Comme dans les autres pays nordiques, le système fiscal islandais repose surtout sur l’impôt sur le revenu. À la suite du ralentissement progressif de l’économie suivi d’une chute brutale à partir de 2019, les recettes fiscales se sont amenuisées en valeur absolue comme en proportion du PIB (Graphique 1.15, partie B). Les réformes de l’impôt sur le revenu récemment menées ont rendu le système plus propice à l’innovation et réduit la pression fiscale, en particulier pour les ménages à bas revenus (Encadré 1.3).
Encadré 1.3. Aperçu des réformes fiscales récentes
Les autorités ont joué un rôle actif dans le domaine fiscal et mené plusieurs réformes au cours des deux dernières années, principalement dans l’objectif de réduire la pression fiscale sur les ménages à bas revenus, comme indiqué ci-après.
Impôts sur le revenu des personnes physiques. Les autorités ont mis en œuvre la troisième et dernière étape de la réforme fiscale entamée en 2019. Les taux d’imposition sur les revenus faibles et moyens ont fait l’objet d’une réduction pouvant aller jusqu’à 5.5 points de pourcentage et une troisième tranche d’imposition a été créée. Les seuils et les tranches d’imposition seront ajustés suivant l’évolution de la productivité et de l’inflation. Les cotisations de sécurité sociale ont de nouveau été abaissées. Les autorités ont instauré un prélèvement sur l’épargne-retraite que les ménages ont été autorisés à retirer pendant la pandémie.
Impôt sur les sociétés. Une législation provisoire permet aux entreprises d’appliquer un taux d’amortissement plus élevé aux actifs « verts » durant la période 2021-2025. Les véhicules de société respectueux de l’environnement peuvent être entièrement amortis au cours de l’année d’acquisition. Le plafond annuel des dépenses de recherche-développement admissibles a été relevé et différents taux de crédit d’impôt ont été introduits pour les PME et les grandes entreprises (35 % et 25 % respectivement).
Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). En 2020, les autorités ont mis en place plusieurs exonérations de TVA qui sont appliquées aux modes de transport respectueux de l’environnement et qui devraient être éliminées progressivement d’ici à 2023. Le ratio des recettes de TVA, c’est-à-dire le rapport entre le recouvrement de la TVA et les recettes qui seraient générées si un taux de TVA uniforme était appliqué à tous les produits de consommation, s’établit à 55 %, chiffre le plus bas des pays nordiques et légèrement inférieur à la moyenne de l’OCDE.
Taxes environnementales. En 2020, les autorités ont mis en place une taxe sur les gaz fluorés et ainsi élargi la taxation du carbone. Il n’est pour l’instant pas prévu d’en relever les taux. Un projet de taxe sur la mise en décharge a été reporté.
Source : OECD Tax Policy Reform Questionnaire 2021.
En 2021, les allègements fiscaux provisoires liés à la pandémie de COVID-19 continueront d’affaiblir les rentrées fiscales, en particulier l’étalement des remboursements de TVA dans le cadre des projets de construction et le report de la taxe sur l’hébergement hôtelier. Expliquant en partie le chiffre des recettes de TVA inférieur à la moyenne, les dépenses fiscales au titre de la TVA, notamment dans le secteur du tourisme, devraient être réduites.
Les prestations sociales sont bien ciblées mais tendent à pénaliser les seconds apporteurs de revenu, qui sont souvent des femmes
Le système islandais de prélèvements et de prestations est bien ciblé (OECD, 2020[11]). La plupart des prestations sociales (allocations familiales et retraites par répartition comprises) sont soumises à des conditions de ressources et l’impôt sur le revenu est progressif, ce qui contribue à soutenir les ménages à faible revenu. Ce système ciblé a cependant pour corollaire des taux marginaux d’imposition élevés, ce qui n’incite pas les seconds apporteurs de revenu, souvent des femmes, à travailler un plus grand nombre d’heures (Graphique 1.16, partie A). Bien que l’écart entre le nombre d’heures de travail (rémunéré) des hommes et celui des femmes ait diminué au cours des deux dernières décennies à partir d’un niveau élevé (Olafsdottir, 2020[12]), il demeure le plus marqué de toute la zone OCDE (Graphique 1.16, partie B). Les taux marginaux d’imposition élevés pourraient avoir freiné la réduction de cet écart. En dépit des récentes réformes de l’impôt sur le revenu, les personnes à faible revenu sont toujours assujetties à des taux marginaux d’imposition élevés si leurs heures de travail dépassent environ 20 % d’un temps plein. La réforme des règles du congé parental adoptée en 2021, qui étend les prestations et encourage une répartition plus équitable des responsabilités de garde d’enfants, est bienvenue car elle permettra de réduire encore l’écart entre les hommes et les femmes (Work in Iceland, 2021[13]). Dans ces conditions, il conviendrait que les autorités continuent de réduire les contre-incitations au travail pour les seconds apporteurs de revenu, par exemple en réduisant la dégressivité des allocations familiales.
