La société suisse vieillit et dans le même temps, l’espérance de vie s’allonge. La plupart des travailleurs prenant leur retraite aux alentours de 65 ans, le temps passé à la retraite augmente et le ratio retraités-salariés devrait grimper en flèche. Bien que porteuses d’un large éventail d’opportunités, ces évolutions vont probablement peser sur la croissance du PIB par habitant et faire progresser les dépenses publiques. Elles peuvent aussi accentuer les inégalités existantes. Ce chapitre met en lumière trois défis essentiels que devront relever les pouvoirs publics pour préserver un niveau de vie élevé au cours des prochaines décennies. Premièrement, le système de retraite assure des revenus substantiels aux retraités malgré une absence de réformes. De telles réformes doivent néanmoins être conduites de toute urgence car le système est soumis à des pressions croissantes. Deuxièmement, un certain nombre de contre incitations et d’obstacles existant sur le marché du travail et au sein du système fiscal contribuent aux départs en retraite anticipée et aux départs forcés à la retraite. Stimuler l’employabilité des plus âgés et élargir le champ des possibilités qui leur sont offertes permettrait d’atténuer les conséquences économiques du vieillissement. Troisièmement, le système de santé suisse obtient d’excellents résultats mais à un coût plus élevé que dans les autres pays, et le vieillissement ne fera qu’exacerber les pressions correspondantes. La maîtrise des coûts et l’amélioration de la coordination sont donc indispensables. Ajuster le financement des soins de longue durée pourrait améliorer l’accès à ces soins et leur qualité globale.
Études économiques de l'OCDE : Suisse 2019
2. Faire face au vieillissement de la société en Suisse : quelles politiques ?
Abstract
La Suisse, à l’instar des autres pays de l’OCDE, est en proie au vieillissement. Près d’un cinquième de la population est déjà âgé de 65 ans ou plus, proportion qui devrait atteindre 30 % en 2060. Si 65 ans était autrefois un « âge avancé », aujourd’hui, un Suisse de cet âge peut s’attendre à vivre encore 21 ans, un chiffre qui est parmi les plus élevés des pays de l’OCDE (OCDE, 2017a). Cette évolution structurelle de la population a été bien anticipée et elle était déjà mise en évidence dans l’Étude économique de 2000 (OCDE, 2000). Depuis lors, l’ampleur de l’immigration nette a ralenti le rythme du changement et atténué l’urgence des réformes. À l’avenir, toutefois, le recul de l’immigration nette et le départ en retraite de l’importante cohorte du baby boom accentuent la nécessité d’adopter de nouvelles réformes pour que les personnes âgées conservent un niveau de vie élevé et pour que la chance que représente l’allongement de la vie ne se transforme en fardeau. Après avoir exposé les principales conséquences économiques du vieillissement en Suisse, on s’intéressera dans ce chapitre à trois défis essentiels pour les pouvoirs publics : garantir des revenus adéquats aux retraités, allonger la durée de la vie active pour amortir les coûts d’ajustement, et répondre à une demande croissante de soins de santé et de longue durée.
Conséquences du vieillissement de la société et défis correspondants
Ces 50 dernières années, la population suisse a augmenté de quelque 3 millions de personnes et elle a vieilli (Graphique 2.1, partie A). Le taux de fécondité a diminué de moitié entre le début des années 1960 et celui des années 2000 pour atteindre 1.4, et il n’a que peu progressé depuis. La hausse des dépenses de santé, l’amélioration de l’éducation et des revenus, ainsi que des modes de vie plus sains ont entraîné un allongement de l’espérance de vie dans les pays de l’OCDE (OCDE, 2017a). En Suisse, l’espérance de vie est passée de 69 ans au début des années 1950 à 84 ans. Et si l’amélioration du taux de mortalité se poursuit, un garçon et une fille nés en 2017 pourront espérer atteindre 91 et 94 ans, respectivement. Le rythme rapide de l’immigration a stimulé la croissance de la population dans les années 1960, 1990 et 2000 à la suite de l’Accord de 2002 sur la libre circulation des personnes signé entre la Suisse et l’UE (partie B). Les immigrés ont tendance à être plus jeunes.
À l’avenir, le taux d’accroissement naturel de la population pourrait devenir négatif et le rythme de l’immigration est très incertain – il a pratiquement diminué de moitié entre 2013 et 2017 alors que les autres économies européennes se redressaient après la crise financière mondiale. À travers ses effets sur la croissance de la population et l’emploi, l’immigration contribuera à façonner les répercussions du vieillissement démographique sur l’économie (Encadré 2.1). Dans le scénario de référence, ces dynamiques ralentiront la croissance de la population et le vieillissement s’accélèrera dans les années 2030. La part de la population âgée de plus de 65 ans – qui est l’âge légal de la retraite pour les hommes en Suisse – pourrait atteindre 30 % en 2060 (partie C). La proportion de la population âgée de 80 ans et plus – âge à partir duquel les handicaps deviennent plus fréquents – sera multipliée par plus de deux d’ici 2045 (partie D).
Les scénarios à long terme de l’OCDE illustrent les effets que peut produire le vieillissement sur l’économie suisse. Le recul attendu de la part de la population âgée de 15 à 74 ans (âge actif potentiel) pourrait entamer la croissance annuelle du PIB par habitant dans une proportion allant jusqu’à ½ point de pourcentage (Graphique 2.2, partie A). De plus, les travailleurs d’un certain âge sont moins susceptibles d’être occupés, malgré la progression du taux d’emploi des cohortes plus âgées intervenue ces dernières années, ce qui pourrait faire légèrement fléchir le taux d’emploi (partie B). L’augmentation du taux d’activité des femmes a fait office de contrepoids ces derniers temps, mais en l’absence de nouvelles réformes, ces gains seront épuisés au début des années 2020. Dans tous les cas, la progression future des revenus est fortement tributaire de celle de la production par travailleur, qui est très incertaine (Encadré 2.1). On estime généralement que la pénurie de main‑d’œuvre fait augmenter le rendement relatif du capital et la productivité de la main‑d’œuvre (Guillemette et Turner, 2018 ; Lee, 2016). Une pénurie de travailleurs d’âge moyen peut accentuer l’automatisation et, dans certains secteurs, tirer la productivité à la hausse (Acemoglu et Restrepo, 2018). La robotisation s’intensifie en Suisse, même si elle y reste moins courante qu’ailleurs : en 2016, on dénombrait 70 robots pour 10 000 salariés dans le secteur manufacturier, soit 42 de plus qu’en 2007 (OCDE, 2019a). Cela étant, le vieillissement peut aussi peser sur la productivité, notamment si les compétences des travailleurs deviennent obsolètes ou si l’esprit d’entreprise décline.
Encadré 2.1. Quatre sources d’incertitude quant à l’évolution future de la situation économique
L’immigration se prête difficilement aux prévisions et elle est la principale source d’incertitude pour les projections relatives à la population suisse. En 2001, on prévoyait que l’immigration nette reviendrait à 4 500 personnes par an en 2015 et que la population se contracterait après 2030 ; au lieu de quoi, l’immigration nette s’est établie aux alentours de 72 000 en 2015, et la population devrait continuer de progresser lentement tout au long du siècle. Les scénarios des Nations Unies montrent que la population devrait amorcer un repli à partir de 2030 environ si l’immigration nette est nulle. Les immigrés sont généralement d’âge actif, de sorte qu’un scénario de progression de l’immigration pourrait laisser entrevoir une accélération de la croissance et un allègement du fardeau des dépenses croissantes liées à l’âge à hauteur de 0.7 % du PIB en 2045 (Tableau 2.1). L’immigration future peut être limitée, puisque la population de l’Union européenne vieillit également et qu’il existe des quotas pour les migrants originaires de pays extérieurs à l’UE.
La croissance de la productivité est également source d’incertitude. Le vieillissement peut peser sur la productivité de la main‑d’œuvre de manière directe, ou indirecte via les répercussions d’un progrès technologique limité (Lee, 2016). Ces 20 dernières années, le PIB par heure travaillée a cru de 0.8 % en moyenne, un chiffre proche de l’hypothèse de 1 % établie par les autorités suisses (en équivalent temps plein) (OCDE, 2000, 2017b). Selon les scénarios nationaux les plus récents, la productivité de la main‑d’œuvre augmentera de 1.2 % par an sur la période 2020‑45. Les scénarios de l’OCDE font état d’une progression dynamique de la productivité de la main‑d’œuvre, qui grimperait de quelque 1 % par an dans la décennie à venir à 1.4 % dans les années 2050. Une accélération de la croissance de la productivité allègerait le fardeau des dépenses liées au vieillissement (Tableau 2.1).
Tableau 2.1. Dépenses publiques liées à l’âge selon diverses hypothèses
Pourcentage du PIB, à tous les niveaux de l’administration
2013 |
2030 |
2045 |
|
---|---|---|---|
Données de référence |
17.3 |
19.3 |
20.8 |
Progression de l’immigration (+20 000 en 2030 ; +10 000 en 2040) |
-0.4 |
-0.7 |
|
Croissance positive de la productivité (+0.3 % par an) |
-0.1 |
-0.2 |
|
Croissance négative de la productivité (-0.3 % par an) |
0.0 |
0.2 |
Note : Les dépenses liées à l’âge comprennent les pensions de retraite, les soins de santé, les soins de longue durée et les dépenses d’éducation.
Source : T. Brändle, C. Colombier et A. Philipona (2016), Perspectives à long terme des finances publiques en Suisse pour 2016, Département fédéral des finances.
De même que la période des taux d’intérêt historiquement bas n’avait pas été anticipée, le redressement de ces taux prévu par les scénarios de long terme et autres projections de l’OCDE pourrait bien ne pas se concrétiser – ou se révéler plus marqué (Guillemette et Turner, 2018). Ces deux scénarios produiraient des effets d’entraînement sur le stock de capital via le coût d’usage du capital, puis sur la croissance de la productivité et des salaires. Les taux d’intérêt influent également sur les revenus des retraités et la viabilité de la dette publique et privée (à l’heure actuelle, l’endettement des ménages est élevé, l’endettement brut représentant 212 % du revenu net disponible en 2016).
Les effets du changement climatique sur l’économie sont incertains : en effet, les canaux sont complexes, les effets ne sont pas linéaires, les hypothèses ont une importance considérable et les risques extrêmes sont importants en raison par exemple d’événements météorologiques extrêmes (OCDE, 2017c). Des effets négatifs se produiraient sur l’économie suisse à travers la santé (et notamment des décès prématurés) et la productivité de la main‑d’œuvre, mais ils pourraient être compensés en partie par les avantages découlant d’une diminution des frais de chauffage et du développement de secteurs comme le tourisme estival (Vöhringer, 2017). Reporter à plus tard les mesures à prendre alourdit les coûts d’ajustement (OCDE, 2017c). Outre les répercussions sur la croissance, le changement climatique et les mesures d’atténuation prises à l’échelle mondiale peuvent influer sur les rendements de l’épargne à travers les actifs des caisses de pension qui sont exposés au risque des actifs « échoués ».
Le vieillissement remodèle aussi l’économie, en élargissant les marchés existants et en ouvrant de nouvelles perspectives aux entreprises et aux entrepreneurs. Il s’agit notamment des produits et services permettant de gérer la détérioration physique ou mentale, ainsi que des services de loisirs destinés aux personnes en bonne santé (OCDE, 2019b). Selon l’Enquête suisse sur le budget des ménages, les dépenses par habitant les plus élevées sont celles des 65‑74 ans, qui consacrent au transport, à l’alimentation, au logement, à la santé et aux loisirs des sommes plus importantes que les autres tranches d’âge. Au-delà de 75 ans, les dépenses s’orientent davantage vers la santé. La spécialisation de la Suisse dans les produits thérapeutiques et pharmaceutiques constituera un atout dans un monde vieillissant. Les besoins vont évoluer en matière de logement, de transport et de ressources financières. La technologie peut donner naissance à de nouveaux produits et services, faciliter l’évolution des pratiques professionnelles et créer de nouveaux types de relations sociales (OCDE, 2014a). L’entrepreneuriat des seniors peut ouvrir des perspectives en termes d’activité et de revenus pour les plus âgés (OCDE, 2019b).
L’évolution de la longévité, les décisions relatives au travail et la demande de soins de santé et de longue durée auront un impact budgétaire. En Suisse, le rôle moindre joué par le gouvernement dans les pensions de retraite et le financement des soins de santé et de longue durée permettra de contenir les pressions budgétaires comparativement à bien d’autres pays de l’OCDE (Graphique 2.3). Quoi qu’il en soit, ces postes de dépenses pourraient progresser à hauteur de 3 % du PIB en 2060. D’autres dépenses publiques pourraient s’alourdir plus encore si les dépenses par habitant restent inchangées en termes réels, conformément aux prévisions (Guillemette et Turner, 2018). Les cantons et les communes, qui sont les principaux responsables des prestations de soins de santé et de longue durée, seront les plus exposés aux pressions budgétaires liées au vieillissement (Brändle, Colombier et Philipona, 2016). Toutefois, en raison des différences existant dans le rythme et l’ampleur du vieillissement démographique, les difficultés varieront considérablement d’un canton à l’autre (Graphique 2.4). La gestion de ces tensions sur les coûts et le financement des besoins en termes de dépenses seront analysés dans les sections suivantes, principalement sous l’angle des retraites et des soins de santé et de longue durée.
Par comparaison, les perspectives sont favorables pour les Suisses les plus âgés, grâce à des revenus relativement importants et à de faibles taux d’invalidité. Comme partout, néanmoins, le vieillissement devrait accentuer les inégalités existantes (OCDE, 2017d). Bien que les taux d’emploi soient élevés, l’écart notable (de 25 points, soit proche de celui du pays médian de l’OCDE) observé entre celui des adultes les plus instruits et celui des moins instruits contribue à l’existence de différences en termes d’épargne et de revenu au titre de la retraite. En Suisse, la rémunération perçue par les femmes sur l’ensemble de leur carrière est plus basse que celle des hommes, en raison d’un nombre d’heures travaillées inférieur et de l’écart de salaire existant. Les femmes, qui bénéficient en outre d’une espérance de vie supérieure, sont donc davantage exposées au risque de pauvreté à un âge avancé.
Le système de sécurité sociale offre une protection contre la pauvreté grâce à des pensions de vieillesse à caractère redistributif et à des prestations complémentaires soumises à conditions de ressources qui permettent à chacun de faire face aux dépenses correspondant à ses besoins fondamentaux ou à ses besoins en termes de soins en établissement ou d’invalidité. Quelque 13 % de la population âgée de 65 ans ou plus ont touché des prestations complémentaires en 2017, ce taux étant plus élevé pour les femmes. Les possibilités de maintenir cette aide à son niveau actuel dépendront des performances économiques et des finances publiques. Le niveau d’aide varie également d’un canton à l’autre. Les inégalités spatiales peuvent se creuser si les cantons où l’évolution démographique est la plus rapide peinent à offrir des services, notamment si les recettes fiscales sont soumises à de fortes pressions. Des travaux empiriques récents mettent ce risque en évidence : sur la période 2001-12, les régions de l’OCDE où l’évolution démographique a été plus rapide que la moyenne nationale ont enregistré une croissance de la productivité inférieure à la moyenne, ce qui a accentué l’effet de freinage exercé sur le PIB par une main‑d’œuvre vieillissante (Daniele, Honiden et Lembcke, 2019).
Préparer le système de retraite à une forte hausse du nombre de retraités
Le système de retraite suisse s’articule autour de trois piliers qui atténuent les risques individuels et publics ainsi que le recommande l’OCDE (OCDE, 2018a ; Tableau 2.2). Le premier pilier correspond à un système public par répartition, lequel constitue la principale source de revenus des plus modestes (Graphique 2.5 ; Encadré 2.2). Contrairement à un système d’assurance sociale au sens strict, il revêt un caractère redistributif, car les retraites sont plafonnées, mais pas les cotisations. Le deuxième pilier est un régime de prévoyance professionnelle, et de nombreuses entreprises choisissent de mettre en place une composante facultative (« surobligatoire »). La plupart des caisses de pension reposent sur un régime hybride, dans lequel il est possible d’accumuler des actifs de retraite individuels mais les prestations dépendent largement de paramètres fixés au niveau national. Moins de 5 % des engagements des caisses de pension correspondent à des dispositifs à prestations définies au sens strict.
Tableau 2.2. Le système de retraite suisse s’articule autour de trois piliers
|
Premier pilier |
Deuxième pilier |
Troisième pilier |
---|---|---|---|
Type de retraite |
Retraite publique |
Plans de retraite professionnels |
Plans de retraite privés |
Couverture |
Obligatoire |
Obligatoire pour les salariés au‑delà d’un certain salaire |
Facultative |
Objectif |
Couvrir les frais de subsistance élémentaires |
Préserver le niveau de vie |
Complément |
Note : Un filet de protection sociale complète la retraite du premier pilier, en procurant des « prestations complémentaires » aux bénéficiaires dont les revenus ne couvrent pas des dépenses élémentaires définies.
Encadré 2.2. Caractéristiques du premier pilier
Le premier pilier correspond à un régime par répartition. Le taux de cotisation est le même pour tous les salariés, soit 8.4 % du salaire brut (la moitié étant versée par les employeurs). Les prestations de retraite sont fonction du nombre d’années de cotisation, du salaire moyen perçu au cours de la carrière et de bonifications éventuelles. Au bout d’un an de cotisation, une prestation de retraite peut déjà être accordée, mais pour toucher une retraite à taux plein, un travailleur doit cotiser chaque année à partir de l’âge de 20 ans. Chaque année manquante entraîne une décote de 1/44e. En 2019, les prestations à taux plein varient de 1 185 CHF à 2 370 CHF (le salaire moyen étant supérieur à 7 000 CHF par mois). En outre, un couple ne peut pas percevoir plus de 150 % de la prestation maximale. Des bonifications permettent de compenser les années d’éducation des enfants et de prise en charge des parents proches.
Dans l’ensemble, le système de retraite soutient relativement bien la comparaison avec les systèmes des autres pays, notamment en matière de gouvernance (« intégrité ») et de viabilité financière (Graphique 2.6). C’est moins vrai pour ce qui est de l’adéquation des revenus au titre de la retraite, notamment en raison des incitations en faveur des sorties en capital et non en rente (Mercer, 2018). La position relative de la Suisse s’est détériorée au fil des ans, principalement sous l’effet du manque de réformes de ces 20 dernières années.
Le premier pilier aurait déjà dû être réformé
Comme c’est souvent le cas pour les systèmes par répartition, le premier pilier s’expose à de sérieuses difficultés financières à mesure que le vieillissement progresse. Les dépenses de retraite totales sont ressorties en hausse de 2.7 % par an au cours des dix dernières années, les recettes augmentant de 1.9 % seulement (OFAS, 2018). Le fonds de compensation qui gère les actifs et les passifs du premier pilier est en déficit (abstraction faite du rendement du capital) depuis 2014. À l’heure actuelle, les recettes viennent principalement des cotisations des assurés et des employeurs (plus de 70 %), et le reste des recettes publiques et du produit des placements.
