Rapport sur la dette mondiale 2024

1. Perspectives de l’OCDE sur les emprunts souverains

Abstract

Les emprunts bruts dans la zone OCDE ont augmenté en 2023, après avoir diminué au cours des deux années précédentes, et devraient franchir un niveau record en 2024, dépassant le précédent pic atteint au plus fort de la pandémie de COVID-19. Cet essor a porté l’encours de la dette souveraine à des niveaux sans précédent, mais les ratios dette/PIB sont restés relativement stables, car les augmentations des emprunts ont été largement compensées par l’impact de l’inflation sur le PIB nominal.

Bien que le coût de l’emprunt augmente pour la troisième année consécutive, les finances publiques des pays de l’OCDE sont en partie protégées de la hausse des taux en raison de l’allongement des échéances depuis 2008. Dans le même temps, alors que les banques centrales ont commencé à réduire leurs portefeuilles d’obligations souveraines, l’offre nette à absorber par le marché atteint des niveaux record.

1.1. Introduction

Ce chapitre étudie l’évolution de la dette souveraine sur la période 2008-24, en se concentrant sur la zone OCDE. On y examine les besoins et stratégies de financement, l’évolution du ratio dette/PIB, les coûts d’emprunt et les courbes de rendement, les charges d’intérêts et les risques de refinancement, ainsi que les effets de la réduction du bilan des banques centrales sur la base d’investisseurs et la liquidité des marchés. Ce chapitre s’appuie principalement sur les réponses reçues à une enquête annuelle sur les titres de dette négociables des administrations centrales. Il contient des données jusqu’en 2022, avec des estimations pour 2023 et des projections pour 2024. L’Annexe 1.A livre des précisions sur la méthodologie.

Principales conclusions

• Les emprunts bruts dans la zone OCDE sont passés de 12 100 milliards USD en 2022 à 14 100 milliards USD en 2023 et devraient encore augmenter pour atteindre 15 800 milliards USD en 2024, soit le niveau le plus élevé jamais enregistré, dépassant le précédent record de 2020. Les États-Unis représentaient près des deux tiers du total de 2023, principalement du fait de l’émission de nouveaux emprunts.

• Les emprunts à court terme sous forme de bons du Trésor représentaient 50 % des emprunts bruts en 2023 et devraient atteindre un sommet historique de 51 % en 2024. Cette augmentation est principalement imputable à un petit groupe d’émetteurs.

• L’encours de la dette négociable des pays de l’OCDE est passé de 40 000 milliards USD en 2019 à 54 000 milliards USD en 2023 et devrait atteindre un nouveau record de 56 000 milliards USD en 2024. Le ratio dette/PIB est resté stable aux alentours de 83 % en 2023, soit un niveau encore bien supérieur à celui d’avant la pandémie (73 %), même si l’inflation, qui a stimulé la croissance du PIB nominal, l’a réduit de plus de 10 points de pourcentage en 2022-23.

• Le coût des nouveaux emprunts dans la zone OCDE est passé en moyenne de 1 % en 2021 à 4 % en 2023, tandis que les charges d’intérêts ont augmenté de 2.3 % à 2.9 % du PIB sur la même période. Le rallongement de l’échéance moyenne de la dette publique des pays de l’OCDE isole en partie les finances publiques des hausses de rendement. Toutefois, ce sursis n’est que temporaire et, d’ici à 2026, le seul refinancement de la dette à taux fixe devrait se traduire par une augmentation des charges d’intérêts de 0.5 % du PIB par rapport à 2023.

• La prime d’échéance moyenne dans la zone OCDE s’est repliée à un niveau proche de zéro en 2023, un niveau historiquement bas, et les courbes de rendement présentent des niveaux d’inversion variables. Cela a une incidence sur l’arbitrage entre les coûts et les risques pour les émetteurs souverains : les taux fixes peuvent sembler économiques, mais ils peuvent entraîner le verrouillage de rendements plus élevés.

• Les banques centrales réduisent leurs portefeuilles d’obligations souveraines, ce qui accroît le niveau de l’offre à absorber par le marché et modifie la base d’investisseurs pour la dette souveraine, avec pour conséquence qu’une part croissante de la dette est détenue par des investisseurs plus sensibles aux prix. En outre, les pertes subies par les banques centrales en raison du resserrement monétaire réduisent leurs envois de fonds au Trésor ou déclenchent des appels à indemnisation, ce qui augmente les besoins d’emprunt.

• La liquidité des marchés des obligations d’État est restée globalement inchangée en 2023, après s’être dégradée en 2022. Elle continue d’être influencée principalement par la capacité de stockage des spécialistes en valeurs du Trésor, l’évolution de la base d’investisseurs et l’incertitude macroéconomique et géopolitique. Les émetteurs souverains prennent diverses mesures pour soutenir la liquidité du marché, les plus efficaces étant l’utilisation des titres existants, les opérations de rachat et de conversion, et les facilités de prêt de titres.

• Les émissions d’obligations souveraines dans les marchés émergents et les économies en développement sont passées de 3 000 milliards USD en 2022 à 3 900 milliards USD en 2023, dépassant le pic de 2021. La part de la Chine dans les emprunts s’est accrue de 15 % en 2021 à 37 % en 2023.

• Les notes de crédit des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure se sont détériorées en 2023, les pays de ces groupes ayant fait l’objet de 24 révisions à la baisse contre 6 révisions à la hausse.

1.2. L’augmentation des emprunts bruts a porté l’encours de la dette à des niveaux record en 2023

La baisse des emprunts bruts des pays de l’OCDE en 2021 et 2022 s’est interrompue en 2023. Après avoir culminé à 15 400 milliards USD en 2020, ils ont été ramenés à 12 100 milliards USD en 2022, les estimations faisant état d’une hausse à 14 100 milliards USD en 2023 (Graphique 1.1, partie A). La projection de 15 800 milliards USD pour 2024 dépasserait le pic atteint pendant la pandémie, et marquerait une hausse de près de 45 % et 25 % en termes réels par rapport aux niveaux de 2019 et 2022, respectivement. L’Encadré 1.1 étudie ces tendances pour les marchés émergents et les économies en développement (MEED).

Les besoins d’emprunt bruts correspondent aux besoins d’emprunt nets et aux besoins de refinancement, les premiers étant à l’origine de l’augmentation du chiffre brut en 2023. Les emprunts nets ont culminé en 2020 à 7 300 milliards USD, avant de refluer à environ 2 100 milliards USD en 2022, soit un niveau proche de celui d’avant la pandémie. Toutefois, la hausse des dépenses, notamment au titre de la sécurité sociale et des mesures liées au coût de la vie, a inversé cette tendance à la baisse observée depuis deux ans (OECD, 2023[1]) ; d’après les estimations, les emprunts nets devrait augmenter pour avoisiner 3 600 milliards USD en 2023, avant de diminuer légèrement pour s’établir à 3 200 milliards USD en 2024. Le fait que les niveaux d’emprunt nets soient désormais plus étroitement alignés sur les déficits budgétaires donne à penser que les soldes de trésorerie se sont quelque peu normalisés, après être montés en flèche pendant la pandémie1.

Les besoins de refinancement devraient être le principal moteur de l’augmentation des emprunts bruts en 2024. Ils s’élevaient à environ 7 000 milliards USD avant la pandémie, mais ils ont dépassé les 10 000 milliards USD depuis 2021, avec un pic prévu de 12 600 milliards USD en 2024. Ce niveau record prévu est attribué à l’augmentation des emprunts à court terme, qui doivent être refinancés dans un délai d’un an, au cours de la période 2023-24.

Sous l’effet de l’augmentation du besoin de financement, l’encours de la dette de la zone OCDE devrait atteindre 54 000 milliards USD en 2023 et continuer de croître pour s’établir à 56 000 milliards USD en 2024 (Graphique 1.1, partie B). En ce qui concerne les émetteurs, la part des États-Unis dans l’encours de la dette de l’OCDE a sensiblement augmenté ces dernières années, pour représenter près de la moitié du total en 2023. La part de l’UE est de 20 %, celle du Japon de 16 %, celle du Royaume-Uni de 6 %, les autres pays de l’OCDE réunis représentant 9 %. D’importants changements se sont produits au fil du temps, la part des États-Unis ayant augmenté de 7 points de pourcentage depuis 2019 et doublé depuis 2008. Cette hausse est due non seulement à la croissance de la dette américaine, mais aussi à l’appréciation du dollar des États-Unis2.

Graphique 1.1. Besoins d’emprunt, déficit budgétaire et évolution de la dette dans les pays de l’OCDE

Note : « 2023e » correspond à des estimations et « 2024p » à des projections.

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

L’augmentation de l’endettement brut dans la zone OCDE est principalement le fait de quelques grands émetteurs, car on estime que davantage de pays ont connu une diminution du ratio de l’endettement brut au PIB qu’une augmentation. Dans seulement 10 pays de l’OCDE, la hausse devrait être supérieure à 1 point de pourcentage en 2023 ; cela inclut les grands émetteurs comme les États-Unis, l’Italie et le Royaume-Uni. Parallèlement, une baisse supérieure à 1 point de pourcentage est envisagée pour 12 pays, dont l’Allemagne, la France et le Japon (Graphique 1.2, partie A). Par rapport à leurs moyennes de 2015‑19, des augmentations supérieures à 5 points de pourcentage de ce ratio sont envisagées pour l’Allemagne, l’Autriche, les États-Unis et la Finlande.

Graphique 1.2. Emprunts bruts et nets, et besoins de refinancement en pourcentage du PIB

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

Les niveaux d’emprunts nets varient considérablement d’un pays à l’autre, la moyenne de l’OCDE demeurant stable aux alentours de 2.5 % du PIB en 2023, soit environ 1 point de pourcentage de plus que les moyennes de 2015-19 (Graphique 1.2, partie B). On estime que les ratios des emprunts nets rapportés au PIB vont sensiblement augmenter en 2023 au Royaume-Uni, où une hausse de 5 points de pourcentage sera en grande partie imputable au financement de mesures liées au coût de la vie ; en Israël, où la hausse de 4 points de pourcentage sera due en partie au conflit au Moyen-Orient ; et en Italie, où la hausse de 3 points de pourcentage sera principalement due à des réductions d’impôts et à de nouvelles dépenses. C’est en Colombie et en Hongrie que l’assainissement budgétaire a entraîné les baisses les plus marquées (OECD, 2023[1]).

Si l’augmentation soutenue des emprunts nets pose des problèmes budgétaires, des excédents budgétaires faibles et persistants peuvent soulever certaines préoccupations, comme l’accès des pouvoirs publics au financement par l’emprunt et la viabilité à long terme du marché des titres d’État. Ces dernières années, des pays comme le Danemark, l’Irlande, la Norvège et la Suède ont affiché des excédents budgétaires persistants (Graphique 1.2, partie B), ce qui pourrait poser des problèmes pour élaborer des courbes de rendement sans risque de crédit et soutenir la liquidité des marchés des titres d’État. Lorsque l’offre de titres d’État est limitée en raison de la diminution de la dette publique, ces titres pourraient devenir moins liquides et plus coûteux. Une dégradation de la liquidité et de l’efficience des titres d’État réduit leur intérêt en tant que référentiel pour le taux d’intérêt sans risque et pour la fixation des prix et les positions de couverture sur d’autres marchés. En outre, les besoins de financement de l’État, qui pourraient temporairement disparaître, pourraient resurgir, ce qui entraînerait des difficultés d’accès au marché en période de besoins d’emprunt accrus (Bjellerup et Rådahl, 2023[3]). Enfin, des volumes de marché plus faibles peuvent affecter la viabilité des modèles économiques des spécialistes en valeurs du Trésor, qui peuvent jouer un rôle déterminant pour l’accès au marché.

Les besoins de refinancement dans l’ensemble de la zone OCDE sont restés globalement stables en 2023, mais ont sensiblement augmenté dans certains pays depuis la pandémie (Graphique 1.2, partie C). À la différence des nouveaux emprunts, les besoins de refinancement ne sont pas soumis à des fluctuations budgétaires immédiates, mais sont plutôt liés à la taille et à la composition des portefeuilles de dettes. En 2023, les ratios besoins de refinancement/PIB de la zone OCDE sont restés globalement conformes aux moyennes de 2015-19. Les États-Unis et le Japon se distinguent et devraient contribuer à une envolée des besoins de refinancement de la zone OCDE de 5 000 milliards USD entre 2019 et 2024.

Encadré 1.1. Évolution des émissions de dette souveraine dans les marchés émergents et les économies en développement

Les émissions de dette des administrations centrales dans les marchés émergents et les économies en développement sont passées de 3 000 milliards USD en 2022 à 3 900 milliards USD en 2023, dépassant le pic de 3 200 milliards USD enregistré en 2021 (Graphique 1.3, partie A). Cette hausse est portée par la République populaire de Chine (Chine), dont le montant des émissions obligataires a plus que doublé en 2023 par rapport à 2022 en raison de l’augmentation des dépenses destinées à soutenir la croissance économique. En conséquence, la Chine représentait 37 % des emprunts bruts en 2023, contre 15 % en 2021. Les emprunts bruts n’ont diminué que dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) (-10 %) en 2023, ce qui pourrait traduire une préférence pour les prêts (concessionnels), comme dans le cas de l’Égypte, ou des besoins d’emprunt moins importants, comme dans les Émirats arabes unis.

La part de la dette émise en devises est restée stable à 5 % en 2023, malgré des variations entre les régions. En Asie, les valeurs sont restées stables : les émissions de la Chine sont libellées presque entièrement en monnaie nationale depuis 2002, tandis que le ratio pour les autres émetteurs asiatiques est de 2 %. Dans la région MENA, la part globale est passée de 5 % à 7 %, mais elle était nulle pour les pays à revenu élevé‑ de la région, comme le Koweït et le Qatar. Parmi les MEED européens, le ratio est passé de 17 % en 2022 à 20 % en 2023, sous l’impulsion de la Hongrie et de la Pologne, pour lesquelles l’émission de titres de dette libellés en devises était moins coûteuse en raison des taux directeurs élevés, tandis que le risque de change sur leurs euro-obligations est moindre du fait de leur interconnexion avec les économies de la zone euro. En Afrique subsaharienne, certains pays ont du mal à accéder aux marchés internationaux ; en conséquence, les émissions obligataires en devises ont chuté de 5 % en 2022 à 1 % en 2023.

Graphique 1.3. Emprunts bruts et risques de refinancement dans les marchés émergents et les économies en développement

Note : l’Annexe 1.D expose une méthodologie détaillée. Les moyennes présentées dans la partie D sont pondérées en fonction de la taille de l’émission, et le total fait référence à des données agrégées. Les groupes de pays sont conformes à la classification du FMI.

Source : LSEG ; et calculs de l’OCDE.

L’échéance moyenne des obligations souveraines émises par les MEED en 2023 a augmenté dans toutes les catégories de revenu, passant globalement de 4.4 à 4.8 ans (Graphique 1.3, partie D), même si des différences notables sont observées entre les pays. L’échéance à l’émission a augmenté le plus dans les pays à haut revenu, passant de 3 à 4.3 ans, avec en tête le Chili et la Pologne. Pour les pays à faible revenu (PFR), l’échéance s’est allongée de 5.4 ans en 2022 à 5.9 ans en 2023, même si elle a en fait diminué pour tous les pays de ce groupe à l’exception de la Tanzanie et de l’Ouganda, ce qui traduit peut-être les préoccupations des investisseurs concernant la plupart des économies à faible revenu dans le contexte actuel. L’Ukraine est l’un des émetteurs dont les échéances ont le plus diminué (passant de 7.8 ans à 1.6 an), du fait des difficultés qu’elle rencontre pour accéder aux financements du marché en raison de la guerre.

Bien que l’écart moyen entre les rendements des obligations souveraines des MEED et le rendement de référence des bons du Trésor américain à 10 ans ait diminué en 2023 dans toutes les régions à l’exception de l’Europe¹, il reste supérieur à 1 000 points de base (pb) en Afrique subsaharienne, ce qui constitue un seuil critique pour déterminer si un pays est en situation de surendettement. Cela met en évidence la difficulté rencontrée par les pays d’Afrique subsaharienne, qui sont pour la plupart des PFR : financer leurs besoins d’emprunt à de tels taux peut s’avérer prohibitif, ce qui les contraint à recourir à d’autres moyens de financement tels que des prêts concessionnels ou bilatéraux. Parmi les MEED européens, la hausse de l’écart moyen a été largement imputable à la Türkiye, où il a presque doublé pour atteindre 1 500 points de base. Hors Türkiye, l’écart de rendement de ces émetteurs a diminué (Graphique 1.4, partie A). On observe également une baisse notable des écarts de rendement en Zambie (-350 points de base), dont les négociations sur la restructuration de la dette ont progressé, et au Brésil (-300 points de base), qui a commencé à réduire ses taux directeurs sur fond de poursuite du resserrement monétaire mondial.

Plus d’un tiers des obligations souveraines des MEED arriveront à échéance en 2026, ce qui génère un risque de refinancement, particulièrement problématique pour les pays à revenu faible et intermédiaire de la tranche inférieure (PFR et PRITI) compte tenu de leurs coûts d’emprunt actuels plus élevés (Graphique 1.3, partie B). Parmi eux, l’Éthiopie a fait défaut en décembre, et 100 % de sa dette négociable arrivera à échéance en 2024 (soit environ 1 milliard USD). En outre, 100 % de la dette négociable du Myanmar (environ 2.7 milliards USD) arrivera à échéance dans les deux prochaines années, contre 62 % (environ 441 millions USD) au Malawi.

Le risque de refinancement peut être une source de préoccupation pour les économies appartenant à d’autres régions et catégories de revenu. Par exemple, plus de 60 % de la dette négociable de la Moldavie (soit l’équivalent de 8 % du PIB) arrivera à échéance en 2024. Ce chiffre est de 45 % pour l’Argentine (10 % du PIB) et l’Égypte (26 % du PIB). La part élevée des emprunts à court terme ces dernières années a aggravé le risque de refinancement dans un contexte de dégradation des perspectives de crédit souverain dans ces pays.

Les notes de crédit ont évolué de façon contrastée en 2023, avec un nombre quasiment identique de relèvements (27) et de dégradations (29), la plupart des révisions à la baisse se concentrant dans les PRITI (Graphique 1.4, parties B et C). Cela met en évidence les difficultés que les PRITI rencontrent dans le contexte du resserrement mondial de la politique monétaire et de la volatilité des prix des produits de base. Aucun pays n’a perdu son statut de catégorie investissement, mais l’Argentine, l’Éthiopie et l’Ukraine ont rejoint le groupe des pays obtenant une note moyenne correspondant au défaut de paiement ou s’en rapprochant. Ce groupe comprend également le Ghana, la Grenade, le Laos, le Liban, le Sri Lanka, le Suriname, le Venezuela et la Zambie. Le Cameroun et El Salvador ont obtenu temporairement des notes techniques de défaut avant de retrouver leur statut de catégorie spéculative.

Graphique 1.4. Écarts de rendement et notes de crédit dans les MEED

Note : L’Annexe 1.D présente une méthodologie détaillée. La partie A présente, regroupées par région, des moyennes simples des écarts de rendement par rapport au rendement de référence à 10 ans des États-Unis pour tous les pays pour lesquels cette mesure est disponible auprès de la LSEG. Ces pays sont l’Afrique du Sud, la Bulgarie, le Brésil, la Chine, la Fédération de Russie, la Hongrie, l’Indonésie, l’Inde, le Kenya, le Mexique, la Malaisie, les Philippines, la Pologne, la Roumanie, la Thaïlande, la Türkiye et la Zambie. Les valeurs figurant dans les parties B et C sont calculées à l’aide des notes d’émetteurs à long terme (étrangers) attribuées par Moody’s, Fitch et S&P. Si un pays a reçu plusieurs notes en un mois de la part de la même agence, c’est la plus basse qui est retenue, sauf s’il s’agit d’une note de défaut ou d’une note technique de défaut. Les définitions des marchés régionaux et des marchés émergents sont conformes à la classification des pays établie par le FMI.

