L’essor des technologies tridimensionnelles soulève des questions quant aux possibilités, aux risques et aux incidences des environnements immersifs pour les entreprises, les pouvoirs publics, les individus et la société. Ce chapitre fait la lumière sur les environnements numériques immersifs et sur un médium particulier – la réalité virtuelle – compte tenu de sa capacité avérée à se prêter à un déploiement à grande échelle. On y décrit les technologies et les caractéristiques de la réalité virtuelle, ainsi que les avantages, les possibilités, les inconvénients et les risques qu’elle présente. L’analyse de plusieurs cas concrets d’utilisation permet d’aller au-delà des effets de mode et de l’engouement médiatique qu’elle suscite, pour comprendre véritablement dans quels domaines elle se révèle, ou non, d’une grande utilité. Le chapitre examine par ailleurs le cadre « DICE », qui peut constituer un guide intéressant dans le contexte de l’utilisation de la réalité virtuelle pour des expériences qui seraient, dans le monde physique, dangereuses, impossibles, contre-productives ou onéreuses. Parmi les principaux enjeux stratégiques liés à la réalité virtuelle et aux technologies immersives figurent les défis inhérents à la protection de la vie privée, en particulier ceux associés aux données de suivi, et à la sécurité, notamment dans le cas des enfants et des véhicules mobiles.
Perspectives de l’économie numérique de l’OCDE 2024 (Volume 1)
Chapitre 4. La réalité virtuelle, ses possibilités et ses risques
Copier le lien de Chapitre 4. La réalité virtuelle, ses possibilités et ses risquesAbstract
Principaux constats
Copier le lien de Principaux constatsLes caractéristiques uniques de la réalité virtuelle supposent d’opérer des arbitrages
Les expériences de réalité virtuelle peuvent être autonomes, sociales ou industrielles.
La réalité virtuelle consiste en un cycle de suivi, de rendu et d’affichage, processus continu qui se déroule en temps réel. Le suivi du corps, grâce auquel les scènes réagissent naturellement aux mouvements corporels, donne le « sentiment de présence » et distingue la réalité virtuelle des autres environnements immersifs.
La réalité virtuelle suppose d’opérer des arbitrages liés à un certain nombre de caractéristiques technologiques, dont le niveau de suivi, le champ de vision, le champ de regard, le taux de rafraîchissement, la latence et la qualité de l’image.
La réalité virtuelle se prête particulièrement aux expériences qui seraient, dans le monde réel, dangereuses, impossibles, contre-productives ou onéreuses (DICE)
L’utilisation de la réalité virtuelle – plutôt que des technologies bidimensionnelles – devrait être privilégiée dans les domaines dans lesquels les travaux de recherche ont montré qu’elle était porteuse de transformations et constituait manifestement la meilleure solution.
La réalité virtuelle s’applique avant tout aux expériences dites « DICE » (pour Dangerous, Impossible, Counterproductive, Expensive), telles que la formation des chirurgiens et des pompiers, la réadaptation médicale (par exemple pour les victimes d’accidents vasculaires cérébraux) et les expériences instinctives et perceptives (par exemple l’exploration spatiale).
Cinq domaines s’inscrivent parfaitement dans le cadre DICE et ont une capacité avérée à se prêter à un déploiement à grande échelle : l’enseignement de l’empathie ; la réadaptation médicale ; les interventions destinées à améliorer la santé mentale ; la formation en entreprise ; et les jumeaux numériques.
Il est essentiel de tenir compte dès le départ des inconvénients et des risques de la réalité virtuelle
Les expériences de réalité virtuelle peuvent être incroyables, mais si elles sont suffisamment puissantes pour altérer le bien-être psychologique et l’empathie à l’égard d’autres personnes et d’autres cultures, il est inévitable qu’elles présentent également des inconvénients et des risques.
Les cinq principaux inconvénients et risques sont liés aux aspects suivants : la protection de la vie privée, notamment pour ce qui est du suivi des mouvements du corps ; le développement cognitif et le comportement des enfants ; le mal des simulateurs ; la distraction au volant ; et l’utilisation excessive et la dépendance.
Les données de suivi – indispensables à toute expérience de réalité virtuelle – permettent également de créer et de partager des profils d’utilisateur très détaillés, ce qui induit des risques quant à la protection de la vie privée.
La combinaison de cadres d’action existants dans le domaine du numérique et de nouvelles stratégies façonnera un avenir immersif positif
Dans les pays ayant répondu au questionnaire établi pour l’édition 2024 des Perspectives de l’économie numérique, l’action des pouvoirs publics en matière de réalité virtuelle et de technologies immersives est centrée sur la promotion du secteur national de la réalité virtuelle, mais commence à s’étendre à des secteurs spécifiques (tels que celui de l’éducation).
Certains pays entreprennent de définir des « droits » et des « principes » liés à la réalité virtuelle et aux technologies immersives.
Dans la mesure où il n’existe aucun moyen d’« exercer son option de retrait » ou de « rester incognito » dans la réalité virtuelle, de nouvelles approches, au-delà des modèles traditionnels fondés sur le consentement, devront être mises en place pour protéger la vie privée.
Une attention particulière doit être portée à la sécurité mentale et physique dans le cadre de la réalité virtuelle, en particulier pour ce qui concerne les enfants et les véhicules mobiles ; la sécurité par défaut peut jouer un rôle important à cet égard.
Les entreprises spécialisées dans la réalité virtuelle ont commencé à élaborer des lignes directrices, notamment pour les expériences de réalité virtuelle sociale.
À mesure que les environnements numériques évoluent, passant de formats essentiellement « plats » à des environnements tridimensionnels (3D) qui réagissent aux mouvements du corps des utilisateurs, les questions relatives aux possibilités, aux risques et aux incidences de ces mondes immersifs pour les entreprises, les pouvoirs publics, les individus et la société deviennent de plus en plus pressantes. Les applications proposées dans des environnements immersifs couvrent un large éventail de secteurs, du divertissement à la production manufacturière, en passant par l’éducation, les soins de santé, la construction, les services publics ou la défense (Kim, 2021[1] ; Marr, 2021[2]). Bien que les technologies immersives existent depuis de nombreuses années, la façon dont elles se combinent, l’éventail de nouvelles applications et la baisse des coûts créent un sentiment d’urgence chez les décideurs (MIC, 2022[3]).
Plusieurs termes et expressions décrivent les environnements immersifs : réalité augmentée, réalité mixte, réalité étendue, métavers, Web 3.0, ou encore réalité virtuelle. Avec la réalité augmentée, parfois appelée réalité mixte, les utilisateurs voient et entendent le monde réel, auquel s’ajoute une couche numérique. Google Glass en est l’un des premiers exemples. Cette paire de lunettes laisse passer la lumière du monde extérieur, tandis qu’à travers une petite fenêtre située dans une partie du champ de vision d’un œil, l’utilisateur peut voir des images, du texte ou des vidéos en surimpression sur le monde réel. Dans les systèmes plus perfectionnés, tels que Vision Pro d’Apple, HoloLens de Microsoft ou les casques de Magic Leap, les objets peuvent être rendus de manière stéréoscopique. En d’autres termes, chaque œil reçoit une image provenant du point de vue approprié pour créer de la profondeur, et les objets sont enregistrés spatialement dans une pièce réelle (Miller et al., 2019[4]). L’utilisation la plus populaire de la réalité augmentée consiste à regarder une vidéo filmée en temps réel par la caméra d’une tablette ou d’un téléphone bidimensionnel (2D) et sur laquelle est superposée une image 2D (comme dans le jeu vidéo Pokémon Go, par exemple) (Lee et al., 2022[5]).
La réalité étendue est une expression relativement nouvelle utilisée pour désigner les différentes technologies immersives existantes – réalité virtuelle, réalité augmentée et réalité mixte – ainsi que les technologies connexes qui pourraient voir le jour. Le terme « métavers » (parfois appelé Web 3.0) désigne l’architecture globale qui recouvre la réalité étendue, la technologie des chaînes de blocs, ainsi que des mondes virtuels comprenant des biens immobiliers, de la monnaie et des plateformes pour organiser des événements et des activités. Ce terme est large, mal défini et galvaudé. Apparu tout d’abord dans l’univers de la science-fiction, ce concept orienté vers l’avenir a ensuite été adopté par les développeurs de jeux vidéo et le monde universitaire (Ball, 2022[6]). Il sera amené à évoluer au fur et à mesure du développement et de l’expansion des technologies.
Ce chapitre est centré sur un médium immersif particulier – la réalité virtuelle – car il s’agit du seul environnement immersif à présenter une capacité avérée à se prêter à un déploiement à grande échelle. En 2022, environ 9 millions de casques de réalité virtuelle ont été vendus dans le monde (contre 260 000 casques de réalité augmentée) (Ubrani, 2023[7]). La quasi-totalité de ces casques ont été commercialisés par des entreprises dont les produits et services liés aux médias sociaux constituent la principale source de revenus (80 % par Meta, 10 % par ByteDance et 10 % par d’autres entreprises). La réalité virtuelle offre une expérience plus proche du réel que médiée, tant sur le plan perceptif que psychologique. Elle suscite un « sentiment de présence », c’est-à-dire la sensation pour l’utilisateur que l’expérience est « réelle » (Sanchez-Vives et Slater, 2005[8]).
Ce chapitre expose des cas d’utilisation de la réalité virtuelle qui ont déjà démontré leur capacité à se prêter à un déploiement à grande échelle et à générer un retour sur investissement, et laisse de côté les cas récemment surmédiatisés (par exemple les investissements immobiliers dans les mondes virtuels payés en crypto-monnaies) (Tangermann, 2023[9]). On commence par y expliquer ce qu’est la réalité virtuelle ainsi que ses caractéristiques technologiques et autres. On y décrit ensuite les avantages, les possibilités, les inconvénients et les risques qu’elle présente, avant de présenter des cas concrets d’utilisation dans un certain nombre de domaines. Le chapitre se termine par un examen des enjeux stratégiques liés à la réalité virtuelle.
Comprendre la réalité virtuelle
Copier le lien de Comprendre la réalité virtuelleLes expériences de réalité virtuelle autonomes se vivent souvent par l’intermédiaire d’applications1. Dans la réalité virtuelle autonome, une seule personne « réelle » se trouve dans l’environnement immersif à un moment donné, que ce soit pour détruire des cubes flottants à l’aide de sabres laser ou pour se rendre dans l’archipel de Palau afin de comprendre les effets néfastes du changement climatique sur les récifs coralliens. À cela s’ajoutent d’autres exemples, tels que le jeu vidéo de tir encensé par la critique, Half Life Alyx, ou des applications à plus petit budget dans lesquelles l’utilisateur peut faire l’expérience de l’empathie en vivant dans la peau d’un avatar qui n’a pas la même identité que lui. Meta propose des expériences de réalité virtuelle via l’application Meta Quest, tandis que Sony dispose de sa propre plateforme accessible aux plus de 100 millions de propriétaires de consoles PlayStation (à condition qu’ils acquièrent le casque de réalité virtuelle de la marque).
Deuxième catégorie d’expériences, les plateformes de réalité virtuelle sociale permettent aux utilisateurs, par le biais d’avatars, d’interagir entre eux et de créer et vivre ensemble des scènes de réalité virtuelle. Par exemple, dans VRChat, ils peuvent créer un monde 3D personnalisé, incarner un avatar qui peut leur ressembler (ou non) et partager des expériences virtuelles avec d’autres personnes qui portent également un casque. Les utilisateurs peuvent ainsi faire une partie de golf miniature ou participer à un karaoké. Sur ces plateformes, les utilisateurs rencontrent de nouvelles personnes, nouent des relations et bâtissent des communautés. On estime qu’Horizon Worlds, l’application de réalité virtuelle sociale de Meta, comptait au second semestre 2022 environ 200 000 utilisateurs mensuels actifs, interagissant dans le cadre de plus de 10 000 expériences virtuelles distinctes (Horwitz, Rodriguez et Bobrowsky, 2022[10]).
La troisième catégorie d’expériences a trait à l’utilisation de la réalité virtuelle dans l’industrie, avec des cas d’utilisation interentreprises impliquant des solutions immersives. Par exemple, les technologies de réalité virtuelle peuvent permettre aux fabricants d’aller plus loin que les « jumeaux numériques » – définis au sens large comme une version virtuelle dynamique d’un site ou d’un objet physique (Jones et al., 2020[11]). Ils peuvent ainsi voir comment un produit potentiel fonctionnerait dans un contexte réaliste, avant de le fabriquer physiquement. Le concept de jumeaux numériques fondés sur la réalité virtuelle est utilisé dans différents domaines, notamment pour la conception d’équipements complexes, pour des environnements très détaillés d’usines et de villes, ainsi que pour la médecine de précision et l’agriculture numérique (Marr, 2021[2]). On retrouve des cas d’utilisation dans un large éventail de secteurs. Cependant, jusqu’à présent, ils se limitent à des applications à forte valeur et hautement personnalisées (telles que la conception de moteurs à réaction, d’installations industrielles et de centrales électriques) (Marr, 2021[2]).
