Ce chapitre présente de nouveaux indicateurs sur l’économie des villes africaines, fondés sur les données de plus de 4 millions d’individus à travers l’Afrique. Ces indicateurs offrent un éclairage nouveau sur les villes africaines, d’une portée et d’une précision sans équivalent. Ils permettent de comparer la performance de villes de tailles différentes, de suivre leur évolution sur la durée et d’analyser l’effet des villes sur les zones rurales voisines. Il en ressort que, dans presque toutes les dimensions mesurables, l’urbanisation a un impact positif sur la performance économique et la qualité de vie.
Dynamiques de l'urbanisation africaine 2022
1. Une nouvelle perspective de l’économie urbaine africaine
Abstract
Résumé
Le débat politique sur l’urbanisation en Afrique a longtemps souffert d’un manque de données fiables. Ce chapitre présente de nouvelles évidences, fondées sur des données recueillies auprès de plus de 4 millions d’individus issus de 2 600 villes, dans 34 pays différents, et travaillant tant dans l’économie formelle que dans l’économie informelle. En associant les individus avec leur lieu d’habitation à partir de leurs coordonnées, il est désormais possible de décrire les villes africaines d’une manière beaucoup plus détaillée.
Ces données montrent que l’urbanisation de l’Afrique a contribué d’une manière significative à l’amélioration des résultats économiques et du niveau de vie. Au sein de leur pays, ce sont les villes qui enregistrent les meilleurs résultats dans la plupart des catégories. Dans les grandes villes, les salaires horaires sont deux fois plus élevés que ceux des zones rurales et le sous-emploi y est moins répandu : les travailleurs urbains enregistrent en effet 30 % d’heures de travail de plus que les travailleurs ruraux. La part des travailleurs ayant des emplois qualifiés atteint environ 50 % pour les hommes et 25 % pour les femmes dans les grandes villes et les villes moyennes, contre seulement 18 % et 11 %, respectivement, en zones rurales.
Les villes facilitent l’accès aux services et aux infrastructures. Les enfants des grandes villes reçoivent en moyenne près de cinq années d’éducation de plus que les enfants des zones rurales. Dans les grandes villes, 80 % des ménages sont connectés au réseau électrique, contre 20 % seulement en zones rurales. Plus de la moitié des ménages des grandes villes disposent d’un compte en banque alors que ce taux ne s’élève qu’à 20 % dans les campagnes.
Les taux de fécondité dans les grandes villes sont inférieurs de 37 % à ceux des zones rurales ; et la différence entre leurs rapports de dépendance (le rapport entre la population en âge de travailler et celle trop jeune ou trop âgée pour travailler) est encore plus élevée. Or, des rapports de dépendance moins élevés signifient de meilleurs niveaux de Produit intérieur brut (PIB) par habitant car chaque habitant en âge de travailler doit subvenir aux besoins de moins d’habitants qui ne sont pas en âge de travailler.
Les villes petites et moyennes obtiennent en moyenne des résultats moins bons que les grandes villes, mais nettement meilleurs que les zones rurales. Pour la plupart des indicateurs, l’écart entre les zones rurales et les petites villes (de 10 000 à 50 000 habitants) est supérieur à l’écart entre les petites et les grandes villes (celles de plus d’un million d’habitants).
L’urbanisation profite également aux zones rurales qui, grâce aux villes, accèdent aux marchés, aux infrastructures et aux services. La proximité des villes est fortement corrélée à de meilleurs résultats dans la plupart des dimensions analysées dans ce chapitre. Avec l’émergence de près de 4 500 nouvelles villes africaines entre 1990 et 2015, des millions d’habitants des campagnes ont pu accéder aux opportunités économiques, aux services et aux infrastructures des villes voisines.
Depuis 1990, les villes africaines ont vu leur population croître d’environ 500 millions d’habitants, sans pour autant perdre leurs avantages économiques, ni leur avance en matière d’infrastructures ou de fourniture de services. L’urbanisation a ainsi amélioré la qualité de vie de millions de migrants ruraux dans les villes. Comme les grandes villes ont tendance à obtenir de meilleurs résultats que les villes plus petites, la croissance de la population urbaine causée par l'urbanisation a également profité aux résidents des villes en expansion.
Les villes sont porteuses d’économies d’agglomération. Les entreprises et les travailleurs des villes sont plus productifs que ceux des zones rurales ; quant aux entreprises et travailleurs des villes relativement grandes, ils sont plus productifs que ceux des villes relativement petites. Quand les personnes migrent des zones rurales vers les zones urbaines et que les villes grandissent, la productivité de l’économie augmente. Un calcul rapide suggère que la hausse de productivité – due à la croissance des économies d’agglomération provoquée par l’urbanisation – représente 0.33 point de pourcentage de la croissance du PIB par habitant en Afrique. Cela correspond à 29 % de la croissance annuelle moyenne du PIB en Afrique entre 2001 et 2020.
Les leviers de développement économique, comme l’accès à l’électricité, à l’éducation et aux services bancaires, ont progressé dans les villes, conformément aux tendances nationales. Mais si les villes obtiennent partout de meilleurs résultats que les zones rurales, les indicateurs clés de l’économie urbaine n’ont que faiblement augmenté depuis les années 90. La part des emplois qualifiés est restée constante. De même, la part des ménages qui possèdent des biens de consommation durables, comme un réfrigérateur ou une voiture, n’a, au mieux, que faiblement augmenté. L’urbanisation offre des avantages économiques majeurs en permettant aux habitants des villes d’accéder à de meilleurs emplois et de meilleurs services. Toutefois, des efforts supplémentaires s’imposent si l’on veut que les villes deviennent les moteurs d’une croissance économique durable.
Les données sur les villes africaines et leurs économies sont limitées en comparaison des autres régions du monde. Les villes africaines sont souvent perçues comme surpeuplées, embouteillées et peu productives ; et l’urbanisation rapide comme une menace ou, au mieux, comme un problème à résoudre. Ce chapitre questionne cette perception. Il montre que l’urbanisation est bénéfique pour l’Afrique et contribue à l’amélioration des résultats économiques et des niveaux de vie. S’il est indéniable que les villes font face à des défis majeurs, le chapitre montre qu’elles obtiennent, dans la plupart des dimensions, des résultats nettement meilleurs que le reste du pays où elles se situent. Souvent, l’écart entre la performance des villes et les moyennes nationales est beaucoup plus important en Afrique que dans de nombreuses autres régions du monde.
Ce chapitre présente de nombreux nouveaux indicateurs basés sur un ensemble de sources de microdonnées contenant des millions d’observations individuelles. Le Tableau d’annexe 1.A.1 donne un aperçu général des pays concernés. Ces indicateurs sont construits en utilisant une définition uniforme de ce qui constitue une ville fournie par la base de données Africapolis. Une définition uniforme est indispensable pour obtenir des indicateurs comparables ; la définition de la ville varie parfois considérablement d’un pays à l’autre. Les données incluent des individus, choisis indépendamment de leur statut professionnel, travaillant dans le secteur informel ou formel. Les indicateurs fournissent donc une moyenne représentative de l'économie formelle et informelle, sans faire de distinction entre les deux. Le chapitre montre des écarts importants et systématiques entre les résultats moyens des villes et ceux des zones rurales, comme entre les résultats moyens de villes de différentes tailles. Malgré ces tendances claires, il est important de garder à l'esprit que l'Afrique est un continent hétérogène présentant de larges variations en termes de niveau de revenu et de niveau de vie. Les moyennes présentées dans ce chapitre indiquent donc des tendances générales, mais peuvent cacher des variations entre villes de taille égale. Ces différences ne peuvent être examinées en détail dans le cadre d'un chapitre, mais ne sont pas négligeables pour autant.
Ce chapitre, s’appuie sur des travaux connexes pour élaborer des évaluations quantitatives des villes des pays en développement sur la base de microdonnées géocodées, notamment Henderson et al. (2019[3]), OCDE/Commission européenne (2020[4]) et Gollin et al. (2021[5]). Les données utilisées dans ce chapitre sont antérieures à la pandémie de COVID-19. Au moment de la rédaction de ce rapport, il n’était pas encore possible de prévoir si cette pandémie aurait des effets durables sur les villes africaines (voir aussi Encadré 1.4).
Les emplois disponibles dans les villes africaines exigent des compétences plus élevées et sont généralement mieux rémunérés que dans les zones rurales. Les infrastructures y sont meilleures et les services plus largement disponibles. Les habitants des villes bénéficient d’une meilleure éducation, et les taux de fécondité et rapports de dépendance y sont inférieurs à ceux des zones rurales. Le sous-emploi est moins répandu car les travailleurs urbains travaillent plus longtemps et sont plus susceptibles d'avoir un emploi formel que les travailleurs ruraux. En outre, les grandes villes obtiennent généralement de meilleurs résultats que les petites villes dans la plupart des dimensions. La part des entreprises qui investissent dans la recherche et développement (R&D), par exemple, augmente considérablement avec la taille des villes. Cependant, l’écart entre grandes villes et petites villes tend à être plus faible que celui entre petites villes et zones rurales.
Si la population urbaine de l’Afrique a augmenté d’environ 500 millions d’habitants entre 1990 et 2020, les villes africaines continuent d’enregistrer de bonnes performances. Pour la plupart des dimensions mesurables, les écarts entre zones rurales et urbaines sont restés largement stables sur la période. L’urbanisation a fortement stimulé les résultats économiques et le niveau de vie, permettant à des centaines de millions de personnes de quitter des zones rurales économiquement moins performantes pour bénéficier de meilleures opportunités dans les villes. Cependant, il n'est pas certain que les économies urbaines se transforment rapidement. Par exemple, les taux d’équipement en biens de consommation durables, tels que les réfrigérateurs, est resté stable ou n’a connu qu’une faible hausse au cours des trois dernières décennies.
Les avantages de l’urbanisation profitent également aux zones rurales. Dans ces dernières, la proximité des villes est corrélée à de meilleurs résultats. Par exemple, le niveau moyen d’éducation et la part des emplois qualifiés dans les zones rurales déclinent fortement à mesure que la distance avec la ville la plus proche augmente. Avec l’émergence de près de 5 000 nouvelles villes africaines, entre 1990 et 2020, des millions d’habitants des campagnes ont pu accéder aux opportunités économiques, aux services et aux infrastructures fournis par les zones urbaines.
Si ce chapitre montre que les villes africaines enregistrent de bons résultats dans le contexte de leur pays, il est clair qu'elles doivent relever des défis. Beaucoup de villes africaines manquent de planification, d’infrastructures et de services publics suffisants, en comparaison avec d’autres régions du monde. Elles sont confrontées à des niveaux croissants de pollution et menacées par le changement climatique. Le coût élevé des activités commerciales limite la compétitivité de leurs économies et les villes africaines ne connaissent pas les transformations rapides observées dans d’autres économies émergentes, comme la Chine. Il incombe aux gouvernements africains de relever ces défis s’ils veulent que leurs villes atteignent les niveaux de développement enregistrés dans d’autres régions du globe.
En dépit des défis auxquels font face les villes africaines, les données montrent clairement que l’urbanisation africaine apporte d’importants bénéfices économiques et sociaux. Reconnaître ce fait est une condition préalable à une gestion efficace de la croissance urbaine. Si les défis doivent être relevés, ils ne doivent pas servir d’argument pour contenir l’urbanisation que connaît l’Afrique. Son urbanisation rapide constitue une opportunité unique. Les gouvernements doivent concentrer leurs efforts pour en tirer le meilleur parti.
Encadré 1.1 Données utilisées dans ce chapitre
Les indicateurs clés présentés dans ce chapitre se basent sur quatre bases de données. La méthodologie retenue pour le traitement de ces données est décrite au sein de l’Encadré 1.2. Les quatre bases de données utilisées pour construire ces indicateurs sont les suivantes :
Africapolis
Africapolis (OCDE/CSAO, 2018[2]) est une base de données géospatiale complète et homogène sur les villes. Elle se base sur une définition uniforme des zones urbaines et couvre 7 721 villes africaines, de plus de 10 000 habitants en 2015. Elle fournit des estimations de population au niveau des agglomérations individuelles, une géolocalisation systématique et des données relatives à la superficie et au développement de ces agglomérations depuis 1950. Les villes sont définies comme des zones bâties contiguës (avec des écarts de moins de 200 mètres séparant les bâtiments) comptant au moins 10 000 habitants.
Enquêtes Démographiques et de Santé (EDS)
Les Enquêtes Démographiques et de Santé (EDS) (en anglais, Demographic and Health Surveys ou DHS) (EDS, 1990-2019[1]) constituent la source de données la plus complète concernant les individus en Afrique. Depuis 1990, près de 150 enquêtes ont été réalisées dans 32 pays, rassemblant des informations sur plus de 4 millions de personnes. Comme leur nom l’indique, les données EDS ne portent pas uniquement sur les résultats économiques, bien qu’elles fournissent une quantité considérable d'informations sur les résultats économiquement pertinents. Les données EDS sont géoréférencées (elles fournissent les coordonnées géographiques des répondants), ce qui permet d’associer les individus aux villes définies par Africapolis.
Living Standard Measurement Study (LSMS)
Les données des enquêtes Living Standard Measurement Study (LSMS), (en français Étude de mesure des niveaux de vie), (Banque mondiale, 2008-2019[6]) constituent un autre ensemble de microdonnées géoréférencées. Elles fournissent des informations sur la situation économique des ménages et sont donc tout à fait pertinentes pour ce chapitre. Cependant, la couverture des pays reste limitée (les enquêtes géocodées ont pu être utilisées pour six pays uniquement entre 2008 et 2019) et la taille des échantillons relativement faible (moins de 100 000 ménages au total). En outre, les bases de données LSMS contiennent davantage d’éléments spécifiques aux pays que les données EDS et sont donc moins comparables entre pays.