Les réformes destinées à améliorer la viabilité financière du premier pilier se sont révélées difficiles. La dernière grande tentative aura consisté en un projet complet connu sous le nom de « Prévoyance vieillesse 2020 », lequel a été rejeté par référendum en 2017. Celui‑ci se caractérisait essentiellement par un relèvement de l’âge de la retraite pour les femmes, par une diminution de la retraite du deuxième pilier partiellement compensée par une augmentation des prestations du premier pilier, et par une hausse de la TVA.
En 2020 entrera en vigueur une réforme qui doit permettre de collecter 26 milliards CHF supplémentaires d’ici à 2030 (Encadré 2.3). Cela repoussera de quatre ans l’échéance à laquelle le fonds enregistrera une valeur nette négative, soit jusqu’en 2035 (OFAS, 2019). En 2030, les réserves du fonds de compensation atteindront un niveau correspondant environ à 50 % des dépenses annuelles (alors qu’il était encore de 100 % en 2018) et continueront de diminuer ensuite. Des recettes supplémentaires seront donc nécessaires. Des estimations antérieures à la récente réforme laissent à penser que le déficit de financement resterait substantiel : en utilisant un modèle d’équilibre général, Keuschnigg (2018) estime que les besoins de financement à long terme du premier pilier imposent de relever le taux normal de la TVA de 4 points et l’âge effectif de départ à la retraite de 4 ans. Bien qu’elles soient difficiles sur le plan politique et qu’elles puissent nécessiter des mesures en faveur des faibles revenus, ces réformes sont plus efficaces que d’autres solutions telles que l’alourdissement de la fiscalité directe.
L’âge légal de la retraite s’élève à 65 ans pour les hommes depuis 1948 – l’espérance de vie en Suisse à 65 ans étant alors inférieure de huit ans – et celui des femmes a été porté à 64 ans en 1997 (l’espérance de vie des femmes à 65 ans est supérieure de trois ans à celle des hommes). La durée de la retraite devrait devenir l’une des plus longues parmi les pays de l’OCDE à mesure que l’âge légal de la retraite passera sous la moyenne et que l’espérance de vie continuera de progresser (de plus de trois ans d’ici 2060) (Graphique 2.7). Les pouvoirs publics ont l’intention d’harmoniser l’âge de la retraite des femmes avec celui des hommes (soit 65 ans) (Encadré 2.3). Cette modification décalerait d’un an seulement l’assèchement des actifs du fonds (la proposition de majoration de la TVA le repoussant de trois années supplémentaires).
Une réforme plus ambitieuse peut avoir un impact plus net sur le financement. Ainsi, une estimation de l’OCDE suggère qu’en cas de relèvement de l’âge légal de la retraite à 67 ans, le ratio de la population plus âgée que l’âge de la retraite sur celle en âge de travailler augmenterait de 5 et non de 12 points d’ici 2030. Le Danemark et les Pays‑Bas, qui sont dotés de systèmes de retraite similaires, porteront l’âge de la retraite à 67 ans au début des années 2020 (et à 68 ans en 2030 pour le Danemark) et au‑delà, celui‑ci reculera automatiquement en fonction de l’espérance de vie. L’âge légal de la retraite devrait être fixé à 65 ans pour les deux sexes comme prévu, puis repoussé à 67 ans d’ici à 2034, et être indexé par la suite sur tout nouvel allongement de l’espérance de vie. Une fois les âges légaux de la retraite revus à la hausse, des mesures complémentaires pourraient s’avérer nécessaires pour tenir compte de l’espérance de vie plus courte qui caractérise certaines catégories socioéconomiques.
Encadré 2.3. Réforme publique du premier pilier
Une première réforme a été adoptée par le Parlement en septembre 2018 et par référendum en mai 2019. À partir de 2020, elle permettra d’améliorer le financement du premier pilier :
en relevant de 0.3 point de pourcentage les cotisations sociales sur les salaires bruts ;
en affectant au premier pilier une fraction supplémentaire de 0.2 point de pourcentage des recettes de TVA (pour les porter à 1 point) ;
en portant de 19.6 % à 20.2 % la contribution de la Confédération aux dépenses totales.
En outre, le gouvernement a présenté un projet de loi au Parlement en août 2019 afin de renforcer encore la viabilité financière du premier pilier. Quatre grandes modifications sont envisagées, à partir de 2022 :
L’âge légal de la retraite sera désormais connu sous le nom d’âge de référence et repoussé d’un an pour les femmes, afin d’atteindre 65 ans pour les deux sexes dans le premier et le deuxième piliers. Il sera relevé de trois mois chaque année à compter de 2023.
Le recul de l’âge de référence pour les femmes sera compensé pendant une période de transition de neuf ans, pour un coût total de 700 millions CHF par an. La décote appliquée en cas de retraite anticipée sera moins élevée pour celles qui touchent des revenus faibles à intermédiaires. Les femmes prenant leur retraite à 65 ans bénéficieront d’une surcote en fonction de leurs revenus (soit 76 CHF par mois en moyenne).
La flexibilité sera accrue, les prestations pouvant être perçues entre 62 et 70 ans (au lieu de 63 à 70 ans pour les hommes et 62 à 69 ans pour les femmes) ; la décote (surcote) actuarielle appliquée en cas de retraite anticipée (différée) est modifiée (Tableau 2.3). Il sera possible de travailler à temps partiel et de toucher une retraite partielle. Des cotisations pourront être versées au‑delà de 65 ans pour compenser toute interruption dans l’acquisition des droits à la retraite.
Les recettes du fonds augmenteront grâce à une hausse de 0.7 point de pourcentage du taux normal de la TVA.
Tableau 2.3. Évolution des facteurs d’ajustement en cas de réduction/prolongation de l’activité
Retraite anticipée de 2 ans |
Retraite anticipée d’1 an |
Retraite différée d’1 an |
Retraite différée de 2 ans |
|
---|---|---|---|---|
Situation actuelle |
-13.6 % |
-6.8 % |
5.2 % |
10.8 % |
Réforme prévue |
-7.7 % |
-4.0 % |
4.3 % |
9.0 % |
Source : Conseil fédéral.
Une plus grande flexibilité dans l’âge légal de la retraite peut favoriser le recul de l’âge effectif de départ et le départ lui‑même. Elle peut apaiser les inquiétudes quant aux inégalités au regard de l’espérance de vie. Toutefois, même si les décotes et surcotes (en cas de retraite anticipée et différée) sont neutres sur le plan actuariel, une souplesse accrue peut faire baisser l’âge effectif de la retraite en raison d’une sous‑estimation des besoins futurs, de vastes filets de protection sociale ou de taux de remplacement élevés (OCDE, 2017e). De plus, la flexibilité peut se révéler inéquitable sur le plan social dès lors que seules les personnes aisées peuvent se permettre de partir en retraite anticipée.
Le gouvernement a l’intention d’actualiser les décotes et les surcotes afin qu’elles soient neutres en termes actuariels, de telle sorte que les prestations de retraite constituées en cas de prolongation de l’activité d’un an, par exemple, soient identiques à celles de l’année précédente (Encadré 2.3). Néanmoins, les départs en retraite anticipée étant déjà très courants, revoir les décotes à la baisse pourrait favoriser plus encore un tel phénomène (Schaltegger, 2018). Certains pays – comme la Corée, l’Estonie, l’Islande, le Japon et le Portugal – proposent, outre l’équité actuarielle, des surcotes en cas de retraite différée. D’autres, comme l’Autriche ou la Corée, ont mis en place des contre‑incitations financières aux départs en retraite anticipée. À l’inverse, le système suédois n’a pas fixé d’âge légal de la retraite, mais des droits à retraite flexibles et neutres sur le plan actuariel à partir de l’âge de 61 ans. Si l’âge légal de la retraite est maintenu à 65 ans en Suisse, il conviendrait de modifier les surcotes et les décotes pour créer des incitations à différer le départ en retraite.
Le premier pilier est la principale source de revenus au titre de la retraite pour les plus modestes (Graphique 2.5 ; Encadré 2.2). Parce qu’il est complété par un ample deuxième pilier, le fardeau futur que représente ce premier pilier pour les finances publiques est moins lourd que dans bien d’autres pays de l’OCDE (Graphique 2.3). Le taux de cotisation est relativement bas (Graphique 2.8), mais les cotisations ne sont pas plafonnées, contrairement aux prestations. En d’autres termes, le système de retraite fonctionne également comme une taxe sur les plus hauts revenus, ce qui est peu courant dans les pays de l’OCDE. Il propose toutefois, à travers la retraite minimum, un filet de protection important pour les bas revenus.
Les prestations de retraite (touchées au départ en retraite et pendant la retraite) sont ajustées tous les deux ans selon un indice correspondant à la moyenne de la hausse moyenne des salaires nominaux et des prix à la consommation. En conséquence, elles ont progressé de 0.9 % par an en moyenne sur la période 2000‑17, contre 1.1 % pour le salaire moyen, signe d’une diminution du taux de remplacement du premier pilier. À partir du Modèle de retraite de l’OCDE, on estime que le taux de remplacement brut du premier pilier (défini comme le revenu perçu à la retraite rapporté au salaire de la dernière année) atteindra 24 % en 2060 pour un homme touchant un salaire moyen, soit un niveau inférieur au taux actuel de 35 % estimé par le gouvernement. La simulation effectuée repose sur diverses hypothèses simplificatrices, dont l’absence de futures réformes. Il est important que les futurs retraités comprennent que cette évolution est en cours.
Le gouvernement devrait améliorer les outils de communication et d’information afin que les retraités puissent planifier leur retraite et modifier au besoin leur comportement d’épargne. Pour l’heure, les relevés ne peuvent être obtenus qu’en écrivant au fonds de compensation, et le site web existant ne contient qu’une calculatrice. Un site web facile à utiliser devrait permettre aux travailleurs de se procurer des relevés actualisés et clairs de leurs droits à retraite. Il devrait également tenir compte des droits au titre du deuxième pilier ; les relevés concernant le deuxième pilier sont actuellement envoyés chaque année, et certains fonds fournissent des informations en ligne. En Suède, un service Internet – MinPension – regroupe les informations relatives aux trois piliers, ce qui représente 98 % du capital‑retraite total. Il permet aussi d’établir des prévisions des droits à retraite futurs en fonction de différentes hypothèses, notamment en matière de rendements et de salaires attendus. Il est financé à parité par le gouvernement et par les caisses de pension.
Comme on l’a vu, le taux de remplacement au départ en retraite devrait s’inscrire en baisse à l’avenir, en raison notamment du mécanisme utilisé pour calculer les droits à retraite lors du départ. Les répercussions seront particulièrement lourdes pour les faibles revenus, mais aussi pour les revenus moyens. Des mesures favorisant une meilleure connaissance de l’ensemble des droits à pension aideraient les travailleurs à prendre des décisions éclairées en matière d’épargne et à compenser cette baisse. En principe, le montant de la retraite perçue lors du départ devrait suivre l’évolution des salaires, comme c’est généralement le cas dans les pays de l’OCDE (OCDE, 2017e). Cette mesure serait coûteuse par rapport au dispositif actuel, dans lequel le recul des taux de remplacement faciliterait le financement du premier pilier. Néanmoins, elle pourrait limiter le nombre de seniors cherchant à toucher des prestations complémentaires pour satisfaire leurs besoins fondamentaux. Indexer les retraites sur l’inflation pendant la retraite pourrait aider au financement de cette mesure, les salaires augmentant généralement plus vite que les prix à la consommation. Dans l’ensemble, les coûts peuvent être plus élevés pendant une période de transition (durant laquelle les retraités existants continuent de bénéficier d’une indexation supérieure) et cette période serait probablement longue. Cela risque notamment d’entamer le pouvoir d’achat des retraités, car leur panier de consommation diffère de celui du consommateur moyen, la part des services de santé étant sensiblement plus élevée. L’Australie, par exemple, utilise un « indice du coût de la vie des retraités et des bénéficiaires » pour mieux répondre aux besoins de la population âgée.
Les deuxièmes apporteurs de revenu (des femmes, principalement) peuvent être davantage protégés par les cotisations de leur conjoint que par les leurs. Ils peuvent ainsi percevoir une pension à taux plein au titre du premier pilier sans cotiser dès lors que leur conjoint verse au moins le double de la cotisation minimum. La pension de réversion les protège également en cas d’interruption de travail ou d’inactivité. En 2017, quelque 50 000 veuves ont touché en moyenne près de 90 % de la retraite moyenne. Malgré des revenus inférieurs, les femmes perçoivent aussi, en règle générale, un revenu au titre du premier pilier légèrement supérieur à celui des hommes et pendant une période plus longue, en raison d’une espérance de vie plus élevée. Un tel système crée des inégalités entre les différents types de ménages. Le taux d’activité des femmes étant plus important – et en progression – la nécessité de partager les prestations de l’apporteur principal s’amenuise. Aucune raison évidente ne justifie qu’une veuve soit davantage protégée qu’une autre personne percevant elle aussi de faibles revenus (OCDE, 2018a). La possibilité de supprimer la pension de réversion devrait faire l’objet d’une étude, évaluant notamment ses effets sur la pauvreté. La Suède, par exemple, l’a abandonnée en 1990 (OCDE, 2017e). Le plafond fixé pour les rentes perçues par les couples mariés et les exonérations de cotisations accordées sous conditions aux deuxièmes apporteurs de revenu dissuadent également les individus de travailler et devraient être supprimés. Il serait plus équitable d’évoluer vers un système octroyant des droits à retraite en fonction des cotisations individuelles et une aide soumise à conditions de ressources destinée aux personnes démunies indépendamment de leur situation matrimoniale.
Les travailleurs indépendants sont couverts par le premier pilier, conformément aux recommandations de l’OCDE. Leur taux de cotisation retraite progresse en fonction de leurs revenus à concurrence de 7.8 %, contre 8.4 % pour l’ensemble des salariés. Pour les bas revenus, la différence avec les salariés est substantielle. Les travailleurs indépendants percevant des prestations identiques, les autorités devraient s’assurer que les cotisations équivalent à celles des salariés pour ne pas donner l’impression de les soutenir financièrement (Bonoli, 2017). Le coût serait peu élevé pour les travailleurs indépendants, car les taux de cotisation sont bas par rapport aux autres pays (Graphique 2.8).
Accroître la viabilité et l’inclusivité du régime de prévoyance professionnelle obligatoire
Le deuxième pilier s’est développé à partir des initiatives prises par des employeurs à partir du XIXe siècle, et il est devenu obligatoire en 1985. Il s’apparente pour l’essentiel à un régime à cotisations définies et il est pratiquement arrivé à maturité, car il couvrait déjà 80 % des salariés en 1985. Les actifs de retraite totaux sont importants, mais moindres qu’au Danemark et aux Pays‑Bas (Graphique 2.9). Plus de la moitié des actifs provient de cotisations surobligatoires (examinées ci-dessous). La plupart des caisses de pension sont privées. La concentration du secteur a eu pour effet de ramener leur nombre de quelque 3 600 en 1985 à 1 500 environ en 2018 et fait augmenter leur taille moyenne. Ce régime complète le taux de remplacement du premier pilier pour une grande partie de la population. Il convient toutefois d’adapter ce régime pour mieux répondre aux besoins futurs. En particulier, sa viabilité est mise en péril par la rigidité du cadre juridique, comme on le verra ci‑après. De plus, les règles actuelles excluent certains salariés, comme ceux qui travaillent quelques heures ou selon des contrats de travail multiples, ce qui compromet plus encore l’adéquation de leurs revenus au titre de la retraite. À la demande du gouvernement, les partenaires sociaux se sont accordés sur un ensemble de propositions qu’ils ont annoncées en juillet 2019 (Encadré 2.4).
Encadré 2.4. Réforme du deuxième pilier proposée par les partenaires sociaux
En juillet 2019, trois des quatre principaux partenaires sociaux se sont mis d’accord sur un ensemble de réformes du deuxième pilier qui ont été soumises au Conseil fédéral. Cette proposition recommande notamment de ramener le taux de conversion de 6.8 % à 6 % en une seule étape et propose trois mesures visant à réduire les effets sur le taux de remplacement :
Abaissement de la déduction de coordination de 24 855 CHF à 12 443 CHF. Les travailleurs à temps partiel pourraient ainsi accroître leurs droits à retraite.
Aplanissement du rapport entre les taux de cotisation et l’âge : de 7 % à 9 % du salaire assuré pour la tranche d’âge 25‑34 ans ; de 10 % à 9 % de 35 à 44 ans ; de 15 % à 14 % de 45 à 54 ans ; et de 18 % à 14 % pour les travailleurs les plus âgés. L’employabilité des seniors s’en trouverait améliorée.
Versement aux nouveaux retraités d’une prestation complémentaire permanente de 200 CHF au cours des cinq premières années, de 150 CHF les cinq années suivantes et de 100 CHF les cinq années qui suivent. Un élément par répartition serait ainsi introduit dans le deuxième pilier, car celui-ci serait financé en relevant les cotisations à hauteur de 0.5 % du salaire.
De plus, la proposition recommande que le Conseil fédéral présente régulièrement un rapport sur l’adéquation du taux de conversion et de la prestation complémentaire permanente.
Source : Union Patronale Suisse / Union Syndicale Suisse / Travail.Suisse, communiqué de presse, 2 juillet 2019.
Ce système est un régime hybride. Contrairement à un régime à cotisations définies stricto sensu, les principaux paramètres sont définis par les autorités principalement pour atteindre un objectif de taux de remplacement de 60 % au titre du premier et du deuxième piliers obligatoires. Ces paramètres sont le taux de conversion, qui transforme les actifs accumulés en prestations de retraite, et le rendement minimum des actifs. Depuis 2004, le taux de conversion est fixé par la loi (auparavant, un comité technique soumettait des propositions au gouvernement). Il a aussi été revu progressivement à la baisse, passant ainsi de 7.2 % (taux valable depuis 1985) à 6.8 % en 2014. Le rendement minimum, initialement fixé à 4 %, est actuellement de 1 % et il est établi tous les deux ans par le gouvernement sur proposition de la Commission de haute surveillance. En 2018, le Conseil fédéral n’a pas suivi la recommandation de l’abaisser à 0.75 %. Pour le régime surobligatoire, les fonds peuvent déterminer librement les rendements et les prestations, à condition que les sommes touchées par les retraités soient supérieures à celles qu’ils auraient perçues en l’absence de cotisations surobligatoires.