La réalité virtuelle repose sur un cycle continu de suivi, de rendu et d’affichage
Copier le lien de La réalité virtuelle repose sur un cycle continu de suivi, de rendu et d’affichageLa réalité virtuelle repose sur un cycle de suivi, de rendu et d’affichage, qui se déroule en continu et en temps réel (Blascovich et Bailenson, 2011[12]). Le cycle commence par le suivi : des capteurs détectent les mouvements de l’utilisateur et les traduisent en données qui servent à mettre à jour le contenu de la réalité virtuelle. Par le passé, une diversité de capteurs, aussi bien mécaniques que magnétiques, étaient utilisés, mais aujourd’hui le suivi se fait principalement à l’aide de systèmes de vision par ordinateur. Ces systèmes comprennent des caméras intégrées au casque, capables de déterminer avec précision, rapidité (c’est-à-dire avec une faible latence) et à intervalles fréquents (c’est-à-dire avec un taux de rafraîchissement élevé) où regarde l’utilisateur et comment son corps bouge, en filmant en permanence la pièce autour de lui. Les informations de suivi sont essentielles car le système doit savoir où une personne regarde et où son corps se situe pour afficher correctement sa position virtuelle.
Le rendu correspond à la manière dont la réalité virtuelle crée une représentation virtuelle de l’environnement à partir des données de suivi. De la même manière que le système GPS d’une voiture stocke une carte, l’ordinateur sur lequel s’appuie le système de réalité virtuelle stocke un modèle numérique 3D du monde virtuel. Par exemple, il peut stocker des scènes telles qu’un salon et les objets qui s’y trouvent ou un récif corallien et les différents coraux qui le composent. En utilisant les informations de suivi et les données du modèle numérique, l’ordinateur met à jour le point de vue de l’utilisateur en effectuant le rendu du monde en 3D à partir de ce point de vue. Dans une expérience de réalité virtuelle mettant en scène un récif corallien sous-marin, par exemple, si l’utilisateur incline la tête et regarde vers le bas, il peut voir des poissons nager en dessous de lui. De même, dans une expérience de réalité virtuelle se déroulant dans une maison, si l’utilisateur tourne physiquement la tête à 180 degrés, il verra le mur arrière de la pièce virtuelle. Chaque fois que l’utilisateur se déplace physiquement, l’équipement de suivi détecte le mouvement, ce qui amène l’ordinateur à effectuer le rendu du monde en fonction de ce nouveau point de vue.
Dans les systèmes de réalité virtuelle actuellement commercialisés, ce processus se répète environ 100 fois par seconde. Lorsque le système fonctionne correctement, l’utilisateur vit une expérience fluide, comme s’il se déplaçait dans le monde réel. En effectuant un rendu dynamique de chaque scène en fonction de la position de l’utilisateur, la réalité virtuelle permet d’explorer une scène à l’infini. Dans une expérience mettant en scène un récif corallien, l’utilisateur peut trouver un petit coquillage à la périphérie, s’accroupir et regarder derrière. L’expérience diffère donc des films, qui offrent un seul point de vue (celui du réalisateur qui filme depuis un angle particulier montrant le coquillage), ou encore des jeux vidéo, qui laissent aux utilisateurs la liberté d’explorer différents chemins et objets, mais à condition qu’ils soient liés au scénario du jeu.
Enfin, les systèmes de réalité virtuelle affichent l’environnement virtuel en temps réel ; l’utilisateur peut ainsi l’expérimenter comme s’il était physiquement présent. Cet affichage est généralement assuré grâce à un casque de réalité virtuelle qui fournit une vision stéréoscopique de l’environnement virtuel et un son spatialisé par l’intermédiaire de multiples haut-parleurs synchronisés avec les mouvements de l’utilisateur. Parmi les autres systèmes d’affichage, citons par exemple les ordinateurs portables 3D qui utilisent l’autostéréoscopie lenticulaire pour afficher des modèles 3D, ou les systèmes de projection de type cubes immersifs 3D (Cave Automatic Virtual Environment, ou CAVE), dont la surface d’affichage entoure l’utilisateur.
La réalité virtuelle a évolué depuis la publication, en 1965, d’un article d’Ivan Sutherland intitulé « The Ultimate Display », dans lequel le concept de réalité virtuelle était bien expliqué, mais pas la manière de le mettre en œuvre (Sutherland, 1965[13]). En effet, le potentiel de la réalité virtuelle a radicalement changé au cours des dernières décennies. À l’époque d’I. Sutherland, les casques ne pouvaient pas effectuer le rendu des scènes de manière stéréoscopique ou multicolore. Aujourd’hui, ils peuvent reproduire la façon dont les gens voient et entendent dans le monde réel. Cependant, la qualité des systèmes de réalité virtuelle varie. Un système haut de gamme associé à un casque coûteux, pour afficher les images, et à un (puissant) ordinateur séparé, pour le rendu, offrira une qualité visuelle et sonore nettement supérieure à celle d’un casque de réalité virtuelle autonome meilleur marché qui affiche les images et effectue le rendu simultanément.
Caractéristiques technologiques de la réalité virtuelle
Copier le lien de Caractéristiques technologiques de la réalité virtuelleComme l’ont déjà relevé des universitaires (Cummings et Bailenson, 2016[14]), il n’existe pas de mise en œuvre type de la réalité virtuelle, qui allie plutôt diverses caractéristiques et technologies. En fonction des objectifs à atteindre, la priorité pourra être donnée à l’une ou l’autre de ces caractéristiques.
Le niveau de suivi renvoie au nombre et aux types de degrés de liberté appliqués au suivi dont l’utilisateur fait l’objet dans la réalité virtuelle. On le règle en ajustant la qualité de la méthode d’entrée. Par exemple, un suivi accru des mouvements naturels simule la façon dont le corps bouge, par opposition à une entrée de contrôleur abstraite comme un bouton ou un manche à balai. Il désigne également le nombre de degrés suivis, tels que la position de la tête, des mains, des pieds et les mouvements du visage.
Le suivi de la tête est sans doute la caractéristique la plus importante de la réalité virtuelle (Lanier, 2017[15]). Sans lui, la réalité virtuelle n’est qu’un film en 3D. D’après les travaux de recherche, c’est à cette navigation active dans le cadre de scènes qu’elle doit son efficacité unique (Markowitz et al., 2018[16]). Le suivi des mouvements corporels permet à l’utilisateur de faire bouger ses mains et ses jambes et de se déplacer, et il a été démontré qu’il augmente considérablement le sentiment de présence (Zanbaka et al., 2004[17]). Certaines applications nécessitent plus de suivi que d’autres. Par exemple, la réalité virtuelle utilisée à des fins de réadaptation après un accident vasculaire cérébral requiert un système perfectionné pour suivre avec précision les mouvements des bras et des jambes (voir la sous-section sur la réadaptation médicale).
Le champ de vision est généralement associé à un sentiment de présence et un engagement dans la réalité virtuelle accrus (Hendrix et Barfield, 1996[18]). Il donne une idée de la partie de l’environnement qu’une personne peut voir. On l’augmente généralement en modifiant la taille des écrans à proximité des yeux de l’utilisateur. Cette caractéristique est différente du champ de regard, qui correspond à la zone totale visible. Par exemple, le champ de vision typique d’un casque de réalité virtuelle est une fenêtre de la taille d’une grande feuille de papier tenue à bout de bras. En tournant la tête, on peut généralement déplacer cette fenêtre et examiner les objets et les espaces dans toutes les directions (dans ce cas, le champ de regard est alors de 360 degrés).
Toutefois, le champ de regard est fréquemment réduit. Les créateurs de contenu vidéo en réalité virtuelle passent souvent à un contenu à 180 degrés en limitant le champ de regard pour ne pas effectuer le rendu du contenu qui se trouve au-delà du champ de vision initial de l’utilisateur. Certaines applications ne nécessitent pas un grand champ de vision. Par exemple, dans une conversation en tête-à-tête, la personne qui apparaît de l’autre côté d’un bureau n’occupe pas beaucoup d’espace dans le champ visuel de l’utilisateur. En revanche, les scènes conçues pour susciter l’émerveillement, par exemple un alunissage virtuel, tirent un avantage considérable de la présence spatiale accrue qu’apporte un grand champ de vision (Brown, Bailenson et Hancock, 2023[19]).
Le rendu stéréoscopique consiste à effectuer le rendu d’une scène deux fois de sorte que chaque œil reçoive une image provenant d’une position de caméra virtuelle légèrement différente, comme dans le cas de la vision humaine dans le monde réel. La plupart des concepteurs de réalité virtuelle considèrent que la vision stéréoscopique – c’est-à-dire la perception de la profondeur – est l’une des caractéristiques qui distingue véritablement la réalité virtuelle des autres médiums. Toutefois, la vision stéréoscopique sert avant tout pour les objets proches (situés dans un rayon d’environ six mètres) (Ono et Comerford, 1977[20]). Elle est essentielle pour certains cas d’utilisation, notamment pour des chirurgiens s’entraînant à utiliser des scalpels et des instruments tranchants sur un corps. En revanche, pour les scènes dont le contenu critique est éloigné – par exemple une démonstration du système solaire à visée pédagogique – la perception de la profondeur n’est pas aussi importante.
Le taux de rafraîchissement (soit le nombre de fois où une scène est rendue chaque seconde) et la latence (le temps nécessaire au rendu d’une image en fonction du mouvement suivi) sont des concepts très différents, mais qui fonctionnent de la même manière pour contribuer à l’impact global de la réalité virtuelle. En général, la capacité d’un système de réalité virtuelle à effectuer rapidement le rendu des objets et des scènes accroît le sentiment de présence, et cela se voit plus facilement dans un environnement à latence élevée (Waltemate et al., 2016[21]). Il est important de réduire la latence et d’augmenter le taux de rafraîchissement pour réduire le mal des simulateurs, l’un des principaux inconvénients de la réalité virtuelle (voir la sous-section sur les inconvénients et les risques).
La qualité de l’image dépend de plusieurs caractéristiques technologiques qui contribuent au réalisme, à la fidélité et à la qualité générale des visuels dans la réalité virtuelle. Elle peut être améliorée de différentes façons, notamment en réglant la résolution de l’écran, les taux de scintillement, les types d’éclairage et la qualité du mappage des textures. Améliorer le niveau général de détail augmente également le nombre de polygones, qui fait que les objets ont des parties lisses et ne semblent pas être constitués de blocs.
L’écosystème de la réalité virtuelle est complexe car le port d’un casque qui doit être confortable limite les possibilités technologiques. C’est particulièrement vrai pour la réalité virtuelle autonome qui n’est pas reliée à un ordinateur ou à des caméras externes. Les caractéristiques évoquées plus haut sont nécessairement à somme nulle et les arbitrages sont inévitables.
Le choix du casque a des conséquences. Un casque à haute résolution et à large champ de vision maximisera l’impression visuelle ou l’échelle d’une scène. Toutefois, ces casques affichent généralement une latence élevée. Si les ordinateurs effectuent le rendu de scènes vastes et complexes, ils ne peuvent pas le faire aussi souvent (taux de rafraîchissement plus faible) et cela prend plus de temps (latence plus élevée). Par conséquent, la fidélité visuelle se fait au détriment de la fluidité de l’expérience vécue.
Pour les scènes assorties d’un suivi des mouvements naturels, dans lesquelles les utilisateurs regardent souvent autour d’eux, il convient généralement de privilégier les casques qui maximisent une faible latence et un taux de rafraîchissement élevé, plutôt que la taille et la qualité de l’image (c’est-à-dire le champ de vision et la résolution). Un suivi plus élaboré – par exemple de grands espaces où marcher et un suivi des mains et des pieds pour les auto-avatars – ajoute de la valeur à une scène en termes de sentiment de présence, au détriment de l’échelle et de la facilité d’utilisation. Imaginons 30 élèves qui utilisent la réalité virtuelle dans une salle de classe. Il n’y a pas assez de place pour qu’ils puissent tous se déplacer simultanément avec la réalité virtuelle à l’échelle de la pièce. Les enseignants ont donc tendance à utiliser la réalité virtuelle « 3DOF » (3 degrés de liberté) dont le suivi et le rendu se limitent aux rotations de la tête. Les élèves peuvent alors rester assis sur leur chaise et regarder autour d’eux.
