Nicolas Gonne
OECD
Études économiques de l'OCDE : Belgique 2022
2. Offrir à chacun de meilleures perspectives économiques
Abstract
Les inégalités de revenu sont faibles en Belgique et la mobilité intergénérationnelle des revenus est conforme à la moyenne des pays de l’OCDE. Cependant, comme dans les autres pays de l'OCDE, il est possible de renforcer l'égalité des chances pour toutes les catégories de population. Les risques de pauvreté sont élevés pour les demandeurs d’emploi et les actifs peu qualifiés. Les catégories sociodémographiques vulnérables, telles que les personnes ayant un faible niveau d’instruction, les mères célibataires, les populations issues de l’immigration et les personnes en situation de handicap, voient leurs revenus stagner à des niveaux bas. En outre, les coûts du logement représentent une charge excessive pour les ménages à bas revenu. Pour favoriser la mobilité ascendante sur l’échelle des revenus, il faudrait promouvoir l’emploi des catégories vulnérables en renforçant leurs compétences grâce à la formation continue, en assurant une orientation professionnelle efficace et en continuant d'accroître les incitations au travail. Afin d’empêcher la transmission intergénérationnelle des désavantages sociaux, il faudrait remédier à la ségrégation sociale dans l’enseignement obligatoire, notamment en améliorant les politiques d’affectation scolaire, en facilitant la mobilité entre les filières générale et professionnelle, et en renforçant les incitations en direction des enseignants ainsi que leur formation. Il est également nécessaire de promouvoir des logements abordables et de qualité pour réduire la ségrégation spatiale et lever les obstacles dans l'accès aux chances.
Les inégalités de revenu sont globalement faibles en Belgique, grâce à un système bien développé de prélèvements et de transferts et au bon fonctionnement du dialogue social institutionnalisé. Le coefficient de Gini y est l'un des plus bas de l’OCDE, son niveau étant comparable à ceux des pays nordiques et inférieur à ceux des pays voisins de la Belgique que sont la France, l’Allemagne et les Pays-Bas. En outre, la part totale de la population exposée au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale se situait à 18.9 % en 2020, soit en dessous de la moyenne de l’UE (22 %), avec toutefois des disparités régionales.
La mobilité intergénérationnelle des revenus est également élevée par rapport à d'autres pays – en d'autres termes, le degré d'influence du niveau de revenu des parents sur celui de leurs enfants est inférieur à la moyenne de l’OCDE. Environ 35 % des écarts de revenu entre les pères se reportent sur la génération suivante en Belgique, une proportion moindre que les 50 % observés en France ou en Allemagne (OECD, 2018[1]). En moyenne, il faudrait une centaine d'années (soit environ quatre générations) à la descendance d'une famille à faible revenu pour atteindre le niveau de revenu moyen en Belgique, un processus qui, pour lent qu'il puisse paraître, est plus rapide que dans de nombreux pays de l’OCDE (Graphique 2.1, partie A). La Belgique se positionne aussi de manière favorable sur le plan international au regard d'autres paramètres (accès aux soins de santé, éducation) qui permettent de réduire les inégalités de revenu (WEF, 2020[2] ; Eurofound, 2017[3]).
Néanmoins, les politiques de lutte contre les inégalités et de promotion de la mobilité intergénérationnelle ne permettent pas nécessairement d'assurer l’égalité des chances, c'est-à-dire l'accès aux mêmes chances dans la vie quelles que soient les conditions de vie initiales. De fait, les bonnes performances globales de la Belgique en termes de distribution des revenus et de mobilité intergénérationnelle masquent une répartition inégale des chances offertes en matière économique. De très fortes disparités sont observées entre les groupes de population en fonction, notamment, du milieu familial et du pays d’origine des individus. Ainsi, les enfants de ressortissants de pays non membres de l’UE, de parents peu diplômés ou au chômage, ainsi que les locataires, sont davantage exposés au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale (Graphique 2.1, partie B). Des disparités existent également selon la profession, les enfants de travailleurs manuels étant plus susceptibles, à hauteur de 11.9 points de pourcentage, d’être eux-mêmes travailleurs manuels que cadres, soit un écart proche de la moyenne de l’OCDE, mais deux fois plus important qu’en France ou en Allemagne (OECD, 2018[1]).
L’inégalité des chances sur le plan économique se traduit par une faible mobilité intragénérationnelle des revenus pour les membres des catégories vulnérables, c’est-à-dire que leurs revenus n’évoluent que très peu au cours de leur vie. La stabilité des revenus tout au long de la vie reflète en partie l'existence de filets de protection sociale robustes en Belgique, comme c'est le cas dans d'autres pays tels que les Pays-Bas ou les pays nordiques. Cela étant, cette persistance peut aussi être le signe qu'il existe des obstacles structurels à l'amélioration de la situation socioéconomique d'origine. Si des limites en termes de données disponibles empêchent la réalisation d'une analyse complète des revenus sur le cycle de vie (Encadré 2.1), la Belgique semble caractérisée, selon les mesures existantes, par une très forte persistance intragénérationnelle des revenus. Ainsi, les « inégalités de revenu permanent », c’est-à-dire les inégalités de revenu concentrées sur plusieurs années, ne sont que légèrement moins élevées que les inégalités de revenu observées à un moment quelconque (en coupe instantanée) (Graphique 2.2, partie A).
Comme plusieurs autres pays de l'OCDE, la Belgique est un pays de « planchers et plafonds collants », où la persistance des revenus n’est pas répartie de manière homogène à travers les différentes catégories de population. Si la moitié environ de la population en âge de travailler est restée dans le même quintile de distribution des revenus entre 2011 et 2014, soit une proportion proche de la moyenne de l’OCDE, la persistance des revenus est importante et toujours plus sensible pour les catégories à revenu faible et à revenu élevé que pour celles à revenu intermédiaire. Près de 64 % des individus en âge de travailler du quintile inférieur de revenu, et 70 % de ceux du quintile supérieur demeurent dans le même quintile sur une période de quatre ans (Graphique 2.2, partie B).
En Belgique, la mobilité ascendante sur l'échelle des revenus est très faible pour les bas revenus et parallèlement, les foyers à revenu moyen inférieur risquent assez fortement de glisser au bas de l’échelle des revenus (Graphique 2.2, partie C). Les demandeurs d’emploi, les familles monoparentales et les locataires sont les catégories les plus exposées à la pauvreté (StatBel, 2019[4]). Les perspectives économiques offertes sont particulièrement réduites pour les populations issues de l’immigration. Ainsi, la probabilité d’occuper un emploi et les chances de mobilité professionnelle ascendante sont relativement limitées pour les individus nés en Belgique de parents étrangers (Graphique 2.2, partie D).
Les écarts entre catégories sociodémographiques ont tendance à se reproduire d’une génération à l’autre dans tous les pays de l'OCDE. Le revenu des parents constitue un déterminant majeur de l'accès à une éducation de bonne qualité, à des soins de santé adéquats et à des réseaux professionnels, et conditionne donc les possibilités de carrière et le revenu des enfants (OECD, 2018[1]). De telles disparités dans l’accès aux chances peuvent pérenniser les inégalités en payant un lourd tribut à l'économie, notamment en l'absence d'investissements dans les talents et dans le capital humain (OECD, 2015[5]). Il peut être souhaitable du point de vue social de faire en sorte que le niveau de revenu ne stagne pas dans le temps ou ne se transmette pas de génération en génération, en particulier lorsque la situation initiale reflète des discriminations à l'égard de certaines catégories, ou est liée au milieu culturel, ethnique ou familial d’origine. Mais il peut être tout aussi souhaitable d'atténuer les variations fréquentes et imprévisibles du revenu disponible pour réduire l’insécurité économique, par exemple au travers de l'assurance sociale.
Encadré 2.1. Mesurer la mobilité des revenus : disponibilité des données
Mesurer la mobilité des revenus au cours d’une vie nécessite des données longitudinales, c’est-à-dire l'évolution dans le temps d'informations relatives à un groupe homogène d’individus et collectées sur une période relativement longue. De telles données sont rares, car coûteuses à recueillir, et présentent certaines limitations, notamment un biais d’attrition. En outre, certaines variables pertinentes dans les enquêtes sont collectées dans le cadre de modules thématiques qui sont interrompus.
Le présent chapitre se fonde largement sur les données du rapport de 2018 de l’OCDE, L’Ascenseur social en panne ? Comment promouvoir la mobilité sociale, une initiative de recherche de grande envergure qui a puisé dans des sources d’information variées pour dresser un tableau international complet de la mobilité sociale. Les données utilisées lors de la publication, qui remontent parfois au début des années 2010, demeurent les plus pertinentes à ce jour, car la nature durable et structurelle des schémas de mobilité des revenus en garantit le caractère approprié aux fins de l’analyse présentée dans ce chapitre.
Source : OCDE (2018), L’Ascenseur social en panne ? Comment promouvoir la mobilité sociale.
Outre qu’elle nuit au bien-être et à la qualité de vie des individus, l’inégalité des chances pèse sur les grands résultats macroéconomiques que sont la croissance potentielle, les finances publiques et la cohésion sociale. Premièrement, l’inégalité des chances sur le plan économique contribue à la mauvaise affectation ou à la sous-utilisation des talents et des ressources, notamment le capital humain, ce qui freine la croissance de la productivité (OECD, 2018[6]). Cet aspect revêt une importance particulière en Belgique, où les pénuries de main-d’œuvre sont importantes et vont croissant (chapitre 1). Deuxièmement, la persistance de revenus faibles dans certaines catégories nécessite une vaste redistribution, ce qui aggrave les difficultés à moyen terme en matière de viabilité budgétaire. Troisièmement, les perspectives limitées d'accès aux possibilités offertes (ou la perception que ces perspectives sont limitées) tendent à affecter la participation à la vie démocratique et la confiance (OECD, 2018[1] ; OECD, 2021[7]), un enjeu particulièrement important en Belgique, pays de l'OCDE où la confiance dans les pouvoirs publics s'est le plus fortement dégradée depuis 2007 (OECD, 2021[8]).
Encadré 2.2. Niveaux d'administration et compétences concernant les obstacles aux chances économiques
Outre le gouvernement fédéral, le système administratif de la Belgique comprend trois autorités régionales et trois communautés linguistiques (interrégionales), dotées d’un degré élevé d'autonomie et de compétences distinctes. Les trois régions sont la Région flamande, la Région de Bruxelles-Capitale et la Région wallonne. Les communautés sont la Communauté française, la Communauté flamande et la Communauté germanophone. Chaque autorité est dotée de ses propres pouvoirs législatifs et exécutifs dans son domaine de compétences, et d'un parlement et d'un gouvernement en propre pour exercer ces pouvoirs. L’État fédéral, les régions et les communautés sont situés sur un pied d'égalité, de sorte qu'aucune autorité ne prenne le pas sur une autre.
En ce qui concerne les obstacles à l'accès aux chances économiques identifiés dans ce chapitre, à savoir ceux qui concernent le marché du travail, l'éducation et le logement, les compétences sont réparties entre les différents niveaux de gouvernement (Tableau 2.1).
Tableau 2.1. Répartition des compétences concernant les obstacles à l'accès aux chances économiques
Gouvernement fédéral |
Régions |
Communautés |
|
---|---|---|---|
Marché du travail |
Chômage, retraites et assurance maladie |
Politiques actives du marché du travail, prestations familiales, santé, allégements de cotisations de sécurité sociale en faveur de certains groupes cibles |
|
Éducation |
Âge du début et de la fin de la scolarité obligatoire, exigences minimales pour la délivrance des diplômes, régimes de retraite du personnel éducatif |
Une partie de la formation des adultes et de l'apprentissage |
De l'éducation préscolaire à l'enseignement supérieur et l'éducation des adultes, y compris la délivrance des équivalences de diplômes |
Logement |
Crédit d’impôt au titre d’emprunts hypothécaires pour le financement d’investissements locatifs |
Logement social et impôts sur le patrimoine immobilier, crédit d’impôt au titre des emprunts hypothécaires contractés par les propriétaires-occupants, aides au logement |
Note : Le tableau n’est pas exhaustif ; seuls les principaux domaines d'action et compétences y sont recensés. En Flandre, les institutions communautaires et régionales ont été fusionnées. La Région wallonne a transféré une partie de ses compétences concernant les germanophones à la Communauté germanophone, notamment les services de l’emploi (ADG).
Le présent chapitre examine la capacité de la Belgique à offrir des perspectives économiques à chacun, quelle que soit sa situation initiale, tout en continuant à œuvrer dans le sens d'un niveau d'inégalité globale des revenus modéré et à promouvoir la sécurité économique grâce à son remarquable filet de protection sociale. Les auteurs identifient trois principales sources d'obstacles – le marché du travail, l'éducation et le logement – et évoquent les politiques publiques susceptibles d'améliorer les chances économiques, en se concentrant particulièrement sur la situation des catégories vulnérables que sont les personnes peu qualifiées, celles qui sont issues de l’immigration et les mères célibataires. Ces politiques consistent notamment : i) à améliorer les transitions sur le marché du travail des catégories vulnérables (par exemple, au moyen de la formation continue) ; ii) à atténuer l’impact du milieu socio-économique sur le niveau d’instruction des élèves défavorisés (grâce à des mesures d’incitation pour les enseignants, par exemple) ; et iii) à faire en sorte que les ménages modestes aient accès à des logements abordables de qualité (notamment grâce à des aides au logement). Les compétences en matière de marché du travail, d'éducation et de logement étant réparties entre différents niveaux de gouvernement (Encadré 2.2), certaines recommandations concernant des compétences non fédérales sont plus pertinentes pour des régions et communautés spécifiques, en fonction de leurs besoins et priorités de politiques publiques.
Les obstacles à l'accès aux chances économiques en Belgique
Le faible niveau des transitions sur le marché du travail entrave la mobilité ascendante des revenus
L'activité et les transitions sur le marché du travail sont des facteurs déterminants de la mobilité des revenus au cours d'une vie (Encadré 2.3). L’inactivité ou le chômage de longue durée et les emplois peu rémunérés, notamment, contribuent à la persistance de revenus faibles (OECD, 2020[9]). Des transitions difficiles entre l'école et le monde du travail font également obstacle à la mobilité des revenus, car elles se traduisent par des périodes de chômage et des débuts de carrière précaires, en particulier pour les jeunes défavorisés (OECD, 2018[1]). Par ailleurs, les emplois atypiques créent de nouveaux défis car s’ils peuvent accroître l'activité, ils offrent souvent un accès limité à certaines formes de protection sociale, ce qui risque d'amplifier les disparités existantes (OECD, 2019[10]).
De meilleurs résultats sur le marché du travail sont essentiels à la mobilité ascendante des revenus en Belgique. De fait, les individus qui entrent dans l’emploi ont six fois plus de chances de connaître une augmentation notable de leur revenu que les sans-emploi en Belgique (Graphique 2.3, partie A). Plus de la moitié des personnes exerçant un emploi voient leur revenu augmenter d'au moins 20 % en Belgique, contre environ un tiers dans les pays voisins. Cependant, les passages du chômage ou de l’inactivité à l’emploi sont particulièrement faibles en Belgique (Graphique 2.3, partie B). La probabilité qu’un individu passe du chômage à l'emploi est inférieure à 30 %, soit le niveau le plus bas de l’Union européenne. L’incidence du chômage de longue durée va également de pair avec la persistance de revenus faibles (Graphique 2.3, partie C).
L’entrepreneuriat offre des trajectoires de mobilité ascendante aux individus en mesure d’identifier de nouvelles possibilités sur les marchés et de créer de la valeur ajoutée. Néanmoins, les catégories vulnérables rencontrent plus d'obstacles que les autres dans leur accès à l’entrepreneuriat, en partie parce que les compétences et savoirs nécessaires à l’esprit d’entreprise se transmettent souvent de manière informelle de parents à enfants, ou bien s'acquièrent auprès de réseaux professionnels et d'associations d’anciens élèves (OECD, 2018[1]). La Belgique est très touchée par le phénomène des « entrepreneurs manquants », c’est-à-dire des personnes dont on pourrait attendre qu'elles créent une entreprise si la catégorie à laquelle elles appartiennent affichait le même taux d'entreprises en démarrage que celle des hommes âgés de 30 à 49 ans (Graphique 2.3, partie D). Combler les écarts de créations d’entreprises entre toutes les catégories sociodémographiques permettrait d'augmenter de 270 000 le nombre d’entrepreneurs, qui s'établit actuellement à 475 000, les femmes et les immigrés représentant respectivement deux tiers et 20 % des entrepreneurs manquants (OECD, 2020[11]).
Encadré 2.3. Obstacles à la mobilité ascendante des revenus en Belgique : nouveaux éléments fondés sur les microdonnées d’une enquête
En s'appuyant sur l’enquête sur les finances et la consommation des ménages (Household Finance and Consumption Survey, HFCS) relative à la Belgique, de nouvelles recherches de l’OCDE évaluent la corrélation entre les caractéristiques des ménages en termes de marché du travail, d’éducation et de logement et leur mobilité dans la distribution des revenus, en suivant la méthodologie de Martinez-Toledano et al. (2019[12]).
