Ce chapitre examine l’insertion sur le marché du travail des émigrés ivoiriens dans les pays de l’OCDE. Avec un intérêt particulier pour les principaux pays de destination des émigrés ivoiriens, nous y étudions le statut d’occupation des 15‑64 ans en 2015/2016 et plus récemment en 2017/2020 en France, en Italie et aux États-Unis. Nous nous intéressons à l’évolution de cette insertion depuis la crise financière et économique de la fin des années 2000 et du début des années 2010 en Europe. Nous y examinons les facteurs d’employabilité des émigrés ivoiriens au travers des questions de genre et d’éducation mais aussi de durée de séjour et d’acquisition de la nationalité. Outre la mesure du taux d’emploi, de chômage et d’inactivité des émigrés ivoiriens, les types de postes, leur adéquation avec leurs qualifications et les secteurs d’activité où ils travaillent sont étudiés. Ce chapitre se ferme sur les caractéristiques de l’insertion des descendants d’émigrés ivoiriens.
Panorama de l’émigration ivoirienne
3. Situation des émigrés ivoiriens sur le marché du travail
Abstract
En bref
En 2015/2016, 77 % des émigrés ivoiriens en âge de travailler participent au marché du travail dans les pays de l’OCDE.
Ce taux de participation cache un niveau élevé de taux de chômage : 21 % d’entre eux sont au chômage.
61 % des émigrés ivoiriens entre 15 et 64 ans sont ainsi en emploi, un taux similaire à l’ensemble des émigrés des pays de l’UEMOA mais significativement inférieur au taux de participation de l’ensemble des immigrés et des natifs de l’OCDE.
Ces taux varient beaucoup selon le pays de destination. En France, premier pays de destination des émigrés ivoiriens, 62 % d’entre eux sont en emploi en 2019/2020 quand ils sont 71 % aux États-Unis en 2017/2019.
Depuis 2010/2011, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens sur le marché du travail est resté relativement stable.
Il reste cependant plus difficile pour les femmes d’accéder à l’emploi. À peine plus de la moitié des femmes nées en Côte d’Ivoire et résidant dans un pays de l’OCDE est en emploi contre les deux tiers de leur contrepartie masculine.
Le niveau d’éducation est un autre déterminant de l’accès à l’emploi. Dans l’ensemble, 71 % des émigrés ivoiriens les plus éduqués ont un emploi, un taux inférieur à celui observé pour l’ensemble des immigrés.
Ce taux d’emploi plus élevé pour les individus ayant suivi des études supérieures cache une grande inadéquation entre emploi et qualifications. Près de la moitié des émigrés ivoiriens ayant suivi un enseignement supérieur occupe un poste demandant des qualifications inférieures à celles obtenues.
Ainsi, les émigrés ivoiriens occupent surtout des postes faiblement qualifiés. Ils travaillent en premier lieu comme aides ménagers. Une part non négligeable des femmes travaille dans le secteur des soins aux particuliers. Ce constat au sein de l’OCDE est à nuancer dans la mesure où il existe d’importantes hétérogénéités entre les pays.
Les émigrés ivoiriens travaillent avant tout dans le secteur des services aux États-Unis et en France et plus rarement dans les secteurs primaires et secondaires sauf en Italie où environ 40 % de la main d’œuvre née en Côte d’Ivoire travaille dans la construction ou l’industrie manufacturière et extractive.
Les descendants d’émigrés ivoiriens s’insèrent plus facilement sur le marché du travail. En France, 75 % des 25‑64 ans sont en emploi, un taux similaire à celui des enfants de parents natifs.
Une insertion difficile des émigrés ivoiriens sur le marché travail
Une insertion sur le marché du travail très inégale selon les pays de destination
Parmi les 189 000 émigrés nés en Côte d’Ivoire âgés entre 15 et 64 ans et résidant dans les pays de l’OCDE, 77 % d’entre eux participent au marché du travail, comme le montre le Graphique 3.1. Ce taux d’activité correspond au taux moyen de participation des émigrés des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et est légèrement supérieur au taux d’activité moyen des immigrés dans les pays de l’OCDE (74 %). Toutefois, comme leurs homologues originaires des autres pays de l’UEMOA, les émigrés ivoiriens sont plus de deux fois plus fréquemment au chômage que l’ensemble des émigrés (21 % contre 10 %). De ce fait, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens est relativement faible, concernant 61 % des 15‑64 ans, un taux similaire à celui de l’ensemble des émigrés originaires des pays de l’UEMOA, mais inférieur à celui de l’ensemble des immigrés (67 %) et des natifs des pays de l’OCDE (65 %).
