La Pologne a connu une croissance économique vigoureuse ces dernières années. Elle a très bien réussi son intégration dans les échanges internationaux, surtout grâce à la place de plus en plus grande qu’elle occupe en tant que destination d’externalisation de services aux entreprises. Le rattrapage par rapport aux niveaux de vie moyens d’autres pays de l’OCDE et de pays comparables de la région s’est poursuivi (Graphique 1.1). Jusqu’à l’apparition du coronavirus, la hausse des revenus des ménages avait contribué à rendre le développement économique plus inclusif, tandis que le taux de pauvreté, les inégalités et le taux de chômage avaient reculé (Graphique 1.2).
Études économiques de l’OCDE : Pologne 2020 (version abrégée)
1. Principaux éclairages sur l’action publique
Assurer une convergence continue vers des niveaux de vie plus élevés
La pandémie de COVID-19 menace les réalisations des dernières décennies. Bien que le choc initial ait été moins marqué que dans nombre de pays de l’OCDE, l’activité économique devrait se contracter sensiblement en 2020, avant de se redresser partiellement en 2021 (Graphique 1.3). Avec la levée des mesures de confinement en mai 2020, de nombreuses entreprises ont rouvert et la plupart des travailleurs ont repris le travail, si bien que la consommation et la production se redressent après être tombés à de faibles niveaux pendant le confinement. Cela étant, le rythme de la reprise reste très incertain : le chômage a légèrement augmenté, de nouvelles restrictions sanitaires ont été imposées à l’automne, les incertitudes sont fortes et la demande mondiale reste atone.
Le soutien public devrait se poursuivre tant que l’économie fonctionnera largement en deçà de ses capacités. Le choc pèsera sur les perspectives dans certains secteurs, et de nombreux travailleurs risquent de perdre le lien avec leur employeur et de rencontrer des difficultés pour trouver un nouvel emploi. Les mesures annoncées par le gouvernement et au niveau de l’Union européenne (Encadré 1.1) devraient aussi être mises à profit pour assurer une croissance plus durable et plus inclusive à long terme. La Pologne est confrontée à des problèmes environnementaux pressants liés à ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et à la pollution de l’air. De fait, le niveau persistant de la pollution de l’air est nocif pour la santé, notamment parce qu’il rend les citoyens plus vulnérables à des maladies respiratoires aiguës comme celle provoquée par le coronavirus. Plus généralement, la Pologne obtient des résultats inférieurs à la moyenne de l’OCDE en ce qui concerne la santé, l’offre de logements et la productivité par salarié, celle-ci étant encore inférieure de 23 % à la moyenne de l’OCDE en 2018 malgré une progression rapide. Le pays est également confronté à d’importantes pressions démographiques en raison de la faiblesse de la fécondité et des soldes migratoires négatifs du passé, ainsi qu’à des écarts encore importants entre hommes et femmes en matière d’activité et d’emploi, ce qui pèsera sur la croissance du PIB et risque de compromettre le modèle actuel de croissance reposant sur une forte intensité de main-d’œuvre. Tous ces éléments, ajoutés aux séquelles de la pandémie de coronavirus, vont réduire la capacité de la Pologne à financer ses dépenses de retraite et de santé à long terme (Graphique 1.4).
Si les interventions des pouvoirs publics ont permis d’épargner à la plupart des familles la plus grosse partie du choc (Encadré 1.2, OECD, 2020a), la pandémie pourrait creuser les inégalités. En particulier, la forte proportion de travailleurs temporaires et indépendants pourrait pâtir des ajustements en cours du marché du travail (Graphique 1.6, partie A). Environ 14 % des travailleurs temporaires sont titulaires d’une forme de contrat de travail indépendant et ne bénéficient pas pleinement des droits reconnus aux travailleurs, et certains contrats peuvent ne pas ouvrir droit à des prestations de sécurité sociale. Dans le même temps, les micro- et petites entreprises sont nombreuses à n’avoir qu’une faible productivité et des liens peu développés avec les marchés locaux, nationaux et internationaux, ce qui se traduit par des salaires modestes et une médiocre qualité de l’emploi (Chapitre 2). Elles peuvent aussi avoir moins de résilience et de flexibilité pour faire face aux coûts de la pandémie et à l’évolution des processus de travail, par exemple aux chocs affectant les fournisseurs et les marchés, ainsi qu’au passage au télétravail et à l’adoption de mesures de prévention liées à la pandémie (OECD, 2020b).
Les disparités entre les régions pourraient s’accentuer encore. Elles s’étaient déjà aggravées entre 2011 et 2016 (OECD, 2018a). Le revenu disponible par ménage est inférieur de 20 % à la moyenne nationale dans certaines régions, et supérieur de 20 % dans la capitale (Statistics Poland, 2019a), tandis que les indicateurs régionaux de bien-être font ressortir des disparités considérables, malgré les progrès accomplis récemment (Graphique 1.5). Bon nombre de petites villes et de zones rurales sont encore en proie aux difficultés que posent le départ des jeunes et l’accès à des services publics de qualité comme la santé, l’éducation ou les transports publics (EC, 2019a). Après que l’épidémie de coronavirus eut débuté, en avril 2020, la variation de l’emploi salarié moyen allait de -5.2 % à +0.7 % en glissement annuel (Statistics Poland, 2020), les baisses les plus récentes étant nettement plus prononcées dans les régions les plus mal en point (Graphique 1.6, partie B).
Dans ce contexte, les principaux messages de cette Étude économique sont les suivants :
Une grande incertitude entoure la croissance économique. Les responsables des politiques macroéconomiques devront continuer de soutenir la reprise et doivent demeurer prêts à intervenir en cas de nouvelle vague de contamination ou de ralentissement inopiné de l’activité.
Pour alimenter la reprise et promouvoir une croissance plus inclusive, les pouvoirs publics devraient prendre des mesures à même d’améliorer les perspectives d’emploi des catégories défavorisées et de resserrer les liens entre les PME et les marchés nationaux et internationaux.
Pour être plus durable, la croissance devrait être étayée par des politiques axées sur l’innovation, l’écologisation des infrastructures et le développement des perspectives d’emploi offertes aux femmes et aux travailleurs âgés.
Encadré 1.1. Mesures prises pour limiter la diffusion de l’épidémie de coronavirus et soutenir l’économie
Mesures de confinement
Après l’apparition des premiers cas de coronavirus début mars, le gouvernement a rapidement pris des mesures pour interdire les manifestations de grande ampleur, fermer les écoles et les universités et passer à l’enseignement en ligne, favoriser le télétravail et fermer progressivement les lieux publics de grande taille. Le trafic aérien et ferroviaire international a été suspendu et les frontières rétablies. Le 24 mars, des mesures de confinement strict ont été appliquées. Les citoyens n’étaient autorisés à quitter leur domicile que pour acheter de la nourriture ou des médicaments, consulter un médecin ou aller travailler. En octobre, les autorités ont imposé de nouvelles restrictions pour endiguer le rebond des contaminations. Le port du masque dans les lieux publics a été rendu obligatoire, la plupart des établissements scolaires sont passés à l’enseignement à distance, les salles de sport et les restaurants accueillant du public ont fermé à nouveau, et les rassemblements publics, le nombre de clients présents au même moment dans les magasins et les manifestations culturelles ont été limités.
Mesures sanitaires
Avec l’assouplissement progressif des mesures de confinement adoptées en mars, le gouvernement a rendu obligatoire le port d’un masque dans les espaces publics, sauf si une distance minimale de deux mètres pouvait être respectée. Les autorités ont débloqué plus de 23 millions EUR (98 millions PLN) en faveur des hôpitaux à un stade très précoce de l’épidémie, et un montant supplémentaire de 2.3 milliards EUR (10.1 milliards PLN) destiné au secteur de la santé a été ensuite annoncé. Les pharmaciens ont été autorisés à émettre directement des ordonnances et des fonds supplémentaires ont été consacrés à des équipements de protection personnelle destinés aux services de secours et d’incendie, à la police et au secteur ferroviaire.
Mesures budgétaires
Le gouvernement a adopté un train de mesures budgétaires dès le 19 mars. Ce dispositif a été révisé à trois reprises depuis et des mesures supplémentaires ont été prises pour soutenir l’économie. Le nouveau fonds de crise mis en place au sein de la Banque nationale de développement (BGK, Bank Gospodarstwa Krajowego) devrait financer des mesures budgétaires de l’ordre de 22.7 milliards EUR (100 milliards PLN) en 2020. En outre, 2.8 milliards EUR (12.2 milliards PLN) ont été spécifiquement affectés au soutien de l’investissement des collectivités locales.
Garantie de revenu pour les personnes physiques
Les parents dont les enfants étaient concernés par les fermetures d’écoles et de structures d’accueil des jeunes enfants pouvaient demander une allocation de garde. Les entreprises pouvaient demander à bénéficier d’une subvention salariale en cas de difficultés, sous réserve de ne pas licencier de travailleurs tant qu’elles bénéficiaient de la prestation. Les travailleurs indépendants et les travailleurs sous contrat de travail indépendant de droit civil pouvaient aussi demander une aide allant jusqu’à 80 % du salaire minimum légal, exonérée de cotisations de sécurité sociale et d’impôts. Le gouvernement a également mis en place une prestation de solidarité de 1 400 PLN par mois, servie pendant une durée maximale de trois mois, pour les travailleurs ayant perdu leur emploi après le 15 mars, et il a augmenté de 36 % le montant minimal de la prestation de chômage mensuelle, en le portant à 272 EUR (1 200 PLN) à partir de septembre 2020.
Subventions, prêts, garanties de prêt et injections de capitaux au bénéfice des entreprises
Le gouvernement a annoncé la mise en place d’un « Bouclier financier », un programme de prêts et de subventions sans précédent d’un montant de 22.7 millions EUR (100 millions PLN) pour permettre aux entreprises de préserver leurs liquidités et de protéger l’emploi. Ce programme administré par le Fonds de développement polonais (PFR, Polski Fundusz Rozwoju) est axé sur les petites, moyennes et grandes entreprises. Les prêts ont été consentis pour trois ans, à taux zéro, et les remboursements ne commenceront que la deuxième année. Si les entreprises gardent leur salariés pendant toute la durée du prêt, jusqu’à 60 % du montant de l’aide accordée initialement sous forme de crédit peut se transformer en subvention.
La Banque nationale de développement (BGK, Bank Gospodarstwa Krajowego) a également relevé le montant de son programme de garanties de prêt de minimis aux entreprises de 4.5 milliards EUR (20 milliards PLN), puis un montant supplémentaire de 91 millions EUR (400 millions PLN) de financements provenant de l’UE a été réaffecté à de nouvelles garanties de prêt à la fin du mois d’avril. Pour les petites entreprises, le taux de couverture des garanties a été porté de 60 % à 80 % du montant des prêts, et un nouveau fonds de garantie des liquidités a été créé au sein de la BGK pour les emprunts contractés par les moyennes et grandes entreprises.
Le PFR a augmenté ses investissements et ses opérations de financement à des conditions préférentielles. Les pouvoirs publics ont également annoncé que de nouvelles injections de capitaux seraient financées par le biais des fonds régionaux de l’UE disponibles.
Reports d’impôts et de cotisations de sécurité sociale
Les travailleurs indépendants et les microentreprises ayant enregistré une baisse importante de leurs recettes pouvaient demander à bénéficier d’un report de paiement d’impôts et d’une annulation temporaire du paiement de leurs cotisations de sécurité sociale. Cette mesure a ensuite été étendue aux entreprises de 10 à 49 salariés.
Politique monétaire et réglementation prudentielle
La politique monétaire a été exceptionnellement accommodante. La Banque nationale de Pologne (NBP, Narodowy Bank Polski) a réduit trois fois son taux directeur, qui a été ramené de 1.5 % au début du mois de mars à 0.1 % à la fin du mois de mai. En outre, la banque centrale a mis en place des opérations de pensions pour fournir des liquidités au secteur bancaire, et annoncé qu’elle allait acheter des titres du Trésor polonais et des titres de dette garantis par l’État sur le marché secondaire. Elle a aussi lancé un programme de financement des prêts bancaires aux entreprises privées non financières similaire au programme d’opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO) de la BCE.
La réglementation macroprudentielle a été assouplie. Le coefficient de réserves obligatoires a été abaissé de 3.5 % à 0.5 %, tandis que le taux des intérêts sur les réserves obligatoires a été fixé au niveau du taux directeur (soit 0.1 % actuellement). À la suite de recommandations du Comité de stabilité financière, les banques ont été relevées de l’obligation de maintenir le volant de fonds propres applicable au risque systémique et autorisées à ramener le coefficient de pondération en fonction des risques de 100 % à 50 % pour certaines expositions garanties par de l’immobilier commercial, ce qui a eu pour effet d’accroître considérablement leurs fonds propres disponibles. La Commission de surveillance financière (KNF, Komisja Nadzoru Finansowego) polonaise a introduit une certaine souplesse dans le classement des expositions, et permis aux banques de continuer à opérer même en deçà du résultat combiné du volant de sécurité obligatoire et du ratio prêts/fonds propres.
Le plan de relance « Next Generation EU »
Le plan de relance « Next Generation EU » adopté par les dirigeants de l’UE en juillet 2020 se monte à 750 milliards EUR. Après l’approbation par le Parlement européen et le Conseil des propositions législatives qui créeront les instruments financiers nécessaires pour concrétiser « Next Generation EU », la mise en œuvre de ce plan de relance devrait débuter le 1er janvier 2021. Il sera financé par des emprunts émis par la Commission sur les marchés de capitaux, dont le remboursement s’étalera sur la période 2028-58. Ce plan est complété par le budget 2021-27 de l’UE, qui devrait s’établir à 1 074.3 milliards EUR, ce qui porte le montant total mobilisé à 1 824.3 milliards EUR sur la période 2021-27.
Le plan de relance « Next Generation EU » crée de nouveaux instruments financiers, et sa mise en œuvre est concentrée sur les premières années de sa période d’application. La nouvelle Facilité pour la reprise et la résilience absorbe l’essentiel des fonds (672.5 milliards EUR, dont 312.5 milliards sous forme de subventions et 360 milliards sous forme de prêts) et vise à contribuer au financement d’investissements et de réformes au cours de la période 2021-23. Plus spécifiquement, les subventions accordées à la Pologne au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience devraient atteindre environ 23.1 milliards EUR (soit approximativement 4.4 % du PIB de 2019 sur une période de six ans). D’après la répartition des fonds prévue, les 30 milliards EUR du Fonds pour une transition juste, destinés à favoriser la transition vers une économie neutre pour le climat, pourraient porter ce montant à un total approximatif de 29.1 milliards EUR pour la Pologne (5.5 % du PIB de 2019) (EC, 2020).
Source : OCDE, 2020, Outil de suivi des politiques nationales relatives au COVID-19 ; OCDE (2020) Perspectives économiques, juin 2020 – De l’effondrement à la reprise : l’économie mondiale sur la corde raide, Éditions OCDE, Paris ; Commission européenne (2020), Les piliers de « Next Generation EU », https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/health/coronavirus-response/recovery-plan-europe/pillars-next-generation-eu_fr
Il est nécessaire que l’action publique continue de soutenir l’économie
L’économie a été considérablement affaiblie.
Après les premiers cas positifs observés début mars, le nombre quotidien des nouvelles contaminations par le coronavirus en Pologne a augmenté rapidement jusqu’au début du mois d’avril (Graphique 1.7). Le 8 mars, après la confirmation des premiers cas, les autorités sont intervenues rapidement pour promouvoir le télétravail, interdire les événements de masse, suspendre les cours dans les écoles et les universités et fermer progressivement la totalité des lieux culturels, d’hébergement et de restauration et des salles de spectacle, ainsi que les centres commerciaux (Encadré 1.1). À la mi-mars, le trafic aérien et ferroviaire international de passagers a été interrompu et des contrôles aux frontières ont été rétablis. Quelques jours après, le gouvernement a déclaré l’état d’urgence épidémique et appliqué des mesures de confinement encore plus strictes. La rapidité avec laquelle ces mesures ont été prises ont aidé à limiter l’ampleur de la contagion. Néanmoins, le nombre de nouveaux cas est vite reparti à la hausse pendant l’automne et les autorités ont imposé de nouvelles restrictions sanitaires.
La production industrielle et les ventes au détail ont fortement baissé en avril, tombant en dessous des niveaux observés pendant la crise financière mondiale (Graphique 1.8). La fin, en mai, des deux mois de confinement a permis un redémarrage de l’activité. La production industrielle et les ventes au détail se sont nettement redressées. L’hôtellerie, la restauration et les transports sont des secteurs particulièrement touchés. La fréquentation des commerces de détail et des restaurant a diminué de 28 % par rapport à une période normale, et les ventes au détail des entreprises employant jusqu’à 9 personnes ont reculé de 23 % en glissement annuel en avril. Les exportations et les importations, qui avaient bien résisté au premier trimestre, ont elles aussi chuté avant de rebondir. La confiance des entreprises reste relativement faible dans la plupart des secteurs, notamment les services, et la résurgence récente de la pandémie sape la confiance : depuis le rétablissement des restrictions, la demande intérieure et les indicateurs de mobilité ont renoué avec une tendance baissière.
