En 2022, les pays développés ont fourni et mobilisé un total de 115,9 milliards USD de financements climatiques pour les pays en développement (Graphique 1 et Tableau 1), atteignant ainsi pour la première fois leur objectif annuel collectif de mobiliser 100 milliards USD pour l'action climatique dans les pays en développement. Cette réalisation intervient deux ans après l'année cible initiale de 2020, mais un an plus tôt que selon les projections établies par l'OCDE avant la COP26, fondées sur les engagements et estimations des fournisseurs publics bilatéraux et multilatéraux de financement de la lutte contre le changement climatique. En raison de l'augmentation très importante et la plus forte observée à ce jour d'une année sur l'autre (26,3 milliards USD et 30 % de plus qu'en 2021), le total pour 2022 a atteint un niveau qui, selon les projections de l'OCDE, n’était pas attendu avant 2025 (OCDE, 2021[2]).
Financement climatique fourni et mobilisé par les pays développés en 2013-2022
Tendances agrégées
Les pays développés ont dépassé l'objectif annuel de 100 milliards USD pour la première fois en 2022
L'examen des tendances pour chaque composante au cours de la période disponible indique que :
Les financements climatiques publics (bilatéraux et multilatéraux attribuables aux pays développés) représentaient près de 80% du total en 2022 et sont passés de 38 milliards USD en 2013 à 91,6 milliards USD en 2022. La hausse annuelle entre 2021 et 2022 est la plus importante observée à ce jour, en termes absolus (hausse de 18,5 milliards USD) et relatifs (25%).
Au sein du financement public pour le climat, c'est le financement multilatéral qui a le plus progressé entre 2013 et 2022, avec une augmentation de 35 milliards USD (226%) due aux banques multilatérales de développement (BMD). Le financement public bilatéral pour le climat a augmenté de 18,5 milliards d'USD (82%) au cours de la même période.
Les financements privés mobilisés par les financements publics pour le climat, pour lesquels des données comparables ne sont disponibles qu'à partir de 2016, sont passés de 14,4 milliards USD en 2021 à 21,9 milliards en 2022 (soit une augmentation de 7,5 milliards USD ou de 52%), après plusieurs années de relative stagnation.
Les crédits à l'exportation liés au climat restent modestes et volatils en volume et, par conséquent, leur part dans le total a été faible tout au long de la période observée.
Tableau 1. Financement climatique fourni et mobilisé en 2013-2022 par composante et sous-composante
(Montants en milliards USD) |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Financement climatique public bilatéral (1) |
22.5 |
23.1 |
25.9 |
28.0 |
27.0 |
32.0 |
28.7 |
31.4 |
34.5 |
41.0 |
Financement climatiques public multilatéral attribué aux pays développés (2) |
15.5 |
20.4 |
16.2 |
18.9 |
27.1 |
30.5 |
34.7 |
36.9 |
38.7 |
50.6 |
Banques multilatérales de développement |
13.0 |
18.0 |
14.4 |
15.7 |
23.8 |
26.7 |
30.5 |
33.2 |
34.3 |
46.9 |
Fonds multilatéraux pour le climat |
2.2 |
2.0 |
1.4 |
2.6 |
2.9 |
3.5 |
3.8 |
3.5 |
4.2 |
3.4 |
Flux vers les institutions multilatérales (absence de données de sorties) |
0.3 |
0.4 |
0.4 |
0.6 |
0.5 |
0.3 |
0.3 |
0.2 |
0.2 |
0.3 |
Sous-total (1+2+3) |
37.9 |
43.5 |
42.1 |
46.9 |
54.1 |
62.5 |
63.4 |
68.4 |
73.1 |
91.6 |
Crédits à l’exportation liés au climat bénéficiant d’un soutien public (3) |
1.6 |
1.6 |
2.5 |
1.5 |
3.0 |
2.7 |
2.6 |
1.9 |
2.1 |
2.4 |
Sous-total (1+2+3) |
39.5 |
45.1 |
44.6 |
48.5 |
57.1 |
65.2 |
66 |
70.2 |
75.2 |
94.1 |
Financement climatique privé mobilisé (4) |
12.8 |
16.7 |
N/A |
10.1 |
14.5 |
14.7 |
14.4 |
13.1 |
14.4 |
21.9 |
Par le financement climatique public bilatéral |
6.5 |
8.1 |
N/A |
5.2 |
4.0 |
3.8 |
5.8 |
5.1 |
5.6 |
9.2 |
Par le financement climatique public multilatéral attribué aux pays développés |
6.2 |
8.6 |
N/A |
4.9 |
10.5 |
11.0 |
8.6 |
8.0 |
8.8 |
12.7 |
Total général (1+2+3+4) |
52.4 |
61.8 |
N/A |
58.5 |
71.6 |
79.9 |
80.4 |
83.3 |
89.6 |
115.9 |
Note : La somme des composantes peut ne pas correspondre aux totaux en raison des arrondis. L’absence de données en 2015 pour les financements privés mobilisés résulte de la mise en œuvre de méthodes de mesure améliorées. Par conséquent, les totaux en 2016-22 et en
2013-14 ne sont pas directement comparables.