Beaucoup pensent que les limitations matérielles entravent la généralisation de la réalité virtuelle. Pourtant, la plupart des casques de réalité virtuelle coûtent environ deux fois moins cher qu’un smartphone classique. Les chercheurs attribuent plutôt les faibles taux d’adoption au manque de contenu attrayant propre à la réalité virtuelle (par opposition à un écran 2D) (Mado et al., 2022[22]). Alors que tout le monde peut publier assez rapidement un message sur les médias sociaux ou enregistrer une vidéo, il est difficile de créer une scène de réalité virtuelle réussie. En outre, plus le système matériel est complexe, plus il est difficile pour les utilisateurs de le maîtriser et pour les espaces physiques de prendre en charge plusieurs utilisateurs simultanément.
Le toucher et l’odorat sont complexes à rendre dans la réalité virtuelle
Copier le lien de Le toucher et l’odorat sont complexes à rendre dans la réalité virtuellePour la vision et l’ouïe, le cycle de suivi et de rendu est simple : les objets sont plus grands et plus bruyants lorsque l’on s’en approche. En revanche, le toucher et l’odorat sont plus complexes. La sortie tactile de l’expérience d’un utilisateur dans la réalité virtuelle est généralement rendue par de simples vibrations dans les contrôleurs manuels de l’utilisateur. Lors d’une expérience de réalité virtuelle dans un récif corallien, par exemple, l’utilisateur reçoit une légère vibration dans sa main lorsqu’il la tend dans le monde physique pour « toucher » l’endroit où un morceau de corail est rendu dans l’espace. En ce sens, le toucher dans la réalité virtuelle peut contribuer au réalisme global de l’expérience (Kreimeier et al., 2019[23]).
Des universitaires ont également étudié le toucher virtuel interpersonnel, qui est rendu possible par la mise en réseau de plusieurs dispositifs haptiques2 pour permettre à deux personnes de se toucher (Bailenson et Yee, 2008[24]). Par exemple, quand deux avatars se touchent la main, chaque contrôleur manuel vibre simultanément pour communiquer une représentation haptique du contact. Des études ont montré que lorsque les personnes peuvent se toucher – par exemple se serrer la main virtuellement – elles s’apprécient davantage que lors d’interactions sociales sans contact (Bailenson et Yee, 2007[25]).
Le sens de l’odorat est convaincant lorsqu’il est rendu dans la réalité virtuelle. L’un des cas d’utilisation de l’odorat les plus étudiés est la thérapie d’exposition pour les soldats souffrant de troubles de stress post-traumatique (Herz, 2021[26]) (voir la sous-section sur la réadaptation médicale). Certaines odeurs, comme celle du diesel, peuvent agir comme des déclencheurs d’événements traumatisants. Les thérapeutes utilisent ces déclencheurs pour aider leurs patients à développer des compétences et des stratégies afin de déconstruire les associations entre ces odeurs et le traumatisme (Mozgai et al., 2021[27]). Des dispositifs olfactifs portables ont été développés ces dernières années. Ils sont désormais suffisamment légers pour pouvoir être fixés à la base d’un casque.
Avantages et possibilités de la réalité virtuelle
Copier le lien de Avantages et possibilités de la réalité virtuelleLa réalité virtuelle est le plus souvent associée à l’industrie du divertissement, secteur dans lequel elle rencontre un succès modeste3. Elle offre toutefois un plus grand potentiel à condition d’être développée et utilisée de manière responsable. Cette section présente un cadre, basé sur des décennies de recherches, visant à servir de guide pour déterminer dans quelles situations la réalité virtuelle est à préférer aux technologies 2D. Le cadre « DICE » aide à recenser les expériences qui se prêtent à la réalité virtuelle car elles seraient, dans le monde réel, dangereuses, impossibles, contre-productives ou onéreuses (en anglais, DICE signifie Dangerous, Impossible, Counterproductive, Expensive). Former les pompiers, rééduquer les victimes d’accidents vasculaires cérébraux, apprendre l’histoire de l’art dans les musées et vivre de façon instinctive et perceptive l’avenir de la Terre pour comprendre le changement climatique sont autant d’exemples qui s’inscrivent parfaitement dans le cadre DICE. En revanche, un casque de réalité virtuelle ne sera d’aucune utilité pour consulter son courrier électronique, regarder la télévision ou réaliser du travail de bureau. Ces applications fonctionnent bien mieux sur des écrans 2D. En s’abstenant de transposer inutilement ces cas d’utilisation dans la réalité virtuelle, la société s’épargnera certains des défis qui l’accompagnent (voir la sous-section sur les inconvénients et les risques). La recherche devrait plutôt se concentrer sur les domaines dans lesquels la réalité virtuelle est porteuse de transformations et constitue manifestement la meilleure solution.
Cette section est centrée sur cinq domaines qui répondent parfaitement aux critères du cadre DICE : l’enseignement de l’empathie ; l’utilisation de la réalité virtuelle comme outil de réadaptation médicale ; les interventions visant à améliorer la santé mentale ; la formation en entreprise ; et les jumeaux numériques en réalité virtuelle. Ces cas d’utilisation ont été choisis pour deux raisons. D’une part, ils utilisent tous la réalité virtuelle pour résoudre des problèmes difficiles du monde réel, au lieu de se contenter de faire quelque chose de « sympa » avec la technologie. D’autre part, ils ont déjà démontré leur capacité à se prêter à un déploiement à grande échelle. Ces cinq domaines ont tous montré comment la réalité virtuelle peut être utilisée dans un contexte pratique et l’ont mise à la disposition de milliers de personnes dans le monde.
Enseigner l’empathie
Copier le lien de Enseigner l’empathieVivre dans la réalité virtuelle une expérience qui est impossible dans le monde réel – occuper un autre corps – est un cas d’utilisation DICE classique. La réalité virtuelle permet de s’approprier le corps d’une autre personne d’un point de vue perceptif. Les tâches de prise de perspective sont plus efficaces pour promouvoir l’empathie, faire adopter de meilleures attitudes et renforcer les comportements prosociaux que les tâches moins immersives, comme visionner une vidéo ou lire une histoire. Par exemple, il a été demandé aux participants à des études d’adopter le point de vue de personnes atteintes de schizophrénie (Kalyanaraman et al., 2010[28]) et de personnes âgées (Yee et Bailenson, 2006[29]) par le biais de la réalité virtuelle. Dans le cadre d’autres études, les participants ont été virtuellement transformés en animaux pour comprendre d’où vient la viande de bœuf (Ahn et al., 2016[30]) ou conduits à abattre des arbres pour mesurer les conséquences de l’absence de recyclage (Ahn, Bailenson et Park, 2014[31]). La réalité virtuelle a la capacité unique de faire mieux comprendre les groupes marginalisés et d’induire des changements d’attitude et de comportement susceptibles de perdurer plusieurs mois après l’expérience de réalité virtuelle (Herrera et al., 2018[32]). De telles expériences peuvent favoriser le sentiment d’appartenance et d’identification à un avatar, même si celui-ci ne ressemble pas physiquement à l’utilisateur.
Les études universitaires sur la réalité virtuelle et l’empathie sont de plus en plus connues au sein des entreprises. Sprouts Farmers Market, chaîne de magasins américaine comptant environ 35 000 salariés, a créé une série d’expériences de réalité virtuelle pour illustrer ses valeurs fondamentales, dont certaines sont liées à l’empathie. Un employé peut, par exemple, conseiller une mère anxieuse qui doit acheter des produits alimentaires sans gluten pour son enfant, ou prendre l’initiative de faire livrer une pastèque à un client âgé malade qui se trouve dans l’incapacité de conduire pour récupérer son fruit préféré.
Au lieu d’enseigner des règles sur les comportements empathiques, Sprouts Farmers Market a mis en œuvre un « modèle exemplaire » (Smith et Medin, 2002[33]). Un tel modèle met l’accent sur des expériences marquantes qui, bien que différentes en apparence, témoignent toutes d’un comportement empathique. Elles fonctionnent en association pour construire naturellement une vision particulière du monde. Une étude a été menée pour tester la compréhension conceptuelle qu’avait un sous-groupe d’environ 300 employés des valeurs fondamentales de l’entreprise. La formation a été dispensée pour la moitié d’entre eux dans la réalité virtuelle et pour l’autre moitié au moyen d’une présentation PowerPoint (Bailenson, 2020[34]). Les six concepts ont été parfaitement assimilés par 48 % des employés qui ont suivi la formation dans la réalité virtuelle, et seulement par 3 % de ceux qui ont bénéficié de la présentation PowerPoint.
Le film « Clouds over Sidra » est un autre exemple d’enseignement de l’empathie à grande échelle grâce à la réalité virtuelle. Produit en partie par les Nations Unies, il s’agit d’un film immersif à 360 degrés de 8.5 minutes qui emmène les spectateurs dans un camp de réfugiés de Za’atari, dans le nord de la Jordanie, qui accueillait à l’époque plus de 80 000 Syriens déplacés en raison de la guerre civile. L’utilisateur entend une jeune fille prénommée Sidra décrire le camp et expliquer que sa famille vit dans un petit conteneur d’expédition reconverti. Le film a été salué comme l’un des contenus de réalité virtuelle les plus efficaces jamais réalisés. Selon les Nations Unies, grâce à lui, deux fois plus de personnes ont fait des dons pour venir en aide aux réfugiés syriens (Gaudiosi, 2016[35]).
Réadaptation médicale
Copier le lien de Réadaptation médicaleLa réadaptation médicale peut coûter cher, et un système de réalité virtuelle à domicile permet souvent de remplacer une visite chez un physiothérapeute, avec à la clé plus de confort et d’efficacité. Il existe déjà des applications de réalité virtuelle à visée thérapeutique pour rééduquer les patients victimes notamment d’un accident vasculaire cérébral, de lésions cérébrales traumatiques ou d’une infirmité motrice cérébrale (Weiss et al., 2021[36]). La répétition et la pratique sont importantes pour l’apprentissage moteur, une composante de la réadaptation, et les patients ont besoin d’un retour d’information sur l’efficacité de ces répétitions. En outre, ils doivent rester motivés pour effectuer des mouvements qui sont souvent douloureux ou fastidieux.
Dans une première étude, la réalité virtuelle a été utilisée pour restaurer les performances motrices de patients victimes d’un accident vasculaire cérébral (Holden, 2005[37]). Dans ce système de réalité virtuelle, les patients s’entraînaient à effectuer divers mouvements de bras pour surmonter les déficits induits par l’accident vasculaire cérébral. Ils devaient réaliser des activités conçues pour provoquer certains mouvements, par exemple mettre une enveloppe dans une boîte aux lettres. Des traqueurs capturaient ses mouvements et fournissaient un retour d’information dans la simulation virtuelle pour l’aider à corriger la trajectoire. Ce système a donné de meilleurs résultats que les autres types de réadaptation pour ce qui est de l’expérience du patient et a permis d’améliorer les mouvements dans le monde réel (Holden, 2005[37]). Une revue systématique récente qui décrit 27 études quantitatives utilisant la réalité virtuelle de manière similaire fait état de résultats positifs constants (Khan, Podlasek et Somaa, 2021[38]).
La transformation de la représentation virtuelle des mouvements physiques est un domaine prometteur pour la réadaptation médicale. Des universitaires ont étudié la quantité d’effort à fournir pour agir virtuellement, en augmentant le gain entre les mouvements des participants dans la vie réelle et ceux de leur avatar dans le monde virtuel (Won et al., 2017[39]). En d’autres termes, si le patient plie son genou de 20 degrés dans le monde réel, il voit son avatar virtuel plier son genou de 40 degrés dans la réalité virtuelle. L’objectif était d’aider le patient à visualiser ses possibilités, afin de lui permettre de voir le gain de mobilité qu’il pourrait atteindre à terme.
Les psychologues parlent dans ce cas de la « connaissance de ses propres capacités », soit l’idée selon laquelle, pour atteindre un objectif, il est essentiel de croire en sa réalisation. La visualisation positive peut être une aide puissante à la guérison. Cependant, lorsqu’un patient souffre, il peut avoir du mal à passer outre sa douleur pour s’imaginer en bonne forme physique pendant sa thérapie. Pour autant, les premiers résultats cliniques sont prometteurs (Won et al., 2015[40]), et seule la réalité virtuelle permet de montrer aux patients des mouvements qu’ils n’arrivent pas encore à effectuer.
Au cours des dernières années, la réadaptation par la réalité virtuelle de patients ayant souffert d’accidents vasculaires cérébraux a dépassé les frontières du monde universitaire. Par exemple, les dispositifs médicaux de Penumbra mettent en œuvre à grande échelle un système de suivi du corps entier (le système REAL) utilisé par des milliers de vétérans de guerre à travers les États-Unis pour leur réadaptation (Bailey, 2023[41]). Ce cas d’utilisation répond parfaitement aux critères du cadre DICE, et les patients tirent des avantages considérables dès quelques courtes séances hebdomadaires.
