La reprise consécutive à la pandémie marque le pas, sur fond d’incertitude accrue. Les dernières négociations salariales annuelles de printemps ont abouti à la plus forte hausse des salaires observée depuis trois décennies, ce qui pourrait marquer un tournant dans l’évolution des prix, de la croissance et des revenus, un objectif poursuivi de longue date par les pouvoirs publics japonais. Le cadre de politique monétaire est mis à rude épreuve par l’inflation persistante ainsi que par l’évolution de la situation monétaire et du secteur financier à l’échelle mondiale, et les risques de taux d’intérêt et de crédit dans le secteur financier doivent être surveillés de près. Compte tenu du niveau élevé de la dette publique, il est essentiel d’assainir les finances publiques en vue de reconstituer des marges de manœuvre budgétaires, en s’appuyant sur un cadre budgétaire à moyen terme crédible pour réduire le déficit primaire et inscrire le ratio dette/PIB sur une trajectoire clairement descendante. Le vieillissement rapide de la population pèsera sur la croissance tendancielle, sauf si les gains de productivité s’accélèrent. Sachant en outre que les tensions budgétaires s’accentueront sous l’effet du vieillissement démographique, les pouvoirs publics doivent agir pour freiner la hausse des dépenses de santé et de soins de longue durée. Accroître la part de la recherche fondamentale dans les dépenses totales de recherche‑développement (R-D) ainsi que la part de R-D financée par des entreprises qui est menée dans des établissements universitaires, renforcer la concurrence et améliorer l’accès des jeunes pousses (start-ups) aux financements sont autant de mesures qui favoriseraient l’innovation et la dynamique des entreprises. Toujours dans une optique de viabilité à long terme, le Japon devra réduire ses émissions de gaz à effet de serre, conformément aux objectifs fixés par les autorités nationales, en combinant investissements verts, mesures d’innovation et tarification du carbone.
Études économiques de l'OCDE : Japon 2024 (version abrégée)
1. Principaux éclairages sur l’action publique
Abstract
Avant la pandémie, la politique économique du Japon, baptisée « Abenomics », visait à sortir le pays de la déflation, à accélérer la croissance économique et à remédier aux effets de l’évolution démographique défavorable. Grâce aux réformes mises en œuvre, cette politique a effectivement permis de rehausser la croissance et le taux d’activité, en particulier celui des femmes et des seniors, et a conduit à un taux d’inflation faible mais positif. Depuis 2020, les pouvoirs publics axent davantage leurs mesures sur le court terme afin de protéger les ménages et les entreprises contre le double choc provoqué par la pandémie et la crise énergétique, qui a été accélérée par la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. La pandémie a également interrompu la convergence du taux de croissance de la production par habitant vers la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.1, partie A). La croissance avait rebondi après la pandémie, soutenue par l’amélioration des chaînes d’approvisionnement, l’augmentation du nombre d’arrivées de touristes à la suite de la réouverture des frontières, le rattrapage de la demande et l’orientation accommodante des politiques budgétaire et monétaire, mais elle s’est récemment essoufflée dans un contexte de forte incertitude (partie B). En outre, la divergence des politiques monétaires entre le Japon et d’autres économies avancées, l’instabilité financière à l’échelle internationale, les tensions géopolitiques et le fléchissement de la croissance mondiale soulignent l’importance de renforcer la résilience de l’économie japonaise face aux chocs.
Il est crucial de s’attaquer aux enjeux structurels à long terme pour parvenir à une croissance résiliente et durable. Le ratio dette publique brute/PIB a atteint 245 % en 2022 (Graphique 1.2, partie A). Par ailleurs, sur fond d’intensification des tensions démographiques, le taux de dépendance des personnes âgées devrait se hisser à 79 % d’ici à 2050 (chapitre 2 ; Graphique 1.2, partie B). Il est essentiel de renforcer la croissance de la productivité pour compenser le recul attendu de la population active dû au déclin et au vieillissement démographiques (partie C). Les responsables publics devront en outre engager des réformes ambitieuses pour atteindre l’objectif consistant à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050 (partie D).
Le programme de l’administration Kishida, qui vise à créer une « nouvelle forme de capitalisme », est axé sur le capital humain, l’innovation, la sécurité économique et les transformations numérique et écologique (Encadré 1.1). Les priorités d’action sont globalement conformes aux recommandations formulées dans les précédentes Études économiques de l’OCDE. Pour parvenir à une croissance plus durable et inclusive, le gouvernement accroît les dépenses et prévoit des réformes dans plusieurs domaines (capital humain, enfance et famille, environnement) (Government of Japan, 2023a). Une Agence pour l’enfance et la famille a notamment été créée en avril 2023, une mesure qui s’inscrit dans le droit fil de la priorité donnée par le gouvernement à l’enjeu démographique et au relèvement du taux de fécondité, qui s’établit actuellement à environ 1.3.
Dans ce contexte, les principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
Afin d’assurer la viabilité des finances publiques, les autorités doivent s’appuyer sur un plan crédible et concret pour dégager un excédent budgétaire primaire et placer le ratio d’endettement public sur une trajectoire descendante en maîtrisant les dépenses liées au vieillissement et en accroissant progressivement les recettes en vue de s’attaquer aux enjeux de l’après-pandémie. Il est de mise que la gestion souple du dispositif de contrôle de la courbe des rendements se poursuive et que le taux d’intérêt directeur à court terme soit légèrement relevé peu à peu, compte tenu des prévisions de l’OCDE selon lesquelles l’inflation devrait se maintenir aux alentours de l’objectif de 2 %.
Il est essentiel de mettre en œuvre de nouvelles réformes propices aux gains de productivité pour renforcer le cadre de l’innovation et les incitations accordées aux jeunes pousses (start-ups) productives, afin de rehausser la croissance potentielle et de remédier aux tensions liées au vieillissement démographique. Le renforcement de la situation financière des jeunes et des mesures de soutien aux familles et aux enfants, notamment l’amélioration du congé parental, contribuerait à inverser la tendance à la baisse du taux de fécondité. La suppression des obstacles à l’emploi des femmes et des seniors ainsi qu’un recours accru à la main-d’œuvre étrangère aideraient à contrer l’évolution défavorable de la situation démographique.
La réalisation des objectifs climatiques ambitieux du Japon devra passer par un ensemble complet de mesures, combinant notamment investissements verts, innovation et tarification du carbone, ainsi que par la planification des aléas, compte tenu de la proportion importante de technologies incertaines dans les plans de réduction des émissions.
Encadré 1.1. « Nouvelle forme de capitalisme » : stratégie et initiatives récentes
La stratégie du gouvernement vise à instaurer une « nouvelle forme de capitalisme » en créant un « cercle vertueux de croissance et de redistribution » afin de redynamiser la classe moyenne. Sa mise en œuvre nécessitera la collaboration des entreprises et des travailleurs, ainsi que des secteurs public et privé. Cette « nouvelle forme de capitalisme » repose sur l’investissement dans les quatre piliers suivants : les individus, la technologie et l’innovation, les jeunes pousses (start-ups), et les initiatives écologiques et numériques (Government of Japan, 2022a). Dans un premier temps, les pouvoirs publics viseront à pérenniser un « cercle vertueux des salaires et des prix », en s’appuyant sur la récente hausse de l’inflation et sur l’augmentation des rémunérations convenue lors des dernières négociations salariales, qui est la plus forte observée depuis 30 ans. Dans un second temps, ils renforceront la résilience économique du pays en réalisant des investissements publics ciblés dans le capital humain et les transformations numérique et écologique, en vue de stimuler l’investissement privé et d’inciter les entreprises à s’installer ou à se délocaliser au Japon. Outre des dispositions destinées à aider les ménages à faire face au niveau élevé des prix, le train de mesures économiques de novembre 2023 intègre des incitations fiscales destinées à étayer la progression des salaires, ainsi que des réformes de la réglementation visant à favoriser le développement des jeunes pousses et à renforcer la transformation numérique, par exemple dans le domaine de la santé.
Hausse structurelle des salaires : Le gouvernement prévoit d’inciter les entreprises à répercuter la hausse des coûts sur les prix, ce qui peut favoriser une hausse des salaires et l’équité des transactions de sous-traitance. Les secteurs public et privé uniront leurs efforts en faveur d’une augmentation structurelle des salaires, en s’appuyant sur trois piliers : (i) l’aide à la reconversion et au développement des compétences ; (ii) la mise en place d’un système de salaires fondé sur le type d’emploi et la situation effective de chaque entreprise ; et (iii) la facilitation du redéploiement de la main-d’œuvre vers les domaines en croissance.
Transformation écologique (GX) : Les autorités apporteront un soutien aux investissements initiaux (20 000 milliards JPY) sous la forme d’obligations de transition destinées à financer la transformation écologique (GX Economy Transition Bonds), mettront en place un dispositif de tarification du carbone et recourront à de nouvelles approches financières pour faciliter l’investissement privé et public dans la transition écologique, afin de mobiliser les 150 000 milliards JPY qui seront nécessaires au cours des dix prochaines années. Le Japon s’attachera en outre à promouvoir la diffusion des technologies et contribuera, via la coopération internationale, à la réalisation de la transition écologique à l’échelle régionale et mondiale.
Transformation numérique (DX) : Un plan d’action prévoyant des réformes de la fiscalité, des subventions et de la réglementation viendra appuyer les activités des entreprises nationales et étrangères dans des domaines stratégiques, tels que les semi-conducteurs, les batteries, la biofabrication et les centres de données. L’environnement global de l’investissement dans la transformation numérique sera amélioré, et la mise en place des infrastructures nécessaires (télécommunications, par exemple) pour mener à bien l’initiative intitulée « Vision pour une nation de cités-jardins numériques », qui a pour objectif de revitaliser les zones rurales, sera promue.
Jeunes pousses (start-ups) : Le Plan quinquennal de soutien aux jeunes pousses, adopté en novembre 2022, vise à multiplier par plus de dix l’investissement dans les jeunes pousses d’ici à l’exercice budgétaire 2027 (pour le porter à 10 000 milliards JPY) et à créer 100 licornes (entreprises privées dont la valorisation dépasse 100 milliards JPY) et 100 000 jeunes pousses. Dans le collectif budgétaire pour l’exercice 2022, le gouvernement a affecté 1 000 milliards JPY à ce plan, qui repose sur trois piliers pour favoriser la création d’entreprises via les ressources humaines, le financement et l’innovation ouverte.
1.1. La croissance ralentit sur fond de forte incertitude
Les taux élevés de vaccination contre le COVID-19 (Graphique 1.3) et le renforcement du système de santé destiné à protéger les groupes vulnérables ont permis de lever les restrictions qui avaient été instaurées et de rouvrir les frontières en 2022. Le rattrapage de la demande, qui a par ailleurs été stimulée par les aides publiques et les mesures destinées à amortir le choc de la flambée des prix, a étayé la reprise. En termes réels, le PIB et la production par habitant ont progressé respectivement de 1.0 % et de 1.4 % en 2022.
Les risques macroéconomiques directs découlant de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine ont été limités, les échanges commerciaux du Japon avec la Russie étant modestes. En 2022, la proportion des importations en provenance de Russie et celle des exportations vers la Russie étaient respectivement de 1.7 % et de 0.6 % du total. La part des combustibles fossiles dans le bouquet énergétique du Japon s’établit à 83 %, sachant qu’environ 90 % de ces combustibles sont importés, le charbon et le gaz naturel venant principalement d’Australie et le pétrole du Moyen-Orient. La dépendance du Japon à l’égard des combustibles fossiles russes, qui était déjà faible, a encore diminué en 2022 (charbon : 6 % ; gaz naturel : 8 % ; pétrole : 1 %), d’autres grands exportateurs s’étant substitués à la Russie. Le Japon est en outre tributaire de la Russie pour ses approvisionnements en métaux non ferreux (celle-ci représentant 13 % de ses importations totales de métaux non ferreux en volume en 2022), notamment le palladium, qui est utilisé dans les convertisseurs catalytiques des véhicules automobiles. Bien que le Japon dispose de stocks de métaux non ferreux, dont les prix se sont stabilisés depuis peu, la hausse durable des prix et la persistance des pénuries d’approvisionnement pourraient créer des goulets d’étranglement. Les effets indirects du renchérissement l’énergie et des produits alimentaires ont été plus prononcés, ce qui a incité les pouvoirs publics à mettre en place des mesures de soutien de grande ampleur (voir plus bas).
Après avoir vigoureusement augmenté au premier semestre de 2023, le PIB réel s’est contracté de 0.7 % au troisième trimestre sur fond de recul de la demande intérieure. La forte incertitude et l’inflation, conjuguées à la dissipation de l’effet de rattrapage de la demande, ont modéré la consommation privée (Graphique 1.4). La consommation de biens durables et non durables a chuté au deuxième et au troisième trimestres, tandis que la consommation de services est restée stable.
En janvier 2023, l’inflation globale mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) et l’indice des prix hors produits alimentaires frais ont atteint leur plus haut niveau depuis 41 ans, s’établissant respectivement à 4.3 % et 4.2 %. Les deux mesures restaient supérieures à l’objectif, ressortant à 2.8 % et 2.5 %, respectivement, en novembre (Graphique 1.5), tandis que l’inflation hors énergie et produits alimentaires frais s’établissait à 3.8 %. La contribution des prix de l’énergie à l’inflation globale a diminué, de même que celle des prix des importations et des biens de production, tandis que les prix des services aux entreprises continuent d’augmenter. Les prix des services aux particuliers étaient en hausse de 2.3 % en novembre, tirés par les tarifs des services de loisirs, notamment de l’hôtellerie (62.9 %), compte tenu de la progression du tourisme récepteur. Les prix des produits alimentaires, qui ont augmenté de 13 % entre janvier 2022 et novembre 2023, demeurent élevés.
La répercussion sur les prix à la consommation des augmentations de coûts dues au renchérissement antérieur des importations devrait se poursuivre à court terme. La proportion de composantes du panier de consommation utilisé pour mesurer l’inflation dont le prix augmente reste forte (partie C). Dans les temps à venir, la réduction des subventions publiques au gaz et à l’électricité va tirer les prix vers le haut, même le moment auquel cela se produira reste incertain. Les mesures des anticipations d’inflation à moyen terme tirées d’enquêtes ont également augmenté (partie D), 60 % des entreprises s’attendant à une hausse des prix de 2 % ou plus au cours de l’année à venir, tandis que les anticipations d’inflation à long terme s’établissent légèrement au-dessus de 2 %. Les anticipations d’inflation des ménages ont évolué à la hausse, celles à un an ressortant en moyenne à 10.7 %.
Les tensions se sont accentuées sur le marché du travail, le ratio offres/demandes d’emploi étant relativement élevé (Graphique 1.6, parties A et B). Les pénuries de compétences sont en partie liées aux complémentarités entre l’investissement immatériel et les compétences (Furukawa et al., 2023). Avant la pandémie, on observait une hausse régulière des taux d’emploi, tirée principalement par ceux des femmes et des travailleurs âgés, en partie grâce aux réformes structurelles antérieures (partie C). À mesure que les possibilités d’augmentation de l’offre de main-d’œuvre diminueront sous l’effet de l’évolution démographique défavorable, il sera essentiel de mener des réformes structurelles axées sur des politiques favorables à l’emploi et au renforcement des compétences (chapitre 2).
Le retour durable de l’inflation au niveau de l’objectif de 2 % dépendra en partie de la croissance des salaires. La stagnation des salaires nominaux observée par le passé au Japon tient aux anticipations d’inflation rétrospectives, à la focalisation des travailleurs sur la sécurité de l’emploi plutôt que sur la croissance des salaires, et à la faible mobilité de la main-d’œuvre, qui est liée aux spécificités du marché du travail japonais (Études économiques de l’OCDE de 2021 et 2019 ; chapitre 2) : i) le système de rémunération à l’ancienneté et les pratiques d’emploi de longue durée entraînent souvent des pertes de salaire pour les travailleurs d’âge moyen et les seniors en cas de transition professionnelle ; et ii) la proportion croissante de travailleurs non réguliers, qui est passée de 32 % en 2005 à 37 % en 2021, a comprimé le salaire moyen.
La dynamique des salaires est en train de changer peu à peu, sous l’effet de l’évolution du marché du travail consécutive à la pandémie et de la hausse de l’inflation. Les principaux syndicats et employeurs sont convenus dans le cadre des dernières négociations salariales annuelles (Shunto) d’augmenter la rémunération de base de 2.1 % et le salaire global de 3.6 %, alors que ces hausses avaient été de 0.6 % et 2.1 % un an auparavant (Graphique 1.7, partie A). En conséquence, la croissance des salaires nominaux s’est accélérée (partie B). Certains éléments indiquaient que les PME confrontées à des pénuries de main-d’œuvre augmentaient les salaires ou prévoyaient de le faire (JCCI, 2023), mais la diffusion des hausses de salaire aux PME est lente. Néanmoins, la contribution de la revalorisation des salaires de base à la croissance nominale des salaires des travailleurs à temps plein, qui tendait à être tirée par la rémunération des heures supplémentaires et les primes, augmente (parties C et D). En outre, les données relatives aux offres d’emploi pour les salariés réguliers laissent entrevoir une évolution à la hausse des salaires, qui pourrait stimuler la mobilité de la main-d’œuvre (Furukawa et al., 2023). Dans les temps à venir, le principal syndicat a déclaré qu’il s’efforcerait d’obtenir une hausse de plus de 3 % du salaire de base et de plus de 5 % du salaire global pour l’exercice 2024, et le dernier train de mesures économiques prévoit également des mesures destinées à aider les entreprises à augmenter les rémunérations. La croissance des salaires devrait donc s’accélérer en 2024-25.
Le redressement de la production industrielle et des exportations en termes réels a été fluctuant, compte tenu de l’évolution de la situation des chaînes d’approvisionnement et des perspectives mondiales. Les exportations à destination de la Chine, qui est un partenaire commercial essentiel du Japon (Graphique 1.8) sont à la traîne, tandis que celles à destination de l’Europe ont récemment diminué (Graphique 1.9, partie A). Le solde des échanges de biens s’est amélioré compte tenu de la modération des prix de l’énergie et des matières premières (partie B). Le nombre total de touristes étrangers accueillis s’est établi aux alentours du niveau de 2019 en novembre, même si le redressement du nombre de visiteurs en provenance de Chine est lent, puisqu’il reste limité à 34 % de son niveau d’avant la pandémie (partie C). L’enquête Tankan de décembre laisse entrevoir de solides intentions d’investissement des entreprises, mais les perspectives d’évolution de la production industrielle se sont dégradées, en raison de l’incertitude qui entoure les perspectives mondiales (partie D).
Face aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, le gouvernement a promulgué, en mai 2022, une loi pour la promotion de la sécurité économique (Economic Security Promotion Act). Celle-ci a pour objet de : (i) garantir un approvisionnement stable en produits critiques ; (ii) assurer la fourniture pérenne de services d’infrastructure essentiels ; (iii) soutenir le développement de certaines technologies critiques ; et (iv) préserver la confidentialité des demandes de brevet concernant certaines inventions liées à la sécurité. En décembre 2022, le gouvernement a arrêté une liste de 11 produits critiques, parmi lesquels figurent les semi-conducteurs, les applications d’informatique en nuage (cloud computing), les batteries, le gaz naturel liquéfié, les substances antibactériennes, les engrais et les aimants permanents. De plus, le Japon s’efforce de renforcer ses partenariats commerciaux internationaux fondés sur des règles, tels que l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, l’Accord de partenariat économique régional global et le Cadre économique indo-pacifique. Lancé plus récemment, ce dernier comprend 14 membres, qui représentent 40 % du PIB mondial.
La croissance du PIB devrait refluer de 1.9 % en 2023 à 1.0 % en 2024, avant de se redresser légèrement pour s’établir à 1.1 % en 2025, parallèlement à une diminution de la contribution positive du solde extérieur (Tableau 1.1). La consommation privée sera étayée par la progression des salaires et le nouveau train de mesures économiques. L’investissement des entreprises augmentera modérément, grâce aux subventions publiques et aux bénéfices élevés des entreprises. Les investissements publics dans des projets de grande envergure contribueront à l’expansion économique en 2024. Le marché du travail restera tendu, ce qui contribuera à renforcer la croissance des salaires en 2024-25. L’inflation globale mesurée par les prix à la consommation devrait atteindre plus de 2 % d’ici à la fin de 2025, sur fond d’expiration des subventions publiques, de comblement de l’écart de production et d’accélération de la progression des salaires.
Parmi les risques de divergence à la baisse par rapport aux prévisions figurent une demande extérieure plus faible que prévu, notamment un ralentissement plus marqué de l’économie chinoise, ainsi que de nouvelles hausses des prix de l’énergie et perturbations des chaînes d’approvisionnement. Une perte de confiance dans la viabilité des finances publiques japonaises et une hausse des primes de risque souverain pourraient déstabiliser le secteur financier et la sphère réelle de l’économie, ce qui aurait des effets d’entraînement négatifs considérables à l’échelle mondiale. À l’inverse, la croissance pourrait être plus vigoureuse si la consommation, de services en particulier, se redressait plus rapidement que prévu. Elle serait également renforcée par une hausse inattendue de la demande extérieure, notamment du tourisme récepteur. En outre, d’autres événements peu probables menaçant les perspectives pourraient faire dérailler la reprise (Tableau 1.2).
