L’Allemagne promeut les solutions fondées sur la nature pour mieux adapter les villes au changement climatique. Les toitures et façades végétalisées et autres espaces naturels imitent le cycle naturel de l’eau en absorbant la pluie là où elle tombe et en se gonflant comme des éponges jusqu’à ce que l’eau puisse pénétrer dans la terre ou s’évaporer. Ce mécanisme constitue un moyen naturel de prévention des inondations et contribue également à rafraîchir les bâtiments, à favoriser la biodiversité et à améliorer la qualité de l’air et le bien-être des citoyens. Beaucoup de villes allemandes ont commencé à végétaliser leurs bâtiments.
En Allemagne, des villes perméables pour faire face à la chaleur et aux inondations
Abstract
Défis
Bien que son climat soit généralement tempéré, l’Allemagne a récemment subi plusieurs vagues de chaleur et inondations. Par exemple, les inondations catastrophiques de juillet 2021 ont provoqué d’importantes destructions, en particulier dans les Länder de Rhénanie-Palatinat et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Plus de 180 personnes ont perdu la vie et environ 800 autres ont été grièvement blessées. Comme d’autres pays européens, l’Allemagne a également fait face à plusieurs vagues de chaleur, les températures dépassant largement les 35 degrés, ce qui a particulièrement affecté les personnes âgées, les jeunes enfants et d’autres groupes vulnérables. Les villes sont souvent plus chaudes que les zones rurales, car les bâtiments et trottoirs en béton ré-émettent la chaleur du soleil ; la température y est plus élevée également en raison de la concentration d’habitants, de véhicules et de complexes industriels. Les effets des vagues de chaleur et des risques connexes pour la santé sont plus fortement ressentis en ville (c’est l’effet d’îlot de chaleur). Pour ces raisons, de nombreuses villes allemandes cherchent à accroître leur résilience climatique et à mieux protéger leurs citoyens. Elles se tournent vers les solutions fondées sur la nature pour améliorer la capacité des villes à absorber l’eau de pluie et pour rafraîchir les bâtiments grâce à des toits et façades végétalisés et à d’autres espaces naturels. Parmi les principaux obstacles, on trouve la tendance à concevoir les infrastructures grises comme par le passé, à appliquer des principes de planification urbaine traditionnels et à mettre en œuvre des pratiques plus coûteuses de modernisation des bâtiments après coup.
Approche
Les toitures et façades végétalisées et autres espaces naturels imitent le cycle naturel de l’eau en absorbant la pluie là où elle tombe et en se gonflant comme des éponges jusqu’à ce que l’eau puisse pénétrer dans la terre ou s’évaporer. Les zones verdies viennent ainsi alléger la pression sur les réseaux d’assainissement et contribuent à prévenir ou du moins réduire les conséquences des inondations. Les toits et façades végétalisés contribuent également à maintenir la fraîcheur des bâtiments et de l’air ambiant, favorisent la biodiversité et améliorent la qualité de l’air et le bien-être des citoyens.
Il existe deux types de toitures végétalisées : intensives et extensives. Les toits intensifs présentent une profondeur de sol végétalisé et donc une capacité d’absorption de l’eau de pluie supérieures ; cependant les toits extensifs demandent beaucoup moins de maintenance et sont donc moins coûteux et plus appréciés. En 2019, la grande majorité des toits végétalisés (84 %) en Allemagne recourait à la méthode extensive (BuGG, 2020). La tendance évolue maintenant en faveur des toitures végétalisées intensives (avec la création de jardins accessibles sur les toits, par exemple).
L’installation de toitures et façades végétalisées a été principalement encouragée par les municipalités qui ont prévu des dispositions en ce sens dans leurs plans locaux de développement. En 2019, près des deux tiers des villes allemandes avaient rendu obligatoire l’inclusion des toits végétalisés dans les plans de développement (contre un tiers en 2010). Sur dix villes de plus de 50 000 habitants, sept ont prévu des dispositions en faveur des toitures végétalisées dans leur plan de développement. Ces dispositions s’appliquent principalement aux toits plats et aux toits à faible inclinaison, l’épaisseur moyenne du substrat étant d’au moins 10 cm (BuGG, 2020). Certaines municipalités ajoutent des impératifs spécifiques applicables à la conception des structures des bâtiments.
