Garantir la sécurité alimentaire et nutritionnelle et soutenir les moyens de subsistance des agriculteurs et l’économie rurale sont des objectifs de longue date de la politique agricole. Au fil du temps, des préoccupations telles que la durabilité et l’inclusion ont gagné en importance et ont été intégrées dans la conception des politiques. Plus récemment, la résilience, l’adaptation et l’atténuation du changement climatique ont gagné en importance. La multiplicité des objectifs et les budgets serrés signifient que les fonds disponibles doivent être utilisés efficacement et que les synergies et les arbitrages entre les objectifs doivent être soigneusement étudiés. En aidant à comprendre les implications des mesures prises par les pouvoirs publics, le suivi des politiques agricoles peut faciliter la mise en œuvre de réformes qui garantissent que les politiques publiques permettent d’atteindre efficacement les résultats attendus.
Suivi de la politique agricole
Des politiques agricoles bien conçues peuvent aider les agriculteurs à répondre de manière durable à la demande mondiale croissante d’aliments sûrs et nutritifs. Toutefois, certaines politiques actuelles peuvent avoir des conséquences négatives sur la sécurité alimentaire, les marchés et l’environnement, tant au niveau national que mondial. Le suivi régulier par l’OCDE des politiques agricoles de 54 pays représentant les trois quarts de la valeur ajoutée agricole mondiale permet de bien comprendre leur nature, leur mise en œuvre et leur impact, dans le but d’aider les pouvoirs publics à élaborer des politiques plus efficaces et efficientes.
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Messages clés
L’alimentation fait l’objet d’échanges importants : 20 % des calories consommées dans le monde franchissent au moins une frontière et aucun pays n’est totalement autosuffisant pour produire toutes les denrées alimentaires qu’il consomme. Sans la facilité avec laquelle les denrées alimentaires traversent les frontières, les consommateurs seraient confrontés à des prix plus élevés et à des options limitées sur les étagères des magasins, tandis que les agriculteurs auraient moins de possibilités de vendre leurs produits à ceux qui en veulent. Le commerce est également vital pour la sécurité alimentaire, les mauvaises récoltes dans une région étant compensées par les approvisionnements en provenance d’autres régions. Enfin, les échanges permettent la diffusion d’innovations qui améliorent la productivité et la durabilité, et les agriculteurs des économies ouvertes sont plus susceptibles d’adopter des méthodes et des technologies innovantes que ceux qui sont protégés par des obstacles aux échanges.
Pourtant, les obstacles aux échanges, tels que les droits de douane et les quotas sur les importations, ainsi que d’autres mesures susceptibles de ralentir ou de limiter les échanges, restent très répandus. En effet, les mesures qui restreignent les échanges et font ainsi passer les prix intérieurs au-dessus des niveaux de référence représentent une part considérable de l’ensemble du soutien apporté au secteur, soit 334 milliards USD sur les 842 milliards USD par an de soutien total en 2021-23 dans 54 pays.
Une grande partie du soutien apporté au secteur agricole se présente sous les formes susceptibles de créer le plus de distorsions sur les marchés et les échanges et de nuire à l’environnement. Le soutien des prix du marché, les paiements au titre de la production et les subventions aux engrais, aux carburants ou à l’eau sont les formes de soutien qui faussent le plus les échanges, notamment si aucune limite n’a été fixée à l’utilisation de ces intrants. En encourageant les agriculteurs à produire davantage, ces mesures peuvent accroître l’utilisation d’intrants polluants et encourager les méthodes de production nocives. Le soutien fondé sur la production bénéficie aussi principalement aux grandes exploitations et tire vers le haut les prix que les agriculteurs paient pour les terres et d’autres intrants, réduisant l’avantage net du soutien jusqu’à 75 %. Enfin, ces politiques entravent les ajustements structurels et autres nécessaires pour s’adapter au changement climatique et améliorer la capacité du secteur à fournir des aliments sûrs, nutritifs et abordables à une population mondiale croissante.
