Ce chapitre intervient à la suite des analyses et recommandations sur l’environnement propice au gouvernement ouvert, qui soulignent l’importance d’avoir un programme de gouvernement ouvert intégré, en assurant la pertinence et les synergies des cadres législatif, politique et institutionnel. Le présent chapitre fournit des recommandations sur les moyens de créer des processus et mécanismes de gouvernance qui permettent de mettre en pratique une approche intégrée de gouvernement ouvert.
Examen du gouvernement ouvert au Maroc 2024
2. Les processus de promotion de la culture de l’ouverture au Maroc
Abstract
2.1. Introduction
Selon la théorie du changement élaborée par l’OCDE (voir Graphique 2.1), afin de favoriser une culture du gouvernement ouvert, les gouvernements doivent établir des processus et des mécanismes qui permettent de transformer les préconditions pour un gouvernement ouvert que sont un cadre légal, politique et institutionnel en actions et initiatives concrètes en faveur de l’ouverture. Si les pays sont à différentes étapes de leur processus d’ouverture, le Cadre de l’OCDE pour l’évaluation de l’ouverture des gouvernements (OCDE, 2020[1]) recense les processus clés soutenant l’avènement d’une culture du gouvernement ouvert.
On compte ainsi quatre étapes incontournables et interdépendantes qui reflètent les dispositions de la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert :
La coordination des politiques et pratiques de gouvernement ouvert.
Le renforcement des capacités et la promotion de la culture du gouvernement ouvert dans l’administration et parmi les parties prenantes.
Le suivi et l’évaluation des politiques et pratiques de gouvernement ouvert.
L’usage stratégique de la communication externe et interne pour les réformes du gouvernement ouvert.
Ce chapitre souligne l’importance de poursuivre le processus d’ouverture au Maroc à travers des mécanismes de coordination plus étendus et inclusifs. Ceux-ci nécessitent de rassembler toutes les institutions et parties prenantes pertinentes contribuant à la mise en œuvre d’initiatives de promotion des principes du gouvernement ouvert. Il souligne ensuite le besoin de renforcer les capacités de pilotage de l’agenda du gouvernement ouvert et de diversifier ses outils et vecteurs de promotion au sein d’une administration et d’un public souvent peu familiers de son concept ou de ses bénéfices. Il reconnaît également les importants efforts de suivi des acteurs institutionnels du gouvernement ouvert au Maroc et suggère de développer des mécanismes visant à mieux identifier l’impact de la mise en œuvre des politiques de gouvernement ouvert, de manière à permettre leurs ajustements et une meilleure planification. Enfin, il recommande, dans la logique de développement d’une approche intégrée de gouvernement ouvert, de mutualiser les efforts de communication à ce sujet au sein du gouvernement et de développer davantage les opportunités de communication bidirectionnelle, de manière à systématiser et formaliser les échanges avec les citoyens sur les réformes en cours.
2.2. Coordonner les politiques publiques et pratiques du gouvernement ouvert
Comme stipulé dans la disposition 4 de la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert, les gouvernements devraient « coordonner, au moyen des dispositifs institutionnels requis, les stratégies et initiatives – horizontalement et verticalement – à tous les niveaux de gouvernement afin d’assurer leur cohérence avec l’ensemble des objectifs socioéconomiques pertinents et afin de veiller à ce qu’elles contribuent à ces objectifs » (OCDE, 2017[2]). En effet, si les politiques publiques de gouvernement ouvert sont transversales par nature, les programmes en matière de participation, transparence ou redevabilité ont de nombreuses interconnexions et poursuivent des objectifs similaires de bonne gouvernance, de promotion de la démocratie et de croissance inclusive. Dans ce sens, de nombreux pays ont mis en place un comité multipartite pour assurer la coordination de leurs initiatives dans le cadre de leurs plans d’action nationaux (PAN) du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO).
Cependant, les analyses de l’OCDE démontrent que les initiatives en matière de gouvernement ouvert sont encore souvent fragmentées et ne parviennent ainsi que partiellement à atteindre les objectifs d’ouverture du gouvernement. Par ailleurs, le lien avec d’autres politiques publiques en matière de transformation numérique ou de lutte contre la corruption est peu souvent formalisé dans les phases de mise en œuvre ou de suivi. Ces éléments entravent l’impact des programmes de modernisation de l’État et la dynamique de promotion d’un État ouvert, qui représente un objectif d’ouverture intégrée et holistique. À ce titre, il est indispensable de mettre en place des mécanismes structurés de dialogue entre les institutions et avec toutes les parties prenantes, pour assurer la cohérence nécessaire et l’impact des politiques publiques engagées, ainsi que pour susciter une vision commune autour de l’ouverture du pays.
Au Maroc, il existe une velléité de créer des instances de coordination pour les politiques et pratiques d’ouverture, en particulier dans le cadre du processus du PGO, comme l’illustrent le comité de pilotage mixte du PGO ainsi que son comité d’implémentation. Ces mécanismes, dans leur ensemble (en matière de gouvernement ouvert, d’open data, de développement numérique et de lutte contre la corruption), demeurent cependant peu connectés entre eux. Cette section recommande, en conséquence, la création d’un Conseil national du gouvernement ouvert jouissant d’une gouvernance adaptée aux divers publics impliqués et thématiques traitées.
2.2.1. Au Maroc comme dans les autres pays, le nombre d’institutions engagées dans des initiatives d’ouverture implique une coordination étendue
Afin que les acteurs institutionnels du gouvernement ouvert puissent mettre en place des initiatives pertinentes au regard de l’efficacité des politiques publiques et de la satisfaction citoyenne, il est important qu’elles puissent être mises en œuvre de manière coordonnée à la fois horizontalement et verticalement, par le biais de mécanismes dédiés. À cet égard, les pays sont confrontés à différents défis pour coordonner les initiatives de gouvernement ouvert. Ces défis peuvent être liés au mandat de l’institution de coordination, à l’insuffisance de ressources financières et/ou au manque d’incitations à la coordination entre les institutions gouvernementales, entre autres (voir Graphique 2.2) (OCDE, 2019[3]).
Compte tenu du nombre important d’institutions impliquées dans le programme de gouvernement ouvert du Maroc et au-delà du processus du PGO, des mécanismes de coordination formels et informels sont essentiels pour assurer la cohérence des initiatives d’ouverture et leur alignement sur les priorités stratégiques nationales, en particulier dans le contexte du nouveau modèle de développement économique et social du pays.
2.2.2. Le Maroc a créé des mécanismes de coordination institutionnelle dans différents domaines du gouvernement ouvert
Le gouvernement ouvert se construit par nature à travers le dialogue de parties prenantes variées, publiques et non publiques, qui organisent sa planification, sa mise en œuvre, son suivi et son évaluation. Le Maroc a ainsi mis en place un certain nombre de mécanismes de coordination impliquant différents départements ministériels, ainsi que des représentants de la société civile et du secteur privé, comme détaillé dans le Tableau 2.1.
Tableau 2.1. Mécanisme de coordination impliquant des parties prenantes gouvernementales et non gouvernementales au Maroc
Nom du mécanisme de coordination |
Participants |
Instance de coordination |
Fréquence des réunions |
---|---|---|---|
Comité de pilotage du PGO |
11 représentants de l’administration, 11 représentants de la société civile |
Ministère de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration (MTNRA) |
Semestrielle |
Comité de pilotage Open Data |
Hauts responsables des départements ministériels clés (finances, Haut-Commissariat au plan, Agence de développement digital, MTNRA) |
Au moins deux réunions de coordination par an |
|
Conseil d’administration de l’Agence de développement digital |
Conseil présidé par le chef du gouvernement avec 20 membres au total provenant de l’administration, du secteur public et du secteur privé, dont 4 sont des représentants des associations professionnelles |
Annuelle |
|
Commission Nationale Anti-Corruption |
22 représentants des institutions et instances publiques, 2 représentant(e)s de la société civile et un représentant de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) |
Secrétariat permanent de la Commission nationale anti-corruption, tenu par le MTNRA |
Biannuelle |
Source : Élaboré à partir des réponses du Maroc à l’Enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (2020).
À l’exception du comité de pilotage du PGO, ces mécanismes n’ont pas eu pour finalité, à leur création, la promotion du gouvernement ouvert en tant que tel. Cependant, il a été largement reconnu qu’un gouvernement ouvert portant les principes de participation, transparence, redevabilité et intégrité joue un rôle crucial dans la réalisation des objectifs stratégiques portés par ces mécanismes, que ce soit l’intégrité du secteur public et la lutte contre la corruption, la modernisation du secteur public, les libertés publiques ou l’administration numérique. À ce titre, ces organes peuvent être considérés comme des enceintes de promotion et de mise en œuvre du gouvernement ouvert.
La Direction du dialogue et partenariat avec la société civile prépare également un projet de décret créant un comité de suivi du Plan d’action national en matière de démocratie et des droits de l’Homme (PANDDH). Ce texte envisage la participation de dix parties prenantes non publiques. Dans l’attente de la promulgation du décret, des points focaux assurent le suivi de la mise en œuvre du plan dans chaque département ministériel, chaque région et certaines universités.1
D’autres réseaux existent en matière de promotion de la transparence et assurent la coordination entre les départements ministériels. Les réseaux des points focaux de l’accès à l’information et des communicants publics se réunissent au moins deux fois par an et échangent très fréquemment à travers les réseaux sociaux, en particulier sur WhatsApp. De plus, en mars 2023, le MTNRA a lancé une nouvelle plateforme dédiée d’échange pour les membres du réseau de chargés d’accès à l’information, la plateforme ReDAI (ReDAI, s.d.[4]).
Les entretiens menés pour la réalisation de ce rapport ont souligné des efforts indéniables en matière de coordination de la part des administrations en charge des programmes d’ouverture. Cependant, il a également été noté que, de manière générale, un certain nombre d’améliorations pourraient être apportées. Parmi elles, les responsabilités pourraient être plus ou mieux définies, la coopération avec les parties prenantes non publiques pourrait être plus régulière, l’approche des programmes pourrait être plus cohérente, et les capacités humaines et financières pourraient être renforcées.
À cet égard, il est aussi opportun d’observer les travaux de 2019 de l’Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption (INPPLC) analysant les défis de la gouvernance propre à la mise en œuvre de la stratégie nationale anti-corruption. Le rapport « Stratégie Nationale Anti-Corruption, pour une nouvelle dynamique d’ensemble » pointe de cette manière la faible coopération entre les secteurs (y compris en termes d’échange d’informations), les moyens humains et financiers limités alloués à la commission, le manque d’adaptation des outils de suivi et enfin le conflit de priorités des fonctionnaires désignés, qui sont aussi ceux chargés de l’application des programmes dans les départements ministériels (INPPLC, 2019[5]).
2.2.3. La coordination du processus du PGO est réalisée par un comité de pilotage mixte et un comité d’implémentation
Presque tous les pays adhérents au PGO ont créé des forums multipartites pour assurer la mise en œuvre coordonnée des engagements entre les institutions publiques et les parties prenantes non publiques. Les données de l’OCDE recueillies au titre de l’enquête 2020 sur le gouvernement ouvert indiquent que ces forums ont vocation à examiner la mise en œuvre du PAN (dans 82 % des cas sondés), à définir les orientations du processus du plan d’action (dans 82 % des cas sondés) et à superviser le processus de cocréation (dans 72 % des cas sondés).
Depuis 2018 et son adhésion au PGO, le Maroc a envisagé une gouvernance propre à la mise en œuvre des PAN, formée d’un comité de pilotage, d’un comité d’implémentation et d’un forum de la société civile (en cours d’élaboration sous la forme d’un espace de la société civile) (voir Graphique 2.3).
Selon les entretiens menés pour ce rapport, ces comités ont permis de créer une réelle dynamique de réformes en matière de gouvernement ouvert autour de plusieurs départements ministériels, qui ont mis en œuvre leurs engagements du premier PAN (2018-20) à hauteur de 84 % en septembre 2021 et du second PAN (2021-2023) à hauteur de79 % en mai 2023, et ont joué le jeu de la coordination. Par ailleurs, dans le comité de pilotage, les OSC ont établi leurs propres critères et mécanismes de sélection des participants (voir également le chapitre 5 sur la participation). Cette capacité de la société civile à sélectionner de manière autonome ses représentants constitue une bonne pratique au regard des expériences internationales. Cependant, les entretiens ont permis d’identifier une volonté de l’ensemble des acteurs de renforcer encore la légitimité de cette enceinte en s’assurant qu’elle puisse refléter plus largement les attentes et propositions de la société civile dans sa diversité.
2.2.4. Un espace de la société civile pour représenter largement sa voix dans les réformes du gouvernement ouvert
Dans le schéma d’origine de la gouvernance des politiques de gouvernement ouvert, il a également été envisagé de mettre en place un Forum de la société civile, ouvert à toutes les associations souhaitant s’engager dans un espace de réflexion et de proposition et mobiliser largement la société civile pour faire avancer le gouvernement ouvert au Maroc.
Cependant, les associations du comité de pilotage responsables de sa mise en place et de sa coordination reconnaissent que le caractère bénévole du travail et l’éloignement géographique de ses membres éventuels ont retardé sa mise en place. Lors des entretiens menés en juillet 2021, il avait été indiqué que son lancement pourrait intervenir pendant le dernier trimestre 2021. Le Maroc a finalement fait le choix de la création d’un espace de la société civile en ligne, dont il sera important de veiller à la gouvernance, afin de satisfaire les attentes nombreuses des OSC tout en assurant une intégration optimale dans le schéma global de mise en œuvre et de suivi des réformes de gouvernement ouvert. L’exemple présenté dans l’Encadré 2.1 présente une initiative similaire au Royaume-Uni.
Encadré 2.1. Le Forum du gouvernement ouvert du Royaume-Uni
Le Royaume-Uni a fait le choix de créer un réseau de citoyens et d’OSC pour échanger des idées sur le gouvernement ouvert et, entre autres, travailler ensemble sur le plan d’action du PGO. Le réseau a également des antennes régionales en Irlande du Nord, en Écosse et au pays de Galles.
Source : (UK Open Governement, s.d.[6]).
2.2.5. Le Maroc pourrait envisager d’approfondir encore sa gouvernance du gouvernement ouvert pour refléter son approche intégrée des pratiques d’ouverture
Pour répondre au besoin de cohérence entre l’ensemble des politiques publiques de gouvernement ouvert, les données recueillies par l’OCDE ont permis d’observer les initiatives d’un certain nombre de pays. Ces initiatives visent à actualiser leur gouvernance du gouvernement ouvert, de manière à mieux refléter l’ensemble des pratiques d’ouverture au-delà de la coordination des processus PGO, ainsi que la diversité des parties prenantes impliquées. Certains pays ont par exemple choisi d’étendre le champ d’intervention de leurs forums multipartites, comme la Commission de travail pour l’ouverture du gouvernement et la transparence de l’administration publique de la République tchèque, qui a un large mandat de soutien à l’intégrité. D’autres pays, comme le Canada, ont décidé de créer un Comité interministériel des directeurs généraux du gouvernement ouvert, qui surveille l’application des principes du gouvernement ouvert dans l’ensemble du gouvernement, en complément du Forum multipartite. Enfin, l’Espagne, comme d’autres pays, a fait le choix d’instaurer un Forum du gouvernement ouvert facilitant la collaboration entre le gouvernement et la société civile concernant toutes les initiatives liées à l’ouverture du gouvernement et favorisant l’échange de bonnes pratiques. Le Forum dispose alors d’une commission permanente qui agit en tant qu’organe exécutif du Forum et se réunit une ou deux fois par an en séance plénière (voir Encadré 2.2).