Source : Sur la base des rapports biennaux à la CCNUCC, des statistiques du CAD et du Groupe des crédits à l'exportation de l'OCDE, et de données complémentaires fournies à l'OCDE.
Le nombre d'activités climatique déclarées par les bailleurs de fonds publics bilatéraux a considérablement augmenté au fil des ans, dépassant largement le nombre d'activités déclarées par les bailleurs de fonds publics multilatéraux, qui financent généralement un plus petit nombre de projets de plus grandes tailles (Graphique 2). Le nombre relativement stable d'activités déclarées par les bailleurs de fonds multilatéraux en 2022, par rapport aux trois années précédentes, indique une augmentation substantielle de la taille moyenne de leurs projets de financement climatique. Les sections suivantes du rapport, notamment celles consacrées aux instruments de financement public et aux thèmes climatiques, permettent de mettre en perspective ces informations sur le nombre d'activités déclarées.
Les progrès accomplis pour doubler le financement de l'adaptation d'ici à 2025 doivent être maintenus
Le financement total de l'adaptation fourni et mobilisé par les pays développés a augmenté, malgré une légère baisse en 2021, atteignant 32,4 milliards USD en 2022 contre 10,1 milliards USD en 2016 (Graphique 3). Ce montant total comprend 28,9 milliards USD provenant de sources publiques bilatérales et multilatérales. Le financement climatique pour l'adaptation mobilisé auprès du secteur privé a également augmenté, passant de 0,4 milliard USD en 2016 à 3,5 milliards USD en 2022. Il est toutefois important de noter que les bonds significatifs du financement privé mobilisé pour l'adaptation en 2020 et 2022 sont imputables à un petit nombre de projets de grande taille.
Le Pacte de Glasgow pour le climat de 2021 appelait les pays développés à au moins doubler, d'ici à 2025, leur contribution collective au financement de l'adaptation des pays en développement par rapport aux niveaux de 2019 (CCNUCC, 2021[3]). Les travaux menés dans le cadre du Comité permanent du financement (CPF) de la CCNUCC ont abordé, dans un "rapport sur le doublement du financement de l'adaptation" publié en 2023, les questions relatives au niveau de référence pour le doublement, aux défis méthodologiques et aux données disponibles jusqu'en 2020 (UNFCCC SCF, 2023[4]). Les résultats du premier Bilan Mondial de l'Accord de Paris en décembre 2023 ont réitéré l'appel au doublement et ont exhorté les pays développés à préparer un rapport en 2024 pour évaluer les progrès (CCNUCC, 2023[5]).
Le montant du financement de l'adaptation mesuré par l'OCDE en 2019 sur la base des données déclarées par les fournisseurs bilatéraux et multilatéraux s'élevait à 18,8 milliards USD. Si l'on prend les chiffres du financement public publiés par l'OCDE comme référence, en 2022, à mi-chemin entre 2019 et 2025, les pays développés avaient à peu près réalisé la moitié de l'appel à doubler le financement de l'adaptation. En outre, entre 2019 et 2022, le financement de l'adaptation mobilisé auprès du secteur privé a plus que doublé, passant de 1,5 milliard d'USD à 3,5 milliards USD.
