Cora Berner
États de fragilité 2018
Chapitre 3. Performance des contextes fragiles au regard de la concrétisation du développement durable
Abstract
Le chapitre 3 présente les premiers progrès accomplis par les contextes fragiles sur la voie de la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et au regard d’autres indicateurs du développement, en soulignant les difficultés particulières auxquelles sont confrontés les contextes de fragilité pour être à la hauteur des ambitions mondiales de développement. Il examine quelques-unes des problématiques associées à la collecte de données et à la mesure des progrès en matière de développement durable dans les contextes de fragilité, puis compare les 58 contextes fragiles compris dans le Cadre sur la fragilité au regard de diverses thématiques en rapport avec le développement durable. Au nombre des thématiques envisagées figurent la croissance démographique prévue, la concentration croissante de la pauvreté à l’échelle mondiale dans les contextes de vulnérabilité et l’impact de la violence dans les contextes fragiles. Ce chapitre traite également de la question de la gouvernance dans les situations de fragilité, en particulier des performances enregistrées en matière de prestation de services de base et de biens publics, tels que l’éducation et la santé, et analyse les défis liés aux inégalités dans les contextes de fragilité.
De nombreux contextes fragiles ont réalisé d’importantes avancées vers la concrétisation du développement durable. Collectivement, ils sont toutefois en retard par rapport aux pays et économies qui ne sont pas fragiles. Si la plupart des contextes de fragilité sont en bonne voie pour réaliser les ODD 13 et 17, des défis considérables subsistent concernant la réalisation des ODD 1, 2, 3 et 16, notamment (Sachs et al., 2017, pp. 15-19[1]). En réalité, la plupart des contextes de fragilité se classent parmi les pays affichant les moins bonnes performances concernant les cibles de l’ODD 16 (Institute for Economics and Peace, 2017[2]).
Autrement dit, les contextes fragiles sont déjà ceux qui accusent le plus grand retard dans la réalisation d’un agenda voué à ne laisser personne de côté. Sur 157 pays pour lesquels il existe des données relatives aux avancées en matière d’ODD, les contextes fragiles se classent systématiquement dans le dernier tiers. Les pays extrêmement fragiles que sont la République démocratique du Congo, le Tchad et la République centrafricaine sont tout en bas du classement, respectivement à la 155e, 156e et 157e place (Sachs et al., 2017, p. 11[1]). Les principales caractéristiques des contextes de fragilité sont présentées dans le Graphique 3.1.
3.1. Déficit de données
Le déficit de données et les lacunes des systèmes statistiques demeurent en de nombreux endroits des obstacles majeurs à la planification en vue de la réalisation des ODD et à leur suivi (OCDE, 2017[11]). Ainsi, les données font défaut pour environ les deux tiers des 232 indicateurs relatifs aux ODD, et pour 88 indicateurs, aucune méthodologie de mesure n’a été convenue. En outre, seuls 37 pays disposent d’une législation nationale en matière de statistique conforme aux Principes fondamentaux de la statistique officielle des Nations Unies ; l’insuffisance persistante de données ventilées par sexe et « le manque de volonté politique, de ressources financières et de capacités » constituent des obstacles supplémentaires à un suivi exhaustif des avancées vers le développement durable (OCDE, 2017, p. 80[11]).
Pour 10 des 58 pays inclus dans le Cadre 2018 sur la fragilité, les données disponibles ne couvrent même pas 80 % des indicateurs relatifs aux ODD (Sachs et al., 2017, p. 50[1]). Malgré ces difficultés, il ressort du rapport Coopération pour le développement 2017 que l’aide apportée par les donneurs à l’appui de la statistique est de plus en plus dirigée vers des situations fragiles, si bien que la République démocratique du Congo et l’Afghanistan – deux contextes extrêmement fragiles – étaient les deux principaux bénéficiaires de l’aide à l’appui de la statistique entre 2013 et 2015 (OCDE, 2017, p. 81[11]). Cette évolution est encourageante. Cependant, les donneurs du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE et les donneurs non membres du CAD devront continuer de tenir les engagements qu’ils ont souscrits dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 (ci-après le « Programme 2030 »). Ces derniers ne visent pas simplement à produire du développement mais aussi à renforcer les capacités à comprendre et suivre la concrétisation du développement et les conséquences qui en découlent.
Encadré 3.1. Renforcement des capacités statistiques nationales dans les contextes de fragilité
Avec l’appui des partenaires au développement, les systèmes statistiques nationaux ont pu faire des progrès en termes de renforcement de leurs capacités. Cependant, ils demeurent déficients dans les contextes de fragilité. Leurs installations sont souvent inadéquates et ils manquent de ressources et de compétences techniques. En outre, les gouvernements de certains pays en développement ne peuvent pas accéder en toute sécurité à l’ensemble de leur territoire. Du fait de ces problèmes, les contextes de fragilité ont accusé un certain retard dans la notification relative aux Objectifs du millénaire pour le développement, et ce pour les huit Objectifs qui les constituaient. En conséquence, comme le note l’édition 2017 du Partner Report on Support to Statistics (PRESS, rapport sur le soutien des partenaires à la statistique) de PARIS21, les contextes de fragilité1 bénéficient désormais de l’attention de la communauté du développement de la statistique (Paris21, 2017[12]). D’après ce rapport, les engagements financiers consacrés au développement de la statistique reçus par les contextes fragiles entre 2013 et 20152 se sont élevés au total à 507 millions USD, ce qui représente près d’un tiers de l’ensemble des engagements dédiés au développement de la statistique à travers le monde sur cette période.