Cette insertion difficile sur le marché du travail diffère substantiellement selon les pays de destination. Moins de la moitié des émigrés ivoiriens occupent un emploi en Grèce, Finlande, Belgique, Irlande, Australie et Hollande. Dans ces trois premiers pays même, moins de deux adultes sur cinq sont en emploi. Ces taux sont significativement inférieurs au taux d’emploi des natifs qui atteint 50 % en Grèce (contre 37 % pour les émigrés ivoiriens) et jusqu’à 77 % aux Pays-Bas (contre 45 % pour les individus nés en Côte d’Ivoire).
Dans le troisième pays de destination de l’OCDE des Ivoiriens, l’Italie, à peine 52 % d’entre eux ont un emploi et 27 % sont à la recherche d’un emploi. Ces derniers chiffres sont similaires à ceux observés en France, premier pays de destination des émigrés ivoiriens. Effectivement, seuls trois adultes sur cinq en âge de travailler ont un emploi et un sur quatre est au chômage. Parmi les autres principaux pays de destination, au Canada et au Royaume‑Uni, 63 % et 64 % des émigrés ivoiriens ont un emploi. 15 % des individus nés en Côte d’Ivoire et résidant au Canada sont au chômage contre 24 % au Royaume‑Uni.
Le taux d’emploi des émigrés ivoiriens est supérieur à celui des natifs dans deux pays uniquement, Israël et les États-Unis. Dans le premier, ce résultat doit être nuancé par le très faible effectif d’Ivoiriens résidant en Israël : on compte moins de 300 individus entre 15 et 64 ans en 2015/16. Aux États-Unis, deuxième pays de destination des Ivoiriens en revanche, 71 % des immigrés ont un emploi contre 69 % des natifs. Cependant, la proportion d’actifs occupés aux États-Unis cache une forte inadéquation entre les emplois occupés par les émigrés ivoiriens et leur qualification, comme nous le montrerons plus tard dans le chapitre.
Les Ivoiriens s’insèrent généralement moins bien dans les principaux pays d’accueil que les émigrés des autres pays comme le montre le Graphique 3.2. Cela s’observe particulièrement au Royaume‑Uni et en Italie mais aussi au Canada où les taux d’emploi moyen des immigrés sont supérieurs entre 5 et 7 points de pourcentage à celui des émigrés ivoiriens. En Belgique, si l’accès à l’emploi est similaire pour les immigrés des pays de l’UEMOA, il est très inférieur à celui des immigrés venant d’autres pays (10 points de pourcentage inférieur). La France, avec les États-Unis, constitue un cas particulier dans la mesure où les immigrés venant de Côte d’Ivoire et plus généralement des pays de l’UEMOA s’en sortent mieux que l’ensemble des immigrés en moyenne. Ces derniers ne sont que 55 % à occuper un emploi en 2015/16, soit 5 points de pourcentage de moins que les immigrés nés dans un pays de l’UEMOA. Aux États-Unis, si les individus nés en Côte d’Ivoire s’en sortent relativement moins bien que les immigrés d’origine d’autres pays de l’UEMOA dont 74 % sont des actifs occupés, ils accèdent l’emploi dans les mêmes proportions que les autres immigrés.
La participation au marché du travail des immigrés est d’autant plus forte que le temps écoulé depuis leur arrivée est important. Effectivement, comme le montre le Graphique 3.3, si les individus arrivés il y a un an ou moins sont essentiellement inactifs en France et en Italie, le constat se renverse dès que la durée de séjour dépasse un an. Entre un et cinq ans en France, 43.5 % des émigrés ivoiriens sont en emploi. Ce taux passe à 65 % au-delà de cinq ans passés en France et atteint 70 % après dix ans de résidence. Aux États-Unis, les émigrés ivoiriens arrivés depuis moins d’un an sont déjà 60 % à occuper un emploi. Si cela peut s’expliquer par la politique d’attribution de visas, le taux d’emploi croit de façon quasi linéaire avec le nombre d’années passées sur le territoire américain.
En lien avec le temps passé dans les pays de destination, l’acquisition de la nationalité du pays facilite l’accès à l’emploi comme le montre le Tableau 3.1. Effectivement, les émigrés ivoiriens de nationalité italienne sont 66 % à occuper un emploi en 2017/20 contre 56 % pour ceux sans la nationalité italienne. Cela vaut aussi pour les États-Unis et la France dans des proportions très similaires. Ce constat se maintient mais dans une moindre mesure lorsqu’on contrôle la durée de séjour des émigrés ivoiriens.