Enterprise Surveys
Les Enterprise Surveys ou enquêtes sur les entreprises (Banque Mondiale, 2010-2019[7]) contiennent des informations sur les entreprises individuelles, notamment les caractéristiques clés de leurs activités commerciales, leurs employés et les obstacles auxquels elles sont confrontées. Contrairement aux données EDS et LSMS, elles ne sont pas géoréférencées ; il n’est donc pas possible d’associer les entreprises avec les villes au sein desquelles elles se situent.
Les villes africaines obtiennent de meilleurs résultats que les zones rurales dans de nombreux domaines
Les niveaux de revenu et de consommation sont plus élevés dans les villes que dans les zones rurales
Partout dans le monde, la productivité des travailleurs et des entreprises tend à être plus élevée dans les villes que dans les zones rurales ; ce qui se traduit par des salaires moyens plus élevés pour les travailleurs des zones urbaines. L’Afrique ne fait pas exception. Les salaires horaires moyens des six pays pour lesquels des données sont disponibles (Éthiopie, Mali, Malawi, Nigéria, Tanzanie et Ouganda) s’élèvent à 0.51 USD dans les zones rurales et 1.03 USD dans les villes relativement grandes (plus de 250 000 habitants), soit pratiquement le double (Graphique 1.2). Cet écart salarial se reflète directement dans plusieurs indicateurs du niveau de vie, tels que la consommation et la richesse, mais aussi dans d’autres résultats, tels que la possession d’actifs, présentés ci-dessous.
L'écart des niveaux de consommation entre les zones rurales et urbaines est encore plus important que l’écart des salaires horaires (Graphique 1.3), en particulier l'écart entre les petites villes et les zones rurales. Plusieurs facteurs sont responsables de cette différence. Comme expliqué ci-après, le nombre d’heures travaillées est nettement plus élevé dans les zones urbaines que dans les zones rurales, ce qui implique que les différences de salaire total entre les zones rurales et urbaines sont plus importantes que les différences de salaire horaire. De plus, les rapports de dépendance sont plus faibles dans les zones urbaines que dans les zones rurales. Pour 100 habitants en âge de travailler, les villes comptent environ 30 personnes inactives en raison de leur âge (personnes trop jeunes ou trop âgées pour travailler) de moins que dans les zones rurales. Cela implique qu’un pourcentage plus élevé de la population des villes travaille ; les niveaux moyens de revenu par personne y sont donc plus élevés et les niveaux de consommation supérieurs pour un niveau de rémunération donné1.
Encadré 1.2 Comment les indicateurs clés de ce chapitre sont-ils calculés ?
La plupart des indicateurs mentionnés dans ce chapitre sont fondés sur les microdonnées des enquêtes EDS et LSMS, qui sont appariées aux différentes villes définies par Africapolis (voir Encadré 1.1 pour une description des différentes bases de données). Pour obtenir ces indicateurs, la méthode suivante a été employée :
1. Les individus et/ou ménages couverts par les enquêtes EDS et LSMS sont appariés aux zones bâties des villes telles que définies par Africapolis, en fonction de leur localisation. Cette étape est compliquée par le fait que les enquêtes EDS et LSMS n'utilisent pas des définitions homogènes des zones urbaines et appliquent un décalage aléatoire de 2 ou 5 kilomètres, respectivement, aux coordonnées des ménages afin de préserver l’anonymat des personnes interrogées. Pour contourner ce problème, un ménage est assigné à une ville s’il est défini par EDS ou LSMS comme un ménage urbain et si une ville correspondant à la définition d’Africapolis se situe dans la zone d’incertitude. De même, les ménages qui sont définis par EDS ou LSMS comme étant ruraux mais qui ont une probabilité supérieure à 50 % d'être en réalité situés dans la zone bâtie d'une ville selon Africapolis sont affectés à cette ville2. Au total, les observations de EDS et LSMS ont pu être appariées avec environ un tiers des 7 721 villes de la base de données Africapolis. Tous les autres ménages ont été considérés comme ruraux.
2. Les moyennes au niveau de chaque ville sont calculées en faisant la moyenne de tous les individus assignés à la ville et en utilisant les pondérations fournies par les enquêtes EDS et LSMS. Cette opération est répétée pour chaque vague d’enquêtes. Les moyennes annuelles sont créées pour les villes couvertes par plusieurs vagues d’enquêtes à différentes.
3. Les moyennes par catégorie de taille de ville sont créées en faisant la moyenne de toutes les moyennes pour cette catégorie de taille pour tous les pays disponibles entre 2010 et 2019. Les villes sont pondérées de manière à ce que chaque ville ait la même influence sur la moyenne de sa catégorie de taille, indépendamment de sa population ou du nombre d’enquêtes dont elle a fait l’objet au cours de la période. De même, les moyennes des zones rurales sont créées en calculant la moyenne des zones rurales pour tous les pays couverts. La zone rurale de chaque pays a la même influence sur la moyenne rurale, indépendamment de sa population.
Contrairement aux données EDS et LSMS, les données des Enterprise Surveys ne sont pas géolocalisées. Ces données indiquent si l’entreprise se situe dans une ville comptant entre 50 000 et 250 000 habitants, entre 250 000 et 1 million d’habitants ou plus de 1 million d’habitants, souvent sans identifier précisément cette ville. Comme il n’est pas possible d’apparier les entreprises aux villes individuelles, les moyennes des entreprises ont été calculées en fonction des catégories de taille de ville fournies par les Enterprise Surveys, en utilisant les pondérations d’échantillonnage fournies, sans autre traitement.
Des différences frappantes sont observées entre zones rurales et urbaines en ce qui concerne la répartition de la richesse. Alors qu’en moyenne, seulement 4 % de la population rurale appartient au quintile le plus riche d’un pays, cette part est de 30 % dans les villes de 10 000 à 50 000 habitants et 59 % pour les villes de plus de 1 million d’habitants. À l’inverse, la part des habitants appartenant au quintile le plus pauvre est de 33 % en zones rurales, contre seulement 2 % dans les grandes villes de plus de 1 million d’habitants (Graphique 1.4)3. Ce différentiel de richesse s’exprime aussi par la propriété de biens spécifiques : par exemple, 18 % des habitants des villes de plus de 1 million d’habitants font partie d’un ménage possédant une voiture, contre seulement 3 % dans les zones rurales.
Comme mentionné plus haut, les moyennes interpays ne reflètent pas les hétérogénéités entre pays. Par exemple, 18 % des habitants des grandes villes vivent dans un ménage qui possède une voiture, mais pour de nombreuses villes, ce chiffre n’est pas représentatif. Au Cap (Afrique du Sud), 49 % des ménages possèdent une voiture, contre moins de 3 % pour Kisii (Kenya) (Graphique 1.5).
Les taux d’emploi sont plus faibles dans les villes qu’en zones rurales, mais le sous-emploi est moins répandu
Les salaires plus élevés dans les villes ne se traduisent pas par des taux d'emploi plus élevés. En effet, les taux d’emploi urbains sont légèrement inférieurs à ceux des zones rurales. Pour les habitants des villes âgés de 18 à 49 ans, les taux moyens d’emploi se situent entre 79 % et 82 % pour les hommes et entre 58 % et 61 % pour les femmes. Dans les zones rurales, en revanche, 85 % des hommes et 60 % des femmes ont un emploi ou travaillent à leur compte (Graphique 1.6). Les taux d’emploi sont généralement plus élevés pour les hommes que pour les femmes, mais les différences entre les villes varient considérablement d’un pays à l’autre. Le Graphique 1.7 montre que les villes d’Afrique du Nord en particulier présentent des taux d’emploi très faibles pour les femmes, alors que dans d’autres villes, comme Accra (Ghana), Antananarivo (Madagascar) et Lomé (Togo), le taux d’emploi des femmes est presque aussi élevé que celui des hommes.
Encadré 1.3 Pourquoi les indicateurs ne sont-ils présentés que pour quelques villes ?
La méthode décrite au sein de l’Encadré 1.2 permet d’apparier les observations provenant des bases de données EDS et LSMS aux 2 600 villes d’Afrique. Cependant, dans la plupart des cas, le nombre d’observations n’est pas suffisant pour obtenir des statistiques fiables pour une ville donnée. En effet, les données EDS et LSMS ne sont pas expressément collectées pour faire l’objet d’une analyse désagrégée a un tel niveau géographique. Les deux enquêtes se base sur un échantillonnage par conglomérats, qui ne sélectionne pas les répondants aléatoirement dans toutes les zones. Ainsi, les zones d’échantillonnage (aussi nommées conglomérats ou grappes) sont sélectionnées de manière aléatoire et seulement 20 à 30 ménages vivant au sein d’une zone tirée sont enquêtés. Par conséquent, une ville type comprend des données correspondant à 150 individus (dont de nombreux enfants) provenant de 30 ménages différents dans un quartier étroitement défini de cette ville.
Ainsi, si les données contiennent des informations concernant plusieurs centaines de personnes vivant au d’une ville donnée, elles ne suffisent pas pour créer des moyennes fiables au niveau de la ville car les individus n'ont été échantillonnés que dans certaines zones de la ville. Par conséquent, les données de nombreuses villes ne sont pas représentatives. Dans de nombreux cas, ce sont des quartiers majoritairement pauvres ou riches qui ont été enquêtés. Ce n’est que si le nombre de sites d’échantillonnage est élevé qu'il est probable que les sites soient représentatifs de la ville dans son ensemble. Pour éviter de fournir une image erronée, les données d’une ville ne sont prises en compte que si l’on a enquêté un minimum de 500 personnes issues de 250 ménages différents vivant dans au moins 50 endroits différents de cette ville. Dans ce cas, il est beaucoup moins probable que les résultats dépendent de l'emplacement des zones d'échantillonnage. Des données détaillées au niveau des villes pour toutes les villes seront mises à la disposition des chercheurs et analystes intéressés. Pour y accéder, veuillez contacter africapolis@oecd.org.
Il est important de noter que l’erreur d’échantillonnage pour les villes analysées individuellement est nettement moins préoccupante lorsque les moyennes sont calculées par catégorie de taille de ville. Dans ce cas, l’erreur d’échantillonnage s’annule et les indicateurs obtenus pour chaque catégorie de taille de villes ont une précision beaucoup plus élevée que les indicateurs correspondant aux villes prises individuellement.
Les taux élevés de chômage rural sont compensés par le faible nombre d’heures travaillées
S’il est vrai que le taux d’emploi des villes est légèrement inférieur à celui des zones rurales, cela est largement compensé par la différence du nombre d’heures travaillées. En moyenne, les habitants des campagnes en emploi travaillent 36 heures par semaine contre jusqu’à 49 heures pour les habitants des villes de plus de 1 million d’habitants, soit une différence de 39 %. Le taux d’emploi élevé des zones rurales masque un sous-emploi important : les habitants de ces zones travaillent moins d’heures qu’ils ne le pourraient s’ils avaient le choix ; cela est largement dû au caractère saisonnier du travail agricole. De plus, la part des travailleurs salariés est nettement plus élevée dans les grandes villes.
Encadré 1.4 L’impact économique de la COVID-19 sur les villes africaines
La pandémie de COVID-19 a fait de nombreuses victimes en Afrique. Outre son impact sur la santé publique, qui n’a pas encore été clairement mesuré, la pandémie a eu des conséquences économiques majeures. Les personnes s’activant dans le secteur informel ont perdu en moyenne 7.7 % de leur revenu en raison des confinements, le plus souvent sans bénéficier d'aucun programme de protection sociale (OIT, 2021[8]). En Afrique, le nombre d’individus menacés par l’insécurité alimentaire a également augmenté de 60 %, pour atteindre plus de 100 millions (Banque Mondiale, 2021[9]).
La crise économique a eu des conséquences dramatiques sur les finances publiques. Selon les prévisions, la pandémie réduira les recettes publiques de l'Afrique de 5 %, et les gouvernements locaux pourraient perdre jusqu’à 60 % de leur revenu en 2021 (ONU-Habitat, CEA, FENU and CGLU Afrique, 2020[10]). Cette baisse est particulièrement inquiétante si l’on considère la capacité fiscale des gouvernements locaux déjà faible avant le début de la pandémie (voir Chapitres 4 et 5).
Ce rapport a été rédigé pendant la pandémie, à un moment où l’on ne saisissait pas encore pleinement les conséquences de celle-ci. S’il est possible que son impact économique soit transitoire, on ne peut exclure des effets à long terme sur les économies urbaines, dus soit à une crise économique durable, soit à une modification des modes d’urbanisation. Ce rapport se base sur des données allant jusqu’à 2019. Les statistiques qui y sont discutées ne rendent donc pas compte de l’impact de la pandémie.
La proportion des travailleurs ayant des emplois qualifiés est plus élevée en ville
Dans le monde entier, les zones urbaines ont des économies plus complexes que les zones rurales. Les villes des économies émergentes sont souvent des centres d’activité industrielle alors que celles des économies avancées tendent à dépendre des services. À l’inverse, les zones rurales sont beaucoup plus largement dépendantes de l’agriculture et des industries extractives et la part des emplois qualifiés et du secteur des services y est plus faible. Toutefois, particulièrement dans les pays à revenu élevé, l’agriculture tend à n’employer qu’une faible proportion des individus, même dans les zones rurales. Dans un pays moyen de l’OCDE, seuls 7 % des travailleurs des zones rurales sont en emploi dans l’agriculture (OCDE, 2021).