Des programmes de financement ciblés sont en général utilisés pour encourager le verdissement de quartiers spécifiques (ils couvrent parfois la municipalité entière). Environ un quart des grandes villes allemandes octroie des aides financières pour la végétalisation des toits. Les financements proposés peuvent couvrir jusqu’à la moitié de l’investissement et représentent en moyenne 10-100 EUR/m2 et 500-100 000 EUR par projet (BuGG, 2020).
Dans le cadre des règlementations sur la compensation des impacts, environ un quart des villes attribue des points aux toits végétalisés pour leur effet positif sur l’environnement. La promotion des toits végétalisés va de pair avec celle du photovoltaïque/solaire thermique. Par ailleurs, la grande majorité des villes octroie également des réductions sur la taxe différenciée pour le traitement des eaux de pluie, mais ces réductions sont moindres comparé aux coûts supplémentaires liés à la végétalisation des bâtiments.
Résultats
L’Allemagne peut s’appuyer sur une longue tradition de végétalisation des toits et est devenue une figure de proue du verdissement des bâtiments, en exploitant des techniques très diverses et une expertise solide. Étant donné leurs multiples bienfaits sur l’environnement urbain (gestion des eaux de pluie, refroidissement par évaporation, captage des poussières et du CO2), les toitures et façades végétalisées ont été reconnues comme une mesure importante pour l’adaptation au climat dans le Plan d’action climatique de l’Allemagne à l’horizon 2050.
La superficie totale de toits végétalisés était de quelque 120 millions de m2 en 2019 en tenant compte des toits extensifs et intensifs et des toits de parcs de stationnement souterrains. Cette superficie a plus que doublé en dix ans. En 2019, plus de 7 millions de m2 supplémentaires de toits ont été végétalisés, ce qui correspond environ à 9 % des nouveaux toits plats construits (BuGG, 2020). La construction écologique crée également de nouveaux emplois dans les professions de ce secteur, notamment pour la maintenance des toits.
Cependant, la situation est très variable selon les régions et dépend de multiples réglementations en matière de construction, de divers plans de développement urbain, règlements municipaux, réglementations environnementales, financements municipaux et autres mesures incitatives. D’après l’indice de végétalisation des toits, les villes de Munich, Stuttgart et Berlin disposent de la plus large superficie de toits végétalisés, soit plus de 4 millions de m2 ; Stuttgart arrive en tête en termes de pourcentage de toits végétalisés par habitant (4.1 m2/habitant contre une moyenne de 1.2 m2/habitant dans les 15 plus grandes villes).
Enseignements
Afin d’accélérer la végétalisation des toitures et des façades, il serait utile de concevoir des normes communes et un inventaire national pour mesurer les progrès accomplis et évaluer l’efficacité des mesures de soutien. Pour l’heure, les villes allemandes recourent à des méthodes différentes pour estimer la superficie existante des toitures et façades végétalisées (images aériennes ou satellites, cadastres ou modèles numériques des bâtiments) et seules quelques villes actualisent leur inventaire des toits végétalisés chaque année. Ces informations contribueraient à assurer un suivi de l’efficacité des aides directes et indirectes.
L’Allemagne gagnerait également à disposer de meilleurs outils analytiques pour mesurer la performance d’évaporation et les avantages énergétiques de la végétalisation des toits et des façades, tout comme elle bénéficierait d’une évaluation du cycle de vie complet et d’une analyse des coûts. La maintenance du couvert végétal existant devrait être mieux gérée en vue de mettre au point un cadre stratégique national à long terme qui apporterait des conseils et références clairs, y compris à l’usage des ménages.
En outre, il pourrait être nécessaire que l’État ou les Länder octroient davantage d’aides financières aux petites municipalités afin de les aider à déployer plus de projets de végétalisation.
Cet exemple de politique en pratique peut s’appliquer à des pays de l’OCDE bénéficiant d’un climat similaire, notamment de précipitations régulières.
En savoir plus
OCDE (2023), Examens environnementaux de l'OCDE : Allemagne 2022, Examens environnementaux de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris. Publication à paraître.
OECD (2021), Scaling up Nature-based Solutions to Tackle Water-related Climate Risks: Insights from Mexico and the United Kingdom, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/736638c8-en.
BuGG (2020). BuGG-Market Report on Building Greening 2020, Green Roofs, Green Facades and Interior Greening in Germany.
Publication à mettre en exergue
OCDE (2023), Examens environnementaux de l'OCDE : Allemagne 2022, Examens environnementaux de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris. Publication à paraître - https://issuu.com/oecd.publishing/docs/oecd-epr-germany-2023-introduction.
Lien vers : https://www.oecd.org/fr/changement-climatique.
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