Santé mentale
Copier le lien de Santé mentaleSi les comportements négatifs (tels que la cyberintimidation et le harcèlement) sont associés à des risques pour la santé mentale dans les environnements numériques, ils peuvent devenir plus dangereux encore dans les environnements immersifs (Danaher, 2018[42]) (voir également le Coup de projecteur « La santé mentale dans les environnements numériques »). Du fait de phénomènes comme le sentiment de présence, l’émotion et l’immersion, les utilisateurs peuvent ressentir plus profondément les effets des contenus à charge émotionnelle, notamment ceux des menaces violentes, parce que la réalité virtuelle ne se limite pas à des mots abstraits, mais présente des contenus en trois dimensions (Cummings et Bailenson, 2016[14] ; Cadet et Chainay, 2020[43]).
Il est toutefois également établi que la réalité virtuelle peut jouer un rôle positif dans la santé mentale. Par exemple, des études cliniques menées dans le monde entier se sont intéressées à l’effet de la réalité virtuelle dans des domaines allant de la diminution de l’anxiété au traitement des phobies, en passant par le développement de relations interpersonnelles et la réduction de l’isolement social. Au cours des dernières années, plusieurs études systématiques ont analysé l’état de la recherche dans le domaine de la santé mentale dans la réalité virtuelle (Cieślik et al., 2020[44] ; Hatta et al., 2022[45]).
La thérapie d’exposition est l’un des traitements par la réalité virtuelle les plus éprouvés en matière de santé mentale. Elle est définie comme étant un traitement psychologique scientifiquement reconnu, mis au point pour aider les patients à affronter leurs peurs en diminuant l’évitement des objets, des situations ou des activités redoutés par le biais de la désensibilisation (APA, 2023[46]). Il existe de nombreuses formes de thérapie d’exposition. L’exposition in vivo consiste à interagir directement avec ses peurs dans le monde réel. L’exposition imaginale implique d’imaginer les objets ou les situations redoutés. Aujourd’hui, l’American Psychological Association mentionne explicitement l’exposition dans la réalité virtuelle comme une forme de cette thérapie scientifiquement validée pour traiter les troubles anxieux.
Rothbaum et al. (1995[47]) ont été les premiers à établir que la réalité virtuelle constitue un traitement efficace en démontrant que la thérapie d’exposition par la réalité virtuelle peut aider des patients à surmonter leur peur du vide. D’une certaine manière, la réalité virtuelle fonctionne comme la thérapie d’exposition in vivo traditionnelle, car elle induit un sentiment de présence. Pour un patient qui a peur du vide dans le monde réel, se tenir au bord d’un bâtiment virtuel est tout aussi effrayant dans la réalité virtuelle. Cette dernière peut donc être utilisée pour aider à traiter cette phobie.
Dans ce contexte, la réalité virtuelle présente quatre avantages uniques. Premièrement, elle réduit considérablement les coûts. On traite généralement la peur de l’avion en demandant à la personne qui en souffre de se rendre physiquement dans un aéroport, de passer du temps dans une zone d’embarquement et, enfin, de monter à bord d’un avion. Compte tenu des protocoles de sécurité en vigueur dans les aéroports, le patient est souvent contraint d’acheter des billets d’avion dans le cadre de son traitement, ce qui revient cher. Deuxièmement, la réalité virtuelle permet au thérapeute de simuler des événements extrêmement rares, par exemple, de mauvaises conditions météorologiques et des turbulences, par simple pression d’un bouton. Le thérapeute peut ainsi utiliser la réalité virtuelle pour confronter le patient à ses peurs d’une manière qui n’est pas possible lors d’un vol réel. Troisièmement, grâce à la réalité virtuelle, le thérapeute peut réduire l’exposition du patient à des expériences psychologiquement dangereuses ou susceptibles d’aggraver son traumatisme. Si un patient craint de traverser des gorges en voiture, par exemple, le clinicien peut modifier la profondeur des gorges, la vitesse de la voiture ou les conditions météorologiques. Enfin, la réalité virtuelle protège le patient contre tout risque de préjudice physique. Dans la réalité virtuelle, on ne sera pas mordu par une araignée ou heurté par un objet en cas de turbulences pendant un vol.
Depuis la première étude de Rothbaum, de nombreux travaux ont été consacrés au traitement des troubles de stress post-traumatique. En 2002, des universitaires ont utilisé la thérapie par la réalité virtuelle pour traiter un premier intervenant qui avait développé des troubles de stress post-traumatique suite à l’attaque du World Trade Center du 11 septembre (Difede et Hoffman, 2002[48]). Les thérapies traditionnelles reposant sur des techniques d’imagerie mentale dirigée s’étaient avérées inefficaces dans son cas. Le patient a donc été progressivement exposé à un environnement virtuel dans lequel des avions passaient au-dessus de sa tête et s’écrasaient sur des bâtiments, des explosions se produisaient et des gratte-ciels s’effondraient. À l’issue de son traitement, il a signalé une réduction des symptômes aigus liés aux troubles de stress post-traumatique. Ce cas illustre comment la réalité virtuelle a immergé en toute sécurité un utilisateur dans des simulations d’environnements traumatisants.
Depuis lors, des centaines d’études ont été réalisées dans ce domaine. Une méta-analyse a par exemple cherché à examiner l’efficacité de la réalité virtuelle dans le traitement des troubles de stress post-traumatique. Il en est ressorti que la réalité virtuelle donnait de meilleurs résultats que les essais contrôlés et que les effets positifs obtenus persistaient après la fin du traitement (Wenrui et al., 2019[49]).
Comme pour les autres cas d’utilisation de la réalité virtuelle présentés dans ce chapitre, les travaux universitaires consacrés aux troubles de stress post-traumatique montrent qu’un déploiement à grande échelle est possible dans le monde entier. En 2007, Rizzo, Rothbaum et Graap (2007[50]) ont mis au point un système de thérapie d’exposition par la réalité virtuelle pour les vétérans atteints de troubles de stress post-traumatique qui intégrait le retour d’information fourni par des études portant sur les soldats de retour de la guerre d’Irak. Au cours des années suivantes, l’efficacité clinique du traitement a été démontrée. Aujourd’hui le système commercial BRAVEMIND comprend des scénarios d’exposition, y compris dans des villes et des villages modélisés d’après des localités qui existent réellement en Irak et en Afghanistan (Rizzo et al., 2010[51]). BRAVEMIND est déployé à grande échelle dans des cliniques et hôpitaux pour vétérans à travers les États-Unis.
Formation
Copier le lien de FormationUne formation peut être dangereuse, coûteuse et les rares événements qui sont des moments propices à l’apprentissage sont difficiles à reproduire. C’est pourquoi, depuis des décennies, soldats, chirurgiens et astronautes s’entraînent dans la réalité virtuelle (Bailenson, 2018[52]). En effet, c’est en faisant soi-même les choses et en bénéficiant d’un retour d’information en cas d’erreur que l’on apprend le mieux. La formation à des activités à fort enjeu constitue par conséquent une application naturelle de la réalité virtuelle. Par exemple, les travaux de recherche montrent que la réalité virtuelle renforce la confiance des chirurgiens en formation, améliore leur compréhension de l’anatomie et leur offre un espace à faible risque pour s’entraîner à pratiquer des techniques chirurgicales difficiles (Paro, Hersh et Bulsara, 2022[53]). Aujourd’hui, des milliers de chirurgiens s’entraînent dans la réalité virtuelle et même sa version grand public les aide à devenir plus compétents et plus efficaces dans leur travail (McKinney et al., 2022[54]).
Il existe également des études universitaires sur la formation aux interventions chirurgicales, et la littérature est suffisamment étayée pour inclure plusieurs méta-analyses. L’une d’elles, par exemple, compare la formation chirurgicale dans la réalité virtuelle à d’autres techniques (Su et al., 2023[55]). Les résultats montrent pour la plupart que la formation dans la réalité virtuelle donne des résultats meilleurs (ou équivalents) à ceux des formations en face-à-face, qu’elle permet de réaliser des économies et qu’elle est plus courte que les techniques traditionnelles.
Au cours de la dernière décennie, la réalité virtuelle s’est étendue à la formation en entreprise (Bailenson, 2018[52]). L’un des modules les plus fréquemment utilisés, dénommé « The Pickup Tower », ressemble à un grand kiosque grâce auquel les clients récupèrent leurs achats réalisés en ligne. Walmart a formé plus d’un million de ses collaborateurs à l’aide de ce module. Les stagiaires reçoivent des instructions pas à pas sur la manière d’utiliser la machine, avec un retour d’information immédiat en cas d’erreur. Avant la mise au point du module de formation par la réalité virtuelle, chaque employé passait une journée entière à se former dans un magasin spécifique. Grâce à la réalité virtuelle, la formation ne dure plus que 15 minutes, et le temps et les frais de déplacement ont été supprimés. Étant donné que tous les collaborateurs de Walmart aux États-Unis doivent se former à The Pickup Tower, la réalité virtuelle a permis à l’enseigne d’économiser plus d’un million de jours de travail, pour le même niveau d’efficacité (Bailenson, 2020[34]).
Dans le domaine de la formation, les ressources humaines ont également adopté la réalité virtuelle. Une récente étude s’est intéressée aux formations visant à apprendre aux témoins de harcèlement sexuel à intervenir de manière appropriée (Rawski, Foster et Bailenson, 2022[56]). Elle a démontré que ces formations sont plus efficaces lorsque les scénarios sur lesquelles elles reposent ne sont pas présentés dans des vidéos en 2D, mais dans la réalité virtuelle, car cette dernière permet aux stagiaires de développer les compétences nécessaires dans un environnement plus réaliste.
Depuis que le simulateur de vol a été mis au point en 1929 par Edmund Link, la formation au pilotage s’est avérée être un cas d’utilisation parfait de la réalité virtuelle. La formation répond à tous les critères du modèle DICE et continue d’être la force motrice de la réalité virtuelle en tant que médium, à la fois pour les entreprises et pour les consommateurs. En effet, la formation personnelle est l’un des cas d’utilisation les plus populaires de la réalité virtuelle autonome (Eakin, 2018[57]). Des employés de Walmart ont ainsi été formés à l’intervention d’urgence en cas de fusillade. La formation s’appuyait sur un jumeau numérique du magasin et permettait aux collaborateurs de répéter des techniques de survie essentielles (comment se cacher, que dire au tireur et quel comportement non verbal adopter). Certains de ces stagiaires étaient en poste lors de la fusillade de 2019 dans un magasin Walmart à El Paso, au Texas. Selon le président-directeur général de Walmart, Doug McMillon, « des vies ont été sauvées et des secondes ont été gagnées » grâce à cette formation (Jenkins, 2019[58]). Les employés n’étaient pas des utilisateurs quotidiens de la réalité virtuelle, mais l’expérience intense d’une formation dans cet environnement immersif était restée gravée dans leur mémoire.
Jumeaux numériques en réalité virtuelle
Copier le lien de Jumeaux numériques en réalité virtuelleCertaines entreprises utilisent la technologie des jumeaux numériques en réalité virtuelle pour économiser du temps et des ressources. Elles utilisent des jumeaux numériques pour modéliser des systèmes complexes, souvent dans les domaines de l’urbanisme, de la conception architecturale, de la fabrication et de la formation (Botín-Sanabria et al., 2022[59]). Dans une usine qui tourne en continu et dont les employés travaillent par équipes tournantes, une formation classique des nouveaux embauchés nécessiterait l’arrêt des opérations. Grâce aux jumeaux numériques, il est désormais possible de dispenser des formations sans perturber le flux de travail.
Il existe deux types de techniques de construction : la modélisation et la capture. La modélisation consiste à construire un monde virtuel, un élément après l’autre. Par exemple, pour construire une usine, on utilise un logiciel de modélisation 3D ou la photogrammétrie pour créer les machines, les pièces, les employés et les sons environnants. Ces éléments sont ensuite assemblés comme on le ferait pour un diorama.
La capture consiste à utiliser des caméras spéciales pour produire une vidéo sphérique. La capture volumétrique – qui utilise des caméras passives et actives pour générer des nuages de points de scènes – permet de se déplacer dans une scène et rend des modèles réalistes. Toutefois, cette méthode est coûteuse, car elle nécessite des salles dédiées, de la vidéo stéréoscopique et d’autres formes de vidéo capables de capturer une scène « telle quelle ». Par exemple, une vidéo sphérique crée une vue continue à 360 degrés qui est visible en tournant la tête. Bien qu’elle ait une haute résolution et puisse facilement être enregistrée à l’aide d’une seule caméra, elle ne permet qu’un point de vue unique. Par exemple, si une vidéo à 360 degrés était tournée depuis la chaîne de montage d’une usine, le spectateur ne pourrait jamais regarder sous une table voisine. La photogrammétrie, qui déduit la structure 3D en instanciant de multiples images fixes du même objet sous différents angles, est une technique robuste. Cependant, elle ne fonctionne pas bien dans les scènes avec du mouvement, telles qu’un transporteur à courroie sur lequel travaillent de nombreuses personnes.
