Rapport sur la dette mondiale 2024

2. Les marchés de la dette d’entreprise dans un contexte de mutation du paysage macrofinancier

Abstract

L’endettement des entreprises a sensiblement augmenté au cours des quinze dernières années. À l’échelle mondiale, l’encours des obligations d’entreprises s’établissait à 34 000 milliards USD à la fin de 2023, soit une hausse en termes réels de 13 000 milliards USD depuis 2008. Outre l’application de politiques monétaires accommodantes, les entreprises ont été en mesure d’accroître le niveau de leurs emprunts et de s’assurer des conditions favorables. Parallèlement, les marchés des obligations d’entreprises ont évolué sur au moins quatre plans : la composition sectorielle, la composition géographique, la base d’investisseurs et la qualité du crédit. Les conditions de financement ayant permis la forte expansion des emprunts ont pris fin et les besoins de refinancement sont considérables. Le segment des titres de la catégorie investissement se concentre de plus en plus dans les obligations moins bien notées et, à note égale, les obligations actuelles présentent des caractéristiques très différentes de celles que l’on observait il y a quinze ans. Le secteur non financier, en particulier, est plus endetté que jamais dans l’histoire récente.

Dans ce contexte, le présent chapitre étudie les implications de ce nouveau paysage macrofinancier sur les marchés des obligations d’entreprise à l’échelle mondiale.

2.1. Introduction

Les marchés des obligations d’entreprise ont connu une forte croissance depuis la crise financière de 2008. Les entreprises ont tiré parti d’un contexte de politiques monétaires accommodantes : accroissement des emprunts, verrouillage de taux d’intérêt favorables et prolongation des échéances. Parallèlement, à l’échelle mondiale, les marchés des obligations d’entreprises ont évolué sur au moins quatre plans différents : la composition sectorielle, la composition géographique, la base d’investisseurs et la qualité du crédit. Le présent chapitre illustre ces évolutions et examine leurs possibles interactions avec un contexte macrofinancier en mutation. Axé sur les marchés des obligations d’entreprise, il ne s’intéresse pas aux billets de trésorerie ni aux titres adossés à des actifs.

Principaux constats

• Fortes hausses des émissions d’obligations d’entreprise. En termes réels, l’encours total de la dette obligataire des entreprises est passé de 21 000 milliards USD en 2008 à 33 600 milliards USD en 2023. Cette augmentation est imputable pour plus de 60 % à des sociétés non financières, qui ont plus que doublé leurs émissions annuelles moyennes entre 2000-2008 et 2009-2023.

• Évolution de la composition géographique. La composition géographique des marchés des obligations d’entreprise a considérablement évolué. Les émetteurs chinois, qui représentaient moins de 1 % de l’encours total en 2008, sont ainsi passés à près d’un cinquième à la fin de 2023.

• Obtention de conditions favorables par les entreprises. Dans un environnement de financement favorable, les entreprises de la catégorie investissement ont, partout dans le monde, porté l’échéance moyenne de leur dette de 5.6 ans en 2000 à 7.9 ans en 2023. En outre, la grande majorité des obligations d’entreprise sont à taux fixe, ce qui limite l’exposition immédiate aux fluctuations des taux d’intérêt.

• Une base d’investisseurs qui évolue. Le contexte d’investissement qui est celui des obligations d’entreprise a évolué à la suite des efforts réglementaires entrepris pour diversifier l’intermédiation de crédit en l’éloignant du secteur bancaire. Les fonds d’investissement à capital variable et les fonds indiciels cotés (ETF) ont considérablement gagné en importance. Le nombre de fonds à revenu fixe participant aux marchés des obligations d’entreprise a plus que triplé depuis 2000. Ces fonds sont également de plus en plus exposés aux obligations d’entreprise : à l’échelle mondiale, l’exposition nette de plus de 30 % d’entre eux représente plus de 75 % de la valeur totale de leur portefeuille.

• Dégradations structurelles de la qualité du crédit. Partout dans le monde, les marchés des obligations d’entreprise deviennent de plus en plus risqués du fait de la forte dégradation des notations de crédit moyennes pondérées en fonction de la valeur. Il faut y voir la conjonction de l’expansion du segment des titres classés dans la catégorie spéculative, qui s’est développé plus rapidement que le marché au sens large, et d’une dégradation de la qualité du crédit parmi les émetteurs de la catégorie investissement.

• Durcissement des conditions financières et tensions sur les marchés. Malgré l’augmentation des emprunts et la dégradation de la qualité du crédit, le nombre de défaillances d’entreprises est resté modéré, étant donné que la faiblesse des taux d’intérêt a permis d’assurer la soutenabilité des hauts niveaux d’endettement. Toutefois, à l’échelle mondiale, 12 300 milliards USD d’obligations d’entreprise arrivent à échéance d’ici la fin de 2026. En raison du resserrement marqué de la politique monétaire opéré depuis 2022, une grande partie de cette dette devra être refinancée à des taux nettement plus élevés qu’au moment de son émission.

• Vulnérabilités au seuil de la catégorie investissement. Une part croissante des marchés d’obligations de sociétés non financières dans le monde se situe juste au-dessus du seuil de la catégorie spéculative. En effet, la part des obligations notées BBB dans le total des émissions de la catégorie investissement a atteint 53 % en 2023, soit plus du double du niveau observé en 2000. Parallèlement, les caractéristiques des obligations notées BBB ont évolué : la part de celles émises par des sociétés non financières affichant un ratio dette/EBITDA supérieur à 4 était de 42 % en 2023, contre 11 % en 2008. Le fait qu’ils se situent sur le seuil de la catégorie spéculative rend ces titres vulnérables à une dynamique de vente à prix bradés, en particulier lorsque les mandats des investisseurs sont fondés sur les notations.

2.2. Aperçu des évolutions survenues sur les marchés mondiaux d’obligations d’entreprise

Les emprunts d’entreprises sur les marchés obligataires se sont sensiblement accrus ces vingt dernières années, dans un contexte marqué, depuis la crise financière de 2008, par des politiques monétaires accommodantes. Les rendements ont été contenus par l’extrême faiblesse des taux directeurs ainsi que les achats massifs, par les banques centrales, d’obligations d’État et d’entreprise. Parallèlement, l’environnement des marchés obligataires a évolué, notamment les caractéristiques des émetteurs et des investisseurs. À partir de données portant sur les opérations, cette section dresse un tableau des évolutions survenues sur les marchés des obligations d’entreprise à l’échelle mondiale depuis 2000.

2.2.1. Tendances observées du côté des émetteurs : recours par les entreprises aux marchés obligataires

Le montant total de l’encours des obligations d’entreprises a été multiplié par deux et demi en termes réels, passant de 13 600 milliards USD en 2000 à 33 600 milliards USD en 2023 (Graphique 2.1, partie A). Cette hausse a été particulièrement prononcée dans le secteur non financier depuis la crise financière de 2008, les entreprises du monde entier ayant tiré parti de la baisse des coûts d’emprunt résultant de politiques monétaires accommodantes. Le durcissement de la réglementation bancaire a également contribué à cette croissance. Les émissions de sociétés non financières ont, en moyenne, plus que doublé en termes réels, passant de 1 100 milliards USD par an entre 2000 et 2008 à 2 300 milliards USD entre 2009 et 2023 (partie B). Cette tendance se confirme même si l’on exclut les niveaux record d’émissions enregistrés pendant la pandémie de COVID-19 en 2020 et 2021 (3 400 milliards USD et 2 800 milliards USD respectivement).

La hausse est plus modérée en ce qui concerne les sociétés financières : 2 500 milliards USD entre 2000 et 2008 contre 2 800 milliards USD entre 2009 et 2023. Par conséquent, plus de 60 % de l’augmentation de la dette obligataire des entreprises à l’échelle mondiale est due à l’accroissement de la dette des sociétés non financières. En 2023, la part des obligations de sociétés non financières dans l’encours total de la dette obligataire des entreprises était supérieure de neuf points à son niveau de 2008. Les politiques monétaires expansionnistes menées depuis 2008 ont également eu une incidence sur le différentiel de coût relatif entre les obligations et les actions. Les émissions d’obligations en multiple du volume total des émissions d’actions ont considérablement augmenté au fil du temps, en particulier s’agissant des sociétés financières (partie C).

Graphique 2.1. Aperçu des marchés mondiaux d’obligations d’entreprise

Note : la partie C présente des moyennes mobiles sur trois ans. Le total des émissions d’actions correspond à la somme des introductions en bourse et des placements sur le marché secondaire.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Si la dette obligataire des sociétés non financières a sensiblement augmenté dans les économies avancées depuis 2008 (en termes réels, de 72 % aux États-Unis, de 51 % en Europe et de 28 % au Japon), le tableau est plus équivoque en ce qui concerne les obligations de sociétés financières (Graphique 2.2, partie A). Aux États-Unis comme en Europe, l’encours des obligations émises par des sociétés financières a, en fait, légèrement diminué en termes réels depuis 2008 (de 5 % et 6 %, respectivement), alors qu’il a sensiblement augmenté au Japon, même s’il partait de niveaux beaucoup plus bas. En République populaire de Chine (Chine), l’encours des obligations d’entreprises financières et non financières a connu une hausse considérable depuis 2008.

Cette situation a entraîné une évolution significative de la répartition des marchés obligataires régionaux. En effet, la dette obligataire des entreprises chinoises est passée de niveaux négligeables en 2008 à près d’un cinquième du total mondial en 2023 (partie B), tandis que la part de l’Europe a été ramenée de 42 % à 28 %. La raison en est, en partie, que le marché européen est dominé par les sociétés financières, notamment les banques, un segment qui se développe beaucoup plus lentement que celui des sociétés non financières. À la fin de 2023, les obligations émises par des sociétés financières représentaient ainsi plus des deux tiers de la dette européenne totale, contre 54 % au niveau mondial et 36 % aux États-Unis.

Graphique 2.2. Croissance et répartition régionale de l’encours des obligations d’entreprise

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Durant la période de faiblesse des taux d’intérêt, les entreprises bien notées, en plus d’augmenter le montant de leurs emprunts, ont également prolongé l’échéance de leur dette. À l’échelle mondiale, l’échéance pondérée de l’ensemble des obligations d’entreprise de catégorie investissement est passée de 5.6 ans en 2000 à 7.9 ans en 2023. Cette tendance se vérifie en ce qui concerne les sociétés tant financières que non financières, qui suivent des trajectoires très similaires, même si l’échéance moyenne de ces dernières est légèrement plus longue. Comme le montre le Graphique 2.3, tous les pays sont également concernés. Les échéances moyennes ont été prolongées dans toutes les régions présentées ci-dessous, à l’exception notable de la Chine, où elle a été ramenée de 10.0 à 6.3 ans, sous l’effet d’une expansion significative du marché pour y inclure des émetteurs de moindre envergure (voir (OCDE, 2022[1]). Aux États-Unis, les échéances des titres de catégorie investissement ont plus que doublé depuis 2000 et dépassaient 10 ans en 2023.