Selon les résultats préliminaires de ces travaux, un faible niveau d'éducation et le chômage sont fortement corrélés à une mobilité inférieure sur l'échelle des revenus durant la période 2011-17. Le Graphique 2.4 présente les coefficients d’une analyse par régression de l’évolution de la position des ménages dans la distribution des revenus avec des variables muettes concernant leur situation au regard du marché du travail, leur niveau d'éducation et le mode d'occupation de leur logement, en tenant compte de l’âge, du revenu et du patrimoine. Toutes choses égales par ailleurs, les ménages dont le chef est au chômage se situeront, au bout de trois ans, près de 15 centiles plus bas dans la distribution des revenus que ceux dont le chef est occupé ou retraité. De même, les ménages dont le chef n’est pas diplômé de l’enseignement supérieur se situeront, au bout de trois ans, plus de neuf centiles plus bas dans la distribution des revenus que ceux dont le chef l’est. Par conséquent, des politiques qui améliorent la situation au regard de l'emploi des catégories vulnérables et qui renforcent l’égalité des chances dans l'éducation sont un moteur déterminant de la mobilité ascendante sur l’échelle des revenus.
De meilleures transitions entre l'école et le monde du travail sont également indispensables pour améliorer les perspectives de mobilité ascendante des revenus offertes aux jeunes en Belgique. D’après des données d'Eurostat, la proportion d’individus âgés de 15 à 24 ans qui ne sont ni scolarisés, ni en emploi, ni en formation (NEET) atteignait 9.2 % en 2020, un niveau inférieur à la moyenne de l’UE, mais nettement supérieur à celui des Pays-Bas (4.5 %) ou de l'Allemagne (7.3 %), avec des différences selon les régions. Cette proportion est particulièrement élevée (18.1 % en 2020) chez les personnes nées en dehors de l'UE. En outre, plus d'un chômeur sur cinq âgés de 15 à 24 ans étaient sans emploi depuis plus d'un an en 2020, compromettant ainsi leurs chances de mobilité ascendante.
L’inégalité des chances dans l'éducation obligatoire pèse sur la mobilité intergénérationnelle
L'éducation constitue un déterminant majeur de la mobilité intergénérationnelle des revenus (OECD, 2018[1] ; OECD, 2018[13]). Les enfants dont les parents ont un niveau d'éducation plus élevé obtiennent de meilleurs résultats scolaires, en raison notamment de l’investissement que ces parents sont à même de réaliser dans l’éducation de leurs enfants. En conséquence, la simple transmission de compétences et de préférences éducatives entre parents et enfants contribue à la persistance intergénérationnelle des revenus au point que les revenus sont corrélés avec le niveau d'instruction (Hanushek et al., 2021[14] ; Blanden, Gregg et Macmillan, 2007[15]). Alors qu'ils ne sont pas obligatoires, l'éducation et l’accueil des jeunes enfants ont également un impact important sur la mobilité sociale (voir ci-après).
En Belgique, les systèmes éducatifs se caractérisent par une forte persistance intergénérationnelle en termes de niveau d’instruction, et par des liens étroits entre les résultats scolaires des élèves et leur statut socioéconomique. Ainsi, la corrélation entre le nombre d'années d’études des enfants et celui des parents est l’une des plus élevées de l’OCDE, une année supplémentaire d'études des parents allant de pair avec plus d’un semestre d'études supplémentaires pour leurs enfants (Graphique 2.5, partie A, ci-dessus). Cette corrélation est moins forte pour les cohortes plus jeunes en raison de la progression globale des chiffres de scolarisation, mais elle demeure supérieure à la moyenne de l’OCDE. La mobilité sociale à l'école, mesurée en établissant le ratio moyen entre la position des élèves dans la distribution des statuts socioéconomiques et leur position dans la distribution des résultats scolaires, est également faible (Godin et Hindriks, 2018[16]). Selon cette mesure, les écoles belges se classent, en termes de mobilité sociale à l'école, parmi les cinq derniers pays sur les 27 pays de l’OCDE participant au Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) depuis 2003 (Graphique 2.5, partie B). Cette forte persistance et la faible mobilité à l’école témoignent de l’existence de mécanismes puissants de transmission éducative intergénérationnelle en Belgique.
L'éducation obligatoire se caractérise par la prévalence d’une forte ségrégation (Graphique 2.5, partie C). Les derniers résultats du PISA montrent qu’en Belgique, les élèves sont très nombreux à fréquenter des « écoles socialement ségréguées » (établissements accueillant des élèves de milieux socioéconomiques soit relativement modestes, soit relativement aisés) et des « écoles scolairement ségréguées » (établissements affichant des résultats scolaires moyens soit relativement médiocres, soit relativement bons) (Hirtt, 2020[17]). Ces deux formes de ségrégation, sociale et scolaire, vont de pair en raison d'un processus de cumul entre sélection sociale et sélection scolaire tout au long du parcours des élèves belges dans l’enseignement obligatoire, ce qui explique l’impact particulièrement sensible des écoles sur les résultats scolaires.
Le manque de logements abordables adéquats contribue à la persistance des bas revenus
La disponibilité de logements abordables de qualité est essentielle à l'égalité des chances, les caractéristiques du milieu de résidence et les effets d’émulation pouvant influencer à la fois les niveaux d’instruction et l’accès aux services publics et à des réseaux d'emploi de meilleure qualité (OECD, 2018[1]). L'accessibilité financière des logements favorise la mobilité résidentielle, ce qui accroît l’efficacité du marché du travail, grâce à une meilleure adéquation entre l’offre et la demande d’emploi, et stimule la mobilité des revenus en facilitant l’accès à des emplois mieux rémunérés et à une éducation de meilleure qualité, notamment pour les enfants et les jeunes défavorisés (Caldera Sánchez et Andrews, 2011[18] ; OECD, 2021[19]). En revanche, d’importants écarts de prix entre quartiers empêchent les ménages de déménager et peuvent conduire à une séparation géographique des catégories socioéconomiques.
Outre qu’elle amplifie les fragilités dans le secteur immobilier (chapitre 1), la hausse croissante des coûts du logement peut accroître la ségrégation résidentielle en pesant plus lourdement sur les ménages modestes, ce qui est le cas en Belgique comme dans d'autres économies de l’OCDE (OECD, 2021[19]). Les dépenses de logement représentent environ 24 % de la consommation des ménages en Belgique, soit une hausse de deux points de pourcentage depuis la crise financière mondiale et un niveau supérieur aux moyennes de l’OCDE et de l’UE (Graphique 2.6, partie A). Durant la période 2014-19, la hausse des coûts du logement a été particulièrement forte dans la Région de Bruxelles-Capitale, où les prix des appartements du segment d'entrée de gamme sont ceux qui ont le plus augmenté (Graphique 2.6, partie B). Qui plus est, une analyse spatiale fondée sur le recensement de 2011 montre une forte ségrégation résidentielle à l’intérieur de la capitale et dans sa zone d’influence (Graphique 2.6, partie C). La pauvreté se concentre dans les vieux quartiers industriels, qui offrent des logements de piètre qualité du marché locatif privé, occupés depuis longtemps par des ménages modestes (Costa et De Valk, 2021[20]).
La ségrégation résidentielle peut accentuer les obstacles que le marché du travail et le système éducatif dressent contre la mobilité sociale, et par conséquent réduire les chances que les résidents des quartiers défavorisés auront dans la vie. Ainsi, les écoles y présentent probablement une moindre diversité que celles des quartiers mixtes, ce qui s'accompagne d’une plus grande inégalité des performances scolaires. La concentration spatiale d’individus d’origine étrangère renforce encore les difficultés en termes de mobilité sociale, les immigrés défavorisés se retrouvant géographiquement isolés dans de grandes villes telles que Bruxelles, Anvers et Liège (Costa et de Valk, 2018[21]).
Améliorer la situation des catégories vulnérables au regard de l'emploi
Le marché du travail belge pâtit depuis longtemps de difficultés qui freinent la mobilité sociale des individus tout au long de leur vie. Avant la pandémie de COVID-19, parallèlement à la vigueur des créations d’emplois et à un taux de chômage historiquement bas, le pays faisait face à d’importants défis dont des niveaux élevés d’inactivité, de faibles transitions sur le marché du travail et une pénurie croissante de compétences, notamment dans le domaine numérique, comme l'avait indiqué l’Étude économique de 2020 consacrée à la Belgique, auxquels on peut ajouter des disparités régionales considérables (Tableau 2.2). Au plus fort de la pandémie, la mise en place rapide de mesures de soutien aux revenus a complété l'augmentation automatique des transferts et les baisses d’impôts pour protéger les moyens de subsistance des travailleurs. Relever les défis du marché du travail, à mesure que celui-ci se rétablit, sera essentiel pour améliorer les possibilités de mobilité ascendante des revenus. L’amélioration des résultats sur le marché du travail est particulièrement importante pour les catégories vulnérables, car celles-ci ont été touchées de manière disproportionnée par les répercussions de la crise liée au COVID-19 et bénéficient moins que les autres de la reprise (chapitre 1).
Outre la diminution du chômage des jeunes et l'augmentation des taux d’activité des plus de 55 ans (chapitre 1), il faudra remédier aux écarts d’emploi particulièrement prononcés dans les catégories défavorisées telles que les individus ayant un faible niveau d’instruction, les immigrés originaires de pays non membres de l’UE et les personnes en situation de handicap (Graphique 2.7, partie A). Les transitions de l’inactivité ou du chômage vers l’emploi sont particulièrement faibles dans les catégories vulnérables. Ainsi, les transitions des femmes de l'inactivité vers l’emploi étaient inférieures de 20 % à celles des hommes en Belgique en 2019 (Causa, Luu et Abendschein, 2021[22]) et ce même taux de transition parmi les immigrés originaires de pays non membres de l’UE affichait un écart de cinq points de pourcentage par rapport à celui des ressortissants de l’UE sur la période 2008-14 (HCE, 2018[23]). Il faudra augmenter sensiblement les taux d’emploi de ces catégories pour parvenir à l’objectif ambitieux du gouvernement d’un taux d’emploi de 80 % des 20-64 ans d’ici à 2030. Se fondant sur des projections démographiques et sur une comparaison avec les pays voisins de la Belgique les mieux classés en la matière, le Conseil supérieur de l’emploi estime que le rehaussement nécessaire des taux d’emploi sera particulièrement marqué chez les personnes peu qualifiées, les jeunes et les immigrés non originaires de l’UE.
Les écarts d’emploi sont souvent le reflet de multiples obstacles liés aux travailleurs, à leur aptitude à l'emploi, à leur disponibilité pour travailler et aux incitations à travailler (Graphique 2.7, partie B). En Belgique, plus de la moitié des individus déclarant être chômeurs de longue durée, inactifs, ou entretenir des liens ténus avec le marché du travail se heurtent à une série d’obstacles dont les plus courants sont leur faible niveau d’instruction et des problèmes de santé (Adalet McGowan et al., 2020[24]). Les mêmes types d’obstacles liés aux travailleurs sont observés dans de nombreux autres pays de l’OCDE, mais la Belgique tend à en cumuler plusieurs simultanément (OECD, 2020[25]). Les difficultés linguistiques constituent un important obstacle en termes d'aptitude à l'emploi et expliquent en partie la persistance de disparités et de déséquilibres entre les régions. En ce qui concerne les personnes d’origine étrangère (immigrés de première et deuxième générations, représentant 32.7 % de la population en janvier 2021), les discriminations s'ajoutent probablement aux obstacles liés aux travailleurs (Baert, Heiland et Korenman, 2016[26] ; FPS Employment/UNIA, 2019[27]). L’inégalité des chances dans l’éducation contribue à la persistance des obstacles ayant trait à l’aptitude au travail, notamment pour les enfants d’immigrés non originaires de l’UE, dont la situation au regard de l'emploi n'est guère meilleure que celle de leurs parents (Piton et Rycx, 2021[28]).
Tableau 2.2. Il existe des disparités régionales considérables en ce qui concerne le marchés du travail et les situations sur ce marché
2020 (%)
1. 15-64 ans.
2. Part de la population active au chômage pendant 12 mois ou plus
3. 15-24 ans.
4. Part des 15-24 ans ni en emploi, ni scolarisés, ni en formation (définition Eurostat).
5. Part de la population en risque de pauvreté ou d’exclusion sociale
Source : Eurostat.
Les caractéristiques des ménages recoupent souvent les écarts liés au pays d’origine, de sorte que les résultats sur le marché du travail sont particulièrement faibles dans le cas des femmes immigrées. Seulement 46.2 % des femmes d’âge très actif nées en dehors de l’UE occupaient un emploi en 2020, selon Eurostat. De récentes estimations fondées sur les données de sécurité sociale portent à croire que les femmes immigrées de première et deuxième générations originaires de pays non membres de l’UE subissent une double peine en termes de probabilités d’emploi, qui s'avère supérieure à la somme des handicaps liés au genre et aux origines étrangères (Piton et Rycx, 2021[28]). En Belgique, les probabilités des mères d’avoir un emploi sont généralement inférieures de 3.2 points de pourcentage à celles des femmes sans enfants, selon une analyse fondée sur la méthode de l’appariement sur score de propension (Nautet et Piton, 2021[29]).
D’importantes réformes ont déjà permis d'accroître le taux d’activité des bas salaires et de la main-d'œuvre senior en Belgique, et d'autres projets de réformes devraient permettre de poursuivre dans cette voie (Encadré 2.4 ; chapitre 1). Pour renforcer ces réformes, il est essentiel d’axer les politiques et les ressources sur les catégories vulnérables pour améliorer les possibilités économiques leur étant offertes, s'agissant en particulier des mères, des immigrés non originaires de l’UE et des personnes en situation de handicap. Outre qu’elle promeut la mobilité ascendante des revenus et renforce le bien-être, cette attention renforcée aux populations vulnérables peut contribuer à réduire les problèmes de viabilité budgétaire en limitant les besoins de redistribution (chapitre 1).
Encadré 2.4. Projets de réformes du droit du travail en Belgique
Les réformes du droit du travail évoquées dans ce chapitre s'attachent aux aspects les plus pertinents en termes de mobilité sociale en Belgique, notamment au ciblage des politiques et des ressources sur les catégories vulnérables. Les enjeux du marché du travail et les réformes nécessaires pour accroître le taux de participation font l’objet d'une analyse plus globale dans le chapitre 1, et ont déjà été abordés dans le chapitre spécial de l’Étude économique de 2020. Le présent encadré fournit un aperçu des réformes du droit du travail inscrites dans l’accord sur le budget fédéral d’octobre 2021 et le train de réformes de février 2022.
Les réformes envisagées devraient permettre de continuer d'accroître les taux d'activité. Un transfert de charge fiscale de 300 millions EUR, induisant une baisse des cotisations de sécurité sociale partiellement financée par une hausse des taxes sur la consommation (tabac) et de la fiscalité environnementale (trajets en avion), vise à réduire davantage le coin fiscal sur les bas salaires et à limiter les trappes à bas salaire.
De nouvelles mesures amélioreront par ailleurs les transitions sur le marché du travail, sous réserve d’un accord avec les autorités régionales et les partenaires sociaux. Un compte individuel de formation est mis en place. Les cotisations de sécurité sociale payées par les employeurs en cas de licenciement seront réaffectées pour un tiers à la formation des salariés licenciés. Une partie des indemnités de départ sera également utilisée pour subventionner le salaire versé par un nouvel employeur et il sera possible de commencer un nouvel emploi durant la période de préavis afin d’encourager le passage d'un emploi à un autre. Les conditions de retour au travail des personnes en incapacité de travail seront assouplies. La mobilité de la main-d'œuvre sera encouragée en permettant aux chômeurs de longue durée qui prennent un emploi dans une autre communauté linguistique ou qui comblent un poste vacant difficile à pourvoir de conserver une partie de leurs indemnités de chômage pendant trois mois.
Enfin, la législation du travail sera réformée pour plus de flexibilité. Les salariés à temps plein se verront proposer une organisation plus flexible des semaines de travail, avec notamment la possibilité de répartir les heures de travail sur quatre jours au lieu de cinq. L’instauration du travail de nuit entre 20 heures et minuit sera facilitée afin de favoriser le développement du commerce électronique, et le statut des travailleurs des plateformes numériques a été clarifié.
Source : Chancellerie du Premier ministre.
Une autre récente série de réformes et de mesures adoptées à l'échelle fédérale et régionale visait à stimuler le dynamisme des entreprises et la création d’entreprise, dont le niveau est relativement faible, en réduisant les coûts pour les entrepreneurs en faillite, en abaissant les barrières administratives et en développant la formation à l’entrepreneuriat (OECD, 2020[9] ; OECD, 2019[30]). Cependant, les capacités entrepreneuriales perçues demeurent faibles (OECD, 2021[31]) et le sous-développement de la culture entrepreneuriale constitue un obstacle majeur à l’entrepreneuriat (Mulder et Godefroid, 2016[32]), même si des enquêtes ont permis de constater des améliorations en Flandre (Roelandt et Andries, 2021[33]). Les obstacles liés au faible niveau de compétences et à la crainte de l'échec semblent particulièrement préjudiciables pour les catégories vulnérables, en particulier les femmes (OECD, 2020[11]). Parallèlement, l’incidence relativement forte du travail indépendant contraint en Belgique porte à croire que la création d’entreprise pourrait avoir une capacité limitée à assurer une mobilité ascendante de grande ampleur. L’entrepreneuriat de subsistance est particulièrement prévalent chez les femmes, 38 % d’entre elles déclarant avoir créé une entreprise parce qu’elles ne parvenaient pas à obtenir un emploi, soit un niveau supérieur au taux global de 25 % en Belgique et à la moyenne de l’UE (18.8 %) (OECD, 2020[11]).