Tableau 1.1. La croissance devrait se modérer
|
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
---|---|---|---|---|---|---|
|
Prix courants (milliers de milliards JPY) |
Variation annuelle, en volume (prix de 2015) |
||||
PIB aux prix du marché |
539.8 |
2.6 |
1.0 |
1.9 |
1.0 |
1.1 |
Consommation privée |
291.8 |
0.8 |
2.2 |
0.9 |
1.0 |
0.6 |
Consommation publique |
113.2 |
3.4 |
1.7 |
0.8 |
- 1.0 |
0.0 |
Formation brute de capital fixe |
137.6 |
- 0.1 |
- 1.4 |
1.8 |
2.6 |
2.8 |
Demande intérieure finale |
542.6 |
1.1 |
1.1 |
1.1 |
1.0 |
1.0 |
Variation des stocks¹ |
- 1.3 |
0.4 |
0.3 |
0.0 |
- 0.3 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
541.3 |
1.5 |
1.5 |
1.1 |
0.7 |
1.0 |
Exportations de biens et services |
83.8 |
11.9 |
5.3 |
2.2 |
2.9 |
2.4 |
Importations de biens et services |
85.3 |
5.1 |
7.9 |
- 1.1 |
1.8 |
2.0 |
Solde extérieur¹ |
- 1.5 |
1.0 |
- 0.5 |
0.8 |
0.2 |
0.1 |
Pour mémoire |
|
|
|
|
|
|
PIB potentiel |
_ |
0.7 |
0.6 |
0.4 |
0.4 |
0.4 |
Déflateur du PIB |
_ |
- 0.2 |
0.3 |
3.8 |
2.7 |
2.2 |
Écart de production |
_ |
- 1.9 |
- 1.5 |
- 0.1 |
0.5 |
1.2 |
Indice des prix à la consommation (IPC) |
_ |
- 0.2 |
2.5 |
3.2 |
2.6 |
2.0 |
IPC sous-jacent2 |
_ |
- 0.7 |
0.3 |
2.7 |
2.3 |
2.0 |
Taux de chômage (% de la population active) |
_ |
2.8 |
2.6 |
2.6 |
2.5 |
2.4 |
Taux d’épargne des ménages, net (% du revenu disponible) |
_ |
7.8 |
5.2 |
2.8 |
2.3 |
0.7 |
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) |
_ |
- 6.2 |
- 5.7 |
- 5.2 |
- 4.3 |
- 3.3 |
Dette brute des administrations publiques (% du PIB) |
_ |
239.3 |
244.8 |
243.5 |
243.3 |
242.3 |
Solde des paiements courants (% du PIB) |
_ |
3.9 |
1.8 |
3.4 |
3.8 |
3.9 |
1. Contributions aux variations du PIB réel ; montant effectif dans la première colonne.
2. Indice des prix à la consommation hors produits alimentaires et énergie.
Source : OCDE, Perspectives économiques de l’OCDE, n° 114 (base de données), données actualisées après la publication des comptes nationaux du Japon le 8 décembre 2023.
Tableau 1.2. Événements susceptibles de modifier sensiblement les perspectives
Choc |
Effet probable |
---|---|
Escalade des tensions commerciales et géopolitiques |
Perturbations des chaînes d’approvisionnement et recul des exportations et de l’investissement des entreprises |
Abandon désordonné du contrôle de la courbe des rendements ou accentuation de l’instabilité financière mondiale |
Instabilité financière causée par la revalorisation des actifs risqués |
Augmentation de la fréquence et de la gravité des catastrophes naturelles |
Nombreux décès, perturbation de l’activité économique et coûts de reconstruction élevés |
Cyberattaques affectant des services essentiels |
Instabilité financière et répercussions socioéconomiques négatives causées par des perturbations des infrastructures, du secteur financier et des principaux services publics |
1.2. Le cadre de politique monétaire est exposé à des pressions accrues
La politique monétaire demeure accommodante, la Banque du Japon ayant maintenu son taux d’intérêt directeur à court terme inchangé, à -0.1 %, mais elle a apporté plusieurs ajustements à la gestion de son dispositif de contrôle de la courbe des rendements en vue d’améliorer le fonctionnement du marché. En décembre 2022, elle a modifié la gestion de ce dispositif de contrôle de la courbe des rendements, en élargissant la marge de fluctuation du taux de rendement des obligations d’État japonaises à 10 ans autour de l’objectif fixé à zéro, qui est passée de ±25 points de base environ à ±50 points de base environ, et en portant son objectif d’achats mensuels d’obligations d’État japonaises de 7 300 milliards JPY à quelque 9 000 milliards JPY. Elle a en outre renforcé ses opérations spéciales de refinancement (special funds-supplying operations) en janvier. En avril, un vaste réexamen de la politique monétaire de la Banque du Japon (qui devrait être achevé à la fin de 2024) a été annoncé par son gouverneur, tandis que ses indications prospectives ont été modifiées, l’institution ayant supprimé de ses communiqués la formule selon laquelle elle « s’attend à ce que les taux d’intérêt directeurs à court et à long terme restent à leurs niveaux actuels ou à des niveaux plus bas ». Il n’est pas prévu dans l’immédiat de réviser l’accord conclu en 2013 entre la Banque du Japon et le gouvernement, qui fixait pour objectif d’atteindre un taux d’inflation de 2 % « le plus tôt possible ». En juillet 2023, la Banque du Japon a annoncé que les limites supérieure et inférieure de la marge de fluctuation seraient considérées, dans le cadre de ses opérations de marché, comme des références et non comme des limites rigides, et qu’elle proposerait d’acheter des obligations d’État japonaises à 10 ans via des opérations d’achat à taux fixe de 1 %. À la fin du mois d’octobre, la Banque du Japon a changé de valeur de référence pour la limite supérieure de la fourchette retenue comme objectif de rendement en adoptant 1 %, et indiqué que le contrôle de la courbe des rendements reposerait essentiellement sur des achats massifs d’obligations d’État japonaises et des opérations de marché.
La divergence des politiques monétaires observée entre le Japon et d’autres économies avancées a contribué à une forte dépréciation du yen (Graphique 1.10, partie A), ce qui a conduit la Banque du Japon à procéder pour la première fois depuis 1998 à des interventions sur le marché des changes, en achetant des yens contre des dollars des États-Unis en septembre et en octobre 2022, pour un montant d’environ 9 200 milliards JPY (correspondant à 5 % des réserves de change du pays). Depuis lors ont eu lieu plusieurs épisodes de tensions sur le taux de change et le rendement des obligations d’État japonaises à 10 ans, qui a atteint un pic d’environ 0.9 % à la fin d’octobre. Ces tensions se sont quelque peu atténuées par la suite, mais elles pourraient ressurgir en fonction de l’évolution de la situation mondiale (partie B). En septembre 2023, la Banque du Japon détenait 54 % de l’encours des obligations d’État japonaises (hors bons du Trésor), et ses actifs totaux représentaient environ 126 % du PIB (parties C et D). Ses achats d’obligations d’État japonaises ont atteint un niveau record de 23 700 milliards JPY en janvier 2023, avant de retomber à 9 300 milliards JPY en octobre.
Le recours prolongé au dispositif de contrôle de la courbe des rendements peut engendrer des difficultés, notamment en réduisant la fonctionnalité du marché des obligations d’État japonaises et en créant des risques de volatilité sur la partie longue de la courbe. Le dispositif de ciblage du rendement des obligations d’État de la Banque de réserve d’Australie (RBA, Reserve Bank of Australia), qui a pris fin en novembre 2021, a fait l’objet d’évaluations, dont ont notamment été tirées les conclusions suivantes : l’utilisation de ce type de mécanisme devrait reposer à l’avenir sur une évaluation de la capacité d’adaptation de l’objectif de rendement à l’évolution de la situation ainsi que des difficultés opérationnelles connexes ; et les indications prospectives se sont affaiblies en 2021, lorsque l’objectif de rendement fixé est devenu incompatible avec les anticipations relatives à l’orientation de la politique monétaire (RBA, 2021 ; Lucca and Wright, 2022). Malgré sa situation différente, le Japon pourrait faire face à de nouvelles tensions si les marchés commençaient à spéculer sur la fin du contrôle de la courbe des rendements. Des données internationales donnent en outre à penser qu’un assouplissement monétaire prolongé peut entraîner une augmentation de la proportion d’« entreprises zombies » (Jafarov and Minella, 2023 ; Hong et al., 2022 ; Acharya et al., 2019).
Tout en reconnaissant les effets secondaires potentiels d’un assouplissement monétaire prolongé et le fait que la probabilité de parvenir à l’objectif de stabilité des prix de manière durable et stable avait augmenté, la Banque du Japon entend poursuivre sa politique d’assouplissement quantitatif et qualitatif via le contrôle de la courbe des rendements. Dans sa déclaration d’avril 2023, elle réitère que l’objectif de stabilité des prix de 2 % doit être atteint de manière durable et stable, mais précise cette fois que celle-ci doit « s’accompagner de hausses de salaires », ce qui laisse entrevoir la volonté d’éviter un resserrement prématuré. En octobre, la Banque du Japon a révisé à la hausse ses prévisions d’inflation mesurée par les prix à la consommation (hors produits alimentaires frais), en les portant à 2.8 % pour les exercices budgétaires 2023 et 2024, et à 1.7 % pour l’exercice 2025, en évoquant des facteurs d’inflation par les coûts (BoJ, 2023a). Néanmoins, d’après la synthèse des avis exprimés lors de la réunion de politique monétaire d’octobre 2023, quelques membres du Conseil de la Banque du Japon ont déclaré que les négociations salariales annuelles du printemps prochain et la mesure dans laquelle les hausses de salaire se répercuteraient sur les prix joueraient un rôle clé pour confirmer que le cercle vertueux enclenché entre les salaires et les prix se renforce.
Si l’inflation reste supérieure à l’objectif et si les rendements obligataires augmentent à l’échelle mondiale, les marchés pourraient à nouveau remettre en question le dispositif de contrôle de la courbe des rendements. Il faudrait donc continuer de lui apporter des modifications en vue de le rendre plus souple et de réduire les risques de brusques changements ultérieurs, qui pourraient créer de la volatilité sur les marchés. Les autorités monétaires pourraient notamment songer à relever l’objectif de rendement des obligations d’État japonaises à 10 ans et/ou à passer à un objectif de rendement à plus court terme. Selon les évaluations de la Banque du Japon, les taux à court et à moyen termes ont un effet plus important sur l’écart de production que les taux à long terme. Étant donné que l’inflation devrait rester aux alentours de 2 % (Tableau 1.1), que la croissance des salaires devrait s’accélérer et que l’écart de production devrait se combler, d’après les prévisions de l’OCDE, un relèvement progressif du taux directeur serait de mise à partir du début de 2024. Dans ce contexte, il faudrait prendre en compte les éventuelles retombées négatives que ces mesures pourraient avoir sur la stabilité financière nationale et mondiale (IMF, 2023a). Les politiques macroprudentielles peuvent contribuer à limiter les risques en cas d’abandon de la politique actuelle (voir plus bas). Il est également essentiel de communiquer de manière claire et en temps opportun sur l’orientation actuelle et future de la politique monétaire.
L’incertitude qui entoure les perspectives d’inflation est exceptionnellement forte. Parmi les facteurs de risque à la baisse figurent les obstacles structurels qui freinent de longue date la croissance des salaires (voir plus haut) et un éventuel ralentissement de l’économie mondiale. À l’inverse, un resserrement du marché du travail pourrait entraîner une croissance des salaires plus forte que prévu. Le maintien de certaines aides budgétaires et une nouvelle hausse des prix de l’énergie produiraient les mêmes effets. Dans ce contexte, l’enjeu majeur auquel est confrontée la Banque du Japon est de parvenir à atteindre durablement son objectif d’inflation sans le dépasser de beaucoup, tout en préservant la stabilité financière. Si le cercle vertueux des salaires et de l’inflation s’enclenche plus lentement que ne le prévoit l’OCDE, la Banque du Japon attendra probablement plus longtemps avant de relever les taux d’intérêt.
1.3. Les risques pesant sur la stabilité financière devraient être étroitement surveillés
Le système financier semble rester résilient face aux vents contraires qui soufflent dans le monde. Les ratios de fonds propres sont largement supérieurs au minimum réglementaire, mais inférieurs à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.11). La proportion de prêts non performants, qui s’établit à 1.2 %, reste faible. La faillite de la Silicon Valley Bank a montré que les variations des taux d’intérêt du marché pouvaient mettre au jour les risques de duration inhérents aux modèles économiques des banques ; l’impact sur le système financier japonais a toutefois été limité, les cours des actions bancaires s’étant temporairement inscrits en baisse (BoJ, 2023b). Les risques croissants liés aux taux d’intérêt étrangers et les risques de crédit imposent aux autorités de faire preuve de vigilance et d’exercer une surveillance étroite. Il conviendrait de poursuivre la coordination entre la Banque du Japon et l’Agence des services financiers (ASF), qui a été renforcée par des tests de résistance menés conjointement, par le partage de données et par la création d’un Conseil commun de surveillance financière en juin 2021.
Les mesures d’aide financière liées au COVID-19 sont en train d’être démantelées progressivement. Les opérations de refinancement de la Banque du Japon au titre des prêts aidés par l’État et celles au titre des prêts non aidés par l’État ont pris fin en décembre 2022 et en mars 2023, respectivement. Toutefois, l’encours des garanties de prêts reste élevé, puisqu’il s’est établi à 41 000 milliards JPY (7.3 % du PIB) au cours de l’exercice budgétaire 2022 (Graphique 1.12, partie A). Alors que les prêts à taux zéro commencent à être remboursés, le manque de liquidités dont pâtissent certaines micro-entreprises crée des risques pour les banques exposées (BoJ, 2023b). Le nombre de faillites a enregistré une hausse de 35 % en glissement annuel au cours de la première moitié de l’exercice budgétaire 2023, notamment en raison d’un rebond parmi les PME dans les secteurs de la restauration et du commerce de détail, mais il reste proche du niveau observé avant la pandémie (BoJ, 2023c).
Bien qu’il se maintienne aux alentours de la moyenne de l’OCDE, le ratio de la dette des ménages à leur revenu disponible, qui s’établit à 121 %, a augmenté en raison de l’accroissement de la proportion de prêts immobiliers (partie B). Le taux de défaillance sur les prêts au logement reste faible, mais plusieurs facteurs nécessitent une surveillance étroite, notamment l’augmentation des prêts sans apport personnel, la hausse des ratios prêt/revenu et des prêts au logement assortis d’un ratio du service de la dette au revenu d’au moins 25 % (20 % des ménages) – qui s’explique en partie par le fait que les jeunes ménages souscrivent des prêts au logement plus importants –, ainsi que la forte proportion de prêts au logement à taux variable (76 % de l’ensemble des prêts au logement en mars 2023) (partie C ; BoJ, 2023b). L’Agence des services financiers examine les risques propres au secteur, tels que le crédit immobilier, tout en exerçant une surveillance microprudentielle, qui intègre un point de vue macroprudentiel. Les politiques macroprudentielles peuvent toutefois contribuer à réduire les facteurs de vulnérabilité liés à la hausse des prêts au logement, compte tenu du nombre croissant de ménages peu résilients face aux chocs affectant les revenus ou les taux d’intérêt. Il faudrait envisager d’inclure dans la panoplie d’instruments macroprudentiels des dispositifs relatifs aux emprunteurs, tels que le plafonnement du ratio prêt/valeur du bien (quotité de financement) ou du ratio prêt/revenu, afin de permettre leur déploiement rapide le cas échéant. En outre, l’exposition des banques vis-à-vis des sociétés immobilières nationales et étrangères s’est accrue, ce qui justifie une surveillance étroite (BoJ, 2023c).
Les risques liés aux taux d’intérêt étrangers, aux prêts octroyés à l’étranger et aux financements en devises devraient également faire l’objet d’une surveillance étroite. Les prêts octroyés à l’étranger par de grandes banques et les investissements obligataires étrangers réalisés par des banques et des investisseurs institutionnels ont accru les risques de taux d’intérêt liés aux actifs libellés en devises (partie D), même si ces risques ont diminué depuis le début de 2023 (BoJ, 2023c). Si les risques liés au crédit étranger restent globalement faibles, le montant et la concentration accrus des prêts octroyés à l’étranger à des emprunteurs fortement endettés sont source de nouvelles faiblesses pour les banques exposées (BoJ, 2023b). Toute modification apportée au cadre de la politique monétaire, en particulier une pentification de la courbe des rendements des obligations d’État japonaises ou une hausse du taux directeur à court terme de la Banque du Japon, aurait également des répercussions sur le système financier. Les avoirs des banques en obligations d’État japonaises (principalement en bons du Trésor) ont augmenté après la pandémie. Si une pentification de la courbe des rendements des obligations d’État japonaises peut contribuer à améliorer la rentabilité des banques à moyen terme, certains établissements financiers fortement exposés à ce type d’actifs pourraient subir des effets négatifs immédiats (IMF, 2023b). Les grandes banques remédient à ces fragilités potentielles en réduisant leur risque de duration, mais les petites banques pourraient rencontrer des difficultés.
La forte hausse des taux d’intérêt sur le marché des obligations d’État du Royaume-Uni et l’effondrement de la plateforme d’échange de cryptomonnaies FTX en 2022 ont mis en lumière de nouveaux risques, qui paraissent toutefois maîtrisés au Japon. Ainsi, les fonds de pension d’entreprise se sont abstenus de se lancer dans une quête excessive de rendements, même si les assureurs-vie se livrent de plus en plus à des opérations à effet de levier (Ito et al., 2023). Trois réformes juridiques du cadre réglementaire des crypto-actifs ont été menées depuis 2016 et ont permis de renforcer la surveillance : les plateformes d’échange de crypto-actifs, dont les jetons de valeur stable (« stablecoins ») (depuis de juin 2023), doivent désormais s’enregistrer auprès de l’Agence des services financiers et obtenir une autorisation d’exercice au Japon. Un cadre juridique entré en vigueur en juin 2023 vise en outre à réduire les risques de blanchiment de capitaux et à améliorer la coordination internationale en intégrant la « règle de voyage », en vertu de laquelle les plateformes d’échange de crypto-actifs doivent se transmettre des informations sur les transferts de ce type d’actifs (y compris pour les jetons de valeur stable). Toutes ces mesures sont bienvenues et la surveillance des risques connexes doit se poursuivre.
La rentabilité des banques régionales s’est accrue grâce aux mesures de soutien prises par la Banque du Japon face à la pandémie et à la « facilité de dépôt spéciale » créée en 2020 dans le but de renforcer les fondements économiques des banques. Le regroupement de succursales et la transformation numérique ont permis de réduire les dépenses, mais il reste possible de comprimer encore les coûts (Samikawa et al., 2021). Il convient de saluer la mise en place par l’Agence des services financiers du nouveau dispositif de subventions destiné à encourager les fusions. Les autorités devraient continuer d’aider les banques régionales à moderniser leurs modèles d’affaires, à mieux utiliser les technologies de l’information et les technologies financières, à rationaliser leurs coûts et à regrouper leurs succursales, dans un contexte marqué par des difficultés structurelles liées au déclin démographique. Par ailleurs, certaines banques régionales n’ont pas pleinement mesuré l’impact du remboursement du principal des prêts à taux d’intérêt zéro et intégralement garantis qui leur ont été consentis durant la pandémie (BoJ, 2023d). Il conviendrait en priorité d’améliorer l’efficacité de leur gestion des risques, notamment des évaluations de leur tolérance à l’égard des risques, scénarios défavorables y compris.
La Banque du Japon mène des expérimentations sur la monnaie numérique de banque centrale depuis avril 2021. Après l’achèvement d’une étude de faisabilité technique en mars 2023, un programme pilote a été lancé. L’objectif de ce programme sera notamment de paramétrer de manière intégrée les systèmes de réseaux centraux et intermédiaires et les dispositifs terminaux, et de mettre en place un Forum de la monnaie numérique de banque centrale destiné à ouvrir un dialogue avec les parties prenantes privées. Ces expérimentations visant à assurer au préalable la coexistence de la monnaie numérique de banque centrale avec d’autres formes d’argent sont essentielles pour répondre avec souplesse aux besoins futurs de facilité d’utilisation et d’accès universel. Il importera d’étudier attentivement les effets de la monnaie numérique de banque centrale sur la stabilité financière et la protection de la vie privée.
1.4. Il est primordial de relever les défis de politique budgétaire à court et à long terme
Les mesures destinées à protéger les ménages et les entreprises des conséquences de la pandémie et de la crise énergétique ont accentué les problèmes de viabilité des finances publiques à moyen terme. En 2022-23, le gouvernement a lancé trois trains de mesures économiques, représentant 64 700 milliards JPY (soit 11.5 % du PIB), englobant le financement d’investissements à moyen terme dans des domaines tels que la sécurité économique (semi-conducteurs et intelligence artificielle générative), les transformations écologique et numérique, ainsi que l’éducation, et de mesures de lutte contre la crise énergétique (Encadré 1.2), qui devraient se traduire par la persistance d’un déficit élevé, s’établissant à 5.2 % du PIB en 2023. Le train de mesures économiques de novembre 2023 comprend des incitations fiscales plus fortes axées sur les entreprises destinées à permettre des augmentations structurelles des salaires, des réformes de la réglementation et le financement d’activités de R-D pour créer de nouvelles frontières de croissance dans les domaines de l’espace et des océans. Les mesures prises pour atténuer l’impact du niveau élevé des prix, dans un contexte de recul des salaires réels, prennent notamment la forme de prestations en espèces destinées aux ménages à faible revenu (70 000 JPY supplémentaires par ménage) et de baisses temporaires de l’impôt sur le revenu et de la taxe de résidence (40 000 JPY par personne), qui représenteront un coût de 1 100 milliards JPY (0.2 % du PIB) et d’environ 4 000 milliards JPY, respectivement.