1. La région MENA ne figurait pas dans l’analyse du fait de contraintes de données.

Source : LSEG ; et calculs de l’OCDE.

1.2.1. La part de la dette à court terme dans le total des emprunts devrait augmenter en 2023-24

La dette à court terme (titres émis avec une échéance inférieure à un an) représentait 50 % de l’endettement brut en 2023 et devrait atteindre 51 % en 2024, dépassant le pic précédent de 43 % enregistré en 2020 (Graphique 1.5, partie A). Cette évolution correspond à une diminution de la part des émissions de titres de créance à taux fixe, tandis que la part des instruments à taux variable et indexés sur l’inflation devrait rester stable à 3 %, malgré d’importantes fluctuations des niveaux d’inflation et des taux directeurs sur la période 2021-23. Malgré une augmentation des emprunts à court terme, l’échéance moyenne des titres de créance des pays de l’OCDE est restée globalement stable, aux alentours de 8 ans (voir le Graphique 1.20).

La part historiquement élevée des emprunts à court terme s’explique en grande partie par les incertitudes macroéconomiques et géopolitiques, combinées au resserrement quantitatif et à des niveaux plus élevés d’emprunts bruts3, compliquant l’émission de titres de créance à taux fixe supplémentaires pour certains émetteurs souverains. En conséquence, les émissions de titres de créance à court terme ont représenté plus de la moitié des nouveaux emprunts (2 000 milliards USD sur les 3 600 milliards USD) en 2023, ce qui a encore accru la part de la dette à court terme dans l’encours de la dette (Graphique 1.5, partie B).

L’émission d’instruments à court terme procure une grande souplesse opérationnelle aux gestionnaires de la dette, en permettant aux émetteurs de lever rapidement des fonds importants, ce qui facilite la gestion des incertitudes et des chocs temporaires. Pendant les périodes d’incertitude accrue et/ou lorsque l’endettement brut est plus élevé, la demande des investisseurs se déplace généralement vers les actifs les plus sûrs et les plus liquides (souvent des instruments à court terme). Du côté de l’offre, les crises sont source d’incertitudes quant à l’ampleur et à la durée des pertes de recettes et des coûts associés aux mesures de soutien public ; les instruments à court terme permettent de mieux faire correspondre les entrées et les sorties de fonds, et d’accélérer le remboursement si les pertes de recettes s’atténuent. C’est pourquoi les instruments à court terme ont été utilisés comme amortisseurs des chocs au début de la pandémie de COVID-19 (OECD, 2022[4]).

Graphique 1.5. Composition des instruments d’endettement brut et sources de financement

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

L’augmentation de la part des emprunts à court terme dans la zone OCDE en 2023 a été principalement le fait d’un petit groupe de grands émetteurs. Si la part des emprunts à taux fixe dans la zone OCDE a globalement baissé (Graphique 1.6, partie A), elle a en fait augmenté dans 19 pays, diminué dans 14 et est restée stable dans 5 autres. La hausse de la part des emprunts à court terme de grands émetteurs, comme l’Allemagne, le Canada, la France et surtout les États-Unis (où elle est passée de 49 % du total des émissions en 2022 à 62 % en 2023) a dépassé la hausse de la part des émissions de titres à taux fixe dans la moitié des pays de l’OCDE.

Les emprunts à court terme aux États-Unis ont augmenté, en particulier depuis juin 2023, principalement pour accroître le solde du compte général du Trésor. Une baisse rapide s’est produite dans les mois qui ont précédé la suspension de la règle du plafond d’endettement, ce qui a conduit le Trésor américain à financer en partie l’administration fédérale en puisant dans ce solde. Au second semestre de 2023, les conditions du marché ont été déterminées par cette offre accrue de titres du Trésor des États-Unis, conjuguée au resserrement quantitatif, et par la hausse des rendements à long terme, signe d’une possible évolution des taux d’intérêt neutres à long terme et des primes d’échéance. En novembre 2023, le Treasury Borrowing Advisory Committee (TBAC) a laissé entendre que cette augmentation tendancielle des emprunts à court terme aux États-Unis pourrait persister jusqu’au deuxième trimestre de 2025 (TBAC, 2023[5] ; TBAC, 2023[6]). De même, le Royaume-Uni a réduit la part des émissions d’obligations à long terme (et indexées sur l’inflation) en 2023-24 par rapport à 2022-23, car l’appétit des fonds de pension pour ces titres diminue sur fond de changement structurel de la demande (UK DMO, 2024[7]).

Graphique 1.6. Composition des instruments d’endettement brut

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

Vingt pays de l’OCDE émettent des titres indexés sur l’inflation qui constituent un produit sans risque très demandé et qui permettent aux investisseurs de se protéger de l’inflation. Ces titres peuvent contribuer à élargir la base d’investisseurs pour la dette publique et peuvent aussi s’avérer rentables pour les émetteurs. Avec le regain d’inflation en 2023, 14 de ces pays ont réduit la part des titres indexés sur l’inflation qu’ils ont émis (Graphique 1.6, partie C). Cette évolution s’est produite malgré une demande stable ou croissante du marché pour les titres indexés sur l’inflation, selon les résultats d’une enquête, ce qui dénote une inflexion stratégique dans la gestion du portefeuille de dette4. C’est la Colombie qui a enregistré la plus forte proportion d’emprunts sous forme de titres indexés sur l’inflation (53 %), alors que la moyenne des 20 émetteurs était de 9 %. En 2023, seule la Colombie a augmenté sa part des émissions de ces titres de plus de 1 point de pourcentage, tandis que celle de pays comme l’Italie et le Royaume-Uni a reculé de plus de 1 point. L’Allemagne a notamment cessé son programme d’émission de titres indexés sur l’inflation en 2023, tout comme le Canada en 2022 (Government of Canada, 2022[8]).

En raison de l’endettement brut plus élevé et de la perte des banques centrales en tant qu’acheteurs nets de dette souveraine, plusieurs émetteurs souverains ont davantage cherché à capter la demande des petits investisseurs. Les résultats de l’enquête montrent que 13 pays de l’OCDE accordent une plus grande attention au secteur des investisseurs individuels en 2023-24. Compte tenu de la hausse des rendements, les obligations d’État représentent un investissement de plus en plus attrayant pour les ménages généralement plus sensibles aux prix. Aussi, les émetteurs souverains tentent de capter cette demande par le biais de produits et/ou de programmes axés sur les petits investisseurs, dont les achats ont atteint des niveaux sans précédent en 2023 (Encadré 1.2).

Encadré 1.2. Programmes et produits visant les particuliers dans une sélection de pays de l’OCDE

Cet encadré décrit les programmes et produits d’émission de titres de dette à l’intention des particuliers en Belgique, aux États-Unis, en Italie, au Japon, au Portugal et au Royaume-Uni. Les émissions totales de titres de dette auprès des particuliers ont culminé à 222 milliards USD en 2022, en grande partie sous l’impulsion des États-Unis (Graphique 1.7, partie B), où les petits investisseurs peuvent soumissionner à la demande lorsque le Trésor américain met des titres aux enchères. Le précédent pic, en 2020, était principalement dû à l’activité au Royaume-Uni, où la baisse des taux directeurs ne s’est pas répercutée dans un premier temps sur les taux des produits destinés aux particuliers afin de contribuer à soutenir le financement public.

Graphique 1.7. Instruments et programmes d’émission visant les particuliers

Notes : la partie A correspond à novembre 2023. Les dates de début du programme du Royaume-Uni sont celles de la première émission d’obligations à lots. La partie B est classée par taille d’émission en 2022. Les données relatives aux États-Unis incluent tous les titres de créance et les obligations d’épargne vendus par l’intermédiaire de TreasuryDirect. Les données relatives au Japon comprennent uniquement les obligations d’État japonaises (JGB) pour les investisseurs individuels. Les données du Royaume-Uni se rapportent aux entrées brutes à la NS&I. La partie D indique l’échéance moyenne au moment de l’émission de titres de dette à l’intention des particuliers moins celle des titres de dette sur le marché de gros, pondérée par la taille de l’émission.

1. Les avantages fiscaux rattachés aux obligations de détail peuvent constituer une source de coûts supplémentaire.

Source. (Italian Ministry of Economy and Finance, 2023[9] ; Ministry of Finance of Japan, 2023[10] ; National Savings & Investments, 2023[11] ; Belgian Debt Agency, 2023[12] ; US Treasury Department, 2023[13] ; Portuguese Treasury and Debt Management Agency, 2023[14]); Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; et calculs de l’OCDE.

Ces dernières années, la part des programmes destinés aux particuliers dans le total des emprunts a atteint un niveau record dans tous les pays étudiés, à l’exception du Japon (Graphique 1.7, partie C), où les rendements nominaux restent inférieurs à 1 %. Au Portugal, les produits proposés aux petits investisseurs sont assortis de taux d’intérêt attractifs liés à l’Euribor. En Belgique, l’envolée de 2023 s’explique par l’émission d’un bon d’État à un an assorti d’une retenue d’impôt réduite offrant le coupon le plus élevé depuis 2011 (Graphique 1.7, partie D). Dans le même temps, les émissions obligataires destinées aux particuliers en Italie ont atteint un niveau record de plus de 8 % du total des emprunts bruts du pays en 2023.

Si les produits destinés aux particuliers peuvent permettre de diversifier le portefeuille et la base d’investisseurs, et couvrir en partie les besoins de financement, ils induisent une charge opérationnelle importante¹. La gestion des interfaces d’achat, des canaux de communication et des processus administratifs peut être contraignante, même si les progrès technologiques peuvent la faciliter (Boitreau et Secunho, 2020[15]). Les Organismes de gestion de la dette souveraine doivent également tenir compte du fait que l’émission d’instruments destinés aux particuliers représente une participation à des activités essentiellement privées, pour lesquelles les intermédiaires facilitent déjà l’accès du public. En outre, la demande à plus long terme des investisseurs individuels varie plus que celle des investisseurs institutionnels, alors même que le segment des investisseurs individuels n’offre pas la même échelle relative sur la plupart des marchés. L’Allemagne, en 2013, et le Canada, en 2017, ont choisi de mettre fin à leurs programmes de vente aux petits investisseurs.

1.2.2. Les stratégies d’émission doivent trouver le juste équilibre entre prévisibilité et flexibilité dans un environnement de financement incertain

Les Organismes de gestion de la dette souveraine (OGD) n’ont généralement pas d’influence sur les prix ; ils agissent en tant qu’intermédiaires pour mettre en correspondance les emprunts bruts et les financements du marché. Les niveaux d’emprunt et les conditions du marché échappent largement au contrôle des OGD. Par conséquent, leur rôle principal consiste à décider de la composition des instruments et des échéances en fonction du niveau d’emprunt, du calendrier des mouvements de trésorerie de l’État et de l’accès au marché. La décision implique de choisir parmi divers instruments de dette, chacun ayant son propre profil de demande des investisseurs, ce qui limite la composition possible de certains portefeuilles de dette.

Les émetteurs souverains choisissent la composition d’une émission dans le but de réduire les coûts d’emprunt à long terme tout en maintenant des niveaux de risque acceptables. Cette décision nécessite de trouver un compromis entre coût et risque : les instruments à court terme, bien que moins coûteux, comportent des risques de refinancement et de taux d’intérêt plus élevés, tandis que les instruments à long terme permettent généralement d’atténuer ces risques en contrepartie d’un coût plus élevé pour l’émetteur. Ainsi, pour remplir leur mandat à long terme, les émetteurs souverains optent généralement pour différentes échéances, avec des modèles d’émission programmatiques.

La stratégie d’émission sera toujours quelque peu dictée par la demande inégale entre échéances et par la nécessité de soutenir la liquidité du marché. Les titres à longue échéance, généralement achetés par les fonds de pension et les compagnies d’assurance, sont moins demandés à l’échelle mondiale, ce qui réduit les options stratégiques des émetteurs souverains. Pour améliorer la liquidité du marché, les OGD rouvrent souvent des lignes individuelles plusieurs fois jusqu’à atteindre une taille de référence, mais cela peut aussi être coûteux. C’est notamment le cas pour les titres à long terme, dont la durée plus longue réduit la valeur de marché de façon plus marquée pendant les périodes de taux élevés, générant des entrées de trésorerie relativement plus faibles pour le même montant de dette émise.

En 2023, la plupart des OGD de la zone OCDE voyaient dans la volatilité des marchés, la hausse des rendements et les prévisions de trésorerie leurs principaux motifs de préoccupation (Graphique 1.8, partie A). L’inflation, bien qu’orientée à la baisse, est restée supérieure à l’objectif visé, la hausse des prix des services s’étant révélée particulièrement forte. La croissance économique est freinée par les politiques monétaires restrictives et par l’atonie du commerce mondial (OECD, 2023[1] ; OECD, 2024[16]). Les tensions géopolitiques, notamment la guerre en Ukraine et le conflit au Moyen-Orient, contribuent à la volatilité des marchés. Même si les flux de trésorerie sont plus stables que pendant la pandémie, les besoins de financement affichent encore des fluctuations supérieures à la moyenne, les finances publiques étant mises à l’épreuve par des facteurs structurels tels que les évolutions démographiques et les efforts de décarbonation, et par le contexte actuel caractérisé par des coûts d’intérêt plus élevés et une croissance de la production plus lente.

Les conditions macrofinancières ont un impact significatif sur les coûts d’atténuation des risques. En période d’incertitude économique, la réticence des investisseurs à prendre des risques à plus long terme peut accroître le coût des émissions à plus longue échéance. Par conséquent, les coûts de portefeuilles à faibles risques augmentent dans de tels scénarios. En outre, dans l’environnement actuel de taux d’intérêt plus élevés, s’engager sur des échéances à long terme pourrait risquer de verrouiller ces taux plus élevés sur une longue période (risque de regrets), ce qui souligne que les considérations tenant aux coûts et aux risques vont au-delà de la forme actuelle des courbes de rendement. En 2022-23, on a constaté une augmentation correspondante des courbes de risque efficaces par rapport à leur coût.

Les stratégies d’émission restent flexibles dans tous les pays de l’OCDE, dans un environnement incertain. Tous les OGD ont recours à des stratégies flexibles pour gérer les risques, 81 % d’entre eux utilisant des volants de liquidités et 73 % adaptant leurs stratégies de communication (Graphique 1.8, parties B et C). L’intérêt des volants de liquidités réside dans la disponibilité de liquidités en cas de conditions imprévues sur le marché, sans qu’il soit nécessaire que les émissions recoupent étroitement les sorties de fonds, ce qui facilite une approche plus souple en matière d’émission. Les stratégies de communication sont également cruciales pour trouver le juste équilibre entre flexibilité et prévisibilité.

La flexibilité a ses limites, les grands émetteurs privilégiant souvent une approche programmatique des émissions. Des changements soudains dans les stratégies d’émission des grands émetteurs peuvent avoir un impact immédiat sur la courbe des rendements. Ils peuvent accroître la volatilité et réduire leur capacité à accomplir leur mandat et à assurer un accès permanent au marché. Lorsque des changements stratégiques sont nécessaires, les émetteurs s’efforceront de les annoncer le plus tôt possible. Par exemple, en 2023, les États-Unis ont été le seul grand émetteur à modifier la composition des instruments de son plan d’émission (au profit d’instruments à plus court terme), et ils ont communiqué un calendrier correspondant (US Treasury, 2023[17]).

Les petits émetteurs adoptent généralement une approche plus souple de la gestion de la dette, étant donné que les changements de stratégie ont généralement moins d’incidence sur leurs marchés. Cela explique pourquoi les changements annuels de grande ampleur dans les stratégies d’émission sont plus souvent le fait de petits émetteurs (Graphique 1.6). C’est également pour cette raison qu’en dehors des États-Unis, les douze pays qui ont modifié la composition des instruments de leur stratégie initiale sont des émetteurs relativement petits (Graphique 1.8, partie C)5.

La flexibilité suppose également la possibilité de moduler les techniques d’émission et de modifier le calendrier des enchères et les annonces. En 2023, les changements ont notamment concerné la fréquence des adjudications, l’utilisation d’opérations de conversion, le recours aux syndications, aux placements privés, aux rachats et aux mécanismes post-enchères (Graphique 1.8, partie D). Parmi les autres exemples, on peut citer le recours à des transactions en deux ou trois tranches, qui permettent à un émetteur de proposer plusieurs titres de créance assortis de conditions différentes dans le cadre d’une même émission, afin de s’adapter aux préférences des investisseurs et aux conditions du marché ; et l’annonce à l’avance du volume total d’émission, mais en retardant la communication de la composition de l’instrument. Ces méthodes permettent aux OGD de mieux faire correspondre les besoins de financement volatils et la demande de certains titres.

Ces changements sont contrebalancés par des pratiques qui améliorent la prévisibilité. On peut citer à titre d’exemples la fixation d’une taille cible minimale pour l’encours des titres de référence ; la transparence des consultations de marché, des retours d’information et des ajustements afin d’éviter des variations inattendues de l’offre ; la tenue d’un calendrier d’émission avec des émissions hebdomadaires de divers titres ; et le choix d’ajustements progressifs, chaque fois que possible, de la taille et du calendrier prévus des adjudications, ce qui permet d’adapter les adjudications aux toutes dernières conditions de marché.

Graphique 1.8. Difficultés rencontrées lors d’émissions récentes et mesures prises par les émetteurs souverains

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés primaires.

1.3. Les ratios dette/PIB sont restés globalement stables en 2023, après avoir diminué en 2021 et 2022, et devraient repartir à la hausse en 2024

On estime que le ratio agrégé dette/PIB dans la zone OCDE, mesuré par la dette négociable des administrations centrales, restera globalement stable en 2022-23, à 83 %, et qu’il augmentera légèrement pour atteindre 84 % en 2024 (Graphique 1.9, partie A). Ce chiffre global masque la forte variabilité des ratios dette/PIB entre les pays (Graphique 1.9, partie D). Une hausse de plus de 1 point de pourcentage est prévue dans neuf pays, les États-Unis en tête, où le ratio devrait progresser de 3 points. À l’inverse, les ratios dette/PIB de 12 pays devraient diminuer de plus de 1 point de pourcentage, avec un recul supérieur à 5 points au Japon, au Portugal et en Espagne.

En 2023, les ratios dette/PIB ont dépassé les niveaux d’avant la pandémie d’environ 5 points de pourcentage en moyenne et de 10 points au total dans la zone OCDE6. 24 pays ont enregistré une progression de leur ratio, qui a dépassé 8 points de pourcentage dans tous les pays du G7. Les ratios dette/PIB du Japon et des États-Unis ont augmenté respectivement de plus de 24 et 22 points de pourcentage depuis 2019. Au cours de la même période, les ratios dette/PIB ont baissé dans 14 pays, reculant de plus de 10 points de pourcentage en Irlande, en Pologne, au Portugal et en Suède. Il convient de noter que les ratios dette/PIB et leur évolution varient considérablement en fonction des méthodes d’évaluation de la dette, les approches suivies n’étant pas les mêmes pour les Perspectives des emprunts souverains, les Comptes nationaux et les Perspectives économiques de l’OCDE (voir l’Encadré 1.3).

La part de la dette à court terme dans l’encours de la dette de l’OCDE a augmenté et devrait atteindre 16 % d’ici à 2024 (Graphique 1.9, partie B), soit la valeur la plus élevée depuis 15 ans à l’exception de 2020. Parallèlement, on estime que la proportion d’instruments à taux fixe est passée de 79 % en 2022 à 76 % en 2023 - le pourcentage le plus faible depuis 2010 sauf en 2020, période pendant laquelle les avoirs obligataires des banques centrales étaient négligeables.

Malgré ce recul, la dette à taux fixe continue de représenter plus de la moitié de l’encours de la dette dans tous les pays de l’OCDE en 2023. La part de la dette à court terme s’échelonne entre 0 % dans 9 pays de l’OCDE et 22 % aux États-Unis, tandis que la part des obligations indexées sur l’inflation est comprise entre 0 % dans 17 pays et 32 % au Chili (Graphique 1.9, partie C).