Graphique 2.3. Échéances moyennes pondérées concernant les entreprises de catégorie investissement

Note : la série chronologique de la partie E débute en 2010 car avant cette date, les titres notés émis par des sociétés chinoises étaient très rares.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

La grande majorité des obligations d’entreprise sont émises à taux fixe (Graphique 2.4) : 94 % du total depuis 2008 en ce qui concerne les sociétés non financières des économies avancées (partie A) et une part similaire, 93 %, pour ce qui est des économies émergentes (partie B). Dans ces deux groupes, on ne constate pas de différence significative entre les titres de la catégorie investissement et ceux de la catégorie spéculative. La situation est toutefois différente en ce qui concerne les sociétés financières, dont 72 % des émissions totales étaient à taux fixe dans les économies avancées, contre 92 % sur les marchés émergents. Cependant, les sociétés financières sont moins concernées par les risques liés aux emprunts à taux variable du fait de leur exposition positive, par leurs activités de prêt, aux hausses des taux d’intérêt. Pour verrouiller des taux avantageux, les sociétés financières ont néanmoins accru leur part d’emprunts à taux fixe au fil du temps. Entre 2000 et 2008, celle-ci ne représentait, en effet, que 50 % du total dans les économies avancées et 58 % dans les économies émergentes. Font toutefois notablement exception à cette tendance les sociétés financières de la catégorie spéculative dans les économies avancées, qui ont ramené la part des émissions à taux fixe de 82 % entre 2000 et 2008 à 78 % entre 2008-2023 pour atteindre un plus bas historique de 44 % en 2022.

Graphique 2.4. Part des émissions à taux fixe (par montant)

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

La prédominance des taux fixes, conjuguée à l’allongement des échéances, a globalement atténué les effets à court terme de la hausse des taux d’intérêt et réduit les risques de refinancement auxquels est confronté le secteur des entreprises dans les économies avancées. Comme l’illustre le Graphique 2.5, la part de la dette arrivant à échéance au cours des trois années suivantes s’établissait à 32 % à la fin de 2023, contre 37 % en 2008. Toutefois, compte tenu de l’augmentation des emprunts, les montants à rembourser ou à refinancer restent considérables en termes absolus : 8 000 milliards USD.

La situation dans les économies émergentes est plus difficile, car les remboursements arrivant à échéance au cours des trois années suivantes ont sensiblement augmenté non seulement en montants absolus, mais aussi en pourcentage de l’encours total de la dette. À la fin de 2023, ils s’élevaient à 4 400 milliards USD, soit 51 % de l’encours total (partie B). Il s’agit d’une augmentation marquée par rapport à 2008 environ, date jusqu’à laquelle cette part suivait une tendance à la baisse. La progression observée depuis lors s’explique très largement par la croissance du marché chinois, dont les échéances se sont raccourcies (voir partie E du Graphique 2.3), ce qui a entraîné une hausse de la part de la dette due au cours des trois années suivantes pour les entreprises financières et non financières. La part de la Chine dans l’encours total des obligations d’entreprise des marchés émergents est passée de 29 % en 2010 à 74 % en 2023, ce qui a des répercussions importantes sur le chiffre agrégé. Si l’on considère les marchés émergents hors Chine, la part de la dette arrivant à échéance au cours des trois années suivantes est plus stable, mais s’élevait encore à 48 % à la fin de 2023.

Graphique 2.5. Encours des obligations d’entreprises arrivant à échéance au cours des trois années suivantes, toutes entreprises confondues

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

2.2.2. Tendances observées du côté des investisseurs : évolution du paysage des créanciers

L’augmentation des emprunts des États (voir chapitre 1) et des entreprises dans le monde depuis 2008 a été principalement absorbée par les banques centrales et les investisseurs institutionnels. Fin 2022, les sept catégories d’investisseurs énumérées ci-dessous détenaient au total 74 600 milliards USD de titres d’emprunt (émis par des entreprises ou des États), contre 61 400 milliards USD en 2007. À l’échelle mondiale, les plus gros investisseurs en titres de dette sont les banques centrales, dont les avoirs sont passés de 3 500 milliards USD en 2007 à 18 400 milliards USD en 2022. Viennent ensuite les banques commerciales et les fonds d’investissement (Graphique 2.6). Les fonds du marché monétaire, les banques centrales et les compagnies d’assurance allouent la plus grande partie de leurs portefeuilles aux titres d’emprunt : respectivement 46 %, 33 % et 43 %.

Graphique 2.6. Titres d’emprunt détenus par certaines institutions financières, 2007 et 2022

Note : sur la base des données de bilan des secteurs nationaux pour 42 économies. Les autres intermédiaires financiers sont notamment les succursales spécialisées d’institutions financières (sociétés financières spécialisées dans la titrisation d’actifs, courtiers en valeurs mobilières et produits dérivés, sociétés financières spécialisées dans le crédit et autres sociétés financières spécialisées), les auxiliaires financiers et les institutions financières captives et les organismes de crédit. Les données non consolidées des comptes financiers de l’OCDE sont complétées dans un premier temps par des données consolidées, puis par les Statistiques de l’OCDE sur les pensions lorsque les données des comptes financiers ne sont pas disponibles.

Source : comptes financiers de l’OCDE ; Statistiques de l’OCDE sur les pensions et calculs de l’OCDE.

S’agissant des juridictions qui communiquent des données sur les mouvements de fonds selon le principe « de qui à qui », il est possible d’analyser l’évolution des structures de propriété concernant certains types de titres d’emprunt, notamment les obligations d’entreprise. À l’aide de ces données, le Graphique 2.7 met en évidence une tendance notable sur les deux plus grands marchés d’obligations d’entreprise au monde (les États-Unis et la zone euro), à savoir l’importance croissante des fonds d’investissement en tant que détenteurs d’obligations d’entreprise. Cette progression est particulièrement marquante en ce qui concerne les obligations émises par des sociétés non financières depuis la crise financière de 2008, à la suite des efforts réglementaires déployés pour réduire les risques dans le secteur bancaire et diversifier l’offre de crédit, qui ont entraîné une baisse de la participation des banques aux marchés obligataires. Aux États-Unis, la part des fonds d’investissement dans l’encours des obligations de sociétés non financières a plus que quadruplé entre 2008 et 2021, passant de 8 % à 34 %, la grande majorité de ces titres étant détenus par des fonds à capital variable (y compris des ETF). Ce pourcentage a fortement chuté, pour s’établir à 23 % en 2022, à la suite de fortes pressions à la baisse exercées sur les prix des titres à revenu fixe à l’échelle mondiale, au cours desquelles les fonds d’investissement, qui, le plus souvent, n’appliquent pas une politique de type « acheter pour conserver », contrairement aux fonds de pension ou aux compagnies d’assurance, ont réduit leurs avoirs.

Bien qu’elle soit inférieure à celle des avoirs des fonds d’investissement en obligations de sociétés non financières, la hausse est également marquée en ce qui concerne les obligations de sociétés financières, qui ont plus que doublé entre 2008 et en 2021, passant de 8 % à 19 %, avant de retomber à 15 % en 2022 (Graphique 2.7, partie A). À la fin de 2022, les pourcentages étaient encore plus élevés dans la zone euro, à savoir 35 % d’obligations de sociétés non financières et 20 % d’obligations de sociétés financières (partie B).

Les données disponibles pour les États-Unis sont ventilées par type de fonds, ce qui permet une analyse plus détaillée et révèle une évolution importante au sein de l’univers des fonds d’investissement. Les fonds indiciels cotés (ETF) sont passés d’un pourcentage quasi nul (0.3 %) de l’encours des obligations d’entreprises non financières en 2008 à 6 % à la fin de 2022, soit plus d’un cinquième du total des avoirs détenus par les fonds d’investissement (Graphique 2.7, partie A).

Graphique 2.7. Part de l’encours des obligations d’entreprise détenue par des fonds d’investissement

Note : parts du total des participations par région. Les données relatives à la zone euro se rapportent au total des placements dans des fonds du marché non monétaire. Les données relatives à la zone euro sont disponibles à partir de 2013.

Source : système de réserve fédérale des États-Unis (FED), BCE, calculs de l’OCDE.

Pour mieux apprécier l’évolution de la participation des fonds d’investissement dans les marchés des obligations d’entreprise, l’analyse est complétée à l’aide d’un ensemble de données détaillées contenant l’ensemble des fonds à capital variable axés sur les titres à revenu fixe et des ETF à l’échelle mondiale. On considère qu’un fonds participe au marché des obligations d’entreprise si son exposition nette (positions longues diminuées des positions courtes) aux obligations d’entreprise représente au moins 1 % de son portefeuille total selon les dernières données disponibles. Toutes les analyses présentées dans cette section se réfèrent à cette catégorie de fonds.

Premier élément à souligner : l’expansion soutenue de la participation des fonds d’investissement, parallèlement à l’augmentation des émissions d’obligations d’entreprise. En ce qui concerne tant les fonds à capital variable que les ETF, le nombre net de nouveaux fonds (nouvelles créations diminuées des fonds morts) est positif chaque année depuis 2000 (Graphique 2.8, partie A). La crise financière de 2008 a donné lieu à une nette accélération, due notamment au désengagement des services d’intermédiation du crédit du secteur bancaire et à l’absorption des emprunts des entreprises par de nouveaux investisseurs. Par conséquent, le nombre cumulé de fonds à revenu fixe participant aux marchés des obligations d’entreprise a plus que triplé, passant de 4 776 en 2000 à 15 144 en 2023 (partie B).

La croissance des ETF observée aux États-Unis se constate également à l’échelle mondiale. Fin 2023, sur les quelque 15 000 fonds recensés dans le monde, plus de 6 % étaient des ETF, contre moins d’un demi-pour cent en 2008. Toutefois, malgré leur croissance rapide, l’envergure des ETF demeure nettement moins importante que celle de la catégorie des fonds à capital variable. Au début de 2024, le volume agrégé de l’ensemble des fonds s’élevait à 8 900 milliards USD, dont 939 milliards USD (11 %) pour les ETF (partie C). En termes de domaine d’investissement, les États-Unis sont de loin le plus grand marché pour les ETF, puisqu’ils représentent 31 % de l’ensemble analysé, un chiffre plus de quatre fois supérieur à celui de l’Europe, qui se classe au deuxième rang.

Graphique 2.8. Fonds à revenu fixe participant au marché des obligations d’entreprise

Note : il s’agit ici des fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 % (exposition longue diminuée de l’exposition courte, en pourcentage du portefeuille total) (dernière observation disponible). Les fonds à capital fixe et ceux du marché monétaire sont exclus. Les fonds morts peuvent être liquidés ou fusionnés dans un autre fonds. Les données cumulées de la partie B indiquent l’ensemble des fonds nets (les nouveaux fonds minorés des fonds morts) depuis le début de la série de données (les premières créations remontent au début des années 50). La partie C se fonde sur la zone géographique déclarée sur laquelle les fonds se concentrent plutôt que sur leur domicile ou leur cotation. Ainsi, par exemple, la catégorie « États-Unis » comprend des investisseurs non américains qui se concentrent sur le marché américain. La catégorie « Total » comprend tous les fonds, y compris ceux n’indiquant aucune zone spécifique. Seuls sont inclus les fonds pour lesquels des données de portefeuille ont été communiquées à partir de 2023. Les catégories régionales (Asie, Europe) comprennent les fonds axés sur un pays spécifique (la Chine, par exemple, relève entièrement de la catégorie « Asie »).

Source : Morningstar Direct, calculs de l’OCDE, voir Annexe 2.A pour plus de détails.