Dans la pratique, les bailleurs de fonds internationaux ont une série de défis à relever ainsi que d'opportunités à saisir pour contribuer à l'augmentation du financement de l'adaptation dans les pays en développement. Ces questions sont abordées dans un rapport spécifique de l'OCDE intitulé Accroître le financement de l'adaptation dans les pays en développement, qui fournissant également des perspectives sur l'objectif plus large consistant à soutenir la capacité des pays en développement à s'adapter aux conséquences du changement climatique (voir Encadré 1 et (OCDE, 2023[6])).
Si l'on considère la répartition thématique globale du total du financement climat fourni et mobilisé par les pays développés (Graphique 4), la part de l'adaptation a progressivement augmenté au cours de la période, passant de 17% en 2016 et 25% en 2019 à 28% en 2022, en raison d'une hausse de 22,3 milliards USD sur la période 2016-2022. Néanmoins, le financement de l'atténuation, qui a augmenté de 27,7 milliards d'USD entre 2016 et 2022, continue de représenter la majorité en 2022, avec 60 % (69,9 milliards d'USD) du total. Les activités transversales qui portent à la fois sur l'atténuation et l'adaptation ont également augmenté, passant de 6,2 milliards USD en 2016 à 13,6 milliards USD en 2022, ce qui représente une part relativement stable entre 7% et 13% du total tout au long de la période.
Il est important de garder à l'esprit que les variations d'une année sur l'autre dans la répartition thématique du financement climatique peuvent être influencées à la fois par de grands projets individuels (notamment pour les infrastructures) et par les méthodologies utilisées par les bailleurs de fonds pour identifier le thème climatique des activités et déterminer le montant spécifique pour le climat. Dans ce contexte, le Graphique 5 illustre une croissance très rapide, depuis 2019, du nombre d'activités déclarées comme financement de l'adaptation, à l'exception d'une baisse en 2021. En contraste, le nombre d'activités déclarées pour l'atténuation (ainsi que pour les activités transversales) a augmenté à un rythme beaucoup plus lent mais relativement régulier.
En termes de répartition sectorielle (Graphique 6), les tendances sont restées largement inchangées depuis 2016. La plupart des financements de l'atténuation se sont concentrés dans les secteurs de l'énergie et du transport. Entre 2016 et 2022, ces deux secteurs ont représenté plus de la moitié (62 %) du financement total de l'atténuation fourni et mobilisé. En revanche, le financement de l'adaptation a été réparti plus uniformément entre un plus grand nombre de secteurs, l'approvisionnement en eau et l'assainissement, ainsi que l'agriculture, la sylviculture et la pêche, représentant les parts les plus importantes avec respectivement 19 % et 18 % du total du financement de l'adaptation fourni et mobilisé.
Encadré 1. Accroître le financement de l'adaptation dans les pays en développement : défis et opportunités pour les bailleurs de fonds internationaux
Le financement de l'adaptation dans les pays en développement se heurte à des obstacles, notamment (i) des difficultés économiques et financières telles que des assiettes fiscales limitées, une capacité d'emprunt, des niveaux d'endettement croissants et un manque d'incitations pour les investisseurs privés en raison des difficultés à quantifier l'impact des événements climatiques et les avantages sociétaux non financiers ; (iii) les défis institutionnels et de gouvernance tels que la fragmentation croissante de l'architecture internationale du financement de l'adaptation, la diversité des critères d'éligibilité, la longueur des processus d'examen des propositions de projet et les difficultés d'accréditation des entités nationales pour la gestion des fonds provenant de sources multilatérales.
Le rapport 2023 de l’OCDE Accroître le financement de l'adaptation dans les pays en développement présente cinq domaines d'action pour augmenter l'offre de financement de l'adaptation, attirer des financements du secteur privé et améliorer l'accès. Ces domaines d'action invitent les bailleurs de fonds internationaux de financement de l'adaptation à :
1. Évaluer la cohérence de leurs plans de dépenses prévisionnelles avec l'appel à doubler collectivement le financement du climat pour l'adaptation d'ici 2025, y compris en coordination avec les autres fournisseurs internationaux.