Un vaste train de mesures budgétaires a permis d’amortir l’impact initial de la crise
La politique budgétaire a apporté des réponses énergiques à la crise liée au coronavirus. Les autorités ont annoncé l’adoption d’un plan de lutte contre la crise qui comporte des mesures discrétionnaires représentant environ 5.2 % du PIB en 2020 (112.2 milliards PLN), en sus du jeu des stabilisateurs automatiques et du Bouclier financier (Encadré 1.1). Ce train de mesures, bienvenu, visait à préserver les emplois en soutenant la trésorerie des entreprises, à renforcer les dépenses de santé et à encourager l’investissement dans les infrastructures pendant la phase de reprise. Des garanties de ressources ont été octroyées aux nombreux travailleurs indépendants et temporaires. Pour éviter que la pandémie ne creuse encore les inégalités, le gouvernement a renforcé les transferts aux collectivités locales et a reporté les remboursements de prêts pendant une période allant jusqu’à trois mois pour les personnes ayant perdu leur emploi ou leur principale source de revenu. Il a également instauré une allocation de solidarité de trois mois destinée aux demandeurs d’emploi les plus défavorisés, et relevé de façon permanente les prestations de chômage. Un mécanisme de microcrédit subventionné permet de soutenir la trésorerie des plus petites entreprises, tandis qu’un dispositif de garantie de prêts à hauteur de 100 milliards PLN (4.4 % du PIB) couvre les crédits consentis à toutes les entreprises n’ayant pas d’arriérés d’impôt, en fonction de leur taille.
La consommation différée et les décisions d’investissement qui avaient été repoussées ont soutenu la reprise initialement, mais la résurgence de la pandémie et les restrictions sanitaires associées, la hausse attendue du chômage et les incertitudes entourant l’ampleur des destructions subies par les chaînes de valeur mondiales entament la confiance des ménages et des entreprises. La croissance du PIB ne dépassera pas 2.9 % en 2021 après une profonde récession en 2020. En cas de nouvelles vagues épidémiques, accompagnées de nouvelles mesures d’endiguement, la reprise s’affaiblirait encore. En outre, une reprise moins rapide dans la zone euro, conjuguée à une dégradation plus marquée des perspectives de l’industrie automobile et des services aux entreprises au niveau mondial, réduiront les débouchés d’exportation.
Les ajustements en cours sur le marché du travail auront des conséquences durables sur les ménages et les entreprises (Graphique 1.9). Les effets du choc initial ont été lissés par les mesures gouvernementales, la réduction du temps de travail et la prise de congés sans solde (Statistics Poland, 2020). Les effectifs salariés et le nombre d’heures travaillées ont lentement diminué, en partie sous l’effet du dispositif de chômage partiel. Le rebond de l’emploi qui suivi la fin du confinement initial n’a été que partiel, et nombreux sont les travailleurs qui ne pourront pas conserver de lien avec leur employeur. Ces ajustements sont appelés à prendre de l’ampleur compte tenu de la faiblesse de la reprise attendue, avec les licenciements et faillites qu’elle va probablement provoquer et les importants besoins de réaffectation et de reconversion qui vont en découler. Les travailleurs sous contrat temporaire ou indépendants, qui représentent une part exceptionnellement importante de la main-d’œuvre, pourraient payer le plus lourd tribut à cet égard. Les petites et les microentreprises, dont les réserves financières sont limitées, sont aussi particulièrement vulnérables. En effet, après le déclenchement de l’épidémie, nombre d’entre elles ont dû abaisser les salaires pour réduire les pertes à court terme et préserver leurs liquidités sans avoir à procéder à des licenciements, et le rétablissement des restrictions à l’automne pourrait compromettre un peu plus leur situation financière.
Les exportations devraient être relativement résilientes face à l’atonie de la situation économique mondiale (Graphique 1.10). Ces dernières années, les exportateurs polonais ont cherché à diversifier leurs liens commerciaux pour compenser la contraction de la demande en provenance de l’Union européenne et les chocs négatifs qui ont pesé sur la demande de la Russie et de l’Ukraine. La composition des exportations de biens de la Pologne est diversifiée, même si elles restent principalement axées sur des produits de faible et moyenne technologie et orientées vers d’autres pays européens (Graphique 1.11 et Chapitre 2). Pourtant, à la différence de ce qui s’est produit avec la forte dépréciation de la monnaie observée pendant la crise financière mondiale, le choc provoqué par la pandémie et le récent assouplissement de la politique monétaire (voir ci-après) n’ont pas, à ce jour, provoqué d’importantes variations des taux de change.
Les perspectives à court terme sont particulièrement incertaines. Si la pandémie de coronavirus devait encore durer et s’étendre davantage, la situation économique locale et mondiale pourrait être mise à mal, ce qui pèserait sur la croissance. La recrudescence des tensions commerciales risquerait de brider encore la progression des exportations et de l’investissement privé. Un nouveau ralentissement de l’industrie automobile allemande pénaliserait également les exportations, et notamment le secteur des équipementiers automobiles. De même, une dégradation des perceptions concernant l’évolution de l’indépendance judiciaire et de l’État de droit pourrait affaiblir l’investissement des entreprises. En revanche, le déploiement à grande échelle d’un vaccin efficace mis sur le marché dès 2021 pourrait accélérer le rythme de la reprise en dopant la demande extérieure et la confiance des investisseurs. Un redressement plus rapide que prévu de la confiance des ménages pourrait stimuler la consommation privée. Enfin, un certain nombre de chocs potentiels de grande ampleur pourrait modifier sérieusement les perspectives (Tableau 1.3).
Tableau 1.2. Événements peu probables qui pourraient modifier sensiblement les perspectives
Origine du choc |
Conséquences possibles |
---|---|
Épidémie prolongée et mondialisée de coronavirus |
De nouvelles flambées épidémiques, plus longues et plus aiguës, pourraient se propager beaucoup plus largement que prévu. Cela affecterait les perspectives de croissance mondiale et la demande sur les grands marchés d’exportation, et pourrait également limiter la capacité productive de la Pologne en réduisant son offre de main-d’œuvre et en affectant ses chaînes d’approvisionnement. |
Hausse rapide des primes de risque sur les marchés mondiaux |
Il en résulterait un relèvement des taux sur le marché polonais et le zloty pourrait se déprécier, d’où une hausse les charges d’intérêts et des risques de dérapage budgétaire. |
Montée du protectionnisme et des tensions commerciales internationales. |
La Pologne serait gravement touchée par un ralentissement de ses partenaires européens en cas de tensions commerciales prolongées et exacerbées. Cela aurait des conséquences négatives sur les exportations et les entrées d’entreprises sur le marché et pourrait saper la confiance des investisseurs, au détriment de la productivité et de la croissance potentielle. |
Encadré 1.2. Principales mesures et réformes en cours
Accroître les transferts sociaux : suite à l’élargissement, en juillet 2019, du périmètre du programme 500+, une allocation mensuelle de 500 PLN (117 EUR) est accordée sans conditions de ressources à tous les enfants âgés de 0 à 18 ans. Le dispositif de complément de retraite consiste à verser aux retraités, une fois par an, une pension forfaitaire dont le montant brut était de 1 100 PLN en 2019 (246 EUR) et de 1 200 PLN (281 EUR) en 2020.
Réforme des retraites : les fonds de pension ouverts (OFE, Otwarty fundusz emerytalny) vont être supprimés et les fonds transférés sur des comptes individuels de retraite privés (IKE) ou sur des comptes personnels auprès de l’Institut d’assurance sociale (ZUS, Zaklad Ubezpieczen Spolecznych). Les autorités ont aussi mis en place en 2019 des plans d’épargne salariale (PPK, Pracownicze Plany Kapitałowe), facultatifs. Ces plans ont vocation à accroître l’épargne privée à long terme et pourraient notamment rendre le niveau des retraites plus adéquat à l’avenir.
Augmenter les dépenses fiscales pour les bas salaires et les jeunes travailleurs : le seuil en deçà duquel les revenus sont exonérés d’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) a augmenté depuis 2018, et le taux de la première tranche d’imposition a été ramené en octobre 2019 de 18 % à 17 %. Les jeunes contribuables (dès lors que leurs revenus n’excèdent pas 85 528 PLN) sont exemptés de l’IRPP depuis août 2019, et le montant des frais déductibles a plus que doublé en octobre 2019.
Améliorer la discipline fiscale concernant la TVA : la Pologne a créé un entrepôt de données centralisé et fusionné les services chargés de l’administration de l’impôt, des douanes et du contrôle budgétaire. Elle a également amélioré les outils de modélisation pour mieux détecter les irrégularités et a facilité les échanges de renseignements avec les banques en cas de suspicion de fraude.
Le gouvernement a revalorisé le salaire minimum : une augmentation de 15.6 % a eu lieu en janvier 2020, et une nouvelle hausse de 7.7 % prendra effet en janvier 2021 (portant le salaire minimum à 2 800 PLN).
Les programmes « Air pur » de 2018 et « Mon énergie » de 2020 visent à réduire la pollution atmosphérique due au chauffage résidentiel, à améliorer la performance énergétique des bâtiments et à développer l’utilisation des petites installations d’énergie renouvelable. Des subventions et des prêts sont accordés pour investir dans le remplacement des systèmes de chauffage, des fenêtres et des portes et dans l’isolation thermique des logements, ainsi que pour installer des systèmes à énergie renouvelable. Le second dispositif permettra ainsi de cofinancer des équipements photovoltaïques individuels jusqu’à hauteur de 50 %.
Augmenter les dépenses publiques de santé : avant la pandémie de COVID‑19, le gouvernement prévoyait d’accroître les dépenses publiques de santé pour les porter de 4.5 % du PIB en 2015 à 6.0 % en 2025. Des dépenses supplémentaires ont déjà été engagées en 2020 en réponse à la crise actuelle.
Augmenter certains impôts spécifiques : une nouvelle taxe sur les sodas et certaines boissons alcoolisées, dite « taxe sur le sucre », et un impôt sur le chiffre d’affaires du commerce de détail vont être instaurés en 2021.
Initiatives d’aide aux PME (Chapitre 2) : la « Constitution du Business » (ensemble de textes de loi redéfinissant les relations entre l’État et les entreprises) de 2018 et le dispositif « 100 changements pour les entreprises » visent à réduire les lourdeurs administratives, notamment pour les PME et les investisseurs étrangers. Par ailleurs, les autorités ont abaissé le taux réduit de l’impôt sur les bénéfices pour les PME à 9 % en 2019.
Stratégie intégrée pour les compétences : le volet général de la Stratégie intégrée pour les compétences (ZSU, Zintegrowana Strategia Umiejętności) a été adopté en janvier 2019. Le volet détaillé est en cours d’élaboration avec le soutien de l’OCDE.
Réformes judiciaires : dans le contexte de la réforme générale des retraites, les autorités ont abaissé l’âge de départ à la retraite des juges mais autorisé le ministère de la Justice à maintenir en poste certains d’entre eux, entre autres mesures. La Cour de justice de l’Union européenne a jugé illégale cette proposition de réforme (EC, 2019), à la suite de quoi le gouvernement a modifié l’âge de départ à la retraite des juges. Une autre réforme, qui donnerait la possibilité de révoquer des juges sur le fondement d’arrêts qu’ils ont rendus, a été critiqué par la Cour suprême de Pologne (Polish Supreme Court, 2020) et le Conseil de l’Europe (Council of Europe, 2020).
Source : CE (2019), Déclaration de la Commission européenne sur l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne concernant la loi polonaise sur les juridictions de droit commun, Commission européenne ; Conseil de l’Europe (2020), Pologne - Avis conjoint urgent de la Commission de Venise et de la Direction générale des droits de l’homme et de l’État de droit (DG I) du Conseil de l’Europe sur les amendements à la loi sur les tribunaux ordinaires, à la Loi sur la Cour suprême et à certaines autres lois, Avis n° 977 / 2020, CDL-PI(2020)002-f ; et Cour suprême de Pologne (2020), 24 janvier 2020.
L’orientation accommodante de la politique monétaire est appropriée.
Les instruments de la politique monétaire ont été actionnés rapidement et vigoureusement en réponse à la crise du coronavirus qui se profilait. La banque centrale a ramené son taux directeur de 1.5 % au début du mois de mars à 0.1 % à la fin du mois de mai en procédant parallèlement à un resserrement du corridor de taux d’intérêt (Graphique 1.12), renforcé la liquidité des banques en réduisant le coefficient de réserves obligatoires, lancé un programme d’achat d’actifs – comprenant des titres de dette garantis par l’État – et lancé un programme d’opérations ciblées de refinancement à long terme de type TLTRO. Ces mesures ont permis un assouplissement des conditions monétaires et facilité le financement des mesures budgétaires anti-crise dans la mesure où les rendements des obligations d’État ont nettement diminué (NBP, 2020a). Il a été par ailleurs expressément indiqué que la banque centrale allait poursuivre ses achats de titres du Trésor et d’obligations garanties par l’État sur le marché secondaire, et qu’elle accorderait aux banques des crédits par voie d’escompte d’effets de commerce pour leur permettre de refinancer les prêts consentis aux entreprises.
L’inflation globale a fortement ralenti, en partie sous l’effet de l’inversion des hausses antérieures des prix de l’énergie et des produits alimentaires (Graphique 1.13, partie A). En octobre, l’inflation globale – selon la définition de l’Office central de statistique (GUS, Glówny Urzad Statystyczny) – s’établissait à 3.1 % en glissement annuel, en baisse de 1.6 point par rapport à son pic de février. La baisse des prix du pétrole et le ralentissement de la croissance des prix des produits alimentaires ont largement compensé la hausse des prix de gros de l’électricité, due à des défaillances récurrentes de l’offre (OECD, 2016) et la fin, en janvier 2020, du gel des prix de l’électricité pour les ménages décidé en 2019 (ERO, 2020). Pourtant, l’inflation sous-jacente reste relativement élevée. Cela est dû aux effets différés des hausses des prix administrés, de la légère dépréciation du zloty et de la répercussion des coûts des nouvelles procédures en matière de santé et de sécurité, car la progression des salaires a fortement ralenti et le chômage a commencé à augmenter. D’après les prévisions de l’OCDE et celles de la banque centrale, l’inflation devrait rester dans la marge de fluctuation définie par la banque centrale en 2020-21 (Graphique 1.13, partie B ; NBP, 2020a et c). La progression des salaires devrait céder encore du terrain et l’économie se redresser lentement et de manière très incertaine, car l’activité fait face à des vents contraires liés à l’atonie de la croissance mondiale, aux risques de voir apparaître des épisodes épidémiques plus graves et plus durables et à l’intensification des tensions commerciales.
Dans ces circonstances, l’orientation actuelle de la politique monétaire paraît appropriée. En réaction au choc provoqué par la pandémie de COVID-19, les autorités monétaires ont amélioré et amplifié les instruments à leur disposition. Les rendements des obligations en monnaie locale ont diminué sensiblement à la suite de l’annonce des programmes, sans effet majeur sur les taux de change. Les autorités ont clairement indiqué qu’elles étaient prêtes à maintenir les taux d’intérêt à leurs niveaux historiquement bas pendant une période prolongée et qu’elles allaient poursuivre leurs achats de titres du Trésor et de titres de dette garantis par l’État sur le marché secondaire afin de renforcer le mécanisme de transmission de la politique monétaire. Cela étant, les décisions de politique monétaire devraient rester dictées par la réalité des faits et s’inscrire dans une démarche d’anticipation, et permettre une réaction rapide si la situation économique devait se détériorer (ou s’améliorer) plus rapidement que prévu. Étant donné que leur marge de manœuvre est potentiellement limitée, si la crise économique était encore plus grave, les autorités monétaires pourraient envisager d’ajuster leurs achats massifs d’actifs, notamment en élargissant l’éventail d’actifs admissibles et en recourant à des taux d’intérêt négatifs.
Les risques pour la stabilité financière se sont accrus et doivent être surveillés attentivement
La crise liée au coronavirus a entraîné l’apparition de plusieurs risques financiers. Avant la crise, l’état du système financier était relativement bon, malgré l’augmentation de certains facteurs de vulnérabilité (Graphique 1.14). Cela étant, un déclin prolongé de l’emploi et une baisse des recettes des entreprises réduiraient la capacité des ménages et des entreprises à rembourser leurs dettes et augmenteraient les coûts liés au risque de crédit pour les banques (OECD, 2020a et 2020c). Ce risque est néanmoins atténué par le soutien budgétaire et les interventions monétaires de grand ampleur qui sont déployés (Encadré 1.1). Dans le même temps, le niveau élevé des incertitudes et l’augmentation de l’aversion au risque ont un impact négatif sur la propension des banques à accorder de nouveaux crédit, ce qui pourrait rendre plus périlleuse encore la situation de liquidité des entreprises et menacer leur solvabilité (Graphique 1.15, partie A ; NBP, 2020b). Toutefois, à en croire les résultats d’enquêtes menées auprès des banques, le ralentissement de la distribution de nouveaux prêts observé en 2020 s’explique davantage par la morosité de la demande que par le resserrement des normes de crédit.
La bonne santé du secteur bancaire avant la crise et les mesures réglementaires ont jusqu’à présent prémuni les banques contre les problèmes de liquidités et de fonds propres. Malgré des taux d’intérêt historiquement bas, les facteurs de vulnérabilité macrofinancière s’étaient atténués depuis 2010. Le ratio du service de la dette des entreprises non financières était faible en comparaison des niveaux internationaux (Graphique 1.15, partie B). Les pertes sur prêts, les prêts en souffrance et les créances douteuses étaient en baisse (NBP, 2019). Le système bancaire était en outre bien capitalisé et liquide (KNF, 2019 ; EBA, 2018). Tous ces volants de sécurité cumulés, ainsi que la suspension des dispositions relatives au volant de fonds propres applicable au risque systémique, recommandée par le Comité de stabilité financière, et les mesures prises par la banque centrale pour fournir des liquidités au secteur bancaire, telles que la baisse des coefficients de réserves obligatoires et l’introduction d’opérations de pensions et d’opérations structurelles, ont permis de limiter le risque de liquidité et la nécessité de renforcer les fonds propres des banques.