Taux de remplacement et droits à retraite
Selon des calculs fondés sur le Modèle de retraite de l’OCDE, en l’absence de réforme des retraites, le taux de remplacement du système de retraite obligatoire pour un travailleur rémunéré au salaire moyen chutera à 40 % environ pour une personne qui débute sa carrière aujourd’hui, soit en‑dessous de celui de bien d’autres pays de l’OCDE et de l’objectif de 60 % fixé dans la loi sur les retraites (Graphique 2.10). Près de 90 % des salariés percevront des revenus provenant de régimes de retraite surobligatoires. Le recul prévu de la composante obligatoire est dû à une réduction du taux de remplacement des premier et deuxième piliers. Dans le deuxième pilier, la diminution relative du salaire couvert maximum fera baisser le taux de remplacement, le plafond n’intégrant que partiellement la hausse des salaires réels du fait du mécanisme d’indexation décrit plus haut. Bien qu’uniquement facultatif dans la loi, le plafond devrait prendre systématiquement en compte la progression des salaires réels afin de limiter le recul du taux de remplacement. Faute de quoi, les inégalités pourraient se creuser entre les bénéficiaires du système obligatoire et ceux qui ont accès à un régime surobligatoire.
Le taux de conversion minimal est trop élevé d’après les modèles actuariels. Même en 1985, il était fixé à un haut niveau par rapport à l’espérance de vie, mais les rendements étaient suffisamment importants (CHS PP, 2019). Les rendements étant plus faibles que prévu à l’époque de la réforme de 2004 et la longévité supérieure, le système est soumis à des pressions croissantes. Les tentatives de révision de 2010 (à 6.4 %) et de 2017 (à 6.0 %) ont échoué. Le taux de 6.8 % est conforme au versement d’une rente pendant 15 ans environ (100/6.8), ce qui est nettement inférieur à l’espérance de vie à 65 ans (plus de 20 ans). De même, ce taux correspond à un rendement implicite de 4.8 %, qui dépasse largement les rendements du marché (Bauman et Koller, 2018).
Les caisses de pension ont adopté diverses stratégies pour combler leur déficit de financement. Certaines ont minoré le taux appliqué aux cotisations surobligatoires, de sorte que le taux de conversion global est inférieur à 6.8 %, ce qui confirme que le système obligatoire n’est pas viable à l’heure qu’il est. D’autres ont réduit les rendements déjà faibles perçus par les cotisants actuels, ce qui correspond à un transfert intergénérationnel de quelque 0.8 % des actifs de retraite (approximativement 7 milliards CHF par an), en moyenne, sur la période 2014‑18 (CHS PP, 2019). S’agissant des caisses de pension reposant principalement sur le régime obligatoire, ce transfert est encore plus important et leur solvabilité future est compromise.
Si l’on maintient le taux de conversion à 6.8 %, l’âge effectif de la retraite devrait être supérieur à 70 ans pour que le système soit financièrement viable. Selon les estimations, le taux de conversion approprié varie de 4.5 % à 5 %, en fonction des rendements attendus et de l’âge de la retraite (Helvetia, 2018). Le système actuel de définition des paramètres s’est révélé incapable de s’adapter à la situation économique et à l’évolution de l’espérance de vie. Il serait notamment possible de s’orienter vers un régime à cotisations définies au sens strict, dans lequel les prestations dépendraient des performances du fonds. On pourrait aussi, de manière moins radicale, charger la Commission fédérale de la prévoyance professionnelle de formuler une recommandation fondée sur les rendements du marché et l’espérance de vie, le taux de conversion étant fixé par ordonnance, comme c’est actuellement le cas pour le rendement minimum. Avant 2004, le gouvernement pouvait ajuster le taux de conversion en fonction de paramètres techniques. En Suède, cette conversion (pour les comptes notionnels liés à la rémunération) repose sur l’âge de la retraite et l’espérance de vie actuelle (OCDE, 2017e). Lorsque le taux est fixé par le gouvernement, celui‑ci devrait présenter régulièrement un rapport sur la viabilité du taux de conversion, ainsi que le proposent les partenaires sociaux (Encadré 2.4).
En soi, une diminution du taux de conversion réduira les prestations de retraite (Graphique 2.11). Ce phénomène pourrait cependant être compensé en partie par une augmentation des cotisations. Un allongement de la durée de cotisation y contribuerait également. Commencer à cotiser avant l’âge de 25 ans, ce qui est actuellement proscrit par la loi, ferait croître de 2 points de pourcentage le taux de remplacement d’un travailleur rémunéré au salaire moyen grâce aux intérêts composés. Et le fait de prolonger les cotisations jusqu’à l’âge de 68 ans produirait un effet similaire, les taux de cotisation étant plus élevés.
Retrait des actifs de retraite
Les vastes possibilités de retrait anticipé peuvent compromettre l’adéquation des retraites. Premièrement, il est possible d’acheter un logement en utilisant la totalité des actifs de retraite (jusqu’à l’âge de 50 ans) ; 18 000 personnes environ ont déposé une demande en ce sens en 2016. Des cotisations complémentaires peuvent ensuite combler le déficit de capital, mais il n’existe aucune obligation de compenser le montant des retraits. Pour faciliter l’accession à la propriété, les actifs de retraite devraient uniquement servir de garantie, comme le prévoit la loi, de telle sorte que les rendements continuent de s’accumuler et que le risque de perte des actifs de retraite soit moindre. Deuxièmement, un salarié peut retirer l’ensemble des actifs accumulés pour créer une entreprise, ce qui hypothèque ses revenus futurs au titre de la retraite. Aucun autre pays de l’OCDE n’offre une telle possibilité. Le système financier étant bien développé, il conviendrait de la supprimer.
Les revenus au titre de la retraite sont également compromis par la possibilité d’opter pour une sortie en capital au moment du départ en retraite. La Loi autorise les individus à retirer au minimum 25 % de leur capital. Le taux de conversion étant élevé et la longévité en hausse, les caisses de pension proposent souvent une sortie en capital à 100 %, ce qui réduit leurs engagements (Swisscanto, 2018). Près d’un tiers des assurés choisissent cette option (Schüpbach et al., 2018). Les retraités supportent ensuite les risques de placement et de longévité. On a observé que le filet de protection qu’offrent les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse réduisaient la demande de rentes (Bütler et al., 2017). Un régime fiscal favorable vient s’ajouter aux incitations en faveur de la sortie en capital (Bütler et Ramsden, 2017) : la charge fiscale est souvent moins importante pour les sorties en capital à 100 % que pour les rentes, qui sont imposées comme des revenus classiques (Schüpbach et al., 2018). De plus, un taux de conversion plus bas peut jouer en faveur des sorties en capital.
En principe, ce type de retraits ne devrait pas être autorisé, car il nuit à la fonction d’assurance du système. À défaut, on pourrait donc fixer le retrait maximum à 25 % de manière à réduire le coût budgétaire des incitations fiscales et du recours aux prestations complémentaires, conformément aux recommandations de l’OCDE (OCDE, 2018a). Il est difficile de supprimer les avantages fiscaux qui favorisent les sorties en capital dans le système fiscal décentralisé de la Suisse.
Couverture
Il est encore possible d’élargir la couverture du deuxième pilier. En 2017, le nombre de cotisants au deuxième pilier ne représentait que les deux tiers de ceux du premier pilier. Un seuil d’accès limite la participation des salariés au deuxième pilier. Bien que ce seuil soit assez bas (un quart du salaire moyen), les titulaires de contrats multiples (soit 8 % de la main‑d’œuvre environ), les temps partiels (un quart de la main‑d’œuvre) ou les bas salaires peuvent être exclus. La participation des travailleurs indépendants est facultative, mais à défaut, ils ont accès à un troisième pilier étendu. En moyenne, les prestations servies par ces deux piliers aux salariés et aux indépendants sont à peu près identiques (Ollivaud, 2019). Le deuxième pilier assure uniquement le « salaire coordonné », c’est‑à‑dire le montant supérieur au salaire couvert par le premier pilier. Cela permet de garantir la bonne coordination des deux systèmes, mais c’est une source de complexité.
Abaisser le seuil d’accès et fonder les cotisations sur la totalité du salaire permettrait de simplifier le système et d’améliorer la couverture. Selon une enquête de 2011, la plupart des employeurs sont indifférents ou favorables à l’abaissement du seuil (OCDE, 2014b). La diminution du taux de cotisation appliqué aux travailleurs à bas salaire pourrait limiter les répercussions potentiellement négatives sur leur emploi. Pour ceux qui sont déjà couverts, les taux de cotisation devraient être recalculés afin que la modification soit neutre. Les partenaires sociaux ont proposé de maintenir le seuil, mais d’augmenter le salaire coordonné pour améliorer les droits à la retraite des travailleurs à temps partiel (Encadré 2.4).
À l’heure actuelle, les salariés ne peuvent pas choisir leur propre caisse et doivent en changer lorsqu’ils changent d’emploi. L’employeur sélectionne une caisse de pension pour l’ensemble des salariés, mais salariés et employeurs sont représentés au Conseil de la caisse. Les critères de sélection ou les préférences de l’employeur peuvent différer de ceux des salariés. Un travailleur sur dix environ change d’emploi chaque année, ce qui génère des transferts de droits à retraite et donc des frais administratifs (Roten, 2019). La nouvelle caisse de pension peut aussi rejeter une partie des droits à retraite si ses paramètres sont moins généreux. Une réduction du nombre de caisses de pension permettrait de limiter les changements de caisse et de mieux tirer parti des économies d’échelle pour réduire les frais (OCDE, 2018a). La Suisse devrait continuer de promouvoir les fusions entre caisses en renforçant le contrôle des coûts. Une option plus radicale consisterait à autoriser les salariés à choisir leur caisse, comme c’est le cas au Royaume-Uni. Cela leur permettrait de conserver la même et, in fine, pourrait améliorer l’éventail des offres en intensifiant les pressions concurrentielles. Une telle approche pourrait cependant être coûteuse pour les caisses de pension, et des mesures d’accompagnement seraient également nécessaires pour remédier aux risques dus aux biais comportementaux et à l’absence de compétences financières, ainsi que l’a souligné l’OCDE (2018a).
Gouvernance
Une bonne gouvernance et un contrôle efficace des caisses de pension sont essentiels pour le maintien de la viabilité financière du deuxième pilier. Lorsque le système fonctionne de manière satisfaisante, il est inutile d’imposer des paramètres de retraite qui créent une distorsion, et notamment un rendement minimum. La composition du portefeuille de placements par catégories d’actifs est réglementée. Néanmoins, près de la moitié des caisses de pension ont sollicité des exemptions, généralement pour accroître l’exposition au secteur immobilier (Swisscanto, 2018). La part croissante de l’immobilier et des actions (Graphique 2.12) a compensé le recul des performances dû à des rendements obligataires en repli, voire négatifs.
La faiblesse des taux d’intérêt et le niveau élevé du taux de conversion incitant davantage à prendre des risques, il convient de renforcer le contrôle des portefeuilles d’actifs. De nombreux pays appliquent le « principe de prudence » pour l’évaluation des placements en fonction de la sécurité, de la qualité, de la liquidité et de la rentabilité de l’ensemble du portefeuille (OCDE, 2015a). La règle de la prudence devrait pousser les caisses à mettre davantage l’accent sur la gestion des risques. Les institutions de plus petite taille affichent des performances inférieures (Swisscanto, 2018), ce qui pourrait les amener à prendre plus de risques même si elles ne possèdent pas l’expertise requise dans ce domaine. Une poursuite de la concentration des caisses de pension pourrait contribuer à atténuer ces risques, les caisses de plus grande taille pouvant consacrer davantage de ressources à la gestion des risques.
Le taux de couverture globale des caisses de pension (actifs exprimés en pourcentage des passifs), soit 105.5 % en 2018, est solide (CHS PP, 2019). Il s’inscrit en recul par rapport aux 110.9 % enregistrés en 2017 en raison de rendements négatifs. Les taux de couverture inférieurs à 100 % doivent être rendus publics et résorbés dans les cinq ans. Près de 30 % des fonds affichaient un taux de couverture inférieur à 100 % en 2018 selon la Commission. Les hypothèses de taux d’intérêt technique (ou taux d’actualisation) sont décisives, car elles déterminent les engagements et ont rapidement reculé ces dernières années. Bien que les taux d’intérêt techniques et les rendements promis ont diminué ces dernières années, ils restent supérieurs aux taux du marché. Ainsi, les taux d’intérêt techniques moyens sont revenus de 2.7 % en 2015 à 2.1 % en 2018. La part des caisses affichant un taux supérieur à 3 % était de 5 % en 2018, en recul par rapport aux 25 % enregistrés en 2016, alors que plus de 20 % d’entre elles utilisent un taux inférieur à 2 %. Les rendements promis sont en moyenne supérieurs de 0.6 point de pourcentage aux hypothèses de taux d’intérêt technique, ce qui porte à croire qu’ils restent trop élevés dans de nombreux fonds. Cela tient au niveau élevé du taux de conversion dans le système obligatoire (voir ci‑dessus). Les autorités de tutelle ont montré que 44 % des caisses étaient confrontées à un risque significatif de diminution des prestations futures (CHS PP, 2019).
La Commission a utilisé un taux d’actualisation de 2.1 % (correspondant à la moyenne des hypothèses de taux d’intérêt technique des caisses) pour mesurer les risques pesant sur le taux de couverture, et elle a observé que près de 30 % des caisses sont confrontées à des risques élevés ou moyens à élevés (CHS PP, 2019). Le taux d’actualisation devrait être fixé avec prudence et conformément aux conditions et attentes du marché (OCDE, 2016a). Les autorités de tutelle devraient mettre en place un cadre qui réglemente les hypothèses de taux d’intérêt technique pour éviter de fortes variations. En Finlande et aux Pays‑Bas, par exemple, tous les fonds utilisent le même taux d’actualisation, qui est arrêté par les autorités.
Le contrôle est actuellement exercé par des experts individuels, les cantons et les autorités de tutelle nationales. Leur rôle devrait être renforcé, comme le propose la Commission, pour remédier à la complexité croissante des caisses et améliorer leur transparence (CHS PP, 2019). Un système plus efficient et moins coûteux serait doté de normes nationales strictes et ne nécessiterait aucun contrôle de la part des cantons. Des simulations de crise pourraient être réalisées en utilisant, par exemple, des taux d’intérêt techniques différents, divers scénarios de recul des prix de l’immobilier et une longévité accrue. Les autorités devraient améliorer la collecte de données en termes de rapidité de transmission, de granularité et de couverture afin de mieux suivre les expositions, notamment à l’immobilier (FMI, 2019).
Qui plus est, certaines caisses de pension publiques bénéficient d’un traitement différent, et près de la moitié d’entre elles ont un taux de couverture inférieur à 80 %. Ces caisses bénéficient d’une garantie de l’État et ne sont guère incitées à corriger leur situation, ce qui représente un risque budgétaire. La toute dernière réforme a renforcé la réglementation à cet égard, en imposant à ces caisses de pension d’améliorer leur taux de couverture pour le porter au minimum à 80 % d’ici à 2050. Il est clair que ces caisses de pension doivent faire l’objet de réformes complémentaires. Dans l’idéal, il faudrait qu’elles soient recapitalisées et traitées comme des caisses de pension classiques.
Seule la moitié de l’ensemble des caisses a utilisé des tables de mortalité de génération en 2017 (CHS PP, 2019). Les tables de génération tiennent compte de l’évolution dans le temps des taux de mortalité par tranche d’âge, ce qui n’est pas le cas des tables périodiques. Ainsi, l’espérance de vie d’une personne née en 2017 est pratiquement supérieure de 10 ans selon la première approche. Généraliser les tables de génération permettrait d’améliorer l’évaluation des taux de mortalité. De plus, les taux de mortalité moyens sont supérieurs à ceux qui sont appliqués aux bénéficiaires du deuxième pilier, ce qui conduit à sous‑estimer plus encore les pensions qui seront servies à l’avenir par ce pilier (Lüske, 2015). Imposer une amélioration des tables de mortalité, comme c’est le cas dans de nombreux pays de l’OCDE, bénéficierait à l’ensemble des caisses (OCDE, 2014c).
Trouver l’équilibre entre les cotisations de retraite obligatoires et facultatives
Le niveau global de l’épargne, qui comprend l’épargne constituée en dehors du système de retraite, détermine l’adéquation des revenus durant la retraite. Le taux d’épargne des ménages suisses est le plus élevé des pays de l’OCDE (Graphique 2.13, partie A). En termes agrégés, du moins, les retraités semblent disposer d’une épargne conséquente, puisque le taux d’épargne ne comprend pas les cotisations du deuxième pilier (conformément aux conventions applicables aux comptes nationaux). Si on en tient compte, le taux d’épargne progresse dans le temps (partie B). De nombreux Suisses épargnent d’eux‑mêmes pour leur retraite (Encadré 2.5). Selon les estimations de Swisscanto (2018), le taux de remplacement global des deux premiers piliers était de 80 % environ sur la période 2008‑14 pour un travailleur gagnant un salaire moyen, soit plus que l’objectif de 60 % fixé par le gouvernement. Toutefois, les prestations de retraite servies par ces deux piliers ont reculé de 11 % en moyenne ces quatre dernières années (CHS PP, 2019). Compte tenu du risque de baisse du taux de remplacement futur pour les prestations de retraite du système obligatoire, l’épargne volontaire pourrait devenir essentielle pour préserver l’adéquation des revenus au titre de la retraite. Son importance est particulièrement grande dans un pays qui affiche l’un des taux de propriétaires occupants les plus bas, la propriété étant couramment utilisée pour réduire le montant des revenus nécessaires durant la retraite (Mudrazija et Butrica, 2017).
Encadré 2.5. L’épargne‑retraite facultative en Suisse
En Suisse, deux instruments sont destinés à encourager l’épargne‑retraite facultative :
Le deuxième pilier incite les travailleurs à verser des cotisations supplémentaires dites « surobligatoires » dans le cadre de leur plan de retraite professionnel. Selon l’Office fédéral des assurances sociales, environ 40% des actifs du deuxième pilier proviennent des contributions minimales inscrites dans la loi. Les cotisations font baisser les coûts d’exploitation des employeurs et le revenu imposable des salariés. Dans une caisse de pension, il n’existe pas de distinction entre les actifs du volet surobligatoire et ceux du volet obligatoire. L’un des dispositifs d’épargne (« 1e ») offre une gamme de placements plus étendue, mais il est réservé aux hauts revenus.
Un troisième pilier propose également des incitations fiscales afin d’encourager les cotisations aux plans d’épargne‑retraite gérés par les banques et les sociétés d’assurance. Le dispositif (« 3a ») plafonne les cotisations à 6 826 CHF par an pour les personnes dotées d’un plan du deuxième pilier ou à 20 % des revenus (dans la limite de 34 128 CHF) par an pour les autres (principalement des travailleurs indépendants). Les cotisations peuvent être déduites de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Le total des actifs a augmenté, passant de 5 % du PIB en 1995 à 15 % en 2017.