Le nombre de fonds d’investissement présents sur le marché des obligations d’entreprise a certes augmenté, mais ces fonds ont également accru leur exposition aux obligations d’entreprise (Graphique 2.9). En ce qui concerne les fonds à capital variable, l’exposition nette moyenne est ainsi passée de 38 % en 2005 à 51 % en 2023. L’exposition moyenne aux ETF est encore plus élevée : 64 % (partie A). Cette situation a entraîné une modification de la composition des fonds d’investissement à l’échelle mondiale. À la fin de 2023, la moitié de l’ensemble des fonds affichaient une exposition nette aux obligations d’entreprise supérieure à 50 %, soit une augmentation de 13 points de pourcentage par rapport à 2008 (partie B). Cette hausse est particulièrement frappante en ce qui concerne ceux dont l’exposition nette dépasse 75 %, qui représentent désormais plus de 30 % de l’ensemble des fonds, contre 20 % en 2008 (partie C). La catégorie d’exposition la plus faible (1 à 10 %) ne représente que 10 % des fonds.

Ces évolutions témoignent d’une réorientation mondiale vers des investissements plus risqués dans un environnement de rendements plus faibles sur les actifs refuges traditionnels au cours de la période qui a suivi la crise financière de 2008. La partie C ci-dessous présente un calcul des avoirs en obligations d’entreprise que détiennent réellement les fonds d’investissement (par opposition à leur taille totale, illustrée sur la partie C du Graphique 2.8), ventilés selon l’exposition nette aux obligations d’entreprise. Au début de 2024, les fonds à capital variable et à revenu fixe ainsi que les ETF dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise dépassait 75 % détenaient respectivement 1 400 milliards et 442 milliards USD d’obligations d’entreprise. Dans le cas des ETF, cela représente près des trois quarts du total de leurs avoirs en obligations d’entreprise.

Graphique 2.9. Exposition des fonds d’investissement aux obligations d’entreprise à l’échelle mondiale

Note : seuls les fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 % (en pourcentage du portefeuille total) sont pris en compte. Étant donné que les observations relatives aux ETF sont très limitées avant 2009, c’est cette année qui est retenue comme point de départ dans la partie A. Dans la partie C, les avoirs en obligations d’entreprise sont calculés en multipliant l’exposition nette moyenne aux obligations d’entreprise, pour chaque fonds en 2023, par la taille totale du fonds (telle que déclarée en 2023 ou ultérieurement).

Source : Morningstar Direct, calculs de l’OCDE, voir Annexe 2.A pour plus de détails.

2.3. Accumulation des risques et des vulnérabilités

Parallèlement à l’augmentation de la dette obligataire des entreprises, la qualité du crédit s’est nettement dégradée. Après la crise financière de 2008, la faiblesse des taux d’intérêt et l’abondance des capitaux disponibles ont entraîné une baisse structurelle des rendements dans le monde entier pendant plus de dix ans. Par conséquent, les investisseurs cherchant à accroître leurs rendements ont alloué une plus grande part de leur capital à des investissements plus risqués, ce qui a permis à des entreprises présentant une qualité de crédit moindre d’accéder plus facilement aux marchés des obligations d’entreprise et, partant, de favoriser le développement de segments de marché plus risqués.

2.3.1. Dégradation de la qualité du crédit et croissance du marché des titres spéculatifs

La qualité globale du crédit s’est continuellement dégradée au fil du temps. Le Graphique 2.10 illustre l’évolution à long terme des notations de crédit des obligations d’entreprise à l’aide d’un indice établi en pondérant en fonction de leur valeur les notations de crédit de toutes les obligations notées émises dans le monde. Bien que cet indice présente une évolution cyclique manifeste au fil du temps, il semble également indiquer une tendance baissière structurelle s’agissant des sociétés à la fois non financières et financières. En ce qui concerne les sociétés non financières (partie A), l’indice a atteint sa valeur la plus basse en 2021, à 12.5 (soit un demi-cran au-dessus de BBB-, la note la plus basse de la catégorie investissement), c’est-à-dire deux crans en dessous de la moyenne observée entre 1980 et 2008. En 2022, la valeur de l’indice a connu une progression relativement importante, pour s’établir à 13.8, en raison d’une baisse significative (74 % à l’échelle mondiale) des émissions de la catégorie spéculative dans un contexte de hausse des taux d’intérêt et de durcissement des conditions financières. Il s’est maintenu à ce niveau en 2023.

La dégradation de la qualité du crédit dans la foulée de la crise financière de 2008 est encore plus frappante en ce qui concerne les sociétés financières, dont les obligations ont toujours été très bien notées, et de manière plus stable que celles des obligations d’entreprises non financières. Entre 1980 et 2011, l’indice n’est jamais passé en dessous de 16.9 (ce qui équivaut approximativement à une note A+) s’agissant des sociétés financières. Il s’est toutefois établi à 14.7 (entre A- et BBB+) après dix ans de dégradation marquée de la qualité du crédit. Les années 2022 et 2023 ont ensuite connu de fortes hausses, à l’instar de ce qui a été observé concernant les obligations d’entreprises non financières

Graphique 2.10. Indice mondial de notation des obligations d’entreprise

Note : pour une obligation, 1 représente la note de crédit la plus faible et 21 la plus élevée. L’indice de notation des obligations d’entreprise est ensuite calculé en faisant la moyenne des notes de chaque obligation, pondérée par le montant des émissions. Les calculs reposent sur 250 988 obligations notées émises par des entreprises établies dans 126 juridictions.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Cette dégradation de la qualité du crédit résulte en partie de l’expansion du marché des titres classés dans la catégorie spéculative. Le Graphique 2.11 donne un aperçu de l’évolution de ce segment à l’échelle mondiale, en mettant en lumière trois grosses tendances.

Premièrement, les emprunts de la catégorie spéculative ont fortement augmenté. Entre 2008 et 2023, les encours totaux ont presque doublé en termes réels, pour atteindre 3 400 milliards USD. Deuxièmement, contrairement au marché au sens large, la part des obligations de sociétés financières dans l’encours total des titres de catégorie spéculative a nettement progressé depuis la crise financière de 2008, puisqu’il a plus que doublé, passant de 15 % en 2008 à 38 % en 2023 (partie A). Cette hausse est en grande partie imputable à l’expansion des marchés obligataires européens et chinois de titres de la catégorie spéculative émis par des sociétés financières. La part de l’Europe sur le marché mondial des titres de catégorie spéculative est passée de 14 % à 30 % entre 2008 et 2023, et celle des obligations de sociétés financières sur son propre marché de titres spéculatifs de 20 % à 58 % au cours de la même période. De même, les entreprises chinoises, qui représentaient 2 % du marché mondial de titres spéculatifs en 2008, sont passées à 8 % en 2023. Au cours de la même période, la part des sociétés financières sur le marché chinois des titres de catégorie spéculative a été portée de 17 % à 81 %1. En ce qui concerne les sous-secteurs, la hausse observée à l’échelle mondiale est principalement due à l’augmentation du volume de titres émis par des entreprises actives dans les services bancaires, les services de banque d’investissement et les services d’investissement.

Troisièmement, le segment de la catégorie spéculative a connu, à l’échelle mondiale, une croissance plus rapide que le marché des titres de catégorie investissement. Si l’on examine les moyennes mobiles sur trois ans, la part du volume total des émissions de titres spéculatifs a en effet plus que doublé, passant de 6 % en 2008 à 14 % en 2023 (partie B).

Graphique 2.11. Le marché mondial des titres spéculatifs

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Contrairement à ce que l’on observe sur le marché des titres de la catégorie investissement, ceux de la catégorie spéculative n’ont pas connu d’allongement de leurs échéances moyennes pondérées. À l’échelle mondiale, elles sont restées constantes, autour de 8 ans, au cours des quinze dernières années (Graphique 2.12). Bien que la grande majorité de l’encours des obligations de catégorie spéculative soit assortie de taux d’intérêt fixes, les besoins de refinancement à court terme sont importants. À l’échelle mondiale, 1 100 milliards USD d’obligations de catégorie spéculative devront être remboursés ou refinancés d’ici la fin de 2026, très probablement dans des conditions financières nettement plus restrictives qu’au moment de leur émission.

Graphique 2.12. Échéances et remboursements, obligations de catégorie spéculative dans le monde

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

La mesure dans laquelle les entreprises de la catégorie spéculative utilisent les marchés obligataires varie selon les régions. Les entreprises américaines dominent le marché des obligations de la catégorie spéculative émises par des sociétés non financières. Bien que la part des États-Unis ait diminué au fil du temps, elle s’établissait encore à 59 % à la fin de 2023 (Graphique 2.13), c’est-à-dire bien au-delà de la part qu’occupe le pays sur le marché mondial des titres de sociétés non financières, qui s’élève à 45 %. Ce chiffre représente une baisse par rapport à 2000, où elle représentait 78 % de l’ensemble du marché des titres de la catégorie spéculative émis par des sociétés non financières. Ce recul relatif s’explique principalement par le recours accru des marchés obligataires par les entreprises européennes de catégorie spéculative, dont la part est passée de 8 % en 2000 à 21 % en 2023, à l’instar de la part qu’elles occupent sur le marché des titres non financiers au sens large (19 %).

La situation est différente s’agissant des sociétés financières de la catégorie spéculative. Tout d’abord, ce segment est nettement moins dominé par les entreprises basées aux États-Unis, puisqu’elles représentent 24 % de l’encours mondial, soit une proportion semblable à leur part de la dette obligataire émise par des sociétés financières à l’échelle mondiale (partie B). Les entreprises européennes, à l’inverse, représentent pas moins de 46 % du marché, ce qui est nettement supérieur à la part qu’elles occupent sur le marché mondial des obligations d’entreprises financières, qui s’élève à 35 %. Par rapport au marché des titres de catégorie spéculative émis par des sociétés non financières, les entreprises américaines et européennes représentent également une part plus faible du l’ensemble des marchés des titres de sociétés financières à l’échelle mondiale (70 % à la fin de 2023). Le reste est composé en majorité d’entreprises asiatiques, principalement chinoises.

Graphique 2.13. Répartition régionale de l’encours des obligations de catégorie spéculative

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

2.3.2. Endettement dans le secteur des entreprises non financières

Comme on l’a vu à la section 2.2.1, la part du secteur des sociétés non financières dans l’encours total de la dette obligataire des entreprises a fortement augmenté. Pour mieux évaluer ces évolutions, la présente section étend l’analyse à l’ensemble des opérations de financement par l’emprunt des sociétés non financières.

Les résultats montrent que l’augmentation du risque de crédit ne se limite pas aux marchés d’obligations d’entreprise, mais s’inscrit dans une tendance plus générale du secteur à l’endettement. De fait, si l’on considère l’ensemble des sociétés cotées dans le monde, la catégorie la plus endettée est celle des entreprises dont le ratio dette/EBITDA est supérieur à 4 dans les économies avancées (45 % de la dette totale) et émergentes (52 %). Fin 2022, la dette totale inscrite au bilan de ces entreprises fortement endettées s’élevait à 12 800 milliards USD à l’échelle mondiale.

Graphique 2.14. Dette totale par ratio d’endettement, sociétés non financières cotées

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

On observe cette hausse du nombre d’entreprises fortement endettées dans la plupart des régions, tant en ce qui concerne la proportion d’entreprises concernées que le montant de la dette (Graphique2.15). Fin 2022, environ un quart de l’ensemble des entreprises chinoises cotées, représentant 57 % de l’encours total de la dette, étaient considérées comme fortement endettées sur la base d’un ratio dette/EBITDA supérieur à 4. De même, au Japon, 22 % des sociétés cotées, représentant près de 55 % de l’encours total de la dette, relevaient de la catégorie des entreprises fortement endettées. Aux États-Unis, même si la part des entreprises fortement endettées a augmenté, celle de la dette détenue par ces sociétés est restée à peu près constante. En particulier, s’agissant de la part de la dette détenue par les entreprises très endettées, les niveaux de 2022 sont légèrement inférieurs à ceux de 2019 dans la plupart des régions. Cette évolution s’explique largement par la montée en flèche des bénéfices réalisés par les sociétés cotées partout dans le monde après la pandémie.