2. Soutenir les efforts des pays en développement pour renforcer leurs capacités et développer des conditions favorables au financement de l'adaptation. Il s'agit de soutenir l'amélioration de la capacité institutionnelle à gérer efficacement les ressources financières et à développer des pipelines de projets, en particulier au niveau local. Un élément clé consiste à soutenir l'élaboration de cadres politiques et réglementaires et d'instruments financiers adaptés pour encourager les investissements dans l'adaptation.
3. Renforcer les pratiques actuelles en matière de développement afin d'améliorer le financement de l'adaptation et soutenir l'intégration de l'adaptation dans l'aide au développement. Il peut s'agir de fixer des objectifs quantitatifs internes pour le financement de l'adaptation ou d'envisager des niveaux minimaux de financement pour les pays les plus vulnérables. Il peut également être utile de passer d'un soutien basé sur des projets à des approches programmatiques impliquant plusieurs projets alignés sur les priorités nationales. Un autre facteur important consiste à chercher à rationaliser et à améliorer l'interopérabilité des processus de demande et de décaissement du financement climatique pour l'adaptation.
4. Déployer stratégiquement des instruments de financement mixte pour mobiliser des fonds privés pour l'adaptation. Il peut de subventions pour fournir des capitaux de départ afin d'améliorer le profil risque-rendement des investissements dans l'adaptation. Les organisations intermédiaires telles les institutions de financement du développement et les gestionnaires de fonds climatiques peuvent aider à mettre en relation des investisseurs commerciaux avec des projets d'adaptation en utilisant des instruments tels les obligations vertes.
5. Explorer et exploiter des sources de financement et des instruments de mobilisation alternatifs pour l'adaptation. On peut par exemple exploiter le potentiel des droits de tirage spéciaux du FMI pour renforcer l'adaptation et étudier la pertinence des échanges de dette contre nature, notamment pour contribuer à résoudre le problème de la viabilité de la dette dans les pays en développement. Il est également possible de s'appuyer sur les marchés internationaux du carbone qui cherchent à affecter leurs recettes à des activités d'adaptation.
Source : (OCDE, 2023[6])
La croissance du financement climatique public s'est accompagnée d'une augmentation du financement privé mobilisé
Le secteur privé a un rôle crucial à jouer dans le financement de l'action climatique dans les pays en développement. C'est notamment le cas pour combler le déficit d'investissement dans des domaines tels que l'énergie propre, l'agriculture et la résilience. Dans ce contexte, le financement public peut être utilisé de manière stratégique pour mobiliser le financement privé, notamment en recourant à des mécanismes de réduction des risques. Le rapport de l'OCDE intitulé Accroître la mobilisation des financements privés en faveur de l'action climatique dans les pays en développement a mis en évidence des opportunités pour les fournisseurs internationaux de les soutenir dans ces efforts, tout en fournissant des perspectives sur les possibilités d’augmenter des financements privés en faveur de l'action climatique dans les pays en développement de manière plus générale (voir Encadré 2 et (OCDE, 2023[7])).
Après plusieurs années de stagnation, les financements privés mobilisés par les financements climatiques publics ont augmenté de manière significative en termes relatifs et absolus, atteignant 21,9 milliards d'USD en 2022. Cela représente une augmentation de 52% (ou 7,4 milliards USD) par rapport à 2021. Cette hausse a été observée pour les trois catégories de bailleurs de fonds publics (Graphique 7).
Bien qu'il ne soit pas possible, à un niveau agrégé, d'identifier des facteurs explicatifs spécifiques, ce bond annuel est susceptible de refléter à la fois la forte croissance des financements climatiques publics entre 2021 et 2022 (qui ont augmenté de 18,3 milliards USD, soit 25%), ainsi que certaines améliorations dans l'efficacité de ces financements publics à mobiliser du financement privé. Pour mettre cette hausse en perspective, le total des financements privés mobilisés pour le développement par les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux a également augmenté de manière significative en 2022, de 27 %, passant de 48 milliards d'USD en 2021 à 61 milliards d'USD.