En Afrique, l’agriculture représente l’occupation dominante au sein des zones rurales, représentant près de 60 % de l’ensemble des travailleurs. Les pays urbanisés ont généralement des taux d’emploi agricole plus faibles. Cependant, la vente, les postes manuels qualifiés, les services, les activités professionnelles et techniques et les postes de cadres dominent dans les villes, quelle que soit leur taille. Au total, ces activités représentent presque la moitié des emplois dans les zones urbaines (Graphique 1.9). Même dans les petites villes, de moins de 50 000 habitants, seule 16 % de la main-d’œuvre s’active dans l’agriculture. Bien entendu, ce chiffre ne prend pas en compte l’importance indirecte de l’agriculture avec une part considérable de la main-d’œuvre de ces villes qui s’active dans des secteurs qui dépendent de l’agriculture, comme le commerce ou la transformation de produits agricoles.
Les catégories professionnelles fournies par EDS peuvent être classées en emplois qualifiés et non qualifiés. Il s’agit là d’une classification approximative, certes, étant donné le manque de détails dans les catégories professionnelles disponibles, mais elle révèle une tendance claire : la proportion des emplois qualifiés est nettement moins importante dans les zones rurales. Chez les hommes, moins de 20 % des travailleurs des zones rurales occupent un emploi qualifié, contre 50 % environ dans les villes moyennes et grandes. La part des femmes occupant un emploi qualifié est généralement plus faible, mais la tendance est la même : 11 % des femmes ont des emplois qualifiés dans les zones rurales alors que cette part est comprise entre 20 % et 25 % dans les villes, selon leur taille. Pour les deux sexes, la proportion des personnes qualifiées dans les grandes villes est d’environ 2.5 fois celle des zones rurales.
Le Graphique 1.11 montre le rapport entre la part des emplois qualifiés et le lieu d’habitation (urbain/rural) par pays. Si les estimations au niveau des pays sont davantage sujettes au bruit d’échantillonnage et donc moins précises que les chiffres agrégés, les tendances décrites se vérifient dans la plupart des pays.
Le niveau d’éducation est plus élevé dans les villes qu’en zones rurales
La part élevée d’emplois qualifiés dans les villes s’explique, en partie, par les niveaux d’éducation plus élevés. Alors qu’en moyenne 42 % de la population des zones rurales des pays étudiés n’a bénéficié d’aucune éducation, cette part n’est que de 13 % dans les grandes villes. De même, le nombre moyen d’années de scolarité varie entre 4 ans pour les femmes des zones rurales et près de 10 ans pour les hommes des grandes villes. La différence entre hommes et femmes est un peu moins importante dans les villes d’une certaine taille : l’urbanisation est donc favorable à l’éducation des femmes. Il est important de préciser que ces chiffres concernent l’ensemble de la population de 18 ans et plus et non les diplômés actuels. Comme indiqué ci-dessous, les niveaux d’éducation sont en hausse en Afrique, dans les zones urbaines et rurales. Le niveau d’éducation moyen de l’ensemble de la population est donc plus faible que celui des jeunes adultes.
Partout dans le monde, les villes attirent les personnes éduquées. Ainsi, la différence de niveau d’éducation entre villes et campagnes pourrait s’expliquer par le fait que les personnes les plus éduquées tendent à s’installer en ville. Cependant, les données ne confirment pas cette hypothèse. Bien que les individus migrants des campagnes vers les villes âgés de 18 à 29 ans qui sont arrivés en ville à 18 ans ou plus bénéficient en moyenne de 3 à 3.5 ans de scolarité de plus que leurs homologues ruraux du même âge restés à la campagne, ils demeurent moins éduqués que les personnes de 18 à 29 ans qui ont grandi en ville. Pour toutes les catégories de taille de ville, le niveau d’éducation des habitants nés dans une ville et n’ayant jamais déménagé est supérieur à celui des ruraux qui y sont arrivés à 18 ans ou plus. L’écart important entre les niveaux d’éducation des villes et celui des zones rurales n’est donc pas principalement expliqué par une migration sélective, mais plutôt par un accès facilité à l’éducation dans les villes et à la plus grande importance de l’éducation dans les économies urbaines.
L’impulsion donnée à l’éducation par l’urbanisation est sans doute l’un des principaux avantages de l’urbanisation. L’éducation a des effets positifs considérables sur l’accès à l’emploi, sur la santé et sur d’autres aspects du bien-être tout au long de la vie (OCDE, 2021[11]); ses bienfaits économiques et sociaux persisteront pendant des décennies. En conséquence, cela implique également qu'une grande partie des avantages économiques de l’amélioration actuelle des niveaux d’éducation des enfants dans les villes africaines ne se matérialiseront que dans les années à venir.
Malgré les avantages qu’offrent les villes en matière d’accès à l’éducation, il est important de souligner que certaines villes font mieux que d'autres. Le Graphique 1.13 montre qu’il existe de fortes disparités de niveau d’éducation entre les villes de tailles différentes. Certaines villes réussissent beaucoup mieux que d’autres à proposer une éducation secondaire à leurs habitants, et ont un taux d’éducation secondaire excédant facilement les 50 %, alors que celui-ci reste inférieur à 20 % dans d’autres villes. Ces hétérogénéités en termes de résultats se retrouvent dans de nombreux autres domaines et nous rappellent que les politiques publiques sont importantes et que les avantages de l'urbanisation ne se matérialisent pas automatiquement.
Les entreprises des villes sont plus innovantes
Les entreprises des grandes villes sont plus susceptibles d'être engagées dans des activités innovantes, telles que la création de nouveaux produits ou améliorations (Graphique 1.14). Dans les villes petites à moyennes, de moins de 250 000 habitants, environ 8 % des entreprises apportent de nouvelles améliorations à leurs produits alors que cette part est deux fois plus élevée dans les villes de plus de 1 million d’habitants. Comme l’innovation est un moteur essentiel de la hausse de productivité, les activités plus innovantes des grandes villes contribuent à leur meilleure productivité.
Si les données internationales suggèrent que les entreprises innovantes exportent davantage (Bustos, 2011[12]) et que les grandes villes dépendent largement des exportations (Marin et al., 2020[13]), cette tendance ne se reflète pas dans les données pour les villes africaines (Graphique 1.14). Cela est peut-être dû à l’importance disproportionnée de l’exportation des matières premières dans l’ensemble des exportations africaines. Les producteurs de matières premières sont généralement situés dans les zones rurales ou les petites villes, ce qui contrebalance l’effet positif sur les exportations exercées par les activités innovantes des grandes villes.
En outre, par rapport aux entreprises des villes de moins de 250 000 habitants, les entreprises des villes de 250 000 à 1 million d’habitants comptent une proportion d’employés ayant bénéficié d’une éducation secondaire supérieure de 7 points de pourcentage; contre 11 points de pourcentage de plus pour les entreprises des villes de plus de 1 million d’habitants. Cela correspond au résultat précédemment mentionné, selon lequel la part des emplois qualifiés est plus élevée dans les grandes villes que dans les petites.
Le déploiement des infrastructures est plus efficace en ville
Les villes du monde entier disposent de meilleures infrastructures que les zones rurales, car les infrastructures peuvent être fournies plus efficacement aux résidents urbains qu'aux résidents ruraux. La densité de population étant plus élevée en ville, davantage de personnes peuvent bénéficier d’un investissement donné en infrastructures. La fourniture d’infrastructures aux habitants des villes coûte donc moins cher, y compris le coût par habitant d’infrastructures essentielles telles que les transports et les télécommunications. La forte densité des villes, en habitants comme en entreprises, leur permet de proposer des infrastructures qui ne seraient pas viables en zones rurales, comme les réseaux de métro, les aéroports et diverses infrastructures industrielles spécialisées, par exemple les câbles pour données à haut débit. Or la productivité des travailleurs et des entreprises augmente lorsqu’ils bénéficient de ces infrastructures.
En Afrique, une forte différence est observée entre le niveau des infrastructures urbaines et rurales, comme le montre, par exemple, la part des ménages qui ont accès à l’électricité, à l’eau courante et aux réseaux de télécommunication. Les différences les plus prononcées concernent l’électricité : moins de 20 % des ménages ruraux ont accès à l’électricité, contre 58 % pour les villes de moins de 50 000 habitants et 80 % pour les villes de plus de 1 million d’habitants. L’accès à l’eau courante sur parcelle varie entre 7 % en zones rurales, 25 % dans les petites villes et 33 % dans les grandes villes4. À l’inverse, la couverture et la possession de téléphones portables sont très répandues : 63 % des ménages possèdent un téléphone portable en zone rurale, contre 85 % dans les petites villes et 94 % dans les grandes villes.
Par ailleurs, l’écart entre zones rurales et villes (de toutes tailles) est nettement supérieur à l’écart entre petites et grandes villes. Les différences entre zones rurales et petites villes, en ce qui concerne la part des ménages ayant accès à l’électricité, à l’eau et aux téléphones portables, respectivement, sont deux fois plus élevées que celles entre petites et grandes villes. Cette tendance se vérifie pour de nombreux autres résultats analysés au sein de ce chapitre.
Il est important de noter que le Graphique 1.15 montre des différences générales entre les zones rurales et les villes de différentes tailles, mais qu’il n’est pas représentatif des pays individuels. Une ventilation de l’accès à l’électricité par catégorie de taille de ville et par pays (Graphique 1.16) indique que la majorité des ménages des moyennes et grandes villes ont accès à l’électricité. En revanche, les taux d’électrification des petites villes varient largement d’un pays à l’autre et les taux d’électrification des zones rurales sont inférieurs à 50 % dans la plupart des pays.
L’accès à l’eau courante sur parcelle varie largement en fonction du pays. Le Graphique 1.17 montre la proportion de la population qui a accès à l’eau et à l’électricité dans un certain nombre de villes. Alors que l’accès à l’électricité est largement répandu dans la plupart des grandes villes, l’accès à l’eau courante sur parcelle varie largement d’une ville à l’autre. Si plus de 80 % des habitants d’Addis Abeba (Éthiopie) ont accès à l’eau courante sur parcelle, cette part est à peine supérieure à 10 % à Accra (Ghana). Des différences similaires sont observées entre les villes de toutes les tailles.
Les piliers de l’économie formelle sont plus développés dans les villes
Les données disponibles ne permettent pas de mesurer l’ampleur relative de l’économie formelle et de l’économie informelle dans les zones rurales et urbaines. Toutefois, les villes ont tendance à remplir davantage les conditions nécessaires à leur transition vers l’économie formelle. La proportion des personnes qui disposent d’un compte en banque est deux à trois fois supérieure dans les villes de différentes tailles par rapport zones rurales. De même, près de la moitié des habitants des zones urbaines sont propriétaires de leur maison, contre moins de 20 % en zones rurales. En outre, les habitants des villes ont plus de chances de détenir un acte de naissance ou d’être enregistrés auprès des autorités, même si l’écart est moins important ici. Si aucun de ces facteurs ne suffit à lui seul à permettre le passage à l’économie formelle, l’absence de l’un d’entre eux peut cependant entraver cette transition.
Les services bancaires en ligne ont rendu accessible les comptes en banque à une large catégorie de personnes qui n’avaient précédemment pas accès aux institutions financières. Le Graphique 1.18 présente une moyenne pour les années 2010-19, mais la part des ménages disposant d’un compte en banque est probablement sous-estimée par rapport à la réalité actuelle. Comme le montre le Graphique 1.19, en 2016 et 2018, plus de 80 % des habitants des grandes villes africaines comme Lagos (Nigéria), Kampala (Ouganda) et Addis Abeba (Éthiopie) faisaient partie d’un ménage doté d’un compte en banque. Cependant, il existe encore de grandes villes comme Conakry (Guinée), où moins d'un tiers des résidents vivent dans un ménage qui possède un compte bancaire.
Les rapports de dépendance et taux de fécondité sont plus bas dans les villes
L’Afrique a de loin le rapport de dépendance le plus élevé de toutes les régions du monde. En 2015, en moyenne, 100 personnes en âge de travailler (entre 15 et 64 ans) avaient à leur charge 80 personnes trop jeunes ou trop âgées pour travailler. Dans d’autres régions du globe ce rapport varie entre 47 et 55 personnes inactives en raison de leur âge pour 100 personnes en âge de travailler (ONU DAES, 2019[16]). Ce rapport de dépendance élevé est principalement expliqué par un taux de natalité élevé en l’Afrique : les enfants y représentent plus de 90 % de la population dépendante alors que dans d’autres parties du monde, plus de la moitié de la population dépendante est constituée de personnes âgées.
Des rapports de dépendance bas augmentent le PIB par habitant et améliorent le niveau de vie car la production produite par la population active doit être partagée entre une population inactive moins nombreuse. Si l’on fait l’hypothèse d’un taux d’emploi constant et d’une productivité du travail constante, une baisse du rapport de dépendance – de 80 à la moyenne mondiale d’environ 50 – permettrait d’augmenter le PIB par habitant de 20 %. Les rapports de dépendance pourraient encore diminuer, car les rapports de dépendance des jeunes élevés portent en eux les germes d'un dividende démographique. Si les taux de fécondité baissent pour atteindre le seuil de renouvellement (environ 2,1 naissances par femme), un pays peut passer rapidement d’un rapport de dépendance relativement élevé à un rapport de dépendance relativement faible car la baisse du taux de fécondité fait rapidement baisser le rapport de dépendance des jeunes, alors qu’il faut des décennies pour qu'elle se traduise par des rapports de dépendance des personnes âgées plus élevés.
