Examiner la réglementation existante

2. Principales approches en matière d’examen

Il est généralement nécessaire de recourir à différentes approches pour effectuer un examen ex post de la réglementation. Globalement, ces approches vont des examens programmés aux examens initiés ponctuellement (ad hoc) ou dans le cadre de processus de « gestion » continue.

La plupart des pays ont adopté plusieurs de ces approches (OCDE, 2015[1]) en puisant dans les différentes catégories d’examens répertoriées ci-après (Tableau 2.1). Cette classification s’inspire d’une taxonomie élaborée par la Commission australienne de la productivité.

Tableau 2.1. Approches et mécanismes en œuvre dans les examens ex post de la réglementation

Examens programmés	Examens ad hoc	« Gestion » continue
Règles de caducité Examens prévus dans la législation Autres examens de suivi	Bilans publics Examens fondés sur des principes Examens approfondis Analyse comparative	Règles régissant les flux réglementaires Objectifs quantitatifs d’allègement de la charge administrative

Source : Adapté de (Australian Productivity Commission, 2011[2]).

Examens « programmés »

Comme nous l’avons indiqué, définir et programmer les examens bien à l’avance présente de nombreux avantages. Cela peut se faire de différentes façons.

Si un règlement ou une loi est susceptible d’avoir des retombées importantes sur le plan social ou économique, notamment parce qu’on y trouve des éléments innovants ou parce que son efficacité est incertaine, il est souhaitable d’insérer dans la réglementation ou la législation elle-même des exigences en matière d’examen.

Dans de tels cas, un examen peut s’avérer crucial pour garantir le nécessaire « apprentissage par la pratique » et s’assurer de l’absence de conséquences non intentionnelles. Prévoir un examen dans la loi habilitante renforce les chances que cet examen soit effectué au moment opportun et qu’il aborde les principaux sujets de préoccupation. C’est aussi un moyen de signaler publiquement le souhait du gouvernement d’obtenir de bons résultats, ce qui est important. La réglementation australienne sur l’accès des tiers aux infrastructures économiques essentielles illustre bien cela. La législation initiale prévoyait explicitement un examen dans un délai de cinq ans, or à la suite de cet examen, elle a subi d’importantes modifications (Australian Productivity Commission, 2005[3]).

La majorité des pays de l’OCDE insèrent au moins quelques exigences en matière d’examen dans leur réglementation, mais cette pratique est plus courante en Hongrie, en Corée et au Royaume-Uni (voir Encadré 2.1).

Encadré 2.1. Exemples d’exigences en matière d’examen prévues dans la réglementation

• Les documents d’orientation de la Hongrie en matière d’analyse d’impact de la réglementation (AIR) stipulent qu’il faut indiquer dans toute proposition réglementaire, au moment de son élaboration, s’il est nécessaire de définir une évaluation ex post dans le texte législatif. Cela signifie indiquer au cas par cas si une évaluation ex post sera réalisée et, si oui, à quel moment.

• En Corée, conformément à l’Article 8 de la Loi-cadre sur les règlements administratifs, l’ensemble des nouvelles lois et des nouveaux actes modificatifs ainsi que les lois subordonnées doivent prévoir une période d’examen effective, qui ne doit généralement pas dépasser cinq ans.

• Au Royaume-Uni, un examen obligatoire des règlements subordonnés est prévu lorsque ces règlements affectent soit des entreprises, soit un organisme bénévole ou communautaire. Le rapport doit énoncer les objectifs fixés, évaluer dans quelle mesure ils ont été atteints, déterminer si ces objectifs restent appropriés et, si c’est le cas, évaluer s’il serait possible de les atteindre à moindre frais. Le premier rapport doit être présenté dans les cinq ans suivant l’entrée en vigueur du règlement subordonné, suivi d’autres examens à une échéance de cinq ans.

Source : (OCDE, 2018[4]); (Legislation.co.uk, 2015[5]) Sections 28 à 32.

Les exigences de caducité constituent un mécanisme utile de « sécurité intégrée » garantissant que la réglementation subordonnée existante continue de servir les objectifs fixés au fil du temps.

La « caducité » désigne l’expiration automatique d’un règlement à une échéance donnée, sauf s’il a été reformulé. Conçues et mises en œuvre avec soin, les clauses de caducité permettent de supprimer de façon efficace des règlements devenus superflus ou qui ne sont plus rentables, tout en laissant la possibilité de plaider en faveur d’un renouvellement ou d’une modification de ces règlements.