Cela étant, malgré ces bons indicateurs globaux, la prudence est de mise. Les cours des actions des banques ont baissé, ce qui pourrait les empêcher de lever des fonds auprès de sources extérieures si besoin était. On observe en outre une certaine hétérogénéité entre les banques, certains établissements de petite taille plus sensibles aux chocs ayant subi des pertes qui réduisent sensiblement leurs fonds propres disponibles (NBP, 2020b). Bien que l’encours des créances douteuses et litigieuses soit demeuré globalement stable jusqu’en septembre 2020, la crise liée au coronavirus a accentué les risques de créances improductives, et les banques devraient utiliser leurs bénéfices pour renforcer leurs volants de fonds propres, par exemple en s’abstenant de distribuer des dividendes, ainsi que l’a recommandé l’autorité de tutelle.
La crise a mis à mal la rentabilité des établissements financiers. Les banques polonaises étaient déjà touchées par les pressions sur la rentabilité observées à l’échelle mondiale (EBA, 2019), ainsi que par des facteurs propres à la Pologne liés à la taxe sur les actifs introduite en 2016 et à l’augmentation des contributions au fonds de garantie bancaire (Graphique 1.16, partie A ; NBP, 2019). La demande de services bancaires et de produits d’investissement ayant diminué pendant le confinement, les marges hors intérêts ont chuté, tandis que la baisse des taux a réduit les marges d’intérêt des banques. Dans le même temps, l’augmentation des provisions pour risque de crédit réduit encore leur rentabilité. La diminution de l’encours de créances hypothécaires libellées en devises représente une autre source de risques à moyen terme, car dans le contexte actuel de multiplication des plaintes de clients et des procédures judiciaires, la rentabilité des banques pourrait souffrir si les clauses de certains contrats de prêt hypothécaire en devises étaient jugées abusives (ECJ, 2019).
Les liens entre l’État et les établissements financiers se sont renforcés, exposant les banques à d’éventuels effets de rétroaction négatifs entre la situation des finances publiques et celle du secteur bancaire. Le contrôle étatique du système financier s’était déjà renforcé avant la pandémie, portant sur environ 40 % des actifs du secteur, après l’acquisition par l’État de participations dans deux grandes banques en 2017 et une réforme de 2019 qui a conféré à l’État un rôle accru dans les nominations des membres de la Commission de surveillance financière polonaise (KNF, Komisja Nadzoru Finansowego). Les banques ont par ailleurs considérablement étoffé leurs portefeuilles d’obligations souveraines (Graphique 1.16, partie B). La taxe de 2016 sur les actifs bancaires incite les banques à augmenter leurs placements en titres d’État dans la mesure où ceux-ci sont pour l’instant exonérés de cette taxe. Remplacer l’actuelle taxe sur les actifs bancaires par un impôt sur les bénéfices et les rémunérations aurait un effet de distorsion moindre (IMF, 2019).
Le renforcement du cadre réglementaire viendrait conforter la stabilité financière. La KNF, chargée de la surveillance du secteur bancaire, s’est vu octroyer des ressources supplémentaires en 2019. Cependant, son indépendance risque de demeurer limitée. En effet, les administrateurs de la KNF devraient être sélectionnés sur la seule base de leur expertise et de leur expérience. La KNF devrait également avoir compétence pour superviser la gestion de ses ressources humaines, ainsi que pour juger de l’efficacité de la surveillance exercée. Pour renforcer l’efficacité des interventions précoces concernant les banques en difficulté, la KNF devrait pouvoir procéder à une évaluation de leur insolvabilité sans avoir à solliciter l’avis externe d’une tierce partie (IMF, 2019).
Stimuler la reprise tout en jugulant les tensions à moyen terme sur les dépenses
La crise va laisser des traces qui viendront s’ajouter à des problèmes existant de longue date.
Avant la crise, la situation budgétaire était solide à court terme (Graphique 1.17). Le déficit budgétaire avait été sensiblement réduit depuis 2010 et le ratio dette publique/PIB aurait dû encore baisser par rapport à son pic de 2016 pour descendre bien en deçà de la moyenne de l’Union européenne en 2021. Ces résultats ont été rendus possibles par la vigueur de la croissance, l’amélioration du recouvrement de l’impôt (notamment grâce à la suppression de certaines niches fiscales) et la faible croissance des dépenses jusqu’à une époque récente. Pourtant, déjà avant la crise, les autorités avaient augmenté les dépenses sociales (Graphique 1.18 et Encadré 1.2). En particulier, le programme de prestations pour enfant 500+ mis en place en avril 2016 (et ensuite élargi) et les mesures d’octobre 2017 revenant sur la réforme de l’âge minimum de départ à la retraite pour le ramener au niveau de 2012 ont eu pour conséquence d’augmenter les besoins de financement à moyen terme. On estime que ces deux mesures devraient coûter plus de 2 % du PIB par an. La nouvelle prestation pour enfant a entraîné un doublement du soutien public aux familles, qui représente désormais quelque 3.8 % du PIB, soit bien plus que dans la plupart des autres pays de l’OCDE (Graphique 1.18, partie A). Le dispositif de complément de retraite et l’annulation de la réforme qui avait relevé l’âge de la retraite devraient porter les dépenses publiques de retraite à un niveau proche de 12.0 % du PIB en 2020 (partie B).
Dans le contexte actuel de taux d’intérêt très bas, qui pourrait perdurer longtemps, des niveaux d’emprunts publics élevés peuvent être viables s’ils servent à financer des investissements propices à la croissance. Or, la forte augmentation temporaire du déficit liée à la crise déclenchée par le coronavirus rendra plus nécessaire la maîtrise des tensions sur les dépenses à moyen terme (Graphique 1.17). Par rapport aux prévisions de l’OCDE de novembre 2019, la crise fera grimper la dette au sens de Maastricht de 17 points de PIB pour la porter à 62 % du PIB. D’importants problèmes se posent aussi pour la viabilité à long terme. Un certain nombre d’éléments laissent augurer une augmentation des tensions sur le solde budgétaire à long terme. Premièrement, les dépenses de santé et de soins de longue durée devraient augmenter de 1.4 point de PIB environ d’ici 2050 (EC, 2018a). Deuxièmement, il restera des besoins considérables à satisfaire en matière d’infrastructures pour permettre la transition vers une économie plus verte et plus efficiente, compte tenu de la persistance de goulets d’étranglement dans les infrastructures énergétiques et de transport.
Selon des simulations effectuées par l’OCDE à titre d’illustration, empreintes d’une très grande incertitude, la dette publique de la Pologne (au sens de Maastricht) pourrait augmenter pour avoisiner 90 % du PIB d’ici 2050 si rien n’est fait pour compenser les coûts du vieillissement et les conséquences d’une vague unique de COVID-19 (Graphique 1.19). Même en tenant compte de la règle nationale de dépenses, qui impose à la Pologne de rester proche de son objectif à moyen terme, à savoir un solde structurel de -1 % du PIB, les efforts d’assainissement engagés pour compenser les éléments cités ne parviendraient pas à orienter résolument la dette publique à la baisse, puisque le vieillissement démographique va progressivement réduire le potentiel de croissance. Dans ce scénario, du fait de la forte augmentation du stock de dette sur la période 2020-21, l’endettement public continuera de croître pour s’établir à un niveau proche de 74 % du PIB en 2050.
Renforcer encore le cadre budgétaire contribuerait à sécuriser la viabilité des finances publiques à long terme. Actuellement, la dette publique (selon la définition nationale) doit être maintenue en deçà de 60 % du PIB en vertu de la Constitution. Dans des circonstances normales, l’application de la règle de dépenses de 2013 devrait conduire à une réduction du déficit si l’un des trois éléments déclencheurs suivants survient : les seuils préventifs fixés pour le ratio dette publique nette/PIB (43 % et 48 %) sont franchis ; le déficit des administrations publiques dépasse 3 % du PIB ; ou il existe des divergences importantes par rapport à l’objectif budgétaire à moyen terme. Depuis 2019, la procédure budgétaire doit en outre intégrer une perspective à moyen terme (trois ans) et fournir des orientations concernant les futurs plafonds de dépenses, ce qui est bienvenu. La Banque nationale de Pologne (NBP, Narodowy Bank Polski) et la Commission européenne (via le programme de convergence) formulent des avis sur le projet de loi de finances, et la Cour des comptes (NIK, Najwyższa Izba Kontroli) joue un rôle de contrôle ex post. Néanmoins, la Pologne demeure le seul État membre de l’UE dépourvu de conseil budgétaire (EC, 2019a), et il serait utile qu’une institution indépendante réalise des évaluations ex ante des plans budgétaires du gouvernement ainsi que des analyses de la viabilité des finances publiques à long terme (OECD, 2016).
D’autres risques pourraient peser sur la charge de la dette. Les éléments de passif éventuel des administrations publiques sont considérables. Ils atteignaient près de 43 % du PIB en 2018 (IMF, 2019) et ont augmenté avec la crise du coronavirus. Les garanties et engagements de l’État polonais liés à des partenariats public-privé (PPP) sont faibles en comparaison d’autres pays (Eurostat, 2020a). Néanmoins, les engagements des nombreuses entreprises publiques présentes dans les secteurs financier et non financier sont importants. La Pologne devrait s’aligner sur les meilleures pratiques de l’OCDE en matière de suivi des activités des entreprises publiques et de renforcement de leur gouvernance (EC, 2019a ; OECD, 2020d).
Le vieillissement démographique pèsera lourdement sur la qualité des retraites et des soins de santé et de longue durée
Avant la crise du coronavirus, la viabilité financière du système de retraite semblait assurée, à en juger par les projections à long terme. Cela étant, elle aurait été obtenue au prix d’une baisse progressive du niveau des retraites par rapport aux salaires sur le long terme. Cette situation implique un risque de pauvreté au moment de la vieillesse et, pour cette raison, de nombreux Polonais s’inquiètent de la sécurité financière dont ils bénéficieront à un âge avancé. Ils estiment également ne pas avoir accès à des soins de longue durée et de santé de qualité (OECD, 2019a). Il convient de mettre en œuvre des réformes allant au-delà des seules préoccupations liées à la viabilité financière, pour que des dépenses efficientes et adéquates soient effectuées dans les secteurs des retraites, de la santé et des soins de longue durée.
Des réformes s’imposent pour réduire le risque de pauvreté durant la vieillesse et stimuler l’emploi
Les dépenses publiques de retraite semblent globalement maîtrisées sur le long terme. Malgré des augmentations ponctuelles en 2019-20, les dépenses publiques de retraite devraient rester proches de la moyenne de l’Union européenne à environ 11 % du PIB (Graphique 1.20, partie A). Selon les projections de la Commission européenne (EC, 2018a), elles demeureront stables dans l’ensemble jusqu’en 2050. La viabilité financière du système de retraite a été assurée par des taux de cotisation standard élevés et par une forte baisse du taux de remplacement (partie B), due à l’évolution vers des retraites fondées sur les antécédents de cotisations pendant la vie active et au fait que les retraites futures soient indexées principalement sur les prix (plutôt que sur la masse salariale). Cela compenserait le vieillissement rapide de la population. Néanmoins, en l’absence de nouvelles améliorations de la situation du marché de l’emploi et d’un allongement des durées de cotisation, le taux de remplacement devrait devenir l’un des plus bas observés dans les pays de l’OCDE.
L’introduction récente d’un dispositif d’épargne-retraite professionnel privé à affiliation automatique (le PPK) pourrait, d’une certaine manière, éclairer ces sombres perspectives. Le taux d’épargne net des ménages a décliné sur le long terme pour s’établir aux alentours de -1.0 % du revenu disponible en 2018. Le PPK pourrait améliorer les perspectives des futurs retraités en ajoutant une nouvelle composante au système de retraite, à condition de rétablir la confiance dans les dispositifs privés, laquelle a été entamée par les revers du régime par capitalisation obligatoire (OFE, Otwarty fundusz emerytalny) (OECD, 2019b). Depuis juillet 2019, les grandes entreprises doivent affilier leurs salariés à un PPK moyennant une cotisation standard égale à 3 ½ pour cent de leur salaire brut, scindée en une part patronale (2 %) et une part salariale (1.5 %). Les PPK bénéficient également d’un abondement par l’État. Les entreprises de plus petite taille ont suivi en 2020, et les entités publiques ainsi que les plus petites entreprises devraient être couvertes à leur tour par ce dispositif en 2021. Dans les grandes entreprises, 40 % des salariés avaient un PPK. Les autorités s’attendent à couvrir 75 % des salariés et à injecter chaque année environ 0.7 % du PIB sur les marchés de capitaux (EC, 2019a). De plus, en 2019, les autorités ont revu à la hausse la pension minimum (après une première revalorisation en 2017), l’indexation des retraites, ainsi que la couverture des femmes ayant plus de quatre enfants grâce à des transferts monétaires non conditionnels (RSU). Les prestations exceptionnelles servies à tous les retraités en 2019 et 2020 à hauteur de 0.5 % du PIB par an, au titre du dispositif de complément de retraite (Encadré 1.2), dopent également les revenus des retraités.
Le taux d’emploi des travailleurs proches de la retraite (54-64 ans) et le cumul emploi-retraite ont progressé à un rythme soutenu, mais le risque de pauvreté durant la vieillesse devrait malgré tout augmenter à long terme, notamment pour les femmes. Si l’âge effectif moyen du départ en retraite a augmenté pour les hommes comme pour les femmes jusqu’en 2018, il reste relativement bas, et les taux d’emploi des femmes âgées de 60 à 64 ans et des hommes âgés de 65 à 69 ans diminuent depuis 2018 (Graphique 1.21). Cela s’explique probablement par l’annulation, fin 2017, de la réforme de l’âge de la retraite de 2013 et l’abaissement de l’âge de la retraite à 60 ans pour les femmes et à 65 ans pour les hommes, puisque l’espérance de vie à 50 ans a progressé de 20 mois sur la période 2010-18 (Eurostat, 2020b). Dans de nombreuses études, en effet, l’âge légal de la retraite passe pour être un élément essentiel, qui tend à peser fortement sur la décision de partir en retraite, au-delà des effets éventuels des incitations financières (Cribb et al., 2016). Si l’on ajoute la forte proportion des titulaires de contrats temporaires et des travailleurs indépendants assujettis à de faibles cotisations et n’ayant donc droit qu’à de faibles retraites (OECD, 2019b et ci-dessous), cela risque d’accentuer la pauvreté durant la vieillesse et la part des retraités qui ne touchent qu’une pension minimum. Les femmes, pour lesquelles l’ouverture des droits est associée à un âge légal de la retraite particulièrement bas, ont généralement des taux de remplacement inférieurs et sont les plus exposées au risque (Bledowski et al., 2017 ; Tyrowicz and Brandt, 2017) : leur âge moyen de sortie du marché du travail figure aujourd’hui parmi les plus bas de la zone OCDE.
Un relèvement continu de l’âge effectif de la retraite, conforme à l’évolution de l’espérance de vie en bonne santé, et une amélioration des possibilités de travailler pour les femmes et les seniors sont cruciaux pour la participation au marché du travail et le niveau des retraites. Le système de retraite sert des prestations majorées à ceux qui repoussent leur départ au-delà de l’âge légal. De plus, les travailleurs reçoivent des informations et des conseils sur leur situation au regard de la retraite et les avantages potentiels d’un report de leur départ, par le biais de courriers annuels ainsi qu’auprès de conseillers régionaux. Toutefois, harmoniser la protection de l’emploi pour toutes les tranches d’âge, afin de limiter les freins au recrutement des travailleurs âgés, qui sont actuellement mieux protégés, pourrait améliorer les perspectives d’emploi de ces derniers (OECD, 2015). Relever et uniformiser l’âge légal de la retraite pour les hommes et les femmes et l’indexer sur l’espérance de vie en bonne santé, comme cela a été fait dans de nombreux autres pays de l’OCDE tels que le Danemark ou le Portugal, permettrait aussi de mieux tenir compte des améliorations de l’état de santé des travailleurs âgés et d’accélérer le relèvement de l’âge effectif de la retraite. Des efforts seront aussi nécessaires pour renforcer les programmes d’aide à la recherche d’emploi et de formation et réduire les discriminations envers les travailleurs âgés.
Les dispositifs de retraite préférentiels existants induisent des coûts budgétaires et limitent la mobilité des travailleurs entre les secteurs d’activité. Les dépenses au titre des régimes spéciaux de retraite concernent plus de 22 % des retraités actuels et représentent 2.6 % du PIB (EC, 2018a). La Caisse d’assurance sociale des agriculteurs (KRUS, Kasa Rolniczego Ubezpieczenia Społecznego), en particulier, qui repose sur des cotisations forfaitaires et qui est subventionnée à hauteur de 0.8 % du PIB environ, restreint la mobilité de la main-d’œuvre et contribue au chômage déguisé dans l’agriculture, même si la proportion d’actifs travaillant dans le secteur agricole a diminué. Si elles peuvent se justifier en partie par des conditions de travail dangereuses, les règles particulières s’appliquant aux retraites des mineurs semblent nettement plus généreuses que les règles générales. De même, les autorités pourraient revoir les dispositifs de pension de réversion pour accroître les incitations à travailler à un âge avancé et réduire leurs coûts. En effet, la part de la pension de réversion, soit 85 %, est parmi les plus élevées des pays de l’OCDE, et est supérieure à celle qui est jugée nécessaire, selon les estimations, pour préserver le niveau de vie du conjoint survivant (OECD, 2018d). Réduire progressivement l’ampleur de ces programmes permettrait d’améliorer le niveau d’emploi et l’inclusivité.