Tableau 3.1. Taux d’emploi des émigrés ivoiriens selon leur nationalité en France, en Italie et aux États-Unis, 2017‑20 et 2017‑19
% de la population entre 15 et 64 ans
France |
Italie |
États-Unis |
|||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
|
Français de naissance |
Naturalisé français |
Étranger |
Italien |
Étranger |
Américain |
Étranger |
Ensemble |
68.3 |
69.2 |
58.5 |
65.7 |
56.3 |
77.9 |
67.9 |
Homme |
70.9 |
77.6 |
63.1 |
65.6 |
69.1 |
82.8 |
67.4 |
Femme |
65.6 |
64.2 |
55.4 |
65.9 |
39.9 |
72.7 |
68.6 |
Sources : Enquête emploi en continu de l’Insee (EEC) 2017‑20, American community survey du Census Bureau (ACS) 2017‑19 et Enquête sur la main d’œuvre de l’Istat 2017‑20.
Au Mali et au Sénégal, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens est supérieur à celui des natifs
Les données disponibles nous permettent d’étudier en partie l’insertion économique des émigrés ivoiriens en Afrique de l’Ouest, première région de destination des Ivoiriens, au travers de leur insertion au Mali et au Sénégal. Les données de l’enquête modulaire et permanente auprès des ménages (EMOP) collectées en 2016 renseignent sur le niveau d’activité des émigrés ivoiriens au Mali, leur troisième pays de destination (voir Chapitre 2). Ainsi, deux tiers des 15 ans et plus étaient en emploi en 2016 comme présenté dans le Graphique 3.4. Ce taux était supérieur de 3 points de pourcentage à celui observé pour l’ensemble des émigrés au Mali et surtout de 9 points de pourcentage au taux d’emploi des natifs. Si les femmes nées en Côte d’Ivoire travaillaient significativement moins que leurs homologues masculins au Mali (57 % soit 12 points de pourcentage de moins que les hommes), il restait supérieur de 7 et 10 points de pourcentage à celui des femmes nées à l’étranger dans l’ensemble et nées au Mali respectivement. Dans l’ensemble, les émigrés ivoiriens au Mali sont substantiellement moins représentés (46 %) dans le secteur agricole que les natifs (64 %).
Au Sénégal, seuls 40 % des émigrés ivoiriens étaient en emploi en 2013 (mesuré à partir des données du dernier recensement général de la population). Cependant, ce niveau d’emploi est supérieur à celui des natifs de 3 points de pourcentage mais est sensiblement inférieur à celui de l’ensemble des émigrés au Sénégal (‑6 points de pourcentage). Les femmes ivoiriennes sont seulement un quart à être en emploi au Sénégal, une proportion similaire à celle observée pour l’ensemble des femmes immigrées mais supérieur de 5 points de pourcentage à celui des natives.
La proportion de travailleurs à compte propre diffère substantiellement entre les émigrés ivoiriens au Mali et au Sénégal. Effectivement, si au Mali les travailleurs émigrés ivoiriens sont aussi fréquemment à compte propre que les immigrés en général (68 %), ils le sont bien moins au Sénégal ou la moitié est à compte propre contre 65 % et 67 % des immigrés en général et des natifs.
L’emploi des émigrés ivoiriens est resté relativement stable depuis 2010 dans les pays de l’OCDE
L’insertion sur le marché du travail des émigrés ivoiriens est stable depuis 2010/2011. Comme présenté dans le Graphique 3.5, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens a augmenté de moins de 1 point de pourcentage sur la période, passant de 60.5 à 61 % en 2015/2016. L’évolution du niveau d’emploi des émigrés ivoiriens ne suit pas la tendance générale de relative amélioration de l’environnement économique dans les pays de l’OCDE au sortir de la crise économique et financière internationale et européenne de la fin des années 2000 et de la première moitié des années 2010. Effectivement, pour les émigrés des pays de l’UEMOA et dans une moindre mesure pour les émigrés en général, le taux d’emploi a augmenté respectivement de 3 et 2 points de pourcentage. Il s’inscrit dans le contexte de reprise relative de l’économie des pays de l’OCDE dont la légère augmentation du taux d’emploi des natifs de près d’un point de pourcentage est le témoin.