Renforcer et reconnaître les compétences acquises en dehors du système éducatif formel
Il est essentiel de renforcer les compétences numériques des catégories vulnérables pour stimuler la mobilité sociale ascendante en garantissant l’employabilité de ces individus et en facilitant les transitions sur le marché du travail (OECD, 2018[1]). Outre qu’elles complètent les technologies numériques pour gagner en productivité et en croissance des revenus, les compétences numériques permettent aux actifs de prospérer dans un monde du travail en évolution constante, où l'automatisation accélère le remplacement du travail humain par des machines dans un certain nombre de tâches (OECD, 2019[10]). Les travailleurs très qualifiés tirent généralement parti de la transformation numérique via des niveaux supérieurs d'emploi et de salaires (OECD, 2015[34]). Qui plus est, les taux actuels de vacance d’emploi sont particulièrement élevés dans les secteurs liés aux technologies de l’information et des communications (TIC).
La répartition des compétences numériques entre les catégories de population est particulièrement inégale en Belgique et affiche des écarts importants selon les niveaux d'éducation, de revenu et entre les sexes, lesquels reflètent les disparités de possibilités offertes sur le marché du travail. Ainsi, l'écart entre hauts revenus et bas revenus du pourcentage d’individus possédant un niveau de compétences numériques de base ou avancé est plus important qu'il ne l'est dans les pays voisins et nordiques (Graphique 2.8, partie A), et il en va de même pour l’écart entre hommes et femmes s'agissant des titulaires de diplômes universitaires en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM) (Graphique 2.8, partie B). Selon le Tableau de bord des femmes dans le secteur du numérique établi par la Commission européenne en 2021, 58 % seulement des femmes en Belgique disposent au moins de compétences numériques de base, contre 63 % des hommes, même si le niveau d’instruction des femmes est en moyenne plus élevé que celui des hommes. Il sera essentiel de puiser dans le potentiel inexploité de ces catégories pour répondre aux besoins aigus et croissants en compétences numériques, compte tenu de la diffusion rapide des technologies de l’information et des communications (TIC) dans le monde du travail en Belgique. En outre, les investissements prévus dans le plan national pour la reprise et dans les plans régionaux, très axés sur le numérique, devraient accroître la demande de compétences numériques (chapitre 1).
Il faudrait renforcer, dans le cadre de l’enseignement formel, les mesures visant à promouvoir la participation aux formations dans les disciplines STIM, tant auprès des adultes occupant un emploi que de ceux qui sont emploi, notamment les femmes. Les mesures mises en place par les autorités régionales pour promouvoir les disciplines STIM et remédier à la pénurie de diplômés dans ces filières, notamment la phase 2020-30 du plan d’action sur les STIM en Flandre, la stratégie Digital.Brussels dans la région de la capitale et la stratégie numérique Digital Wallonia 2019-24 en Wallonie, vont dans le bon sens, mais il serait possible d’aller plus loin. Faire état de l'avantage salarial des emplois à forte composante numérique facilement accessibles peut stimuler les candidatures à ce genre de formation. Cet avantage salarial étant toutefois relativement faible par rapport à d'autres pays de l’UE, il pourrait être nécessaire que les employeurs améliorent leur offre de rémunération à destination des spécialistes des STIM (OECD, 2020[9]). Il serait possible d’offrir des incitations financières plus fortes en assouplissant le mécanisme de fixation des salaires, de façon à lier plus fortement rémunérations et productivité (chapitre 1).
La formation continue est essentielle à la mobilité ascendante des revenus, car le maintien et le renforcement des compétences contribuent aux transitions sur le marché du travail, à la fois des métiers en déclin vers les nouveaux métiers, et de l’inactivité vers l’emploi (OECD, 2018[1]). Il est particulièrement important que les adultes soient formés aux TIC compte tenu du déficit en compétences numériques dont pâtissent les catégories vulnérables en Belgique, alors même que la crise du COVID-19 accélère la transformation numérique (OECD, s.d.[35]). Toutes les autorités ont pris des initiatives pour développer l'accès au numérique des catégories vulnérables (E-inclusion for Belgium au niveau fédéral, Digibanks en Flandre, plan d'action pour l'acquisition de compétences numériques à Bruxelles, Espaces Publics Numériques en Wallonie). Par ailleurs, selon Eurostat, seuls 45 % des 55-64 ans disposent d'un niveau de compétences numériques de base ou avancé, ce qui constitue un motif de préoccupation majeur eu égard aux récentes réformes retardant l’âge de départ à la retraite, qui rendront d'autant plus nécessaire la prévention de l’obsolescence des compétences de la main-d'œuvre plus âgée (chapitre 1).
En Belgique, la participation globale à la formation continue se situe autour de la moyenne de l’UE, mais masque d'importantes disparités selon les niveaux de diplôme et de compétences (HCE, 2021[36]). Le taux de participation des personnes occupant un emploi s'établit ainsi à 54 %, un niveau supérieur à celui de l’UE (52 %), mais bien inférieur à ceux des pays les plus performants (Pays-Bas, par exemple) (Graphique 2.9, partie A). Chez les sans-emploi, la participation à la formation continue est particulièrement élevée, à 42 % contre 28 % pour l’UE, et s'explique par le grand nombre de possibilités de formation offertes par les services publics de l’emploi dans les trois régions du pays. Les données sur la qualité des formations sont peu nombreuses, mais font état d’un impact global sensible et durable sur la recherche d’emploi des personnes concernées en Wallonie (Fonder, Lejeune et Tarantchenko, 2019[37]). Cependant, la participation des peu diplômés est inférieure de 45 points de pourcentage à celle des très diplômés, et la participation des actifs exerçant des emplois peu qualifiés est inférieure de 38 points de pourcentage à celle des actifs dans des emplois très qualifiés (Graphique 2.9, partie B). L'écart de participation entre les jeunes et les plus âgés est également l’un des plus élevés de l’UE. La persistance de ces écarts de participation à la formation risque d’enraciner plus profondément encore la persistance actuelle des bas revenus en creusant les disparités de compétences préexistantes (HCE, 2021[36]).
Les mesures en faveur de la formation tout au long de la vie devraient être simplifiées et mieux coordonnées, car la multiplicité des dispositifs, des fournisseurs et des administrations impliqués crée une complexité particulièrement préjudiciable à la participation des catégories vulnérables (HCE, 2021[36]). Le gouvernement fédéral a fait à juste titre de la formation continue un objectif majeur de politique publique, conformément au programme de la Commission européenne. Les projets de réforme prévoient l'activation de l’article 39 ter de la loi relative aux contrats de travail, aux termes duquel un tiers des indemnités de licenciement sera utilisé pour offrir une formation au salarié concerné. Les régions et les partenaires sociaux mettent en œuvre leurs propres mesures, comme le plan d’action Alle hens aan deck (Tous sur le pont) en Flandre ou le centre de formation Cefora de la Commission paritaire 200 (CP 200), une initiative de formation mise en place par la principale commission paritaire pour employés. Le plan national pour la reprise et la résilience prévoit également des mesures de formation continue. Ce cadre institutionnel complexe mériterait d’être simplifié, et une coordination devrait être assurée entre les différents échelons de gouvernement.
La mise en place d'un compte individuel de formation, prévue dans le budget du Gouvernement fédéral, et qui faisait partie des recommandations de l’Étude économique de 2020, constitue une avancée majeure pour améliorer l’efficacité et l’inclusivité de la formation continue. En convertissant l’obligation qui était faite aux entreprises d'accorder en moyenne cinq jours de formation par an à leurs salariés en un droit individuel des travailleurs, le compte individuel de formation assure la portabilité des droits à la formation, accroît la responsabilité des travailleurs dans leur choix de parcours de formation et leur garantit à tous, y compris aux catégories vulnérables comme les peu qualifiés, un accès à la formation. Il conviendra d’assurer une coordination avec les administrations régionales pour que le compte individuel de formation puisse intégrer les initiatives régionales d’apprentissage tout au long de la vie, notamment le compte d’apprentissage et de carrière qui est en cours d’élaboration en Flandre et la réforme du congé-éducation payé prévue dans la Région de Bruxelles-Capitale.
L’offre de formations de qualité dans les domaines en forte demande de compétences et d'un accompagnement individuel pour le choix des programmes de formation est une condition sine qua non de la réussite du compte individuel de formation (OECD, 2019[38]). L’orientation professionnelle étant de plus en plus dispensée en ligne, il convient de maintenir des services en face à face pour éviter l’exclusion des populations ne disposant pas de compétences numériques suffisantes ou d’un accès à Internet (OECD, 2021[39]). Ces services pourraient être ciblés à la manière du modèle néerlandais, en vertu duquel les demandeurs d’emploi qui sont statistiquement les plus susceptibles de connaître le chômage de longue durée sont systématiquement invités à un entretien en face à face avec un conseiller, tandis que les autres chômeurs sont orientés au départ vers les services en ligne. En outre, un affinement approprié de la cible est nécessaire pour réduire le coût budgétaire tout en stimulant la participation des catégories vulnérables. Par exemple, abonder les comptes individuels en euros plutôt qu’en jours de formation, comme la France l'a fait en 2018, permettrait aux peu qualifiés d'avoir accès à plus de formations puisque le coût pour les former est inférieur (OECD, 2019[40]). Il convient aussi de veiller à l'implication constante des employeurs dans la conception des programmes de formation pour réduire le décalage entre l’offre et la demande de compétences affectant les catégories vulnérables (voir ci-après).
Un meilleur ciblage de la formation continue au profit des catégories vulnérables est essentiel à l'amélioration de la mobilité des revenus, notamment en augmentant la participation des individus peu qualifiés. Les services d’information existants, tels que le Leerwinkel en Flandre, devraient continuer de cibler les peu qualifiés et les immigrés, en collaboration avec les services publics de l’emploi et de l’immigration. Par ailleurs, les initiatives visant à aller à la rencontre des populations participant peu à la formation continue, comme l’unité mobile Formtruck à Bruxelles et la Cité des métiers à Bruxelles et en Wallonie, devraient être évaluées et au besoin, développées. En Flandre, le dispositif Opleidingskrediet, qui complète le congé payé de formation accordé par les autorités régionales, cible aussi les catégories participant peu à la formation continue en offrant une allocation d'un montant supérieur aux ménages composés d'une seule personne. Dans leur mise en place du compte individuel de formation, les pouvoirs publics et partenaires sociaux pourront aussi s'appuyer sur l’expérience française du « compte personnel de formation », dont l’accès est universel, mais le soutien financier variable selon les catégories de population (Encadré 2.5).
De nombreuses mesures régionales de politique publique et initiatives privées visent à promouvoir les compétences et connaissances entrepreneuriales auprès de certaines catégories vulnérables, dont les jeunes, les chômeurs, les femmes et les personnes en situation de handicap. Certaines de ces populations restent toutefois peu sensibilisées, et la complexité des démarches tend à limiter leur participation (OECD, 2020[11]). En outre, il existe peu de données concernant l’efficacité de ces programmes. Simplifier l’offre de programmes de formation aux compétences entrepreneuriales et créer un système de guichet unique permettraient de clarifier le dispositif et d’atteindre plus facilement les populations ciblées. Il est fondamental d'évaluer les programmes existants, et cet exercice pourrait s’inspirer de l'évaluation des mesures visant à promouvoir l’esprit d’entreprise dans l’enseignement secondaire, mises en place dans le cadre du Plan Marshall 4.0 de la Wallonie (Van Haeperen, Meunier et Mosty, 2019[41]). Les programmes de formation aux compétences entrepreneuriales pourraient également cibler directement les populations d’origine immigrée, compte tenu des écarts d’emploi et de compétences importants dont elles pâtissent.
Encadré 2.5. L’individualisation des dispositifs d’accès à la formation : l’exemple français
Le compte personnel de formation (CPF) est un dispositif individualisé de financement des formations professionnelles dans lequel les droits à la formation se cumulent au fil du temps. Mis en œuvre en 2015, ce compte est ouvert à tous les actifs et intégralement transférable tout au long de leur vie professionnelle, de l'entrée sur le marché du travail jusqu’à la retraite. Il a été réformé en 2018 pour développer l'accès à la formation des peu qualifiés et des demandeurs d’emploi. Initialement crédité en heures de formation, le CPF est désormais abondé en euros, une modification visant à corriger les disparités en termes de coûts horaires des formations. Le montant des crédits annuels est fondé sur le niveau de qualification des travailleurs : chaque actif dispose de 500 EUR par an sur son CPF pour suivre des formations, les moins qualifiés disposant de 800 EUR (les montants étant plafonnés à respectivement 5 000 EUR et 8 000 EUR sur dix ans). La réforme a également institué un service d’accompagnement pour les bénéficiaires potentiels, de même que le contrôle de la qualité des formations proposées et des informations fournies à leur sujet. Une partie des fonds alloués à la formation professionnelle et à l’apprentissage est affectée aux « conseils en évolution professionnelle » (CEP).
Source : OCDE (2020), L’individualisation des dispositifs d’accès à la formation : l’exemple français du Compte Personnel de Formation; et OCDE (2019), Études économiques de l’OCDE : France 2019.
Les décalages entre l’offre et la demande sur le marché du travail compromettent aussi les chances de mobilité ascendante des individus, car le fait de disposer des bonnes compétences ou d'avoir suivi la filière d'études adaptée à un poste a des conséquences durables sur la rémunération et l’emploi tout au long d’une carrière (OECD, 2018[1]) Par ailleurs, ces décalages s'accompagnent d'une moindre productivité, du fait d’une moindre efficience dans l'allocation des ressources, et peuvent contribuer aux inégalités de revenu dans un contexte de pénuries de compétences (Mcgowan et Andrews, 2015[42]). Les travailleurs immigrés, notamment ceux qui n’ont pas quitté leur pays à cause du travail, peuvent être particulièrement exposés aux déséquilibres entre l'offre et la demande sur le marché du travail, la méconnaissance de la langue et du marché du travail du pays d'accueil les empêchant de constituer des réseaux et de rechercher un emploi de manière efficace.
En Belgique, la surqualification est un phénomène courant chez les travailleurs immigrés non originaires de l’UE (HCE, 2018[23]). Près de 40 % des personnes nées en dehors de l’UE et travaillant en Belgique sont surqualifiées, soit deux fois plus que les individus nés dans le pays, et sensiblement davantage qu’en Allemagne, en France et aux Pays-Bas (Graphique 2.10, partie A). L'asymétrie entre le niveau de qualification des immigrés non originaires de l’UE et celui que nécessite leur emploi est particulièrement fréquente chez les très diplômés et peut conduire à une dépréciation des compétences (Graphique 2.10, partie B). Le fait que les flux d’immigration aient en grande partie pour origine des raisons familiales ou humanitaires contribue aussi aux décalages avec les besoins du marché du travail (OECD, 2015[43]).
Il conviendrait d'encourager la reconnaissance des compétences obtenues en dehors des systèmes éducatifs classiques, notamment celles que les immigrés ont acquises à l'étranger. Selon un module ad hoc de l’Enquête de 2014 sur les forces de travail, un quart des répondants surqualifiés attribuent ces décalages aux difficultés pour faire reconnaître les qualifications obtenues à l'étranger (HCE, 2018[23]). Les immigrés devaient donc être orientés rapidement et systématiquement vers des services de validation des compétences. Ces services pourraient prendre différentes formes, y compris numériques, comme l'application pour smartphones « Recognition in Germany », qui a été conçue pour le compte du ministère allemand de l’Éducation et de la Recherche, afin de fournir des informations faciles à comprendre sur les procédures et critères de reconnaissance applicables (OECD, 2017[44]). Les procédures de reconnaissance des diplômes obtenus à l’étranger pourraient être plus rapides et l'on pourrait s'inspirer de la procédure accélérée mise en place par la Suède pour les professions en tension, qui associe la reconnaissance des diplômes étrangers et la validation des acquis étrangers à des cours de langue pour la délivrance d’un certificat d'aptitude professionnelle (OECD, 2017[44]). Une coordination devrait être assurée entre les trois communautés, qui ont compétence pour la reconnaissance des diplômes, et les frais pourraient être modulés en fonction des revenus ou supprimés, comme il est d'usage dans la Communauté germanophone.
Des politiques d’activation efficaces pour tous
Les politiques d’activation du marché du travail sont essentielles pour réduire l’impact à long terme du chômage sur les trajectoires de revenus et éviter que des périodes de chômage n’entravent la future mobilité ascendante des travailleurs. Des programmes d’activation efficaces peuvent également contribuer à réduire les risques de mobilité descendante. En effet, l’augmentation des dépenses consacrées à de tels programmes s’accompagne d’une baisse de la proportion de ménages à revenu moyen qui glissent vers la tranche basse de la distribution des revenus (OECD, 2018[1]). La crise du COVID-19 a renforcé l’importance de l’activation pour assurer la résilience du marché du travail, tandis que la poursuite de la transformation numérique et l’évolution de la nature du travail tendent à augmenter le risque de transitions hors des formes typiques d’emploi et, donc, la nécessité d’un soutien à la recherche d’emploi (OECD, 2021[45]). Un ciblage adéquat est essentiel pour garantir que l’activation augmente l’employabilité des demandeurs d’emploi de manière rentable (OECD, 2015[46]).