En ce qui concerne les mécanismes à effet de levier utilisés par les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux pour les activités liées au changement climatique, la plupart des financements privés pour le climat ont été mobilisés par le biais d'investissements dans des entreprises et structures de financement de projets, de garanties, et de prêts syndiqués (Graphique 8). Les différents types de bailleurs de fonds ont toutefois tendance à s'appuyer sur des mécanismes différents, reflétant des mandats différenciés ainsi que la nécessité d'adapter le choix et l'utilisation de ces mécanismes aux contextes nationaux et sectoriels.
Le secteur qui a le plus bénéficié de la croissance des financements privés mobilisés en 2022 est celui de l'énergie, qui, entre 2016 et 2022, a représenté près de la moitié du total des financements privés mobilisés en faveur du climat. De même, une part majoritaire des financements privés a continué d'être mobilisée dans les pays à revenu intermédiaire (Graphique 9). Plus généralement, les volumes de financement climatique mobilisés étaient relativement concentrés dans un nombre limité de pays en développement. Entre 2016 et 2022, les cinq premiers pays bénéficiaires représentaient 28 % du total des financements climatiques mobilisés. Cette part atteint 41 % si l'on considère les 10 premiers pays et 57 % si l'on considère les 20 premiers pays. Cette tendance résulte en partie de la mobilisation d'un volume important de financements privés pour un nombre limité de grands projets d'infrastructure.
Encadré 2. Accroître le financement privé mobilisé pour l'action climatique dans les pays en développement : défis et opportunités pour les bailleurs de fonds internationaux
Un certain nombre de défis peuvent affecter le potentiel de mobilisation du financement privé pour le climat dans les pays en développement. Il s'agit notamment des conditions générales liées à l'investissement dans les pays bénéficiaires (stabilité macroéconomique, risque politique et environnement réglementaire, disponibilité de l'expertise technique, coût de la diligence raisonnable et du suivi), ainsi que de la dynamique commerciale dans certains domaines m’ayant pas de profils risque-rendement suffisamment attrayants pour attirer des investissements privés à grande échelle. En outre, les projets sont souvent trop petits pour obtenir un financement commercial. Par ailleurs, les objectifs, les mandats et les modèles opérationnels des acteurs du développement qui déploient des financements publics internationaux pour le climat ont tendance à être dominés par les expositions au secteur public, un engagement limité du secteur privé et des modèles axés sur les prêts à forte intensité de capital qui limitent le potentiel de mobilisation des financements privés.
Le rapport 2023 de l'OCDE Accroître le financement privé mobilisé pour l'action climatique dans les pays en développement présente trois domaines d'action clés qui peuvent aider les fournisseurs internationaux à renforcer leur rôle dans la mobilisation des financements privés :
1. Adapter les interventions au niveau des projets et des pays pour réduire les risques des projets et des marchés. Il peut s'agir de mettre l'accent sur le financement mixte et la mobilisation dans des secteurs matures tels que les énergies renouvelables. Les fournisseurs internationaux peuvent réorienter les prêts vers la mobilisation de financements privés dans ces secteurs et accroître l'utilisation des garanties, tout en renforçant les capacités pour améliorer les conditions d'investissement et le développement de pipelines de projets. Il est essentiel de se retirer progressivement des projets au fur et à mesure qu'ils deviennent commercialement viables afin d'allouer les ressources à de nouvelles priorités climatiques.
2. Accroître l'utilisation des mécanismes de financement transfrontaliers et améliorer la coordination pour canaliser le financement mondial. Il s'agit de renforcer la coordination et la collaboration entre les fournisseurs bilatéraux et multilatéraux de financement de la lutte contre le changement climatique, les acteurs nationaux et le secteur privé. Pour faciliter les investissements, les bailleurs de fonds internationaux pourraient également redoubler d'efforts pour développer des actifs secondaires qui regroupent des projets constitutifs plus petits en actifs plus importants, tarifés et négociables.