La mise en application de cette réforme fiscale et d’autres recommandations formulées dans la présente Étude devrait être neutre pour le solde budgétaire à moyen terme (Encadré 1.4).
Encadré 1.4. Quantification de l’impact des recommandations de politique budgétaire
Les estimations qui suivent donnent un chiffrage approximatif de l’impact sur le budget de certaines recommandations à un horizon de 5 à 10 ans, en retenant comme hypothèses des changements de politiques publiques simples, présentés à titre d’illustration. Les effets des changements mentionnés ici ne prennent pas en compte les réponses comportementales.
Mesures de politique publique |
Impact sur le solde budgétaire, en % du PIB |
|
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Recommandations ayant pour effet de creuser le déficit |
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Abaisser les taux d’imposition des seconds apporteurs de revenu |
Abaisser de 5 points de pourcentage les taux marginaux d’imposition appliqués aux seconds apporteurs de revenu |
-0.4 |
Augmenter les dépenses consacrées aux infrastructures, à la transition numérique, aux énergies vertes et à l’innovation |
Mettre en œuvre le programme public d’investissement selon les modalités prévues |
-0.5 |
Recommandations ayant pour effet de réduire le déficit |
||
Réduire les dépenses consacrées aux prestations d’invalidité |
Réduire les dépenses de prestations d’invalidité de moitié par rapport à l’augmentation intervenue depuis 2000 (de 3.1 % du PIB à 2.6 % du PIB) |
+0.5 |
Revoir à la baisse les subventions agricoles |
Réduire les subventions à l’agriculture de 0.3 point de pourcentage de PIB (un cinquième du niveau actuel) |
+0.3 |
Impact total sur le budget |
-0.1 |
Agir pour renforcer la productivité et l’emploi
La compétitivité de l’économie s’est améliorée, mais elle est menacée
La compétitivité s’est améliorée à la fin des années 2010, la croissance de la productivité s’accélérant et celle des salaires ralentissant. Cela dit, la progression de la productivité a été lente au cours des dix dernières années. Les gains de compétitivité enregistrés après la crise de 2008/09, compte tenu de la dévaluation de la couronne islandaise et des fortes baisses des salaires réels, sont aujourd’hui effacés (Graphique 1.17, partie A). La croissance de la productivité a été relativement atone dans les industries de réseau comme la production d’électricité, et moyenne dans les services riches en emplois mais caractérisés par une faible productivité, comme le tourisme (Graphique 1.17). Dans ce contexte, la mise en œuvre dans ces secteurs et dans d’autres des réformes structurelles recommandées dans cette Étude économique pourrait contribuer à rehausser la productivité et l’emploi (Encadré 1.5).
Encadré 1.5. Quantification de l’impact de certaines réformes structurelles
Les effets de certaines des réformes proposées dans la présente Étude sont quantifiés dans le Tableau 1.4, sur la base de modifications simples des politiques publiques ayant une valeur indicative et à partir d’analyses de régression portant sur divers pays. Les effets d’autres réformes, notamment dans le domaine de l’enseignement ou de la politique environnementale, ne peuvent être quantifiés compte tenu des informations disponibles ou de la complexité des mesures considérées. La plupart des estimations reposent sur des relations empiriques entre les réformes structurelles antérieures et la productivité, l’emploi et l’investissement, ainsi que sur l’hypothèse d’une mise en œuvre rapide et complète des réformes, et elles ne tiennent pas compte des spécificités institutionnelles de l’Islande. Ces estimations sont donc fournies à titre purement indicatif et doivent être interprétées avec prudence.