La Belgique obtient de bons résultats en ce qui concerne les dépenses d’activation et les réformes prévues devraient faciliter les transitions d'un emploi à un autre, notamment l’utilisation d’une partie de l’indemnité de licenciement pour subventionner le salaire chez un nouvel employeur. La structure des dépenses s’est améliorée et les dépenses d’activation allouées à la formation ont augmenté, passant de 15.9 % en 2017 à 18.5 % en 2019, mais elles restent inférieures à la moyenne de l’OCDE, qui se situe à 23.7 % (Graphique 2.11, partie A). Toutefois, les dépenses pourraient être mieux ciblées sur les groupes vulnérables, en particulier les migrants et les personnes handicapées. Les citoyens non belges (issus ou non de l’UE) bénéficient moins des mesures d’activation que les nationaux (HCE, 2018[23]). Pourtant, les immigrés non ressortissants de l’UE auraient besoin de dépenses d’activation plus efficaces, car l’incidence du chômage de longue durée est nettement plus élevée dans ce groupe (52 %) que pour les personnes nées en Belgique (40.3 %) (Graphique 2.11, partie B). En outre, si les transitions du marché du travail vers l’inactivité ont augmenté pour l’ensemble de la population pendant la crise du COVID‑19, les groupes vulnérables ont été particulièrement touchés : 29 % des immigrés non ressortissants de l’UE et 21 % des personnes handicapées ont perdu temporairement ou définitivement leur emploi, contre 14 % et 15 % respectivement pour les personnes nées en Belgique et les personnes non handicapées (Lens, Marx et Mussche, 2020[47]).
Dans les trois régions, le recours à des outils de profilage statistique pour la prestation de services d’emploi devrait être élargi afin de cibler les groupes vulnérables. Les services publics de l’emploi complètent de plus en plus souvent le profilage basé sur des critères d’admissibilité et d’appréciation individuelle par des modèles statistiques permettant d’anticiper les situations de désavantage sur le marché du travail et de classer les demandeurs d’emploi en différentes catégories pour les inciter à la reprise de l’emploi (Desiere, Langenbucher et Struyven, 2019[48]). Concevoir des outils statistiques qui prennent en compte le statut d’immigré ou l’état de santé tout en respectant les réglementations sur la protection de la vie privée pourrait permettre d’identifier plus facilement les personnes les plus exposées au chômage de longue durée et d’intervenir de manière plus précoce et mieux adaptée aux besoins individuels. Par exemple, les données basées sur les mesures d’activation visant les chômeurs récents en Flandre montrent que le pays de naissance des demandeurs d’emploi, leur âge et leur connaissance du néerlandais, sont d'important facteurs prédictifs du type de mesures d’activation susceptibles d’accélérer le retour à l’emploi (Boolens, Cockx et Lechner, 2020[49]). Les modèles existants basés sur l’apprentissage automatique, tels que le programme NextBestSteps de la Flandre et le modèle d’évaluation de la proximité de l’emploi de la Région wallonne, devraient être élargis afin de développer des programmes d’activation du marché du travail sur mesure pour les demandeurs d’emploi.
La formation linguistique sur le lieu de travail doit être encouragée, car la connaissance de (l’une au moins des) langues nationales est essentielle non seulement pour l’intégration sur le marché du travail, mais aussi pour participer à l’apprentissage tout au long de la vie. En outre, la connaissance de l’une des langues nationales a plus de chances de réduire les déséquilibres entre l’offre et la demande d’emploi grâce à une intégration plus rapide sur le marché du travail, comme le suggère indirectement le fait que les immigrés nés hors de l’UE sont plus susceptibles de maîtriser une langue nationale lorsqu’ils travaillent (HCE, 2018[23]). Comme c’est le cas dans beaucoup d’autres pays, les autorités régionales belges investissent de plus en plus dans la formation linguistique des immigrés (OECD, 2020[50]). En Flandre, en Wallonie et dans la communauté germanophone, les trajectoires d’intégration obligatoires pour les immigrés comprennent des cours de langue, et la région de Bruxelles-Capitale devrait elle aussi donner corps, sans plus attendre, à la législation récemment adoptée concernant les programmes d’intégration obligatoires.
L’effet de la formation linguistique sur l’intégration au marché du travail est plus fort si elle est liée à des compétences linguistiques professionnelles (OECD, 2021[51]). Une part plus importante des dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail pourrait être allouée à la formation linguistique professionnelle sur le lieu de travail. En Flandre, le programme Integratie door Werk (Intégrationpar le travail) du service public de l’emploi propose des trajectoires d’activation ciblées sur les immigrés, qui comprennent des cours de néerlandais sur le lieu de travail (HCE, 2018[23]). Pour mettre en œuvre et étendre ces mesures, les gouvernements régionaux peuvent s’inspirer de l’expérience du programme de mentorat linguistique de l’Agence nationale pour l’emploi de Lettonie destiné aux réfugiés qui travaillent, qui s’est avéré très efficace pour aider les immigrés à s’adapter à leur environnement de travail en leur offrant une formation linguistique professionnelle spécifique sur le lieu de travail (OECD, 2020[50]).
Pour compléter les mesures d’activation qui ciblent les populations immigrées, il faut continuer à promouvoir la diversité et la lutte contre la discrimination. La discrimination sur le marché du travail aggrave les écarts d’emploi, contribue aux écarts de salaire, et affaiblit également l’efficacité des mesures d’activation (HCE, 2018[23] ; FPS Employment/UNIA, 2019[27] ; view.brussels, 2019[52]). Des mesures visant à protéger les témoins dans les affaires de discrimination ont récemment été ajoutées à une législation anti-discrimination déjà solide à différents niveaux de gouvernement. La loi fédérale de 2018 qui autorise les inspecteurs sociaux à prouver l’existence d’une infraction en rapport avec la discrimination au travail en passant des appels anonymes ou en se rendant incognito sur le terrain, est en cours d'assouplissement car jusqu’à présent, des conditions trop strictes en ont limité l'utilisation (UNIA, 2020[53]). Des initiatives similaires sont prises par les gouvernements régionaux. En outre, la législation devrait comprendre également des mesures destinées à soutenir des pratiques d’embauche inclusives, en s’appuyant éventuellement sur les informations disponibles sur la composition des origines du personnel de la Banque-carrefour de la Sécurité Sociale pour identifier les schémas de discrimination et améliorer la conception des politiques anti-discrimination (UNIA, 2020[54] ; view.brussels, 2019[52]). Les nouvelles mesures du gouvernement fédéral concernant le suivi de la diversité par secteurs sont un premier pas dans cette direction.
Les systèmes d’indemnités d’invalidité devraient offrir un juste équilibre entre la protection et les incitations au travail pour réintégrer les travailleurs malades, tout en restreignant les entrées injustifiées dans ces régimes. Les dépenses d’incapacité (invalidité, maladie, accident du travail), qui représentent 3 % du PIB en Belgique, sont supérieures à la moyenne OCDE de 2 % (Graphique 2.12, partie A). La part des personnes inactives ne cherchant pas d’emploi pour cause de maladie ou de handicap est passée de 10.7 % en 2007 à 18.4 % en 2020, dépassant la moyenne de l'UE qui s’élève à 12.3 %. La part des bénéficiaires d'indemnités d’invalidité, en particulier celle des femmes, a augmenté (Graphique 2.12, partie B), pour une part en raison de l’augmentation du taux d’activité des femmes et de l’alignement de leur âge légal de départ à la retraite (Saks, 2017[55]), et pour une autre part sous l’effet de la régularisation de travailleurs auparavant non déclarés avec la mise en place du système de titres-services (Leduc et Tojerow, 2020[56]). Le budget 2022 prévoit de lier les financements aux régions à leurs résultats en matière de réinsertion des travailleurs, d’introduire des outils et des incitations devant permettre d'allier travail partiel et prestations, de durcir les sanctions pour les employeurs et les salariés et d’introduire un parcours de réinsertion 2.0 visant à simplifier et à accélérer le processus d’intégration, notamment par l’utilisation d’outils numériques, ce qui est une bonne chose.
Il convient d’accorder la priorité à la mise en place rapide de parcours formels visant à réintégrer les bénéficiaires de prestations de maladie et d’invalidité dans le monde du travail. Une procédure d’intégration formelle a été introduite en 2016 pour compléter les parcours informels existants ; elle comprend une visite médicale volontaire auprès du médecin du travail ou une obligation d’examen de retour au travail pour les travailleurs sous surveillance médicale obligatoire. La procédure formelle exige que les médecins de la mutualité évaluent les possibilités de réintégration dans les deux premiers mois de l’arrêt-maladie. Les employeurs comme les salariés trouvent les procédures officielles de réintégration lourdes sur le plan administratif, lentes et insuffisamment individualisées et flexibles. L’employé peut demander une réintégration officielle à tout moment pendant son congé de maladie et l’employeur quatre mois après le début de l’incapacité, mais la participation à ces parcours informels reste limitée. De plus, 40 % des personnes qui suivent un parcours formel attendent au moins un an avant d’avoir un premier contact avec le médecin du travail, contre 25 % pour les parcours informels, et 42 % seulement reprennent le travail (souvent chez un autre employeur), ce qui est inférieur au taux des parcours informels (73 %) (Boets et al., 2020[57]).
Il faut saluer les nouvelles réformes visant à mieux coordonner les politiques et la collecte des données afin d’adapter ces politiques aux besoins individuels et de suivre les personnes à travers les différentes étapes. Jusqu'à une date récente, bien qu’il existe certaines mesures de soutien pour les travailleurs jugés inaptes à reprendre leur emploi, celles-ci n'étaient pas systématiques et aucune donnée n’était collectée sur leur situation après le licenciement (Lopez-Uroz, Westhoff et Akgüç, 2021[58]). En janvier 2022, l'adoption du plan Trajet Retour au Travail s'est accompagné de la création de postes de Coordinateurs Retour au Travail au sein des mutualités. La mission de ces Coordinateurs permettra de systématiser une interaction précoce avec les salariés demandant à bénéficier d'indemnités de maladie et de les orienter dans la conception d'un trajet de retour à l'emploi répondant à leurs besoins et à leurs compétences ; elle sera également utile pour collecter des données et échanger des renseignements avec les services publics de l'emploi dans les régions. Il sera important d'évaluer les effets de cette mesure récente. D'autres pays de l'OCDE, par exemple la Finlande, ont mis en place des « guichets uniques » qui réunissent les services publics de l’emploi, les services sociaux et des soins de santé, les services de l’agence nationale d’assurance et les experts professionnels en sous-traitance, et un partenariat non hiérarchique d’acteurs de différents niveaux d’administration (OECD, 2021[59]).
Il conviendrait de renforcer les incitations à participer aux programmes d’activation. Les travailleurs inaptes à reprendre leur emploi précédent doivent se recycler, mais la participation des personnes handicapées à l’apprentissage tout au long de la vie, qui s’élève à 10.8 % en Belgique, est inférieure à la moyenne de l'UE de 18.7 %. L’une des voies de retour au travail est la réadaptation professionnelle accompagnée d’incitations financières. Les participants continuent à recevoir leurs prestations et sont payés pour chaque heure de formation, et reçoivent en outre un paiement forfaitaire de 500 euros à la fin de la formation. Toutefois, les participants peuvent perdre leur droit aux prestations d’invalidité dans les six mois suivant la formation, ce qui peut avoir un effet dissuasif. Cette règle devrait être supprimée et les bénéficiaires encouragés à participer à des programmes d’activation rigoureusement évalués.
En Belgique, comme dans d’autres pays, l’absentéisme au travail lié à la santé mentale est en hausse. En 2019, 36 % des bénéficiaires de prestations d’invalidité présentaient des problèmes de santé mentale (FPB, 2021[60])surtout parmi les jeunes (Graphique 2.13, parties A et B) et les mères célibataires. Les coûts directs (santé et prestations) et indirects (participation et productivité réduites) des problèmes de santé mentale représentent 5.3 % du PIB en Belgique, contre une moyenne européenne de 3.6 % (Graphique 2.13, partie C ; OCDE, (2021[61]). La pandémie a pu exacerber ces tendances, puisque la proportion d’adultes souffrant d’anxiété a doublé en avril 2020 par rapport à l’année précédente (OECD, 2020[62]) et s’est stabilisée depuis à un niveaux plus élevé (FPB, 2022[63]). La santé mentale est devenue, à juste titre, un élément central de l’agenda politique à tous les niveaux de gouvernement (CSS, 2021[64]).
Au-delà des mesures de prévention, il est essentiel de mieux intégrer les services d’emploi et de santé mentale et d’adopter des mesures plus larges pour identifier rapidement les personnes souffrant de problèmes de santé mentale. La réforme des systèmes d'indemnités d’invalidité mentionnée plus haut y contribuera. Toutefois, au milieu des années 2010, 50 % des personnes souffrant de troubles mentaux, bénéficiant de prestations, touchaient des allocations de chômage (OECD, 2021[65]). Plusieurs évaluations ont mis en lumière la nécessité d’améliorer en priorité la continuité des soins entre les services (santé, santé mentale, sociaux) dans l’organisation des soins de santé mentale pour adultes en Belgique (Devos et al., 2019[66] ; Mistiaen et al., 2019[67]). Selon une nouvelle évaluation comparative des systèmes de soins de santé mentale, la Belgique n’inclut pas systématiquement les résultats en termes d’emploi dans la prestation des services de santé mentale ou les résultats en matière de santé mentale dans les services de soutien à l’emploi (OECD, 2021[61]).
On pourrait utiliser davantage les programmes de placement et de soutien individuels (IPS), qui sont des pratiques fondées sur des données probantes selon lesquelles des équipes multidisciplinaires de santé mentale, comprenant un spécialiste de l’emploi, fournissent un soutien coordonné en matière de santé et d’emploi aux demandeurs d’emploi. La Belgique dispose, depuis 2017, de programmes IPS pilotes pour les personnes souffrant de problèmes de santé mentale, qui suivent le modèle « placer puis former », axé sur l’aide à l’obtention rapide d’un emploi. Les programmes IPS ont donné des résultats positifs en matière d’emploi en Australie et au Danemark (OECD, 2021[65]). En fonction des évaluations, qui seront achevées d’ici 2023, ces programmes devraient être étendus. Leur conception doit permettre de relever les défis du financement et de la mise en œuvre de la mise à l’échelle, sur la base des meilleures pratiques internationales (OECD, 2021[59]). Par exemple, il sera important de compléter l’orientation du programme sur les transitions vers l’emploi par des mesures visant à maintenir l’emploi et à permettre la progression professionnelle.
Renforcer les incitations à travailler pour les parents isolés à faible revenu et les deuxièmes apporteurs de revenu
Les systèmes d’impôts sur le travail et de prestations ont des répercussions importantes sur la mobilité des revenus. En effet, ils modifient la participation au marché du travail et amortissent l’impact des transitions défavorables, par exemple vers le chômage (OECD, 2018[1]). Pour favoriser la mobilité sociale sans créer d’insécurité économique, les prélèvements et les prestations doivent permettre un bon équilibre entre le maintien de fortes incitations à la participation au marché du travail et une protection efficace contre les pertes de revenus du travail. En outre, pour garantir l’égalité des chances sur le marché du travail, les systèmes d’de prélèvements et de prestations doivent être exempts de préjugés implicites à l’encontre de groupes spécifiques en raison des différentes réalités socio-économiques auxquelles ils sont confrontés, par exemple des femmes, en raison des disparités entre hommes et femmes en matière de taux d'activité et de revenus (Harding, Perez-Navarro et Simon, 2020[68]).
La Belgique allie des taux de remplacement de revenu élevés pour les chômeurs et de fortes désincitations financières au travail, en particulier pour les travailleurs dont l’emploi précédent était peu rémunéré (Hijzen et Salvatori, 2020[69]), comme expliqué en détail dans l’Étude économique de la Belgique 2020. La Belgique, tout comme la France et la plupart des pays nordiques, fait partie des pays où la fiscalité et les transferts sociaux ont le plus d’impact sur l’amortissement des pertes importantes de revenus marchands (OECD, 2018[1]). Malgré l’intention du gouvernement fédéral de poursuivre les réformes visant à accroître les incitations au travail pour les travailleurs percevant un faible salaire (Encadré 2.4, ci-dessus), les taux d’imposition de l’activité, (c’est-à-dire la part du revenu d’activité supplémentaire qui est perdue en raison de la baisse des allocations et de la hausse des impôts pour les travailleurs percevant un faible salaire) restent élevés pour certains groupes (Adalet McGowan et al., 2020[24] ; OECD, 2020[70]).