Selon le rapport PRESS 2017 (Paris21, 2017[12]), l’Afghanistan, la République démocratique du Congo, Madagascar, le Myanmar, le Soudan du Sud et le Yémen ont reçu plus des deux tiers de l’aide à l’appui de la statistique accordée à des contextes fragiles. Globalement, 11 contextes de fragilité ont bénéficié chacun de plus de 10 millions USD d’engagements dédiés au développement de la statistique. Cinq donneurs – le Canada, le Royaume-Uni, l’Union européenne (UE), le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et la Banque mondiale – ont fourni près de 80 % de l’aide totale consacrée à la statistique ciblant les contextes de fragilité.
Le très récent rapport de suivi des Objectifs de développement durable (ODD) montre également que seulement un contexte fragile sur dix disposait d’un plan statistique national intégralement financé en cours de mise en œuvre en 2017 (ONU DAES, 2018[13]). S’agissant de la répartition sectorielle, la majeure partie des engagements va aux statistiques démographiques, et plus particulièrement au soutien à l’enregistrement des naissances et des faits d’état civil, qui demeure médiocre dans les contextes fragiles (taux d’enregistrement de 59 %, contre une moyenne mondiale de 71 %) (ONU DAES, 2017[14]). Au fil des ans, le soutien international porte ses fruits. Le score moyen de l’Indicateur de capacité statistique des contextes en situation de fragilité a augmenté de 5 points, passant de 46 à 51 sur 100, entre 2010 et 2015 (Banque mondiale, s.d.[15]). Sur la même période, la moyenne pour les pays empruntant auprès de l’Association internationale de développement (IDA) a augmenté de seulement 2 points, passant de 61 à 63 sur 100. Les contextes fragiles continuent de mener peu à peu des activités de renforcement des capacités statistiques. Le Myanmar, par exemple, a procédé à son premier recensement depuis 30 ans, et la Libye a mis en place sa première stratégie nationale pour le développement de la statistique, devant être déployée sur la période 2018-23.
Il est crucial que d’autres engagements et investissements à long terme soient réalisés afin de renforcer les systèmes et d’assurer le développement des capacités dans les contextes de fragilité, ces deux activités étant au cœur de tout effort de renforcement statistique. Ce point se vérifie tout particulièrement à la lumière du Programme 2030 pour la mise en œuvre et le suivi des plans nationaux de développement et des ODD, afin de combler les lacunes propres à tel ou tel secteur dans des domaines tels que les statistiques environnementales et économiques. Le développement des capacités statistiques doit être au centre du soutien apporté aux contextes fragiles. Un moyen de garantir des capacités statistiques homogènes et pérennes consiste à veiller à ce que le financement à l’appui du développement de la statistique soit explicitement inclus dans ce soutien.
1. Le Rapport sur le soutien des partenaires à la statistique de PARIS21 (rapport PRESS) n’utilise pas les mêmes critères que l’OCDE pour définir la fragilité. Il s’appuie sur la liste harmonisée des situations fragiles établie par la Banque mondiale pour déterminer quels contextes et pays satisfont à ces critères. Voir : http://www.worldbank.org/en/topic/fragilityconflictviolence/brief/harmonized-list-of-fragile-situations.
2. L’aide totale au développement de la statistique est habituellement calculée sur une base triennale parce que les engagements portent généralement sur plusieurs années et il est courant que les montants fluctuent d’une année sur l’autre.
3.2. Population
D’après les projections réalisées aux fins du présent rapport, la proportion de la population mondiale vivant dans des contextes fragiles augmentera dans les prochaines décennies. Actuellement, environ 1.8 milliard de personnes vivent dans des contextes fragiles, ce qui représente 24 % de la population mondiale. D’ici 2030, la population vivant dans ces contextes devrait croître, atteignant 2.3 milliards d’individus, soit environ 28 % de la population de la planète. Selon les estimations, elle devrait encore s’accroître d’ici 2050, pour atteindre 3.3 milliards de personnes, ou 34 % de la population mondiale (Graphique 3.3).