Le travail effectué par Elizabeth Baron chez Ford Motor Company (Baron, 2009[60]) offre l’un des meilleurs exemples de jumeaux numériques. Le laboratoire d’Elizabeth Baron a utilisé la réalité virtuelle pour tester la réaction de conducteurs de différents âges face à des prototypes de voitures reproduits à l’aide de jumeaux numériques. Les résultats de ces tests ont permis d’adapter le design des voitures afin qu’il soit plus facile pour les conducteurs plus âgés d’y entrer et d’en sortir. De plus, Ford souhaitait comprendre comment la forme du pare-brise affecte la distraction au volant. Par exemple, quel rôle elle joue dans la façon dont le conducteur réagit aux éléments qui attirent son attention. Grâce à la réalité virtuelle, l’équipe d’Elizabeth Baron a conçu des pare-brises qui réduisent au minimum les distractions et améliorent les performances de conduite. Les essais dans la réalité virtuelle ne produisant pas de dommages physiques réels, Ford a ainsi pu réaliser des expériences qui auraient été autrement impossibles. Par exemple, le constructeur a testé un système de sécurité qui détecte les changements de voie involontaires. Un tel test dans le monde réel présente évidemment des risques pour la sécurité, alors qu’en utilisant un jumeau numérique, les scientifiques ont capturé des comportements de conduite « naturalistes » sans risque.
Inconvénients et risques de la réalité virtuelle
Copier le lien de Inconvénients et risques de la réalité virtuelleIl est inévitable qu’une expérience de réalité virtuelle suffisamment puissante pour altérer le bien-être psychologique et l’empathie à l’égard d’autres personnes et d’autres cultures présente également des inconvénients et des risques. Cette section passe en revue cinq domaines de préoccupation spécifiquement associés à la réalité virtuelle qui vont au-delà de ceux concernant les environnements numériques 2D : la protection de la vie privée, notamment en ce qui concerne le suivi des mouvements du corps ; le développement cognitif des enfants ; le mal des simulateurs ; la distraction au volant et l’utilisation excessive et dépendance. Ils ont été retenus pour deux raisons. D’une part, des travaux de recherche universitaires leur ont été consacrés afin de guider les décideurs. D’autre part, ils sont propres aux caractéristiques technologiques de la réalité virtuelle examinées plus haut.
Risques liés à la protection de la vie privée
Copier le lien de Risques liés à la protection de la vie privéeLa réalité virtuelle amplifie les risques d’atteinte à la vie privée associés aux dispositifs connectés à l’internet, notamment dans le cadre de l’internet des objets (IdO), et les étend sous de nouvelles formes. Les technologies de réalité virtuelle et leurs applications évoluent rapidement. La collecte sans précédent de données directement liées à l’environnement des utilisateurs et à leur corps crée des risques supplémentaires pour les libertés et les droits fondamentaux des individus. Ce problème est exacerbé par la nécessité d’utiliser des capteurs, tels que des caméras (voir plus haut) dans la réalité virtuelle. En d’autres termes, bloquer les caméras – comme on peut le faire sur un ordinateur portable – est impossible dans la réalité virtuelle.
Les organismes de réglementation de la protection de la vie privée et des données identifient comme l’un des principaux effets négatifs la surveillance constante des interactions des utilisateurs, les atteintes à la vie privée devenant la norme aussi bien pour les utilisateurs directs que pour les spectateurs (Contrôleur européen de la protection des données, 2022[61]). Autre risque : celui d’un profilage toujours plus approfondi, qui permet de cibler des individus à un niveau de détail croissant. À cela s’ajoute la surveillance sans précédent de données sensibles en temps réel telles que les réactions physiologiques, les émotions et les données biométriques (Kim, 2022[62]).
Les technologies de réalité virtuelle enregistrent régulièrement des données à caractère personnel concernant la localisation des personnes, leurs liens sociaux, leurs requêtes de recherche et leurs préférences en matière de produits. Une fois combinées, ces données rendent possible une identification précise des utilisateurs. Ces données combinées peuvent déjà être considérées comme sensibles en raison des conclusions qu’elles permettent de tirer sur les personnes (par exemple sur leur état de santé, leurs préférences sexuelles ou leurs croyances religieuses).
Dans la réalité virtuelle, la collecte de données générées par l’environnement ou le langage corporel d’une personne amplifie les risques associés à la création de profils détaillés. Ces données concernent le fonctionnement du corps, y compris la communication verbale. Cependant, elles sont également de nature « émotionnelle » (les données déduites des expressions faciales et des inflexions vocales en sont des exemples).
Des données sur le comportement non verbal, comme la posture de l’utilisateur, son regard, ses gestes, ses expressions faciales et la distance interpersonnelle, sont collectées. Pour afficher correctement une scène, certains des systèmes de réalité virtuelle les plus populaires suivent les mouvements du corps 90 fois par seconde. Les systèmes de réalité virtuelle haut de gamme enregistrent 18 types de mouvements de la tête et des mains. Par conséquent, passer 20 minutes dans un système de réalité virtuelle génère un peu moins de 2 millions d’enregistrements uniques du langage corporel.
Le comportement non verbal est en grande partie automatique et peut être utilisé pour déduire l’identité d’une personne, ses émotions et ses problèmes de santé (Miller et al., 2020[63]). Si chacun est en mesure de contrôler les images et les textes qu’il publie sur les médias sociaux, rares sont les personnes qui arrivent à réguler systématiquement leur taille ou leurs micromouvements et gestes subtils tels que les regards en coin et les sourires sincères. En ce sens, les données non verbales donnent des indications uniques sur un individu (Ekman et Friesen, 1969[64]). On peut donc affirmer qu’un fournisseur de services de réalité virtuelle connaît chaque utilisateur plus intimement que l’utilisateur ne se connaît lui-même.
Encadré 4.1. Données de suivi : les gestes sont plus éloquents que les mots
Copier le lien de Encadré 4.1. Données de suivi : les gestes sont plus éloquents que les motsLes volumes de données de suivi augmentent de manière exponentielle à mesure que la réalité virtuelle évolue. Les capteurs de vision par ordinateur des principaux casques autonomes dépendent de caméras situées à l’extérieur du casque, qui filment la pièce dans laquelle se trouvent les utilisateurs et les autres personnes présentes. De nombreuses politiques de protection de la vie privée (Meta, 2023[65]) applicables à ces casques indiquent clairement que les fabricants de casques peuvent utiliser les images filmées par les caméras, en partie parce que les données de suivi constituent un élément essentiel de la réalité virtuelle.
Depuis plus de dix ans, les universitaires utilisent les données de suivi de la réalité virtuelle à des fins de recherche. Très tôt, Rizzo et ses collègues ont construit une salle de classe virtuelle dans laquelle se trouvaient des élèves, un enseignant qui dispensait un cours et diverses sources de distraction (Rizzo et al., 2004[66]). Ils ont ainsi observé un plus grand nombre de mouvements de la tête chez les enfants souffrant de troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité que chez ceux qui n’en souffraient pas.
En utilisant un paradigme d’évaluation similaire, Jarrold et ses collègues ont démontré que les élèves atteints de troubles du spectre autistique à haut niveau de fonctionnement regardaient moins souvent les autres participants à une expérience de réalité virtuelle que les autres élèves (Jarrold et al., 2013[67]). Won et ses collègues ont utilisé les données de suivi d’élèves pendant une leçon dans la réalité virtuelle pour prédire avec précision leur future note (Won, Bailenson et Janssen, 2014[68]). Le langage corporel des enseignants et des élèves pendant un cours dispensé dans la réalité virtuelle a permis de déterminer avec précision la note des élèves à l’évaluation suivante.
Si l’agrégation et l’anonymisation des données contribuent en général à protéger la vie privée, ces techniques fonctionnent moins bien dans le cas des données de suivi. Miller et ses collègues ont testé les possibilités d’identification des utilisateurs dans des circonstances typiques de visualisation dans la réalité virtuelle, sans tâche d’identification spécifique (Miller et al., 2020[63]). En d’autres termes, ils ont examiné les données de suivi de personnes effectuant des activités standard dans la réalité virtuelle, telles que le visionnage de vidéos à 360 degrés. Ils ont ensuite supprimé les fichiers de suivi et utilisé des algorithmes d’apprentissage automatique pour identifier des individus dans le groupe. Sur 511 participants, le système a identifié correctement 95 % des utilisateurs après avoir été entraîné sur moins de cinq minutes de données de suivi par personne. Des travaux plus récents montrent que le temps passé dans les expériences de réalité virtuelle et leur fréquence sont des éléments clés de l’identification des utilisateurs (Miller et al., 2023[69]).
Une étude menée sur plus de 55 000 utilisateurs du jeu « Beat Saber » a révélé que les données de suivi permettent d’identifier individuellement un peu plus de 94 % de ses utilisateurs (Nair et al., 2023[70]). Dans le cadre de ces travaux, on a également comparé la précision d’identification de diverses technologies biométriques (balayage d’iris, données de mouvement provenant de systèmes de réalité virtuelle et de réalité augmentée, empreintes digitales, lecture du visage et parole). Seul le balayage d’iris a fait mieux que les données de mouvement provenant de systèmes de réalité virtuelle et de réalité augmentée pour ce qui est de la capacité à identifier personnellement les utilisateurs.
La réalité virtuelle soulève également des interrogations sur la protection des données de santé, notamment biométriques, qui ne sont pas gérées par les canaux traditionnels de prise en charge des patients, comme les hôpitaux et les prestataires de soins de santé. De nouvelles questions se posent quant à savoir si et comment les entités proposant des expériences immersives devraient se voir interdire de créer et/ou de partager les profils comportementaux ou émotionnels des utilisateurs. Devrait-on imposer à ces entités des limites concernant les publicités ciblant les mineurs ou les destinataires vulnérables en raison de leur genre, de leur origine ethnique ou raciale, ou d’un handicap ?
Mal des simulateurs
Copier le lien de Mal des simulateursDans le monde réel, le cerveau assimile en permanence des informations perceptives. Il s’agit notamment d’images, de sons, d’informations vestibulaires (l’oreille interne vibre d’une manière particulière lorsque l’on marche ou que l’on bouge la tête) et d’informations somatosensorielles (les muscles des pieds ressentent le sol lorsque l’on marche). L’être humain a évolué en s’appuyant sur ces schémas perceptifs précis et immuables pendant des centaines de milliers d’années. Ces informations fonctionnent ensemble d’une manière particulière, et ce n’est qu’au cours des dernières décennies que les technologies immersives ont présenté au cerveau un nouveau défi perceptif.
Le mal des simulateurs survient lorsque le cerveau reçoit ces informations d’une manière qui n’est pas naturelle, souvent décrite comme un « réarrangement sensoriel » ou un « conflit des informations perceptives ». Ce phénomène est étudié depuis les années 1950 et l’apparition des premiers simulateurs de vol (OTAN, 2021[71]). Compte tenu de l’essor récent des technologies immersives susceptibles de déclencher le mal des simulateurs (réalité virtuelle, IMAX ou les manèges en 4D, par exemple), les études scientifiques dans ce domaine se sont multipliées. Le mal des simulateurs est un sous-ensemble de ce que l’on nomme communément le mal des transports. Par exemple, le mal de mer survient généralement parce que le cerveau reçoit des informations vestibulaires alors que les yeux ne reçoivent pas les changements du flux optique, en particulier lorsque l’on est assis à l’intérieur d’un bateau. Dans la réalité virtuelle, les yeux reçoivent souvent un flux optique, mais il n’y a pas d’informations vestibulaires correspondantes puisque l’utilisateur est assis sur son siège.
Les symptômes du mal des simulateurs sont généralement mesurés à l’aide d’une vingtaine de marqueurs physiologiques et psychologiques, dont la difficulté à se concentrer, les nausées, la vision trouble, la sensation de tête pleine, les étourdissements, les vertiges, une sensation de malaise général, une fatigue oculaire, la transpiration et les éructations. Environ un tiers des utilisateurs de réalité virtuelle présentent certains symptômes, et environ 5 % présentent des symptômes graves (OTAN, 2021[71]). Les différences individuelles telles que l’âge, le genre et les antécédents médicaux peuvent influencer l’apparition du mal des simulateurs. Ces symptômes sont passagers, mais désagréables. Retirer son casque toutes les 30 minutes, utiliser un bon matériel (c’est-à-dire présentant une faible latence et un taux de rafraîchissement élevé) et privilégier un contenu qui évite le conflit des informations perceptives décrit plus haut sont autant de règles qui permettent de limiter le mal des simulateurs. Certaines personnes, par exemple celles souffrant de nausées sur le siège passager d’une voiture, ne supportent simplement pas la réalité virtuelle, même pendant de courtes durées.
