La pandémie a frappé une économie qui souffrait déjà d’une faible croissance (Graphique 1). La contraction de l’activité en 2020 a été sévère, malgré la rapidité de l’intervention des pouvoirs publics, et la pauvreté s’est accrue. La reprise s'annonce lente, sur fond de ralentissement de la croissance mondiale, d'atonie persistante de la demande intérieure et d’incertitudes concernant le fonctionnement des institutions politiques. Le niveau élevé de la dette publique rend indispensable une réduction des dépenses publiques courantes et complique la conduite de la politique monétaire.
La récession a été d'une ampleur sans précédent. La plupart des secteurs ont enregistré une contraction, surtout le tourisme et les autres services à forte intensité de main-d'œuvre, qui ont été particulièrement touchés par les mesures pour freiner la propagation du virus. L’investissement a chuté brutalement, et la consommation privée a reculé à cause des pertes de revenu. Cette évolution n'a été que partiellement compensée par la vigueur de la demande extérieure pour les services informatiques et de communication, les produits médicaux et l’huile d'olive et par la hausse de l'activité dans la construction. Bien que les recettes du tourisme se soient effondrées, le déficit de la balance courante s’est réduit, grâce à la faiblesse de la demande d'importations et à l’augmentation des transferts des tunisiens résidant à l’étranger.
Le système de santé est sous pression. La pandémie de COVID-19 a été virulente, mais la vaccination progresse et la situation sanitaire s’améliore lentement. La fuite de cerveaux chez les professionnels de santé a augmenté et constitue une source de préoccupation.
Les répercussions sociales sont très lourdes. Le chômage, déjà élevé, a encore augmenté, les jeunes étant particulièrement touchés. Dans le secteur informel, les travailleurs ont souffert d’une baisse sévère de leur revenu. Les fermetures d'établissements scolaires et les faiblesses de l’enseignement à distance ont eu des conséquences particulièrement graves sur les enfants issus de foyers à faible revenu. Le nombre de Tunisiens qui émigrent à l’étranger est reparti à la hausse.
La reprise sera lente (Tableau 1), et les risques de révision à la baisse des prévisions sont considérables. Les restrictions à la mobilité freinent le redémarrage du tourisme et pèsent sur les services fortement intensifs en main-d'œuvre. Le niveau élevé du chômage bride la consommation privée, les incertitudes politiques pèsent sur la mise en œuvre des réformes et l’investissement et l’affaiblissement de la demande extérieure retarde le redressement de l'activité manufacturière. Par contre, la mise en service de nouveaux champs de pétrole et de gaz va stimuler dans le court terme la production d’énergie. Les tensions inflationnistes ont repris en 2021 et elles pourraient s’accentuer à cause de la flambée des prix des matières premières provoquée par la guerre en Ukraine. Il convient de minimiser le risque d’une spirale prix/salaires. La hausse des prix des matières premières pèse sur la balance courante et sur le déficit budgétaire, dans la mesure où la Tunisie est un importateur net d’hydrocarbures et de céréales, et que les subventions énergétiques y sont encore élevées.