Cette approche est normalement réservée aux règlements secondaires ou subordonnés car si on l’applique à la législation primaire, le coût et les perturbations qu’entraînerait la suppression d’une règle par inadvertance pourraient être importants. Un certain nombre de juridictions prévoient des dispositions distinctes visant à garantir que d’autres règlements seront examinés dans des délais prescrits (Encadré 2.2).

Encadré 2.2. Résumé des dispositions de caducité en place dans les pays de l’OCDE

Les données les plus récentes indiquent qu’un peu moins de la moitié des pays membres de l’OCDE ont mis en place, d’une façon ou d’une autre, des dispositions de caducité, et que celles-ci concernent plus souvent des règlements subordonnés que des lois primaires (OCDE, 2018[4]). Toutefois, dans la majorité des pays concernés, ces dispositions sont généralement prises au cas par cas.

Des dispositions de caducités plus standardisées ont été mises en place dans les pays suivants : Allemagne, Corée et France (3 à 5 ans pour les lois primaires et les règlements subordonnés), Mexique (5 ans pour les normes techniques relatives aux règlements subordonnés), Royaume-Uni (au plus tard 7 ans, avec un examen au bout de 5 ans pour les règlements subordonnés) et Australie (10 ans pour les règlements subordonnés). Les dispositions de caducité de la Corée reprennent les exigences générales du pays en matière d’examen (voir ci-dessus).

Source : (OCDE, 2018[4]) ; (OCDE/KDI, 2017[6]).

En tant que mécanisme de sécurité intégrée, les clauses de caducité ne se déclenchent normalement que longtemps après l’élaboration d’une réglementation, par exemple au bout de 5 à 10 ans. Les règles peuvent être structurées de manière à couvrir une large partie de la réglementation existante, mais elles peuvent aussi être sélectives ou comporter des exclusions spécifiques. Comme ces processus peuvent concerner un grand nombre de règlements, leur gestion doit être efficace afin d’éviter une surcharge d’examens. Par exemple, une étude récente de l’OCDE sur la gouvernance réglementaire en Corée a révélé qu’étant donné le nombre de règlements sur le point d’arriver à expiration, le personnel chargé des examens au sein du cabinet du Premier ministre disposait en moyenne d’un peu plus d’une journée à peine pour examiner chaque règlement concerné. De même, les processus mis en place doivent garantir la sécurité réglementaire, surtout lorsque ce travail est réalisé à proximité de la date d’« expiration ».

Dans certaines situations, il peut être utile de prévoir des examens de suivi dans des délais plus courts (1 à 2 ans), notamment lorsqu’une mesure réglementaire d’urgence s’avère nécessaire, lorsque l’évaluation réglementaire ex ante a été jugée inadéquate ou lorsque la réglementation a été mise en œuvre malgré des lacunes ou des risques de détérioration connus.

Les examens de suivi constituent un autre mécanisme de « sécurité intégrée », plus ciblé, destiné à détecter en temps utile tout impact négatif non intentionnel, avant que les coûts ne deviennent trop élevés (Encadré 2.3). Ils n’interviennent que dans des circonstances exceptionnelles. L’expérience indique que ces impacts sont plus probables lorsque les processus ex ante se sont avérés déficients ou ont été annulés.

Encadré 2.3. Exigences en matière d’examens de suivi

Les données de l’OCDE signalent que huit pays membres ont actuellement mis en place des exigences en matière d’examens de suivi : Australie, Corée, Hongrie, Irlande, Italie, Japon, Nouvelle-Zélande et Slovénie (OCDE, 2018[4]).

• En Australie, toute nouvelle réglementation ayant « un impact économique important ou généralisé » doit faire l’objet d’un examen dans un délai de cinq ans. En outre, un examen de suivi doit être effectué dans les deux ans en cas d’introduction, suppression ou modification significative d’un règlement sans qu’aucune analyse d’impact n’ait été fournie, y compris lorsque le Premier ministre accorde, en raison de circonstances exceptionnelles, une exemption aux exigences réglementaires de présenter une analyse d’impact. Le bureau régissant les bonnes pratiques réglementaires (Office of Best Practice Regulation) tient un registre public des examens de suivi en suspens et détermine si les agences se conforment aux meilleures pratiques.