Graphique 1.9. Encours de la dette de l’administration centrale, ratios dette/PIB et composition de la dette dans les pays de l’OCDE

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

Encadré 1.3. Méthodes de calcul de la dette souveraine

Les méthodes de calcul de la dette brute diffèrent principalement en fonction du périmètre des administrations publiques, des instruments couverts et de la valorisation des instruments financiers (Graphique 1.10, partie A). En 2022, les ratios dette/PIB s’élevaient à 83 % selon les Perspectives des emprunts souverains, 113 % selon les Perspectives économiques et 114 % selon les Comptes nationaux (Graphique 1.10, partie B). La dette infranationale représente environ les deux tiers de cet écart, tandis que la dette non négociable de l’administration centrale représente l’autre tiers. Les pays dont la dette infranationale est élevée, comme le Canada, ou dont la dette non négociable est importante, comme la Grèce, afficheront des écarts plus importants en fonction de la méthodologie retenue (Graphique 1.10, partie C).

Graphique 1.10. Différences méthodologiques et chiffres du ratio dette/PIB

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; (OECD, 2023[1]) ; (OECD, 2023[18]) ; (Rawdanowicz et al., 2021[19]) sites web des autorités nationales ; base de données de l’OCDE sur la décentralisation budgétaire ; et comptes nationaux de l’OCDE.

Les méthodes de valorisation peuvent amplifier considérablement les variations des ratios dette/PIB. L’utilisation de la valeur nominale dans les Perspectives des emprunts souverains permet de s’assurer que les fluctuations des rendements n’ont pas d’incidence sur les chiffres de la dette, contrairement à l’approche fondée sur la valeur de marché des Perspectives économiques et des Comptes nationaux1. En 2022, la hausse des taux d’intérêt a contribué à faire baisser les ratios dette/PIB de plus de 20 points de pourcentage dans neuf pays selon les méthodologies des Comptes nationaux et des Perspectives économiques, contre seulement 10 points de pourcentage au maximum selon la méthodologie des Perspectives des emprunts souverains (Graphique 1.10, partie D). Si la méthode de la valeur de marché est judicieuse pour des pratiques telles que les rachats de dette, il est essentiel de noter que les obligations sont remboursées à leur valeur nominale à l’échéance. Par conséquent, les gestionnaires de la dette doivent procéder à des refinancements en se basant sur cette valeur.

1. Les Perspectives économiques de l’OCDE suivent généralement la méthode des Comptes nationaux en procédant à des ajustements (comme indiqué dans le Graphique 1.10, partie A). Néanmoins, elles livrent également d’autres chiffres sur la dette, en particulier pour les pays de l’UE, en s’appuyant sur la définition de la dette au sens de Maastricht, qui utilise les valeurs nominales pour la valorisation des instruments financiers.

1.3.1. L’inflation a compensé la hausse des coûts d’emprunt dans les trajectoires du ratio dette/PIB en 2022-23

La baisse des ratios dette/PIB entre 2021 et 2023 s’explique principalement par la hausse de l’inflation, qui a stimulé la croissance du PIB nominal, et en partie par la croissance du PIB réel (Graphique 1.11). Depuis 2021, l’inflation a contribué à une baisse de 13 points de pourcentage de ces ratios, tandis que la croissance du PIB réel les a fait reculer de 8 points7. Le rendement réel, qui combine l’impact des taux nominaux et de l’inflation, était négatif dans presque tous les pays de l’OCDE8. L’essentiel de la dette de l’OCDE a été émise à une période où l’inflation et les taux d’intérêt étaient plus faibles, entraînant des coûts moindres (Graphique 1.19). Aussi, le niveau actuel de croissance du PIB nominal a dépassé les taux d’intérêt effectifs (c’est-à-dire le ratio des charges d’intérêts rapportées à l’encours de la dette), ce qui contribue à faire baisser les ratios dette/PIB.

Compte tenu du reflux de l’inflation et de l’augmentation du montant de la dette émise à des taux plus élevés, la tendance à la baisse des ratios dette/PIB observées entre 2021 et 2023 devrait s’inverser en 2024. Si l’effet de l’inflation sur le PIB nominal est immédiat et de courte durée, les effets du renchérissement des coûts d’emprunt sur les dépenses d’intérêts sont progressifs et durables. L’inflation a pour effet initial de faire baisser les ratios dette/PIB, mais si elle persiste, elle a pour conséquence à moyen et long terme d’accroître la prime d’inflation et les coûts de financement de la dette.

L’inflation ne contribue guère à améliorer la viabilité de la dette, car les trajectoires du ratio dette/PIB sont principalement déterminées par les soldes budgétaires à long terme, l’inflation inattendue n’ayant qu’un impact à court terme. Les données rétrospectives soulignent le rôle crucial des soldes primaires dans l’évolution de ces trajectoires et invitent à la prudence dans l’interprétation des baisses récentes (Rawdanowicz et al., 2021[19] ; Acalin et Ball, 2023[20]). Pour éviter une boucle de rétroaction négative entre hausse des taux d’intérêt, ralentissement de la croissance et creusement des déficits, il est essentiel de mener des politiques budgétaires prudentes, étayées par des cadres budgétaires à moyen terme crédibles. Consciente de ce risque de boucle de rétroaction, l’UE envisage d’intégrer une analyse de viabilité de la dette dans son nouveau cadre de règles budgétaires9.

Graphique 1.11. Décomposition des variations du ratio dette/PIB dans la zone OCDE

Note : la décomposition des ratios dette/PIB associe des informations provenant des administrations centrales et des administrations publiques. Pour plus de détails, voir l’Annexe 1.B.

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales (2023) ; LSEG; (OECD, 2023[1]); (IMF, 2023[2]) sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

1.4. Les coûts d’emprunt ont augmenté moins vite en 2023 qu’en 2022

Les coûts d’emprunt pour les nouvelles dettes, mesurés par le taux de rendement à l’échéance au moment de l’émission, sont passés d’environ 3 % en 2022 à 4 % en 2023 en moyenne dans les pays de l’OCDE. Cette hausse représente environ la moitié de l’augmentation de près de 2 points de pourcentage observée en 2022, portant les coûts d’emprunt en 2023 à près de deux fois leur moyenne de 2015-19 (Graphique 1.12). En outre, contrairement à 2022, année où une hausse s’est produite dans tous les pays, cinq pays ont vu leur taux de rendement moyen à l’échéance diminuer en 2023, certaines banques centrales ayant abaissé leurs taux l’année dernière (par exemple le Chili, la Pologne et la Tchéquie). Cela donne à penser que la hausse du taux de rendement à l’échéance ralentit, et qu’il est peu probable que de nouvelles hausses interviennent, car les taux directeurs devraient baisser dans la plupart des pays en 2024 (OECD, 2024[16]).

Les taux nominaux négatifs, courants dans de nombreux pays européens en 2020 et 2021, ne se sont produits qu’au Japon en 2023 (Graphique 1.12, partie B). En outre, le pourcentage de la dette émise à des coûts d’emprunt inférieurs à 2 % a fortement diminué, chutant de près de 40 % en 2022 à 15 % en 2023, tandis que la proportion de la dette émise avec un rendement supérieur à 4 % a plus que triplé, passant de 11 % en 2022 à 37 % en 2023.

L’augmentation du taux de rendement moyen à l’échéance en 2023 a été plus forte dans les pays européens. Sur les 20 pays ayant enregistré les plus fortes hausses de ce taux au moment de l’émission, 13 appartenaient à la zone euro et 5 étaient des pays européens non membres de la zone euro. Cette tendance reflète l’intensification de la politique de resserrement monétaire menée par la BCE en 2023, qui marque une rupture par rapport à 2022, année où les hausses des taux directeurs et des rendements intervenues dans les pays de la zone euro comptaient parmi les plus faibles enregistrées (Graphique 1.13, partie A). Parallèlement, l’année 2023 a été marquée par un resserrement de l’écart de rendement par rapport aux obligations allemandes dans 12 pays européens, et cet écart s’est creusé dans 3 pays seulement, peut-être en raison d’une perception de moindre risque, et du panachage des réinvestissements de la BCE dans le cadre de ses programmes d’achat d’actifs.

Graphique 1.12. Coûts d’emprunt des nouvelles émissions de titres de dette

Note : les parties A, B et C du graphique comprennent uniquement les instruments à taux fixe libellés en monnaie nationale, tandis que la partie D comprend toutes les émissions.

Source : LSEG ; et calculs de l’OCDE.

La hausse des rendements repose principalement sur les anticipations relatives aux taux directeurs des banques centrales, le taux directeur moyen dans la zone OCDE étant passé de 5 % en 2022 à 6 % en 2023 (Graphique 1.13, partie A). En 2023, 15 des 20 banques centrales de la zone OCDE ont relevé leurs taux directeurs. En particulier, la BCE a relevé ses taux directeurs de 2.0 points de pourcentage, soit la deuxième plus forte hausse de la zone OCDE derrière la banque centrale islandaise. La Banque du Japon maintient ses taux directeurs à un niveau proche de zéro depuis 2016, tandis que les banques centrales du Chili, de la Tchéquie, de la Hongrie et de la Pologne ont commencé à les abaisser en 2023.

Les taux nominaux sont généralement déterminés par trois facteurs : les taux d’intérêt réels, les anticipations d’inflation et une prime de risque. Les taux d’intérêt réels correspondent aux rendements réels que les consommateurs et les épargnants exigent en contrepartie d’un report de la consommation. Il s’agit d’une estimation du rendement réel des investissements, qui est largement déterminée par les anticipations de croissance économique réelle et la volatilité. Les anticipations d’inflation sont intégrées dans les taux d’intérêt nominaux afin de compenser les anticipations des épargnants en matière de variation des niveaux de prix. La prime de risque indemnise les investisseurs pour l’incertitude entourant les niveaux d’inflation futurs. Cette prime est généralement plus élevée pour les obligations à échéance plus longue du fait que les anticipations à long terme sont entourées d’une incertitude accrue, tandis que les obligations à court terme sont plus directement affectées par les taux directeurs en vigueur et les anticipations d’inflation plus immédiates.

En 2023, les rendements moyens n’ont cessé d’augmenter dans les pays de l’OCDE, coïncidant avec une baisse des points morts d’inflation et une hausse des rendements réels (Graphique 1.13, parties B, C et D)10. Selon le principe de non-arbitrage, qui suppose que les titres ayant les mêmes flux de trésorerie devraient avoir des prix identiques, le taux au comptant d’une obligation est équivalent au taux au comptant d’une obligation à plus court terme et à la série des taux anticipés à court terme futurs jusqu’à l’échéance de l’obligation. Cela implique que le prix du marché reflète les anticipations selon lesquelles les taux futurs à court terme resteront élevés, ce qui donne à penser qu’à moyenne échéance, les taux directeurs ne se replieront pas au niveau proche de zéro qui a prévalu pendant une grande partie de la dernière décennie - de sorte que les taux demeureront à des niveaux plus élevés sur longue période11.

Graphique 1.13. Facteurs d’augmentation des coûts d’emprunt

Note : les parties B, C et D présentent la moyenne simple de la zone OCDE et la fourchette comprise entre les 10^e et 90^e centiles pour les pays pour lesquels des données sont disponibles.

Source : adapté de (BIS, 2023[21]) et LSEG.

1.4.1. Les primes d’échéance sont à des niveaux historiquement bas, et les courbes de rendement présentent des degrés d’inversion variables

La prime d’échéance (l’écart de rendement sur le marché secondaire des obligations de référence à 10 ans et à 2 ans) est un indicateur clé que les émetteurs souverains doivent prendre en compte lorsqu’ils évaluent le rapport entre coûts et risques. La prime d’échéance est généralement positive, et correspond au rendement supplémentaire demandé par les investisseurs en contrepartie du risque induit par l’achat d’obligations à plus long terme. La prime d’échéance varie en fonction de facteurs tels que l’offre et la demande d’obligations sur l’ensemble de la courbe, les anticipations d’inflation et de taux d’intérêt, le cycle économique et la croissance de la production. Les OGD peuvent utiliser cette prime pour évaluer l’arbitrage entre la dette à court terme, généralement moins coûteuse et présentant un risque de liquidité et de refinancement accru, et la dette à long terme, habituellement assortie d’un risque de refinancement et de liquidité plus faible, mais plus coûteuse.

La prime d’échéance moyenne dans la zone OCDE a atteint des niveaux historiquement bas, proches de zéro en 2023 (Graphique 1.14, partie A). Ce chiffre est orienté à la baisse depuis 2009, en grande partie du fait de la demande accrue d’échéances plus longues motivée par la recherche de rendements positifs dans un contexte où les banques centrales ont ramené les taux d’intérêt à un niveau égal ou proche de zéro et ont mené des programmes d’assouplissement quantitatif ; des anticipations de niveaux d’inflation futurs plus faibles ; et de la croissance en demi-teinte, qui fait baisser les rendements attendus des investissements futurs (Cohen, P. et Xia, 2018[22]). Cette tendance à la baisse s’est interrompue en 2021 sur fond d’incertitude accrue quant à la trajectoire des taux directeurs et de l’inflation, mais elle a repris en 2022-23, l’inflation s’atténuant et les marchés anticipant une baisse des taux directeurs en 2024.

Graphique 1.14. Primes d’échéance correspondant à l’écart de rendement des obligations de référence à 10 ans et à 2 ans

Note : les parties A et B présentent la moyenne simple de la zone OCDE et la fourchette comprise entre les 10^e et 90^e centiles.

Source : LSEG ; et calculs de l’OCDE.

Tout au long de l’année 2023, la prime d’échéance a évolué dans des directions différentes, reflétant le changement des conditions au fil des mois (Graphique 1.14, partie B). Elle est restée stable de janvier à mai avant de refluer en juin et juillet, sous l’effet du recul de l’inflation aux États-Unis et en Europe et des peurs croissantes de récession. De juillet à décembre, la tendance s’est inversée, la prime repartant à la hausse sous l’effet des déséquilibres entre l’offre et la demande provoqués par l’augmentation des besoins d’emprunt, en particulier aux États-Unis, et du resserrement quantitatif.

En 2023, la prime d’échéance a globalement baissé dans plus des deux tiers des pays, mais la dynamique n’était pas la même dans les économies de la zone euro et dans celles hors zone euro (Graphique 1.14, partie C). Dans la zone euro, tous les pays ont enregistré une baisse de la prime d’échéance, de 0.5 point de pourcentage en moyenne, reflétant l’érosion généralisée des rendements à 10 ans dans la région. En dehors de la zone euro, les primes d’échéance ont évolué dans les deux sens, avec une augmentation des rendements à 10 ans dans la moitié des pays et une diminution dans l’autre moitié. Par rapport aux niveaux de 2015-19, le Japon est le seul pays où les primes d’échéance ont augmenté, traduisant la flexibilité accrue du mécanisme de contrôle de la courbe des rendements par la Banque du Japon (BoJ, 2023[23]).

Dans les pays du G7, les courbes des rendements nominaux sont restées globalement inchangées et se sont inversées en 2023, alors qu’avant la pandémie, presque tous les pays du G7 affichaient des courbes à pente ascendante (Graphique 1.15). La courbe des rendements nominaux du Canada, du Japon et des États-Unis est restée globalement inchangée en 2023. Au cours de la même période, les rendements nominaux ont augmenté à court terme au Royaume-Uni, mais ont légèrement baissé pour les obligations de référence à 5, 7 et 10 ans, ce qui a entraîné une nouvelle inversion. Les rendements à court terme ont également progressé en Allemagne, en France et en Italie en 2023, tandis que leurs courbes de rendements nominaux ont affiché des degrés d’inversion variables.

Les courbes de rendements sont généralement ascendantes, reflétant des primes de risque qui s’alignent sur la durée des obligations, tandis que les pentes descendantes suggèrent des réductions anticipées des donné que le marché s’attend toujours à ce que les taux directeurs convergent vers le taux neutre à long terme. Compte tenu de la nature cyclique de taux courts élevés pendant les périodes de forte inflation, les courbes de rendement s’inversent souvent pendant ces périodes12.

Graphique 1.15. Formes des courbes des rendements nominaux et réels dans les pays du G7

Note : l’absence de données signale l’insuffisance de données disponibles. Le rendement réel correspond au rendement nominal diminué du point mort d’inflation pour une même échéance.

Source : LSEG et calculs de l’OCDE.

Les courbes de rendement inversées peuvent avoir une incidence sur l’arbitrage coût-risque entre les différentes stratégies d’emprunt. Elles impliquent que les échéances plus longues supportent des coûts plus faibles et comportent moins de risques que les échéances plus courtes, car les taux sont fixés pour une période plus longue à un niveau plus bas. Cependant, comme les courbes inversées anticipent une baisse des taux d’intérêt, le fait de verrouiller un certain niveau de rendement à plus long terme au moment où les taux d’intérêt sont peut-être sur le point de baisser peut entraîner un risque de regrets. Par conséquent, certains OGD choisissent de privilégier les émissions à échéances plus courtes. En outre, les stratégies d’émission devraient prendre en compte les caractéristiques de la demande sur tout l’éventail des échéances, certains investisseurs privilégiant systématiquement des segments spécifiques de la courbe, tels que la préférence des fonds de pension pour les investissements à plus long terme et la préférence des organismes de placement collectif monétaires (OPC monétaires) pour les instruments à plus court terme. Aussi, une stratégie d’émission bien équilibrée, comportant une offre régulière aux échéances de référence clés sur toute la courbe, est souvent la norme, quelle que soit la forme de la courbe.

À l’instar des courbes de rendements nominaux, les courbes de rendements réels des pays du G7 sont restées globalement inchangées en 2023, tous les pays du G7, à l’exception du Japon, affichant des valeurs largement positives. Fin 2023, les courbes de rendement réel se sont inversées à court terme dans tous les pays du G7, à l’exception du Canada et du Japon.

La principale conséquence des rendements réels positifs est d’exercer une pression sur les soldes primaires, ce qui accroît le risque d’un cercle vicieux de creusement des déficits par le biais d’une augmentation des charges d’intérêts et de la dette. Le décalage entre taux d’intérêt réels et croissance du PIB est un facteur clé de la dynamique d’évolution du ratio dette/PIB. La plupart des dettes publiques des pays de l’OCDE se sont accumulées lorsque la croissance du PIB dépassait les taux réels, ce qui a permis aux États d’accuser des déficits budgétaires primaires tout en conservant des ratios dette/PIB en baisse. Aujourd’hui, alors que la dette de l’OCDE atteint des niveaux record et est refinancée sur fond de taux d’intérêt réels positifs, la plupart des États doivent dégager des excédents primaires pour stabiliser leurs ratios dette/PIB. Toutefois, y parvenir pourrait être plus difficile que par le passé dans le contexte actuel de tensions accrues sur les dépenses (OECD, 2023[1]). Les OGD, de par leur rôle d’intermédiaires entre les pouvoirs publics et les marchés, ne peuvent agir que sur le calendrier et sur les échéances de la dette, sans que cela ait d’impact significatif sur les trajectoires du ratio dette/PIB.

1.5. Les charges d’intérêts ont augmenté en 2023 et devraient continuer de s’alourdir en 2024

Les charges d’intérêts devraient avoir progressivement augmenté dans les pays de l’OCDE, passant de 2.3 % en 2021 à 2.9 % du PIB en 2023 (Graphique 1.16, partie A). D’après les estimations, le ratio charges d’intérêts/PIB a augmenté dans 20 pays, évolué de façon négligeable dans neuf et diminué dans quatre13. Il devrait notamment avoir progressé de plus de 0.5 point de PIB en 2023 aux États-Unis, en Grèce, en Hongrie, en Nouvelle-Zélande et en République tchèque. Face à cette tendance globale à la hausse, l’Italie et le Royaume-Uni devraient en revanche avoir vu leurs charges d’intérêts diminuer en proportion du PIB en 2023, par rapport à 2022, et ce en raison du recul de l’inflation, qui devrait entraîner une diminution des charges d’intérêts au titre des obligations indexées sur l’inflation, lesquelles représentent environ 10 % et 25 % des portefeuilles d’emprunts de ces pays.