Les pays s’attaquent souvent aux problèmes de sécurité alimentaire en prenant des mesures qui augmentent les prix intérieurs au-dessus de ceux des marchés internationaux afin d’encourager les agriculteurs à accroître leur production intérieure. Ces mesures, telles que des droits de douane élevés ou d’autres obstacles à l’importation, se traduisent généralement par une hausse du coût des denrées alimentaires, qui touche de manière disproportionnée les ménages à faible revenu. Dans certains pays, les pouvoirs publics s’efforcent de compenser ce phénomène en versant des sommes importantes aux consommateurs ou aux systèmes de distribution alimentaire ; toutefois, ces paiements ne sont pas toujours ciblés sur les personnes dans le besoin, peuvent entraîner des pertes et des gaspillages alimentaires s’ils ne sont pas bien gérés, et peuvent entraîner une charge budgétaire importante. Pour être efficaces, les politiques de sécurité alimentaire doivent associer des investissements dans la production intérieure durable et des importations de denrées alimentaires facilement accessibles.
Depuis la révolution verte des années 1960, la croissance de la productivité a aidé les agriculteurs à répondre à la demande de denrées alimentaires supplémentaires sans utiliser davantage de terres – ce qui est essentiel pour lutter contre le changement climatique. La croissance de la productivité est le résultat d’innovations dans les domaines de la génétique, des pratiques de gestion des exploitations, des matériaux et des machines, soutenues par des investissements publics dans la R-D, les services de vulgarisation, la formation et le conseil. Dans le même temps, les investissements dans d’autres services ont également créé un environnement propice à une croissance durable de l’agriculture. Les investissements dans la biosécurité, notamment dans les systèmes d’inspection et de contrôle, contribuent à la prévention des ravageurs et des maladies et au rétablissement de la situation, tandis que les investissements dans les infrastructures et institutions physiques et numériques sont la clé du bon fonctionnement des systèmes de production et des marchés. Enfin, les pouvoirs publics versent également des paiements directs aux agriculteurs pour qu’ils produisent des biens publics sur leurs terres, par exemple pour divers services écosystémiques tels que l’amélioration de la biodiversité ou la protection de l’eau.
Pourtant, même s’il est prouvé que ces investissements génèrent d’importants rendements à long terme, ils ne représentent qu’une part minime du soutien au secteur. Sur le soutien total au secteur dans les 54 pays examinés par l’OCDE dans le cadre de son suivi annuel en 2020-22, les investissements dans l’innovation, la biosécurité, les infrastructures et les autres services d’intérêt général ne représentaient que 12.5 % de l’ensemble des transferts au secteur. Ce chiffre représente une baisse par rapport aux 16 % enregistrés il y a vingt ans. Et si la part des paiements au titre des biens publics agricoles a presque doublé au cours de la même période, elle représente encore moins de 0.2 % du total. En outre, l’investissement dans l’innovation doit être bien ciblé si l’on veut qu’il atteigne des objectifs de durabilité parallèlement à la croissance de la productivité. Les pouvoirs publics disposent d’une marge de manœuvre considérable pour à la fois accroître la part du soutien allouée aux investissements à long terme dans les services d’intérêt général essentiels, et mieux cibler ces investissements afin de favoriser une croissance durable de la productivité.
Contexte
Le soutien public à l’agriculture reste élévé
Le soutien total au secteur agricole dans les 54 pays couverts par le rapport s’est élevé en moyenne à 842 milliards USD par an entre 2021 et 2023. Près des trois quarts de ce total profitent aux agriculteurs individuellement, sous la forme de prix plus élevés ou de paiements et d’avantages fiscaux, tandis que les dépenses consacrées aux services d’intérêt général et aux consommateurs en représentent respectivement 12.6 % et 12.7 % en moyenne.
L’atténuation et l’adaptation au changement climatique représentent des défis majeurs pour l’agriculture
En tant que secteur dépendant de la nature, l’agriculture est particulièrement vulnérable au changement climatique tout en étant la source d’un cinquième des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine. La réduction des émissions agricoles, l’adaptation au changementt climatique et la promotion d’une croissance durable de la productivité sont donc des objectifs essentiels des politiques agricoles. Pour cela, la R-D, la biosécurité et les infrastructures et d’aurtres services généraux jouent un rôle essentiel. Pourtant, leur part dans le soutien public total au secteur est tombée à 12.6 % en 2021-23, contre 16 % deux décennies plus tôt.Pourtant, si les services d’intérêt général (comme la R-D, la biosécurité et les infrastructures) jouent un rôle essentiel pour aider le secteur à s’adapter au changement climatique, leur part du soutien public total au secteur est tombée à 12.5 % en 2020-22, contre 16 % vingt ans plus tôt.