Encadré 1.2. Principales mesures prises par les pouvoirs publics face à l’augmentation des prix de l’énergie et des produits alimentaires
Plusieurs trains de mesures économiques ont été mis en œuvre pour modérer l’envolée des prix et aider les ménages et les entreprises vulnérables (pour un montant de 14 000 milliards JPY, soit 2.4 % du PIB) en 2022-23. Le subventionnement des prix de l’énergie qui a permis de plafonner les prix des produits pétroliers a débuté en janvier 2022 ; le coût de ce dispositif a été financé à hauteur de 80 milliards JPY grâce à la loi de finances rectificative adoptée au titre de l’exercice budgétaire 2021. Les mesures prises en septembre 2022 (3 500 milliards JPY) englobent la prolongation du subventionnement des produits pétroliers, le gel du prix de vente public du blé importé à son niveau d’avril, l’octroi d’une prestation en espèces spéciale ponctuelle aux ménages à faible revenu, et une dotation spéciale aux collectivités locales qui leur permettra de venir en aide aux ménages et aux entreprises vulnérables. Il est possible de cibler cette dernière mesure, mais ses critères d’application sont laissés à l’appréciation de chaque municipalité. Le deuxième train de mesures économiques et la loi de finances rectificative pour 2022 ont encore prolongé le subventionnement des produits pétroliers, jusqu’en septembre 2023, et mis en place de nouveaux dispositifs pour réduire les factures d’électricité et de gaz de ville de janvier à septembre 2023 (6 100 milliards JPY). En mars, le gouvernement a décidé d’utiliser 2 200 milliards JPY du fonds de réserve pour imprévus pour intensifier les mesures d’aide, et il a réduit, à compter du mois d’avril, la taxe de soutien aux énergies renouvelables sur l’électricité. La prolongation du programme de subventions destiné à réduire les prix de l’essence jusqu’à la fin de l’année a été annoncée en août 2023. Les mesures prises pour alléger les factures d’électricité et de gaz de ville ont aussi été prolongées, sachant que les taux des subventions ont été réduits de moitié en septembre. Le train de mesures économiques de novembre a prorogé les subventions actuelles destinées à amortir l’impact de la hausse des prix du fioul, de l’électricité et du gaz de ville jusqu’en avril 2024 (pour un coût supplémentaire de 800 milliards JPY), sachant que celles relatives à l’électricité et au gaz de ville continueront de s’appliquer avec des taux réduits à partir de mai 2024. Il incluait également de nouvelles dotations aux collectivités locales (à hauteur de 1 600 milliards JPY) destinées à financer différentes mesures, notamment les prestations en espèces ponctuelles versées aux ménages à faible revenu. Le train de réformes de plus large portée adopté pour faire face à la crise énergétique et aux problèmes de sécurité énergétique comporte également des projets destinés à accélérer le recours à l’énergie nucléaire (voir ci-après).
Les principales mesures de soutien ont été massives et pour l’essentiel non ciblées. La prolongation du plafonnement des prix de l’énergie exacerbe les problèmes de viabilité des finances publiques et peut, en faussant les signaux du marché, réduire les incitations à passer aux énergies renouvelables et à faire baisser la demande d’énergie. Certains pays de l’OCDE ont déjà mis fin aux baisses non ciblées de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliquées à l’énergie (notamment les Pays-Bas) et les mesures encore en vigueur devraient expirer à l’automne ou à l’hiver 2023 (Hemmerlé et al., 2023). La reprise se poursuivant, la normalisation de l’action publique devrait commencer et se concrétiser par la suppression progressive des mesures subsistantes. Toute aide publique supplémentaire aux revenus devrait, si de nouveaux chocs affectant les prix de l’énergie le justifiaient, viser uniquement les plus vulnérables, qui ne sont pas suffisamment couverts par le système général de protection sociale.
La persistance et l’ampleur des déficits budgétaires peuvent saper la confiance dans la capacité du Japon d’assurer le service de sa dette, qui suscite des préoccupations depuis un certain temps déjà (Hoshi and Ito, 2014). Le Japon n’a pas de stratégie crédible d’assainissement de ses finances publiques à moyen terme lui permettant d’inscrire sa dette publique sur une trajectoire descendante et de constituer des marges de manœuvre budgétaires pour améliorer sa résilience face aux chocs, en agissant à la fois sur ses recettes et ses dépenses (Graphique 1.13, partie A). Il faudrait réorienter vers le renforcement de l’offre les dépenses actuellement axées sur la stimulation de la demande, en s’appuyant sur des examens de dépenses (voir ci-après), tout en réformant le système d’imposition de manière que la structure fiscale ait un impact négatif aussi limité que possible sur la croissance et l’équité, et qu’il ne compromette pas la réalisation d’autres objectifs des pouvoirs publics. Les charges d’intérêts nettes sur l’encours de la dette sont faibles, puisqu’elles ne représentent que 0.47 % du PIB, mais il conviendrait de prendre en compte, dans les scénarios d’assainissement des finances publiques, l’alourdissement du service de la dette qui pourrait se produire si les taux d’intérêt venaient à augmenter. Les projets d’accroissement des dépenses de défense (43 000 milliards JPY sur les cinq prochaines années) et l’enveloppe budgétaire consacrée aux enfants et aux familles (3 500 milliards JPY par an au cours des trois prochaines années ; chapitre 2) accentueront peut-être encore ces tendances, sachant que les décisions relatives aux mesures concrètes devant être adoptées en matière de recettes pour compenser ces augmentations de dépenses n’ont pas encore été prises.
Le fait de retenir des hypothèses en phase avec les tendances antérieures peut améliorer la crédibilité de la politique budgétaire. La réaction des pouvoirs publics à la double crise a dégradé la situation budgétaire, mais l’engagement qui a été pris de parvenir à un excédent primaire d’ici à l’exercice budgétaire 2025 reste inchangé. Le gouvernement élabore différents scénarios pour ses projections budgétaires à moyen terme (scénario de référence, scénario de croissance forte et scénario tendanciel), ce dont il y a lieu de se féliciter (partie B ; Cabinet Office, 2023a). Dans le scénario de croissance forte et le scénario tendanciel, qui reposent sur l’hypothèse que la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF) se hisse à 1.4 % et à 1.1 %, respectivement, au cours des cinq prochaines années, le gouvernement obtient un solde primaire excédentaire au titre de l’exercice budgétaire 2025, en mettant en œuvre des réformes relatives aux dépenses, mais ces scénarios pourraient s’avérer difficiles à concrétiser. Le déficit primaire demeure inférieur à celui prévu dans le scénario de référence, selon lequel la croissance de l’économie est proche de son niveau potentiel, tandis que celle de la PTF s’établit à 0.5 %, c’est-à-dire aux alentours de sa croissance moyenne entre 2012 et 2020. Il faut donc établir une feuille de route claire et crédible pour parvenir à un excédent primaire même si le taux de croissance est plus bas, fondée sur des mesures spécifiques et permettant de ramener le ratio de la dette publique sur une trajectoire descendante.
1.4.1. Évaluer la viabilité de la dette
Les pouvoirs publics prévoient, en raison du vieillissement, une hausse des dépenses de sécurité sociale qui, de 21.5 % du PIB en 2018, devraient atteindre environ 24 % du PIB en 2040. Faute d’actions correctrices, la viabilité des dépenses publiques à long terme s’en trouvera fortement détériorée. En se référant au cadre décrit dans l’Étude économique de 2021, l’analyse actualisée de la viabilité de la dette produite par l’OCDE tient compte des projections du Bureau du Cabinet qui couvrent la période allant jusqu’à l’exercice budgétaire 2032, des projections de population les plus récentes (IPSS, 2023 ; Bureau du Cabinet, 2023a) et des dépenses supplémentaires destinées à financer la poursuite de la transformation verte. Dans le scénario de référence, dans lequel les paramètres de la politique budgétaire sont constants, avec une croissance annuelle du PIB réel d’environ 0.5 %, le déficit primaire de l’administration centrale et des collectivités locales se creusera nettement après 2030 en raison de l’intensification des tensions sur les dépenses due à l’augmentation des dépenses de sécurité sociale induite par le vieillissement et d’un déclin rapide de la population active, et l’encours de la dette rapporté au PIB progressera à un rythme soutenu pour atteindre approximativement 310 % en 2060 (Graphique 1.14).
Dans le scénario prévoyant une réforme budgétaire, dans lequel les taxes sur la consommation et les taxes carbone sont progressivement relevées après 2025, et la moitié des recettes qu’elles génèrent recyclées pour en atténuer l’impact économique, la situation budgétaire s’améliore pendant un temps, avant que les tensions sous-jacentes sur les dépenses n’entraînent une hausse des niveaux d’endettement. Il en va de même, certes avec un certain retard, dans le scénario qui prévoit des réformes visant à accroître la productivité, dans lequel la croissance annuelle potentielle progresse, pour ressortir à environ 1 %, et l’amélioration de l’efficacité des dépenses publiques permet de réduire les dépenses de 10 % par rapport au scénario de référence. Pour que la politique budgétaire soit tenable, les réformes budgétaires doivent être associées à des réformes structurelles afin de promouvoir la croissance de la productivité. Les projections reposent sur diverses hypothèses simplificatrices, concernant notamment les taux d’intérêt, et elles sont sensibles aux dynamiques à l’œuvre au niveau de la population et de la main-d’œuvre (Encadré 1.3). Les conséquences possibles de certaines des mesures budgétaires proposées sont décrites dans l’Encadré 1.4.
Encadré 1.3. Analyses de sensibilité des projections à long terme
Les hypothèses retenues concernant le taux d’intérêt sont déterminantes pour les projections budgétaires, compte tenu des taux élevés d’endettement. La différence entre le taux d’intérêt à long terme et le taux de croissance du PIB nominal vers le milieu de 2030 est d’environ 0.2 à 0.3 point de pourcentage, ce qui est faible au regard du niveau moyen sur longue période. L’incertitude à propos des taux d’intérêt a grandi. D’autres simulations reposant sur l’hypothèse d’un écart taux d’intérêt-taux de croissance plus grand ou plus faible d’un point de pourcentage montrent que dans le scénario de référence, le ratio dette/PIB serait, en 2060, supérieur d’environ 70 points de pourcentage à ce qu’il serait dans le scénario bâti sur des taux d’intérêt plus élevés (Tableau 1.3).
Tableau 1.3. Toute hausse des taux d’intérêt est porteuse de risques pour la viabilité à long terme des finances publiques
Encours de la dette brute en pourcentage du PIB en 2060
Hypothèse de prime retenue dans le graphique 1.14 |
Prime plus faible -1.0 point de pourcentage |
Prime plus élevée +1.0 point de pourcentage |
|
---|---|---|---|
Scénario de référence |
310.7 |
256.7 |
378.0 |
Scénario de réformes combinées |
112.6 |
83.6 |
149.8 |
Note : Les variations supposées des taux d’intérêt retenues sont intégrées progressivement dans les scénarios après 2030, sur une période de cinq ans.
Source : Calculs de l’OCDE.
Une seconde série d’analyses de sensibilité concerne les projections de population, avec un taux de fécondité supérieur ou inférieur de 0.5 au taux actuel de 1.3. Si le taux de fécondité est supérieur (inférieur), la population totale en 2060 augmentera (baissera) d’environ 9 % par rapport au scénario de référence, ce qui aura des conséquences sur la croissance du PIB et les tensions sur les coûts. Les réformes visant à inverser le déclin tendanciel des taux de fécondité, examinées en profondeur au chapitre 2, peuvent améliorer la viabilité de la dette (Graphique 1.15).
Encadré 1.4. Illustration des effets sur le budget des mesures de réforme proposées
Les effets sur le budget de quelques-unes des réformes proposées dans cette Étude, dans la mesure où ils peuvent être chiffrés, sont présentés, à titre indicatif, dans le Tableau 1.4.
Tableau 1.4. Illustration des effets de certaines des mesures de réforme proposées sur le solde budgétaire
En % du PIB
2030 |
2040 |
2050 |
|
---|---|---|---|
Taxe sur la consommation (taxe sur la valeur ajoutée) relevée d’un point de pourcentage par an à partir de 2025 jusqu’à atteindre 20 %, la moitié des recettes correspondantes étant utilisées pour aider les ménages vulnérables |
+1.5 |
+2.6 |
+2.6 |
Relèvement linéaire de la taxe sur le carbone portée à 4 000 JPY par tonne de CO2 entre 2025 et 2034, la moitié des recettes correspondantes étant utilisées pour aider les ménages vulnérables |
+0.2 |
+0.1 |
0.0 |
Réforme de la sécurité sociale et autres dépenses liées à la transformation numérique (amélioration de l’efficacité de 10 % sur 30 ans à compter de 2025) |
+0.5 |
+1.6 |
+2.8 |
Relèvement de l’âge d’ouverture des droits à pension à partir de 2031, porté de 65 à 70 ans sur une période de 15 ans, assorti d’une augmentation des prestations de 4.2 % par an pour chaque année de report du départ en retraite |
0.0 |
+0.4 |
+0.3 |
Note : Les effets indiqués s’appliquent au solde budgétaire de l’administration centrale et des collectivités locales.
Source : Ministère des Affaires intérieures et des Communications ; ministère de la Santé, du Travail et de la Protection sociale ; Bureau du Cabinet ; et calculs de l’OCDE.
1.4.2. Améliorer le cadre budgétaire
Un recours excessif aux collectifs budgétaires et aux fonds de réserve pour imprévus amoindrit la fiabilité et la transparence des projections et des objectifs budgétaires. On dénombre 18 collectifs budgétaires depuis 2012, et sept depuis la pandémie, et les réserves pour imprévus ont été multipliées par dix par rapport à leur niveau moyen d’avant la pandémie (Graphique 1.16). S’il permet certes d’apporter une réponse immédiate et efficace aux crises, le recours massif et fréquent aux collectifs budgétaires rend caduc le caractère contraignant du plafonnement des dépenses et est préjudiciable à la cohérence des budgets annuels ainsi qu’à la viabilité des finances publiques à moyen terme. Si l’on excepte la riposte récente aux grandes crises, les collectifs budgétaires portent généralement, dans les pays de l’OCDE, sur de faibles montants et sont en principe utilisés pour procéder à des ajustements techniques plutôt que pour financer des mesures nouvelles. De plus, les révisions à la hausse de certaines enveloppes budgétaires peuvent être compensées par une réduction équivalente des dotations attribuées à d’autres organismes ou par l’utilisation anticipée de dotations allouées au titre de l’exercice suivant (OECD, 2023a).
Ces derniers temps, il est arrivé au Japon que certains des crédits budgétaires votés et restés inutilisés soient reportés et affectés à d’autres finalités que celles initialement prévues. Ainsi, une partie des crédits budgétaires votés et non dépensés, notamment des réserves pour imprévus, servira à financer en partie l’augmentation des dépenses de défense. Il conviendrait toutefois de réserver l’emploi des collectifs budgétaires et des fonds de réserve pour imprévus aux grandes crises macroéconomiques, dont une définition plus concrète devrait être donnée pour préciser les circonstances dans lesquelles il est possible de se tourner vers ces solutions. Le gouvernement pourrait par exemple être tenu de déclarer officiellement se trouver face à une situation de crise ou d’urgence pour pouvoir recourir aux collectifs budgétaires au-delà d’un certain seuil. Par ailleurs, l’utilisation des fonds devrait être plus ciblée, orientée par exemple vers l’aide aux groupes vulnérables en cas de crise, et devrait donner lieu à des évaluations a posteriori afin de consolider le cadre budgétaire et d’améliorer l’efficacité du soutien macroéconomique. Afin de veiller à ce que les dépenses budgétaires hors cycle soient effectivement affectées aux ripostes en cas de crise, on pourrait faire évaluer en temps réel par un organisme extérieur, une institution budgétaire indépendante par exemple, si les dépenses hors budget se justifient pour faire face en urgence à une situation de crise.
La création d’une institution budgétaire indépendante peut faciliter la réalisation des objectifs budgétaires et l’évaluation des projections budgétaires. Il existe des organismes de ce type dans la plupart des pays de l’OCDE où l’on observe que leur présence va de pair avec un meilleur respect des règles budgétaires, des prévisions plus précises et une politique budgétaire moins procyclique (Rawdanowicz et al., 2021). Leurs missions recouvrent le plus souvent le contrôle du respect des règles budgétaires, l’évaluation de la viabilité des finances publiques à long terme, l’analyse des budgets et des plans budgétaires à moyen terme et l’approbation ou la production de prévisions économiques et budgétaires (Encadré 1.5). Au Japon, le Conseil de politique économique et budgétaire produit depuis 2001 des analyses et des évaluations des prévisions et des objectifs budgétaires à long terme. Présidé par le Premier ministre, le Conseil compte cinq ministres, le gouverneur de la Banque du Japon et deux experts issus du monde universitaire. Plus récemment, la nomination de huit nouveaux experts siégeant au comité consultatif auprès du Conseil de politique économique et budgétaire, ainsi que l’enrichissement des projections budgétaires – dans le prolongement des discussions du Conseil – au moyen de scénarios complémentaires et d’une évaluation élargie des risques fondée sur des analyses de sensibilité et de graphiques en éventail, ont constitué des avancées dans la bonne direction. Néanmoins, la mise en place d’une institution budgétaire indépendante renforcerait encore le cadre budgétaire du Japon. Sa principale mission devrait consister à évaluer les projets et les prévisions macroéconomiques et budgétaires du gouvernement, et elle pourrait également être chargée de fournir en temps voulu une évaluation ex ante transparente de certaines mesures (notamment des scénarios de réforme des retraites et de la fiscalité, ainsi que du ciblage des mesures d’aide temporaires), comme c’est le cas dans d’autres pays de l’OCDE. Ainsi, les institutions budgétaires indépendantes espagnoles et belges estiment régulièrement les coûts liés au vieillissement démographique et simulent les effets budgétaires de différentes propositions de réforme des retraites, ce qui améliore la transparence de ces coûts. Le Conseil consultatif budgétaire irlandais (IFAC, Irish Fiscal Advisory Council) a réalisé un examen indépendant de programmes de dépenses d’urgence adoptés récemment (à savoir les trains de mesures liés à la pandémie et au coût de la vie), notamment en quantifiant la part des mesures ciblées (OECD, 2020a ; IFAC, 2022). En Suède, la surveillance indépendante exercée par le Conseil de politique budgétaire, conjuguée aux objectifs de politique budgétaire, à un processus budgétaire rigoureux de l’administration centrale et à des règles destinées à assurer la transparence et la clarté, constitue un élément important du cadre budgétaire.
Des examens de dépenses peuvent contribuer à la viabilité des finances publiques grâce à une analyse systématique des dépenses actuelles, destinée à les hiérarchiser et redéployer les crédits budgétaires. Le Japon réalise des examens annuels des dépenses, qui sont ensuite liés au processus budgétaire annuel, mais ils ne sont pas utilisés pour établir des programmes pluriannuels. En outre, le Japon applique une méthode d’élaboration des politiques fondée sur des données probantes (EPFDP), qui sert notamment à évaluer l’efficacité des politiques publiques et des projets ex post. L’utilisation de ces deux instruments dans le contexte des budgets et des programmes pluriannuels pourrait être encore renforcée. Ainsi, au Danemark, les examens de dépenses étayent les décisions concernant les accords budgétaires pluriannuels pour améliorer leurs liens avec le cadre budgétaire à moyen terme (Tryggvadottir, 2022). Il est également possible d’améliorer les ressources utilisées, en termes de capacités (experts compétents) et de temps passé, ainsi que la disponibilité des données sur les résultats pour réaliser les examens de dépenses et appliquer la méthode d’EPFDP de manière efficace (OECD, 2020b ; RIETI, 2022). Ainsi, la Lettonie a mis sur pied une unité spécialisée dans les examens de dépenses, afin de renforcer les capacités qui leur sont consacrées ainsi que leur utilisation. Le recours accru aux technologies numériques pour lier des bases de données connexes et partager des données entre différents niveaux d’administration et organismes peut faciliter la mise en évidence des gains d’efficience des dépenses pouvant être réalisés dans des domaines tels que la santé et les soins de longue durée (voir ci-après).
Encadré 1.5. Institutions budgétaires indépendantes : l’expérience internationale
Selon les Principes de l’OCDE relatifs aux institutions budgétaires indépendantes (IBI), le mandat des dirigeants d’une IBI devrait dans l’idéal être indépendant du cycle électoral ; une IBI ne devrait exercer aucune responsabilité quant à l’élaboration de politiques normatives ; et ses dirigeants devraient être choisis uniquement en fonction de leur mérite et de leur compétence technique (OECD, 2014). En ce qui concerne les IBI, les expériences des pays de l’OCDE illustrent une certaine diversité. Ainsi, au Royaume-Uni, la création d’une IBI a été motivée par la forte augmentation de la dette publique et par la crainte que les prévisions budgétaires ne soient excessivement optimistes (Chote and Wren-Lewis, 2013).
L’Irlande offre une bonne illustration de la manière dont les IBI peuvent sensibiliser l’opinion publique aux problèmes budgétaires à long terme et renforcer la gestion budgétaire (OECD, 2017). Créé en 2012, le Conseil consultatif budgétaire irlandais (IFAC, Irish Fiscal Advisory Council) a pour mission d’évaluer en toute indépendance l’orientation de la politique budgétaire du gouvernement et les prévisions budgétaires, d’approuver les prévisions macroéconomiques officielles établies par le ministère des Finances et de suivre l’observation des règles budgétaires. Le Conseil compte cinq membres, dont le Président, nommés par le ministre des Finances parmi des spécialistes nationaux et internationaux des questions macroéconomiques et budgétaires pour un mandat de quatre ans, renouvelable trois fois consécutivement. Il dispose d’un budget annuel d’environ 0.8 million EUR et s’appuie sur un secrétariat employant six personnes à temps plein. Au fil des ans, l’IFAC est devenu un maillon essentiel pour le débat national sur les finances publiques, en particulier parce qu’il attire l’attention sur la nécessité de garantir la viabilité des finances publiques face à des défis systémiques, tels que le vieillissement de la population, le changement climatique et la transition numérique. Les rapports et les recommandations de l’IFAC ont progressivement fait leur chemin au sein de la sphère politique. Les autorités ont adopté une règle de dépenses en 2021 et elles ont amélioré la transparence grâce à l’adoption de cadres budgétaires à moyen et long terme renforcés.