Contenir la hausse nécessaire des dépenses de soins de santé et de longue durée
Bien que les mesures d’endiguement précoces aient permis de limiter la diffusion de la pandémie, le système de santé souffre de plusieurs faiblesses. Les dépenses de soins de santé sont relativement faibles. Elles s’élevaient à 6.3 % du PIB en 2018 (et, étant financées à hauteur de 71.8 % par des dispositifs publics obligatoires, étaient prises en charge par l’État à hauteur de 4.5 % du PIB), et leur montant par habitant ne représentait que 50 % environ de la moyenne des pays de l’OCDE (Graphique 1.22, partie A). Aussi les indicateurs de santé sont-ils relativement médiocres : la mortalité évitable, c’est-à-dire les décès qui auraient pu être évités grâce à des soins appropriés, est supérieure à la moyenne de l’UE (OECD/EOHS, 2019). L’augmentation prévue du financement public de la santé à 6 % du PIB au minimum d’ici à 2024 est donc bienvenue. Pour se préparer à une éventuelle deuxième vague de la pandémie, la priorité devrait être d’assurer des ressources suffisantes pour renforcer les capacités de soins intensifs et permettre un dépistage et des mesures d’isolement à grande échelle. Le vieillissement démographique va également accentuer les pressions sur le système de soins de santé à plus long terme en raison des problèmes d’efficience posés par la forte dépendance du système à l’égard des soins hospitaliers. La coordination pourrait être améliorée grâce à un système d’orientation des patients plus efficace et à un raccourcissement des listes d’attente.
Renforcer les soins primaires permettrait aussi de ne pas dépendre à l’excès d’hospitalisations coûteuses. Le nombre de médecins, notamment de généralistes, est faible, et celui des hospitalisations évitables est élevé (Graphique 1.22, parties C et D). Le manque de généralistes et d’infirmières limite aussi de fait l’accès aux soins de santé, notamment pour les personnes démunies vivant en milieu rural. Ce phénomène s’explique en partie par des rémunérations insuffisantes. Le salaire annuel d’un médecin généraliste en 2016 était de loin le plus bas des pays de l’OCDE pour lesquels les données sont disponibles. La situation est la même pour les infirmières, dont le salaire, en bas du classement, n’est supérieur qu'à celui de leurs homologues hongroises. Pour remédier à ce problème, les autorités ont adopté en 2019 une politique nationale à long terme concernant le personnel infirmier et les sages-femmes, qui s’est traduite par une hausse sensible du nombre d’établissements de formation aux soins infirmiers et une augmentation des salaires du personnel infirmier et des sages-femmes. Néanmoins, élaborer, comme prévu, une stratégie intégrée pour les soins de santé qui répartisse la hausse attendue des dépenses publiques contribuerait grandement à remédier à ces difficultés, à condition d’accorder davantage d’importance aux soins primaires, à la prévention et aux services de santé en ligne.
L’équité est également une source de préoccupation majeure. Les différences d’espérance de vie en fonction du niveau d’études sont marquées (Graphique 1.22, partie B). Les facteurs de risque comportementaux, comme les risques alimentaires, le tabagisme, la consommation d’alcool ou une faible activité physique, sont à l’origine de près de la moitié des décès en Pologne (OECD/EOHS, 2019) et le coût de la pollution de l’air est important (voir ci-dessous). La plupart de ces facteurs de risque sont plus répandus chez les personnes dont le niveau d’études ou les revenus sont peu élevés (Wojtyniak and Goryński, 2018). Les soins préventifs ne représentent que 2.3 % des dépenses totales et pourraient largement contribuer à combler ces écarts. Il faut continuer de s’intéresser aux outils de l’action publique que sont les normes alimentaires et sanitaires, les interdictions de commercialisation ou les instruments budgétaires tels que les impôts ou les subventions. La création en 2017 d’un centre national chargé de promouvoir une alimentation saine et l’activité physique auprès de la population, et le relèvement en 2020 des taxes sur la consommation du tabac et de l’alcool, accompagné d’un prélèvement supplémentaire sur les sodas, sont des mesures bienvenues. Il faut également mener de nouvelles campagnes d’information pour mettre en avant les bonnes pratiques alimentaires et améliorer les taux de vaccination, notamment chez les plus de 65 ans.
Améliorer le système fiscal
La réforme fiscale devrait encourager la reprise et l’inclusivité et, une fois l’économie bien relancée sur la voie de la croissance, aider à financer l’augmentation des besoins de dépenses et améliorer les résultats environnementaux. À court terme, une baisse des taux des impôts sur le travail, notamment pour les ménages à faible revenu et à revenu moyen, permettrait de conforter le redressement de l’emploi et la cohésion sociale. À long terme et pour autant que cela soit nécessaire, le recouvrement de recettes supplémentaires devrait être le plus inclusif possible et fausser le moins possible la croissance. Une rationalisation des dépenses fiscales, qui sont importantes, serait utile à cet égard. De fait, le ratio impôts/PIB est déjà conforme à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.23, partie A) et le coin fiscal est relativement élevé, ce qui laisse penser que des gains d’efficience et une mise en œuvre rigoureuse sont indispensables pour limiter l’augmentation nécessaire de certains postes de dépenses. Le gouvernement prévoit de continuer à financer l’augmentation des dépenses essentiellement en réduisant la fraude fiscale et en renforçant la discipline fiscale, tout en augmentant les taxes sur la consommation (Tableau 1.4). De fait, les efforts déployés pour améliorer le respect des obligations en matière de TVA ont très nettement porté leurs fruits jusqu’ici, puisque les pertes dues à la fraude fiscale pourraient avoir diminué de 25 % environ en 2017. Néanmoins, ce résultat était aussi lié en partie à une conjoncture économique favorable (EC, 2019a).
Améliorer la dimension redistributive du régime d’imposition
Il est possible de rendre le régime d’imposition des revenus des personnes physiques plus équitable et de réduire le coin fiscal pour les travailleurs à faible revenu de manière à renforcer l’inclusivité et l’emploi (Graphique 1.23, partie B). La part de l’impôt progressif sur le revenu des personnes physiques dans l’ensemble des recettes fiscales est faible en comparaison des niveaux internationaux (OECD, 2018c). L’instauration en 2017 d’un crédit d’impôt non remboursable dégressif a contribué à renforcer la progressivité globale du système (EC, 2018e). En outre, le gouvernement a abaissé le taux de la première tranche d’imposition et exonéré certains jeunes travailleurs (personnes de moins de 26 ans dont les revenus d’activité bruts sont inférieurs à 85 528 PLN par an, soit environ 19 992 EUR) de l’impôt sur le revenu des personnes physiques en août 2019, avant d’augmenter le montant des frais fiscalement déductibles pour les salariés en octobre 2019 (Encadré 1.2). Le crédit d’impôt sur le revenu des personnes physiques mis en place en 2017 et l’abaissement du taux appliqué à la première tranche d’imposition sont de bonnes initiatives. Néanmoins, la mesure ciblée sur les jeunes a créé un seuil d’âge important, qui pourrait se traduire par une sélection accrue des salariés en fonction de leur âge et par une dégradation de la discipline fiscale.
Plusieurs mesures pourraient améliorer la progressivité des impôts sur le revenu et sur le patrimoine sans mettre en péril les perspectives de croissance. Premièrement, il est possible de renforcer le crédit d’impôt sur le revenu des personnes physiques. Seules les familles ayant des revenus très modestes (ne dépassant pas 13 % du salaire brut moyen, en 2019) peuvent bénéficier intégralement de ce crédit d’impôt. Par conséquent, il concerne essentiellement les célibataires travaillant à temps partiel et les familles à faible revenu soumises à une imposition commune (Brown et al., 2019). Deuxièmement, il existe quatre régimes distincts d’imposition et de cotisations de sécurité sociale pour les travailleurs indépendants. Dans le principal d’entre eux, les prélèvements sont assis sur un pourcentage de la rémunération mensuelle moyenne (anticipée), notamment pour les cotisations d’assurance maladie et d’assurance chômage. Certains travailleurs indépendants paient des cotisations sociales qui sont uniquement assises sur le salaire minimum et un impôt sur le revenu des personnes physiques à taux uniforme. La modicité de ces coûts au regard de ceux acquittés par les travailleurs sous contrat permanent entraîne des risques pour la qualité de l’emploi des travailleurs peu qualifiés (voir ci-après). Troisièmement, lorsque l’économie sera solidement relancée, une augmentation des impôts sur le patrimoine, qui représentent une part relativement modeste de l’ensemble des recettes, complèterait utilement de telles réformes (Graphique 1.23, partie C). Un moyen de procéder consisterait à fonder l’imposition des biens immobiliers sur leur valeur marchande (au lieu de les taxer en fonction de leur superficie), à imposer les plus-values réalisées sur les placements immobiliers et à augmenter les impôts sur les terrains et les biens immobiliers vacants dans les zones urbaines. De telles mesures amélioreraient l’inclusivité, dans la mesure où les recettes des impôts sur le logement se répartissent de façon relativement uniforme tout au long de l’échelle des revenus (Boone et al., 2019), et elles renforceraient la neutralité du système fiscal par rapport aux autres types de placements, ce qui améliorerait la répartition des ressources (OECD, 2018f).
Une fois la reprise solidement amorcée, le nombre élevé de taux réduits et d’exonérations de TVA devra être soigneusement réexaminé (Graphique 1.23, partie D). La Pologne applique des taux réduits de TVA à un certain nombre de biens et services tels que les produits alimentaires, y compris les produits alimentaires préparés, et les produits d’hygiène, les journaux et les livres, les services d’hôtellerie et de restauration, les services d’approvisionnement en eau, les services de réparation des logements et certains services de transport (CASE/IAS, 2019 ; OECD, 2018vat). Initiative bienvenue, les autorités sont en train de simplifier le système des taux réduits pour limiter les incertitudes relatives à leur application. Cela étant, limiter le recours aux taux réduits pourrait permettre d’abaisser le taux normal, qui est relativement élevé à 23 %, tout en continuant d’accroître les recettes fiscales. Cela rendrait également la structure fiscale plus inclusive. De fait, les taux réduits bénéficient souvent aux ménages à revenu élevé ou aux propriétaires d’entreprises, quelquefois de manière disproportionnée s’il s’agit par exemple de taux réduit de TVA sur l’hôtellerie-restauration, comme on l’a vu avec les baisses de TVA sur les restaurants en France (Benzarti and Carloni, 2019). On aiderait les ménages à faible revenu de façon plus efficace en utilisant l’impôt sur le revenu des personnes physiques ou des transferts sociaux ciblés, qui restent faibles en Pologne, même s’ils ont augmenté.
Renforcer la fiscalité environnementale
Pendant la phase de reprise, il est indispensable que les mesures de relance et les nouveaux investissements soient alignés sur les ambitions en matière de changement climatique, de biodiversité et, plus largement, de protection de l’environnement (voir ci-après). À long terme, la suppression progressive des subventions aux combustibles fossiles sera une condition cruciale pour améliorer la situation de la Pologne sur le plan environnemental et sanitaire. En 2015, 15 % seulement des émissions de CO2 résultant de la consommation d’énergie avaient un prix supérieur à 30 EUR par tonne, ce qui correspond à l’extrémité basse de la fourchette des coûts estimés du carbone aujourd’hui (OECD, 2018b), et les taux effectifs d’imposition de la consommation d’énergie sont également faibles (OECD, 2019c). Comme dans d’autres pays de l’OCDE, les taux d’imposition de la consommation d’énergie sont relativement élevés dans le secteur routier mais sont faibles ou nuls dans le secteur résidentiel, et le taux des droits d’accise sur l’électricité est bas. La fiscalité de l’énergie comporte d’importantes exonérations, telles que les exonérations de taxe sur le charbon dans le secteur agricole et sur la consommation des ménages ou les exonérations de droits d’accise sur le charbon et le gaz accordées à certains secteurs à forte intensité énergétique (OECD, 2019c). Le gouvernement devrait élaborer une stratégie pour les supprimer progressivement, tout en veillant à atténuer les effets qui peuvent en résulter en termes de précarité énergétique.
Une fois la reprise bien engagée, une tarification plus efficace du carbone pourrait faciliter la transition énergétique (Graphique 1.24). De l’ordre de 48 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la Pologne étaient couverts par le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SEQE) de l’UE en 2019, le prix du quota s’établissant autour de 25 EUR la tonne de CO2. Malgré tout, l’imposition effective du carbone – c’est-à-dire la somme des taxes carbone explicites et des droits d’accise sur les carburants, diminuée des exonérations, des allègements correspondant à l’application de taux réduits et des remboursements d’impôts applicables – qui complète le SEQE de l’UE ne permet pas d’envoyer actuellement des signaux-prix du carbone de vaste portée (OECD, 2019c). Un élargissement de la base d’imposition contribuerait à atténuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) et la pollution de l’air, tout en permettant de collecter à court terme des recettes supplémentaires, qui pourraient être utilisées pour financer des projets environnementaux. Bien que les émissions de CO 2 imputables au transport routier demeurent relativement faibles, le niveau par habitant des émissions dues aux transports a été multiplié par plus de deux au cours de la période 1997‑2017. La Pologne est un des très rares pays de l’OCDE où il n’existe pas de taxe sur les véhicules spécifiquement liée à leurs émissions de CO2. En outre, le gazole y est plus faiblement taxé que l’essence. La mise en place d’une telle taxe devrait s’accompagner de mesures sociales transitoires, destinées à la rendre plus acceptable. Dans la même logique, une partie des recettes de cette taxe pourrait être utilisée pour subventionner l’achat par les ménages à faible revenu de voitures ou de systèmes de chauffage moins polluants, par exemple, comme cela a été fait récemment pour les acquisitions de voitures électriques.
Il faudrait que les prix de détail de l’électricité puissent augmenter. En 2019, la Pologne a plafonné les prix de détail de l’électricité en réduisant le taux de la taxe sur l’électricité ainsi que la redevance de transition et les tarifs de l’électricité. Ce plafond a été appliqué à tous les consommateurs d’électricité au premier semestre de 2019, puis sa portée a été limitée au ménages, aux petites et moyennes entreprises, aux collectivités locales et aux hôpitaux. Les autorités ont également versé aux sociétés de négoce d’électricité des montants compensatoires couvrant la différence avec les prix du marché. Cela a ralenti la transition vers des solutions plus vertes pour les ménages qui bénéficiaient d’autres programmes (Encadré 1.2). Les autorités ont supprimé le plafonnement des prix de l’électricité en 2020, ce qui est une bonne chose, mais l’autorité de tutelle a refusé une forte hausse des prix pour les ménages en 2020 qui aurait permis de compenser l’augmentation des coûts de production et des prix de gros de l’électricité. Avant la crise, il était prévu que la hausse des prix de l’électricité pour les ménages s’accompagne du versement en 2021 de transferts sous conditions de ressources aux ménages les plus démunis. Pour autant qu’elles soient judicieusement conçues, de telles mesures pourraient contribuer à la réalisation des objectifs poursuivis en matière d’environnement, tout en évitant une dégradation excessive de l’accessibilité financière de l’énergie pour les ménages à faible revenu (Flues and van Dender, 2017).
Illustration des effets budgétaires de réformes adoptées par le gouvernement et recommandées par l’OCDE
Les réformes proposées en matière de fiscalité et de dépenses offrent au gouvernement différentes options pour améliorer la structure des dépenses et des recettes publiques à moyen terme. Ces réformes permettraient également d’accroître les dépenses d’investissement propices à la croissance à plus long terme, telles que les dépenses publiques de R-D. Le Tableau 1.4 présente à titre indicatif des estimations des effets que pourraient avoir ces différentes mesures.