Graphique 2.15. Part des sociétés non financières cotées fortement endettées, par région

Note : les entreprises fortement endettées sont définies comme celles dont le ratio dette/EBITDA est supérieur à 4.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Bien que l’endettement des entreprises ait globalement augmenté, les niveaux varient sensiblement d’un secteur à l’autre, comme l’illustre le Graphique 2.16. À l’exception du secteur industriel, tous les secteurs ont vu leur ratio dette/EBITDA global augmenter depuis 2005. C’est dans le secteur de l’immobilier que la hausse est la plus prononcée, puisque le ratio est passé, en moyenne, de 4.2x à 13.5x. L’envolée de l’endettement des sociétés immobilières, qui sont, de loin, les plus endettées parmi les ses secteurs repris ci-dessous, est principalement le fait des entreprises chinoises, qui ont vu leurs bénéfices chuter de manière significative et leur niveau d’endettement augmenter au cours des dernières années. L’Encadré 2.1 examine plus en détail les risques et les vulnérabilités auxquels est confronté le secteur immobilier.

Graphique 2.16. Ratio dette/EBITDA des sociétés non financières cotées, agrégé par secteur

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Encadré 2.1. Les risques auxquels est confronté le secteur immobilier

Ces dernières années, le secteur immobilier a largement fait appel aux marchés des obligations d’entreprise, plus encore que d’autres secteurs. La part des émissions d’obligations de sociétés non financières imputable au secteur immobilier est passée de 0.7 % en 2000 à un niveau record de 3.1 % en 2021, avant de retomber à 2.0 % en 2023 (Graphique2.17, partie A). En 2023, l’encours des obligations émises à l’échelle mondiale par les entreprises du secteur a atteint 881 milliards USD. À l’instar d’autres obligations d’entreprise, la grande majorité d’entre elles sont émises à taux fixe. Cependant, le secteur immobilier est fortement endetté et une part importante de cette dette devra être refinancée ou remboursée à court terme. Ce problème se fait particulièrement sentir dans certaines économies asiatiques. D’ici la fin de 2026, 70 % de l’encours total des obligations de sociétés immobilières arriveront à échéance en Chine, et 51 % dans les économies asiatiques hors Chine et Japon.

Graphique 2.17. Tendances du financement obligataire par les sociétés immobilières

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Le niveau d’endettement du secteur immobilier a augmenté nettement plus que dans la plupart des autres secteurs ces dernières années. Sur la base d’une mesure du taux de couverture des intérêts, le Graphique2.18 compare la part de la dette détenue par des entreprises à haut risque du secteur immobilier à celle d’autres secteurs dans différents pays. On constate que la part des entreprises à risque a considérablement augmenté dans plusieurs régions, notamment en Chine, où elle atteignait 71 % à la fin de 2022, et aux États-Unis, où elle s’établissait à 69 %. La détérioration des conditions de crédit dans certains segments de l’immobilier aux États-Unis peut également s’observer dans la légère hausse du taux d’impayés concernant les titres adossés à des créances hypothécaires dans les secteurs de l’immobilier de bureau et de l’hébergement (Trepp, 2023[2]).

Le durcissement de la réglementation bancaire et la recherche de rendement par les investisseurs au cours des dix dernières années ont favorisé le développement du financement des sociétés immobilières par des instruments non bancaires et le recours de celles-ci à des organismes de placement collectif (OCDE, 2021[3]). Les données disponibles sur l’exposition des investisseurs institutionnels (compagnies d’assurance, fonds de pension et fonds d’investissement) à ces investissements mettent en évidence une certaine hétérogénéité selon les régions et les types d’investisseurs. En moyenne, parmi les juridictions reprises ci-dessous, c’est au secteur immobilier que les fonds d’investissement sont les plus exposés, avec 15.6 % du total des actifs. Les expositions moyennes des fonds de pension et des compagnies d’assurance sont plus faibles : 5.0 % et 4.2 %, respectivement. Toutefois, même pour ces investisseurs, l’exposition est importante dans certaines juridictions, notamment au Japon et dans certaines économies européennes.

Graphique 2.18. Part de la dette détenue par des entreprises à risque dans les différents secteurs

Note : les données se rapportent aux sociétés cotées, hors secteur financier. Les entreprises à risque sont celles qui affichent un taux de couverture des intérêts inférieur à 2.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Graphique 2.19. Exposition des investisseurs institutionnels à l’immobilier

Note : les données se rapportent au T4 2022. Les expositions à l’immobilier sont représentées par les avoirs immobiliers (non destinés à l’usage propre), les prêts hypothécaires commerciaux, les titres adossés à des créances hypothécaires commerciales et les parts de fonds de placement immobilier. Données non disponibles pour le Royaume-Uni.

Source : Bureau australien de la statistique, Banque du Japon, statistiques de l’AEAPP sur les assurances et les pensions, Banque centrale européenne, Réserve fédérale des États-Unis, Bureau de la statistique nationale du Royaume-Uni, Statistique Canada, calculs de l’OCDE.

Malgré la hausse du niveau d’endettement, la part des entreprises à risque n’a pas augmenté sensiblement au cours des deux dernières décennies si l’on examine leur capacité à assurer le service de leur dette. Le Graphique 2.20 ci-dessous illustre la part des entreprises ayant une faible capacité à assurer le service des paiements d’intérêts, c’est-à-dire celles affichant un taux de couverture des intérêts inférieur à 2, un seuil parfois utilisé pour définir les entreprises « à risque » (Palomino et al., 2019[4]). Dans la plupart des régions, la part des entreprises affichant de faibles taux de couverture des intérêts était à peu près la même en 2022 qu’en 2005, principalement en raison d’une politique monétaire accommodante, qui a permis de contenir les charges d’intérêts.

Graphique 2.20. Proportion de sociétés non financières cotées affichant un faible taux de couverture des intérêts

Note : le taux de couverture des intérêts correspond au rapport entre les bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement et les charges d’intérêts. Il est dit « faible » lorsqu’il est inférieur à 2.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG Datastream, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

De fait, la faiblesse des taux d’intérêt, ces dernières années, a donné lieu à une tendance notable : une corrélation négative entre l’endettement des entreprises et les charges d’intérêts. Tant les économies avancées que les marchés émergents ont vu les charges d’intérêts (mesurées en rapportant les charges d’intérêts à la dette financière totale) diminuer au cours des quinze dernières années, tandis que le ratio d’endettement (mesuré en rapportant la dette financière à l’actif total) a augmenté (Graphique 2.21). Vu le durcissement des conditions financières, il est peu probable que cette tendance se poursuive. Compte tenu du niveau élevé d’endettement des entreprises à l’heure actuelle, les hausses des taux d’intérêt pourraient faire basculer un nombre bien plus important d’entreprises dans la catégorie des taux de couverture des intérêts à haut risque.

Graphique 2.21. Endettement et charges d’intérêts des sociétés non financières cotées

Note : les charges d’intérêts sont mesurées en rapportant les charges d’intérêts à la dette financière totale.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

2.3.3. Évolution des défaillances d’entreprises

Malgré une envolée de l’endettement et une dégradation généralisée de la qualité de crédit des obligations d’entreprise, le nombre de défaillances d’entreprises est resté modéré ces dernières années par rapport aux niveaux passés. Hormis une légère hausse en 2020, il n’y a pas eu de pic significatif des défaillances d’entreprises classées dans la catégorie spéculative depuis la crise financière de 2008 (Graphique 2.22, partie A). Les défaillances ont augmenté quelque peu en 2022 à la suite d’une politique monétaire plus restrictive et du durcissement des conditions financières, même leur niveau est resté nettement inférieur à celui de 2020 (MIS, 2023[5]) (MIS, 2023[5]). En particulier, en raison de l’ampleur des dispositifs de soutien public et des mesures ayant permis d’éviter une crise financière généralisée, la dégradation de la qualité du crédit (mesurée par le rapport entre les révisions à la baisse et à la hausse des notations de crédit) ne s’est pas traduite par une augmentation des défaillances aussi importante qu’au lendemain de la crise financière de 2008 (partie B). En 2002 comme en 2009, le nombre de révisions à la baisse a été plus de 3.5 fois supérieur à celui des révisions à la hausse, le taux de défaillance ayant atteint 16.1 % en 2009 dans la catégorie spéculative. À l’inverse, si le ratio entre les révisions à la baisse et à la hausse atteignait 6.7 en 2020, soit de loin le plus élevé de la série ci-dessous, le taux de défaillance de la catégorie spéculative est resté relativement faible, à 6.3 %.

Graphique 2.22. Défauts sur obligations d’entreprise et évolution de la notation de crédit

Source : (MIS, 2023[5]) pour la partie A et (S&P, 2023[6]) pour la partie B.

La question centrale est donc de savoir s’il faut s’attendre à de nouvelles défaillances à mesure que le resserrement marqué de la politique monétaire produit progressivement ses effets. Comme le montre le Graphique 2.4, la grande majorité des obligations d’entreprise sont émises à taux fixe. Par conséquent, de nombreuses entreprises de la catégorie spéculative ne seront exposées à la hausse des taux d’intérêt qu’avec un certain décalage. Par ailleurs, les entreprises ont amélioré leurs volants de liquidités depuis la crise financière de 2008, puis ont bénéficié du soutien apporté par les pouvoirs publics et les banques centrales au début de la pandémie en 2020. Les volants de liquidités ont été considérablement renforcés entre 2008 et 2022 : les encaisses monétaires médianes, mesurées en proportion de la dette financière totale, sont passées de 32 % en 2008 à 65 % en 2022 (Graphique 2.23, partie A). On observe la même tendance au niveau sectoriel, tous les secteurs ayant amélioré leur position de trésorerie médiane entre 2008 et 2022 (partie B).

Graphique 2.23. Niveaux de liquidité (trésorerie/dette financière) des sociétés non financières cotées à l’échelle mondiale

Note : il s’agit de valeurs médianes.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Pour déterminer si les chiffres agrégés masquent des variations entre des entreprises ayant des capacités différentes en matière de service de la dette, l’échantillon est scindé en deux catégories, les entreprises à haut risque et celles à faible risque, sur la base des ratios dette/EBITDA. Au cours de la période 2008-22, les entreprises à haut risque comme celles à faible risque ont amélioré leur trésorerie. Comme on pouvait s’y attendre, les volants de liquidités sont nettement plus faibles dans les entreprises à haut risque (Graphique 2.24). Parmi ces dernières, les secteurs des services publics, de l’énergie, de l’immobilier et des produits de consommation non cyclique affichaient le ratio trésorerie/dette le plus faible. En 2022, c’est dans les secteurs de la santé, de la technologie, de l’industrie et de l’immobilier que l’écart de trésorerie entre les entreprises à faible risque et celles à haut risque a été le plus important : plus de 100 points de pourcentage chacun.