Cela se traduit de façon hétérogène selon les pays de destination comme le met en évidence le Graphique 3.6, signe de la diversité des niveaux de reprise économique observés dans les pays de destination. L’Italie, encore très touchée par la politique budgétaire restrictive et l’augmentation des taux d’intérêt, a vu le taux d’emploi des immigrés d’origine ivoirienne diminuer de près de 6 points de pourcentage, une dynamique négative observée aussi pour les natifs (‑1.5 point de pourcentage) et dans des proportions similaires pour les émigrés des pays de l’UEMOA. En Belgique, où les fondamentaux économiques commencent à retrouver leur niveau d’avant crise, l’emploi est resté stable durant la période. En revanche, dans les pays anglo-saxons, et en premier lieu aux États-Unis et au Royaume‑Uni, où la croissance est de retour de façon soutenue depuis plusieurs trimestres en 2015/2016, le taux d’emploi a augmenté significativement pour tous les individus dont les émigrés ivoiriens (+9 points de pourcentage aux États-Unis et +6 points de pourcentage au Royaume‑Uni).
L’évolution hétérogène de l’insertion des émigrés ivoiriens sur différents marchés de l’emploi nationaux dans les pays de l’OCDE se poursuit sur la période la plus récente comme le montrent les résultats issus des enquêtes-emploi de la France (EEC) et de l’Italie (LFS) entre 2017 et 2020 et les enquêtes sur la communauté américaine (ACS) entre 2017 et 2019 (Ruggles et al., 2021[1]). Aux États-Unis, où la hausse du taux d’emploi était la plus forte entre 2010/11 et 2015/16, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens s’est maintenu à 71 % avant le début de la pandémie du COVID‑19 à un niveau égal à celui des natifs mais inférieur de 4 et 2 points de pourcentage à celui des émigrés des pays de l’UEMOA et des immigrés en général.
En Italie, la reprise économique matérialisée par une augmentation du taux d’emploi des natifs de 2 points de pourcentage entre 2015/2016 et 2017/2020, touche dans des proportions similaires les immigrés et particulièrement les émigrés de l’UEMOA dont le taux d’emploi atteint respectivement 60 et 61 %. S’il existe toujours un écart entre le niveau d’emploi moyen des immigrés en Italie et le taux d’emploi des émigrés ivoiriens, il s’est significativement réduit en 2017/2020. Effectivement, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens a augmenté de 5 points de pourcentage atteignant 58 % en 2017/2020. Cette amélioration de l’insertion des émigrés ivoiriens sur le marché du travail est le résultat d’une diminution de près de 6 points de pourcentage du taux de chômage de ces derniers depuis 2015/2016. Le taux d’inactivité des émigrés ivoiriens reste malgré tout élevé en Italie (28 %) et supérieur aux moyennes observées pour les immigrés (13 %).
En France, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens a suivi une évolution positive entre la période 2011/2012 et 2019/2020 quand elle est restée relativement constante pour l’ensemble des immigrés (Graphique 3.7). Si l’augmentation des niveaux d’emploi des émigrés ivoiriens a été particulièrement significative jusqu’en 2015/2016, elle a ralenti voire a été négative jusqu’en 2019/2020 période à laquelle le taux d’emploi des émigrés ivoiriens atteint 62 %, un taux toujours supérieur de 3 points de pourcentage à celui des immigrés. Par ailleurs, l’écart d’accès à l’emploi entre les femmes et les hommes émigrés ivoiriens a varié dans le temps. Alors qu’il était quasi-nul en 2011/2012, il s’est creusé depuis 2015/2016 : en 2019/2020, 59 % des femmes nées en Côte d’Ivoire étaient en emploi soit 7 points de pourcentage de moins que leur contrepartie masculine.
Le taux de chômage des émigrés ivoiriens, sur la période 2017/2020, retrouve les niveaux observés pour les émigrés de l’UEMOA (15 %). Les immigrés restent toutefois plus vulnérables sur le marché du travail étant près deux fois plus fréquemment exposés au chômage que les natifs. Un quart des émigrés ivoiriens sont par ailleurs inactifs. Parmi eux, 69 % ne sont ni en étude ni en formation.