Tableau 1.3. Mesures budgétaires structurelles prévues par le gouvernement de 2018 à 2025 et recommandations de l’OCDE
Effets estimés sur le déficit budgétaire de 2025 (en % du PIB de 2025)1
Partie A. Principales mesures prévues par le gouvernement en matière de dépenses jusqu’en 2025 |
% du PIB |
---|---|
Élargissement en 2019-20 du périmètre du programme de prestations pour enfant 500+ à l’ensemble des ménages, indépendamment de leurs revenus. |
0.8 |
Renforcement en 2018-19 d’autres programmes axés sur la prise en charge des enfants (programme « Bon départ » de 2018 et dispositif « Mama 4+ » de 2019). |
0.1 |
Accroissement des dépenses de santé : 1.3 % du PIB. |
1.3 |
Augmentation des dépenses de retraite due à l’annulation du relèvement de l’âge de la retraite intervenu en 2013. |
0.5 |
Accroissement des dépenses de R-D non financées par des fonds de l’UE. |
0.3 |
Partie B. Principales mesures prévues par le gouvernement en matière de recettes jusqu’en 2025 |
|
Poursuite de l’amélioration de la discipline fiscale. |
-1.5 |
Mise en application d’une taxe sur les entreprises du numérique et de la taxe sur les ventes au détail. |
-0.1 |
Nouvelles dépenses fiscales au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (nouveau seuil d’imposition, augmentation de l’abattement forfaitaire, exonération accordée aux jeunes contribuables) instaurées en 2020. |
0.4 |
Hausse des taxes sur l’alcool et le tabac en 2020 et mise en place de la nouvelle taxe sur les sodas. |
-0.15 |
Réforme du deuxième pilier du système de retraite (OFE, Otwarty fundusz emerytalny), qui se traduira par une augmentation des cotisations de sécurité sociale. |
-0.1 |
Partie C. Effet global des mesures prévues par le gouvernement sur le déficit budgétaire |
1.55 |
Partie D. Réformes recommandées par l’OCDE |
|
Redéploiement des dépenses de soins de longue durée et de prise en charge des enfants vers les soins de longue durée, le développement des structures d’accueil des jeunes enfants et les familles à faible revenu : 0 % du PIB. Il serait possible de financer une hausse des dépenses consacrées à la prise en charge des enfants et aux soins de longue durée équivalente à 1.4 point du PIB en supprimant les crédits d’impôt pour enfants à charge et les allocations familiales qui existaient avant l’adoption du programme de prestations 500+, qui représentent globalement 0.6 % du PIB, ainsi qu’en réduisant et en révisant l’élargissement du périmètre du programme 500+, qui s’élève à 0.8 % du PIB. En termes nets, cela se traduirait par un niveau de dépenses inchangé d’ici à 2025. |
0 |
Renforcement de la formation des travailleurs peu qualifiés et des chômeurs par un surcroît de ressources équivalent à 0.1 point de PIB. |
0.1 |
Augmentation des dépenses publiques consacrées à l’enseignement supérieur et à la recherche : une augmentation de 0.5 point de PIB des financements publics alloués aux universités porterait les dépenses affectées en Pologne à l’enseignement supérieur à un niveau peu ou prou similaire à celui observé au Royaume Uni et aux Pays Bas 2. |
0.5 |
Réduction du coin fiscal pour les travailleurs peu qualifiés équivalente à 0.4 % du PIB. |
0.4 |
Renforcement de la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques consistant à augmenter les recettes de 0.6 point de PIB (soit 16 % de l’écart qui sépare la Pologne de la moyenne de l’OCDE) et à utiliser ces recettes pour réduire les cotisations générales de sécurité sociale sur les bas salaires. |
0 |
Réduction des pertes de recettes de TVA dues aux taux réduits et aux exonérations : 0.8 % du PIB 2. |
-0.8 |
Augmentation des taxes environnementales et des impôts sur le patrimoine. |
-0.85 |
Alignement du régime spécial de retraite des agriculteurs et de celui des mineurs sur le régime général. Relèvement progressif à 67 ans de l’âge légal de la retraite pour les femmes et les hommes entre 2020 et 2040. |
-0.9 |
Partie E : Effet global des propositions de l’OCDE sur le déficit budgétaire |
-1.55 |
Partie F : Effet global des mesures prévues par le gouvernement et des propositions de l’OCDE sur le déficit budgétaire (= Partie C + Partie E) |
0 |
1. Hors mesures temporaires de soutien en réponse à la crise liée au coronavirus. Les nombres positifs correspondent à une dégradation du solde budgétaire. Les chiffres étant arrondis, il se peut que les totaux ne correspondent pas à la somme de leurs composantes. Les mesures adoptées avant 2018 et dont l’effet sur le déficit n’est pas échelonné dans le temps ne sont pas prises en compte.
2. Ces recommandations sont tirées de l’Étude de 2018.
Source : Calculs de l’OCDE fondés sur République de Pologne (2019), Programme de convergence – mise à jour 2019, Varsovie ; et OCDE (2018), Études économiques de l’OCDE : Pologne 2018 (version abrégée), Éditions OCDE, Paris
Tableau 1.4. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant la politique budgétaire et les retraites
Principales recommandations récentes de l’OCDE |
Mesures prises depuis l’Étude de 2018 |
---|---|
Évaluer les effets de la réforme des retraites et lui apporter des ajustements, par exemple en harmonisant l’âge de la retraite des femmes et des hommes et en l’indexant sur l’espérance de vie en bonne santé. Informer la population des effets d’un allongement de la vie active sur les revenus perçus à la retraite. |
Des courriers sont envoyés chaque année pour informer les actifs sur leurs futures retraites et un réseau de conseillers locaux a été mis en place. Des campagnes d’information du public ont été menées et un simulateur de retraite en ligne a été créé. Le Conseil des ministres a adopté une évaluation officielle de la réforme de 2016. |
Augmenter les taxes liées à l’environnement, limiter le recours aux taux réduits et aux exonérations de TVA et renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, par exemple en abaissant le seuil de la première tranche d’imposition, en introduisant de nouvelles tranches intermédiaires et en mettant fin au traitement fiscal préférentiel dont bénéficient les travailleurs indépendants. |
Depuis 2018, le seuil de non-imposition au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques a été relevé. Le taux appliqué à la première tranche d’imposition a été abaissé en octobre 2018, et certains jeunes travailleurs (les personnes âgées de moins de 26 ans et dont les revenus d’activité sont inférieurs à 85 528 PLN) sont exonérés de l’impôt sur le revenu des personnes physiques depuis août 2019. Le montant des frais fiscalement déductibles a été revu à la hausse pour les salariés en octobre 2019. |
Réaménager et privilégier les impôts les moins générateurs de distorsions, en fondant l’imposition des biens immobiliers sur leur valeur marchande et en imposant les plus-values réalisées sur les placements immobiliers. |
Aucune mesure prise. |
Améliorer la productivité, l’emploi et le bien-être
Pour favoriser la reprise et revenir à une trajectoire de croissance durable, la Pologne doit stimuler l’innovation et la productivité, notamment dans les petites entreprises. Les progrès accomplis vers une croissance plus résiliente et inclusive sont freinés par le faible niveau des compétences, des phénomènes généralisés d’inadéquation entre l’offre et la demande sur le marché du travail et les difficultés qu’ont les petites entreprises jeunes et dynamiques à se développer (Chapitre 2). Selon des simulations de l’OCDE à visée illustrative, les réformes structurelles pourraient accroître le PIB de 5.8 % au bout de 10 ans (Encadré 1.3). Les gains les plus importants proviendraient de la réforme des régimes de retraite, du développement des structures d’accueil des jeunes enfants et de l’amélioration de l’employabilité des travailleurs peu qualifiés, obtenue grâce à une réduction de leur coin fiscal et à un renforcement des mesures d’activation.
Le marché du travail polonais évolue vers des emplois plus qualifiés. Depuis que le pays s’est éloigné de la planification centralisée, le secteur des services s’est développé et l’industrie manufacturière s’est étroitement intégrée aux chaînes de valeur mondiales, ce qui modifie de plus en plus l’éventail des compétences recherchées sur le marché du travail. L’évolution de la structure de l’économie et le développement de l’informatisation et de l’automatisation ont amené des gains de productivité. Mais en parallèle, l’évolution des profils de poste se traduit par une disparition progressive des emplois répétitifs ne nécessitant pas de compétences cognitives. On assiste à un changement de composition de l’emploi, la part des postes peu et moyennement qualifiés diminuant au profit des emplois hautement qualifiés (Graphique 1.25, partie A). La demande de travailleurs qualifiés devrait continuer à augmenter (Cedefop, 2018) et le fait de doter les travailleurs des compétences requises pour s’adapter à un environnement en mutation permettra d’entretenir la croissance de la productivité (partie B). Préparer le marché du travail au changement technologique est une priorité de l’action publique, et le gouvernement est en train d’élaborer sa stratégie pour les compétences avec l’aide de l’OCDE (2019d).
Améliorer l’insertion sur le marché du travail
Renforcer les compétences et leur utilisation efficiente
Améliorer l’éducation et la formation est indispensable pour soutenir la reprise et revenir aux niveaux de croissance antérieurs. L’amélioration des compétences et le recyclage seront indispensables à mesure que l’activité économique va se redresser. Le nombre de demandeurs d’emploi devrait être plus élevé qu’auparavant et il est possible qu’on assiste à des transferts permanents de la demande de main-d’œuvre entre secteurs (OECD, 2020a). La formation permettrait de réaffecter rapidement les travailleurs licenciés. Une montée en gamme des compétences des travailleurs permettrait aussi aux entreprises locales de profiter de la diffusion des connaissances et de l’adaptation technologique pour orienter leur production vers des activités à plus forte valeur ajoutée (OECD, 2017). En particulier, le recours accru à des modèles d’apprentissage en entreprise pourrait avoir un effet non négligeable sur le PIB de la Pologne (Encadré 1.3).
Le niveau d’instruction est élevé en Pologne, mais de nombreux adultes ne possèdent pas les compétences élémentaires et numériques nécessaires. Après des progrès considérables, les Polonais de 15 ans figurent parmi les meilleurs élèves du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE et se classent parmi les premiers en compréhension de l’écrit, en sciences et en mathématiques dans l’enquête PISA 2018 (Graphique 1.26, partie A). En outre, le pays compte une forte proportion de bons élèves et la plus faible proportion de mauvais élèves de l’OCDE (partie B), et les élèves en retard sont peu nombreux (OECD, 2019e). Pourtant, le niveau de compétences des adultes est inférieur à la moyenne des résultats obtenus dans le Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC), en particulier en numératie (partie C).
La participation à la formation des adultes semble relativement faible selon les enquêtes internationales. Les travailleurs peu qualifiés sont particulièrement peu investis dans l’apprentissage (Graphique 1.26, partie D). C’est également le cas de ceux qui vivent dans les zones rurales et travaillent dans les nombreuses petites et microentreprises (Chapitre 2). L’évaluation de la qualité et de l’efficacité des programmes de formation est également insuffisante (OECD, 2019d). La mise en place de comptes individuels de formation (Chapitre 2) pourrait favoriser l’apprentissage tout au long de la vie, notamment pour les personnes sous contrat temporaire (voir plus bas). Cela permettrait aux travailleurs de transférer leurs droits à la formation d’un emploi ou d’un statut professionnel à un autre, d’où un meilleur redéploiement de la main-d’œuvre. Toutefois, pour être efficace, un tel système nécessiterait également de garantir un financement adéquat et prévisible, de faire preuve d’une plus grande générosité à l’égard de ceux qui en ont le plus besoin et de mettre à disposition des informations ainsi que des conseils et des orientations (OECD, 2019f). Mettre à profit les moyens numériques pour proposer des formations opportunes et pertinentes, diffuser des informations sur les possibilités de formation et dispenser des conseils d’orientation professionnelle sont des mesures potentiellement utiles si les interactions en face à face avec les services publics de l’emploi doivent rester limitées (OECD, 2020d).
Encadré 1.3. Impact potentiel de certaines réformes recommandées par l’OCDE sur la croissance
L’impact de certaines réformes structurelles essentielles proposées dans cette Étude peut être évalué à l’aide de simulations s’appuyant sur les relations entre réformes et taux de croissance observées par le passé dans l’ensemble des pays de l’OCDE (Tableau 1.6) Ces estimations supposent une mise en œuvre rapide et complète des réformes.
Tableau 1.5. Impact potentiel de certaines réformes proposées dans cette Étude sur le PIB
Effet sur le niveau du PIB
Domaine d’action |
Mesure |
Effet en 2025 |
Effet en 2030 |
---|---|---|---|
Augmentation de l’âge effectif de la retraite1,2 |
Relèvement progressif de l’âge légal de départ en retraite de 60 à 67 ans pour les femmes et de 65 à 67 ans pour les hommes entre 2020 et 2040. |
0.45 %-1.02 % |
1.23 %-3.17 % |
Dépenses supplémentaires au titre de l’accueil des jeunes enfants et des soins de longue durée 2 |
Redéploiement des dépenses de soins de longue durée et de prise en charge des enfants vers les soins de longue durée, le développement des structures d’accueil des jeunes enfants et les familles à faible revenu. |
0.57 % |
1.69 % |
Dépenses supplémentaires au titre de la R-D des entreprises2 |
Augmentation de 0.35 point de PIB. |
0.31 % |
0.59 % |
Amélioration de la réglementation des marchés des produits |
Simplification de la réglementation pour les nouvelles entreprises au niveau de la médiane de l’OCDE. |
0.09 % |
0.13 % |
Dépenses supplémentaires pour la formation |
Renforcement de la formation des travailleurs peu qualifiés et des chômeurs par un surcroît de ressources équivalent à 0.1 point de PIB. |
0.46 % |
0.58 % |
Réduction du coin fiscal, en particulier pour les travailleurs peu qualifiés |
Réduction du coin fiscal pour les travailleurs peu qualifiés équivalente à 0.4 % du PIB. |
0.22 % |
0.27 % |
Réduction du coin fiscal, en particulier pour les travailleurs peu qualifiés |
Renforcement de la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques consistant à augmenter ses recettes de 0.6 point de PIB (soit 16 % de l’écart qui sépare la Pologne de la moyenne de l’OCDE) et à les utiliser pour alléger les cotisations générales de sécurité sociale, de manière à réduire le coin fiscal sur le travail de 0.1 point de PIB environ. |
0.06 % |
0.07 % |
Effets combinés des réformes structurelles3 |
2.2 %-2.7 % |
4.6 %-6.5 % |
1. Les gains de PIB dus au relèvement de l’âge de la retraite et à la hausse des dépenses consacrées à l’accueil des jeunes enfants et aux soins de longue durée sont calculés à partir du modèle de Cavalleri et Guillemette (2017). La fourchette des estimations concernant le relèvement de l’âge de la retraite correspond à diverses estimations de l’élasticité de l’emploi des seniors par rapport à l’évolution de l’âge légal de départ à la retraite, qui sont extrapolées en fonction de l’évolution estimée de l’emploi des seniors en Pologne au cours du dernier trimestre 2017 du fait de l’abaissement de l’âge légal de la retraite. Les estimations des effets sur le PIB d’une augmentation des dépenses de R-D des entreprises, de dépenses supplémentaires au titre des politiques actives du marché du travail et de la modification du coin fiscal sont tirées de B. Égert et P. Gal (2017).
2. Ces recommandations sont tirées de l’Étude de 2018. On pose l’hypothèse que cette augmentation résulte de nouvelles dépenses publiques consacrées à l’enseignement supérieur et à la recherche (Tableau 1.4).
3. Ce Tableau ne prend pas pleinement en compte l’impact des projets de réforme des impôts présentés dans le Tableau 1.4. Néanmoins, les réformes fiscales prévues – à savoir un élargissement du champ d’application de la TVA et une augmentation des taxes environnementales et des impôts sur le patrimoine – figurent parmi les moins préjudiciables à la croissance selon de récentes estimations de l’OCDE (Akgun et al., 2017).
Source : Calculs de l’OCDE fondés sur Égert, B. et P. Gal (2017), « The quantification of structural reforms: A new framework », Documents de travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, n° 1354 ; OCDE (2018), Études économiques de l’OCDE : Pologne 2018, Éditions OCDE, Paris ; et Akgun, O., B. Cournède et J. Fournier (2017), « The effects of the tax mix on inequality and growth », Documents de travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, n° 1447, Éditions OCDE, Paris.
La réduction des frictions sur le marché du travail permettrait d’améliorer l’utilisation des compétences en sécurisant les transitions des travailleurs sur le marché du travail et en améliorant la mobilité géographique et sociale des groupes les plus défavorisés (Encadré 1.4 ; Lewandowski et al., 2020). Malgré l’essor du marché du travail, les disparités régionales en matière de taux d’emploi n’ont pas évolué depuis 2007 (Statistics Poland, 2019b). La mobilité interrégionale de la population est la deuxième parmi les plus faibles de la zone OCDE (OECD, 2018a) et il existe d’importantes disparités de taux de chômage entre les communes d’une même région. Les créations d’emploi se concentrent dans les régions urbaines (OECD, 2018g), et le manque de logements abordables empêche une adéquation efficace entre les travailleurs et les entreprises. La totalité des régions polonaises figurent dans le quintile inférieur de la distribution des régions OCDE selon le nombre de pièces par personne (Graphique 1.5) et 43.9 % des Polonais âgés de 25 à 34 ans vivaient avec leurs parents en 2019. On estime que 40 % de la population est dans l’incapacité d’acheter ou de louer un appartement aux conditions du marché mais perçoit des revenus trop élevés pour pouvoir prétendre à un logement social (Habitat for Humanity Poland, 2019). Le programme Mieszkanie+ (Appartement+) de 2017 soutient la construction de logements locatifs abordables et offre la possibilité d’acquérir les appartements à terme. Toutefois, il a été beaucoup moins utilisé que prévu : fin 2019, seuls 3 000 logements environ étaient achevés ou en construction, contre 100 000 prévus initialement.
Du fait du taux élevé d’accession à la propriété et de la mauvaise qualité de certaines routes locales (Chapitre 2), la mobilité n’est pas suffisante pour éviter des poches de chômage élevé. On trouve de grands terrains et bâtiments vacants dans le centre de certaines villes (EC, 2020a). Réduire les droits d’enregistrement et augmenter les taxes périodiques sur les terrains et les propriétés en les alignant progressivement sur les prix du marché serait un moyen d’encourager les propriétaires à vendre des terrains à bâtir. Cela contribuerait à développer le marché locatif subventionné et les logements sociaux (Encadré 1.4). L’intégration des plans spatiaux, économiques et sectoriels et l’amélioration de la couverture des plans d’aménagement du territoire à l’échelle locale permettraient de suivre de près le développement urbain et de renforcer l’impact des nouvelles constructions sur la productivité et le bien-être, notamment en réduisant les coûts de création et d’exploitation des infrastructures de transport collectif. En effet, les nouvelles constructions engendrent un étalement considérable en Pologne pour le moment (Graphique 1.27), ce qui a des répercussions négatives sur les trajets quotidiens, qui se font principalement en voiture. Promouvoir l’investissement dans les transports collectifs contribuerait à soutenir la reprise et favoriserait la réaffectation des travailleurs, les gains de productivité et l’amélioration de la qualité de l’air.