• En Slovénie, lorsqu’un projet de loi a été présenté à l’Assemblée nationale sans analyse d’impact et qu’il est adopté dans le cadre d’une procédure d’urgence, un rapport doit être établi au bout de deux ans à compter de la date de mise en œuvre. Le rapport doit contenir une analyse d’impact dans les mêmes domaines qu’une analyse d’impact standard, et le rapport est ensuite transmis à l’Assemblée nationale pour information et publié sur le site web du gouvernement.

• En Corée, s’il existe des raisons particulières justifiant la mise en place immédiate d’un nouveau règlement (ou d’une modification), le chef du ministère à l’origine de cette proposition peut demander au Comité de réforme de la réglementation de prendre une décision d’urgence. Si le Comité décide qu’un règlement est urgent, il voit s’il est raisonnable d’envisager sa mise en place dans un délai de 20 jours et informe de ses conclusions le ministère qui l’a proposé. Le chef du ministère doit alors soumettre une analyse d’impact pour ce règlement dans les 60 jours suivant les conclusions du comité.

Source : OCDE (2017) ; (Australian Office of Best Practice Regulation, 2016[7]); (PISG Legal Information System, s.d.[8]) ; Loi-cadre sur les règlements administratifs 2013 (Corée).

La nécessité d’une « réglementation préalable » se fait souvent sentir dans des situations de crise, lorsqu’il faut agir vite et que les procédures normales sont trop longues. Elle peut également être motivée par un avis politique jugeant qu’il est utile de réglementer, sauf évaluation technique contraire. Bien que ces raisons puissent être un motif légitime de réglementation, les risques sont généralement plus importants dans de telles circonstances, ce qui justifie la mise en place d’un examen dans un délai plus court que dans le cadre d’un processus plus systématique.

Examens ad hoc à des fins particulières

Les examens doivent souvent être lancés de manière ponctuelle (ad hoc) en réponse à une question ou à une crise qui s’annonce, par exemple en cas de catastrophe naturelle ou de grave problème de santé publique. Ils peuvent également intervenir dans le cadre d’enjeux ou de problèmes plus généraux, comme les entraves à la concurrence, ou porter sur une activité économique ou un segment de la société spécifique, par exemple, sur le développement régional.

Les « bilans » publics de la réglementation fournissent l’occasion de faire périodiquement le point sur les problèmes constatés dans certains secteurs ou dans l’ensemble de l’économie.

Ces « bilans » sont utiles pour solliciter l’avis du public sur les problèmes et les priorités du moment. Ils peuvent également constituer un moyen efficace d’identifier les charges réglementaires cumulées ou de détecter les interactions négatives entre différentes réglementations (Graphique 2.1).

Compte tenu de leur étendue et des ressources nécessaires pour les réaliser, les bilans ne sont normalement exigés que peu fréquemment, à des intervalles allant de 5 à 10 ans. De plus, étant donné qu’ils sont motivés par des plaintes, ils doivent être accompagnés de processus de contrôle rigoureux avant d’aboutir à la formulation de recommandations. Par exemple, en Australie, le Groupe de travail du Premier ministre sur la réglementation de 2005 a adopté une approche consistant à sélectionner dans un premier temps les propositions qui semblent intéressantes, puis à les transmettre au ministère concerné pour commentaires avant de prendre une décision sur une recommandation (Regulation Taskforce, 2006[9]).

Graphique 2.1. Examens ad hoc de la réglementation existante au cours des 12 dernières années

Note : Les données proviennent de 34 pays membres de l’OCDE et de l’Union européenne.

Source : Indicateurs des enquêtes 2014 et 2017 sur la politique et la gouvernance réglementaires, http://oe.cd/ireg.

Il est également possible de restreindre les examens de type bilan à des questions de performance spécifiques ou à certains impacts préoccupants en utilisant un critère ou un principe de sélection uniforme.

Une telle approche étant plus sélective, elle est généralement plus facile à gérer que les bilans généraux et peut permettre une analyse plus approfondie (Encadré 2.4). La plupart des pays ont procédé à des examens de ce type à un moment donné au cours des 12 dernières années, comme l’indiquent les résultats d’enquête (voir le graphique ci-dessus). Les domaines d’intérêt les plus courants sont les effets anticoncurrentiels et les charges élevées que représente la mise en conformité (OCDE, 2016[10]) ; OCDE 2018).