Tableau 1.4. Impact potentiel de certaines réformes structurelles sur le revenu par habitant
Politique |
Mesure |
Effet à 10 ans, en % |
Accroître l’ouverture commerciale |
Rehausser l’indicateur d’ouverture commerciale de 5 points de PIB |
1.6 |
Réformer le régime de concurrence |
Mettre en œuvre les recommandations formulées dans l’évaluation d’impact sur la concurrence de l’OCDE pour les secteurs du tourisme et de la construction. |
1.0 |
Réformer le marché de l’électricité |
Dissocier complètement la propriété des activités de production, de transport et de distribution d’électricité, et ouvrir entièrement à la concurrence le marché de gros. |
0.8 |
Abaisser les taux d’imposition des seconds apporteurs de revenu |
Réduire le taux marginal d’imposition des seconds apporteurs de revenu de 5 points de pourcentage. |
1.1 |
Améliorer la maîtrise de la corruption |
Rehausser l’indicateur de maîtrise de la corruption en le ramenant au niveau moyen atteint durant la période 2010-16. |
0.0 - 1.4 |
Renforcer les investissements publics consacrés aux infrastructures, à la transition numérique et écologique, et à l’innovation. |
Accroître l’investissement public de 0.5 point de PIB, comme prévu. |
1.5 |
Alléger les dépenses d’invalidité |
Réduire les dépenses de prestations d’invalidité de moitié par rapport à l’augmentation intervenue depuis 2000 (de 3.1 % à 2.6 % du PIB). |
0.4 |
Revoir à la baisse les subventions agricoles |
Réduire les subventions agricoles d’un cinquième ou 0.3 point de PIB. |
0.6 |
Note : La recommandation de rehausser les taxes sur le carbone est prise en compte dans l’exercice de quantification de l’impact budgétaire de certaines réformes (Encadré 1.3), mais son effet sur le PIB ne peut être quantifié.
Source : Calculs de l’OCDE d’après (Égert et Gal, 2017[14]) (Cournède et al., 2018[15]) et (OECD, 2020[16]).
La croissance tendancielle des salaires a ralenti, malgré une accélération des salaires réels constatée au début de 2020 (3.4 % contre 1.8 % en 2019), en partie grâce aux accords salariaux de 2019, qui ont couplé les futures augmentations de salaire à l’évolution du PIB par habitant. Ces accords ont contribué à atténuer les conséquences économiques de la pandémie et à étayer le pouvoir d’achat des personnes ayant de faibles revenus d’activité. Cela dit, la productivité constituerait un meilleur point d’ancrage pour préserver la compétitivité et la stabilité macroéconomique, tout en veillant à ce que la croissance continue de profiter à tous. Dans ce contexte, les réformes de 2016 du système de négociations salariales adoptées en Finlande, qui lient plus étroitement l’évolution des salaires à celle de la productivité, pourraient servir de modèle aux partenaires sociaux en Islande, une fois que la reprise sera fermement engagée (OCDE, 2019[17]).
La rigueur de la réglementation entrave la concurrence
La rigueur de la réglementation des marchés de produits de l’Islande est proche de la moyenne de l’OCDE, mais elle diffère considérablement suivant les domaines (Graphique 1.18). Le secteur des entreprises publiques est de taille modeste et bien géré, mais les obstacles à l’entrée sur le marché sont considérables tant pour les entreprises nationales qu’étrangères, ce qui nuit à une saine concurrence. Les lourdes charges administratives qui pèsent sur les nouvelles sociétés, ainsi qu’un vaste système d’autorisations et de permis, protègent les entreprises en place et ralentissent les nouvelles jeunes pousses (start-ups) innovantes. Enfin, l’existence de liens étroits et potentiellement incontrôlés entre le monde politique et des groupes d’intérêts crée un risque d’activités de lobbying créant des distorsions. L’Islande devrait promouvoir un environnement ouvert et propice au jeu de la concurrence, et garantir une stricte séparation entre intérêts publics et privés. L’instauration de délais de carence à observer avant de passer du secteur public à des groupes d’intérêts ou vice-versa est une démarche bienvenue.
Dans une récente évaluation d’impact sur la concurrence, l’OCDE a examiné la réglementation en vigueur dans deux secteurs, à savoir le tourisme et la construction, en vue de préparer des réformes destinées à rendre le cadre réglementaire plus propice au jeu de la concurrence (OECD, 2020[16]). Ces deux secteurs sont des piliers essentiels de l’économie islandaise, puisqu’ils représentent ensemble environ 17 % du PIB et 23 % de l’emploi.