Des disparités dans l’accès à l’emploi des émigrés ivoiriens selon leur genre subsistent
Les femmes immigrées doivent faire face à un défi double pour s’insérer sur marché du travail, du fait d’une part des inégalités de genre (OCDE, 2020[2]) et d’autre part de leur origine étrangère. Il existe de fait des différences souvent importantes de taux d’emploi entre hommes et femmes parmi les immigrés vivant dans les pays de l’OCDE : en moyenne, en 2015/16, le taux d’emploi des femmes est inférieur d’au moins 12 points de pourcentage à celui des hommes (voir Graphique 3.8). Parmi les émigrés ivoiriens, à peine plus de la moitié des femmes (55 %) ont un emploi contre plus de deux tiers (67 %) des hommes. Cela peut s’expliquer au moins pour partie par des différences entre les caractéristiques individuelles des hommes et des femmes. D’une part, les émigrées ivoiriennes en âge de travailler ont moins fréquemment suivi des études supérieures, et se présentent surtout plus fréquemment sur le marché du travail avec un niveau d’étude faible, équivalent au mieux à un niveau secondaire inférieur. De plus, mais de façon plus marginale, les émigrées ivoiriennes sont aussi présentes dans les pays de l’OCDE depuis relativement moins de temps, jouant aussi sur leur taux d’emploi comme présenté plus haut.
Par ailleurs, les émigrées ivoiriennes ont tendance à être davantage inactives (28 % contre 19 % pour les hommes). Elles sont aussi plus souvent au chômage (24 %) que les hommes (17 %) mais aussi que les femmes natives (10 %).
Ce résultat s’observe dans l’ensemble des principaux pays de destination des émigrés de Côte d’Ivoire comme le montre le Graphique 3.9 mais est valable aussi quel que soit le pays de naissance. Si les différences d’accès à l’emploi sont plus hétérogènes pour les natifs des pays de l’OCDE que pour les immigrés, les femmes autochtones souffrent aussi d’un accès inégal au marché du travail.
L’écart de niveau d’emploi selon le genre est le plus faible pour les émigrés ivoiriens résidant au Royaume‑Uni en 2015/2016 ; il est de 3 points de pourcentage. Cet écart est très faible relativement à l’écart moyen entre le taux d’emploi des hommes immigrés et celui des femmes immigrées au Royaume‑Uni. Effectivement, en moyenne le taux d’emploi des hommes est respectivement supérieur de 17.5 points de pourcentage à celui des femmes. Il est aussi plus faible que pour les natifs dont le taux d’emploi des hommes est supérieur de 8 points de pourcentage. Ce plus faible écart d’insertion sur le marché du travail est à nuancer dans la mesure où les émigrés ivoiriens s’intègrent moins bien au marché du travail que le reste de la population résidente contrairement aux émigrés ivoiriennes au Royaume‑Uni. Le taux d’emploi des hommes est 15 points de pourcentage inférieur à celui des immigrés en moyenne quand celui des femmes ivoiriennes est égal à la moyenne des immigrées. Ce plus faible écart s’explique notamment par le fait que les émigrées ivoiriennes ont davantage suivi des études supérieures que les hommes au Royaume‑Uni.
Cet écart double et quadruple pour les émigrés ivoiriens respectivement en Belgique (44 % des hommes en emploi contre 37 % des femmes) et au Canada (69 % des hommes contre 57 % des femmes). Dans ces deux pays, le niveau moyen d’étude des hommes est généralement supérieur à celui des femmes comme mis en évidence dans le Chapitre 2 pouvant ainsi expliquer pour partie ces différences d’insertion sur le marché du travail. Ils sont cohérents avec les écarts observés en général pour la population en emploi.
En France, pour les émigrés ivoiriens, les hommes sont 5 points de pourcentage en plus à occuper un emploi (63 %) que les femmes. Cet écart s’explique notamment par l’arrivée plus récente des femmes en France comme le montrent les données disponibles en 2017/2020. Comme décrit plus haut, le temps écoulé depuis l’arrivée dans le pays de destination facilite l’insertion sur le marché du travail. Le niveau d’éducation des émigrées ivoiriennes aussi inférieur à celui des hommes est un autre déterminant de cet écart en France.
En Italie et aux États-Unis, les disparités d’accès à l’emploi selon le genre sont les plus élevées en 2015/2016 ; elles dépassent les 20 points de pourcentage. Ces écarts sont cohérents avec les écarts observés pour les populations immigrées. Cependant, aux États-Unis, elles diffèrent substantiellement avec l’écart entre les taux d’emploi des femmes et des hommes autochtones (5 points de pourcentage de différence). Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces niveaux de disparités. Aux États-Unis, les femmes émigrées ivoiriennes sont en moyenne moins éduquées que les hommes. En Italie, les femmes émigrées ivoiriennes ont aussi tendance à résider depuis moins longtemps dans le pays. En lien avec ce dernier résultat, elles ont aussi moins fréquemment (acquis) la nationalité italienne que les hommes ce qui joue en leur défaveur comme le montre le Tableau 3.1. Effectivement, les femmes émigrées ivoiriennes sont 66 % en emploi quand elles ont obtenu la nationalité italienne contre 40 % autrement. Un résultat observable aussi aux États-Unis et en France.