Les femmes touchent des prestations de retraite plus basses, car elles perçoivent des revenus inférieurs sur l’ensemble de leur carrière en raison d’un nombre d’heures travaillées moins élevé et de l’écart de salaire existant entre les femmes et les hommes, ainsi que des interruptions de carrière dues aux enfants. En 2017, les femmes représentaient 38 % des bénéficiaires du deuxième pilier et percevaient environ un quart de la prestation de retraite moyenne (d’après l’Office fédéral de la statistique). L’écart de retraite avec les hommes est élevé par rapport aux autres pays (Graphique 2.14). Les répercussions de l’emploi à temps partiel et l’écart de salaire femmes-hommes – 15 % pour le salarié médian à temps plein – est sensible dans le deuxième pilier en raison des intérêts composés. Améliorer la communication sur les droits à retraite permettrait de mieux faire connaître les conséquences du travail à temps partiel et des interruptions de carrière sur les revenus au titre de la retraite, favorisant ainsi une prise de décisions éclairées.
S’attaquer aux causes des revenus inférieurs des femmes doperait leurs revenus à la retraite. Ainsi, le manque de services abordables d’accueil des enfants limite l’emploi des femmes à temps plein (Thévenon, 2013). Un programme gouvernemental de 2003 visait à accroître l’offre de services de ce type. Bien que la situation se soit améliorée, le coût des services d’accueil des enfants reste élevé en Suisse (OCDE, 2017b). Les données concernant les coûts et les dépenses publiques sont insuffisantes. Des statistiques complètes sur l’accueil des enfants s’avèrent nécessaires, notamment pour comparer les coûts entre les cantons et trouver des moyens d’abaisser des coûts visiblement élevés. Le Parlement envisage de porter de 10 000 CHF à 25 000 CHF les déductions d’impôt liées à l’accueil des enfants dans le système fédéral de l’impôt sur le revenu. En 2018, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il dépenserait 100 millions CHF sur cinq ans pour doper les aides publiques infranationales en faveur des familles et l’offre de structures d’accueil des enfants. Cette mesure pourrait s’accompagner de mesures recommandées dans l’étude menée en 2014 par l’OCDE sur les politiques relatives au travail et à l’accueil des enfants, et notamment : développer l’offre de structures d’accueil des enfants ; faire en sorte que les horaires scolaires soient davantage compatibles avec la vie professionnelle ; et introduire pour les parents un droit limité dans le temps à l’emploi à temps partiel (OCDE, 2004).
Le taux d’épargne des ménages d’âge actif à faible revenu est négatif et il est proche de zéro pour le deuxième quintile (Graphique 2.15). Ces ménages risquent de percevoir, une fois à la retraite, des revenus inadéquats. À l’heure qu’il est, le taux de pauvreté monétaire des personnes âgées est élevé (19.5 %) et nettement supérieur à la moyenne de l’OCDE (13.1 %). Quoi qu’il en soit, la pauvreté monétaire est relative et le revenu moyen en Suisse est conséquent. De ce fait, la privation matérielle est faible (1.8 %) pour les plus âgés, nettement en‑deçà de celle des plus jeunes. En outre, le patrimoine des ménages peut remplacer les revenus, notamment lorsque le patrimoine retraite est retiré sous forme de capital. En effet, des travaux récents portent à croire que les plus âgés ne sont pas plus exposés au risque de pauvreté lorsqu’on tient compte à la fois des revenus et des actifs (liquides) (OFS, 2018). Néanmoins, quelque 7.5 % des retraités déclarent être confrontés à des difficultés financières, des femmes en particulier.
Les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse aident les retraités qui sont dans l’impossibilité de couvrir leurs besoins fondamentaux. Une réforme de 2019 a eu pour effet d’abaisser le plafond de patrimoine conditionnant l’accès à ces prestations complémentaires et relevé le montant maximal des loyers pris en compte, qui était inchangé depuis 2001. Procéder à des évaluations régulières de l’adéquation de ces prestations, portant notamment sur les seuils d’admissibilité et l’évolution du coût de la vie, permettrait de veiller au bon équilibre entre le rapport coût-efficacité, le ciblage et l’adéquation des prestations à mesure que la longévité augmente. L’adoption de mesures favorisant l’emploi des femmes et des catégories défavorisées les rendrait moins vulnérables au risque d’appauvrissement.
La progression du taux d’épargne du quintile de revenu supérieur – soit 8 points de pourcentage entre 2006 et 2014 – détermine l’augmentation de l’épargne facultative totale, ce quintile représentant environ les deux tiers de l’épargne totale (Graphique 2.15). Les incitations fiscales jouent un rôle important : pour une personne gagnant le quintuple du salaire moyen, le taux effectif d’imposition marginal sur l’épargne‑retraite privée est le taux négatif le plus bas des pays de l’OCDE, soit -90 % (OCDE, 2018b). L’avantage fiscal accordé augmente avec les revenus (Graphique 2.16). Les dernières estimations des dépenses fiscales résultant du régime fiscal des plans de retraite privés (qui portent uniquement sur 2007) étaient de 0.75 % du PIB, mais ce coût est plus élevé aujourd’hui (OCDE, 2018c). Les hauts revenus affichant déjà des taux d’épargne élevés, les autorités devraient revoir les incitations fiscales. Le plafond des déductions d’impôt sur les cotisations au deuxième pilier devrait être abaissé ; actuellement, le salaire assuré maximum est de 853 200 CHF (ce qui correspond à un salaire total de 878 085 CHF). De plus, les estimations relatives aux dépenses fiscales nettes (c’est‑à‑dire au manque à gagner sur l’IRPP) devraient être publiées régulièrement pour accroître la transparence entourant ces initiatives.
Allonger la durée de la vie active
Le phénomène du vieillissement en bonne santé a rendu caducs les âges de départ en retraite chronologiques, offrant ainsi la possibilité d’abandonner la norme des « trois âges de la vie » (études, vie active, retraite) pour poursuivre des objectifs professionnels différents (Gratton et Scott, 2016). Prolonger sa carrière permet aussi d’entretenir ses fonctions cognitives et de conserver une vie sociale active, et donc d’atténuer le risque de démence (Dufouil et al., 2014). L’allongement de la durée de la vie active facilite aussi la gestion des coûts économiques du vieillissement en alimentant directement la croissance, en allégeant les pénuries de compétences dans certaines professions, en limitant les dépenses publiques liées aux retraites et en accroissant les recettes fiscales. Il faut donc impérativement supprimer les obstacles et les contre‑incitations au maintien en activité pour faire reculer l’âge effectif de la retraite, y compris en déplaçant la charge fiscale qui pèse sur les revenus du travail.
Les taux d’emploi sont élevés jusqu’à l’âge de la retraite
Jusqu’à l’âge de 65 ans, les taux d’activité et d’emploi sont parmi les plus élevés des pays de l’OCDE, mais l’activité accuse une forte baisse au‑delà, en chutant sous la moyenne de l’OCDE (Graphique 2.17). Ces 20 dernières années, l’âge effectif de la retraite estimé a reculé dans les autres pays de trois ans environ, mais il est resté inchangé à 66 ans pour les Suisses (Graphique 2.18). L’âge de la retraite des Suissesses a augmenté de deux ans, mais moins que dans d’autres pays. Cela tient en partie au fait que les âges effectifs de la retraite étaient déjà élevés. Néanmoins, l’espérance de vie en Suisse est proche des chiffres les plus hauts dans l’OCDE. Cette constance relative tient pour une part à un taux de remplacement relativement important (Bütler, 2009 ; Leisibach et al., 2018). D’un point de vue prospectif, l’incertitude liée aux rendements futurs, le recul potentiel des prestations de retraite futures analysée ci‑dessus et les préoccupations quant au financement d’une retraite plus longue pourraient inciter certains travailleurs à retarder leur départ en retraite.
Environ 38 % de l’ensemble des travailleurs prennent leur retraite au moins un an avant l’âge légal (Graphique 2.19, partie A). C’est plus particulièrement le cas pour les hommes (40 % des travailleurs masculins), les salariés (43 % de l’ensemble des salariés) et le secteur de la finance et des assurances (65 % des travailleurs du secteur). Ce phénomène s’est estompé ces dix dernières années, mais il reste significatif. En 2018, 43 % des Suisses ne faisant pas partie de la population active et âgés de 55 à 64 étaient retraités, ce qui représentait près de 14 % de la population concernée (SECO, 2019). Cette situation s’explique en grande partie par les dispositifs du système de retraite (partie B). Les trois quarts des personnes en retraite anticipée touchent une retraite du deuxième pilier, avant même la date de leur retraite officielle. Le taux de retraite anticipée a augmenté de 16 points de pourcentage depuis le début des années 2000, en particulier pour les travailleurs les plus instruits, car ils bénéficient d’un taux de remplacement élevé (Dorn et Sousa-Pouza, 2005). Le taux de conversion des retraites atteignant à l’heure actuelle un niveau significatif (voir précédemment), les taux de remplacement sont suffisants pour partir prématurément à la retraite. Le recul attendu du taux de conversion incite aussi à percevoir plus tôt les prestations du deuxième pilier.
Faciliter les départs en retraite anticipée semble inéquitable d’un point de vue social et accroît l’exposition au risque de longévité. Les accords de branche (comme dans le secteur de la construction) et les prestations d’invalidité visent à lutter contre les inégalités de santé de manière plus ciblée. L’Allemagne, l’Autriche, la Belgique et la Finlande ont durci les règles, si bien que l’âge de la retraite anticipée a davantage reculé que l’âge normal de la retraite (OCDE, 2017e). L’âge minimum à partir duquel il est possible de partir en retraite au titre du deuxième pilier (soit 58 ans à l’heure qu’il est) pourrait être revu à la hausse pour être aligné sur celui du premier pilier (62 ans pour les femmes, 63 pour les hommes).
Le système de retraite n’incite pas les individus à rester en activité au‑delà de 65 ans. Dans le deuxième pilier, la loi statue que les cotisations ne sont pas obligatoires après 65 ans. Seuls certaines caisses de pension offrent la possibilité de reporter la perception des prestations de retraite, et un tel report n’est pas autorisé après 70 ans. Accroître les possibilités de continuer de cotiser serait bénéfique à ceux qui souhaitent majorer leurs droits à retraite. Dans le premier pilier, après 65 ans, les travailleurs continuent de verser des cotisations sur la partie de leur salaire qui dépasse 1 400 CHF par mois (soit un cinquième du salaire moyen), ce qui réduit les incitations à travailler pour la plupart des salariés. De plus, une personne rémunérée au salaire moyen qui reporte son départ en retraite de trois ans cotise actuellement à hauteur de 400 CHF par mois pendant ces années pour gagner quelque 400 CHF par mois ultérieurement (soit environ 400 USD par mois). Dans le cadre de la réforme des retraites proposée (analysée précédemment), il est envisagé de diminuer sensiblement ces revenus supplémentaires. Cette même réforme prévoit cependant également d’offrir aux individus la possibilité de compenser toute interruption dans l’acquisition des droits à la retraite en continuant à cotiser après 65 ans, ce qui renforcerait les incitations à rester en activité.
Les travailleurs seniors représentent généralement un coût plus élevé pour les employeurs. En Suisse, le montant des salaires est étroitement lié à l’ancienneté et peut être supérieur à la productivité (OCDE, 2014b). Ainsi, pour le même métier et le même secteur, un travailleur de 65 ans ayant 20 ans d’ancienneté dans une entreprise touche en moyenne jusqu’à 15 % de plus qu’une personne ayant un an d’ancienneté (d’après le calculateur national des salaires mis en place par le gouvernement). Le secteur public pourrait donner l’exemple. En 2007, la Finlande a finalisé un nouveau système de rémunération des fonctionnaires au moyen d’une convention collective qui renforce les liens entre le salaire, et les exigences professionnelles et les performances individuelles (OCDE, 2018d). La conférence nationale annuelle sur les travailleurs âgés, qui réunit les partenaires sociaux et autres parties prenantes, pourrait examiner les moyens permettant d’introduire une plus grande souplesse dans le système et d’accroître l’employabilité de ces travailleurs, notamment en supprimant les salaires liés à l’ancienneté. Cela resserrerait le lien entre l’évolution des salaires et celle de la productivité. Procurer davantage de formations aux seniors pourrait faciliter ce changement en les aidant à maintenir leur productivité.
De plus, les cotisations minimales au titre du deuxième pilier augmentent avec l’âge, et les employeurs en acquittent au moins la moitié. Les coûts salariaux peuvent s’alourdir considérablement à certains seuils (35, 45 et 55 ans) ; pour un salaire moyen, le taux de cotisation est multiplié par 2.5 entre 34 et 55 ans. La structure actuelle profite aux jeunes travailleurs qui peuvent être moins libres d’investir dans leur retraite future. La Suisse est toutefois le seul pays de l’OCDE à être doté d’un tel système obligatoire. Fixer un taux uniforme pour les cotisations patronales de sorte que seules les cotisations salariales s’accroissent au fil des ans réduirait cette contre‑incitation à recruter des travailleurs âgés tout en maintenant un taux progressif. Si le taux global des cotisations obligatoires reste bas, l’introduction d’un taux uniforme ne devrait pas avoir de répercussions sur l’emploi des plus jeunes. Une autre solution proposée par les partenaires sociaux envisage une structure aplatie composée uniquement de deux taux de cotisation (les cotisations étant versées pour moitié par les employeurs) (Encadré 2.4).
Un licenciement peut avoir des conséquences lourdes à un âge avancé. Bien que moins important qu’ailleurs en Europe, le taux de chômage est plus élevé pour les seniors moins instruits et les demandeurs d’emploi âgés sont aussi plus souvent confrontés au chômage de longue durée (Graphique 2.20). Pour ces derniers, le taux pour les 55-59 ans est même supérieur à la moyenne de l’UE. La proportion de chômeurs qui arrivent en fin de droits sans avoir retrouvé un travail croît aussi avec l’âge : si elle ressort à 23 % en moyenne, elle atteint 27 % et 31 % pour les 45‑54 ans et les 55‑64 ans, respectivement (SECO, 2019). Les offices régionaux de placement en Suisse expliquent que pour les personnes âgées de 50 ans et plus, les principales difficultés de retour à l’emploi sont : les préférences des employeurs ; le manque de confiance et de compétences des salariés en matière d’amélioration de leurs candidatures et de leur CV ; une spécialisation pointue ; l’absence de formation tout au long de la vie ; les salaires de réserve ; leur état de santé et leurs faibles compétences informatiques (Egger, Dreher & Partner AG, 2019). Le recours des 55‑64 ans à l’aide sociale est passé à 2.9 % en 2017, contre 2.2 % en 2011, mais il reste moins important que pour l’ensemble de la population (3.3 % en 2017).
En mai 2019, le gouvernement a lancé un train de réformes prévoyant des dépenses supplémentaires pour les politiques d’activation en faveur des travailleurs âgés (Tableau 2.4). Néanmoins, les dépenses moyennes consacrées aux programmes d’activation pour chaque chômeur resteront nettement inférieures à celles des principaux pays de l’OCDE (voir ci‑dessous). En Suisse, l’investissement dans les programmes du marché du travail ciblant les chômeurs diffère en fonction de l’âge et du canton, ce qui ouvre des perspectives de promotion des meilleures pratiques. La durée moyenne de ces programmes varie de 31 à 67 jours pour les plus de 50 ans, et de 30 à 115 jours pour les moins de 50 ans (Egger, Dreher & Partner AG, 2019). Compte tenu du profil des chômeurs, il faudrait également intervenir plus tôt, à l’âge de 50 ou de 55 ans. Ainsi, au Danemark, les chômeurs de plus de 50 ans peuvent bénéficier d’un programme d’activation dans les trois mois suivant la perte d’emploi, contre six mois en temps normal (OCDE, 2018e).
Tableau 2.4. Nouvelles mesures destinées à valoriser la main‑d’œuvre locale
Mesure |
Groupe cible |
Coût annuel (CHF) |
---|---|---|
Renforcer le préapprentissage d’intégration (actuellement ouvert aux réfugiés) et l’étendre aux immigrés sans diplôme du secondaire |
Réfugiés reconnus, personnes admises à titre provisoire, immigrés adolescents et jeunes adultes sans diplôme du secondaire |
15 millions / 13 000 par personne |
Programme pilote prévoyant le versement d’allocations d’initiation au travail aux employeurs qui recrutent des réfugiés ou des personnes admises à titre provisoire |
Réfugiés reconnus et personnes admises à titre provisoire dont le placement reste difficile |
3.8 millions / 12 000 par personne |
Analyse de la situation et orientation de carrière gratuites pour les travailleurs âgés de 40 ans et plus dans le cadre d’un projet pilote en 2020-21, qui sera étendu à l’ensemble des cantons sur la période 2021-24 |
Travailleurs âgés de 40 ans et plus |
6.6 millions pour le pilote 7.6 millions ensuite |
Reconnaissance cohérente des compétences existantes et des acquis dans le cadre de programmes de certification professionnelle afin de permettre aux adultes d’obtenir une qualification professionnelle de façon plus efficiente |
Adultes à partir de 25 ans |
0.6 million |
Financement supplémentaire accordé aux cantons pour permettre aux offices régionaux de placement de mieux aider les demandeurs d’emploi difficiles à placer |
Demandeurs d’emploi difficiles à placer, en particulier les seniors qui ne touchent pas d’allocations chômage |
62.5 millions |
Accès à la formation pour les demandeurs d’emploi âgés de plus de 60 ans en fin de droits |
Demandeurs d’emploi âgés de plus de 60 ans n’ayant pas retrouvé de travail une fois arrivés en fin de droits (environ 2 600 personnes) |
21 millions |
Prestation « transitoire » destinée aux chômeurs de 60 ans ou plus, à condition notamment que leur fortune soit inférieure à 100 000 CHF pour une personne seule et à 200 000 CHF pour un couple (résidence principale non prise en compte) |
Personnes sans emploi en fin de droits de 60 ans ou plus |
40 millions en 2022 / 230 millions en 2025 |
Note : Les montants indiqués ont été établis par la Confédération suisse aux prix de 2019.
Source : Confédération suisse (2019), Fiche d’information : mesures pour renforcer l’encouragement du potentiel de la main-d’œuvre en Suisse ; Prestation transitoire pour chômeurs âgés : ouverture de la procédure de consultation.