Développement cognitif et comportement des enfants
Copier le lien de Développement cognitif et comportement des enfantsLes effets d’une exposition à long terme à la réalité virtuelle et à d’autres technologies immersives sur le développement cognitif des enfants sont un sujet de préoccupation important (Allcoat et von Mühlenen, 2018[72]). Il convient également de déterminer en quoi la réalité virtuelle diffère des autres médiums et si, et de quelle manière, elle modifie le point de vue et le comportement des enfants.
Bien que les travaux de recherche universitaires dans ce domaine soient limités, la littérature montre généralement que les jeunes enfants vivent plus intensément les expériences de réalité virtuelle que les adultes (Bailey et Bailenson, 2017[73]). De plus, les effets de la réalité virtuelle tendent à être amplifiés par rapport à ceux des médiums traditionnels tels que la télévision. On sait, par exemple, que les jeunes enfants sont susceptibles d’acquérir de faux souvenirs lorsqu’ils sont exposés à toutes sortes d’éléments, qu’il s’agisse de récits verbaux, d’images mentales ou de photographies modifiées. Dans une étude publiée en 2008, des universitaires ont testé la capacité des enfants d’âge préscolaire et en début d’école primaire à différencier les expériences virtuelles des expériences réelles, à la fois immédiatement et une semaine après l’exposition à une expérience de réalité virtuelle (Segovia et Bailenson, 2008[74]). Par exemple, après avoir vécu une expérience de réalité virtuelle dans laquelle ils nageaient avec des baleines, beaucoup d’enfants scolarisés en école élémentaire ont formé de « faux souvenirs » et pensaient être physiquement allés à SeaWorld pour voir une orque (alors qu’ils ne l’avaient vue que dans la réalité virtuelle).
Une autre étude a examiné les effets potentiels de la réalité virtuelle sur les réponses comportementales et cognitives des enfants (Bailey et al., 2019[75]). Les chercheurs ont comparé les effets de l’interaction avec un personnage virtuel sur un écran de télévision et dans la réalité virtuelle. Dans une simulation programmée, 55 enfants âgés de quatre à six ans ont pu interagir avec un personnage virtuel – en l’occurrence Grover, le gentil monstre à fourrure bleue de la série télévisée pour enfants Sesame Street. Par rapport à l’expérience non immersive (qui consistait à regarder Grover sur un écran de télévision), les enfants ayant participé à l’expérience de réalité virtuelle ont montré un contrôle inhibiteur sensiblement plus faible. Cela a été mesuré par leur capacité à jouer au jeu « Jacques a dit » avec Grover. Ils étaient également été plus enclins à interagir avec le personnage dans la réalité virtuelle et à lui donner de vrais autocollants. Cette étude laisse à penser que la réalité virtuelle suscite chez les enfants des réactions comportementales différentes de celles qu’ils ont lors d’expériences leur présentant un contenu similaire sur un écran 2D, et qu’il est possible que les enfants traitent différemment le contenu de la réalité virtuelle.
De plus amples études sur les effets de la réalité virtuelle sur les enfants étant nécessaires, il convient d’appeler à modérer l’usage qu’ils en font. Au lieu de parler en heures d’utilisation, comme pour d’autres appareils numériques, il est important de penser ici en minutes. Pour ce qui est du contenu, une règle devrait prévaloir : si les parents ne souhaitent pas que leurs enfants vivent avec le souvenir d’un événement survenu dans le monde réel, ils ne doivent pas les laisser en faire l’expérience dans la réalité virtuelle. Voyager sur la Lune ne pose pas de problème, mais une expérience effrayante restera gravée dans leur mémoire. La sécurité physique est un autre facteur important pour tous, mais surtout pour les enfants. Par définition, la réalité virtuelle masque le monde réel. Il est donc primordial de surveiller les enfants jouant à proximité de meubles aux arêtes vives, d’animaux, d’escaliers, etc. Les études montrent que la majorité des enfants sont ravis de faire l’expérience de la réalité virtuelle, sans qu’aucun accident ou trouble ne soit signalé. Toutefois, dans ces études, les enfants rencontraient le personnage Grover de Sesame Street, et faisaient, sous supervision, des sessions de réalité virtuelle qui ne duraient que cinq minutes environ.
Distraction au volant
Copier le lien de Distraction au volantL’idée de conduire une automobile en portant un casque de réalité virtuelle peut sembler inattendue, mais plusieurs entreprises avancent dans cette direction. Leurs motivations vont du divertissement des passagers, qui souvent lisent un livre ou utilisent d’autres supports pour se distraire, jusqu’à la création d’un « équipement additionnel », similaire à un autoradio, pour les voitures autonomes. Des entreprises invitent même le conducteur à porter un casque de réalité virtuelle.
Le constructeur automobile BMW et Varjo, fabricant de casques de réalité virtuelle, ont récemment collaboré pour proposer aux conducteurs de porter un casque de réalité virtuelle dans une automobile, de la même façon que les pilotes de chasse se servent de cockpits virtuels. Le conducteur voit ainsi un rendu informatique de son environnement, et non la lumière qui passe à travers un pare-brise en verre. En conséquence, des informations sur la circulation, la température et la vitesse peuvent être projetées dans son champ de vision (XR Today, 2022[76]).
Faccio et McConnell (2018[77]) ont étudié l’impact du jeu vidéo de réalité augmentée Pokémon GO, dans lequel les joueurs se promènent dans le monde réel en regardant un flux de caméra en temps réel qui superpose des objets virtuels à la scène. Bien que ce ne soit pas techniquement un casque de réalité virtuelle ou de réalité augmentée, il s’agit néanmoins d’un premier pas important vers l’utilisation de la réalité virtuelle dans les automobiles. Les auteurs montrent que Pokémon GO a été téléchargé 100 millions de fois dans les 148 jours qui ont suivi le lancement du jeu. Ils ont ensuite analysé un peu moins de 12 000 rapports de police concernant des accidents survenus dans une ville pour identifier ceux dus à Pokémon GO, puis établi une projection de l’incidence du jeu à l’échelle nationale. Ils en ont conclu que le fait de jouer à Pokémon GO a été associé à un peu moins de 150 000 accidents de voiture au cours de la période considérée, et à un peu plus de 250 décès (Faccio et McConnell, 2018[77]). Depuis la fin de l’étude, la popularité de ce jeu de localisation en réalité augmentée est restée stable : plus d’un tiers de l’ensemble des consommateurs réguliers de jeux vidéo aux États-Unis y jouent (Statistica, 2023[78]).
Utilisation excessive et dépendance
Copier le lien de Utilisation excessive et dépendanceLa réalité virtuelle est spéciale parce qu’elle est immersive, réagit aux mouvements naturels du corps et masque le monde physique pour rendre l’illusion encore plus convaincante. Or, ces mêmes caractéristiques font qu’il est difficile de résister aux tentations virtuelles. Dans le roman Ready Player One, d’Ernest Cline, le seul refuge d’un monde dystopique est un immense univers virtuel dans lequel les individus se retirent dès qu’ils en ont l’occasion. La réalité virtuelle est décrite dans cette histoire et dans d’autres comme un lieu d’évasion ultime, avec des conséquences inquiétantes pour le monde physique. Compte tenu des schémas d’utilisation des supports contemporains, se retirer dans un monde imaginaire que l’on organiserait soi-même ne semble plus relever de la science-fiction (Steinicke et Bruder, 2014[79]). Imaginons un monde où les médias sociaux ressembleraient aux plus belles fêtes, et où les jeux d’argent en ligne ouvriraient les portes de la salle la plus exclusive d’un casino de Monaco. L’accès permanent à la perfection dans le monde virtuel pourrait modifier la façon dont les individus interagissent avec le monde réel.
Les travaux de recherche sur les conséquences pour la santé d’une utilisation prolongée de la réalité virtuelle ne sont pas pour l’heure assez nombreux. Dans le cadre d’une étude, un universitaire a passé 24 heures avec un casque de réalité virtuelle dans des conditions soigneusement contrôlées (Steinicke et Bruder, 2014[79]). Dans leur article, les auteurs indiquent que « plusieurs fois au cours de l’expérience, le participant ne savait plus s’il se trouvait dans l’environnement virtuel ou dans le monde réel, et mélangeait certains artefacts et événements des deux mondes ». L’une des priorités phares de la recherche devrait être d’étudier les effets physiologiques et psychologiques d’une utilisation prolongée de la réalité virtuelle pendant plusieurs mois (Han et al., 2023[80]).
Des travaux de recherche expérimentale ont été menés pour quantifier les effets du passage d’un environnement de travail organisé autour du bureau à un environnement basé sur la réalité virtuelle (Biener et al., 2022[81]). Dans cette étude, les participants ont travaillé soit dans un environnement de bureau traditionnel, soit dans un environnement de réalité virtuelle, huit heures par jour pendant cinq jours d’affilée. Les résultats ont montré que, par rapport à l’environnement de bureau traditionnel, les personnes qui ont travaillé dans un environnement de réalité virtuelle ont jugé la facilité d’utilisation moins bonne et ont été relativement nombreuses à souffrir du mal des simulateurs. En outre, deux participants à l’étude ont dû abandonner l’expérience dès le premier jour en raison d’un inconfort physique, notamment de nausées et de migraines. Toutefois, ceux qui ont poursuivi l’expérience ont un peu mieux noté la facilité d’utilisation au fil de la semaine.
Assurer la gouvernance de la réalité virtuelle
Copier le lien de Assurer la gouvernance de la réalité virtuelleLa technologie évolue en général plus rapidement que les cadres réglementaires. La transformation numérique est complexe et présente de multiples facettes. Un cadre d’action sur le numérique complet et coordonné, tel que le Cadre d’action intégré du projet « Vers le numérique » (OCDE, 2020[82]), s’avère par conséquent essentiel. Un tel cadre permet de s’assurer que les technologies numériques sont, dans l’ensemble, une force positive pour les individus et la société. À mesure que la réalité virtuelle se généralise, les décideurs doivent se demander si elle présente des caractéristiques uniques. Les pouvoirs publics doivent-ils prendre des mesures spécifiques ou les règles existantes qui régissent la transformation numérique (protection de la vie privée, sécurité numérique ou concurrence) sont-elles suffisantes ?
La réalité virtuelle et les autres technologies immersives sont arrivées à une étape charnière : elles sont suffisamment développées pour que les possibilités et les risques qui les accompagnent soient identifiés, mais l’action des pouvoirs publics est encore en mesure de façonner leur évolution future. De nombreux pays prennent conscience de la nécessité d’une action unifiée des pouvoirs publics dans le domaine de la réalité virtuelle et des autres technologies immersives, dont le métavers. Les dirigeants des pays du G7 ont souligné que la gouvernance de la transformation numérique devait refléter des valeurs démocratiques communes (G7, 2023[83]). Alors qu’il est important d’adopter une approche technologiquement neutre de l’élaboration des politiques du numérique, cette section examine la façon dont les cadres d’action pourraient devoir être adaptés – ou complétés – afin d’ouvrir la voie à un avenir immersif positif.
L’action des pouvoirs publics en matière de réalité virtuelle et de technologies immersives est axée sur la promotion du secteur national
Copier le lien de L’action des pouvoirs publics en matière de réalité virtuelle et de technologies immersives est axée sur la promotion du secteur nationalLes initiatives des pouvoirs publics portant sur la réalité virtuelle et les technologies immersives en général sont limitées. Les données qui ressortent des réponses au questionnaire établi pour l’édition 2024 des Perspectives de l’économie numérique tendent à montrer que l’action des pouvoirs publics est principalement axée sur le soutien au développement des technologies immersives au niveau national. Par exemple, la stratégie « Digital Luxembourg » comprend un programme de financement de la réalité virtuelle4. L’Espagne accorde des subventions pour promouvoir des projets utilisant des technologies immersives5, l’Allemagne finance des programmes liés à des technologies immersives6 et la Corée dispose d’une stratégie de promotion de l’industrie du métavers7. À Singapour, le PIXEL Innovation Hub8 met notamment l’accent sur la réalité virtuelle et les technologies immersives, et la Finlande promeut ces technologies par le biais de sa stratégie nationale pour le métavers9. Aux États-Unis, la loi CHIPS and Science Act, promulguée en 2022, charge le gouvernement fédéral de mener un programme de recherche sur la mesure dans le domaine des technologies des communications, dont la réalité virtuelle et d’autres « technologies immersives » (Gouvernement des États-Unis, 2022[84]).