Les taux d’imposition de l’activité pour les parents isolés à faible revenu et les deuxièmes apporteurs de revenus avec enfants sont parmi les plus élevés de l’OCDE et devraient être réduits. En 2021, le taux d’imposition de l’activité s’élevait à 43.5 % pour les deuxièmes apporteurs de revenus bénéficiant d’un revenu minimum garanti, ce qui est supérieur à la moyenne de 32.7 % de l’OCDE (Graphique 2.14, partie A). Le gouvernement fédéral a accru l’avantage fiscal attaché aux services de garde d’enfants en 2020. D’autres mesures visant à accroître les incitations au travail devraient prendre en compte le cas des deuxièmes apporteurs afin d’atteindre les objectifs d’emploi du gouvernement fédéral pour des groupes spécifiques, en particulier les femmes, à moindre coût budgétaire. Le système de quotient conjugal pour les couples, qui diminue l’impôt global sur le revenu du travail des ménages dans le cadre de l’imposition progressive en permettant à un montant théorique de revenus d’être transféré entre les époux si l’un d’entre gagne 30 % ou moins du revenu total du foyer, devrait être réduit ou aboli, car il décourage généralement le deuxième apporteur de travailler. Les prestations liées à l’exercice d’un emploi compenseraient l’augmentation concomitante de l’imposition moyenne du travail pour les ménages à faibles revenus (voir ci-après).
Des améliorations ciblées des incitations au travail devraient rendre le travail attractif pour les parents isolés, qui sont confrontés à un taux d’imposition de 84.8 % lorsqu’ils bénéficient d’allocations de chômage, ce qui est supérieur à la moyenne de 68.1 % de l’OCDE (Graphique 2.14, partie B). L’introduction de prestations liées à l’exercice d’un emploi favoriserait le retour sur le marché du travail et éviterait des phénomènes de dépendance prolongée à l’égard des prestations sociales. Ces mesures qui rendent le travail attractif financièrement sont communes à tous les pays de l’OCDE, y compris la France (Prime d’activité) et les États-Unis (Earned Income Tax Credit). Une autre option consiste à permettre aux personnes à faible revenu de cumuler les allocations de chômage et les revenus du travail, en s’appuyant sur le système existant pour les travailleurs à temps partiel, à l’instar de la réforme prévue par le gouvernement fédéral pour les chômeurs de longue durée qui acceptent de prendre un emploi par-delà la frontière linguistique ou d’occuper un poste difficile à pourvoir. Un ciblage efficace sera essentiel pour limiter les coûts budgétaires.
Faciliter la garde des enfants de 0 à 2 ans issus de ménages à faibles revenus contribuerait également à réduire les taux d’imposition de l’activité des parents isolés et inciterait davantage les femmes à travailler, notamment parmi les immigrées. En Belgique, presque tous les enfants de 3 ans et plus fréquentent une structure d’éducation et d’accueil des jeunes enfants, et le taux de fréquentation des enfants de moins de trois ans (60 %) est élevé (OECD, 2020[9]). Cependant, les populations immigrées utilisent peu ces structures, bien qu’elles soient largement disponibles et peu coûteuses, ce qui se traduit par des écarts d’emploi importants pour les femmes immigrées (Biegel, Wood et Neels, 2021[71]). Il existe un écart de près de 13 points de pourcentage entre le taux d’emploi des femmes nées en Belgique et celui des immigrées (Graphique 2.15, partie A). Dans le même temps, près de 70 % des enfants de 0 à 2 ans issus de ménages à haut revenu utilisent des services de garde d’enfants en Belgique, contre 36.4 % seulement de ceux issus de ménages à faible revenu, dont un nombre disproportionné est issu de l’immigration (Graphique 2.15, partie B). Il faudrait augmenter l’offre de structures d’éducation et d’accueil des enfants de moins de trois ans, comme le recommande l’Étude économique de 2020 sur la Belgique. Des mesures de sensibilisation devraient cibler les ménages immigrés et s’attaquer à la fois aux normes culturelles et à la méconnaissance du système de garde d’enfants.
Les mesures visant à promouvoir la garde d’enfants chez les foyers à revenu modeste devraient être associées à des mesures d’activation ciblées, notamment des cours de langue à destination des mères immigrées, en s’appuyant sur des initiatives existantes, telles que la Maison d’Enfants d'Actiris et la coordination du réseau de structures d’accueil de jeunes enfants. Bien que les pratiques actuelles donnent la priorité aux parents qui travaillent lorsque le nombre de places dans les structures d’accueil est limité, en réalité, l’utilisation réelle peut être inférieure à la capacité totale, par exemple en raison d’enfants malades. Cette capacité inutilisée permettrait aux enfants de ménages vulnérables de fréquenter ces établissements pendant que leur parent participe à une formation basée sur l’activation. De telles mesures combinant la garde d’enfants et l’activation contribueraient à résoudre le problème des parents, en particulier immigrés, qui ne sont pas en mesure de suivre une formation parce qu’ils doivent s’occuper de leurs enfants. Il est nécessaire de coordonner les services publics de l’emploi et les organismes publics de garde d’enfants pour prévoir l’utilisation réelle des structures d’accueil et attribuer des places aux enfants des personnes qui suivent une formation.
Accroître l’égalité des chances dans l’enseignement obligatoire
Les résultats scolaires d’ensemble des élèves belges se situent autour de la moyenne de l’OCDE et sont comparables à ceux des pays voisins, mais ils mettent en lumière d’importantes disparités entre les élèves. Ces résultats varient entre les trois communautés (le niveau de gouvernement auquel l’enseignement est organisé en Belgique ; voir Encadré 2.6 et OCDE (2017[72]) pour plus de détails) – avec des performances élevées mais en baisse en Communauté flamande, relativement faibles en Communauté française et se situant entre les deux en Communauté germanophone. Toutefois, les écarts de performance en fonction du milieu d’origine sont nettement plus importants que les différences observées entre les communautés. La Communauté flamande et la Communauté française se caractérisent toutes deux par une détermination relativement élevée des résultats scolaires par le statut socioéconomique, comme le montrent les différences considérables des scores obtenus aux tests en fonction du milieu socioéconomique (Graphique 2.16). Selon les résultats de l’enquête PISA de 2018, l’écart des scores en matière de compréhension de l’écrit entre les élèves du quartile supérieur de l’indice de Statut économique, social et culturel (SESC) et ceux du quartile inférieur est l’équivalent de plus de trois années de scolarité, faisant de la Belgique le cinquième pays de l’OCDE où cet écart est le plus fort (OECD, 2019[73]).
Plusieurs autres indicateurs mettent en évidence l’importance de la corrélation entre le milieu socioéconomique des élèves et leurs résultats scolaires. La variance des résultats en compréhension de l’écrit s’explique par le milieu d’origine à hauteur de 17.2 %, soit le cinquième taux de l’OCDE par ordre décroissant, dépassant de loin la moyenne de 12 % (OECD, 2019[73]). Seuls 9 % des élèves belges sont dits « scolairement résilients », ce qui signifie qu’ils se classent dans le quartile supérieur pour la compréhension de l’écrit tout en appartenant au quartile inférieur de l’indice SESC, soit le quatrième pourcentage le plus faible de l’OCDE (OECD, 2019[73]). Les perturbations entraînées par la pandémie de COVID-19 dans l’enseignement en classe ont vraisemblablement creusé l’écart lié au milieu socioéconomique dans les résultats scolaires, en raison des différences d’accès aux outils d’apprentissage à distance : 84 % des élèves belges défavorisés ont accès à un ordinateur pour leur travail scolaire, contre 98 % des élèves favorisés (OECD, 2021[74]). Dans ce contexte, les communautés ont, à juste titre, mis en place des mesures ciblant les élèves exposés au risque d’exclusion des plateformes d’enseignement à distance, notamment des mesures spéciales pour que le télé-enseignement soit plus accessible aux enfants issus de l’immigration dans la Communauté française (OECD, 2021[75]).
Les inégalités de résultats scolaires entre élèves favorisés et défavorisés se traduisent par des différences importantes entre les établissements scolaires et les programmes, dans la mesure où le libre choix de l’école par les élèves (et leurs parents, en fait) dépend trop largement de leur milieu socioéconomique. La ségrégation spatiale accentue les différences entre les établissements scolaires, car les élèves sont plus susceptibles de choisir une école à proximité de chez eux. Ce tri des écoles en fonction du statut socioéconomique affiche généralement une corrélation négative avec l’équité dans l’éducation (Graphique 2.17, partie A ; et (OECD, 2019[73])). Les différences entre les écoles reflètent un processus dans lequel se cumulent deux formes de sélection, sociale et scolaire (Nicaise, 2019[76]). Cette " auto-sélection " initiale selon des critères socioéconomiques conduit à des résultats scolaires inégaux en raison de plusieurs mécanismes, notamment les effets de type " groupes de niveau " ou les attentes des enseignants, moins exigeants à l’égard des élèves défavorisés. Les disparités de performance se creusent ensuite sous l’effet du processus de ségrégation scolaire, les élèves étant orientés vers des filières différentes en fonction de leurs résultats antérieurs, de sorte que la ségrégation sociale et la ségrégation scolaire se renforcent mutuellement.
L’orientation des élèves selon leurs résultats scolaires, eux-mêmes fortement déterminés par leur milieu socioéconomique, est un moteur essentiel des inégalités sociales dans le système éducatif belge (Hindriks et Godin, 2018[77] ; De Witte et Hindriks, 2018[78]). Par exemple, en Belgique plus que dans la zone OCDE, les élèves défavorisés dans les écoles favorisées obtiennent de meilleurs résultats que les élèves favorisés dans les écoles défavorisées (Graphique 2.17, partie B). En outre, des disparités de mobilité sociale en milieu scolaire apparaissent entre les filières et entre les types de prestataires de l’enseignement. Elle est ainsi plus élevée dans les filières professionnelles que dans la filière d’enseignement général, tant en Communauté française qu’en Communauté germanophone (Hindriks et Godin, 2018[77]).
Le processus de sélection scolaire et sociale explique la forte influence du milieu scolaire sur les résultats. Par exemple, près de la moitié de la variation des résultats des élèves belges en mathématiques s’explique par l’école qu’ils fréquentent, soit une proportion supérieure à la moyenne de l’OCDE, qui est d’un tiers (Graphique 2.17, partie C). Dans les trois communautés, le milieu socioéconomique moyen des établissements scolaires est même plus important que le milieu parental, en ce sens que les résultats scolaires des élèves sont plus influencés par le statut socioéconomique moyen des parents des autres élèves de la même école que par celui de leurs propres parents (Encadré 2.7). La fréquentation d’une école dont les élèves proviennent de milieux socioéconomiques plus favorisés va de pair avec de meilleurs scores aux tests dans tous les pays de l’OCDE, mais cet effet est particulièrement marqué en Belgique.
Encadré 2.6. Structure et financement de l’enseignement obligatoire en Belgique
Malgré la décentralisation depuis la troisième réforme de l’État en 1988 et les réformes récentes, la structure générale de l’enseignement obligatoire est en grande partie identique dans les trois communautés, qui sont confrontées aux mêmes enjeux s’agissant de mobilité sociale ; voir OCDE (2017[72]) pour plus de détails.
Le système présente les caractéristiques d’un quasi-marché de l’éducation, fondé sur le principe de liberté de l’enseignement inscrit à l’article 24 de la Constitution, c’est-à-dire sur la liberté d’établissement des écoles, le libre choix de l’école et un financement déterminé en fonction du nombre d’élèves. L’offre d’enseignement relève de pouvoirs organisateurs gouvernementaux (« enseignement officiel ») ou non gouvernementaux (« enseignement libre »), les communautés en assurant la réglementation et la surveillance. Le choix par les familles des établissements scolaires fréquentés par les enfants est resté non réglementé jusqu’à ce que des réformes, dans les années 2000, tentent d’intervenir face à des éléments de plus en plus probants de ségrégation sociale, mis en évidence notamment par les enquêtes PISA. L’enseignement obligatoire débute à 5 ans et se poursuit jusqu’à 18 ans. Il englobe la dernière année d’enseignement préscolaire (depuis septembre 2020), l’enseignement primaire, relativement non diversifié (de 6 à 12 ans), le premier cycle de l’enseignement secondaire et enfin, le deuxième cycle du secondaire (désormais réformé), subdivisé en quatre filières (général, technique, professionnel ou artistique). Un enseignement professionnel dual, qui combine l’apprentissage en milieu scolaire et en entreprise, est proposé à partir de 15 ans, à condition d’avoir réussi sa deuxième année d’enseignement secondaire (2e secondaire). Pour accéder à l’enseignement supérieur, il est obligatoire d’avoir obtenu un diplôme de fin d’études de l’enseignement obligatoire.
Les communautés sont presque entièrement financées par le gouvernement fédéral et l’éducation est leur principal poste de dépenses. Le financement est régi par les dispositions de la réforme de 2014 de la loi spéciale de 1989 relative au financement ; suivant ces dispositions, l'autorité fédérale attribue aux communautés une partie de la TVA et du produit de l’impôt sur le revenu, au prorata respectivement du nombre d’élèves soumis à l’obligation scolaire (« clé élèves ») et du lieu de résidence des contribuables ( clé fiscale »). Les dépenses par élève sont relativement élevées comparativement aux niveaux internationaux, et elles sont plus importantes en Communauté flamande qu’en Communauté française (Graphique 2.18Graphique 2.18, partie A). Cependant, les perspectives de financement de l’éducation varient d’une communauté à l’autre en raison d’orientations budgétaires divergentes. Après une grave détérioration imputable à la pandémie, le déficit budgétaire devrait se stabiliser à moyen terme en Flandre, mais se détériorer en Communauté française, les dépenses primaires augmentant plus rapidement que les recettes attribuables en vertu de la loi spéciale relative au financement (Graphique 2.18Graphique 2.18, partie B). Il est impératif de dégager une marge de manœuvre budgétaire pour mettre en œuvre certaines des mesures recommandées dans la présente Étude, en particulier dans la Communauté française. Le développement des examens de dépenses pourrait être utile pour une meilleure efficience de la dépense dans l’éducation (chapitre 1).
Encadré 2.7. L’influence du milieu scolaire : de nouvelles données issues de l’enquête PISA
De nouvelles recherches de l’OCDE exploitent les tout derniers résultats de l’enquête du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) pour isoler l’influence du milieu scolaire de l’influence globale du milieu parental sur les résultats scolaires des élèves, en adoptant la méthodologie décrite dans Causa et Johansson (2010[79]).
La Graphique 2.19 illustre la décomposition en deux parties de la corrélation conditionnelle au niveau Élève entre les scores aux tests en compréhension de l'écrit et les valeurs de l’indice Statut économique, social et culturel (SESC) : tout d’abord, un effet des antécédents individuels, qui mesure le lien entre le milieu parental de l’élève et ses résultats scolaires dans une école donnée (effet « intra‑établissement ») ; ensuite, un effet du milieu scolaire, qui mesure le lien entre la situation socioéconomique moyenne dans l’école fréquentée et les résultats scolaires de l’élève, après prise en compte de son milieu parental (effet « inter‑établissements »).
L’influence du milieu scolaire semble être particulièrement grande en Belgique, ce qui laisse penser que les résultats scolaires d’un élève belge dépendent grandement de la composition socioéconomique de son groupe de pairs dans l’école qu’il fréquente (Graphique 2.19). Un effet aussi considérable du milieu scolaire rend compte de plusieurs dimensions caractérisant l’existence, au sein de l’enseignement belge, d’une ségrégation de facto, notamment le tri des élèves entre les écoles ou la répartition des filières et des programmes entre les écoles.
Atténuer les conséquences négatives du libre choix de l’école
Le libre choix de l’école peut engendrer des avantages sur le plan de l’innovation, de la liberté pédagogique ou des incitations à améliorer la qualité de l’enseignement, mais il peut également creuser les inégalités sociales, du fait que les parents défavorisés sur le plan socioéconomique sont plus limités dans leur choix d’école pour leurs enfants (Urquiola, 2016[80]). Les données internationales montrent l’effet préjudiciable de ce libre choix sur la sélection selon des critères scolaires et socioéconomiques (OECD, 2018[13]). Conjugué à une capacité limitée, le libre choix de l’école engendre un quasi-marché des services d’enseignement, où les consommateurs (les parents) se font concurrence pour inscrire leurs enfants dans les écoles les plus réputées, alors que les prestataires (les écoles) se font concurrence pour recruter les meilleurs élèves (Vandenberghe, 1996[81]). Ces forces tendent à créer une ségrégation sociale, car les élèves en viennent à être triés entre les écoles en fonction de critères socioéconomiques – lesquels se recoupent souvent avec le statut d’issus de l’immigration.
En dépit de ses avantages, la liberté de choix de l’établissement alimente également des disparités au regard des résultats scolaires entre les écoles en Belgique (Nicaise, 2019[76] ; Friant et al., 2012[82] ; Nusche et al., 2015[83] ; OECD, 2015[43] ; OECD, 2017[84]). Le choix de l’école est peu réglementé en Belgique, en dépit de la mise en œuvre de réformes visant à encadrer la liberté de choix tant en Communauté flamande qu’en Communauté française, au cours de la dernière décennie, pour lutter contre la discrimination à l’étape de l’inscription (Nicaise, 2019[76] ; OECD, 2019[85]). La concurrence autour des élèves est également élevée : 93 % des élèves belges sont scolarisés dans des établissements dont le responsable déclare qu’au moins un autre établissement lui fait concurrence dans le même bassin scolaire, ce qui classe la Belgique au troisième rang le plus élevé de la zone OCDE (Graphique 2.20, partie A).