Dans les 32 pays pour lesquels les données sont disponibles, la moyenne des taux de fécondité des grandes villes était de 3.7 naissances par femme entre 2010 et 2019, contre 5.9 naissances en zones rurales (Graphique 1.20, panneau de gauche). Pour l’ensemble de l’Afrique, le taux de fécondité est passé de 6.2 en 1990 à 4.4 en 2020 (ONU DAES, 2019[16]). Cette tendance à la baisse a été relativement uniforme pour les zones rurales et pour les villes, quelle que soit leur taille, l’écart entre zones rurales et villes restant relativement constant sur la durée. Si le taux de fécondité est le facteur qui influence le plus le rapport de dépendance, ce dernier est également affecté par l’exode rural. L’écart important entre le rapport de dépendance (Graphique 1.20, graphique de gauche) des zones rurales et celui des petites villes (de 10 000 à 50 000 habitants), qui ne se reflète pas dans les taux de fécondité (Graphique 1.20, graphique de droite), pourrait indiquer que les migrants ruraux n’emmènent pas leurs enfants avec eux lorsqu’ils partent pour de petites villes (peut-être parce qu’elles sont situées à proximité de leurs foyers ruraux). Une analyse plus approfondie serait nécessaire afin de confirmer cette hypothèse.
Les villes petites et moyennes enregistrent de bonnes performances
Un des résultats récurrents les plus notables des données décrites est la bonne performance des villes moyennes et petites. Dans presque tous les domaines mesurables, même les petites villes présentent des résultats nettement meilleurs que ceux des zones rurales. Les petites villes tendent, certes, à moins bien réussir que les grandes villes, mais l’écart entre petites et grandes villes est généralement beaucoup moins important que celui entre petites villes et zones rurales.
Ces résultats montrent que, dans bien des cas, une activité économique, un service public ou une infrastructure nécessite une taille ou une densité de population minimum. Une fois le seuil requis atteint, toute population supplémentaire ne facilite que faiblement l’activité économique, la fourniture de services publics ou d’infrastructures. Par exemple, une ville de 10 000 habitants disposera de suffisamment d’élèves pour qu’une école secondaire y fonctionne de manière efficace. Dans des villes plus grandes, il sera possible d’ouvrir davantage d’écoles secondaires, ou des écoles secondaires plus spécialisées, mais il s’agit là de gains relativement mineurs par rapport aux avantages obtenus lorsque l’on atteint la taille requise pour ouvrir une école secondaire. De nombreux autres résultats peuvent être soumis à des effets de seuil semblables, par exemple la viabilité d’un marché spécialisé ou de l’ouverture d’une succursale bancaire.
Toutefois, tous les avantages de l’urbanisation ne sont pas sujets à des seuils. Certains de ces avantages continuent de s’accumuler à mesure que la taille des villes et leur densité de population augmentent. Les grandes villes ont, par exemple, des économies plus complexes parce qu’on peut y pratiquer des activités plus spécialisées. Or cette complexité augmente avec la taille des villes, sans être sujette à des seuils évidents.
Les moyennes masquent de fortes hétérogénéités entre villes et au sein des villes
Ce chapitre présente principalement des moyennes par catégorie de taille de ville afin de mettre en avant des constantes que l’on peut retrouver à travers l’Afrique. Bien que ces moyennes soient significatives et importantes, elles ne présentent qu’une image partielle de la situation et ne reflètent pas les variations considérables qui existent entre villes et au sein de ces dernières. Comme expliqué précédemment, il y existe de fortes disparités entre les villes avec de nombreuses villes qui obtiennent de bons résultats dans certains domaines, mais pas dans d’autres. Au sein des villes, les différences entre habitants riches et pauvres sont plus importantes que les différences moyennes entre villes. En raison du manque de données correspondantes, ce rapport n’analyse pas le fossé entre le secteur formel et le secteur informel. Les statistiques présentées ici regroupent généralement les deux secteurs, quand bien même les conditions économiques et sociales sont nettement plus favorables dans le secteur formel. De même, le lieu d’habitation au sein d’une ville impact considérablement le niveau de vie. Les habitants des bidonvilles ont souvent un accès bien plus limité aux services et aux infrastructures que les personnes vivant dans des logements conventionnels. Là encore, ces différences n’ont pas fait l’objet d’analyses en raison du manque de données transnationales qui permettent une analyse quantitative rigoureuse.
Estimation des gains de PIB dus à l’urbanisation
La plupart des villes sont porteuses d’« économies d’agglomération » considérables (OCDE, 2015[17]). Ce terme englobe une série de facteurs qui, lorsque des activités économiques ont lieu à proximité les unes des autres, y améliorent la productivité, les salaires et l’innovation (Encadré 1.5). Les villes, notamment les grandes villes, sont les principales bénéficiaires des économies d’agglomération en raison de la forte densité de leurs activités économiques.
Les niveaux de productivité des villes africaines sont plus élevés que ceux des zones rurales ; ceux des villes relativement grandes sont supérieurs à ceux des villes relativement petites. Cela se répercute sur le niveau des salaires (Graphique 1.2) et du PIB. Si cette constatation tend à suggérer que l’urbanisation contribue à de meilleurs résultats économiques, il ne s’agit pas d’une preuve irréfutable. Une autre explication possible est que les villes, plus particulièrement les grandes villes, attirent les industries ou les travailleurs les plus productifs et les industries les plus avancées, un processus que les économistes appellent « biais de sélection » (en anglais sorting). Si ce « biais de sélection » était la seule explication de la bonne performance des villes, l’urbanisation ne profiterait pas aux économies nationales puisque les industries et les travailleurs productifs implantés dans les villes seraient tout aussi productifs s’ils restaient à la campagne. Selon cette explication, l’urbanisation n’influencerait que la localisation des entreprises et travailleurs productifs, sans améliorer le niveau de productivité globale d’une économie nationale.
Ce « triage » des travailleurs et des entreprises est commun dans la plupart des pays, y compris en Afrique. Comme indiqué plus haut, les migrants des campagnes vers les villes bénéficient en moyenne d’entre 3 et 3.5 années de scolarité de plus que les habitants des zones rurales d’un âge similaire qui ne migrent pas en ville. En moyenne, une augmentation de 10 % de la taille d’une ville correspond est associée à une hausse de 0.3 points de pourcentage de la part de travailleurs occupant un emploi qualifié. Le Graphique 1.21 montre le rapport entre la taille des villes et la part des emplois qualifiés selon les pays. Le graphique montre, pour chaque pays, la hausse estimée de la proportion des emplois qualifiés qu’entraîne une hausse de 10 % de la taille d’une ville, ainsi que l’intervalle de confiance de 95 % applicable à cette estimation. Pour la plupart des pays, le coefficient estimatif se situe entre 0.1 et 0.6 : cela signifie que la proportion des travailleurs qualifiés augmente en moyenne de 0.1 à 0.6 points de pourcentage lorsque la taille d’une ville augmente de 10 %.
Les niveaux élevés de productivité dans les villes ne sont pas uniquement dû au « triage ». Même en tenant compte du niveau d’éducation des travailleurs, des caractéristiques personnelles telles que le sexe et l’âge, ainsi que des particularités des industries au sein desquelles ils travaillent, les travailleurs des grandes villes sont plus productifs que ceux des petites villes, qui, à leur tour, sont plus productifs que ceux des zones rurales (Tableau d’annexe 1.A.7 et Tableau d’annexe 1.A.8). Ainsi, les données suggèrent que les villes africaines, toute comme les villes du reste du monde, sont sources d’économies d’agglomération.
Encadré 1.5. Qu’entend-on par « économies d’agglomérations » ?
Le terme « économies d’agglomération » décrit une série de facteurs qui, grâce à la proximité des activités économiques, améliorent la productivité, les salaires et l’innovation. Ce sont les villes, surtout les grandes villes, qui bénéficient le plus des économies d’agglomération en raison de la forte densité des activités économiques qu’elles hébergent. Selon la plupart des études empiriques, une hausse de 10 % de la taille ou de la densité de population entraîne une hausse de productivité de 0.2 % à 0.5 %, les estimations les plus fiables optant souvent pour un chiffre proche de 0.2 % (Combes et Gobillon, 2015[18]). Dans une méta-analyse de 70 études provenant de pays en développement, Grover, Timmis et Lall (2021[19]) concluent que l’ampleur des économies d’agglomération dans les pays à revenu faible et intermédiaire est à peu près similaire et même légèrement supérieure à celle des pays à revenu élevé.
Les leviers des économies d’agglomération ont déjà été discutés par Marshall (1890[20]) qui mettait en lumière trois facteurs que l’on continue de considérer comme déterminants : « partager », « apparier » et « apprendre » (Puga, 2010[21]). Au-delà, d'autres explications ont été proposées et la question fait encore l'objet de recherches actives.
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Plus une ville est grande, plus le nombre d'utilisateurs potentiels d'un service ou d'une infrastructure est élevé. C’est ce qui permet aux grandes villes de proposer des infrastructures et des services publics ou privés qui ne seraient pas viables dans des villes plus petites. Les entreprises qui y ont accès peuvent fonctionner de manière plus productive que les entreprises qui n’y ont pas accès. Par exemple, dans une grande ville, un parc industriel privé destiné à l’industrie chimique peut être viable. Entre autres services, le parc pourrait offrir un système de pipelines pour fournir divers gaz industriels couramment utilisés aux entreprises clientes qui s'installent dans le parc. Une entreprise chimique située dans le parc pourrait ainsi fonctionner de manière plus productive qu'une entreprise chimique similaire dans une petite ville ou une zone rurale qui n'aurait pas accès à un système similaire et devrait transporter ces gaz par camion.
Les entreprises peuvent donc partager l’accès à des services et à des infrastructures, mais elles peuvent aussi partager un réseau de fournisseurs, leur permettant d’accéder à des intrants spécialisés et ainsi améliorer leur productivité.
Apparier
Dans les grandes villes, les travailleurs ont accès à un grand nombre d’emplois potentiels et les employeurs peuvent choisir parmi un grand nombre de candidats potentiels. Cela signifie qu’un travailleur a plus de chances d’obtenir un poste qui utilise au mieux ses capacités et qu’une entreprise trouvera un candidat dont les compétences correspondent exactement à ce qu’elle recherche. Prenons l’exemple d’un employé du bâtiment ayant bénéficié d’une formation lui apprenant une technique de soudage avancée, rarement utilisée. À la campagne ou dans une petite ville, ce travailleur n’aura que peu de chances de trouver un poste faisant régulièrement appel à cette technique. Il travaillera probablement pour une petite entreprise et n’utilisera que rarement sa spécialisation. Dans une grande ville, en revanche, il y a plus de chances que le travailleur trouve un emploi spécialisé dans la technique de soudage, par exemple dans une grande entreprise de construction. Dans ce cas, le travailleur pourra utiliser ses compétences spécialisées plus fréquemment et travaillera de manière plus productive que dans les zones rurales.
Apprendre
Les entreprises et les travailleurs deviennent plus productifs lorsqu’ils imitent les approches de concurrents et collègues performants. Comme il y a davantage d’entreprises et de travailleurs en ville que dans les zones rurales, il est plus facile de tirer profit des expériences des autres. Dans une grande ville, par exemple, c’est en parlant avec des collègues d’une autre entreprise, en travaillant pour plusieurs entreprises pendant sa carrière ou encore en observant des entreprises concurrentes au travail, qu’un travailleur peut découvrir différentes approches légèrement différentes pour aborder une même tâche. Certaines de ces approches seront plus efficaces que d’autres et le travailleur est susceptible d'apprendre de celles qui fonctionnent le mieux, améliorant ainsi sa productivité. Dans les petites villes et les zones rurales, où il y a moins de postes semblables, ce potentiel d’apprentissage est limité.
Au-delà de ces sources d’externalités évoquées par Marshall (1890[20]), une autre source importante a été mise en évidence par Jacobs (1969[22]). Les villes sont sources d’innovation parce qu’un grand nombre de personnes issues de différentes professions s’y rencontrent. Ces interactions produisent de nouvelles idées fondées sur des connaissances existantes. Or, comme de nombreuses innovations ont tendance à se répandre d'abord localement, elles bénéficient en particulier aux villes au sein desquelles elles ont été inventées.
En Afrique, l’urbanisation est responsable de près d’un tiers de la croissance du produit intérieur brut (PIB) par habitant
Si l’on connaît l’ampleur des économies d’agglomération, il est possible d’estimer l’effet de l’urbanisation sur le PIB. La principale mesure des économies d’agglomération est ce que l’on appelle l’élasticité de la productivité en fonction de la taille de la ville. Ce terme indique combien la productivité augmente lorsque la taille de la ville augmente. Pour évaluer l’effet de l’urbanisation de l’Afrique sur son PIB, l’élasticité moyenne a été calculée, en fonction de leur taille, des villes de cinq pays africains, l’Éthiopie, le Malawi, le Nigéria, la Tanzanie et l’Ouganda (voir Encadré 1.6). En moyenne, il est estimé que la productivité du travail5 augmente de 0.3 % lorsque la population urbaine augmente de 10 % (voir la spécification 2 du Tableau d’annexe 1.A.7). Ces chiffres peuvent être appliqués à la croissance observée des zones urbaines et rurales pour obtenir une première approximation de son impact sur le PIB.
