La reprise économique après la pandémie de COVID-19 a été robuste, grâce aux aides massives de l’État. Cependant, le nouveau choc provoqué par la guerre en Ukraine pousse l'inflation à la hausse et aggrave les pénuries du côté de l'offre et sur le marché du travail, soulignant l'importance de mesures destinées à stimuler la résilience de l'économie belge. Pour relever les défis de la viabilité budgétaire à moyen terme, il convient de limiter les possibilités de sortie anticipée du marché du travail, d’accroître l'efficience des dépenses publiques, en particulier en procédant à des examens des dépenses, et de renforcer la coordination des politiques budgétaires entre les différents niveaux de gouvernement de façon à dégager des marges d’investissement public. Pour stimuler la croissance de la productivité et contribuer à asseoir une croissance plus durable, il est nécessaire de lier plus étroitement salaires et productivité au niveau des entreprises et des travailleurs, d’accroître la concurrence dans les services et de réaliser des investissements bien ciblés dans les infrastructures vertes et numériques, qui permettraient de s’attaquer aux goulets d'étranglement et d’envoyer des signaux de prix adéquats.
Études économiques de l'OCDE : Belgique 2022
1. Principaux éclairages sur l’action publique
Abstract
Jusqu’au déclenchement de la pandémie de COVID-19, la Belgique connaissait une croissance robuste et riche en emplois et affichait des taux de chômage historiquement bas. Pour autant, certaines difficultés budgétaires et structurelles, connues de longue date, perduraient, notamment la faiblesse des taux d’activité, des gains de productivité et de la dynamique des entreprises. La viabilité des finances publiques à moyen terme doit être renforcée pour accroître la résilience de l'économie belge et permettre des investissements porteurs de gains de productivité. Stimuler la croissance de la productivité nécessitera d’adopter des réformes des marchés de produits et du travail qui facilitent les redéploiements. Il est également fondamental de rehausser les niveaux de qualification et les possibilités d’emploi des groupes défavorisés pour promouvoir la mobilité sociale et développer les opportunités économiques.
La Belgique a été durement touchée par la pandémie, mais une riposte rapide et d’envergure, par des mesures de soutien au revenu des ménages et à la trésorerie des entreprises, a permis d’en atténuer les incidences économiques et sociales globales (Marchal et al., 2021[1] ; Almeida et al., 2020[2]). Grâce à des taux élevés de vaccination, à des mesures qui ont protégé les ménages et les entreprises et à la bonne performance du secteur pharmaceutique, le rebond de l’activité a été relativement rapide, le PIB renouant avec ses niveaux d’avant la pandémie au troisième trimestre de 2021 (Graphique 1.1, partie A). Les marchés du travail ont affiché une bonne capacité à rebondir, les effets sur le chômage ayant été limités, et les pénuries de main-d'œuvre ont atteint des niveaux inédits. Toutefois, les incidences de la pandémie, variables selon les secteurs, ont touché certains groupes plus que d’autres, notamment la main-d'œuvre peu qualifiée, les jeunes actifs et les personnes issues de l’immigration, si bien que la reprise a été inégale. La guerre en Ukraine a accentué l’incertitude et les risques entourant la reprise.
La pandémie rend d’autant plus urgente la réponse aux difficultés de longue date que connaît la Belgique, et l’adaptation de l’économie belge aux changements induits par la crise, à la transformation numérique et à la transition écologique nécessitera un programme de réformes structurelles ambitieuses. La priorité du pays a été de gérer la pandémie, de soutenir la reprise et de coordonner le programme de vaccination. La Belgique devrait maintenant s’attacher en premier lieu à assurer une reprise résiliente et s’atteler aux enjeux structurels à long terme.
Si les inégalités de revenu sont faibles en Belgique, avec un coefficient de Gini de 0.26 après impôts et transferts, les risques de pauvreté reflètent des disparités régionales, variant de 12 % à 38 %, et sont élevés pour les chômeurs (qui sont généralement dans des foyers monoparentaux, des personnes en situation de handicap ou issues de l’immigration) et pour les personnes peu diplômées (Graphique 1.2, partie A). De telles différences peuvent s’expliquer par l’inégalité des chances (chapitre 2) et ont des effets durables, le milieu d'origine étant fortement corrélé au risque de pauvreté en Belgique. La Belgique s’est fixé un objectif ambitieux, celui de rehausser le taux d’emploi (de la population des 20-64 ans) pour le porter de 70 % à 80 % à l’horizon 2030. Les taux d’emploi actuels affichent des disparités régionales et varient de 75.3 % en Flandre à 62.2 % dans la Région de Bruxelles-Capitale. En outre, les niveaux d’emploi des catégories vulnérables sont relativement faibles (Graphique 1.2, partie B). Des réformes seront nécessaires pour remédier au niveau élevé du chômage de longue durée et de l’inactivité malgré des taux d’emplois vacants importants, et à l’insuffisance des transitions du chômage et de l’inactivité vers l’emploi (OECD, 2020[3]).
La Belgique fait également face à des difficultés concernant la viabilité de ses finances publiques à long terme et se heurte à des obstacles à l’investissement et d’ordre réglementaire pour assurer sa transition vers une économie bas carbone. La dette publique en pourcentage du PIB (selon la définition de Maastricht) s’élève à 108.4 % en 2021. Le vieillissement démographique accentuera les difficultés budgétaires, le coût total lié au vieillissement devant passer de 5.7 % à 25.8 % du PIB d’ici 2070 si aucune réforme n’est adoptée (Graphique 1.3). Des réformes ambitieuses et des investissements seront nécessaires pour abaisser les émissions de la Belgique dans les secteurs du logement, de l’énergie, de l’industrie et du transport afin de contribuer à l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050 retenu par l'UE. Pour surmonter ces difficultés, il faudra une coordination efficace entre les différents niveaux de gouvernment, étant donné la décentralisation des compétences (Graphique 1.4), et de la transparence s'agissant du partage de la charge et des écarts par rapport aux résultats et objectifs budgétaires et environnementaux visés.
La faiblesse des gains de productivité, principalement due à la faible contribution de la croissance de la productivité totale des facteurs, et celle de l’investissement public, sont des questions qu’il va falloir également aborder (Graphique 1.5Graphique 1.5). L’insuffisance de main-d'œuvre suffisamment qualifiée, le caractère restrictif de la réglementation, le manque de diffusion technologique et les rigidités du marché du travail ont pour effet de réduire l’investissement et la dynamique des entreprises (OECD, 2019[4] ; NPB, 2021[5]). Les investissements prévus dans les plans de relance et dans le Budget 2022 (de 300 millions EUR en 2022 à 1 milliard EUR d’ici 2024) aideront à répondre aux besoins d’investissement dans l’éducation, les modes de transport durables, l’énergie et l’infrastructure numérique, mais il faudra faire davantage pour atteindre l’objectif du gouvernement de porter l’investissement public à 4 % du PIB d’ici 2030.
Dans ce contexte, les principaux messages de cette Étude sont les suivants :
Il importe de restaurer la viabilité des finances publiques pour se préparer aux chocs de demain, en particulier dans le contexte d’une population vieillissante. Renforcer le cadre budgétaire et établir un plan d’assainissement à moyen terme des finances publiques via une meilleure efficience de la dépense publique, en accompagnant ces mesures d’une réforme fiscale sans incidence sur les recettes pour améliorer les dispositifs d’incitation au travail et élargir les bases d’imposition, devraient concourir à cet objectif.
Renforcer l’égalité des chances des groupes défavorisés face à l’éducation, à l’emploi et au logement, accélérer les redéploiements en assouplissant les marchés de produits et améliorer les niveaux de qualification permettront plus de croissance.
Si les de relance offrent une bonne base de départ, d’autres réformes seront nécessaires pour accélérer la croissance de la productivité et s’adapter à la transformation numérique et à la transition écologique.
Les politiques publiques ont permis une reprise vigoureuse après la pandémie, mais les risques se sont accrus
La pandémie a durement frappé la Belgique, qui a connu plusieurs vagues auxquelles elle a riposté par des mesures d’endiguement strictes, plusieurs confinements, la fermeture des activités non essentielles et des couvre-feux, ce qui a conduit à une forte contraction de son PIB, de 5.7 % en 2020. La plupart des restrictions, notamment le télétravail obligatoire et la présentation d'un passe sanitaire, ont été assouplies à la fin mars 2022, les restrictions residuelles étant levée à la fin du mois de mai. À cette même date, 63.5 % de la population totale avait reçu une vaccination de rappel, soit un taux supérieur à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.6Graphique 1.6). La Belgique devrait continuer d’assurer la conformité de son palmarès vaccinal aux directives internationales.
Les autorités ont mis en place rapidement de nombreuses mesures de soutien direct et des aides de trésorerie pour remédier aux conséquences de la pandémie, qui ont concouru à un rebond rapide de l’activité, à protéger les emplois et à empêcher la multiplication des cas d’insolvabilité (Tableau 1.1 ; Tableau 1.2 ; Graphique 1.7, parties A, B et C). Les principales mesures de soutien aux travailleurs salariés et aux indépendants face à la pandémie ont pris fin le 31 mars 2022. La reprise et les risques demeurent inégaux selon les catégories de main-d'œuvre (Graphique 1.7, partie D) et les entreprises, les PME étant les plus fortement touchées (Dhyne et Duprez, 2021[6]). Pour l'heure, les séquelles semblent limitées, mais leur ampleur ne sera clairement visible qu’après la levée intégrale des mesures de soutien.
Tableau 1.1. Principales mesures de soutien liées à la pandémie
Principaux domaines |
Principales mesures spécifiques |
---|---|
Santé |
- Aides à l’achat d’équipements, au dépistage, au traçage et à la vaccination, et soutien aux hôpitaux et aux établissements de long séjour. - Augmentation structurelle des dépenses de santé (augmentation des effectifs hospitaliers et revalorisation des rémunérations des professionnels de santé, dotations supplémentaires à la santé mentale). |
Dispositif de maintien dans l’emploi (chômage temporaire) |
- Extension du dispositif existant en simplifiant ses modalités d’accès (la pandémie constituant désormais un cas de « force majeure ») et rehaussement des taux de remplacement (de 65 % à 70 %) ; prestation forfaitaire supplémentaire. |
Revenu de remplacement en faveur des indépendants (droit-passerelle) |
Instauration d’un droit temporaire, assorti de conditions plus souples et d’une augmentation du nombre de travailleurs indépendants pouvant en bénéficier (en l’espèce, ceux qui ont dû interrompre leur activité en raison de la pandémie et ont enregistré une baisse notable de leur chiffre d’affaires), et de la possibilité temporaire de cumuler ce droit avec un autre revenu de remplacement. - Extension du dispositif actuel par la simplification de ses modalités d’accès (interruption forcée de 7 jours/mois) et revalorisation de la couverture assurée aux indépendants exerçant leur activité indépendante à titre complémentaire. |
Autres aides aux ménages |
- Gel temporaire de la dégressivité dans le temps des allocations de chômage en fonction de la durée de chômage et de la carrière de l’allocataire. - Aides versées en complément des prestations d’aide sociale et aux bénéficiaires du revenu minimum, et aides régionales en faveur des ménages vulnérables pour le paiement de leurs factures d’énergie et d’eau et de leur loyer. - Indemnité supplémentaire pour incapacité de travail, prime de fin d’année aux chômeurs de longue durée et aux actifs du secteur de l’hébergement et de la restauration ; congé parental et garde d’enfant pour les « travailleurs essentiels ». - Versement d’une prime mensuelle de 25 EUR aux bénéficiaires du revenu d’insertion. |
Soutien aux entreprises et aux indépendants (aides aux entreprises, allégements fiscaux, etc.) |
- Indemnité exceptionnelle aux entreprises contraintes de fermer ou en perte de chiffre d’affaires. - Reports de paiement d’impôts et de cotisations sociales, souplesse en faveur des entreprises en difficulté pour le paiement de leurs arriérés d’impôt. - Majoration de l’abattement au titre des investissements accordé aux PME et abattement de l’impôt sur les sociétés en faveur des restaurateurs. - Report en arrière des pertes : déduction des pertes attendues pour 2020 de la dette fiscale exigible au titre des revenus de 2019. - Mesures sectorielles (réductions de TVA, exonérations de cotisations de sécurité sociale) : hébergement et restauration, transport ferroviaire, contrôle aérien, culture, sports, etc. |
Soutien à la solvabilité |
- Apports directs en fonds propres et prêts à Brussels Airlines et Aviapartner. - Mise en place de fonds nouveaux pour financer des prêts subordonnés et des apports en fonds propres : Fonds de transformation mis en place par le gouvernement fédéral (750 millions EUR en 2021-22) ; Fonds pour le bien-être en Flandre (240 millions EUR de financements publics ; objectif 500 millions EUR ) ; Fonds de solvabilité et de relance en Wallonie (400 millions EUR) ; Bruxelles (Fonds finance&invest.brussels) : apport de fonds propres (106 millions EUR, objectif 160 millions EUR) et prêts subordonnés (40 millions EUR). |
Garanties publiques de prêts |
- Prêts d’une durée maximum de 12 mois : enveloppe de 50 milliards EUR (mars-décembre 2020), 3.3 milliards EUR mobilisés. - Prêts d’une durée de 12-36 mois, prolongée ensuite à 60 mois (juillet 2020-juin 2021) ; 338 millions EUR mobilisés. - Garanties régionales de prêts-relais : 2 milliards EUR (379 millions EUR mobilisés). |
Mesures financières et macroprudentielles |
- Réduction du volant de fonds propres contracyclique des banques, dont le taux a été ramené à 0 % au moins jusqu’au premier trimestre de 2022. - Moratoires sur les prêts aux entreprises et les prêts hypothécaires jusqu’en juin 2021. |
Insolvabilité |
- Moratoire sur les procédures d’insolvabilité jusqu’en janvier 2021 ; amendement de la législation sur l’insolvabilité. |
Source : Divers rapports du Comité de monitoring ; site web du SPF (Service public fédéral) Stratégie et Appui ; et sources nationales.
Tableau 1.2. Coût budgétaire des mesures de soutien adoptées pendant la pandémie
|
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
|
Total (milliards EUR) |
% du PIB |
Total (milliards EUR) |
% du PIB |
Total (milliards EUR) |
% du PIB |
Total (milliards EUR) |
% du PIB |
Dépenses de santé |
5.0 |
1.1 |
4.5 |
0.9 |
1.6 |
0.3 |
1.0 |
0.2 |
Soutien au revenu des ménages |
8.4 |
1.9 |
4.8 |
1.0 |
0.2 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Dispositif de chômage temporaire |
3.9 |
0.9 |
1.6 |
0.3 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Revenu de remplacement en faveur des travailleurs indépendants |
3.3 |
0.7 |
2.0 |
0.4 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Autres prestations sociales et primes |
1.1 |
0.3 |
1.2 |
0.2 |
0.2 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Soutien aux entreprises et aux travailleurs indépendants |
6.8 |
1.5 |
4.7 |
0.9 |
1.0 |
0.2 |
0.6 |
0.1 |
Primes pour fermeture forcée et perte de chiffre d’affaires importante |
3.4 |
0.7 |
2.2 |
0.4 |
0.3 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Mesures fiscales de soutien à la solvabilité |
0.7 |
0.2 |
0.4 |
0.1 |
0.5 |
0.1 |
0.6 |
0.1 |
Soutien à certains secteurs |
2.8 |
0.6 |
2.1 |
0.4 |
0.2 |
0.0 |
0.0 |
0.0 |
Investissement |
0.9 |
0.2 |
1.3 |
0.2 |
1.3 |
0.2 |
||
Total |
20.6 |
4.6 |
14.9 |
2.9 |
4.1 |
0.8 |
2.8 |
0.5 |
Apports de fonds propres/prêts subordonnés |
1.0 |
0.2 |
1.3 |
0.3 |
0.3 |
0.1 |
0.0 |
0.0 |
Enveloppe de garanties de prêts |
52.0 |
11.4 |
11.6 |
2.3 |
11.6 |
2.2 |
11.6 |
2.2 |
Source : Autorités nationales.
La croissance s’est montrée solide en 2021, sous l’effet d’un rebond de l’investissement des entreprises et d’une envolée de la consommation privée facilitée par une campagne de vaccination efficace, ce qui a permis de ramener le PIB à ses niveaux d’avant la pandémie au troisième trimestre de 2021. Les marchés du travail se sont montrés résilients et le taux de vacance d’emploi a sensiblement augmenté pour s’établir à 4.7 % à la fin de 2021, soit un niveau nettement supérieur à la moyenne de l’UE (Graphique 1.8, partie A). Depuis la fin de 2021, les restrictions d’activité inhérentes à la toute dernière vague de la pandémie, le niveau d’inflation et les difficultés d’approvisionnement pèsent sur la reprise. La guerre en Ukraine, qui occasionne de nouvelles flambées des prix de l’énergie et des produits de base et une recrudescence des incertitudes, contrebalance les effets positifs de l’amélioration de la situation sanitaire et de l’assouplissement des restrictions. La confiance des consommateurs s’est effondrée en mars et ne s’était que partiellement redressée en mai (Graphique 1.8, partie B). La croissance du PIB a atteint 0.5% au premier trimestre 2022. Les mesures destinées à faciliter l'accès au dispositif de chômage temporaire ont été prolongées jusqu'en juin 2022 du fait de l'impact de la guerre en Ukraine sur l'économie belge.
Les effets indirects de cette crise via les marchés financiers, le climat d’incertitude ou les perturbations des chaînes d’approvisionnement dans l’industrie, et son rejaillissement depuis les pays voisins pourraient être supérieurs aux effets directs pour la Belgique. La Russie entre pour 0.9 % dans les exportations de la Belgique et pour 1.8 % dans ses importations. Seulement 1.5 % de l’IDE belge est à destination de la Russie et le secteur financier belge y est peu exposé directement. Se situant à un taux de 60 %, la part des importations directes depuis la Russie dans la valeur ajoutée totale est inférieure à la moyenne de l’OCDE, qui était de 90 % en 2018 (Graphique 1.9, partie A), cette part montant à 65 % (OCDE : 97 %) s’agissant des importations énergétiques. Les importations de pétrole et de gaz de Russie se situaient respectivement à 26 % et 3 % (Graphique 1.9, partie B). En vertu de l’indice de participation en amont aux chaînes de valeur mondiales, la valeur ajoutée de la Russie en pourcentage des exportations brutes de la Belgique s’établit à 1.2 % (0.9 % dans l’OCDE).
La crise énergétique et la guerre pourraient avoir des conséquences disproportionnées selon les secteurs. La part des importations de produits énergétiques s’établit autour de 60 % dans le secteur des produits pétroliers raffinés, et entre10 % et 20 % dans les approvisionnements en électricité et en gaz, le transport aérien et maritime, les activités annexes de l’extraction et dans l’industrie chimique et la métallurgie de base. Par ailleurs, les secteurs où la part de la valeur ajoutée russe dans les exportations brutes de la Belgique est la plus importante sont la cokéfaction et le raffinage (3.7 %) et la métallurgiques de base et le travail des métaux (3.3 %) (Graphique 1.9, partie C). À des niveaux plus désagrégés, c’est dans la cokéfaction et le raffinage que la part des activités d’extraction de produits sources d’énergie (dont le gaz naturel) dans les exportations brutes de la Belgique est la plus élevée (1.8 %). D’une manière générale, l’extraction de produits sources d’énergie (dont le gaz naturel) est une source de valeur ajoutée russe dans les exportations brutes de nombreux secteurs en Belgique.
La Belgique avait accueilli 45 000 réfugiés ukrainiens à la fin du mois de mai, contre un chiffre annuel de 25 000 habituellement. Selon une déclaration du Secrétaire d’État à l’Asile et la Migration aux médias, le pays pourrait s'attendre à recevoir jusqu’à 200 000 réfugiés, un chiffre calculé à partir d’une estimation à 4.7 millions du nombre total de réfugiés accueillis et de leur répartition possible dans toute l’UE.