La principale recommandation concernant le secteur du tourisme est de remettre à plat le système inefficient et coûteux régissant la propriété et l’exploitation de l’infrastructure aéroportuaire. Dans la mesure où une concurrence entre aéroports n’est guère possible en Islande, l’exploitation de l’infrastructure aéroportuaire devrait faire l’objet d’appels d’offres, et les tarifs aéroportuaires devraient être réglementés de manière adéquate. Il est également proposé dans le rapport de l’OCDE de revoir les concessions d’activités commerciales pour améliorer la productivité des services auxiliaires, notamment des transports par bus, à l’aéroport international de Keflavik. Enfin, il est suggéré dans ce rapport d’assouplir la réglementation applicable aux voyagistes et aux taxis.
S’agissant du secteur de la construction, il est notamment recommandé de procéder à un assouplissement ciblé des règles d’urbanisme et de construction, en particulier pour remédier à la lourdeur des procédures d’autorisation et alléger certaines règles relatives aux matériaux de construction, qui alourdissent les coûts sans améliorer la qualité des bâtiments. En outre, le cadre vaste et restrictif qui régit la délivrance des autorisations professionnelles dans les deux secteurs considérés devrait être assoupli, afin que de nouveaux emplois puissent être créés (voir ci-après).
D’après le rapport, plus de 670 instruments de réglementation entravent le jeu de la concurrence, et la suppression ou la modification de ces dispositions pourrait se traduire par une augmentation du PIB islandais de l’ordre de 1 %. Au printemps 2021, le gouvernement a présenté au Parlement un projet de loi destiné à alléger les charges administratives dans les secteurs de la restauration et de la location de voitures. Dans ce contexte, le gouvernement devrait évaluer l’impact de la réglementation dans d’autres branches d’activité, notamment l’agriculture et l’énergie, et supprimer les dispositions réglementaires aux effets négatifs.
La réglementation des services professionnels et personnels est plus stricte en Islande que dans la plupart des autres pays de l’OCDE (Graphique 1.19). Aucune profession artisanale ne peut être exercée sans autorisation. L’exercice de nombreuses activités est subordonné à la détention de plusieurs titres professionnels, ce qui alourdit encore le fardeau qui pèse sur les nouveaux entrants, en particulier dans le secteur de la construction (OECD, 2020[16]). Les professionnels étrangers, même ceux qui sont originaires d’un pays membre de l’Espace économique européen (EEE), doivent réussir des examens complémentaires en Islande. La délivrance d’autorisations professionnelles peut correspondre à des objectifs des pouvoirs publics tels que la santé et la sécurité, mais des conditions d’accès restrictives à certaines professions peuvent ralentir la croissance de l’emploi et de la productivité, et entraver la transition vers une économie plus innovante. Le gouvernement devrait supprimer les restrictions réglementaires applicables aux services s’il n’existe aucune raison impérieuse de les maintenir, en traitant les questions telles que la protection des consommateurs au moyen de dispositions législatives adaptées.
Des restrictions s’appliquent à l’investissement direct étranger (IDE), ce qui explique en partie sa faiblesse en proportion du PIB (voir les chapitres 2 et 3). Des dispositions législatives, qui datent des années 1990, limitent les investissements des sociétés étrangères établies en dehors de l’EEE dans le secteur de la pêche, ainsi que dans ceux de l’énergie et du transport aérien. De manière plus générale, l’investissement étranger peut être « bloqué » si l’on estime qu’il réduit la concurrence ou qu’il a un effet préjudiciable sur l’économie islandaise, bien que cette disposition n’ait jamais été appliquée. La moitié des membres du conseil d’administration et le directeur général des sociétés doivent résider en Islande ou dans un pays membre de l’EEE. L’accès aux marchés publics est ouvert aux entreprises étrangères, mais la lourdeur de la réglementation relative aux activités d’audit favorise les auditeurs titulaires d’une licence locale. Enfin, des restrictions s’appliquent aux non-ressortissants en matière d’investissement immobilier. Le marché des télécommunications, en revanche, est très ouvert. Dans ce contexte, les autorités devraient assouplir davantage les restrictions aux investissements directs étrangers dans les secteurs où aucune raison impérieuse ne justifie leur maintien.
La réglementation des industries de réseau est restrictive, en particulier dans le secteur de la distribution d’électricité, ce qui limite sa capacité à tirer parti de ses avantages comparatifs intrinsèques. La production d’électricité islandaise est physiquement séparée des réseaux de transport de l’Europe et de l’Amérique du Nord, ce qui confère un pouvoir de marché considérable aux fournisseurs locaux d’électricité (et crée des obstacles à l’entrée sur le marché quasiment infranchissables pour les fournisseurs étrangers). Les projets de construction d’un câble de transport d’électricité reliant l’Islande au Royaume-Uni ont été abandonnés. Depuis 2003, l’Islande se conforme à l’exigence réglementaire minimale appliquée dans l’Union européenne consistant à séparer les activités de production, de transport et de distribution d’électricité, mais le marché reste dominé par quelques acteurs essentiellement publics. Dans ce contexte, le gouvernement devrait améliorer le cadre réglementaire du marché de l’électricité, notamment en dissociant la propriété des sociétés de production, de transport et de distribution, et en ouvrant complètement à la concurrence le marché de gros.