La croissance démographique rebattra les cartes entre les régions. Si, en 2017, 60 % de la population mondiale (4.5 milliards d’habitants) vivaient en Asie, selon les estimations, plus de 50 % de la croissance anticipée de la population mondiale entre 2017 et 2050 surviendra en Afrique (ONU DAES, 2017, p. 1 [16]). On prévoit que la moitié de cette croissance de la population mondiale sera concentrée dans seulement neuf pays, dont six connaissent une situation de fragilité (l’Éthiopie, le Nigéria, l’Ouganda, le Pakistan, la République démocratique du Congo et la République-Unie de Tanzanie, ci-après la « Tanzanie ») (ONU DAES, 2017, p. 5[16]). Ainsi le Nigéria – actuellement le septième pays le plus peuplé au monde – devrait en 2050 dépasser les États-Unis en termes de population et devenir le troisième pays le plus peuplé au monde (ONU DAES, 2017, p. 5[16]). La population du Pakistan, lequel figure actuellement parmi les 10 premiers pays au monde par la population, devrait franchir la barre des 300 millions d’habitants d’ici 2050. Dans tous ces pays, la croissance démographique est essentiellement tirée par des taux de fécondité élevés, ce qui est particulièrement vrai pour le Nigéria, l’Ouganda, la République démocratique du Congo et la Tanzanie (ONU DAES, 2017, p. 6[16]).
3.3. Pauvreté
La plupart des 58 pays que ce rapport identifie comme fragiles se heurtent à de grandes difficultés pour mettre fin à l’extrême pauvreté, définie comme le fait de vivre avec moins de 1.90 USD par jour. Selon les Nations Unies, la proportion de la population vivant dans l’extrême pauvreté à travers le monde a nettement diminué, passant de 28 % en 1999 à 11 % en 2013 (ONU DAES, 2017, p. 16[14]). Toutefois, d’après les calculs effectués pour ce rapport, la part de la population vivant dans l’extrême pauvreté devrait augmenter dans 40 des 58 contextes fragiles d’ici 2030, année fixée pour la réalisation des ODD. Si aucune action n’est entreprise, on estime que le nombre de personnes vivant en dessous du seuil international de pauvreté dans les situations de fragilité atteindra 620 millions en 2030, contre 513.6 millions en 2015. Autrement dit, il se pourrait qu’en 2030, plus de 80 % des individus les plus pauvres de la planète vivent dans des contextes fragiles. En 2030, les personnes extrêmement pauvres seront essentiellement concentrées dans 4 des 58 pays recensés dans le Cadre de l’OCDE sur la fragilité : le Nigéria (130 millions d’habitants), la République démocratique du Congo (80 millions d’habitants), la Tanzanie (30 millions d’habitants) et Madagascar (28 millions d’habitants).
Les progrès les plus rapides accomplis dans la lutte contre l’extrême pauvreté ont été observés en Asie de l’Est et en Asie du Sud-Est, où celle-ci a reculé de 32 % entre 1999 et 2013 (ONU DAES, 2017, p. 16[14]). En Afrique subsaharienne, où se concentrent la majorité des contextes de fragilité (36), le rythme de réduction de la pauvreté est plus lent : environ 41 % de la population y vivait encore dans l’extrême pauvreté en 2013 (Banque mondiale, 2017, p. 36[17]). Une autre étude récente aboutit à des projections analogues, avançant que les territoires le moins susceptibles d’avoir éradiqué la pauvreté d’ici 2030 sont 31 « pays accusant un important retard », pâtissant d’un gouvernement peu efficace, d’un secteur privé faible, de conflits et de violence, d’aléas naturels ou encore de risques environnementaux, autant de facteurs qui contribuent à la stagnation des taux de pauvreté (Gertz et Kharas, 2018[18]). Cette même étude estime également que quatre personnes sur cinq vivant dans l’extrême pauvreté en 2030 habiteront dans ces pays. Ces constats concordent avec la cartographie de la fragilité. Parmi les pays recensés par Gertz et Kharas dans leur étude (2018[18]), tous sauf deux sont considérés comme fragiles selon le Cadre de l’OCDE sur la fragilité.
Même les économies avancées ont du mal à atteindre les cibles de réduction de la pauvreté nationale. Ce constat ressort d’une récente évaluation de référence portant sur la réalisation des ODD par le Canada, laquelle observe que les progrès au regard de l’objectif consistant à réduire de 50 % la pauvreté monétaire nationale d’ici 2030 marquent le pas (McArthur et Rasmussen, 2017[19]). En effet, pour de nombreux pays, il ne sera pas facile d’atteindre la cible de l’ODD 1 relative à la réduction de la pauvreté, ce qui devrait mettre nettement en relief les difficultés majeures qui se posent dans les contextes fragiles. Étant donné que la problématique de la lutte contre l’extrême pauvreté sera de plus en plus associée au programme d’action relatif à la fragilité, un effort concerté s’imposera pour mieux comprendre et prendre en compte la multiplicité des facteurs qui entravent des progrès plus rapides dans ces pays.