3. Renforcer les institutions internationales pour maximiser le potentiel de mobilisation du financement public de la lutte contre le changement climatique. Cela peut impliquer de demander aux BMD de définir clairement des objectifs de mobilisation des financements privés institutionnels, de développer des mécanismes de transfert de risque et de fournir des financements en monnaie locale, ainsi que des approches de co-prêt et des plateformes de syndication. En outre, il est nécessaire d'améliorer la divulgation des données et la transparence des méthodologies comptables relatives au financement public de la lutte contre le changement climatique et au financement privé qu'il mobilise.
Source : (OCDE, 2023[7]).
Les prêts représentent la majorité du financement climatique public, mais les subventions sont privilégiées dans les pays à faible revenu
En 2022 comme les années précédentes, les financements climatiques publics des pays développés fournis bilatéralement et par le biais de canaux multilatéraux ont principalement pris la forme de prêts (69%, soit 63,6 milliards USD) et, dans une moindre mesure, de dons (28%, soit 25,6 milliards USD), tandis que les volumes de prises de participation (dans des entreprises, projets ou fonds) sont restés modestes (Graphique 10). Entre 2016 et 2022, le niveau annuel des subventions a augmenté de 13,4 milliards USD, faisant plus que doubler avec une croissance de 109 %, dépassant la croissance de 91 % des prêts publics, qui ont augmenté de 30,3 milliards USD.
L’utilisation d'instruments varie entre types de bailleurs de fonds, reflétant les mandats différents et complémentaires et, par conséquent, les différents types d'activités au sein de leurs portefeuilles. Sur la période 2016-2022, près de 90 % des financements fournis par les BMD ont pris la forme de prêts (avec des projets individuels de taille relativement importante, comme l'illustre le Graphique 2). En revanche, la répartition était comparativement plus équilibrée pour les fonds multilatéraux pour le climat (39% de prêts, 54% de dons) et les fournisseurs bilatéraux (57% de prêts, 39% de dons), qui ont tous deux tendances à financer un éventail d'activités et de projets relativement plus large et diversifiée (Graphique 10).
Comme le montre le Graphique 11, l'utilisation des instruments de financement public a peu varié entre les pays en développement qui sont des pays à revenu élevé (PRE), des pays à revenu intermédiaire supérieur (PRITS) ou des pays à revenu intermédiaire inférieur (PRITI), pour lesquels les prêts représentant respectivement 92 %, 87 % et 85 % du financement climatique public en 2016-2022. En revanche, le financement sous forme de dons était nettement plus élevé dans les pays à faible revenu (PFR), où il représentait 64% du financement climatique public, en raison de besoins spécifiques (par exemple, l'adaptation, le renforcement des capacités) ainsi que des circonstances (plus de risques et moins de projets ayant la capacité de rembourser des prêts). En effet, en 2016-2022, une part plus importante des financements publics pour l'adaptation (38 %) et des activités ciblant les deux objectifs (55 %) a été fournie sous forme de subventions, par rapport à l'atténuation (15% financés par des subventions).
Encadré 3. Prêts concessionnels et non concessionnels
Un prêt concessionnel est accordé à un emprunteur à des conditions plus préférentielles que celles disponibles sur le marché, y compris des taux d'intérêt inférieurs, des délais de grâce prolongés, ou une combinaison des deux. Entre 2016 et 2022, 79% des prêts accordés par les bailleurs de fonds bilatéraux étaient concessionnels (Graphique 12). En contraste, 41% et 23% des prêts accordés par les fonds multilatéraux pour le climat et les BMD étaient concessionnels (Graphique 13). Toutefois, en raison de différences de définition, ces pourcentages ne sont pas comparables à ceux des fournisseurs bilatéraux. En effet, la déclaration de prêts concessionnels et non concessionnels repose sur des définitions différentes pour les membres du CAD, d'une part, et pour les institutions multilatérales, d'autre part.