Il est indispensable de s’attaquer au problème de la pénurie de compétences
La pandémie a mis en lumière le besoin d'une réaffectation plus rapide de la main-d'œuvre et d'un renforcement des compétences conforme aux besoins du marché du travail. La transition vers une économie à plus faible intensité de carbone où le numérique tiendra une plus grande place, conjuguée aux pressions démographiques, rend également nécessaire la possibilité que des compétences puissent être transférées vers de nouvelles activités. Les autorités ont commencé à prendre des mesures pour relever ces nouveaux défis. Les universités et les établissements scolaires, sous la houlette conjointe des ministères de l’Éducation et du Travail, ont élaboré des cours de recyclage dans les domaines où il existe des pénuries de compétences, en particulier pour les techniciens, les artisans et les professionnels de santé. Le gouvernement a également renforcé les programmes destinés à l'amélioration des compétences linguistiques des migrants. Les fonds pour la recherche consacrés à l’innovation ont été augmentés, et un nombre plus important d'étudiants travaillent sur des projets menés conjointement par des universités et des entreprises, ce qui permet vraisemblablement d’en accroître la pertinence. Enfin, les autorités ont commencé à dresser l’inventaire des prévisions en matière de compétences.
Des réformes de grande ampleur en matière d'éducation et de compétences restent cependant nécessaires pour préparer l’Islande aux défis à plus long terme de la transition économique :
Comme le montrent les scores au PISA, les résultats de l’enseignement primaire et secondaire restent médiocres (Graphique 1.20). Les compétences en lecture sont plus faibles chez les garçons que chez les filles, et l’écart est plus grand que dans d’autres pays nordiques. L’écart entre les élèves autochtones et les élèves issus de l’immigration est également plus important que dans la plupart des autres pays nordiques (OECD, 2019[18]). Les résultats tangibles de la stratégie nationale 2015 pour la compréhension de l’écrit et du nouveau cadre de compétences des enseignants élaboré en 2017 se font toujours attendre. Si le système éducatif islandais est remarquablement équitable, le statut social des enseignants est moins bon qu’il ne l’est dans beaucoup de pays de l’OCDE, leurs qualifications sont en baisse et le système de rémunération récompense peu l’expérience et les résultats pédagogiques concrets. Dans ce contexte, et comme préconisé par l’OCDE dans la précédente Étude économique, le gouvernement devrait revoir le système de rémunération pour attirer des enseignants de haute qualité et mieux récompenser l’excellence, et adapter les cursus aux capacités et aux besoins des élèves.
L’enseignement supérieur est peu ouvert aux besoins du marché du travail, d’où un déséquilibre entre l’offre et la demande de compétences. Le nombre d’étudiants inscrits dans les matières STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques), et en particulier dans les disciplines du numérique pour lesquelles la demande du marché du travail est la plus forte, reste en deçà des besoins potentiels. Du fait du système de financement, les universités ont davantage intérêt à mettre l’accent sur les inscriptions que sur les résultats, ce qui les incite à privilégier les formations peu onéreuses et les matières populaires. Les financements publics sont majoritaires, même si la collaboration entre les universités et le secteur privé se développe. Dans ce contexte, le financement de l’université devrait être plus étroitement lié aux performances et aux résultats sur le marché du travail, comme c’est le cas au Danemark (Encadré 1.6).
Encadré 1.6. La réforme du financement de l’université au Danemark
Comme l’Islande, le Danemark rencontre des difficultés pour faire faire aux demandes concernant certaines compétences de la part du marché du travail. Des pénuries de compétences apparaissent dans différents domaines de connaissances comme l'enseignement et la formation, les mathématiques ou encore l’informatique et l’électronique. Si la part de la population adulte diplômée de l'enseignement supérieur est légèrement supérieure à la moyenne de l’OCDE, les étudiants sont moins nombreux que dans d'autres pays de l’OCDE à s’orienter vers les disciplines STIM. Par ailleurs, la part des entreprises ayant des difficultés à pourvoir les postes de spécialistes de l’informatique est parmi les plus élevées de toute la zone OCDE.