1.4.3. Assumer les coûts liés au vieillissement
Le vieillissement de la population accentuera les tensions budgétaires, sachant que l’augmentation des dépenses de santé, de soins de longue durée et de retraite entre les exercices 2025 et 2040 devrait être de 17 000 milliards JPY environ (2.7 % du PIB prévu pour 2025) d’après des projections nationales (Graphique 1.17, partie A). Les réformes engagées récemment pour endiguer les dépenses recouvrent une hausse de la participation financière des patients à la prise en charge des frais médicaux et une révision des prix des médicaments. Les autorités sont en train de préparer une feuille de route pour réformer la sécurité sociale, qui devrait prévoir un ajustement des cotisations d’assurance maladie et d’assurance dépendance des personnes âgées, un renforcement de la productivité et de l’efficience du système de santé, notamment via la transformation numérique des services de santé, une réforme du système d’assurance sociale visant à réduire les écarts entre les différentes catégories de travailleurs, et un allongement de l’espérance de vie en bonne santé (Committee on Social Security System Oriented to All Generations, 2023). Depuis 2022, les montants des pensions sont réévalués une fois par an même lorsqu’un bénéficiaire travaille encore, afin de tenir compte, dans les prestations de retraite, des cotisations versées après l’âge de 65 ans et avant l’âge de la cessation d’activité ou l’âge de 70 ans, et le seuil de revenu au-delà duquel les pensions liées à la rémunération antérieure sont réduites pour les personnes âgées de 60 à 64 a été relevé. Selon les résultats de la prochaine vérification de la viabilité financière du système de retraite (conduite tous les cinq ans) prévue en 2024, les autorités pourraient envisager de poursuivre la réforme des retraites.
Garantir la viabilité du système de retraite
Les réformes des pensions doivent permettre de concilier au mieux les impératifs d’adéquation et de viabilité. La forte croissance de l’emploi, notamment l’allongement de la durée des carrières, a partiellement contrebalancé les effets de la démographie sur les dépenses de retraite. Cependant, le futur taux de remplacement net de 39 % pour une carrière complète au salaire moyen est nettement inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE, qui s’établit à 62 % (partie B), et pourrait faire augmenter le taux de pauvreté relative des personnes âgées, alors que celui-ci s’établit déjà à 20 %, c’est-à-dire au-dessus de la moyenne des pays de l’OCDE, qui est de 13 %. Le fait que la retraite de base (le régime national de retraite) n’assure pas la sécurité des revenus à certaines personnes âgées met également sous tension le système public d’aide financé par l’impôt. L’aide sociale avait vocation à procurer une aide d’urgence aux personnes dans l’incapacité de conserver un niveau de revenu minimum, mais elle a commencé à faire office de retraite complémentaire. Environ la moitié des bénéficiaires sont âgés d’au moins 65 ans (2.8 % des personnes âgées) contre 36 % en 2000 (partie C), ce qui peut induire un effet d’éviction sur les ménages à bas revenu d’âge actif (Oshio, 2018).
Le Japon et la Corée sont les seuls pays de l’OCDE dans lesquels l’âge de la retraite obligatoire s’applique aux travailleurs du secteur privé à partir de l’âge de 60 ans, alors que dans neuf autres pays, il ne s’applique qu’à partir de 65 ans ou au-delà (OECD, 2021b). À l’avenir, l’âge de départ à la retraite (notamment pour ceux qui accèdent au marché du travail à l’âge de 22 ans en 2020) devrait être relevé dans un certain nombre de pays de l’OCDE, repoussé par exemple à 67 ans en Norvège et 68 ans en Finlande, mais aucun changement n’est prévu au Japon. La réforme qui aurait le plus d’impact consisterait à repousser l’âge d’ouverture des droits à pension au-delà de 65 ans, compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie, et à supprimer l’âge obligatoire de départ à la retraite, qui était fixé à 60 ans par 72.3 % des entreprises en 2022, même si un grand nombre d’entre elles disposent de mécanismes de prolongation et/ou de réembauche (chapitre 2). On pourrait ainsi renforcer les incitations au travail, réduire la pauvreté au sein de la population âgée, améliorer l’équité entre les générations et consolider la viabilité du système de retraite. Par ailleurs, il serait souhaitable d’accélérer le relèvement de l’âge d’ouverture des droits à pension des femmes dans le cadre du régime d’assurance-vieillesse des salariés, qui doit atteindre 65 ans en 2030 (Chapitre 2). Une autre solution pourrait consister à allonger, et à porter de 40 à 45 ans, la période de cotisation pour l’ouverture des droits à une pension de base à taux plein.
L’indexation macroéconomique, mise en place en 2004, en vertu de laquelle on applique une correction à l’indexation sur les prix des pensions de base versées au titre du régime obligatoire comme des pensions liées à la rémunération antérieure et, pour les pensions nouvelles, à la revalorisation des salaires antérieurs, aidera à surmonter les tensions sur les dépenses. L’application de cette correction est toutefois différée en période de croissance négative des prix ou des salaires. Un mécanisme de report, instauré en 2016, permet en principe de compenser cet ajustement différé au cours des années suivantes, mais ce mécanisme de compensation sera suspendu si le taux de remplacement tombe en deçà d’un certain seuil (50 % suivant la méthode japonaise de calcul de ce taux). Le fait que les prestations liées aux rémunérations antérieures n’aient pas été réévaluées conformément aux plans d’indexation a abouti au versement de prestations excessives dans le passé. Pour garantir la viabilité à long terme du système de retraite, il conviendrait d’appliquer pleinement l’indexation, même en cas de déflation.
Les réformes visant à étendre la couverture des salariés aux travailleurs non réguliers devraient être poursuivies. Les travailleurs indépendants sont couverts par le régime de pension de base, mais ils ne sont pas obligatoirement couverts par les régimes liés à la rémunération. Le seuil de taille de l’entreprise applicable pour la couverture obligatoire des travailleurs à temps partiel a été ramené de 500 à 100 salariés à temps plein en 2022 et sera fixé à 50 en 2024, mais au Japon, environ 30 % des salariés à temps partiel travaillent dans des entreprises comptant moins de 50 salariés à plein temps. Dans la mesure où environ un tiers des femmes travaillent à temps partiel, ces réformes peuvent aussi contribuer à combler les écarts de pension entre hommes et femmes sachant que la différence de revenu à la retraite entre les uns et les autres, qui est de 47 %, est nettement plus élevée que la moyenne des pays de l’OCDE, à savoir 26 % (OECD, 2021b). Lever les obstacles à la création d’emplois réguliers et à temps plein, notamment en réduisant le niveau de protection pour les travailleurs réguliers et en poursuivant les réformes des modes de travail, comme préconisé dans les Études économiques précédentes, serait également judicieux (chapitre 2).
Contenir les dépenses de soins de santé et de longue durée
Le niveau élevé de plusieurs indicateurs, comme le nombre de lits d’hôpital, la durée de séjour à l’hôpital et le nombre de consultations médicales, laisse entrevoir la possibilité de réaliser des gains d’efficience en matière de dépenses de santé et de soins de longue durée (Tableau 1.5). La part des dépenses publiques de santé dans le total des dépenses est relativement importante, le montant du reste à charge des patients est faible, en particulier pour certains segments de la population, et les médecins sont principalement rémunérés à l’acte. Il est capital d’améliorer l’efficience des dépenses, car le vieillissement de la population va intensifier les tensions et accroître les coûts. La prévalence de la démence au Japon par exemple, qui était la plus élevée des pays de l’OCDE en 2021, soit 26.7 pour 1 000 habitants (contre une moyenne de 15.7 pour les pays de l’OCDE), devrait grimper à 44.7 d’ici à 2050 (OECD, 2021 c). En dehors des coûts budgétaires de la démence, les coûts de productivité pour les aidants familiaux et non professionnels sont également élevés (Ikeda et al., 2021).
Le reste à charge en pourcentage des dépenses courantes de santé, soit 15.1 %, est inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE, qui est de 24.1 %. Le niveau du reste à charge dépend avant tout de l’âge plutôt que du revenu, le niveau de participation au coût des soins étant réduit pour les personnes âgées de 70 ans ou plus (Graphique 1.18, partie A). Le fardeau pesant sur la population en âge de travailler va s’alourdir avec le vieillissement de la population. Le relèvement du taux de participation au coût des soins de 10 % à 20 % pour les personnes âgées de 75 ans et plus dont le revenu excède un certain seuil, appliqué depuis octobre 2022 (à comparer au taux normal de 30 %), mérite donc d’être salué. Compte tenu de la richesse des personnes âgées en moyenne, on pourrait envisager de poursuivre le relèvement de la participation au coût des soins ou d’abaisser le seuil de revenu. L’application du taux réduit de participation aux frais devrait être soumise à conditions de ressources pour tous les adultes et réservée aux ménages à faible revenu.
Le Japon applique principalement une rémunération à l’acte tant pour les soins primaires que pour les consultations externes de spécialistes, ce que font la moitié des pays de l’OCDE. Ce mode de rémunération peut induire une croissance excessive des dépenses en raison des incitations qu’il crée à la surconsommation de soins, s’il n’est pas associé à des mécanismes de budgétisation rigoureux (Lindner et Lorenzoni, 2023). Comme recommandé dans l’Étude économique de 2019, intensifier progressivement le recours à un système de rémunération aux résultats, dans lequel les prestataires reçoivent des incitations financières à se conformer à des normes de performance, pourrait contribuer à réduire le nombre de consultations de médecins et à améliorer l’efficience des dépenses au Japon. Dans ce contexte, certains pays de l’OCDE expérimentent de nouveaux modèles de rémunération (fondés sur la valeur plutôt que sur le volume), plus en phase avec les objectifs d’amélioration de la qualité des soins, de renforcement de la coordination et de l’intégration des prestations des soins toutes structures et tous services confondus, de la maîtrise des dépenses de santé et de la rétribution de la promotion de la santé et de la prévention des maladies, qui mériteraient également l’attention.
Tableau 1.5. Comparaison internationale de quelques structures de soins de santé et de longue durée
Nombre de consultations de médecins par habitant et par an |
Part des dépenses privées consacrées à la prise en charge ambulatoire des patients (%) |
Reste à charge pour les ménages (%) |
Durée totale moyenne du séjour en hôpital pour les soins nécessitant une hospitalisation1 |
Nombre total de lits hospitaliers2 |
Nombre de lits de soins aigus2,3 |
Nombre de lits de soins de longue durée2,3 |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|
Japon |
11.1 |
15.9 |
14.9 |
27.5 |
43.7 |
26.8 |
8.0 |
Moyenne OCDE |
5.6 |
27.6 |
22.1 |
8.3 |
23.6 |
16.8 |
3.1 |
Pays affichant le chiffre le plus élevé |
14.7 |
52.3 |
48.5 |
27.5 |
77.1 |
36.6 |
32.2 |
Pays affichant le chiffre le plus bas |
1.4 |
10.5 |
7.0 |
4.4 |
9.9 |
7.2 |
0.0 |
Note : 1. En jours 2. Par millier d’habitants âgés de 65 ans ou plus. 3. Dans les hôpitaux.
Source : OCDE, Statistiques de l’OCDE sur la santé (base de données).
Les patients peuvent accéder à des structures de soins de santé secondaires et tertiaires directement, sans passer par un médecin de premier recours (Kato, et al., 2019), même si le reste à charge a été revu à la hausse en 2016 pour les patients qui se rendent dans des établissements hospitaliers de soins tertiaires sans avoir été préalablement orientés vers ces structures. Ce reste à charge en cas d’accès direct à un établissement hospitalier a été augmenté en 2022, ce dont il y a lieu de se féliciter. Subordonner l’accès aux soins secondaires à l’orientation préalable des patients par un médecin de premier recours peut également permettre d’abaisser encore les coûts. Une bonne intégration des dossiers médicaux offre également la possibilité d’améliorer l’efficience des soins primaires et la connexion entre les soins primaires avec et sans hospitalisation, mais un renforcement de l’infrastructure et de la gestion des données est nécessaire. La proportion des cabinets de médecins de premier recours utilisant des dossiers médicaux électroniques s’est hissée de 15 % en 2012 à 42 % en 2021, mais elle demeure très inférieure à la moyenne de l’OCDE, qui était de 93 % (OECD, 2021 c). Il est également primordial de développer l’utilisation des technologies numériques pour relier des bases de données connexes, comme cela avait été préconisé dans l’Étude économique de 2021. L’analyse systématique de ces données peut être source de gains d’efficience des dépenses et d’amélioration de la qualité des soins. L’Irlande, par exemple, prévoit de mettre en place un organisme central indépendant chargé de recueillir les fruits de l’intégration des données. Au Japon, la ville de Fukuoka centralise et analyse les données nécessaires pour améliorer l’efficacité de ses politiques de soins de longue durée (Encadré 1.6).
Encadré 1.6. La ville de Fukuoka cherche à créer un modèle social sain
Fukuoka est une ville dynamique, qui offre des conditions favorables aux entreprises et où on peut vivre et exercer une activité économique pour un coût raisonnable. Labellisée zone spéciale d’intérêt stratégique national pour les startups mondiales et la création d’emplois en 2014, elle s’est dotée d’une plateforme de soutien aux startups qui offre des services de soutien intégrés, un programme « Visa pour les startups » et des réductions spéciales de l’impôt sur les sociétés pour les startups. Elle a aussi réussi à sursoir à la transition démographique grâce à la relative jeunesse de sa population. Néanmoins, elle se prépare à un avenir qui sera marqué par les effets du vieillissement démographique (l’« ère des centenaires ») et a lancé pour ce faire le projet Fukuoka 100, qui a débuté en juillet 2017 et recouvre un grand nombre d’initiatives. Premièrement, les informations relatives à la naissance, à la santé, aux soins liés à la dépendance et au décès de quelque 1.64 million d’habitants de la ville de Fukuoka ont été centralisées et analysées afin de déterminer les principales raisons justifiant la nécessité de soins de longue durée. Cette analyse est ensuite mise à profit pour créer des mécanismes et des dispositifs qui incitent les gens à vouloir être actifs en fréquentant les routes et les parcs et pour concevoir des mesures préventives, visant par exemple à préserver la santé buccale tout au long de la vie. Deuxièmement, afin de faire de Fukuoka une ville accueillante pour les personnes frappées de démence, une ville dans laquelle elles puissent vivre au sein d’une communauté à laquelle elles sont accoutumées dans un environnement qui leur est familier, la municipalité organise des conférences sur les techniques de prise en charge de la démence à l’intention de différents groupes de population, notamment des résidents locaux, des élèves de l’enseignement primaire et du premier cycle de l’enseignement secondaire et du personnel paramédical.
Source : municipalité de Fukuoka (2017), Fukuoka 100.
Le fait de dispenser les soins de longue durée en dehors des hôpitaux peut générer des économies et améliorer le bien-être des patients et être complémentaire de la priorité donnée actuellement à une prise en charge globale de proximité. Le nombre de lits pour soins de longue durée dans les établissements hospitaliers est 2.5 fois supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE (Tableau 1.5), et de nombreux lits de soins aigus dans les hôpitaux sont utilisés pour des prises en charge de longue durée (Jones, 2022). Les importantes capacités hospitalières expliquent en partie que les soins de longue durée soient dispensés en milieu hospitalier, les « hospitalisations sociales » contribuant à la longueur des séjours moyens en hôpital. Or, l’utilisation des hôpitaux pour des soins de longue durée est inefficiente, car elle a un coût plus de deux fois supérieur à celui des lits dans les établissements de soins de longue durée et ce, en raison de la réglementation relative au personnel et aux équipements médicaux applicable aux hôpitaux (Jones, 2022). En outre, le coût d’une prise en charge de longue durée à domicile pour des personnes de plus de 65 ans ayant des besoins légers à modérés en matière de soins est généralement sensiblement inférieur, en proportion de leur revenu disponible, à celui des soins de longue durée dispensés en établissement (Graphique 1.18, partie B). C’est pourquoi il serait efficace, en termes de coût, de décharger les hôpitaux des soins de longue durée, de donner la priorité aux soins à domicile, y compris en faisant appel à des soignants professionnels, et d’orienter vers des établissements spécialisés les personnes qui ont des besoins importants en matière de soins. Il importera de veiller à ce que le passage à des prises en charge à domicile n’ait pas de conséquences imprévues, notamment l’abandon de la vie active par de femmes pour s’occuper de parents âgés. Il est essentiel de garantir une offre suffisante d’aidants professionnels ou de personnel infirmier rémunérés, en faisant éventuellement appel à des soignants étrangers, et de mieux faire connaître la loi de 2017 sur le congé parental et familial, laquelle accorde, aux salariés et aux entreprises, la flexibilité nécessaire pour permettre aux travailleurs d’assurer une partie des soins de longue durée sans pour autant devoir interrompre leur vie active (chapitre 2).
1.4.4. Réformer le système fiscal
L’accroissement des recettes publiques devrait faire partie intégrante d’une stratégie axée sur la viabilité des finances publiques. Au Japon, le niveau des recettes fiscales mesuré en pourcentage du PIB est proche de la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.19, partie A), même s’il est supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE non membres de l’Union européenne (UE). La part des taxes sur la consommation et de l’impôt sur le revenu des personnes physiques est en revanche relativement faible (partie B). À l’inverse, la part des cotisations de sécurité sociale et celle de l’impôt sur les sociétés sont supérieures à la moyenne de l’OCDE. Les pouvoirs publics envisagent de relever encore les taux des cotisations de sécurité sociale, ce qui peut affaiblir les incitations à l’emploi, ainsi que ceux des impôts sur les bénéfices des sociétés, pour pouvoir financer la hausse des dépenses de défense. Les cotisations de sécurité sociale représentent déjà 36 % des recettes des administrations publiques. Compte tenu du vieillissement démographique, il est crucial d’éliminer les distorsions, dans le système fiscal, qui pèsent sur l’emploi, tout en renforçant la fonction redistributive de l’impôt pour avoir une structure fiscale optimale.
Malgré une augmentation régulière qui l’a porté à 10 % en octobre 2019, le taux de la taxe sur la consommation (taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée) reste un des plus faibles de la zone OCDE, et les recettes de taxe sur la consommation, qui représentent 5 % du PIB, sont relativement modestes (partie C). Les taxes sur la consommation ont des effets de distorsion relativement légers sur le travail, l’épargne et l’investissement, elles assurent une répartition équitable du fardeau de l’impôt entre les générations et peuvent être une source de recettes relativement stable. Parmi les options qui s’offrent aux pouvoirs publics, une hausse continue et graduelle des taxes sur la consommation procurerait des recettes fiscales relativement importantes, aux prix d’effets négatifs relativement ténus sur le PIB à long terme et la protection sociale (OECD, 2021a ; McGrattan et al., 2018). Comme recommandé dans les précédentes Études économiques de l’OCDE consacrées au Japon, il conviendrait de relever progressivement le taux de la taxe sur la consommation, en suivant un calendrier régulier à moyen terme, ancré dans la législation, afin de limiter l’impact économique de cette mesure et de minimiser l’incertitude entourant les décisions des pouvoirs publics ; cette politique pourrait être complétée par un ciblage judicieux des transferts monétaires au profit des ménages modestes.
Différentes déductions au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques ont pour effet d’éroder la base d’imposition (Tableau 1.6). Réformer les déductions bénéficiant aux ménages à revenu élevé serait un moyen d’accroître la progressivité de l’impôt et les recettes. Malgré un taux légal d’imposition maximum de 55 %, les recettes d’impôt sur le revenu des personnes physiques sont plutôt modestes. Il est possible d’élargir l’assiette de cet impôt en réduisant l’abattement au titre des revenus salariaux, qui constitue la déduction la plus importante, puisqu’elle représente 28.5 % du revenu brut des personnes physiques avant impôts, soit davantage que les frais professionnels des salariés (notamment au titre des déplacements domicile-travail). Actuellement, l’abattement au titre des revenus salariaux, qui a été conçu pour prendre en compte les frais professionnels estimés des salariés et ajuster la ponction fiscale sur les salaires au regard des prélèvements effectués sur d’autres revenus d’activité, s’applique à partir de 550 000 JPY de revenu salarial brut et est plafonné à 1.95 million JPY.
Les autorités pourraient réduire la nécessité d’ajuster la charge fiscale pesant sur les revenus salariaux par rapport à d’autres revenus d’activité en améliorant le respect par les travailleurs indépendants de leurs obligations fiscales ; pour ce faire, il faudrait utiliser efficacement le système de numéro national d’identification personnelle (« Mon numéro ») afin de renforcer la transparence des revenus des travailleurs indépendants. De même, les abattements au titre des pensions s’appliquent même aux retraités très fortunés, le plafond étant fixé à 1.95 million JPY. Les réformes fiscales mises en œuvre pendant l’exercice budgétaire 2018 se sont traduites par une diminution de l’abattement et du plafond dans les deux cas. Il est toutefois possible d’abaisser encore les plafonds, tout en prenant des mesures d’aide ciblées sur les ménages à faible revenu. Réformer le traitement appliqué en matière d’assurance sociale et de fiscalité aux deuxièmes apporteurs de revenu permettrait de renforcer l’emploi des femmes et les rentrées d’impôts (chapitre 2). L’abattement pour enfants à charge de plus de 16 ans accordé sous certaines conditions pourrait également être réexaminé, si le droit aux allocations familiales, qui expire actuellement le 31 mars suivant le quinzième anniversaire de l’enfant, est prolongé jusqu’au 31 mars suivant son dix-huitième anniversaire, comme il en est question dans la Stratégie pour l’avenir des enfants du gouvernement (Government of Japan, 2023b).
Tableau 1.6. Abattements au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques
Pourcentage du revenu brut avant impôts en 20 211
Abattement à la base |
Abattement pour conjoint |
Abattement au titre des cotisations de sécurité sociale et des impôts sur le revenu |
Abattement au titre des revenus salariaux |
Total des abattements |
|
---|---|---|---|---|---|
Japon |
9.3 |
7.4 |
14.4 |
28.5 |
59.7 |
G7 |
11.5 |
1.1 |
8.5 |
5.5 |
26.6 |
1. Pour un couple marié avec deux enfants comptant un travailleur rémunéré au salaire moyen. 2. Frais professionnels.
Source : OCDE (2022), Les impôts sur les salaires 2022.