Graphique 2.24. Niveaux de liquidité des sociétés non financières cotées par risque et par secteur, fin 2022

Note : la liquidité est mesurée par le ratio médian entre la trésorerie et la dette financière pour chaque catégorie de risque. Les entreprises à haut risque et à faible risque sont définies comme celles dont le ratio dette/EBITDA est supérieur à 4 et inférieur à 3, respectivement. Les entreprises dont l’EBITDA est négatif sont exclues.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

2.4. Gérer les risques pesant sur la stabilité financière dans un contexte de mutation du paysage macrofinancier

La période prolongée de conditions financières accommodantes ayant permis l’expansion des marchés des obligations d’entreprise, dont traite le présent rapport, a brusquement pris fin en 2022 ; les banques centrales de la plupart des grandes économies se sont alors engagées dans un cycle de resserrement monétaire en réponse à la hausse du taux d’inflation annuel qui a atteint, dans l’ensemble des pays de l’OCDE, des niveaux jamais observés depuis 1989. Cette section examine ce que pourrait être la réaction des marchés mondiaux des obligations d’entreprise face à cette évolution du paysage macro financier, en mettant en lumière les implications possibles pour la stabilité financière.

2.4.1. Resserrement de la politique monétaire et retrait des banques centrales des marchés obligataires

En valeurs absolues, les taux directeurs se situent à des niveaux similaires à ceux observés à la fin de l’année 2006 au Royaume-Uni (5 % actuellement, contre 5.25 % en février 2024) et aux États‑Unis (5.25 %, contre une fourchette comprise entre 5.25 et 5.50 % en février 2024). Le taux de la facilité de dépôt de la Banque centrale européenne (BCE) a atteint un plus haut niveau historique de 4 % en février 2024, alors qu’il s’établissait à 2.5 % fin 2006. Le cycle de resserrement actuel, qui s’est enclenché entre 2021 et 2022 dans la plupart des pays, se caractérise non pas tant par le niveau des taux en valeur absolue que par le rythme des relèvements, qui n’a jamais été aussi soutenu depuis plusieurs décennies (Graphique 2.25).

Graphique 2.25. Cycles de resserrement des principales banques centrales depuis 1990

Note : un cycle de resserrement correspond à une période d’au moins 14 mois qui commence lorsque la première décision de resserrement de la politique monétaire est annoncée et s’achève au moment où la première baisse de taux intervient ou au terme d’une période de 12 mois consécutifs sans hausse de taux d’intérêt. Les cycles sont les suivants : Réserve fédérale – 1994-1995, 1999-2000, 2004-2007, 2015-2019, 2022-2024 ; BCE – 1999-2001, 2005-2008, 2022‑2024 ; Banque d’Angleterre – 1994-1995, 1996-1998, 1999-2000, 2003-2005, 2006-2007, 2017-2019, 2021-2024.

Source : LSEG, calculs de l’OCDE

En d’autres termes, les conditions qui ont permis la multiplication des émissions d’obligations à haut risque ne sont plus réunies. Même si l’inflation diminuait largement et revenait au niveau de l’objectif fixé ou s’en rapprochait, les taux d’intérêt et les coûts de financement des entreprises resteraient nettement plus élevés qu’ils ne l’ont été durant ces dernières années, en particulier eu égard à la décision des banques centrales de mettre fin aux mesures d’apport de liquidités. L’Encadré 2.2 donne un aperçu des effets que différents scénarios d’évolution des taux d’intérêt produiraient sur l’aptitude des entreprises cotées d’assurer le service de leur dette.

Alors que les taux d’intérêt ont été abaissés à un niveau proche de zéro, voire en deçà dans de nombreux pays au cours des dernières années dans le but de stimuler l’économie et de faire remonter le taux d’inflation vers son objectif, de nombreuses banques centrales ont enrichi leurs panoplies d’outils de politique monétaire, en y incluant des mesures d’assouplissement quantitatif, et mis en œuvre d’importants programmes d’achat d’actifs. Nombre de ces programmes ont été mis en place au lendemain de la crise financière de 2008, mais ils ont été considérablement élargis en réponse à la pandémie de COVID‑19. Bien que les achats d’actifs aient principalement ciblé les titres d’État, les grandes banques centrales ont également acheté d’importants volumes d’obligations d’entreprise, comme le montre le Graphique 2.26 ci‑après.

Dans le contexte actuel de réorientation de la politique monétaire, ces programmes sont progressivement abandonnés. Les achats nets effectués en vertu du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP) de la Banque centrale européenne (BCE) ont été arrêtés en mars 2022 et le réinvestissement des titres arrivant à échéance pourrait prendre fin en 2024 ; les achats nets effectués dans le cadre du programme d’achats du secteur des entreprises (CSPP) ont pris fin en juin 2022 et il a été mis un terme au réinvestissement intégral en février 2023 (BCE, s.d.[7]) (BCE, s.d.[8]). Fin mars 2022, la Banque du Japon a décidé de ralentir le rythme de ses achats d’obligations d’entreprise et de billets de trésorerie à compter d’avril 2022 et de la ramener au niveau d’avant la pandémie, ce qui signifie que les encours détenus diminueraient progressivement pour atteindre un total de 5 000 milliards JPY (3 000 milliards JPY d’obligations d’entreprise et 2 000 milliards JPY de billets de trésorerie) (Banque du Japon, 2022[9]). La Banque du Japon a indiqué vouloir « tenir pleinement compte des conditions d’émission des obligations d’entreprise » dans le cadre de cette réorientation de sa politique monétaire (Banque du Japon, 2022[10]).

En février 2022, la Banque d’Angleterre a décidé de cesser de réinvestir son portefeuille d’obligations d’entreprise arrivant à échéance et de démarrer un programme de ventes actives d’obligations d’entreprise (Bank of England, 2022[11]). Ce programme de vente, engagé en septembre 2022, s’est achevé en juin 2023, date à laquelle le stock d’obligations d’entreprise de la Banque s’élevait à 833 millions GBP, soit une baisse de 96 % par rapport aux neuf mois précédents. Le solde correspond à des obligations à très courte échéance qui seront conservées jusqu’à leur terme, en avril 2024 (Bank of England, 2023[12])2. La Réserve fédérale des États-Unis, qui a commencé à acheter des obligations d’entreprise en 2020 en réponse à la pandémie de COVID-19, a entrepris de vendre ses parts d’ETF et ses avoirs en obligations d’entreprise dès juin et juillet 2021, respectivement (Federal Reserve Bank of New York, s.d.[13]). Comme indiqué ci-après, sa position avait été entièrement dénouée fin août 2021.

S’agissant des portefeuilles d’obligations d’entreprise, les positions qui ont été dénouées, à savoir celles de la Fed et de la Banque d’Angleterre, étaient de bien moindre ampleur, tant en valeur absolue qu’en proportion du produit intérieur brut (PIB) et du marché obligataire total, que celles de la BCE (Eurosystème) et de la Banque du Japon. Les obligations d’entreprise détenues par la Fed achetées par l’intermédiaire de la Facilité de crédit aux entreprises du marché secondaire (SMCCF, Secondary Market Corporate Credit Facility) ont atteint, en décembre 2020, un sommet d’environ 0.14 % du marché total des obligations d’entreprise aux États-Unis. Les avoirs détenus par la Banque d’Angleterre étaient en proportion plus importants (1.4 %), mais nettement inférieurs à ceux de la BCE et de la Banque du Japon, qui représentaient 6.7 % et 3.4 % de leurs marchés d’obligations d’entreprise respectifs fin 2023. La décision de réduire la voilure en diminuant ou en cessant les achats nets et les réinvestissements s’est traduite par des achats nets négatifs records par la BCE et la Banque du Japon depuis la mise en place des programmes d’achats d’obligations d’entreprises par ces deux institutions (Graphique 2.27).

Graphique 2.26. Titres de dette d’entreprise détenus par les grandes banques centrales

Note : les titres détenus par l’Eurosystème se composent d’obligations d’entreprise et de billets de trésorerie.

Source : BCE, Banque du Japon, Banque d’Angleterre, Réserve fédérale des États-Unis, Eurostat, Comptes nationaux du Japon, Bureau de la statistique nationale du Royaume-Uni, FMI.

Graphique 2.27. Achats nets d’obligations d’entreprise par les banques centrales

Note : obligations d’entreprise et billets de trésorerie dans le cas de l’Eurosystème. Les informations sur les achats nets réalisés en vertu du PEPP sont communiquées tous les deux mois et on postule une répartition égale entre chacun des deux mois. Les données de la Banque du Japon correspondent aux opérations sur « titres industriels », qui sont des obligations émises dans le pays par des sociétés anonymes, correspondant à des obligations garanties ou non garanties en vertu de la loi sur les instruments financiers et les opérations de change. Valeurs nominales.

Source : BCE, Banque du Japon.

Le processus inverse de l’assouplissement quantitatif (le resserrement quantitatif) correspond au retrait d’un important souscripteur de certains marchés d’obligations d’entreprise. Afin de maintenir l’équilibre sur le marché, d’autres investisseurs doivent absorber cette offre nette supplémentaire. Comme indiqué à la section 2.2.1, 12 300 milliards USD d’obligations d’entreprise à l’échelle mondiale arriveront à échéance dans les trois prochaines années, dont une part importante devra être refinancée, ce qui mettra à l’épreuve la capacité d’absorption du marché. Toutefois, compte tenu de l’augmentation de l’offre sur le marché secondaire, les banques centrales se délestant en même temps de leurs titres en portefeuille, le marché pourrait avoir du mal à absorber des quantités aussi importantes de nouveaux titres de dette à un coût acceptable pour les émetteurs. Même si les avoirs actuels des banques centrales se limitent à des obligations de catégorie investissement, cela peut aussi s’avérer préoccupant pour le marché des titres de catégorie spéculative, car le retour à des niveaux de rentabilité plus élevés sur le marché moins risqué des titres de catégorie investissement pourrait inciter les investisseurs traditionnellement moins enclins à prendre des risques à se détourner du marché des titres de catégorie spéculative, où 1 100 milliards USD d’obligations devront être remboursées ou refinancées dans le monde d’ici à la fin de l’année 2026.

Cela dit, les mesures d’assouplissement quantitatif visant spécifiquement les obligations d’entreprise ont été relativement limitées en taille. Les mesures de resserrement quantitatif auront un effet nettement plus significatif sur les marchés des obligations souveraines dans la mesure où les montants détenus par les banques centrales sont souvent des centaines de fois supérieurs à ceux de leurs portefeuilles d’obligations d’entreprise (voir Chapitre 1). Mais il est important de noter que les achats d’obligations souveraines ont aussi, par nature, une incidence sur les marchés de la dette d’entreprise. En effet, l’assouplissement quantitatif a comme objectif principal de « faire baisser les taux d’intérêt à long terme et d’assouplir les conditions financières globales » (US Federal Reserve System, s.d.[14]). Les achats d’actifs de la Fed ont ainsi contribué à faire baisser les rendements des obligations d’entreprise (Gagnon et al., 2011[15]) (Krishnamurthy et Vissing-Jorgensen, 2011[16]). De même, dans l’UE, le programme d’assouplissement quantitatif de la BCE (mis en place avant la pandémie) a favorisé une augmentation des émissions d’obligations d’entreprise (Todorov, 2020[17]). En outre, bien que les grandes banques centrales aient ciblé leurs mesures d’assouplissement quantitatif entièrement sur les titres souverains, on constate que ces mesures ont également des effets significatifs sur les marchés internationaux ; le programme d’assouplissement quantitatif de la Fed a apparemment stimulé les émissions d’obligations d’entreprises non financières à l’échelle mondiale, en particulier sur les marchés émergents (Lo Duca, Nicoletti et Martinez, 2014[18]).