Des informations de meilleure qualité sur les offres d’emploi et les candidats auraient également un impact positif sur le retour à l’emploi des travailleurs licenciés et sur la productivité (Algan et al., 2018 ; Skandalis, 2018). Pour ce faire, il faudrait renforcer l’aide aux chômeurs de longue durée, aux travailleurs peu qualifiés et aux PME, et adapter les méthodes de recherche d’emploi. Par exemple, le service public français de l’emploi a conçu une application (« La Bonne Boîte ») qui permet aux demandeurs d’emploi de diriger leurs candidatures spontanées vers les entreprises susceptibles de les employer. Aider les PME à trouver des candidats appropriés (Chapitre 2) et renforcer les bons de mobilité seraient des mesures complémentaires utiles. Les dispositions de la Garantie européenne pour la jeunesse, un ensemble de mesures d’activation instauré en 2014, prévoient des bons de mobilité professionnelle, mais les autres bons destinés aux chômeurs qui acceptent un emploi en dehors de leur lieu de résidence sont très limités. Ils pourraient être étendus aux entretiens d’embauche et aux premiers emplois afin de renforcer les incitations à la recherche et promouvoir une utilisation plus efficace des compétences.
Encadré 1.4. Logement et situation du marché du travail en Pologne
Comme dans d’autres pays de l’OCDE, les marchés du logement et du travail sont étroitement liés en Pologne, pays où les propriétaires à part entière de leur logement sont majoritaires (84.2 % de la population sont des propriétaires occupants), où le marché locatif est restreint (4.2 % des logements sont loués au prix du marché) et où la situation du marché du travail est très disparate selon les régions. La qualité des logements en Pologne est plutôt mauvaise, comme l’atteste le taux de sur-occupation élevé, quoiqu’elle se soit constamment améliorée au cours des dernières années.
Au niveau local, les analyses de régression réalisées dans le cadre de cette étude (Lewandowski et al., 2020) montrent que les différences spatiales en termes d’activité de construction et de prix des appartements sont faiblement corrélées aux différences en termes de situation du marché du travail. Le parc de logements s’est développé presque exclusivement grâce à la construction privée, et une part importante des nouveaux appartements a été construite dans les quelques grandes métropoles où les prix sont les plus élevés. Les importantes disparités de prix et de liquidité entre les grandes métropoles et les villes et villages pourraient restreindre la mobilité potentielle des propriétaires d’appartements installés dans les villes et villages.
Les salaires relatifs ne semblent pas compenser les coûts de logement plus élevés observés dans les métropoles et sur les marchés du travail locaux les plus dynamiques. Pour les travailleurs diplômés de l’enseignement supérieur, les grandes métropoles offrent des avantages salariaux qui peuvent compenser les coûts de logement plus élevés, mais pour les travailleurs sans diplôme d’études supérieures, les avantages salariaux associés à la vie dans les métropoles semblent relativement inférieurs aux coûts relatifs du logement, ce qui peut décourager les migrations internes vers des localités offrant de meilleurs débouchés sur le marché du travail.
Source : Lewandowski, P., Pigoń, A. et T. Świetlik (2020), Housing and labour market outcomes in Poland, document d’information technique.
Améliorer la qualité des emplois
La proportion de contrats temporaires et de travailleurs indépendants reste élevée (Graphique 1.6, partie A). Malgré un recul récent, les contrats temporaires restent fréquents chez les jeunes et les travailleurs peu qualifiés, qui souffrent de ce fait d’un désavantage salarial, de mauvaises perspectives de carrière et d’un accès médiocre à la formation (Graphique 1.28 ; Gora et al., 2017). Les travailleurs atypiques se sont particulièrement ressentis de l’arrêt généralisé de l’activité provoqué par les mesures d’endiguement de la pandémie (OECD, 2020a). Les secteurs les plus directement touchés emploient une forte proportion de ces travailleurs. En outre, 2 % des travailleurs (selon les récentes enquêtes sur la population active) sont titulaires d’un contrat de travail indépendant fondé sur le droit civil commun et non sur le droit du travail, et ne bénéficient donc pas intégralement de la couverture du système de sécurité sociale ni des droits reconnus aux travailleurs. Le gouvernement a pris des mesures bienvenues pour soutenir les travailleurs indépendants et les travailleurs atypiques qui ont été durement touchés par les mesures de confinement (Encadré 1.1). Néanmoins, les agences de travail temporaire, par exemple, ne sont pas couvertes par ces mesures.
L’utilisation de contrats de travail indépendant relevant du droit civil est souvent illégale, mais la probabilité que les employeurs soient contrôlés est inférieure à 1 % (Gora et al., 2017). Peu d’infractions sont sanctionnées par des amendes, dont le montant moyen est faible (OECD, 2016). Par conséquent, l’application du droit du travail doit être renforcée, comme l’ont fait valoir les Études précédentes. Environ 3 % des travailleurs ne possèdent aucun contrat écrit d’après les Statistiques de la population active. L’Office polonais de la statistique estime la part des emplois dans l’économie informelle ou souterraine à 5 %. Les travailleurs informels sont exclus du champ des dispositifs de soutien mis en place par les autorités en riposte à l’épidémie de COVID-19. Dans le même temps, le gouvernement devrait communiquer davantage avec les travailleurs et les employeurs à propos du respect et de l’application du salaire minimum.
Le relèvement continu du salaire minimum pourrait avoir un effet négatif sur la reprise économique, l’emploi et la qualité des emplois. Suite aux hausses du salaire minimum mises en œuvre et prévues en 2020-21 (Encadré 1.2), le rapport entre salaire minimum et salaire médian sera l’un des plus élevés de la zone OCDE et le coût du travail pour les travailleurs à bas salaire sera considérablement accru (Graphique 1.29, parties A à C). Ces hausses concernent directement 13 % des travailleurs environ (Statistics Poland, 2019b). Le salaire minimum a ainsi augmenté de 15.6 % en 2020, alors que l’inflation devrait être proche de 2.6 %. Le salaire minimum augmentera encore de 7.7 % en 2021, pour un taux d’inflation prévu de 2.5 %. Compte tenu de l’affaiblissement sans précédent de l’activité économique provoqué par l’épidémie de COVID-19 et de la contraction attendue du PIB, les hausses prévues des coûts de main d’œuvre risquent soit de dissuader les employeurs de réembaucher des travailleurs licenciés, surtout des travailleurs faiblement rémunérés et peu qualifiés, soit de les inciter à recourir davantage à des formes d’emploi plus précaires (Neumark, 2018). Étant donné que l’impact des mesures de confinement liées au COVID-19 sur le marché du travail risque de se concentrer précisément sur les travailleurs faiblement rémunérés et peu qualifiés, il est encore plus important de ne pas dissuader les entreprises d’employer les travailleurs les plus vulnérables (EC, 2020b).
Depuis 2017, de nombreuses formes de travail atypiques sont couvertes par les dispositions en matière de salaire minimum, ce qui est une bonne chose. En principe, le salaire minimum couvre également les contrats de services entre l’employeur et les travailleurs indépendants. Toutefois, il ne s’applique pas à certaines formes de contrats civils comme les « contrats d’entreprise » (umowa o dzieło). De fait, les fortes hausses du salaire minimum se sont traduites par un recours accru à des contrats de ce type, les contrats « zéro heure », dans les secteurs à bas salaire au Royaume-Uni (Datta et al., 2019). En outre, le non-respect du salaire minimum légal – pratique qui semble déjà courante – pourrait continuer à s’aggraver, même pour les travailleurs qui en bénéficient actuellement (Goraus-Tanska et Lewandowski, 2019). Toutefois, la hausse du salaire minimum pourrait également avoir des effets positifs puisqu’elle pourrait inciter les entreprises à améliorer les compétences des travailleurs existants pour améliorer leur productivité. Certaines données récentes pointent des effets dans ce sens, pour autant que la rigidité à la baisse des salaires n’empêche pas les entreprises de répercuter partiellement le coût de la formation sur les travailleurs pendant la période de formation (D’Arcy, 2016). Autre effet positif auquel on peut s’attendre, l’accélération du transfert des force de travail vers des entreprises plus grandes et plus efficaces, à condition qu’il n’y ait pas d’obstacle majeur au redéploiement de la main-d’œuvre (Dustman et al., 2019).
Un allègement sensible des prélèvements sur les salariés faiblement rémunérés titulaires d’un contrat régulier relevant du droit du travail, tel qu’amorcé en 2019, pourrait inciter les employeurs à réembaucher des travailleurs licenciés, réduirait encore les incitations à utiliser les contrats de droit civil et autres contrats irréguliers et rendrait le système fiscal plus progressif. Pour cela, les autorités pourraient réduire ou subventionner les cotisations sociales sur les bas salaires, mais d’autres sources de financement seraient nécessaires pour maintenir le niveau des prestations pour les groupes concernés. L’instauration d’un crédit d’impôt remboursable ciblé sur les revenus du travail serait encore plus efficace pour réduire la charge fiscale sur les travailleurs à bas salaire et augmenter leur salaire net (Boulhol, 2014). Cela inciterait davantage les chômeurs à accepter un emploi au salaire minimum (Graphique 1.29, partie D), et encouragerait les travailleurs à effectuer un plus grand nombre d’heures rémunérées au salaire minimum, qui sinon devrait rester faible (OECD, 2019g).
Renforcer l’emploi des femmes
La situation des femmes au regard de l’emploi s’est considérablement améliorée, rétablissant à bien des égards la situation antérieure à la transition, à savoir un fort taux d’activité féminine et l’égalité hommes-femmes en matière d’éducation. L’écart de rémunération entre les sexes a diminué et la grande majorité des salariées travaillent à temps plein. Le taux d’emploi des femmes de 25 à 39 ans est proche de la moyenne de l’Union européenne. La proportion de femmes occupant des postes d’encadrement est également en hausse, un cinquième des sièges des conseils d’administration des plus grandes sociétés cotées en bourse étant occupés par des femmes. Pourtant, il faut encourager davantage l’activité féminine, notamment celle des femmes âgées de 60 à 64 ans, qui ont été touchées par l’abaissement de l’âge de la retraite (voir ci-dessus), et celle des femmes peu qualifiées, même si leur taux d’emploi a récemment augmenté. L’élargissement du périmètre du programme d’allocations familiales 500+ en 2019 a éliminé l’effet négatif potentiel du critère de ressources appliqué initialement (Magda et al., 2017). Toutefois, le taux d’emploi des jeunes mères a stagné en 2018 et reste faible pour le petit nombre de mères peu qualifiées (Graphique 1.30). De plus, les femmes ont payé un très lourd tribut à la crise économique provoquée par le COVID-19 (OECD, 2020a). En Pologne, le personnel de soins de longue durée est à 95 % féminin (OECD, 2020e). La fermeture des écoles pendant la crise a sans doute alourdi la charge de travail non rémunéré des femmes, et une enquête en ligne menée par la Fondation CBOS révèle que les femmes ont été touchées de manière disproportionnée par les pertes de revenu et d’emploi.
Il est essentiel de garantir des services d’accueil des jeunes enfants abordables pour encourager l’emploi des femmes. Plus de 45 % des femmes inactives dans la force de l’âge citent leurs responsabilités familiales comme l’une des causes de leur inactivité (OECD, 2018c). La Pologne a enregistré l’une des progressions les plus rapides de la préscolarisation des jeunes enfants de la zone OCDE. Le taux d’inscription des enfants de 3 à 5 ans dans les structures d’éducation des jeunes enfants augmente rapidement (Graphique 1.31, partie A), et les enfants de 3 ans ont légalement droit à une place dans un établissement d’éducation préscolaire depuis 2017. Cependant, les données de l’enquête de l’UE sur le revenu et les conditions de vie (EU-SILC) montrent que l’accès à l’éducation préscolaire des 0-2 ans reste largement insuffisant, malgré une amélioration régulière (partie B).
Le gouvernement estime que la réforme du programme Maluch (« tout-petits ») contribuera à créer de nouvelles places pour les très jeunes enfants et à porter leur taux de préscolarisation à 18 % en 2020, ce qui restera toutefois encore très inférieur à la moyenne de l’OCDE. En particulier, en 2019, 58 % des communes n’étaient toujours pas dotées d’établissements préscolaires opérationnels pour les enfants de moins de 3 ans, ce qui est problématique, particulièrement dans les zones rurales et pour les ménages à bas revenu. En conséquence, les ménages aux revenus les plus faibles, dont le taux d’activité est plus sensible aux possibilités de garde d’enfant (Goux et Maurin, 2010), ont peu recours à des dispositifs de garde d’enfant (OECD, 2020f). Les programmes publics actuellement mis en œuvre pour développer les structures d’accueil des enfants sont ciblés sur les communes qui ne disposent pas d’établissements préscolaires, notamment dans les zones rurales, ce qui est judicieux. L’amélioration continue de l’accès aux services de garde d’enfants et leur adaptation aux horaires de travail des travailleurs les moins qualifiés encourageraient les mères peu qualifiées à reprendre un emploi, tout en favorisant une meilleure mobilité sociale et économique. En effet, les enfants de parents peu instruits bénéficieraient tout particulièrement d’une éducation préscolaire de qualité, car elle apporte des avantages considérables sur le plan des compétences cognitives.
D’autres pays ont récemment adopté des mesures réglementaires pour faire respecter juridiquement l’égalité de rémunération entre hommes et femmes. L’écart de rémunération entre hommes et femmes est relativement faible en Pologne, et les autorités encouragent les employeurs à surveiller l’évolution de cet écart au niveau de chaque entreprise. En France par exemple, les entreprises d’au moins 50 salariés sont tenues de publier des indicateurs mesurant les écarts de rémunération entre les sexes. Les entreprises qui ne parviennent pas à atteindre un résultat minimum dans un délai de trois ans peuvent encourir des sanctions financières. En Islande, ce n’est plus aux salariés de prouver qu’ils sont sous-rémunérés mais à l’entreprise de prouver qu’elle rémunère ses travailleurs équitablement. Les employeurs doivent obtenir d’un réviseur agréé un certificat attestant que leur système de gestion des salaires est conforme à une norme nationale d’égalité salariale. La Pologne pourrait s’inspirer de tels exemples pour progresser encore dans la réduction de l’écart de rémunération femme-homme.
Améliorer les politiques migratoires
Pour compenser les pénuries de main-d’œuvre liées au vieillissement, les pouvoirs publics peuvent faire en sorte d’attirer de la main-d’œuvre qualifiée en Pologne. La Pologne est devenue la première destination pour les travailleurs temporaires du monde (OECD, 2019h). En 2019, la plupart des immigrés venaient de pays voisins, notamment d’Ukraine, où les migrations temporaires et saisonnières sont en hausse (Chmielewska et al., 2019). Cela a contribué à amortir le déclin de la population en âge de travailler amorcé en 2011 (Strzelecki et al., 2020). Toutefois, l’afflux massif d’Ukrainiens et de migrants venant d’autres pays voisins ne sera peut-être pas pérenne, et il est souhaitable de faire venir des travailleurs d’un plus grand nombre de pays. En outre, du fait de la situation précaire d’une majorité de travailleurs immigrés en Pologne, le risque existe qu’ils se rendent dans un autre pays s’ils en ont l’occasion (Chmielewska et al., 2019).
Les politiques migratoires devraient être améliorées pour attirer un large éventail de travailleurs qualifiés. Des informations facilement accessibles sur la vérification des diplômes, les débouchés professionnels et les cours de langue disponibles pourraient encourager les travailleurs qualifiés à envisager la Pologne comme pays de destination. Une stratégie claire en matière d’immigration devrait permettre de mieux contrôler l’intégration des étrangers en fonction des besoins du marché du travail, ainsi que la protection de leurs droits, notamment l’accès à l’éducation et à la formation pour eux et leurs enfants (OECD, 2018c).
Il serait également utile de faciliter l’embauche légale de ressortissants d’autres pays par le biais de différents permis de travail et de permis de séjour délivrés plus rapidement. En son état actuel, la procédure administrative de délivrance de permis de séjour standard ne permet pas de faire face à l’afflux important d’étrangers. La durée du processus de légalisation du séjour – par le biais d’un permis de séjour – est passée de 64 à 206 jours au cours des quatre dernières années (NIK, 2019), et la durée de la procédure d’obtention d’un permis de travail était proche de 58 jours en 2019, ce qui a plongé nombre d’immigrés et d’employeurs potentiels dans une situation de précarité. Il existe des directives communes dans tous les services locaux concernant les aspects obligatoires, mais une prolongation de la durée de validité de ces permis pourrait contribuer à désengorger les services. En outre, l’actualisation des politiques de lutte contre les discriminations et le renforcement de leur mise en œuvre permettraient de lutter contre les discriminations fondées sur l’origine ethnique et la nationalité (UN, 2019 ; Antfolk et al., 2019). Le gouvernement a pris des mesures efficaces pour aider les agriculteurs polonais à recruter de la main-d’œuvre immigrée pendant la période de confinement. Certaines des procédures simplifiées pourraient rester en place après la levée du confinement et la réouverture des frontières.
Dans le même temps, le gouvernement devrait continuer à renforcer sa stratégie visant à maintenir le lien avec l’importante communauté d’expatriés. Les émigrés de retour dans le pays pourraient apporter des compétences, des réseaux et un capital financier (Brandt, 2016). De nombreux pays de l’OCDE mettent à disposition de leurs ressortissants établis à l’étranger des plateformes en ligne pour publier des offres d’emploi, de formation, des opportunités d’affaires et de recherche dans leur pays d’origine (DFA, 2015). Un salon de l’emploi a été récemment organisé à Londres, et les autorités ont aussi créé un site internet offrant des conseils aux Polonais qui travaillent à l’étranger. L’élaboration d’une base de données sur les compétences de la diaspora pourrait contribuer à mettre directement en relation les émigrés susceptibles de revenir au pays avec les employeurs, comme cela a été fait au Portugal avec la Plateforme de mobilité professionnelle mondiale (Plataforma de Mobilidade Profissional Global). Les dispositifs de conseil personnalisé et d’assistance générale liés à l’emploi, au logement, à l’enseignement et aux procédures administratives de création d’une petite entreprise, tels que le programme de tutorat « Back to Business » mis en place en Irlande, se sont également révélés relativement efficaces (EC, 2014).