Encadré 2.4. Exemples d’examens fondés sur des principes dans les pays de l’OCDE

• En Australie, dans le cadre d’un accord général de « politique nationale de la concurrence » entre les gouvernements des États et des territoires du Commonwealth, la législation ayant des effets anticoncurrentiels avérés a fait l’objet d’examens entre 1995 et 2005. Une nouvelle règle décisionnelle a été instaurée selon laquelle ces réglementations ne pouvaient être maintenues que si l’on pouvait démontrer a) qu’elles procuraient à la société des avantages nets supérieurs aux coûts et b) que les objectifs de la politique ne pouvaient être atteints qu’en entravant la concurrence. Environ 80 % des quelque 2 000 points législatifs concernés ont été examinés au cours de cette période et la majorité d’entre eux ont été supprimés ou modifiés. La juridiction a dans ce cas pu percevoir des « indemnités pour concurrence » de la part du gouvernement fédéral.

• Le Forum des entreprises danoises pour une meilleure réglementation a été lancé en 2012. Il vise à assurer le renouvellement de la réglementation des entreprises, dans le cadre d’un dialogue étroit avec le monde des affaires, en recensant les domaines représentant la charge la plus lourde pour les entreprises afin de proposer des mesures de simplification. Il peut s’agir, par exemple, de modifier les règles ou de réduire les délais de traitement. Treize thèmes sont actuellement couverts, allant de l’embauche de travailleurs étrangers aux obstacles à la croissance. Les parties intéressées peuvent soumettre des thèmes supplémentaires. Les propositions du Forum des entreprises sont soumises au principe « se conformer ou s’expliquer », selon lequel le gouvernement doit s’engager à mettre en œuvre les initiatives proposées ou, s’il choisit de ne pas le faire, en expliquer la raison. En octobre 2016, 603 propositions ont été envoyées au gouvernement, parmi lesquelles 191 ont été entièrement mises en œuvre et 189, partiellement. La réduction de charge annuelle cumulée associée à certaines initiatives a été estimée à 790 millions de couronnes danoises.

• L’Office de simplification du ministère italien de l’Administration publique a récemment publié une mise à jour de son programme de simplification. Ce programme recense cinq secteurs stratégiques, tous fondamentaux pour la vie quotidienne : la citoyenneté numérique ; le bien-être ; la santé en ligne ; la fiscalité ; le bâtiment et les affaires. Prenons, par exemple, le thème de la citoyenneté numérique. L’objectif est de développer les prestations de services en ligne et l’accès aux communications via l’internet. Les domaines suivants ont été examinés par la suite : la diffusion du système public d’identité numérique ; l’achèvement du registre démographique national ; l’informatisation des procédures civiles, pénales et administratives ; le système de paiement électronique ; les délais moyens de paiement des administrations publiques.

• Entre 2015 et 2017, la Suède a procédé à un examen de son secteur hôtelier en mettant l’accent sur la charge administrative qu’impose la réglementation des permis de restauration. Le rapport a mis en évidence la nécessité d’expliquer aux entreprises comment se procurer les permis nécessaires pour ouvrir un restaurant, en quoi ils consistent et comment en assurer la coordination. Ce constat a abouti à l’élaboration d’un guide expliquant comment créer un restaurant et d’une liste de contrôle en mai 2016. En 2017, un projet de normalisation a été lancé sous la forme d’un service électronique sur les sites web des autorités locales.

Source : OCDE (2017) ; (OCDE, 2016[11]) ; (Australian Productivity Commission, 2005[3]) ; (Danish Business Forum, sans date[12]) ; (Ministère de la Simplification et de l’Administration publique (Italie), 2017[13]).

Les examens publics « approfondis » conviennent aux grands régimes réglementaires présentant une grande complexité et de nombreuses interactions et/ou qui sont très litigieux.

Les examens publics approfondis se caractérisent par une approche analytique et probatoire solide. Ils doivent également laisser aux parties prenantes et au grand public une grande latitude pour exprimer leurs points de vue et faire part de leurs commentaires, notamment sur les conclusions et recommandations préliminaires.

C’est donc un exercice relativement gourmand en ressources, dont l’exécution prend généralement beaucoup plus de temps que les autres types d’examen. Par exemple, la durée moyenne des enquêtes publiques sur des sujets réglementaires de grande importance, menées par les commissions en charge de la productivité en Australie, au Chili et en Nouvelle-Zélande, est d’environ 12 mois.