Pour l’ensemble de l’Afrique, le processus d’urbanisation actuel apporte une contribution annuelle de 0.33 points de pourcentage à la croissance du PIB par habitant, même sans tenir compte des avantages additionnels, à long terme et secondaires, de l’urbanisation (par exemple, en raison de l'amélioration de l'éducation des enfants dans les villes). Cela représente 29 % de la croissance annuelle moyenne totale du PIB par habitant en Afrique de 2001 à 2020. Ainsi, même si l’on ne tient pas compte des effets secondaires liés aux niveaux d’éducation plus élevés des habitants des campagnes, l’urbanisation contribue significativement à la croissance du PIB par habitant en Afrique.
L’effet de l’urbanisation sur le PIB peut être divisé en deux composantes. Premièrement, l’urbanisation fait augmenter la part de la population qui vit dans les zones urbaines plus productives au lieu des zones rurales moins productives. Cette modification de la répartition de la population entraîne une hausse des niveaux nationaux du PIB et donc du PIB moyen par habitant. Deuxièmement, les villes deviennent plus productives du fait de l’arrivée de travailleurs supplémentaires parce que les niveaux de productivité des grandes villes sont supérieurs à ceux des petites. D’un point de vue quantitatif, la première composante représente les deux tiers environ de la croissance prévue du PIB par habitant, contre un tiers pour la seconde composante. La part croissante d’individus vivant dans des villes plus productives augmente le PIB par habitant de 0.22 points de pourcentage, alors que la productivité accrue des villes due à leur taille contribue à hauteur de 0.11 points de pourcentage6.
Plusieurs limites sont à noter. Sur le plan économétrique, l’ampleur estimée des économies d’agglomération est sujette à un niveau d’incertitude élevé en raison des problèmes conceptuels abordés au sein de l’Encadré 1.6 et du bruit statistique. L’élasticité de la productivité en fonction de la taille de la ville – de 0.03 – appliquée à notre estimation rapide est relativement faible par rapport à des estimations comparables pour des pays développés (voir Grover, Timmis et Lall (2021[19]). À titre de comparaison, si l’élasticité de la productivité en fonction de la taille de ville était deux fois plus élevée – une estimation qui se placerait dans la tranche supérieure de celles de Grover, Timmis et Lall (2021[19]) –, la contribution de l’urbanisation à la croissance annuelle du PIB par habitant serait de 0.56 points de pourcentage, soit 50 % du total de la croissance moyenne annuelle du PIB par habitant entre 2001 et 2020.
D’un point de vue conceptuel, il n’est pas possible de saisir toutes les conséquences de l’urbanisation. Les estimations ne fournissent que l’effet des gains de productivité dus aux économies d’agglomération sur le PIB. Elles ne tiennent pas compte des autres conséquences de l’urbanisation, par exemple le fait qu’elle entraîne des modifications structurelles de l’économie ou qu’elle modifie les caractéristiques de la main-d’œuvre (parce que les enfants des zones urbaines bénéficient d’une plus longue scolarité que ceux des zones rurales par exemple). De plus, les estimations ne portent que sur la productivité et ne tiennent pas compte des externalités négatives dues à la croissance urbaine, comme les embouteillages ou l’exposition croissante à la pollution. Ces estimations ne saisissent donc pas le plein impact de l’urbanisation, surtout à plus long terme.
Considérées ensemble, ces réserves impliquent que les estimations ci-dessus ne représentent, au mieux, qu’une fourchette approximative des gains économiques à moyen terme de l’urbanisation. Elles ne doivent pas être considérées comme des prédictions exactes, ni comme reflétant l’ensemble des impacts économiques et sociaux de l’urbanisation. Il semble cependant probable que ces chiffres sous-estiment les bienfaits à long terme de l’urbanisation, en particulier si l’on considère les niveaux nettement plus élevés d’éducation dont les habitants des villes bénéficient par rapport à ceux des campagnes : les bienfaits de l’éducation affecteront les économies africaines pendant de nombreuses décennies, même si leur impact est difficile à saisir.
Encadré 1.6. Estimation des économies d’agglomération en Afrique
Plusieurs méthodes ont été développées pour estimer les économies d’agglomération (voir Combes, Duranton et Gobillon (2010[23]) pour un aperçu). Toutes requièrent un nombre important de données détaillées concernant les entreprises et/ou les travailleurs. La méthode la plus courante, basée sur les travaux de Combes, Duranton et Gobillon (2008[24]), utilise les données individuelles des travailleurs – provenant par exemple d’enquêtes sur la population active – pour estimer la relation entre la productivité et la taille des villes. Dans un premier temps, les effets fixes de la productivité par ville sont estimés en contrôlant par un ensemble de facteurs, y compris les caractéristiques des travailleurs (par exemple âge, sexe et éducation) ainsi que leurs effets fixes, leur occupation et leur secteur. Dans un second temps, les effets fixes prédits des villes sont régressés sur la taille ou la densité de la population, en utilisant éventuellement une stratégie de variable instrumentale pour obtenir une variation exogène de ces facteurs.
La seule base de données au niveau individuel entre pays contenant les informations requises pour l’Afrique est la base de données LSMS, décrite dans l’Encadré 1.1. Par rapport aux sources de données généralement utilisées pour évaluer les économies d’agglomération, comme les enquêtes sur la population active, les données LSMS présentent plusieurs limites, notamment le faible nombre d’observations, le manque d’informations détaillées concernant les occupations et industries et les mesures de variables clés, comme les salaires, sont peu précises. En dépit de ces limites, ces données permettent d’évaluer les économies d’agglomération selon Combes, Duranton et Gobillon (2008[24]) si elles sont associées aux zones urbaines, selon la méthode décrite dans l’Encadré 1.2.
Plusieurs simplifications sont effectuées par rapport à Combes, Duranton et Gobillon (2008[24]) pour faire face au manque de données disponibles. Premièrement, les informations sur les travailleurs sont limitées aux informations disponibles dans la base de données LSMS, et il n’est pas possible d’inclure les effets fixes des travailleurs dans l’estimation. Le nombre d'individus dans les données qui se déplacent d'un endroit à l'autre est trop faible pour identifier des effets fixes de ville. Deuxièmement, une spécification en une étape est utilisée plutôt qu’une approche en deux étapes parce qu’elle donne des résultats plus stables étant donné le faible nombre d’observations. Finalement, en raison du manque de données sur les villes africaines, les variables de contrôle de zone sont limitées à quelques indicateurs géographiques.
En raison de ces limitations, deux spécifications principales sont estimées. Le Tableau d’annexe 1.A.8 présente les coefficients d’estimation correspondant aux écarts de productivité par catégorie de taille de ville pour toutes les observations, les observations rurales servant de référence. Le Tableau d’annexe 1.A.8 présente les estimations des élasticités selon la taille des villes en utilisant uniquement les observations urbaines. Toutes les observations sont pondérées de sorte que chaque ville ait le même poids dans les estimations.
Encadré 1.7. Hypothèses formulées pour évaluer l’effet de l’urbanisation sur le PIB
Estimer l’effet de l’urbanisation sur le PIB sur la base de l’élasticité de la productivité en fonction de la taille de la ville requiert un certain nombre d’hypothèses, formulées ci-après :
La population de chaque ville augmente selon le taux de croissance annuel de la population observé entre 2000 et 2010. Si une ville n’existait pas en 2000, on suppose que sa population augmente au taux de croissance moyen des villes, soit 3.5 %. La population rurale de chaque pays est supposée croître au taux de croissance annuel moyen de la population rurale du pays concerné en 2000 et 20101.
Toute croissance de la population urbaine a lieu au sein des villes existantes. Aucune nouvelle ville n’émerge et les villes ne fusionnent pas entre elles.
Les villes de 10 000 habitants ont des niveaux de productivité supérieurs de 18 % à ceux des zones rurales. Il s’agit d’une estimation prudente, basée sur les estimations du Tableau d’annexe 1.A.8, qui indiquent que le niveau de productivité des villes de 10 000 à 50 000 habitants est supérieur de 21 % lorsque l’on contrôle les caractéristiques individuelles et celles des entreprises.
À partir d’une population de 10 000 habitants, l’élasticité de la productivité en fonction de la taille de la ville est de 0.03, selon les estimations de la spécification 2 du Tableau d’annexe 1.A.7. Autrement dit, si la population d’une ville augmente de 10 %, sa productivité augmente de 0.3 %. La productivité rurale reste constante.
Les variations de la productivité du travail se traduisent par des variations du PIB par habitant2.
Sur la base de ces hypothèses, il est possible d’estimer les niveaux du PIB par habitant des villes de toutes tailles par rapport à celui des zones rurales. Une fois ces niveaux établis, il est facile d’obtenir les niveaux totaux du PIB avec ou sans hausse de la population et d’estimer la croissance moyenne du PIB par habitant causée par la croissance démographique urbaine et rurale précédemment mentionnée. Ces estimations ne dépendent pas du niveau initial du PIB. Le taux de croissance prédit sera toujours le même.
1. Les moyennes de 2000 à 2010 sont utilisées car elles sont plus fiables que les données des périodes ultérieures. En l'absence de recensements, les données démographiques récentes sont souvent basées sur des projections et tendent à sous-estimer l'urbanisation.
2. Cette hypothèse implique que la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF) due aux économies d'agglomération est identique à celle de la productivité du travail et que le taux d'emploi et le stock de capital ne sont pas affectés par l'urbanisation.
Les villes ont conservé leur avantage relatif, en dépit du fait que leur taille a triplé depuis 1990
L’une des réussites les plus méconnues des villes africaines au cours de ces 30 dernières années est leur performance constamment meilleure que celle des zones rurales, et cela en dépit du fait qu’elles ont absorbé un grand nombre de migrants ruraux. En 1990, l’Afrique comptait 3 300 villes d’une moyenne de 57 000 habitants. En 2015, ces villes comptaient plus de 140 000 habitants en moyenne ; en 2020, elles atteindront probablement une moyenne de 170 000 habitants. En outre, 4 900 nouvelles villes à population moyenne de 22 000 habitants sont apparues pendant cette période. Pendant toute cette période de croissance démographique extrêmement rapide, les villes ont réussi à préserver leurs performances supérieures à la moyenne. Depuis 1990, elles affichent toujours une part plus élevée d’emplois qualifiés, des niveaux de richesse supérieurs et de meilleures infrastructures. Si un indicateur évolue au niveau national, les tendances correspondantes pour les zones rurales et urbaines connaissent généralement une évolution parallèle.
Le Graphique 1.22 montre l’évolution de la part des habitants connectés au réseau électrique et bénéficiant de l’eau courante sur parcelle, le nombre moyen d’années de scolarité et la proportion des habitants faisant partie de ménages dotés d’un compte en banque. Trois des quatre résultats clés affichent une nette tendance à la hausse pour tous les territoires, les plus grandes villes préservant en général leur avantage sur les villes moins grandes et les zones rurales. L’accès à l’eau courante sur parcelle constitue une exception à cette tendance généralement positive. La part des habitants faisant partie de ménages qui ont accès à l’eau courante sur leur parcelle a fortement baissé dans les villes à la fin des années 90 et au début du millénaire. Elle s’est cependant stabilisée depuis, restant constante, alors que les villes continuaient de connaître une forte croissance.
Cette tendance stable suggère que l’urbanisation a été positive pour la croissance économique et l’amélioration du niveau de vie. Même si la performance relative des villes est restée constante, l’urbanisation a apporté une contribution majeure à l’amélioration du niveau de vie. Les villes ont été en mesure d’absorber les migrants ruraux ainsi que la croissance naturelle de leur population tout en continuant d’obtenir de bons résultats par rapport au contexte national. Alors que la population urbaine est passée de moins de 190 millions de personnes en 1990 à 570 millions en 2015 et à environ 700 millions en 2020, la capacité des villes à absorber cette croissance, sans baisse mesurable du niveau de vie, a permis à plusieurs centaines de millions de personnes d’occuper de meilleurs emplois et de bénéficier d’un meilleur accès aux services et aux infrastructures dans les villes. Les chiffres absolus constituent un autre moyen de montrer les réalisations des villes africaines. En trente ans, de 1990 à 2020, près de 390 millions d’habitants ont été raccordés au réseau électrique7. En 2020, environ 270 millions de citadins de plus qu’en 2000 vivent au sein d’un ménage qui dispose d’un compte en banque.
Les économies urbaines africaines n’ont enregistré que peu de changements mesurables au cours des 30 dernières années
Dans les pays à croissance rapide, ce sont les villes qui sont les moteurs de la modernisation de l’économie. En Chine, par exemple, l’urbanisation s’est accompagnée d’une expansion rapide du secteur manufacturier dans les villes, suivie d’un passage à des activités à plus forte valeur ajoutée. En Afrique, et cela en dépit de la persistance des bonnes performances des villes par rapport aux zones rurales, les villes n’ont pas joué ce rôle de moteurs du changement8.
Le pourcentage des travailleurs qualifiés dans les différentes catégories de taille de ville est resté pratiquement constant (Graphique 1.23)9. Bien que l’on observe une modeste croissance de la proportion de certaines activités, qui pourrait signaler le passage à une économie plus avancée (par exemple, dans les activités professionnelles/techniques/managériales et de services), la répartition de cette croissance est homogène, sans croissance disproportionnée des villes (Tableau d’annexe 1.A.4).
En outre, d’autres sources de données indiquent elles aussi l’absence d’une modernisation significative des économies urbaines. Des données au niveau des entreprises indiquent qu’entre 2010 et 2020, la part des entreprises engagées dans la R&D a diminué de plus de 10 points de pourcentage. Sur la même période, la part des entreprises engagées dans des activités d'exportation est restée à peu près constante, même si la part des entreprises qui se conforment aux normes de qualité internationale a diminué de 5 points de pourcentage.