L’inflation globale, à 9.9 % en mai, reste forte, principalement sous l’effet du niveau élevé des prix de l’énergie, et supérieure à la moyenne de l’UE (Graphique 1.10, parties A et B). Les prix du gaz naturel et de l'électricité en sont la principale cause, mais les prix du pétrole alimentent également l’inflation. L’inflation sous-jacente s’est également accélérée, en particulier du fait de la hausse des prix dans les services. D'une manière générale, le renchérissement de l’énergie affecte l’inflation en Belgique plus que dans la zone euro, étant donné l’importance des contrats de livraison d’électricité et de gaz à tarif variable. Qui plus est, étant donné le très faible niveau des droits d’accise sur le fioul domestique, les prix du pétrole brut se répercutent plus fortement sur les prix à la consommation. Un certain nombre de mesures ont été adoptées pour atténuer l’impact des hausses de prix de l’énergie sur les ménages vulnérables (voir plus loin). Le mécanisme d’indexation automatique devrait faire augmenter les salaires du public et du privé et les prestations sociales d’environ 6 % en 2022 (FPB, 2022[7]) et soutiendra également le pouvoir d’achat. Toutefois, cela pourrait peser sur la compétitivité à court terme, étant donné la part importante des exportations dans l’économie de la Belgique, et entraîner des coûts budgétaires supplémentaires.
Il conviendrait de surveiller de près les effets des hausses prix-salaires sur la compétitivité internationale (Graphique 1.10, parties C et D). Le mécanisme de négociation salariale, qui comporte deux éléments principaux, à savoir une mesure d’indexation et un plafond calculé à partir de la progression salariale dans les pays voisins, pourrait donc devoir être réévalué (Encadré 1.1). L’application correcte et stricte du mécanisme de plafonnement devrait permettre d’atténuer le risque de spirale salaires-prix en corrigeant la répercussion de la hausse des prix sur les salaires, plus rapide en Belgique que dans les pays voisins en 2022. La croissance des salaires dans les pays voisins devrait être supérieure en 2023-24 compte tenu des négociations salariales, tandis que le plafonnement devrait permettre de contenir les hausses des salaires réels en Belgique.
Encadré 1.1. Le mécanisme de négociation salariale en Belgique
La loi de 1996 relative à la compétitivité régit le processus de formation des salaires et fixe un plafond de croissance des salaires (« marge maximale disponible/norme salariale »), ainsi qu’une règle d’indexation calculée d’après « l’indice santé » (indice national des prix à la consommation, qui exclut les boissons alcoolisées, le tabac et les carburants). Le mécanisme d’indexation salariale a été suspendu d’avril 2015 à avril 2016 (« saut d’index ») pour résorber le handicap salarial cumulé depuis 1996 par la Belgique par rapport aux pays voisins de référence. Cette mesure a permis de renforcer sa compétitivité-coûts et a concouru à la croissance de l’emploi (Bijnens, Karimov et Konings, 2019[8] ; IMF, 2019[9]). Le cadre de fixation de la hausse maximum des salaires réels a été revu en 2017 pour empêcher la réapparition de nouveaux écarts de salaires. Les principaux éléments du nouveau dispositif sont les suivants : i) une prévision de croissance des salaires chez les principaux partenaires commerciaux de la Belgique (France, Allemagne et Pays-Bas) pour les deux années suivantes ; ii) une prévision d’inflation en Belgique comme base de calcul de l’indexation salariale attendue ; iii) une correction ex post pour tenir compte des différences d’évolution salariale par rapport aux partenaires commerciaux ; et iv) une marge de sécurité pour tenir compte des erreurs de prévision.
Il conviendrait d’évaluer dans quelle mesure la réforme de 2017 du mécanisme de négociation salariale est efficace pour préserver la compétitivité, ainsi que ses effets sur l’emploi et l’inflation, comme il est recommandé dans l'Étude économique de 2017, et de réformer le dispositif, en coopération avec les partenaires sociaux, s’il apparaissait que la règle d’indexation ne parvient pas à prendre en compte la conjoncture. Cette réforme devrait être envisagée à moyen terme, une fois que la flambée des prix de l’énergie se sera apaisée. Ce serait également l’occasion de remédier aux difficultés soulevées par le paramétrage actuel, notamment le calcul de la marge et la prise en compte des changements dans les pays voisins, qui compliquent l’interprétation des évolutions (Bogaert et Kegels, 2019[10]). Une autre faiblesse du mécanisme réside dans le fait que les écarts de croissance de productivité du travail entre la Belgique et ses principaux partenaires clés ne sont pas pris en compte. À moyen terme, lorsque les prix de l’énergie se seront calmés, on pourrait redéfinir « l’indice santé » (obtenu par soustraction de certains produits du panier de l´indice des prix à la consommation, à savoir les boissons alcoolisées, le tabac et les carburants) pour exclure l’ensemble des postes d’énergie, étant donné que les hausses des prix de l’énergie entraînent des inégalités face à l’inflation auxquelles on pourrait mieux remédier par des mesures ciblées sur les ménages vulnérables (Germain et Hindricks, 2022[11]).
Les réformes devraient être menées en se demandant si le moyen le plus efficace pour compenser les effets de l’inflation est de recourir au mécanisme d'indexation automatique ou à d’autres mécanismes, offrant plus de souplesse et améliorant le potentiel d’ajustement de l’économie. D’une part, le mécanisme d’indexation permet un ajustement rapide à l’inflation pour protéger le pouvoir d’achat. De l’autre, l’expérience acquise dans les pays voisins montre que le pouvoir d’achat n’est pas nécessairement érodé à long terme en l’absence de mécanisme formel d’indexation, l’inflation étant prise en compte dans les négociations salariales, mais que l’absence d’indexation permet de parer plus facilement à certains chocs (NBB, 2012[12]). Les deux éléments d’équilibrage du mécanisme actuel (l’indexation et le plafonnement salarial) pourraient donc être reconsidérés pour permettre aux salaires d’évoluer parallèlement aux fondamentaux économiques. Il pourrait être également utile de lier l’évolution salariale à celle de la productivité au niveau des entreprises et de favoriser plus de concurrence dans les services, ainsi qu’on le verra plus loin.
La croissance du PIB, qui connaît un ralentissement à cause de la guerre en Ukraine, devrait rester robuste à 2.4 % en 2022, avant de chuter à et 1.0 % en 2023 alors que les consquéquences de l’embargo de l’UE sur le pétrole russe se font ressentir (Tableau 1.3). Les prix élevés de l’énergie et des produits de base, les perturbations des chaînes d’approvisionnement et l'accroissement des incertitudes pèsent sur la confiance et freineront la consommation privée, l'investissement et les exportations. Néanmoins, la croissance devrait être portée par la demande intérieure, et pourrait bénéficier du niveau élevé de l'épargne et de la demande non satisfaite des ménages pendant la pandémie, de l'indexation automatique des salaires et des mesures d'aide face à la hausse des prix de l'énergie qui pourraient atténuer en partie ces difficultés. La pandémie n’a que légèrement affecté la production potentielle grâce aux mesures de protection du potentiel productif de l’économie et à la transformation numérique accélérée des entreprises durant la pandémie. Cela étant, les perturbations dans les chaînes d’approvisionnement et les incertitudes, notamment concernant les approvisionnements énergétiques, pourraient entraver la mise en œuvre des plans de redressement.
Les exportations de biens et de services représentent 80 % du PIB de la Belgique, l’UE étant son principal partenaire commercial (Graphique 1.11). Si les exportations et les importations avaient renoué avec leur niveau d’avant la pandémie à la mi-2021, les anticipations à l’exportation ont reculé depuis février et pourraient reculer davantage en raison de la guerre en Ukraine et des conséquences des sanctions sur les flux d’échanges et les chaînes d’approvisionnement. À 57 %, l’indice de participation de la Belgique aux chaînes de valeur mondiales, mesurée par l’intégration en amont et en aval de ses exportations, figure parmi les plus élevés de l’OCDE. Le Royaume-Uni demeure le quatrième partenaire commercial de la Belgique et représente respectivement 6 % et 9 % de ses exportations de biens et de services. Dans des études antérieures, le taux médian de perte économique résultant du Brexit avait été estimé à 0.9 point de pourcentage du PIB, dans l’hypothèse d’un scénario de sortie sans accord (Bisciari, 2019[13] ; Schmitz, 2019[14]). S’il est encore trop tôt pour évaluer l’impact du Brexit, des calculs de la Banque nationale de Belgique (BNB) indiquent que l’accord commercial actuellement en vigueur pourrait se traduire, à l’horizon 2025, par un gain de 0.4 point de pourcentage du niveau d’activité économique par rapport au scénario sans accord (« no deal ») (NBB, 2021[15]).
Tableau 1.3. Indicateurs et projections macroéconomiques
Variation annuelle en pourcentage, en volume (aux prix de 2015)
|
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
---|---|---|---|---|---|---|
|
Prix courants (milliards EUR) |
|||||
Produit intérieur brut (PIB) |
460.1 |
2.1 |
-5.7 |
6.2 |
2.4 |
1.0 |
Consommation privée |
238.2 |
1.8 |
-8.2 |
6.4 |
3.6 |
0.9 |
Consommation publique |
106.5 |
2.0 |
-0.4 |
4.4 |
1.3 |
0.9 |
Formation brute de capital fixe |
108.5 |
4.4 |
-6.1 |
7.8 |
-0.4 |
2.6 |
Logement |
22.7 |
5.1 |
-6.8 |
10.1 |
3.6 |
1.1 |
Entreprises |
73.8 |
4.8 |
-7.0 |
8.0 |
0.2 |
2.3 |
Administrations publiques |
12.1 |
0.7 |
1.5 |
2.6 |
-11.6 |
8.1 |
Demande intérieure finale |
453.2 |
2.5 |
-5.9 |
6.2 |
2.1 |
1.3 |
Variation des stocks1 |
8.0 |
-0.6 |
-0.3 |
-0.5 |
0.8 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
461.2 |
1.8 |
-6.1 |
5.6 |
2.9 |
1.3 |
Exportations de biens et services |
382.0 |
2.0 |
-5.5 |
9.6 |
0.8 |
0.5 |
Importations de biens et services |
383.1 |
1.6 |
-5.9 |
9.1 |
1.3 |
0.8 |
Solde extérieur1 |
-1.1 |
0.3 |
0.4 |
0.6 |
-0.4 |
-0.2 |
Autres indicateurs (taux de croissance, sauf spécification contraire) |
||||||
PIB potentiel |
. . |
1.6 |
1.4 |
1.4 |
1.2 |
1.1 |
Écart de production2 |
. . |
0.2 |
-6.8 |
-2.4 |
-1.2 |
-1.3 |
Emploi |
. . |
1.6 |
0.0 |
1.7 |
1.7 |
0.5 |
Taux de chômage |
. . |
5.4 |
5.8 |
6.3 |
6.0 |
6.4 |
Déflateur du PIB |
. . |
1.8 |
1.3 |
4.3 |
7.2 |
3.4 |
Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) |
. . |
1.2 |
0.4 |
3.2 |
9.0 |
4.8 |
IPCH sous-jacent |
. . |
1.5 |
1.4 |
1.3 |
3.9 |
4.9 |
Taux d’épargne des ménages, net3 |
. . |
5.5 |
13.7 |
9.9 |
10.0 |
10.6 |
Solde des paiements courants4 |
. . |
0.2 |
0.8 |
-0.4 |
-1.4 |
-0.3 |
Solde financier des administrations publiques4 |
. . |
-2.0 |
-9.0 |
-5.5 |
-5.6 |
-4.8 |
Solde budgétaire sous-jacent des administrations publiques2 |
. . |
-2.1 |
-3.7 |
-4.0 |
-5.0 |
-4.1 |
Solde budgétaire primaire sous-jacent des administrations publiques2 |
. . |
-0.4 |
-2.1 |
-2.6 |
-3.7 |
-2.8 |
Dette brute des administrations publiques4 |
120.4 |
120.4 |
128.6 |
126.3 |
127.5 |
|
Dette brute des administrations publiques (Définition de Maastricht)4 |
. . |
97.7 |
112.8 |
108.4 |
106.1 |
107.2 |
Dette nette des administrations publiques4 |
. . |
84.1 |
100.8 |
88.6 |
86.3 |
87.4 |
Taux du marché monétaire à trois mois, moyenne |
. . |
-0.4 |
-0.4 |
-0.5 |
-0.2 |
0.9 |
1. Contribution aux variations du PIB réel.
2. En pourcentage du PIB potentiel.
3. En pourcentage du revenu disponible des ménages.
4. En pourcentage du PIB.
Source : Perspectives économiques de l’OCDE (base de données).
Les perspectives à court terme sont particulièrement très incertaines, compte tenu de la guerre en Ukraine et de la pandémie, toujours en cours. Les principaux risques de divergence à la baisse sont de nature géopolitique et tiennent à des tensions continues sur les prix de l’énergie, qui pourraient faire courir le risque d’une inflation durablement élevée et créer une spirale salaires-prix. D’autres risques tiennent aux goulets d’étranglement au niveau de l’offre et aux pénuries de main-d'œuvre, qui pourraient perturber plus que prévu la production et les exportations. L’apparition d’un nouveau variant du coronavirus, qui serait plus résistant aux vaccins actuels et amènerait la Belgique, et ses principaux partenaires commerciaux, à réinstaurer des mesures plus restrictives, demeure également un risque à la baisse. En outre, un certain nombre d’autres chocs pourraient hypothéquer les perspectives de croissance (Tableau 1.4). Ainsi, les inondations de juillet 2021 ont occasionné de sérieux dégâts, notamment en Wallonie, et d’autres risques de nature climatique vont sans doute se concrétiser et entraîner des répercussions sociales et économiques coûteuses.
Tableau 1.4. Événements qui pourraient modifier sensiblement les perspectives
Facteur de vulnérabilité |
Conséquences possibles |
---|---|
Exacerbation des tensions géopolitiques |
Les prix élevés de l’énergie et des produits de base, les difficultés dans les chaînes d’approvisionnement, le regain d’incertitude et son impact sur la confiance pourraient porter un coup à la consommation privée, à l’investissement et aux exportations, ainsi qu’à la mise en œuvre des investissements prévus dans les plans pour la reprise. L’intensification des flux de réfugiés risque de peser sur les coûts budgétaires à court terme, tandis qu’un succès dans l’intégration des migrants peu qualifiés et des très qualifiés pourrait aider à combler les déficits de main-d'œuvre et les décalages entre offre et demande et donner un coup de pouce à l’entrepreneuriat. |
Spirale inflationniste des salaires et des prix |
L’instabilité macroéconomique, les distorsions des prix relatifs conduisant à une mauvaise allocation des ressources, la perte de pouvoir d’achat des ménages vulnérables dont les revenus ne suivent pas le rythme de l’inflation, ou au contraire, l’indexation automatique des salaires, pourraient entraîner une perte de compétitivité. |
Émergence de nouveaux variants du COVID-19 et efficacité potentiellement limitée des vaccins. |
Imposition de nouvelles mesures de confinement plus restrictives et incertitude accrue, ce qui aurait des effets négatifs considérables sur la consommation et l’investissement du secteur privé. |
Correction majeure des prix des actifs |
Une forte correction des prix des logements, ou un relèvement d’ampleur des taux d’intérêt, pourrait déclencher une baisse de la consommation, ce qui à son tour pourrait avoir des conséquences néfastes pour la croissance économique. |
Difficultés financières et problèmes de surendettement dans les entreprises et les ménages en raison de la pandémie |
L’augmentation des cas d’insolvabilité et des prêts non performants pourrait être plus forte que prévu, entamant la confiance des entreprises et provoquant des difficultés financières et un rationnement du crédit dans le secteur bancaire. |
Incertitude politique et défaut de coordination entre les différents niveaux de gouvernement |
Une inaction prolongée risquerait de ralentir la reprise de l’activité après la pandémie, de fragiliser les efforts d’assainissement des finances publiques et de retarder les réformes nécessaires pour accroître la croissance potentielle et relever les défis du changement climatique et de la transformation numérique. |
Risques climatiques |
Des événements climatiques extrêmes plus fréquents, à l'instar des inondations qui ont eu lieu en Wallonie en 2021, pourraient pénaliser l'activité économique de certains secteurs et dans certaines zones, tout en imposant des efforts budgétaires supplémentaires pour prendre des mesures de secours. |
Une surveillance étroite du secteur financier est de rigueur
Le secteur bancaire belge se révèle résilient et les banques disposent, semble-t-il, de volants de fonds propres et de liquidités suffisants, y compris en cas de difficultés (EBA, 2021[16]). Au deuxième trimestre de 2021, le ratio des fonds propres de base (Tier 1), à 18.8 %, était supérieur à la moyenne de l’OCDE, tandis que le ratio de levier, à 6 %, lui était inférieur(Graphique 1.12, parties A et B). Il importera également de veiller à l’adéquation des volants de fonds propres des succursales de banques étrangères, celles-ci étant très présentes en Belgique. Comme les banques demeurent la principale source de financement, elles devraient jouer un rôle essentiel en utilisant leurs volants de fonds propres pour absorber les pertes et renégocier les prêts avec les emprunteurs viables traversant des difficultés temporaires, et distribuer le crédit aux fins de la reprise.
Les mesures de soutien (reports de remboursement des échéances de prêts, moratoires et garanties) ont permis d’atténuer l'impact de la pandémie sur les ménages et les entreprises, mais certaines poches de fragilité sont apparues. Si le taux de prêts non performants (PNP) est resté bas, à 1.5 % au dernier trimestre de 2021, le profil de risque de certains des prêts bénéficiant d’une garantie ou d’un moratoire s’est détérioré, et les taux de PNP sont supérieurs dans les secteurs ayant été beaucoup plus touchés par la pandémie (Graphique 1.12, parties C et D). La proportion d’entreprises s’attendant à faire faillite a reculé à 1.6 % en octobre 2021, contre 3.2 % en juin, mais des différences de solvabilité demeurent, en particulier parmi les PME des secteurs les plus affectés (IMF, 2021[17] ; Tielens, Piette et De Jonghe, 2021[18]) (Graphique 1.13, partie A). Si les mesures prises, notamment les moratoires sur l'insolvabilité et les sursis volontaires sur créances publiques, ont jusqu'à présent permis d'éviter une vague d'insolvabilités, l’ampleur des besoins de liquidités restants pourrait accroître les risques de surendettement. En conséquence, il importera encore de poursuivre l’évaluation des prêts non performants et de constituer des réserves adéquates.
La Belgique a progressé dans l’amélioration de son régime d’insolvabilité, qui doit être renforcé encore pour favoriser les redéploiements et atténuer les séquelles laissées par la crise. En mars 2021, des amendements ont été apportés à la procédure de réorganisation judiciaire (PRJ) afin de mettre en place des procédures « d’accord pré-pack » (« phase pré-PRJ », qui donne lieu à un accord confidentiel) et de faciliter l’accès à cette procédure, en particulier l’accès des PME, ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2020. Leur efficacité à empêcher l’encombrement des tribunaux dépendra de l’expertise des administrateurs judiciaires, de la complexité des affaires et de la capacité des tribunaux à statuer dans des délais très courts. Ces amendements resteront en vigueur jusqu’en juillet 2022, lorsque la transposition dans le droit belge de la directive de l’UE de 2019 sur la restructuration et l’insolvabilité permettra d’apporter de nouvelles améliorations. Ainsi, permettre aux créanciers d’engager une procédure de réorganisation judiciaire, mettre en place des procédures extrajudiciaires spéciales pour les PME et réduire le nombre d’étapes impliquant l’intervention des tribunaux au cours de la procédure sont autant de mesures qu’il conviendra d’introduire dès que cela sera possible (OECD, 2020[3]).
Intervenir le plus en amont possible pour repérer et aider les entreprises viables connaissant des difficultés temporaires de solvabilité pourrait accélérer la reprise et empêcher l’accumulation de prêts non performants. Des mesures de soutien à la solvabilité, notamment l’octroi de prêts subordonnés et des apports en fonds propres, sont en place (Tableau 1.1 ci-dessus). Les premiers programmes de ce type ciblaient les PME et consistaient en des prêts subordonnés, mais les derniers sont conçus pour que l’ensemble des entreprises aient recours à des instruments de quasi-fonds propres. Les programmes en place représentent 0.3 % du PIB, ce qui se situe au milieu de la fourchette des programmes de ce type menés dans les pays comparables, et couvrent 16 % environ des besoins en fonds propres estimés nécessaires pour rétablir les niveaux de solvabilité d’avant la pandémie (IMF, 2021[17]).
Le rapport coût-efficacité des mesures de soutien à la solvabilité devrait être étroitement surveillé, et ces mesures devraient prévoir des stratégies de sortie crédibles. Une analyse menée au niveau d’entreprises belges donne à penser que le savoir-faire des banques et leurs capacités de sélection peuvent être utiles pour identifier les entreprises viables (De Jonghe, Mulier et Samarin, 2021[19]). Aussi faudrait-il mobiliser leur expertise pour aider à cibler, sélectionner et suivre l’utilisation qui est faite des fonds publics. Qui plus est, des ressources du secteur privé pourraient être mobilisées pour compléter ces fonds publics. Il existe certaines incitations fiscales à l’intention des investisseurs privés pour qu’ils fournissent des prêts subordonnés, notamment des réductions d’impôt et des abattements au titre des investissements, qui pourraient être encore étendues. La France, par exemple, a mis en place un dispositif de garantie des prêts subordonnés consentis par les banques et les investisseurs privés.