3.4. Inégalités
Le creusement des inégalités entre riches et pauvres est devenu l’une des problématiques définitoires du xxie siècle. Comme le souligne un rapport d’Oxfam publié en 2017, depuis 2015, les 1 % de personnes les plus riches possèdent davantage de richesses que le reste du monde (Hardoon, 2017[20]). Les inégalités de revenu constituent un frein majeur à la croissance inclusive et à l’atténuation de la pauvreté, dont découlent de grandes difficultés pour concrétiser le Programme 2030 (Banque mondiale, 2016, p. 69[21]). Les inégalités sont un problème d’envergure mondiale. Cependant, leurs conséquences sont encore plus dévastatrices dans les contextes de fragilité, surtout en Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient, où les inégalités de revenu se sont stabilisées à des niveaux très élevés (Alvaredo et al., 2018, p. 40[22]). Selon le coefficient de Gini, les pays considérés comme extrêmement fragiles, dont Haïti et la République centrafricaine, sont aussi parmi les pays dont la distribution des revenus est la plus inégale (Sachs et al., 2017, p. 436[1]). Toutefois, ces chiffres doivent être abordés avec prudence, au vu de récentes recherches critiquant la mesure habituelle des inégalités de revenu et soulevant des interrogations quant à la qualité, relativement médiocre, des données utilisées pour calculer le coefficient de Gini (Alvaredo et al., 2018, p. 27[22] ; World Inequality Lab, s.d.[23]). Une autre critique porte sur le fait que souvent, la faiblesse des niveaux de revenu et de patrimoine relevés par ces mesures n’est pas plausible, surtout en haut de l’échelle de distribution (World Inequality Lab, s.d.[23]).
Désormais, les chercheurs prennent davantage en compte la perception qu’ont les individus d’une dégradation de leur niveau de satisfaction à l’égard de l’existence, en partie en conséquence de ces problématiques, mais aussi eu égard au rôle que la dégradation perçue de la satisfaction vis-à-vis de l’existence a tenu dans la révolution du printemps arabe, en 2011. Afin de mieux comprendre et évaluer les inégalités de revenu, les universitaires ne se cantonnent plus aux mesures du revenu/du patrimoine/de la consommation, mais commencent à intégrer des mesures, subjectives, du bien-être et de la satisfaction à l’égard de la vie comme des composantes importantes des analyses des inégalités (Banque mondiale, 2016, p. 73[21]). L’OCDE, par exemple, élabore actuellement un « Nouveau discours sur l'économie » (New Economic Narrative), qui intègre une nouvelle manière d’aborder la croissance et l’inclusion (OCDE, 2017[24]). Des questions telles que celle-ci pourraient bien gagner en importance pour les évaluations des inégalités, et leur pertinence dans des contextes fragiles est particulièrement évidente. Sur de nombreux territoires fragiles, le chômage des jeunes fait rage et s’assortit d’un manque d’espoir dans l’avenir et dans les perspectives pour le futur. L’écart entre les attentes des individus et la réalité de leur existence peut intensifier le mécontentement, surtout lorsque ceux-ci prennent conscience ou perçoivent que d’autres, ailleurs, vivent dans de bien meilleures conditions ; ce mécontentement peut exacerber les dissensions sociales et la fragilité (ONU/Banque mondiale, 2018[25]).
3.5. Gouvernance
Universitaires et responsables de l’action publique sont, aujourd’hui, conscients de l’importance d’une gouvernance crédible et efficiente comme vecteur d’un développement durable (Banque mondiale, 2017[26]). Dans le contexte du développement, la gouvernance reçoit diverses définitions : « le processus d’interaction par lequel les acteurs étatiques et non étatiques conçoivent et appliquent les politiques publiques dans le cadre d’un ensemble donné de règles formelles et informelles qui façonnent le pouvoir, mais sont en même temps façonnées par celui-ci » (Banque mondiale, 2017, p. 3[26]) ou « l’exercice de l’autorité politique, économique et administrative nécessaire pour gérer les affaires d’une nation » (OCDE, 2006, p. 147[27]). Il est crucial de garantir la sécurité, de promouvoir la croissance économique et d’atténuer les inégalités et l’exclusion sociale (Banque mondiale, 2017[26]).
Pourtant, dans les situations fragiles, où la présence de l’État est souvent déficiente et où des acteurs non étatiques ou d’autres autorités comblent les lacunes en termes de prestation de services publics, le renforcement des structures de gouvernance est une tâche complexe qui nécessite des approches inclusives permettant de prendre en compte les différents acteurs et de réduire les risques de conflit (ONU/Banque mondiale, 2017, p. 142[28]).
Dans ce contexte, les progrès enregistrés dans les performances en termes de gouvernance sont très variables. Il ressort de l’indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique 2017 que les pays africains et la majorité des contextes fragiles en Afrique ont accompli des progrès dans la plupart des catégories qui relèvent de la gouvernance au cours de la dernière décennie, quoiqu’à des degrés différents (Fondation Mo Ibrahim, 2017[29]). Toutefois, parallèlement, des dégradations observées dans la catégorie Sécurité et État de droit, surtout sur le plan de la sécurité nationale, sont source de préoccupations. Au nombre des contextes fragiles affichant les moins bons résultats dans cette catégorie figurent le Burundi, le Cameroun, l’Éthiopie, la Libye et la République centrafricaine (Fondation Mo Ibrahim, 2017, p. 38[29]).
Pour ce qui concerne la catégorie Participation, l’indice Ibrahim pour 2017 donne à voir un tableau mitigé pour les contextes de fragilité en Afrique. La Côte d’Ivoire, le Nigéria et la Sierra Leone comptent parmi les pays qui ont enregistré des progrès croissants, tandis que le Burundi, la République démocratique du Congo, le Swaziland et le Tchad ont montré des signes de détérioration toujours plus nombreux au cours de la dernière décennie (Fondation Mo Ibrahim, 2017, pp. 43-59[29]).