Au Japon, les recettes provenant de l’impôt sur les sociétés sont volumineuses, sachant que son taux est relativement élevé (Partie D). Néanmoins, un taux réduit ciblé (15 %) s’applique aux PME dont le bénéfice imposable annuel est inférieur à 8 millions JPY, alors que le taux normal applicable aux grandes entreprises est de 23.2 %. Or, les mesures différenciées en fonction de la taille des entreprises de ce type peuvent avoir pour effet de dissuader les entreprises de se développer (Benedek et al., 2017). Des taxes locales, qui varient selon la taille de l’entreprise, ajoutent encore à la complexité du système d’imposition des sociétés. C’est pourquoi, à moyen terme, la simplification du système et la suppression du taux d’imposition réduit applicable aux PME pourraient permettre d’accroître les recettes. Une augmentation des impôts sur les plus-values et les dividendes pourrait également contribuer à gonfler les recettes et pourrait renforcer la progressivité du système d’imposition. Les taux marginaux d’imposition effectifs des dépôts bancaires, des dividendes et des plus-values sont inférieurs à la moyenne de l’OCDE au Japon, en particulier pour les personnes ayant des revenus d’activité élevés (OECD, 2018). Les plus-values et dividendes sont soumis à un taux forfaitaire de 20 %, sachant qu’il existe des exonérations destinées à promouvoir les placements financiers effectués par les ménages via les comptes individuels d’épargne nippons. Parce que personnes aux revenus d’activité élevés disposent d’un patrimoine plus important, qui est imposé à un taux forfaitaire plus bas que le taux maximal d’imposition des revenus du travail, la charge fiscale diminue au-delà d’un seuil de revenu annuel de 100 millions JPY environ (Kumakura and Kojima, 2018).
Tableau 1.7. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant les politiques macroéconomiques et mesures prises
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2021 |
---|---|
Tant que l’inflation demeure en deçà de l’objectif, maintenir la politique monétaire accommodante actuelle pour soutenir la reprise. |
La politique monétaire est restée accommodante, sachant que la gestion du dispositif de contrôle de la courbe des rendements a été ajustée en décembre 2022, en juillet 2023 et en octobre 2023. |
Continuer de soutenir les banques régionales afin de consolider leurs fondements économiques. |
Un dispositif de subventions destiné à encourager les fusions a été mis en place par l’Agence des services financiers (ASF). |
Les autorités de surveillance financière doivent rester vigilantes en ce qui concerne les risques de liquidité et de financement. |
L’ASF assure un suivi régulier des risques de financement et de liquidité en devises. |
Établir une feuille de route pour obtenir un solde primaire excédentaire, dans le cadre d’un plan global destiné à assurer la viabilité des finances publiques à long terme. |
Aucune. |
Exploiter les possibilités d’améliorer l’efficience des dépenses publiques, notamment en recourant davantage aux technologies numériques. |
À la suite de projets pilotes lancés en juin 2022 concernant l’adoption d’une méthode d’élaboration des politiques fondée sur des données probantes pour améliorer l’efficience de l’administration publique, l’élargissement de son champ d’application à quelque 5 000 projets a été approuvé. |
Poursuivre les réformes des modes de travail, notamment celles visant à promouvoir une rémunération égale à travail égal et des modalités de travail flexibles, tout en améliorant l’offre de services d’accueil des jeunes enfants pour rehausser le taux d’activité des femmes. |
L’information relative au congé parental pouvant être pris par les pères s’est améliorée, et les conditions temporelles d’application du congé parental se sont assouplies depuis 2021. Le seuil de taille à partir duquel les entreprises sont tenues d’établir et de publier un plan d’action pour accroître la proportion de femmes dans leurs effectifs a été abaissé en 2022. Les bureaux de l’emploi préfectoraux ont intensifié les efforts déployés en vue de garantir le respect du principe de rémunération égale à travail égal. |
Continuer de relever l’âge de départ obligatoire en retraite ou le supprimer. |
Les aides existantes accordées aux employeurs qui portent l’âge de la retraite à 65 ans ou plus, ou qui suppriment l’âge obligatoire de départ à la retraite, sont maintenues. |
Une fois que l’économie se sera redressée, accroître progressivement les recettes, notamment en relevant encore, de manière régulière, le taux de la taxe sur la consommation par petites hausses successives. |
Aucune. |
1.5. La priorité devrait être donnée aux réformes propices aux gains de productivité
Il est essentiel de rehausser la croissance de la productivité, qui a été modérée au cours des dernières décennies, pour faire face aux évolutions démographiques défavorables. Le renforcement du cadre de l’innovation, des incitations à l’innovation et de la réglementation, ainsi que l’amélioration de l’accès aux financements, peuvent contribuer à réduire l’écart de productivité entre les petites et moyennes entreprises (PME) et les grandes entreprises et à stimuler l’investissement immatériel.
1.5.1. Relancer le moteur de la R-D
Les dépenses de recherche-développement (R-D) du Japon, qui s’élevaient à 3.3 % du PIB, figuraient parmi les plus élevées de la zone OCDE en 2021 (Graphique 1.20, partie A). Néanmoins, depuis 2000, l’augmentation moyenne des dépenses de R-D n’a été que de 1.2 % par an en termes réels, ce qui classe le Japon au troisième rang des pays de l’OCDE par ordre croissant. En outre, les activités d’innovation menées au niveau national sont peu intégrées aux réseaux mondiaux d’innovation, 0.6 % seulement de la R-D totale ayant été financé par des sources étrangères en 2021. Les entreprises privées ont réalisé environ 80 % des activités totales de R-D, mais approximativement 6 % seulement de ces activités étaient liés à des PME, soit un pourcentage nettement inférieur à la moyenne de 40 % enregistrée dans la zone OCDE (partie B ; OECD, 2022a). Dans ce contexte, le fait que la R-D des entreprises soit très concentrée dans les activités manufacturières, qui représentent près de 80 % du total, limite les ressources affectées à des services plus novateurs. Ainsi, les investissements en R-D dans le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) représentaient moins de 3 % de l’ensemble des activités de R-D des entreprises en 2020, soit la proportion la plus basse de la zone OCDE.
Si le Japon figure parmi les premiers pays du monde à l’aune du nombre de brevets, ces derniers sont en grande partie le résultat d’innovations incrémentales, la plupart des dépôts de brevet concernant des améliorations mineures de technologies existantes (Jones, 2022) et nombre d’entre eux n’étant pas utilisés dans le cadre de recherches ultérieures (Bahar and Strauss, 2020). De plus, un certain nombre de ces brevets constituent en réalité un maquis de droits de propriété intellectuelle créé par les entreprises en place, qui peut entraver la commercialisation d’inventions nouvelles ou de produits innovants (OECD, 2021a). Cette question pourrait être importante pour la transformation numérique, étant donné que le développement de nouveaux produits et procédés couvre plusieurs domaines de propriété intellectuelle. Afin de mieux soutenir l’innovation ouverte, l’Office japonais des brevets (JPO, Japan Patent Office) a donc élaboré des contrats types pour aider les jeunes pousses (start-ups) et les entreprises commerciales spécialisées dans la R-D à mieux communiquer et à surmonter les obstacles juridiques et liés aux négociations auxquels se heurtent les activités de recherche conjointes et les accords de licence. Toutefois, les autorités de la concurrence devront peut-être s’assurer que les brevets ne font pas l’objet d’une utilisation stratégique abusive qui entrave la transformation numérique.
Renforcer les incitations en faveur de la R-D
Les aides publiques à la R-D des entreprises sont inférieures à la moyenne de l’OCDE et ont sensiblement diminué ces dernières années, se découplant des dépenses de R-D des entreprises. Ces mesures de soutien sont essentiellement de nature fiscale, les aides directes n’en représentant que moins d’un cinquième (Graphique 1.21, partie A). Dans l’ensemble, la structure des aides est en phase avec les données empiriques qui montrent que les avantages des incitations fiscales l’emportent sur leurs coûts (Lester and Warda, 2020) et qu’elles favorisent les dépenses de R-D de manière relativement efficace (Hall and van Reenen, 2000), même si elles peuvent comporter des risques de pertes d’efficience. Les subventions directes sont souvent associées aux risques inhérents à toute politique de « sélection des gagnants », ces risques pouvant toutefois être atténués grâce à des procédures de mise en concurrence élaborées avec soin (Jones and Kim, 2015 ; Giebe et al., 2006). Par conséquent, il pourrait être envisagé de recourir davantage à des aides directes axées sur des objectifs spécifiques, comme la réduction du déficit de financement des actifs incorporels, qui pénalise les jeunes pousses innovantes (OECD, 2021d ; Appelt et al., 2016). Il importe toutefois d’évaluer l’efficacité des subventions directes, qui ont augmenté pendant la pandémie, pour éviter la création d’entreprises zombies (Hashimoto and Hirasawa, 2021).
Les incitations fiscales à la R-D sont conçues de telle sorte que le taux marginal de subvention fiscale est légèrement négatif pour les entreprises déficitaires, et s’établit en deçà de la moyenne de l’OCDE (partie B). Cela vaut indépendamment de leur taille, mais il est possible que cet effet soit plus marqué pour les petites entreprises. Bien qu’elles représentent 71 % de l’ensemble des bénéficiaires, les PME n’ont reçu que 7 % du montant global des subventions fiscales à la R-D en 2019, alors qu’elles ont bénéficié d’environ un cinquième des financements directs (OECD, 2021e). Compte tenu du caractère non remboursable du crédit d’impôt et de l’absence de dispositions permettant son report, supprimées en 2015, son effet d’incitation à investir est réduit pour les entreprises nouvelles et de petite taille, dont la dette fiscale est généralement insuffisante et qui sont plus susceptibles d’être confrontées à des contraintes de crédit. Rendre ce crédit d’impôt remboursable ou rétablir la possibilité de le reporter permettrait d’inciter davantage les PME et les jeunes pousses innovantes à investir.
Renforcer le potentiel d’innovation des universités
Le système de R-D du Japon se caractérise par une forte orientation commerciale, ce qui restreint le champ de la recherche fondamentale, laquelle est en grande partie réalisée dans les universités et les établissements publics de recherche (Graphique 1.22). La recherche fondamentale contribue à produire de nouvelles connaissances qui, même si elles n’ont pas d’application ou d’utilisation prévisible dans l’immédiat, jettent les bases d’autres innovations technologiques. Cependant, les interactions entre la R-D des entreprises et celle des universités sont limitées, 0.5 % seulement de la R-D financée par les entreprises étant réalisé dans des établissements universitaires, malgré un crédit d’impôt relativement généreux qui permet aux entreprises de déduire 30 % de leurs dépenses de R-D des impôts dont elles sont redevables lorsque ces dépenses sont engagées dans des projets de recherche conjoints réalisés avec des universités ou des établissements publics de recherche nationaux reconnus (METI, 2022a). Dès lors, renforcer le rôle des universités et des établissements publics de recherche, en resserrant leurs liens avec les entreprises, en particulier les PME, pourrait contribuer à la réalisation de l’objectif de stimulation de l’innovation créatrice visé par le gouvernement (Government of Japan, 2021).
La mobilité limitée des chercheurs entre les différents établissements reste un obstacle à la diffusion des idées novatrices. Si la mobilité des chercheurs à l’intérieur du secteur des entreprises est relativement élevée, les experts ou les chercheurs universitaires profitent rarement de la possibilité créée en 2014 de travailler à la fois dans les universités, les centres de recherche et les entreprises privées (METI, 2020a). Il conviendrait donc de mener à bien les projets visant à inclure l’exercice simultané d’activités dans différentes organisations dans les critères d’évaluation appliqués pour les postes de recherche permanents des universités et l’évolution de carrière des chercheurs. De même, au Japon les flux nets d’auteurs scientifiques sont restés constamment négatifs ces dernières années (OECD, 2023b), malgré les engagements pris par le gouvernement d’attirer davantage de talents étrangers pour renforcer l’internationalisation des universités (Government of Japan, 2015). Permettre aux chercheurs et aux scientifiques étrangers venant au Japon de progresser dans leur carrière au sein des départements et des universités qui les accueillent maximiserait les effets des compétences et concepts nouveaux sur les processus opérationnels et organisationnels locaux.
La réalisation de l’objectif énoncé dans le Plan-cadre pour la science, la technologie et l’innovation, qui vise à faire des universités le moteur d’un circuit national de l’innovation remis à plat, fondé sur un système de recherche fondamentale robuste piloté par le secteur public, appelle des investissements considérables. Après avoir acquis le statut de société universitaire nationale en 2004, à la suite d’une privatisation partielle, les universités nationales ont été contraintes d’élargir leurs sources de recettes et leurs fonds de soutien opérationnel ont été réduits de 1 % par an (Kikuchi, 2021). En 2019, le financement par les administrations publiques de la R-D réalisée par les universités était supérieur d’environ 4 % seulement à son niveau de 2000 en termes réels, alors qu’il avait augmenté de 61 % aux États-Unis, même s’il a progressé au même rythme que le PIB nominal au cours de la même période (OECD, 2022a).
Le fonds de dotation universitaire, lancé en mars 2022 et doté actuellement de 10 000 milliards JPY environ (soit 1.8 % du PIB), devrait utiliser les gains réalisés grâce à l’investissement de ses actifs pour fournir à des universités sélectionnées un financement à long terme stable leur permettant de moderniser leurs infrastructures de recherche, ainsi que pour soutenir les jeunes pousses universitaires et financer une augmentation des dépenses de personnel en vue d’attirer des chercheurs de premier plan. Le fonds est géré par l’organisme national de financement de la recherche, l’Agence japonaise pour la science et la technologie (JST, Japan Science and Technology Agency), suivant des lignes directrices élaborées par le ministère de l’Éducation pour garantir que les investissements réalisés s’inscrivent dans une perspective à long terme (Council for Science, Technology and Innovation, 2021).
L’accès à ce dispositif est subordonné à une évaluation des plans de réforme institutionnelle des établissements candidats, de leur capacité de produire des travaux de recherche de premier ordre à l’échelle internationale, de leur mise en application de stratégies commerciales et financières très efficaces, et de l’existence de systèmes de gouvernance autonomes et responsables (Government of Japan, 2022b). Les critères d’admission au bénéfice du dispositif devraient être clairement définis et transparents, en particulier s’agissant de l’évaluation de la vision des universités et de leur détermination à mener à bien de futures réformes, et limiter par ailleurs les possibilités d’intervention des pouvoirs publics. Cela favoriserait le jeu de la concurrence et réduirait le risque de brider l’innovation en concentrant les investissements dans des technologies « privilégiées ».
Le fonds offre un potentiel considérable de renforcement de l’intensité d’innovation, mais il convient d’éviter de créer des incitations négatives. A priori, les universités sélectionnées jouiront d’une liberté totale d’utilisation des fonds qui leur seront alloués et ne seront pas soumises à des exigences spécifiques en matière de domaines de recherche et de types de projets, ce qui devrait permettre aux universités de soutenir des travaux de recherche qui ne seraient pas viables dans le secteur privé (Aghion et al., 2008). Il importera de veiller à ce que ne soient pas menés uniquement des projets de recherche caractérisés par une rentabilité commerciale relativement rapide. Par conséquent, les effets induits par le fonds en termes de renforcement de la recherche fondamentale théorique devraient faire l’objet d’une évaluation et d’un suivi réguliers.
La réduction du temps consacré à la recherche par les scientifiques peut limiter la capacité d’innovation des universités. L’aggravation des pénuries de personnel, due aux réductions régulières des dotations globales depuis 2004, a entraîné une augmentation de la participation des chercheurs aux tâches administratives et à la gestion des universités. Une séparation plus stricte entre les fonctions de recherche et celles d’administration universitaire, sous réserve de la disponibilité de financements suffisants, permettrait d’améliorer les résultats obtenus en matière d’innovation. Des travaux empiriques donnent à penser que la relation entre la productivité et l’âge des chercheurs prend pour l’essentiel la forme d’une courbe en U inversé (Costas et al., 2010), même si le niveau élevé de compétences d’un individu peut contribuer à compenser les effets négatifs de l’âge sur la qualité de ses contributions scientifiques (Yu et al., 2022). Aussi, un assouplissement des règles d’ancienneté appliquées en matière de gestion de projets, consistant à relever le plafond du montant annuel des financements de projet dont peuvent bénéficier les jeunes chercheurs, indépendamment du professeur adjoint ou titulaire dont ils relèvent, pourrait stimuler la réflexion créative.
Raviver l’intérêt pour les professions scientifiques
Pour pouvoir renouer avec l’excellence en matière d’innovation généralisée, le Japon devra disposer d’une main-d’œuvre hautement qualifiée, or la proportion de diplômés en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM) reste relativement faible, puisqu’elle était de 19 % en 2021, contre 24 % dans l’ensemble de la zone OCDE. La proportion de femmes diplômées en STIM, qui s’établit à 7 %, est la plus faible de la zone OCDE. En outre, la proportion d’étudiants inscrits en doctorat a reculé de 17 % en 2000 à moins de 10 % en 2021 (Government of Japan, 2022b), ce qui pourrait s’expliquer par la stagnation des salaires et la perspective d’une progression de carrière lente, dans un contexte de multiplication des contrats de travail atypiques, sachant que 22 % seulement des professeurs d’université étaient âgés de moins de 40 ans en 2021 (Graphique 1.23, partie A).
À l’image des écarts entre genres observés de manière plus globale dans le contexte socioéconomique japonais, dont il est question au chapitre 2, la proportion de femmes inscrites à l’université et dans les programmes d’enseignement supérieur en STIM, bien qu’elle augmente, est relativement modeste. En 2021, la part des femmes parmi les professeurs d’université, qui s’établissait à 30 %, était la plus faible de la zone OCDE (partie B), tandis que les étudiantes représentaient respectivement 17 % et 20 % des nouvelles inscriptions dans l’enseignement supérieur et les programmes doctoraux en STIM. Le gouvernement s’est engagé à lancer une vaste enquête sur les raisons qui sous-tendent les orientations liées au genre en matière d’éducation et de carrières dans les sciences naturelles, et à réaliser une analyse factorielle connexe, d’ici à 2023-24. Il est possible de renforcer la filière STIM en favorisant le mentorat en vue de susciter des vocations dans les STIM parmi les jeunes filles dans l’enseignement secondaire et les étudiantes en début de parcours universitaire, sachant que l’efficacité de ce mentorat est avérée lorsqu’il est assuré par des femmes (Wu et al., 2022), ou en organisant des manifestations pour mettre en valeur des modèles féminins dans le domaine des STIM (Guenaga et al., 2022). L’allègement de la charge que représente la garde des enfants pour les jeunes couples et les parents isolés peut également apporter une pierre à l’édifice, de même que la réduction des écarts d’emploi et de rémunération entre les genres, qui s’établissent respectivement à 11.7 % et 22.1 %, contre 10.2 % et 11.9 % en moyenne dans la zone OCDE (chapitre 2).
Les réformes en cours qui visent à rendre les carrières plus attrayantes dans le domaine de la recherche sont bienvenues. Le gouvernement prévoit de tripler d’ici à 2025 le nombre de doctorants bénéficiant des allocations de subsistance (1.8 million JPY par an). De futures règles autorisant les universités à financer au moyen de fonds externes les augmentations de salaire de certains membres de leur personnel, comme les assistants de recherche, pourraient également être utiles à cet égard (Government of Japan, 2021 ; Cabinet Office, 2022). Il conviendrait d’envisager d’avancer la mise en œuvre de certaines des réformes prévues, comme la réduction en deçà de 10 % du rapport entre tâches administratives et activités d’enseignement et la modification des critères d’évaluation des performances du personnel de direction des universités visant à l’inciter à améliorer la diversité des genres et des âges au sein du corps universitaire.
1.5.2. Améliorer l’affectation des ressources
Au Japon, la dynamique des entreprises est relativement modeste, le taux d’entrée sur le marché et la croissance des jeunes pousses (start-ups) y étant faibles, ce qui témoigne des difficultés rencontrées par les jeunes pousses innovantes pour accéder à des financements et se développer (OECD, 2021a). Traditionnellement assuré par les banques, le financement des entreprises est encore largement subordonné à des garanties immobilières et personnelles, ce qui est inadapté aux nouvelles entreprises caractérisées par une forte intensité en actifs incorporels. En outre, l’efficacité de l’affectation des ressources est limitée par les aides publiques généreuses – et peu ciblées – accordées aux petites et moyennes entreprises (PME), qui empêchent la sortie du marché d’entreprises improductives. Des incitations plus fortes en faveur du financement par capitaux propres, notamment sous la forme de capital-risque et d’opérations de fusion et d’acquisition, pourraient atténuer ces distorsions et stimuler la dynamique des entreprises.
Réformer les aides publiques aux entreprises
Au cours de l’exercice budgétaire 2021, les prêts garantis par l’État ont représenté environ 14 % de l’encours total des crédits accordés aux PME, soit 7.9 % du PIB, contre 4 % du produit intérieur brut en 2018 (Graphique 1.24). Le taux de couverture des prêts a diminué de 100 % à 80 %, mais reste relativement élevé. De même, en amont, les sociétés de garantie de crédit, qui couvrent le risque de crédit des banques privées, bénéficient d’une assurance-crédit assez généreuse fournie par la Société japonaise de financement (JFC, Japan Finance Corporation), une entité publique qui offre des taux de couverture de l’ordre de 70 % à 80 %. En outre, les établissements financiers publics ont accordé aux PME des prêts directs d’un montant total équivalent à 5.2 % du PIB (OECD, 2022b). Certains pays européens ont offert des taux de couverture similaires pour les prêts bonifiés aux entreprises pendant la pandémie (Albertazzi et al., 2020), mais d’autres ont fourni des aides plus ciblées, la France et l’Espagne ayant appliqué des taux de couverture différenciés en fonction du chiffre d’affaires des entreprises, en fixant des taux de base plus bas pour les PME de plus grande taille (Altavilla et al., 2021).