La recrudescence de facteurs de vulnérabilité dans le secteur immobilier nécessite une surveillance étroite et l’application continue de mesures macroprudentielles pour atténuer ces risques. Les prix des logements ont sensiblement augmenté et l’on estime qu’ils étaient surévalués de 20 % à la mi-2021 (Graphique 1.13). Le secteur de l’immobilier résidentiel et commercial représente 31 % des portefeuilles de crédit bancaire. Un volant de fonds propres macroprudentiel de protection contre les risques inhérents à ce secteur a été décidé en 2013. De nouveaux plafonds ont été imposés en janvier 2020 sur les prêts hypothécaires plus risqués. Les « attentes prudentielles » (ou recommandations de la BNB, relatives aux nouveaux prêts hypothécaires) ont eu pour effet d’abaisser le taux des prêts à quotité de financement élevée (ratio prêt/valeur du bien) consentis aux primo-acquéreurs et aux propriétaires-occupants (NBB, 2021[20]). Cela étant, des mesures complémentaires pourraient s’avérer nécessaires pour les prêts à l’investissement dans l’immobilier locatif, dont les quotités de financement demeurent supérieures aux marges de tolérance fixées par la BNB. Il conviendrait, le cas échéant, de continuer de surveiller attentivement les écarts de prix et de prendre de nouvelles mesures macroprudentielles, si nécessaire. Il faudrait également veiller tout particulièrement à l’évolution du secteur de l’immobilier commercial, car des enquêtes laissent penser que d’importantes réductions des besoins en espaces de bureaux par salarié sont à prévoir au cours des cinq prochaines années (9 % en Belgique et 22 % à Bruxelles) (Coppens et al., 2021[21]).
Outre les risques à court terme, il convient, comme dans d’autres pays de l’OCDE, de renforcer la capacité d’adaptation du secteur financier à d’autres enjeux. La faiblesse de la rentabilité des banques dans un contexte persistant de taux d’intérêt bas, la concurrence, la transformation numérique (notamment la gestion des technologies de l’information et des risques pour la cybersécurité) et le rapport coût-efficacité comptent au nombre de ces enjeux, qui sont plus marqués pour les petites et moyennes banques dont le modèle économique est celui d’une activité de banque de dépôt (NBB, 2021[20]). Les banques doivent intégrer les risques et opportunités liés au climat (physiques et/ou en lien avec la transition) dans leurs pratiques de gestion. En décembre 2020, la BNB a ainsi publié ses attentes et exigences en matière de collecte d’informations sur l’efficacité énergétique des prêts au marché immobilier, dans le cadre de la gestion bancaire du risque (NBB, 2020[22]), ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2020. Enfin, une étude récente de l’impact des technologies financières (FinTech) et de la transformation numérique sur le secteur bancaire belge a montré que l’adoption d’une stratégie et d’un modèle économique numériques, et leur actualisation périodique, devaient rester une priorité essentielle des banques (NBB, 2021[23]). Ces dispositions sont une bonne chose pour répondre aux enjeux de demain et devraient être prises en compte dans des exercices d’évaluation systématique de l’ensemble des institutions financières.
Les plans pour la reprise et la résilience fournissent l’occasion de promouvoir l’investissement et les réformes
Le plan de relance de la Belgique et les dépenses supplémentaires inscrites dans les plans de relance fédéral et régionaux et financées en dehors des fonds de l'UE offrent la possibilité d’accroître l'investissement, la productivité et la croissance. Le plan national de relance va permettre d’accroître l’investissement public (Graphique 1.14), 88 % des ressources étant allouées à la formation brute de capital fixe (FPB, 2021[24]). Ses principaux volets portent sur la rénovation énergétique des bâtiments et sur l’infrastructure permettant un transfert modal dans les transports et la mobilité (Encadré 1.2). Ce plan s'articule autour de six axes stratégiques, la transition écologique et la transformation numérique représentant la majorité du total des dépenses prévues, conformément aux orientations accompagnant la Facilité pour la reprise et la résilience. L'axe thématique « Social et vivre-ensemble » a pour objectif d’accroître l’égalité des chances en s’attaquant aux déficits de compétences numériques, à la faiblesse des taux d’emploi des groupes vulnérables et aux enjeux que pose l’accessibilité financière du logement (chapitre 2). Il importera de veiller à ce qu’une transformation numérique inégale et des mesures écologiques non destinées aux plus vulnérables n’aggravent pas les fractures sociale et numérique (FPB, 2021[25]).
Le plan entraînera une augmentation annuelle de 0.14 % du PIB réel en moyenne sur la période 2021-26, selon les estimations nationales, ce qui ne prend pas en compte les externalités positives des PNRR des autres pays européens, des réformes structurelles, des investissements supplémentaires prévus dans les plans de relance régionaux et des investissements privés complémentaires (FPB, 2021[24]). Bien que ce ne soit pas directement comparable, la Commission européenne, dans son évaluation du plan de relance, estime que les externalités provenant des plans des autres pays européens (environ 0.5 % en moyenne) et des fonds autres que les ressources au titre de la Facilité pour la résilience (par exemple REACT-EU) représenteront un impact total de 0.5 %-0.9 % par an entre 2021 et 2026, et la création de 16 000 emplois supplémentaires (EC, 2021[26]). Une analyse comparée des PNRR de cinq pays montre que les gains d’emplois par milliard d’euros investis sont, avec 1 800 emplois supplémentaires en Belgique, inférieurs à ce qu’ils sont en Allemagne (4 300) (Bisciari, Gelade et Melyn, 2021[27]).
Les augmentations récentes des prix des produits de base, les obstacles administratifs, les contraintes pesant sur l’offre et la répartition des compétences entre le gouvernement fédéral et les gouvernements régionaux sont autant de difficultés pour la mise en œuvre du plan. Le gouvernement fédéral ne recevra que 12 % des fonds affectés à la reprise et la résilience (Graphique 1.14), ce qui, dans un souci d’efficacité, rendra d’autant plus nécessaires la coopération et la coordination entre les différents niveaux de gouvernement. Le comité interfédéral prévu dans le plan devra veiller à assurer un déploiement rapide des mesures et l’exploitation des synergies entre les réformes des entités fédérées. Si les réformes et les investissements ne sont pas déployés de manière uniforme d’une région à l’autre, les disparités régionales, déjà prononcées, n’en seront que plus marquées encore. Le site internet de la Facilité pour la reprise et la résilience de l'UE recensant les appels d'offres lancés dans le cadre des plans de relance de tous les pays contribuera à garantir la transparence du processus.
La réglementation stricte des permis d’urbanisme et des procédures environnementales pourrait faire obstacle à la réalisation des investissements majeurs dans le numérique et la transition écologique visés dans le plan national pour la reprise et la résilience (5G, rénovation des bâtiments). La délivrance, en temps et en heure, des permis communaux nécessaires au déploiement des sites d’implantation de relais de téléphonie mobile gérés par les régions, et la fiscalité lourde appliquée sur les antennes-relais par les municipalités ont retardé le déploiement du haut débit et de la 5G. Ces dernières années, la réforme du Code Bruxellois de l’Aménagement du Territoire (CoBAT), le passage progressif au numérique des procédures de permis de construire et la simplification des demandes d'autorisation pour l'installation d’antennes de téléphonie dans la Région de Bruxelles-Capitale, le passage à des procédures en ligne pour la délivrance des permis de construire en Flandre et la réforme du code d’utilisation des sols en Wallonie ont eu pour but de réduire les retards dans la délivrance des permis. Toutes les régions se sont engagées, dans le contexte du plan national pour la reprise et la résilience, à rationaliser encore ces procédures, ce qui est une bonne chose, mais les délais prévus pour la mise en œuvre sont longs (le chantier devrait être achevé à la mi-2026 en Wallonie). Il conviendrait d’avancer le calendrier de réalisation de cette partie des réformes pour assurer le succès des investissements programmés.
Encadré 1.2. Réformes et investissements en cours et programmés
Cet encadré ne fait qu’esquisser les grands axes thématiques de réforme et d’investissement, tandis que leurs modalités précises sont examinées tout au long de l’Étude, dans les sections correspondantes.
Le Plan national pour la reprise et la résilience (PNRR) :
Climat, durabilité et innovation : les mesures prévues concernent l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments existants, la promotion des technologies de soutien à la transition énergétique (promotion des technologies de l’hydrogène, construction d’un pôle énergétique offshore) et la conservation et la restauration de la biodiversité
Transformation numérique : des projets sont prévus pour renforcer la résilience aux cyberattaques, promouvoir l’utilisation des technologies numériques dans le secteur public (plateforme numérique pour l’interaction entre la sécurité sociale et les citoyens, transformation numérique de la justice) et améliorer la connectivité numérique (poursuite du déploiement de la fibre, développement des corridors 5G pour une connectivité universelle et à un prix abordable).
Mobilité : l’objectif est d’améliorer la mobilité, de mieux connecter entre elles les régions et d’assurer un transfert modal dans les transports au profit de modes plus respectueux de l'environnement et du climat, en développant des infrastructures cyclables et piétonnes, en améliorant les services de transport public (train, tramway, métro, transport fluvial) et en verdissant le transport routier grâce à des bus électriques et à une infrastructure de recharge.
Social et vivre-ensemble : les compétences numériques seront développées pour que les systèmes éducatifs soient plus inclusifs et plus en adéquation avec les besoins du marché du travail. Le taux d’activité des groupes vulnérables (main-d'œuvre peu qualifiée, personnes issues de l’immigration, personnes en situation de handicap, femmes, jeunes) sera renforcé grâce à des politiques d’activation plus solides et à l’extension des systèmes de formation. De nouveaux logements sociaux et le développement des capacités d’accueil des jeunes enfants viendront renforcer la cohésion sociale.
Économie du futur et productivité : il s’agira de dynamiser l’éducation au numérique pour que les compétences en la matière correspondent aux besoins du marché du travail. La recherche-développement sera développée et axée sur la transformation numérique, la durabilité et la santé. L’économie circulaire sera encouragée en mettant en place de nouvelles infrastructures de recyclage et des partenariats pour l’innovation. Les procédures d’autorisation et de recours seront accélérées.
Finances publiques : des revues de dépenses seront intégrées aux procédures d’établissement budgétaire à tous les niveaux de gouvernement.
Plans de relance régionaux
Le Gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale a adopté un plan de relance et de redéploiement pour faire face à la pandémie du Covid-19 afin de permettre la mise en œuvre d’un redémarrage progressif et durable de toutes les activités à court, moyen et long terme. Doté d'un budget de quasiment 500 millions EUR, il repose sur trois piliers : transition socio-économique et emploi, mesures en faveur du bien-être et politique de santé, et développement territorial et environnement. Ce plan est complété par les investissements et réformes à l'échelon régional prévus dans le plan national de relance. Les différents projets concernés ont été intégrés dans la Stratégie GO4Brussels 2030 qui prévoit des procédures formelles de consultation des partenaires sociaux. Des investissements supplémentaires sont également prévus dans quatre domaines d'action prioritaire : la mobilité (plan pluriannuel d'investissement dans les transports publics, soit environ 5 milliards EUR), le logement social, la politique de l'emploi et la mise en œuvre du Plan Climat.
Doté d'une enveloppe de 4.3 milliards EUR, le plan de relance du Gouvernement flamand « Résilience flamande » (Vlaamse Veerkracht) repose sur sept piliers : rendre l’économie et la société plus durables, investir dans les infrastructures, réussir la transformation numérique de la Flandre, investir dans le capital humain et les talents, renforcer le système flamand de soins et de bien‑être, gérer la crise liée au COVID-19 et le Brexit, et renforcer la réactivité et l’efficacité de l'administration. Plusieurs projets inscrits dans le plan Résilience flamande seront financés à l'aide de fonds issus de la Facilité de l’UE pour la reprise et la résilience.
Le Plan de relance de la Wallonie, doté d'un budget de 7.644 milliards EUR, prévoit un ensemble de mesures d'investissement et de réforme destinés à relever les enjeux du redressement et de la reconstruction en Wallonie en répondant aux besoins dictés par la triple transition économique, sociale et environnementale. Ce plan de relance s'articule autour de six axes : « miser sur la jeunesse et les talents des wallon.ne.s, assurer la soutenabilité environnementale, amplifier le développement économique, soutenir le bien-être, la solidarité et l'inclusion sociale, garantir une gouvernance innovante et participative, et soutenir la reconstruction et la résilience des territoires sinistrés ».
Programme fédéral de réformes plus générales, incluant les politiques publiques inscrites au Budget 2022
Des réformes fiscales, destinées à supprimer les contre-incitations au travail, à élargir la base d’imposition, à transférer la charge fiscale sur la consommation, la production et l’environnement, et à simplifier la fiscalité, sont prévues. À titre de première étape, une taxe sur les comptes de titres a été introduite et un plan annuel de lutte contre la fraude fiscale et la fraude aux cotisations sociales a été annoncé. Un transfert de charge fiscale d’un montant de 300 millions EUR, impliquant une réduction des cotisations de sécurité sociale compensée en partie par les taxes sur la consommation et la fiscalité environnementale, a été décidé en février 2022.
Une réforme des retraites, dont l’objectif est d’améliorer l’adéquation des pensions, leur acceptabilité sociale et la pérennité financière du système, est en cours de discussion. Elle aura vocation à inciter les seniors à rester sur le marché du travail et à améliorer l’équilibre hommes-femmes et le second pilier du système de retraite.
Les réformes du marché du travail inscrites au Budget 2022 ont pour but d’accroître l’activité au moyen de mesures visant à : i) lutter contre les discriminations, ii) faciliter la réinsertion des bénéficiaires de prestations d’invalidité (via des incitations à combiner emploi à temps partiel et prestations, le durcissement des sanctions applicables aux employeurs et aux salariés, la simplification et l’accélération du processus de réinsertion), et iii) accroître la mobilité de la main-d'œuvre (en affectant un tiers des cotisations salariales patronales versées en cas de licenciement à des mesures de formation des travailleurs licenciés, en allouant une fraction des indemnités de licenciement au versement d’une subvention salariale au nouvel employeur, et en permettant aux chômeurs de longue durée acceptant un emploi dans une autre région linguistique de conserver leurs indemnités de chômage pendant trois mois). Un nouvel accord a été trouvé en février 2022, qui permet plus de souplesse dans l’organisation du temps de travail (en laissant la possibilité d’une semaine de 4 jours), protège davantage les travailleurs des plateformes numériques, assouplit les conditions du travail de nuit des salariés de l’e-commerce et met en place des allocations individuelles de formation.
Le régime d’insolvabilité s’est vu simplifié pendant la pandémie pour faciliter les gains de productivité et la transformation numérique. Le Budget 2022 assouplit les règles applicables à l’e-commerce et prolonge un certain nombre de mesures permettant de stimuler l’investissement dans les start-up.
Enfin, pour atténuer l’impact des hausses de prix de l’énergie, diverses mesures ont été prises : prolongement du tarif social de l’énergie jusqu’en septembre, versement d’une allocation forfaitaire ciblée aux ménages vulnérables, réduction exceptionnelle des factures d’électricité et de fioul de l’ensemble des ménages, réduction des droits d’accise sur l’essence et application temporaire d’un taux réduit de TVA sur l’électricité et le gaz naturel, passant de 21 % à 6 % jusqu’en septembre. Une réforme des taxes fédérales sur la consommation d’énergie, qui remplacerait la TVA par des droits d’accise et permettrait de faciliter les ajustements à opérer après des variations de prix, tout en transférant la charge sur les ménages qui consomment davantage, est en projet.
Les pénuries de compétences dans des secteurs essentiels comme la construction et les technologies de l’information et la communication (TIC) pourraient compliquer la réalisation des investissements prévus dans les plans de relance (rénovation des bâtiments, transformation numérique) et la reconstruction des zones affectées par les inondations. Les employeurs citent à 87 % le manque de personnel qualifié comme le principal obstacle à l’investissement en 2021, contre 79 % en moyenne dans l’UE (EIB, 2021[30]). La reconversion professionnelle sera un outil important non seulement pour résorber ces pénuries et renforcer l’employabilité des salariés licenciés, mais également pour atteindre les objectifs d’emploi que s’est fixés le gouvernement. En conséquence, les mesures proposées au niveau fédéral et régional dans les plans de relance et dans le Budget 2022 pour améliorer l’efficience des programmes actifs du marché du travail et la formation continue valent d’être saluées (chapitre 2).
Les réformes présentées dans le plan pourraient être plus ambitieuses et ont besoin d’être affinées dans certains domaines. Si certaines, comme la simplification des procédures administratives, l’introduction d’un compte individuel de formation et l’accompagnement renforcé des demandeurs d’emploi, ainsi qu’il est recommandé dans les Études économiques précédentes, sont plus concrètes, des précisions manquent concernant la conception et la mise en œuvre de certaines réformes (celles de la fiscalité et des retraites) et seront fondamentales. La réforme fiscale n’a pas été incluse dans le plan national pour la reprise et la résilience par manque de clarté concernant son calendrier et l’engagement vis-à-vis de son adoption. Un renforcement de la cohérence entre les investissements et les réformes prévus dans le plan (comme les mesures fiscales destinées à réduire les contre-incitations au travail) pourrait produire un impact de plus grande ampleur. En s'efforçant de faire émerger un consensus politique et social sur les réformes, les autorités contribueraient à garantir leur pérennité, mais cette recherche ne doit pas retarder inutilement les réformes nécessaires.
La crise a accentué les problèmes de viabilité des finances publiques à moyen terme
Du fait de la guerre en Ukraine, les perspectives et les besoins budgétaires à court terme ont changé dans les pays de l’OCDE et en Belgique. Le budget 2022, qui ne tient pas compte de la dernière vague de contaminations, des mesures de soutien adoptées face à la hausse des prix de l’énergie ou de la guerre en Ukraine, prévoit un assainissement budgétaire de 0.4 % du PIB. Dans le contexte actuel du choc affectant l’offre, l’efficacité des stabilisateurs automatiques à l’œuvre en Belgique peut contribuer à atténuer les tensions financières qui s’exercent sur les ménages. De plus, les autorités peuvent apporter un soutien temporaire, judicieusement ciblé et sous conditions de ressources pour amortir les effets immédiats des chocs subis par les prix des produits de base et alimentaires sur les ménages et les entreprises vulnérables, et aider les réfugiés à court terme (OECD, 2022[31]).
Les événements récents ont par ailleurs montré l’importance de disposer d’une marge de manœuvre budgétaire pour faire face aux chocs futurs. L’ampleur des dépenses liées à la pandémie a fait grimper la dette publique au sens de Maastricht à 108.4 % du PIB en 2021. Selon les projections de l’OCDE, des efforts considérables devront être consentis pour stabiliser la dette publique à près de 99 % du PIB en 2060 (Graphique 1.15). Les projections de l’OCDE se fondent sur l’hypothèse que, pour stabiliser la dette d’ici à 2060, les pouvoirs publics devront prendre des mesures supplémentaires pour réduire progressivement le déficit primaire et ramener le budget à l’équilibre d’ici à 2031. Il est en outre supposé que les réformes des retraites ainsi que des soins de santé et de longue durée prendront en compte le coût total net du vieillissement démographique (Graphique 1.15, courbe bleue). Dans un scénario plus pessimiste, une hausse des taux d’intérêt pourrait faire grimper le ratio de la dette au PIB jusqu’à 129 % (Graphique 1.15, courbe orange). Dans un scénario plus optimiste, qui suppose la mise en œuvre de certaines des réformes structurelles propices à la croissance présentées dans l’Encadré 1.3, le ratio dette/PIB s’établirait à 78 % (Graphique 1.15, courbe verte). Et il s’élèverait à 169 % dans un scénario d’absence de réformes visant à prendre en compte les coûts liés au vieillissement démographique (Graphique 1.15, courbe rouge).