Dans ce contexte, les pouvoirs publics ont lancé une initiative visant à encourager les étudiants à choisir des filières d’études conformes à leurs capacités, à achever leurs études dans un délai raisonnable et à privilégier les professions fortement demandées. Un accord a été adopté en décembre 2017 pour réformer le financement de l’université en fonction de la qualité et des résultats des étudiants. Le financement sera basé à hauteur de 25 % sur le niveau du budget actuel et de 67.5 % sur l’activité (nombre de cours offerts), et une dotation de 7.5 % sera fonction des résultats du point de vue du marché du travail. Le gouvernement a également lancé un Pacte pour la technologie qui vise à augmenter le nombre de diplômés des filières STIM, en collaboration avec les entreprises, les établissements universitaires et les instituts de recherche.
Source : (OCDE, 2019[19]).
Il faut renforcer l'enseignement et la formation professionnels (EFP). Seuls 25 % des élèves du secondaire s’orientent vers l’enseignement professionnel à l’issue de la scolarité obligatoire, une proportion inférieure à celle de n'importe quel autre pays européen de l’OCDE (Graphique 1.21). Le système d’EFP repose en grande partie sur l’apprentissage ou la formation en entreprise, surtout dans les professions traditionnelles comme les métiers de techniciens ou l’artisanat, mais l’intégration entre l’enseignement en milieu scolaire et la formation en milieu professionnel reste peu développée. Dans ce contexte, étendre la formation en milieu professionnel à des secteurs de services comme les technologies numériques ou le tourisme pourrait contribuer à renforcer la pertinence des formations pour le marché du travail. Élargir l’offre de formations en milieu professionnel pourrait aussi aider l’Islande à résoudre le problème de décrochage auquel elle est confrontée, dans la mesure où la part des 25-34 ans non diplômés du deuxième cycle du secondaire est l’une des plus élevées dans la zone OCDE (OCDE, 2020[20]). Les autorités ont commencé à développer les passerelles vers l’enseignement supérieur offertes aux étudiants en EFP, par exemple en leur facilitant l’accès aux universités et en créant des filières professionnelles spécifiques dans le supérieur, ce qui est une démarche bienvenue.
Tableau 1.5. Recommandations antérieures et mesures prises pour améliorer la compétitivité et les compétences
Principales recommandations |
Mesures prises |
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Réduire la charge réglementaire, particulièrement dans le secteur des services et les industries de réseau. |
Le gouvernement a établi un plan d'action pour appliquer les recommandations de l’évaluation d'impact sur la concurrence publiée par l’OCDE en 2020. Un projet de loi visant à alléger la réglementation dans les secteurs de la restauration et de la location de voitures a été soumis au parlement. |
Réduire les obstacles à l’investissement étranger. |
L’obligation de résidence en Islande faite aux membres des conseils d'administration a été levée en 2019. |
Surveiller la croissance de la productivité lors de la fixation des salaires et se référer aux « orientations salariales » établies par un groupe d’experts. |
Un Comité sur les statistiques du marché du travail créé en 2019 participe à la préparation et au suivi des négociations salariales collectives. |
Améliorer la qualité de l’enseignement en allongeant la période de formation pratique dans les programmes de formation initiale et en personnalisant davantage les perspectives d’évolution professionnelle offertes aux enseignants. |
Au cours de leur dernière année de formation initiale, les étudiants peuvent effectuer des stages rémunérés. La formation professionnelle continue des enseignants a été élargie. |
Offrir des programmes de formation linguistique efficaces. |
Le nombre de cours de langue offerts aux migrants a augmenté. |
Élaborer des méthodes et des outils permettant de suivre les besoins de compétences qui fassent appel à plusieurs sources d’information, de préférence aussi bien quantitatives que qualitatives. |
Les autorités ont commencé à dresser l’inventaire des prévisions en matière de compétences. |
Renforcer les compétences professionnelles grâce à une meilleure intégration entre la formation en milieu professionnel et la formation en milieu scolaire. |
Les établissements scolaires s’efforcent davantage d’intégrer l'apprentissage dans les cursus. |
Lier en partie le financement des universités à leur capacité de fournir, via leurs formations supérieures, des compétences correspondant aux besoins du marché du travail. |
Aucune mesure prise. |
Améliorer la gouvernance et l’intégrité dans le secteur public
Les indicateurs de l'intégrité publique et de la maîtrise de la corruption montrent que l’Islande obtient des résultats supérieurs à la moyenne de l’OCDE, mais que cette performance est orientée à la baisse (Graphique 1.22). Selon certains observateurs, ce déclin s’explique par un faible de niveau de transparence dans les processus décisionnels des pouvoirs publics et par des conflits d’intérêts fréquents. Comme relevé plus haut, l’étroitesse des liens entre le secteur public et le secteur privé pose apparemment un problème. Le cadre institutionnel islandais, notamment les règles de l’État de droit, sont solides, mais moins semble-t-il que dans d'autres pays nordiques. La confiance dans la puissance publique est passé largement en dessous de la moyenne de l’OCDE après la crise financière mondiale, mais elle est repartie à la hausse ces dernières années.