Encadré 2.2. Les initiatives visant à élargir la gouvernance du gouvernement ouvert au-delà du processus du PGO
Le Comité interministériel des directeurs généraux du gouvernement ouvert au Canada
Au Canada, les initiatives de gouvernement ouvert sont coordonnées par le Comité interministériel des directeurs généraux du gouvernement ouvert. Le comité est présidé par le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) et se réunit tous les trimestres. Ce comité de niveau exécutif établit l’orientation stratégique des initiatives de gouvernement ouvert. Il agit à titre de comité directeur général, qui surveille la mise en œuvre du gouvernement ouvert dans l’ensemble du gouvernement du Canada. Le gouvernement du Canada a également mis sur pied un Conseil des directeurs généraux de la science ouverte, c’est-à-dire un comité composé de hauts fonctionnaires chargés de fournir une orientation stratégique pour les initiatives de science ouverte dans les ministères et organismes à vocation scientifique.
En plus de ces deux organismes, le Forum multipartite soutient le dialogue continu entre le gouvernement et la société civile canadienne sur le gouvernement ouvert. Son mandat consiste à fournir des commentaires et des conseils sur les engagements du gouvernement du Canada en matière de gouvernement ouvert, à identifier de nouveaux domaines d’intérêt et à bâtir la communauté du gouvernement ouvert à travers le Canada.
Le gouvernement fédéral, ainsi que les gouvernements provinciaux et territoriaux, collaborent également sur les questions de gouvernement ouvert par l’intermédiaire du Groupe de travail sur le gouvernement ouvert du Canada. Ce groupe se concentre sur les principes, les normes, les licences et les questions de sensibilisation et d’engagement concernant le gouvernement ouvert au Canada. Il contribue ainsi à un environnement propice au gouvernement ouvert au Canada.
Le Forum du gouvernement ouvert en Espagne
L’Espagne a mis en place un Forum sur le gouvernement ouvert en février 2018. Il est destiné à institutionnaliser la collaboration entre les administrations publiques de tous les niveaux de gouvernement et la société civile, pour renforcer le dialogue permanent sur la transparence, la collaboration, la participation et la responsabilité.
La réunion plénière du Forum se tient une ou deux fois par an. Plus de 70 représentants y participent et représentent des services de l’administration générale de l’État, des communautés autonomes, des villes, et de la Fédération espagnole des municipalités et des provinces, ainsi que des représentants de la société civile de l’Académie royale des sciences morales et politiques, des professeurs et maîtres de conférences universitaires, des OSC, du Conseil des consommateurs et des usagers, ainsi que du secteur privé.
Le Forum dispose également d’une commission permanente qui présente des propositions à l’assemblée plénière, coordonne les travaux commandés par cette dernière et agit en tant qu’organe exécutif du Forum. Enfin, le Forum dispose de trois groupes de travail, au sein desquels des sujets particuliers sont discutés, notamment : 1) la collaboration et la participation ; 2) la transparence et la redevabilité ; et 3) la formation et la sensibilisation. L’assemblée plénière et les groupes de travail assurent la participation externe et des échanges entre les différentes parties prenantes.
Sources : Réponses des pays à l’OCDE (2015), Enquête de l’OCDE sur la coordination du gouvernement ouvert et la participation des citoyens au cycle politique, OCDE, Paris ; (Gouvernement espagnol, s.d.[7]), Portal de la transparencia, « Forum du gouvernement ouvert », http://transparencia.gob.es/transparencia/transparencia_Home/index/Gobierno-abierto/ForoGA.html.
Au Maroc, le comité de pilotage n’est pas compétent au-delà du processus PGO, ce qui limite la possibilité d’une coordination globale des politiques publiques destinées à l’ouverture. Aussi, dans la perspective de créer une stratégie intégrée de gouvernement ouvert, le Maroc pourrait-il envisager d’adapter son schéma de gouvernance du gouvernement ouvert en actualisant son propre modèle au regard des bonnes pratiques internationales en la matière.
Au Maroc, pour assurer la mise en œuvre et le suivi de la stratégie, il pourrait être envisagé d’élargir le mandat et la représentation du comité de pilotage du processus du PGO. Cependant, il ne faudrait pas compromettre sa dynamique actuelle par un mandat trop élargi. En effet, le mécanisme actuel est efficace. Il mobilise les acteurs publics et non publics sur des engagements concrets et sur l’ancrage des pratiques de gouvernement ouvert dans la vie publique nationale. Une autre option consisterait à créer un comité institutionnel exécutif du gouvernement ouvert, en complément du comité de pilotage. Celui-ci serait, en quelque sorte, le « gardien » de la vision du gouvernement ouvert du pays et chargé de veiller à une mise en œuvre effective des orientations stratégiques de la nouvelle stratégie de gouvernement ouvert, en cohérence avec le programme gouvernemental du pays. Dans ce cas et pour assurer la légitimité et la pertinence de son action, il conviendrait de lui attribuer également un mandat d’animation d’un réseau de praticiens et d’experts publics et non publics. Il serait de plus redevable devant ce réseau, qui aurait une véritable responsabilité en matière de proposition et de décision auprès du comité.
Enfin, afin de soutenir la mise en œuvre d’une stratégie gouvernementale en matière de gouvernement ouvert, le Maroc pourrait faire un choix différent, à savoir celui d’une gouvernance pleinement intégrée. Pour ce faire, il instaurerait un Conseil/Comité national élargi du gouvernement ouvert, avec un mandat de coordination de l’ensemble des initiatives d’ouverture (dont la stratégie et les PAN du PGO). Cet organe serait composé de représentants des acteurs clés du gouvernement ouvert dans le pays, au sein du gouvernement et des institutions indépendantes, ainsi que de représentants clés de la société civile, d’universitaires, ainsi que de représentants du secteur privé et de syndicats (environ une trentaine de personnes). Régulièrement pendant l’année, il se réunirait au niveau des directeurs ou chefs de service. Il serait piloté par un secrétariat assurant le bon fonctionnement et la supervision du travail agréé.
Ses responsabilités seraient larges et couvriraient les tâches suivantes :
Orienter et coordonner la mise en œuvre de stratégies et d’initiatives de gouvernement ouvert dans le pays.
Diriger la conception et la mise en œuvre d’une stratégie nationale pour un gouvernement ouvert.
Diriger et coordonner la conception et la mise en œuvre des plans d’action du PGO du Maroc.
Surveiller et évaluer les stratégies et les initiatives de gouvernement ouvert.
Promouvoir le programme de gouvernement ouvert aux niveaux national et international.
Ce Conseil pourrait se réunir également en séance plénière, une ou deux fois par an, avec l’ensemble des acteurs du gouvernement ouvert et avec une représentation institutionnelle de haut niveau. Il permettrait alors un échange élargi sur les priorités politiques en matière d’ouverture, offrirait un espace de dialogue et d’échange de bonnes pratiques, et valoriserait les bénéfices du dialogue permanent entretenu par une communauté de praticiens en ligne, comme recommandé plus bas (voir Section 2.4.5).
Quel que soit le modèle choisi, il semble nécessaire d’aller dans le sens d’une plus grande mise en cohérence des politiques publiques en matière d’ouverture. Dans ce contexte, il apparaîtrait souhaitable que l’organe de coordination établi puisse se reposer sur un réseau clair et élargi de points de contact du gouvernement ouvert dans chaque institution, identifiés pour la mise en œuvre de la stratégie nationale du gouvernement ouvert. C’est le choix qu’a fait le Costa Rica en mettant en place un tel réseau de points de contact, appelé « Enlaces interinstitucionales » (voir Encadré 2.3). Ces points de contact seraient ainsi des acteurs de premier plan de la nouvelle gouvernance du gouvernement ouvert et participeraient à la réunion plénière biannuelle du Conseil. En effet, les points de contact actuels sont chargés de la conception et de la mise en œuvre du plan d’action PGO. Ils ne sont, en revanche, pas responsables de la promotion du gouvernement ouvert dans leurs institutions ou de la coordination de leurs politiques au-delà des engagements du PAN. Dans certains cas, le point de contact du gouvernement ouvert peut également être chargé de l’information, ce qui devrait être perçu comme une opportunité de renforcer son mandat.
Encadré 2.3. Les points de contact du gouvernement ouvert au Costa Rica
Les Enlaces interinstitucionales (c’est-à-dire les points de contact du gouvernement ouvert), établis pour faciliter la conception et la mise en œuvre du deuxième plan d’action du PGO, représentent une première étape importante pour assurer la coordination interinstitutionnelle. Les Enlaces comprennent des points de contact des différents ministères du gouvernement central, des institutions décentralisées, de certaines municipalités, du médiateur, du pouvoir judiciaire, etc. Pour aider à mettre en œuvre son programme de gouvernement ouvert, le gouvernement vise à créer au moins un Enlace dans chaque institution. Les Enlaces se réunissent régulièrement et bénéficient d’un soutien en matière de renforcement des capacités.
Source : (Gouvernement du Costa Rica, 2015[8]).
En résumé, chaque point de contact assumerait les responsabilités suivantes :
Promouvoir le travail effectué au sein du Conseil dans le cadre des activités de son département.
Coordonner la conception, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation de la stratégie pour son département ministériel.
Agir en tant qu’interlocuteur direct du Secrétariat pour le gouvernement ouvert.
S’assurer que tous les processus institutionnels liés à l’ouverture partagent des objectifs communs et sont en accord avec la stratégie de gouvernement ouvert recommandée.
Participer à la communauté de pratique du gouvernement ouvert pour partager les bonnes pratiques et les expériences.
Diffuser la culture de gouvernement ouvert dans les institutions publiques.
Assurer la mise en œuvre des lois et des politiques publiques relatives aux principes du gouvernement ouvert.
Fournir un soutien individuel et personnalisé aux agents publics de leur institution.
2.2.6. Le Conseil national du gouvernement ouvert pourrait également être composé de groupes thématiques et de recherche accompagnant la mise en œuvre concrète des engagements pris au niveau du comité directeur
Le Conseil national du gouvernement ouvert pourrait formaliser son idée de mettre en place un certain nombre de sous-groupes thématiques, composés d’acteurs publics et non publics (voir Graphique 2.4). Ces sous-groupes seraient chargés de processus spécifiques (comme le PGO) ou de sujets thématiques liés aux piliers du gouvernement ouvert (par exemple, sur la transparence, les données ouvertes ou la participation citoyenne), de manière à pouvoir organiser des échanges techniques entre parties prenantes publiques/non publiques, à réaliser le suivi des actions engagées et à développer des recommandations utiles d’orientations. Ces sous-groupes feraient participer activement les points de contact institutionnels du gouvernement ouvert, en leur offrant un espace d’échange et de dialogue politique, tout en travaillant sur des programmes concrets et pertinents pour leurs institutions. Les sous-comités impliqueraient également activement les parties prenantes non publiques, et en particulier l’espace de la société civile. Si le Maroc souhaitait aller dans cette direction, il trouverait une source d’inspiration auprès de l’Italie, dont le Forum du gouvernement ouvert est organisé autour de groupes thématiques (voir Graphique 2.4).
Encadré 2.4. Le Forum du gouvernement ouvert de l’Italie
L’Italie a mis en place un Forum du gouvernement ouvert, dans lequel 20 administrations publiques et 54 OSC se réunissent régulièrement. Le Forum, coordonné par le Département de l’administration publique de la présidence du Conseil des ministres, est ouvert à toute nouvelle organisation ou administration, tant centrale que locale, qui souhaite participer au développement de la politique de l’Italie en matière de gouvernance ouverte ou qui a l’intention de rejoindre le PGO. L’objectif du Forum sur le gouvernement ouvert est d’engager les OSC et les administrations publiques dans une collaboration durable et dans la co-conception, le développement et la coordination de la mise en œuvre des actions prévues dans le PAN italien du PGO.
Le ministre de l’Administration publique rencontre le forum tous les six mois. Ce dernier regroupe les domaines thématiques du gouvernement ouvert autour de six axes : transparence, données ouvertes, participation, redevabilité, citoyenneté numérique, et innovation et compétences numériques. Quant au Département de l’administration publique, il a mis en place six groupes de travail, en invitant chaque participant au Forum du PGO à les rejoindre.
De cette manière, le Département de l’administration publique a créé un canal direct entre les administrations publiques et les OSC, en vue de se réunir tous les deux ou trois mois et de communiquer régulièrement en ligne.
L’objectif est de donner aux fonctionnaires responsables des engagements en matière de gouvernement ouvert (c’est-à-dire les engagements du PAN) la possibilité de consulter les OSC sur des questions spécifiques et de recevoir leurs commentaires. En outre, les OSC peuvent contrôler la bonne mise en œuvre des engagements, et fournir des contributions et des idées sur la manière de développer de nouvelles initiatives de gouvernement ouvert.
A l’occasion du processus de cocréation du 5ème PAN du PGO pour 2022-23, le Forum du gouvernement ouvert a été renforcé et a évolué en Communauté OGP (Community OGP Italia). Cette communauté inclut de nouveaux acteurs impliqués, aussi bien institutionnels que des acteurs privés, des OSC, des institutions de recherches ou encore des réseaux d’associations.
Sources : (Italia Open Gov, s.d.[9]), « Open Government Forum », https://open.gov.it/partecipa/community-ogp-italia/forum-multistakeholder ; (Italia Open Gov, s.d.[10]), « Community OGP Italy », https://open.gov.it/partecipa/community-ogp-italia.
Dans le cadre de cette nouvelle architecture du gouvernement ouvert, il est également important de formaliser le rôle des organes de recherche sur le gouvernement ouvert, afin de fonder la prise de décision sur une réflexion approfondie relative aux méthodes d’inclusion et d’innovation. À ce titre, une convention pourrait être établie entre le MTNRA et un ou plusieurs centres de recherche disposant d’une expertise liée aux principes du gouvernement ouvert.
2.2.7. Une nouvelle gouvernance du gouvernement ouvert comme opportunité d’améliorer la coordination entre les différents niveaux de gouvernement
Pour le moment, la coordination entre les différents niveaux de gouvernement a lieu dans le cadre des échanges entre le MTNRA et la Direction générale des collectivités territoriales (DGCT), et à travers les engagements propres au niveau local. Cependant, il n’existe pas de coordination formalisée pour harmoniser les efforts des collectivités et ceux du niveau national. Aussi, serait-il bénéfique d’envisager la formalisation d’un accord sur ce point entre les deux acteurs clés du gouvernement ouvert.