Malgré les importants efforts requis pour stabiliser la dette, les projections officielles tablent sur un recul du solde primaire qui reviendrait de -4 % du PIB à seulement -2.5 % en 2023 jusqu’en 2027 (FPB, 2022[32]), après quoi aucun plan d'amélioration n’est prévu. En conséquence, la dette ne serait pas stabilisée et se hisserait à 150 % du PIB d’ici à 2050, même si des réformes des retraites étaient prises pour faire face aux coûts liés au vieillissement démographique. Une stratégie d’assainissement budgétaire crédible et transparente, intégrant chaque niveau de gouvernement, est donc nécessaire pour réduire le déficit budgétaire et garantir une diminution régulière du ratio dette/PIB. Cette stratégie pourrait comprendre, outre une trajectoire de réalisation des objectifs convenus, des règles claires applicables aux gains budgétaires exceptionnels. Le plan d’ajustement budgétaire doit être centré sur les dépenses, compte tenu de la charge fiscale déjà lourde, et prendre en considération le vieillissement de la population. La présente partie porte sur les principales réformes qui s’imposent pour améliorer la viabilité des finances publiques à moyen terme, à savoir accroître l’efficience de la dépense publique grâce à des revues de dépenses, améliorer le cadre et les règles budgétaires, et mettre en œuvre des réformes de grande ampleur dans les domaines de la fiscalité et des retraites. Les réformes du cadre budgétaire devront être étudiées à la lumière des prochaines révisions générales des règles budgétaires européennes.
Encadré 1.3. Effet potentiel des réformes sur la croissance et le solde budgétaire
Le Tableau 1.5 présente l’effet sur la croissance et le budget de certaines des réformes structurelles essentielles proposées dans cette Étude. Les effets budgétaires indiqués dans le Tableau 1.6 ne tiennent pas compte de certains effets indirects comme ceux induits par l’impact positif des réformes sur la croissance et les recettes publiques, et l’effet budgétaire de certaines recommandations (comme l’amélioration de l’efficience de la dépense publique) ne peut pas être quantifié.
Tableau 1.5. Effet potentiel de certaines des réformes proposées sur le PIB par habitant
Mesure |
Effet à 10 ans |
|
---|---|---|
Amélioration de l’environnement des entreprises (renforcement de la concurrence dans le secteur des services, réduction de la complexité des procédures liées aux autorisations et aux permis). |
Relèvement de l’indicateur de réglementation des marchés de produits (RMP) de l’OCDE de 0.25 % pour le porter au niveau de la moyenne de l’OCDE à un horizon de 10 ans. |
1.1 |
Relèvement du niveau d’instruction des élèves défavorisés. |
Allonger la durée moyenne de scolarisation de 9 mois à un horizon de 15 ans. |
1.2 |
Amélioration de l’efficacité du système judiciaire. |
Amélioration des conditions-cadre institutionnelles (État de droit) de 0.2 % à un horizon de 10 ans. |
0.8 |
Réduction des coins fiscaux pour les célibataires et les couples (réforme neutre sur le plan des recettes). |
Réduction des coins fiscaux de 5 points de pourcentage à un horizon de 10 ans. |
1.2 |
Augmentation du taux d’emploi des seniors (élimination de l’écart entre l’âge effectif et l’âge normal de départ à la retraite, formation tout au long de la vie). |
Relèvement du taux d’emploi des 55-74 ans pour le porter de 32 % à 40 % d’ici à 2040. |
2.1 |
Total |
5.4 |
Note : Ces estimations sont fournies à titre indicatif. L’effet sur le PIB par habitant est estimé à partir des relations observées par le passé entre réformes et taux de croissance dans les pays de l’OCDE. Le modèle ne tient pas compte des changements induits par l’action publique concernant des préférences profondément ancrées, comme l’aversion au risque, ni de leurs effets ultérieurs sur les variables économiques.
Source : Calculs de l’OCDE d’après (Guillemette et Turner, 2021[33]).
Tableau 1.6. Estimation indicative de l’effet budgétaire direct de certaines des réformes recommandées
Réforme |
Effet budgétaire à moyen terme [économies (+)/coûts (-)] (en % du PIB) |
---|---|
Réformes destinés à soutenir l’emploi des seniors |
1.1 % d'ici 2040 |
Relèvement du niveau d’instruction des élèves défavorisés |
-0.5 % |
Renforcement du ciblage des PAMT sur les groupes vulnérables et accroissement de la part des dépenses affectée à la formation au titre des PAMT |
-0.3 % |
Mesures d'aide au logement pour les ménages vulnérables |
-0.25 % |
Réforme fiscale visant à réduire l’imposition des bas salaires financée par un élargissement de la base d’imposition, à modifier l’imposition du capital et à alourdir la fiscalité environnementale en l'accompagnant de mesures d'aide en direction des ménages vulnérables |
Aucun effet (sans incidence sur les recettes) |
Note : Les dépenses publiques affectées à l’enseignement primaire et secondaire en Belgique (4.1 %) sont plus élevées que la moyenne de l’OCDE (3.4 %) et les dépenses consacrées aux PAMT par chômeur en pourcentage du PIB par habitant (38 %) y sont elles aussi supérieures à la moyenne de l’OCDE (26.2 %) (la part des dépenses consacrée à la formation au titre des PAMT, soit 18 %, est inférieure à la moyenne de l’OCDE, qui est de 23 %). Compte tenu de ce qui précède, le présent tableau indique des hausses indicatives des dépenses budgétaires dans ces domaines, mais les recommandations qui y sont formulées reposent sur l’hypothèse implicite que les ressources budgétaires actuelles sont utilisées de manière plus efficiente (c’est-à-dire sans incidence sur le budget). À 1 %, les dépenses de protection sociale consacrées au logement en Belgique sont inférieures à la moyenne de l'UE, qui ressort à 1.8 %, si bien que l'augmentation des aides au logement destinées aux ménages à faible revenu reviendrait à combler un tiers de l'écart. La réforme fiscale comprend une hausse de la TVA exprimée en pourcentage du PIB destinée à combler la moitié de l'écart par rapport à la moitié supérieure des pays de l'OCDE (c'est-à-dire à la faire passer de 6.8 % à 7.4 % du PIB) ainsi qu'une augmentation de la fiscalité environnementale exprimée en pourcentage du PIB visant à combler la moitié de l'écart par rapport à la moyenne du tiers supérieur des pays de l'OCDE (c'est-à-dire à la faire passer de 2 % à 2.3 % du PIB), avec des mesures d'accompagnement en faveur des ménages pauvres les plus touchés dont le coût représenterait environ un quart de l'augmentation des recettes.
Source : Calculs de l’OCDE ; et Commission européenne (2021), The 2021 Ageing Report (Rapport 2021 sur le vieillissement).
Améliorer le cadre budgétaire et l’efficience de la dépense publique
Afin de garantir la viabilité des finances publiques, il importera de réexaminer le cadre de coordination budgétaire à tous les niveaux de gouvernement afin de fixer des objectifs contraignants pour chaque niveau. En vertu de l’accord de coopération conclu en 2013 entre l’État fédéral et les entités fédérées en vue d’améliorer la coordination budgétaire, le Conseil supérieur des finances (CSF) a reçu pour mission : i) de formuler des recommandations ex ante concernant les objectifs budgétaires des administrations publiques et leur répartition entre les différents niveaux de gouvernement ; et ii) à supposer que les objectifs soient convenus, d’assurer un suivi ex post de leur respect et l’activation de mécanismes de correction en cas d’écart important entre l’objectif et le résultat budgétaire (Graphique 1.16). Toutefois, depuis 2013, hormis l’approbation de l’objectif budgétaire global des pouvoirs publics en 2018, le Comité de concertation (composé de membres issus de différents niveaux de gouvernement) n’a fait que prendre acte de l’objectif global recommandé par le CSF et n’a pas approuvé les objectifs individuels. Une telle situation peut compromettre la viabilité de la trajectoire budgétaire vers l’objectif à moyen terme et empêcher le CSF de s’acquitter de son mandat de suivi. La meilleure solution serait de mettre pleinement en œuvre l’accord de coopération de 2013, mais d’autres possibilités pourraient être étudiées compte tenu du cadre institutionnel de la Belgique, où l’État fédéral, les régions et les communautés sont sur un pied d’égalité, de sorte qu’aucune autorité ne prenne le pas sur une autre.
L’un des moyens d’accroître l’influence du CSF consiste à renforcer son mandant en le chargeant de réaliser des analyses approfondies et un suivi des finances publiques aux différents niveaux de gouvernement, même s’il ne peut imposer des recommandations ou des objectifs contraignants. Le CSF pourrait gagner en transparence en publiant des scénarios de viabilité de la dette en l’absence d’intervention des pouvoirs publics pour tous les niveaux de gouvernement, selon une méthodologie uniforme. La transparence et la visibilité de ses recommandations pourraient également être accrues par l’instauration d’un principe « comply or explain » (appliquer ou expliquer), au titre duquel le gouvernement devra justifier devant le Parlement tout écart de la trajectoire budgétaire par rapport aux recommandations, ou par une meilleure communication avec les médias. Le Conseil budgétaire espagnol, par exemple, publie régulièrement ce type d’analyses régionales et les présente dans diverses instances. Par ailleurs, le calendrier de publication de la trajectoire budgétaire recommandée par le CSF pourrait être ajusté de façon à laisser davantage de latitude pour en discuter au sein du Comité de concertation. Des conseils budgétaires indépendants, soumis à des conditions et exigences minimales communes, pourraient sinon être créés au niveau régional pour renforcer le cadre budgétaire de la Belgique, tout en respectant son cadre institutionnel. C’est notamment ce qui a été fait dans l’État de Victoria, en Australie, ainsi qu’en Écosse et en l’Irlande du Nord, au Royaume-Uni. La création de conseils régionaux pourrait aussi contribuer à un renforcement des capacités en vue de la réalisation de revues de dépenses (voir plus bas).
La planification budgétaire pluriannuelle, à tous les niveaux de gouvernement, peut améliorer la transparence et la réalisation des objectifs budgétaires à moyen terme. Le cadre budgétaire à moyen terme de la Belgique n’est guère efficace. La Belgique est le seul pays de la zone euro à ne pas avoir pleinement intégré une planification budgétaire pluriannuelle au niveau national, hormis le programme de stabilité (Bisciari et al., 2020[34]). Celui-ci contient des objectifs budgétaires pluriannuels, qui manquent toutefois de précision et de stabilité, et ne sont souvent pas atteints. Depuis peu, une planification pluriannuelle se met progressivement en place au niveau régional. La mise en place d’une planification budgétaire à moyen terme au niveau des entités fédérées et au niveau national peut contribuer à accroître la transparence et la cohérence de la politique budgétaire. Aux Pays-Bas, la planification budgétaire pluriannuelle s’accompagne de règles de dépenses, élément qui devrait également être envisagé en Belgique.
Des règles de dépenses fixant des plafonds pluriannuels pour les grands agrégats de dépenses à chaque niveau de gouvernement faciliteraient l’assainissement des finances publiques reposant sur les dépenses et contribueraient à la réforme des dépenses à moyen terme. Le cadre budgétaire belge ne comprend aucune règle de dépenses, sauf pour les dépenses de santé. La Flandre s’emploie cependant actuellement à la mise en place d’un objectif de dépenses. Il y a là un contraste important, l’adoption de ces règles se faisant de plus en plus fréquente en Europe. Les incertitudes engendrées par la révision prochaine des règles budgétaires de l’UE et les difficultés techniques de transposition des règles nationales de dépenses aux niveaux infranationaux (domaine dans lequel l’OCDE apporte actuellement son soutien à la Belgique) soulèvent certains problèmes. Des règles de dépenses devraient néanmoins être adoptées dès que possible. Chaque niveau de gouvernement pourrait disposer d’une grande autonomie pour la fixation de ses plafonds de dépenses, dont la surveillance pourrait être confiée au CSF.
Il est nécessaire d’accroître l’efficience des dépenses et de mieux cibler les prestations afin de dégager une marge de manœuvre pour des investissements publics porteurs de gains de productivité, comme cela avait été souligné dans l’Étude économique de 2020. Les dépenses publiques de la Belgique sont parmi les plus élevées de l’UE (Graphique 1.17, partie A), et des hausses structurelles des dépenses non liées à la pandémie (santé, pensions minimums) sont prévues. Les subventions salariales, qui sont beaucoup utilisées pour compenser les coûts de main-d’œuvre élevés et la lourde charge fiscale qui pèse sur le travail, ainsi que la rémunération des salariés du secteur public (Graphique 1.17, partie B) représentent l’essentiel de l’écart de dépenses entre la Belgique et les pays comparables de l’UE (Godefroid, Stinglhamber et Van Parys, 2021[35]). Les dépenses sociales publiques ont également augmenté au fil du temps et sont supérieures à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.17, partie C).
Il est possible d’améliorer l’efficience des dépenses d’éducation afin de dégager une marge budgétaire pour mettre en œuvre certaines des recommandations formulées dans la présente Étude en faveur d’une réduction des disparités en matière de résultats scolaires (chapitre 2). Les dépenses publiques consacrées à l’enseignement, de l’enseignement primaire à l’enseignement post-secondaire non supérieur, s’élèvent à 4.1 % du PIB, un chiffre supérieur à la moyenne de l’OCDE, qui est de 3.1 %. Il ressort d’une comparaison des scores au PISA et du ratio de dépenses par élève que les résultats scolaires en Belgique ne sont pas supérieurs à ceux observés dans des pays voisins comme les Pays-Bas et l’Allemagne, malgré le niveau de dépenses plus élevé (Graphique 1.17, partie D). Les scores au PISA sont plus élevés aux Pays-Bas que dans la communauté française, malgré des ressources comparables. La communauté flamande consacre à l'éducation davantage de dépenses que les pays voisins (France, Allemagne et Pays-Bas), mais elle obtient aussi de meilleurs résultats.
Des revues de dépenses commencent à être mises en place aux niveaux fédéral et régional (Tableau 1.8), mais elles devraient être mieux intégrées à la procédure budgétaire annuelle, comme le prévoit le plan national pour la reprise et la résilience, et être plus cohérentes entre les différents niveaux de gouvernement. Certains des projets pilotes menés (sur les titres-services en Flandre et sur le télétravail et les subventions salariales au niveau fédéral) ont abouti à une inflexion bienvenue des politiques en 2021-22. Compte tenu du cadre institutionnel, il est normal que les revues de dépenses soient réalisées à différents niveaux de gouvernement. Il conviendrait toutefois d’assurer une plus grande cohérence et une plus grande homogénéité des méthodologies et des objectifs pour lier les revues de dépenses et les analyses coûts-avantages aux cadres de dépenses à moyen terme et au processus budgétaire annuel afin de faire progressivement baisser les dépenses publiques. Cela permettrait aussi d’éviter que des réformes engagées dans un domaine (retraite anticipée ou allocations de chômage) n’entraînent des hausses des dépenses dans d’autres (invalidité). Ces revues de dépenses devraient être intégrées à la stratégie d’assainissement budgétaire à moyen terme pour stabiliser et réduire progressivement le ratio dette/PIB.
Des données de meilleure qualité sur les résultats et un mécanisme de suivi en cours d’exercice pourraient également contribuer à une plus grande viabilité des finances publiques. Dans les pays de l’OCDE, les principales difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des examens des dépenses tiennent à l’absence de données sur les résultats ou à leur qualité médiocre, notamment au manque d’accès à des microdonnées permettant une évaluation plus précise (OECD, 2019[36]). Ces facteurs peuvent aussi faire obstacle à l’adoption de la budgétisation axée sur les résultats, qui consiste à utiliser des informations sur les résultats pour orienter les décisions budgétaires (OECD, 2019[37]). Un cadre de budgétisation axée sur les résultats, qui a été utilisé de manière efficace dans d’autres pays (en Australie, par exemple), pourrait être envisagé.
Mettre en œuvre une réforme fiscale d’envergure et sans incidence sur les recettes
Les recettes fiscales de la Belgique, qui s’élèvent à 43 % du PIB, sont supérieures à la moyenne de l’OCDE, qui est de 33.5 % (Graphique 1.18, partie A). Les prélèvements sur le travail demeurent prépondérants dans la structure fiscale, ce qui pénalise la croissance et l’emploi, sachant que le coin fiscal sur les travailleurs à bas salaire est relativement élevé, malgré les réformes récemment mises en œuvre (Graphique 1.18, parties B et C). Compte tenu des problèmes de viabilité des finances publiques, il conviendrait d’augmenter les impôts ayant un moindre effet de distorsion pour financer un allégement de la fiscalité du travail en faveur des bas salaires afin que la réforme soit sans incidence sur les recettes. Un premier pas dans ce sens est fait dans le budget 2022, qui prévoit une légère réduction, sans incidence sur le budget, de la cotisation spéciale de sécurité sociale (0.05 % du PIB). Un plan de lutte contre la fraude, qui prévoit notamment une réduction de l’écart de TVA, a été adopté en juin, ce qui constitue une avancée bienvenue.
Une réforme fiscale visant à transférer la charge fiscale du travail vers la consommation, la propriété immobilière et les activités préjudiciables à l’environnement, comme le prévoit le gouvernement, permettrait de réduire les distorsions causées à la croissance économique (Akgun, Cournède et Fournier, 2017[38]). Cette réforme devrait réduire les contre-incitations à l’activité, en particulier pour les travailleurs à revenus faibles ou moyens et les deuxièmes apporteurs de revenu, et modifier la fiscalité du logement et de l’environnement, conformément aux recommandations formulées dans les précédentes Études et recensées par le CSF (HCF, 2020[39] ; HCF, 2021[40]). Des évaluations d'impact détaillées et correctement menées permettant d'analyser les conséquences des modifications éventuelles de la fiscalité sur différents indicateurs socio-économiques importants seront nécessaires à une réforme fiscale durable et efficiente. Un certain nombre de documents d’information sur différents aspects de la fiscalité, qui serviront à définir les principes et l’orientation de la réforme, sont en cours d’élaboration. Parallèlement, il sera essentiel de définir un calendrier précis et des engagements clairs pour l’adoption de cette réforme, dans la mesure où il n’existe pas encore de plan concret.
Un certain nombre d’exonérations fiscales diminuent l’efficience du système fiscal (Tableau 1.7). Certaines créent des distorsions, profitent généralement aux ménages à revenu élevé et sont susceptibles de nuire aux résultats environnementaux et de freiner la croissance de la productivité (voir plus bas). Un inventaire des recettes perdues au titre des dépenses fiscales fédérales est publié chaque année. Toutefois, bien que des évaluations ex post soient réalisées ponctuellement, les dépenses fiscales ne font pas systématiquement l’objet d’analyses d’impact (EC, 2020[41]). Les revues de dépenses récemment mises en place pourraient inclure une évaluation des dépenses fiscales à différents niveaux de gouvernement.
Tableau 1.7. Principales dépenses fiscales
Dépenses fiscales, 2019
% du PIB |
Mesures à caractère social |
Emploi |
Logement |
Épargne et crédit |
Recherche-développement |
Aides sectorielles |
Autres |
Total |
% du total |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
TVA |
1.4 |
0.0 |
0.4 |
0.0 |
0.0 |
0.3 |
0.0 |
2.2 |
36 % |
Impôt sur le revenu des personnes physiques |
0.9 |
0.4 |
0.5 |
0.2 |
0.0 |
0.0 |
0.1 |
2.1 |
34 % |
Autres |
0.4 |
0.4 |
0.0 |
0.0 |
0.7 |
0.2 |
0.1 |
1.9 |
31 % |
Total |
2.7 |
0.8 |
0.9 |
0.3 |
0.7 |
0.5 |
0.2 |
6.1 |
Source : Ministère des Finances.
Les dépenses fiscales qui bénéficient généralement de manière disproportionnée aux ménages à revenu élevé pourraient être progressivement rationalisées pour améliorer l’efficacité du système fiscal et ses effets redistributifs. L’assiette de la TVA est entamée par diverses exonérations et taux réduits, ce qui se traduit par d’importantes pertes de recettes au titre de cette taxe (Graphique 1.18, partie D). La future réforme fiscale devrait élargir l’assiette de la TVA, ce qui renforcera la cohérence globale du régime de TVA et réduira sa complexité. Elle devrait être accompagnée de mesures ciblées visant à protéger les ménages à faible revenu, au moyen de transferts directs, contre les effets négatifs des mesures d’élargissement de l’assiette de la TVA. Le régime fiscal appliqué aux véhicules de société, qui est fortement régressif et a un coût budgétaire élevé, reste très avantageux, malgré la mise en œuvre récente d’une réforme visant à le rendre écologique (ce régime sera réservé aux véhicules de société zéro émission achetés ou loués à compter de 2026) (Traversa et Valenduc, 2020[42]). Les exonérations fiscales accordées au titre des pensions de retraite des deuxième et troisième piliers ont un coût budgétaire élevé et profitent fortement aux ménages à revenu élevé (Janssens et Valenduc, 2020[43] ; Court of Auditors, 2020[44] ; Peeters et Schols, 2021[45]).