Il s’ensuit que ces examens sont normalement réservés aux domaines réglementaires d’importance majeure, dans lesquels interviennent différents règlements et d’autres instruments politiques dont les effets combinés doivent être compris et envisagés dans les réformes spécifiques proposées. Près de la moitié des pays membres de l’OCDE ont indiqué avoir entrepris un examen approfondi entre 2014 et 2017 (voir Encadré 2.5).

Encadré 2.5. Exemples d’examens approfondis dans les pays de l’OCDE

• La Commission australienne de la productivité (Productivity Commission, PC) mène des enquêtes publiques sur les grandes questions politiques qui lui sont soumises par le gouvernement fédéral, dont beaucoup comportent une composante réglementaire importante, parallèlement à d’autres instruments. La réglementation sociale et environnementale ainsi que la réglementation économique font partie des domaines abordés. Par exemple, la PC a mené deux grands examens sur l’industrie du jeu en Australie, un secteur qui a connu un essor considérable suite aux initiatives de déréglementation des gouvernements des États. Elle a constaté que le cadre réglementaire ne tenait pas suffisamment compte des coûts sociaux et que la politique était trop axée sur les revenus du tourisme et les recettes fiscales. Des recommandations ont été formulées dans divers domaines, avec notamment des règlements limitant les dépenses et les taux de perte sur les « machines de jeu électroniques » ou portant sur l’accès des « joueurs à problèmes » aux établissements de jeu et l’apport d’un soutien à ces personnes.

• La Cour des comptes française a procédé à un examen de l’accès au logement social des personnes défavorisées. Après avoir enquêté dans six quartiers différents, elle a conclu en 2017 que la politique en vigueur était trop axée sur les nouvelles constructions. Elle a recommandé un passage à une gestion active du parc de logements sociaux existant en insistant sur la nécessité d’accroître la transparence et de renforcer le rôle de pilotage des municipalités. C’est ainsi que le gouvernement a lancé un plan de logement en septembre 2017 qui ne se limite pas à la construction de nouveaux logements sociaux mais met l’accent sur la mobilité et la transparence.

• L’Italie a récemment entrepris un examen de ses processus d’enregistrement des entreprises alimentaires. Elle a comparé les dispositions réglementaires mises en œuvre en Espagne, en France, en Italie et au Royaume-Uni. L’examen a mis en évidence des cas de chevauchement des réglementations et de surréglementation. Il a également fait remarquer que certaines informations qu’il fallait fournir aux autorités publiques étaient obsolètes, redondantes, inutiles ou pas réellement exigées par la législation. En réponse à cet examen, l’Italie a révisé ses exigences de notification standardisée en suivant les pratiques en vigueur dans d’autres pays européens.

• Les Pays-Bas ont réalisé une étude dans plusieurs États membres de l’Union européenne (UE) comparant la charge réglementaire imposée aux PME du secteur de la boulangerie. L’évaluation a comparé l’impact des cadres réglementaires appliqués aux Pays-Bas, en Lituanie, en Espagne et en Irlande. L’objectif était d’évaluer si, du point de vue de la mise en œuvre, il existait des différences significatives entre la législation nationale et la législation de l’UE se traduisant par des charges réglementaires inutiles. L’examen a conclu que le recours à des exemptions et à des régimes réglementaires moins stricts pour les PME du secteur de la boulangerie dans la législation européenne pourrait réduire leur charge réglementaire et améliorer leur viabilité économique.

• Le gouvernement néo-zélandais a demandé à sa Commission de la productivité de procéder à un examen du cadre politique de l’enseignement supérieur et des mesures d’adaptation possibles pour faire face aux défis technologiques, démographiques et autres. Elle a constaté que ce secteur était entravé par des contraintes gouvernementales trop lourdes et n’était pas suffisamment innovant pour répondre aux besoins de la société. Elle a formulé des recommandations en matière d’information à l’appui de nouveaux modèles, de modalités de financement et d’une réglementation, notamment en ce qui concerne l’assurance qualité, l’accès aux cours, l’entrée dans le secteur et l’équilibre entre la recherche et l’enseignement.

Source : OCDE (2017) ; (Australian Productivity Commission, 1999[14]) ; (Australian Productivity Commission, s.d.[15]) ; (Cour des comptes (France), 2017[16]) ; (Ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales (France), 2017[17]).