Pour ce motif, le Conseil national du gouvernement ouvert devrait être à l’image des initiatives variées portées par ses acteurs. En ce sens, il est indispensable qu’il permette un échange régulier entre les niveaux de gouvernement, pour assurer l’efficacité, la cohérence et la coordination des initiatives engagées. Au-delà d’un partenariat formalisé entre le MTNRA et la DGCT, il sera ainsi incontournable d’assurer la participation de la DGCT dans les organes exécutifs instaurés pour la mise en œuvre et le suivi/l’évaluation de la Stratégie de gouvernement ouvert, ainsi que la représentation de régions pilotes. En ce sens, il est à noter que la DGCT fait d’ores et déjà partie du comité de pilotage du PGO. Enfin, le réseau des points de contact du gouvernement ouvert pourrait inclure des représentants des collectivités territoriales, par exemple en élargissant le mandat des agents chargés de l’accès à l’information.
Enfin, pour accompagner les échanges réguliers liés à l’expertise et l’expérience entre les niveaux de gouvernement et entre les collectivités elles-mêmes, il serait opportun de créer une conférence territoriale annuelle du gouvernement ouvert. Les acteurs de la société civile, les instances consultatives auprès des conseils élus et toutes les autres parties impliquées dans la cocréation de politiques et programmes aux niveaux central et local, y seraient invités. Ils auraient alors l’occasion de dialoguer et de guider les autorités publiques aux niveaux national et local dans la conception de leurs programmes et activités. Dans ce sens, la DGCT a créé en octobre 2022, en partenariat avec l’Association des régions du Maroc et l’association Impact pour le développement, le Réseau marocain des collectivités territoriales ouvertes (REMACTO), qui a pour ambition de constituer un espace de dialogue et d’échange d’expériences en vue de l’institutionnalisation d’une culture d’ouverture au niveau local (DGCT, s.d.[11]).
2.3. Le suivi et l’évaluation des politiques publiques et pratiques du gouvernement ouvert
En matière de réflexion sur la performance des politiques publiques, les mécanismes de suivi et d’évaluation sont indissociables de la prise de décision fondée sur des données probantes. Ils contribuent aussi à un apprentissage permanent, né de la confrontation avec la mise en œuvre de l’action publique. Ils créent enfin un cercle vertueux de redevabilité. Ces éléments sont déterminants dans le cadre des réformes de gouvernement ouvert, qui requièrent une grande disponibilité des données et la communication des résultats de l’action publique (OCDE, 2017[12]).
À cet effet, la grande majorité des pays membres de l’OCDE (82 %) affirme que les initiatives pour un gouvernement ouvert (dans le cadre du PGO ou non) font l’objet d’un suivi par le gouvernement, dont les résultats sont rendus publics. Le processus de suivi établi correspond à ce que l’OCDE définit comme un « processus continu de collecte systématique d’informations, selon des indicateurs choisis, pour fournir aux gestionnaires et aux parties prenantes d’une action (…) en cours, des éléments sur les progrès réalisés, les objectifs atteints et l’utilisation des fonds alloués » (OCDE, 2017[12]). Cependant, peu de pays ont mis en place un dispositif solide et intégré de suivi et d’évaluation de leur programme de gouvernement ouvert et, plus largement, de l’ensemble des initiatives contribuant à l’ouverture (OCDE, 2020[1]).
Si les processus de suivi sont bien établis, ceux relevant davantage de l’évaluation restent assez limités dans leur portée. Cette carence tient à la difficulté d’établir un système clair d’évaluation face à la nature multidimensionnelle du gouvernement ouvert. En effet, mettre en œuvre des stratégies de gouvernement ouvert implique généralement des initiatives dans divers domaines, tels que la participation des parties prenantes, l’intégrité, la transparence et le gouvernement numérique. Cela nécessite également la participation de multiples parties prenantes, telles que les ministères, les agences et les OSC et, dans certains cas, différents niveaux de gouvernement (OCDE, 2019[3]). L’absence de processus établi d’évaluation, avec indicateurs spécifiques, limite par conséquent l’évaluation réelle de l’impact des initiatives pour un gouvernement ouvert et leur ajustement.
Aussi, afin de soutenir une compréhension concrète de la dynamique et des effets de l’ouverture, la disposition 5 de la Recommandation sur le Gouvernement Ouvert prévoit que les pays devraient « élaborer et mettre en œuvre des dispositifs de suivi, d’évaluation et d’apprentissage en rapport avec les stratégies et initiatives en matière de gouvernement ouvert, par les moyens suivants : 1) en désignant les acteurs institutionnels qui seront chargés de recueillir et de diffuser une information et des données actualisées et fiables en format ouvert ; 2) en élaborant des indicateurs comparables visant à mesurer les processus, les résultats, les réalisations et les impacts, en collaboration avec les parties prenantes ; et 3) en favorisant une culture de suivi, d’évaluation et d’apprentissage parmi les agents publics grâce à un renforcement de leurs capacités à effectuer régulièrement des exercices à ces fins, en collaboration avec les parties prenantes concernées » (OCDE, 2017[2]).
Pour établir un cadre de suivi et d’évaluation solide et cohérent, il est en premier lieu important de reconnaître qu’il s’agit de deux processus différents, mais absolument complémentaires.
Encadré 2.5. La différence entre le suivi et l’évaluation
Malgré leur complémentarité, le suivi et l’évaluation sont deux pratiques différentes, avec des dynamiques et des objectifs différents. Le suivi des politiques fait référence à une fonction continue, qui utilise la collecte systématique de données sur des indicateurs spécifiques pour fournir aux décideurs politiques et aux parties prenantes des informations concernant les progrès et les réalisations d’une initiative de politique publique en cours et/ou l’utilisation des fonds alloués. Le suivi contribue à la planification et à la prise de décision opérationnelle, car il fournit des preuves pour mesurer les performances et peut aider à soulever des questions spécifiques, afin d’identifier les retards de mise en œuvre ou les goulots d’étranglement. Il peut également renforcer la redevabilité liée à l’utilisation des ressources, à l’efficacité des processus de gestion interne ou aux résultats d’une initiative politique donnée.
L’évaluation des politiques publiques correspond à l’évaluation structurée et objective de la conception, de la mise en œuvre et/ou des résultats d’une initiative politique future, en cours ou achevée. Le but est de déterminer la pertinence et la réalisation des objectifs politiques, ainsi que d’évaluer des dimensions telles que l’efficience, l’efficacité, l’impact ou la durabilité des politiques publiques. En tant que telle, l’évaluation des politiques publiques fait référence au processus de détermination de leur valeur ou de leur importance. Elle sert trois objectifs principaux. Elle favorise d’abord l’apprentissage, en aidant les décideurs à comprendre pourquoi et comment une politique a réussi ou non. Par conséquent, elle contribue aussi à la prise de décisions stratégiques, en fournissant des informations sur la manière d’améliorer les liens entre les décisions politiques et les résultats. Enfin, elle favorise la redevabilité, car elle fournit aux citoyens et à un large éventail de parties prenantes – comme les journalistes et les universitaires – des informations de déterminer si les efforts déployés par le gouvernement, y compris les ressources financières mobilisées pour eux, produisent les résultats escomptés. Par conséquent, alors que le suivi des politiques est descriptif et une source d’information importante (mais non exclusive) pouvant être utilisée dans le contexte d’une évaluation, l’évaluation des politiques est une activité différente, qui cherche à analyser et à comprendre les liens de cause à effet entre une intervention politique et ses résultats.
Source : (OCDE, 2019[3]).
2.3.1. Le MTNRA coordonne le suivi des initiatives du gouvernement ouvert
Dans le cadre du processus du PGO, le suivi de la mise en œuvre des engagements inclus dans le PAN est organisé de manière régulière par le MTNRA. Celui-ci met les informations à la disposition du public sur le portail du gouvernement ouvert du Maroc (gouvernement-ouvert.ma) et y publie les informations utiles sur les réalisations, sous la forme de pourcentages d’engagements remplis. Cette plateforme a été conçue comme le « guichet unique » du gouvernement ouvert au Maroc. Elle a vocation à informer le public sur le processus du PGO dans le pays, les engagements pris ainsi que leurs réalisations, et à partager les informations utiles sur les activités menées. Elle a également été mobilisée comme plateforme de consultation publique dans le cadre du processus du PGO au niveau du gouvernement national et du PAN de la Chambre des représentants. En ce qui concerne le suivi de la mise en œuvre des engagements, la gestion de la plateforme a été organisée pour que les différents points focaux au sein des administrations publiques restituent en temps réel l’état d’avancement des activités. Le MTNRA fait le point une fois par trimestre pour s’assurer de la bonne actualisation des informations, dans le prolongement de réunions de suivi du comité de pilotage du PGO. À titre comparatif, d’après les données de l’Enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert,16 pays sur 42 pays répondants réalisent une actualisation du suivi tous les deux à trois mois.2 Le système instauré semble fluide et montre rapidement l’avancement des projets, ainsi que, globalement, celui du PAN. Il n’existe cependant pas d’indicateurs exposant précisément le rapport investissement/résultat, la qualité des livrables ou encore celle du suivi, qui donneraient plus d’informations sur l’efficacité du travail effectué. Par ailleurs, le public n’est pas directement associé à l’appréciation des actions menées et à leur amélioration quand cela pourrait être nécessaire. Il existe cependant un espace de commentaires en bas de la page de chaque engagement sur le portail du gouvernement ouvert qui permet aux citoyens de commenter l’état d’avancement des engagements du PAN.
2.3.2. Le Maroc a également développé des mécanismes de suivi permettant de collecter un grand nombre d’informations sur les pratiques d’ouverture dans le pays
Comme dans la plupart des pays de l’OCDE, le Maroc ne dispose actuellement d’aucun système intégré de suivi de l’ouverture du gouvernement dans sa globalité. Il y existe cependant différents outils de suivi axés sur des politiques et pratiques spécifiques, qui contribuent à l’ouverture, tels que l’accès à l’information, les données gouvernementales ouvertes et l’intégrité du secteur public.
Certains processus de suivi sont ainsi accessibles au public. Par exemple, la Commission nationale anti-corruption publie, de manière ad hoc, un rapport de suivi sur une période de deux ans sur le site du chef du gouvernement (le dernier en date est celui de 2016-18), avec l’appui du secteur privé et de la société civile. La Commission du Droit d’Accès à l’Information (CDAI) a également pour mandat « d’établir un rapport annuel sur le bilan de ses activités en matière de droit d’accès à l’information comportant en particulier une évaluation du processus de la mise en œuvre dudit principe » (CDAI, s.d.[13]). C’est le cas également de la présidence du gouvernement, qui a mis en place une plateforme de suivi du programme gouvernemental (barnamaj.cg.gov.ma). Grâce à celle-ci, l’opinion publique suit de manière détaillée et permanente l’avancement du gouvernement dans la mise en œuvre de ses engagements, et tout particulièrement ceux relatifs au renforcement des valeurs de la transparence, la réforme de l’administration et la consécration de la bonne gouvernance. L’actualisation régulière de cette plateforme est effectuée à partir des données directement mises à disposition par les départements ministériels.3
Dans les autres cas, les mécanismes de suivi ont été internalisés. Concernant le Plan d’action nationale en matière de démocratie et des droits de l’Homme 2018-21 (PANDDH), les départements ministériels responsables se réunissent régulièrement pour en assurer le suivi, et un système de suivi en temps réel (SysDH), renseigné régulièrement par les parties prenantes, a également été mis en place. Ces actions devront permettre l’élaboration d’un rapport à mi-parcours, d’un rapport final sur la mise en œuvre et d’un rapport d’évaluation. La Délégation interministérielle aux droits de l’homme a également indiqué développer une cartographie et une série d’indicateurs de suivi de la mise en œuvre des initiatives en matière de droits humains au niveau des ministères et des régions, de manière à permettre une visibilité et un suivi global des réformes en cours.
2.3.3. Évaluer les résultats et l’impact des politiques et pratiques de gouvernement ouvert est un défi que le Maroc partage avec de nombreux pays membres et partenaires de l’OCDE
Dans le cas du processus du PGO et en conformité avec la pratique de la plupart des pays adhérant à ce partenariat, le MTNRA a procédé à deux types d’évaluations concernant la mise en œuvre de son premier PAN (2018-20). L’une a été réalisée selon le mécanisme de rapport indépendant (Independant report mechanism, IRM) du PGO, avec l’appui d’un chercheur indépendant, et a été publiée le 5 août 2021 (Partenariat pour un gouvernement ouvert, 2021[14]). L’autre est une autoévaluation de la mise en œuvre du PAN réalisée par le MTNRA et publiée en juin 2021. À ce jour, la société civile n’a pas effectué d’évaluation parallèle. Les données produites dans le cadre de ces différentes évaluations ont par la suite nourri le processus d’élaboration du second PAN.
Ce fonctionnement est ligne avec les pratiques de la plupart des pays de l’OCDE, qui ont indiqué également que leurs évaluations correspondent aux examens prévus dans le cadre du PGO (examens par les pays eux-mêmes et examens au titre du mécanisme de rapport indépendant). La grande majorité d’entre eux (71 % des pays sondés et 84 % des pays membres de l’OCDE) confirme que cette activité fait partie des activités d’évaluation normales de chaque institution (OCDE, 2017[12]). Par ailleurs, près du tiers des pays réalisent des enquêtes auprès des citoyens et des parties prenantes, et un nombre comparable de pays a recours à des études indépendantes menées par des ONG. En ligne avec cette pratique, le Maroc a organisé des consultations publiques à travers le portail du gouvernement ouvert autour des rapports d’autoévaluation annuels (Gouvernement Ouvert Maroc, 2022[15]).
Aussi, le système de suivi et d’évaluation instauré par le Maroc permet-il à la fois de répondre aux exigences propres au processus du PGO et de suivre si les engagements du PAN ont été réalisés. Cependant, il ne prévoit pas de collecte systématique de données qualitatives pour recenser les ressources utilisées, ou évaluer la portée et l’impact des activités menées. Il n’est ainsi pas utilisé comme outil d’ajustement ou de planification. En outre, parce qu’il est déconnecté des autres processus relatifs à l’ouverture, il ne fournit pas d’éléments pertinents pour alimenter la prise de décision de manière optimale.
Cependant, il est intéressant de noter plusieurs dynamiques qui vont dans le sens d’une institutionnalisation des processus de suivi et d’évaluation dans le pays. Aussi, dans un souci de mise en cohérence des politiques publiques et de meilleure efficacité de l’action publique, une unité d’exécution et de suivi a-t-elle été créée au sein de la présidence du gouvernement. Celle-ci assure le suivi des objectifs stratégiques du programme gouvernemental et de ses priorités, et propose un accompagnement au renforcement des capacités de suivi des administrations. Plus récemment, le chef du gouvernement a créé un ministère délégué auprès du chef du gouvernement, chargé de l’Investissement, de la Convergence et de l’Évaluation des politiques publiques, afin de soutenir l’alignement des politiques publiques sur les ambitions du Nouveau Modèle de développement, et de développer des outils intégrés de veille, suivi et évaluation pour mieux mesurer leur efficacité. Par ailleurs, au niveau sectoriel, les entretiens effectués pour la rédaction de ce rapport ont permis de relever les efforts de l’INPPLC en matière d’évaluation. En tant qu’institution indépendante, elle a élaboré un rapport d’évaluation en 2019. Par la suite, celui-ci a permis une adaptation des travaux engagés, en particulier concernant la stratégie nationale en la matière, une adaptation des contenus de ses programmes et projets, ainsi qu’une révision de son cadre de gouvernance pour plus d’efficience, de convergence et d’orientation vers les objectifs cibles.