Il est possible de renforcer l’imposition des revenus du capital perçus par les personnes physiques, en mettant en place un barème d’imposition progressif et un impôt sur les plus-values. Le manque de neutralité de la fiscalité appliquée aux différents types de placement, de revenu ou d’épargne et l’absence d’impôt sur les plus-values ouvrent des possibilités d’arbitrage fiscal, ce qui peut accentuer la mauvaise affectation du capital en l’immobilisant dans des entreprises existantes (OECD, 2018[46]). Le système actuel incite les personnes exerçant une activité de services professionnels et les travailleurs indépendants à se constituer en personne morale de façon à bénéficier de taux d’imposition effectifs moindres, et encourage les actionnaires travaillant dans leur propre société à conserver les bénéfices plutôt qu’à distribuer des dividendes. Ainsi, l’application du même barème aux bénéfices imposables des sociétés et aux revenus salariaux imposables permettrait d’éliminer les différences de charge fiscale moyenne entre l’entrepreneuriat et l’emploi salarié, ainsi que les possibilités de planification fiscale. L’imposition des revenus du travail est déjà progressive en Belgique. Dans le cadre d'une réforme fiscale plus large, il faudrait envisager de mettre en place un système d’imposition progressive dual, intégrant un barème légèrement progressif appliqué à toutes les formes de revenus du capital (différent du barème actuel d’imposition des revenus du travail), et un impôt sur les plus-values. Afin d’éviter toute distorsion et toute conséquence non souhaitée, il faudrait qu’un tel impôt soit prospectif et s’applique uniquement aux plus-values futures, et qu’il n’y ait pas de décalage entre l’annonce de cette mesure et sa mise en œuvre.
Maîtriser les coûts liés au vieillissement démographique
Les dépenses de retraite devraient augmenter de 3 points de pourcentage pour se hisser à 15.2 % du PIB d’ici à 2070 (Graphique 1.19). En décembre 2020, il a été convenu de relever la pension minimum à 1 500 EUR nets pour une personne célibataire ayant effectué une carrière complète entre 2021 et 2024, mesure qui renforcera l’équité. Une réforme des pensions est prévue dans l’accord de gouvernement fédéral et dans le plan national pour la reprise et la résilience, qui vise l’adoption de cette réforme par le Parlement d’ici à juin 2024, bien que les modalités précises ne soient pas encore arrêtées (Governments of Belgium, 2021[28]). L’accord de coalition du gouvernement vise essentiellement à améliorer l’équité du régime de retraite (en mettant l’accent sur la durée de carrière plutôt que sur l’âge), tout en s’appuyant sur un éventail de politiques de retraite et de politiques du marché du travail pour différer les décisions de départ à la retraite (au moyen du bonus de pension, par exemple) et améliorer les conditions de travail et l’employabilité des travailleurs seniors à l’aide de mesures destinées aux employeurs et aux salariés.
Un certain nombre de mesures ont été prises en 2015 pour rehausser l’âge moyen de la retraite, notamment un relèvement progressif de l’âge légal de la retraite à 67 ans d’ici à 2030, un durcissement des critères d’admission au bénéfice du chômage avec complément d’entreprise (anciennement qualifié de prépension), la suppression des limites de cumul d’une pension de retraite avec les revenus d’une activité professionnelle pour les personnes ayant 65 ans révolus ou ayant travaillé pendant au moins 45 ans. De plus, les conditions d’accès à une retraite anticipée ont été durcies : un départ anticipé à la retraite n’est désormais possible qu’à partir de 60 ans pour les personnes ayant travaillé pendant 44 ans, de 61 ans pour celles ayant travaillé pendant 43 ans, et de 63 ans pour celles ayant travaillé pendant 42 ans. L’une des nouvelles propositions de réforme est de porter l’âge minimum de départ en retraite anticipée à 60 après 42 ans de carrière afin de renforcer l’équité pour les travailleurs ayant un métier dit « pénible » et pour ceux qui commencent à travailler à un âge précoce en mettant l’accent sur la durée de carrière. La précédente réforme des retraites n’avait pas abouti à un accord sur la définition des métiers pénibles. En adoptant une telle mesure, la Belgique s’éloignerait toutefois des normes internationales. Son éventuelle mise en œuvre devrait être envisagée dans le cadre d’un train de réformes pour compenser la hausse des coûts.
Malgré les récentes réformes et le relèvement de l'âge moyen de sortie du marché qui est passé de 59 ans en 2015 à 60.5 ans en 2020, l’écart entre l’âge légal de départ à la retraite et l’âge moyen de sortie du marché du travail reste l’un des plus marqués de l’OCDE (Graphique 1.19), et les gains qui pourraient découler d’un relèvement des taux d’emploi des seniors pour la viabilité des retraites sont considérables (0.9 point de PIB d’ici à 2070 selon (EC, 2021[47])). D’après le modèle à long terme de l’OCDE, combler progressivement l’écart entre l’âge effectif et l’âge légal de la retraite et faire en sorte que l’âge effectif moyen de la retraite continue à augmenter dans l’avenir à un rythme correspondant à deux tiers des gains escomptés d’espérance de vie sont deux mesures qui pourraient accroître le PIB par habitant de 6 % en 2060 (moyenne de l’OCDE : 3 %) (Guillemette et Turner, 2021[33]). Il est donc bienvenu que les réformes visent en priorité à inciter les seniors à rester sur le marché du travail.
Les liens entre carrière professionnelle et pension pourraient être renforcés dans le cadre du régime de retraite anticipée. En règle générale, les régimes de retraite offrent une certaine souplesse quant à l’âge auquel il est possible de faire valoir ses droits à pension. Pour éviter qu’une demande de pension précoce (tardive) ne se traduise par une pension plus (moins) importante sur la durée de vie, il est possible d’appliquer un « ajustement actuariel » qui modifie les prestations en fonction de l’âge auquel elles sont demandées (c’est-à-dire en abaissant la pension lorsqu’elle est demandée à un stade précoce afin de tenir compte du nombre d’années supplémentaires au-delà desquelles elle serait perçue ou, à l’inverse, en versant une prime en cas de demande différée). Les données montrent que les individus demandent leur pension de retraite à un stade précoce en l’absence de tels ajustements (Martinez et Soto, 2021[48]). Il faudrait donc envisager la mise en place d’un mécanisme d’ajustement actuariel, qui n’existe actuellement pas en Belgique.
La mise en place d’une pension à temps partiel et d’un bonus de pension (tout allongement de la vie active au-delà de 42 années de carrière donnera droit à une majoration des droits à pension sous la forme d’un bonus annuel pour chaque journée de travail supplémentaire) est actuellement à l’étude. Ces mesures visant à allonger la vie active sont bienvenues et devraient être mises en œuvre. Une autre solution qu’il conviendrait d’envisager est l’application de surcotes (majorations de pension) et de décotes (minorations de pension) en fonction de l’âge légal de la retraite plutôt que de l’âge de la retraite anticipée, à l’instar de ce qui se fait dans d’autres pays de l’OCDE. En Finlande, par exemple, en ce qui concerne la part de la pension de vieillesse qui peut être demandée de manière anticipée, une réduction de 0.4 % est appliquée chaque mois durant lequel cette part est liquidée avant l’âge minimum de départ à la retraite de chaque cohorte ; et en cas de report de la liquidation de la pension au-delà de cet âge, la pension est majorée de 0.4 % par mois de report (OECD, 2021[49]).
Une réforme plus ambitieuse s’impose pour garantir la pérennité des réformes et éviter de devoir constamment mener des négociations politiques pour trouver des solutions à court terme. L’instauration d’un mécanisme d’ajustement automatique, comme dans la plupart des pays de l’UE, contribuerait à réduire les incertitudes entourant la pérennité financière du système. Le durcissement des conditions d’accès à la retraite anticipée et le relèvement de l'âge légal de la retraite, qui s’élèvera à 67 ans en 2030, devraient faire augmenter l’âge effectif de sortie du marché du travail, mais l’espérance de vie devrait s’allonger plus vite. La mise en place d’un lien automatique entre l’âge de la retraite et l’espérance de vie se traduirait par une diminution des dépenses de retraite de 1.3 point de PIB en 2070 (EC, 2021[47]). Il faudrait, à terme, indexer l’âge légal de départ à la retraite sur l’évolution de l’espérance de vie résiduelle (mise en œuvre progressive après 2030), comme au Danemark, en Finlande et aux Pays-Bas, et offrir des possibilités de formation tout au long de la vie.
Des réformes complémentaires, dans d’autres domaines que les retraites, sont également nécessaires pour allonger la vie active. Le durcissement des dispositifs de retraite anticipée a contribué en partie à l’accroissement des dépenses de maladie et d’invalidité, raison pour laquelle il est essentiel d’améliorer l’efficacité des évaluations et de la réinsertion des bénéficiaires de prestations de maladie ou d’invalidité (chapitre 2). Le régime d’assurance chômage constitue une autre voie de sortie du marché du travail. Les taux de remplacement assurés par les allocations de chômage sont élevés en comparaison de ceux observés dans des pays homologues, sachant que la durée de versement des allocations de chômage est illimitée et que leur dégressivité est faible (réduction dans le temps des prestations en fonction de la durée du chômage et de la carrière du salarié), et devraient faire l’objet d’une réforme, ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2020. Selon la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le vieillissement et les politiques de l’emploi, il sera en outre essentiel d’encourager les employeurs à embaucher et à garder les seniors, notamment en luttant contre les discriminations fondées sur l’âge, en vue de différer leur sortie du marché du travail. Ainsi, les entreprises pourraient être tenues d’adopter des plans de diversité et de fournir une réponse à chaque candidat, en précisant les motifs de rejet le cas échéant.
Le taux d’emploi des seniors (55-64 ans) s’élève à 54.4 %, soit un niveau inférieur à la moyenne de l’OCDE, qui est de 61.1 %. Une amélioration des compétences est nécessaire pour maintenir l’employabilité des seniors, mais leur taux de participation à la formation tout au long de la vie est faible (Graphique 1.20 ; (Delhez et al., 2022[50])). Parmi les mesures proposées en février dans le cadre du « Deal pour l’emploi » figure la possibilité pour les seniors de consacrer un tiers de leur période de préavis à un reclassement externe ou une formation, ce qui est bienvenu. L’état de santé et l’âge constituent, entre autres, les principaux freins à la participation des seniors à la formation, bien que la distance géographique ou les horaires des formations soient également des obstacles évoqués (HCE, 2021[51]) et auxquels il serait possible de remédier en développant les formations en ligne et les formations modulaires. Une analyse de la formation tout au long de la vie en Flandre montre que l’accès insuffisant à l’information et l’orientation concernant les formations, ainsi que le soutien plus limité des employeurs constituent des obstacles à la participation des seniors (WSE, 2020[52]). Pour favoriser une utilisation efficace des allocations de formation individuelles mises en place en 2022 pour les seniors, on pourrait créer pour toute la Belgique un site unique regroupant les informations sur les possibilités de formation et fournissant des orientations pour les aider à faire des choix éclairés en matière de formation tout au long de la vie, à l'instar de celui qui existe en Flandres (Opleidingsdatabank, base de données sur la formation du Gouvernement flamand).
Certains changements structurels potentiels imputables à la pandémie de COVID-19 pourraient également contribuer à retarder les décisions de départ à la retraite. La pandémie a accéléré le recours au télétravail en Belgique, sachant que le taux était déjà élevé en 2019 (25 %). La Belgique procède actuellement à une refonte de sa loi sur le télétravail, qui avait fait l’objet de modifications temporaires pendant la pandémie. Une attention particulière pourrait être accordée à la flexibilité dont les seniors ont besoin. Selon des données relatives aux États-Unis, les travailleurs âgés qui peuvent moduler leur temps de travail et télétravailler tendent à repousser leur départ à la retraite (Hudomiet et al., 2019[53]).
La structure complexe du système de retraite et les différents régimes applicables aux divers types de travailleurs entravent la mobilité professionnelle et contribuent au caractère inéquitable du système de retraite. Les taux de cotisation de retraite des travailleurs indépendants sont bas par rapport à ceux des salariés traditionnels, ce qui réduit leur capacité de se constituer des droits à prestation adéquats (Graphique 1.18Graphique 1.19, partie C). À cet égard, il avait été préconisé dans l’Étude économique de 2020 d’harmoniser les taux de cotisation et les modes de calcul des pensions des travailleurs indépendants et des salariés. Le coefficient de correction appliqué au calcul des droits à pension des travailleurs indépendants (fixé à 69 % du montant des droits à pension des salariés) a récemment été supprimé, mais les cotisations n’ont pas été ajustées, ce qui accentuera les tensions financières et pourrait décourager indûment l’emploi salarié (OECD, 2021[54]). Par conséquent, les taux de cotisation devraient être ajustés de façon à ce que la réforme récemment mise en œuvre n’aggrave pas les problèmes de viabilité des finances publiques.
Il est également possible de consolider et d’accroître la portabilité entre les régimes de retraite du secteur privé et du secteur public et d’améliorer le lien entre cotisations de retraite et droits à pension. La Belgique est dotée de régimes totalement distincts pour les travailleurs des secteurs public et privé, entre lesquels il existe un ample écart de taux de remplacement, de l’ordre de 30 points de pourcentage (Boulhol, 2019[55]). Cet écart tient au fait que les périodes de référence retenues pour le calcul des pensions sont différentes (il s’agit des 10 dernières années pour les fonctionnaires) et au système préférentiel de bonus de pension appliqué au secteur public, malgré les réformes mineures mises en œuvre ces dernières années. Il faudrait poursuivre le rapprochement progressif des systèmes de retraite des secteurs public et privé, ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2020. Afin de renforcer le lien entre cotisations et droits à pension, les pouvoirs publics pourraient réexaminer le mécanisme d’indexation des rémunérations antérieures sur les prix qui régit les augmentations réelles des pensions pour calculer les droits à pension en fonction de la croissance des salaires réels, sachant que les recettes des régimes de retraite contributifs évoluent plus ou moins parallèlement aux salaires (OECD, 2019[56]).
Tableau 1.8. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant la politique budgétaire et les retraites
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2020 |
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Faire en sorte que des examens réguliers des dépenses à chaque niveau de gouvernement fassent partie intégrante du cadre budgétaire. |
L’État fédéral a mené trois projets expérimentaux en 2021 et s’emploie à intégrer les revues de dépenses dans le processus budgétaire sur une base structurelle. La Région de Bruxelles-Capitale a mené deux projets expérimentaux en 2021, ainsi qu’une évaluation du système de gestion des finances publiques, et a demandé l’assistance technique de l’UE pour intégrer les revues de dépenses dans la procédure d’établissement du budget. La Wallonie mène un exercice budgétaire dit « budget base zéro » qui s’achèvera à la mi-2022. La Communauté française a demandé un soutien technique à l’OCDE pour choisir des projets expérimentaux. À la suite du projet pilote sur les titres-services mené en 2019, la Flandre a procédé en 2021 à une vaste réévaluation de toutes les dépenses et recensé d’autres domaines à examiner, La région procède également à une évaluation des dépenses sociales et a alloué des fonds à un examen des charges administratives. |
Aligner les taux de TVA réduits, qui sont régressifs, sur les taux standards. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Continuer d’abaisser les cotisations de sécurité sociale pour les bas salaires, en finançant cette mesure par un relèvement des impôts dont les effets de distorsion sont moindres. |
Un « transfert de charge fiscale » neutre sur le plan budgétaire (0.05 % du PIB) prévoit une réduction de la cotisation spéciale de sécurité sociale financée par un relèvement des droits d’accise sur le tabac, l’application d’une nouvelle taxe sur les billets d’avion et une réforme du régime d’exonération des précomptes. Le plafond du salaire brut donnant droit au bonus à l’emploi sera relevé en 2022. |
Prévoir le remboursement immédiat des crédits d’impôt à la recherche-développement. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Élaborer des politiques de recyclage des compétences des seniors afin de favoriser leur emploi et lier l’âge légal de la retraite à l’espérance de vie au moment de la retraite. |
Parmi les mesures proposées en février dans le cadre du « Deal pour l’emploi » figure la possibilité pour les seniors de consacrer un tiers de leur période de préavis à un reclassement externe ou une formation. |
Continuer d’harmoniser le traitement des travailleurs du secteur privé et du secteur public du point de vue des retraites, en mettant par exemple en place un système à points. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Harmoniser les taux de cotisation et les modes de calcul des pensions des travailleurs indépendants et des salariés. |
Les droits à pension futurs des travailleurs indépendants ont augmenté, mais les taux de cotisation n’ont pas été ajustés. |
Favoriser le redéploiement des ressources et renforcer la productivité
Des marchés du travail plus dynamiques et des marchés de produits plus flexibles sont nécessaires pour entretenir la reprise, faciliter le redéploiement des ressources en main-d’œuvre et en capital et favoriser la transformation numérique. Les taux d’entrée et de sortie d’entreprises du marché sont faibles (Graphique 1.21), en particulier dans le secteur des services. La proportion d’entreprises à forte croissance (entreprises comptant au moins 10 salariés dont la croissance annuelle des effectifs dépasse 10 % pendant une période de trois ans) s’établissait à 7.4 %, soit en deçà de la moyenne de l’UE, qui était de 11.9 %, en 2018 (Dillen, Crijns et Standaert, 2020[57]). La Belgique se caractérise en outre par une dynamique limitée du marché du travail, illustrée par la faiblesse des taux de transition de l’inactivité et du chômage vers l’emploi ainsi que des taux de transition d’emploi à emploi (Causa, Luu et Abendschein, 2021[58]).
Lier plus étroitement salaires et productivité au niveau des entreprises et des travailleurs
La réactivité des salaires aux écarts de productivité entre les entreprises d’un même secteur est faible, puisque les entreprises belges dont la productivité est supérieure de 10 % à celle des autres entreprises du secteur considéré versent des salaires qui ne sont supérieurs que de 2.7 % en moyenne, ce qui est inférieur au différentiel moyen observé dans la zone OCDE (Graphique 1.22, partie A). La productivité horaire est plus élevée dans les entreprises belges pour lesquelles un accord d’entreprise complète l’accord de branche (Garnero, Rycx et Terraz, 2020[59]). Des analyses empiriques de l’OCDE laissent à penser que l’atout constitué par la faible dispersion des salaires en Belgique a pour contrepartie une plus forte dispersion des taux de productivité et un redéploiement de la main-d’œuvre moins propice aux gains de productivité (OECD, 2019[4]). Autrement dit, les entreprises très productives versent des salaires inférieurs à ce que justifierait leur niveau de productivité élevé, tandis que les entreprises peu productives rémunèrent leurs salariés à un niveau supérieur à ce qu’elles devraient normalement pouvoir se permettre.
Il est probable que la forte centralisation des négociations salariales de branche contribue à cette situation. Cette centralisation sectorielle limite en effet les marges de manœuvre des entreprises en termes de fixation des salaires, et elle va donc vraisemblablement de pair avec un décalage plus marqué entre les salaires et la productivité pour l’ensemble des entreprises. Une augmentation des salaires constituerait un moyen pour les entreprises très productives d’attirer des travailleurs, d’accroître leur part de marché et de se développer. À l’autre extrémité du spectre, des salaires plus bas permettraient plus aisément aux entreprises peu productives de surmonter un épisode de fléchissement temporaire de la demande et réduiraient le risque qu’elles se transforment en « entreprises zombies ». En outre, cette situation pousse les entreprises productives à chercher des moyens de contourner le système en octroyant à leurs salariés des voitures de société gratuites et d’autres avantages accessoires non spécifiés dans les conventions collectives.
Il serait possible d’obtenir une plus grande flexibilité en passant à un système « décentralisé organisé » de négociation collective, fondé sur des accords-cadres sectoriels prévoyant explicitement une marge d’adaptation au niveau de l’entreprise ou des clauses dérogatoires applicables sous certaines conditions, tout en préservant un niveau élevé de coordination des salaires (Graphique 1.22, partie B ; (OECD, 2018[60])). Une solution envisageable résiderait dans des « accords tunnel » définissant une fourchette plus large entre normes minimales et maximales par secteur, qui laisseraient davantage de latitude pour la détermination des salaires au niveau de l’entreprise. Une autre option consisterait à permettre des exemptions plus fréquentes au principe de faveur par le biais de clauses dérogatoires, comme en Allemagne et en Autriche (OECD, 2019[4]). Selon le principe de faveur, un accord d’entreprise peut uniquement prévoir des dispositions plus favorables aux travailleurs que celles d’un accord de branche. Dans les systèmes décentralisés organisés, les partenaires sociaux décident dans quelles circonstances ce principe ne s’applique pas. Les partenaires sociaux ont également cette possibilité en Belgique, mais ils n’en font que très rarement usage. On pourrait envisager d'autoriser plus fréquemment les entreprises à déroger aux conventions collectives, en discussion avec les partenaires sociaux.