Encadré 2.2. Aptitude des entreprises cotées d’assurer le service de leur dette dans un contexte de hausse des taux

La conséquence la plus évidente d’un resserrement de la politique monétaire sur la capacité des entreprises d’assurer le service de leur dette se manifeste à travers l’augmentation du coût de la dette. Lorsque les niveaux de dette et les taux d’endettement sont élevés dans une économie, les hausses de taux d’intérêt peuvent modifier la nature de la dette et la rendre insoutenable (Minsky, 1995[19]). Pour évaluer l’incidence que la hausse des taux d’intérêt pourrait avoir sur la capacité des entreprises d’assurer le service de leur dette, un test de résistance a été réalisé sur la base de deux scénarios d’augmentation du coût de financement par emprunt, de 200 et 400 points de base par rapport aux niveaux enregistrés en 2022. On mesure ensuite les conséquences sur le pourcentage d’entreprises et d’encours total de la dette à risque (correspondant à un taux de couverture des intérêts inférieur à 2). L’exercice part du principe que les niveaux d’endettement demeurent inchangés et que les entreprises sont en mesure de refinancer leur dette à un coût plus élevé. On pose également que les autres postes du bilan restent inchangés. Comme le montre la partie A du Graphique 2.28, si le coût de la dette augmentait de 400 points de base, entre 6 et 11 % d’entreprises supplémentaires, toutes régions confondues, se retrouveraient en situation de vulnérabilité. Aux États‑Unis, 45 % des entreprises seraient en difficulté dans le scénario d’une hausse de taux de 400 points de base. L’effet est plus significatif encore sur la part de la dette (partie B). En Chine, par exemple, si les taux augmentaient de 400 points de base, 48 % de la dette seraient détenus par des entreprises à risque, contre 29 % en 2022.

Graphique 2.28. Conséquences sur le pourcentage d’entreprises cotées et la part de la dette à risque selon différents scénarios de hausse du coût de financement, par région

Note : concerne les sociétés non financières cotées. Les entreprises à risque sont celles qui affichent un taux de couverture des intérêts inférieur à 2. Le taux de couverture des intérêts correspond au rapport entre les bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement et les charges d’intérêts.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Les tests de résistance sont également réalisés au niveau sectoriel. Comme le montre la partie A du Graphique 2.29, dans le scénario d’une hausse de taux de 400 points de base, entre 4 et 19 % d’entreprises cotées supplémentaires, tous secteurs d’activité confondus, se retrouveraient dans la catégorie « à risque ». L’effet est là aussi plus important sur la part de la dette. On observe des différences importantes entre les secteurs d’activité. Dans le scénario d’une hausse de 400 points de base, la part de la dette détenue par des entreprises à risque resterait relativement faible, à 15 % dans le secteur de l’énergie, alors qu’elle atteindrait 78 % dans le secteur immobilier.

Graphique 2.29. Conséquences sur le pourcentage d’entreprises et la part de la dette à risque selon différents scénarios de hausse du coût de financement, par secteur d’activité

Note : concerne les sociétés cotées. Les entreprises à risque sont celles qui affichent un taux de couverture des intérêts inférieur à 2. Le taux de couverture des intérêts correspond au rapport entre les bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement et les charges d’intérêts.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Par conséquent, le retrait de ce mécanisme de soutien aura probablement l’effet inverse sur les marchés des obligations d’entreprise et accentuera le durcissement des conditions financières déjà induit par le relèvement des taux directeurs. Si, en plus de l’arrêt des injections de liquidités, les banques centrales devaient procéder à un resserrement quantitatif à grande échelle visant à réduire leurs avoirs en titres souverains (en vendant activement sur le marché secondaire), cela pourrait enclencher une dynamique qui ferait que sous l’effet d’une offre plus importante d’obligations d’État offrant des rendements plus élevés, la demande pourrait se détourner des marchés d’obligations d’entreprise. Compte tenu des volumes significatifs d’obligations d’entreprise arrivant à échéance à court terme, la capacité à contracter des emprunts supplémentaires sur le marché des obligations d’entreprise pourrait s’en trouver restreinte.

2.4.2. Le seuil de la catégorie investissement et le rôle des agences de notation

La dégradation générale de la qualité de crédit décrite à la section 2.3 résulte en partie d’une modification de la composition au sein de la catégorie investissement. La note moyenne des obligations de catégorie investissement est aujourd’hui nettement inférieure à celle d’avant 2008 et cela concerne les sociétés financières aussi bien que non financières. Pour les entreprises non financières, la part des obligations notées BBB – la note la plus basse de la catégorie investissement – dans le total des émissions de catégorie investissement est passée de 25 % en 2000 à 53 % en 2023. En outre, la part des émissions notées BBB-, qui correspond à la sous-catégorie la moins bien notée au sein de la catégorie BBB, a augmenté en proportion du total des émissions notées BBB au fil du temps (Graphique 2.30, Partie A). Il s’ensuit qu’une part importante des obligations de catégorie investissement se situe désormais juste au-dessus du seuil de la catégorie spéculative. Fin 2023, l’encours total des obligations notées BBB émises par des sociétés non financières s’élevait à 4 300 milliards USD.

La capacité du marché des titres spéculatifs d’absorber les titres de la catégorie BBB dont la note a été dégradée mérite par conséquent qu’on s’y intéresse, notamment en ce qui concerne les entreprises non financières. De nombreux investisseurs institutionnels sont tenus par la réglementation et/ou des mandats de gestion de limiter leurs avoirs principalement aux obligations de la catégorie investissement, ce qui signifie que les obligations de la catégorie spéculative attirent un nombre d’investisseurs nettement plus restreint que les obligations de catégorie investissement. Pour mesurer l’impact d’éventuelles dégradations, la partie B du Graphique 2.30 montre à quel montant, exprimé en pourcentage de la moyenne annuelle des émissions de titres spéculatifs par des sociétés non financières sur la période 2018-23, correspondraient différentes hypothèses de taux de transition de la catégorie BBB vers la catégorie spéculative. Il s’agit d’un indicateur de la capacité du marché d’absorber de nouveaux titres de dette de catégorie spéculative. Une dégradation de 7.5 % du stock d’obligations notées BBB (équivalent au taux de 2009) dans la catégorie spéculative représenterait 87 % de la moyenne annuelle des émissions de catégorie spéculative sur cinq ans au niveau mondial. Un taux de transition moins élevé de 5 %, proche des moyennes historiques (S&P Global Ratings, 2023[20]), entraînerait une augmentation du volume des obligations de la catégorie spéculative équivalant à 58 % de la moyenne des émissions au cours des cinq dernières années. Avec un taux de transition plus important de 10 % (plus élevé que celui observé au lendemain de la crise de 2008), le pourcentage serait de 117 %.

Historiquement, les obligations notées BBB- sont celles qui font le moins souvent l’objet d’une dégradation d’un cran (Graphique 2.31). Cela n’est guère surprenant. Compte tenu de la portée du seuil de la catégorie investissement et des conséquences sur la disponibilité du capital et sur les coûts de financement que représente le franchissement de ce seuil, les entreprises ont tendance à suivre de près leurs indicateurs de qualité de crédit (comme le niveau d’endettement) lorsque leur dette est notée BBB- afin d’éviter de basculer dans la catégorie spéculative. De même, les entreprises qui se situent juste en deçà du seuil de la catégorie investissement prendront des mesures afin d’obtenir un relèvement de leur note, comme en témoigne le fait que les obligations notées BB+ (la note la plus élevée de la catégorie spéculative) sont parmi celles qui ont la plus forte probabilité de voir leur note revue à la hausse (Çelik, Demirtaş et Isaksson, 2020[21]). Il est possible cependant qu’en plus des efforts consentis par les entreprises pour préserver leur solvabilité, les agences de notation, conscientes de la portée d’une note en catégorie investissement, fassent preuve d’une prudence particulière lorsqu’il s’agit de dégrader des obligations notées BBB-.

Graphique 2.30. Émission au niveau du seuil de la catégorie investissement et différents scénarios de dégradation

Note : concerne les sociétés non financières. La partie A présente des moyennes mobiles sur trois ans.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

Graphique 2.31. Probabilité de dégradation en moyenne historique de long terme, par note

Note : taux de transition annuels moyens d’un cran (par exemple, de A+ à A) pour les périodes suivantes : S&P 1981-2022, Moody’s 1983-2022, Fitch 1990-2022. B- correspond à la note la plus basse, les notes inférieures à B- étant regroupées dans les rapports de transition. Les émetteurs notés AAA sont exclus en raison de la taille limitée de l’échantillon.

Source : S&P (2022) « Annual Global Corporate Default and Rating Transition Study » ; Moody's (2022) « Annual default study » ; Fitch (2022) « Transition and Default Studies ».

La concentration des émissions de la catégorie investissement sur des qualités de crédit inférieures, conjuguée à une forte augmentation des emprunts, pose la question de savoir si la tendance historique présentée dans le Graphique 2.31 peut se maintenir dans un contexte de resserrement des conditions de crédit. Ce point est particulièrement important compte tenu de l’évolution des caractéristiques des obligations notées BBB au fil du temps. Comme le montre le Graphique 2.32, le taux d’endettement (médian), en moyenne mobile sur trois ans, d’un émetteur non financier noté BBB, était en 2023 supérieur d’environ 44 % (35 %) à son niveau de 2008 dans les économies avancées et de 162 % (229 %) dans les économies émergentes (Partie A). À l’échelle mondiale, la part des obligations notées BBB émises par des sociétés non financières affichant un ratio dette/EBITDA supérieur à 4 était de 42 % en 2023, contre 11 % en 2008 (partie B). En d’autres termes, l’émetteur obligataire moyen noté BBB est aujourd’hui nettement plus endetté qu’il y a 15 ans. Du fait de taux d’intérêt historiquement bas après 2008, les emprunteurs ont pu conserver des capacités de remboursement similaires malgré un taux d’endettement beaucoup plus élevé (voir Graphique 2.20).

Toutefois, sous l’effet des hausses rapides des taux d’intérêt, les coûts du service de la dette vont augmenter, car les entreprises doivent refinancer leurs dettes, alors que les taux et les niveaux d’endettement ne s’ajustent pas automatiquement. Les émetteurs actuellement classés dans la catégorie investissement pourraient par conséquent voir leur capacité d’assurer le service de leur dette diminuer et atteindre un niveau que l’on observe plus habituellement chez les émetteurs de la catégorie spéculative. En outre, la suspension des mesures d’apport de liquidités par les banques centrales pourrait avoir un impact particulièrement important sur les émetteurs dont la note se situe juste au-dessus du seuil de la catégorie investissement. Il semble en effet que ces entreprises aient tout particulièrement bénéficié des programmes d’assouplissement quantitatif qui leur ont permis d’obtenir des coûts de financement subventionnés pour leurs émissions obligataires (Acharya et al., 2022[22]).

Graphique 2.32. Évolution des caractéristiques des émetteurs notés BBB (sociétés non financières)

Note : le ratio d’endettement correspond au ratio dette/EBITDA, winsorisé à 1 %. Hors émetteurs affichant un EBITDA négatif.

Source : données issues de la série sur les marchés de capitaux de l’OCDE, LSEG, voir Annexe 2.A pour plus d’informations.