La corruption constitue l’un des obstacles majeurs au renforcement des structures de gouvernance dans les contextes de fragilité (Graphique 3.5). Tous les pays figurant dans le Cadre 2018 de l’OCDE sur la fragilité, à l’exception du Rwanda, se classent parmi les pays où les scores de perception de la corruption sont le plus élevés, selon l’Indice de perception de la corruption de 2016 (Transparency International, 2017[30]). La corruption est particulièrement endémique dans les contextes extrêmement fragiles, la Somalie affichant les pires résultats, suivie par le Soudan du Sud, la République populaire démocratique de Corée, la République arabe syrienne (ci-après la « Syrie ») et le Yémen ; en Amérique centrale et dans les Caraïbes, Haïti et le Venezuela sont parmi les pays où les scores de perception de la corruption sont le plus élevés (Transparency International, 2017[30]).
3.6. Éducation
L’éducation, qui est un moteur clé de la croissance économique et de l’atténuation de la pauvreté, peut apporter une contribution substantielle à la paix et à la stabilité dans les situations de fragilité (Banque mondiale, 2016[31]). Pourtant, la plupart des contextes fragiles affichent encore un retard par rapport aux autres contextes pour ce qui est de fournir une éducation de qualité, comme y appelle l’ODD 4. Ainsi, entre 2011 et 2016, plusieurs des plus faibles proportions d’enfants d’âge scolaire officiel inscrits à l’école primaire se concentraient dans les contextes fragiles, comme le Soudan (53.8 %), Djibouti (53.5 %) ou le Libéria (37.6 %) (Sachs et al., 2017, p. 411[1]). Point plus positif, plusieurs pays figurant dans le Cadre sur la fragilité, tels que l’Égypte, la République islamique d’Iran (ci-après l’« Iran ») ou la Sierra Leone, ont accompli des progrès substantiels, atteignant un taux de scolarisation en primaire de presque 100 % pour cette même période (Sachs et al., 2017, p. 411[1]).
Globalement, si l’on prend en considération le nombre moyen d’années de scolarisation, les données laissent toutefois à penser que la plupart des 58 contextes jugés fragiles en 2018 ont encore d’importants progrès à accomplir. C’est en particulier le cas pour le Burkina Faso, le Niger et le Tchad, où, en moyenne, les enfants sont scolarisés au maximum 2.3 ans (Sachs et al., 2017, p. 411[1]). Une majorité de pays en situation de fragilité figurent également parmi les pays dont le ratio du nombre moyen d’années de scolarisation des femmes par rapport à celui des hommes (de 25 ans et plus) est le plus faible. Sur les 35 pays détenant le score le plus faible pour cet indicateur, 26 sont en situation de fragilité (Sachs et al., 2017, p. 415[1]). Parmi eux, l’Afghanistan, la Guinée et le Tchad se distinguent tout particulièrement parce qu’ils affichent les niveaux les plus élevés au monde d’inégalité hommes-femmes dans l’éducation (Sachs et al., 2017, p. 415[1]).
3.7. Genre
Les inégalités de genre perdurent à travers le monde et posent des difficultés substantielles pour la concrétisation du développement durable dans les contextes fragiles et dans les autres contextes (OCDE, 2017[32]). Dans les contextes de fragilité, l’inéquité des relations entre femmes et hommes peut être source de conflit et de violence, tandis que la participation active des femmes peut contribuer à une paix durable et à la résilience (OCDE, 2017, p. 21[32]).
Certaines caractéristiques des situations fragiles ont tendance à creuser les inégalités hommes-femmes et affectent, proportionnellement, davantage les filles et les femmes. Au nombre de ces caractéristiques figurent de piètres institutions et services, un État de droit inefficace ou inégal, l’insécurité ou les restrictions imposées à la liberté de déplacement, ou encore la domination des institutions informelles, telles que les réseaux de clientélisme (OCDE, 2017, p. 20[32]). En effet, à quelques exceptions près, les contextes les plus fragiles se heurtent à des difficultés majeures pour atteindre l’égalité hommes-femmes. En Afrique subsaharienne plus particulièrement, les contextes de fragilité connaissent encore un niveau élevé de demande de contraception non satisfaite et de mariages précoces, et un grand nombre de femmes et de filles y sont sujettes à de la violence physique ou sexuelle (Union africaine/BAfD/PNUD, 2017, p. 71[33]).
En 2015, huit des dix sociétés présentant les plus fortes inégalités hommes-femmes au monde étaient également considérées comme fragiles selon le Cadre de l’OCDE sur la fragilité. Il s’agit du Yémen, du Tchad, du Niger, du Mali, de la Côte d’Ivoire, de l’Afghanistan, de la République démocratique du Congo et de la Sierra Leone (PNUD, 2016, pp. 214-217[8]).