L’« analyse comparative » de la réglementation est un mécanisme puissant qui utilise les comparaisons entre juridictions ayant des objectifs politiques similaires pour recenser les améliorations.

Il est souvent difficile de déterminer le scénario « contrefactuel », c’est-à-dire d’imaginer quelle serait la situation sous un régime différent, lorsqu’on évalue les performances d’une réglementation, surtout si aucun problème majeur n’est survenu. La comparaison des performances réglementaires entre juridictions peut être un moyen efficace de se faire une idée des avantages que pourrait présenter l’adoption de caractéristiques conceptuelles différentes ou d’instruments d’un autre genre. Par exemple, une juridiction peut choisir d’adopter une approche fondée sur les performances plutôt qu’une approche prescriptive de la réglementation alimentaire ou de la sécurité sur le lieu de travail, ou de maintenir les normes de qualité des transports en imposant des barrières réglementaires à l’entrée plutôt qu’au travers d’un régime de surveillance/plaintes.

De telles comparaisons entre juridictions peuvent également exercer une forme de pression concurrentielle sur les juridictions peu performantes et les inciter à faire des réformes.

Pour que les comparaisons soient pertinentes, il faut que les juridictions soient suffisamment similaires sur le plan institutionnel et du point de vue des objectifs politiques fixés dans le domaine concerné. Les systèmes de gouvernement fédéraux ou quasi fédéraux sont plus à même de satisfaire à cette condition.

Dans cette logique, une série spéciale d’études comparatives portant sur différents indicateurs a été menée en Australie entre plusieurs juridictions au sein de la Fédération (voir ci-dessous). Il existe également quelques exercices internationaux similaires comme le rapport « Doing Business » de la Banque mondiale ou, dans le domaine de l’éducation, l’enquête annuelle PISA de l’OCDE.

Gestion continue de la réglementation existante

Dans de nombreux cas, il est possible d’« améliorer en continu » la réglementation en tirant parti des informations sur son fonctionnement et son efficacité, recueillies dans le cadre de processus administratifs.

Il faut mettre en place des mécanismes qui permettent aux organismes chargés de l’application de la loi de transmettre aux secteurs du gouvernement concernés exerçant une responsabilité politique les enseignements tirés « sur le terrain » concernant les performances d’une réglementation.

Les organismes de réglementation dotés de pouvoirs exécutifs et les autorités d’inspection sont souvent les mieux placés pour mesurer les performances d’une réglementation au regard de critères essentiels tels que la facilité d’administration et de mise en conformité ou l’obtention d’un changement de comportement. Ils peuvent jouer un rôle important dans la transmission de ces informations aux services de conception de la réglementation, que ce soit au sein de l’organisme de réglementation lui-même ou dans un département ou un ministère de tutelle. Toutefois, ces retours d’informations en boucles ne sont pas bien implantés dans la plupart des administrations, même si leurs avantages potentiels sont reconnus de longue date (HM Treasury UK, 2005[18]) ; (OCDE, 2017[19]).

Il est donc important de mettre en place des mécanismes de communication internes informant des performances de la réglementation en place « en temps réel », car c’est un moyen d’éviter de devoir procéder à des examens plus importants à un stade ultérieur, lorsque les problèmes seront devenus plus manifestes.

Les règles de compensation réglementaire (comme la règle « one in, one out », c’est-à-dire « un ajout, un retrait ») et les objectifs ou quotas de réduction de la charge doivent inclure une exigence selon laquelle les règlements dont la suppression est prévue, s’ils sont encore « actifs », doivent d’abord faire l’objet d’une forme d’estimation de la valeur qu’ils représentent.

Les règles formalisées régissant les flux réglementaires, qui exigent la suppression des règlements existants si de nouveaux règlements sont introduits, ou qui obligent les organismes à réduire les « charges administratives » d’un certain montant chaque année, utilisent en fait des règles de décision simples pour contenir les coûts globaux d’administration et de mise en conformité. Les approches de ce type sont largement utilisées dans l’ensemble de l’OCDE ; voir, par exemple. (Trnka et Thuerer, 2019[20]). Elles prennent souvent la forme d’un groupe de règlements annuels de « nettoyage » et elles ont également été introduites à des niveaux d’administration infranationaux dans certains pays.