L’Islande a pris un certain nombre de mesures visant à renforcer la lutte contre la corruption. Au printemps 2020, elle a adopté une législation destinée à renforcer la protection des lanceurs d’alerte dans le secteur public et dans le secteur privé et à améliorer l’accès à l’information. Le pays doit faire en sorte d'assurer la mise en œuvre adéquate et l’efficacité de cette nouvelle législation (OECD, 2020[21]). Aucune affaire de corruption transnationale n'a encore été menée à son terme en Islande, et lorsque des allégations de corruption transnationale crédibles ont été formulées, elles n’ont fait l’objet d'aucune évaluation. Une première affaire de corruption transnationale est actuellement en cours d’instruction. L’intégrité publique devrait demeurer un principe directeur dans les initiatives des autorités pour lutter contre la corruption, étant donné le rôle que ces efforts jouent dans l’amélioration de la productivité et de l’inclusivité (OCDE, 2020[22]).
Tableau 1.6. Conclusions et recommandations pour promouvoir une reprise forte, résiliente et inclusive
Politiques monétaire et budgétaire en faveur d’une reprise forte, résiliente et inclusive |
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L’inflation et les anticipations d'inflation à court terme sont supérieures aux objectifs. |
Conserver une politique monétaire accommodante, mais se tenir prêt à un resserrement en cas de risque d’ancrage des anticipations d'inflation à long terme. |
La politique budgétaire soutient l’activité économique. |
Continuer de soutenir l’économie et engager le processus d’assainissement, ainsi qu’il est prévu, lorsque la reprise sera fermement établie. |
Des investissements publics plus importants sont nécessaires pour favoriser la réallocation des ressources. |
Veiller à ce que les investissements dans les infrastructures, l’éducation, l’innovation et la transformation numérique soient bien effectués selon les modalités prévues. |
Les subventions et les dépenses au titre de la TVA sont élevées. |
Réduire les subventions, en particulier à l’agriculture, et les dépenses de TVA. |
Les examens de dépenses peuvent contribuer à améliorer la qualité des dépenses publiques. |
Veiller à ce que les examens de dépenses deviennent une composante systématique du processus budgétaire, comme le prévoit le gouvernement. |
Politiques structurelles en faveur de la croissance inclusive |
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Les obstacles à l’entrée d’entreprises nouvelles sont élevés. |
Réduire les obstacles à une concurrence saine dans les secteurs du tourisme et de la construction. Assouplir l’accès aux professions strictement réglementées. |
L’investissement direct étranger est peu élevé, et en recul. |
Ouvrir davantage le pays en assouplissant les restrictions relatives aux entreprises à capitaux étrangers, aux marchés publics et aux activités de révision comptable. |
La concurrence est faible dans le secteur de l’électricité. |
Dissocier complètement la structure de propriété des sociétés de production, de transport et de distribution d’électricité, et ouvrir complètement à la concurrence le marché de gros. |
Les scores au PISA sont médiocres et se dégradent. |
Améliorer la structure de rémunération pour attirer des enseignants de haute qualité et récompenser l’excellence. |
Le déséquilibre entre l’offre et la demande de compétence est important. Les pénuries de main-d'œuvre se sont intensifiées dans certains secteurs, ralentissant la réallocation des ressources. |
Poursuivre et étendre les programmes de formation aux professions pour lesquelles l’offre est insuffisante. Renforcer l’enseignement et la formation professionnels (EFP) en développant l'apprentissage en entreprise et en facilitant l’accès à l’enseignement supérieur aux diplômés de l’EFP. Resserrer les liens entre l’enseignement supérieur et le marché du travail, en liant une partie du financement des universités aux besoins du marché du travail. |
L’écart entre les heures travaillées par les hommes et par les femmes est important, générant un écart salarial considérable entre les deux sexes. |
Réduire le taux marginal d’imposition sur le deuxième apporteur de revenu, qui est élevé, par exemple en supprimant progressivement les prestations familiales. |
Les dépenses consacrées aux prestations d’invalidité sont élevées. |
Poursuivre la réforme du système de prestations d’invalidité, en encourageant davantage le retour et le maintien dans l’emploi. |
Le niveau de corruption perçue est faible, mais en augmentation. |
Durcir les règles relatives aux relations entre le secteur public et le secteur privé, notamment en ce qui concerne le délai à respecter pour passer de l’un à l’autre. Veiller à assurer la mise en œuvre adéquate et l’efficacité de la nouvelle législation sur les lanceurs d'alerte. |
Note : Les principales recommandations sont indiquées en caractères gras et reprises dans le Résumé.