Les projets des communautés pour réformer les mécanismes d’encadrement du libre choix de l’établissement scolaire et accroître la mixité sociale dans l’enseignement secondaire devraient être mis en œuvre dès que les difficultés imputables à la pandémie auront pris fin. En Communauté flamande, la mise en place d’un portail en ligne unique d’inscription dans les écoles situées dans des zones où la limitation des capacités est problématique devrait permettre d’accroître la transparence du système et empêcher les parents d’inscrire leurs enfants dans plusieurs écoles. En Communauté française, les réformes prévues visent à réduire la charge administrative des écoles et à décentraliser une partie des procédures d’affectation des élèves à un niveau plus local, ce qui devrait réduire la résistance globale face au système.
La poursuite des efforts de lutte contre les conséquences négatives du libre choix d’établissement scolaire devrait demeurer une priorité. En Communauté flamande, la suppression du système actuel de double quota dans l’enseignement secondaire, en vertu duquel les écoles sont tenues d’admettre une proportion d’élèves défavorisés, pourrait affecter la mixité sociale. Il conviendra de surveiller et d’évaluer les conséquences de cette suppression et de l’introduction, à partir de l’année scolaire 2023-24, du nouveau système en vertu duquel chaque établissement sera libre de fixer ses propres critères d'admission d’élèves défavorisés. En Communauté française, la mise en œuvre des règles de priorité pour l’inscription dans le cadre des systèmes d’encadrement du choix d’école devrait être décentralisée de manière à renforcer l’adhésion des parties prenantes aux nouvelles règles, comme cela a été le cas pour les « plateformes de négociation locale » en Flandre.
La Belgique enregistre le troisième taux le plus élevé de l’OCDE pour ce qui est des transferts d’élèves dans d’autres écoles (Graphique 2.20, partie B). Cette pratique va à l’encontre de la réglementation sur le choix de l’école s’agissant de l’objectif d’une plus grande mixité sociale en milieu scolaire. Les données de l’enquête PISA montrent que le milieu social a une plus forte incidence sur les résultats scolaires dans les pays où il est plus courant de réaffecter des élèves faibles ou perturbateurs dans un autre établissement, sans que cela ait d’impact positif sur la performance globale (OECD, 2010[86]). Là où il existe des options simples et claires en matière de changement d’établissement, les enseignants peuvent être moins enclins à répondre aux besoins des élèves en difficulté. À l’opposé, les écoles qui ont une plus grande responsabilité dans la formulation des stratégies d’évaluation des élèves, les décisions concernant l’offre de cours, la détermination du contenu des cours et le choix des manuels ont généralement tendance à moins opérer de transferts d’élèves (OECD, 2011[87]). Il conviendrait d’inciter davantage les enseignants à répondre aux besoins des élèves en difficulté et de limiter les transferts dans d’autres écoles pour assurer l’efficacité des politiques de scolarisation.
Le financement des écoles pourrait également comporter des incitations à promouvoir l’équité dans l’enseignement. Selon le système actuel, le financement est réparti entre les établissements en fonction de leur taille, après correction pour tenir compte de la composition sociodémographique de la population scolaire. Bien que ce dispositif incite les établissements à diversifier leur recrutement d’élèves, il ne les récompense pas lorsqu’ils obtiennent de bons résultats dans des conditions difficiles. La modélisation de la valeur ajoutée (c’est-à-dire, le fait de mesurer l’impact de l’établissement sur les résultats des élèves en utilisant des modèles statistiques pour prévoir les scores aux tests de chaque élève, à partir des caractéristiques des élèves et de l’établissement, puis en comparant ces prévisions de scores aux scores effectivement obtenus), ou d’autres indicateurs de performance fiables pourraient être utilisés pour mesurer les améliorations dans l’enseignement et allouer en conséquence une partie des fonds aux écoles. Parce qu’ils tiennent compte des résultats antérieurs des élèves, ces mécanismes de financement incitent à améliorer les résultats de l’ensemble des élèves, y compris ceux qui partent avec un désavantage scolaire. Des indicateurs de performance ainsi que d'autres données sur la réussite des parcours scolaires pourraient également contribuer à lutter contre le processus de ségrégation sociale et scolaire, en fournissant des informations objectives sur la qualité des établissements et en aidant les parents à faire des choix d’école éclairés.
Accroître la mobilité entre la filière générale et la filière professionnelle
L’orientation précoce vers l’enseignement professionnel est un autre facteur qui contribue aux disparités dans le système scolaire. Le regroupement des élèves en fonction de leurs aptitudes contribue à rendre les classes plus homogènes et peut faciliter l’enseignement, mais il peut aussi concourir à accroître les inégalités sociales dans les résultats scolaires si l’orientation est le reflet du milieu socioéconomique des élèves. Les données internationales indiquent que l’orientation à un âge précoce va de pair avec une moindre équité dans les résultats scolaires, comme le laissent penser les écarts plus notables observés dans les scores de compréhension de l’écrit entre les élèves favorisés et défavorisés (OECD, 2020[88]).
L’orientation vers des filières d’enseignement séparées s’opère de fait à l’âge de 12 ans en Belgique, soit à un âge plus précoce que l’âge moyen de 14 ans dans l’OCDE (Graphique 2.21, partie A). En outre, les élèves sont orientés à partir de 14 ans vers l’une des quatre filières existantes, plus nombreuses que la moyenne de trois filières dans l’OCDE. Les réformes prévues et en cours dans les communautés visent à différer l’orientation, à assurer un enseignement différencié et à réduire le nombre de filières (voir plus bas). Malgré une réforme des cursus des deux premières années du secondaire en Flandre, le risque d'une orientation dès l'âge de 12 ans subsiste. En Communauté française, les mesures planifiées dans le cadre de la réforme du Pacte d’excellence, qui comprennent le prolongement d’un an du tronc commun d’apprentissage et la fusion des deux filières à vocation professionnelles (filière « technique » et filière « professionnelle »), vont dans le bon sens et devraient être mises en œuvre sans délai.
Lors de la réforme des systèmes d’éducation en vue de différer l’orientation, les autorités devraient prendre des mesures complémentaires afin d’éviter des conséquences involontaires. La hausse continue du nombre de redoublements, qui sont déjà particulièrement élevés en Belgique, près du tiers des élèves ayant déjà redoublé une classe à l’âge de 15 ans, soit plus que la moyenne de 11 % de l’OCDE, est un sujet particulièrement préoccupant (OECD, 2020[88]). Un soutien ciblé des élèves en difficulté sera nécessaire pour assurer l’acquisition de compétences génériques. La Belgique pourrait s’inspirer de l’exemple de l’expérience de « tronc commun différencié » dans la province canadienne de l’Ontario, où l’orientation a lieu à l’âge de 16 ans, mais où l’enseignement est adapté aux besoins des élèves. Les éléments clés de cette expérience comprennent le regroupement à l’intérieur d’une classe en fonction du style d’apprentissage et non du niveau, la disponibilité d’« enseignants pour la réussite » à temps complet, spécialisés en soutien des élèves en difficulté, ainsi que la possibilité d’accumuler des crédits en vue de l’obtention du diplôme en effectuant des stages en entreprise (Ontario Ministry of Education, 2021[89]).
Un autre problème lié à l’orientation est celui de la stigmatisation sociale associée aux filières professionnelles en Belgique. Les parents préfèrent souvent que leur enfant redouble dans la filière générale plutôt que de passer à une autre filière. L’effet cascade qui en résulte, les élèves en difficulté commençant par redoubler avant d’être transférés dans une autre filière réputée inférieure sur le plan scolaire, signifie que les filières non générales sont en réalité des filières de relégation (Nicaise, 2019[76] ; De Witte et Hindriks, 2017[90]). L’effet cascade contribue également aux disparités dans les résultats scolaires entre les écoles, la plupart de celles-ci étant organisées par filière. En Belgique, l’écart en compréhension de l’écrit entre la filière générale et les autres filières, après prise en compte du statut socioéconomique, correspond à 69 points, soit environ une année et demie de scolarité, ce qui dépasse de loin la moyenne de 29 points de l’OCDE (OECD, 2020[88]). L'amélioration de la qualité et la montée en gamme de l'enseignement professionnel constituent donc une priorité.
Les réformes de l’enseignement devraient viser à accroître la mobilité entre les filières professionnelle et générale. Cela contribuerait à remédier au déficit d’image de l’enseignement professionnel en Belgique et à réduire la ségrégation scolaire. En encourageant les établissements scolaires à organiser les programmes par domaine, de manière transversale par rapport aux filières (établissements dits « écoles de domaine » et « écoles campus »), la réforme de modernisation en Flandre rend effectivement les filières professionnelles plus attrayantes et permet aux élèves de passer de la filière professionnelle à la filière générale, ce qui peut réduire l’effet cascade. En Communauté française, la réforme de l’enseignement professionnel dans le cadre du Pacte d’excellence vise à renforcer l’acquisition de compétences génériques afin de réduire les différences par rapport à l’enseignement général. Toutefois, les filières restent entièrement séparées et peu de passerelles existent pour que les élèves puissent passer de l’enseignement professionnel à l’enseignement général ou supérieur. La réforme sur ce point pourrait consister à s’inspirer de l’expérience flamande.
Le recours à la formation professionnelle en alternance, qui combine l’apprentissage en milieu scolaire et en entreprise, est relativement peu développé en Belgique (Graphique 2.21, partie B) et devrait l’être davantage, comme le recommandait l’Étude économique de 2020. La formation et l’expérience en milieu professionnel facilitent les transitions de l’école au monde du travail et favorisent la mobilité sociale. L’incidence de l’enseignement professionnel sur la probabilité d’emploi à tous les stades de la carrière est plus élevée dans les pays où la participation aux programmes de formation combinés travail-études est forte, comme l’Autriche et l’Allemagne (Forster, Bol et van de Werfhorst, 2016[91]). Des réformes récentes en Belgique pourraient être utiles à cet égard. En Communauté flamande, tous les établissements d’enseignement secondaire peuvent proposer une formation professionnelle en alternance depuis septembre 2019 et plus de 100 formations sont actuellement offertes (OECD, 2021[92]). Le Pacte d’excellence, en Communauté française, vise à améliorer les synergies entre l’enseignement professionnel et le marché du travail, mais manque de clarté au sujet de la coordination nécessaire avec les autorités régionales, compétentes pour les politiques de formation et d’emploi.
Pour que la formation professionnelle en alternance réponde aux besoins du marché du travail, il faudrait que le financement soit alloué par bloc de formation plutôt que par établissement. Le modèle actuel, en vertu duquel les établissements d’enseignement professionnel perçoivent des financements par élève et les utilisent pour organiser leur programme de formation, ne possède pas la souplesse nécessaire pour pouvoir s’adapter à l’évolution rapide des besoins du marché du travail et empêche la spécialisation et la collaboration au niveau des entreprises dispensatrices de la formation. Le passage à un modèle axé sur la demande, comme au Royaume-Uni, qui consiste à allouer les fonds directement aux prestataires de formation, permettrait de réduire les décalages entre l’offre et la demande de compétences et de garantir que les compétences acquises dans l’enseignement professionnel sont celles qui sont recherchées sur le marché du travail (Sodermans et al., 2018[93]). En outre, le rôle de l’Office francophone de la formation en alternance (OFFA) dans la coordination de l’enseignement et la formation professionnels en alternance entre la Région wallonne, la Région de Bruxelles-Capitale et la Communauté française devrait être clarifié et les certifications, harmonisées.
Proposer des mesures plus fortement incitatives aux enseignants
Des politiques efficaces de recrutement des enseignants sont indispensables à un système éducatif performant, et le manque d’enseignants ou de qualifications appropriées nuit à la qualité et à l’équité du système (OECD, 2019[73] ; OECD, 2020[88]). Les données montrent que les résultats scolaires des élèves dépendent en partie de caractéristiques propres aux enseignants, notamment de leur formation initiale et de leurs diplômes, de leurs conditions de travail, de la collaboration et du tutorat entre collègues. Ainsi, les différences de pourcentage d’enseignants entièrement pourvus des titres et diplômes requis, délivrés par une autorité compétente, sont à l’origine de quelque 13 % des différences de scores moyens aux tests de compréhension de l’écrit dans l’ensemble des pays et économies participant à l’enquête PISA (OECD, 2020[88]). Indicateur de mesure de la qualité des enseignants, l’amélioration des résultats des élèves en une année de scolarité, une fois pris en compte les facteurs échappant au contrôle des enseignants, a un impact durable sur le niveau d’instruction atteint et les rémunérations ultérieures de ces élèves (Chetty, Friedman et Rockoff, 2014[94] ; Chetty, Friedman et Rockoff, 2014[95] ; Hanushek et Rivkin, 2010[96] ; Kane Douglas O Staiger et al., 2008[97]). Aussi l’offre d’enseignants très qualifiés est-elle essentielle pour favoriser la mobilité sociale.
Les écoles éprouvent des difficultés à recruter des enseignants et sont souvent forcées d’embaucher du personnel qui ne possède pas les titres exigés en Belgique. Selon des données issues de l'Enquête internationale sur l'enseignement et l'apprentissage (TALIS) de 2018, 44 % des élèves belges fréquentaient des écoles ayant déclaré une pénurie d’enseignants, soit un pourcentage supérieur à la moyenne de 27 % dans l’OCDE (Graphique 2.22, partie A), et 26 % des élèves fréquentaient des écoles où les enseignants étaient peu qualifiés ou dont les qualifications étaient insuffisantes, ce qui classait le pays au septième rang des taux les plus élevés de l’OCDE. Les pénuries d’enseignants sont le reflet d’une forte érosion naturelle chez les jeunes enseignants. En 2014, 44 % des enseignants dans l’enseignement secondaire et 25 % dans le primaire en Communauté flamande ont quitté l’enseignement moins de cinq ans après le début de leur carrière (De Witte et Hindriks, 2018[78]). En Communauté française, le taux de sortie des enseignants durant leurs cinq premières années d’enseignement s’élevait à 39 % pour la cohorte d’enseignants débutants entrés en fonction en 2006-07 (Delvaux et al., 2013[98]). Les raisons invoquées tiennent aux conditions de travail précaires, aux problèmes posés par les classes difficiles, aux difficultés pour passer de la théorie à la pratique et au manque de soutien au sein de l’établissement scolaire.
Afin de limiter les départs de jeunes enseignants, les autorités devraient renforcer les programmes d’intégration en faveur des enseignants débutants. Seuls 43 % des enseignants belges déclarent avoir bénéficié de quelconques modalités d’intégration (Graphique 2.22, partie B). Or, il a été démontré que les programmes de soutien en début de carrière qui offrent un accompagnement systématique réduisent le taux de décrochage des enseignants (OECD, 2019[99]). L’intégration devrait devenir systématique et inclure des éléments essentiels tels qu’une charge de travail adaptée à des enseignants débutants, leur insertion dans la stratégie et la culture de l’école, des temps réguliers d’observation en classe avec un retour d’information et des plans de perfectionnement professionnel.
La récente institution d’un droit à l’accompagnement pour les nouveaux enseignants en Communauté flamande, et la définition d’une carrière en trois étapes comportant des missions adaptées en conséquence en Communauté française, vont dans le bon sens. Des réformes supplémentaires pourraient viser à aller au-delà de l’intégration et à aider la transition des jeunes enseignants en prévoyant des liens directs avec les programmes de formation initiale des enseignants. Par exemple, les Pays-Bas ont institué en 1997 une phase de « pratique pédagogique autonome » au cours de la dernière année du cursus, qui consiste à enseigner dans le cadre d’un contrat de formation et d’emploi pendant une durée de cinq mois au maximum (European Commission, 2010[100]). L’enseignant stagiaire travaille en qualité de membre régulier de l’équipe pédagogique ; il reçoit à ce titre les parents en réunion et discute des bulletins scolaires.
L’amélioration des conditions de travail en début de carrière, conditions qui sont précaires en Belgique, s’impose. La plupart des enseignants qui débutent n’obtiennent qu’un contrat à temps partiel, ils remplacent des enseignants absents nommés à titre définitif et souvent, les classes qu’ils ont en charge sont réparties entre plusieurs écoles. Ainsi, selon l’étude effectuée en 2012 par l’Administration générale de l’enseignement de la Communauté française, 25 % des nouveaux enseignants ont été embauchés sous contrat à temps partiel et 52 % en tant que suppléants. De plus, les nouveaux enseignants sont plus susceptibles d’enseigner dans une école défavorisée, ce qui accroît la difficulté de leur mission. La Communauté flamande a récemment pris des mesures pour renforcer la stabilité de l’emploi des enseignants débutants, notamment en réduisant le nombre de jours de travail requis pour qu’une nomination temporaire soit convertie en nomination définitive. La Communauté française s’en remet à l’amélioration de la qualité de la formation initiale des enseignants, prévue dans le Pacte d’excellence, pour accroître l’attrait des carrières en enseignement.
Afin de rendre les carrières de l’enseignement plus attrayantes tout en favorisant l’équité dans l’éducation, les enseignants pourraient bénéficier de mesures d’incitation pour s’occuper des besoins des élèves défavorisés. L’enseignement dans des écoles défavorisées pourrait être récompensé par des primes de salaire, un allégement du nombre de classes à leur charge, l’accélération de leur nomination à titre définitif ou des mutations prioritaires vers d’autres établissements à partir d’une certaine ancienneté. Par exemple, au Japon et en Corée, des mesures sont prises pour que des enseignants très chevronnés soient nommés dans des écoles défavorisées, sous la forme de dispositifs formels et informels permettant aux enseignants de changer d’école périodiquement et de bénéficier d’incitations supplémentaires, notamment une majoration de salaire, un allégement de leur charge de travail et la possibilité de choisir leur école lors de leur prochaine mutation (Encadré 2.8).