Les aides publiques généreuses accordées aux PME au Japon peuvent freiner le redéploiement des ressources et la sortie du marché des entreprises, retarder les restructurations et réduire les possibilités d’entrée d’entreprises plus innovantes ainsi que leurs possibilités d’investissement. En outre, elles tendent à favoriser les entreprises qui entretiennent des relations de longue date avec les établissements de crédit et réduisent les risques assumés par les établissements financiers ainsi que leurs incitations à mettre en place un système efficace d’évaluation des crédits aux PME, ce qui entrave le développement des financements de marché (Jones, 2022). Les pouvoirs publics devraient donc abaisser encore le taux de couverture des prêts garantis par l’État, afin de renforcer la gestion du risque de crédit des banques.
La préférence que donnent les banques aux garanties immobilières et personnelles pèse sur la création d’entreprises et leur croissance, car tout financement supplémentaire sollicité à des fins d’expansion nécessite une redéfinition des garanties (Financial Council, 2023a). Ainsi que cela avait été recommandé dans l’Étude économique de 2021, exclure la résidence principale du champ d’application des procédures de faillite personnelle (comme c’est le cas dans de nombreuses provinces canadiennes et en France) pourrait être bénéfique à cet égard. Des mesures prises récemment, telles que la publication par l’Office japonais des brevets (JPO, Japan Patent Office) de lignes directrices sur l’évaluation de la propriété intellectuelle des PME, ont contribué à la mise en place de crédits garantis par des actifs immatériels et à l’augmentation de la part des prêts de banques privées non assortis de garanties fournies par les dirigeants des entreprises concernées, qui est passée de 12 % à 33 % entre les exercices budgétaires 2015 et 2022 (METI, 2023a).
Les projets des pouvoirs publics visant à réformer le système de garanties, qui amélioreront les conditions de financement des jeunes pousses à potentiel de croissance, sont bienvenus. Le fait que les nouveaux prêts puissent être garantis par une sûreté portant sur l’ensemble des actifs de l’entreprise et sur ses futures créances réduira les asymétries d’information entre prêteurs et emprunteurs, ce qui éliminera la nécessité de recourir à des garanties et des sûretés personnelles (Financial Council, 2023a). En outre, un nouveau système de garantie de crédit libérera les dirigeants des jeunes pousses de moins de cinq ans de l’obligation de fournir des garanties personnelles. Pour que ce système soit efficace, il faudra en assurer la stabilité juridique en définissant clairement les actifs fournis en garantie et veiller à ce qu’il ne détériore pas la position relative des parties prenantes, en particulier celle des travailleurs (Financial Council, 2023b). Le gouvernement a l’intention de présenter de nouvelles dispositions législatives visant à instaurer la possibilité, lors de la négociation d’un prêt, d’inclure des actifs incorporels dans les garanties, ce qui n’est pas prévu par le Code civil à ce jour. L’adoption et la mise en œuvre rapide de cette réforme sont indispensables pour aider les jeunes pousses innovantes nationales à réaliser leur potentiel.
Améliorer les conditions permettant de mobiliser du capital-innovation
Des marchés du capital-risque fonctionnant bien sont des moteurs importants de l’innovation et de la croissance de la productivité. Le capital-risque atténue les asymétries d’information liées à l’évaluation des actifs incorporels, permet de financer des innovations radicales et accroît la probabilité d’un cofinancement par des investisseurs institutionnels (Jeppson, 2018). En 2021, les entreprises de capital-risque nationales représentaient un tiers des investissements totaux dans les jeunes pousses japonaises, dont la valeur avait sextuplé depuis 2014 pour atteindre 1 100 milliards JPY (METI, 2022b). Néanmoins, le marché japonais du capital-risque reste sous-dimensionné (Graphique 1.25) et principalement concentré sur les investissements d’amorçage et de démarrage. Le Fonds d’investissement public pour les retraites a récemment commencé à investir dans des fonds de capital-investissement et de capital-risque, qui peuvent soutenir la création et le développement de jeunes pousses et renforcer sensiblement le financement de l’innovation, comme aux États-Unis.
Le plan quinquennal pour le développement des jeunes pousses prévoit un large éventail de mesures, notamment un soutien financier substantiel, des modifications de la réglementation, et une plus grande ouverture aux investisseurs en capital-risque étrangers (Cabinet Secretariat, 2022). Son efficacité serait étayée par une hiérarchisation des mesures, consistant à mettre en œuvre d’abord celles qui visent à attirer les investisseurs étrangers innovants, notamment en simplifiant les obligations administratives et réglementaires à satisfaire, en garantissant pleinement la mobilité de la main-d’œuvre qualifiée, en assurant un meilleur partage de l’information, et en renforçant l’intégration des acteurs nationaux dans les réseaux et les pôles d’innovation mondiaux. Parmi les mesures prévues figurent une augmentation de 120 milliards JPY d’ici à 2027 des financements destinés à accroître les investissements (assortis d’une responsabilité limitée) dans les fonds de capital-risque nationaux et étrangers, ainsi que le renforcement des déductions et des incitations fiscales destinées aux entreprises de capital-risque et aux investisseurs providentiels individuels. Il conviendrait de concevoir judicieusement des mesures fiscales ciblées et d’en assurer un suivi permanent, afin de s’assurer qu’elles sont économiquement efficientes et ne posent pas de problème d’équité.
Au Japon, au cours de l’exercice budgétaire 2020, les stratégies de sortie des jeunes pousses adoptées pour surmonter les obstacles à leur croissance liés à leur taille se sont appuyées sur des fusions et acquisitions dans moins de 25 % des cas (METI, 2022c), contre 90 % aux États-Unis et 67 % dans l’Union européenne. Les fusions et acquisitions constituent pour les jeunes pousses, en particulier celles qui sont financées par du capital-risque, une solution souple qui leur permet de se développer rapidement grâce à l’acquisition de nouveaux produits, technologies ou talents. Les réformes fiscales prévues, qui devraient entrer en vigueur en 2023-24 et permettront aux entreprises, sous certaines conditions, de déduire de leur bénéfice imposable 25 % de la valeur d’une prise de participation dans une jeune pousse, ainsi que l’assouplissement des règles fiscales appliquées aux entreprises essaimées, peuvent inciter davantage les grandes entreprises à investir dans l’innovation. La réduction ou la suppression des restrictions concernant le report en avant des pertes d’exploitation nettes en cas de changement de la structure de propriété d’une entreprise pourrait étayer ces réformes bienvenues.
Le niveau des obstacles réglementaires à l’investissement direct étranger (IDE) est proche de la moyenne de l’OCDE (OECD, 2023 c), mais le stock d’IDE entrant du Japon mesuré en proportion du PIB est très bas en termes de comparaison internationale (OECD, 2023d). En avril 2023, le gouvernement a annoncé un nouveau plan d’action pour atteindre l’objectif consistant à porter le stock d’IDE entrant de 46 200 milliards JPY à la fin de 2022 à 100 000 milliards JPY en 2030 (Council for Promotion of Foreign Direct Investment in Japan, 2023). Ce plan souligne la nécessité d’accomplir des efforts supplémentaires pour réduire les obstacles à l’IDE, notamment en assouplissant les procédures, en fournissant une assistance multilingue et en améliorant l’environnement des entreprises. Réduire les restrictions explicites, en mettant l’accent sur celles qui affectent le secteur des services, favoriserait les entrées d’IDE. Le Japon joue également un rôle mineur dans les opérations transnationales de fusion et d’acquisition, qui sont un moteur de plus en plus important de l’IDE, si bien que l’activation du marché des fusions et acquisitions, qui avait été recommandée dans l’Étude économique de l’OCDE de 2017, apporterait aussi une pierre à l’édifice (Jones, 2022).
Les opérations de fusion et d’acquisition ont des retombées positives, mais devraient faire l’objet d’un suivi rigoureux. Tout d’abord, elles peuvent permettre d’améliorer la qualité des processus de gestion et d’organisation et d’évaluer de manière plus juste le potentiel de croissance des entreprises. Ensuite, elles offrent aux entreprises rentables dirigées par des personnes relativement âgées un large éventail de solutions alternatives à la fermeture de l’entreprise faute de successeurs adéquats. En 2022, malgré l’existence de prêts bonifiés, d’incitations fiscales et de services de conseil et de mise en relation, 55 % des 49 600 entreprises qui ont fermé leurs portes en raison de problèmes de succession étaient rentables (TSR, 2023). En revanche, les opérations de fusion et d’acquisition peuvent réduire la concurrence si les grandes entreprises en place y ont recours pour « internaliser » les innovations créées par des concurrents de plus petite taille ou de nouveaux entrants potentiels (OECD, 2021a). La Commission de la concurrence japonaise (JFTC, Japan Fair Trade Commission) a renforcé sa capacité d’identifier les fusions anticoncurrentielles (Yagami et al., 2022), mais la complexité accrue des transactions sous-jacentes appelle un assouplissement du cadre de contrôle des fusions. Recourir davantage aux évaluations ex post et exiger des entreprises en place occupant une position dominante qu’elles apportent la preuve que leurs acquisitions de jeunes pousses naissantes n’ont pas d’effets anticoncurrentiels, conformément aux recommandations de l’OCDE (OECD, 2020 c), renforceraient l’application du droit de la concurrence et préserveraient les droits des consommateurs.
Renforcer la réglementation et la transformation numérique des administrations publiques
Un cadre réglementaire plus propice à la concurrence stimulerait le dynamisme des entreprises et la croissance de la productivité. Selon les indicateurs de réglementation des marchés de produits de l’OCDE, les exigences en matière d’autorisation sont relativement faibles, grâce à un guichet unique en ligne et des règles de « consentement tacite », mais la complexité de la réglementation, notamment le nombre élevé de procédures à suivre pour enregistrer une nouvelle entreprise, peut être réduite. Ce type de réforme pourrait stimuler la croissance du PIB à moyen et long terme (Encadré 1.7). Le cadre réglementaire est favorable à la concurrence dans les secteurs des services et des réseaux (sauf les communications électroniques) et le plus ouvert de la zone OCDE pour les échanges de services. Cependant, des restrictions à l’entrée d’acteurs étrangers et à la circulation des personnes limitent les services juridiques et de télécommunications (OECD, 2022 c). Il serait utile d’assouplir l’obligation d’enregistrement des prestataires de services étrangers au Japon. Il est également possible d’améliorer le cadre réglementaire des marchés publics, qui ne garantit pas des conditions de concurrence équitables à tous les soumissionnaires potentiels.
L’utilisation des technologies numériques par les administrations publiques accuse un retard mais progresse, comme l’avait recommandé l’Étude économique de 2021, avec un objectif de 98 % de procédures administratives en ligne d’ici à 2025. Les règles relatives aux consultations médicales et aux conseils sur l’administration de médicaments en ligne ont été assouplies pendant la pandémie de COVID-19. Les évolutions technologiques pourraient créer de nouvelles conditions-cadres nécessitant l’adoption de nouvelles règles ou la révision de règles existantes. C’est pourquoi il est positif que le pays procède actuellement à un examen de la réglementation relative aux dispositifs médicaux logiciels, notamment d’imagerie diagnostique fondée sur l’IA, dans l’optique de favoriser leur développement et leur lancement sur le marché. Le Japon s’emploie également à promouvoir les villes intelligentes, mais les projets dépassent rarement le stade des études de faisabilité, du fait de difficultés de mise sur le marché et d’obstacles juridiques. Cependant, les zones spéciales stratégiques nationales, des sites sélectionnés dans lesquels sont mises en œuvre des réformes spécifiques touchant à la réglementation et à d’autres aspects de ces environnements urbains, peuvent être utiles à cet égard, tout comme les initiatives Super City en cours à Osaka et Tsukuba depuis 2022 (Cabinet Office, 2023b). Il faut également des mesures complémentaires de prévention de l’exclusion numérique, du fait de la présence, au Japon, de populations importantes de personnes plus âgées ayant peu voire pas du tout de culture numérique.
Après une lente progression à la suite du lancement du dispositif en 2016, la proportion de personnes dotées d’une carte « Mon numéro » (numéro national d’identification personnelle), conçue pour faciliter le couplage entre les données et la fourniture de services publics, a atteint 72.7 % de la population en octobre 2023, sous l’effet de la pandémie et de nouvelles mesures d’incitation prises par les pouvoirs publics. Il convient de viser la généralisation de ce dispositif dès que ce sera possible en pratique. De récents cas d’erreurs liées à l’utilisation de la carte ont conduit les pouvoirs publics à décider de la conduite d’un examen du système en juin 2023. Pour bâtir la confiance du public dans une utilisation plus large du dispositif, il sera essentiel d’assurer la protection des données et de la vie privée et d’améliorer la convivialité de la carte, par exemple en simplifiant la gestion des codes confidentiels. L’utilisation de cette carte comme carte d’assurance maladie est en cours de déploiement et les plans visant à l’associer à davantage de services publics et privés devraient être une priorité. Utiliser le système « Mon numéro » pour accomplir certaines démarches administratives, suivre le revenu des travailleurs indépendants et assurer le partage de données entre les différents niveaux d’administration, comme le recommandait l’Étude économique de 2021, ainsi que pour améliorer l’efficience administrative quand il s’agit de cibler des aides sur les ménages vulnérables après des chocs, permettrait de mieux récolter les fruits de la transformation numérique.
Encadré 1.7. Quantification de l’impact de certaines réformes structurelles
Le Tableau 1.8 présente l’effet sur la croissance de certaines des réformes structurelles essentielles proposées dans cette Étude. Ces estimations sont fournies à titre indicatif. L’effet sur le PIB par habitant est estimé à partir des relations observées par le passé entre réformes et taux de croissance dans les pays de l’OCDE. Le modèle ne tient pas compte des changements induits par l’action publique concernant des préférences profondément ancrées, comme l’aversion au risque, ni de leurs effets ultérieurs sur les variables économiques.
Tableau 1.8. Effet potentiel de certaines des réformes proposées sur le PIB par habitant
Réforme |
Effet à 10 ans |
Effet à long terme |
---|---|---|
Améliorer l’environnement réglementaire |
0.5 |
1.8 |
Étayer les dépenses de recherche-développement (R-D) des jeunes entreprises innovantes |
0.1 |
0.4 |
Réorienter les dépenses au titre des politiques actives du marché du travail vers la formation |
0.7 |
1.2 |
Relever l’âge de départ à la retraite à 67 ans pour les hommes d’ici à 2030 et pour les femmes d’ici à 2035 (et le lier aux 2/3 de l’augmentation de l’espérance de vie par la suite) |
0.2 (0.2) |
0.7 (0.9) |
Total |
1.5 |
4.1 |
Note : Améliorer l’environnement réglementaire désigne le fait de relever l’indicateur OCDE de réglementation des marchés de produits relatif au Japon de deux décimales par rapport à son niveau actuel de 1.4 pour l’amener au niveau du tiers supérieur du classement des pays de l’OCDE. L’augmentation supposée des dépenses de R-D destinées à soutenir les jeunes entreprises est égale à 0.8 % du PIB. Les dépenses au titre des politiques actives du marché du travail par chômeur en pourcentage du PIB par habitant (12 % en 2019) sont supposées augmenter de 15 points de pourcentage, ce qui rapprocherait ainsi le Japon de la médiane des pays membres de l’OCDE.
Source : Calculs de l’OCDE fondés sur Guillemette and Turner (2021).
Renforcer l’intégrité publique
L’intégrité et la transparence de l’administration publique sont indispensables à l’efficience et à la croissance de la productivité du secteur public, dans la mesure où ces facteurs instaurent un climat d’investissement plus sûr. Elles conditionnent aussi la confiance dans les institutions publiques qui, selon une récente enquête de l’OCDE, est plus faible au Japon que dans la moyenne de l’OCDE, en particulier vis-à-vis des administrations publiques et des organes législatifs nationaux (OECD, 2022d). Dans l’ensemble, le niveau de corruption perçue est inférieur à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.26, parties A à C). De même, le Japon se conforme amplement aux meilleures pratiques de l’OCDE en ce qui concerne les échanges de renseignements avec les administrations fiscales, d’après les conclusions du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales. Cela étant, il peut encore améliorer sa législation relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, en renforçant l’efficacité de ses mesures de prévention, de ses mécanismes de surveillance, ainsi que des enquêtes et des poursuites menées (partie D). L’approfondissement des lignes directrices sur l’identification et la quantification des produits de la corruption transnationale à des fins de confiscation pourrait y contribuer.
Les lois relatives à l’éthique dans le secteur public sont plutôt strictes et, au cours des dernières années, le Japon a adopté plusieurs mesures pour mieux maîtriser la corruption. Cela étant, certains domaines dans lesquels les agents publics sont en relation avec le secteur des entreprises sont encore une source potentielle de collusion (OECD, 2021a). Le recrutement, par les entreprises japonaises, de hauts fonctionnaires partis dans le privé ou retraités depuis peu amplifie le risque de soumissions concertées dans les marchés publics (kansei dango) ou d’activités de lobbying illicites. S’agissant des risques de soumissions concertées, la Commission de la concurrence japonaise (JFTC, Japan Fair Trade Commission) s’est de plus en plus focalisée sur les activités de promotion de la concurrence, afin d’inciter les entreprises à modifier à titre préventif des comportements potentiellement illicites (Ae et al., 2023). Les récentes modifications apportées au programme de clémence, garantissant aux entreprises demandeuses qu’elles pourront bénéficier d’allègements supplémentaires des amendes administratives qui leur sont infligées en cas de soumission concertée, en fonction de leur degré de coopération avec les enquêteurs, ont renforcé la capacité de la JFTC à faire appliquer la loi ainsi que son pouvoir de dissuasion. L’utilisation de modèles algorithmiques de détection des pratiques collusoires dans le cadre des procédures de passation des marchés publics pourrait contribuer à améliorer la mise en œuvre de la politique de la concurrence (García-Rodríguez et al., 2022). De plus, l’extension à d’autres sphères de l’administration centrale des règles imposant la tenue d’audits externes et une plus grande transparence des relations avec les entreprises soumissionnaires, adoptées en 2020 par le ministère de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie pour ses propres grands marchés publics, améliorerait l’intégrité dans les marchés publics et l’efficacité de la dépense publique.
Il n’existe au Japon aucune loi ou exigence spécifique imposant aux agents publics de faire connaître leurs relations avec des groupes d’intérêt, malgré une réglementation indirecte de cette question dans la Loi sur l’éthique dans le service public. Imposer aux agents publics de faire état de leurs relations avec des lobbyistes en les inscrivant dans un registre accessible au public ou en publiant leurs agendas rendant compte de leurs rencontres avec des lobbyistes/groupes d’intérêts extérieurs, comme cela se pratique dans la plupart des pays de l’OCDE (OECD, 2021f), favoriserait une plus grande inclusivité du processus d’élaboration des politiques publiques. De même, la centralisation ou le regroupement des rapports sur les revenus et dépenses des législateurs relevant de financements politiques, actuellement communiqués au ministère de l’Intérieur et aux commissions préfectorales d’administration des élections (Noguchi, 2021), afin que ces rapports puissent être consultés en ligne et au moment voulu, seraient une bonne chose.
Malgré des progrès continus, la mise en œuvre de la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption reste incomplète. Le Japon doit donc redoubler d’efforts pour renforcer son action répressive dans les affaires de corruption transnationale et mettre en place un cadre approprié permettant aux juristes, auditeurs et comptables du secteur privé de détecter et de signaler les actes suspects. Il doit également envisager de réviser les orientations définies à l’intention du personnel des organismes de crédit à l’exportation concernant les procédures de signalement interne élaborées récemment (OECD, 2021g). En juin 2023, la Diète a approuvé des dispositions législatives destinées à porter les sanctions prévues en cas de corruption transnationale au niveau le plus élevé des peines applicables aux infractions économiques au Japon, à prolonger le délai de prescription et à élargir le périmètre de la compétence judiciaire. L’impact de ses réformes devra être évalué à mesure qu’elles seront mises en œuvre. Les modifications apportées à la Loi de 2004 sur la protection des lanceurs d’alerte, qui était entrée en vigueur à la mi-2022, ont considérablement renforcé les incitations du personnel des entreprises à dénoncer les infractions pénales ou administratives commises par leur employeur, mais n’ont pas instauré de sanctions à l’encontre des entreprises imposant des mesures de rétorsion aux membres de leur personnel ayant dénoncé leurs malversations (OECD, 2021g). Ces sanctions, conjuguées à l’adoption de systèmes de récompense dans ces situations, pourraient pourtant encourager les dénonciations, ce qui rendrait plus efficace la mise en œuvre des politiques de lutte contre la corruption.