Améliorer l’environnement des entreprises
Les autorités pourraient renforcer la concurrence en réformant les procédures complexes liées à la réglementation, aux autorisations et aux permis, ainsi que la réglementation restrictive qui s’applique aux services professionnels (Graphique 1.23, parties A et B). Des mesures antérieures, notamment la réforme du droit des sociétés de 2019 et les initiatives prises au niveau régional pour faciliter l’obtention de permis, ont allégé les charges administratives. L’amélioration des pratiques en matière d’administration en ligne prévue dans les plans de relance devrait également apporter une pierre à l’édifice. Néanmoins, les recommandations formulées dans l’Étude économique de 2020, telles que l’application d’une règle de « consentement tacite » pour la délivrance de permis et d’autorisations et la poursuite de l’assouplissement des restrictions dans le secteur du commerce de détail, qui se caractérise par un cadre réglementaire restrictif fixant de manière rigide les horaires d’ouverture et les modalités des soldes saisonnières, restent pertinentes.
Les services professionnels et les professions artisanales demeurent lourdement réglementés, les professions d’agent immobilier et d’architecte figurant parmi les plus strictement réglementées dans la zone OCDE, à l’aune des indicateurs de réglementation des marchés de produits (RMP) de l’OCDE. La réglementation applicable aux comptables et aux comptables-fiscalistes a été assouplie depuis 2020. Les restrictions concernant la coopération entre professions, la commercialisation des services ainsi que la détention du capital et de droits de vote au sein des entreprises réduisent la concurrence dans d’autres services professionnels. Il est proposé dans le budget 2022 de réduire les frais de notaire liés aux transactions immobilières, qui figurent parmi les plus élevés de l’UE (EC, 2020[41] ; Price Observatory, 2021[61]). Une libéralisation plus générale des services professionnels est prévue par l’accord de coalition du gouvernement fédéral et devrait être mise en œuvre. Les obligations de formation, d’adhésion à une chambre professionnelle et d’assurance qui s’appliquent aux services professionnels devraient être encore assouplies. Malgré des pénuries de main-d’œuvre, tout particulièrement dans le secteur de la construction, qui devraient s’accentuer, les conditions d’entrée dans les professions artisanales et les services de construction demeurent strictes dans certaines régions. Les exigences de qualifications professionnelles relatives aux professions artisanales réglementées ont été supprimées en Flandre en 2018, elles ont été éliminées pour cinq professions en Wallonie, et elles sont en cours d’évaluation pour 26 professions dans la Région de Bruxelles-Capitale. Il faudrait poursuivre les réformes destinées à assouplir les règles d’entrée dans les professions artisanales et les services de construction.
Il est possible d’intégrer des analyses d’impact et des évaluations ex post dans le processus d’élaboration des politiques publiques et d’améliorer leur transparence, sachant que la Belgique est en deçà de la moyenne de l’UE dans ce domaine (Graphique 1.23, partie C). Systématiser le recours aux consultations, tant pour les textes législatifs que réglementaires dans l’ensemble des ministères et mettre en place une plateforme centrale sur laquelle seraient publiées toutes les consultations permettraient d’améliorer la transparence du système réglementaire. En outre, il n’est pas systématiquement requis, dans le cadre des analyses d’impact de la réglementation, d’identifier et d’évaluer d’autres solutions envisageables que l’option réglementaire privilégiée, ce qui peut amoindrir leur efficacité (OECD, 2021[62]). Des mesures récentes ont renforcé les ressources de l’Autorité belge de la concurrence, qui pourrait être impliquée dans l’analyse d’impact et l’évaluation des nouveaux textes législatifs et réglementaires.
Tirer le meilleur parti des réformes axées sur la transformation numérique
Récolter les fruits de l’adoption du numérique en termes de productivité nécessite de bonnes compétences numériques (Gal et al., 2019[63]). La Belgique est un des pays les plus avancés en matière d’adoption des technologies numériques par les entreprises, puisque 43 % d’entre elles utilisent des services d’informatique en nuage (cloud computing) et 23 % des données massives (big data), soit des proportions supérieures à la moyenne de l’UE, qui s’établit respectivement à 26 % et 14 %. Des mesures destinées à renforcer les compétences numériques – 59 % des entreprises déclarent avoir des difficultés à recruter des spécialistes des technologies de l’information et de la communication (TIC) – et à rehausser le taux de diplômés universitaires en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM) – 15 %, contre 23 % en moyenne dans la zone OCDE – pourraient sensiblement améliorer les gains de productivité découlant de la transformation numérique (voir le chapitre 2). Une augmentation de 10 points de pourcentage de la proportion d’actifs travaillant dans le domaine des STIM va de pair avec une augmentation de 2.5 % à 4 % de la productivité des entreprises en Belgique (Bijnens et Dhyne, 2021[64]).
Les politiques destinées à favoriser la transformation numérique devraient être spécifiquement axées sur les petites et moyennes entreprises (PME), qui représentent 69 % de l’emploi et 63 % de la valeur ajoutée. L’adoption des technologies numériques par les petites entreprises tend certes à être plus forte en Belgique que dans l’UE, mais l’écart entre petites et grandes entreprises est plus marqué en Belgique (Graphique 1.24Graphique 1.24, partie A). Globalement, le COVID-19 a eu un effet positif sur l’investissement en TIC en Belgique, mais variable suivant la taille des entreprises, ce qui pourrait accentuer les disparités actuelles (Graphique 1.24Graphique 1.24, partie B). La déduction fiscale dont bénéficient les entreprises en croissance ne s’appliquera plus qu’aux investissements numériques ou verts à partir de 2023, ce qui peut aider les PME innovantes.
La sécurité numérique est un domaine dans lequel les PME manquent de ressources et de compétences. En 2019, 20 % des entreprises belges ont été confrontés à des incidents de sécurité numérique, soit une proportion supérieure à la moyenne de l’OCDE, qui s’établissait à 14.8 % (OECD, 2021[65]). La proportion des entreprises belges ayant recours à des pratiques de gestion du risque de sécurité numérique est supérieure à la moyenne de l’OCDE, mais comme dans d’autres pays de l’OCDE, on observe un écart entre petites et grandes entreprises en ce qui concerne les outils les plus complexes (Graphique 1.24Graphique 1.24, partie C). Le gouvernement fédéral et les gouvernements des régions se sont dotés de plans pour la cybersécurité, et dans le cadre du plan de relance national, une enveloppe de 79 millions EUR est consacrée à l’élaboration d’outils de protection et à la mise en place d’un pôle de compétence en matière de cybersécurité. Cela contribuera au financement d’un cadre de gouvernance global en matière de cybersécurité, ce qui est une bonne chose. En effet, selon le dernier rapport relatif à l’Indice de cybersécurité dans le monde (GCI), à l’aune duquel la Belgique est globalement relativement bien classée (19e sur 175 pays évalués en 2020), ses structures organisationnelles présentent des lacunes. L’accent devrait être mis tout particulièrement sur le renforcement des capacités des PME. Le plan prévoit également de renforcer les capacités du ministère de la Défense, au sein duquel se trouve le pôle de spécialistes de la cybersécurité de l’administration belge. Un programme de formation plus général, s’appuyant par exemple sur le système d’enseignement et de formation professionnels (EFP), pourrait être envisagé pour étoffer le réservoir de talents en matière de sécurité numérique dans lequel peuvent puiser les entreprises, à l’image de ce qui est prévu en Espagne.
La disponibilité de services d’accès mobile et fixe à internet à haut débit de haute qualité, à des prix compétitifs, est essentielle pour la transformation numérique. Le poids relatif du télétravail est passé de 25 % en 2019 à 33 % en 2020 (sachant que la moyenne de l’UE s’établissait à 18.6 %), et on s’attend à ce qu’il augmente encore (Acerta, 2020[66]). Le développement des technologies numériques va aussi entraîner un accroissement du trafic de données, ce qui exigera l’adoption de mesures et de dispositions réglementaires pour promouvoir l’investissement et réduire les obstacles au déploiement des infrastructures.
Le nombre d’abonnements au haut débit fixe pour 100 habitants, y compris pour les connexions offrant un débit supérieur à 100 Mbit/s, est élevé, mais la part de la fibre dans l’ensemble des abonnements au haut débit fixe est relativement faible, et l’adoption du haut débit mobile est inférieure à la moyenne de l’OCDE. Cette part modeste de la fibre tient en partie à l’utilisation de réseaux câblés très performants, mais les futurs besoins technologiques (débits montants) accentuent l’urgence du passage à la fibre (OECD, 2021[67]). Le déploiement de la cinquième génération de communications mobiles (5G) a été retardé dans la plupart des pays de l’OCDE du fait de la pandémie, mais la Belgique est particulièrement à la traîne (Graphique 1.25). Le Plan national pour le haut débit fixe et mobile vise à assurer une connectivité à haut débit de haute qualité, caractérisée par un débit contractuel de 100 Mbit/s d’ici à 2025 et de 1 Gbit/s d’ici à 2030, pour l’ensemble des ménages, grâce à une cartographie de la couverture du réseau permettant d’identifier les zones blanches (2 % du territoire), qui permettra de faciliter le déploiement des services à haut débit et de stimuler l’investissement. Les investissements prévus dans la fibre optique et la 5G (une enveloppe de 100 millions EUR dans le cadre du plan de relance national et 66 millions EUR de crédits budgétaires fédéraux sur la période 2022-24) sont bienvenus, mais des financements publics supplémentaires seront nécessaires pour atteindre les objectifs définis dans le plan pour le haut débit.
Il faudrait lever les obstacles au déploiement efficace de la 5G. L’attribution des licences d’exploitation de fréquences (qui concerne dans l’Union européenne les « bandes pionnières pour la 5G ») a été retardée faute de consensus sur la conception du mécanisme de vente aux enchères de ces fréquences. En octobre 2021, le gouvernement a approuvé un arrêté royal sur la mise aux enchères du spectre 5G, en vue d’une organisation des premières enchères au deuxième trimestre de 2022, et a élargi la campagne d’information sur la 5G afin que les citoyens appréhendent mieux le processus et ses répercussions. Son déploiement efficace passera par la suppression de certains obstacles réglementaires, notamment des limites strictes relatives au rayonnement électromagnétique imposées au niveau des régions ou des communes. Certains seuils appliqués en Belgique, comme ceux en vigueur à Bruxelles, sont plus stricts que les lignes directrices de l’UE et figurent parmi les plus bas d’Europe (OECD, 2021[68]). Le plan de relance prévoit des réformes visant à modifier les limites de rayonnement électromagnétique, si des commissions régionales chargées d’examiner la question formulent des recommandations en ce sens. En octobre 2021, un projet de loi destiné à abaisser les limites de rayonnement électromagnétique a été soumis à consultation publique à Bruxelles, ce qui constitue une avancée bienvenue. Il faudrait que ces limites soient modifiées aussi rapidement que possible, afin de permettre un déploiement efficace de la 5G, une fois les enchères menées à bien.
Les mesures existantes de réduction des coûts de déploiement du réseau à haut débit devraient être prolongées. La Belgique a mis en place dans chaque région un guichet central électronique pour favoriser l’accès aux infrastructures existantes, et elle s’efforce également d’optimiser la coordination des travaux routiers et la répartition des coûts entre les différents opérateurs de réseau qui participent aux travaux de voirie conjoints (opérateurs de télécommunications, câblodistributeurs, gestionnaires de réseau électrique, sociétés de distribution d’eau, transports, etc.) (OECD, 2021[69]). Le déploiement de la fibre est favorisé par des accords de co-investissement, mais la difficulté de coordonner les travaux de creusement et d’ouverture de tranchées et l’inefficacité des procédures de règlement des litiges soulèvent des problèmes (EC, 2020[70]). La Flandre prévoit de faciliter le partage d’infrastructures en créant un opérateur d’infrastructures mobiles passives pour réduire les coûts et accélérer le déploiement des réseaux à haut débit, notamment en zone rurale. Il faudrait étoffer les initiatives de ce type destinées à réduire les obstacles au déploiement de la 5G (OECD, 2020[71]).
Le niveau élevé des prix des services d’accès à internet à haut débit et la forte concentration de ce marché, tant pour l’accès fixe que mobile (Graphique 1.26), pourraient tenir à la faiblesse de la concurrence dans le secteur des communications (EC, 2020[72]). D’après l’indice de restrictivité des échanges de services (IRES) de l’OCDE, le niveau des restrictions appliquées au secteur des télécommunications s’établit aux alentours de la moyenne de l’OCDE, mais il est nettement supérieur à celui observé dans les pays voisins. La réduction des obstacles à l’entrée sur le marché devrait s’accompagner de mesures facilitant les changements d’opérateur de communication pour les consommateurs. Le taux d’utilisation de la procédure « Easy Switch », qui facilite les changements d’opérateur depuis 2017 en permettant au nouveau prestataire de résilier les services souscrits par le consommateur auprès de son ancien fournisseur, est passé de 19.7 % à 23.4 % en 2020, mais il serait possible d’aller plus loin pour promouvoir cette procédure et faciliter son utilisation (BIPT, 2021[73]).
Les données et les technologies numériques peuvent jouer un rôle déterminant dans le réexamen du mode de fonctionnement du secteur public, l’amélioration de la qualité et du rapport coût-efficacité des services publics, l’élargissement de l’accès aux institutions publiques et le renforcement de la confiance des citoyens à leur égard (OECD, 2020[74]). L’administration numérique n’est pas très développée en Belgique dans certaines dimensions, telles que l’utilisation stratégique des données et des technologies numériques, l’accès des entreprises à des services de base en ligne, et l’utilisation par les citoyens des services publics numériques (Graphique 1.27Graphique 1.27). Des travaux de l’OCDE laissent à penser qu’une réduction de moitié de l’écart séparant la Belgique des pays les mieux classés en termes de recours à l’administration numérique pourrait se traduire par une augmentation de la productivité des entreprises (via l’adoption des technologies numériques) de 1.2 % au bout de trois ans (Sorbe et al., 2019[75]).
Les plans de relance sont axés à juste titre sur la transformation numérique du secteur public, et prévoient des projets à tous les niveaux de gouvernement. Les principales réformes consistent à faire passer au numérique le système de sécurité sociale et le système judiciaire, à mettre en place un portail numérique unique pour améliorer la gouvernance des données et faciliter leur partage et leur réutilisation via l’application du principe de la transmission unique d’informations (principe « une fois pour toutes »), à remettre à plat les procédures administratives et les services publics numériques, et à améliorer la passation de marchés publics en ligne. La Belgique a mis en place un cadre de gouvernance adapté pour l’administration numérique, par le biais de la Direction générale transformation digitale du Service public fédéral Stratégie et Appui (SPF BOSA). La Flandre s'est dotée d'une stratégie pour les données et la Wallonie a créé un service public numérique. Néanmoins, il manque toujours à la Belgique une stratégie cohérente et une architecture numérique couvrant les différents niveaux de gouvernement. Compte tenu du cloisonnement des initiatives numériques mises en œuvre dans l’ensemble des administrations publiques, il pourrait s’avérer difficile de récolter pleinement les fruits des réformes prévues. Il sera crucial de renforcer les compétences numériques des usagers (Chapitre 2), étant donné que les citoyens ayant un faible niveau d’études tendent à utiliser moins souvent les services publics numériques (OECD, 2020[71]). Il est également important d’étayer la demande de services publics numériques, en assurant par exemple aux usagers que leurs données personnelles sont protégées tout en étant utilisées de manière stratégique pour améliorer les services (OECD, 2019[76]).
Il est essentiel d’attirer des talents numériques et d’actualiser les compétences du personnel dans l’ensemble de l’administration publique pour accélérer son adoption des technologies numériques. Compte tenu des pénuries de compétences qui caractérisent la Belgique, le secteur public doit se montrer plus souple en matière de recrutement et de gestion de carrière pour attirer des travailleurs qualifiés. Le gouvernement prévoit d’évaluer les compétences numériques des agents publics et la palette de compétences numériques nécessaires, pour cerner les besoins de formation. Il faudrait que cette évaluation soit réalisée rapidement et utilisée pour créer des programmes de formation spécifiquement destinés à renforcer les compétences numériques des travailleurs du secteur public. Au-delà des compétences numériques de base, développer les compétences des agents publics dans d’autres domaines (tels que le leadership numérique, la gestion de projet et l’analyse de données) contribuerait à l’instauration d’une culture numérique pouvant étayer une transformation numérique plus profonde du secteur public. Ainsi, l’Académie du numérique de l’École de la fonction publique du Canada (EFPC) a été créée pour proposer à la fois des formations à caractère général et plus spécialisées, en présentiel et en ligne, aux fonctionnaires de tous niveaux (OECD, 2021[77]).
Une autre composante essentielle de l’administration numérique réside dans l’accès à des données publiques ouvertes, qui peut favoriser la participation sociale, ouvrir de nouvelles perspectives aux entreprises et promouvoir l’innovation, domaine dans lequel les résultats de la Belgique sont inférieurs à la moyenne (Graphique 1.27, partie D). Des portails de données ouvertes existent au niveau des régions, mais il est nécessaire d'en améliorer la cohérence. Plus spécifiquement, la Belgique est à la traîne en matière de promotion de la création de valeur publique via la réutilisation des données tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur public (par exemple par le biais de forums de discussion, ou en offrant la possibilité aux usagers de soumettre leurs propres données et éléments visuels). Dans le cadre du nouveau programme de transformation numérique, les autorités devraient s’attacher à rehausser les niveaux encore modestes d’association des parties prenantes externes et des agents publics pour favoriser leur réutilisation de données ouvertes, au moyen de nouveaux partenariats stratégiques, programmes de formation et manifestations (OECD, 2020[78]). En Estonie, la mise en place d’un cadre juridique relatif à la protection et à la sécurité des données a contribué à porter la proportion de personnes utilisant internet pour entrer en interaction avec les administrations publiques de 50 % en 2009 à 80 % en 2019 (OECD, 2020[79]). Il faudrait accorder une importance prioritaire à la mise en place d’un cadre efficace de gouvernance des données dans le secteur public, en promouvant l’adoption d’une approche fondée sur les données au sein des administrations publiques (Encadré 1.4).
Encadré 1.4. Cadre de gouvernance des données dans le secteur public : l’exemple de la Nouvelle-Zélande et de la Norvège
L’Office statistique de Nouvelle-Zélande (Statistics New Zealand) a élaboré un cadre de gouvernance des données pour favoriser de meilleures pratiques de gestion des données dans l’ensemble du secteur public. Un de ses piliers réside dans l’adoption d’une approche couvrant l’ensemble du cycle de vie des données, qui consiste à encourager les organismes et les agents publics à mener une réflexion plus stratégique concernant la gouvernance, la gestion, la qualité et la transparence de leurs données, sur toute la durée du cycle de vie de ces données. En Norvège, l’Agence pour la gestion publique et l’administration électronique (Difi, Direktoratet for forvaltning og IKT) a créé un modèle de gouvernance de l’information qui place la gestion des données du secteur public au cœur de sa transformation numérique, dans le cadre duquel les organismes publics norvégiens disposent d’un large éventail d’outils pour faire des données un actif stratégique dans une optique de prise de décisions et de réutilisation.
Source : (OECD, 2019[76]).
Il sera également essentiel de renforcer la transformation numérique du système judiciaire, comme cela avait été recommandé dans l’Étude économique de 2020 (OECD, 2019[80]). Compte tenu du manque de données judiciaires cohérentes, fiables et uniformes, il est difficile d’évaluer l’efficience du système judiciaire (EC, 2021[81]). Un système de gestion électronique des affaires a été mis en place en 2019, mais l’utilisation des outils et technologies numériques par les tribunaux reste limitée (Graphique 1.28 ; (EC, 2021[82])). Le plan de relance vise à améliorer la gestion des affaires et à automatiser la collecte des données, pour réduire le temps nécessaire au traitement des affaires, et à rehausser le taux de publication en ligne des jugements, afin de renforcer la sécurité juridique. Ces projets sont bienvenus et devraient s’accompagner d’un nouveau renforcement de la formation des juges aux TIC, afin de leur permettre de les utiliser efficacement.