Les programmes de réduction de la charge et les compensations entre règlements peuvent constituer un complément important des examens ex post. Bien qu’il ne s’agisse pas de formes d’évaluation à proprement parler, ces activités peuvent motiver l’évaluation des réglementations en place. Toutefois, il est important d’éviter les méthodes d’administration trop péremptoires, qui mettent davantage l’accent sur les coûts que sur les avantages de la réglementation. Pour éviter les effets pervers, il faut peser les pour et les contre avant d’apporter des changements.

Cela dit, ces évaluations doivent être modérées de façon de ne pas annuler les avantages de la règle « un ajout, un retrait » sur le plan des coûts administratifs. Il suffit de pouvoir conclure que la suppression du règlement pourrait apporter un bénéfice net.

Il convient de revoir périodiquement les méthodes d’examen elles-mêmes pour s’assurer qu’elles restent adaptées au regard de leur objectif.

Comme indiqué, il est avantageux de recourir à différents types d’examens pour s’assurer que rien ne « passe entre les mailles du filet » et de répartir les efforts en fonction de l’importance des différents règlements et des bénéfices potentiels des examens (Encadré 2.6). Mais il est également important de réviser à intervalles réguliers les techniques d’examen elles-mêmes pour s’assurer qu’elles permettent d’atteindre les objectifs fixés. Par exemple, une méthode d’examen qui semble efficace au début, lorsqu’on met en place une évaluation plus poussée de la réglementation, peut s’avérer moins efficace une fois que la plupart des avantages les plus accessibles ont été obtenus. Un certain nombre de juridictions ont entrepris des examens de ce type (UK National Audit Office, 2011[21]), (Cour des comptes de l'Union européenne, 2018[22]) et certaines ont, suite à cela, apporté des modifications importantes à leurs systèmes d’examen ex post ; voir (OCDE, 2011[23]) Annexe 2).

Encadré 2.6. L’utilisation croissante des éclairages comportementaux

On entend par « éclairages comportementaux » les enseignements tirés des sciences comportementales et sociales, qui englobent la prise de décision, la psychologie, les sciences cognitives, les neurosciences, les comportements des organisations et des groupes. Ils sont de plus en plus utilisés par les gouvernements du monde entier pour renforcer l’efficacité des politiques publiques. Dans le cadre des éclairages comportementaux, on adopte une démarche inductive de l’action publique, fondée sur l’expérimentation et les essais, qui remet en question les idées reçues sur les comportements dits « rationnels » des citoyens et des entreprises. Alors que les recherches (OCDE, 2017[19]) montrent qu’en matière de politiques publiques, les éclairages comportementaux servent surtout à améliorer la conception et la mise en œuvre des politiques, la prochaine étape consistera à en étendre l’utilisation en vue de retombées plus amples et plus profondes dans le domaine de l’élaboration des politiques.

L’évaluation ex post est bien évidemment un domaine de développement logique de l’utilisation de la méthodologie des éclairages comportementaux. D’une part, il s’agit par définition d’une méthode d’évaluation : l’expérimentation et les essais produisent des preuves de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas, qui peuvent être utilisées par les décideurs politiques pour évaluer l’efficacité d’un choix politique donné. Cette méthode est particulièrement efficace lorsqu’elle est associée à des analyses d’impact de la réglementation (AIR) ex ante fondées sur des données comportementales, l’évaluation ex post permettant de déterminer dans quelle mesure une décision politique a atteint les résultats escomptés. D’autre part, les éclairages comportementaux permettent de comprendre comment les citoyens et les entreprises se comportent et prennent des décisions. Cette méthodologie peut servir à évaluer une politique donnée sous l’angle du comportement afin de découvrir, le cas échéant, quels sont les problèmes comportementaux qui réduisent l’efficacité des choix politiques (OCDE, 2019[24]). Les décideurs politiques peuvent alors recourir aux éclairages comportementaux pour tester et mettre en œuvre de nouvelles solutions politiques plus aptes à produire les résultats escomptés.

Source : (OCDE, 2017[19]) ; (OCDE, 2019[24]).

Références

[7] Australian Office of Best Practice Regulation (2016), Post-implementation review, Guidance Note, https://ris.pmc.gov.au/sites/default/files/posts/2016/02/Post-implementation-reviews-guidance-note.pdf.