La Belgique se distingue en ce qu’elle a pris des mesures dans un secteur particulier : celui de l’éducation. Son plan d’action pour la réalité étendue vise à intégrer cette dernière dans l’enseignement secondaire technique et professionnel. À cette fin, elle promeut la formation à l’utilisation de la réalité étendue et son développement dans l’enseignement. Une coopération avec les universités belges de sciences appliquées est prévue afin d’aider à analyser la nature et l’efficacité du plan10. Des projets pilotes menés dans certaines provinces espagnoles dans le cadre d’« InnoVET XR » encourageront la création de nouveaux logiciels et applications destinés à l’enseignement technique et professionnel11. Aux États-Unis, une tendance similaire se fait jour. En décembre 2022, Lisa Blunt, membre de la Chambre des représentants, a présenté le projet de loi Immersive Technology for the American Workforce Act. Le texte proposé avait pour but de financer l’utilisation de technologies immersives pour former les travailleurs dans les community colleges et d’autres centres éducatifs, mais il n’a pas été adopté par le Congrès (Davalos, 2023[85]).
Les réponses au questionnaire établi pour l’édition 2024 des Perspectives de l’économie numérique montrent également que certains pays adoptent la réalité virtuelle et d’autres technologies immersives en vue d’améliorer leurs services publics. L’Autriche teste une application qui utilise la réalité augmentée pour rationaliser les contrôles douaniers en superposant des informations numériques sur un véhicule. La Türkiye exploite les technologies immersives dans le secteur culturel pour promouvoir les visites virtuelles interactives de sites culturels et stimuler le tourisme. Les États-Unis ont pris des mesures pour intégrer la réalité augmentée afin de faciliter le contrôle des passagers dans les aéroports, l’objectif étant de renforcer la sécurité tout en fluidifiant les contrôles (Deloitte, 2021[86]). Le gouvernement régional de Corée a quant à lui créé « Metaverse Seoul ». Cette plateforme permet aux citoyens d’accéder à divers services publics, notamment de déposer une plainte et de discuter avec des fonctionnaires par l’intermédiaire d’avatars12. Enfin, le Luxembourg a lancé « Luxembourg Megaverse » et la Commission européenne finance le développement de « citiverses », des environnements immersifs pour découvrir de façon attrayante les processus d’élaboration des politiques (Hupont Torres et al., 2023[87]).
L’Espagne encourage activement l’intégration des groupes défavorisés, en particulier des femmes, dans le cadre du financement des initiatives impliquant des technologies immersives13. Cette démarche est importante, car les études montrent que les femmes ressentent plus souvent que les hommes un inconfort lorsqu’elles portent un casque de réalité virtuelle (Stanney et al., 2003[88] ; Munafo, Diedrick et Stoffregen, 2017[89]) et qu’elles sont moins enclines à en acheter (Kommando Tech, 2022[90]). L’Australie reconnaît également la nécessité de concevoir du matériel immersif en veillant à promouvoir un accès inclusif (Australian eSafety Commissioner, 2020[91]). D’autres décideurs manifestent également de l’intérêt pour l’adoption d’une législation spécifique sur les technologies immersives. Par exemple, la Commission européenne a annoncé son intention de proposer une législation « sur les mondes virtuels, notamment le métavers » (Commission européenne, 2022[92]).
Vers la définition de « droits » ou de « principes » relatifs à la réalité virtuelle et aux technologies immersives
Copier le lien de Vers la définition de « droits » ou de « principes » relatifs à la réalité virtuelle et aux technologies immersivesCompte tenu des limites des approches réglementaires lorsqu’il s’agit de traiter les questions soulevées par les expériences de réalité virtuelle (Dick, 2021[93]), les universitaires et les décideurs s’intéressent à la définition de « droits » ou de « principes » pour la réalité virtuelle et les environnements immersifs. Dans un rapport publié en juillet 2023, le Japon préconise de favoriser une reconnaissance internationale commune du métavers et encourage une utilisation digne de confiance des technologies associées, basée sur les valeurs démocratiques (MIC, 2022[3]). Les chercheurs jugent par ailleurs crucial de veiller à garantir un accès équitable et l’authenticité dans le contexte de la réalité virtuelle et des expériences immersives.
Si la réalité virtuelle et les environnements immersifs deviennent des lieux de travail, d’apprentissage et d’interaction, ils doivent être accessibles à tous. La capacité du matériel de réalité virtuelle à s’adapter à des personnes et des morphologies diverses devrait être une priorité. Comme indiqué plus haut, de nombreux casques de réalité virtuelle disponibles sur le marché ne sont pas agréables à porter pour les femmes, entraînant inconfort et nausées (Stanney, Fidopiastis et Foster, 2020[94]). Cela peut expliquer en partie pourquoi la plupart des acheteurs de casques de réalité virtuelle sont des hommes (Kommando Tech, 2022[90]). Si l’accessibilité de la réalité virtuelle n’est pas améliorée, les fractures numériques pourraient se creuser. Par conséquent, il importe de garantir un accès équitable et effectif aux environnements immersifs, y compris pour les femmes, les personnes handicapées et les minorités culturelles (Dick, 2021[95] ; Heller, 2022[96]).
Certains soutiennent aussi que, dans les environnements immersifs, les utilisateurs devraient bénéficier de « droits » garantis (le droit à des expériences « authentiques »). La plupart des adultes sont capables d’identifier les publicités dans les mondes physique et numérique comme étant des messages rémunérés. En revanche, dans la réalité virtuelle et les autres environnements immersifs, les annonceurs peuvent atténuer le contexte en brouillant les lignes entre les expériences authentiques et celles conçues à des fins commerciales, à l’insu des utilisateurs (Rosenberg, 2022[97]). L’« auto-approbation » possible dans la réalité virtuelle représente une nouvelle et puissante stratégie publicitaire (Ahn et Bailenson, 2011[98]). Une approche pourrait consister à exiger que les personnes et les artefacts conçus à des fins commerciales soient visuellement et auditivement différents dans les environnements immersifs. Les utilisateurs pourraient ainsi percevoir les expériences modifiées à des fins promotionnelles comme différentes de celles qui sont authentiques.
La Corée est à l’avant-garde de l’élaboration de principes applicables à la réalité virtuelle et a annoncé en 2022 un ensemble de lignes directrices éthiques non contraignantes pour la mise au point et l’utilisation de services dans le métavers14. Ces principes éthiques du métavers visent à guider les développeurs et les consommateurs en s’appuyant sur trois valeurs fondamentales : l’identité propre, des expériences sûres et une prospérité durable. Ces valeurs visent à garantir que les individus puissent disposer de l’autonomie nécessaire pour incarner de manière authentique les identités qu’ils ont choisies (identité propre) et profiter des environnements immersifs en toute sécurité (expériences sûres). En outre, ces principes prévoient que chaque individu a le droit de bénéficier des environnements immersifs sans en être intentionnellement exclu, ces droits devant être étendus aux générations futures (prospérité durable).
Pour mettre en œuvre ces valeurs fondamentales, la Corée propose huit principes pratiques : l’authenticité, l’autonomie, la réciprocité, le respect de la vie privée, l’équité, la protection des informations à caractère personnel, l’inclusion et la responsabilité quant à l’avenir. Le principe d’authenticité, par exemple, encourage les utilisateurs à définir avec sincérité leurs identités virtuelles et à agir en y restant fidèles, en ayant à l’esprit l’incidence du moi virtuel sur le moi réel. De même, les développeurs sont invités à permettre aux utilisateurs de se présenter sous un jour aussi proche que possible de leur personnalité réelle.
Les données issues des applications de réalité virtuelle posent de nouveaux défis aux cadres de protection de la vie privée existants
Copier le lien de Les données issues des applications de réalité virtuelle posent de nouveaux défis aux cadres de protection de la vie privée existantsLa réalité virtuelle et les environnements immersifs amplifient et étendent les problèmes de protection de la vie privée. Les décideurs et les parties prenantes, y compris les autorités chargées de veiller au respect de la vie privée, cherchent donc à clarifier l’application des réglementations pertinentes en la matière à ces nouvelles réalités. À cette fin, ils s’attachent à identifier des mesures d’atténuation appropriées, notamment des solutions technologiques intégrées aux applications de réalité virtuelle.
Comment les contextes, les activités et les sources de données aident-ils à repérer les algorithmes, les technologies protectrices de la vie privée (OCDE, 2023[99]) et les mesures propres à protéger la vie privée et en soutiennent-ils l’élaboration ? Comprendre ce qui influence la précision des techniques de désanonymisation peut aider les chercheurs à définir des moyens plus efficaces de limiter les risques pour les utilisateurs finaux. Cette approche peut favoriser le développement de produits de réalité virtuelle intégrant le respect de la vie privée dès la conception, notamment les technologies protectrices de la vie privée telles que les analyses fédérées et les environnements d’exécution fiables15 (OCDE, 2023[99]). Un environnement d’exécution de confiance protège les données vis-à-vis des applications tierces en les traitant dans un environnement sécurisé, sur l’appareil.
Aucune politique ne cible les données uniques collectées par les applications de réalité virtuelle ni la manière dont elles sont utilisées ou partagées. Cependant, un nombre croissant de cadres juridiques relatifs à la protection de la vie privée, tels que le Règlement général sur la protection des données de l’Union européenne (Union européenne, 2016[100]), traitent déjà des données biométriques et s’appliquent donc directement à la réalité virtuelle. Le traitement des données biométriques dans la réalité virtuelle est souvent soumis à des dispositions renforcées (telles que le consentement explicite de l’utilisateur ou l’autorisation légale) en fonction de leur finalité.
Comment ces définitions peuvent-elles rester pertinentes au fil du temps ? Certaines dispositions peuvent se révéler trop spécifiques à mesure que les développements technologiques progressent plus rapidement que la réglementation. Par exemple aux États-Unis, la loi de l’État de l’Illinois Biometric Information Privacy Act s’applique aux informations basées sur des lectures de la géométrie de la main ou du visage, de la rétine ou de l’iris, et des empreintes vocales. Cette définition des « identifiants biométriques » ne couvre pas explicitement la collecte de caractéristiques comportementales ou le suivi des yeux, ce qui rend son application aux données de réalité virtuelle incertaine (Berrick et Spivack, 17 novembre 2022[101]).
En outre, la réalité virtuelle crée pour la législation une dynamique nouvelle dont le socle demeure le consentement. Par exemple, un utilisateur ne peut pas vivre une expérience de réalité virtuelle sans consentir aux conditions générales d’utilisation du système concerné. Le traitement de ces données est indispensable pour garantir une expérience immersive réaliste. Étant donné qu’il n’existe aucun moyen d’« exercer son option de retrait » ou de « rester incognito » dans la réalité virtuelle, de nouvelles approches seront nécessaires pour protéger de manière appropriée la vie privée des utilisateurs.
De plus, il est possible que les utilisateurs ne comprennent pas parfaitement de quelle façon leurs données hautement personnelles peuvent être monétisées. Ils peuvent également ne pas être informés des techniques subliminales ou des décisions automatisées susceptibles de leur causer du tort (Barros Vale et Berrick, 2023[102]). Cela conduit à s’interroger sur la pertinence d’une législation centrée sur le consentement, qui fait peser sur les individus une charge décisionnelle injuste.
Autre difficulté, les exigences relatives au consentement s’ajoutent généralement à d’autres exigences de base, telles que la transparence, l’équité, la limitation de la finalité, la minimisation des données ou la limitation du stockage. Certains de ces principes peuvent peser sensiblement sur le développement de la réalité virtuelle et d’autres technologies immersives. En particulier le principe de « minimisation des données » (selon lequel seules les données strictement nécessaires doivent être collectées pour l’objectif visé) intègre le consentement dès la conception des applications de réalité virtuelle et autres technologies immersives.
Les développeurs de réalité virtuelle doivent également réussir le test de la « compatibilité des finalités ». Les données biométriques et de suivi peuvent par exemple être utilisées efficacement à des fins d’authentification (les données de reconnaissance faciale peuvent faciliter l’accès à des sites web protégés par un mot de passe). Cette mesure peut contribuer à protéger les jeunes enfants en détectant automatiquement s’ils utilisent le casque de réalité virtuelle de leurs parents. Elle peut également améliorer les soins de santé et la réadaptation médicale (voir ci-dessus). Dans le même temps, les données biométriques et de suivi peuvent servir à identifier des personnes à des fins qui ne sont pas toujours transparentes (création d’un profil utilisateur pour des publicités ciblées, par exemple) (Miller et al., 2020[63]).
Le comportement de l’utilisateur capturé par les données de suivi a aussi été associé à des problèmes médicaux (tels que la démence ou le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) (Cherniack, 2011[103]), ce qui soulève des questions quant à la discrimination (par des employeurs potentiels ou des compagnies d’assurance). À mesure que la réalité virtuelle passe du suivi par l’intermédiaire du casque au suivi du corps entier, les données de mouvement permettront de déterminer avec encore plus de précision l’identité de l’utilisateur. Ces risques de « détournement d’usage » soulèvent de nouvelles questions quant à savoir si et comment les entités proposant des expériences immersives devraient se voir interdire de créer et/ou de partager les profils comportementaux ou émotionnels des utilisateurs.