2.4.3. Composition des fonds et dynamique de vente à prix bradés

Il convient d’examiner la part croissante des émissions moins bien notées en liaison avec la participation accrue des fonds d’investissement sur les marchés des obligations d’entreprise. Du fait de leur structure qui permet aux investisseurs de revendre leurs parts à bref délai, les fonds d’investissement à capital variable gèrent généralement leurs portefeuilles de manière plus active que de nombreux autres investisseurs institutionnels. D’autres investisseurs obligataires importants, comme les fonds de pension et les compagnies d’assurance, ont tendance à suivre des stratégies d’achat à long terme. La présence plus forte des fonds d’investissement sur les marchés des obligations d’entreprise influe par conséquent sur la dynamique du marché.

La partie A du Graphique 2.33 fait clairement apparaître la prédominance croissante des fonds obligataires et apporte à cet égard un éclairage différent. Il montre que la proportion des fonds à revenu fixe dans le total des nouveaux fonds (fonds en actions et fonds de matières premières compris) a régulièrement augmenté au fil du temps. En moyenne, entre 2000 et 2008, les fonds à revenu fixe ont représenté 14 % de l’ensemble des nouveaux fonds chaque année, contre 18 % entre 2009 et 2023. Au sein de cette catégorie de fonds qui occupent une place de plus en plus prépondérante, la part des fonds axés sur les obligations d’entreprise a également augmenté. Les fonds qui affichent une exposition nette supérieure à 25 % aux obligations d’entreprise, critère plus précis que celui utilisé à la section 2.2.2, sont passés de 26 % de l’ensemble des nouveaux fonds à revenu fixe en 2010 à 45 % en 2021, avant de retomber à 28 % en 2023. Comme la part des fonds à revenu fixe dans l’ensemble des nouveaux fonds ne baisse pas dans les mêmes proportions, cette forte diminution est probablement due, tout au moins en partie, au fait que les titres souverains affichent des rendements plus attractifs et, par conséquent, à un changement dans la composition des investissements des fonds à revenu fixe.

Pour ce qui est des fonds types (ceux avec une exposition nette minimum de 1 % aux obligations d’entreprise), la part moyenne pondérée en fonction de la valeur des titres notés BBB (y compris les titres non émis par des entreprises) est de 18 % pour les fonds à capital variable et de 26 % pour les ETF, les titres notés BBB- représentant dans chaque cas 6 points de pourcentage (partie B). Cela représente une exposition nette totale de 1 700 milliards USD à des titres notés BBB, dont 519 milliards USD concernent des titres notés BBB- (partie C).

Graphique 2.33. Croissance des fonds investis en obligations d’entreprise et exposition aux titres notés BBB, au niveau mondial

Note : dans la partie A, la ligne bleu foncé représente le nombre de fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est supérieure à 25 %, en pourcentage du total des nouveaux fonds à revenu fixe. La ligne bleu clair représente la part des fonds à revenu fixe dans le total des nouveaux fonds (y compris les fonds en actions et de matières premières). Dans les parties B et C, seuls les fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 % (en pourcentage du portefeuille total) sont pris en compte. Les données concernent tous les titres notés, y compris les titres souverains.

Source : Morningstar Direct, voir Annexe 2.A pour plus de détails.

La forte exposition des fonds à capital variable aux obligations d’entreprise peut entraîner des conséquences sur le fonctionnement général du marché. Cette situation résulte d’un décalage de liquidité entre les fonds et les instruments sous-jacents. Tout comme la transformation des liquidités d’une banque, elle reste gérable pour autant que les flux ne soient pas trop asymétriques ni trop importants. Toutefois, en cas de remboursements importants sur une courte période, les fonds pourraient devoir vendre des quantités considérables d’obligations d’entreprise sur un marché secondaire relativement peu liquide, ce qui pourrait déclencher une dynamique de vente à prix bradés. En raison de la nature de l’instrument et de ses principaux investisseurs, les marchés des obligations d’entreprise n’ont jamais été particulièrement liquides et certains éléments tendent à montrer que la liquidité s’est détériorée depuis la crise financière de 2008 (Friewald, Jankowitsch et Subrahmanyam, 2012[23]). Au cours de la même période, l’exposition des fonds aux obligations d’entreprise a considérablement augmenté.

L’exposition à des titres notés BBB est importante au regard de cette discussion. Le fait qu’ils se situent à la frontière entre la catégorie investissement et la catégorie spéculative les rend en effet particulièrement susceptibles d’être concernés par une éventuelle dynamique de vente à prix bradés. Il est donc essentiel de connaître l’identité des fonds qui détiennent ces titres. Sur les 1 700 milliards USD d’exposition nette totale aux titres notés BBB, 37 % (627 milliards USD) correspondent à des fonds dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est supérieure à 75 % (Graphique 2.34). Cette concentration est particulièrement prononcée parmi les ETF, dont 63 % (155 milliards USD) du total des expositions à des titres notés BBB est détenu par des fonds dont l’exposition aux obligations d’entreprise est supérieure à 75 % (partie B).

La dynamique des ETF diffère quelque peu de celle des autres fonds à capital variable. En raison de leur illiquidité relative, l’écart entre le prix des parts et les actifs sous-jacents peut varier considérablement pour les ETF investis en obligations (davantage que pour les ETF investis en actions), qui sont de fait gérés de manière active à travers le choix des titres qui constituent les paniers de création et de rachat. Cette souplesse permettrait aux ETF obligataires de neutraliser la dynamique de vente à prix bradés, en absorbant les tensions sur la liquidité au niveau des parts détenues dans les ETF plutôt qu’au niveau des obligations sous-jacentes, contribuant ainsi à stabiliser les marchés (Shim et Todorov, 2021[24]). Dans un scénario de ventes massives, les promoteurs pourraient modifier la composition du panier de rachat en y incluant des obligations plus risquées et moins liquides, de sorte que les parts des investisseurs qui ne sont pas vendeurs seraient de meilleure qualité, ce qui atténuerait les pressions à la vente (Todorov, 2021[25]).

Graphique 2.34. Exposition des fonds d’investissement à des titres notés BBB au niveau mondial selon leur exposition aux obligations d’entreprise, début 2024

Note : seuls les fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 % (en pourcentage du portefeuille total) sont pris en compte. Les données concernent tous les titres notés, y compris les titres souverains.

Source : Morningstar Direct, voir Annexe 2.A pour plus de détails.

Toutefois, les effets que les ETF obligataires pourraient avoir sur la stabilité financière sont encore sujets à débat. Contrairement à ce qui précède, certains estiment également que si les ETF contribuent d’une manière générale à améliorer la liquidité des obligations d’entreprise, ils ont en réalité tendance à dégrader les conditions de liquidité en temps de crise (Koont et al., 2022[26]). Le marché des ETF a bien résisté lors du dernier épisode de tensions de grande ampleur au début de l’année 2020 ; on ne sait pas toutefois dans quelle mesure cela est dû aux programmes d’achat d’actifs des banques centrales, ou aux dispositifs d’absorption des chocs incorporés aux ETF eux-mêmes.

Le sous-ensemble de fonds dont le mandat de gestion prévoit des limitations en fonction de la note de crédit est particulièrement concerné par le risque de vente à prix bradés. Pour évaluer l’exposition de ce segment de marché, on examine un échantillon de 1 161 fonds spécifiquement classés dans la catégorie investissement (Graphique 2.35). Ces fonds pèsent 3 200 milliards USD, soit 35 % de la valeur totale des fonds dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 %. À l’instar d’autres fonds à revenu fixe, ces fonds ont également accru leur exposition aux obligations d’entreprise ces dernières années (Partie A). Leur exposition nette pondérée en fonction de la valeur aux titres notés BBB représente 21 % du portefeuille total, ce qui correspond à 651 milliards USD, dont 196 milliards USD sont des titres notés BBB-, la note la plus basse de la catégorie investissement (partie B). Si ces obligations devaient être dégradées dans la catégorie des titres spéculatifs, une part importante devrait probablement être vendue. Ce sous-ensemble ne représente toutefois qu’une part relativement faible du marché mondial des obligations d’entreprise de catégorie spéculative, qui s’élevait à 3 400 milliards USD fin 2023.

Graphique 2.35. Exposition des fonds de titres de catégorie investissement aux obligations d’entreprise et aux titres notés BBB, au niveau mondial

Note : sur la base de 1 161 fonds pour lesquels la catégorie Morningstar Institutionnel comporte la mention « investissement » ou une sous-catégorie « BBB » ou « A » par exemple. Seuls les fonds à revenu fixe dont l’exposition nette aux obligations d’entreprise est d’au moins 1 % (en pourcentage du portefeuille total) sont pris en compte. Les données concernent tous les titres notés, y compris les titres souverains.

Source : Morningstar Direct, voir Annexe 2.A pour plus de détails.

Annexe 2.A. Méthodologie de collecte et de classification des données

A. Données relatives aux obligations d’entreprise

Les données concernant les émissions d’obligations d’entreprise reposent sur des calculs de l’OCDE effectués à partir de données obtenues auprès de LSEG qui publie des données sur les nouvelles émissions d’obligations d’entreprise au niveau mondial souscrites par une banque d’investissement. La base de données contient des données détaillées pour chaque émission d’obligations d’entreprise, notamment l’identité, la nationalité et le secteur d’activité de l’émetteur, la nature, la structure des taux d’intérêt, la date d’échéance et la catégorie de notes de l’obligation, le montant et l’utilisation des produits tirés de l’émission.

Les obligations convertibles, les opérations enregistrées, mais non réalisées, les actions privilégiées, les obligations sukuk, les obligations ayant une échéance initiale inférieure ou égale à 1 an ou dont la taille de l’émission est inférieure à 1 million USD sont exclues du jeu de données. La classification sectorielle est établie à partir de The Reference Data Business Classification (TRBC) de LSEG. Les montants annuels initialement collectés en USD ont été ajustés en fonction de l’IPC des États-Unis de 2023.

Comme une fraction importante des obligations est émise à l’échelle internationale, il n’est pas possible de rattacher ces émissions à un pays donné. Pour cette raison, la ventilation par pays est effectuée sur la base du pays dans lequel l’émetteur est domicilié. La classification marchés avancés/émergents est fondée sur la classification des pays établie par le FMI.

Données relatives aux notes de crédit

Les données qui concernent les notes de crédit reposent sur des calculs de l’OCDE effectués à partir de données obtenues auprès de LSEG qui publie des informations sur les notes octroyées par trois grandes agences de notation : S&P, Fitch et Moody’s. Pour chaque obligation pour laquelle des informations sur la note figurent dans le jeu de données, une valeur de 1 est attribuée à la note correspondant à la qualité de crédit la plus basse (C) et de 21 à la note correspondant à la qualité de crédit la plus élevée (AAA pour S&P et Fitch et Aaa pour Moody’s). La catégorie spéculative compte onze échelons : cinq notes C (C à CCC+) et six notes B (B- à BB+). La catégorie investissement en compte dix : trois notes B (BBB- à BBB+) et sept notes A (A- à AAA).