De même, rien n’indique que les disparités de richesse ou de revenu s’accroissent, comme on pourrait s’y attendre dans un scénario où les villes seraient à la tête d’une transformation économique. Les économies émergentes connaissent en effet souvent une hausse des inégalités de revenu lorsque les niveaux de revenu augmentent, inégalités qui se remettent à baisser quand les pays approchent du statut de pays à haut revenu (conformément à la célèbre courbe de Kuznets). La hausse des inégalités dans les économies émergentes a généralement une forte dimension spatiale, car les niveaux de revenu au sein des villes divergent de ceux des zones rurales (voir par exemple (Yang, 1999[25])). Pourtant, en Afrique, rien ne prouve l'existence d'un tel schéma. Les changements de répartition de la richesse y ont été modestes.
À l'image de cette tendance, les taux de possession de biens de consommation durables sont restés largement stable ces 30 dernières années, tant dans les villes que dans les zones rurales. Par exemple, le taux moyen de possession d'une voiture n'a pratiquement pas changé, ni dans les villes de différentes tailles ni dans les zones rurales (Graphique 1.24)10. La proportion des personnes qui possèdent un réfrigérateur a augmenté d’environ 10 points de pourcentage dans les villes comme à la campagne mais reste en dessous des 50 %, même dans les grandes villes. Seule la part des personnes possédant une télévision a connu une hausse significative, de 20 à 30 points de pourcentage. Cette croissance correspond à une tendance générale touchant aussi bien les villes que les zones rurales.
Ces tendances suggèrent une conclusion nuancée. D’une part, elles montrent clairement les avantages considérables de l’urbanisation africaine, qui sont susceptibles de se poursuivre. D’autre part, l’absence de changement significatif dans la structure économique des villes montre l’ampleur des défis de la transformation systémique. Pour que les villes deviennent les moteurs d’un développement économique durable, d’autres mesures politiques sont nécessaires, comme nous le verrons dans les chapitres suivants.
Les zones rurales bénéficient de la proximité des villes
Les villes sont essentielles pour le fonctionnement des économies rurales. En fonction de leur taille et de leur proximité, les villes jouent des fonctions différentes pour les zones rurales. Pour les zones rurales, les villes servent de points d’entrée vers des économies plus connectées et plus diversifiées ; elles fournissent des marchés où les producteurs agricoles peuvent vendre leurs produits et les ménages ruraux peuvent accéder à des services et acheter des produits de première nécessité11. Ces dernières décennies, le centre de gravité du système alimentaire du continent africain s’est déplacé des campagnes vers les villes et agglomérations. Aujourd’hui, les villes offrent aux producteurs agricoles d’une région donnée de plus grandes meilleures opportunités commerciales ; elles jouent aussi le rôle de nœuds pour le commerce et les marchés alimentaires. Elles constituent des nœuds de transport qui permettent l'accès aux réseaux de transport des biens et des personnes. Les fournisseurs de services intellectuels et financiers – comme les banques, comptables, avocats et ingénieurs – tendent à s’établir en ville. Même si les entreprises rurales ne recourent à ces services qu’occasionnellement, ils n’en restent pas moins indispensables pour une entreprise moderne. Ces services sont souvent présents dans des villes moyennes, comme les capitales régionales, qui fournissent les services requis à une vaste zone rurale environnante.
Les grandes villes, quant à elles, assurent des fonctions spécialisées utiles pour certaines entreprises rurales. Elles servent de point d’entrée vers les marchés étrangers et accueillent souvent les sièges locaux de sociétés multinationales. Elles jouent fréquemment le rôle de centre financier national et sont généralement dotées d’un grand aéroport et, le cas échéant, d’un port. En général, la plus grande ville d’un pays est aussi sa capitale. Avoir accès au gouvernement peut être utile pour obtenir des contrats publics et influer sur les législations. Les grandes villes tendent aussi à abriter les fournisseurs les plus spécialisés et offrent de grands marchés de clients potentiels.
La proximité des villes facilite l’accès des entreprises aux infrastructures, aux services et aux opportunités commerciales mentionnées précédemment. Cela réduit les coûts d'exploitation et offre des possibilités de développement commercial. Les zones rurales situées à proximité des villes peuvent plus facilement profiter des infrastructures essentielles reposant sur la connexion à de grands réseaux, comme les transports et l’électricité. Ces avantages se reflètent dans la structure de l’économie des zones rurales concernées, qui influence à son tour le niveau de vie des résidents des zones rurales.
Les villes petites et moyennes servent de centre urbain pour les zones rurales
L’urbanisation rapide de l’Afrique modifie le paysage urbain mais aussi les zones rurales. Entre 1990 et 2015, le nombre des villes africaines a plus que doublé, passant de 3 319 à 7 721, de nombreuses villes ayant émergé dans des zones rurales à forte densité de population. Avec l’émergence de nouvelles villes, de plus en plus de ménages ruraux vivent à proximité d’une ville. En effet, 50 % des résidents ruraux vivent dans un rayon de 14 km d’une ville, et 90 % d’entre eux dans un rayon de 47 km. Moins de 1.5 % des résidents ruraux vivent à plus de 100 km de la ville la plus proche. Le Graphique 1.25 montre la distribution de la population rurale en fonction de la distance à la ville la plus proche. La proximité croissante des zones urbaines permet à une proportion croissante de résidents ruraux d’accéder aux services et aux équipements qu’offrent les villes.
La plupart des ménages ruraux vivent près de villes petites ou moyennes. Pour plus de deux tiers des résidents ruraux, la ville la plus proche compte entre 10 000 et 50 000 habitants, et pour plus de 20 % d’entre eux, elle compte entre 50 000 et 250 000 habitants (Graphique 1.25, panneau de droite). À l’inverse, moins de 10 % de la population rurale vit près d’une ville de plus de 250 000 habitants. Ces chiffres mettent en lumière l’importance des villes petites et moyennes, où vivent plus de 250 millions d’Africains (44 % du total de la population urbaine). Pour une large majorité des ménages ruraux, ces villes constituent le centre urbain le plus proche.
Les zones rurales situées à proximité des villes obtiennent de meilleurs résultats que les zones rurales isolées
Les avantages que les zones rurales tirent de la proximité des villes apparaissent clairement lorsque l’on examine leurs résultats en fonction de leur distance avec la ville la plus proche. Le Graphique 1.26 montre la part des travailleurs qualifiés des zones rurales en fonction de leur distance avec la ville la plus proche, comptant au moins 10 000 habitants. Dans les zones rurales situées juste à l’extérieur des villes, la part des travailleurs qualifiés est de 22 %, soit moins de la moitié de la moyenne de la part des travailleurs qualifiés dans les villes, mais tout de même 4 points de pourcentage de plus que la moyenne des zones rurales. Cette part diminue à mesure que la distance avec la ville la plus proche augmente. Lorsque la distance atteint 30 km environ, la proportion se stabilise alors autour de 13 %. Ainsi, la proportion des travailleurs qualifiés dans les zones rurales proches des villes représente près du double de celle des zones rurales isolées.
Les personnes vivant à plus de 50 km de la ville la plus proche, soit moins de 10 % des personnes étudiées, n’apparaissent pas sur le graphique. À ces distances, le rapport entre la distance de la ville et les variables de résultat devient instable et commence à fluctuer. Cela s’explique en partie par le faible nombre de personnes habitant à cette distance des villes. Les données ne contiennent donc qu’un nombre limité d’observations, ce qui augmente le bruit statistique des estimations. Cependant, cela peut aussi indiquer que les zones rurales isolées ont souvent des économies distinctes, qui ne correspondent pas aux tendances générales.
Des tendances similaires peuvent être observées pour une d’autres résultats. Le Graphique 1.27 montre le rapport entre la distance avec la ville la plus proche et des résultats tels que le nombre moyen d’années d’éducation, le niveau de richesse et l’accès aux services et aux infrastructures. Pour tous ces résultats, on observe une relation décroissante avec l’augmentation de la distance à la ville la plus proche, mais dont l’ampleur varie fortement d’un résultat à l’autre. Alors que la part des ménages disposant d’un compte en banque est divisée par trois lorsque l’on passe d’une distance de 1 km à 50 km, la baisse relative de la part des ruraux possédant un téléphone portable est bien plus faible.
La distance par rapport à la ville la plus proche (quelle que soit sa taille) est, de loin, le facteur prédictif le plus important de la situation socioéconomique. En outre, la proximité de villes moyennes (entre 50 000 et 250 000 habitants), tout comme celle de grandes villes (de plus de 1 million d’habitants), est corrélée à de meilleurs résultats, même en contrôlant la distance aux villes les plus proches. Les avantages de la distance par rapport aux villes de différentes tailles sont cumulatifs. Si l’on compare deux résidents ruraux qui vivent à une distance de 20 km d’une petite ville, mais à 100 km et 200 km, respectivement, d’une grande ville (de 1 million d’habitants), le résident le plus proche de la grande ville sera certainement avantagé.
Les avantages de la proximité des villes sont cumulatifs, quelle que soit la densité des zones rurales concernées. Bien que les zones rurales plus denses obtiennent dans certains domaines de meilleurs résultats et que les zones rurales proches des villes tendent à être plus densément peuplées que les zones rurales isolées, les avantages de la proximité des villes persistent même si l’on tient compte de la densité de population des zones rurales. Cela suggère que les villes offrent des avantages distincts qui n'apparaissent pas lorsque le même nombre de personnes vivent à proximité les unes des autres dans un environnement rural (Tableau d’annexe 1.A.5 et Tableau d’annexe 1.A.6).
Les petites villes situées à proximité de grandes villes obtiennent de meilleurs résultats dans certains domaines
Les zones rurales ne sont pas les seules à profiter de la proximité des villes. Les villes petites et moyennes proches des grandes villes obtiennent elles aussi de meilleurs résultats que les villes petites et moyennes éloignées des grandes villes, même si des corrélations statistiquement significatives sont observées pour moins de résultats. Le nombre moyen d’années d’éducation est plus élevé dans les villes petites et moyennes proches des grandes villes, ce qui est notamment dû à la proportion plus élevée d’habitants ayant bénéficié d’une éducation secondaire ou supérieure. Cela pourrait indiquer que les villes petites et moyennes profitent d’un meilleur accès à l’éducation offerte dans les grande villes voisines. En revanche, la performance des petites villes ne dépend pas de la proximité des villes moyennes. Seule la proximité des grandes villes, de plus de 1 million d’habitants, est systématiquement corrélée à de meilleurs résultats (Tableau d’annexe 1.A.6).
Références
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[6] Banque mondiale (2008-2019), Living Standard Measurement Surveys, Banque Mondiale, Washington, DC, https://www.worldbank.org/en/programs/lsms.
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[23] Combes, P., G. Duranton et L. Gobillon (2010), « The identification of agglomeration economies », Journal of Economic Geography, vol. 11/2, pp. 253-266, https://doi.org/10.1093/jeg/lbq038.
[24] Combes, P., G. Duranton et L. Gobillon (2008), « Spatial wage disparities: Sorting matters! », Journal of Urban Economics, vol. 63/2, pp. 723-742, https://doi.org/10.1016/j.jue.2007.04.004.
[18] Combes, P. et L. Gobillon (2015), « The Empirics of Agglomeration Economies », dans Handbook of Regional and Urban Economics, Elsevier, https://doi.org/10.1016/b978-0-444-59517-1.00005-2.
[14] Danert, K. et A. Healy (2021), « Monitoring Groundwater Use as a Domestic Water Source by Urban Households: Analysis of Data from Lagos State, Nigeria and Sub-Saharan Africa with Implications for Policy and Practice », Water, vol. 13/4, p. 568, https://doi.org/10.3390/w13040568.
[1] EDS (1990-2019), Demographic and Health Surveys (various datasets), https://dhsprogram.com/.
[5] Gollin, D., M. Kirchberger et D. Lagakos (2021), « Do urban wage premia reflect lower amenities? Evidence from Africa », Journal of Urban Economics, vol. 121, p. 103301, https://doi.org/10.1016/j.jue.2020.103301.
[19] Grover, A., S. Lall et J. Timmis (2021), Agglomeration Economies in Developing Countries: A Meta-Analysis, The World Bank, https://doi.org/10.1596/1813-9450-9730.
[3] Henderson, J., D. Nigmatulina et S. Kriticos (2019), « Measuring urban economic density », Journal of Urban Economics, p. 103188, https://doi.org/10.1016/j.jue.2019.103188.
[22] Jacobs, J. (1969), The economy of cities, Random House. New York.
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[20] Marshall, A. (1890), Principles of Economics, MacMillan, London.
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[28] OCDE (2021), OECD Regions and Cities at a Glance, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/959d5ba0-en.
[29] OCDE (2021), « Water Governance in African Cities », OECD Studies on Water, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/19effb77-en.
[17] OCDE (2015), The Metropolitan Century: Understanding Urbanisation and its Consequences, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264228733-en.
[4] OCDE/Commission européenne (2020), « Cities in the World: A New Perspective on Urbanisation », OECD Urban Studies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/d0efcbda-en.
[2] OCDE/CSAO (2018), Africapolis (base de données), OCDE Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, Éditions OCDE, Paris, http://africapolis.org.
[8] OIT (2021), Heures de travail perdues en raison de la crise du COVID-19 – Estimations modélisées du BIT (%) | Annuel, ILOSTAT, https://ilostat.ilo.org/fr/data/.