Pour les membres du CAD, la concessionnalité est un critère clé d'éligibilité à l'APD ; seuls les prêts concessionnels sont actuellement inclus dans l'APD. Pour que les prêts souverains soient concessionnels, leur « élément don » (calculé sur la base du taux d'intérêt, du délai de grâce, de l'échéance, du calendrier de remboursement et du taux d'actualisation) doit être d'au moins 45 % pour les PMA et les autres PFR, de 15 % pour les PRITI et de 10 % pour les PRITS et les institutions multilatérales. Les prêts au secteur privé doivent comporter un élément de libéralité d'au moins 25 % pour être concessionnels. En outre, les conditions des prêts d'APD doivent être conformes à la politique de limitation de la dette du FMI ou à la politique d'emprunt non concessionnel de la Banque mondiale.
Pour les prêts des BMD et des fonds multilatéraux pour le climat, la concessionnalité est liée à leur capacité à offrir des crédits à des conditions financièrement viables, sur la base de leurs propres coûts de financement. Les institutions multilatérales ont besoin de subventions externes pour accorder des prêts concessionnels. À l'inverse, les prêts non concessionnels sont viables en raison des faibles coûts de financement des institutions et de leur statut de créancier privilégié, ce qui leur permet d'offrir des conditions plus avantageuses que celles du marché. L'utilisation de prêts concessionnels ou non concessionnels par les organisations multilatérales dépend du niveau de revenu du pays bénéficiaire ainsi que de considérations relatives à sa solvabilité et à la viabilité de sa dette.
Le financement climatique a augmenté dans tous les groupes de pays en développement, avec des tendances distinctes dans les PEID et les PMA
En termes de groupes de revenus, les PRITI ont été les principaux bénéficiaires, représentant 40 % (46,5 milliards USD) du total du financement climatique fourni et mobilisé en 2022, en augmentation par rapport aux 23,2 milliards USD de 2016 qui représentaient une part similaire (Graphique 14). La part représentée par les PRITS est restée stable (30% en 2022, 28% en 2016). La part des financements fournis et mobilisés pour les PFR représentait 10% en 2022. Toutefois, en termes absolus, les financements destinés aux PFR ont été multipliés par cinq (9 milliards USD) depuis 2016. Pas moins de 18% des financements climatiques fournis et mobilisés par les pays développés n'ont pu être attribués à un groupe de revenu, en raison principalement d'activités ayant une portée régionale ou multi-pays au moment de la déclaration.
Au cours des années observées, il y a eu une croissance presque continue en volume pour les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID). Le financement climatique pour les PMA a dépassé la barre des 20 milliards d'USD pour la première fois en 2022 (1,2 milliards USD). Le financement climatique pour les PEID a été multiplié par plus de trois depuis 2016, atteignant 3,2 milliards d'USD en 2022. Entre 2016 et 2022, les PMA et les PEID ont bénéficié, respectivement, d'une moyenne annuelle de 14,2 milliards USD (17 % du total du financement climatique fourni et mobilisé) et de 2 milliards USD (2 %) (Graphique 15). En termes de montants par habitant, les PEID ont bénéficié en moyenne de 96 USD et les PMA de 16 USD au cours de la période observée. En contraste, sur la même période, tous les pays en développement ont bénéficié de 25 USD par personne et par an.
Il est important de noter que sur la période 2016-2022, l'adaptation a représenté une part plus importante du financement climatique (près de la moitié) dans les PMA et les PEID par rapport à l'ensemble des pays en développement (un quart) (Graphique 16). La part représentée par les financements privés mobilisés était nettement plus faible pour les PMA (7%) et les PEID (9%), contre une moyenne de 18% pour l'ensemble des pays en développement. Cela souligne les difficultés rencontrées par ces pays pour attirer les investissements privés en faveur de l'action climatique et la nécessité de déployer des efforts pour contribuer à relever ces défis (OCDE, 2023[7]). De même, les PEID et, dans une moindre mesure, les PMA, ont reçu une part plus importante de subventions que les autres pays en développement. La majorité (53 %) des financements publics accordés aux PEID l'ont été sous forme de subventions ; ce pourcentage était de 44% pour les PMA.