L’aide sociale ne doit pas constituer une passerelle vers la retraite anticipée. Le train de réformes de 2019 créera un nouveau régime de prestations destinées aux demandeurs d’emploi de plus de 60 ans, moyennant certaines conditions, relatives au patrimoine, notamment. Ce régime sera coûteux et réduira probablement les incitations à suivre une formation et à chercher un travail avant 60 ans ; il devrait être revu. À défaut, les conditions devraient s’étendre à une obligation de participer à une formation ou à un travail d’intérêt général, ou de poursuivre la recherche d’emploi. La prolongation de la durée de versement des allocations de chômage aux plus âgés (soit six mois de plus à 55 ans et quatre ans avant l’âge légal de la retraite) n’est pas recommandée non plus, comme l’explique OCDE (2019e). Le Danemark a supprimé un régime similaire en 2011. La prolongation des allocations chômage et des prestations transitoires permettra à une personne âgée de 58 ans d’attendre la retraite officielle grâce aux aides publiques et réduira les incitations à suivre une formation à un âge inférieur. En Finlande, la possibilité de toucher les allocations chômage de 61 ans jusqu’à l’âge légal de la retraite a entraîné une forte hausse du nombre de nouveaux chômeurs, puisque les employeurs ont tendance à licencier en priorité les travailleurs qui y ont droit et que ces travailleurs choisissent spontanément de recourir au « tunnel du chômage » (OCDE, 2018f).
Le régime d’invalidité sert aussi de passerelle vers la retraite. Les réformes passées ont permis de remettre sur le marché du travail des personnes en incapacité, parmi lesquelles les travailleurs âgés (OCDE, 2014b). Le nombre de bénéficiaires a diminué de 1.3% par an en moyenne de 2007 à 2017. Toutefois, un système parallèle d’allocations extraordinaires réservées aux ressortissants suisses qui remplissent presque les conditions pour avoir droit à l’allocation classique a augmenté de 3.2 % par an sur cette période. Les autorités devraient s’assurer que les critères d’ouverture des droits sont les mêmes pour tous.
Dans le contexte de la numérisation, de nouveaux outils, tâches et emplois apparaîtront avec le temps, requérant de nouvelles palettes de compétences, et donc une requalification et une amélioration des compétences au fil de la carrière, ainsi que des systèmes de formation des adultes adaptés (OCDE, 2019c). Les progrès technologiques pouvant réduire la demande physique d’emplois et les rendre plus flexibles, les travailleurs plus âgés devraient en bénéficier. Les offices régionaux de placement en Suisse insistent aussi sur l’importance de la formation tout au long de la vie pour diminuer le risque de chômage pour les travailleurs âgés et pour aider les offices à faire correspondre leur offre de formations et les besoins des employeurs (Egger, Dreher & Partner AG, 2019). Cela étant, les adultes peu qualifiés bénéficient souvent de moindres perspectives d’emploi à un âge avancé, puisque leurs compétences risquent davantage d’être dépassées et qu’ils ont tendance à moins participer à la formation continue (OCDE, 2017b). Les données d’Eurostat montrent qu’en 2018, environ 44 % des travailleurs ayant bénéficié d’un enseignement supérieur ont suivi une formation, ce qui est nettement plus élevé que dans les autres pays d’Europe. Mais le taux d’activité des travailleurs sans diplôme de deuxième cycle du secondaire n’était que de 11 %, ce qui est plus bas que dans les pays nordiques et en Islande.
En 2018, la Suisse a lancé un Programme de promotion des compétences de base sur le lieu de travail, qui cible les travailleurs moins instruits et inclut notamment l’acquisition de compétences informatiques, a compté quelque 1 500 participants la première année. S’il est efficace, il devra être développé. Le train de réformes de mai 2019 prévoit une orientation professionnelle et une évaluation des compétences gratuites après 40 ans pour l’ensemble des adultes, ce qui devrait contribuer à promouvoir l’accès à la formation pour les personnes qui en ont besoin. Des subventions et des chèques pourraient encourager les catégories ciblées à investir dans la formation (OCDE, 2017b). Une meilleure reconnaissance des compétences existantes grâce à la validation et à la certification permettrait d’abaisser les obstacles à la formation institutionnelle en Suisse (OCDE, 2014b). En 2019, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il procurerait aux cantons des lignes directrices et 3.2 millions CHF pour promouvoir la certification professionnelle, ce qui devrait améliorer la reconnaissance des compétences et favoriser la formation institutionnelle. La réussite passera par un contrôle et par une mise en commun des expériences des cantons.
Le taux de départs forcés à la retraite est relativement élevé en Suisse (Graphique 2.21). De plus, 6 % des offres d’emploi sont assorties de limites d’âge (Buchs et Gnehm, 2018). Il arrive aussi que les candidatures soient triées en fonction de l’âge. Les employeurs peuvent avoir des préjugés sur le recrutement des seniors (OCDE, 2014b). Le maintien en poste des travailleurs âgés dépend de la mise en balance de l’expérience, des transferts de connaissances et de la pénurie de compétences, avec les inquiétudes liées à la baisse de la productivité et la faculté d’adaptation. Cette perception négative des employeurs peut conduire à l’introduction d’une clause sur la retraite obligatoire dans les contrats ou à des départs forcés à la retraite. Les fonctionnaires, par exemple, doivent obtenir une prolongation de leur contrat à l’âge légal de la retraite pour pouvoir continuer de travailler. Si la Constitution rejette toute forme de discrimination, aucune loi n’empêche la discrimination en fonction de l’âge. Celle‑ci devrait être proscrite, comme c’est le cas dans tous les autres pays de l’OCDE (OCDE, 2018g). Pour être efficace, cette interdiction devrait être complétée par des mesures de mise en œuvre et des campagnes destinées à changer les normes sociales (OCDE, 2014b). En Suède, le Médiateur pour l’égalité est chargé de veiller au respect de la Loi sur la discrimination. Aux Pays‑Bas, les offres d’emploi sont passées au crible.
Des pénuries sont déjà apparues pour certaines professions et elles vont s’aggraver à mesure que les effets du vieillissement se feront sentir et que l’immigration ralentira, à moins que des évolutions de la culture et des pratiques sur le lieu de travail encouragent les travailleurs âgés à rester plus longtemps en activité. En 2019, les autorités ont organisé la cinquième conférence annuelle sur les travailleurs âgés. Celle‑ci a permis de faire mieux connaître les risques de pénurie, mais des campagnes plus directes pourraient contraindre les entreprises à faire face au vieillissement de la main‑d’œuvre et à mieux s’y préparer. De nouvelles formes de travail pourraient faciliter la mise en concordance des préférences et des compétences des seniors. L’exercice d’un travail moins physique ou d’une activité, de conseil, par exemple, à temps partiel pourrait faciliter les départs en retraite progressifs. L’adoption des nouvelles technologies pourrait favoriser le télétravail (en 2018, seuls 10 % des salariés étaient en télétravail en Suisse, contre plus de 30 % dans les pays nordiques) et réduire le travail physique. Les programmes de prévention en matière de santé et de sécurité améliorent aussi l’employabilité. La Suisse pourrait profiter de sa conférence annuelle pour établir un cadre similaire à la Strategy55+ espagnole. Cette stratégie, élaborée en 2011 après consultation des partenaires sociaux, propose des mesures préventives soutenues par la formation, l’information, des travaux de recherche et une évaluation des risques professionnels (OCDE, 2018h).
La Suisse a la possibilité de faciliter la transition vers la retraite via une flexibilité accrue sur le lieu de travail. Réduire le temps de travail pourrait permettre à certains de rester en activité, s’ils le souhaitent : en 2012, 9 % des seniors ont diminué leur temps de travail avant leur retraite, contre 17 % aux Pays‑Bas (selon les données d’Eurostat). Certains Suisses partis en retraite anticipée continuent de travailler : ils perçoivent habituellement une retraite à taux plein au titre du deuxième pilier et continuent de cotiser au premier. Selon une enquête précédente, 30 % d’entre eux sont dans ce cas, ce qui souligne l’importance de la retraite progressive (Dorn et Sousa-Poza, 2005). Les travailleurs qui restent en activité au-delà de 65 ans réduisent généralement leur temps de travail, qui correspond en moyenne à 84 % de celui d’un poste à temps plein entre 55 et 64 ans, et chute à 45 % pour les 65-69 ans (SECO, 2019). La perception de prestations de retraite partielles en cas de maintien en activité au‑delà de l’âge légal de la retraite ferait grimper le taux d’emploi après 65 ans : à l’heure qu’il est, cette possibilité est uniquement offerte par certaines caisses de pension, et pas par le premier pilier. En Autriche, par exemple, les retraités peuvent continuer de travailler et leurs retraites sont réévaluées chaque année (OCDE, 2017e). La proposition de réforme du premier pilier est la bienvenue à cet égard (Encadré 2.3).
Mettre en œuvre aujourd’hui tout un ensemble de réformes pourrait faire reculer l’âge effectif de la retraite et limiter les coûts économiques du vieillissement. Le ratio retraités-salariés progressera à un rythme rapide dans les prochaines décennies (Graphique 2.22, partie A). Selon les simulations de l’OCDE, la proposition du gouvernement de reporter l’âge de la retraite pour les femmes à 65 ans en 2026 aura un impact négligeable sur le ratio retraités‑salariés (partie B). Une réforme plus ambitieuse visant à repousser l’âge de la retraite à 67 ans d’ici le début des années 2030 puis de la moitié de l’allongement de la durée de vie pourrait faire baisser le ratio de 5 points de pourcentage en 2060. Un programme de réformes prévoyant également une majoration des dépenses consacrées aux politiques actives et aux réformes du marché du travail afin de reporter l’âge de la retraite de six mois pourrait faire grimper le taux d’emploi des travailleurs âgés de 8 points de pourcentage environ d’ici 2060 (pour le porter à 57 %, ce qui serait encore inférieur à celui de pays comme l’Islande ou le Japon dans les scénarios à long terme de l’OCDE). Il doperait aussi le PIB de 10 % en 2060, compensant ainsi les effets directs du vieillissement de la population (Graphique 2.2, partie A).
Les recettes viennent principalement de la fiscalité du travail à tous les niveaux de l’administration
La Suisse est davantage tributaire de la fiscalité directe, en particulier de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), que la plupart des pays de l’OCDE (Graphique 2.23). Mais l’imposition des revenus du travail agit comme une contre‑incitation au travail (Akgun, Cournède et Fournier, 2017 ; Arnold et al., 2011). Les cantons et les communes, qui supporteront l’essentiel des pressions sur les dépenses liées au vieillissement (Brändle, Colombier et Philipona, 2016), dépendent de l’IRRP pour 60 % et 66 % de leurs recettes fiscales, respectivement. Le vieillissement peut aussi exercer des pressions sur les recettes, imposant ainsi un relèvement des taux d’imposition. Les publications économiques traitant des effets du vieillissement sur les recettes sont relativement limitées et les résultats dépendent fortement des hypothèses de modélisation (Woodland, 2016). Le vieillissement pèsera probablement sur les recettes fiscales tirées des revenus du travail. Toutefois, les effets du vieillissement sur les recettes provenant de l’imposition des revenus du capital et de la consommation sont difficiles à prévoir (Nerlich et Schroth, 2018). En Suisse, les dépenses de consommation des ménages âgés sont généralement plus élevées, ce qui peut doper les recettes tirées des taxes sur la consommation.
Les précédentes Études de l’OCDE ont recommandé de réduire les distorsions du système fiscal suisse en déplaçant la base d’imposition de la fiscalité du travail vers une taxation plus indirecte, et en améliorant le dispositif des impôts sur les personnes physiques (OCDE, 2012). De telles réformes permettraient de mieux préparer les finances publiques aux difficultés à venir, et de doper la croissance. Les simulations calibrées pour la Suisse le montrent clairement : financer l’augmentation anticipée des dépenses de retraite par la fiscalité du travail pourrait entamer le PIB par habitant de 20 % à long terme, alors que relever la TVA et l’âge de la retraite réduirait cet impact de moitié (Encadré 2.6). Compte tenu des difficultés liées à la modification de la fiscalité en Suisse, ainsi que de la possibilité (ou la nécessité pour certaines taxes) d’un référendum, et des incertitudes considérables entourant les recettes futures, des prévisions et analyses relatives aux recettes devraient figurer dans les rapports réguliers du gouvernement sur la viabilité des finances publiques à long terme pour mieux informer sur la nécessité d’une réforme. Une telle réforme impliquerait aussi de modifier les formules de péréquation budgétaire utilisées pour répartir les recettes entre et dans les différents niveaux de l’administration.
Encadré 2.6. Simulation des avantages pouvant découler de réformes globales
Keuschnigg (2018) a effectué des simulations en utilisant un modèle à générations imbriquées calibré pour la Suisse. Il a étudié les effets du vieillissement sur les retraites, les prélèvements et les cotisations sociales, et fait ressortir le contraste existant entre les conséquences économiques d’un « scénario passif », prévoyant un alourdissement de la fiscalité du travail, et des réformes plus globales (Tableau 2.5). Une réforme visant à relever le taux de TVA de 4 points de pourcentage et l’âge de la retraite de 3 ans pourrait atténuer le caractère impératif d’un alourdissement de la fiscalité du travail, et réduire ainsi de moitié la baisse du PIB par habitant. Des réformes plus étendues destinées à faire progresser le taux d’emploi pourraient rendre inutile une augmentation de la fiscalité du travail.
Tableau 2.5. Simulation des effets de différentes réformes de la fiscalité et de la politique de retraite
Évolution à long terme par rapport à une situation initiale stable
|
Scénario passif (1) |
Financement par la TVA et recul de l’âge de la retraite (2) |
Financement par la TVA, recul de l’âge de la retraite et réforme des retraites (3) |
Toutes réformes confondues, contrôle plus strict des chômeurs et formation (4) |
---|---|---|---|---|
Fiscalité du travail (pts de %) |
7.1 |
1.9 |
0.5 |
0.1 |
Impôt implicite prélevé à la source (employeurs et salariés) (pts de %) |
5.9 |
0.9 |
-1.5 |
-1.8 |
Impôt effectif sur les heures travaillées (pts de %) |
9.7 |
2.0 |
-1.0 |
-1.2 |
TVA (pts de %) |
0.0 |
4.0 |
4.0 |
4.0 |
Heures travaillées (%) |
-1.6 |
-1.2 |
-0.8 |
-0.8 |
PIB par habitant (%) |
-19.9 |
-9.9 |
-7.5 |
-5.7 |
Note : La colonne 2 inclut un recul de l’âge de la retraite de 3 ans. La colonne 3 prévoit en outre une réforme des retraites, ayant pour effet de supprimer le plafond du premier pilier et d’interrompre l’accumulation des droits à retraite pendant les périodes de chômage. La colonne 4 prévoit aussi un contrôle plus strict des chômeurs et des investissements publics en faveur de la formation.
Source : C. Keuschnigg (2018), « Aging, Taxes and Pensions in Switzerland », dans R. Holzmann et J. Piggott (éditions), The Taxation of Pensions, MIT Press, Cambridge.
Il existe d’énormes possibilités en termes d’augmentation de la TVA. En Suisse, le taux normal de la TVA, soit 7.7 %, est actuellement l’un des deux plus faibles de l’OCDE et bien en deçà de la moyenne de l’OCDE, qui s’établit à 20 % (Graphique 2.24). Le gouvernement s’interroge sur un relèvement de ce taux depuis de nombreuses années, et il propose de l’augmenter de 0.7 point de pourcentage dans le cadre de la réforme des retraites prévue. Toutefois, il est apparu qu’il était difficile de le modifier, notamment parce qu’il est inscrit dans la Constitution et que tout changement doit être approuvé par référendum. En 2018, le taux de TVA a reculé, une augmentation antérieure étant parvenue à échéance. La TVA représente une base d’imposition efficiente, puisqu’elle n’a pas d’incidence sur les incitations à l’épargne, qu’elle crée moins de contre-incitations au travail que la fiscalité sur le revenu du travail et que les exportations sont soumises à un taux nul (la TVA n’est pas due, mais celle versée sur les intrants peut être récupérée). Selon une comparaison internationale, le taux actuel est vraisemblablement inférieur de plus de 10 points de pourcentage au niveau auquel des taux élevés auraient pour effet de réduire les recettes de la TVA (Akgun, Bartolini et Cournède, 2017). Les pertes dues à l’évasion et à la fraude fiscales semblent minimes : en 2016, les recettes collectées atteignaient presque 70 % des recettes potentielles (mesurées de manière approchée par la consommation et le taux normal), soit l’un des taux les plus élevés dans l’OCDE (OCDE, 2018i).
L’élargissement de l’assiette de la TVA conduirait à une augmentation des recettes, à une diminution des coûts d’administration et à une amélioration de l’efficience. Des taux réduits (2.5 % et 3.7 %) et des exonérations s’appliquent à un certain nombre de biens et de services. L’exemple d’autres pays de l’OCDE montre que l’application de taux réduits à des biens comme les magazines et les services culturels bénéficie de façon disproportionnée aux ménages à haut revenu (OCDE/KIPF, 2014). Les exonérations de TVA sont également inefficientes et peuvent produire des effets imprévus : ainsi, les exonérations sur les pesticides et les engrais encouragent sans doute leur surconsommation. Une étude de 2007 a montré que le taux normal pourrait être inférieur de 1.1 point de pourcentage si l’assiette de la TVA était plus large (CDF, 2007). On pourrait dissiper les inquiétudes liées à l’effet redistributif d’une telle mesure en allégeant l’impôt sur le revenu des ménages modestes, en créant des crédits compensatoires de cotisations de sécurité sociale, ou en étoffant et en ciblant mieux le subventionnement des primes d’assurance‑maladie obligatoire, ainsi que l’avait recommandé l’OCDE (2012).
Accroître les recettes provenant des impôts périodiques sur la propriété immobilière pourrait permettre un allègement de l’IRPP. Bien que les recettes des impôts immobiliers représentent environ 2 % du PIB, ce qui correspond quasiment à la moyenne de l’OCDE, leur composition diffère, les impôts périodiques sur le patrimoine occupant une plus grande place que les impôts périodiques sur la propriété immobilière (Graphique 2.25). Ces derniers sont particulièrement utilisés par les administrations locales dans d’autres pays. Si les impôts sur le patrimoine net peuvent contribuer à la réduction des inégalités, ils sont moins efficients que l’association d’impôts à large assiette sur les revenus du capital et de l’impôt sur les successions et les donations (OCDE, 2018j). En particulier, l’impôt sur le patrimoine génère des contre-incitations à accumuler des richesses et des incitations à pratiquer l’optimisation fiscale, et il peut faire baisser la production (Cournède, Fournier et Hoeller, 2018). L’exemple de la Suisse porte à croire que les ménages sont extrêmement sensibles à une augmentation même minime (0.1 %) du taux d’imposition, mais qu’ils préfèreront adopter des stratégies d’évasion fiscale que de déménager dans une autre juridiction (Brülhart et al., 2016).