[2] Australian Productivity Commission (2011), Identifying and Evaluating Productivity Commission, Regulation Reforms Research Report, https://www.pc.gov.au/inquiries/completed/regulation-reforms/report/regulation-reforms.pdf (consulté le 2 juillet 2020).

[3] Australian Productivity Commission (2005), Review of National Competition Policy Reforms: Productivity Commission Inquiry Report No. 33, https://www.pc.gov.au/inquiries/completed/national-competition-policy/report/ncp.pdf.

[14] Australian Productivity Commission (1999), Australia’s Gambling Industries, https://www.pc.gov.au/inquiries/completed/gambling (consulté le 1 juillet 2020).

[15] Australian Productivity Commission (s.d.), Gambling: Inquiry report, 2010, https://www.pc.gov.au/inquiries/completed/gambling-2010/report (consulté le 1 juillet 2020).

[16] Cour des comptes (France) (2017), Le logement social face au défi de l’accès des publics modestes et défavorisés, https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-logement-social-face-au-defi-de-lacces-des-publics-modestes-et-defavorises (consulté le 29 juin 2020).

[22] Cour des comptes de l’Union européenne (2018), Les réexamens ex post de la législation de l’UE : un système bien rodé, mais incomplet, Rapport spécial nº 16., https://www.eca.europa.eu/lists/ecadocuments/sr18_16/sr_better_regulation_fr.pdf (consulté le 29 juin 2020).

[12] Danish Business Forum (sans date), , http://www.enklereregler.dk.

[18] HM Treasury UK (2005), Reducing administrative burdens: effective inspection and enforcement, http://news.bbc.co.uk/nol/shared/bsp/hi/pdfs/bud05hampton_150305_640.pdf.

[5] Legislation.co.uk (2015), Small Business, Enterprise and Employment Act 2015, http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2015/26/contents/enacted (consulté le 2 juillet 2020).

[17] Ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales (France) (2017), Présentation de la Stratégie logement du Gouvernement, https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/dossier-de-presse-presentation-de-la-strategie-logement-du-gouvernement (consulté le 1 juillet 2020).

[13] Ministère de la Simplification et de l’Administration publique (Italie) (2017), L’agenda per la semplificazione 2015-2017 (Agenda pour la simplification 2015-2017), http://www.italiasemplice.gov.it/media/2062/agenda_semplificazione_2015-2017.pdf (consulté le 1 juillet 2020).

[24] OCDE (2019), Tools and Ethics for Applied Behavioural Insights: The BASIC Toolkit, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9ea76a8f-en.

[4] OCDE (2018), Politique de la réglementation : Perspectives de l’OCDE 2018, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264305458-fr.

[19] OCDE (2017), Behavioural Insights and Public Policy ?: Lessons from Around the World, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264270480-en.

[11] OCDE (2016), OECD Best Practice Principles: Stakeholder Engagement in Regulatory Policy, Draft for public consultation, OCDE, http://dx.doi.org/GOV/RPC/MRP(2016)1/ANN.

[10] OCDE (2016), Perspectives de l’OCDE sur la politique de la réglementation 2015, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264245235-fr.

[1] OCDE (2015), « Ex post evaluation of regulation: An overview of the notion and of international practices », dans Regulatory Policy in Perspective : A Reader’s Companion to the OECD Regulatory Policy Outlook 2015, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264241800-8-en.

[23] OCDE (2011), Pourquoi la simplification administrative est-elle si compliquée ? : Perspectives au-delà de 2010, Éliminer la paperasserie, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264089778-fr.

[6] OCDE/KDI (2017), Improving Regulatory Governance: Trends, Practices and the Way Forward, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264280366-en.

[8] PISG Legal Information System (s.d.), Rules of Procedure of the Government of the Republic of Slovenia, http://www.pisrs.si/Pis.web/pregledPredpisa?id=POSL32 (consulté le 30 juin 2020).

[9] Regulation Taskforce (2006), Rethinking Regulation: Report of the Taskforce on Reducing Regulatory Burdens on Business, https://www.pc.gov.au/research/supporting/regulation-taskforce/report/regulation-taskforce2.pdf.

[20] Trnka, D. et Y. Thuerer (2019), One-In, X-Out: Regulatory offsetting in selected OECD countries, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/67d71764-en.

[21] UK National Audit Office (2011), Delivering regulatory reform, https://www.nao.org.uk/wp-content/uploads/2011/02/1011758es.pdf.