2.3.4. Le Maroc pourrait envisager plusieurs actions visant à mieux informer les citoyens sur les réalisations en matière d’ouverture et bénéficier de leurs avis de manière continue
Pendant l’élaboration d’un écosystème plus cohérent de gouvernement ouvert et pour construire un système élargi et ouvert de suivi des initiatives, il serait opportun d’identifier les informations et données clés existantes et manquantes en matière d’ouverture, que soit sur les réalisations en matière d’accès à l’information, de données ouvertes, de numérisation ou encore d’intégrité, pour les intégrer et les valoriser de manière optimale sur le site gouvernement-ouvert.ma. Cette démarche permettrait également la publication par les acteurs publics de leurs évaluations et rapports de suivi (rapport annuel du PANDDH, de la CDAI et de l’INPPLC). Pour faciliter la compréhension du public et identifier les enjeux non couverts, les doublons ou les besoins de synergies et d’approfondissement, il serait également nécessaire de clarifier, pour chaque rapport, l’institution responsable, la politique publique couverte, si les informations sont publiées et accessibles, et si elles sont présentées au Parlement ou soumises à débat public. Afin que le suivi soit complet, il serait également important de recenser les informations concernant les collectivités territoriales et les autres pouvoirs de l’État (législatif et judiciaire). Dans ce sens, les rapports concernant les initiatives d’ouverture du Parlement lui-même pourraient également être publiés. Cette démarche d’état des lieux et d’analyse des besoins serait d’autant plus utile dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie du gouvernement ouvert.
Par ailleurs, une fonctionnalité de dialogue sur le site de référence du gouvernement ouvert peut présenter certains atouts. Celle-ci peut faciliter les échanges constants avec les citoyens sur leur perception des activités en cours. Elle offrirait également les moyens de connaître de façon continue et structurée leur satisfaction sur la progression des engagements en matière de gouvernement ouvert, afin de procéder à des ajustements si cela se révélait nécessaire. L’espace de la société civile mis en place sur le portail du gouvernement ouvert gouvernement-ouvert.ma dispose d’une telle fonctionnalité pour les associations inscrites. Cette option pourrait alors être étendue à l’ensemble des citoyens.
2.3.5. Dans la perspective de l’élaboration d’une stratégie de gouvernement ouvert, l’Unité du gouvernement ouvert pourrait coordonner l’élaboration d’un plan de suivi et d’évaluation
Comme mentionné ci-dessus, les pays ne suivent et collectent généralement que des données sur la mise en œuvre de leurs politiques publiques de manière sectorielle, et mènent rarement des évaluations holistiques pour comprendre les effets des réformes du gouvernement ouvert sur la confiance des citoyens dans les institutions publiques, la lutte contre la corruption, la croissance économique, l’efficacité politique, etc. L’évaluation des résultats et de l’impact des politiques liées au gouvernement ouvert est un domaine d’intérêt relativement nouveau pour les décideurs et les chercheurs, et un défi commun à tous les pays de l’OCDE (OCDE, 2019[3]), même si quelques expériences intéressantes existent déjà. Ainsi, le Canada, à travers son évaluation du programme de gouvernement ouvert, a cherché à anticiper l’impact immédiat, intermédiaire et de long terme de ses réformes (voir Encadré 2.6).
Encadré 2.6. L’évaluation du programme de gouvernement ouvert par le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada
L’évaluation a porté sur la pertinence et l’efficacité du programme. Puisqu’il s’agissait d’une évaluation formative, elle ne portait que sur les résultats immédiats au cours des exercices 2016-17 à 2018-19. Les documents ont été examinés pour toutes les années depuis 2011, année du lancement du programme.
Un cadre logique précise les résultats attendus (dans l’immédiat, à moyen terme et à long terme), ainsi que les hypothèses ou considérations nécessaires pour les obtenir.
L’évaluation a cependant uniquement pris en compte les résultats immédiats. Puisque le programme ne recevait de financement direct que depuis l’exercice 2016-17, les résultats intermédiaires et à long terme n’ont pas pu être évalués.
Les sources de données étaient les suivantes :
L’examen des données et des documents du programme.
L’analyse documentaire.
Une étude intergouvernementale.
Vingt-huit entrevues avec des informateurs clés.
Sept groupes de discussion.
Les évaluateurs ont consulté des fonctionnaires et des membres de la société civile travaillant avec des jeunes ou des peuples autochtones pour déterminer les problèmes rencontrés par les membres de ces groupes.
Source : (Gouvernement du Canada, s.d.[16]).
Les bureaux de coordination du gouvernement ouvert peuvent promouvoir la création de cadres généraux de suivi et d’évaluation qui vont au-delà du processus du PGO. Aussi, dans le cadre de la stratégie à venir du gouvernement ouvert, serait-il envisageable de donner mandat au MTNRA et à son unité de gouvernement ouvert pour développer un plan de suivi et d’évaluation (S&E) servant à l’élaboration d’un rapport annuel sur l’ouverture du pays. L’Unité serait alors chargée de la coordination du suivi et présenterait régulièrement les avancées au Conseil national du gouvernement ouvert, afin de s’assurer de leur conformité avec les objectifs stratégiques agréés. Les résultats de l’autoévaluation du PGO et de toute autre évaluation pertinente effectuée dans le domaine du gouvernement ouvert seraient également présentés au Conseil.
Afin de soutenir l’élaboration du plan de S&E, plusieurs outils pourraient être envisagés et sont décrits dans les sous-sections suivantes.
Une théorie du changement propre au gouvernement ouvert, avec des indicateurs spécifiques
Au Maroc, comme dans de nombreux pays, il existe des indicateurs sur les processus d’ouverture et les résultats obtenus. Il n’y a cependant pas de méthodologie globale élaborée pour mieux comprendre l’impact des réformes au regard des objectifs plus larges de politiques publiques (transparence, qualité des services, confiance, etc.) et surtout vis-à-vis des attentes des citoyens. Pourtant, au regard de l’ambition du Maroc de porter l’agenda du gouvernement ouvert au niveau d’une stratégie gouvernementale, il serait utile d’engager une réflexion structurée sur la manière, les vecteurs et les cibles du changement envisagé en matière d’ouverture. Ce processus, qui correspond à l’élaboration d’une théorie du changement, pourrait contribuer à élaborer un « récit du gouvernement ouvert » et faciliter son appropriation par toutes les parties prenantes.
Une théorie du changement est une « description de la cascade de causes et d’effets menant d’une intervention à son objectif souhaité » (OCDE, 2014[17]). Elle montre la relation entre les ressources, les activités, les réalisations et les résultats plus larges ; elle prend également en considération la complexité environnementale (ce que l’intervention ne peut pas contrôler) ; elle met en évidence les différentes voies susceptibles de conduire au changement ; et elle décrit comment et pourquoi un changement se produirait. À cet égard, elle est utilisée principalement pour concevoir et évaluer des programmes de politiques publiques (OCDE, 2019[3]).
Au Maroc, l’application de la théorie du changement pourrait ainsi capitaliser sur les indicateurs existants et permettre de réfléchir à la manière de les clarifier et de les diversifier de façon à mesurer les processus, les résultats, les réalisations et les impacts. Si aucun indicateur ne permet d’appréhender les réformes dans leur globalité, divers indicateurs peuvent être utilisés de manière cohérente, allant de ceux de contexte à ceux d’impact, chacun ayant un objectif différent (voir Encadré 2.7).
Encadré 2.7. Typologie des indicateurs
Une typologie classique distingue les indicateurs de la façon suivante :
Les indicateurs de contexte, lorsque l’on considère le secteur public comme un système ouvert, suivent les facteurs externes tels que les tendances socioéconomiques, mais incluent également les mesures politiques prises par d’autres gouvernements ou organisations supranationales (Van Dooren, Bouckaert et Halligan, 2015[18]). Idéalement, un système complet de suivi et d’évaluation prévoirait des indicateurs pour surveiller l’existence et le développement de facteurs environnementaux ou contextuels susceptibles d’influencer la gouvernance des stratégies et initiatives gouvernementales.
Les indicateurs de ressources mesurent les ressources au sens large (c’est-à-dire les ressources humaines, financières, matérielles) consacrées à une stratégie ou à une initiative particulière de gouvernement ouvert. Dans le contexte de la gouvernance du gouvernement ouvert, les indicateurs de ressources pourraient inclure le nombre d’employés travaillant dans le service chargé du gouvernement ouvert ou le budget alloué à une initiative de gouvernement ouvert donnée.
Les indicateurs de processus font référence au lien entre les ressources et les réalisations (c’est-à-dire les activités qui utilisent des ressources et conduisent à un résultat). Dans le cadre de la gouvernance des stratégies et initiatives gouvernementales relatives au gouvernement ouvert, ces indicateurs incluraient la création d’un service responsable de la coordination du gouvernement ouvert ou le temps consacré à la conception de stratégies et d’initiatives.
Les indicateurs de réalisation se réfèrent à la quantité, au type et à la qualité des produits qui résultent des ressources allouées et englobent les buts ou objectifs opérationnels. Par exemple, dans le contexte de ce domaine de politiques publiques, les indicateurs de réalisation sont susceptibles de faire référence à l’existence d’une loi sur l’accès à l’information ou à l’existence de cours de formation pour les agents publics sur la mise en œuvre des principes de gouvernement ouvert.
Les indicateurs de résultat ou d’impact font référence aux objectifs (stratégiques) d’une politique d’intervention. Dans un contexte de politique publique, les effets recherchés sont souvent liés à un groupe cible ou à une région, mais concernent le fonctionnement interne d’une administration. Les effets peuvent se produire ou être attendus avec des intervalles de temps variables, suivant la politique d’intervention. Concernant la différence entre résultat et impact, le terme « résultat » fait généralement référence à des effets à court terme, tandis qu’« impact » fait référence à des effets à plus long terme. Des exemples dans ce domaine incluraient la proportion de fonctionnaires ayant connaissance d’une stratégie de gouvernement ouvert ou le nombre de plaintes de citoyens contre des décisions de politique publique.
Sources : OCDE (2017), « Towards Open Government Indicators: Framework for the Governance of Open Government (GOOG) Index and the Checklist for Open Government Impact Indicators » (note de concept), OCDE, Paris ; (Van Dooren, Bouckaert et Halligan, 2015[18]).
L’élaboration d’une théorie du changement et la consolidation des indicateurs pourraient avoir lieu pendant l’élaboration de la stratégie de gouvernement ouvert, au fur et à mesure des données collectées, et faire l’objet d’une cocréation avec les parties prenantes clés (départements ministériels, collectivités territoriales, OSC, citoyens et universités), dont les échanges seraient publiés. En effet, un tel processus doit être fondé sur une compréhension commune de ce que l’on entend par « ouverture », des attentes et des ambitions des différentes parties prenantes, ainsi que des différentes étapes de l’ouverture dans une institution publique. Par ailleurs, il est important que l’exercice tienne compte des contextes spécifiques, tout spécialement celui des collectivités territoriales, qui requièrent une version adaptée à leurs spécificités. Les résultats seraient ensuite soumis à une validation approfondie avec le Haut-Commissariat au plan et le nouveau ministère délégué auprès du chef du gouvernement chargé de l’Investissement, de la Convergence et de l’Évaluation des politiques publiques.
Dans une démarche semblable, le Mexique a mené une expérience de développement d’indicateurs de référence sur le gouvernement ouvert susceptible d’inspirer le Maroc (voir Encadré 2.8).
Encadré 2.8. Les indicateurs de référence du Mexique sur le gouvernement ouvert
Fondés sur une initiative de l’Institut national pour la transparence, l’accès à l’information et la protection des données personnelles (INAI), les indicateurs du gouvernement ouvert du Mexique ont été développés par le Centre de recherche et d’enseignement économiques (CIDE). Ils sont conçus comme une référence pour mesurer l’état actuel du Système national de transparence, d’accès à l’information et de protection des données personnelles (SNT) et ses politiques de gouvernement ouvert et de transparence. Visant à être une « radiographie du point de départ de la politique de gouvernement ouvert de l’État mexicain » au niveau national et infranational, leur objectif va au-delà de la mesure de la conformité aux réglementations. Ils sont destinés à saisir des informations sur les performances des résultats de l’ouverture du gouvernement et des politiques de transparence du point de vue à la fois du gouvernement et des citoyens.
Les indicateurs partent d’une définition opérationnelle du gouvernement ouvert structurée autour de deux dimensions : la transparence et la participation publique. Chaque dimension est alors abordée sous deux angles : le gouvernement et les citoyens.
Tableau 2.2. Angles adoptés pour les indicateurs du gouvernement ouvert au Mexique
|
Dimension sur la transparence |
Dimension sur la participation publique |
---|---|---|
Point de vue du gouvernement |
Le gouvernement rend-il publiques des informations sur ses décisions et ses actions ? Dans quelle mesure est-ce fait ? Quelle est la qualité de ces informations ? |
De quelles manières les citoyens peuvent-ils avoir un impact sur les décisions publiques ? |
Point de vue du citoyen |
Le gouvernement rend-il publiques des informations sur ses décisions et ses actions ? Dans quelle mesure est-ce fait ? Quelle est la qualité de ces informations ? |
Les citoyens peuvent-ils activer un mécanisme qui leur permet d’influencer les décisions publiques ? |
Source : (INAI, 2017[19]).
Le CIDE a développé un indice de gouvernement ouvert, composé d’indicateurs de la transparence et de la participation du point de vue à la fois du gouvernement et des citoyens. La construction de cet indice a impliqué l’analyse des réglementations existantes, un examen des sites internet du gouvernement et des simulations d’utilisateurs, y compris des demandes d’informations. L’enquête Métrica comprenait un échantillon de 908 organismes gouvernementaux aux niveaux national et infranational ; 754 portails ont été examinés et 3 635 demandes d’informations ont été envoyées. L’indice de gouvernement ouvert du Mexique résultant était de 0.39 (sur une échelle de 0 à 1). L’indice a montré que la dimension transparence a une valeur beaucoup plus élevée (0.50) que la dimension participation (0.28).
Source : (INAI, 2017[19]).
Dans une perspective de long terme, le Maroc pourra réfléchir à consolider son mécanisme de suivi et d’évaluation en élaborant un modèle de maturité du gouvernement ouvert
Le modèle de maturité constitue un instrument de référence pour évaluer la transition d’une entité vers un objectif déterminé, durant une période donnée. Des modèles de maturité sont de plus en plus développés dans différents domaines de la gouvernance publique, y compris dans celui du gouvernement ouvert. Les modèles de maturité de gouvernement ouvert constituent en effet un outil utile des institutions publiques pour évaluer et surveiller les éléments essentiels de leur écosystème de gouvernement ouvert. En particulier, ils peuvent :
Définir les éléments du socle des bonnes pratiques dans le domaine du gouvernement ouvert.