L’accès à l’emploi des émigrés ivoiriens s’améliore avec leur niveau d’éducation
Comme attendu, pour les émigrés ivoiriens comme pour l’ensemble de la population, l’employabilité des individus s’améliore avec leur niveau d’étude comme le montre le Graphique 3.10. Ainsi, 71 % des émigrés ivoiriens avec un niveau d’éducation élevé, c’est-à-dire qui ont atteint un enseignement supérieur, ont un emploi. Ce taux diminue de 10 points de pourcentage pour ceux ayant atteint un niveau intermédiaire (deuxième cycle de l’enseignement secondaire) et de 10 points de pourcentage supplémentaires pour ceux avec un niveau faible (premier cycle de l’enseignement secondaire ou moins). Ces taux sont restés très stables entre 2010 et 2015.
L’accès à l’emploi des émigrés ivoiriens selon le niveau d’éducation, s’il s’inscrit dans la moyenne des émigrés de l’UEMOA, diffère substantiellement des niveaux moyens observés pour les immigrés et les natifs. Tout d’abord, les immigrés s’étant arrêtés au collège ou avant s’insèrent mieux que les natifs à niveau d’étude égal. En 2015/16, 51.5 % des émigrés ivoiriens, 54.6 % des émigrés de l’UEMOA et 54.4 % de l’ensemble des immigrés dans les pays de l’OCDE avec un niveau d’éducation faible sont des actifs occupés contre 45 % des natifs. Ce dernier résultat ne devrait pas être étonnant, dans la mesure où le niveau d’étude minimum généralement atteint dans les pays de l’OCDE dépasse le premier cycle du secondaire. Ainsi, la grande majorité des individus sans emploi nés dans le pays et avec un niveau d’éducation faible sont inactifs plutôt qu’à la recherche d’un emploi.
Les écarts avec le taux d’emploi des immigrés et des natifs se creusent à mesure que le niveau d’étude augmente. Ainsi, les émigrés ivoiriens (et plus généralement les émigrés de l’UEMOA) ayant atteint un niveau équivalent au lycée sont moins fréquemment en emploi (‑6 points de pourcentage) que les immigrés et les natifs des pays de l’OCDE dont le taux d’emploi est de 68 %. Bien que cet écart se maintient entre le taux d’emploi des émigrés ivoiriens avec le taux moyen des immigrés ayant suivi un niveau d’étude supérieur, il se creuse davantage avec les natifs dont le taux d’emploi atteint 83 % (+12 points de pourcentage).
Ainsi, malgré un accès à l’emploi d’autant plus facile que le niveau d’étude est élevé, les émigrés ivoiriens sont plus vulnérables sur le marché du travail que les autres à niveau d’étude égal. En effet, ils sont plus souvent au chômage. Les individus avec un niveau d’éducation faible sont près deux fois plus fréquemment au chômage que les immigrés en moyenne (26 % contre 14 % et 12 % des natifs) et trois fois plus fréquemment pour les émigrés ivoiriens avec un niveau d’étude moyen et supérieur (respectivement 21 et 15 % contre 9 et 6.5 % pour les immigrés et 8 et 4.5 % pour les natifs).
Ce constat se vérifie, en général, dans l’ensemble des principaux de pays de destination en 2015/2016 comme le met en évidence le Graphique 3.11. Aux États-Unis, il est intéressant de noter que hormis à niveau d’éducation faible, le taux d’emploi des émigrés ivoiriens est très proche de celui des immigrés et des natifs. Effectivement, avec un niveau d’éducation élevé, 80.5 % des émigrés ivoiriens occupent un emploi contre 83.2 % des natifs. En réalité, comme nous l’analysons plus bas, ce taux élevé d’emploi des émigrés ivoiriens ayant suivi un enseignement supérieur cache une inadéquation importante entre le poste occupé et leurs qualifications.
En Italie, les émigrés ivoiriens occupent un emploi dans des proportions similaires qu’ils aient suivi un enseignement secondaire de premier ou de second cycle bien que ces taux diffèrent davantage en 2017/2020. Cela s’explique notamment par le fait que les femmes émigrées ivoiriennes résidant en Italie sont surreprésentées parmi les émigrés ivoiriens avec un niveau d’éducation moyen. Comme analysé précédemment, les femmes en Italie souffrent d’un accès plus difficile au marché du travail que les hommes et ce quel que soit leur niveau d’éducation. Le taux d’emploi des émigrés ivoiriens avec un niveau d’étude supérieur est à interpréter avec précaution du fait de leur très faible effectif dans le pays.