Encadré 2.8. Attirer de bons enseignants dans les écoles défavorisées : les cas du Japon et de la Corée
En Corée et au Japon, les élèves défavorisés ont au moins autant de chances que les autres de recevoir un enseignement dispensé par des enseignants de qualité, ce dont attestent certaines caractéristiques d’enseignants telles que les années d’expérience, le fait d’être diplômé dans toutes les disciplines enseignées et, dans le cas des professeurs de sciences, d’avoir obtenu un diplôme universitaire avec les sciences en discipline majeure.
Au Japon, on attend des enseignants qu’ils changent périodiquement d’école au cours de leur carrière, de sorte que toutes les écoles puissent avoir accès à des enseignants performants et bénéficient d’un équilibre entre enseignants expérimentés et débutants. Les autorités éducatives locales déterminent la répartition des enseignants entre les écoles et la mettent en œuvre.
La Corée a mis en place un système de rotation obligatoire des enseignants, qui les oblige à changer d’établissement tous les cinq ans. De multiples incitations sont offertes dans le cadre du système pour attirer les enseignants vers les écoles dont les besoins éducatifs sont grands, notamment une majoration de salaire, des classes moins chargées, un allégement des heures d’enseignement, des crédits supplémentaires au titre d’une promotion ultérieure à un poste administratif et la possibilité pour l’enseignant de choisir son prochain établissement d’affectation. Les deux dernières mesures sont considérées comme particulièrement attrayantes.
Source : OCDE (2018), Effective Teacher Policies: Insights from PISA.
Promouvoir des logements abordables et de qualité
La hausse des prix des logements non seulement restreint l’accès à des habitations de qualité pour les ménages qui consacrent une proportion relativement importante de leurs revenus au logement, mais contribue aussi à la persistance de revenus faibles, car des conditions de vie précaires vont souvent de pair avec un accès limité à des emplois et à un enseignement de qualité, en particulier pour les enfants et les jeunes adultes (OECD, 2020[101]). La crise liée au COVID-19 a accentué les problèmes d’accessibilité financière, dans la mesure où de mauvaises conditions de logement rendent les confinements et le télétravail (ainsi que l’enseignement à domicile ; voir plus haut) plus difficiles. L’accessibilité financière sera encore entravée par les gains d’efficacité énergétique qu’il faudra réaliser dans le secteur du logement pour atteindre les objectifs climatiques, qui pèsent de manière disproportionnée sur les ménages à bas revenu (IEA, 2019[102]).
En Belgique, les conditions de logement, caractérisées par des habitations de grande taille et des coûts de logement modestes, sont globalement parmi les meilleures de la zone OCDE d’après l’indicateur du vivre mieux. Il est toutefois devenu de plus en plus difficile pour les ménages modestes de trouver un logement abordable. Les personnes à faible revenu qui louent leur logement sur le marché privé sont particulièrement exposées au risque de surcharge financière liée au coût du logement, sachant que 70 % des ménages situés dans le dernier quintile de la distribution des revenus consacrent plus de 40 % de leur revenu à leurs dépenses totales de logement (Graphique 2.23, partie A). Les ménages modestes sont aussi tout particulièrement confrontés au problème de la qualité des logements : 26 % d’entre eux vivent dans un logement inadéquat, soit une proportion plus élevée que la moyenne de l’UE, qui est de 22 % (Graphique 2.23, partie B). Ces problèmes d’accessibilité financière sont plus prononcés dans les grandes zones urbaines (voir plus haut).
Dans le sillage du deuxième volet de la sixième réforme de l’État entrée en vigueur en 2014, les régions ont mis en œuvre un certain nombre de réformes liées au logement, qui visaient essentiellement la suppression des réductions fiscales accordées au titre des intérêts et des amortissements en capital d’emprunts hypothécaires pour habitation propre et unique (le « bonus-logement »), comme cela avait été recommandé dans l’Étude économique de 2020 (Encadré 2.9). Ces réformes, qui s’attaquent à la dégressivité de ces avantages fiscaux, pourraient atténuer les tensions sur les prix du marché, le bonus n’étant plus capitalisé dans les prix des logements. Ce pas vers la neutralité fiscale entre location et acquisition est bienvenu, car il favorise la mobilité sociale. La suppression d’autres avantages fiscaux injustifiés dont bénéficient encore les propriétaires occupants renforcerait davantage la mobilité sociale en libérant des ressources publiques pour financer les aides locatives destinées aux ménages à faible revenu. La Flandre et la Région de Bruxelles-Capitale ont modifié à juste titre leur fiscalité du logement en réduisant les droits d’enregistrement. La Région wallonne devrait s’en inspirer et envisager de remplacer son crédit d’impôt au titre des emprunts hypothécaires
Encadré 2.9. Réformes régionales du « bonus-logement »
Depuis la mise en œuvre de la sixième réforme de l’État, les compétences en matière d’imposition du logement et de réglementation du marché locatif reviennent (pour l’essentiel) aux régions, ce qui a permis aux gouvernements régionaux de fixer leurs propres priorités face aux problèmes de logement. La réforme la plus notable mise en œuvre dans les trois régions concerne la suppression des réductions d’impôt accordées au titre des intérêts et des amortissements en capital d’emprunts hypothécaires pour habitation propre et unique (le « bonus-logement »).
Flandre : En 2020, le bonus-logement a été remplacé par une réduction des droits d’enregistrement, dont le taux a été ramené de 6 % à 3 % (et à 1 % si des travaux de rénovation énergétique sont effectués) pour l’achat d’une habitation propre et unique.
Wallonie : En 2016, le bonus-logement est remplacé par un crédit d’impôt (le « chèque habitat ») accordé aux ménages ayant contracté un emprunt hypothécaire pour financer l’achat d’une habitation propre et unique ; ce chèque, dont le montant diminue à mesure que le revenu net imposable du ménage augmente, peut être accordé pour toute la durée d’un emprunt hypothécaire, jusqu’à 20 ans au maximum, sa valeur étant réduite au bout de 10 ans.
Région de Bruxelles-Capitale : En 2017, le bonus logement a été remplacé par une majoration de l’abattement, porté à 175 000 EUR, sur les droits d’enregistrement pour l’achat d’une habitation propre et unique, dont le taux est fixé à 12.5 %.
Améliorer l’efficacité des aides au logement destinées aux ménages à faible revenu
La mise à disposition de logements sociaux et l’offre de prestations liées au logement contribuent à atténuer les conséquences négatives de la hausse des coûts de logement pour les ménages à faible revenu. En accroissant l’offre de logements, les investissements consacrés au logement social améliorent l’accessibilité du logement non seulement pour les locataires éligibles à faible revenu, mais aussi pour le reste du marché du logement (OECD, 2021[19]). Il est essentiel de bien concevoir les mesures pour faire en sorte que les maigres ressources disponibles parviennent bien aux groupes vulnérables sans induire une ségrégation sociale ni entraver leur mobilité, en particulier sur le marché du travail (OECD, 2020[103]).
En Belgique, la proportion de logements sociaux dans le parc de logements total (environ 4 %) est faible par rapport à certains pays de l’OCDE, comme la France (environ 15 %) ou le Danemark (environ 20 %) (Graphique 2.24). Bien que stable au cours de la dernière décennie, cette proportion relativement faible de logements sociaux n’est pas suffisante pour répondre à la demande, comme en témoignent les très longues listes d’attente des ménages pouvant prétendre au logement social. Le manque de logements sociaux est particulièrement criant à Bruxelles : en mars 2020, 37 077 ménages vivaient dans un logement social, mais près de 50 000 ménages étaient sur liste d’attente, selon l’organisme public responsable, la Société du Logement de la Région de Bruxelles-Capitale. Par conséquent, l’extension du parc de logements sociaux constitue une priorité urgente, comme l’ont reconnu les gouvernements des trois régions.
Sachant que le manque de terrains disponibles rend l’extension du parc de logements sociaux particulièrement difficile dans la Région de Bruxelles-Capitale, des mesures complémentaires doivent être prises pour améliorer l’accessibilité financière du logement, notamment des aides locatives pour les ménages à faible revenu sur le marché privé et une réglementation plus favorables à l’offre (voir plus bas). Par ailleurs, des règles d’occupation des sols favorables à la densité pourraient aussi s’avérer utiles, dans la mesure où les obstacles réglementaires auxquels se heurtent les nouvelles constructions, en particulier les limitations de hauteur, peuvent restreindre l’offre de biens immobiliers d’habitation et contribuer à faire augmenter les coûts de logement, en particulier dans les villes les plus chères de l’OCDE (OECD, 2021[19]). Cela dit, l’« écart de hauteur des bâtiments » (c’est-à-dire la différence entre la hauteur du parc existant d’immeubles de grande hauteur et celle qui résulterait d’un assouplissement de la réglementation, estimée par régression à partir du revenu national et des baux ruraux) est plus faible en Belgique que dans des pays voisins comme l’Allemagne ou les Pays-Bas (Jedwab, Barr et Brueckner, 2020[104]). La Région de Bruxelles-Capitale poursuit sa densification conformément à ses Plans d’Aménagement Directeurs, bien que ceux-ci suscitent souvent l’opposition des habitants, notamment en ce qui concerne la hauteur des nouvelles constructions.
Le développement du logement social doit éviter d’exacerber la ségrégation spatiale. L’imposition de quotas minimums de logements sociaux à l’échelle des communes pour limiter la ségrégation socioéconomique et ethnique dans les cités de logements sociaux ne semble pas efficace en Belgique, notamment car les sanctions applicables en cas de non-respect ne sont pas dissuasives. De manière générale, les stratégies explicites de mixité sociale dans le logement social n’ont pas eu d’effets positifs appréciables dans la plupart des pays de l’OCDE, y compris l’objectif de taux de logements sociaux de 20 % fixé au niveau des communes en France (OECD, 2018[105]). En revanche, de vastes projets de rénovation des grands ensembles de logements sociaux et des abords immédiats lancés dans certains pays se sont révélés prometteurs (Encadré 2.10). Une autre démarche consiste à envisager de créer des ensembles de logements sociaux de plus petite taille répartis au sein des zones urbaines et entre elles afin de déconcentrer réellement ces ensembles (OECD, 2020[103]).
Encadré 2.10. Revitalisation à grande échelle du logement social : l’exemple de Toronto (Canada)
L’expérience de revitalisation de la cité de logements sociaux de Regent Park dans la ville de Toronto illustre la possibilité de revitalisation inclusive du logement social. Le projet a débuté en 2005 alors que Regent Park était en tête des quartiers les plus défavorisés de Toronto et que la cité était délabrée et pâtissait depuis longtemps des mesures d’austérité. Doté d’un budget de 1 milliard CAD, le projet de réaménagement a mobilisé des partenaires locaux, l’agence municipale du logement social, ainsi que des promoteurs du secteur privé.
Le projet, qui, afin de favoriser la mixité sociale, prévoyait à la fois des logements sociaux, des copropriétés au prix du marché et des logements abordables, nécessitait de démolir les biens existants et de repenser l’ensemble pour mieux relier la zone au cœur de la ville. Il prévoyait en outre officiellement un « droit de retour » pour les anciens locataires et une aide financière couvrant le loyer du logement que ces derniers devaient occuper pendant les travaux, ainsi que les frais de déménagement. Alors que le projet touche à sa fin, il ressort des données disponibles qu’environ 60 % des ménages sont revenus là où ils habitaient ou à proximité, et que 10 à 20 % d’entre eux ont trouvé un autre logement social à Toronto. Dans l’ensemble, les résidents se disent davantage satisfaits et ont une attitude positive à l’égard de la mixité sociale de l’habitat.
Source : OCDE (2019), « Le logement social : un élément essentiel des politiques de logement d’hier et de demain ».
Il faudrait veiller à l’application des règles encadrant la location d’un logement social, que la Belgique a réformées en vue d’accroître l’offre de logements sociaux pour les ménages remplissant les conditions requises, notamment en supprimant les baux à durée indéterminée, en révisant les critères d’éligibilité des ménages dont la taille diminue ou en appliquant des critères de revenu. Cependant, les écarts de loyers moyens avec le marché privé étant importants, les ménages qui perdent leur éligibilité ne retrouvent pas facilement un logement. Les critères de ressources pourraient en outre nuire aux incitations à travailler si le fait de prendre un emploi (mieux rémunéré) entraîne la perte d’un logement social. À cet égard, il serait utile d’améliorer la portabilité des allocations de logement social en cas de possibilité d’emploi nécessitant un déménagement, comme l’a fait l’Angleterre avec la règle du « Right to Move » (droit de déménager). Des allocations de réinstallation sous condition de ressources pourraient également être utiles (voir plus bas).
Les loyers des logements sociaux pourraient être fixés proportionnellement au revenu et au patrimoine des ménages afin de ne pas nuire aux incitations à travailler et de faire en sorte que les logements sociaux soient attribués aux plus vulnérables. Aux Pays-Bas, les loyers des logements sociaux augmentent en fonction du revenu total du ménage (Encadré 2.11). Pour éviter des effets de seuil brutaux, les loyers devraient être fixés en proportion du revenu et du patrimoine à tous les niveaux, comme le fait en partie l’Australie. La révision des loyers en fonction de la hausse des revenus des locataires de logements sociaux peut favoriser la mixité sociale des quartiers, des ménages plus aisés continuant d’occuper des logements sociaux. Un tel système nécessiterait toutefois une accélération considérable de l’expansion du parc de logements sociaux, dans la mesure où celui-ci serait occupé en partie par des ménages qui auraient sinon déménagé. Il faudrait en outre éviter d’inciter les organismes de logements sociaux à choisir les locataires en fonction de la croissance potentielle de leur revenu, au détriment des ménages les plus vulnérables.
Encadré 2.11. Augmentation des loyers en fonction du revenu : l’exemple des Pays-Bas
Depuis 2013, l’augmentation annuelle des loyers à laquelle procèdent les sociétés néerlandaises de logement social est calculée à partir du revenu total des ménages pour chaque location au lieu d’être indexée sur l’inflation. L’augmentation maximale du montant des loyers et les seuils de revenu sont fixés chaque année par décret ministériel (Uitvoeringsregeling Huurprijzen Woonruimte). Les données disponibles montrent que cette réforme a incité les ménages plus aisés à aller vivre dans des logements à loyer non encadré.
Cette méthode permet d’assurer une allocation efficace des ressources dans les pays où un large éventail de la population peut prétendre au logement social, y compris les personnes actives, car elle ne crée pas nécessairement de fortes contre-incitations à l’emploi.
Source : OCDE (2019), « Le logement social : un élément essentiel des politiques de logement d’hier et de demain ».
Les régions devraient continuer de renforcer le soutien apporté aux ménages à faible revenu sur le marché locatif privé, compte tenu du manque de logements sociaux et du temps nécessaire pour accroître l’offre. Les conditions d’admission au bénéfice des aides à la location octroyées par les régions aux ménages qui sont sur liste d’attente pour un logement social ou qui vivent dans un logement inadéquat devraient être assouplies de façon à couvrir tous les locataires du secteur privé qui répondent aux conditions requises pour bénéficier d’un logement social, ainsi qu’il était recommandé l’Étude économique de 2015, et être mises à disposition plus rapidement là où elles ont déjà été étendues. L’élargissement de la portée des dispositifs actuels d’allocations de logement permettrait d’atténuer les réticences que les propriétaires pourraient avoir en raison de la situation financière médiocre des locataires à faible revenu et, partant, d’augmenter l’offre de logements locatifs dans le segment inférieur du marché. Une telle mesure risque toutefois d’accentuer à court terme les tensions à la hausse sur les loyers par la capitalisation de l’aide dans les loyers avant que l’offre ne s’ajuste. Cela dit, le mécanisme actuel d’indexation des loyers, qui plafonne les augmentations de loyer en cours de bail au taux d’inflation mesuré à l’aide de l’indice santé, devrait permettre d’empêcher que cela se produise. Le cas échéant, les régions pourraient envisager de plafonner les hausses de loyer entre plusieurs locations si des allocations de logement sont accordées, mais il conviendrait de mettre en balance les avantages qui découleraient à court terme d’une telle mesure et ses éventuels inconvénients à plus long terme, notamment une baisse potentielle de l’offre de logements locatifs (OECD, 2021[19]).
Atténuer les tensions sur les prix des logements en améliorant l’efficience de la réglementation
Une réglementation efficiente peut renforcer les politiques de logement social pour rendre les marchés du logement plus abordables, et notamment atténuer les difficultés que rencontrent de nombreux ménages vulnérables et à faible revenu pour s’acquitter de loyers élevés et en hausse (OECD, 2021[19]). Il importe d’assurer le juste équilibre entre locataires et propriétaires en garantissant à la fois la sécurité d’occupation d’un logement de qualité aux locataires et un investissement peu risqué aux propriétaires. Par ailleurs, les modes de gouvernance de l’occupation des sols qui évitent les chevauchements de compétences entre niveaux d’administration peuvent favoriser l’adéquation entre l’offre et la demande. Une meilleure gouvernance de l’occupation des sols peut améliorer la réactivité de l’offre face à l’évolution de la demande, atténuant ainsi les tensions à la hausse sur les prix et rendant le logement plus abordable.