Ce sont toutefois des territoires fragiles qui ont fait des progrès considérables en termes d’égalité entre les sexes sur certains indicateurs, notamment en ce qui concerne la représentation des femmes dans les parlements nationaux. Le Rwanda en constitue un exemple notoire. En 2016, les femmes y occupaient 63.8 % des sièges parlementaires, une proportion plus élevée qu’en Suisse, au Danemark ou en Suède, qui sont parmi les pays les plus égalitaires au monde au regard de la dimension hommes-femmes. Plusieurs autres contextes fragiles, en particulier certains pays d’Afrique subsaharienne, ont déjà comblé l’écart de taux d’activité entre les femmes et les hommes, le Malawi, le Mozambique, le Burundi et le Rwanda affichant des performances particulièrement bonnes à cet égard (Sachs et al., 2017, p. 416[1]).
Dans cet ordre d’idées, l’intégration judicieuse de femmes dans les négociations de paix, les processus de réforme constitutionnelle et les nouvelles institutions peuvent contribuer à une paix durable et à des avancées dans la reconnaissance officielle du droit des femmes (OCDE, 2017, p. 21[32]). La transition dans les structures de gouvernance et les systèmes judiciaires que connaissent souvent les contextes fragiles peut constituer pour les femmes une opportunité d’être reconnues et prises en compte comme agents dans les processus de consolidation de la paix et du renforcement de l’État.
Pour finir, les progrès accomplis par certains contextes fragiles en matière d’égalité entre les sexes, mesurés quantitativement, sont impressionnants. Cependant, la véritable égalité hommes-femmes est également qualitative, même si les progrès qualitatifs sont plus difficiles à saisir. Si des gains spécifiques dans certains pays sont louables, il ne faut pas oublier que concrétiser l’égalité entre les sexes dans des contextes fragiles nécessitera encore des efforts particuliers aux niveaux social et structurel. Ces efforts sont indispensables pour remettre en question les normes sociales en vigueur, renforcer l’autonomisation des femmes, soutenir un rôle actif des femmes dans les processus de paix et favoriser l’égalité des droits, des responsabilités et des chances pour les femmes et les hommes.
3.8. Santé
Les contextes fragiles et non fragiles ont accompli d’importants progrès en matière de réduction de la mortalité des mères et des enfants. À l’échelle mondiale, le taux de mortalité maternelle a reculé de 37 % entre 2000 et 2015 (ONU DAES, 2017, p. 4[14]). Sur la même période, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans a chuté de 44 % (ONU DAES, 2017, p. 4[14]). Cependant, les progrès enregistrés dans les contextes fragiles ont été très hétérogènes, ce qui met en relief l’ampleur des défis qu’ils rencontrent pour obtenir un développement durable et la nécessité pour eux de bénéficier d’un soutien ciblé sur la création et le renforcement de systèmes offrant des soins de santé de qualité pour tous (Graphique 3.6).
Ainsi, en 2016, les taux de mortalité maternelle et des enfants de moins de 5 ans (pour 1 000 naissances vivantes) dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure figurant dans le Cadre sur la fragilité, tels que la Libye ou l’Iran, sont analogues à ceux observés en Argentine et en Arabie saoudite, qui affichent de très bons résultats selon l’indice de développement humain (PNUD, 2016, pp. 226-229[8]). D’un autre côté, les taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans pour 1 000 naissances vivantes dans les contextes extrêmement fragiles et à faible revenu que sont la Somalie (132.5), le Tchad (127.3) et la République centrafricaine (123.6) étaient les plus élevés au monde. Globalement, en 2016, le taux de mortalité moyen des enfants de moins de 5 ans dans les contextes fragiles était de 62.5 (pour 1 000 naissances vivantes), contre une moyenne de 16.5 dans les contextes non fragiles.
À l’échelle mondiale, l’espérance de vie à la naissance s’est allongée de quatre ans entre 2000 et 2015, évolution en partie attribuable au recul du nombre de nouvelles infections et de décès dus au VIH/sida et au paludisme, ainsi qu’à des progrès dans les traitements médicaux (PNUD, 2016, p. 68[8]). Malgré ces avancées, un grand nombre de pays et de contextes figurant dans le Cadre sur la fragilité affichent encore une espérance de vie parmi les plus faibles au monde (OMS, 2017[35]). D’après les données de 2015, par exemple, l’espérance de vie à la naissance la plus courte était observée en Sierra Leone (50.1 ans), suivie de près par l’Angola (52.4 ans) et la République centrafricaine (52.5 ans) (OMS, 2017, p. 55 [35]).
3.9. Violence
Comme le soulignait le rapport États de fragilité 2016, la violence, quelle que soit la forme qu’elle prend, a un impact substantiel sur la fragilité. C’est l’un des facteurs susceptibles d’exacerber la fragilité dans ses cinq dimensions, et c’est à la fois un vecteur et une conséquence de la fragilité. La violence a également des répercussions substantielles sur l’économie mondiale, et ponctionne lourdement les ressources, surtout dans les contextes fragiles ou touchés par un conflit. Un rapport récent calcule le coût économique de la violence : il en ressort le chiffre effarant de 14 300 milliards USD (en parité de pouvoir d’achat, ou PPA), soit l’équivalent de 12.6 % du PIB mondial, ou 1 953 USD par habitant de la planète (Institute for Economics and Peace, 2017, p. 3[36]).