En France, en 2015/2016, les émigrés ivoiriens avec un faible niveau d’éducation s’en sortent généralement mieux que les immigrés à niveau d’éducation égal dont le taux d’emploi est inférieur de 9 points de pourcentage (44 % de la population immigrée en âge de travailler est en emploi). Cet écart se réduit de 6 points de pourcentage pour ceux avec un niveau d’éducation intermédiaire. Le taux d’emploi des émigrés ivoiriens atteint 60 % contre 57 % des immigrés. L’écart entre le taux d’emploi des émigrés ivoiriens et celui moyen des immigrés devient quasiment nul quand ils ont suivi un enseignement supérieur. Cependant, il est largement inférieur au taux d’emploi des natifs avec un niveau d’éducation supérieur. Ces derniers sont 82 % à être en emploi contre 68 % des émigrés ivoiriens. Les émigrés ivoiriens à chaque niveau d’étude considéré ne sont plus souvent ni en emploi, ni en étude ni en stage que les natifs (10 points de pourcentage de plus à chaque niveau d’étude considéré).
Le taux d’emploi des émigrés ivoiriens les plus éduqués cache une inadéquation entre leur qualification et les emplois occupés
Si les émigrés ivoiriens diplômés du supérieur ont une probabilité plus élevée d’être en emploi que les autres émigrés ivoiriens, près de la moitié d’entre eux ont un emploi ne nécessitant pas un tel niveau d’éducation, comme le montre le Graphique 3.12. Dans les pays de l’OCDE, en 2015‑16, 48 % des émigrés ivoiriens diplômés du supérieur occupent un emploi en inadéquation avec leurs qualifications, un taux supérieur à celui observé pour l’ensemble des émigrés des pays de l’UEMOA (44 %). Ce taux est également supérieur de plus de 10 et 20 points de pourcentage à celui prévalant respectivement pour les immigrés (35 %) et les natifs (28 %) des pays de l’OCDE.
Encadré 3.1. Déclassement : définition et mesure
Indicateur : On parle de déclassement lorsque le niveau d’éducation formel de l’individu est plus élevé que celui que requiert l’emploi qu’il occupe. Le taux de déclassement estimé ici est la part des personnes ayant un diplôme de l’enseignement supérieur et occupant un emploi peu ou moyennement qualifié. Le niveau d’étude est mesuré à partir de la Classification internationale type de l’éducation (CITE), les diplômés du supérieur étant classés dans les niveaux 5 et 6. Le niveau de qualification des emplois est mesuré à partir de la Classification internationale type des professions (CITP), une profession très qualifiée comprenant les CITP 1, 2 et 3.
Chez les immigrés, le déclassement est supposé rendre compte du degré de transférabilité du capital humain d’un pays à l’autre. En effet, les diplômes et les compétences linguistiques acquises dans le pays d’origine ne sont pas toujours immédiatement transférables dans le pays d’accueil.
Champ : Population en emploi de 15 à 64 ans ayant un haut niveau d’éducation (CITE 5‑6), non compris les forces armées (CITP 0), dont le niveau de qualification de l’emploi n’est pas référencé.
Le déclassement des travailleurs nés en Côte d’Ivoire est très hétérogène selon les pays de destination. La langue officielle dans ces pays ne semble pas être un catalyseur du déclassement des individus nés en Côte d’Ivoire dont la langue officielle est le français. Par exemple, si les taux de déclassement sont élevés, ils sont significativement inférieurs relativement à la moyenne de l’OCDE au Canada, partiellement francophone, et au Royaume‑Uni affectant respectivement 39 et 31 % des émigrés ivoiriens avec un diplôme du supérieur et en emploi. Dans ces derniers pays, il s’écarte moins des taux de déclassement des immigrés les plus éduqués situés entre 36 % et 37 % au Canada et 35 et 42 % au Royaume‑Uni selon leur pays de naissance.
En France, le déclassement concerne 40 % des émigrés ivoiriens contre 34 % des émigrés de l’UEMOA et 31 % des immigrés en général. C’est près de 15 points de pourcentage de plus que pour les natifs dont le déclassement concerne 24 % des actifs occupés avec un niveau d’éducation supérieur. Les données disponibles sur la période 2017/2020 montrent que le fait d’avoir étudié en France ou à l’étranger est un facteur d’accès aux postes en adéquation avec le niveau d’étude atteint. Les émigrés ivoiriens ayant suivi leurs études supérieures en France (arrivés avant leur 18 ans) sont un quart à occuper un poste en inadéquation avec leurs qualifications. Ce taux de déclassement est inférieur à celui observé pour la moyenne des immigrés ayant faits leurs études en France (28 %). Ce taux double pour les émigrés ivoiriens arrivés en France après leurs études supérieures (arrivés après 25 ans) ; la moitié d’entre eux (52 %) occupe des fonctions qui demandent moins de qualifications qu’ils n’en ont. La spécialité d’étude n’est pas un déterminant du type de poste occupé en France.