Le ratio charges d’intérêts/PIB escompté en 2023 dans la zone OCDE est supérieur de seulement 0.3 point de pourcentage aux niveaux observés sur la période 2015-19 (Graphique 1.16, partie B). Malgré un contexte de rendements plus élevés, seuls 15 pays devraient avoir vu ce ratio augmenter en 2023 par rapport aux niveaux antérieurs à la pandémie. Au cours de cette période, le Royaume‑Uni a enregistré la plus forte hausse : son ratio charges d’intérêts/PIB a progressé de 1.8 point de PIB, soit près de deux fois plus qu’en Hongrie (1.0 point) et trois fois plus qu’en France et aux États-Unis (0.6 point de PIB dans les deux pays). Cette progression représente près des deux tiers des dépenses d’investissement annuelles du Royaume-Uni (OECD, 2023[18]).

Dans la zone euro, les charges d’intérêts sont relativement moins lourdes et ont évolué dans une moindre mesure. En proportion du PIB, elles restent généralement plus faibles dans les pays de la zone euro que dans les pays affichant un ratio dette/PIB comparable, sauf en Italie et en Grèce, ce qui s’explique par le niveau plus bas des taux directeurs de la BCE et par le recul des anticipations d’inflation (Graphique 1.16, partie C). La hausse plus modérée des charges d’intérêts dans la zone euro tient aussi au profil de la dette de ses pays membres (Graphique 1.16, partie D).

En 2023, l’augmentation du ratio charges d’intérêts/PIB a été inférieure à celle du coût moyen d’émission, qui s’est accru de 1 point de pourcentage (Graphique 1.12, partie A), car les charges d’intérêts varient généralement de manière progressive dans les pays de l’OCDE, ceux-ci détenant essentiellement des titres de dette à taux fixe. Comptabilisées sur la base des droits constatés (principale méthode utilisée dans la zone OCDE), les charges d’intérêts s’accumulent chaque année de manière proportionnelle, en fonction du taux de rendement à l’émission et du montant de l’encours14. Sachant que les pays de l’OCDE procèdent rarement au refinancement de plus d’un quart de leur dette au cours d’une année, les charges d’intérêts évoluent en général de manière marginale (Graphique 1.16, partie B). Les titres indexés sur l’inflation diffèrent de ceux à taux variable dans la mesure où leur coût varie en fonction du niveau du taux d’inflation pour les premiers et des taux d’intérêt pour les seconds.

Graphique 1.16. Évolution des charges d’intérêts des administrations publiques dans la zone OCDE

Note : les charges d’intérêts correspondent aux intérêts bruts versés par les administrations publiques (chiffres tirés des Perspectives économiques de l’OCDE). Les valeurs relatives à 2023 sont des estimations et celles relatives à 2024 sont des projections. Dans la partie B, la zone grisée indique la fourchette comprise entre les 10^e et 90^e centiles. La dette dont le taux a été refixé est soit une dette arrivée à échéance et refinancée, soit une dette dont le taux d’intérêt (variable ou indexé sur l’inflation) a été révisé au cours de la période considérée.

Source : Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; (OECD, 2023[1]) ; (IMF, 2023[2]) ; sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

Les charges d’intérêts sur les obligations indexées sur l’inflation ont sensiblement augmenté sous l’effet de la hausse soudaine de l’inflation en 2022-23, mais elles devraient diminuer à l’avenir. En 2022, ce type d’obligations représentait quelque 8 % de l’encours total de la dette de la zone OCDE, mais environ 30 % des charges d’intérêts (Graphique 1.17). En 2023, la part de la dette indexée sur l’inflation dans l’encours total est restée relativement stable, tandis que la proportion des charges d’intérêts liées à ce type d’instrument obligataire a diminué de moitié. Elle représente toutefois encore environ le double de la part de cet instrument dans l’encours total de la dette.

Les charges d’intérêts sur les instruments à taux variable devraient diminuer parallèlement aux taux directeurs en 2024. Étant donné que ces instruments ne représentaient qu’environ 2 % de l’encours de la dette de la zone OCDE et 4 % des charges d’intérêts en 2022-23, la baisse des charges d’intérêts sur la dette à taux variable sera mineure par rapport à celle attendue sur les titres indexés sur l’inflation.

Les instruments à court terme suivent une trajectoire comparable à celle des titres à taux variable, quoique décalée dans le temps. Ils représentent en outre une part beaucoup plus importante de l’encours de la dette. Alors que les coûts d’emprunt des instruments à taux variable évoluent rapidement en fonction des taux directeurs, les instruments à court terme sont refinancés aux taux en vigueur lorsqu’ils arrivent à échéance. Les paiements d’intérêts versés au titre de ces instruments ont donc été relativement modestes en 2022, nombre d’entre eux ayant été émis à la fin de 2021 ou au début de 2022, à des taux plus faibles. En 2023, les instruments à court terme représentaient toutefois 15 % du portefeuille de dette et 23 % des charges d’intérêts. Étant donné que le décalage temporel peut aller jusqu’à un an, une diminution des charges d’intérêts correspondantes, dans l’hypothèse d’une baisse des taux directeurs en 2024, n’est pas attendue avant 2025 (OECD, 2024[16]).

S’agissant des instruments à taux fixe, qui représentent près de 80 % du portefeuille d’emprunts des pays de la zone OCDE, une hausse des charges d’intérêts est attendue à court et à moyen terme. Sur la période 2009-20, la part des charges d’intérêts sur les titres à taux fixe était, en moyenne, supérieure de 10 % à la part de ces instruments dans l’encours total. Cet écart tient au fait qu’une grande partie de l’encours de la dette à taux fixe a été émise au cours de la décennie précédente, lorsque les taux étaient plus élevés que pendant la période 2009-20. On s’attend à l’avenir à une évolution similaire de la situation : les titres à taux fixe récemment émis sont assortis de taux plus élevés, ce qui entraînera une hausse des charges d’intérêts, même en cas de baisse des taux directeurs.

Graphique 1.17. Parts de divers instruments dans l’encours de la dette de la zone OCDE et charges d’intérêts

Note : la proportion des charges d’intérêts est calculée sur la base des droits constatés. Des précisions méthodologiques figurent à l’Annexe 1.C.

Source : Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; et calculs de l’OCDE.

1.5.1. Les obligations indexées sur l’inflation peuvent présenter des avantages à plus long terme en matière de gestion des coûts et des risques, même sur fond de hausse des charges d’intérêts

En théorie, le coût d’émission de titres d’emprunt à taux fixe est plus élevé du fait du risque de duration, tandis que l’émission de titres indexés sur l’inflation est généralement moins onéreuse, les investisseurs étant disposés à payer une prime pour se protéger contre l’inflation. En 2022-23, il s’est toutefois révélé plus coûteux d’émettre des titres indexés sur l’inflation que des titres à taux fixe en raison d’un taux d’inflation nettement supérieur à l’objectif. Il est important de noter que la véritable rentabilité d’une obligation indexée sur l’inflation ne peut être évaluée qu’à l’échéance, par comparaison avec une obligation à taux fixe. Si le taux d’inflation moyen sur la durée de vie de l’obligation est inférieur au point mort d’inflation à l’émission, on peut conclure que l’obligation indexée sur l’inflation était rentable, et inversement.

Il ressort d’une analyse de paires correspondantes d’obligations indexées sur l’inflation et d’obligations à taux fixe que les titres indexés sur l’inflation sont généralement rentables. Dans 66 % des paires correspondantes arrivées à échéance entre 2011 et 2021, le coût des obligations indexées sur l’inflation était inférieur à celui de leurs équivalents à taux fixe (Graphique 1.18, partie A). À l’inverse, dans 85 % des paires correspondantes arrivées à échéance entre 2022 et 2023, les obligations à taux fixe se sont révélées plus rentables. En analysant les obligations en fonction de leur année d’émission, on constate que les titres indexés sur l’inflation émis entre 2011 et 2015 étaient généralement rentables, contrairement à ceux émis entre 2016 et 2018 (Graphique 1.18, partie B). À l’avenir, à mesure que le taux d’inflation refluera vers l’objectif et que les paiements d’intérêts au titre des obligations indexées sur l’inflation diminueront, les instruments à taux fixe devraient constituer le principal facteur de la hausse des charges d’intérêts.

Au-delà de leur rentabilité potentielle, les obligations indexées sur l’inflation peuvent présenter plusieurs avantages pour les OGD (OECD, 2023[24]). D’un point de vue budgétaire, la corrélation entre les charges d’intérêts sur les obligations indexées sur l’inflation et les recettes publiques peut permettre de stabiliser le rapport entre ces deux variables15. En outre, le marché des titres d’emprunt indexés sur l’inflation diffère de celui des obligations classiques, ce qui permet aux émetteurs souverains de diversifier leur base d’investisseurs et d’allonger l’échéance de leur portefeuille d’emprunts, les investisseurs en titres de dette indexés sur l’inflation privilégiant généralement des échéances plus longues16. Enfin, signalant la volonté des autorités de maîtriser l’inflation, ce type d’obligations peut favoriser la stabilité des prix17.

D’autres éléments relatifs aux instruments indexés sur l’inflation doivent également être pris en considération par les émetteurs, notamment la forte volatilité potentielle du niveau des charges d’intérêts. De fait, si les avantages liés au coût moins élevé de ce type d’instrument se matérialisent progressivement, les charges d’intérêts augmentent, elles, de manière brutale en période d’inflation élevée. Cet instrument peut donc présenter un risque de réputation asymétrique, dans la mesure où sa rentabilité se concrétise progressivement sur de nombreuses années, tandis que le coût de son financement monte en flèche et devient très apparent lorsque l’inflation s’envole.

Graphique 1.18. Écart entre les taux d’intérêt effectifs d’obligations à taux réel et d’obligations nominales correspondantes

Note : aux fins de ce graphique, 91 obligations indexées sur l’inflation émises en Allemagne, en Australie, au Chili, au Danemark, en Corée, en Espagne, aux États-Unis, en France, en Italie, au Royaume-Uni, en Suède et en Türkiye ont été rapprochées de leur équivalent à taux fixe ayant les dates d’échéance et d’émission les plus proches. Les dates d’émission et d’échéance des paires correspondantes se situent toutes dans une fenêtre de 60 jours. Pour les obligations émises en Espagne, au Royaume-Uni et en Türkiye, cette période a été portée jusqu’à 180 jours, car il était quasiment impossible d’établir des rapprochements plus étroits. Les coûts ont été calculés selon la méthode décrite à l’Annexe 1.C.

Source : Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; et calculs de l’OCDE.

1.5.2. Le refinancement de la dette pourrait accroître les charges d’intérêts de 0.5 % du PIB sur la période 2024-26

Environ 60 % des obligations en circulation dans la zone OCDE sont assorties de coupons dont le taux a été fixé avant 2022 et feront probablement l’objet d’un refinancement à des taux plus élevés à l’avenir (Graphique 1.19, partie A). L’encours de dette de la zone OCDE se compose d’environ 30 % de titres émis en 2022-23, alors que les taux avaient déjà commencé à augmenter, et de 10 % de titres indexés sur l’inflation et d’instruments à taux variable, qui tiennent déjà compte du niveau plus élevé des taux d’intérêt et d’inflation. Par conséquent, les charges d’intérêts devraient augmenter à court et à moyen terme, sous l’effet du refinancement des obligations à taux fixe et de l’émission de nouveaux emprunts.

Le cycle de resserrement monétaire actuel a eu une incidence non négligeable sur les coûts d’emprunt, la part de la dette des pays de l’OCDE émise en 2022-23 (30 %) représentant environ 40 % des charges d’intérêts. Il s’agit de la première fois depuis le début de la série de données (soit 2009) que la proportion des paiements d’intérêts au titre de la dette émise durant l’année en cours et l’année précédente dépasse celle de l’encours de la dette émise au cours de cette même période (Graphique 1.19, partie B).

Parallèlement, la dette émise au plus fort de la pandémie, en 2020-21, représente aussi presque 30 % de l’encours actuel de la dette de la zone OCDE, mais moins de 15 % des charges d’intérêts. Par ailleurs, environ 7 % de l’encours de la dette émise avant 2012 représente 13 % des paiements d’intérêts du fait des taux relativement plus élevés observés pendant et juste après la crise financière mondiale.

Graphique 1.19. Échéancier rétrospectif de l’encours de la dette de la zone OCDE et des charges d’intérêts

Note : l’« échéancier rétrospectif » de la dette indique les différentes années au cours desquelles les obligations en circulation ont été émises, par opposition à un échéancier prospectif classique. Les charges d’intérêts ont été calculées selon la méthode décrite à l’Annexe 1.C.

Source : Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; et calculs de l’OCDE.

Une proportion d’instruments à taux fixe représentant près d’un quart du PIB de la zone OCDE arrivera à échéance d’ici à 2026 (Graphique 1.20, partie A). Celle-ci dépassera 20 % du PIB dans cinq pays de l’OCDE, à savoir le Japon (52 %), l’Italie (33 %), les États-Unis (27 %), l’Espagne (27 %) et la France (20 %)18. Ces pays pourraient être confrontés à des risques de refinancement accrus si les taux d’intérêt restent élevés pendant l’essentiel de cette période.

Plus le rendement à l’échéance d’un titre d’emprunt au moment de son émission est faible, plus l’incidence budgétaire d’un refinancement de ce titre à un taux plus élevé est importante. Dans la zone OCDE, le rendement moyen à l’échéance de la dette à taux fixe échéant d’ici à 2026 oscille entre 2 % et 3 %, contre environ 4 % pour les titres à taux fixe émis en 2023 (Graphique 1.20, partie B). Le Costa Rica et la Slovénie, qui ont émis en 2023 des obligations à taux fixe dont le rendement à l’échéance est inférieur à celui de la dette échéant entre 2024 et 2026, pourraient voir les tensions sur leurs charges d’intérêts diminuer en cas de refinancement au cours des trois prochaines années. À l’inverse, 19 pays de l’OCDE, dont tous les pays du G7 à l’exception du Japon, ont émis en 2023 des obligations à taux fixe présentant un rendement à l’échéance supérieur de plus de 1 point à celles arrivant à échéance d’ici à 2026.

Compte tenu de ces écarts entre le rendement à l’échéance de la dette à taux fixe arrivant à échéance et celui des nouvelles émissions, on estime que les charges d’intérêts des administrations publiques des pays de l’OCDE augmenteront de 0.5 point de PIB d’ici à 2026, sous l’effet du seul refinancement de la dette à taux fixe (Graphique 1.20, partie D)19. Cette hausse attendue, qui équivaut à celle des dépenses annuelles que les pays de l’OCDE consacrent en moyenne à la protection de l’environnement (OECD, 2023[18]), est relativement plus marquée dans quelques grands pays émetteurs, dont les États-Unis, l’Italie, la France et le Royaume-Uni.

Graphique 1.20. ATM, ATR et risques de refinancement dans la zone OCDE

Note : les acronymes ATM et ATR désignent respectivement la durée moyenne jusqu’à l’échéance (average term to maturity) et la durée moyenne jusqu’à la refixation du taux d’intérêt (average term to refixing), qui correspondent toutes deux à une moyenne pondérée de l’encours. La partie C présente les chiffres de l’ATR corrigés des avoirs de la banque centrale (BC) uniquement pour les pays dans lesquels la banque centrale communique la structure des échéances ou la durée moyenne jusqu’à l’échéance des obligations d’État qu’elle détient. Dans la partie E, l’Estonie n’est pas prise en compte dans le calcul de la moyenne en raison de la forte variabilité de la durée moyenne jusqu’à l’échéance de son portefeuille de dette.

Source : Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; (OECD, 2023[1]) ; sites web des autorités nationales ; et calculs de l’OCDE.

Par rapport à la hausse des rendements, l’augmentation attendue des charges d’intérêts liée au refinancement de la dette est relativement faible, l’échéance moyenne des portefeuilles d’emprunts des pays membres de l’OCDE étant d’environ 8 ans à compter de 2023 (Graphique 1.20, partie C). Au cours des deux dernières décennies, les émetteurs souverains ont, dans l’ensemble, allongé l’échéancier de leur portefeuille de dette (Graphique 1.20, partie E), essentiellement en vue de réduire le risque de refinancement. Par conséquent, plus de la moitié de la dette des pays de l’OCDE arrivera à échéance après 2027 ou fera l’objet d’une refixation de taux au-delà de cette date, ce qui les protège en partie de l’incidence du cycle de resserrement actuel sur les charges d’intérêts et atteste donc l’intérêt d’échéanciers plus longs.

1.6. Le resserrement quantitatif accroît les besoins d’emprunt et l’offre nette d’obligations sur les marchés, influant sur la base d’investisseurs et la liquidité des marchés

L’ampleur des avoirs des banques centrales en obligations souveraines, conjuguée au resserrement des politiques monétaires, a considérablement influé sur les marchés de titres d’État, ainsi que sur les portefeuilles de dette souveraine. Les achats massifs de titres d’État réalisés par les banques centrales ont été financés par l’émission de réserves. Si l’on prend le bilan du secteur public dans son ensemble, les avoirs obligataires des banques centrales sont pour l’essentiel assimilables à une dette à taux variable vis-à-vis de créanciers privés. Vu sous cet angle, environ un tiers de la dette publique équivaut à de la dette à taux variable (Graphique 1.20, partie A), ce qui ramène la durée moyenne jusqu’à la refixation du taux d’intérêt du portefeuille de créances des pays de l’OCDE dotés d’un programme d’assouplissement quantitatif de 8 à 5 ans (Graphique 1.20, partie C). Ceci masque non seulement les risques de taux d’intérêt auxquels les États sont confrontés, mais aussi les charges d’intérêts ; au lieu de prendre la forme d’une augmentation des paiements d’intérêts, la hausse des coûts se traduit par une réduction des bénéfices distribués par les banques centrales ou par des demandes de couverture des pertes.

La hausse des taux d’intérêt réduit les bénéfices ou entraîne des pertes sur les avoirs obligataires des banques centrales (ECB, 2023[25] ; OECD, 2023[26]). Cela se produit de deux manières. Premièrement, des taux d’intérêt plus élevés alourdissent le coût des engagements liés aux taux directeurs et aux taux de rémunération des dépôts. L’impact est d’autant plus fort lorsque les banques centrales ont entrepris des mesures d’assouplissement quantitatif, dans la mesure où le montant des engagements liés aux dépôts bancaires rémunérés utilisés pour acheter des obligations est plus important. Deuxièmement, si les banques centrales ont mis en œuvre un programme d’assouplissement quantitatif et recourent à la méthode de comptabilisation en valeur de marché ou vendent activement des obligations, la hausse des taux réduit la valeur de leurs avoirs du fait de l’application de taux d’actualisation plus élevés à leurs flux de trésorerie fixes20.

Les pertes subies par les banques centrales peuvent avoir une incidence sur les besoins d’emprunt bruts de l’État, dans la mesure où elles donnent lieu à une interruption de la distribution de leurs bénéfices ou à des demandes de couverture des pertes. Les banques centrales tirent généralement des revenus de seigneuriage de l’émission de billets non porteurs d’intérêts aux fins de l’acquisition d’actifs porteurs d’intérêts. Ces revenus varient entre 0.1 et 0.9 % du PIB (Reis, 2013[27]). Les pertes peuvent entraîner une suspension de la distribution des bénéfices, voire, selon le pays, donner lieu à une recapitalisation ou à une couverture des pertes par l’administration centrale (Bell et al., 2023[28])21.