La violence meurtrière a augmenté au cours de la dernière décennie alors même que les taux de décès dus à des conflits ont continué de régresser à travers le monde après avoir culminé en 2014‑15. En 2016, les décès liés à des conflits sont ressortis à 1.32 pour 100 000 personnes, contre 1.61 pour 100 000 en 2015 (Mc Evoy et Hideg, 2017, p. 10[37]). Dans le contexte de ce recul général, les conflits en Afghanistan, en Iraq et en Syrie ont représenté, à eux seuls, environ les deux tiers de l’ensemble des décès liés à des conflits à l’échelle mondiale en 2016 ; ils ont fait plus de 370 000 morts depuis 2010 (Mc Evoy et Hideg, 2017, p. 21[37]). Dans ces 3 pays, le coût économique de la violence a été particulièrement élevé, représentant l’équivalent de plus de 50 % du PIB en moyenne en 2016 (Institute for Economics and Peace, 2017, p. 60[36]). Indépendamment du coût économique élevé des conflits violents, le coût en termes de perte de vies civiles a également augmenté. Des données récentes font apparaître que les morts de civils sur la seule période de janvier à novembre 2017 ont augmenté de 42 % par rapport à la même période de 2016 (Action on Armed Violence, 2018[38]). Sur cette période en 2017, au moins 15 399 civils ont été tués, chiffre dont la hausse s’explique essentiellement par une augmentation des attaques aériennes en Syrie, en Iraq et au Yémen (Action on Armed Violence, 2018[38]).
Le Global Terrorism Index de 2017 dresse un tableau plus positif : le nombre de décès dus à des attaques terroristes (25 673 tués en 2016) a diminué de 13 % par rapport à 2015 (Institute for Economics and Peace, 2017, p. 14[7]). Cette diminution s’explique essentiellement par le recul du nombre de personnes tuées par des actes terroristes en Afghanistan, au Nigéria, au Pakistan et en Syrie, qui, avec l’Iraq, sont les cinq pays les plus touchés par le terrorisme (Institute for Economics and Peace, 2017, p. 14[7]). En revanche, l’Iraq a connu un accroissement de 40 % des décès dus au terrorisme, essentiellement en raison des activités terroristes actuelles attribuées au mouvement connu sous le nom d’État islamique dans ce pays (Institute for Economics and Peace, 2017, p. 15[7]).
En 2016, les taux d’homicide ont augmenté, à l’échelle mondiale, pour la première fois depuis 2004, les homicides étant à l’origine de 68 % de l’ensemble des victimes de violences meurtrières (Mc Evoy et Hideg, 2017, p. 11[37]). À travers le monde, les taux d’homicide les plus élevés (supérieurs à 13 pour 100 000 habitants) sont concentrés dans seulement 15 pays. Onze d’entre eux se situent en Amérique centrale, en Amérique du Sud et dans les Caraïbes, signe que la violence se déploie de plus en plus en dehors des zones de conflit (Mc Evoy et Hideg, 2017, p. 14[37]). En 2015, El Salvador a enregistré le taux d’homicide le plus élevé au monde (108.65 pour 100 000 habitants), suivi par le Honduras (63.75 pour 100 000 habitants) et le Venezuela (57.15 pour 100 000 habitants). Le Honduras et le Venezuela sont considérés comme fragiles selon les éditions 2016 et 2018 du Cadre sur la fragilité. La résurgence de taux d’homicides élevés montre bien qu’il est indispensable d’apporter une attention accrue à la fragilité urbaine et aux défis spécifiques qu’elle pose au développement durable, surtout aux ODD 11 et 16, mais bien sûr sans s’y limiter.
3.10. Catastrophes
Les catastrophes sont des facteurs qui exacerbent les menaces liées à la fragilité. Elles peuvent renforcer les difficultés préexistantes, avoir un impact délétère sur la disponibilité de ressources et les opportunités économiques, et accroître la probabilité de déplacement et de migration, autant d’éléments qui entravent la capacité de l’État à bâtir la résilience indispensable pour faire face aux crises de demain (Rüttinger et al., 2015, p. 35[39]). Il est probable que le changement climatique influera sur la fréquence et l’intensité d’aléas climatologiques et hydrométéorologiques soudains et augmentera le risque de déplacements dus à des catastrophes dans les années à venir (Internal Displacement Monitoring Centre, 2017[40]). Les données disponibles semblent confirmer ce constat. Si les conflits ont conduit au déplacement d’environ 6.9 millions de personnes en 2016, les catastrophes ont expliqué le déplacement de 24.2 millions d’autres personnes (Internal Displacement Monitoring Centre, 2017, p. 11[40]).1
La récurrence des catastrophes a aussi fait croître le nombre de décès liés à des catastrophes à travers le monde, qui s’est hissé à 69 800 entre 2006 et 2015, contre 64 900 pour la période 1996-2015 (CRED/UNISDR, 2016, p. 7[41]). Pour la période cumulée 1996-2015, 6 des 10 pays ayant enregistré le plus grand nombre de décès liés aux catastrophes en valeur absolue figurent également dans le Cadre 2018 sur la fragilité : l’Afghanistan, Haïti, le Honduras, le Myanmar, le Pakistan et la Somalie (CRED/UNISDR, 2016, p. 15[41]). Les catastrophes peuvent frapper n’importe où, mais leurs effets sont particulièrement dévastateurs dans les contextes de fragilité, qui sont plus fortement exposés au risque et disposent de capacités insuffisantes d’adaptation pour gérer, absorber ou atténuer ces risques. Les contextes fragiles à faible revenu sont tout particulièrement vulnérables, affichent généralement les taux de mortalité les plus élevés et dépendent fortement de l’aide internationale (Peters, 2017, p. 10[42]). Haïti illustre bien cet état de fait : l’île a enregistré la plus forte proportion de décès liés à des catastrophes au cours des deux dernières décennies en termes aussi bien relatifs qu’absolus (CRED/UNISDR, 2016, p. 13[41]). La gravité de la dévastation qui a ravagé Haïti découle en partie de sa très faible capacité à faire face (INFORM, 2018[43]).