Si une émission fait l’objet d’une notation par plusieurs agences, on utilise la moyenne des notes attribuées. Pour certaines émissions figurant dans le jeu de données, il n’existe en revanche aucune note. En pareil cas, on utilise la note moyenne de toutes les obligations émises par le même émetteur au cours de la même année (t). Lorsque l’émetteur n’a émis aucune obligation notée au cours de l’année t, on examine dans l’ordre l’année t-1 et l’année t-2. Cette procédure permet d’accroître le nombre d’obligations notées dans le jeu de données et améliore ainsi la représentativité de l’analyse fondée sur la note. Lorsqu’on distingue les obligations de catégorie investissement des obligations de catégorie spéculative, la note finale est arrondie à l’entier le plus proche et les émissions dont la notation arrondie est inférieure ou égale à 11 sont classées dans la catégorie spéculative.

Données relatives aux remboursements anticipés

Pour calculer l’encours d’obligations d’entreprise au cours d’une année, il faut déduire de ce montant les obligations remboursées par anticipation. Les données concernant les remboursements par anticipation sont obtenues auprès de LSEG WS et concernent les obligations ayant fait l’objet d’un remboursement anticipé en raison d’une procédure de distribution finale consécutive à une défaillance, de l’exercice d’une option d’achat ou d’une option de vente, d’une liquidation ou d’un rachat. Les données sur les remboursements anticipés sont fusionnées avec les données du marché primaire des obligations d’entreprise au moyen des numéros internationaux d’identification des titres (ISIN).

Données relatives aux fonds d’investissement

Les analyses concernant les fonds d’investissement reposent sur des calculs de l’OCDE réalisés à partir de données sur les fonds obtenues auprès de Morningstar Direct. Le jeu de données de référence est réparti en neuf grandes catégories (Morningstar Global Broad Category Group) correspondant à la principale classe d’actifs du fonds : Allocation, Alternatives, Matières premières, Convertibles, Actions, Obligations, Divers, Monétaires et Immobilier. Au total, le jeu de données comprend plus de 281 000 fonds à capital variable et ETF, dont 48 805 fonds à revenu fixe. La taille des fonds est exprimée en USD courants. Seules les observations se rapportant aux fonds dont la taille est communiquée en 2023 ou plus tard sont prises en compte dans l’analyse.

Pour recenser les fonds qui interviennent sur le marché des obligations d’entreprise, un sous-ensemble des fonds à revenu fixe ayant une exposition nette d’au moins 1 % (exposition longue moins exposition courte, en pourcentage du portefeuille total) aux obligations d’entreprise est créé à partir de la dernière observation disponible (généralement début 2024). Pour ce sous-ensemble, on crée un ensemble de données chronologiques distinct qui comprend des informations sur l’exposition nette aux obligations d’entreprise au fil du temps (à partir de 2005) ainsi que sur la composition des actifs de chaque fonds pondérés en fonction de la note de crédit (à partir de 2017). Les données relatives aux notes concernent le portefeuille dans son ensemble et pas uniquement les titres d’entreprises. Les notes doivent émaner d’agences de notation agréées par les autorités de réglementation.

L’exposition des fonds aux obligations d’entreprise et aux titres notés BBB s’observe sur une base mensuelle. Cependant, tous les fonds ne disposent pas de données mensuelles relatives à leur exposition. On utilise par conséquent une exposition annuelle moyenne (fondée sur les observations disponibles en fin de mois), calculée pour chaque fonds. Pour calculer l’exposition du fonds en valeurs absolues, la taille totale du fonds est multipliée par cette exposition.

Pour les analyses ventilées par région, on utilise la zone d’investissement du fonds. Il s’agit de la zone géographique dans laquelle le fonds concentre ses investissements et qui peut être différente du lieu où le fonds est domicilié ou de la région où le fonds est actif.

Fonds de titres de catégorie investissement

Les fonds à revenu fixe qui investissent essentiellement dans des titres de catégorie investissement sont identifiés à l’aide de la catégorie Morningstar Institutionnel. Les catégories suivantes sont incluses : A, BBB, Investissement à moyen terme (4-6), Investissement à long terme (>6), Investissement à court/moyen terme (2.5-4), Investissement à court terme et Investissement à très court terme. Ce sous-ensemble comprend un total de 1 161 fonds.

C. Informations relatives au bilan des entreprises non financières cotées

Les informations présentées dans la section 2.3.2 et l’Encadré 2.2 de ce chapitre reposent sur les calculs de l’OCDE effectués à l’aide des données de LSEG Datastream. Le jeu de données de panel déséquilibré contient des informations sur les états financiers des sociétés non financières cotées en bourse entre 2005 et 2022 et couvre 57 053 entreprises enregistrées dans 138 pays.

Nettoyage des données financières

Le jeu de données financières brutes comprend plusieurs observations entreprise-année lorsqu’une entreprise établit des rapports à différentes fins. Pour constituer un panel qui comporte une seule observation entreprise-année, on procède de la manière suivante :

• Les sociétés financières sont exclues.

• Les entreprises cotées sur un marché de gré à gré sont exclues.

• Les entreprises classées comme des « fonds communs de placement » ou des « organismes de placement collectif » sont exclues.

• Les entreprises retirées de la cote sont exclues.

• Dans le cas des entreprises ayant fait l’objet de plusieurs observations, mais pour lesquelles il existe plusieurs pays de domiciliation, le pays de domiciliation effective est vérifié manuellement afin d’éliminer les doublons.

• Les états financiers utilisés couvrent une période de 12 mois.

• Les entreprises dont au moins une observation fait apparaître des actifs négatifs ou des immobilisations négatives sont exclues.

• Les données financières sont corrigées des variations annuelles de l’indice des prix à la consommation (IPC) des États-Unis et sont exprimées en USD de 2022.

Classification par branche d’activité

LSEG Datastream utilise la classification TRBC (Reference Data Business Classification) de LSEG. Les secteurs économiques pris en compte dans l’analyse sont les suivants :

 

Secteur économique TRBC
Matériaux de base	Santé
Produits de consommation cyclique	Industrie
Produits de consommation non cyclique	Activités immobilières
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D. Test de résistance

Le test de résistance vise à évaluer l’impact de la hausse des coûts de financement sur la capacité des entreprises de couvrir leurs charges d’intérêts à l’aide de leurs bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (EBITDA). Pour réaliser ce test, on utilise les données des états financiers de 30 969 sociétés non financières pour l’année 2022.

On part du principe que seul le coût de financement change et que tous les autres postes du bilan et du compte de résultat demeurent inchangés.

Le coût de financement de référence a été établi à partir des données de 2022 et est calculé sur la base du rapport entre les charges d’intérêts et la dette financière.

Deux scénarios sont envisagés :

1. Scénario 1 : augmentation des coûts de financement de 200 points de base par rapport au scénario de référence.

2. Scénario 2 : augmentation des coûts de financement de 400 points de base par rapport au scénario de référence.

Pour chaque scénario, les nouvelles prévisions de charges d’intérêts sont calculées en multipliant le niveau actuel de la dette financière par le coût prévisionnel de financement. Le ratio de couverture des intérêts est ensuite calculé en divisant les bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement par les nouvelles charges d’intérêts estimées. Les entreprises dont le ratio de couverture des intérêts est inférieur à 2 sont considérées comme des entreprises à risque.

Références

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[11] Bank of England (2022), Monetary Policy Summary and minutes of the Monetary Policy Committee meeting ending on 2 February 2022, https://www.bankofengland.co.uk/-/media/boe/files/monetary-policy-summary-and-minutes/2022/february-2022.pdf.

[9] Banque du Japon (2022), Statement on Monetary Policy, https://www.boj.or.jp/en/mopo/mpmdeci/mpr_2022/k220318a.pdf.

[10] Banque du Japon (2022), Statement on Monetary Policy, https://www.boj.or.jp/en/mopo/mpmdeci/mpr_2022/k221220a.pdf.

[8] BCE (s.d.), Asset purchase programmes, https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/app/html/index.en.html (consulté le  janvier 2024).

[7] BCE (s.d.), Pandemic emergency purchase programme (PEPP), https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/pepp/html/index.en.html (consulté le  janvier 2024).

[21] Çelik, S., G. Demirtaş et M. Isaksson (2020), Corporate Bond Market Trends, Emerging Risks and Monetary Policy, https://www.oecd.org/corporate/ca/Corporate-Bond-Market-Trends-Emerging-Risks-Monetary-Policy.pdf.

[13] Federal Reserve Bank of New York (s.d.), Secondary Market Corporate Credit Facility, https://www.newyorkfed.org/markets/secondary-market-corporate-credit-facility (consulté le  janvier 2024).

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[26] Koont, N. et al. (2022), Steering a Ship in Illiquid Waters: Active Management of Passive Funds, https://www.nber.org/system/files/working_papers/w30039/w30039.pdf.

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[18] Lo Duca, M., G. Nicoletti et A. Martinez (2014), Global Corporate Bond Issuance: What Role for US Quantitative Easing?, https://doi.org/doi.org/10.2139/ssrn.2397787.

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[3] OCDE (2021), The rise of non-bank financial intermediation in real estate finance: Post COVID-19 trends, vulnerabilities and policy implications, Éditions OCDE, Paris, https://www.oecd.org/daf/fin/financial-markets/The-rise-of-non-bank-financial-intermediation-in-real-estate-finance.pdf.

[4] Palomino, F. et al. (2019), The information in interest coverage ratios of the US nonfinancial corporate sector, https://www.federalreserve.gov/econres/notes/feds-notes/information-in-interest-coverage-ratios-of-the-us-nonfinancial-corporate-sector-201901.

[6] S&P (2023), Default, Transition, and Recovery: 2022 Annual Global Corporate Default And Rating Transition Study, https://www.spglobal.com/ratings/en/research/articles/230425-default-transition-and-recovery-2022-annual-global-corporate-default-and-rating-transition-study-12702145 (consulté le  janvier 2023).

[20] S&P Global Ratings (2023), Default, Transition, and Recovery: 2022 Annual Global Corporate Default And Rating Transition Study, https://www.spglobal.com/ratings/en/research/articles/230425-default-transition-and-recovery-2022-annual-global-corporate-default-and-rating-transition-study-12702145.

[24] Shim, J. et K. Todorov (2021), ETFs, illiquid assets, and fire sales, https://www.bis.org/publ/work975.pdf.

[25] Todorov, K. (2021), The anatomy of bond ETF arbitrage, https://www.bis.org/publ/qtrpdf/r_qt2103d.pdf.

[17] Todorov, K. (2020), Quantify the quantitative easing: Impact on bonds and corporate debt issuance, pp. 340-358, https://doi.org/doi.org/10.1016/j.jfineco.2019.08.003.

[2] Trepp (2023), Trepp CMBS Delinquency Report, CMBS Research, https://www.trepp.com/hubfs/Trepp%20Delinquency_Report%20June%202023.pdf?hsCtaTracking=5d28d466-3d72-4d81-bb6d-c700ff3c607b%7Cc4b810e3-d869-4647-a4d8-1aa55e62943c.

[14] US Federal Reserve System (s.d.), The Federal Reserve’s response to the financial crisis and actions to foster maximum employment and price stability, https://www.federalreserve.gov/monetarypolicy/bst_crisisresponse.htm (consulté le  janvier 2024).

Notes

← 1.  L’identifiant sectoriel utilisé dans cette analyse (secteur économique TRBC) classe les entreprises exerçant des activités immobilières dans la catégorie des sociétés financières. Elles représentent une part importante des titres spéculatifs émis par des sociétés financières chinoises entre 2010 et 2014.

← 2.  Bien que l’intention soit de conserver ces obligations jusqu’à leur date d’échéance, la Banque d’Angleterre pourra envisager de participer au cas par cas à des appels d’offres pour les céder sur le marché.