Au Royaume‑Uni, les pertes de la banque centrale ont donné lieu à une indemnisation directe par l’État, tandis qu’aux États-Unis et dans certains pays de l’UE, elles ont conduit à une interruption du reversement des bénéfices. La Banque d’Angleterre, qui utilise la méthode de comptabilisation en valeur de marché et dont les obligations détenues ont l’échéance moyenne la plus longue de tous les pays de l’OCDE (Graphique 1.20, parties C et E), est confrontée à des pertes de grande ampleur. Depuis octobre 2022, l’État britannique a consacré environ 1 % du PIB à la couverture des pertes de sa banque centrale, sachant que celles-ci devraient atteindre 5 % du PIB (UK Office for Budget Responsibility, 2023[29]). Dans la zone euro, où les banques centrales nationales redistribuaient auparavant chaque année entre 0.1 % et 0.2 % du PIB de la zone euro aux pays membres, aucune distribution de bénéfices ne devrait avoir lieu pendant 11 ans en Allemagne, 4 ans aux Pays-Bas, 3 ans en France et 2 ans en Espagne (Belhocine, Bhatia et Frie, 2023[30]). Après une décennie de versements annuels à l’administration fédérale américaine, lesquels se sont hissés à pas moins de 0.5 % du PIB en 2020, la Réserve fédérale des États-Unis (Fed) a cessé de dégager un bénéfice au troisième trimestre de 2022 et ne devrait pas reprendre les versements avant 2027 (Castro et Jordan-Wood, 2023[31]).

Exprimés en pourcentage de la dette publique nationale, les avoirs moyens des banques centrales en obligations d’État ont diminué en 2023, passant de 37 % à 33 % dans une sélection de 21 pays de l’OCDE (Graphique 1.21, partie A)22. Des baisses notables ont été observées au Canada, en Finlande et dans les pays baltes.

Les quatre plus grandes banques centrales qui ont entrepris un resserrement quantitatif, à savoir la Fed, la BCE, la Banque d’Angleterre et la Banque du Canada, ont ramené leurs avoirs en titres d’État de 11 500 milliards USD en 2021 à 10 000 milliards USD en 2023 (Graphique 1.21, partie B). Une nouvelle réduction de 1 000 milliards USD est prévue en 2024. Cela représente une baisse annuelle de leurs avoirs en titres d’État d’environ 7 % sur la période 2021-24.

Graphique 1.21. Portefeuille de titres d’État des banques centrales et resserrement quantitatif

Note : dans la partie A, les données d’enquête de l’OCDE utilisées datent de la fin 2022 et de juin 2023. Les valeurs relatives à 2024 sont des prévisions fondées sur le rythme de resserrement quantitatif indiqué par les banques centrales sur les sites internet, ainsi que sur les échéanciers de leurs portefeuilles. La Banque centrale européenne (BCE) ne figure pas dans la partie C car elle ne communique pas la structure des échéances de ses titres d’État. Les parties D et E reposent sur les données qui étaient disponibles à la fin décembre 2023 sur les sites internet des banques centrales. Seules les obligations détenues au titre du programme d’achats de titres du secteur public (Public Sector Purchase Programme, PSPP) et du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (Pandemic emergency purchase programme, PEPP) sont comprises dans les avoirs de la BCE.

Source : Enquêtes 2022 et 2023 sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État ; Enquête 2023 de l’OCDE sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; (OECD, 2023[1]) ; et sites web des autorités nationales.

Les banques centrales peuvent opérer un resserrement quantitatif soit en ne réinvestissant pas ou seulement partiellement le produit des obligations arrivant à échéance (resserrement quantitatif passif), soit en cessant les réinvestissements et en cédant directement une partie de ses avoirs obligataires (resserrement quantitatif actif). La BCE et les banques centrales du Canada et des États-Unis procèdent à un resserrement quantitatif passif (BoC, 2022[32] ; ECB, 2023[33] ; OECD, 2023[34] ; BIS, 2023[35] ; Fed, 2022[36]), tandis que la Banque d’Angleterre a opté pour une stratégie active. (BoE, 2022[37]). À l’inverse, la Banque du Japon mène un programme d’assouplissement quantitatif en raison du faible niveau d’inflation que connaît le pays (BIS, 2023[35])23. Parmi ces banques centrales, la Banque du Canada devrait afficher la plus forte baisse des avoirs en titres d’État sur la période 2021-24 (soit 50 %). À titre de comparaison, les portefeuilles de titres d’État de la Fed, de la Banque d’Angleterre et de la BCE devraient diminuer respectivement d’environ 25 %, 40 % et 7 %. Les avoirs en titres d’État de la BCE, qui a adopté un rythme de réduction du bilan plus lent, devraient dépasser ceux de la Fed dans le courant de l’année 2024.

Le rythme des programmes de resserrement quantitatif concordera en général avec la structure des échéances des obligations détenues par les banques centrales (Graphique 1.21, partie C). Près de 50 % des titres d’État détenus par la Banque du Canada arriveront à échéance d’ici à 2026, contre 40 % dans le cas de la Fed et 30 % dans celui de la Banque d’Angleterre. En revanche, environ 50 % des titres d’État détenus par la Banque d’Angleterre arriveront à échéance après 2031, alors que ce chiffre est de 40 % dans le cas de la Fed et de 30 % dans celui de la Banque du Canada.

Dans la mesure où les banques centrales détiennent essentiellement des titres d’État à taux fixe, les programmes de resserrement quantitatif ont sensiblement accru l’offre de ce type d’instrument sur le marché. Les nouvelles émissions d’emprunts à taux fixe ont représenté respectivement 1 % de l’encours de la dette à taux fixe au Canada, 2 % aux États-Unis et 6 % dans la zone euro et au Royaume-Uni. Mais si l’on tient compte du surcroît d’offre qui découle du resserrement quantitatif, ces instruments représentent 9 % de l’encours de la dette à taux fixe au Canada, 6 % aux États-Unis, 7 % dans la zone euro et 9 % au Royaume-Uni (Graphique 1.21, partie D).

Le resserrement quantitatif se traduit non seulement par un accroissement de la dette à absorber par le marché, mais aussi par un allongement de l’offre nette de duration en l’absence de modification de la stratégie d’émission par les gestionnaires de la dette24. Au Canada et aux États-Unis, la durée moyenne jusqu’à l’échéance des avoirs de la banque centrale est supérieure de 1 an à celle des obligations en circulation (Graphique 1.21, partie E). Le Royaume‑Uni fait face à des tensions supplémentaires liées à l’offre de duration sur le marché, dans la mesure où le resserrement quantitatif actif opéré par la Banque d’Angleterre a donné lieu à la vente d’obligations ayant une durée moyenne jusqu’à l’échéance de près de 20 ans25.

1.6.1. La base d’investisseurs pour la dette souveraine devient plus sensible aux prix

Outre la définition du type d’instrument et de la structure des échéances des émissions, les gestionnaires de la dette publique sont chargés de veiller à la diversité de la base d’investisseurs (OECD, 2019[38]). Celle-ci est indispensable au vu de la diversité des comportements et des besoins d’investissement des différents investisseurs. Elle réduit la probabilité de mouvements d’achat ou de vente uniformes, favorisant ainsi l’approfondissement et la liquidité des marchés. Elle permet en outre aux émetteurs souverains de mieux gérer les arbitrages entre les coûts et les risques, dans la mesure où certains investisseurs désirent prendre des risques pour obtenir des rendements élevés et que d’autres privilégient des stratégies plus prudentes et programmées. La diversification géographique peut constituer un autre facteur de soutien de la demande en rendant un émetteur moins tributaire de la situation macrofinancière de certaines régions.

Les émetteurs souverains s’efforcent d’établir une base d’investisseurs stable par de nombreuses façons, notamment en renforçant la transparence des opérations relatives à la dette, en dialoguant fréquemment avec les investisseurs, en diversifiant leur offre de produits et en prenant des mesures propres à accroître la liquidité des marchés. Une stratégie d’émission cohérente et prévisible peut jouer un rôle crucial dans la constitution d’une base d’investisseurs stable. Des émetteurs souverains dans plus de 50 pays, dont près de 30 dans la zone OCDE, ont notamment émis des obligations durables, et ce essentiellement à des fins de diversification de la base d’investisseurs (ainsi qu’il est expliqué plus en détail au chapitre 3).

Au cours des 15 dernières années, la base d’investisseurs de la dette des administrations publiques des pays de l’OCDE a sensiblement évolué sous l’effet du rôle accru joué par les banques centrales nationales sur ces marchés. De fait, la part de la dette souveraine détenue par des banques centrales nationales est passée de 5 % en 2008 à 27 % en 2022 (Graphique 1.22, partie A) en raison de l’augmentation de leurs achats d’obligations d’État nouvellement émises et déjà en circulation dans un contexte d’offre croissante. En parallèle, la proportion de la dette souveraine détenue par les investisseurs nationaux a diminué, la part des banques nationales étant tombée de 46 % à 33 % et celle du secteur non bancaire de 20 % à 14 %.

Après avoir oscillé entre 28 % et 31 % entre 2008 et 2019, la part de la dette souveraine détenue par des investisseurs étrangers a diminué en 2020, lorsque les banques centrales ont relancé ou accéléré le rythme de leur programme d’assouplissement quantitatif pour faire face à la pandémie. La part détenue par des investisseurs publics étrangers est tombée à 12 % en 2022, après avoir culminé à 17 % en 2013. Ce recul coïncide avec la divergence entre le taux de croissance de l’encours de la dette publique des pays de l’OCDE et celui des réserves de change mondiales (Graphique 1.22, partie D) ; bien que les deux aient progressé à un rythme comparable entre 2008 et 2015, les réserves de change ont augmenté de 9 % durant la période 2015-23, tandis que l’encours de la dette des pays de l’OCDE a progressé de 57 % sur la même période (Graphique 1.22, partie C)26.

Les données d’enquête indiquent que, par rapport à la période 2008-22, la composition de la base d’investisseurs s’est en partie inversée en 2023, la part des banques centrales nationales ayant diminué et celle du secteur financier non bancaire augmenté (Graphique 1.22, partie B). En 2023, si l’on examine la ventilation de la dette souveraine entre ses détenteurs, on constate que la part des banques centrales nationales a diminué dans 16 pays, et que celle des gestionnaires d’actifs et des fonds spéculatifs nationaux a augmenté dans 11 pays, celle des investisseurs institutionnels s’est accrue dans neuf pays et la part des investisseurs autres a progressé dans dix pays. Ces évolutions témoignent d’une absorption croissante de l’offre d’obligations d’État par le secteur financier non bancaire en période de resserrement monétaire et de hausse des taux (Graphique 1.22, partie D).

Graphique 1.22. Composition de la base d’investisseurs de la dette souveraine de la zone OCDE

Note : la partie A renvoie à la moyenne des pays de l’OCDE pondérée par l’encours de leur dette, à partir des données tirées des Perspectives de l’OCDE sur les emprunts souverains.

Source : Enquêtes 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés secondaires ; Enquête 2023 sur les titres de dette négociables des administrations centrales ; LSEG ; (OECD, 2023[1]) ; (IMF, 2023[39] ; IMF, 2023[40] ; IMF, 2023[2]) ; et sites web des autorités nationales.

À mesure que le resserrement quantitatif se poursuit, on ignore encore quels types d’investisseurs absorberont l’offre supplémentaire d’obligations d’État et comment la structure des échéances et les taux évolueront. Ces facteurs influeront sur les profils de coût et de risque des portefeuilles de dette souveraine. Il ne s’agira pas d’un simple retour à la structure de la base d’investisseurs observée avant l’amorce des grands programmes d’assouplissement quantitatif en 2008. À l’heure actuelle, l’encours de dette négociable des administrations centrales des pays de l’OCDE s’établit, en pourcentage du PIB, aux alentours de 83 %, contre 53 % en 2008 ; cette hausse de 30 points de pourcentage est en grande partie imputable aux avoirs obligataires des banques centrales. En raison du resserrement quantitatif et de la persistance d’un niveau d’emprunt élevé, le marché devra absorber un volume net record, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les coûts d’emprunt et la structure des échéances.

On s’attend à ce qu’une part croissante de la dette souveraine soit détenue par des investisseurs plus sensibles aux prix, ce qui pourrait exercer des tensions à la hausse sur les rendements. À l’inverse, les banques centrales achètent en général des obligations d’État indépendamment de leur prix, puisqu’elles obéissent à un mandat de stabilité des prix. Elles sont aussi considérées comme des vendeurs insensibles aux variations de prix dans le cadre d’un resserrement quantitatif, dans la mesure où elles sont disposées à en céder pour s’acquitter de leur mandat, indépendamment des prix du marché27.

À moyen terme, la demande de la part des investisseurs étrangers pourrait augmenter à mesure que les coûts actuellement élevés de couverture du risque de change diminuent, mais leur demande de titres libellés en monnaies fortes pourrait baisser si les économies enregistrent des résultats plus solides et évitent une récession. Les cycles de resserrement font généralement grimper les coûts de couverture du risque de change, car les investisseurs doivent se protéger contre une appréciation de la monnaie dans un contexte de creusement des écarts de taux d’intérêt et de volatilité accrue des taux de change. Par ailleurs, un atterrissage en douceur des économies pourrait renforcer l’attrait des titres d’État libellés dans des monnaies plus faibles et réduire ainsi la demande d’obligations souveraines de la plupart des pays de l’OCDE. À l’inverse, une récession se traduirait probablement par une « fuite vers des valeurs refuges », qui profiterait notamment à l’Allemagne et aux États-Unis et entraînerait une baisse des coûts d’emprunt.

Les réglementations applicables influent sur la demande de titres d’État de la part des banques nationales. Le renforcement des exigences de liquidité par la réglementation Bâle III au lendemain de la crise financière mondiale a entraîné une hausse de la demande de titres d’État de la part des banques au cours des dix dernières années, mais ces exigences accrues ont également réduit la probabilité qu’une nouvelle réglementation soit mise en place, étant donné que le secteur bancaire est resté globalement résilient face au cycle actuel de resserrement monétaire (FSB, 2023[41]). Cela dit, à la suite des turbulences traversées par ce secteur au premier semestre de 2023, les États-Unis envisagent d’instaurer de nouvelles règles en matière de fonds propres, ce qui pourrait accroître la demande de titres d’État de la part des établissements américains (CRS, 2023[42]).

Les banques satisfont souvent aux exigences de liquidité en détenant soit des titres d’État soit des réserves auprès de la banque centrale, en fonction des niveaux de rendement (Eren, Schrimpf et Xia, 2023[43]), du risque de duration et de considérations liées aux devises. En période de resserrement monétaire, le risque de duration incite les banques à préférer les réserves bancaires aux obligations ; elles recourent cela dit aux obligations en cas d’amélioration des conditions de financement. Les banques ne devraient donc pas constituer de gros acheteurs de titres d’État en période de resserrement quantitatif, comme en témoigne la diminution de leurs avoirs en obligations d’État en 2022. Toutefois, à moyen terme, si un assouplissement monétaire devait se produire, la demande de titres d’État de la part des banques pourrait augmenter, à condition que l’écart de rendement par rapport aux réserves détenues auprès des banques centrales compense le risque de duration plus élevé.

À mesure que les investisseurs étrangers et les banques nationales réduiront leurs avoirs en titres d’État au cours du cycle de resserrement, le secteur non bancaire national devrait devenir le principal acheteur marginal de nouveaux titres d’État. La tendance observée en 2022-23 devrait donc se poursuivre durant le cycle de resserrement en cours. Très varié, le secteur non bancaire national comprend les investisseurs les plus sensibles aux prix (Fang, Hard et Lewis, 2023[44]), tels que les fonds de placement, les fonds spéculatifs et les ménages. Ces derniers ont acheté en 2022-23 un montant record d’obligations d’État dans le cadre de dispositifs destinés aux particuliers (Encadré 1.2).

La demande d’obligations d’État de la part des fonds de pension et des compagnies d’assurance sera probablement fonction de l’évolution des rendements à long terme. Ce type d’investisseurs recherchent des rendements plus élevés et des échéances plus longues pour équilibrer leur passif. En 2023, la situation macroéconomique incertaine a toutefois pesé sur la demande d’obligations à long terme dans certains pays28. La définition d’exigences minimales en matière de détention d’obligations d’État par les fonds de pension peut également influer sur leurs avoirs, bien qu’aucune modification réglementaire de ce type ne soit prévue dans un avenir proche (OECD, 2023[45]).

Parmi les fonds de placement, les organismes de placement collectif monétaires (OPC monétaires), les fonds à capital variable et les fonds spéculatifs contribuent à la liquidité des marchés mais peuvent aussi être à l’origine de leur instabilité. Les OPC monétaires, qui investissent souvent massivement dans des titres d’État à court terme, peuvent rapidement vendre des actifs pour honorer les demandes de remboursement des investisseurs en période de tensions sur les marchés. Les fonds à capital variable sont quant à eux exposés à des asymétries de liquidité dans la mesure où ils garantissent des remboursements quotidiens et détiennent des obligations ; ils peuvent ainsi être incités à vendre des actifs à prix bradés au début d’une crise pour éviter de devoir les céder ultérieurement et subir d’importantes pertes. Les fonds spéculatifs, qui peuvent devoir se défaire rapidement de leurs positions obligataires en période de volatilité accrue, sont également susceptibles d’exacerber les mouvements de vente29.

Les émetteurs souverains estiment que la participation du secteur financier non bancaire aux marchés obligataires favorise leur liquidité, mais qu’elle peut aussi amplifier la sensibilité de ces marchés aux chocs30. Les établissements du secteur non bancaire qui investissent dans des obligations d’État obéissent à un cadre réglementaire différent de celui qui s’applique aux banques. De plus, comme ils ne sont pas des spécialistes en valeurs du Trésor, ils ne sont pas tenus de conserver un certain niveau de liquidités et proposent un double cours continu. Par conséquent, en période de volatilité accrue, ils peuvent parfois accentuer l’instabilité des marchés. Une telle situation s’est produite en 2020, lorsque les banques centrales sont intervenues pour acheter un grand nombre de titres d’État, puis à nouveau à l’automne 2022, lors de la crise du « mini-budget » britannique, qui a été exacerbée par les positions obligataires des fonds de pension31.

Si le secteur financier non bancaire devient un détenteur d’obligations d’État encore plus important, il sera crucial de préserver la liquidité en période de tensions accrues sur les marchés. Ces enjeux de liquidité peuvent également susciter des inquiétudes quant à la stabilité financière, si bien que les banques centrales et les autorités de réglementation réfléchissent à des mesures qui leur éviteraient de devoir intervenir directement sur les marchés pour les stabiliser, comme elles ont dû le faire en 202032. Il s’agit là d’un enjeu majeur pour les émetteurs souverains, sachant que la vente de titres d’État à prix bradés peut entraîner une hausse des coûts d’emprunt, voire les empêcher d’accéder à des liquidités en période de crise.

1.6.2. La liquidité des marchés s’est améliorée en 2023 mais la volatilité reste forte

La liquidité du marché secondaire des obligations d’État est essentielle pour permettre l’accès au marché primaire et réduire au minimum les coûts des emprunts souverains sur le long terme. Par conséquent, les conditions de liquidité font partie des principaux facteurs surveillés de très près par les offices de gestion de la dette souveraine (OECD, 2018[46]). Le pourcentage d’OGD ayant fait état d’une baisse de la liquidité est passé d’un plus haut de 63 % en 2022 à 19 % en 2023 (Graphique 1.23). Les émetteurs souverains estiment que les principaux facteurs ayant eu une incidence négative sur la liquidité en 2023 sont les risques géopolitiques et le ralentissement des échanges mondiaux. Les risques géopolitiques ont eu incidence plus marquée que les incertitudes macroéconomiques par rapport à 2022 (Graphique 1.23, partie B).

Graphique 1.23. Évolution récente de la liquidité et facteurs déterminants

Note : les parties A et B couvrent tous les pays de l’OCDE, qui ont répondu à une seule et même question. En revanche, la partie C couvre uniquement les pays qui ont répondu à la question de l’enquête se rapportant à l’évolution de la liquidité considérée.

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés secondaires.