Les bailleurs de fonds multilatéraux jouent un rôle de plus en plus important dans la fourniture et la mobilisation du financement climatique
Le Graphique 1 et le Tableau 1 au début de ce rapport soulignent que les fournisseurs multilatéraux représentent une proportion très importante et croissante du financement climatique total comptabilisé comme étant fourni et mobilisé par les pays développés. Au sein de cette composante, il est important de faire la distinction entre les BMD et les fonds climatiques, car ces deux sous-catégories ont tendance à fonctionner différemment en termes de ressources, de mandats et d'opérations.
Le Tableau 7, dans le chapitre Données et méthodes, fournit une liste complète des institutions couvertes par ce rapport (notant l'ajout, pour les données de 2022, de la Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD) du FMI) et les pourcentages spécifiques à chaque institution pour attribuer aux pays développés une part du financement climatique que ces institutions fournissent et mobilisent. Ces pourcentages vont de 4,8% à 100% selon l'institution, ce qui signifie que la part restante du financement climatique fourni et mobilisé par les institutions multilatérales est attribuable aux pays en développement, comme l'illustre l’Encadré 4.
Le Graphique 17 indique que le total des financements climatiques fournis et mobilisés par les BMD (attribués aux pays développés) n'a cessé de croître depuis 2016 et a contribué à la réalisation de l'objectif de 100 milliards USD en 2022, notamment grâce à l'octroi de prêts. En revanche, le financement climatique fourni pour les fonds multilatéraux pour le climat (pour lesquels la part d'attribution aux pays développés est proche de 100 % dans presque tous les cas) reste relativement plus modeste et a tendance à varier d'une année sur l'autre depuis 2019, après une période de croissance régulière entre 2016 et 2019.
Si l'on considère spécifiquement les volumes de financement privé mobilisés, il est important de noter que certaines institutions multilatérales sont explicitement mandatées pour financer des domaines qui n'attirent généralement que peu ou pas d'investissements privés, tels que les prêts aux gouvernements. Le manque de données ne permet pas d'effectuer une analyse au niveau des transactions dans ce domaine.
La répartition comparative par thème climatique et par groupe de revenu bénéficiaire des financements climatiques fournis et mobilisés par les BMD et les fonds climatiques sur la période 2016-2022 apporte deux éclairages au niveau agrégé (Graphique 18). Premièrement, la part du financement de l'adaptation est similaire dans les deux groupes, malgré des différences dans les méthodologies de suivi du financement climatique (par exemple, les fonds climatiques classent souvent le financement de l'adaptation comme ciblant les deux objectifs, une catégorie rarement utilisée par les BMD), et dans les caractéristiques des projets (les BMD financent de très grands projets, dans le cadre desquels un montant important de financement de l'adaptation sera enregistré si une composante spécifique au climat élevée est appliquée). Deuxièmement, une part très importante du financement climatique fourni et mobilisé par les fonds climatiques n'a pas pu être attribuée à un groupe de revenu au moment de la déclaration. Malgré cette contrainte, la répartition des groupes de revenus semble relativement similaire, les PRITI représentant la plus grande part, suivis de près par les PRITS et, avec des parts nettement inférieures, par les PFR et les pays en développement à revenu élevé.
Encadré 4. Financement climatique public multilatéral attribué aux pays développés et aux pays en développement
Le champ d'application de l'objectif de 100 milliards d'USD se réfère uniquement au financement climatique fourni et mobilisé par les pays développés, y compris par le biais de canaux multilatéraux. Le chapitre "Données et méthodes" du rapport détaille, pour chaque banque multilatérale de développement et fond climatique, la part calculée de ses engagements (ainsi que du financement privé mobilisé par ces engagements) attribuable aux pays développés et incluse dans ce rapport.
La Graphique 19 présente, pour 2022, le volume résultant des engagements de financements climatiques publics multilatéraux attribuées aux pays développés comptabilisés dans le cadre comptable de l’objectif 100 milliards USD, soit 46,9 milliards USD pour les BMD et 3,4 milliards USD pour les fonds climat. Cependant, le graphique montre également les volumes attribuables aux pays en développement, à savoir 19,2 milliards USD pour les BMD et 0,4 milliard USD pour les fonds climatiques. En effet, de nombreux pays en développement sont actionnaires des BMD et certains, plus rarement, contribuent aux fonds multilatéraux pour le climat.