Références
[1] Adalbjornsson, T. (2019), « Iceland’s datacenters are booming - here is why this is a problem », MIT Technology Review, https://www.technologyreview.com/2019/06/18/134902/icelands-data-centers-are-booming-heres-why-thats-a-problem/amp/.
[5] Central Bank of Iceland (2021), Background to the Decision of the Countercyclical Buffer, 24 March.
[6] Central Bank of Iceland (2021), Financial Stability, 2021/1.
[3] Central Bank of Iceland (2021), Monetary Bulletin 2021/1.
[2] Central Bank of Iceland (2021), Monetary Bulletin, 2021/2.
[4] Central Bank of Iceland (2020), Financial Stability, 2020/2.
[15] Cournède, B. et al. (2018), « Public Finance Structure and Inclusive Growth », OECD Policy paper 25.
[14] Égert, B. et P. Gal (2017), « The Quantification of Structural Reforms in OECD Countries: A New Framework », OECD Economics Department Working Papers, No. 1354, http://dx.doi.org/10.1787/2d887027-en.
[8] FATF (2020), Anti-money Laundering and Counter-terrorist Financing Measures – Iceland, 2nd Enhanced Follow-up Report & Technical Compliance Re-Rating, FATF, Paris, http://www.fatf-gafi.org/publications/mutualevaluations/documents/fur-iceland-2020.html.
[7] FATF (2018), Anti-money Laundering and counter-terrorist Financing Measures - Iceland, Fourth Round Mutual Evaluation Report, FATF, ParisFATF (2018), Anti-money laundering and counter-terrorist financing measures - Iceland,, http://www.fatf-gafi.org/publications/mutualevaluations/documents/mer-iceland-2018.html.
[22] OCDE (2020), Manuel de l’OCDE sur l’intégrité publique, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/84581cb5-fr.
[20] OCDE (2020), Regards sur l’éducation 2020 : Les indicateurs de l’OCDE, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/7adde83a-fr.
[19] OCDE (2019), Études économiques de l’OCDE : Danemark 2019 (version abrégée), Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-dnk-2019-fr.
[17] OCDE (2019), Études économiques de l’OCDE : Finlande 2018 (version abrégée), Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/5c48f31f-fr.
[9] OECD (2021), OECD Interim Economic Outlook, OECD Publishing, Paris.
[21] OECD (2020), Implementing the OECD Anti-Bribery Convention: Iceland, Phase 4 Report, OECD Publishing, Paris, https://www.oecd.org/daf/anti-bribery/Iceland-Phase-4-Report-ENG.pdf.
[16] OECD (2020), OECD Competition Assessment Reviews: Iceland, http://www.oecd.org/daf/competition/oecd-competition-assessment-reviews-iceland.htm.
[24] OECD (2020), OECD Economic Outlook 108, OECD Publishing, Paris.
[11] OECD (2020), Social Expenditure Update, http://www.oecd.org/social/expenditure.htm.
[23] OECD (2020), Tax Policy Reforms: OECD and Selected Partner Economies, OECD Publishing, http://dx.doi.org/doi.org/10.1787/7af51916-en.
[10] OECD (2019), OECD Economic Surveys: Iceland, OECD Publishing, Paris.
[18] OECD (2019), PISA 2018 Results. Combined Executive Summaries.
[12] Olafsdottir, K. (2020), « The Icelandic Labour Market 2000-2018 », IZA World of Labour, http://dx.doi.org/doi: 10.15185/izawol.474.
[25] von Rueden, C. et I. Bambalaite (2020), « Measuring occupational entry regulations: A new OECD approach », OECD Economics Department Working Papers, n° 1606, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/296dae6b-en.
[13] Work in Iceland (2021), Maternity and Paternity leave.