Le rapport de l’OCDE Politiques agricoles : suivi et évaluation apporte une transparence et des éclairages sur le soutien apporté par les pays à leur secteur agricole
Ce rapport phare annuel de l’OCDE suit les politiques qui influent sur la performance de l’agriculture et évalue la valeur du soutien découlant de ces politiques de manière à assurer la cohérence et la comparabilité entre les pays et dans le temps. Cela permet un dialogue bien étayé sur les politiques à suivre à différents niveaux.
- Au niveau national : Le rapport de suivi et les données sous-jacentes sur le soutien donnent aux pays un moyen de comprendre la forme générale de leur politique agricole et le soutien qu’ils apportent au secteur. L’évaluation comparative des politiques des pays par rapport à d’autres peut contribuer à éclairer un dialogue national sur les objectifs, les impacts et les orientations des efforts déployés, sur la base d’un cadre de référence commun.
- Au niveau international : Le rapport facilite l’apprentissage mutuel et le dialogue sur les tendances en matière de soutien au secteur, en mettant en évidence les autres outils et pratiques de l’action publique permettant d’atteindre divers objectifs pour les systèmes alimentaires. Les pays ont tout intérêt à découvrir d’autres modèles de dépenses et d’investissement, ainsi que d’autres approches pour renforcer la productivité, la durabilité et la résilience de l’agriculture.
Depuis la première édition, dans les années 80, le rapport de l’OCDE Politiques agricoles : suivi et évaluation dresse un tableau cohérent et comparable du soutien à l’agriculture dans les différents pays et dans le temps. Cette source unique d’estimations du soutien couvre 54 pays de tous les continents, représentant les trois quarts de la valeur ajoutée agricole mondiale. La classification détaillée des différents types de soutien, qui fait la distinction entre les diverses caractéristiques de la mise en œuvre des politiques, permet d’évaluer globalement les niveaux et la composition du soutien à l’échelle mondiale.
Comment mesurer le soutien à l’agriculture
Pour aider les pouvoirs publics à mieux comprendre le montant et la forme du soutien apporté, l’OCDE a créé un ensemble d’indicateurs qui expriment les mesures prises par les pouvoirs publics à l’aide de chiffres permettant des comparaisons dans le temps et entre les pays.
Les principaux indicateurs du soutien à l’agriculture utilisés dans notre analyse sont définis ci-dessous, mais vous trouverez un guide complet de toutes les définitions et méthodes dans notre manuel en ligne sur l’ESP.
L’indicateur de l’estimation du soutien aux producteurs (ESP) estime la valeur monétaire annuelle des transferts bruts des consommateurs et des contribuables aux producteurs agricoles, mesurés au départ de l’exploitation, découlant des mesures de soutien à l’agriculture, quels que soient leur nature, leur objectif ou leur impact sur la production ou le revenu agricoles.
En complément de cet indicateur, l’estimation du soutien aux consommateurs (ESC) reflète la valeur monétaire annuelle des transferts bruts aux consommateurs de produits agricoles, mesurés au départ de l’exploitation, découlant des mesures de soutien à l’agriculture, quels que soient leur nature, leur objectif ou leur impact sur la consommation de produits agricoles.
D’autre part, l’estimation du soutien aux services d’intérêt général (ESSG) est utilisée pour estimer la valeur monétaire annuelle des transferts bruts découlant des mesures qui créent des conditions favorables au secteur agricole primaire par le développement de services privés ou publics, et par le biais des institutions et des infrastructures, quels que soient leurs objectifs et leurs impacts sur la production et le revenu agricoles, ou la consommation de produits agricoles. Il comprend les mesures dont l’agriculture primaire est le principal bénéficiaire, mais ne comprend pas les paiements aux producteurs à titre individuel. Les transferts pris en compte dans l’ESSG ne modifient pas directement les recettes des producteurs, leurs coûts ou leurs dépenses de consommation.
Globalement, l’estimation du soutien total (EST) donne une estimation globale de la valeur monétaire annuelle de tous les transferts bruts des contribuables et des consommateurs découlant des mesures de soutien à l’agriculture, déduction faite des recettes budgétaires correspondantes, quels que soient leurs objectifs et leurs effets sur la production et le revenu agricoles, ou sur la consommation de produits agricoles.
Données associées
Données par pays
Accédez à chaque mesure publique et aux principales données des indicateurs relatifs pour chaque pays (Excel) ainsi que, dans chaque cas, aux définitions et sources connexes (pdf).
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Publications associées
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Document politique1 septembre 2023