Permettre aux institutions publiques d’évaluer leurs niveaux d’ouverture à un moment donné et d’identifier leur position par rapport aux bonnes pratiques nationales.
Servir à construire une trajectoire cohérente et flexible vers des niveaux de maturité élevés, adaptables à la situation de chaque institution publique.
Montrer les étapes de cette progression et les réalisations nécessaires qui, à chaque étape, sont utiles et consolider le passage aux étapes suivantes.
Faciliter la comparaison entre les institutions publiques dans un cadre défini (OCDE, 2022[20]).
2.3.6. Le Maroc pourrait saisir l’opportunité du développement d’une stratégie du gouvernement ouvert pour favoriser une culture de suivi, d’évaluation et d’apprentissage parmi les agents publics, à tous les niveaux de gouvernement
Une fois les outils d’évaluation développés, il faut considérer que les initiatives gouvernementales n’auront pas l’impact souhaité si les agents publics ne possèdent ni les compétences ni les moyens incitatifs adéquats pour les activités de suivi et d’évaluation. Par ailleurs, dans la mesure où les collectivités territoriales seront des parties prenantes de premier ordre dans l’application d’une stratégie nationale de gouvernement ouvert, et donc de son suivi et de son évaluation, il convient d’envisager l’instauration d’outils harmonisés entre les différents niveaux de gouvernement, favorisant largement le développement de compétences des agents publics.
Dans sa mission éventuelle de coordinateur du plan de suivi et d’évaluation de la stratégie, le MTNRA pourrait procéder au développement de principes et d’outils communs d’évaluation, conjointement avec la DGCT et le ministre délégué auprès du chef du gouvernement chargé de l’Investissement, de la Convergence et de l’Évaluation des politiques publiques. Ces principes et outils seraient intégrés dans la boîte à outils du gouvernement ouvert mise à disposition des collectivités territoriales. Cette boîte à outils d’évaluation présenterait des principes opérationnels (voir Encadré 2.9), ainsi que des lignes directrices en matière de planification et de développement d’initiatives d’après la théorie du changement. Cette démarche tiendrait compte et intégrerait les démarches propres au mécanisme de rapport indépendant à réaliser par les collectivités territoriales membres du PGO, comme c’est le cas pour les régions de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma et Béni Mellal-Khénifra ainsi que la municipalité de Tétouan.
Encadré 2.9. Exemples de principes opérationnels pour réaliser le suivi et l’évaluation d’initiatives de gouvernement ouvert
Normes pour l’élaboration de résultats et d’objectifs d’impact pour un gouvernement ouvert, et dispositions et lignes directrices spécifiques pour la construction d’indicateurs.
Normes et modèles pour les rapports de suivi, y compris des dispositions concernant ce qui peut être publié pour un public plus large et les informations qui constitueront le point de départ d’une discussion interne.
Décisions concernant la fréquence du suivi – par exemple, le Conseil national du gouvernement ouvert pourrait discuter des progrès réalisés sur les objectifs sur une base trimestrielle, tandis que l’équipe du gouvernement ouvert pourrait interagir une fois par mois avec les parties prenantes concernées.
Dispositions pour l’implication des parties prenantes, pour assurer la présence de la société civile et d’autres intervenants dans les discussions sur l’état d’avancement des projets de gouvernement ouvert.
Les règles pourraient également inclure des dispositions similaires pour la réalisation d’évaluations, entre autres pour les normes, les modèles, la fréquence, l’implication des parties prenantes, les profils des évaluateurs et les budgets pour les évaluations.
Source : (OCDE, 2019[3]).
Par ailleurs, puisque les nouvelles initiatives de gouvernement ouvert pourraient suivre la logique de la théorie du changement pour mieux anticiper et comprendre leurs effets, le MTNRA et la DGCT pourraient sensibiliser et former les administrations à son utilisation tout en diffusant la boîte à outils, ainsi que ses outils de suivi et d’évaluation. Cela permettrait une mise à niveau et une mise en cohérence des compétences de suivi et d’évaluation.
2.4. Promouvoir le gouvernement ouvert pour transformer la culture de gouvernance
L’impact des initiatives de gouvernement ouvert ne repose pas seulement sur l’application de mécanismes appropriés de coordination institutionnelle ou de suivi et d’évaluation. Afin de devenir les moteurs d’un programme de gouvernement ouvert, les acteurs publics doivent également se voir affecter des ressources humaines dédiées et bien formées, ainsi que des fonds suffisants. En outre, les fonctionnaires doivent être informés et conscients des avantages qu’une stratégie globale du gouvernement ouvert et les initiatives connexes peuvent apporter pour la pertinence des politiques publiques et la satisfaction citoyenne (OCDE, 2019[3]). Ainsi, la maîtrise des compétences élémentaires liées au gouvernement ouvert – à savoir le degré de sensibilisation, de connaissances et de compétences dont les agents publics et les parties prenantes ont besoin pour participer utilement aux stratégies et initiatives en matière de gouvernement ouvert – est indispensable pour transformer la culture de la gouvernance d’un pays (OCDE, 2021[21]).
Reconnaissant que la sensibilisation, les connaissances et les compétences jouent un rôle important dans la promotion d’un changement vers une culture de gouvernement ouvert, la disposition 3 de la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert invite les pays à favoriser « une maîtrise des compétences de base liées au gouvernement ouvert au sein des administrations publiques, à tous les niveaux d’administration, ainsi que parmi les parties prenantes » (OCDE, 2017[2]).
2.4.1. Le gouvernement ouvert reste un concept à faire connaître au-delà des parties prenantes au processus du PGO
Les entretiens effectués au cours de la préparation de ce rapport, au niveau institutionnel comme au niveau de la société civile, semblent montrer que l’ensemble des parties prenantes ne possèdent qu’une connaissance limitée du concept de gouvernement ouvert et de sa nature holistique. En effet, elles ont connaissance des principes qui le composent, mais elles les appréhendent séparément. Puisque la compréhension du gouvernement ouvert semble plutôt limitée aux membres du comité de pilotage, ce concept peut être perçu comme étant réservé aux initiés ou à une élite, aux antipodes de sa vocation d’inclusion. Cependant, la phase de cocréation pour le second PAN du gouvernement ouvert, démarrée en 2020, a élargi le cercle des administrations et représentants de la société civile sensibilisés à sa définition et ses ambitions. Le ministère de la Santé, le ministère de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille, le ministère de la Justice ou encore le ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports ont ainsi été nouvellement engagés dans l’élaboration et la mise en œuvre des engagements 2021-23.
Pour assurer le déploiement du gouvernement ouvert au Maroc et un réel changement de culture de gouvernance, il apparaît essentiel de mieux faire comprendre ses ambitions et bénéfices aux parties prenantes. Il a été évoqué dans le chapitre 1 la possibilité d’actualiser la définition du gouvernement ouvert retenue par le Maroc, selon sa perception et ses ambitions et à travers une cocréation impliquant largement les administrations, les institutions indépendantes et la société civile. D’autres réformes sont envisageables dans ce sens, en allant vers une attention élargie à l’ensemble des initiatives menées en matière d’ouverture – et au-delà des engagements propres au PGO – ou en conduisant des programmes de sensibilisation et de formation avec développement d’outils adaptés et d’efforts de communication orientés vers un dialogue systématisé avec les citoyens, ainsi qu’une démonstration de l’impact des réformes.
2.4.2. Élargir l’appréhension des réformes liées au gouvernement ouvert
Afin de sensibiliser largement les institutions et les citoyens au gouvernement ouvert, il est nécessaire d’élargir l’appréhension du gouvernement ouvert au-delà des engagements contenus dans le PAN du PGO. Un recensement pourrait ainsi être effectué, pour traduire l’ampleur des chantiers engagés dans ce sens. Procéder ainsi contribuerait à l’élaboration de la stratégie du gouvernement ouvert du Maroc, présentée au chapitre 1, et aurait vocation à établir le lien entre les différentes initiatives d’ouverture conduites jusqu’à maintenant. Aussi, en partant du noyau composé par le processus PGO et le développement numérique, tous deux pilotés par le MTNRA, serait-il envisageable de considérer comme un ensemble cohérent les initiatives liées largement à la transparence (notamment le droit d’accès à l’information), à l’intégrité, à la promotion de l’espace civique et à la participation citoyenne.
Par ailleurs, il est nécessaire de démontrer aux citoyens et à la société civile, non formellement associés au processus du PGO, que leurs voix, aussi diverses soient-elles, comptent dans la promotion de l’ouverture au Maroc. Les 232 propositions collectées lors de la cocréation du second PAN ont été publiées sur la plateforme du gouvernement ouvert, ce qui est un signe positif dans ce sens. Une étape supplémentaire consisterait à en faire un document organisé et récapitulatif, et à en assurer la promotion comme on le ferait d’une boîte à idées. Il serait à disposition des administrations et identifierait les idées les plus prometteuses, pour qu’elles constituent des éléments utiles de réflexion dans l’élaboration de la stratégie nationale du gouvernement ouvert mais aussi, plus largement, lors d’échéances propres à la planification stratégique au niveau local (lors de l’élaboration des plans de développement locaux et régionaux) ou au niveau national. À titre illustratif, le Canada a développé un document recensant les idées non sélectionnées, qu’il a appelé « What we heard » (ce que nous avons entendu) et qu’il garde pour alimenter sa stratégie à venir de gouvernement ouvert (voir Encadré 2.10).
Encadré 2.10. Le rapport « What we heard » (ce que nous avons entendu) au Canada
Le rapport a vocation à expliciter le processus de dialogue avec les citoyens pour l’élaboration des PAN pour un gouvernement ouvert. Il résume ce qui a été dit et précise le processus d’analyse des informations transmises.
Ce rapport, comme les données relatives à la consultation ou aux engagements, est ouvert aux commentaires du public, de manière à permettre une progression constante en matière d’engagement efficace et transparent des citoyens.
2.4.3. La sensibilisation et la formation interne et externe en matière de gouvernement ouvert
La formation constitue un autre moyen de veiller à ce que les agents de la fonction publique appliquent les principes du gouvernement ouvert. Dans certains cas, les bureaux de coordination centraux offrent des formations et des événements pertinents pour les fonctionnaires ou les parties prenantes (par exemple, sur les méthodologies de cocréation de documents politiques). Ils peuvent également collaborer avec des institutions pertinentes (par exemple, une école nationale de la fonction publique, des instituts de formation, etc.) et répondre à leurs besoins et demandes (OCDE, 2020[1]).
Il est indéniable que si les pays veulent voir progresser la culture du gouvernement ouvert, il est nécessaire que l’ensemble de ses parties prenantes en connaissent le sens, les ambitions, les composantes et les pratiques existantes. Cependant, les données récemment collectées par l’OCDE tendent à montrer que, si de nombreuses formations thématiques existent (voir Graphique 2.5) – sur l’accès à l’information et les données ouvertes majoritairement –, seuls 15 pays sur 43 répondants, membres et non membres de l’OCDE, ont organisé des formations sur le gouvernement ouvert en tant que telles, et peu d’entre elles sont adressées à la société civile ou aux citoyens.4
Un nombre croissant de formations sont organisées par le MTNRA et les acteurs du gouvernement ouvert, mais elles demeurent occasionnelles et peu propices à l’appréhension du gouvernement ouvert dans sa globalité et au-delà du processus du PGO
Un nombre croissant de formations ponctuelles ont été organisées ces dernières années à l’intention des fonctionnaires et de la société civile (voir Tableau 2.3). Ces formations ont appuyé la mise en œuvre des nouvelles législations et politiques publiques en matière d’accès à l’information, de diffusion proactive de l’information et de données ouvertes, ou encore de participation citoyenne. Des formations pour les fonctionnaires et la société civile ont également été recensées en matière d’intégrité dans le contexte de la lutte contre la corruption, et en matière de libertés et droits publics dans les cursus de formations pour les policiers, gendarmes et militaires. Il est également opportun de noter l’existence de formations propres au gouvernement ouvert ou de partages d’expériences sur le sujet dans le cadre des comités de coordination du processus du PGO et à destination des différentes parties prenantes. Cependant, les formations sur le gouvernement ouvert en lui-même n’ont lieu qu’au sein du processus du PGO, mises à part les sessions de sensibilisation organisées auprès de la société civile, y compris locale, lors du processus de cocréation du second PAN.
Tableau 2.3. Panorama des formations les plus pertinentes en matière de politiques publiques et pratiques de gouvernement ouvert
Nom des ateliers |
Organisation |
Domaine pertinent |
Public |
---|---|---|---|
Ateliers de formation et de partage d’expérience au profit des membres des comités de pilotage et d’implémentation |
MTNRA |
Gouvernement ouvert |
Fonctionnaires de l’administration centrale Personnel des institutions publiques indépendantes |
Formations sur les données ouvertes |
ADD |
Données ouvertes |
Hauts responsables et fonctionnaires au niveau des différents départements ministériels |
Formations sur la compréhension et l’application des principes de l’éthique, et au cadre général de la lutte contre la corruption dans le secteur public |
INPPLC |
Intégrité |
Fonctionnaires au niveau central Personnel des institutions publiques indépendantes |
Formation des formateurs en matière de droit d’accès à l’information |
MTNRA |
Accès à l’information |
Fonctionnaires au niveau central Personnel du pouvoir législatif |
Formations sur les libertés et droits civiques dans les cursus fondamentaux |
CNDH DIDH |
Libertés et droits civiques |
Police, gendarmerie, forces armées |
Renforcement de la participation citoyenne par l’appropriation de la société civile des mécanismes relatifs à la démocratie participative |
DGCT |
Participation citoyenne et de la société civile |
Société civile |
Sessions de formation et sensibilisation au gouvernement ouvert au profit des associations participant aux ateliers de cocréation du PAN |
MTNRA |
Gouvernement ouvert |
Société civile |
Ateliers de formation et de partage d’expérience au profit des associations membres du comité de pilotage |
MTNRA |
Gouvernement ouvert |
Société civile |
Séminaires de sensibilisation sur le droit d’accès à l’information |
MTNRA |
Accès à l’information |
Société civile |
Modules de formation sur la démocratie participative sur la plateforme de formation à distance des associations tacharokia.ma |
DRSC |
Participation citoyenne et de la société civile |
Société civile |
Source : Élaboré à partir des réponses du Maroc à l’Enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (2020[23]).
Par ailleurs, les entretiens conduits par l’OCDE mettent en valeur la concordance des acteurs institutionnels sur le besoin d’approfondir la sensibilisation et la formation en matière de lutte contre la corruption, d’accès à l’information, de participation citoyenne et de gouvernement ouvert en tant que tel. Cette observation rejoint les données provenant des pays de l’OCDE, qui déclarent à plus de 60 %, au niveau national, que la communication ou la connaissance insuffisante ou nulle des fonctionnaires concernant les avantages apportés par les réformes de gouvernement ouvert restent un défi prioritaire (OCDE, 2017[12]).