Les impôts périodiques sur la propriété immobilière peuvent contribuer à alléger les pressions que fera peser le vieillissement sur les recettes des communes où l’évolution démographique sera plus rapide (Graphique 2.4). Ces impôts sont aussi difficilement évitables et la base d’imposition étant moins mobile que les revenus ou le capital, ils peuvent aussi limiter la concurrence fiscale. Les cantons devraient envisager de transférer la totalité de ces impôts sur la propriété aux communes. Bien que ces prélèvements puissent être impopulaires, ces réformes conféreraient davantage de souplesse aux autorités municipales pour résoudre leurs problèmes futurs en matière de dépenses. Il est possible de concevoir les hausses d’impôts sur la propriété immobilière de manière à en limiter les effets sur les ménages modestes, en particulier sur les personnes âgées, en mettant en place un mécanisme de paiement différé de l’impôt ou en recourant à des crédits spéciaux (Blöchliger, 2015). Puisqu’il est établi que l’impôt sur les successions n’a pas d’effet de distorsion et qu’il améliore l’égalité, les cantons pourraient déplacer une partie de l’impôt sur le patrimoine vers cet impôt (Akgun, Cournède et Fournier, 2017).
Un recours accru à la fiscalité verte pourrait générer des recettes supplémentaires et des incitations à développer une économie plus respectueuse de l’environnement. À l’heure qu’il est, ces prélèvements s’appliquent en quasi-totalité sur la consommation d’énergie et les véhicules à moteur. Ils ont représenté l’équivalent de 1.6 % du PIB en 2016, contre quelque 2 % dans le pays de l’OCDE moyen. Ils pourraient contribuer à faire baisser le coût environnemental du transport, qui représente 40 % des émissions de gaz à effet de serre dues à la consommation d’énergie. Les automobiles neuves suisses sont celles dont les émissions de CO2 sont les plus élevées de tous les pays de l’Association européenne de libre‑échange. La taxe fédérale sur les achats de véhicules est uniforme à l’heure actuelle, à l’exception des véhicules électriques. Établir un lien entre le taux et le niveau des polluants (CO2 et NOx inclus) renforcerait les incitations par les prix. Israël applique actuellement une taxe automobile en fonction de cinq polluants (OCDE, 2016b). Neuf cantons fixent aujourd’hui leurs taxes automobiles annuelles en fonction des émissions de CO2. Un remaniement de la structure fédérale pourrait aider d’autres cantons à créer un lien entre ces taxes annuelles et des voitures plus propres. D’autres taxes et contributions locales pourraient doper plus encore les recettes des autorités infranationales.
La tarification routière prend différentes formes. Un péage routier peu onéreux a été mis en place pour les voies rapides et les autoroutes, et les cantons peuvent demander à instaurer un péage routier pour un usage précis, comme la construction d’infrastructures. La redevance sur trafic des poids lourds semble avoir contribué au transfert du trafic routier vers le rail, mais il est encore possible de l’augmenter (OCDE, 2017f). L’instauration d’une tarification de la congestion, comme dans d’autres villes telles Londres ou Milan, peut réduire la circulation et la pollution de l’air. La tarification de la mobilité a fait l’objet d’un programme pilote en 2011‑15. Les autorités ont entrepris une analyse d’impact en prenant l’exemple du canton de Zoug. Étendre la couverture de la taxe de circulation kilométrique au‑delà des poids lourds et introduire des péages de congestion permettrait d’établir une tarification plus efficace de l’utilisation des infrastructures routières (FIT, 2018 ; OCDE, 2017f). Cela pourrait aussi compenser le fait que la tarification des carburants reflète de moins en moins les externalités négatives des embouteillages et de l’utilisation des infrastructures routières à mesure que les véhicules électriques gagnent en popularité (van Dender, 2019). Diminuer les avantages fiscaux associés à une voiture de société réduirait les incitations pour les salariés à toucher une partie de leur salaire sous la forme d’un véhicule, et donc le manque à gagner pour l’État. L’Examen environnemental de la Suisse de 2017 a exposé les avantages que présentent pour l’environnement l’élargissement de la taxe sur les composés organiques volatils aux faibles émetteurs, la suppression des exonérations de la taxe sur le CO2 et l’imposition de taxes plus élevées pour l’élimination des déchets (OCDE, 2017f).
Faire face au raffermissement de la demande de soins de santé et de longue durée
Le vieillissement de la population fera croître la demande de soins de santé et de longue durée. Les Suisses âgés sont en meilleure santé que leurs homologues de la plupart des autres pays de l’OCDE, grâce à des revenus supérieurs, à un mode de vie plus sain et à des soins de santé de qualité. L’espérance de vie à la naissance se classe en deuxième position au sein des pays de l’OCDE et les indicateurs de qualité sont supérieurs à la moyenne des pays de l’UE (OCDE/UE, 2018). Cela implique toutefois un coût plus élevé que dans des pays obtenant des résultats aussi bons (ou meilleurs) (Graphique 2.26, partie A). En outre, les dépenses de soins de santé ont progressé à hauteur de 1.4 % du PIB depuis 2009, alors qu’elles ont été maîtrisées dans les pays affichant des caractéristiques institutionnelles similaires – comme l’Allemagne ou les Pays‑Bas – et aux États‑Unis, seul pays de l’OCDE dont les dépenses sont plus importantes. Les ménages supportent l’essentiel de ces coûts : les dépenses restant à la charge du patient sont les plus élevées des pays de l’OCDE (partie B). Les ménages doivent également souscrire une assurance‑maladie auprès de prestataires privés, finançant ainsi près de 40 % des dépenses (Encadré 2.7).
Encadré 2.7. Principales caractéristiques du système de santé suisse
Le système suisse de soins de santé est fortement décentralisé, les 26 cantons assumant d’importantes responsabilités en termes de prestations de services, de contrôle des prestataires et de maîtrise de l’accessibilité économique (Tableau 2.6). Certains cantons ont délégué des responsabilités comme les soins de longue durée aux communes. Le nombre d’acteurs du système rend la coordination particulièrement importante. La Conférence des directeurs et directrices cantonaux de la santé assure la coordination intercantonale. Le Dialogue « Politique nationale de la santé » permet d’assurer la coordination de la politique entre les cantons et la Confédération.
Tableau 2.6. Principales caractéristiques du système suisse de soins de santé et de longue durée
|
Financement |
Prestations de services et autres responsabilités |
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Confédération |
Responsabilité légale du financement de l’assurance‑maladie obligatoire (LAMaI) Subventionnement de l’assurance‑maladie obligatoire des ménages à faibles revenus (avec les cantons) Versement d’une allocation de dépendance |
Responsabilité légale de la qualité des soins de longue durée, des produits pharmaceutiques et des dispositifs médicaux, de la santé publique, de la recherche et de la formation Immigration des professionnels de santé |
Cantons |
Prise en charge d’une part importante du financement de l’hospitalisation Subventionnement de l’assurance‑maladie obligatoire des ménages à faibles revenus Prise en charge des coûts résiduels des soins de longue durée liés à la santé Versement de prestations complémentaires à la pension de retraite Éventuellement, subventionnement de services d’assistance de longue durée |
Exécution des services, parfois de façon directe (majorité des hôpitaux, construction et coûts de de gestion des soins de longue durée, p.ex.) Coordination des activités de prévention et de promotion de la santé Diffusion et mise en œuvre de la législation Formation des professionnels de santé Fixation des tarifs en cas de désaccord entre prestataires et assureurs |
Communes |
Variable d’un canton à l’autre |
Dans certains cantons, gestion des établissements médicalisés ou sous-traitance de ces services |
Assureurs / associations d’assureurs |
Négociation des tarifs avec les prestataires (le cas échéant) |
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Assurés |
Participent généralement au financement des prestations couvertes dont ils bénéficient en payant un montant fixe, qualifié de « franchise », ainsi qu’une fraction des coûts dépassant cette franchise, la « quote-part ». Pour les soins de longue durée, la participation financière des patients est plafonnée à 20 % de la contribution des assureurs‑maladie. Les coûts des soins de santé et de longue durée non couverts par l’assurance, notamment les frais de logement et d’entretien dans le cadre des soins de longue durée |
Prestations de services d’assistance non professionnels pour les proches |
La loi la plus importante est la Loi Fédérale sur L’Assurance-Maladie (LAMal). En 1996, elle a introduit une couverture maladie universelle via une assurance-maladie obligatoire, les primes d’assurance étant subventionnées pour les bénéficiaires de l’aide sociale, les enfants et certains ménages à faibles revenus, et a élargi le périmètre des prestations couvertes. Elle visait aussi à maîtriser des coûts en progression. Les assurés font leur choix parmi des assureurs‑maladie concurrents, qui ne sont pas autorisés à réaliser des bénéfices sur leur activité d’assurance-maladie de base. Les primes d’assurance sont fixées selon une tarification uniforme et en fonction de l’âge (trois tranches), du sexe et du canton, moyennant une péréquation des risques entre les assureurs pour compenser les différences de profil de risque des assurés. Les assureurs peuvent réduire les primes en proposant des franchises plus élevées, dans une certaine limite. Les plans d’assurance maladie sous gestion, qui restreignent l’accès à un réseau donné de prestataires, se sont multipliés.
Source : I. Sturny (2017), The Swiss Health Care System, International Health System Profiles, The Commonwealth Fund ; S. Boes, S. Mantwill et T.K. Wicki (2018), The Health Systems and Policy Monitor: Switzerland, European Observatory on Health Systems and Policies ; OCDE/OMS (2011), Examens de l’OCDE des systèmes de santé : Suisse 2011.
La Stratégie Santé2020 du gouvernement, lancée en 2013, vise à relever les défis liés au vieillissement et à la hausse des coûts, et à recentrer le système sur la population. Toutefois, la multitude de parties prenantes, dont les 26 cantons, complique la réforme (Tableau 2.6). Les soins de longue durée sont encore plus complexes, car certains services ne relèvent pas du système de soins de santé et sont financés par les usagers. Le financement et les prestations de services seront soumis à des difficultés à mesure que la demande augmentera (Conseil fédéral, 2016).
Le vieillissement va alourdir les coûts et creuser les inégalités
Le coût moyen des soins de santé augmente fortement pour les plus âgés (Graphique 2.27). En 2016, un cinquième environ des dépenses étaient réalisées par les 4 % de la population âgés de plus de 80 ans, en raison du coût élevé des soins de longue durée, dont les soins palliatifs. Toutefois, des facteurs non démographiques expliquent l’augmentation des dépenses par habitant (Lorenzoni et al., 2019). Il s’agit notamment de la hausse des revenus, des retombées de la progression des salaires réels dans d’autres secteurs de l’économie qui connaissent un accroissement plus rapide de la productivité et des avancées technologiques qui stimulent la demande. Une analyse structurelle-résiduelle menée pour la Suisse confirme que l’évolution démographique explique moins d’un cinquième de l’augmentation des dépenses réelles de soins de santé par habitant sur la période 2011‑16. Quoi qu’il en soit, le nombre croissant des personnes âgées va faire grimper les dépenses globales dans les années qui viennent. Conjugué à des besoins variables, ce phénomène dopera la demande de soins de longue durée, comme expliqué ci‑dessous.
Selon des projections simplifiées des dépenses publiques de santé qui prennent en considération la part que représente la population âgée ainsi que les évolutions non démographiques, ces dépenses augmenteront de 0.4 point de pourcentage du PIB d’ici à 2030 et de 1.1 point d’ici à 2060 (Graphique 2.28). Ces projections sont en deçà de projections nationales plus précises, selon lesquelles ces dépenses devraient s’accroître de 0.7 point de pourcentage du PIB d’ici à 2030 (Brändle et Colombier, 2017). Des réformes plus ambitieuses visant à renforcer l’efficience économique des soins en tenant compte des efforts passés ou à réduire la demande pourraient alléger les dépenses publiques et la pression exercée sur les ménages (scénarios 1 et 2). En revanche, une hausse moins soutenue de la productivité dans la santé par rapport à l’ensemble de l’économie alourdirait le coût induit par les dépenses de soins de santé (scénario 3). Ces scénarios mettent en évidence l’importance des politiques destinées à contenir la demande et le coût des soins en plaçant la Suisse sur la trajectoire d’un vieillissement en bonne santé.
La maîtrise des coûts gagne en importance, car leur progression accroît la pression financière pesant sur les ménages. La hausse de la prime moyenne d’assurance‑maladie obligatoire et des dépenses à la charge des patients est depuis longtemps supérieure à l’inflation (Graphique 2.29, partie A). Les primes d’assurance‑maladie obligatoire représentaient 8.4 % de la consommation des ménages en 2017. Les dépenses à la charge des patients ont atteint 6.8% de la consommation des ménages en 2016, et jusqu’en 2017, elles ont augmenté plus vite que dans les autres pays où ces dépenses étaient également fortes (partie B). Des coûts élevés pèsent sur l’accès aux soins : 22 % des répondants suisses ont dit avoir rencontré des difficultés à cet égard dans leur accès aux soins médicaux au cours de l’année précédente, contre 17 % des Français et 7 % des Allemands (Schneider et al., 2017). Parmi les bas revenus, cette proportion était de 30 %. Les Suisses ont renoncé à des soins ou examens dentaires dans des proportions similaires en raison des coûts ; les soins dentaires ne sont pas pris en charge par l’assurance‑maladie obligatoire. Des données d’enquête nationales laissent cependant à penser que ces proportions étaient nettement plus faibles parmi les personnes ayant besoin de soins, 3.3 % des répondants ayant indiqué avoir été privés de soins médicaux ou dentaires nécessaires pour des raisons financières. Néanmoins, négliger des examens et des traitements peut entraîner une détérioration de l’état de santé et creuser les inégalités par la suite, en particulier si cela pèse sur l’activité professionnelle (OCDE, 2017d). Une détection plus tardive des pathologies accroît aussi les tensions sur les coûts.
Les primes d’assurance-maladie obligatoire accentuent les inégalités, car elles sont uniformes et font donc peser une charge plus lourde sur les ménages à bas revenu et à revenu intermédiaire, même si l’on tient compte des subsides octroyés (Ecoplan, 2018). Le coût des primes d’assurance a progressé plus vite que les subsides sur la période 2011-17. L’Enquête sur le budget des ménages montre qu’un ménage moyen a consacré 6.2 % de ses revenus à l’assurance obligatoire. Toutefois, les simulations d’Ecoplan (2018) portent à croire que cette proportion est nettement plus élevée pour un ménage aux revenus modestes ne bénéficiant pas de l’aide sociale. Les cantons sont tenus par la loi de prêter assistance aux bénéficiaires de l’aide sociale, aux enfants et aux jeunes adultes suivant des études, mais ils jouissent d’une liberté considérable quant à la fixation du montant des subsides ainsi que des critères d’attribution, ce qui conduit à de profondes différences dans les subsides moyens (Graphique 2.30, partie A). Les faibles revenus sont protégés dans tous les cantons, mais l’assurance peut coûter à un retraité percevant un revenu intermédiaire jusqu’à un cinquième de son revenu (partie B). Crivelli et Salari (2014) montrent aussi que le système est régressif à l’échelle cantonale, à des degrés divers selon les cantons. Depuis 2011, la charge pesant sur les revenus modestes semble s’être alourdie (Ecoplan, 2018). Certains cantons ont réduit le montant de leurs subsides en raison des pressions financières auxquels ils sont eux‑mêmes soumis. Début 2019, toutefois, le Tribunal fédéral a empêché Lucerne de minorer encore ses subsides, les soins de santé étant devenus inabordables.
Conscient de la charge que représente la hausse du coût des soins de santé, le gouvernement envisage de prendre de nombreuses mesures de maîtrise des coûts, analysées dans la section suivante. Les primes à la charge des assurés seraient ainsi réduites en améliorant le marché de l’assurance‑maladie. Les plans d’assurance‑maladie sous gestion, qui restreignent le choix de prestataires de services offert aux patients, se sont multipliés, passant de 7 % du marché en 2000 à 64 % en 2017. Ce système a déjà permis de réduire le recours abusif aux soins de santé et généré des économies de coûts substantielles (Kauer, 2016). Un mécanisme de péréquation des risques prévoit des transferts de fonds entre sociétés d’assurance afin de corriger les effets de sélection, mais sans prendre en considération de nombreux facteurs de risque (OCDE, 2015b). Tenir compte d’un plus grand nombre de facteurs favoriserait l’instauration d’une concurrence réelle et loyale. Plus généralement, les primes d’assurance pourraient être minorées en restreignant le panier de prestations à l’aide d’un critère d’efficacité économique plus strict. La plupart des pays de l’OCDE, par exemple, ne couvrent pas les médecines alternatives comme l’homéopathie. Cela peut néanmoins être difficile à mettre en œuvre. Pour réduire la régressivité du système, les cantons devraient travailler avec le gouvernement fédéral à la création d’un cadre national qui établisse un lien entre les subsides et le revenu imposable et protège convenablement les plus démunis. Un système simplifié serait également moins coûteux en termes de gestion (OCDE/OMS, 2011).
La maîtrise des coûts est une priorité dans le secteur des soins de santé
Les précédentes analyses du secteur suisse de la santé réalisées par l’OCDE ont mis en évidence la marge de manœuvre considérable dont dispose le pays pour accroître l’efficience et l’efficacité économique sans sacrifier la qualité, en améliorant l’efficacité économique des traitements, en réduisant la fragmentation, en éliminant les doublons et en favorisant la prévention (OCDE/OMS, 2011 ; OCDE, 2015b). Selon des travaux empiriques comparatifs récemment menés à l’échelle internationale, les modèles de paiement à l’acte et le libre choix des patients – qui sont propres au système suisse – seraient associés à des dépenses supérieures (Lorenzoni et al., 2018b ; de la Maisonneuve et al., 2016 ; Fall et al., 2014). Les prix des prestations hospitalières sont pratiquement deux fois plus élevés que la moyenne de l’OCDE (+92 %) (Lorenzoni et Koechlin, 2017). Il faut absolument améliorer la tarification et les incitations. Les réformes récentes remédient en partie à ces difficultés. Ainsi, depuis 2019, l’assurance-maladie couvre uniquement les traitements ambulatoires pour certaines interventions standard (les amygdalectomies, par exemple, ne sont assurées qu’en cas de chirurgie ambulatoire). En 2017, des comparaisons internationales triennal des prix des produits pharmaceutiques ont repris, incorporant des comparaisons coût-bénéfice avec d’autres produits ainsi que d’autres comparaisons internationales de prix. Cela a conduit à des baisses de prix.
