Les données spatiales sont essentielles pour comprendre la dynamique des conflits. L'indicateur de la dynamique spatiale des conflits (SCDi pour Spatial Conflict Dynamics indicator), développé par le CSAO/OCDE, cartographie la géographie des conflits en Afrique du Nord et de l'Ouest depuis 1997. En mesurant l'intensité et la distribution spatiale des événements violents, l'indicateur SCDi fournit aux décideurs politiques des informations clés sur la manière dont les conflits se propagent ou se contractent au sein ou au-delà des frontières nationales. Il permet d'éclairer les politiques relatives aux dimensions locales, nationales, transfrontalières et régionales des conflits.
Sécurité, frontières et développement
La violence en Afrique de l'Ouest atteint un niveau record. Le nombre d'événements violents et de morts est en constante augmentation. La violence s'étend également aux États côtiers du golfe de Guinée. Pour mieux comprendre ces tendances, le CSAO examine à la fois les dimensions géographiques des conflits et les relations entre les acteurs en conflit. Des analyses innovantes et dynamiques des réseaux sociaux et spatiaux permettent de mieux comprendre les problèmes de sécurité dans la région.
Messages clés
Le nombre d'acteurs en conflit n'a jamais été aussi élevé. Parmi ces acteurs évoluent des forces étatiques, des groupes rebelles mais aussi des organisations extrémistes. Leurs relations sont complexes et volatiles: de l’alliance, au conflit ou à la coopération. Également, les conflits se centrent progressivement sur un petit nombre d'acteurs puissants et violents. Une meilleure connaissance de ces relations est essentielle pour éclairer les stratégies régionales qui visent la stabilité politique de la région à long terme.
La violence est plus susceptible de se produire dans les zones frontalières de l'Afrique de l'Ouest qu'ailleurs dans la région. La violence s’accentue aux abords des frontières: la zone de 0 à 10 km autour d'une frontière représente la plus grande proportion d'événements violents et de décès. Les populations frontalières subissent 67 % plus de violence que les populations non-frontalières. L'analyse spatiale et interactive des zones frontalières réalisée par le CSAO permet ici de mieux comprendre comment les frontières façonnent les schémas de violence. Elle permet également d'élaborer des politiques davantage axées sur le lieu, dans un contexte d’intensification de la nature transnationale des conflits et des groupes violents.
Entre 2000 et 2022, les zones rurales représentent plus de 40 % de l'ensemble des événements violents et des décès en Afrique du Nord et de l'Ouest. La proportion d'événements violents dans les zones urbaines a diminué au fil du temps. Lorsque la violence se produit dans les zones urbaines, elle est principalement observée dans les petites agglomérations de 100 000 habitants ou moins. Les villes de taille moyenne ou grande sont rarement le théâtre d'événements violents, mais les conflits dans les zones rurales environnantes isolent ces villes de leur arrière-pays.
Contexte
Indicateur des dynamiques spatiales des conflits
L'indicateur des dynamiques spatiales des conflits (SCDi) cartographie l'évolution spatiale et temporelle de la violence en Afrique du Nord et de l'Ouest depuis 1997. Il identifie quatre types de conflits classés selon leur i) intensité et ii) concentration. Depuis 2011, l'Afrique du Nord et de l'Ouest fait face à une montée de la violence. Les cinq dernières années sont les plus violentes jamais enregistrées, en raison d'une forte augmentation de la violence ciblant les civils et les zones frontalières. Les principales zones concernées sont le Nigéria, le Sahel central et la région du lac Tchad. La violence se propage également du Sahel vers les pays côtiers. Le SCDi a été développé par le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest (CSAO/OCDE) en coopération avec le Groupe de recherche sur le Sahel de l'Université de Floride.
Les zones frontalières sont fortement associées à la violence
CARTA-Frontières cartographie l'occurrence des événements violents dans les zones frontalières de l'Afrique de l'Ouest. Classée par distance, par type d'événement et par nombre de morts, cette carte interactive aide les décideurs politiques à comprendre la dynamique spatiale de la violence, contribuant ainsi à la mise en place de politiques mieux adaptées au lieu et au contexte.
Depuis 1997, la violence est plus susceptible de se produire dans les zones frontalières qu'ailleurs dans la région. Entre 1997 et 2023, 49 % des événements violents et 50 % des décès se sont produits à moins de 100 km des frontières nationales.
Les principaux épicentres des conflits frontaliers sont le lac Tchad et la triple frontière Burkina Faso/Mali/Niger. En 2023, 40 % des événements violents et 43 % des décès dans les trois pays se sont produits dans un rayon de 50 km autour de la triple frontière. Une ceinture de conflit de 1 200 km de long et 200 km de large s'étend du centre du Mali à la région de Tillaberi au Niger. Ces événements soulignent l’enracinement de la violence dans la région et la nécessité de trouver des solutions transfrontalières coordonnées.
Des réseaux de conflit de plus en plus fragmentés menacent la vie des civils
Les réseaux de conflits en Afrique du Nord et de l'Ouest sont de plus en plus fragmentés. Les acteurs violents naviguent dans un réseau complexe d'alliances et de rivalités, évoluant souvent de relations hostiles à relations de coopération. Un ensemble d'acteurs très actifs et extrêmement violents émerge de ces réseaux.
Ce sociogramme représente 480 acteurs impliqués dans des événements violents en Afrique du Nord et de l'Ouest, ainsi que les 771 rivalités qui existent entre eux. La largeur des liens est proportionnelle au nombre de liens entre les acteurs. La taille des nœuds est également proportionnelle au nombre de liens qu'ils entretiennent avec d'autres acteurs. Le centre représente les civils nigérians, pris pour cible par les forces gouvernementales, les organisations extrémistes et d'autres groupes armés.