[16] ONU DAES (2019), Population Prospects, Nations Unies, Département des affaires économiques et sociales, Population, http://population.un.org/wpp.
[10] ONU-Habitat, CEA, FENU and CGLU Afrique (2020), La COVID-19 dans les villes africaines : Impacts, ripostes et recommandations politiques, ONU-Habitat, https://unhabitat.org/fr/covid-19-in-africa-cities-impacts-responses-and-policies.
[21] Puga, D. (2010), « The magnitude and causes of agglomeration economies », Journal of Regional Science, vol. 50/1, pp. 203-219, https://doi.org/10.1111/j.1467-9787.2009.00657.x.
[27] WorldPop (s.d.), WorldPop, https://www.worldpop.org/.
[25] Yang, D. (1999), « Urban-biased policies and rising income inequality in China », American Economic Review, vol. 89/2, pp. 306-310, https://doi.org/10.1257/aer.89.2.306.
Annex 1.A. Tableaux
Tableau d’annexe 1.A.1. Principales sources utilisées dans ce rapport
Pays |
Sources disponibles |
Catégorie de revenu |
Degré d’urbanisation |
Nombre de villes |
Villes avec des données EDS |
Villes avec des données LSMS |
---|---|---|---|---|---|---|
Afrique du Sud |
EDS |
Revenu moyen supérieur |
70 % |
502 |
62 |
0 |
Angola |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
63 % |
96 |
75 |
0 |
Bénin |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
49 % |
122 |
74 |
0 |
Burkina Faso |
EDS |
Revenu faible |
29 % |
101 |
49 |
0 |
Burundi |
EDS |
Revenu faible |
21 % |
33 |
20 |
0 |
Cameroun |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
58 % |
147 |
87 |
0 |
Comores |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
48 % |
15 |
10 |
0 |
Côte d’Ivoire |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
49 % |
220 |
60 |
0 |
Égypte |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
93 % |
1061 |
125 |
0 |
Éthiopie |
EDS/LSMS |
Revenu faible |
27 % |
510 |
97 |
299 |
Gabon |
EDS |
Revenu moyen supérieur |
81 % |
14 |
14 |
0 |
Ghana |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
52 % |
209 |
121 |
0 |
Guinée |
EDS |
Revenu faible |
37 % |
42 |
29 |
0 |
Kenya |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
65 % |
126 |
95 |
0 |
Lesotho |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
26 % |
10 |
0 |
0 |
Libéria |
EDS |
Revenu faible |
42 % |
21 |
10 |
0 |
Madagascar |
EDS |
Revenu faible |
22 % |
68 |
21 |
0 |
Malawi |
EDS/LSMS |
Revenu faible |
30 % |
77 |
40 |
0 |
Mali |
EDS/LSMS |
Revenu faible |
32 % |
94 |
40 |
65 |
Mozambique |
EDS |
Revenu faible |
33 % |
167 |
37 |
16 |
Namibie |
EDS |
Revenu moyen supérieur |
40 % |
17 |
0 |
0 |
Nigéria |
EDS/LSMS |
Revenu moyen inférieur |
53 % |
1 236 |
76 |
0 |
Ouganda |
EDS/LSMS |
Revenu faible |
39 % |
125 |
149 |
148 |
République démocratique du Congo |
EDS |
Revenu faible |
45 % |
553 |
85 |
0 |
Rwanda |
EDS |
Revenu faible |
56 % |
41 |
17 |
0 |
Sénégal |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
51 % |
74 |
362 |
172 |
Sierra Leone |
EDS |
Revenu faible |
37 % |
25 |
19 |
0 |
Tanzanie |
EDS/LSMS |
Revenu moyen inférieur |
38 % |
249 |
25 |
0 |
Tchad |
EDS |
Revenu faible |
29 % |
93 |
46 |
0 |
Togo |
EDS |
Revenu faible |
50 % |
53 |
213 |
0 |
Zambie |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
44 % |
80 |
28 |
0 |
Zimbabwe |
EDS |
Revenu moyen inférieur |
34 % |
53 |
79 |
75 |
Note : Ce tableau contient les pays pour lesquels des microdonnées étaient disponibles pendant au moins une partie de la période de 2010 à 2019. La plupart des tableaux et graphiques de ce chapitre sont fondés sur les données de ces pays. Lorsque des données additionnelles et/ou différentes ont été utilisées ceci a été indiqué dans les notes figurant sous chaque tableau/graphique.
Tableau d’annexe 1.A.2. Taille de ville – proportion de travailleurs qualifiés – élasticité par pays
Proportion de travailleurs qualifiés |
|
---|---|
log(pop) × AGO |
0.0444** |
(0.0166) |
|
log(pop) × BDI |
0.0170 |
(0.0419) |
|
log(pop) × BEN |
0.0356* |
(0.0156) |
|
log(pop) × BFA |
0.0728* |
(0.0305) |
|
log(pop) × CIV |
0.0138 |
(0.0253) |
|
log(pop) × CMR |
0.0343 |
(0.0183) |
|
log(pop) × COD |
0.0384* |
(0.0156) |
|
log(pop) × COM |
0.00487 |
(0.0910) |
|
log(pop) × ETH |
0.0270* |
(0.0137) |
|
log(pop) × GAB |
-0.00331 |
(0.0448) |
|
log(pop) × GHA |
0.0371 |
(0.0191) |
|
log(pop) × GIN |
0.0404 |
(0.0339) |
|
log(pop) × KEN |
0.00468 |
(0.0110) |
|
log(pop) × LBR |
0.0395 |
(0.0434) |
|
log(pop) × LSO |
0.0388 |
(0.0725) |
|
log(pop) × MLI |
0.00855 |
(0.0305) |
|
log(pop) × MOZ |
0.0414 |
(0.0222) |
|
log(pop) × MWI |
0.0354 |
(0.0314) |
|
log(pop) × NAM |
0.0721*** |
(0.0204) |
|
log(pop) × NGA |
0.0361*** |
(0.00794) |
|
log(pop) × RWA |
0.0366 |
(0.0208) |
|
log(pop) × SEN |
0.0477* |
(0.0210) |
|
log(pop) × SLE |
-0.00286 |
(0.0315) |
|
log(pop) × TCD |
0.0528 |
(0.0342) |
|
log(pop) × TGO |
0.0384 |
(0.0367) |
|
log(pop) × TZA |
0.00886 |
(0.0120) |
|
log(pop) × UGA |
0.0265 |
(0.0202) |
|
log(pop) × ZAF |
-0.00256 |
(0.0121) |
|
log(pop) × ZMB |
0.0160 |
(0.0158) |
|
log(pop) × ZWE |
0.0179 |
(0.0284) |
|
|
|
Effets fixes pays-année |
YES |
Constante |
0.135** |
(0.0427) |
|
|
|
N |
2 349 |
Note : Hausse estimée de la part des postes qualifiés d’une ville lorsque sa taille augmente de 1 %. Les écarts types sont entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.3. Évolution sur la durée en fonction de la catégorie de taille des villes, 2000-2020
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
(5) |
(6) |
(7) |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|
Années de scolarité |
Proportion de travailleurs qualifiés |
Proportion d’emplois |
Proportion de ménages dans le quintile supérieur de richesse |
Proportion de ménages avec un compte en banque |
Accès à l’électricité |
Eau courante sur parcelle |
|
Tendance linéaire |
0.0672*** |
-0.000127 |
0.0116*** |
0.00195 |
0.00938* |
0.0102* |
0.00598 |
(0.0115) |
(0.00253) |
(0.00323) |
(0.00208) |
(0.00407) |
(0.00406) |
(0.00347) |
|
Ville de 10 k à 50 k |
1.688*** |
0.262*** |
0.0737 |
-0.220*** |
0.0112 |
0.309*** |
0.328*** |
(0.238) |
(0.0549) |
(0.0663) |
(0.0484) |
(0.0989) |
(0.0876) |
(0.0863) |
|
Ville de 50 k à 250 k |
1.993*** |
0.236*** |
0.0194 |
-0.229*** |
0.0709 |
0.405*** |
0.390*** |
(0.308) |
(0.0538) |
(0.0810) |
(0.0476) |
(0.120) |
(0.113) |
(0.0833) |
|
Ville de 250 k à 1 M |
2.094*** |
0.359*** |
0.0347 |
-0.240*** |
0.0315 |
0.366* |
0.475*** |
(0.436) |
(0.0779) |
(0.134) |
(0.0421) |
(0.154) |
(0.140) |
(0.107) |
|
Ville >1 M |
3.141*** |
0.425*** |
-0.00295 |
-0.258*** |
0.163 |
0.583*** |
0.514*** |
(0.402) |
(0.0641) |
(0.0823) |
(0.0410) |
(0.111) |
(0.146) |
(0.0891) |
|
(Ville 10 k-50 k)×Année |
0.00539 |
-0.000728 |
-0.00597* |
-0.00124 |
0.00916* |
0.00212 |
-0.00424 |
(0.0112) |
(0.00273) |
(0.00286) |
(0.00220) |
(0.00415) |
(0.00388) |
(0.00370) |
|
(Ville 50 k-250 k)×Année |
0.0199 |
0.00215 |
-0.00417 |
-0.00224 |
0.00957 |
0.00124 |
-0.00391 |
(0.0158) |
(0.00260) |
(0.00356) |
(0.00210) |
(0.00493) |
(0.00527) |
(0.00371) |
|
(Ville 250 k-1 M)×Année |
0.0231 |
-0.000905 |
-0.00512 |
-0.00297 |
0.0115 |
0.00542 |
-0.00612 |
(0.0214) |
(0.00343) |
(0.00574) |
(0.00202) |
(0.00664) |
(0.00618) |
(0.00476) |
|
(Ville >1 M)×Année |
0.00453 |
-0.00434 |
-0.00159 |
-0.00192 |
0.00824 |
-0.00106 |
-0.00605 |
(0.0183) |
(0.00334) |
(0.00407) |
(0.00193) |
(0.00468) |
(0.00693) |
(0.00422) |
|
Effets fixes pays |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Constante |
1.552*** |
0.195*** |
0.529*** |
0.271*** |
-0.0556 |
0.0540 |
-0.0529 |
(0.246) |
(0.0514) |
(0.0751) |
(0.0462) |
(0.0984) |
(0.0895) |
(0.0814) |
|
N |
3 350 |
2 833 |
2 853 |
3 803 |
2 884 |
3 937 |
3 937 |
Note : Toutes les variables dépendantes sont des moyennes au niveau des villes, disponibles dans les enquêtes EDS de 2000 à 2020. « Villes de 10 k à 50 k » à « Villes >1 M+ » correspondent à une série de variables muettes indiquant si une ville faisait partie de la catégorie de taille correspondante en 2000. Les zones rurales constituent la catégorie de référence omise. Les écarts-types sont clustérisés au niveau des pays entre parenthèses. Les spécifications 2 et 3 utilisent des moyennes pour les répondants masculins uniquement. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.4. Évolution de la répartition des occupations en fonction de la taille des villes dans le temps
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
(5) |
(6) |
(7) |
(8) |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Emploi qualifié/technicien/cadre |
Employé de bureau |
Ventes |
Agriculture |
Employé de maison |
Services |
Manuel qualifié |
Manuel non qualifié |
|
Tendance linéaire |
0.00206* |
0.000786* |
0.00190 |
-0.000240 |
0.000570 |
0.00219* |
0.00116 |
0.00303* |
(0.000844) |
(0.000299) |
(0.00143) |
(0.00460) |
(0.000536) |
(0.00102) |
(0.00139) |
(0.00117) |
|
Ville de 10 k-50 k |
0.0776*** |
0.0164*** |
0.0412* |
-0.322*** |
0.00812 |
0.0315** |
0.101*** |
0.0357** |
(0.0120) |
(0.00458) |
(0.0181) |
(0.0481) |
(0.00442) |
(0.0116) |
(0.0173) |
(0.0105) |
|
Ville de 50 k-250 k |
0.0642*** |
0.00919 |
0.0619*** |
-0.395*** |
0.00437 |
0.0491* |
0.117*** |
0.0585*** |
(0.0165) |
(0.00765) |
(0.0160) |
(0.0566) |
(0.00609) |
(0.0204) |
(0.0194) |
(0.0147) |
|
Ville de 250 k-1 M |
0.0515*** |
0.0162* |
0.0660** |
-0.479*** |
0.00719 |
0.0556* |
0.172*** |
0.0477* |
(0.0145) |
(0.00698) |
(0.0229) |
(0.0648) |
(0.0120) |
(0.0271) |
(0.0482) |
(0.0184) |
|
Ville >1 M |
0.0975*** |
0.0261*** |
0.101*** |
-0.517*** |
0.00487 |
0.0443* |
0.165*** |
0.0525** |
(0.0152) |
(0.00635) |
(0.0218) |
(0.0577) |
(0.00613) |
(0.0191) |
(0.0244) |
(0.0192) |
|
(Ville de 10 k-50 k)×Année |
-0.000205 |
-0.000312 |
0.00109 |
-0.00428 |
0.0000204 |
0.00139 |
-0.000743 |
-0.00175* |
(0.000997) |
(0.000344) |
(0.00149) |
(0.00409) |
(0.000344) |
(0.000918) |
(0.00142) |
(0.000828) |
|
(Ville de 50 k-250 k)× Année |
0.000857 |
0.000636 |
-0.000896 |
-0.00302 |
0.000505 |
0.000986 |
-0.000595 |
-0.00249 |
(0.00152) |
(0.000715) |
(0.00137) |
(0.00493) |
(0.000528) |
(0.00155) |
(0.00159) |
(0.00129) |
|
(Ville de 250 k-1 M)× Année |
0.00288* |
-0.000120 |
-0.000834 |
-0.000504 |
0.000670 |
0.000658 |
-0.00264 |
-0.00199 |
(0.00141) |
(0.000521) |
(0.00174) |
(0,00575) |
(0.00105) |
(0.00214) |
(0.00351) |
(0.00146) |
|
(Ville >1 M)×Année |
0.000164 |
-0.000232 |
-0.00245 |
0.00173 |
0.000673 |
0.00239 |
-0.00217 |
-0.00156 |
(0.00120) |
(0.000487) |
(0.00174) |
(0.00563) |
(0.000554) |
(0.00141) |
(0.00208) |
(0.00154) |
|
Effets fixes pays |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Constante |
0.0168 |
-0.00287 |
0.0305 |
0.541*** |
-0.00180 |
0.00445 |
0.0764*** |
0.0138 |
(0.00996) |
(0.00351) |
(0.0171) |
(0.0511) |
(0.00723) |
(0.0137) |
(0.0165) |
(0.0127) |
|