Tableau 1.6. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant les politiques du marché du travail et les politiques migratoires
Principales recommandations récentes de l’OCDE |
Mesures prises depuis l’Étude de 2018 |
---|---|
Élaborer une stratégie nationale sur les compétences faisant une large place aux compétences de base. Inciter les employeurs à développer des programmes de formation des adultes et d’enseignement professionnel en entreprise. |
Le volet général de la Stratégie intégrée en matière de compétences (ZSU) a été adopté en 2019. Le volet détaillé est en cours d’élaboration avec le soutien de l’OCDE, qui a publié la Stratégie de l’OCDE en matière de compétences : Pologne en décembre 2019. |
Investir dans les structures d’accueil des jeunes enfants et les établissements de soins de longue durée. Donner un caractère dégressif à l’allocation familiale pour le premier enfant. |
Le programme Maluch+ a permis de créer environ 68 000 nouvelles places d’accueil pour les jeunes enfants entre 2018 et 2020. Le taux de préscolarisation des enfants de moins de 3 ans est passé de 8.6 % en 2017 à 10.5 % en 2018, d’après les données de l’enquête de l’UE sur le revenu et les conditions de vie (EU-SILC). Les financements alloués à la création de nouveaux établissements d’accueil des jeunes enfants ont augmenté en 2020. La prestation pour enfant, précédemment soumise à des conditions de ressources, a été généralisée en 2019. |
Autoriser les services publics de l’emploi à recruter du personnel plus qualifié et veiller à ce que les ressources profitent davantage dans leur ensemble aux missions prioritaires de placement. Encourager l’adoption de pratiques exemplaires avec sur le management par la performance et l’analyse comparative des prestataires de services de l’emploi. |
Aucune mesure prise. |
Envisager l’instauration d’un impôt sur le revenu pour les travailleurs ayant un lien plus faible avec le marché du travail. |
Aucune mesure prise. |
Élaborer une stratégie migratoire afin de mieux suivre l’intégration des étrangers et de s’assurer qu’elle correspond aux besoins du marché du travail, en veillant à ce que leurs droits soient protégés et à ce que ces personnes et leurs enfants aient accès au système d’éducation et de formation. |
En 2018, le système de procédure d’enregistrement simplifiée destinée aux employeurs a été modifié pour renforcer le contrôle de l’emploi d’étrangers. En outre, un nouveau type de permis de travail – le permis de travail saisonnier donnant aux étrangers le droit de travailler 9 mois sur une période de 12 mois – a été mis en place dans l’agriculture et les secteurs saisonniers. |
Une croissance plus verte est essentielle au bien-être
Procéder à des investissements publics axés sur la mise au point de solutions plus durables permettrait de stimuler la demande globale pendant la reprise en cours et de promouvoir une croissance plus durable (OECD, 2020g). Au cours des deux dernières décennies, l’intensité énergétique et l’intensité d’émission de CO2 ont considérablement baissé (Graphique 1.32). Néanmoins, l’intensité carbone de l’économie reste forte et sa diminution marque le pas depuis quelques années. Le charbon entre toujours pour environ 78 % dans la production d’électricité (Graphique 1.33, partie A) et 75 % des centrales au charbon ont plus de 25 ans. Ces centrales ont donc pour beaucoup un rendement médiocre et demeurent l’une des principales sources d’émissions de CO2 et de polluants atmosphériques industriels en Europe (EC, 2019c).
Les efforts de relance de la Pologne devraient viser en priorité à rendre le mix énergétique plus écologique. Les autorités ont présenté leur Plan national énergie-climat à la Commission européenne à la fin de 2019 et sont en train de préparer la Politique énergétique de la Pologne à l’horizon 2040. Le projet de Stratégie mis à jour de 2020 a notamment pour ambition de ramener à 37-56 % (suivant le scénario d’évolution du prix du carbone) la part du charbon dans la production d’électricité et de porter à au moins 23 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie d’ici à 2030. En outre, la mise à jour de 2020 du programme nucléaire prévoit qu’une première centrale nucléaire entrera en service au plus tard en 2033, et cinq autres d’ici 2043. Le gouvernement n’a toutefois pas encore adopté sa stratégie à long terme.
Même si elle a déjà beaucoup progressé (Graphique 1.33, partie B), la Pologne pourrait encore renforcer son secteur de l’électricité d’origine renouvelable. Avec le durcissement des normes d’émission de l’UE et la hausse des prix du CO2 dans le cadre du SEQE-UE, les centrales électriques au lignite deviennent de plus en plus coûteuses. Si l’on tient compte de la totalité des coûts, y compris des coûts environnementaux et de fermeture, la comparaison des différentes sources d’énergie plaide en faveur de nouveaux investissements dans les filières renouvelables et moins polluantes (OECD, 2016 ; IEA, 2017). Dans le projet de Politique énergétique, il est envisagé de développer l’éolien en mer et le solaire photovoltaïque. La production photovoltaïque a doublé en 2019, et le processus d’enchères lancé cette même année pour l’achat d’électricité d’origine renouvelable contribuera à l’expansion du solaire photovoltaïque et de l’éolien terrestre. Cependant, ce processus doit prendre fin en 2021 et la mise en place d’un cadre réglementaire et d’un système d’incitations plus stables réduirait les incertitudes. En outre, l’éolien terrestre est soumis à une réglementation stricte qui empêche l’emploi d’aérogénérateurs plus grands et plus efficaces. Le développement de l’éolien en mer exigera aussi de renforcer les capacités de transport de l’électricité dans la partie septentrionale du pays.
L’amélioration de l’efficacité énergétique devrait être poursuivie car c’est le moyen le plus efficient de stimuler la compétitivité, de renforcer la sécurité énergétique et de réduire l’empreinte environnementale du pays (IEA, 2018). En 2018, le secteur résidentiel était à l’origine de 28 % de la consommation finale d’énergie en Pologne. L’intensité énergétique du chauffage des bâtiments est l’une des plus élevées de l’UE. Du fait des performances énergétiques médiocres des bâtiments, l’accessibilité financière de l’énergie représente un enjeu de poids, et à cet égard, la précarité énergétique touchait 10 % des foyers en 2017 (Sokołowski J. et al., 2019).
Pour améliorer les performances énergétiques, il est primordial d’engager des rénovations en profondeur en isolant thermiquement les bâtiments et en remplaçant les équipements énergivores. Une grande partie du parc de logements a été construit avant 1990, suivant des normes thermiques insuffisantes. S’il y a eu des avancées dans les immeubles collectifs, plus de 70 % des maisons individuelles ne sont pas ou sont mal isolées (Velux, 2018). Il serait utile de durcir la réglementation en matière de consommation énergétique des bâtiments, qui est aujourd’hui peu contraignante. Dans les pays nordiques, par exemple, malgré la rigueur du climat, l’intensité énergétique du chauffage est aujourd’hui parmi les plus faibles de la zone OCDE grâce à l’application de normes d’isolation exigeantes dans les bâtiments (IEA, 2018). De plus, combiner aides publiques et exigences minimales en matière de fonds de réserve pour la rénovation des immeubles collectifs pourrait contribuer à revitaliser les nombreux immeubles collectifs vieillissants, comme c’est le cas en France.
Les émissions de polluants, en particulier de particules fines imputables aux installations de chauffage des maisons individuelles, constituent la principale raison pour laquelle la qualité de l’air laisse à désirer dans de vastes zones de la Pologne, et elles vont de pair avec une efficacité énergétique trop faible dans le secteur du chauffage. La pollution de l’air est élevée dans de nombreuses villes : parmi celles qui sont évaluées dans un rapport de la Banque mondiale, 36 des 50 villes européennes les plus polluées se trouvaient en Pologne (World Bank, 2018b). Il a été démontré que la pollution de l’air provoque des décès prématurés (Graphique 1.34) et peut avoir des effets importants sur la productivité (Dechezleprêtre et al., 2019).
Le gouvernement a pris des mesures bienvenues pour remédier à ces problèmes. Le programme « Air pur », en particulier, doté d’un budget de 103 milliards PLN, prévoit l’octroi de prêts et de subventions sous conditions de ressources pour financer le remplacement des poêles obsolètes et la rénovation thermique des maisons individuelles jusqu’en 2029. Un programme similaire intitulé « Halte au smog » s’adresse aux communes les plus pauvres et les plus polluées. Même si ces programmes n’existent que depuis 2018, leur utilisation reste pour l’instant bien en deçà des attentes (EC, 2020a) La complexité des procédures administratives et le fait que les primes les plus importantes soient réservées aux très bas revenus freinent leur mise en œuvre. Des évolutions positives récentes (simplifications administratives, primes à l’installation simultanée de pompes à chaleur et de panneaux photovoltaïques et association des banques à l’octroi de prêts) pourraient améliorer leur utilisation. Par ailleurs, certaines voïvodies où les niveaux de pollution dépassent les seuils de qualité de l’air par endroits ont adopté des règlementations anti-smog qui visent à limiter l’utilisation de combustibles fossiles dans les chaudières, notamment en ville. Si elles sont correctement appliquées, ces prescriptions légales et les amendes prévues pour les contrevenants devraient accélérer le remplacement des systèmes de chauffage.
La modernisation et l’extension des réseaux de chauffage urbain peuvent favoriser la transition vers une énergie propre. La Pologne possède un des plus grands systèmes de chauffage urbain de l’Union européenne. Néanmoins, la plupart des petits systèmes, qui chauffent 40 % des logements, sont vieux et énergivores (Forum Energii, 2019). Ils utilisent principalement le charbon, et l’incorporation d’une part plus importante de sources d’énergie renouvelables permettrait de fournir une énergie plus propre aux ménages. La Pologne devrait par ailleurs étendre le recours aux compteurs intelligents. Les projets pilotes d’installation de compteurs intelligents menés dans d’autres pays font apparaître une baisse globale de la consommation d’énergie, avec, en Irlande par exemple, des diminutions particulièrement marquées aux heures de pointe (BPIE, 2016).
La Pologne s’est également efforcée de mettre en place une économie circulaire. Elle a adopté la stratégie de l’UE en matière d’économie circulaire en 2019. Celle-ci comporte quatre priorités : la production durable, la consommation durable, la bioéconomie et les nouveaux modèles d’entreprise. La Pologne prépare également sa Stratégie à long terme « pour la transition vers une économie neutre pour le climat ». Ce document définira différents scénarios pour faire coïncider le développement de l’économie polonaise avec les objectifs de la politique de l’UE en matière de climat et d’énergie, ainsi qu’avec l’objectif fixé par l’Accord de Paris à l’horizon 2050. Cette Stratégie décrira différentes trajectoires possibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et leurs répercussions sur le système énergétique et l’économie d’ici 2050.
Le plan de relance « Next Generation EU », approuvé il y a peu, prévoit des financements spécifiquement destinés à étayer la transition vers la neutralité climatique, conformément à la stratégie de croissance exposée dans le Pacte vert pour l’Europe (Encadré 1.1). La Pologne devrait saisir cette occasion pour rendre son économie et sa société plus résilientes, tant au regard de la récession actuelle que de l’aggravation de plus en plus rapide des défis environnementaux. En fait, plusieurs secteurs « verts » offrent des perspectives importantes de création d’emplois, notamment celui de la production d’énergies renouvelables (OECD, 2020h).
Par ailleurs, l’accompagnement des entreprises peut être une source importante de gains d’efficacité énergétique. Il n’existe pas de programme national pour encourager les petites et les microentreprises à améliorer leur efficacité énergétique, bien que les fonds de l’UE et la BERD offrent un soutien ciblé dans ce domaine. Comme dans d’autres pays, les PME se heurtent à d’importants obstacles liés au financement et à l’information qui, dans le cas de la Pologne, sont amplifiés par la gestion déficiente de ces entreprises (Chapitre 2 ; Bloom et al., 2010). Il serait utile d’évaluer attentivement un programme pilote en faveur des PME mis en œuvre en 2018 et financé par l’UE (Promotion des audits énergétiques et des investissements dans l’efficacité énergétique dans les PME en Pologne) et d’appliquer à plus grande échelle les mesures efficaces de ce programme. Ce projet vise à améliorer les connaissances des PME sur l’utilisation de l’énergie et les effets de l’efficacité énergétique, ainsi qu’à sensibiliser ces entreprises à la gestion de l’énergie, notamment en encourageant la réalisation d’audits énergétiques simplifiés.
Tableau 1.7. Recommandations antérieures de l’OCDE concernant les politiques environnementales
Principales recommandations récentes de l’OCDE |
Mesures prises depuis l’Étude de 2018 |
---|---|
Élaborer et mettre en œuvre une politique claire et stable en matière de lutte contre le changement climatique, qui soit conforme aux objectifs européens et internationaux, afin de réduire l’incertitude qui pèse sur les investissements verts innovants. |
Le Plan national énergie-climat a été transmis à la Commission européenne en décembre 2019. Les travaux se poursuivent sur la Politique énergétique de la Pologne à l’horizon 2040. La mise à jour du programme nucléaire polonais a été approuvée par le Conseil des ministres le 2 octobre 2020. |
Garantir la stabilité et la clarté des politiques influant sur les décisions d’investissement. |
Les consultations obligatoires avec les parties prenantes sont souvent courtes ou ont été évitées en vertu de lois proposées par les membres de l’Assemblée nationale. |
Prévenir la corruption et les infractions économiques
Le niveau de corruption perçue de la Pologne est relativement peu élevé par rapport aux pays comparables mais reste supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE (Graphique 1.35, parties A à C). La Pologne se situe juste en dessous de la moyenne de l’OCDE dans la plupart des catégories du Varieties of Democracy Index (partie D). Elle se conforme largement aux normes définies par le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales qui permettent de réduire les risques de blanchiment de capitaux.
Cela étant, le GRECO (2019) et Transparency International (2019) l’ont mise en garde contre le risque accru d’ingérence politique dans le système judiciaire. Si les autorités ont fait valoir que la réforme de l’appareil judiciaire avait été conçue pour restaurer l’intégrité des grandes institutions publiques, cette réforme risque aussi de concentrer le pouvoir aux mains d’un petit nombre d’organes centraux de contrôle et de décideurs et d’accroître l’influence du ministre de la Justice dans les procédures disciplinaires (GRECO, 2019). En dépit des modifications apportées fin 2019, le Conseil de l’Europe (2020) a publié un avis urgent dans lequel il a recensé les risques pour l’indépendance des juges et a recommandé d’associer davantage le corps judiciaire à la nomination, la promotion et la révocation des magistrats.
La transparence des procédures législatives de l’État et les règles d’accès à l’information concernant les activités des groupes de pression sont les principaux leviers pour mieux prévenir la corruption (GRECO, 2019). Une politique plus ambitieuse en faveur de l’intégrité ciblant les parlementaires est indispensable pour promouvoir les règles de conduite et les mécanismes de répression concernant les cadeaux et avantages, les conflits d’intérêts et les actes de complicité ou d’instigation, ainsi que les relations avec les groupes de pression et autres tierces parties. Le renforcement de la transparence des règles de déclaration de patrimoine imposées aux parlementaires et la révision de leur système d’immunités permettraient aussi de limiter les risques de corruption.
Le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption a également mis en évidence un certain nombre de problèmes qui se posent dans le domaine de la lutte contre la corruption transnationale depuis 2013. Plus précisément, la responsabilité des entreprises ne peut être engagée pour des faits de corruption transnationale tant que les personnes physiques ayant perpétré l’infraction n’ont pas été condamnées. À cela s’ajoute que les amendes infligées aux personnes morales sont encore trop peu élevées pour être efficaces et dissuasives (OECD, 2018h). Les mesures de protection des lanceurs d’alertes ne sont pas assez fortes, la disposition du Code pénal relative à « l’impunité » ne s’appliquant pas à la corruption d’agents publics étrangers, et les mesures de protection contre les actions de rétorsion visant les salariés qui font part de soupçons relatifs à des actes de corruption transnationale sont insuffisantes.
