Avant le cycle révolutionnaire de 2011, la situation de l’accès à l’information n’était pas favorable dans les pays arabes. Mis à part la Jordanie, qui a adopté en 2007 une législation relative à l’accès à l’information, la plupart de ces pays ne disposaient pas de loi relative à la liberté d'échange de l'information. Et dans le cas où il y en existait une, une conjonction de dispositions pénalisait la mise à disposition, l'échange et la communication des informations sans l'autorisation préalable des autorités compétentes. Enfin, les administrations se montraient peu enclines dans la pratique à autoriser les citoyens à recourir au droit d’accès à l’information.
Les Révolutions de 2011 ont instauré un climat favorable au droit d’accès à l’information. L’amélioration de la transparence des pouvoirs publics et de l’État, et de l’accès à l’information détenue par l’administration ont occupé une place significative dans les revendications populaires durant ces évènements. Cela a conduit à des évolutions cruciales dans la législation et les habitudes administratives de certains États.
Au Maroc et en Tunisie, les Constitutions de 2011 et 2014 font explicitement référence au droit d’accès à l’information. À l’opposé, la Constitution libanaise de 1926 et la Constitution jordanienne de 1952 ne le mentionnent pas, tout en reconnaissant la liberté d’expression et de la presse pour la première, et le droit d’interroger les pouvoirs publics pour la seconde.
Les Constitutions tunisienne et marocaine se caractérisent, par ailleurs, par la mise en place d’institutions indépendantes, responsables de la protection et du développement des droits sociaux et humains. Ces institutions sont susceptibles, dans leur domaine de compétences, de participer à la promotion et la défense de l’accès à l’information.
Le droit international tient aussi une place dans la promotion du droit d’accès à l’information dans les quatre pays de la zone MENA concernés. La Jordanie, la Tunisie et le Maroc ont par ailleurs adhéré au Partenariat pour un gouvernement ouvert. Les quatre pays mentionnés dans ce rapport coopèrent également activement avec l’OCDE, par exemple à travers le Programme MENA-OCDE pour la gouvernance et le Programme sur le gouvernement ouvert.
Depuis 2016, la législation relative à l’accès à l’information en Tunisie, au Liban et au Maroc a connu de nettes améliorations. En Tunisie, l’Assemblée des représentants du peuple a adopté, le 24 mars 2016, une loi organique relative à l’accès à l’information. Le Liban a, pour sa part, approuvé, le 10 février 2017, la loi n° 28 relative à l’accès à l’information, qui établit les principales modalités d’application de ce droit. Cependant, cette loi requiert un certain nombre de textes d’application, concernant notamment la composition de la Commission nationale anticorruption, ainsi que les modalités de nomination de ses membres et d’exercice de ses compétences. Le Parlement marocain a enfin adopté, le 6 février 2018, le projet de loi n° 31-13 relatif au droit d’accès à l’information, dont les dispositions entreront en vigueur un an après sa promulgation.
Alors même que des améliorations sont intervenues au plan législatif après 2011, les législations relatives à l’accès à l’information coexistent avec de multiples dispositions constitutionnelles, légales ou règlementaires, protégeant par exemple les libertés individuelles ou les données personnelles, et ayant pour conséquence de renforcer ou restreindre l’exercice du droit d’accès à l’information.
En outre, dans les quatre pays de la région MENA examinés, le droit d’accès à l’information reste peu connu et sous-utilisé, et la transparence et la mise à disposition des informations publiques demeurent réduites.
Les seules données statistiques sur plusieurs années relatives au droit d’accès à l’information qui soient disponibles concernent la Jordanie. Dans ce pays, entre 2012 et 2015, 10 305 demandes ont été formulées. Pour l’année 2016, ce nombre a connu une augmentation considérable et atteint 12 101. Entre 2012 et 2016, on note un taux de réponses positives aux demandes d’accès élevé. Par ailleurs, entre 2008 et 2017, le Conseil de l’information, qui constitue l’IGAI nationale, a reçu 51 recours. Entre 2012 et 2017, 353 refus de communication ont été prononcés par l’administration du pays, à comparer aux 45 recours devant le Conseil de l’information, représentant un taux d’appel de 12.7 %.