La transformation numérique du système judiciaire peut également permettre d’améliorer les procédures d’évaluation et de favoriser l’utilisation des méthodes de règlement extrajudiciaire des litiges, qui reste limitée (Graphique 1.28). Chaque tribunal est tenu de préparer un rapport annuel d’activité en Belgique, mais il n’existe pas de système d’évaluation régulière (en termes de performances et de produits), pas d’indicateurs de performance et de qualité définis au niveau des tribunaux, et pas de lien entre les évaluations et la répartition des ressources au sein de chaque tribunal (CEPEJ, 2021[83]). Les outils numériques peuvent aussi permettre à la Belgique de créer des guichets uniques pour le règlement des litiges, qui permettraient aux usagers de centraliser les démarches effectuées à cet égard, notamment pour réunir des informations, soumettre des demandes et des documents, et faire appliquer les décisions rendues, comme c’est le cas dans la moitié des pays de l’OCDE (OCDE, à paraître).
Renforcer encore la lutte contre la corruption
Le niveau de maîtrise de la corruption se situe aux alentours de la moyenne de l’OCDE, mais en deçà de celui observé dans des pays comparables pour certaines dimensions (Graphique 1.29). Des mesures de prévention de la corruption sont généralement en place, mais des lacunes subsistent en ce qui concerne la prévention des conflits d’intérêts pour les ministres et leurs conseillers, la transparence de la déclaration de patrimoine, ainsi que les activités de lobbying (EC, 2021[81]). D’après les indicateurs de réglementation des marchés de produits (RMP) de l’OCDE, les groupes d’intérêts ne sont pas tenus de se faire inscrire dans un registre public. Des progrès ont été réalisés en matière de prévention des conflits d’intérêts grâce au Code de déontologie des mandataires publics de 2018, mais il faudrait aussi adopter un cadre déontologique pour l’ensemble des personnes occupant de hautes fonctions de l’exécutif (GRECO, 2020[84]), et y intégrer des règles concernant leurs relations avec des tiers, en particulier avec des lobbyistes.
Des mesures de transparence relatives au lobbying sont applicables aux ministres et à leur cabinet, mais elles ne s’appliquent pas aux députés ni aux agents publics, contrairement aux dispositions en vigueur dans la majorité des pays de l’OCDE (OECD, 2021[85]). Par conséquent, il faudrait instaurer des normes et des règles claires relatives à la manière dont les membres du Parlement et les personnes occupant de hautes fonctions de l’exécutif gèrent leurs relations avec des lobbyistes et d’autres tiers (GRECO, 2021[86]). Certains pays (le Canada et la France) utilisent des outils numériques pour améliorer la qualité de la communication d’informations et de la transparence dans ce domaine. Enfin, le droit belge ne prévoit aucune sanction, y compris disciplinaire ou administrative, pour les lobbyistes et les agents publics qui enfreignent les normes et les obligations de divulgation relatives aux activités de lobbying (OECD, 2021[85]). Même si elles restent peu appliquées dans les pays où elles existent, des sanctions pourraient jouer un rôle dissuasif, et les autorités belges devraient envisager leur mise en place.
Une plus grande importance devrait être accordée à la répression des infractions de corruption commises par des ressortissants et des entreprises belges à l’étranger. Certaines réformes de la législation se font toujours attendre, notamment concernant le régime de prescription de l’infraction de corruption et la protection des lanceurs d’alerte. Il existe deux régimes sectoriels de protection des lanceurs d’alerte dans le secteur privé, liés aux infractions à la législation financière et aux règles relatives au blanchiment de capitaux. Il existe pour les membres des administrations publiques fédérale et flamande des procédures formelles de dénonciation d’une atteinte suspectée à l’intégrité au sein d’une autorité administrative fédérale, mais pas pour les personnes signalant des actes présumés de corruption d’agent public étranger commis par un ressortissant ou une entreprise belge (OECD, 2013[87] ; OECD, 2018[88]). La transposition dans le droit interne de la directive de l’UE sur la protection des lanceurs d’alerte a été reportée au deuxième trimestre de 2022 et devrait être menée à bien aussitôt que possible.
Tableau 1.9. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant le marché du travail et la productivité
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2020 |
---|---|
Rationaliser le système d’autorisations et de permis, et réduire le nombre de restrictions dans certains services professionnels. |
Un certain nombre de restrictions applicables aux comptables et aux comptables-fiscalistes agréés ont été allégées à partir de septembre 2020, et le code de déontologie de l’Institut professionnel des comptables et fiscalistes agréés (IPCF) a été adapté en 2021 en ce qui concerne l’exercice d’activités pluridisciplinaires. En 2021, il est devenu possible de créer une entreprise en ligne et un certain nombre d’initiatives régionales ont été adoptées pour faciliter l’obtention de permis, comme le programme MyPermit dans la Région de Bruxelles-Capitale et les solutions « e-desk » destinées aux entrepreneurs en Flandre. |
Du fait de leur complexité et de leur coût, il arrive que les procédures d’insolvabilité ne soient pas adaptées aux besoins des petites et moyennes entreprises (PME). |
En 2021, les autorités ont instauré en matière d’insolvabilité une procédure d’accord préparatoire destinée à rendre plus accessible la procédure de réorganisation judiciaire, revu à la baisse les conditions d’accès à ladite procédure de réorganisation judiciaire, et assoupli les modalités de désignation des mandataires de justice. |
Améliorer l’efficience des aides publiques à la recherche-développement (R-D) des entreprises en trouvant un juste équilibre entre aides directes et indirectes. |
En 2021, la Flandre a procédé à un examen de l’efficacité et de l’additionnalité de son dispositif d’aide à la R-D, la Wallonie a simplifié et rationalisé ses mesures de soutien à la R-D, et la Région de Bruxelles-Capitale a amélioré la composition de sa palette d’instruments de financement de la R-D. |
Recourir davantage aux outils statistiques pour repérer les demandeurs d’emploi risquant de basculer dans le chômage de longue durée, afin d’élaborer des programmes actifs du marché du travail spécifiquement adaptés à leurs besoins. |
En Flandre, la portée du programme NextBestSteps a été élargie, et en Wallonie, un modèle d’apprentissage automatique a été élaboré pour évaluer la distance à l’emploi des demandeurs d’emploi. |
Instaurer des allocations de formation individuelles et prévoir des aides ciblées pour les travailleurs défavorisés, prenant par exemple la forme d’heures de formation plus nombreuses et/ou d’obligations de financement plus importantes. |
L’accord de février 2022 sur la réforme du marché du travail prévoit l’instauration d’un droit individuel à la formation, qui sera de trois jours par travailleur en 2022, de quatre jours en 2023 et de cinq jours à partir de 2024. |
Renforcer les incitations au travail pour les travailleurs faiblement rémunérés en instaurant des prestations liées à l’exercice d’un emploi. |
Un régime plus généreux de déductibilité fiscale des frais de garde d’enfants s’appliquera à partir de l’année d’imposition 2022. En 2021, la Flandre a décidé de mettre en place un dispositif d’incitation au travail sous la forme d’une prime pour l’emploi (« jobbonus »), qui complète le salaire des personnes faiblement rémunérées (salaires allant jusqu’à 2 500 EUR par mois). |
Pour les chômeurs de longue durée, prévoir des prestations sous condition de ressources plutôt que des prestations uniformes. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Pour faire avancer la transition verte et énergétique, des efforts ambitieux s’imposent
Les résultats obtenus par la Belgique sont mitigés en ce qui concerne la réalisation de ses objectifs énergétiques et climatiques pour 2020. L’objectif de réduction des émissions non couvertes par le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SEQE) de l’UE sera atteint en vertu des règles comptables de l’Union européenne qui autorisent les États membres à utiliser les réductions d’émissions excédentaires enregistrées les années où leurs émissions ont été inférieures à leur objectif annuel pour combler les déficits enregistrés les années où leurs émissions ont été au contraire supérieures à leur objectif annuel. Les objectifs fixés en matière d’efficacité énergétique n’ont pas été atteints et la réalisation de l’objectif consistant à porter à 13 % la part des énergies renouvelables a nécessité des transferts statistiques de quantités d’énergie produite dans d’autres États membres de l’UE.
La Stratégie à long terme de la Belgique vise à tenir les objectifs de l’Accord de Paris, mais elle ne comprend pas d’objectif de neutralité climatique au niveau national d’ici à 2050. Des mesures supplémentaires (représentées par les lignes tiretées sur le graphique ci-après) seront nécessaires pour atteindre les actuels objectifs de réduction des émissions non couvertes par le SEQE-UE fixés pour 2030, étant donné que le Plan national énergie-climat (PNEC) de 2019 ne prévoit qu’une légère baisse au cours de la période 2020-30 sur la base des mesures existantes (correspondant aux lignes pointillées) (Graphique 1.30, Partie A ; (OECD, 2021[89])). En partie du fait de la composition sectorielle de l’économie (caractérisée par un poids relatif important des branches d’activité polluantes) et de sa dépendance à l’égard des combustibles fossiles, l’intensité d’émission de GES est relativement forte dans les transports, le logement et l’industrie, ce qui laisse entrevoir des possibilités de réforme (Graphique 1.30, partie B). Un certain nombre d’initiatives, évoquées ci-après, ont mis en évidence des réformes nécessaires (taxe sur le carbone, par exemple) et des besoins d’investissement, mais leur concrétisation se fait attendre. Les récentes évolutions ont souligné l’urgence d’agir en matière de planification à long terme et de sécurité des investissements.
Il est heureux que les plans de relance fassent une large place à la rénovation des bâtiments (chapitre 2) et aux solutions de mobilité, étant donné que les secteurs du transport et du bâtiment produisent la majeure partie des émissions non couvertes par le SEQE-UE. Il est cependant nécessaire d'investir plus largement et d’améliorer la coordination entre les différents niveaux de gouvernement ainsi que de garantir l’efficacité des investissements publics. Ainsi, diverses initiatives régionales et fédérales visent à promouvoir la mobilité durable (budget mobilité, premier plan d’action fédéral destiné à promouvoir l’utilisation de la bicyclette, nouveaux investissements dans les infrastructures ferroviaires et les transports, programme Mobilidata). Les préférences des régions diffèrent cependant en matière de tarification routière applicable aux voitures (Études économiques de l’OCDE : Belgique 2020). Le Comité exécutif des ministres de la Mobilité n’a pas défini de vision cohérente et coordonnée de la mobilité durable pour les différentes entités fédérées (OECD, 2021[89]), même si des initiatives ont été prises pour harmoniser les politiques publiques dans certains domaines, comme la Vision du rail 2040, ou la vision de la mobilité en tant que service (MaaS, Mobility as a Service). Il convient de renforcer le rôle et les capacités d’évaluation de ce comité, dans la mesure où l’analyse coûts-avantages des projets d’infrastructure est réalisée au coup par coup et les entités publiques appliquent leurs propres pratiques à leur niveau (Comité stratégique, 2018). Les projets d’investissements publics devraient systématiquement faire l’objet d’une analyse coûts-avantages réalisée conformément aux lignes directrices de l’UE, intégrant au moins la trajectoire d’évolution à long terme des émissions de CO2 et les émissions évitées.
La politisation des débats entrave ou retarde la conclusion d’un accord et la définition d’une trajectoire d’évolution plus cohérente permettant d’atteindre les objectifs nationaux. D’après le Pacte national pour les investissements stratégiques de 2018 (Tableau 1.10), les besoins d’investissement de la Belgique au cours de la période 2019-30 sont considérables dans les domaines de l’énergie (60 milliards EUR) et de la mobilité (22-27 milliards EUR). Cependant, la cohérence entre ces besoins et les mesures prévues dans le Plan national énergie-climat (PNEC) n’est pas évidente (EC, 2020[90] ; NCC, 2019[91]). L’investissement public et la planification des infrastructures à long terme peuvent non seulement exercer un effet d’entraînement sur les capitaux privés et contribuer à la transition écologique, mais aussi permettre à la fois de remédier aux problèmes de croissance de la productivité et de répartition des ressources évoqués précédemment. Les politiques climatiques devraient déboucher sur la création de quelque 60 000 emplois supplémentaires en Belgique (soit une augmentation représentant jusqu’à 1 % de l’emploi total) (EC, 2020[41]). Il est donc important d’intégrer les futurs besoins de compétences et les implications de la transition écologique pour l’action publique dans les activités de planification et d’anticipation des compétences en Belgique, et de veiller à ce que les politiques actives du marché du travail intègrent des formations permettant d’acquérir les compétences requises par les emplois verts, comme au Danemark (D’Arcangelo et al., 2022[92]). L'étude actuellement menée par le gouvernement fédéral sur les enjeux de la décarbonation en termes d'emploi et de formation est une initiative bienvenue.
Tableau 1.10. Investissements nécessaires pour atteindre les objectifs énergétiques et climatiques de la Belgique à l’horizon 2030
Domaine |
Recommandations |
(milliards EUR) |
|
---|---|---|---|
Secteur public |
Secteur privé |
||
Rénovation des bâtiments |
Investir massivement dans la rénovation des bâtiments publics pour améliorer leurs performances énergétiques. |
8.5 |
8.5 |
Mix électrique |
Continuer de garantir la sécurité d’approvisionnement à des prix compétitifs, poursuivre le développement des énergies renouvelables et réduire encore leur coût. |
0 |
19 |
Renforcement des réseaux |
Investir dans les réseaux de transport et de distribution pour permettre une transition équitable et plus flexible ; soutenir le développement de réseaux intelligents. |
0 |
17 |
Développement du stockage |
Déployer la capacité de stockage des véhicules, des maisons et des entreprises, attirer un producteur de batteries en Belgique, développer le stockage par pompage. |
0 |
5 |
Déploiement des carburants alternatifs |
Veiller à ce qu’il y ait suffisamment de bornes de recharge des véhicules électriques, soutenir la recherche-développement et démonstration (RD-D) dans l’hydrogène et le gaz vert. |
0 |
0.3 |
Démantèlement nucléaire et recherche en gestion des déchets |
Soutenir les projets visant à renforcer les connaissances des entreprises belges en matière de démantèlement via le cluster ABCD (Advanced Belgian Cluster on Decommissioning), recherches sur le traitement efficace des déchets nucléaires. |
0.7 |
1 |
Entretenir et développer des réseaux et des services de transport intégrés |
Entretenir et assurer la maintenance des infrastructures existantes, améliorer l’accès aux villes, notamment via des réseaux ferroviaires suburbains, des plateformes et des pistes cyclables intégrées, améliorer l’accès ferroviaire aux ports et aux parcs industriels et moderniser les écluses. |
17.2-20.5 |
2.8-3.5 |
Faciliter les solutions de mobilité intelligente |
Faciliter la mobilité « porte-à-porte », déployer des systèmes de transport intelligents pour réduire la congestion, renforcer la sécurité routière et faire diminuer les émissions. |
1.5-2 |
0.1 |
Gérer la demande de transport |
Promouvoir l’aménagement du territoire et le réaménagement des sites industriels, créer des bureaux satellites et des espaces de travail partagés (coworking), mettre en place une tarification intelligente des services de mobilité. |
0 |
2 |
Établir un cadre de soutien |
Création de l’Observatoire national de la mobilité, élaboration d’un agenda multimodal pluriannuel d’investissement comprenant une vision claire des investissements et des structures de gouvernance spécifiques au niveau adéquat (métropolitain, régional ou national). |
0 |
< 0.1 |
Total |
28-32 |
56-57 |
|
84-88 |
Note : Ce tableau fournit des estimations réalisées par un groupe d’experts qui a présenté son rapport aux autorités fédérales et régionales en 2018. Ce Comité stratégique a été mis sur pied à l’initiative du précédent gouvernement fédéral pour réunir toutes les parties prenantes aux investissements stratégiques autour d’une vision commune et d’objectifs à atteindre à l’horizon 2030.
Source : Comité stratégique (2018), Pacte national pour les investissements stratégiques.
Une vision à long terme des objectifs et des politiques énergétiques et climatiques commune aux gouvernements fédéral et régionaux offrirait une sécurité à long terme aux parties prenantes pour la réalisation des investissements nécessaires à la décarbonation. La mise à jour du PNEC en 2023-24 devrait se traduire par une trajectoire claire et plus cohérente de réalisation des objectifs et des ambitions à long terme du pays. Dans certains domaines, la contribution des différents efforts régionaux à la réalisation des objectifs nationaux est peu claire (EC, 2020[90]). Depuis 2002, la Commission nationale climat (CNC), notamment par le biais d’un groupe de pilotage commun constitué avec le Groupe de concertation État-régions pour l’énergie (CONCERE), coordonne les efforts des régions et de l’État fédéral, qui ont des compétences partagées en matière de mise en œuvre et de suivi des politiques et mesures (Tableau 1.11), mais la CNC ne remplit pas son rôle de manière efficace (OECD, 2021[89]).
Il faudrait déterminer rapidement comment sera réparti l’effort de réalisation des objectifs nationaux fixés pour 2030. Après l’adoption des objectifs de réduction des émissions dans les secteurs non visés par le SEQE-UE à l’horizon 2020, il a fallu sept ans pour parvenir à un accord sur le partage de la charge (UNFCCC, 2019[93]). Le nouvel accord de partage de l'effort devrait reposer sur des méthodes et des mécanismes transparents, et être conclu en temps utile pour que l’on évite des renégociations durant la période de mise en œuvre et afin qu’il soit lisible pour toutes les parties intervenant dans sa mise en œuvre (AIE, à paraître). Au Royaume-Uni, des objectifs doivent être définis par le gouvernement à partir des conseils formulés par un organe d’experts indépendant, le Comité sur le changement climatique (CCC, Climate Change Committee), qui joue également un rôle de suivi et rend compte au Parlement des progrès accomplis vers la réalisation de ces objectifs. Le caractère permanent et l’indépendance du CCC ont contribué à garantir une focalisation sur des objectifs à long terme et constitué une source d’inspiration pour le cadre institutionnel mis en place dans d’autres pays de l’OCDE, et la Belgique devrait envisager de créer un organe similaire, comme cela avait été recommandé dans le dernier Examen environnemental de l’OCDE consacré à la Belgique. À moyen terme, la possibilité d’adopter une loi nationale sur le climat pour renforcer la coopération institutionnelle en matière de politique énergétique et climatique, comme l’ont recommandé des experts (SPF, 2018[94]), pourrait être étudiée, mais la démarche risque de s’avérer difficile dans la mesure où elle exigera sans doute de modifier la constitution.
Tableau 1.11. La répartition des compétences entre les différents niveaux de gouvernement
|
État fédéral |
Régions |
---|---|---|
Environnement |
Normes de produits, protection contre les radiations, transit de déchets, protection du milieu marin, la plupart des impôts. |
Aménagement du territoire, nature et environnement, protection des sols, de l’eau et de l’air (gestion des déchets, etc.), subventions environnementales et permis d’environnement. |
Énergie |
Production et transport d’électricité, transport de gaz et de pétrole, énergie nucléaire, sécurité des approvisionnements énergétiques (électricité, gaz naturel et pétrole), politique en matière de prix et protection des consommateurs, production d’énergie en mer et activités de recherche-développement et démonstration (RD-D) énergétiques en rapport avec ses compétences. |
Distribution d’électricité et de gaz naturel, réglementation des marchés de détail du gaz et de l’électricité, énergies renouvelables (hors éolien en mer), efficacité énergétique et émissions de gaz à effet de serre (sauf en ce qui concerne les bâtiments et parcs de véhicules fédéraux), transport ferroviaire, politique relative aux produits et mesures budgétaires. |
Transports |
Immatriculation des véhicules, mise en œuvre et contrôle du respect de la réglementation relative aux transports aérien et ferroviaire, fiscalité des combustibles fossiles, promotion des biocarburants, fiscalité des voitures de société. |
Transports (sauf transports ferroviaires nationaux, maritimes, aériens et automobiles), plans de mobilité destinés à promouvoir les transports publics, sécurité routière et gestion des routes, réglementation des voies navigables et aménagement urbain et rural. |
Note : Ce tableau ne couvre pas tous les domaines de l’action publique ; il ne recense que les principales compétences et n’est donc pas exhaustif.
Définir et communiquer une trajectoire à long terme pour la fiscalité du carbone, comme l’ont fait certains autres pays de l’UE, permettrait d’orienter les entreprises et les ménages vers des sources d’énergie plus respectueuses du climat. La Belgique devrait réformer sa fiscalité du carbone à moyen terme, une fois que l'envolée actuelle des prix de l'énergie sera apaisée. En outre, cette réforme devra être réalisée dans le contexte de propositions et d’initiatives concernant l’ensemble de l’UE, notamment de celles consistant à élargir le système de tarification du carbone aux secteurs du transport routier et du bâtiment dans le cadre du programme « Ajustement à l’objectif 55 ».