En réponse aux conclusions d’un groupe d’experts mandatés, le gouvernement a l’intention d’introduire deux nouveaux trains de réformes afin de maîtriser les coûts. Le premier vise à réduire les coûts des prestations hospitalières, à intensifier les incitations par les prix dans les soins ambulatoires et à abaisser les prix des spécialistes et des médicaments. Les assureurs devant rembourser les interventions effectuées dans tous les hôpitaux agréés par les cantons, le projet d’accorder aux assureurs le droit de faire appel des décisions cantonales peut atténuer le problème né du fait que les cantons ne tiennent pas toujours compte des coûts lors de l’agrément des hôpitaux (OCDE, 2015b). Le gouvernement a aussi l’intention de créer un organe indépendant chargé de fixer les tarifs des spécialistes. La mise en place d’un système de prix de référence pour le remboursement des médicaments génériques a été proposée (ainsi que l’avait recommandé l’OCDE). Ces réformes devraient être mises en œuvre. Une autre proposition vise à harmoniser le financement des soins hospitaliers et ambulatoires. Dans le système actuel, la prise en charge du coût des soins hospitaliers est assurée à la fois par les autorités cantonales et par les assureurs, mais les cantons ne contribuent pas au financement des soins ambulatoires. Si elle se concrétisait, l’harmonisation proposée réduirait les incitations à procéder à des transferts de coûts.
Un deuxième train de réformes prévoira sans doute des objectifs de coûts concernant la croissance des dépenses de l’assurance-maladie obligatoire. Le but est d’inciter les principaux acteurs, notamment les assureurs et les prestataires de services, à réaliser des gains d’efficience en les responsabilisant davantage en termes de coûts. La fixation de plafonds budgétaires et d’objectifs en matière de coûts a été associée à une maîtrise plus efficace des dépenses dans certains pays, dont l’Allemagne et les Pays-Bas, et dans certaines circonstances (Brändle et al., 2018 ; de la Maisonneuve et al., 2016 ; Pisu, 2014). Toutefois, les résultats de comparaisons internationales sont plus contrastés (de la Maisonneuve et al., 2016), ce qui, conjugué au risque d’attente et de transfert de coûts, souligne l’importance de la conception du système. Il est sans doute important d’associer les parties prenantes à cette conception en Suisse (Brändle et al., 2018).
Les propositions de réforme des soins curatifs et des dépenses de médicaments renforceront les signaux des prix dans le système. Les soins curatifs ont été l’un des moteurs de la hausse des dépenses sur la période 2011‑16. Il est encore possible d’aller plus loin dans les réformes. La Suisse compte davantage de lits d’hôpital par millier d’habitants que la plupart des pays de l’OCDE – soit 4.6, la médiane des pays de l’OCDE ressortant à 3.8. Dans deux cantons, le taux est deux fois plus élevé que la médiane nationale. On a également observé des différences considérables entre les cantons dans le traitement d’une même intervention en tant que soin hospitalier ou soin ambulatoire (Obsan, 2019). Cela semble indiquer qu’il est possible de recourir davantage aux soins ambulatoires. Encourager les patients à se faire soigner hors de leur canton aurait pour effet d’accroître la concurrence et la flexibilité au sein du système. Favoriser le regroupement des hôpitaux et intensifier la coopération entre les cantons pourrait générer des économies d’échelle et de gamme. De même, renforcer l’analyse comparative des interventions hospitalières, comme recommandé précédemment (OCDE, 2015b), permettrait de réduire les différences notables existant au sein du système et de minorer les coûts.
Le faible recours aux génériques et aux médicaments biosimilaires montre qu’il est possible de réaliser des économies considérables dans les dépenses de médicaments sans compromettre le bien‑être des patients (Graphique 2.31). Les dépenses de médicaments par habitant arrivent en deuxième position dans les pays de l’OCDE (après les États‑Unis). D’après Santésuisse/Interpharma (2018), le prix des génériques était deux fois plus élevé que dans les pays comparables en 2017. Selon ses estimations, le fait de permettre aux assureurs de rembourser un prix fixe basé sur les principes actifs aurait pu générer des économies de 400 millions CHF en 2017 (soit 3.6 % des dépenses totales de médicaments et de produits thérapeutiques). D’après les estimations présentées dans une récente analyse d’impact de la réglementation, des économies de 190 à 480 millions CHF (suivant le modèle utilisé) pourraient être réalisées (Polynomics/Interface/Université de Bâle, 2018). Il conviendrait de finaliser l’instauration du système de prix de référence. Les médecins devraient être encouragés à prescrire des médicaments en utilisant les dénominations communes internationales, comme c’est le cas aux Pays‑Bas.
Les données sur les soins de santé peuvent améliorer la coordination des soins, ainsi que leur efficience, mais à cet égard, la Suisse accuse un retard par rapport aux autres pays (Oderkirk, 2017). Après avoir pris du retard, l’introduction des dossiers électroniques des patients est en cours. Ceux‑ci pourraient permettre d’éviter de réaliser deux fois le même examen et d’améliorer les traitements, ce qui est plus important au vu de l’augmentation du nombre de patients atteints d’affections chroniques multiples ou de démence (OCDE/UE, 2013). Les cantons sont chargés de la mise en place de ces dossiers, à condition de respecter les protocoles nationaux d’interopérabilité. Le gouvernement fédéral devrait renforcer les incitations financières à rejoindre des réseaux existants plus importants (« communautés ») pour éviter les infrastructures informatiques redondantes. Une récente fuite de données a souligné la nécessité de renforcer la surveillance du système de stockage des données.
La participation dans le nouveau système est obligatoire pour les hôpitaux et les établissements médicalisés. Mais elle est facultative pour la plupart des professionnels de santé et des patients, et des études pilotes ont mis en évidence le risque que les prestataires de soins ambulatoires n’y prennent pas part (De Pietro et Francetic, 2018). Ces risques nuisent à l’utilité du système. Des incitations financières devraient être utilisées pour inciter les prestataires de soins de santé à adhérer à ces réseaux, comme c’est le cas dans d’autres pays de l’OCDE (Oderkirk, 2017). De même, des sanctions devraient être imposées pour garantir la qualité des données. Si cela se révèle inefficace, il faudra peut‑être rendre les dossiers électroniques obligatoires. Le gouvernement devrait promouvoir le système auprès des professionnels de santé et des patients et s’assurer de leur confiance, notamment en veillant à la sécurisation des données. Un meilleur usage des données disponibles pour le contrôle et l’évaluation rapprocherait davantage la Suisse des meilleures pratiques (Oderkirk, 2017).
Les soins préventifs font partie d’une stratégie visant à assurer un vieillissement en bonne santé, à maîtriser les coûts et à prévenir les inégalités du vieillissement (OCDE, 2017d). La stratégie lancée par le gouvernement en 2018 sur la prévention des maladies non transmissibles doit permettre de mieux ancrer la prévention dans les autres soins de santé, d’améliorer la coopération et d’augmenter le financement. Les pathologies comme la maladie d’Alzheimer et autres formes de démence induisent d’énormes coûts humains et financiers (OCDE, 2018k). La démence devrait toucher 9 % des plus de 60 ans en 2060, un des taux les plus élevés en Europe (OCDE/UE, 2018). Il est de plus en plus manifeste que les facteurs de risque sont similaires à ceux des autres maladies non transmissibles – dont l’obésité, le manque d’activité physique, l’hypertension, le tabac – et que la prévention peut être efficace (OCDE, 2018k).
Le budget de la prévention dans le domaine de la santé est limité et son efficacité entravée par la décentralisation, malgré l’existence de programmes locaux de qualité (OCDE, 2015b). Compte tenu des économies potentielles, les dépenses devraient être accrues et ciblées, notamment pour les maladies qui risquent le plus d’avoir des effets défavorables sur le marché du travail (OCDE, 2017d ; Devaux et Sassi, 2015). Il importe également d’assurer l’offre de généralistes, compte tenu des départs en retraite à venir. Il pourrait être utile d’atténuer les écarts de rémunération avec les autres spécialistes et d’assouplir les contraintes de temps de travail dans la médecine générale (OCDE, 2017g). Relever les droits d’accise sur le tabac pourrait contribuer à faire reculer un taux de fumeurs relativement élevé.
La fragmentation du système des soins de longue durée crée des inégalités et des inefficiences
Les soins professionnels de longue durée dispensés à domicile et en établissement médicalisé sont fortement développés, 22 % des Suisses âgés de 65 ans ou plus ayant bénéficié de soins de longue durée en 2017. C’est le taux le plus élevé parmi les pays de l’OCDE affichant des données comparables (Graphique 2.32, partie A). Les trois quarts de ces patients ont bénéficié de soins à domicile, généralement par l’intermédiaire de « Spitex », une association regroupant des prestataires de soins et d’assistance. Ces 20 dernières années, on a observé un transfert des soins dispensés en établissement, dont le niveau était précédemment relativement élevé en Suisse, vers les soins à domicile. Une réforme de 2011 a changé le financement des soins prescrits par un médecin. La couverture d’assurance est restée toutefois la même. En outre la réforme a favorisé l’accès aux prestations complémentaires pour les patients en établissement médicalisé et garanti une « allocation de dépendance » aux patients ayant des besoins « modérés » (cette allocation étant précédemment réservée aux personnes ayant des besoins plus importants).
La nécessité de renforcer la coordination est largement reconnue (Conseil fédéral, 2016). Le financement des soins de longue durée est plus fragmenté que celui d’autres types de soins de santé, les services d’assistance ne se limitant pas à la santé (Encadré 2.8). Le financement provient pour l’essentiel des autorités infranationales, de l’assurance‑maladie obligatoire et des ménages (Tableau 2.7). Les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse versées sous conditions de ressources financent une part importante des soins en établissement. Le gouvernement fédéral et les autorités infranationales subventionnent également les prestataires comme Spitex et les organisations du secteur associatif. L’aide financière est apportée au moyen d’une « allocation de dépendance » fondée sur trois niveaux de soins et de prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse versées sous conditions de ressources pour financer les séjours en établissement médicalisé. Des organisations sans but lucratif et à but lucratif dispensent également des soins. Les tenants de l’extension aux soins de longue durée de la réforme en faveur d’un financement uniforme (des soins hospitaliers et ambulatoires) citée précédemment font valoir qu’elle permettrait de renforcer l’intégration du système et de réduire l’alourdissement des coûts (CDS, 2019).
Tableau 2.7. Le financement des soins de longue durée est fragmenté
% des dépenses totales de soins de longue durée, 2017
|
Soins en établissement |
Soins à domicile |
---|---|---|
Cantons |
16.3 |
10.0 |
Communes |
7.9 |
7.2 |
Assurance-maladie obligatoire |
14.2 |
35.5 |
Assurance sociale (pensions de vieillesse et d’invalidité) |
4.0 |
21.8 |
Prestations complémentaires, pensions d’invalidité complémentaires au titre de la pension de vieillesse et autres aides sociales |
21.0 |
1.3 |
Ménages |
35.5 |
19.9 |
Autres, dont assurance privée |
1.0 |
4.2 |
Éléments pour mémoire : Dépenses annuelles, millions de CHF |
13 376 |
2 566 |
Note : Ces données ne prennent pas en compte les subsides pour les primes d’assurance-maladie versé aux ménages par les administrations fédérale et cantonales.
Source : Office fédéral de la statistique.
Encadré 2.8. Types de soins de longue durée et d’établissements
Les soins de longue durée comprennent tout un éventail de soins médicaux, de soins à la personne et de services d’assistance fournis pour soulager la douleur et gérer la dégradation de l’état de santé des personnes en situation de dépendance à long terme.
En Suisse, la loi sur l’assurance‑maladie établit une distinction entre les soins médicaux et les autres aides. Les soins palliatifs, les soins médicaux de longue durée et les services à la personne (prise des repas, toilette, habillage) qui sont prescrits par un médecin et assurés par une infirmière sont couverts par l’assurance‑maladie obligatoire. D’autres soins de longue durée tels l’aide aux tâches comme la cuisine, le ménage et la prise des médicaments (« actes élémentaires de la vie quotidienne ») ne sont pas couverts par l’assurance‑maladie, mais peuvent donner lieu à une aide cantonale. Ces définitions correspondent globalement aux soins de longue durée « de santé » et « sociaux » dans les comptes de la santé.
Les établissements de soins de longue durée sont des structures de soins médicalisées et d’hébergement proposant à la fois hébergement et soins de longue durée. Il s’agit d’établissements spécifiquement conçus à cette fin, de structures d’accueil avec prestations d’assistance où les patients peuvent vivre dans des appartements privés, ou de structures de type hospitalier. La composante essentielle des services fournis doit correspondre à des soins de longue durée. Le caractère limité des données restreint quelque peu les possibilités de comparaison entre les pays. Les données relatives aux établissements de soins de longue durée en Suisse comprennent uniquement les établissements médicalisés.
Source : OCDE (2018), Statistiques de l’OCDE sur la santé 2018 : Définitions, sources et méthodes ; sources nationales.
Le montant de l’aide financière accordée pour les soins à domicile varie selon les cantons. Pour les services d’assistance et de soins couverts par la loi sur l’assurance‑maladie, comme l’aide à l’habillage et à la prise des repas, les assureurs versent une contribution fixe, qui dépend des soins, définie dans la loi. Le coût final pour le patient est plafonné à 20 % de la contribution de l’assureur, les cantons et communes prenant le solde en charge. Dans les cantons où la contribution des patients est moins élevée, le recours aux soins à domicile est plus fréquent (Graphique 2.32, partie B). Il n’est pas aisé de démêler les relations de cause à effet, car l’histoire et les préférences locales jouent aussi un rôle, les soins en établissement étant plus courants dans les régions germanophones (Dutoit, Füglister‑Dousse et Pellegrini, 2016 ; Cosandey et Kienast, 2016). On a toutefois observé une certaine convergence : entre 2014 et 2017, c’est dans les cantons où il était le plus marqué que le recours aux établissements a le plus reculé. Les autres types de soins, comme l’aide à la préparation des repas ou le ménage, sont en premier lieu des dépenses à la charge des patients.
Dans le système actuel, les soins à domicile peuvent vite devenir inabordables. Cela s’explique en partie par le fait que les patients en soins de longue durée qui ont des besoins faibles à modérés doivent bénéficier de soins qui ne sont pas assurés. Pour un retraité fictif vivant à Zurich et ayant des besoins modérés (tel que défini dans Cravo Oliveira Hashiguchi, Ortega Regalado and Llena-Nozal, 2020), les prestations couvriraient 60 % du coût des soins à domicile, un taux similaire à celui de la France, mais moins généreux que dans bien d’autres systèmes. La couverture semble moins élevée à Bâle. Dans cet exemple, le montant élevé à la charge des patients relativement à leur revenu disponible implique que sans accès à des soins informels ou à moins de vendre des actifs financiers, la plupart des retraités dans ces deux études de cas n’auraient pas les moyens de payer ces soins à domicile. Cela crée des incitations à aller en maison médicalisée, où l’aide financière est plus élevée.
Des soins de santé inaccessibles peuvent pousser les patients ayant de faibles besoins vers les maisons médicalisées. En 2014, la moitié des patients en établissement médicalisé percevaient des prestations complémentaires (Cosandey et Kienast, 2016). Toutefois, 30 % des patients avaient besoin de moins d’une heure de soins par jour. Ce taux variait de 9 % à Genève à 39 % à Zurich et 49 % à Glaris (ibid.). Puisque les patients préfèrent souvent rester chez eux aussi longtemps que possible et que les soins en établissement sont plus onéreux, cela montre que l’on peut améliorer à la fois le bien-être des patients et l’efficacité économique.
Étendre les aides financières à certains services d’assistance pourrait contribuer à retarder l’entrée en établissement médicalisé et à améliorer la détection précoce des problèmes de santé, et donc à faire en sorte que le système soit plus efficient et davantage centré sur la population. L’expérience de la Suède, du Danemark, de l’Allemagne et du Luxembourg donnent à penser qu’introduire des services d’assistance dans le dispositif des soins de base permet d’éviter des soins plus onéreux (Colombo et al., 2011). En 2011, les dépenses totales consacrées aux soins de longue durée qui n’étaient pas couvertes par l’assurance‑maladie représentaient environ 15 % du coût total des soins de longue durée, soit 0.25 % du PIB (Conseil fédéral, 2016). Pour remédier à cette situation, on peut par exemple distribuer des chèques pour des prestations à caractère social, comme c’est le cas dans les pays nordiques. Les villes de Lucerne et Berne ont piloté un projet de ce type. Les autorités locales pourraient ainsi négocier des tarifs plus avantageux avec les prestataires (OCDE/OMS, 2011). On pourrait aussi adopter une échelle normalisée des besoins en soins, en remplacement des différents systèmes d’évaluation des soins en établissement et à domicile. Les prestations en espèces pourraient être fixées en fonction du niveau de l’assistance et un coordinateur pourrait aider les patients à s’orienter dans le système. Les patients auraient la possibilité de choisir et cela pourrait améliorer le fonctionnement du marché. L’exemple des Pays‑Bas montre qu’il est crucial de concevoir avec soin le système mis en place pour maîtriser le coût total. L’application de critères de ressources et la participation des assurés au coût des soins contribuent de manière importante à limiter la hausse des coûts, ainsi que l’a souligné l’expérience du Japon (OCDE, 2019f).
L’expérience d’autres pays donne des pistes pour comprendre comment dispenser des soins de meilleure qualité avec plus d’efficience. Les tâches réalisées par les professionnels des soins sont actuellement définies selon que les soins sont assurés ou non. Une nouvelle évaluation serait également source d’une flexibilité accrue. Le modèle néerlandais Buurtzorg – actuellement mis en place à Zurich dans le cadre d’un programme pilote – se caractérise par le fait que les infirmières réalisent une plus large gamme de tâches (Encadré 2.9). Le gouvernement fédéral devrait encourager les expérimentations destinées à trouver des solutions locales, comme c’est le cas en Suède. Il faudrait alors établir un cadre pour mettre en commun les enseignements tirés. Adopter les dossiers électroniques des patients à grande échelle et autoriser leur accès dans l’ensemble des cantons et pour tous les prestataires, comme au Portugal, pourrait permettre d’améliorer les soins et l’efficience.
Encadré 2.9. Exemples d’innovations favorisant une intégration accrue des soins de longue durée
Le modèle néerlandais Buurtzorg de soins à domicile décentralisés s’est développé rapidement. Il repose sur des équipes d’infirmières autonomes chargées d’assurer toutes les facettes des soins d’une patientèle. Les équipes travaillent avec les patients, leurs familles et les prestataires de soins primaires, et ont pour objectif d’accroître l’autonomie des patients. Les infirmières sont assistées par des coachs. L’administration est réduite au minimum et centralisée. Le niveau de satisfaction tant des patients que de leurs familles et des équipes est élevé. Buurtzorg s’est avéré plus efficient par rapport au coût que les autres prestataires de soins à domicile (en tenant compte de la structure des soins fournis), mais il se situe dans la moyenne si l’on inclut les soins curatifs.
La Suède a cherché des solutions innovantes pour améliorer la collaboration entre les hôpitaux, les prestataires de soins de santé primaires et les services sociaux. Des subventions nationales ont été accordées à 19 projets pilotes locaux. Dans l’un deux, des équipes mobiles interviennent précocement à domicile de manière préventive. Dans la commune de Lidköping, les taux d’hospitalisation ont chuté de 90 % après la mise en place d’une commission rassemblant des représentants de plusieurs communes et municipalités afin de coordonner les soins dispensés aux personnes âgées.