En 2023, les pays de l’OCDE ayant fait état d’une amélioration de la liquidité sur les marchés des opérations de pension et des produits dérivés ont été plus nombreux que ceux ayant ont connu une détérioration, ce qui marque une évolution notable par rapport à 2022 (Graphique 1.23, partie C). La liquidité de ces marchés a augmenté essentiellement sous l’effet du resserrement quantitatif, ce qui a eu pour effet d’accroître le flottant (c’est-à-dire la part de la dette détenue par le marché) et, partant, l’offre de titres d’État pouvant être utilisés dans le cadre d’opérations de pension et d’opérations sur produits dérivés à des fins de couverture. Cependant, certains émetteurs affichant un niveau d’emprunt net négatif n’ont pas fait état d’une amélioration de la liquidité sur leurs marchés, ce qui laisse penser que la réduction de leurs emprunts a peut-être contrebalancé l’augmentation des garanties mises sur le marché des opérations de pension et des produits dérivés par les banques centrales33.

Les OGD mesurent la liquidité du marché à l’aide de multiples indicateurs, tels que les écarts de cotation, l’activité du marché, la volatilité et les indicateurs relatifs aux adjudications. En 2023, ces indicateurs ont fourni des signaux quelque peu contradictoires (Graphique 1.24).

Les écarts de cotation ont quasiment retrouvé les niveaux observés avant la pandémie. Aux États-Unis, ces écarts sont stables, quoique toujours légèrement plus élevés qu’avant la pandémie ; dans la zone euro, les écarts de cotation de l’indice de référence à 30 ans se sont nettement resserrés ; au Japon, les écarts se sont creusés en 2023, en particulier à l’extrémité longue de la courbe, du fait de l’approche plus souple adoptée par la Banque du Japon en matière de contrôle de la courbe des rendements ; et au Royaume-Uni, ils se sont réduits à l’extrémité longue de la courbe.

Dans la zone OCDE, la volatilité reste supérieure aux niveaux antérieurs à la pandémie, notamment à l’extrémité longue de la courbe des rendements. De nombreux pays de l’OCDE ont constaté que l’évolution structurelle des marchés avait contribué à l’accroissement de la volatilité, au même titre que les incertitudes macroéconomiques et géopolitiques actuelles, ainsi qu’à l’émergence d’une base d’investisseurs plus sensibles aux prix. Malgré cette volatilité accrue et l’augmentation des besoins d’emprunt, les obligations émises par voie d’adjudication dans la zone OCDE ont été pour la plupart sursouscrites, signe d’un vif intérêt de la part des investisseurs34.

Graphique 1.24. Évolution récente des indicateurs de liquidité

Note : les écarts de cotation correspondent à la moyenne annuelle pour chaque indice de référence. La volatilité est exprimée par le coefficient de variation annuel moyen (c’est-à-dire le rapport entre l’écart-type et la moyenne) du cours moyen de chaque indice de référence. Le ratio de couverture des adjudications est une moyenne pondérée par le volume émis ; pour la zone euro, la médiane des moyennes pondérées de chacun de ses pays membres a été utilisée afin d’éliminer les effets des valeurs aberrantes.

Source : LSEG ; et calculs de l’OCDE.

Les indicateurs relatifs aux adjudications revêtent une grande importance, car les émetteurs souverains empruntent principalement par l’intermédiaire d’adjudications auxquelles, dans la plupart des cas, seuls les établissements spécialistes en valeurs du Trésor peuvent prendre directement part35. Ce système contraste avec celui des bourses classiques, où les participants négocient directement les uns avec les autres, comme c’est le cas sur les marchés d’actions et de produits dérivés. Les spécialistes en valeurs du Trésor achètent des obligations dans le cadre d’adjudications, interviennent sur le marché des courtiers interprofessionnels et proposent essentiellement des opérations de gré à gré à leurs clients36.

En achetant et en distribuant des obligations, les spécialistes en valeurs du Trésor contribuent pour beaucoup à la liquidité des marchés. Étant donné qu’il s’agit principalement de banques (Graphique 1.25, partie A)37, ces établissements sont soumis à des exigences accrues en vertu de la réglementation Bâle III mise en place au lendemain de la crise financière mondiale, ce qui alourdit les contraintes liées à leur bilan et pourrait avoir une incidence sur leurs capacités de stockage des titres (Graphique 1.25, partie B). Sachant qu’ils sont tenus de conserver un certain montant de fonds propres pour couvrir le risque de règlement, plus le volume des transactions est grand, plus les exigences de fonds propres augmentent. Si les courtiers ne disposent pas de fonds propres suffisants ou ne peuvent pas obtenir le niveau requis rapidement, leur capacité de négoce est limitée. C’est ce qui s’est produit aux États-Unis, où le niveau de liquidité a chuté lorsque les spécialistes en valeurs du Trésor ont fait un recours intensif à leur bilan (Duffie et al., 2023[47])38. Bien que ces contraintes aient joué un rôle moins important dans le cadre du précédent cycle d’assouplissement quantitatif, elles se trouvent accentuées en période de volatilité accrue, et en particulier lorsque les marchés doivent absorber le surcroît d’offre généré par le resserrement quantitatif.

Graphique 1.25. Spécialistes en valeurs du Trésor admis et facteurs influant sur la rentabilité de leur activité

Note : le Chili, le Costa Rica, l’Estonie et la Suisse ne disposent pas de spécialistes en valeurs du Trésor.

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés secondaires.

Malgré la volatilité accrue et l’augmentation des besoins d’emprunt, les spécialistes en valeurs du Trésor sont restés en mesure de jouer leur rôle. La plupart des pays de l’OCDE ont fait état d’une stabilité de la capacité de tenue de marché des spécialistes en valeurs du Trésor (Graphique 1.25, partie C), des diminutions ayant été signalées uniquement en période de tensions accrues sur les marchés. L’approche consistant à sélectionner des courtiers pour promouvoir la concurrence et renforcer les activités de marché s’est révélée efficace39. Pour faire face au contexte difficile actuel, des OGD ont entrepris de réviser les critères d’évaluation des performances des courtiers dans huit pays de l’OCDE, d’accroître leurs privilèges dans quatre pays et d’alléger leurs obligations dans deux autres.

Parmi les mesures couramment prises pour soutenir la liquidité des marchés, l’émission continue régulière de titres existants, les mécanismes de prêt de titres, l’amélioration de la communication et les opérations de rachat et de conversion sont considérées comme les plus efficaces (Graphique 1.26)40. D’autres initiatives ont récemment été prises, notamment aux États-Unis, où nouveau programme de rachat débutera en 2024 (US DMO, 2023[48])41, et en Suisse, où l’OGD prévoit de constituer un portefeuille d’obligations d’État pour les marchés monétaires garantis.

Lorsque les taux sont plus élevés, l’émission continue de titres d’État a un coût immédiat, mais elle présente des avantages à plus long terme. De fait, dans un tel contexte, l’émission continue d’obligations qui se négocient à un taux inférieur à la normale signifie que l’État accumule plus de dette qu’il ne lève de fonds, ce qui accroît son niveau d’endettement net. Elle se traduit toutefois par une réduction des charges d’intérêts du fait des primes de liquidité plus faibles, ce qui permet aux OGD de s’acquitter de leur mandat à long terme consistant à allier coûts d’emprunt faibles et maîtrise des risques.

S’agissant des mécanismes de prêt de titres, ils permettent aux OGD de stabiliser les courbes de rendement, d’uniformiser les taux des opérations de pension, de fournir des garanties et des liquidités à des fins de tenue de marché, de réduire les écarts de cotation et d’accéder au marché des opérations de pension pour leurs propres besoins de gestion de trésorerie. L’objectif principal des OGD est d’aider le marché sans occuper une position dominante, sachant que les grands émetteurs sont souvent plus actifs. Les interventions de grande ampleur sont généralement exceptionnelles. Il est largement admis que les avantages de ces mécanismes l’emportent sur leurs coûts opérationnels (informatique, ressources humaines et comptabilité, entre autres).

Graphique 1.26. Mesures de soutien à la liquidité des marchés

Source : Enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés secondaires.

Anticipant d’éventuelles évolutions sur les marchés découlant du resserrement quantitatif, certains émetteurs souverains envisagent d’élargir la compensation centrale sur les marchés des obligations d’État. Pour ce faire, il faut qu’une chambre de compensation avec contrepartie centrale joue le rôle d’intermédiaire auprès des acheteurs comme des vendeurs. À l’heure actuelle, les marchés des obligations d’État, contrairement aux marchés des opérations de pension et des produits dérivés, ne font pas l’objet d’une compensation centrale. En Allemagne, aux États-Unis, en France et au Royaume-Uni, seul un volume négligeable de transactions passe par une chambre de compensation avec contrepartie centrale ; en Italie et au Japon, les transactions entre courtiers font l’objet d’une compensation centrale, contrairement à celles entre courtiers et clients (FSB, 2022[49]).

La compensation centrale présente l’avantage de réduire la pression sur les bilans des spécialistes en valeurs du Trésor et de garantir l’accès aux aides des banques centrales en cas de crise. En compensant des transactions réciproques, une chambre de compensation peut réduire les obligations de règlement, et ce dans une proportion pouvant atteindre 53 % au Royaume-Uni (Baranova et al., 2023[50]) et étant allée jusqu’à 70 % aux États-Unis (Fleming et Keane, 2021[51]) et au Canada (Chen et al., 2022[52]) pendant la pandémie. La possibilité qu’ont les chambres de compensation avec contrepartie centrale de recourir aux réserves de la banque centrale et aux mécanismes de prêt de titres favorise en outre l’efficacité de la négociation durant de telles périodes, en servant d’appui en cas de défaillance et pour assurer la compensation des transactions. Par ailleurs, une amélioration de la transparence pré- et post-négociation, conjuguée à une compensation centrale, permettrait à tous les intervenants sur le marché de négocier entre eux (all-to-all trading) sur les marchés des obligations d’État. Un tel système n’existe actuellement qu’en Israël (Kutai, Nathan et Wittwer, 2023[53]), mais il permettrait d’accroître encore la liquidité sur d’autres marchés (Chaboud et al., 2022[54]).

Il convient de peser soigneusement tout changement structurel sur les marchés des obligations d’État, tel que l’élargissement de la compensation centrale et le développement du « all-to-all trading », du fait des risques que de tels changements pourraient faire peser sur le système actuel. Premièrement, certains acteurs du marché préfèrent dans bien des cas passer directement par un courtier pour bénéficier d’une tarification avantageuse et d’une exécution discrète des transactions de taille importante, sachant que la fidélité des clients incite les spécialistes en valeurs du Trésor à négocier même en période de vives tensions. Deuxièmement, ces réformes pourraient entraîner une concentration des risques au sein des chambres de compensation. Troisièmement, même si des réformes pourraient renforcer la capacité d’intermédiation des courtiers, cette marge de manœuvre supplémentaire au niveau du bilan risque d’être réorientée vers d’autres domaines d’activité, ce qui pourrait nuire à la liquidité des marchés des obligations d’État. Il convient donc d’envisager toute réforme structurelle avec prudence et de procéder de manière progressive, en fixant des objectifs à long terme et en menant une vaste consultation de marché, comme le font les émetteurs souverains. L’annonce faite récemment par l’autorité américaine des marchés financiers (U.S. Securities and Exchange Commission, SEC) selon laquelle tous les titres du Trésor américain devraient faire l’objet d’une compensation centrale d’ici à 2026 marque une évolution majeure sur le plus grand et le plus important marché obligataire du monde.

Compte tenu de l’évolution des conditions de marché et de la dynamique des investisseurs, il convient d’accorder une attention particulière au suivi et au soutien de la liquidité des marchés de titres d’État. Les offices de gestion de la dette souveraine devraient surveiller de près les conditions de marché et continuer à faire preuve de vigilance en recourant à diverses mesures de soutien à la liquidité, telles qu’une amélioration de la communication, l’émission continue de titres existants, les opérations de rachat et de conversion, ainsi que les mécanismes de prêt de titres.

Références

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[50] Baranova, Y. et al. (2023), « The potential impact of broader central clearing on dealer balance sheet capacity: a case study of UK gilt and gilt repo markets », BoE Staff Working Paper No. 1,026, https://www.bankofengland.co.uk/-/media/boe/files/working-paper/2023/the-potential-impact-of-broader-central-clearing-on-dealer-balance-sheet-capacity.pdf.

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[28] Bell, S. et al. (2023), « Why are central banks reporting losses? Does it matter? », BIS Bulletin 68, https://www.bis.org/publ/bisbull68.htm.

[35] BIS (2023), « Central bank asset purchases in response to the Covid-19 crisis », Committee on the Global Financial System Papers No. 68, https://www.bis.org/publ/cgfs68.pdf.

[21] BIS (2023), Central bank policy rates, https://www.bis.org/statistics/cbpol.htm (consulté le 20 December 2023).

[3] Bjellerup, M. et J. Rådahl (2023), « Debt Office Commentary: Long-term conditions for debt management », Swedish National Debt Office, vol. 2023 Number 3, https://www.riksgalden.se/contentassets/ea257dc12453430186b47e2bcfe20376/debt-office-commentary-long-term-conditions-for-debt-management.pdf.

[58] Blanchard, O., Á. Leandro et J. Zettelmeyer (2021), « Redesigning EU Fiscal Rules: From Rules to Standards », Economic Policy, vol. 36/106, https://doi.org/10.1093/epolic/eiab003.

[32] BoC (2022), « Understanding quantitative easing », Bank of Canada, https://www.bankofcanada.ca/2022/06/understanding-quantitative-easing/#:~:text=QE%20helps%20stabilize%20the%20economy,interest%20they%20pay%20to%20bondholders.

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[11] National Savings & Investments (2023), , Annual report, https://nsandi-corporate.com/performance/annual-reports.

[16] OECD (2024), OECD Economic Outlook, Interim Report February 2024: Strengthening the Foundations for Growth, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/0fd73462-en.

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[26] OECD (2023), OECD Economic Outlook, Volume 2023 Issue 1, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/ce188438-en.

[1] OECD (2023), OECD Economic Outlook, Volume 2023 Issue 2, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/7a5f73ce-en.

[34] OECD (2023), OECD Economic Surveys: Israel 2023, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/901365a6-en.

[24] OECD (2023), OECD Sovereign Borrowing Outlook 2023, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/09b4cfba-en.

[45] OECD (2023), Pensions at a Glance 2023: OECD and G20 Indicators, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/678055dd-en.

[4] OECD (2022), OECD Economic Outlook, Volume 2022 Issue 2, OECD Publishing, https://www.oecd-ilibrary.org/economics/oecd-economic-outlook/volume-2022/issue-2_f6da2159-en.

[38] OECD (2019), OECD Sovereign Borrowing Outlook 2019, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/aa7aad38-en.

[46] OECD (2018), OECD Sovereign Borrowing Outlook 2018, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/sov_b_outlk-2018-en.

[14] Portuguese Treasury and Debt Management Agency (2023), « Government Debt Statistics », IGCP, https://www.igcp.pt/en/1-4-399/statistics/government-debt/.

[19] Rawdanowicz, Ł. et al. (2021), « Constraints and demands on public finances: Considerations of resilient fiscal policy », OECD Economics Department Working Papers, n° 1694, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/602500be-en.

[64] RBA (2022), « From QE to QT – The next phase in the Reserve Bank’s Bond Purchase Program », Reserve Bank of Australia Speech, https://www.rba.gov.au/speeches/2022/sp-ag-2022-05-23.html.

[62] RBNZ (2022), « Reserve Bank details planned sales of New Zealand Government Bonds », Reserve Bank of New Zealand, https://www.rbnz.govt.nz/hub/domestic-markets-media-releases/reserve-bank-details-planned-sales-of-new-zealand-government-bonds.

[27] Reis, R. (2013), « The Mystique Surrounding the Central Bank’s Balance Sheet », American Economic Review 103(3), pp. 135–140, https://doi.org/10.1257/aer.103.3.135.

[63] SRB (2022), « Press Releases », Sveriges Riksbank, https://www.riksbank.se/en-gb/press-and-published/notices-and-press-releases/press-releases/2022/policy-rate-raised-by-1-percentage-point/.

[5] TBAC (2023), « Explaining the recent market moves across the Treasury yield curve », TBAC Presentation, https://home.treasury.gov/system/files/221/TBACCharge1Q42023.pdf.

[6] TBAC (2023), « Outlook for demand for US Treasuries », TBAC Presentation, https://home.treasury.gov/system/files/221/TBACCharge2Q42023.pdf.

[7] UK DMO (2024), « Minutes of annual consultation meetings with GEMMs and gilt investors held at HM Treasury on 29 January 2023 », The UK Debt Management Office’s financing remit 2024-25, https://www.dmo.gov.uk/media/rihkgdsg/sa300124.pdf.

[29] UK Office for Budget Responsibility (2023), « Economic and fiscal outlook », https://obr.uk/efo/economic-and-fiscal-outlook-november-2023/.

[48] US DMO (2023), « Treasury’s Current Views on the Operational Design of a Regular Buyback Program », The Department of the Treasury, https://home.treasury.gov/system/files/221/TreasurySupplementalQRQ32023.pdf.

[60] US SEC (2023), « SEC Adopts Money Market Fund Reforms and Amendments to Form PF Reporting Requirements for Large Liquidity Fund Advisers », Press Release, https://www.sec.gov/news/press-release/2023-129.

[17] US Treasury (2023), Upcoming Auctions, https://www.treasurydirect.gov/auctions/upcoming/ (consulté le 1 November 2023).

[13] US Treasury Department (2023), « Securities issued in TreasuryDirect », Fiscal Data Treasury Website, https://fiscaldata.treasury.gov/datasets/securities-issued-in-treasurydirect/.

Annexe 1.A. Méthodologie de collecte et de classification des données

Définitions et concepts utilisés dans l’enquête sous-jacente aux Perspectives sur les emprunts souverains

Dans le cadre de l’enquête qui sous-tend les Perspectives sur les emprunts souverains sont collectées des données relatives aux besoins d’emprunt bruts, aux amortissements et à l’encours de la dette, les données de chaque catégorie étant ventilées par échéance, par monnaie, par type de taux d’intérêt et par label ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) – correspondant par exemple aux obligations durables. Dans le cadre de cette enquête sont également réunies des données sur les avoirs des offices de gestion de la dette (OGD), les prêts accordés dans le cadre du programme Next Generation EU et les spécificités méthodologiques nationales. Elle repose sur la définition stricte de la dette souveraine, à savoir la « dette négociable de l’administration centrale », principalement en raison de la comparabilité des données relatives à cet indicateur et de leur disponibilité. Cette mesure, qui est directement liée au financement du budget de l’administration centrale, a permis à l’OCDE de collecter des données non seulement sur les montants effectifs mais aussi sur les estimations des besoins d’emprunt, des stratégies de financement et de l’encours de la dette publics, ventilées par instrument, par échéance et par monnaie.

Institutions couvertes : les administrations centrales

Le champ institutionnel couvert par les statistiques sur la dette varie du secteur public à l’administration centrale. Le secteur public représente la couverture institutionnelle la plus vaste, dans la mesure où il englobe les dettes des collectivités locales, des fonds d’État, des sociétés publiques financières et non financières ainsi que de l’administration centrale. Les administrations publiques, telles qu’elles sont définies par exemple dans le système de comptabilité nationale (SCN) utilisé par l’OCDE, recouvrent l’administration centrale, les États fédérés (le cas échéant), les collectivités locales et les administrations de sécurité sociale contrôlées par ces entités. L’administration centrale englobe tous les ministères, bureaux, établissements et autres organismes intégrés dans les administrations publiques qui sont des organes ou des instruments de l’autorité centrale d’un pays, à l’exception des administrations de sécurité sociale organisées de façon distincte et des fonds extrabudgétaires. En termes d’étendue de la couverture institutionnelle, l’administration centrale correspond à la définition stricte de la dette publique. La dette de l’administration centrale est émise, gérée et amortie par l’OGD national au nom de cette administration. L’avantage de cette définition relativement étroite de la dette, c’est qu’elle permet aux pays de fournir des données comparables, en particulier aux fins d’estimation.