Différents manuels, boîtes à outils et lignes directrices sur les politiques publiques et stratégies de gouvernement ouvert sont à la disposition des agents publics et des parties prenantes non publiques
Des lignes directrices, des boîtes à outils et d’autres types de directives écrites peuvent accompagner les fonctionnaires dans leur mise en application des principes du gouvernement ouvert (voir Graphique 2.6). L’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert a permis de noter que, en 2020, une grande partie des pays de l’OCDE avait établi des lignes directrices sur les principes et pratiques de gouvernement ouvert, mais souvent avec une approche sectorielle ou thématique, par exemple sur les données ouvertes, la participation des citoyens et des parties prenantes, ou encore l’accès à l’information. On compte seulement 15 pays, membres et non membres de l’OCDE, qui disposent de lignes directrices portant explicitement sur la notion de gouvernement ouvert comme concept global (OCDE, 2023[24]).
Au Maroc, des vidéos et des guides ont été développés et diffusés autour des cadres légaux régissant le droit d’accès à l’information et les mécanismes de la démocratie participative aux échelles nationale et locale, à destination des fonctionnaires comme des citoyens. Une note sur les orientations générales propres au développement du numérique à horizon 2025 a également été remise aux fonctionnaires. Sur le gouvernement ouvert en tant que cadre transversal, on recense seulement un manuel du comité de pilotage du PGO pour ses membres de la société civile.
Tableau 2.4. Boîtes à outils / Lignes directrices disponibles sur les politiques publiques et pratiques de gouvernement ouvert au Maroc
Nom de la boîte à outils / des lignes directrices |
Domaine |
Public |
Lien Internet (si existant) |
---|---|---|---|
Guide sur la loi n° 31-13 sur le droit d’accès à l’information |
Divulgation proactive et réactive d’informations |
Fonctionnaires |
|
Guide de formation des formateurs |
Divulgation proactive et réactive d’informations |
Fonctionnaires |
N/A |
Note d’orientations générales pour le développement du digital à horizon 2025 |
Données gouvernementales ouvertes |
Fonctionnaires |
|
Manuel sur le cadre législatif et réglementaire de la gouvernance participative locale |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Fonctionnaires |
|
Manuel du comité de pilotage |
Approche intégrée du gouvernement ouvert |
Société civile (membre du comité de pilotage du PGO) |
|
Guide sur le droit d’accès à l'information pour les citoyens |
Divulgation proactive et réactive d’informations |
Citoyens |
https://www.mmsp.gov.ma/uploads/file/Guide_DAI_VersionFrancaise.pdf |
Portail relatif au suivi du programme gouvernemental |
Données gouvernementales ouvertes |
Citoyens |
barnamaj.cg.gov.ma |
Guide du droit de présenter des pétitions aux pouvoirs publics |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Citoyens et société civile |
|
Guide du droit de présenter des pétitions aux collectivités territoriales |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Citoyens et société civile |
|
Guide du droit de présenter des motions aux pouvoirs publics |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Citoyens et société civile |
|
Méthodologie d’adhésion des régions au programme local de l’initiative du Partenariat pour un gouvernement ouvert |
Gouvernement ouvert |
Membres des conseils régionaux, administrations territoriales, société civile |
|
Méthodologie de gestion du droit d’accès à l’information au niveau des collectivités territoriales |
Divulgation proactive et réactive d’informations |
Élus et cadres des collectivités territoriales |
|
Communes citoyennes : planifier, animer une démarche citoyenne dans votre commune |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Élus et cadres des collectivités territoriales |
|
Méthodologie de planification et d’animation des démarches participatives |
Participation des citoyens et des parties prenantes |
Élus et cadres des collectivités territoriales |
Source : Élaboré à partir des réponses du Maroc à l’Enquête du gouvernement ouvert de l’OCDE (2020).
2.4.4. Le Maroc pourrait envisager une mise en commun de ces lignes directrices et une boîte à outils intégrée sur le gouvernement ouvert
Dans le cadre de la réflexion visant à mettre en cohérence des principes et outils d’action à destination des acteurs du gouvernement ouvert, il est utile de noter l’effort de la DGCT du ministère de l’Intérieur, au titre du second PAN, visant à élaborer une boîte à outils à destination des collectivités territoriales et rassemblant l’ensemble des guides sur la communication, la participation, l’accès à l’information et la transparence. La DGCT a ainsi publié sur le portail national des collectivités territoriales la boîte à outils intitulée « Pour des politiques publiques régionales participatives et inclusives » qui regroupe une quinzaine de guides méthodologiques utilisables à chacune des étapes du cycle des politiques publiques (planification, mise en œuvre, évaluation et apprentissage, et communication). Ces documents pédagogiques visent à accompagner les collectivités territoriales dans la mise en œuvre effective et cohérente des principes du gouvernement ouvert dans l’action publique locale.
Afin d’appuyer la mise en cohérence des dynamiques de réformes du gouvernement ouvert entre les différents niveaux de gouvernement tout en capitalisant sur cette première expérience, il pourrait être opportun de développer un « trousseau de boîtes à outils ». Celui-ci serait composé de plusieurs boîtes à outils thématiques. Chacune d’entre elles contiendrait une présentation des ambitions du gouvernement en matière d’ouverture, ainsi que des ressources et du matériel communs (plateformes numériques, méthodologies, etc.), en complément des outils thématiques. Enfin, les boîtes à outils seraient référencées sur le site central gouvernement-ouvert.ma.
Le Navigateur de boite à outils de l’Observatoire de l’innovation du secteur public de l’OCDE a ainsi recueilli un certain nombre de boîtes à outils des manuels et des lignes directrices disponibles sur les différentes politiques de gouvernement ouvert dans le monde, de nature à servir pour le Maroc (Observatoire de l'innovation du secteur public, s.d.[25]). Il existe d’autres exemples, notamment de pays de l’OCDE (voir Encadré 2.11).
Encadré 2.11. Exemples de boîte à outils sur les pratiques et politiques publiques de gouvernement ouvert
Boîte à outils pour l’élaboration de politiques ouvertes (Royaume-Uni)
Le manuel comprend des informations sur l’élaboration de politiques ouvertes dans le gouvernement du Royaume-Uni, ainsi que des outils, des conseils étape par étape et des techniques que les décideurs peuvent utiliser pour créer des politiques plus ouvertes et dirigées par les utilisateurs.
Mettre en œuvre l’innovation : un manuel de l’utilisateur pour les programmes de gouvernement ouvert (Reboot)
Une ressource qui fournit des conseils pratiques, des orientations et un processus en huit phases, allant de l’élaboration du concept à sa mise en œuvre pour la création d’un programme de gouvernement ouvert, chaque étape faisant référence aux principes, aux leçons apprises, aux études de cas et à une liste de contrôle pour déterminer si vous êtes à la bonne phase. Cette ressource complète les plans d’action du PGO et a été développée dans le cadre d’un projet d’un an avec le gouvernement mexicain.
L’essentiel de la liberté d’information (Freedom of Information) pour les agences gouvernementales et les ministres australiens
Adaptée aux agents publics australiens qui doivent prendre des décisions sur des questions liées à la liberté d’information, cette boîte à outils couvre tout ce qui concerne l’accès à l’information en Australie, de son importance pour la démocratie à l’application concrète de la loi sur la liberté d’information. Chaque section contient des liens menant à des informations et des conseils plus détaillés sur les sites internet gouvernementaux, tels que les 12 meilleures pratiques pour une liberté d’information.
La boîte à outils de données ouvertes à faire soi-même du Canada
Ce manuel fournit un guide étape par étape sur la façon de développer et de mettre en œuvre une initiative de données ouvertes. Il rassemble des supports de formation, des bonnes pratiques et des outils. Il s’adresse principalement aux communes qui n’ont pas l’expérience des données ouvertes, mais peut néanmoins également servir à toute organisation souhaitant démarrer un projet de données ouvertes.
Boîte à outils bE-Open sur le gouvernement ouvert (Conseil de l’Europe)
En mettant l’accent sur l’Arménie, la Géorgie, la République de Moldavie et l’Ukraine, cette boîte à outils vise à soutenir la démocratie grâce à une meilleure gouvernance locale. Elle fournit des informations sur les normes internationales, la législation, les lignes directrices et les bonnes pratiques autour de quatre thèmes : l’éthique publique et la responsabilité, la prévention de la corruption, la transparence et la participation citoyenne.
2.4.5. Pour une meilleure maîtrise des compétences élémentaires liées au gouvernement ouvert dans les administrations publiques, le Maroc pourrait envisager de systématiser et promouvoir plus largement les formations qui lui sont dédiées et de créer une communauté de praticiens en ligne
Dans la même logique que la boîte à outils, le Maroc pourrait envisager d’élaborer un calendrier, voire un catalogue, des formations proposées sur les thématiques du gouvernement ouvert, de manière coordonnée entre les départements ministériels concernés et la DGCT en particulier, et qui serait mis en ligne et actualisé sur le site central du gouvernement ouvert au Maroc (gouvernement-ouvert.ma). De manière plus systématique, il serait également intéressant de mettre en place et de proposer un module de formation pour les nouveaux fonctionnaires et pour les plus anciens, dans le cadre de la formation continue proposée par les départements centraux, et en particulier la DGCT et le MTNRA.
À ce titre, le Maroc pourrait s’inspirer de l’initiative mise en place par le Brésil (voir Encadré 2.12).
Encadré 2.12. Formations sur le gouvernement ouvert au Brésil
La Direction de la transparence et du contrôle social du Contrôleur général de l’Union (CGU) (en partenariat avec l’université fédérale de Goiás) a préparé un cadre de formation en ligne sur différentes politiques et pratiques de gouvernement ouvert. Tous les cours sont disponibles gratuitement et peuvent être suivis à la fois par des fonctionnaires et des parties prenantes non publiques (la plupart d’entre eux sont toutefois destinés aux fonctionnaires). Outre les cours axés sur le mandat principal du CGU (par exemple, l’accès à l’information), le catalogue comprend un cours de 20 heures spécifiquement consacré au concept de gouvernement ouvert.
Source : (OCDE, 2022[20]).
Par ailleurs, pour une amélioration continue des compétences, il serait envisageable de créer une communauté de praticiens en ligne (à partir du réseau de points de contact) réunissant l’ensemble des parties prenantes intéressées au niveau central comme local, et avec le concours du monde universitaire, de la société civile et du secteur privé. Cet espace serait piloté par le MTNRA et la DGCT, qui sont les mieux placés pour connaître et valoriser les initiatives nationales et internationales. Il aurait vocation à faciliter l’échange de bonnes pratiques et d’expériences, et à constituer un vecteur informel mais efficace de coordination. À titre illustratif, les États-Unis ont créé cet espace au niveau du gouvernement fédéral, et l’organisation Cités et gouvernements locaux unis (CGLU) a mis en place six communautés thématiques de pratique, dont une sur la transparence et le gouvernement ouvert (voir Encadré 2.13). Le Maroc a également déjà effectué un pas dans ce sens avec la création par la DGCT du Réseau marocain des collectivités territoriales ouvertes (REMACTO) en octobre 2022, dans le cadre du Programme d’appui aux collectivités territoriales ouvertes. Une plateforme en ligne dédiée au réseau a été lancée en juin 2023, avec pour objectif de constituer un espace favorisant le dialogue, l’échange de bonnes pratiques et la coopération entre les collectivités territoriales dans la promotion des principes d’ouverture dans les politiques publiques au niveau local (DGCT, s.d.[11]).
Encadré 2.13. Communautés de pratiques sur les politiques et pratiques de gouvernement ouvert
Communauté de pratique US OpenGov
Le gouvernement des États-Unis a établi une série de communautés de pratiques à travers le gouvernement fédéral pour favoriser la collaboration et partager des ressources dans différents domaines politiques. La communauté de pratique du gouvernement ouvert est un espace numérique et un réseau, où les fonctionnaires de l’ensemble du gouvernement peuvent discuter des initiatives et des pratiques liées au gouvernement ouvert. La communauté du gouvernement ouvert se compose d’employés du gouvernement et de membres de la société civile travaillant dans le domaine du gouvernement ouvert, pour partager les meilleures pratiques afin de promouvoir la transparence, la participation et la collaboration, et de plaider en faveur de l’ouverture des informations gouvernementales. Ce type de communautés permet un échange continu d’informations et l’apprentissage par les pairs. Il soutient en outre la coordination et la collaboration à travers le gouvernement.
Communauté de pratique de CGLU sur la transparence et le gouvernement ouvert
La communauté de pratique de Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU) sur la transparence et le gouvernement ouvert a été créée dans le but de soutenir l’apprentissage entre pairs, la mise en réseau, la sensibilisation et le renforcement des capacités sur le gouvernement ouvert, ainsi que l’intégrité publique au niveau local, mais aussi de promouvoir le rôle des gouvernements locaux et régionaux dans le développement et la promotion de pratiques de transparence, de participation et de responsabilité pour la réalisation de villes et de territoires durables. La communauté de pratique est constituée d’un groupe de gouvernements locaux et régionaux, ainsi que d’experts, d’universitaires, d’institutions publiques et de représentants de réseaux internationaux de villes intéressés par la discussion et la promotion de solutions communes, d’opportunités d’apprentissage et d’échange de politiques publiques sur les questions de gouvernement ouvert. Elle est coordonnée par la Fédération espagnole des municipalités et provinces (FEMP), avec le soutien du PGO et du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat).
Le Maroc pourrait aussi considérer des moyens innovants de sensibilisation et d’appropriation, tels que la création d’un label « commune ouverte » et d’un prix du gouvernement ouvert
Pour guider les communes vers l’appropriation du concept du gouvernement ouvert et de ses principes, et les sensibiliser à leur bonne mise en œuvre selon les lignes directrices développées par la DGCT, il pourrait être intéressant de penser à créer un label « commune ouverte », comme vecteur d’incitation à la mise en œuvre de réformes intégrées de gouvernement ouvert. Celui-ci pourrait capitaliser sur le processus de labellisation « commune citoyenne » (créé en coopération avec le collectif « Démocratie et modernité » et l’association Targa, et avec l’appui de l’ambassade de Grande-Bretagne). Ce label représente un outil pertinent de réflexion, d’apprentissage et d’accompagnement de la bonne gouvernance locale sur les cinq piliers que sont la transparence et la reddition des comptes, l’égalité et l’équité, l’efficacité, l’efficience, et la coopération et la solidarité. Cette démarche de mutualisation des efforts permettrait de soutenir l’inclusion des collectivités territoriales dans la création d’une vision et dynamique intégrées d’ouverture, ayant pour objectif l’avènement d’un État ouvert.
Afin d’aller dans le sens d’initiatives encore plus ambitieuses et inciter les agents publics et les parties prenantes non publiques à procéder à des réformes, il pourrait être envisagé de créer un Prix du gouvernement ouvert. Il serait divisé en deux catégories : l’une récompenserait les acteurs non publics (citoyens, société civile, universitaires) qui ont présenté des idées ou initiatives prometteuses en matière d’ouverture ; l’autre récompenserait les acteurs récents de l’État ouvert, les collectivités territoriales ou les acteurs hors pouvoir exécutif. Les candidats seraient sélectionnés par le comité de pilotage du gouvernement ouvert et soumis au vote du public sur le site central du gouvernement ouvert. Dans cette optique, le Maroc pourrait trouver de l’inspiration auprès des expériences du Mexique ou de l’Allemagne qui, pour ce qui la concerne, a choisi une approche thématique (voir Encadré 2.14).