Tableau 1.9. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant la productivité et la transformation numérique et mesures prises
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2021 |
---|---|
Accroître les dépenses ciblées sur la recherche-développement (R-D), l’investissement ainsi que l’enseignement et la formation, pour renforcer la croissance de la productivité. |
L’Agence nationale de recherche-développement (NEDO) dépensera 20 milliards JPY par an (jusqu’en 2027) pour subventionner les deux tiers des coûts de développement d’applications pratiques des jeunes entreprises de R-D, sous réserve que le tiers restant soit financé par des investissements (certifiés) en capital-risque. |
Favoriser les fusions, les acquisitions et les cessions de PME compte tenu des pénuries de main-d’œuvre, afin de promouvoir le regroupement des ressources managériales dans des entreprises viables. |
En plus des mesures existantes prévoyant des subventions, des reports de paiement d’impôts et des dépenses déductibles au titre des fusions-acquisitions pour faciliter les transmissions d’entreprises, une nouvelle disposition entrée en vigueur en avril 2023 autorise les entreprises à déduire du montant dû au titre de l’impôt sur les sociétés 25 % de la valeur d’un investissement en capital-investissement dans une jeune entreprise. |
Élaborer des registres de base pour relier les bases de données des administrations publiques. |
L’Agence du numérique vient de commencer à élaborer un registre de base. |
Remédier aux problèmes de réglementation et de respect de la vie privée pour favoriser un usage accru du numérique. |
La Commission spéciale sur la refonte numérique de l’administration examine actuellement les lois et règlements en vue d’en éliminer les dispositions fondées sur des moyens analogiques tels que des inspections visuelles ou des notifications sur papier. |
Améliorer l’offre de services publics numériques, la prise en compte des besoins des usagers et l’efficience économique dans le secteur public, par exemple en s’appuyant sur l’expérience du secteur privé. |
L’Agence du numérique conduit des examens des projets, en collaboration avec le secteur privé. |
Continuer de développer les modes de financement bénéficiant aux entreprises caractérisées par un niveau élevé de capital immatériel. |
Le gouvernement présentera un projet de loi autorisant les entreprises innovantes à obtenir des financements de croissance auprès des banques en apportant en garantie l’intégralité de leurs actifs économiques. L’Office des brevets du Japon a ouvert un portail sur le financement de la propriété intellectuelle pour diffuser des lignes directrices consacrées à l’évaluation des modèles économiques des PME caractérisées par un niveau élevé de capital immatériel. |
Élargir l’accès aux formations à l’entrepreneuriat et aux financements, en particulier pour les femmes. |
Les pouvoirs publics ont mis en place un réseau national de 290 organisations fournissant aux entrepreneuses des conseils et des services de mentorat. Au cours de l’exercice budgétaire 2022, la Société japonaise de financement (JFC, Japan Finance Corporation) devrait augmenter les fonds affectés aux prêts subventionnés accordés aux dirigeantes d’entreprises nouvelles et récentes (moins de sept ans). |
Favoriser une présence plus importante des femmes dans les STIM, par exemple au moyen de programmes de mentorat. |
Davantage d’efforts sont mobilisés pour élargir le programme phare « Riko-Challenge », soutenu par 865 organisations, qui encourage les lycéennes à s’orienter vers des carrières dans les STIM. |
Continuer de travailler avec les entreprises pour réformer les systèmes de rémunération à l’ancienneté et promouvoir les embauches en milieu de carrière. |
En 2022, pour favoriser les embauches en milieu de carrière dans les entreprises de 301 salariés ou plus, le Japon a pris une disposition aux termes de laquelle ces entreprises ont l’obligation de déclarer la part de leurs effectifs en milieu de carrière pour recevoir des subventions. |
1.6. Atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 nécessitera des efforts considérables
1.6.1. Objectifs et plans de réduction des émissions
Le Japon s’est fixé des objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) : il souhaite les faire baisser de 46 % par rapport à leur niveau de 2013 d’ici à 2030, et ramener à zéro ses émissions nettes de GES à l’horizon 2050. Après avoir connu un pic en 2013, les émissions sont en recul (Graphique 1.2 ci-avant), sous l’effet conjugué de la diminution de l’intensité énergétique et de l’accroissement de la part des renouvelables (Graphique 1.27, parties A et B). Le secteur de l’énergie reste le principal émetteur de GES, devant l’industrie manufacturière et les transports (partie C). Les pouvoirs publics entendent faire passer la part des combustibles fossiles dans les approvisionnements totaux en énergie de 84 % au cours de l’exercice budgétaire 2022 à 67 % sur l’exercice budgétaire 2030 (partie D). De plus, la Stratégie pour une croissance verte mentionnait comme point de référence destiné à servir de base de discussion un mix électrique en 2050 composé de 50 à 60 % d’électricité d’origine renouvelable, de 30 à 40 % d’électricité d’origine nucléaire ou thermique à flamme avec captage, utilisation et stockage du carbone (CUSC), et de 10 % d’électricité produite à partir d’hydrogène ou d’ammoniac (METI, 2020b). Il n’existe cependant pas de structure officielle du mix électrique en 2050, compte tenu de la forte incertitude qui prévaut, notamment concernant les différentes technologies, et de la diversité des scénarios envisageables pour atteindre les objectifs visés à l’horizon 2050 (METI, 2021).
Il convient de saluer l’aspiration renouvelée du Japon à réduire ses émissions, dont témoigne son récent Plan-cadre pour une politique de transformation écologique (Basic Plan for Green Transformation (GX) Policy) (Government of Japan, 2023c ; Encadré 1.8), en combinant mesures d’innovation, investissements verts, financement de la transition, réglementation, collaboration internationale et tarification du carbone. Le gouvernement, qui prévoit de lever 20 000 milliards JPY grâce à des obligations de transition destinées à financer la transformation écologique (GX Economy Transition Bonds) afin de réussir à mobiliser environ 150 000 milliards JPY d’investissements privés et publics au cours des 10 prochaines années, a établi une ventilation des besoins d’investissement dans différents domaines (Le Japon dispose de solides capacités pour faire face au changement climatique (INFORM, 2023), mais il est aussi fortement exposé aux risques liés au changement climatique (IEA, 2021), en tant qu’État insulaire situé dans une région caractérisée par des typhons d’une intensité croissante. Environ 40 % de la population (et des installations des entreprises) sont exposés au risque d’inondation, qui s’est traduit par exemple en 2019 par des dégâts d’un montant de 2 100 milliards JPY. Au-delà de leur impact sur les vies humaines, ces catastrophes naturelles ont un coût économique considérable, qui peut peser sur la sphère réelle de l’économie, notamment sur les prix des terrains et les établissements financiers, en particulier sur les banques régionales (Ashizawa, 2022). Le plan national d’adaptation, présenté en 2021 et élaboré sur la base des risques liés au climat identifiés dans un rapport d’analyse d’impact publié tous les cinq ans, décrit les mesures que prévoit d’adopter le gouvernement en matière de prévention et de contrôle des catastrophes dans l’ensemble des secteurs (NIES, 2023). En septembre 2023, toutes les préfectures ont élaboré des plans locaux d’adaptation au changement climatique en vertu de la loi sur l’adaptation au changement climatique, et les communes définissent aussi progressivement leurs propres plans. La mise en place de centres locaux d’adaptation au changement climatique a été menée à bien dans 41 préfectures (NIES, 2023). Il est crucial de veiller à ce que les informations soient partagées de manière efficace entre tous les niveaux d’élaboration de l’action publique, pour que les mesures préventives d’adaptation soient en phase avec les spécificités locales, et les autorités pourraient aussi envisager de prendre des mesures pour améliorer la disponibilité et l’utilisation d’instruments d’assurance contre les risques naturels. Il faudrait continuer d’intégrer des politiques et des mesures en faveur de la résilience climatique dans les plans à long terme relatifs à l’énergie et au climat, afin de rendre le secteur énergétique plus résilient face aux aléas climatiques.
Graphique 1.28). Ces fonds seront probablement investis dans des technologies existantes ou encore en développement. Des obligations à 5 ans et à 10 ans (pour un montant approximatif de 800 milliards JPY dans chaque cas) doivent être émises en février 2024 sous la dénomination d’« obligations de transition climatique japonaises », après avoir fait l’objet d’une certification internationale par une tierce partie. Le remboursement complet des obligations est prévu en 2050 et devrait être financé par les recettes tirées des mesures de tarification du carbone qui seront bientôt appliquées.
Encadré 1.8. Plan-cadre pour une politique de transformation écologique
Le Plan-cadre pour une politique de transformation écologique (Basic Plan for Green Transformation (GX) Policy) définit une feuille de route à dix ans intégrant des objectifs de décarbonation, qui repose sur quatre grands axes. Premièrement, la stratégie de tarification du carbone propice à la croissance s’appuiera sur un soutien aux investissements en amont via des obligations de transition destinées à financer la transformation écologique (GX Economy Transition Bonds) pour augmenter la part des sources d’énergie non fossiles et faciliter la R-D dans les technologies nouvelles et vertes, sur l’application d’une surtaxe pour la transformation écologique (sur l’approvisionnement en combustibles fossiles), et sur un système d’échange de quotas d’émission qui devrait être progressivement mis en place au cours des dix prochaines années (voir ci-après). Deuxièmement, il est prévu de faire appel à la réglementation, par exemple en autorisant le déploiement de l’éolien en mer jusque dans les zones économiques exclusives, afin de stimuler l’investissement privé via l’assistance à long terme et le soutien à la R-D. Renforcer la réglementation, en particulier les normes de performance énergétique des bâtiments, aidera à ramener à zéro la consommation énergétique nette des bâtiments neufs résidentiels et professionnels d’ici à 2030, et de tous les bâtiments résidentiels et professionnels d’ici à 2050. Troisièmement, le Japon s’efforcera de promouvoir de nouvelles méthodes de financement destinées à soutenir les entreprises, en agissant au niveau international et en proposant une aide à l’investissement dans les technologies de transition telles que l’utilisation de l’ammoniac. Quatrièmement, le Japon s’attachera à soutenir les projets de décarbonation régionaux et mondiaux. On peut citer à titre d’exemple la création de la communauté asiatique zéro émission (AZEC, Asia Zero Emissions Community), une plateforme de coopération destinée à aider les pays d’Asie partenaires à concrétiser la transition énergétique grâce une coordination de l’action publique et un soutien global concernant à la fois les aspects technologiques et financiers et les ressources humaines. Le Japon prévoit en outre d’élargir le mécanisme de crédit conjoint, un mécanisme bilatéral de crédits compensatoires destiné à favoriser le déploiement des technologies de décarbonation de pointe dans les pays partenaires.
Le Japon dispose de solides capacités pour faire face au changement climatique (INFORM, 2023), mais il est aussi fortement exposé aux risques liés au changement climatique (IEA, 2021), en tant qu’État insulaire situé dans une région caractérisée par des typhons d’une intensité croissante. Environ 40 % de la population (et des installations des entreprises) sont exposés au risque d’inondation, qui s’est traduit par exemple en 2019 par des dégâts d’un montant de 2 100 milliards JPY. Au-delà de leur impact sur les vies humaines, ces catastrophes naturelles ont un coût économique considérable, qui peut peser sur la sphère réelle de l’économie, notamment sur les prix des terrains et les établissements financiers, en particulier sur les banques régionales (Ashizawa, 2022). Le plan national d’adaptation, présenté en 2021 et élaboré sur la base des risques liés au climat identifiés dans un rapport d’analyse d’impact publié tous les cinq ans, décrit les mesures que prévoit d’adopter le gouvernement en matière de prévention et de contrôle des catastrophes dans l’ensemble des secteurs (NIES, 2023). En septembre 2023, toutes les préfectures ont élaboré des plans locaux d’adaptation au changement climatique en vertu de la loi sur l’adaptation au changement climatique, et les communes définissent aussi progressivement leurs propres plans. La mise en place de centres locaux d’adaptation au changement climatique a été menée à bien dans 41 préfectures (NIES, 2023). Il est crucial de veiller à ce que les informations soient partagées de manière efficace entre tous les niveaux d’élaboration de l’action publique, pour que les mesures préventives d’adaptation soient en phase avec les spécificités locales, et les autorités pourraient aussi envisager de prendre des mesures pour améliorer la disponibilité et l’utilisation d’instruments d’assurance contre les risques naturels. Il faudrait continuer d’intégrer des politiques et des mesures en faveur de la résilience climatique dans les plans à long terme relatifs à l’énergie et au climat, afin de rendre le secteur énergétique plus résilient face aux aléas climatiques.
1.6.2. Tourner la page des combustibles fossiles
Le Japon a prévu de prendre des mesures qui peuvent augmenter la part de la production électronucléaire dans l’approvisionnement en électricité : redémarrer autant de réacteurs de puissance que possible, prolonger au-delà de la limite actuelle de 60 ans la durée d’exploitation de ceux qui sont en service, avec la conduite d’examens réguliers par l’autorité de sûreté, et construire des réacteurs de la « prochaine génération ». Il compte actuellement 33 réacteurs opérationnels parmi lesquels, en mai 2023, 10 avaient été redémarrés et 7 avaient été soumis avec succès à l’examen de l’autorité nationale de radioprotection et de sûreté nucléaire. La remise en service des centrales nucléaires japonaises nécessite la réalisation d’un examen technique indépendant par l’autorité de sûreté pour s’assurer que les normes de sûreté renforcées sont bien respectées, et une collaboration avec les collectivités locales pour retrouver l’adhésion du public. Depuis l’accident survenu à la centrale de Fukushima Daiichi en 2011, les normes de sûreté ont été durcies et, selon une enquête de l’Asahi Shimbun de février 2023, 51 % de la population est favorable au redémarrage des réacteurs, soit le pourcentage le plus élevé depuis une décennie, ce qui tient en partie à la crise liée aux prix de l’énergie. Les délais d’inspection et de redémarrage relativement longs créent néanmoins des incertitudes.
L’hydrogène, l’ammoniac et la technique du captage, de l’utilisation et du stockage du carbone (CUSC) devraient contribuer de manière essentielle à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050. Les pouvoirs publics ont révisé leur stratégie pour l’hydrogène et s’emploient à introduire la co-combustion de l’ammoniac dans les centrales à charbon, afin d’en réduire les émissions de CO2. L’augmentation de la production d’électricité à partir d’hydrogène ou d’ammoniac dépendra de la baisse des coûts de production, de transport et de stockage, ainsi que des résultats de la R-D dans le domaine. Le Japon devrait également continuer d’être le chef de file du développement des chaînes internationales d’approvisionnement des filières hydrogène et ammoniac, qui sont encore limitées, et de promouvoir le partage des connaissances à l’échelle internationale. Étant donné la part importante de la R-D publique dans ces filières, il sera indispensable de conduire des évaluations systématiques pour apporter les ajustements requis aux moments opportuns.
Pour atteindre l’objectif consistant à réduire à 19 %, à l’horizon 2030, la part de l’électricité produite avec du charbon dans le mix énergétique, il est notamment prévu de réaliser des gains d’efficacité énergétique, de mettre à l’arrêt progressivement les centrales à charbon inefficaces, ainsi que de mettre au point des centrales à charbon « prêtes pour le CUSC » ou encore la co-combustion de l’ammoniac dans les centrales à charbon. Le Japon aura cependant du mal à concilier sa dépendance persistante à l’égard du charbon et son engagement de ramener à zéro ses émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050. Étant donné la durée de vie moyenne élevée, de 40 ans, des centrales à charbon, il est primordial de planifier clairement l’arrêt progressif des centrales à charbon inefficaces, pour neutraliser le risque d’« actifs échoués », tout en augmentant la puissance installée alternative, notamment nucléaire et renouvelable, afin de promouvoir la sécurité énergétique et l’efficience économique. Le Japon prévoit de construire des centrales à charbon et à gaz « prêtes pour le CUSC », mais il reste encore beaucoup d’incertitudes concernant les possibilités de transposer à grande échelle les technologies CUSC de façon rentable. À ce titre, la réalisation d’investissements majeurs dans de nouvelles centrales à charbon devrait être subordonnée aux progrès accomplis dans la mise au point de nouvelles technologies de décarbonation et à une analyse coûts-avantages.
La forte teneur en carbone des ressources énergétiques utilisées (le charbon, par exemple) est également à l’origine d’émissions élevées dans le secteur résidentiel, malgré la consommation d’énergie par habitant relativement faible (Hoeller et al., 2023). Le Japon est l’un des 16 pays de l’OCDE à avoir explicitement fixé des objectifs et pris des engagements climatiques relatifs au secteur du bâtiment, dans la perspective de parvenir à une consommation annuelle nette d’énergie primaire égale à zéro (« énergie nulle ») dans tous les bâtiments résidentiels et professionnels neufs d’ici à 2030 et dans l’ensemble du parc immobilier en moyenne d’ici à 2050 (MLIT, 2022). Les plans destinés à simplifier les normes de construction et la loi révisée sur les économies d’énergie dans le bâti, entrée en vigueur en juin 2022, qui dispose que tous les nouveaux bâtiments construits à compter de 2025 devront respecter les normes de performance énergétique, sont bienvenus. Les efforts actuellement mobilisés pour favoriser la décarbonation des bâtiments existants, comme les aides financières à la rénovation énergétique et la promotion de l’utilisation des renouvelables dans le bâti, devraient être poursuivis.
Généraliser l’usage des énergies renouvelables peut aider à atteindre les objectifs climatiques, renforcer la sécurité énergétique et améliorer l’accessibilité financière. Le Japon dispose d’un potentiel élevé de production d’électricité d’origine éolienne en mer et marémotrice (il possède le sixième littoral le plus long du monde et la zone économique exclusive la plus large) ainsi que des ressources géothermiques importantes (les troisièmes du monde, équivalentes à dix centrales nucléaires). Cependant, la part de ces sources dans l’approvisionnement en électricité reste modeste, tout comme les objectifs que le pays s’est fixés en la matière, et le déploiement des renouvelables pourrait être accéléré. Les coûts d’installation des renouvelables sont relativement élevés au Japon en raison du peu de terrains disponibles à un prix abordable, des coûts de main d’œuvre élevés et des exigences de sécurité spécifiques pour la protection contre les catastrophes naturelles. Cependant, réduire les coûts est possible, notamment en accroissant la concurrence (IEA, 2021). Il sera également essentiel d’améliorer l’acceptation sociale des énergies renouvelables (comme l’éolien en mer) et de réaliser des investissements complémentaires dans les infrastructures de réseau, conjugués à des mesures de gestion de la demande et à des aides ciblées à la R-D.
À l’échelle de la zone OCDE, le financement de la R-D, la simplification des processus de planification et le subventionnement sont des mécanismes qui ont permis une réduction sensible des coûts des renouvelables et une hausse de l’investissement privé dans les technologies énergétiques propres. Ainsi, les politiques publiques ont contribué au déploiement de l’éolien en mer au Danemark et au Royaume‑Uni (Encadré 1.9). Étant donné l’ampleur des investissements nécessaires, un système efficace de délivrance de permis et d’autorisations devrait venir compléter les dispositifs existants, tels que le soutien technologique à l’innovation et les subventions. Par conséquent, les autorités devraient continuer à prendre des mesures telles que l’allongement de la durée des concessions sur les fonds marins pour les projets éoliens en mer, qui a été portée en 2019 de 2-3 ans à 30 ans.
Les incertitudes qui entourent certaines trajectoires de réduction des émissions, parce que les technologies ne sont pas encore rentables ou pourraient ne pas suffisamment être acceptées par le public, exigent une planification des aléas. Étant donné les changements technologiques, il est indispensable de se demander régulièrement si les stratégies, politiques et instruments existants doivent être révisés, et de cartographier les scénarios et les feuilles de route énergétiques en envisageant plusieurs trajectoires possibles de développement des sources d’énergie.
Les efforts déployés actuellement pour augmenter la part des renouvelables dans le mix électrique pâtissent en partie de la faible intégration du réseau électrique. Sa fragmentation en réseaux régionaux, avec deux fréquences différentes et des capacités d’interconnexion limitées, contraint le réseau de transport et de distribution (OECD, 2021a ; IEA, 2021). Une prime d’achat applicable à l’électricité d’origine renouvelable a été introduite en avril 2022. En permettant aux producteurs d’électricité de toucher une subvention fondée sur le prix de gros du marché, plus un prix marginal, cette prime d’achat lie les recettes des producteurs au prix du marché et fournit davantage d’incitations à augmenter l’offre pendant les pointes de demande. Les pouvoirs publics ont également entrepris de modifier la réglementation sur les systèmes de stockage d’énergie en batteries pour atténuer les contraintes de réseau. L’Organisation de coordination transrégionale des gestionnaires de réseau de transport a récemment révisé un plan à long terme en faveur d’une large interconnexion des réseaux à l’horizon de l’exercice budgétaire 2050, prévoyant des investissements estimés aux alentours de 7 000 milliards JPY (OCCTO, 2023). Trois interconnexions régionales devraient entrer en service au cours de l’exercice budgétaire 2027, comme cela avait été recommandé dans l’Étude économique de 2021.
Il est possible d’améliorer la concurrence sur les marchés de l’électricité. En 2020, s’est achevée la séparation juridique des branches du transport et de la distribution et des branches de la production et de la vente de détail de dix entreprises d’électricité verticalement intégrées. Néanmoins, de récentes affaires de mauvaise gestion des données des clients – des gestionnaires de réseau de transport et de distribution ont partagé des informations sur leurs clients avec des entreprises de vente de détail – soulèvent des inquiétudes au sujet de la concurrence (The Mainichi, 2023). Les faibles sanctions prévues en cas de non-conformité pourraient être un facteur. La Commission de surveillance des marchés de l’électricité et du gaz, créée en 2015 pour veiller au jeu de la concurrence, peut conduire des enquêtes et formuler des recommandations, mais n’a pas formellement compétence pour réguler les marchés (IEA, 2021). Afin de stimuler la concurrence et l’investissement, il conviendrait de renforcer ses moyens de contrôle du respect des lois et règlements par les entreprises en place, par exemple en l’habilitant à décider des mesures d’exécution à prendre, au lieu de formuler uniquement des recommandations à l’intention du ministère.
Encadré 1.9. L’éolien en mer au Royaume‑Uni
Le Royaume‑Uni est le premier marché de l’éolien en mer de la zone OCDE, avec actuellement une puissance installée totale en service de près de 14 gigawatts (GW), résultant d’augmentations de puissance de 1.2 GW par an en moyenne depuis 2015. Hornsea 2, la plus grosse ferme d’éoliennes en mer du monde (1.3 GW), située à 89 km au large des côtes du Yorkshire et entrée en service en août 2022, fournira de l’énergie à bas coût à 1.4 million de foyers.
Les politiques publiques ont joué un rôle essentiel dans le développement du secteur britannique de l’éolien en mer. Les mesures prises dans le secteur de la production d’électricité renouvelable pour protéger les investisseurs de la volatilité des prix de gros de l’électricité via des contrats de droit privé à long terme ont réduit les incertitudes. De plus, une équipe spéciale chargée de l’accélération du déploiement de l’éolien en mer a été constituée pour simplifier les processus de planification et d’autorisation, et la fréquence des cycles d’attribution de concessions sur les fonds marins a été progressivement accrue. Les projets éoliens en mer devraient également bénéficier, d’une part, des généreux abattements pour amortissements prévus dans tous les secteurs par le Budget 2023 pour soutenir l’investissement dans les machines et équipements et, d’autre part, des plans visant à ramener de quatre ans à un an le délai d’approbation des nouvelles fermes d’éoliennes en mer.