Types de dette couverts : la dette négociable

En termes d’instruments, les engagements de l’État peuvent prendre la forme de titres de créance, de prêts, de régimes d’assurances, de pensions et de garanties standard, de numéraire et dépôts, ainsi que d’autres comptes à payer. Les instruments de dette peuvent être négociables ou non négociables. La dette négociable est définie comme l’ensemble des titres et autres instruments financiers pouvant être achetés et vendus sur le marché secondaire, tandis que la dette non négociable n’est pas transférable. Ainsi, les obligations et les bons à court terme émis sur les marchés de capitaux sont des formes de dette négociable, tandis que les prêts multilatéraux et bilatéraux accordés par le secteur public relèvent de la dette non négociable.

L’enquête sous-jacente aux Perspectives sur les emprunts souverains est axée sur les instruments de dette négociables, tandis que la plupart des statistiques sur la dette publique – comme celles de l’OCDE fondées sur le SCN, les statistiques sur la dette au sens de Maastricht et les Statistiques de la dette du secteur public élaborées par le Fonds monétaire international (FMI) – couvrent à la fois la dette négociable et non négociable. Les administrations publiques de l’OCDE se financent de manière prédominante au moyen d’instruments de dette négociables. Ce concept joue un rôle central pour toute analyse concernant différentes questions relatives à la gestion de la dette, notamment les conditions d’emprunt, la composition du portefeuille, les préférences des investisseurs et la liquidité du marché. L’utilisation de ce concept présente l’avantage d’indiquer aux investisseurs quels instruments sont négociables sur les marchés secondaires, et lesquels ne le sont pas. Par ailleurs, elle permet à l’émetteur de calculer différentes caractéristiques de la dette, telles que sa duration ou son échéance résiduelle, qu’il serait difficile d’établir dans le cas de la dette non négociable.

Terminologie

• Les besoins d’emprunt bruts standard pour une année sont égaux aux besoins d’emprunt nets au cours de cette année augmentés des amortissements d’instruments à long terme effectués la même année et des amortissements d’instruments à court terme émis l’année précédente. Cet indicateur couvre donc tous les titres émis, hormis ceux qui ont été émis et amortis au cours de la même année civile. En d’autres termes, l’ampleur des besoins d’emprunt bruts au cours d’une année civile correspond au montant de la dette que doit émettre l’OGD en termes nominaux pour rembourser intégralement la dette arrivant à échéance qui avait été émise au cours des années précédentes, augmenté des besoins d’emprunt nets en valeur nominale, indépendamment du mécanisme d’émission employé.

• Les besoins d’emprunt nets désignent le montant requis pour financer le déficit budgétaire courant. Le refinancement des dettes amorties consiste à renouveler le même montant de dette, tandis que les besoins d’emprunt nets correspondent à l’émission d’une dette supplémentaire sur le marché, c’est-à-dire à de nouveaux emprunts.

• La dette brute, c’est-à-dire l’encours de la dette, correspond au montant des dettes émises qui reste à rembourser à la fin de l’année civile. Cette mesure ne tient pas compte des effets de valorisation découlant de l’inflation et des fluctuations des taux de change ; elle est donc égale au montant nominal total de la dette devant être amortie.

• Les amortissements désignent le montant total des remboursements du principal des dettes correspondantes, y compris les paiements de principal effectués par le biais d’opérations de rachat au cours d’une année civile.

Agrégats régionaux

• La zone OCDE dans son ensemble recouvre les 38 pays suivants : l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Canada, le Chili, la Colombie, la Corée, le Costa Rica, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, les États-Unis, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Islande, Israël, l’Italie, le Japon, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République slovaque, le Royaume-Uni, la Slovénie, la Suède, la Suisse, la Tchéquie et la Türkiye.

• Les pays en voie d’adhésion à l’OCDE sont le Brésil, la Bulgarie, la Croatie, le Pérou et la Roumanie.

• Le Groupe des Sept (G7) englobe les sept pays suivants : l’Allemagne, le Canada, les États-Unis, la France, l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni.

• Les pays de l’OCDE membres de la zone euro sont les 17 pays suivants : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays‑Bas, le Portugal, la République slovaque et la Slovénie. L’euro (EUR) est la monnaie officielle de 20 des 27 États membres de l’Union européenne (UE). L’ensemble constitué par ces pays est appelé la zone euro. Les pays de la zone euro sont l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Croatie, Chypre, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays‑Bas, le Portugal, la République slovaque et la Slovénie. Dans ce rapport, les données relatives à la zone euro se rapportent uniquement aux pays qui sont à la fois membres de la zone euro et de l’OCDE.

• Dans cette publication, du point de vue de la gestion de la dette publique, le groupe des pays émergents de l’OCDE (c’est-à-dire des économies de marché émergentes membres de l’OCDE) englobe les sept pays suivants : le Chili, la Colombie, le Costa Rica, la Hongrie, le Mexique, la Pologne et la Türkiye.

Calculs et sources des données

• Pour des raisons de cohérence, les estimations présentées en pourcentage du PIB se fondent sur les estimations de produit intérieur brut tirées de la dernière édition des Perspectives économiques de l’OCDE parue l’année précédente (donc l’édition de novembre 2023 dans le cas présent) et sont calculées à partir de données nominales relatives au PIB.

• La dette est mesurée à la valeur faciale de l’encours actuel de la dette de l’administration centrale. Cette valeur faciale, qui est le montant non actualisé du principal à rembourser, ne varie pas, sauf en cas de nouvelle émission d’un instrument de dette existant. Elle coïncide avec l’engagement initial (et donc l’obligation contractuelle) de l’émetteur. Les OGD utilisent souvent la valeur faciale lorsqu’ils indiquent le montant de la dette nominale qui arrivera à échéance au cours de périodes futures. Une raison importante pour laquelle on utilise la valeur faciale de la dette réside dans le fait que c’est celle qui est couramment employée pour la cotation et le négoce de volumes spécifiques d’un instrument donné sur le marché.

• Les monnaies sont converties en dollars des États-Unis (USD) à l’aide de taux de change flexibles, les données provenant du London Stock Exchange Group (LSEG).

• Sauf indication contraire, tous les chiffres correspondent aux années civiles.

• Les chiffres agrégés relatifs aux besoins d’emprunt bruts, aux besoins d’emprunt nets, à la dette négociable de l’administration centrale, aux amortissements et à la dette arrivant à échéance sont calculés à partir des réponses recueillies dans le cadre de l’enquête sous-jacente aux Perspectives sur les emprunts souverains. Le Secrétariat de l’OCDE a élaboré ses propres estimations ou prévisions lorsque des données étaient manquantes pour 2023 et 2024, en utilisant des données officielles librement accessibles sur les amortissements et les soldes budgétaires des administrations centrales. Lorsque le gouvernement avait annoncé des mesures qu’il prévoyait d’adopter, mais ne les avait pas intégrées dans son programme de financement à la fin de décembre 2023, elles n’ont pas été prises en compte dans les prévisions présentées dans cette publication. Par ailleurs, les dernières estimations de la capacité (ou du besoin) de financement des administrations publiques figurant dans la base de données des Perspectives économiques de l’OCDE ont été utilisées pour estimer certaines données manquantes.

• Les besoins d’emprunt bruts et nets présentés dans ce rapport sont calculés selon la méthode standard et n’intègrent donc pas les émissions liées à la gestion de trésorerie.

• Tant l’enquête de 2023 sur l’évolution des marchés primaires que l’enquête de 2023 sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État menées par l’OCDE ont eu lieu en octobre 2023.

Définitions révisées

• Les titres de dette indexés sur l’inflation sont des instruments dont le coupon et/ou les paiements de principal sont liés à un indice d’inflation. Les données tiennent compte de l’inflation cumulée sur l’ensemble des années écoulées jusqu’à l’année de l’enquête incluse, à la date de déclaration.

• Les obligations à taux variable sont assorties d’un taux d’intérêt ou d’un taux de coupon qui est révisable ou variable. Il s’agit de titres d’emprunt à long terme dont le coupon est révisé périodiquement à une « date de refixation » en fonction d’un indice de taux d’intérêt indépendant tel que le taux moyen des prêts au jour le jour en livres sterling (SONIA, Sterling Overnight Index Average) ou le taux interbancaire offert en euros (EURIBOR). Ainsi, les obligations à taux variable à moyen et long terme sont des titres d’emprunt assortis d’un taux d’intérêt variable qui est révisé périodiquement (généralement chaque mois, trimestre ou semestre). Le niveau auquel est fixé ce taux d’intérêt est généralement égal à un indice de taux d’intérêt augmenté d’un écart prédéfini. Pour l’établissement des prévisions relatives à la dette à taux variable, on utilise le taux correspondant au niveau auquel a été fixé le coupon pour la dernière fois.

• Les chiffres relatifs à la durée moyenne jusqu’à l’échéance ont la même couverture que celle indiquée au début de cette annexe, les aspects méthodologiques spécifiques à certains pays étant décrits ci-après :

  • Allemagne : Les titres d’emprunt que l’OGD détient dans son propre portefeuille ne sont pas pris en compte. Un coefficient de pondération de 0.75 est appliqué aux titres de dette indexés sur l’inflation.

  • Hongrie : Les données ne couvrent pas les titres destinés aux investisseurs individuels, les obligations en devises émises sur le marché local, ni, depuis 2020, les obligations non négociables émises pour financer les communes. Les données incluent les contrats d’échange de devises.

  • Italie : Les engagements au titre de l’instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) et du programme Next Generation EU (qui porteraient à 7.3 le chiffre considéré) ne sont pas pris en compte.

  • Japon : La durée moyenne jusqu’à l’échéance indiquée par le ministère des Finances se fonde sur l’exercice budgétaire, et non sur l’année civile. Les données relatives à 2006 et 2022 ne couvrent pas les bons d’épargne. Le chiffre de 2023 est une estimation et inclut les bons d’épargne.

  • Pays‑Bas : Les chiffres correspondent à l’encours d’obligations et de bons du Trésor et n’incluent pas l’encours de billets de trésorerie.

  • Nouvelle‑Zélande : Les chiffres correspondent uniquement aux titres d’emprunt négociables, tandis que sont exclus les titres non négociables détenus par la Banque de réserve de Nouvelle-Zélande (RBNZ, Reserve Bank of New Zealand) et la Commission des tremblements de terre (EQC, Earthquake Commission). Sont en revanche pris en compte les titres détenus par la RBNZ qui ont été acquis dans le cadre du vaste programme d’achat d’actifs et des rachats d’obligations d’État.

  • Suède : Chiffres de fin d’année. La durée jusqu’à l’échéance (calculée pour le montant ajusté au taux de change courant de la dette) est indiquée en années. Les données se rapportent aux obligations d’État, aux obligations indexées sur l’inflation, aux obligations publiques en devises, aux obligations vertes, et aux bons du Trésor.

  • Royaume‑Uni : Pour calculer la durée moyenne jusqu’à l’échéance, on utilise comme coefficients de pondération le montant nominal de l’encours des fonds d’État et des bons du Trésor émis aux fins de gestion de la dette, à la date de déclaration. Le montant nominal des fonds d’État tient compte des titres détenus par l’administration centrale ; la valeur nominale des fonds d’État indexés tient compte également de l’inflation cumulée jusqu’à la date de déclaration.

Annexe 1.B. Modèle de décomposition de la dette

Pays individuels

Dans le présent chapitre, on a adopté une variante de la méthodologie décrite par Escolano (2010[55]) et utilisé l’équation ci-dessous pour rendre compte de l’évolution du ratio dette/PIB entre un moment t et un moment t-1 :

$d-d_{\left(t-1\right)}= \frac{ip}{\left(1+y\right)}* d_{\left(t-1\right)}- \frac{\mathrm{\pi }}{\left(1+y\right)}*d_{\left(t-1\right)}- \frac{g}{1+g}*d_{\left(t-1\right)}- pb+sf$

dans laquelle :

• d correspond au ratio entre l’encours de dette des administrations centrales tel qu’il ressort de l’enquête annuelle sur les besoins d’emprunts souverains et le PIB des pays de l’OCDE (2023[1])

• ip correspond aux taux d’intérêt effectif, exprimé sous la forme du ratio entre les charges d’intérêts brutes des administrations publiques de la zone OCDE (2023[1]) à un moment t et la valeur de d au moment t-1

• y est le taux de croissance du PIB nominal de la zone OCDE (2023[1]) entre le moment t et le moment t-1

• π correspond à l’inflation, définie comme la variation du déflateur du PIB de la zone OCDE (2023[1]) entre le moment t et le moment t-1

• g est le taux de croissance du PIB réel de la zone OCDE (2023[1]) entre le moment t et le moment t-1

• pb est le ratio entre le solde primaire des administrations publiques de la zone OCDE et le PIB de la zone OCDE (2023[1])

• sf correspond aux ajustements stocks-flux

Zone OCDE

Pour la décomposition de la zone OCDE, on a utilisé l’équation ci-dessus avec les variables suivantes :

• d représente la somme des encours de dette des administrations centrales de chaque pays divisée par la somme des PIB de chaque pays

• ip est la somme des charges d’intérêts brutes des administrations publiques de chaque pays divisée par la somme des valeurs de d de chaque pays au moment t-1

• y est le taux de croissance issu de la somme des PIB nominaux de chaque pays

• π est la somme des valeurs de π de chaque pays, pondérée par le PIB

• g est la somme des valeurs de g de chaque pays, pondérée par le PIB

• pb est la somme des soldes primaires des administrations publiques de chaque pays, divisée par la somme des PIB de chaque pays

• sf correspond aux ajustements stocks-flux

Les chiffres relatifs aux différents pays ont été convertis en dollars des États‑Unis à l’aide des taux de change de fin d’année tels que communiqués par le London Stock Exchange Group (LSEG).

Autres informations

Le taux de croissance du ratio dette/PIB englobe tous les pays de l’OCDE, tandis que les calculs factoriels ont été limités aux pays pour lesquels des données étaient disponibles. Par exemple, les charges d’intérêts ont été calculées à l’exclusion des pays suivants : CHL, COL, CRI, ISR, MEX, et TUR, qui représentent environ 3 % de la dette négociable des administrations centrales de la zone OCDE. Les ajustements stocks-flux ont permis de lisser les écarts résultant de l’utilisation simultanée de données relatives aux administrations centrales et aux administrations publiques ainsi que du caractère incomplet de certaines données.

Annexe 1.C. Calcul du taux d’intérêt effectif

Introduction et sources des données

Le taux d’intérêt effectif (EIR, Effective Interest Rate) se calcule comme un ratio des paiements d’intérêts sur l’encours de la dette et est estimé en comptabilité d’exercice à l’aide de plusieurs sources de données. Les données relatives à l’inflation annuelle et aux taux directeurs jusqu’en 2022, ainsi que les prévisions pour 2023, sont tirées des Perspectives économiques de l’OCDE (OECD, 2023[1]) ; les rendements annuels à l’échéance des obligations à la date d’émission (YTM, Yield To Maturity), les encours et les taux de change sont tirés de la base de données du London Stock Exchange Group (LSEG) ; et l’encours de la dette par pays et par type d’instrument est tiré de l’enquête qui sous-tend les Perspectives de l’OCDE sur les emprunts souverains. Les taux annuels d’intérêt, d’inflation et de rendement à l’échéance sont convertis en valeurs journalières pour tenir compte du fait que les obligations sont émises et remboursées tout au long de l’année. Cette approche permet de garantir que les paiements d’intérêts sont répartis de manière exacte pour correspondre à la période effective pendant laquelle les obligations sont en circulation.

Calcul du taux d’intérêt effectif propre à chaque instrument

Instruments à taux fixe et à court terme

${\text{EIR}}_{\mathrm{i}}^{\text{y}}={\text{YTM}}_{\mathrm{i}}$

Instruments à taux variable

${\text{EIR}}_{\mathrm{i}}^{\text{y}}= \frac{\sum _{d=0}^{D^y}\left(S_i^d\times \left(\frac{{\mathrm{Y}\mathrm{T}\mathrm{M}}_{\mathrm{i}}}{D^y}+F_i^d\right)\right)\mathrm{ }}{\sum _{d=0}^{D^y}{S}_i^{\text{d}}}$

Instruments indexés sur l’inflation

${\text{EIR}}_i^{\text{y}}=\frac{\sum _{d=0}^{D^y}\left(\frac{S_i^d}{D^y}\times \left({\text{YTM}}_{\mathrm{i}}+I^Y+I^Y\times {\text{YTM}}_{\mathrm{i}}\right)\right)}{\sum _{d=0}^{D^y}{S}_i^{\text{d}}}$

Où :

$EI{R}_i^y:$ Taux d’intérêt effectif de l’instrument de dette i pour l’année y ;

${\text{YTM}}_{\mathrm{i}}:$ Rendement annuel à l’échéance à la date d'émission de l’instrument de dette i ;

$S_i^d:$ Encours de l’instrument de dette i le jour d ;

$D^y:$ Nombre de jours de l’année y ;

$I^Y:$ Taux d’inflation pour l’année y ;

$F_i^d:$ Taux d'intérêt variable journalier de l'instrument de dette.

Ajustement des encours après rachats

L’encours de la dette connaît des variations intra-annuelles dues à des événements tels que les échéances et les rachats d’obligations. Dans ce contexte, chaque émission obligataire, y compris les réouvertures, est considérée comme une unité distincte jusqu’à ce qu’il y ait une diminution perceptible de l’encours de la ligne obligataire. Lorsqu’une réduction est observée dans une ligne obligataire spécifique, son effet est systématiquement réparti entre l’émission initiale et toutes les éventuelles réouvertures ultérieures le jour de l’événement. Cette répartition est effectuée au prorata de leur encours respectif à cette date.

$S_{b,i}^d=S_{b,i}^{d-1}-\left(\frac{S_{b,i}^d}{\sum _i{S}_{b,i}^d}\right)\times R_b^d$

Où :

$S_{b,i}^d:$Encours de l’instrument de dette i le jour de l’événement pour l’instrument i de la ligne obligataire b ;

$R_b^d:$ Diminution du montant de l’encours de la ligne obligataire b le jour d de l’événement.

Consolidation du taux d’intérêt effectif au niveau des pays, des instruments et de l’OCDE

Le taux d’intérêt effectif au niveau des instruments est estimé en utilisant une méthode fondée sur la moyenne pondérée par les encours. Cette approche consiste à multiplier le rendement effectif annuel de chaque instrument de dette par son encours moyen quotidien au cours de l’année. Les rendements sont ensuite agrégés pour chaque pays et chaque type d’instrument, puis divisés par l’encours de chaque instrument tel qu’il ressort de l’enquête sous-jacente aux Perspectives de l’OCDE sur les emprunts souverains.

$EI{R}_{t,c}^y=\frac{\sum _{i,d}\left({YTM}_{i,t,c}^y\times S_{i,t,c}^{d,y}\right) }{\sum _{i,d}{S}_{i,t,c}^{d,y}}$ ; $EI{R}_c^y=\frac{\sum _{t}EI{R}_{t,c}^y\times {\varphi }_{t,c}^y}{\sum _t{\varphi }_{t,c}^y}$ ; $EI{R}_t^y=\frac{\sum _{t,c}EI{R}_{t,c}^y\times {\varphi }_{t,c}^y\times X_c^y}{\sum _{t,c}{\varphi }_{t,c}^y\times X_c^y}$ ; $W_t^y=\frac{EI{R}_t^y\times \sum _c{\varphi }_{t,c}^y\times X_c^y}{\sum _{t,c}EI{R}_{t,c}^y{\times \varphi }_{t,c}^y\times X_c^y}$

Où :

$EI{R}_{t,c}^y:$ Moyenne pondérée du taux d'intérêt effectif pour le type d'instrument t au cours de l'année y et pour le pays c ;

$EI{R}_c^y:$ Moyenne pondérée du taux d'intérêt effectif pour le pays c au cours de l'année y ;

$EI{R}_t^y:$ Moyenne pondérée du taux d'intérêt effectif pour le type d'instrument t au cours de l'année y pour la zone OCDE ;

${\varphi }_{t,c}^y:$Encours de la dette de l’instrument t dans le pays c au cours de l’année y ;

$X_c^y:$Taux de change entre la monnaie nationale du pays c et le dollar des États-Unis (USD) le dernier jour de l’année y ;

$W_t^y:$ Part des taux d'intérêt attribués au type d'instrument t.