Encadré 2.14. Bonnes pratiques de pays de l’OCDE pour un prix du gouvernement ouvert
Le prix du gouvernement ouvert de San Luis Potosí au Mexique
L’objectif du Prix du gouvernement ouvert du gouvernement de San Luis Potosí au Mexique est de promouvoir et de reconnaître les initiatives des acteurs de la société civile et de l’administration publique qui ont permis une participation citoyenne plus efficace, une transparence renforcée et/ou une plus grande redevabilité du gouvernement.
La participation est ouverte à toute institution et tout citoyen ayant un intérêt pour le gouvernement ouvert, comme les ONG, les universitaires et l’administration publique, aux niveaux national et local. Les participants doivent soit concevoir et soumettre une initiative de gouvernement ouvert, soit, dans le cas des représentants du gouvernement, nommer celle de l’institution publique existante. Pour soutenir la création de propositions, les participants peuvent s’appuyer sur des lignes directrices qui décrivent les exigences en détail. Les propositions sont collectées sur un portail d’attribution dédié, avant qu’un groupe d’experts ne les évalue en fonction de huit critères prédéfinis. Les deux propositions gagnantes ne sont pas seulement récompensées financièrement avec un document signé par le gouverneur d’État. Elles ont également de réelles chances d’être mises en œuvre puisqu’elles sont intégrées à la banque de données des projets du gouvernement ouvert, qui collecte et valorise les initiatives à fort potentiel.
Ausgezeichnet! – Concours pour une « participation citoyenne exemplaire » en Allemagne
Afin de faire progresser de manière continue la participation citoyenne dans le domaine propre au ministère fédéral de l’Environnement, celle-ci doit être institutionnalisée dans l’administration publique et les entreprises publiques. Le concours « Ausgezeichnet! – Concours pour une participation citoyenne exemplaire » sert de plateforme d’échanges sur ce sujet et récompense les approches innovantes et exemplaires d’institutionnalisation.
Le concours est divisé en trois catégories, selon la partie prenante à l’origine du projet nominée et qui le fait avancer : administration publique, entreprises publiques ou citoyens. Toutes les propositions sont évaluées en fonction de cinq critères, qui garantissent une évaluation juste et comparable : le potentiel d’institutionnalisation, le cadre stratégique, la conception des processus, la qualité des processus et les résultats.
Les lauréats ont été récompensés lors d’un symposium, où les finalistes se sont présentés au jury interdisciplinaire. Dans divers ateliers, ils ont discuté de la manière de surmonter les défis de la participation citoyenne, des formats de participation citoyenne adaptés à l’étranger et de la manière dont les lignes directrices pour une bonne participation citoyenne élaborées par le ministère fédéral peuvent être mises en pratique.
2.5. Vers un usage plus stratégique de la communication externe et interne pour la promotion du gouvernement ouvert
Le rôle clé de la communication publique pour renforcer la mise en œuvre du gouvernement ouvert est consacré dans la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert, qui stipule que les pays doivent « communiquer activement sur les stratégies et initiatives en matière de gouvernement ouvert ainsi que sur les résultats, réalisations et impacts correspondants afin de veiller à ce qu’elles soient connues, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de la sphère publique, l’objectif étant de favoriser leur mise en pratique et de susciter l’adhésion des parties prenantes » (OCDE, 2017[2]). La Recommandation reconnaît par ailleurs sa contribution à la mise en œuvre de l’accès à l’information des citoyens (disposition 7), à la participation des parties prenantes à la vie publique (disposition 8) et à la transition vers un État ouvert (disposition 10), en rappelant le rôle des acteurs non gouvernementaux, y compris les médias, pour renforcer la transparence et la participation (OCDE, 2017[2]).
Les bureaux de coordination du gouvernement ouvert utilisent ainsi différents moyens et canaux de communication internes et externes pour sensibiliser et communiquer sur les progrès et les défis du programme du gouvernement ouvert, et favoriser la prise de conscience et l’appropriation par les parties prenantes (OCDE, 2020[1]). De tels efforts de communication peuvent en outre de nature soutenir un accès à l’information et une participation citoyenne accrus (OCDE, 2021[35]). Au Maroc, c’est ainsi le MTNRA, en tant que point de contact du PGO, qui coordonne les efforts de communication autour du processus du gouvernement ouvert. Il le fait en interne – au sein de l’administration marocaine, notamment via son réseau de communicants publics marocains – et en externe – à travers ses comptes officiels sur les réseaux sociaux, principalement sur Twitter et Facebook, avec #opengovmorocco et le portail du gouvernement ouvert (https://www.gouvernement-ouvert.ma/).
2.5.1. Des efforts de communication ont particulièrement été effectués pendant le processus du PGO et, plus largement, pour renforcer les principes du gouvernement ouvert
Conscient de l’enjeu que représente la communication publique dans la recherche d’information, de sensibilisation et d’adhésion des parties prenantes et du grand public, le Maroc a choisi d’intégrer plusieurs engagements relatifs à son amélioration dans le cadre du premier PAN du PGO (2018-20) (voir Encadré 2.15). Il a également été décidé de développer un plan de communication spécifique, cocréé avec des membres de la sous-commission sur la communication du comité de pilotage du gouvernement ouvert, de représentants d’OSC membres du comité et d’experts en communication publique.
Dans le cadre du second PAN, il convient d’observer le succès de la campagne de communication propre au processus de cocréation, qui a permis la participation de 809 acteurs et qui a largement été menée sur les réseaux sociaux. Un certain nombre d’engagements vont aussi dans le sens d’une meilleure communication autour des bénéfices du gouvernement ouvert (voir Encadré 2.15). Procéder ainsi correspond aux pratiques de l’ensemble des répondants à l’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert, qui rapportent des opérations de communication constantes lors des phases de cocréation et de lancement des plans d’action PGO, et ce principalement via les comptes officiels sur les réseaux sociaux.
Encadré 2.15. La communication publique et les engagements dans les PAN du gouvernement ouvert 2018-20 et 2021-23
Le premier PAN du gouvernement ouvert 2018-20 établit 24 engagements structurés en 6 axes. Le Maroc s’engage notamment à :
Sensibiliser l’opinion publique sur le droit d’accès à l’information (engagement 1) ;
Renforcer la publication et la réutilisation des données ouvertes (engagement 4) ;
Créer une dynamique consultative au niveau national et régional (engagement 14) ;
Mettre en place une plateforme électronique de « la participation citoyenne » (engagement 15) ;
Renforcer l’accès de la société civile aux médias audiovisuels (engagement 17) ;
Améliorer la communication et la sensibilisation sur le gouvernement ouvert (engagement 18).
Le second PAN du gouvernement ouvert 2021-23 établit 22 engagements. En matière de communication, le Maroc s’engage notamment à :
Développer et partager une boîte à outils pour renforcer la communication et la participation citoyenne au niveau des collectivités territoriales (engagement 2) ;
Promouvoir la publication et la réutilisation des données ouvertes (engagement 4) ;
Transcrire et publier des procédures et formalités administratives, et à les simplifier en vue de leur dématérialisation ;
Publier proactivement des informations et données statistiques relatives au secteur de l’éducation nationale.
Pour le PANDDH 2018-20, la communication a été effectuée à travers 14 campagnes de communication avec les universités. Une page Internet propre au PANDDH a également été créée sur le site de la DIDH et présente les axes de travail, les rapports nationaux en la matière, ainsi que les publications et points d’actualité (DIDH, s.d.[38]).
Au cours des dernières années, le Maroc a créé plusieurs portails et sites internet web sur les politiques et pratiques de gouvernement ouvert. Les portails et sites internet gouvernementaux les plus importants sont ainsi :
Le site https://www.gouvernement-ouvert.ma/, qui constitue la plateforme de référence d’information et de suivi sur les initiatives dans le cadre du processus du PGO.
Le site http://www.chafafiya.ma/, qui est un portail unique pour l’accès à l’information permettant aux citoyens d’adresser des demandes d’accès à l’information aux différentes administrations centrales et, depuis peu, aux collectivités territoriales (voir Chapitre 4).
Le site http://eparticipation.ma/, permettant aux groupes de citoyens de déposer des pétitions et des motions, conformément aux lois organiques n° 44.14 et n° 64.14, et disposant par ailleurs d’un espace dédié aux consultations publiques (voir Chapitre 5).
Le portail https://chikaya.ma/, géré par le MTNRA, qui permet aux citoyens de formuler des réclamations, observations ou suggestions sur les services publics des différents ministères, collectivités territoriales et établissements et entreprises publics (voir Chapitre 5)
le site Internet officiel du Secrétariat général du gouvernement (SGG) http://www.sgg.gov.ma/Legislation.aspx, qui permet de consulter des avant-projets législatifs publiés pour commentaire et au titre du décret n° 2-08-229 du 21 mai 2009, qui institue une procédure de publication des projets de textes législatifs et réglementaires publics (voir Chapitre 5).
Le site officiel de l’open data marocain http://www.data.gov.ma, où les informations publiées sont sous licence ouverte, accessibles à tous, sans aucune restriction de copyright ou de brevet.
La mise en place de tels outils, ainsi que les réformes plus larges d’ouverture du gouvernement et de la communication publique marocaine s’opèrent dans un contexte d’écosystèmes médiatiques changeants (OCDE, 2019[39]), dont l’accès à l’information (voir Chapitre 4) forme une composante clé. La télévision et la radio demeurent deux des supports favoris d’une partie des Marocains et des Marocaines pour recevoir des informations, mais Internet et les réseaux sociaux ont un impact significatif sur les habitudes de consommation de contenus (La Lettre Pro de la Radio, 2020[40] ; OCDE, 2021[41]).
Dans ce contexte en évolution, la communication publique, notamment des relations régulières et constructives avec les journalistes, permet de renforcer la capacité des médias à mobiliser les citoyens et à les aider à comprendre, contrôler et évaluer la qualité des politiques et services publics, en facilitant leur accès aux données détenues et diffusées par le gouvernement (OCDE, 2019[39] ; OCDE, 2021[35]). À travers les démarches d’accès à l’information, les journalistes peuvent également inciter le gouvernement à davantage de transparence.
Les réformes du cadre légal et réglementaire, ainsi que les avancées dans la mise en œuvre de l’accès à l’information comme de la gouvernance de la communication publique à l’échelle de l’ensemble du gouvernement au Maroc sont des leviers pour multiplier et généraliser les occasions d’interaction et de coordination entre responsables de l’accès à l’information, chargés de communication, journalistes et autres représentants de la société civile (voir Chapitre 4) (OCDE, 2019[39]). Un questionnaire de suivi a d’ailleurs mis en évidence des efforts poursuivis depuis 2019 pour étoffer les bases de données de journalistes et les relations avec la presse des départements ministériels marocains.5 Ces discussions peuvent en outre favoriser une meilleure compréhension de la manière dont il est possible de mettre la publication de l’information au service des journalistes et des citoyens (OCDE, 2019[39]).
Des rencontres et discussions régulières, adossées à la dynamique impulsée par la législation relative à l’accès à l’information, le dynamisme des initiatives de gouvernement ouvert et les efforts menés pour une communication plus stratégique, amèneraient conjointement l’ensemble du gouvernement et des partenaires des médias et de la société civile à poursuivre leur contribution à l’approfondissement d’une culture de l’ouverture et de la transparence des administrations publiques (voir Chapitre 4) (OCDE, 2019[39]). Elles pourraient se tenir dans le cadre ou en marge des activités régulières d’une structure comme le Conseil national du gouvernement ouvert, et s’appuyer sur les objectifs ou orientations dégagés par un plan – voire une stratégie – de communication adossée à la stratégie de gouvernement ouvert (voir Section 2.5.2).
Outre l’utilisation des médias traditionnels (radio, presse et télévision), les responsables publics ont également recours aux outils numériques. Des vidéos ont ainsi été postées sur les réseaux sociaux, par exemple pour présenter les engagements du Maroc en matière de gouvernement ouvert,6 l’utilisation de la plateforme Chafafiya au niveau central et local, ou encore pour mobiliser les citoyens et la société civile dans le cadre de la campagne de cocréation du second PAN.
Par ailleurs, comme explicité précédemment, la communication interne autour des initiatives de gouvernement ouvert a également été effectuée à travers des guides destinés aux fonctionnaires, des courriers officiels, ainsi que des circulaires gouvernementales relatives à l’accès à l’information et à la participation citoyenne, préparés par le MTNRA et la DGCT.7
En outre, un réseau des communicants publics marocains a été établi. À la suite des recommandations formulées dans le rapport Voix citoyenne au Maroc (OCDE, 2019[39]), il se pérennise et s’appuie désormais sur un groupe WhatsApp permettant l’échange d’informations entre les communicants des administrations centrales. Il s’agit d’un instrument récent d’information et de coordination interne de l’administration publique, mais qui gagnera à être exploité pour la sensibilisation des départements ministériels, la mobilisation des ressources, ainsi que pour l’optimisation des messages et de leur diffusion quant au gouvernement ouvert et aux initiatives menées. Poursuivre l’approfondissement du rôle de ce réseau national des responsables de la communication sera en effet de nature à contribuer au renforcement de la coordination de ces derniers, en organisant des réunions régulières, en l’animant dans le sens d’un meilleur partage de l’information entre les différents ministères, tout en encourageant le dialogue ainsi que la planification d’activités conjointes (OCDE, 2019[39]).
2.5.2. Le Maroc pourrait considérer une approche plus intégrée, innovante et inclusive de sa communication sur le gouvernement ouvert, afin d’assurer l’impact des démarches entreprises, et de susciter l’appropriation et l’engagement du plus grand nombre à travers plusieurs éléments
Une stratégie intégrée de communication reflétant l’éventail des initiatives en matière de gouvernement ouvert
La formulation d’une stratégie de communication gouvernementale est une étape décisive dans la perspective de la montée en puissance progressive des efforts de communication à l’échelle de l’ensemble du gouvernement (OCDE, 2019[39] ; OCDE, 2021[35]). Une fois développées, les stratégies marocaines de communication publique doivent faire l’objet d’une bonne connaissance à l’intérieur et à l’extérieur du gouvernement ou des institutions concernées (OCDE, 2019[39]). En règle générale, ces documents font l’objet d’une opérationnalisation dans des plans d’action, régulièrement suivis et évalués, afin d’en mesurer l’impact et d’en tirer les leçons (OCDE, 2021[35]). Cependant, en 2018, la moitié des départements interrogés dans le cadre d’une enquête sur la communication publique au Maroc ont indiqué qu’ils ne suivaient ni n’évaluaient leurs stratégies. En 2020, un questionnaire de suivi a pourtant souligné une progression, mais le besoin de poursuivre les efforts d’ancrage du suivi et de l’évaluation de la mise en œuvre de la communication publique demeure marqué.