Source : AIE (2023), Renewable Energy Market Update – juin ; UK Department for Business and Trade (2023), Offshore Wind ; et Ørsted.
Les véhicules électriques et à pile à combustible pourraient contribuer de façon décisive à la réduction des émissions dans le secteur des transports. Pour atteindre son objectif de 100 % de ventes de voitures particulières à motorisation électrique, une catégorie qui comprend les hybrides non rechargeables, les hybrides rechargeables et les voitures à hydrogène, le pays a besoin de plus d’investissements, d’une meilleure réglementation, d’un approvisionnement en électricité suffisant et de réseaux intelligents. Il sera crucial de déterminer dans quelle mesure la hausse de la part des véhicules électriques influe sur la demande d’électricité et sur l’intégration des réseaux, ainsi que de prévoir une planification attentive des infrastructures électriques, la gestion des pointes de demande et un mécanisme de tarification intelligente. Le nombre de véhicules électriques par borne de recharge est passé de 6.3 en 2016 à 13.9 en 2022 (sachant que la moyenne de l’OCDE est de 20). L’objectif de 150 000 points de recharge à l’horizon 2030, dont 30 000 bornes de recharge rapide, va dans la bonne direction étant donné l’ambition du pays d’augmenter considérablement les ventes de véhicules électriques. L’observation de la Norvège donne à penser que l’investissement public dans des bornes de recharge dans les grandes villes et le long des principales autoroutes peut stimuler l’investissement privé dans de telles infrastructures (D’Arcangelo et al., 2022). Réduire le taux de motorisation et favoriser d’autres modes de déplacement en reconfigurant la voirie, en optant pour un aménagement du territoire axé sur une proximité accrue, et en soutenant la mobilité partagée, peut aussi aider à décarboner le secteur des transports (OECD, 2022e).
Le Japon est un pionnier des voitures électriques, hybrides et à pile à combustible hydrogène, mais les véhicules entièrement électriques n’ont représenté que 2 % des ventes de voitures particulières neuves au cours de l’exercice budgétaire 2022, malgré des aides sous forme de subventions et d’incitations fiscales. L’augmentation de la demande mondiale de véhicules entièrement électriques et la réglementation en vigueur sur les marchés japonais d’exportation, qui exclut les hybrides des véhicules à émissions nulles, peuvent créer des risques pour le secteur automobile qui, jusqu’à récemment, se concentrait sur les hybrides. De plus, les capacités de production de véhicules à hydrogène restent faibles. Il sera important de suivre la façon dont le marché international évolue et d’évaluer régulièrement les mesures de soutien public des différentes technologies et leur contribution à la réduction des émissions pour orienter l’investissement vers les technologies les plus économiquement efficientes dans ce domaine.
1.6.3. Appliquer efficacement les mesures prévues de tarification du carbone
Les pays disposent de multiples panoplies de mesures pour atteindre la neutralité carbone. Le Japon a jusqu’à présent peu recouru à la tarification du carbone, avec une taxe sur les combustibles fossiles mise en place en 2012 et des systèmes volontaires, au périmètre relativement réduit, d’échange de quotas d’émission dans les préfectures de la Métropole de Tokyo et de Saitama (ICAP, 2022a and 2022b). Cependant, le déploiement progressif d’un système d’échange de quotas d’émission (SEQE) en trois phases, à compter de l’exercice budgétaire 2023, et le fait que le pays prévoit d’appliquer une surtaxe pour la transformation écologique (sur l’approvisionnement en combustibles fossiles) à compter de l’exercice budgétaire 2028 devraient venir s’ajouter à l’augmentation des investissements dans les infrastructures et à l’amélioration de la réglementation.
La mise en place d’un SEQE, recommandée dans de précédentes Études économiques, est une évolution positive, mais il conviendrait de réexaminer la période de déploiement prévue, car la durée actuellement envisagée pourrait limiter la contribution du dispositif aux objectifs fixés pour 2030. La première phase du SEQE japonais (un système volontaire de niveaux de référence et de crédits) a démarré en avril 2023 dans le cadre de la « GX League », une initiative lancée en 2022 pour faciliter la coopération entre le secteur public, le secteur privé et le monde universitaire au service de la décarbonation (METI, 2023c). Chaque entreprise de la ligue établira ses propres objectifs de réduction des émissions de GES, déclarera ses actions et ses investissements dans le domaine et procédera à des échanges volontaires de droits d’émission. En juillet 2023, on comptait déjà 564 entreprises participantes, issues de divers secteurs parmi lesquels l’industrie manufacturière, la finance et les TIC, et représentant environ 40 % du total des émissions (y compris l’approvisionnement des ménages en électricité). À compter de l’exercice budgétaire 2026, le mécanisme de participation et de conformité deviendra obligatoire, avec notamment des objectifs fondés sur des directives établies par les pouvoirs publics, un système d’approbation par des tiers privés et un régime réglementaire plus strict, mais les détails du dispositif ne sont pas encore connus. Enfin, à partir de l’exercice budgétaire 2033, il est prévu de passer d’un système d’allocations à titre gratuit fondées sur des niveaux de référence à un système de vente aux enchères des quotas d’émission de CO2 dans le secteur de la production d’électricité. Des évaluations annuelles des performances de la première phase devraient être conduites pour ajuster le système peu après sa mise en place si nécessaire et pour clarifier les modalités prévues pour les phases suivantes.
La visibilité de l’action publique est essentielle pour favoriser les investissements verts et l’évolution des comportements (Berestycki et al., 2022). Étant donné l’absence de plafonds d’émission, le fait que la participation et la fixation d’objectifs sont volontaires, et l’allocation à titre gratuit de permis d’émission par les pouvoirs publics, la première phase se démarque des systèmes habituels et ne génère pas de recettes. C’est pourquoi il sera important de bien gérer la transition vers la deuxième phase qui doit instaurer la conformité obligatoire et l’allocation de permis d’émission par le régulateur sur la base des émissions antérieures ou des capacités des entreprises. Les mesures législatives nécessaires à la mise en œuvre de la deuxième phase du SEQE devraient être prises au cours des deux prochaines années. Elles devraient s’accompagner de l’annonce, bien en amont de la date de déploiement, de la liste des secteurs à forte intensité d’émission qui auront l’obligation de participer. Il pourrait aussi être utile d’instaurer un prix minimum pour les permis d’émission, comme en Californie. C’est pourquoi il est positif que les autorités prévoient de réexaminer la possibilité d’instaurer des prix minimum et maximum.
Si les allocations à titre gratuit peuvent initialement aider à préserver la compétitivité et à empêcher les fuites de carbone, y renoncer progressivement au profit d’un système d’enchères peut aider à corriger les éventuels problèmes qui viendraient fausser la répartition sur le marché, comme la pénalisation des nouveaux entrants, à générer des recettes et à augmenter l’efficacité d’atténuation du SEQE. Les allocations de permis à titre gratuit creusent un écart entre les prix marginaux et moyens du carbone, tout comme les abattements fiscaux (OECD, 2021h ; IEA, 2020). C’est pourquoi les plans prévoyant le passage à un système d’enchères à compter de 2033 devraient être mis à exécution. L’expérience internationale, notamment celle de l’Union européenne et de la Colombie‑Britannique, suggère que des SEQE bien conçus n’ont pas d’impact négatif sur l’emploi et les bénéfices des entreprises (OECD, 2021i ; Yamazaki, 2017). Par exemple, la redistribution des recettes vers les entreprises particulièrement touchées peut aider à faciliter la transition.
La marge d’amélioration du mécanisme de tarification du carbone est très importante (Graphique 1.29, partie A). Le prix actuel de 289 JPY (1.78 USD) par tonne de CO2 est un des plus faibles de la zone OCDE. Le prix effectif du CO2 est particulièrement bas dans le secteur manufacturier et dans celui de la production d’électricité (partie B). Il est positif que le pays prévoie d’appliquer une surtaxe pour la transformation écologique (sur l’approvisionnement en combustibles fossiles) à compter de l’exercice budgétaire 2028, mais sa portée et sa couverture restent à déterminer. Une mise en place tardive et un niveau initial sans doute faible pourraient limiter la contribution de cette mesure à la réalisation des objectifs fixés pour 2030, c’est pourquoi il conviendrait de réexaminer ces aspects. Le niveau et le champ d’application de cette surtaxe devraient être définis de manière que ses effets incitatifs soient suffisants et qu’elle égalise les coûts marginaux. Les spécificités du Japon, notamment sa large base industrielle et les prix élevés que paient les consommateurs finals pour l’électricité et le gaz naturel, peuvent alourdir l’impact d’une hausse des prix du carbone sur les ménages et les entreprises. Une part non négligeable des entreprises moins solides sur le plan financier dans les secteurs très émetteurs et les secteurs en aval pourraient être touchées ((IMF, 2023b ; Makoto, 2021). C’est pourquoi il pourrait être utile de prendre des mesures pour préparer les secteurs à fortes émissions au moyen de signaux clairs et d’un soutien au financement de la transition.
Le Japon devrait aussi utiliser les recettes tirées des mécanismes de tarification du carbone pour atténuer l’impact des mesures sur les ménages à faible revenu, ce qui devrait aller dans le sens d’une meilleure acceptation par la population. Selon une récente enquête de l’OCDE conduite auprès de plus de 1 900 personnes dans tout le Japon, 89 % des personnes interrogées sont d’accord avec l’affirmation selon laquelle le changement climatique est un problème important, et 85 % estiment que le Japon devrait agir pour lutter contre le changement climatique (Dechezleprêtre et al., 2022). Les mesures perçues comme plus efficaces et non régressives, comme les subventions aux technologies bas carbone et les règlements relatifs à l’isolation des bâtiments notamment, reçoivent davantage de soutien. L’utilisation prévue des recettes détermine largement la mesure dans laquelle la fiscalité du carbone est acceptée. Le public est plus favorable à une tarification du carbone à 45 USD par tonne de CO2 quand les recettes sont destinées à financer des infrastructures vertes et l’adoption des technologies propres, abaisser l’impôt sur le revenu ou financer des transferts monétaires vers les ménages les plus pauvres. Au contraire, les taxes sur les combustibles fossiles sans préaffectation des recettes figurent parmi les mesures les moins populaires (Graphique 1.30). Des campagnes d’information expliquant l’efficacité et les effets redistributifs des politiques climatiques peuvent substantiellement renforcer l’adhésion du public.
Tableau 1.10. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant les politiques de l’environnement et mesures prises
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2021 |
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Élaborer un plan de réduction des émissions assorti d’un calendrier concret et réaliste, y compris s’agissant des investissements nécessaires pour ajuster le mix énergétique et atteindre l’objectif consistant à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre (GES). |
Le plan de lutte contre le changement climatique (Plan for Global Warming Countermeasures) a été révisé en octobre 2021 pour satisfaire aux objectifs à l’horizon 2030. Il est réexaminé tous les ans et révisé tous les trois ans. |
Recourir davantage aux instruments économiques tels que la taxe sur le carbone, un système d’échange de quotas d’émission ou un marché de crédits carbone, tout en tenant compte de leurs effets sociaux et économiques, dans le cadre d’une stratégie plus vaste recouvrant également l’investissement et la réglementation. |
Le Plan-cadre pour une politique de transformation écologique (Basic Plan for Green Transformation (GX) Policy) prévoit des mesures d’investissement, de réglementation et de tarification du carbone. Un système d’échange de quotas d’émission a été lancé à titre expérimental au cours de l’exercice budgétaire 2023 et sera officialisé au cours de l’exercice 2026. La vente aux enchères des quotas d’émission dans le secteur de la production d’électricité sera progressivement mise en place à partir de l’exercice budgétaire 2033. Une surtaxe pour la transformation écologique (sur l’approvisionnement en combustibles fossiles) sera appliquée à partir de l’exercice budgétaire 2018 à certaines entreprises, comme les importateurs de combustibles fossiles. |
Investir davantage dans les capacités d’interconnexion et veiller à ce que les réseaux électriques régionaux soient organisés de manière à favoriser une augmentation de l’approvisionnement en électricité renouvelable. |
La construction de trois interconnexions régionales devrait s’achever d’ici à l’exercice budgétaire 2027. |
Recommandations concernant les politiques macroéconomiques et structurelles
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
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Accroître la résilience aux chocs |
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La politique monétaire demeure très accommodante, mais la gestion du dispositif de contrôle de la courbe des rendements a été assouplie depuis décembre 2022. L’inflation globale et l’inflation sous-jacente (hors produits alimentaires et énergie) mesurées par les prix à la consommation devraient s’établir aux alentours de 2 % en 2024‑25, et la croissance des salaires devrait s’accélérer. L’incertitude demeure néanmoins considérable. |
Continuer d’assouplir la gestion du dispositif de contrôle de la courbe des rendements et commencer à relever progressivement les taux directeurs, pour autant que les prévisions d’inflation continuent d’indiquer qu’elle devrait s’établir durablement aux alentours de 2 %. |
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Le système financier est exposé à des risques potentiels liés aux taux d’intérêt étrangers et à l’augmentation des prêts immobiliers et des prêts à l’étranger octroyés par les banques. Le remboursement du principal des prêts à taux zéro et intégralement garantis qui ont été consentis durant la pandémie crée des risques supplémentaires, en particulier pour les banques régionales. |
Élargir le champ de l’évaluation du risque systémique par les autorités de surveillance financière, afin de surveiller de près les risques de crédit potentiels, ainsi que les risques croissants liés aux taux d’intérêt étrangers. Envisager d’inclure dans la panoplie d’instruments macroprudentiels des dispositifs classiques relatifs aux emprunteurs, tels que le plafonnement du ratio prêt/valeur du bien (quotité de financement) ou service de la dette/revenu, afin de permettre leur mise en œuvre rapide le cas échéant. |
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Les mesures visant à protéger les ménages et les entreprises des conséquences de la pandémie et de la crise énergétique ont entraîné une hausse des dépenses publiques. |
Réduire le déficit budgétaire en supprimant progressivement les aides liées à la pandémie et à la crise énergétique. |
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Les chocs économiques survenus récemment ont accentué les difficultés budgétaires à moyen terme. Le ratio dette publique brute/PIB a atteint 245 % en 2022. Il est possible d’améliorer le cadre budgétaire, notamment la crédibilité des projections et des objectifs budgétaires, et l’évaluation des politiques publiques. |
En vue d’inscrire le ratio d’endettement public sur une trajectoire descendante, élaborer une feuille de route claire et crédible pour parvenir à un excédent primaire, en s’appuyant sur des mesures spécifiques en matière de dépenses et de fiscalité. Recourir aux collectifs budgétaires et aux fonds de réserve pour imprévus uniquement en cas de grave choc macroéconomique et en réaliser une évaluation a posteriori. Mettre en place une institution budgétaire indépendante. Améliorer l’élaboration des politiques fondée sur des données probantes et les examens de dépenses, en particulier pour les programmes pluriannuels. |
||
Le vieillissement de la population accentuera les tensions budgétaires, sachant que l’augmentation des dépenses de santé, de soins de longue durée et de retraite entre les exercices 2024 et 2040 devrait être de 17 000 milliards JPY environ (2.7 % du PIB prévu pour 2025) d’après des projections nationales. La proportion élevée des dépenses publiques de santé, conjuguée à la faible part laissée à la charge des patients, à la longueur des hospitalisations et à la fréquence des consultations médicales, ainsi qu’au système de paiement à l’acte, donne à penser qu’il est possible d’améliorer l’efficience des dépenses. Le nombre total de lits d’hôpital, notamment pour les soins de longue durée, et la durée moyenne des hospitalisations sont supérieurs à la moyenne de l’OCDE. L’absence de dossiers médicaux électroniques et intégrés nuit à l’efficience des dépenses. |
Allonger la période de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une pension de base à taux plein. Appliquer pleinement le système d’indexation macroéconomique aux prestations de retraite, même en période de déflation. Augmenter le taux de participation des personnes âgées au coût des soins de santé et de longue durée selon le principe de conditions de ressources en mettant en place un système efficace d’évaluation des revenus et du patrimoine. Passer progressivement à un système de rémunération en fonction des résultats afin de réduire le nombre de consultations médicales. Améliorer le rôle de filtrage joué par les médecins en soins de santé primaires. Décharger les hôpitaux des soins de longue durée en s’appuyant davantage sur les soins à domicile pour les personnes ayant des besoins légers ou modérés, et sur les soins en établissement pour les personnes ayant des besoins importants. Pour éviter qu’une réorientation des soins de longue durée vers la prise en charge à domicile ne conduise des femmes à quitter la population active, garantir une offre suffisante d’aidants professionnels ou de personnel infirmier rémunérés. Accroître le recours aux technologies numériques dans les services publics en améliorant la qualité et l’accessibilité de l’information. |
||
Les recettes fiscales sont proches de la moyenne de l’OCDE, mais la part des impôts sur la consommation (valeur ajoutée) et de l’impôt sur le revenu des personnes physiques est relativement faible. |
Accroître progressivement les recettes fiscales, notamment en relevant encore le taux de la taxe sur la consommation par petites hausses successives. |
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Renforcer la croissance de la productivité |
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Le taux d’investissement des petites et moyennes entreprises (PME) dans la recherche-développement (R‑D) est l’un des plus faibles de la zone OCDE. |
Rendre le crédit d’impôt en faveur de la R‑D remboursable ou rétablir la possibilité de le reporter pour inciter davantage les jeunes pousses (start-ups) innovantes et les PME en phase de démarrage à investir. |
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Malgré un dispositif généreux de crédit d’impôt, la part de la R-D financée par des entreprises qui est réalisée dans des établissements universitaires est faible, tout comme la part des projets de recherche fondamentale dans les dépenses totales de R-D. |
Afin de renforcer les liens entre les entreprises, les universités et les établissements publics de recherche, favoriser la mobilité du personnel en lui donnant la possibilité d’exercer à plusieurs endroits. Faire de l’exercice simultané d’activités dans différentes organisations un critère d’évaluation explicite pour les postes de recherche permanents et l’évolution de carrière des chercheurs. Veiller à ce que le fonds de dotation universitaire renforce véritablement les capacités de recherche fondamentale en assurant un suivi et une évaluation des projets de recherche menés par les universités sélectionnées. |
||
La proportion de diplômés dans les filières STIM est faible, en particulier parmi les femmes. |
Favoriser une présence plus importante des femmes dans les filières STIM, par exemple en mettant en place des programmes de mentorat. |
||
La dynamique des entreprises est faible, les créations d’entreprises et les sorties d’entreprises peu productives étant relativement peu nombreuses. Du fait de la générosité des garanties publiques accordées sur les prêts consentis aux PME, les banques sont moins incitées à améliorer leur gestion du risque de crédit. |
Promouvoir le regroupement des ressources managériales dans des PME viables en renforçant les incitations réglementaires en faveur du capital-risque et des opérations de fusions et acquisitions. Réduire encore le taux de couverture des garanties publiques de prêts. |
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Les entrées d’investissement direct étranger (IDE) restent limitées, alors que le niveau des obstacles réglementaires est proche de la moyenne de l’OCDE. |
Continuer de faire diminuer les obstacles aux entrées d’IDE, en réduisant les restrictions explicites dont elles font l’objet et en activant le marché des fusions et acquisitions. |
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En dépit des mesures prises récemment pour améliorer la maîtrise de la corruption, le système de passation des marchés publics reste exposé au risque de soumissions concertées. |
Étendre à d’autres sphères de l’administration centrale les règles d’attribution de marchés publics adoptées par le ministère de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie, qui imposent des audits externes et une plus grande transparence avec les entreprises soumissionnaires. |
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Parvenir à la neutralité en gaz à effet de serre d’ici à 2050 |
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La réalisation des objectifs climatiques ambitieux du Japon repose sur plusieurs trajectoires de réduction des émissions, qui dépendent de technologies incertaines qui ne sont pas encore rentables, et du nucléaire. |
Améliorer la planification des aléas en établissant des scénarios et des feuilles de route énergétiques qui tiennent compte des incertitudes entourant les trajectoires d’évolution des technologies. |
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La fragmentation du réseau électrique entrave l’intégration rentable et accrue de sources d’énergie renouvelables. Il est possible d’accroître encore la concurrence sur les marchés de l’électricité. |
Continuer d’investir dans les infrastructures de transport et de distribution, en se fondant sur des analyses coûts-avantages, et améliorer le réseau électrique de manière à favoriser une augmentation de l’approvisionnement en électricité renouvelable. Renforcer les pouvoirs réglementaires de la Commission de surveillance des marchés de l’électricité et du gaz, afin qu’elle puisse notamment infliger des sanctions suffisantes en cas de non-respect de la législation et de la réglementation. |
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Il est prévu de mettre en place un système national d’échange de quotas d’émission (SEQE) et de relever les prix du carbone, qui sont actuellement bas, mais la contribution de ce système à la réalisation des objectifs fixés à l’horizon 2030 pourrait être limitée par sa mise en œuvre progressive. |
Aligner la conception du SEQE sur les meilleures pratiques internationales en matière de participation obligatoire et d’attribution des quotas d’émission par l’organisme de réglementation, et passer progressivement à leur vente aux enchères, comme prévu. Veiller à ce que les mesures prévues de tarification du carbone fournissent des incitations suffisantes et envisager d’accélérer leur mise en œuvre de façon qu’elles contribuent à la réalisation des objectifs fixés à l’horizon 2030. Consacrer une partie des recettes tirées de la tarification prévue du carbone aux mesures de soutien aux ménages à faible revenu et à l’investissement dans des technologies et des infrastructures bas carbone. |
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