Autres recommandations concernant les politiques macroéconomiques et certaines politiques structurelles
(Rappel : les principales recommandations sont présentées dans le Résumé)
CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS |
---|---|
Politiques macroéconomiques et surveillance financière |
|
Les dispositions actuelles ne garantissent pas clairement l’indépendance du système de surveillance financière vis-à-vis des pouvoirs publics. |
Renforcer le processus de nomination des membres du comité de direction de la Commission de surveillance financière (KNF, Komisja Nadzoru Finansowego). |
L’examen ex ante du processus budgétaire et des hypothèses macroéconomiques sous-jacentes relève de la banque centrale et de la Commission européenne. |
Confier à une institution indépendante la tâche de réaliser des évaluations ex ante des plans budgétaires du gouvernement et des analyses de la viabilité des finances publiques à long terme |
Inclusivité, marché du travail et santé |
|
Les relations d’emploi irrégulières sapent la productivité et le bien-être. Elles accentuent également les risques de pauvreté durant la vieillesse. |
Renforcer l’application du droit du travail et poursuivre l’alignement des cotisations entre les contrats de droit civil et les contrats régis par le droit du travail. |
Le marché du logement locatif est peu développé. Les situations de surpeuplement du logement sont courantes et la mobilité géographique des travailleurs est relativement faible. |
Une fois la reprise bien engagée, augmenter les impôts périodiques sur le patrimoine, notamment sur les terrains et les biens immobiliers vacants dans les zones urbaines. Renforcer les aides à la mobilité géographique et les mesures d’activation. |
La forte immigration en provenance des pays voisins de l’est a atténué les tensions sur le marché du travail, mais le manque de suivi limite la capacité des pouvoirs publics à améliorer son impact sur le marché de l’emploi. |
Élaborer une stratégie migratoire afin de mieux suivre l’intégration des étrangers et de s’assurer qu’elle correspond aux besoins du marché du travail, en veillant à ce que leurs droits soient protégés et à ce que ces personnes aient accès au système d’éducation et de formation. |
Le taux d’emploi des seniors est faible. De nombreux ménages ne perçoivent pas les avantages d’un report du départ en retraite. |
Harmoniser la protection de l’emploi pour toutes les classes d’âge. Veiller à ce que les dispositifs d’incitation et de formation soient suffisants pour rehausser l’âge effectif de la retraite. Améliorer l’information sur les avantages découlant de l’allongement de la vie active. |
Les régimes spéciaux de retraite ont un coût budgétaire élevé et limitent la mobilité des travailleurs. Les pensions de réversion peuvent avoir un effet négatif sur l’offre de main-d’œuvre. |
Aligner progressivement les règles des régimes spéciaux de retraite sur celles du régime général. Une fois la reprise bien engagée, revoir à la baisse les pensions de réversion. |
Les inégalités sociales de santé sont marquées et liées à la prévalence de comportements à risque parmi les ménages à faible revenu. |
Renforcer les campagnes d’information sur les comportements à risque, tels que les habitudes alimentaires et la consommation d’alcool. Revoir les normes alimentaires et sanitaires. |
Environnement |
|
Les obligations réglementaires concernant le chauffage des logements et leur efficacité énergétique sont relativement limitées. |
Durcir la réglementation relative à la consommation d’énergie des bâtiments. |
Les dispositifs destinés à renforcer l’efficacité énergétique sont peu utilisés et le déploiement des systèmes de gestion de la demande reste limité. Les conditions d’admission au bénéfice de certains programmes d’aides sont excessivement restrictives pour les ménages à faible revenu. |
Assouplir les conditions d’admission au bénéfice des programmes d’efficacité énergétique pour les ménages à faible revenu. Mettre en place des mécanismes d’incitation à l’utilisation de compteurs intelligents. |
Les petites entreprises n’exploitent guère des gisements de gains d’efficacité énergétique potentiellement importants. |
Évaluer le programme pilote destiné à mieux informer les petites et moyennes entreprises (PME) sur les avantages des gains d’efficacité énergétique et étoffer les mesures efficaces de ce programme pilote, tout en renforçant les programmes connexes d’efficacité énergétique. |
L’étalement urbain est considérable. La portée des plans d’occupation des sols est limitée et leur intégration avec d’autres documents stratégiques pourrait être améliorée. |
Continuer de renforcer les plans locaux d’occupation des sols intégrés, en les rendant obligatoires dans les zones urbaines fonctionnelles et en renforçant leur cohérence avec les autres plans d’aménagement de l’espace. |
Corruption |
|
Les interactions entre les parlementaires, les groupes de pression et d’autres tierces parties ne sont pas totalement transparentes. |
Donner aux parlementaires des orientations claires concernant les conflits d’intérêts. Élaborer une procédure clairement définie de déclaration des conflits d’intérêts potentiels pour les parlementaires. |
La protection des lanceurs d’alerte laisse à désirer. |
Renforcer les mesures de protection des salariés qui signalent des actes présumés de corruption transnationale. |
Climat des affaires |
|
Les dépenses de recherche-développement (R-D) du secteur privé sont très faibles, notamment dans les PME, ce qui entrave l’adoption des nouvelles technologies et l’innovation. |
Inciter les PME à développer les programmes de formation des adultes et d’enseignement professionnel en entreprise. |
Les éléments de passif éventuel des administrations publiques sont considérables. |
Garantir pleinement l’indépendance des autorités de régulation sectorielles. Poursuivre les privatisations dans les secteurs concurrentiels de l’économie, tout en veillant à la bonne gouvernance des entreprises encore détenues par l’État. |
References
Albinowski, M. (2018), “Short-term and long-term employment effects of minimum wage. Evidence from Poland”, Ministry of Finance Working Paper, No 29-2018, Warsaw.
Algan, Y. et al. (2018), “The Value of a Vacancy: Evidence from a Randomized Evaluation with Local Employment Agencies in France”, Chaire sécurisation des parcours professionnels, No. 2018-05.
Antfolk, J, Szala, A and A. Öblom (2019), “Discrimination based on gender and ethnicity in English and Polish housing markets”, Journal of Community and Applied Social Psychology; 29, pp. 222– 237.
Benzarti, Y., and D. Carloni (2019), "Who Really Benefits from Consumption Tax Cuts? Evidence from a Large VAT Reform in France." American Economic Journal: Economic Policy, 11 (1): 38-63.
Bledowski, P., A. Chlon-Dominczak, A. Fihel, A. Kielczewska, I. E. Kotowska, P. Lewandowski, I. Magda, M. Malec, M. Okolski and J. Tyrowicz, (2017), "Population ageing, labour market and public finance in Poland," Books and Reports published by IBS, Instytut Badan Strukturalnych, edited by P. Lewandowski and J. Rutkowski.
Bloom, N., C. Genakos, R. Martin and R. Sadun (2010), "Modern Management: Good for the Environment or Just Hot Air?," Economic Journal, vol. 120(544), pages 551-572, May.
Boone, J., J. Derboven, S. Kuypers, F. Figari and G. Verbist (2019), EWIGE 2 – Update and Extension of the EUROMOD Wealth Taxation Project, JRC Working Papers on Taxation and Structural Reforms, No. 07/2019, European Commission, Joint Research Centre (JRC), Seville.
Boulhol, H. (2014), "Making the Labour Market Work Better in Poland", OECD Economics Department Working Papers, No. 1124, OECD Publishing, Paris.
BPIE (2016), Smart buildings in a decarbonised energy system, Buildings Performance Institute Europe.
Brandt, N. (2016), "Making better use of skills and migration in Poland," OECD Economics Department Working Papers 1301, OECD Publishing, Paris.
Browne et al. (2019), Analysis of Policy reform in the EU – 2016-2018, OECD Publishing, Paris.
CASE/IAS (2019), Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States: 2019 Final Report, Report TAXUD/2015/CC/131 for the Directorate General Taxation and Customs Union, Center for Social and Economic Research and Institute for Advanced Studies.
Cedefop (2018), Skills forecast trends and challenges to 2030, Cedefop.
Chmielewska et al., (2019) Informacja z badań ankietowych imigrantów w Bydgoszczy i we Wrocławiu w 2018 i 2019 roku, Narodowy Bank Polski.
Council of Europe (2020), Poland- Urgent Joint Opinion on the amendments to the Law on organisation on the Common Courts, the Law on the Supreme Court and other Laws, Opinion No. 977 / 2019, CDL-PI(2020)002-e.
Cribb, J., C. Emmerson and G. Tetlow (2016), “Signals matter? Large retirement responses to limited financial incentives”, Labour Economics, Vol. 42, pp. 203-12.
Datta, N., G. Giupponi and S. Machin (2019), Zero Hours Contracts and Labour Market Policy, Economic Policy, eiz008, https://doi.org/10.1093/epolic/eiz008
Dechezleprêtre, A., N. Rivers and B. Stadler (2019), "The economic cost of air pollution: Evidence from Europe", OECD Economics Department Working Papers, No. 1584, OECD Publishing, Paris.
DFA (2015), Global Irish: Ireland’s Diaspora Review, Department of Foreign Affairs.
Dube, A. (2019), Impacts of minimum wages: review of the international evidence, https://www.gov.uk/government/publications/impacts-of-minimum-wages-review-of-the-international-evidence.
Dustmann, C., Lindner, A., Schönberg, U., Umkehrer, M., and vom Berge, P., (2019) ‘Reallocation Effects of the Minimum Wage: Evidence From Germany’, Working Paper
EBA (2018), 2018 EU-wide stress test results, European Bank Authority, 2 November 2018.
EBA (2019), EBA Dashboard - Q3 2019, European Bank Authority.
EC (2018a), The 2018 Ageing Report, European Commission.
EC (2018b), Strategic reports 2018 on the implementation of the European Structural and Investment Funds, European Commission.
EC (2018c), Pension adequacy report 2018, European Commission.
EC (2018d), “Revision of personal income tax in Poland: increase in the tax-free allowance for the lowest earners”, ESPN Flash Report, No. 2017/13, European Commission.
EC (2019a), 2019 European Semester: Country Report – Poland, European Commission.
EC (2019b), Strategic reports 2019 on the implementation of the European Structural and Investment Funds, European Commission.
EC (2019c), Environmental Implementation Review 2019 – Poland, European Commission.
EC (2020a), 2020 European Semester: Country Report – Poland, European Commission.
EC (2020b), Science for Policy Briefs, The Impact of COVID confinement measures on EU labour market, The European Commission’s science and knowledge service, Joint Research Centre.
ECJ (2019), In loan contracts concluded in Poland and indexed to a foreign currency, unfair terms relating to the difference in exchange rates cannot be replaced by general provisions of Polish civil law, Press Release, No 129/19, European Court of Justice, Luxembourg.
ERO (2020), Taryfy wszystkich czterech przedsiębiorców pełniących funkcję tzw. sprzedawców z urzędu zatwierdzone przez Prezesa URE, Energy Regulatory Office, Warsaw, https://www.ure.gov.pl/pl/urzad/informacje-ogolne/aktualnosci/8651,Taryfy-wszystkich-czterech-przedsiebiorcow-pelniacych-funkcje-tzw-sprzedawcow-z-.html
Eurostat (2020a), “Government finance statistics - Contingent liabilities and non-performing loans in the EU Member States in 2018”, Eurostat-News release, No. 22/2020.
Eurostat (2020b), Healthy life years (from 2004 onwards) (database), Eurostat.
Flues, F. and K. van Dender (2017), "The impact of energy taxes on the affordability of domestic energy", OECD Taxation Working Papers, No. 30, OECD Publishing, Paris.
Forum Energii (2019), Clean heat 2030: Strategy for heating.
Góra, M., P. Lewandowski and M. Lis (2017), “Temporary employment boom in Poland – a job quality vs. quantity trade-off?”, Instytut Badan StrukturalnychWorking Paper No. 04/2017,Warsaw.
Goraus-Tanska K and P. Lewandowski, 2019. "Minimum wage violation in central and eastern Europe," International Labour Review, International Labour Organization, vol. 158(2), pages 297-336, June.
GRECO (2019), Fourth Evaluation Round. Corruption Prevention in Respect of Members of Parliament, Judges and Prosecutors. Second Addendum to the Second Compliance Report Including Follow-Up to the Addendum to the Fourth Round Evaluation Report (Rule 34). Poland, https://rm.coe.int/fourth-evaluation-round-corruption-prevention-in-respect-of-members-of/16809947b4
Growiec, J. et al. (2019), “The Contribution of Immigration from Ukraine to Economic Growth in Poland”, NBP Working Paper No. 322, National Bank of Poland, Warsaw.
Statistics Poland (2019a), Sytuacja gospodarstw domowych w 2018 r. w świetle wyników badania budżetów gospodarstw domowych, Statistics Poland, Warsaw.
Statistics Poland (2019b), Wybrane zagadnienia rynku pracy (liczba osób z minimalnym wynagrodzeniem, „samozatrudnieni”, umowy zlecenia, umowy o dzieło). Dane dla 2018 r, Statistics Poland, Warsaw.
Statistics Poland (2020), Wpływ epidemii COVID-19 na wybrane elementy rynku pracy w Polsce w pierwszym kwartale 2020 roku, Statistics Poland, Warsaw.
Habitat for Humanity Poland (2019), https://www.housingforall.eu/habitat-for-humanity-poland/
IEA (2017), Energy Policies of IEA Countries Poland 2016 Review, International Energy Agency.
IEA (2018), World Energy Outlook 2018, International Energy Agency.
IMF (2019), Republic of Poland : Financial System Stability Assessment, International Monetary Fund, Washington DC.
KNF (2019), Monthly data on the banking sector - October 2019, Komisja Nadzoru Finansowego, Warsaw.
Lewandowski, P., Pigoń, A. and T. Świetlik (2020), Housing and labour market outcomes in Poland, Technical Background paper.
MF (2019), Conditional liabilities of the general government sector, Ministry of Finance, https://www.gov.pl/web/finance/fiscal-data-for-eu-budgetary-surveillance
Ministry of Energy, 2018 Extract from the draft of EPP2040 - 23.11.2018.
NBP (2019), Financial Stability Report – December, National Bank of Poland, Warsaw.
NBP (2020a), Inflation Report - July, National Bank of Poland, Warsaw.
NBP (2020b), Financial Stability Report – June, National Bank of Poland, Warsaw.
NBP (2020c), Inflation Report - November, National Bank of Poland, Warsaw.
Neumark, D. (2018), Employment Effects of Minimum Wages, IZA World of Labour, Vol. 6.
NIK (2019), Państwo niegotowe na cudzoziemców, Najwyższa Izba Kontroli, Warsaw.
OECD (2015), Ageing and Employment Policies: Poland 2015, OECD Publishing, Paris.
OECD (2016), OECD Economic Surveys: Poland 2016, OECD Publishing, Paris.
OECD (2017), “How to make trade work for all” in OECD Economic outlook, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018a), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018b), Good Jobs for All in a Changing World of Work: The OECD Jobs Strategy, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018c), OECD Economic Surveys: Poland 2018, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018d), OECD Pensions Outlook 2018, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018e), Consumption Tax Trends 2018: VAT/GST and Excise Rates, Trends and Policy Issues, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018f), Taxation of Household Savings, OECD Tax Policy Studies, No. 25, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018g), OECD Rural Policy Reviews: Poland 2018, OECD Rural Policy Reviews, OECD Publishing, Paris.
OECD (2018h), Poland must make urgent legislative reforms to combat foreign bribery, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019a), Main Findings from the 2018 OECD Risks that Matter Survey, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019b), Pensions at a Glance 2019: OECD and G20 Indicators, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019c), Taxing Energy Use 2019: Using Taxes for Climate Action, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019d), OECD Skills Strategy Poland: Assessment and Recommendations, OECD Skills Studies, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019e), PISA 2018 Results (Volume I): What Students Know and Can Do, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019f), Individual Learning Accounts: Panacea or Pandora's Box?, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019g), OECD Economic Surveys: France 2019, OECD Publishing, Paris.
OECD (2019h), International Migration Outlook 2019, OECD Publishing, Paris.
OECD (2020a), OECD Economic Outlook, Volume 2020, Issue 1, Issue Note 4: Distributional risks associated with non-standard work: Stylised facts and policy considerations, OECD Publishing, Paris.
OECD (2020b), Coronavirus (COVID-19): SME policy responses - OECD Policy Responses to Coronavirus (COVID-19), OECD Publishing, Paris.OECD (2020c), Housing prices (indicator), OECD Publishing, Paris.
OECD (2020d), OECD PMR Country-Fiche Poland, OECD Publishing, Paris.OECD (2020e), Women at the core of the fight against COVID-19 crisis - OECD Policy Responses to Coronavirus (COVID-19), OECD Publishing, Paris.
OECD (2020f), OECD Family Database, OECD Publishing, Paris.
OECD (2020g), OECD Policy Responses to Coronavirus (COVID-19) - COVID-19 and the low-carbon transition: Impacts and possible policy responses, OECD Publishing, Paris.
OECD (2020h), OECD Policy Responses to Coronavirus (COVID-19) – Making the green recovery work for jobs, income and growth, OECD Publishing, Paris.
OECD/EOHS (2019), Poland: Country Health Profile 2019, State of Health in the EU, OECD Publishing, Paris/European Observatory on Health Systems and Policies, Brussels
OECD/IEA (2016), Energy Policies of IEA Countries: Poland 2016 Review, OECD Publishing, Paris.
Republic of Poland (2019a), Convergence Programme – 2019 Update, Warsaw.
Republic of Poland (2019b), National Reform Programme – 2019, Warsaw.
Report of the Council of Ministers (2019), Sprawozdanie Rady Ministrów z realizacji ustawy z dnia 4 lutego 2011 r. o opiece nad dziećmi w wieku do lat 3 w 2018 r., Warsaw.
Skandalis, D. (2018), “Breaking News: Information About Firms’ Hiring Needs Affects the Direction of Job Search”, mimeo.
Sokołowski, J. et al. (2019), “Measuring energy poverty in Poland with the Multidimensional Energy Poverty Index”, IBS Working Paper.
Sowada C et al. (2019), Poland: Health System Review, Health Systems in Transition, 21(1): 1–235.
Strzelecki, P. Jakub Growiec, Robert Wyszyński (2020), The contribution of immigration from Ukraine to economic growth in Poland, NBP Working Paper No. 322, Narodowy Bank Polski.
Tyrowicz, J. and N. Brandt (2017), “Simulating the effects of pension reforms in Poland in an overlapping generations model”, Technical Background Paper, OECD, Paris.
UN (2019disc), “Concluding observations on the combined twenty-second to twenty-fourth periodic reports of Poland”, Committee on the Elimination of Racial Discrimination, International Convention on the Elimination of All Forms of Racial Discrimination, CERD/C/POL/CO/22-24, United Nations.
Velux (2018), Barometr zdrowych domów 2018 (Healthy Homes Barometer)
Wojtyniak B. and Goryński P. (2018), Sytuacja zdrowotna ludności Polski i jej uwarunkowania, Narodowy Instytut Zdrowia Publicznego – Państwowy Zakład Higieny, Warsaw.
World Bank (2018a), Fighting Smog: Energy Efficiency and Anti-Smog in Single Family Buildings in Poland.
World Bank (2018b), Poland Energy Transition: The Path to Sustainability in the Electricity and Heating Sector.