3.11. Déplacements forcés
Tout comme les catastrophes, les conflits et la violence contraignent les individus à se déplacer. En 2016, 1.4 million de personnes sont devenues des réfugiés nouvellement déplacés, et environ 5.5 millions de personnes à travers le monde ont été déplacées dans leur propre pays à cause de conflits et de violence (HCR, 2017, p. 19[44]). À l’échelle mondiale, 65.6 millions de personnes sont déplacées de force (HCR, 2017, p. 2[44]). Si nombre des débats récents traitant des réfugiés portaient surtout sur les personnes arrivant aux frontières de l’Europe, les déplacements forcés affectent essentiellement des contextes fragiles. Ces contextes provoquent le déplacement forcé de grands nombres de personnes et accueillent aussi des proportions parmi les plus importantes de réfugiés à travers le monde, ce qui grève lourdement les capacités de certains contextes fragiles.
D’après les données de 2016 du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 55 % de l’ensemble des réfugiés de la planète proviennent de seulement 3 pays : la Syrie, l’Afghanistan et le Soudan du Sud (HCR, 2017, p. 3[44]). Ceux-ci sont classés comme extrêmement fragiles dans le Cadre 2018 sur la fragilité. De même, six des dix pays ayant accueilli le plus grand nombre de réfugiés en 2016 sont considérés comme fragiles (HCR, 2017, p. 15[44]). Il s’agit de l’Éthiopie, de l’Iran, du Kenya, du Pakistan, de l’Ouganda et de la République démocratique du Congo. Proportionnellement, les contextes fragiles sont également bien plus affectés par les déplacements internes : huit des dix plus vastes populations de personnes déplacées dans leur propre pays se situent dans des contextes de fragilité. Les plus nombreuses sont en Syrie, suivie par l’Iraq, la République démocratique du Congo, le Soudan, le Nigéria, le Yémen, le Soudan du Sud et l’Afghanistan (HCR, 2017, p. 36[44]). Le Graphique 3.8 illustre les déplacements forcés à travers le monde.
Les déplacements forcés et les entrées de réfugiés affectent aussi d’autres situations fragiles. Un autre exemple, très peu médiatisé en 2017, est la crise humanitaire qui se poursuit en République centrafricaine, qui a provoqué le déplacement interne d’environ 688 700 personnes en décembre 2017 et a depuis conduit 17 000 personnes à chercher à se réfugier dans le Tchad voisin (HCR, 2018[46]). Si le Tchad a accueilli des réfugiés de République centrafricaine depuis le début de la crise en 2013, les déplacements actuels marquent les entrées les plus massives de réfugiés depuis 2014 ; ils pourraient bien agir comme un facteur supplémentaire de tensions au Tchad, qui est déjà un contexte extrêmement fragile.
Références
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[23] World Inequality Lab (s.d.), The WID.world Project and the Measurement of Economic Inequality, World Inequality Lab, http://wir2018.wid.world/part-1.html (consulté le 04 avril 2018).
Note
← 1. Les estimations mondiales de l’Observatoire des situations de déplacements internes (IDMC) couvrent les catastrophes déclenchées par les aléas climatologiques et hydrométéorologiques soudains, tels que les inondations, les tempêtes, les incendies et les conditions hivernales extrêmes, ainsi que les aléas géophysiques, tels que les séismes, les éruptions volcaniques et les glissements de terrain. Les estimations n’intègrent pas les déplacements associés à des catastrophes à évolution lente, telles que la sécheresse ou les dégradations environnementales. Elles ne couvrent pas non plus les aléas technologiques et biologiques, tels que les accidents industriels et les épidémies, sauf s’ils sont déclenchés par un aléa naturel. Voir page 31 de (Internal Displacement Monitoring Centre, 2017[40]), à l’adresse www.internal-displacement.org/global-report/grid2017/pdfs/2017-GRID.pdf.