La montée en puissance des données et des technologies numériques bouleverse nos économies et nos sociétés à un rythme très soutenu, avec des implications considérables pour la marche quotidienne des administrations publiques. Les administrations publiques du XXIe siècle doivent s’adapter aux exigences croissantes des citoyens, tout en subissant des pressions budgétaires toujours plus grandes et tout en faisant face à de nouveaux défis sur le plan de l’action publique. Si elles ne réussissent pas à s’adapter à cet environnement nouveau et mouvant, elles s’exposent à des risques réels et, par conséquent, à une dégradation du niveau de confiance des citoyens.
Les données peuvent jouer un rôle utile au sein de la société. Néanmoins, malgré certains progrès, l’espoir de transformer les promesses liées aux données en retombées tangibles, mesurables et cohérentes reste difficile à concrétiser. Au sein du secteur public, le poids des technologies déjà en place, un certain manque de compétences et l’existence d’obstacles d’ordre juridique empêchent les données de jouer pleinement leur rôle dans la transformation numérique en cours. Certains pays ont nettement renforcé leur aptitude à faire un usage stratégique des données de façon à améliorer l’action publique, les services publics ou la gestion des performances du secteur public. À titre individuel, certaines entités ont également obtenu des résultats impressionnants. Néanmoins, l’utilisation des données n’est pas encore considérée – ni financée – comme un outil fondamental de création de valeur publique.
Dans le sillage des travaux déjà menés par l’OCDE sur le rôle des données au sein de la société et de l’économie, le présent rapport propose un modèle de secteur public axé sur les données qui vise à permettre aux administrations publiques de tirer pleinement parti des possibilités offertes par les données au XXIe siècle. Il postule qu’un secteur public véritablement axé sur les données :
admet que les données sont un actif stratégique crucial, dont la valeur est définie et dont l’impact est mesuré ;
s’emploie activement à lever les entraves à la gestion, au partage et à la réutilisation des données ;
utilise les données pour transformer la conception, la prestation et le suivi des politiques et services publics ;
valorise les efforts visant à publier les données de façon ouverte tout autant que l’utilisation des données par chaque acteur public et leur partage entre les acteurs publics.
Le présent rapport souligne l’importance d’une démarche à l’échelle de l’administration tout entière pour concevoir un modèle de gouvernance des données cohérent et complet, qui permette aux pouvoirs publics de mieux assurer les services publics tout en étant efficients, transparents et dignes de confiance dans leur utilisation des données. À cette fin, il propose trois grands axes de réflexion.
En premier lieu, il faut que les pays élaborent, en matière de gouvernance des données, un modèle qui couvre tous les aspects de la question. Le présent rapport propose une définition de la notion de gouvernance des données ; énonce la finalité de cette gouvernance ; et décrit la marche à suivre pour mettre en place un cadre commun permettant d’instituer une telle gouvernance. Il argue que, si les pays veulent instaurer un secteur public véritablement axé sur les données, ils doivent se doter d’une démarche de gouvernance des données cohérente, commune à l’ensemble de l’administration et réunissant les conditions indispensables à l’obtention d’avantages systémiques pour la sphère publique. Les éléments constitutifs d’un tel cadre sont les suivants :
mettre en place le leadership et la vision qui permettront de conférer, à l’échelle de l’ensemble du secteur public, une orientation stratégique à la réflexion relative au secteur public axé sur les données ;
encourager une mise en œuvre cohérente du modèle de secteur public axé sur les données, à l’échelle de l’ensemble de l’administration et dans l’enceinte de chaque entité ;
définir ou revoir les règles, les textes, les orientations et les normes associés aux données ;
veiller à l’existence d’une architecture des données qui respecte les normes, l’interopérabilité et la sémantique tout au long des opérations de création, de collecte, d’entreposage et de traitement des données ;
mettre en place l’infrastructure en matière de données nécessaire pour favoriser la publication, le partage et la réutilisation des données.
En deuxième lieu, les pays peuvent utiliser les données pour créer de la valeur publique dans le cadre de trois types d’activités :
l’anticipation et la planification : ils peuvent utiliser les données dans le cadre de la conception des politiques, de la planification des interventions, de l’anticipation des évolutions possibles et de la prévision des besoins ;
la prestation des services publics et des politiques publiques : ils peuvent utiliser les données pour fournir des éclairages et améliorer la mise en œuvre des politiques publiques, la réactivité des pouvoirs publics et la prestation des services publics ;
l’évaluation et le suivi : ils peuvent utiliser les données pour mesurer l’impact, contrôler les décisions et suivre les performances.
En troisième lieu, les pouvoirs publics doivent réfléchir au rôle des données dans la confiance. La confiance à l’égard des autorités joue un rôle majeur dans le bien-être des citoyens ; toutefois, la confiance se perd beaucoup plus aisément qu’elle ne se gagne. Toute mauvaise manipulation des données des citoyens peut être particulièrement lourde de conséquences. Le rapport met les pouvoirs publics au défi :
d’adopter une démarche conforme à l’éthique qui guidera les décisions et les comportements ;
de préserver la confidentialité des données, de promouvoir la transparence et de concevoir, pour les citoyens, des parcours qui les aideront à comprendre l’utilisation de leurs données, à autoriser cette utilisation ainsi qu’à révoquer cette autorisation ;
d’assurer la sécurité des services et données publics selon des moyens qui permettront d’atténuer les risques sans empêcher la transformation du secteur public.
Le présent rapport propose trois études de cas en rapport avec ce modèle de secteur public axé sur les données. Ces études de cas montrent que cette approche vaut aussi bien à l’échelon local et à l’échelon de chaque entité qu’à l’échelon du centre de gouvernement. Les exemples mentionnés portent sur les domaines de l’intégrité du secteur public ; de l’emploi et de la gestion publics ; et de la budgétisation et des dépenses publiques. Les pays et les entités publiques peuvent se fonder sur le présent rapport pour évaluer où ils se situent sur le chemin de la mise en place d’un secteur public axé sur les données.