N |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
2 851 |
Note : Toutes les variables dépendantes sont des moyennes au niveau des villes, disponibles dans les enquêtes EDS de 2000 à 2020. « Villes de 10 k à 50 k » à « Villes >1 M+ » correspondent à une série de variables muettes indiquant si une ville faisait partie de la catégorie de taille correspondante en 2000. Les zones rurales constituent la catégorie de référence omise. Les écarts-types sont clustérisés au niveau des pays entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.5. Distance de la ville la plus proche et résultats pour les zones rurales
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
(5) |
(6) |
(7) |
(8) |
(9) |
(10) |
(11) |
(12) |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Log (années d’éducation) |
Log (années d’éducation) |
A un compte en banque |
A un compte en banque |
A un téléphone portable |
A un téléphone portable |
Connecté au réseau électrique |
Connecté au réseau électrique |
Eau courante sur parcelle |
Eau courante sur parcelle |
Quintile supérieur de richesse |
Quintile supérieur de richesse |
|
Log distance de la ville la plus proche |
-0.0571** |
-0.0522* |
-0.0113*** |
-0.0105*** |
-0.0193*** |
-0.0169*** |
-0.0199*** |
-0.0160*** |
-0.00874*** |
-0.00506*** |
-0.00930*** |
-0.00761*** |
(0.0212) |
(0.0205) |
(0.00221) |
(0.00220) |
(0.00247) |
(0.00254) |
(0.00365) |
(0.00381) |
(0.00176) |
(0.00140) |
(0.00134) |
(0.00166) |
|
Log distance de la ville la plus proche de plus de 50 k habitants |
-0.139*** |
-0.112*** |
-0.00824** |
-0.00610* |
-0.0101** |
-0.00344 |
-0.00359 |
-0.000782 |
0.00320 |
0.00163 |
-0.00245 |
-0.00447** |
(0.0254) |
(0.0295) |
(0.00278) |
(0.00278) |
(0.00304) |
(0.00312) |
(0.00286) |
(0.00293) |
(0.00219) |
(0.00218) |
(0.00152) |
(0.00141) |
|
Log distance de la ville la plus proche de plus de 250 k habitants |
0.111* |
0.116** |
0.00243 |
0.00193 |
-0.000907 |
0.000439 |
-0.00331 |
-0.00335 |
-0.00487 |
-0.00155 |
0.000574 |
0.000681 |
(0.0441) |
(0.0409) |
(0.00347) |
(0.00354) |
(0.00616) |
(0.00644) |
(0.00547) |
(0.00552) |
(0.00364) |
(0.00295) |
(0.00224) |
(0.00236) |
|
Log distance de la ville la plus proche de plus de 1 M habitants |
-0.173*** |
-0.176** |
-0.00638 |
-0.00491 |
-0.0152* |
-0.0149 |
-0.0107 |
-0.0105 |
-0.00329 |
-0.00366 |
-0.00675* |
-0.00893** |
(0.0486) |
(0.0544) |
(0.00380) |
(0.00397) |
(0.00715) |
(0.00769) |
(0.00653) |
(0.00653) |
(0.00228) |
(0.00204) |
(0.00278) |
(0.00297) |
|
Distance du port le plus proche |
-0.344** |
-0.313* |
-0.0165 |
-0.0143 |
-0.0165* |
-0.00910 |
-0.0206** |
-0.0153** |
-0.000277 |
0.00365 |
-0.00507 |
-0.00378 |
(0.119) |
(0.129) |
(0.00977) |
(0.0101) |
(0.00724) |
(0.00769) |
(0.00625) |
(0.00551) |
(0.00216) |
(0.00232) |
(0.00382) |
(0.00450) |
|
Log population dans un rayon de 10 km |
0.122*** |
0.00756* |
0.0228*** |
0.0322*** |
0.0140*** |
0.0122** |
||||||
(0.0265) |
(0.00302) |
(0.00469) |
(0.00517) |
(0.00363) |
(0.00397) |
|||||||
Log population dans un rayon de 50 km |
-0.0373 |
-0.00267 |
-0.00144 |
-0.0146* |
-0.00479 |
-0.0120** |
||||||
(0.0519) |
(0.00489) |
(0.00806) |
(0.00624) |
(0.00375) |
(0.00360) |
|||||||
Effets fixes pays-années |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Constante |
5.186*** |
4.086** |
0.306*** |
0.232* |
0.835*** |
0.531*** |
0.363*** |
0.172 |
0.0901*** |
-0.0330 |
0.139*** |
0.179** |
(0.669) |
(1.274) |
(0.0588) |
(0.104) |
(0.0402) |
(0.132) |
(0.0475) |
(0.0931) |
(0.0166) |
(0.0654) |
(0.0222) |
(0.0521) |
|
N |
2 140 291 |
2 140 291 |
2 525 596 |
2 525 596 |
2 614 059 |
2 614 059 |
2 613 871 |
2 613 871 |
2 614 177 |
2 614 177 |
2 615 091 |
2615091 |
Note : L’échantillon comprend tous les individus ruraux sondés couverts par les enquêtes EDS en Afrique entre 2010 et 2019. Les écarts-types sont clustérisés au niveau des pays-années entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.6. Distance d’une ville de plus de 1 million d’habitants et résultats des villes
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
(5) |
(6) |
(7) |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|
Log années de scolarité |
A terminé son éducation secondaire ou supérieure |
A un compte en banque |
Quintile de richesse supérieur |
A l’électricité |
Eau courante sur parcelle |
A un téléphone portable |
|
Log population |
0.0499** |
0.0284*** |
0.0354*** |
0.0646*** |
0.0542*** |
0.0272*** |
0.0211*** |
(0.0185) |
(0.00699) |
(0.00758) |
(0.0128) |
(0.0104) |
(0.00675) |
(0.00531) |
|
Log distance de la ville la plus proche de 1 million d’habitants |
-0.0564** |
-0.0242** |
-0.0145 |
-0.0312** |
-0.0163 |
-0.0189* |
-0.0107 |
(0.0178) |
(0.00832) |
(0.00803) |
(0.00940) |
(0.0126) |
(0.00905) |
(0.00674) |
|
Log population dans un rayon de 10 km |
0.0443 |
0.0166 |
0.0122 |
0.0186 |
0.00465 |
0.0435*** |
0.0120 |
(0.0274) |
(0.00883) |
(0.00842) |
(0.0125) |
(0.0119) |
(0.0117) |
(0.00752) |
|
Log population dans un rayon de 50 km |
0.00396 |
-0.00633 |
0.00233 |
-0.00448 |
-0.00697 |
-0.0346* |
-0.00442 |
(0.0234) |
(0.00932) |
(0.00863) |
(0.0127) |
(0.0144) |
(0.0161) |
(0.00640) |
|
Effets fixes pays-années |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Constante |
1.064** |
0.223 |
-0.0554 |
-0.345 |
0.167 |
0.0555 |
0.620*** |
(0.352) |
(0.134) |
(0.116) |
(0.214) |
(0.203) |
(0.159) |
(0.151) |
|
N |
2 440 |
2 441 |
2 737 |
3 022 |
3 022 |
3 022 |
3 022 |
Note : Les écarts-types sont entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.7. Élasticité des salaires en fonction de la taille des villes
Log salaire horaire |
||||
---|---|---|---|---|
(1) |
(2) |
(3) |
(4) |
|
Log population urbaine |
0.025* |
0.030** |
0.124*** |
0.121*** |
(0.013) |
(0.013) |
(0.025) |
(0.029) |
|
Log superficie |
-0.108*** |
-0.098*** |
||
(0.024) |
(0.027) |
|||
Observations |
10 127 |
8 919 |
10 127 |
8 919 |
R2 ajusté |
0.810 |
0.819 |
0.811 |
0.819 |
Effets fixes pays-années |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Contrôles individuels |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Contrôles géographiques |
NON |
OUI |
NON |
OUI |
N |
8 919 |
8 919 |
8 919 |
8 919 |
Note : Les variables de contrôle individuelles incluent les variables suivantes : âge, âge au carré, sexe, éducation, taille du ménage, heures de travail et occupation. Les variables contrôles géographiques incluent les variables suivantes : variable de contrôle pour zones de végétation et distance de la ville la plus proche de plus de 1 million d’habitants. Les écarts-types sont clustérisés au niveau des villes. Résidents urbains uniquement. Les écarts-types sont entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Tableau d’annexe 1.A.8. Différentiels de salaire par catégorie de taille de ville
Log salaire horaire |
|
---|---|
Ville de 10 k-50 k habitants |
0.209*** |
(0.050) |
|
Ville de 50 k-250 k habitants |
0.191*** |
(0.047) |
|
Ville de 250 k-1 M habitants |
0.147*** |
(0.050) |
|
Ville de >1 M habitants |
0.287*** |
(0.076) |
|
Observations |
16 359 |
R2 ajusté |
0.786 |
Effets fixes pays-années |
X |
Contrôles individuels |
X |
Contrôles géographiques |
X |
N |
16 359 |
Note : Les variables de contrôle individuelles incluent les variables suivantes : âge, âge au carré, sexe, éducation, taille du ménage, heures de travail et occupation. Les variables contrôles géographiques incluent les variables suivantes : variable de contrôle pour zones de végétation et distance de la ville la plus proche de plus de 1 million d’habitants. Les écarts-types sont clustérisés au niveau des villes. Résidents urbains uniquement. Les écarts-types sont entre parenthèses. Les seuils de significativité statistique de 5 %, 1 % et 0.1 % sont indiqués respectivement par *, **, ***.
Notes
← 1. Les données concernant les salaires et la consommation sont calculées sur la base des données LSMS, qui contiennent des observations pour 30 000 individus seulement répartis dans six pays. Ces estimations sont donc beaucoup moins précises que la majorité des autres estimations de ce chapitre, qui se fondent sur plus de 4 millions d’observations collectées au sein des enquêtes EDS dans 32 pays.
← 2. Cette probabilité a été calculée en faisant correspondre les zones bâties définies par Africapolis avec la distribution spatiale de la population selon la grille de population de WorldPop (WorldPop[27] ; Linard et al., 2012[26]).
← 3. Cette statistique se fonde sur une classification de l’indice EDS de richesse des ménages en quintiles de richesse. Comme certains chercheurs critiquent cet indice, qui sous-estimerait la richesse des ménages ruraux, il est possible que ces chiffres sous-estiment les niveaux de richesse des zones rurales par rapport à ceux des zones urbaines.
← 4. Voir OCDE (2021[29]) pour une discussion des défis de gouvernance liés à la fourniture d’infrastructures d’eau.
← 5. La productivité du travail est représentée par les salaires, comme c'est souvent le cas dans la littérature sur le sujet.
← 6. Il est estimé que le PIB par habitant des villes augmentera de 0.22 points de pourcentage. Étant donné que près de la moitié de la population africaine vit dans les villes, cela contribue à hauteur de 0.11 points de pourcentage à la croissance globale du PIB par habitant.
← 7. Au début des années 1990, 62 % des 190 millions de résidents urbains étaient connectés au réseau électrique ; à la fin des années 2010, cette part était passée à 72 % des 700 millions de citadins.
← 8. Au début des années 2000, 23 % des 290 millions de citadins vivaient dans un ménage doté d’un compte en banque ; à la fin des années 2010, cette proportion était passée à 48 % de 700 millions de citadins.
← 9. Bien qu’il puisse sembler qu’il y a des tendances différenciées pour la part des travailleurs qualifiés masculins dans les villes de 250 000 à 1 million d’habitants et dans les villes de plus de 1 million d’habitants, le Tableau d’annexe 1.A.4, en annexe, montre que ces tendances ne sont pas significatives (autrement dit, elles sont statistiquement impossibles à différencier du hasard).
← 10. Cela n'est pas en contradiction avec le fait que les niveaux de motorisation au niveau national ont augmenté, car les gens se sont déplacés des zones rurales avec de faibles taux de motorisation vers les villes avec des taux de motorisation plus élevés.
← 11. À mesure que les pays se développent, l’importance des petites villes où se tiennent des marchés décline pour les producteurs agricoles en raison de l’émergence de grossistes, qui rendent les marchés locaux moins incontournables. Simultanément, à mesure qu’augmente le niveau de vie et le revenu disponible des populations rurales, ces villes prennent de l’importance en tant que lieux d’achat de biens.