Il n’existe pas de dispositif d’imposition explicite du carbone en Belgique, en dehors du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE). Hormis dans le domaine du transport non professionnel, la consommation de combustibles fossiles n’est que peu taxée, voire pas du tout, y compris lorsque les émissions correspondantes échappent à la tarification découlant du SEQE-UE, sachant que l’application de tels prélèvements n’est pas imposée par la législation de l’UE. En conséquence, en 2018, l’essentiel des émissions de CO2 était tarifé à un niveau inférieur à 60 EUR, qui est l’estimation médiane du coût du carbone en 2020 et son estimation basse en 2030, et supérieur à son coût actuel (Graphique 1.31, parties A et B). Il conviendrait donc de relever sensiblement le tarif des émissions de CO2 à moyen terme, en suivant un calendrier prévisible et en assurant une tarification égale des externalités climatiques imputables aux émissions de CO2, afin de garantir l’efficience économique des réductions d’émission. Appliquer à l’ensemble des émissions de GES un prix minimum uniforme reflétant l’évolution des prix dans le cadre du SEQE-UE contribuerait à les réduire de manière économiquement efficiente.
Comme dans les autres pays de l’OCDE, il est nécessaire d’atténuer les répercussions sur les ménages modestes des mesures fiscales prises pour appliquer une telle tarification (Cornille et al., 2021[95] ; Burggraeve, De Mulder et De Walque, 2020[96]). En Suisse, par exemple, le projet de loi concernant la taxe sur la CO2 adopté en 2018 prévoyait la redistribution aux ménages et aux entreprises de deux tiers environ du produit de cette taxe (D’Arcangelo et al., 2022[92]). Le débat national sur la tarification du carbone a mis en évidence des solutions envisageables, prenant notamment la forme de transferts sociaux ciblés et d’investissements publics destinés à soutenir la transition vers une économie bas carbone. Il conviendrait d’y donner suite (Encadré 1.5).
Les subventions aux combustibles fossiles figurent parmi les plus élevées de l’UE (Graphique 1.31, partie C), ce qui nuit au signal-prix du carbone, dissuade les agents économiques d’utiliser de manière efficiente les ressources énergétiques et contribue à la mauvaise qualité de l’air. L’inventaire des subventions aux énergies fossiles dressé récemment par les autorités fédérales est bienvenu (FPS_Finance, 2021[97]), et les projets d’élimination progressive de ces subventions qui figurent dans le Plan national énergie-climat (PNEC) de 2019 devraient être mis à exécution. Une approche graduelle devra être adoptée pour réduire au minimum les réactions politiques hostiles et le risque de retour en arrière qui accompagne souvent les réformes de ce type (Elgouacem, 2020[98]). Par exemple, il peut être utile de mettre en place un mécanisme multipartite pour suivre et soutenir la réforme des subventions préjudiciables à l’environnement, comme en France (OECD, 2021[89]).
Encadré 1.5. Le débat national sur la tarification du carbone
En 2017, le gouvernement fédéral a lancé un débat national sur les modalités potentielles de mise en œuvre d’une tarification du carbone dans les secteurs non couverts par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE), en s’appuyant sur un échange approfondi entre des experts belges et étrangers issus des secteurs public et privé, ainsi que du monde universitaire et syndical. Les options envisagées consistaient à instaurer un prix du carbone sous la forme d’une composante additionnelle des droits d’accise, en privilégiant le cas échéant un système de tarification routière dans le secteur des transports. Trois trajectoires de prix partant de 10 EUR/t CO2 en 2020 et aboutissant respectivement à 40, 70 et 100 EUR/t CO2 en 2030 ont été examinées. L’analyse a montré que l’impact de la hausse du prix du carbone pouvait être acceptable, surtout en cas d’utilisation des recettes fiscales supplémentaires (pouvant atteindre 2.6 milliards EUR par an en 2030 en cas de tarification à 70 EUR/t CO2) pour compenser les effets négatifs potentiels et financer des mesures complémentaires, et une feuille de route pour la réforme a été présentée. Un sondage a mis en évidence une adhésion potentiellement forte de la population belge à la tarification du carbone, pour autant qu’elle s’accompagne de mesures compensatoires.
Source : (NDCP, 2018[99]) ; (OECD, 2021[89]).
Compte tenu de la guerre en Ukraine et de la hausse des prix de l’énergie, l’engagement de mettre fin progressivement à la production d’électricité nucléaire d’ici à 2025 a été reconsidéré. Le gouvernement fédéral a décidé en mars 2022 de prendre les mesures nécessaires en vue de prolonger de dix ans la durée de vie de 2 gigawatts (GW) de capacités nucléaires. Pour sortir progressivement du nucléaire, il faudra investir massivement dans la production d’électricité, les interconnexions transfrontalières, les réseaux intelligents, le stockage de l’énergie et la participation active de la demande, car le nucléaire représente une part considérable de la production d’électricité en Belgique (Graphique 1.32). Pour garantir son approvisionnement en électricité, la Belgique a mis en place un mécanisme de rémunération de capacité (CRM), qui, sur la base d’enchères, apportera un soutien au déploiement de nouvelles capacités de production et au maintien des capacités existantes. Ce délai supplémentaire devrait être utilisé pour définir clairement l’orientation de l’action publique en matière d’énergie nucléaire, renforcer la sécurité des investissements et favoriser l’investissement privé dans les capacités destinées à se substituer au nucléaire. Il y a donc lieu de se féliciter de l’annonce simultanée d’un train de mesures comprenant l’adoption d’incitations fiscales destinées à renforcer l’électrification des transports, une accélération de la mise en place et une augmentation des capacités de production d’énergie éolienne en mer, une amélioration des interconnexions électriques, une accélération de la mise en place d’une dorsale pour le transport de l’hydrogène, et la réduction des obstacles administratifs et techniques au déploiement des énergies renouvelables (1.2 milliard EUR).
Pour que la sortie progressive du nucléaire se fasse sans heurts comme convenu par le gouvernement fédéral en mars 2022, il sera important de garantir la sécurité de l’approvisionnement en électricité et d’élaborer des plans d’urgence. Des autorisations régionales seront nécessaires pour que puissent être menés à bien en temps voulu des projets conditionnant la réalisation des objectifs assignés au CRM, or les délais d’octroi de ces autorisations peuvent être source de retards. Compte tenu du temps supplémentaire dont elles disposent pour se préparer, les autorités devraient identifier et atténuer ces risques et établir des scénarios clairs pour maintenir une production adéquate après la sortie progressive du nucléaire dans l’hypothèse où le CRM ne se traduirait pas par des investissements suffisants. La mise en service potentielle de nouveaux moyens de production fonctionnant au gaz pour compenser l’arrêt progressif des centrales nucléaires ferait sans doute augmenter les émissions. La neutralité carbone des nouvelles centrales électriques doit être assurée d’ici à 2050 en vertu d’un arrêté royal, mais il pourrait être utile d’établir des plans plus précis afin d’atténuer les répercussions climatiques de celles qui fonctionnent au gaz et de fournir des orientations aux investisseurs (AIE, 2022[100]).
Tableau 1.12. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant l’environnement et l’énergie
Recommandations des Études antérieures |
Mesures prises depuis 2020 |
---|---|
Mettre en place une taxe sur le carbone pour les secteurs qui ne sont pas soumis au système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE), et élaborer des mesures d’accompagnement à court terme pour les ménages pauvres les plus touchés. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Envisager de supprimer le régime fiscal préférentiel appliqué aux voitures de société, ou proposer d’autres options, par exemple le recours à des véhicules moins polluants. |
Le régime d’imposition favorable des voitures de société sera limité aux véhicules à émissions nulles achetés ou loués à partir de 2026. Le budget mobilité de 2021 et le premier plan d’action fédéral destiné à promouvoir l’utilisation de la bicyclette visent à favoriser le recours à d’autres modes de déplacement que les voitures particulières (de société) |
Mettre en place des péages de décongestion routière, par exemple aux environs de Bruxelles et d’Anvers, avec une différenciation temporelle suffisante pendant les périodes de pointe. |
Des régions ont réalisé des analyses complémentaires sur leur méthode privilégiée pour remédier aux problèmes d’encombrement et les taxes de circulation/sur les véhicules. La Flandre a étudié la possibilité d’instaurer des péages routiers (différenciés) pour les véhicules utilitaires légers, tandis que la Région de Bruxelles-Capitale a approuvé le projet SmartMove (qui vise à mettre en place une taxe kilométrique de décongestion à Bruxelles), mais aucun accord interrégional n’a été conclu. |
Accélérer le déploiement des compteurs électriques intelligents pour faciliter la mise au point de solutions de gestion de la demande. |
La Flandre s’est fixé pour objectif un taux de déploiement de 80 % d’ici à 2024 et un déploiement complet à l’horizon 2029. La Wallonie a approuvé les modalités d’octroi aux clients résidentiels de primes destinées à couvrir les frais d’installation d’un compteur double flux en 2021. La Région de Bruxelles-Capitale est en train de revoir ses ordonnances relatives à l’organisation du marché de l’électricité et du marché du gaz, y compris s’agissant des compteurs intelligents. |
Tableau 1.13. Recommandations concernant les politiques macroéconomiques et structurelles
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
---|---|
Assurer une reprise vigoureuse, résiliente et régulière |
|
Le taux de vaccination est élevé, mais de nouvelles vagues de contaminations plus fortes pourraient créer de nouvelles difficultés. |
Poursuivre les efforts déployés pour conserver un taux de vaccination élevé conformément aux lignes directrices internationales. |
Le rebond économique consécutif à la pandémie a été rapide, mais les risques pesant sur la reprise ont été exacerbés par la guerre en Ukraine |
Veiller à ce que tout soutien budgétaire accordé aux ménages et aux entreprises vulnérables subissant le contrecoup des prix élevés de l’énergie soit bien ciblé et temporaire. |
Dans le contexte du renforcement de l’inflation, il existe un risque que l’indexation automatique des salaires amoindrisse la compétitivité. |
Veiller à ce que le mécanisme correctif intégré dans le mécanisme de fixation des salaires soit rigoureusement appliqué pour empêcher l’apparition d’écarts de salaire avec les pays voisins. Évaluer les effets de la réforme du mécanisme de fixation des salaires sur la compétitivité, l’emploi et l’inflation. Mettre en place un mécanisme plus flexible, garantissant tout de même la coordination des salaires, si cette évaluation montre que la règle d’indexation ne prend pas en compte la conjoncture. |
Les investissements prévus dans le cadre des plans de relance pourraient être retardés par la lenteur des procédures régionales d’octroi de permis. |
Concentrer en début de période la réforme des procédures d’octroi des permis de bâtir et d’environnement, afin de garantir une mise en œuvre efficace et en temps voulu des plans de relance. |
La Belgique a amélioré ses politiques publiques pour remédier aux problèmes de solvabilité des entreprises viables et faciliter la sortie du marché de celles qui ne le sont pas, mais certaines lacunes perdurent. |
S’appuyer encore sur les compétences du secteur privé pour garantir que les aides directes provenant des fonds publics de solvabilité bénéficient à des entreprises viables. Transposer rapidement la directive de l’UE sur l’insolvabilité dans le droit interne. |
Les outils macroprudentiels en place fonctionnent bien, mais la hausse des prix de l’immobilier d’habitation et des ratios prix des logements/revenu, ainsi que la part importante des prêts immobiliers dans l’ensemble des crédits, pourraient créer des risques pour la stabilité financière. |
Continuer à suivre de près les risques macrofinanciers liés au secteur de l’immobilier résidentiel et commercial, et renforcer les dispositifs macroprudentiels si nécessaire. |
Renforcer l’efficacité de la politique budgétaire |
|
Le soutien budgétaire apporté à l’économie pendant la pandémie était adapté, mais il a entraîné une augmentation de la dette publique d’environ 10% depuis 2019. Le niveau des dépenses publiques est l’un plus élevés de la zone OCDE. Les lacunes du cadre budgétaire peuvent amoindrir l’efficacité avec laquelle serait mise en œuvre une stratégie budgétaire à moyen terme. Il est possible d’améliorer l’efficience des dépenses publiques, de manière à dégager des marges de manœuvre pour financer des investissements publics propices à la croissance et remédier aux problèmes budgétaires à moyen terme. |
Commencer à réduire les dépenses publiques et le ratio dette publique/PIB grâce à une stratégie d’assainissement budgétaire à moyen terme, fondée sur des examens des dépenses. Renforcer le cadre budgétaire fondé sur des règles, par exemple en mettant en place une budgétisation pluriannuelle incluant une règle de dépenses. Accroître la visibilité des recommandations budgétaires non contraignantes du Conseil supérieur des finances (CSF) en renforçant la transparence de ses évaluations de la viabilité de la dette à tous les niveaux de gouvernement, selon une méthodologie uniforme. Procéder à des analyses coûts-avantages et à des examens des dépenses en employant des méthodologies communes dans les différents domaines de l'action publique et aux différents niveaux de gouvernement, et les relier aux cadres de dépenses à moyen terme ainsi qu'aux processus budgétaires annuels de façon à abaisser progressivement les dépenses publiques. Envisager de mettre œuvre un cadre de budgétisation axé sur la performance, assorti d’indicateurs et d’un mécanisme de suivi en cours d’exercice. |
Les prélèvements sur le travail sont toujours prépondérants dans la structure fiscale, et il est possible d’élargir la base d’imposition, qui est érodée par un certain nombre de dépenses fiscales régressives. Le fait que le régime d’imposition des revenus financiers varie selon leur nature accentue la mauvaise affectation du capital, et les plus-values réalisées par les personnes physiques ne sont pas imposées. |
Réduire les dépenses fiscales qui ne bénéficient pas aux ménages à faible revenu, pour financer un allègement de la fiscalité du travail en faveur des bas salaires. Dans le cadre de la vaste réforme fiscale préparée en détail, envisager de mettre en place un barème d’imposition progressif pour l’imposition de toutes les formes de revenu du capital. |
L’âge effectif de sortie du marché du travail est bas. Les pensions des travailleurs indépendants ont été revues à la hausse sans augmentation correspondante de leurs taux de cotisation. Le système de retraite est fragmenté, et se compose de régimes qui diffèrent selon les catégories de travailleurs. La réforme des pensions devrait s’accompagner d’une augmentation du taux d’emploi des seniors, mais leur taux de participation à la formation tout au long de la vie est faible. |
Mettre en place des décotes (minorations de pension) et des surcotes (majorations de pension) qui s’appliqueraient, respectivement, en cas de départ avant et après l’âge légal de la retraite. Rehausser les taux de cotisation de retraite des travailleurs indépendants. Continuer d’harmoniser les régimes de retraite des travailleurs du secteur privé et du secteur public. Renforcer la participation des seniors à la formation tout au long de la vie, en leur fournissant des services orientation pour les aider à faire des choix éclairés en matière de formation. |
Renforcer la productivité et favoriser le redéploiement des ressources |
|
Il est possible que les modalités suivant lesquelles sont déterminés les salaires pour les travailleurs et les entreprises entravent la réallocation des emplois et freinent la croissance de la productivité. |
Recourir davantage aux possibilités de décentralisation des négociations salariales, dans le cadre des accords de branche, afin que l’évolution des salaires corresponde mieux à celle de la productivité au niveau de chaque entreprise. |
Malgré certains progrès, la concurrence reste faible dans le secteur des services professionnels. Les résultats de la Belgique sont inférieurs à la moyenne des pays de l’UE en termes d’évaluation systématique des nouveaux instruments de réglementation. |
Continuer de libéraliser les services professionnels et les professions artisanales. Intégrer dans le processus d’élaboration des politiques publiques des analyses d’impact de la réglementation et des évaluations ex post des nouveaux instruments de réglementation. |
La Belgique est à la traîne des pays européens comparables en ce qui concerne la part de la fibre dans les services d’accès à internet à haut débit et le déploiement de la cinquième génération de communications mobiles (5G). Le niveau élevé des prix des services d’accès à internet à haut débit et la forte concentration de ce marché pourraient tenir à la faiblesse de la concurrence dans le secteur des communications. |
Lever les obstacles (tels que les limites strictes relatives au rayonnement électromagnétique et la lenteur des procédures d’octroi des permis) qui peuvent retarder le déploiement du réseau à haut débit et de la 5G. Promouvoir une utilisation accrue des dispositifs en place qui facilitent les changements de prestataire de services pour les consommateurs. |
Les plans de relance visent à accélérer la transformation numérique du secteur public, mais des pénuries de compétences nécessaires à cet égard pourraient nuire à l’efficacité de ces efforts de réforme. La Belgique est à la traîne en ce qui concerne les données publiques ouvertes et la proportion d’individus et d’entreprises qui interagissent en ligne avec les administrations publiques. |
Donner la priorité aux recrutements et au développement des compétences dans le secteur public pour mettre en place et utiliser les outils numériques. Favoriser la cohérence des stratégies numériques des différents niveaux de gouvernement, par exemple en mettant en place un cadre de gouvernance des données pour améliorer l’accès aux données et leur partage. |
L’insuffisance des données disponibles et le manque d’évaluation réduisent l’efficience du système judiciaire et la rapidité de son fonctionnement. |
Mettre à profit la transformation numérique du système judiciaire pour améliorer les procédures d’évaluation et l’utilisation des méthodes de règlement extrajudiciaire des litiges. |
Les règles relatives aux interactions entre les agents publics et les lobbyistes présentent des lacunes. Il n’existe pas de dispositions législatives de portée générale concernant les lanceurs d’alerte. |
Renforcer les règles relatives aux activités de lobbying de manière à en améliorer la transparence. Achever de transposer dans le droit interne la directive de l’UE sur la protection des lanceurs d’alerte. |
Faire avancer la transition écologique et énergétique |
|
Il est possible d’améliorer la cohérence des politiques régionales et fédérale dans le cadre du Plan national énergie-climat (PNEC). Il a fallu sept ans pour parvenir à l’accord sur le partage des efforts correspondant aux objectifs climatiques fixés à l’horizon 2020. |
Veiller à ce que la révision du PNEC se traduise par une vision nationale intégrée des plans convenus aux niveaux fédéral et régional. Déterminer rapidement comment sera réparti en interne l’effort de réalisation des objectifs climatiques fixés pour 2030, par exemple en créant un organisme d’experts indépendant chargé de formuler des conseils et de suivre les mesures prises. |
Les analyses coûts-avantages des projets d’infrastructure (par exemple en matière de mobilité) sont réalisées au coup par coup et les entités publiques appliquent leurs propres pratiques à leur niveau. Il existe de nombreuses initiatives visant à renforcer la mobilité durable, mais leur coordination laisse à désirer. |
Utiliser plus largement les analyses coûts-avantages en matière d’investissement public dans les infrastructures pour garantir une évaluation correcte des répercussions des projets sur l’environnement. Améliorer la cohérence entre régions des initiatives prévues en matière de mobilité durable. |
Il n’existe pas de dispositif d’imposition explicite du carbone en Belgique, en dehors du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE). La consommation de combustibles fossiles est favorisée par une fiscalité modérée et des subventions généralisées. |
Instaurer à moyen terme une taxe carbone pour les secteurs non couverts par le SEQE-UE de manière à appliquer aux émissions de gaz à effet de serre un prix minimum reflétant l’évolution des prix dans le SEQE-UE, tout en adoptant des mesures compensatoires en faveur des ménages vulnérables. Concrétiser l’engagement pris par le gouvernement fédéral de cesser progressivement d’utiliser des combustibles fossiles. |
L’engagement de sortir progressivement du nucléaire d’ici à 2025 est reporté compte tenu des événements récents. Les autorités ont mis en place un mécanisme de rémunération de capacité (CRM), qui, sur la base d’enchères, apportera un soutien au déploiement de capacités destinées à se substituer au nucléaire, mais des incertitudes subsistent quant au fait de savoir si ce dispositif permettra effectivement de maintenir la production d’énergie à un niveau adéquat et en temps voulu. |
Définir clairement l’orientation de l’action publique en matière d’énergie nucléaire pour favoriser l’investissement dans les énergies renouvelables. Établir des scénarios pour maintenir une production adéquate après la sortie progressive du nucléaire dans l’hypothèse où la solution prévue pour remplacer ces capacités de production – le mécanisme de rémunération de capacité (CRM) – ne se traduirait pas par des investissements suffisants. |
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