La réalité virtuelle suscite une autre interrogation liée à la protection de la vie privée : comment traiter les données « à caractère personnel » des avatars – un nouveau type d’acteur de cet univers immersif. Dans certaines applications de réalité virtuelle, un utilisateur peut créer plusieurs avatars ou personnalités (dénommés « alts ») ayant des identités différentes. À qui appartiennent ces « données personnelles » ? Comment le vol d’identité d’avatar sera-t-il traité (Madiega, Car et Niestadt, 2022[104]) ? À première vue, il peut sembler que les avatars participent aux expériences de réalité virtuelle de manière anonyme. Néanmoins, une fois qu’un système de réalité virtuelle a correctement associé le nom d’un utilisateur aux données de suivi, il devient extrêmement difficile de ré-anonymiser cet utilisateur (Bailenson, 2018[105]).
Définir qui est le responsable du traitement des données et qui est le sous-traitant des données est parfois difficile dans la réalité virtuelle et les environnements immersifs (Madiega, Car et Niestadt, 2022[104]). Un défi de gouvernance partagé avec l’internet des objets consiste donc à clarifier la chaîne des responsabilités dans la réalité virtuelle entre les différentes parties prenantes, des fabricants d’appareils aux fournisseurs de services de réalité virtuelle, en passant par les développeurs d’applications, les propriétaires des algorithmes sous-jacents et les fournisseurs de réseaux. Quand les données seront-elles produites, collectées et partagées sur la base des choix de ces parties prenantes et à quels moments du fonctionnement du système de réalité virtuelle ? La responsabilité est parfois difficile à prouver, et les responsabilités juridiques et éthiques en cas d’erreur, de piratage ou d’accident sont parfois loin d’être claires. Cette chaîne de responsabilités peut également être brouillée par l’applicabilité d’autres lois, notamment celles liées à la protection des consommateurs, à la non-discrimination, au respect de la vie privée, à la protection des données et aux recours judiciaires efficaces.
La sécurité mentale et physique dans la réalité virtuelle doit être appréhendée avec la plus grande attention
Copier le lien de La sécurité mentale et physique dans la réalité virtuelle doit être appréhendée avec la plus grande attentionSi ce chapitre décrit les effets positifs de la réalité virtuelle sur la santé mentale, les comportements indésirables dans les environnements numériques (tels que la cyberintimidation, le harcèlement, l’utilisation excessive et la dépendance) entraînent également des risques pour la santé mentale. Ces risques peuvent se révéler encore plus dangereux dans les environnements immersifs (Danaher, 2018[42]) (voir également le Coup de projecteur « La santé mentale dans les environnements numériques »). Les phénomènes comme le sentiment de présence, l’émotion et l’immersion amènent les utilisateurs à ressentir plus profondément les effets des contenus à charge émotionnelle, y compris ceux des menaces violentes, car ces contenus ne sont pas abstraits, mais entraînent une réaction instinctive. Les applications de réalité virtuelle devraient intégrer dès la conception des fonctions de sécurité qui permettent aux utilisateurs de se protéger contre les acteurs malveillants. Par exemple, dans Horizon Worlds et Horizon Venues, la fonctionnalité de « limite personnelle » de Meta empêche les avatars de s’approcher à moins d’un mètre les uns des autres (Tabahriti, 2022[106]).
Outre les risques pour la santé mentale, il importe également de prêter attention aux dommages physiques que peuvent causer la réalité virtuelle et les environnements immersifs. Les décideurs pourraient vouloir donner la priorité à la réglementation de l’utilisation de la réalité virtuelle dans les voitures et autres véhicules mobiles. Le jeu Pokémon GO (voir plus haut) et le nombre important de décès dus à l’utilisation de smartphones en conduisant ont mis en évidence les problèmes de sécurité liés aux véhicules en mouvement. En 2021, la distraction au volant a causé 3 522 décès aux États-Unis et de nombreux États américains ont adopté des lois interdisant l’envoi de SMS et l’utilisation d’un téléphone portable au volant (US DOT, 2022[107]). Il n’est pas certain que les avantages que les conducteurs pourraient retirer du port d’un casque de réalité virtuelle ou de réalité augmentée, qui bloque ou entrave leur capacité à voir le « monde réel », l’emportent sur les risques associés.
Les principes de sécurité dès la conception sont également importants dans la réalité virtuelle et les autres expériences immersives, notamment le contrôle parental, la vérification de l’âge et la modération de contenu (OCDE, À paraître[108]). Certaines applications immersives intègrent un contrôle humain et automatisé des images, des règles et un filtrage automatisés du dialogue en ligne, des restrictions propres au dialogue en ligne, un signalement de la communauté et des contrôles utilisateur et parental16.
De plus amples études sur les effets de la réalité virtuelle sur les enfants sont nécessaires, mais en attendant leurs résultats, la modération doit prévaloir. Vivre une expérience effrayante dans la réalité virtuelle peut marquer un enfant. Au lieu de parler en heures d’utilisation, comme pour d’autres appareils numériques, il est important de penser ici en termes de minutes. La sécurité physique est un autre facteur particulièrement important pour les enfants. Dans la mesure où la réalité virtuelle bloque le monde réel, ils doivent toujours être surveillés lorsqu’ils l’utilisent.
Les entreprises spécialisées dans la réalité virtuelle s’impliquent dans l’autorégulation
Copier le lien de Les entreprises spécialisées dans la réalité virtuelle s’impliquent dans l’autorégulationEn l’absence de politiques publiques globales, les entreprises spécialisées dans la réalité virtuelle ont élaboré leurs propres lignes directrices. Valve, l’une des plus grandes plateformes d’achat de jeux et d’expériences de réalité virtuelle, a adopté une approche minimaliste de la modération de contenu autonome. Elle autorise toute personne à mettre en ligne du contenu sur son magasin Steam, excepté si ce contenu est identifié comme étant « illégal » ou du « trolling » (perturbations volontaires visant à semer le trouble) (Steam, 2018[109]). En avril 2023, le magasin Steam proposait au téléchargement plus de 4 500 applications de réalité virtuelle.
Meta détenant une part considérable du marché des casques de réalité virtuelle (80 % en 2022), son exemple est particulièrement significatif. Son code de conduite (Meta, 2022[110]) condamne la sexualisation des mineurs, la cyberintimidation, le harcèlement, les comportements haineux, l’apologie de la violence, la traite des êtres humains, le soutien au terrorisme, aux organisations fondées sur la haine et aux groupes criminels, la promotion ou la coordination d’actes suicidaires et le partage d’images intimes d’autrui sans le consentement de l’intéressé. C’est aux créateurs de réalité virtuelle et aux développeurs d’applications qu’il incombe en premier lieu de veiller au respect de ces règles.
L’importance de l’autorégulation diffère selon que les utilisateurs vivent une expérience de réalité virtuelle autonome ou sociale. Le code de conduite de Meta s’applique à la réalité virtuelle autonome ; la régulation du contenu dans son application sociale, Horizon Worlds, est plus stricte. En cas de non-respect de son code de conduite, Meta suspend temporairement ou définitivement les comptes en infraction, principalement sur la base d’une modération humaine du contenu (Meta, 2022[110]). Dans certains cas, des guides communautaires, qui sont des personnes payées pour porter un casque, maintiennent l’ordre et bannissent les utilisateurs malveillants. Dans d’autres cas, les membres de la communauté signalent les comportements perturbateurs directement à la plateforme ou éliminent les joueurs par vote.
VRChat, société spécialisée dès l’origine dans la réalité virtuelle (par opposition aux écrans 2D), offre un autre exemple de modération sociale de la réalité virtuelle. Toutefois, elle n’a pas tenté de réadapter les normes héritées des médias sociaux. Dès sa création, VRChat s’est attachée à permettre aux acteurs d’une scène d’expulser les personnes malveillantes du monde virtuel par un vote de la communauté. Il s’agit toutefois d’un processus lourd qui nécessite à la fois la détermination de l’intention malveillante et le consensus de plusieurs parties à l’environnement. Dans la pratique, il est difficile d’expulser une personne malveillante par un vote de la communauté (Freeman et al., 2022[111]). Pour compliquer encore plus la situation, les plateformes sociales de réalité virtuelle actuelles regorgent d’enfants mineurs qui contournent la limite d’âge minimum imposée (Nix, 2023[112]).
Références
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Notes
Copier le lien de Notes← 1. Le magasin Steam est un vendeur d’applications de réalité virtuelle très populaire.
← 2. Les dispositifs haptiques simulent l’expérience du toucher par des vibrations ou des mouvements.
← 3. Même si certains rencontrent un grand succès, les jeux vidéo en réalité virtuelle génèrent beaucoup moins de revenus que les jeux vidéo en 2D. En 2022, les dépenses totales consacrées aux jeux vidéo ont atteint 56.6 milliards USD aux États-Unis (ESA, 2023[119]). Par comparaison, Beat Saber, le jeu vidéo en réalité virtuelle le plus vendu cette année-là, avait généré 255 millions USD en octobre 2022 (Bezmalinovic, 2023[118]).
← 4. Pour plus d’informations, voir : https://digital-skills-jobs.europa.eu/en/actions/national-initiatives/national-strategies/luxembourg-digital-luxembourg-initiative#:~:text=Digital%20Luxembourg%20is%20an%20ongoing,within%20the%20national%20tech%20sphere.
← 5. Pour plus d’informations, voir : https://spainaudiovisualhub.mineco.gob.es/en/actualidad/publicada-convocatoria-metaverso-web3, www.red.es/es/actualidad/noticias/la-incubadora-de-empresas-del-sector-tecnologico-sobre-realidad-virtual-y et www.boe.es/boe/dias/2021/12/22/pdfs/BOE-A-2021-21192.pdf.
← 6. Pour plus d’informations, voir : https://bmdv.bund.de/SharedDocs/EN/Articles/DG/mFund-overview.html.
← 7. Pour plus d’informations, voir : www.msit.go.kr/bbs/view.do?sCode=user&mId=113&mPid=238&pageIndex=2&bbsSeqNo=94&nttSeqNo=3181303&searchOpt=ALL&searchTxt=%EB%A9%94%ED%83%80%EB%B2%84%EC%8A%A4.
← 8. Pour plus d’informations, voir : https://pixel.imda.gov.sg.
← 9. Pour plus d’informations, voir : www.businessfinland.fi/en/whats-new/blogs/2022/what-is-the-metaverse--humanitys-digital-future.
← 10. Pour plus d’informations, voir : www.vlaanderen.be/kenniscentrum-digisprong/nieuws/ga-jij-binnenkort-aan-de-slag-met-xr-in-je-school.
← 11. Pour plus d’informations, voir : https://onderwijs.vlaanderen.be/nl/onderwijspersoneel/van-basis-tot-volwassenenonderwijs/lespraktijk/extended-reality-in-de-klas.
← 12. Pour plus d’informations, voir : www.seoul.go.kr/news/news_report.do#view/378498.
← 13. Pour plus d’informations, voir : https://spainaudiovisualhub.mineco.gob.es/en/actualidad/publicada-convocatoria-metaverso-web3.
← 14. Cet ensemble de principes est le fruit du travail d’un groupe de recherche chargé d’étudier la sensibilisation, les expériences et les préoccupations du public à l’égard du métavers dans le cadre d’une enquête menée à l’échelle nationale auprès de 2 626 personnes âgées de 20 à 69 ans. Parmi les questions soulevées par l’enquête figurent les comportements antisociaux et contraires à l’éthique, la fracture numérique, les atteintes à la vie privée et aux informations personnelles, ainsi que les restrictions potentielles liées aux activités créatives. Pour de plus amples informations sur les principes éthiques du métavers coréens, voir : www.msit.go.kr/bbs/view.do?sCode=user&mId=113&mPid=238&pageIndex=1&bbsSeqNo=94&nttSeqNo=3182405&searchOpt=ALL&searchTxt=%EB%A9%94%ED%83%80%EB%B2%84%EC%8A%A4.
← 15. Vision Pro d’Apple en est un exemple. Apple affirme que les données fédérées Optic ID restent cryptées, ne quittent jamais l’appareil de l’utilisateur et sont uniquement accessibles à l’environnement d’exécution de confiance de l’appareil (le processeur Secure Enclave). En outre, le traitement, au niveau du système, des données provenant des caméras et des capteurs évite que chaque application accède à l’environnement de l’utilisateur, tout en permettant les expériences spatiales.
← 16. Les fonctions de sécurité de la plateforme Roblox en sont un exemple. Pour plus d’informations, voir : https://en.help.roblox.com/hc/fr/articles/203313120-Fonctionnalit%C3%A9s-de-s%C3%A9curit%C3%A9-chat-confidentialit%C3%A9-et-filtrage.