Le Portugal a mis en place un Réseau national de soins continus intégrés en 2007. Celui‑ci est décentralisé, mais coordonné via un système informatique intégré auquel ont accès les équipes de gestion des sorties des hôpitaux, les centres de soins de santé primaire, ainsi que les équipes de coordination aux niveaux national et infranational. Parmi les points forts de ce réseau, notons que le système en ligne permet d’actualiser l’évaluation des besoins, de surveiller les patients et de procéder à une analyse comparative des résultats aux niveaux national, infranational et des unités. Le financement est assuré par les ministères de la Santé et des Affaires sociales.
Source : OCDE/UE (2013), A Good Life in Old Age? Monitoring and Improving Quality in Long-term Care, OECD Health Policy Studies ; B. Gray, S.O. Sarnak et J. Burgers (2015), « Home Care by Self-Governing Nursing Teams: The Netherlands’ Buurtzorg Model », Case Study, The Commonwealth Fund.
La planification reste centrée sur les établissements médicalisés, ce qui implique une forte hausse dans les années qui viennent. À l’heure qu’il est, les gouvernements estiment de manière empirique qu’un cinquième environ des plus de 65 ans auront besoin de soins en établissement. Toutefois, cette approche aboutira à une surestimation considérable du nombre de lits requis si l’on trouve d’autres formes d’assistance (Crédit Suisse, 2018). La répartition actuelle des responsabilités entre les cantons et les communes en termes de financement des soins en établissement et à domicile entrave l’accès aux services hospitaliers en établissement, mais ce problème pourrait être atténué par de meilleurs termes contractuels (Cosandey et Kienast, 2016). Encourager cantons et communes à partager l’accès aux établissements figurant, par exemple, sur un marché régional pourrait aussi améliorer la flexibilité, l’efficience et l’accès des patients aux services. Certains cantons, comme celui de Bâle‑Ville, proposent des incitations financières aux communes qui construisent des structures d’accueil avec prestations d’assistance plutôt que des établissements médicalisés. Genève verse des prestations complémentaires pour les séjours effectués dans ces structures d’accueil, ce qui réduit la demande d’établissements médicalisés. Dans certains cas, ces structures pourraient présenter un meilleur rapport coût‑efficacité que les soins à domicile, en raison de la présence sur place de soignants professionnels (Polynomics, 2018). Enrichir les statistiques, en intégrant les structures d’accueil avec prestations d’assistance, par exemple, permettrait d’améliorer la planification.
Adapter à une population vieillissante les options proposées en matière de logement pourrait aussi retarder l’entrée en établissement médicalisé des seniors n’ayant que peu de besoins. Aux Pays‑Bas, les personnes âgées de 80 ans ou plus souffrant de problèmes physiques risquent nettement moins d’être placées en établissement médicalisé lorsqu’elles vivent dans des logements plus accessibles (Diepstraten, Douven et Woutsere, 2019). Une enquête réalisée sur les villes suisses montre que le logement suscite des inquiétudes particulières (Ecoplan, 2014). Un programme pilote visant à favoriser les adaptations mineures des logements pourrait être mis en place et son efficacité économique évaluée. La ville d’Opfikon a participé au financement de la construction d’appartements adaptés aux plus âgés au sein d’une coopérative (Ecoplan, 2014). L’Union des villes suisses facilite la mise en commun des expériences locales. En Finlande, les habitants de la résidence communautaire Kotisatama qui sont âgés de 50 à 80 ans partagent des tâches comme la préparation du repas du soir (Forum Virium Helsinki, 2016). En France, le programme Pari Solidaire met en relation des jeunes adultes à la recherche d’un logement avec des seniors, ce qui permet aux uns de réduire leurs frais de logement tout en remédiant aux problèmes de solitude et de sécurité des autres (Kesselring et al., 2014).
Renforcer la transparence en matière de prix et de résultats pourrait améliorer l’efficience économique et la qualité des soins à domicile et en établissement. Une telle mesure se fera plus pressante à mesure que la demande augmentera. L’efficience des prestations de soins à domicile est compromise par un certain nombre de facteurs, et notamment par le fait que certains cantons jouent le rôle de prestataires et d’acheteurs de services, que les tarifications sont opaques et qu’il n’existe pas de lien entre la quote-part des patients et le coût effectif des soins assurés (Cosandey et Kienast, 2016). L’organisme de surveillance des prix à la consommation a constaté que le prix des séjours en établissement subissait, au sein des cantons et d’un canton à l’autre, de fortes variations qui ne reflètent pas les coûts mais vraisemblablement des subventions croisées (Surveillance des Prix, 2018). Les pressions financières pesant sur les cantons et les communes s’accentuent également car le taux horaire payé par les assureurs‑maladie est inchangé depuis 2011. De plus, le prix acquitté par les cantons et les communes pour les soins à domicile est souvent le reflet des structures de coût et non des prestations fournies (Cosandey et Kienast, 2016).
L’introduction d’une norme comptable unique à l’échelle nationale et l’exercice d’un contrôle renforcé par les cantons amélioreraient la gouvernance, ainsi que le préconise l’autorité de surveillance des prix à la consommation (Surveillance des Prix, 2018). Pour mieux répartir les coûts, il faudrait que le taux horaire payé par les assureurs-maladie et les patients soit actualisé régulièrement suivant l’avis d’un groupe indépendant comme celui envisagé pour les tarifs des spécialistes. Une amélioration des données liées aux résultats pourrait aussi renforcer le fonctionnement du système et faciliter l’analyse comparative. Ces données sont manquantes à l’heure qu’il est. D’autres pays décentralisés comme les États‑Unis ou le Canada utilisent des données provenant d’instruments d’évaluation normalisés pour apprécier les besoins des usagers et générer des indicateurs de soins (OCDE, 2017d). Il est aussi possible d’utiliser des bases de données administratives, des registres et des enquêtes ad hoc. Par rapport aux autres pays de l’OCDE, la Suisse a tardé à mettre de telles informations à disposition, mais à partir de 2019, certains indicateurs de qualité seront recueillis par le gouvernement fédéral. Il conviendra de les développer plus avant.
Étoffer l’offre de soins de longue durée nécessitera de pallier les pénuries de professionnels des soins. L’Observatoire suisse de la santé estime à 47 000 le nombre de professionnels des soins de longue durée supplémentaires qui seront requis d’ici 2030 (Merçay, Burla et Widmer, 2016). Il faudra aussi fidéliser les travailleurs en place : des facteurs comme les tensions émotionnelles et physiques, le manque d’autonomie et le sentiment d’être sous‑payé ont été associés à une moindre satisfaction professionnelle (Schwendimann et al., 2016). Le gouvernement fédéral a introduit pour les établissements de soins de longue durée l’obligation de proposer des places de formation dans le système d’enseignement professionnel ou de payer une amende. Il encourage aussi les travailleurs à se reconvertir dans les soins de longue durée. Le Japon a réussi à attirer des jeunes, et des femmes qui reprenaient une activité après une interruption de carrière, en leur proposant des incitations financières pour qu’ils se forment aux soins de longue durée (OIT/OCDE, 2019). Les gouvernements devraient aussi tenter d’introduire des incitations financières à la formation aux professions de soignants et des politiques pour accroître la satisfaction professionnelle. Les progrès technologiques concernant la surveillance, l’assistance, les soins à distance, l’autogestion et la collecte de données pourraient aussi contribuer à améliorer la qualité des soins et à réduire leur intensité de main‑d’œuvre (OIT/OCDE, 2019 ; OCDE, 2014a). Quoi qu’il en soit, la main‑d’œuvre continuera sans doute de dépendre des travailleurs étrangers ; leur immigration devrait être facilitée.
Le développement de l’offre de soins passera aussi par un recours accru aux soins non professionnels. À l’heure qu’il est, la Suisse y recourt moins que les autres pays (Graphique 2.33). Les politiques nationales sont moins généreuses que dans d’autres pays de l’OCDE : les congés prévus par la loi ne sont pas rémunérés, même si le système de retraite prévoit une majoration des droits pour les périodes de prise en charge d’une autre personne. Les deux tiers des entreprises proposent des congés rémunérés et quelques cantons accordent une aide financière pour les soins non professionnels. Le gouvernement a l’intention d’offrir aux aidants un congé faiblement rémunéré, ce qui rapprocherait quelque peu la Suisse des autres pays de l’OCDE. Cette mesure pourrait être utile pendant les périodes de transition ou d’accroissement des besoins. Pour mieux soutenir les soins classiques, le gouvernement étend la majoration des droits à retraite aux aidants de personnes ayant des besoins modérés. Il reste à savoir si ces prestations permettront d’étoffer l’offre de soins non professionnels à mesure que les besoins augmenteront.
En cas de recours plus élevé aux aidants non professionnels, il faudra développer l’accueil temporaire (afin de les soulager). Lucerne a commencé à proposer un service de soins à la journée destiné à aider les patients à s’y préparer (OCDE, 2018j). L’accueil temporaire est particulièrement important pour les aidants de patients atteints de démence et son accès devrait être généralisé. L’Allemagne, par exemple, a inscrit dans la loi un droit à une durée d’accueil minimum.
À plus longue échéance, dans la perspective d’un doublement de la population suisse âgée de plus de 80 ans, les tensions pesant sur le système de financement actuel vont indubitablement s’accentuer. Ainsi, la hausse du coût des soins de santé conjuguée au recul des taux de remplacement des retraites pourraient faire grimper le nombre de retraités ayant droit aux prestations complémentaires. Dans un rapport du gouvernement de 2016 ont été étudiées un certain nombre d’options pour le financement des soins de longue durée, parmi lesquelles un maintien du statu quo, assorti d’un financement supplémentaire via les recettes fiscales ; une extension de l’assurance-maladie obligatoire aux services d’assistance ; et la création d’une assurance obligatoire des soins de longue durée (comme en Allemagne, en Corée et aux Pays‑Bas) (Conseil fédéral, 2016). Ce rapport concluait qu’à partir de 2030, la problématique du financement des soins de longue durée s’aggraverait davantage, et qu’il était donc essentiel d’ouvrir sans attendre le débat sur son financement futur. Une réforme future devrait s’attaquer à la fragmentation du financement, qui est source d’inefficience économique et se traduit par des doublons et un manque de coordination des soins dispensés aux patients. La mise en œuvre de la réforme risquant de prendre plus de temps que prévu, et l’évolution démographique étant déjà engagée, le gouvernement devrait commencer à travailler à une proposition de solution.
CONCLUSIONS (principales conclusions en gras) |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
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Préparer le système de retraite à une forte hausse du nombre de retraités |
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Le maintien du même âge légal de départ à la retraite malgré l’allongement de l’espérance de vie va entraîner une augmentation rapide du ratio retraités/salariés. Les réserves du régime public constituant le premier pilier du système de retraite devraient être épuisées au milieu des années 2030. |
Fixer l’âge de la retraite à 65 ans pour les deux sexes comme prévu, puis le porter progressivement à 67 ans et l’indexer ensuite sur l’espérance de vie. |
Indexer les prestations de retraite du premier pilier sur la moyenne des salaires et de l’inflation fait baisser le taux de remplacement au départ en retraite. |
Indexer sur les salaires les prestations servies au titre du premier pilier lors du départ en retraite, puis sur l’inflation pendant la retraite. |
Les femmes sont bien protégées par le système actuel grâce à des pensions de réversion généreuses alors qu’elles ont des droits individuels moins élevés. Cela crée une discrimination envers les célibataires et alourdit le coût du système. |
À moyen terme, évoluer vers un système de droits individuels au titre de la pension de vieillesse (premier pilier) et évaluer l’utilité des pensions de réversion. |
Les informations sur les droits à la retraite sont difficiles d’accès, les renseignements disponibles en ligne étant limités. Dans le premier pilier, les relevés des droits à retraite peuvent être obtenus par des procédures écrites, qui sont longues. |
Améliorer l’accès aux informations sur les droits à la retraite au titre des premier et deuxième piliers en communiquant les renseignements sur un site web unique. |
Les taux de remplacement offerts par le système de retraite obligatoire sont actuellement élevés. Néanmoins, dans le cadre du deuxième pilier, le taux de conversion des actifs accumulés en prestation de retraite est fixé par la loi. Ce taux est trop élevé, ce qui se traduit par une redistribution substantielle, des travailleurs jeunes au profit des travailleurs âgés et des retraités, au sein du deuxième pilier. |
Revoir à la baisse le paramètre utilisé pour calculer les rentes (le « taux de conversion minimal ») et en faire un paramètre technique plus souple fixé par ordonnance. |
Un élargissement du système permettrait d’améliorer l’adéquation des retraites. Les cotisations au deuxième pilier débutent à l’âge de 25 ans, alors que le taux d’emploi est déjà de 70 % pour les 20-24 ans. |
Abaisser l’âge minimum de cotisation au régime de prévoyance professionnelle (deuxième pilier) ainsi que le seuil de rémunération à partir duquel il est possible d’y adhérer. |
En 2018, 5 % des caisses de pension utilisaient un taux d’actualisation supérieur à 3 %, tandis que 20 % appliquaient un taux inférieur à 2 %. |
Mettre en place un cadre pour réglementer les hypothèses de taux d’intérêt technique afin de limiter les variations et de gagner en précision. |
Les actifs de retraite peuvent être retirés de manière anticipée pour acheter un logement ou créer une entreprise, ce qui accroît le risque que le revenu durant la retraite soit insuffisant. Un tiers environ des nouveaux retraités optent pour une sortie en capital. |
Limiter les possibilités de retirer le patrimoine-retraite sous forme de capital lors du départ en retraite et avant le départ. |
Les cotisations surobligatoires au titre du deuxième pilier donnent droit à des avantages fiscaux qui bénéficient principalement aux hauts revenus. |
Réduire le plafond d’avantage découlant des incitations fiscales dans le deuxième pilier. |
Allonger la durée de la vie active |
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Les Suisses sont peu nombreux à travailler au-delà de l’âge légal de la retraite, en partie à cause d’aspects financiers fortement dissuasifs pour les employeurs comme pour les salariés. Les demandeurs d’emploi âgés ont davantage de difficultés à trouver du travail. |
Mettre à profit la conférence annuelle sur le thème des travailleurs âgés pour trouver les moyens d’introduire une plus grande souplesse dans le mécanisme de fixation des salaires et de réduire la rémunération en fonction de l’ancienneté. |
La participation à la formation tout au long de la vie est forte. Mais elle tombe sous celle des principaux pays pour les travailleurs ayant un faible niveau de formation et les chômeurs. |
Augmenter les dépenses de formation pour les demandeurs d’emploi, y compris ceux qui bénéficient de l’aide sociale. Utiliser des subventions pour inciter les catégories les plus exposées aux conséquences de la transformation numérique à participer à la formation continue. Revoir les prestations en espèces prévues pour les demandeurs d’emploi de plus de 60 ans, ou bien les assortir de conditions comme la participation à des formations ou la recherche d’un emploi. |
La Suisse est le seul pays de l’OCDE à ne pas interdire la discrimination en fonction de l’âge, et les coûts pour les employeurs augmentent avec l’âge. |
Interdire la discrimination en fonction de l’âge et prévoir des dispositifs de mise en œuvre de cette mesure. |
Le taux de cotisation minimum du deuxième pilier augmente avec l’âge, et il est multiplié par 2.5 pour un travailleur âgé. Cela accroît le lien entre salaires et ancienneté, et donc le coût des travailleurs âgés. |
Atténuer la progressivité des taux de cotisation retraite en fonction de l’âge. |
À tous les échelons de l’administration, les revenus proviennent pour beaucoup de l’imposition sur le travail, mais ce système génère des contre-incitations au travail et il risque davantage d’être mis sous tension par le vieillissement de la population. |
Réduire l’impôt sur le revenu des personnes physiques (à tous les échelons de l’administration) en abaissant les taux d’imposition pour les faibles revenus et en supprimant les contre-incitations visant les deuxièmes apporteurs de revenu, et financer ces mesures par un recours plus large à la TVA, aux impôts périodiques sur la propriété immobilière et aux taxes liées à l’environnement. |
Faire face au raffermissement de la demande de soins de santé et de longue durée |
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Le vieillissement démographique va tirer vers le haut les dépenses liées à la santé, qui sont déjà importantes. Du fait de l’assurance‑maladie obligatoire et des frais restant à la charge des patients, la hausse des coûts pèsera aussi sur les budgets des ménages. Les dossiers électroniques des patients peuvent permettre d’améliorer la qualité des soins et de réduire les coûts, mais si leur utilisation est limitée, ces avantages pourraient ne pas se concrétiser pleinement. |
Poursuivre des programmes de maîtrise des coûts, en particulier pour les soins curatifs et les médicaments. Mettre en place des incitations et sanctions financières pour encourager l’adoption du dossier électronique du patient par les professionnels de santé et favoriser la saisie de données de bonne qualité. Développer les données disponibles pour les services de surveillance et d’analyse comparative en confiant des responsabilités à l’office national de la statistique ou à l’Observatoire suisse de la santé. |
La demande de soins de longue durée est forte, et elle est appelée à augmenter au fur et à mesure du vieillissement de la population. Cependant, l’accessibilité financière des soins à domicile est variable d’un canton à l’autre. Les règles d’admission au bénéfice des aides financières peuvent amener des patients à se tourner vers des établissements médicalisés sans en avoir véritablement besoin. |
Utiliser des instruments innovants tels qu’un système de chèques ou de budgets individuels fondés sur le niveau des besoins de soins, et prévoir des coordinateurs chargés d’aider les patients à s’orienter dans le système, afin d’en assurer le développement d’une manière économiquement efficiente. Tester à l’échelle locale des méthodes innovantes pour dispenser des soins de longue durée d’un bon rapport coût-efficacité et intégrés, et mettre en commun les pratiques exemplaires. |
En raison de la décentralisation, l’accès aux services de soins de longue durée et leur coût varient fortement à l’échelle nationale. La tarification de ces soins n’est pas transparente et n’est pas liée aux coûts. |
Renforcer la responsabilité et la transparence dans les soins de longue durée en établissant des grilles tarifaires nationales pour les services non couverts, en publiant davantage d’informations sur les prix et la qualité et en intensifiant le contrôle. Favoriser, par des incitations, la planification de la création d’infrastructures de soins de santé et de longue durée sur des zones étendues et autoriser les patients à recevoir des soins en établissement en dehors de leur région. |
Le renchérissement des soins de santé a fait grimper les primes d’assurance‑maladie obligatoire. Le système est régressif malgré l’octroi de subsides. |
Fixer plus systématiquement les subsides pour l’assurance‑maladie obligatoire en fonction des revenus. |
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