Le Maroc ayant engagé la mise en œuvre de son second PAN (2021-23), il pourrait dès lors apparaître opportun de saisir l’occasion de la réflexion sur une stratégie du gouvernement ouvert pour y intégrer une stratégie de communication. Celle-ci serait alors déclinée en termes opérationnels sous la forme d’un plan d’action, prenant le relais du premier plan de communication de la période 2018-20. Pour cela, il conviendrait notamment de tenir compte des besoins de changement identifiés, en particulier en matière d’accentuation de la communication numérique, de diversification des cibles, et de dialogue autour des initiatives engagées et de leur impact. À l’image du reste des domaines couverts par une stratégie du gouvernement ouvert, la stratégie de communication pourrait être adossée, comme évoqué ci-avant, à des indicateurs et modèles de maturité concrets permettant d’en mesurer l’impact, et d’en envisager le perfectionnement et la progression.
La rationalisation des plateformes relatives au gouvernement ouvert permettant d’envisager à terme un guichet numérique unique en la matière
La multiplication des plateformes électroniques visant à mettre en œuvre les principes du gouvernement ouvert constitue un signe positif d’adaptation de l’administration aux besoins et attentes des usagers. Cependant, elle est également susceptible de nuire à la lisibilité de l’ensemble des initiatives et à la bonne compréhension des bénéfices et vecteurs de gouvernement ouvert. Aussi, serait-il utile de réfléchir à la rationalisation des plateformes numériques actuelles, en étudiant les synergies possibles entre elles. La création d’un espace commun numérique pour la société civile en décembre 2021, propre à la participation et à la consultation publique, est un premier pas en ce sens, mutualisant les efforts portés par le MTNRA sur le site gouvernement-ouvert.ma et ceux portés par le Département des relations avec la société civile sur le site eparticipation.ma. Pour aller plus loin, le référencement des différentes plateformes sur le site Internet de référence du gouvernement ouvert au Maroc pourrait être étudié. Cette démarche pourrait aller jusqu’à sa valorisation comme guichet numérique unique du gouvernement ouvert au Maroc. Le Canada a agi ainsi en créant un site central du gouvernement ouvert référençant toutes les informations et démarches en la matière : https://open.canada.ca/fr (voir Encadré 2.16). Procéder ainsi permettrait de communiquer plus efficacement sur le gouvernement ouvert et d’instaurer un point d’entrée unique pour toutes les démarches citoyennes.
Encadré 2.16. Le site Internet du gouvernement du Canada sur le gouvernement ouvert
Le site du gouvernement du Canada sur le gouvernement ouvert fournit du contenu sur un large éventail de sujets liés au gouvernement ouvert, et ce de manière facilement accessible. La page de démarrage est divisée en trois sections. La première section permet aux utilisateurs de rechercher directement des données et des informations qui ont été divulguées soit de manière proactive, soit à la suite d’une demande d’accès à l’information.
La deuxième section est une page d’information autour de la question « En apprendre davantage sur le gouvernement ouvert », qui s’articule autour de quatre thèmes :
À propos du gouvernement ouvert : la participation du Canada au processus du PGO, les initiatives de gouvernement ouvert à travers le Canada, les analyses et outils du Centre d’apprentissage du gouvernement ouvert, les foires aux questions (FAQ) sur le gouvernement ouvert, la licence pour le gouvernement ouvert et d’autres documents de référence.
Données ouvertes : données gouvernementales ouvertes dans le portail de données ouvertes, instructions sur leur utilisation, outils utiles et cas d’utilisation inspirants.
Information ouverte : recherches dans les dossiers numériques du gouvernement du Canada, les sommaires de demandes d’accès à l’information et les contrats de plus de 10 000 $.
Dialogue ouvert : participation à la prise de décision du gouvernement, principes et lignes directrices pour l’engagement, données de consultation, espace d’interaction avec d’autres acteurs de la communauté du gouvernement ouvert dans la communauté de praticiens de l’engagement public.
La troisième section, au bas de la page, présente les dernières nouvelles sur tout ce qui concerne le gouvernement ouvert.
Source : https://open.canada.ca/fr.
Une communication ouverte au plus grand nombre à travers une fonctionnalité de dialogue sur le site de référence du gouvernement ouvert et une analyse des audiences cibles et de leurs moyens privilégiés de communication
La communication publique est en capacité, si elle articule son fonctionnement autour de la contribution au renforcement du principe de transparence et de participation, de permettre l’apparition de nouvelles opportunités de dialogue et de mobilisation pour l’ensemble des parties prenantes autour des politiques publiques et des projets qui les constituent (OCDE, 2019[39] ; OCDE, 2021[35]). Cependant, seuls 8 % des centres de gouvernement font de la participation citoyenne un objectif prioritaire de leur communication publique (OCDE, 2021[35]). Au Maroc, il semble donc opportun de poursuivre la dynamique de communication élargie, telle qu’expérimentée dans le cadre de la cocréation du second PAN, en systématisant l’utilisation des moyens numériques, ainsi que la communication bidirectionnelle entre les citoyens et la société civile, et les parties prenantes au PGO. En ce sens, la création, en décembre 2021, d’un espace numérique de dialogue pour la société civile sur le portail du gouvernement ouvert est à saluer. Il est à souhaiter qu’il devienne un outil permanent non seulement de consultation, mais également de dialogue pérenne et à double sens entre le gouvernement, la société civile et, plus globalement, les citoyens. Un premier pas a déjà été fait dans ce sens avec l’intégration d’un espace de questions et d’un espace de propositions.
Par ailleurs, ces efforts peuvent aller dans le sens d’une plus grande attention à communiquer vers et avec toutes les catégories de population, y compris les plus marginalisées. Un ciblage précis ou des initiatives s’appuyant sur des profils d’audience ciblés permettent d’optimiser la pertinence des démarches de communication publique (OCDE, 2019[39]). Il s’agit néanmoins d’un défi pour de nombreux gouvernements, avec seuls 16 % des centres de gouvernement priorisant dans leur communication « une meilleure compréhension et analyse des publics ». L’absence d’un tel ciblage peut résulter en une dilution des actions et un affaiblissement de l’impact de l’information et de la mobilisation des destinataires des messages formulés (OCDE, 2021[35]).
Lors de l’enquête menée auprès des départements ministériels marocains, seuls certains d’entre eux déployaient alors des efforts pour identifier et adresser des messages spécifiques à des publics ciblés, à l’image du ministère de la Santé (OCDE, 2019[39]). Si des évolutions sont à noter depuis, la nouvelle stratégie de communication publique et le nouveau plan la déclinant en actions pourraient également être élaborés à partir d’une analyse des audiences cibles et de leurs canaux privilégiés de communication (OCDE, 2019[39]). Cela permettrait de mieux cibler les catégories de population les moins informées et sensibilisées que sont souvent les jeunes, les personnes vivant dans des territoires isolés et celles en situation de handicap. En ce sens, la Grèce a par exemple opté en 2018 pour une campagne ciblant les jeunes, pour en faire des acteurs et partenaires pour une gouvernance publique plus ouverte et exemplaire (voir Encadré 2.17).
Encadré 2.17. Une campagne ciblant et engageant les jeunes en Grèce
Dans le cadre d’un projet de l’OCDE avec la Grèce visant à accroître l’intégrité et à réduire la corruption dans le pays, le gouvernement a élaboré en 2018 la campagne « Sois le changement que tu veux voir » sur YouTube. Cette campagne a fait appel à des YouTubeurs, qui comptent parmi les personnalités les plus influentes auprès des jeunes, pour qu’ils partagent leurs expériences personnelles de la corruption.
L’objectif était de créer un contenu authentique auquel les jeunes pouvaient facilement s’identifier et qui leur permettait de s’engager avec les créateurs de contenu, considérés comme des personnes ordinaires ayant des préoccupations et des intérêts communs. Plutôt que de se concentrer sur l’ampleur et la portée de la corruption, l’objectif était de faire participer les jeunes à une conversation et de souligner qu’ils ont le pouvoir et la responsabilité de changer la culture pour le mieux.
La réaction aux vlogs a été positive et la campagne a suscité un grand intérêt pour ce sujet parmi les jeunes Grecs, touchant 78 % des 13-34 ans. Les vidéos ont reçu 888 240 visites et plus de 62 000 réactions.
Source : (OCDE, 2018[42]).
La promotion de « success stories » pour traduire l’impact des réformes en cours
Enfin, une attention particulière est à apporter à la démonstration de l’impact des initiatives engagées pour que les messages communiqués soutiennent une plus large participation, tout en assurant transparence et redevabilité en mettant des informations à la disposition du public. Communiquer sur les projets menés et leurs résultats est notamment de nature à répondre à des interrogations des publics intéressés et à les aider à s’identifier à la communauté chargée de ces actions, à souligner les succès et défis, et à contribuer à soutenir plus largement l’engagement des citoyens et de la société, ainsi que les initiatives nouvelles pour approfondir l’ouverture du gouvernement. Pour répondre à ces enjeux, des pays de l’OCDE ont mis en place des portails partageant les démarches entreprises ou l’expérience des parties prenantes, à l’image du portail des témoignages de réutilisation du Canada (voir Encadré 2.10). Une section dédiée sur le portail du gouvernement ouvert du Maroc pourrait avoir un impact positif en ce sens. Au-delà du développement nécessaire de mécanismes approfondis de suivi et d’évaluation avec indicateurs de performance, elle pourrait prendre la forme d’une présentation et d’une analyse d’exemples de véritables succès (« success stories ») sur le site de référence du gouvernement ouvert au Maroc, et faire l’objet de campagnes sur les réseaux sociaux. Pour ce faire, le Maroc pourrait observer avec intérêt les pratiques de la Nouvelle-Zélande, où l’équipe du service public numérique au département de l’Intérieur a mis en place un blog en ligne pour partager des expériences inspirantes en matière de transformation numérique (voir Encadré 2.18).
Encadré 2.18. Le blog Digital.govt.nz en Nouvelle-Zélande
Le but du blog Digital.govt.nz est de : 1) partager des histoires et des expériences liées à la transformation numérique du gouvernement ; 2) montrer de quelle manière le gouvernement innove et agit pour créer de meilleurs services ; 3) mettre en évidence les meilleures pratiques, les idées novatrices, les tendances transformatrices et les leçons tirées des projets, en particulier lorsqu’elles sont axées sur l’ensemble du gouvernement ; 4) défendre les meilleures pratiques dans l’ensemble du gouvernement ; et 5) communiquer des informations à un public plus large et intergouvernemental.
Références
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[38] DIDH (s.d.), Le plan d’action national en matière de démocratie et des droits de l’Homme (2018-2021), https://didh.gov.ma/fr/planification-et-suivi/politiques_publiques/le-plan-daction-national-en-matiere-de-democratie-et-des-droits-de-lhomme-2018-2021/ (consulté le 12 novembre 2021).
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[8] Gouvernement du Costa Rica (2015), « Segundo Plan de Acción Nacional de Gobierno Abierto de Costa Rica (2015-2017) », https://observatorioplanificacion.cepal.org/sites/default/files/plan/files/2_Segundo%20Plan%20de%20Acci%C3%B3n%20Costa%20Rica%20%281%29.pdf.
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[5] INPPLC (2019), Stratégie Nationale Anti-Corruption : Pour une nouvelle dynamique d’ensemble, https://inpplc.ma/fr/node/368 (consulté le 30 septembre 2021).
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[9] Italia Open Gov (s.d.), Open Government Forum, https://open.gov.it/partecipa/community-ogp-italia/forum-multistakeholder (consulté le 30 septembre 2021).
[40] La Lettre Pro de la Radio (2020), Kantar dévoile les résultats de l’Africascope Maghreb 2019, https://www.lalettre.pro/Kantar-devoile-les-resultats-de-l-Africascope-Maghreb-2019_a23025.html (consulté le 27 novembre 2020).
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[25] Observatoire de l’innovation du secteur public (s.d.), Toolkit Navigar, https://oecd-opsi.org/toolkits/?_toolkit_discipline_or_practice=open-government.
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[23] OCDE (2020), Enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert.
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[42] OCDE (2018), Engaging Youth in the Fight against Corruption, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/corruption/ethics/youth-anti-corruption-campaign.htm (consulté le 2 décembre 2021).
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[2] OCDE (2017), « Recommandation du Conseil sur le gouvernement ouvert », Instruments juridiques de l’OCDE, Éditions OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0438.
[17] OCDE (2014), What is Impact Assessment?, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/sti/inno/What-is-impact-assessment-OECDImpact.pdf.
[14] Partenariat pour un gouvernement ouvert (2021), Rapport de conception du Maroc 2018-2020, https://www.opengovpartnership.org/fr/documents/morocco-design-report-2018-2020/ (consulté le 8 octobre 2021).
[27] Reboot Design (2015), Implementing Innovation: A User’s Manual for Open Government Programs, https://implementinginnovation.org/assets/reboot_implementinginnovation_web.pdf.
[4] ReDAI (s.d.), Plateforme d’échange du réseau du droit d’accès à l’information, http://redai.chafafiya.ma/redai/pages/front.mmsp (consulté le 11 mai 2023).
[37] Royaume du Maroc (2021), Plan d’action national du gouvernement ouvert 2021 - 2023, https://www.gouvernement-ouvert.ma/docs/Plan%20d'action%20OGP-QM4ok.pdf.
[36] Royaume du Maroc (2018), Plan d’action national du gouvernement ouvert 2018 - 2020, https://www.gouvernement-ouvert.ma/docs/PlanAction_Maroc_OGP-IAdGL.pdf.
[22] Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (2018), « What we heard » : Rapport sommaire sur les consultations sur le gouvernement ouvert Octobre 2017 à Août 2018, https://ouvert.canada.ca/fr/contenu/ce-que-nous-avons-entendu-rapport-sommaire (consulté le 12 octobre 2021).
[6] UK Open Governement (s.d.), UK Open Government Civil Society Network, https://opengovernment.org.uk/ (consulté le 14 mars 2022).
[18] Van Dooren, W., G. Bouckaert et J. Halligan (2015), Performance Management in the Public Sector, Routledge, https://doi.org/10.4324/9781315817590.
Notes
← 1. Entretien mené dans le cadre de cette revue (juin 2021).
← 2. Données issues de l’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (2020).
← 3. Il est à noter que cette plateforme n’a pas été actualisée avec le nouveau programme gouvernemental à la date de la rédaction de la revue (novembre 2021).
← 4. Données issues de l’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (2020).
← 5. Données issues d’un questionnaire de suivi de la mise en œuvre des recommandations du rapport « Voix citoyenne au Maroc » (OCDE, 2019[39]), diffusé parmi les départements ministériels à l’automne 2020.
← 7. Sur le droit d’accès à l’information, circulaire n° 5/2020 du ministère de l’Économie, des Finance et de la Réforme de l’administration, Département de la réforme de l’administration : http://bdj.mmsp.gov.ma/Medias/Uploaded/files/Circulaire%20n%C2%B0%205-2020-FP.pdf ; Circulaire n° 920 du 4 octobre 2021, du ministère de l’Intérieur à l’adresse des walis, des gouverneurs et agents des provinces et des préfectures, ainsi que des présidents des conseils des collectivités territoriales, appelant à « renforcer / consolider les valeurs de la démocratie participative et de la participation citoyenne au sein des collectivités territoriales ».