Annexe 1.D. Calcul de la dette négociable des marchés émergents et économies en développement (MEED)

Données relatives aux marchés primaires d’obligations souveraines et catégorisation des pays

Les données relatives aux marchés primaires d’obligations souveraines sont tirées de calculs originaux de l’OCDE reposant sur des données provenant du LSEG, qui fournit des données internationales au niveau des titres sur les nouvelles émissions d’obligations souveraines. L’ensemble de données porte sur des obligations émises par des marchés émergents souverains pendant la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2023 et comprend des émissions à court et à long terme. Les obligations à court terme (« bons du Trésor ») sont des titres dont l’échéance est inférieure ou égale à 365 jours, sans toutefois être inférieure à 30 jours ; en effet, les titres à moins de 30 jours sont considérés comme émis à des fins de gestion de trésorerie et ont été exclus des calculs. Les données comprennent un ensemble détaillé d’informations sur chaque émission obligataire, notamment le produit de l’émission, la date d’échéance, le taux d’intérêt et la structure en devises.

La définition des marchés émergents utilisée dans le présent rapport est conforme à celle de la catégorie des marchés émergents et économies en développement utilisée par le FMI dans ses Perspectives de l’économie mondiale. Les définitions régionales sont également les mêmes que celles du FMI, et les catégories de revenu utilisées (revenu élevé, faible revenu, revenu intermédiaire de la tranche inférieure et revenu intermédiaire de la tranche supérieure) sont celles qui ont été définies par la Banque mondiale en fonction des niveaux de RNB par habitant.

Certaines émissions obligataires ont fait l’objet d’une réouverture. Dans ce cas, les données initiales ne portent que sur le montant total de l’émission (montant d’origine plus réouverture). Pour pouvoir déterminer le montant à l’émission des lignes obligataires ayant fait l’objet d’une réouverture, des données spécifiques sur les montants en cours à la date de chaque réouverture des lignes concernées ont été obtenues individuellement auprès du LSEG. Les données relatives à une réouverture ne portant que sur l’encours à la date concernée, on a soustrait de celui-ci l’encours calculé à la date précédente, de façon à obtenir le montant émis à chaque fois. Les montants à l’émission ainsi calculés ont été convertis à l’aide des taux de change du dollar des États-Unis à la date de l’opération tels que communiqués par le LSEG. Dans un souci de cohérence et de comparabilité, la même méthode a été utilisée pour toutes les émissions, y compris celles qui n’ont pas fait l’objet de réouvertures.

Les offres d’échange et certains emprunts obligataires figurant dans l’ensemble de données ont été manuellement exclus lorsqu’ils ne possédaient pas de code d’identification (ISIN, RIC ou CUSIP) et lorsqu’il n’a pas été possible d’obtenir manuellement des confirmations par comparaison avec des données publiques de source officielle.

Notes

← 1.  Les déficits budgétaires correspondent aux besoins de financement de l’État, et les besoins d’emprunt nets désignent les emprunts sur les marchés autres que les refinancements. Des écarts entre les besoins d’emprunt nets et les déficits budgétaires de l’État peuvent apparaître lorsque les États financent leurs besoins budgétaires par d’autres moyens que l’émission de titres de dette. Ces autres méthodes consistent notamment à utiliser les réserves de trésorerie existantes, à vendre des actifs (tels que des biens immobiliers et des entreprises publiques) ou à acquérir différents passifs, notamment en accumulant des arriérés ou en contractant des prêts. Le surendettement de 1 600 milliards USD en 2020, dû aux incertitudes entourant les prévisions liées à la pandémie, a entraîné une accumulation anormale de liquidités. Toutefois, en 2021 et occasionnellement en 2022, les excédents de trésorerie ont été utilisés pour lisser les émissions de dette en période de hausse des rendements.

← 2.  La valeur de la dette étant convertie en USD, un dollar plus fort grossit la dette des États-Unis, l’effet de change représentant 40 % de la croissance de la part du pays.

← 3.  Le resserrement quantitatif désigne le processus par lequel les banques centrales réduisent la taille de leur bilan en vendant des obligations ou en ne réinvestissant pas intégralement le produit des obligations arrivant à échéance, ce qui a pour effet de retirer de la liquidité du système financier et d’accroître le portefeuille d’obligations sur le marché.

← 4.  D’après l’enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État, la demande de titres indexés sur l’inflation a diminué en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni, et a augmenté au Chili, en Espagne, en Hongrie, en Islande, au Mexique, au Portugal et en Türkiye.

← 5.  Selon l’enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés primaires, il s’agit de l’Australie, du Costa Rica, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Lituanie, du Mexique, des Pays-Bas, de la Nouvelle-Zélande, du Portugal, de la Slovénie, de la Suède et de la Türkiye.

← 6.  Il s’agit de la moyenne des 38 pays membres de l’OCDE. Les grands émetteurs, en particulier les pays du G7, occupent une place prépondérante dans l’agrégat OCDE, et la situation spécifique qui prévaut dans les 38 pays membres peut s’en trouver occultée. La moyenne simple traite tous les pays de la même manière.

← 7.  Cette approximation sous-estime probablement l’impact à court terme de l’inflation sur les niveaux d’endettement. En outre, l’inflation accroît les recettes fiscales à court terme, réduisant ainsi les besoins d’emprunt nets. Cela explique en partie l’amélioration des besoins d’emprunt nets, qui a coïncidé avec un regain d’inflation sur la période 2021-23 (voir le Figure ‎1.1 A).

← 8.  Selon les prévisions pour la période 2022-24, les courbes de rendement réel sont entièrement positives uniquement au Canada, au Danemark, en Norvège et aux États-Unis.

← 9.  L’impact de la pandémie sur les finances publiques de l’UE a intensifié les discussions sur la réforme des règles budgétaires de l’UE. À l’issue d’une consultation publique, la Commission européenne a publié des orientations pour la réforme de ces règles, soulignant le rôle de l’analyse de viabilité de la dette dans l’évaluation des risques budgétaires (Blanchard, Leandro et Zettelmeyer, 2021[58] ; European Parliament, 2023[66]). Les trajectoires d’ajustement budgétaire fondées sur l’analyse de viabilité de la dette proposées par la Commission, qui couvrent une période d’au moins quatre ans, visent à assurer une trajectoire de réduction de la dette publique et le respect de la limite de déficit budgétaire de 3 % du PIB.

← 10.  Le point mort d’inflation désigne l’écart de rendement entre une obligation nominale à coupon zéro et sans risque de défaut et une obligation indexée sur l’inflation à coupon zéro et sans risque de défaut ayant la même échéance.

← 11.  La probabilité de ce scénario diminue avec la baisse de l’inflation, les banques centrales pouvant choisir d’abaisser plus tôt leurs taux directeurs.

← 12.  L’OCDE prévoit actuellement un atterrissage en douceur pour ses pays membres (OECD, 2023[1] ; OECD, 2024[16]). Un atterrissage en douceur dans un cycle de resserrement monétaire désigne le ralentissement réussi de la croissance économique par les banques centrales afin de juguler l’inflation sans déclencher de récession.

← 13.  Le graphique ne couvre pas tous les pays de l’OCDE, faute de données disponibles dans les Perspectives économiques de l’OCDE (OECD, 2023[1]).

← 14.  La comptabilité sur la base des droits constatés, utilisée dans les Statistiques de l’OCDE sur les comptes nationaux et par la majorité des pays de l’OCDE, permet d’enregistrer les charges d’intérêts au fur et à mesure de leur accumulation au fil du temps, indépendamment de la date effective de versement du coupon et de remboursement du principal. Le taux d’intérêt effectif pour une année donnée correspond donc à la moyenne pondérée des rendements à l’échéance, ajustés en fonction du taux ou de l’indice sous-jacent des titres à taux variable ou indexés sur un indice, de tous les titres de dette contenus dans le portefeuille.

← 15.  L’inflation fait généralement augmenter la valeur nominale des bases d’imposition, accroissant par là les recettes fiscales (Garcia-Macia, 2023[57]). Cette hausse compense souvent les effets de l’inflation sur les charges d’intérêts associées aux obligations indexées sur l’inflation.

← 16.  Selon l’Enquête 2023 de l’OCDE sur l’évolution des marchés primaires, 65 % des émetteurs souverains de la zone OCDE ayant un programme d’obligations indexées sur l’inflation ont déclaré que ce programme était à l’origine d’un allongement de l’échéance de leur portefeuille de dette.

← 17.  De fait, certains programmes d’émission de titres d’emprunt indexés sur l’inflation ont vu le jour dans les années 1980 et constituaient une méthode importante de financement de marché à une époque où les banques centrales ne bénéficiaient pas d’une indépendance opérationnelle en matière de politique monétaire.

← 18.  Ce chiffre tient davantage aux augmentations potentielles de charges d’intérêts, plutôt qu’à la proportion de la dette arrivant à échéance ou dont le taux sera refixé. Le taux de la majeure partie de la dette échue a déjà été refixé à un niveau plus élevé, ce qui laisse penser qu’une diminution des coûts d’emprunt futurs est probable (à supposer que les taux baissent). Les instruments à court terme ont en outre été refinancés à des taux plus élevés. Enfin, les pays qui verront une grande partie de leur dette faire l’objet d’un refinancement ou d’une refixation de taux au cours des trois prochaines années mais dont les ratios dette/PIB sont faibles seront peu exposés à l’augmentation des coûts d’emprunt, à l’instar de la Pologne, qui affiche un ratio dette/PIB de 30 % et dont près de la moitié de l’encours de la dette arrive à échéance d’ici la fin de 2026 ou doit faire l’objet d’une refixation de taux avant cette date.

← 19.  On présuppose aux fins de ce calcul que le rendement à l’échéance des obligations à taux fixe émises sur la période 2024-26 correspondra à celui de 2023.

← 20.  Les pratiques comptables relatives aux titres détenus à des fins de politique monétaire varient d’une banque centrale à l’autre (OECD, 2023[26]). La Réserve fédérale des États-Unis et la Banque du Japon comptabilisent ces titres à leur coût historique, ce qui reporte l’incidence des variations de la valeur de marché des titres au moment de leur vente. Ces banques centrales déclarent les variations de valeur latentes uniquement à des fins de transparence. La BCE fait preuve de souplesse en matière de principes comptables, permettant aux banques centrales nationales de choisir entre la méthode de comptabilisation au coût amorti et celle de comptabilisation à la juste valeur (la plupart des banques centrales nationales de la zone euro optent pour la première). D’autres banques centrales, dont celles de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de la Suède, du Royaume-Uni et de la Suisse, comptabilisent les titres détenus à des fins de politique monétaire à leur valeur de marché. Les banques centrales qui ne recourent pas à la méthode de comptabilisation en valeur de marché peuvent tout de même subir des pertes lorsqu’elles vendent activement des titres achetés à des taux bas durant une période où les taux sont relativement plus élevés.

← 21.  À titre d’exemple, la Fed comptabilise les pertes qu’elle subit comme un « actif différé ». Lorsqu’elle dégage un bénéfice net, la valeur de cet actif est déduite. Une fois cette valeur compensée, la Fed reprend le versement de ses bénéfices au Trésor (Castro et Jordan-Wood, 2023[31]).

← 22.  Sont exclus de cette sélection les pays dont les avoirs détenus par la banque centrale en 2022 représentaient moins de 10 % de la dette nationale et ceux qui n’ont pas répondu à la question correspondante dans les Enquêtes 2022 et 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État. La question posée était la suivante : « Veuillez indiquer la part totale des avoirs de la banque centrale dans la dette publique nationale, en distinguant les avoirs détenus par votre banque centrale de ceux détenus par des banques centrales étrangères au 30 juin 2023 (2022) ».

← 23.  Les banques centrales de l’Australie, de la Hongrie et d’Israël mènent aussi un resserrement quantitatif passif (RBA, 2022[64] ; Lybek, 2023[56] ; OECD, 2023[34] ; BIS, 2023[35]). Les banques centrales de la Nouvelle‑Zélande et de la Suède procèdent quant à elles à la vente active d’obligations dans le cadre de leur programme de resserrement quantitatif. (RBNZ, 2022[62] ; SRB, 2022[63]). La Banque de Corée n’a pas pris de mesures de resserrement quantitatif en raison de la faible ampleur de son programme d’assouplissement quantitatif, auquel elle a désormais mis fin (BIS, 2023[35]).

← 24.  De fait, lorsque les banques centrales procèdent à la vente active d’obligations dans le cadre de leur programme de resserrement quantitatif, les niveaux de dette et de duration à absorber par le marché augmentent. Lorsque le resserrement quantitatif est passif, les banques centrales ne font plus baisser les niveaux de dette et de duration sur le marché via des réinvestissements ; par conséquent, l’offre nette de dette et de duration à absorber par le marché augmentera si le calendrier d’émission des emprunteurs souverains reste le même.

← 25.  La durée moyenne jusqu’à l’échéance des titres d’État vendus par la Banque d’Angleterre dans le cadre de son programme de resserrement quantitatif avoisinait 20 ans.

← 26.  Les réserves de change sont essentiellement investies dans des titres d’État et des dépôts au jour le jour ou à terme auprès de la banque centrale concernée.

← 27.  L’expression « vendeurs insensibles aux variations de prix » signifie qu’une banque centrale vend des obligations d’État non pas en fonction de considérations liées au rendement, mais pour s’acquitter de ses mandats de stabilité des prix et de stabilité financière. La vente de ces obligations n’est cependant pas totalement insensible aux prix. À titre d’exemple, la Banque d’Angleterre procède à des adjudications d’obligations, dans le cadre desquelles elle fixe en amont des prix de soumission minimum et peut décider de réduire le montant d’obligations mises aux enchères en cas de demande particulièrement faible ; ce montant sera reporté lors de prochaines adjudications afin que la banque centrale puisse atteindre son objectif de réduction de son portefeuille obligataire (Bank of England, 2022[68]).

← 28.  D’après l’Enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État, ces pays sont les suivants : Autriche, Canada, Corée, Finlande, Islande, Irlande, Israël, Italie, Japon, Lettonie, Lituanie, Portugal, Royaume-Uni, Slovaquie et Suisse.

← 29.  La nature des relations entre les fonds spéculatifs et les marchés des obligations d’État varie considérablement d’un pays à l’autre (FSB, 2022[49]). Ainsi, en 2020, les fonds spéculatifs américains ont fortement recouru à des opérations d’achat de titres au comptant et de vente de contrats à terme, utilisant leurs positions pour tirer parti de faibles écarts de prix. Toutefois, en raison de la volatilité du marché, ils ont enregistré des pertes en valeur de marché et ont dû procéder à des ventes à prix bradés. À l’inverse, au Royaume‑Uni et dans la zone euro, les fonds spéculatifs ont privilégié les opérations en valeur relative, telles que les arbitrages entre émissions récentes et anciennes.

← 30.  D’après les conclusions de l’Enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État.

← 31.  Cette crise du mini-budget britannique est examinée dans la dernière édition des Perspectives sur les emprunts souverains (Sovereign Borrowing Outlook) (OECD, 2023[24]), tandis que la vente d’obligations d’État à prix bradés effectuée en 2020 a fait l’objet d’une analyse approfondie par le Conseil de stabilité financière (CSF) (FSB, 2022[49]).

← 32.  La présence accrue du secteur financier non bancaire sur le marché des obligations d’État a incité les organisations internationales, les autorités de réglementation financière et les banques centrales à prendre des mesures. En 2023, les États-Unis ont mis à jour leur réglementation des OPC monétaires afin d’améliorer la gestion de la liquidité et de la publication d’informations (US SEC, 2023[60]). La Commission européenne, qui devrait leur emboîter le pas, a jugé nécessaire, dans son évaluation du règlement sur les OPC monétaires, de procéder à de nouveaux ajustements (EC, 2023[67]). Le Royaume-Uni progresse quant à lui dans son programme de réformes, ainsi qu’en témoigne la récente consultation publique menée sur les OPC monétaires (FCA, 2022[61]). Parallèlement, le CSF a entrepris un examen approfondi des diverses réformes du secteur de l’intermédiation financière non bancaire mises en œuvre dans le monde pour renforcer la stabilité financière (FSB, 2023[59] ; FSB, 2022[65]).

← 33.  D’après l’Enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État, les pays concernés sont les suivants : Canada, Danemark, Irlande, Norvège, Pays‑Bas et Portugal.

← 34.  On calcule le taux de couverture des adjudications en divisant le montant total des soumissions reçues dans le cadre d’une adjudication d’obligations par le montant mis en adjudication.

← 35.  Pour emprunter, les émetteurs souverains ont recours non seulement à des adjudications, mais aussi à des syndications aux investisseurs finaux, ainsi qu’à des appels d’offres. Les volumes empruntés par ces méthodes varient considérablement d’un pays à l’autre, surtout entre les petits et les grands émetteurs.

← 36.  Aux États‑Unis, les Principal trading firms, qui sont des opérateurs pour compte propre, interviennent également sur les marchés des courtiers interprofessionnels. Ils utilisent leurs propres financements et se livrent essentiellement à des opérations pour compte propre, ainsi qu’à des opérations électroniques et algorithmiques. Ils font office d’intermédiaires sur les marchés des obligations d’État, des produits dérivés et d’autres titres, et jouent un rôle crucial dans l’apport de liquidités et le processus de détermination des prix.

← 37.  D’après l’Enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État, les pays de l’OCDE ont en moyenne 12 à 13 spécialistes en valeurs du Trésor, la Norvège en comptant 4 et l’Allemagne 32. Seuls 13 pays considèrent certains établissements non bancaires comme des spécialistes en valeurs du Trésor.

← 38.  Selon une étude de la Réserve fédérale des États-Unis, lorsque le niveau d’utilisation des capacités des courtiers est d’environ 20 %, l’effet induit par de nouvelles augmentations de capacités sur l’illiquidité du marché serait négligeable, mais que lorsque l’utilisation des capacités passe de 40 % à 80 %, l’illiquidité du marché s’envolerait et dépasserait d’environ trois écarts-types le niveau anticipé sur la seule base de la volatilité (Duffie et al., 2023[47]).

← 39.  D’après l’Enquête 2023 de l’OCDE sur la liquidité des marchés secondaires des obligations d’État, les spécialistes en valeurs du Trésor sont sélectionnés sur la base des critères suivants : maintien d’un environnement concurrentiel (dans 22 pays) ; activité sur le marché secondaire (22) ; capacité de distribution (21) ; stabilité du système (17) ; répartition géographique (13) ; ampleur des besoins d’emprunt (13) ; et capacité de stockage (8).

← 40.  L’émission continue ou la réouverture d’une émission est une méthode par laquelle un émetteur souverain vend des montants supplémentaires d’un titre émis antérieurement, augmentant ainsi l’offre de ce titre sans en modifier l’échéance ou le taux du coupon. En augmentant le volume d’un titre en circulation, en particulier d’une obligation peu en vogue, les émissions continues améliorent la liquidité du marché, ce qui facilite la négociation et le processus de détermination des prix de ces titres.

← 41.  Le programme de rachat annoncé par le Trésor des États-Unis, qui doit débuter en 2024, comporte deux volets, à savoir le soutien à la liquidité et la gestion de la trésorerie. Il prévoit des opérations régulières dans neuf catégories de titres et un montant de rachat maximum trimestriel de 30 milliards USD pour le soutien à la liquidité et de 120 milliards USD au maximum pour la gestion de la trésorerie au cours de la première année du programme. Ces paramètres seront fonction des conditions du marché et pourront faire l’objet d’ajustements opérationnels.