Les relations entre locataires et propriétaires semblent globalement équilibrées en Belgique, les uns comme les autres se situant aux alentours de la moyenne de leur indicateur respectif, mais le niveau global de réglementation est supérieur à la moyenne de l’OCDE (Graphique 2.25, partie A). D’après des simulations effectuées par l’OCDE, un assouplissement de la réglementation du marché locatif se traduirait sur le long terme par une diminution des prix réels des logements rapportés au revenu, dans la mesure où une hausse de l’investissement résidentiel entraîne une baisse des prix. Les ménages belges auraient besoin en moyenne d’un tiers d’année de moins pour acheter un logement de 100 m2 si le degré de réglementation du marché locatif en Belgique correspondait à celui observé en Nouvelle-Zélande (Cournède, Ziemann et De Pace, 2020[106]).
Les dispositions de la réglementation du marché locatif qui dissuadent les propriétaires de louer des logements de bonne qualité à des ménages à faible revenu ou à des personnes occupant des formes d’emploi atypiques devraient être assouplies, en particulier celles qui concernent la protection juridique des locataires, considérée comme forte, et l’expulsion en cas de non-paiement, jugée difficile. Dans le cadre d’une telle réforme, il conviendrait de s’abstenir de réduire excessivement la protection des locataires, compte tenu du taux d’expulsions déjà relativement élevé en Belgique. À cet égard, un élargissement des conditions d’octroi des aides à la location renforcerait la situation financière des locataires à faible revenu (voir plus haut). Une autre manière importante d’assouplir la réglementation du marché locatif consiste à autoriser une augmentation de loyer en cours de bail après des travaux de rénovation énergétique, ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2015 sur la Belgique et stipulé dans le décret flamand sur la location d’habitations entré en vigueur en 2019, tout en octroyant cependant des aides spécifiques aux locataires à bas revenu (voir plus bas). Les réformes de la réglementation du marché locatif devraient assurer un juste équilibre entre l’accessibilité financière à court terme et à long terme, dans la mesure où un assouplissement de la réglementation pourrait dégrader à court terme la situation des locataires en place. L’octroi d’aides à la location (comme évoqué plus haut) serait nécessaire pendant la phase de transition.
La fragmentation et les chevauchements dans la gouvernance de l’occupation des sols sont relativement importants en Belgique, ce qui s’explique probablement par une répartition inefficiente des compétences entre les régions, les communes et même les provinces (Graphique 2.25, partie B). Une gouvernance plus efficiente de l’occupation des sols s’accompagne d’une plus grande élasticité de l’offre de logements (Gyourko et Molloy, 2015[107]). D’après des simulations réalisées par l’OCDE, une rationalisation de la gouvernance de l’occupation des sols qui porterait celle-ci aux niveaux observés dans les pays exemplaires (comme l’Australie, le Canada et la Suisse) pourrait améliorer l’accessibilité financière en Belgique, en se traduisant par une réduction du ratio prix des logements/revenu d’un quart d’année de revenu disponible (Cournède, Ziemann et De Pace, 2020[106]). Les pouvoirs publics pourraient accroître l’efficience de la gouvernance en réattribuant les compétences des communes et des provinces aux régions, tout en accordant une attention particulière au cas spécifique de la ville de Bruxelles et de sa zone d’influence, qui recoupe trois régions.
Remédier aux effets redistributifs de la rénovation énergétique
Bien qu’elle se traduise à long terme par une baisse des factures d’énergie pour les propriétaires ou les locataires, la réalisation de travaux de rénovation énergétique pour se conformer à des normes d’efficacité énergétique plus strictes et à d’autres réglementations peut diminuer l’accessibilité financière à court terme, dans la mesure où elle exerce des tensions à la hausse sur le coût de la construction et de l’entretien et, partant, sur les prix des logements (OECD, 2021[19]). En outre, les ménages à faible revenu sont moins susceptibles de pouvoir investir dans des travaux de rénovation énergétique, car une part disproportionnée d’entre eux sont locataires et, s’ils sont propriétaires, il est probable que leurs ressources financières soient limitées.
Il est crucial de remédier aux conséquences de la rénovation énergétique qui s’impose en Belgique, compte tenu du niveau élevé des émissions de gaz à effet de serre, imputable au vieillissement du parc de logements. Dans le secteur résidentiel belge, les émissions de CO2 imputables à la combustion d’énergie (électricité et chauffage y compris) sont particulièrement élevées, s’établissant à 1.6 tonne par habitant en 2019, ce qui place la Belgique au 8e rang des pays de l’OCDE et au-dessus de la moyenne de l’OCDE (qui est de 1.1 tonne par habitant). Il ressort de simulations effectuées par l’OCDE que le durcissement de la réglementation environnementale nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050 entraînerait des conséquences négatives considérables en termes de disponibilité et d’accessibilité financière des logements en Belgique (Graphique 2.26, partie A). La hausse des prix des logements représenterait plus d’une année de revenu disponible (Graphique 2.26, partie B) et l’investissement résidentiel diminuerait (Graphique 2.26, partie C). Les subventions de l’UE et les investissements prévus par les gouvernements régionaux dans le cadre des plans de relance devraient atténuer les effets de la rénovation énergétique sur le marché du logement (voir chapitre 1).
Des mesures de compensation seront nécessaires pour concilier les objectifs de durabilité et d’accessibilité financière. Diverses mesures ont été mises en place aux niveaux fédéral et régional pour encourager la rénovation des logements, notamment un taux de TVA réduit de 6 % pour les travaux de rénovation ordinaires, ainsi que des aides régionales pour des investissements spécifiques destinés à améliorer l’efficacité énergétique et dont le montant est fonction du revenu et du type de technologie utilisée. Afin d’inciter à rénover des biens locatifs, la législation pourrait prévoir des dispositions visant à améliorer l’efficacité énergétique au-delà des exigences minimales en matière d’efficacité énergétique. Outre l’obligation actuelle de fournir aux locataires des informations sur la performance énergétique du logement, les propriétaires pourraient être tenus de réaliser des audits énergétiques et de donner une estimation précise des dépenses énergétiques à prévoir, comme en France. Il serait également possible d’encourager les investissements dans l’efficacité énergétique des logements locatifs en accordant des prêts subventionnés ciblés aux propriétaires aux ressources financières limitées, qui sont souvent des personnes âgées. Étant donné que les économies réalisées grâce à l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements seront probablement prises en compte dans les loyers, les locataires situés sur le segment inférieur du marché locatif et dont les conditions de logement ont été améliorées devraient être protégés de toute hausse excessive de leur loyer au moyen d’aides spécifiques.
Subventionner la rénovation énergétique des bâtiments anciens sous-utilisés peut à la fois accroître le parc disponible de logements de qualité et atténuer les problèmes d’accessibilité financière liés au coût de la rénovation énergétique. Les aides à la rénovation énergétique pourraient être financées au moins en partie par un relèvement des impôts périodiques sur la propriété immobilière. Pour remédier aux désincitations à la rénovation découlant de la fiscalité immobilière, il est nécessaire d’actualiser régulièrement le revenu cadastral (toujours fondé sur les valeurs de janvier 1975, mais indexé sur l’inflation des prix à la consommation depuis 1991), ainsi qu’il était recommandé dans l’Étude économique de 2020 consacrée à la Belgique, afin d’éviter que les propriétaires ne diffèrent les travaux de rénovation pour ne pas subir une hausse disproportionnée des prélèvements sur la propriété immobilière.
Les subventions énergétiques destinées aux ménages à faible revenu donnent de mauvaises incitations à ceux qui en bénéficient et contribuent au niveau élevé des émissions du secteur résidentiel (OECD, 2015[43]). Les prix subventionnés devraient être remplacés par des prestations forfaitaires en faveur des ménages à faible revenu pour lutter contre la pauvreté énergétique tout en préservant les incitations aux économies d’énergie. L’élargissement des catégories d’ayants droit au tarif social pour l’électricité, nécessaire dans le contexte actuel de hausse des prix mondiaux de l’énergie, devrait être abandonné dès que les tensions sur les prix se seront atténuées, de même que la réduction temporaire du taux de TVA sur l’électricité et le gaz naturel. Les mesures supplémentaires destinées à compenser le nouveau renchérissement de l’énergie depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine devraient être soumises à conditions de ressources, judicieusement ciblées et temporaires pour que leur coût soit gérable et pour éviter des effets de distorsion via les signaux de prix (OECD, 2022[108]). Concrètement, il serait préférable d’opter pour des prestations forfaitaires ciblées plutôt que pour des mesures généralisées qui subventionnent dans les faits la consommation énergétique des ménages indépendamment de leur revenu. À cet égard, des mesures telles que le versement d’un montant forfaitaire unique de 80 EUR aux ménages à faible revenu à l’automne 2021 vont dans le bon sens.
Tableau 2.3. Recommandations pour offrir de meilleures perspectives économiques
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
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Améliorer les résultats des catégories vulnérables sur le marché du travail |
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Les individus peu qualifiés, ceux qui ont des revenus modestes et les personnes handicapées se caractérisent par un niveau de compétences numériques peu élevé et un faible taux de participation à la formation tout au long de la vie, ce qui se traduit par des disparités considérables en matière de taux d’emploi et de transitions sur le marché du travail. Le pourcentage de diplômés des filières STIM est faible, en particulier parmi les femmes. L’activité entrepreneuriale est particulièrement faible parmi les catégories vulnérables. |
Rationaliser le système de formation tout au long de la vie et améliorer la coordination entre ses différents acteurs, et réserver en priorité aux groupes vulnérables les services d’orientation professionnelle en face à face. Veiller à l’efficacité du compte individuel de formation qu’il est prévu de créer en mettant l’accent sur la qualité de la formation. Promouvoir les disciplines STIM en diffusant des informations sur l’avantage salarial des emplois à forte composante numérique. Évaluer et rationaliser l’offre de programmes ciblés de formation aux compétences entrepreneuriales. |
L’inadéquation des compétences et la surqualification sont élevées parmi les immigrés non originaires de l’UE. La discrimination et le manque de compétences linguistiques constituent des obstacles à l’emploi des personnes d’origine étrangère. |
Orienter systématiquement les immigrés vers des services de validation des compétences. Faciliter la reconnaissance des diplômes en supprimant les frais ou en les modulant en fonction des revenus, et en assurant une coordination entre les communautés. Soutenir l’adoption de pratiques d’embauche inclusives par les entreprises, en s’appuyant par exemple sur les informations concernant les origines du personnel. Allouer une part plus importante des dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail à la formation linguistique professionnelle sur le lieu de travail. |
Le taux de chômage de longue durée est élevé et les taux d’emploi des mères de jeunes enfants, des immigrés et des personnes handicapées sont faibles. |
Recourir davantage aux outils statistiques afin de cibler les groupes vulnérables pour des programmes actifs du marché du travail spécifiquement adaptés à leurs besoins. |
Les procédures officielles de réinsertion des bénéficiaires de prestations d’invalidité sont engagées tardivement. Les travailleurs inaptes à reprendre leur emploi précédent doivent se recycler. Les lacunes en matière de coordination de l’action publique concernant les personnes souffrant de problèmes de santé mentale réduisent leurs perspectives d’emploi. Les lacunes du soutien individuel à destination des bénéficiaires de prestations d'invalidité et d'indemnités de maladie freinent leur retour au travail. |
Simplifier et assouplir les procédures officielles de réinsertion. Supprimer la règle selon laquelle les participants aux programmes de formation perdent leur droit aux prestations d’invalidité dans les six mois suivant la formation. Mettre systématiquement l’accent sur les résultats en matière d’emploi dans la prestation des services de santé mentale et sur les résultats en matière de santé mentale dans la prestation de services d’aide à l’emploi. Continuer de renforcer les programmes individualisés de placement et de soutien destinés aux bénéficiaires de prestations d'invalidité et d'indemnités de maladie, en fonction des évaluations menées. |
Les taux élevés d’imposition de l’activité qui s’appliquent aux parents isolés ayant de faibles revenus et aux deuxièmes apporteurs de revenu dans les couples avec enfants affaiblissent les incitations au travail, en particulier pour les femmes. |
Mettre en place des prestations liées à l’exercice d’un emploi pour les travailleurs à bas salaire ayant des enfants. Réduire les contre-incitations à travailler pour les deuxièmes apporteurs de revenu en abolissant le système de quotient conjugal pour les couples, tout en prenant des mesures de compensation en faveur des ménages à faible revenu sous forme de prestations liées à l’exercice d’un emploi. Promouvoir la participation au système d’éducation et d’accueil des jeunes enfants auprès des ménages à faible revenu, en particulier des immigrés. |
Accroître l’égalité des chances dans l’enseignement obligatoire |
|
Le libre choix de l’établissement scolaire entraîne une ségrégation sociale et des disparités en matière de résultats scolaires entre les établissements. Les possibilités de transfert d’élèves à d’autres écoles réduisent la diversité sociale au sein des établissements scolaires ainsi que l’efficacité des réformes des dispositifs d’encadrement du choix de l’établissement scolaire. Les établissements d’enseignement sont incités à diversifier leurs effectifs d’élèves, mais pas à obtenir de bons résultats scolaires dans des conditions difficiles. |
Évaluer les conséquences de la suppression de l’obligation pour les établissements scolaires d’accueillir une certaine proportion d’élèves de milieux défavorisés en Flandre. Décentraliser la mise en œuvre des règles de priorité en matière d’inscription afin d’assurer l’adhésion de la Communauté française. Limiter les possibilités de transfert à d’autres écoles afin d’inciter davantage les enseignants à améliorer les résultats des élèves en difficulté. Utiliser des indicateurs de performance fiables ainsi que d'autres données sur la réussite scolaire pour éclairer les décisions de financement des établissements en fonction des progrès accomplis dans l'accompagnement des élèves défavorisés. |
L’orientation vers l’enseignement général et l’enseignement professionnel engendre un tri des élèves en fonction de critères socioéconomiques. La mobilité limitée entre les filières générale et professionnelle contribue aux inégalités sociales de résultats scolaires. La fréquentation des établissements d’enseignement professionnel en alternance, qui associe formation scolaire et formation en entreprise, est faible malgré la forte proportion d’élèves inscrits dans les filières de l’enseignement et la formation professionnels. Le modèle de financement de l’enseignement professionnel ne possède pas la souplesse nécessaire pour pouvoir s’adapter à l’évolution rapide des besoins du marché du travail. |
Poursuivre les efforts entrepris pour retarder l’orientation en allongeant le tronc commun d’apprentissage en Flandre. Cibler l’aide sur les élèves en difficulté afin de s’assurer qu’une orientation différée n’augmente pas le taux de redoublement dans la Communauté française. Encourager davantage les établissements à organiser des programmes transfilières et autoriser les passages d’une filière à l’autre. Renforcer le recours à la formation professionnelle en alternance en offrant des incitations financières et en rendant obligatoire l’agrément des prestataires de formation. Allouer les fonds directement aux prestataires de formation selon un modèle axé sur la demande, en fonction des modules de formation plutôt que des établissements. |
Le taux de sortie du métier des enseignants débutants est élevé, en particulier dans les établissements défavorisés, et les conditions de travail en début de carrière sont précaires. |
Inciter les enseignants à exercer leurs fonctions dans des établissements défavorisés en leur offrant une rémunération plus élevée ou une conversion plus rapide de leur engagement temporaire en nomination à titre définitif. Permettre aux enseignants de bénéficier d’une insertion professionnelle avant l’obtention de leur diplôme de formation initiale, et l’étoffer lorsqu’elle existe déjà, et renforcer les programmes d’initiation destinés aux enseignants débutants. |
Promouvoir des logements abordables et de qualité |
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L’offre de logements sociaux est trop faible et les écarts de prix avec le marché privé font obstacle à la mobilité résidentielle, ce qui fausse les incitations au travail. |
Élargir le champ d’application des allocations de logement aux locataires du marché privé, tout en accroissant le parc de logements sociaux. Contrôler régulièrement le niveau des ressources des ménages pour déterminer s’ils sont admis à bénéficier d’un logement social et fixer les loyers de manière proportionnelle à leurs ressources. |
Certains aspects de la réglementation du marché locatif dissuadent les propriétaires de louer des logements de qualité à des ménages à faible revenu. La fragmentation de la gouvernance de l’occupation des sols rend l’offre de logements moins réactive à la demande et fait augmenter du même coup les prix. |
Renforcer la situation financière des locataires à faible revenu en assouplissant les conditions d’octroi des aides à la location. Réattribuer aux régions les compétences des communes et des provinces en matière de gouvernance de l’occupation des sols. |
La rénovation énergétique du parc de logements est indispensable, mais elle pèsera sur l’accessibilité financière. Les prix élevés de l’énergie touchent de manière disproportionnée les ménages à faible revenu, mais des subventions énergétiques insuffisamment ciblées peuvent se révéler contre-productives. |
Encourager les investissements visant à améliorer l’efficacité énergétique des logements locatifs en accordant des prêts subventionnés ciblés aux propriétaires qui ont des ressources financières limitées. Recourir à des mesures ciblées pour lutter contre l’impact des prix élevés de l’énergie, notamment en versant des prestations forfaitaires aux ménages à faible revenu. |
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