Aux États-Unis, parmi les diplômés du supérieur, le déclassement touche 35 % de l’ensemble des immigrés, 55 % des émigrés de l’UEMOA et 63 % des émigrés ivoiriens. Ce constat se vérifie avec les données les plus récentes disponibles pour les États-Unis (ACS, Census Bureau 2017/19) pour lesquelles le taux de déclassement des émigrés ivoiriens touche 51 % des plus éduqués en emploi, un taux similaire à celui de l’ensemble des émigrés de l’UEMOA. Le déclassement des émigrés ivoiriens s’explique au moins pour partie par le fait d’avoir suivi ses études supérieures aux États-Unis ou non. Les émigrés ivoiriens arrivés avant leurs 18 ans ne sont plus que 44 % à occuper des postes en inadéquation avec leurs qualifications, 41 % pour ceux arrivés entre 18 et 24 ans contre 57 % pour ceux arrivés après leurs 25 ans et donc ayant suivi leurs études supérieures en dehors des États-Unis. Il décroit aussi substantiellement après avoir passé plus de 10 ans sur le territoire américain (48 %) et surtout égalise le taux de déclassement des natifs quand ils ont résidé plus de 20 ans aux États-Unis. Cependant, avoir la nationalité américaine ne semble pas jouer significativement sur le déclassement des émigrés ivoiriens. Les femmes y sont aussi relativement davantage exposées puisque 53 % d’entre elles occupent un poste en inadéquation avec leurs qualifications contre 49 % des hommes.
La plus forte inadéquation des femmes entre le poste qu’elles occupent et leurs qualifications s’observe dans l’ensemble des pays de l’OCDE pour les immigrés. En revanche, elle touche en moyenne davantage les hommes que les femmes parmi les natifs. En France, le taux de déclassement des femmes émigrées ivoiriennes est 5 points de pourcentage supérieur à celui des hommes pendant la période 2017/2020.
Les émigrés ivoiriens sont surreprésentés dans les professions faiblement qualifiées
Cette inadéquation entre l’emploi et les qualifications des émigrés, particulièrement des émigrés ivoiriens dans les pays de l’OCDE, se matérialise par une surreprésentation des travailleurs immigrés dans les professions les moins qualifiées en 2015/2016. Comme le montre le , près d’un quart, soit 24 %, des actifs occupés nés en Côte d’Ivoire travaillent comme personnels des services directs aux particuliers ou comme commerçants dans les pays de l’OCDE contre 16 % des natifs. Dans ce type de poste, ils sont essentiellement dédiés aux soins personnels (37 %) et aux services de protection (25 %) et relativement moins dans les services à la personne et à la vente (respectivement 19.6 et 18.4 %). Cette distribution parmi les travailleurs émigrés ivoiriens comme personnels des services directs aux particuliers est très hétérogène selon le genre. Tout d’abord, ce sont essentiellement des femmes qui occupent ces emplois puisqu’elles sont 30 % à occuper un tel poste contre 19 % des hommes. De plus, parmi ce type de professions, les femmes se dédient essentiellement aux soins aux particuliers (57 % contre 5 % des hommes) quand les hommes travaillent en majorité dans des services de protection (59 % contre 2 % des femmes). Les postes occupés semblent ainsi très segmentés selon le genre.
22 % des émigrés ivoiriens en emploi dans les pays de l’OCDE occupent une profession élémentaire, demandant peu de qualifications. Cela reste inférieur à la moyenne des émigrés des pays de l’UEMOA dont 29 % a une profession élémentaire mais supérieur à la moyenne des immigrés dans les pays de l’OCDE (17 %) et des natifs (10 %). Les travailleuses émigrées ivoiriennes occupent trois fois sur dix une profession élémentaire contre 14 % des hommes. Au total, 15 % des émigrés ivoiriens sont aide ménagers correspondant à la première profession occupée par la diaspora ivoirienne dans les pays de l’OCDE contre seulement 2.6 % des natifs.
Suivent les professions intermédiaires et les professions intellectuelles demandant, toutes deux, un niveau de qualification élevé et qui occupent respectivement 13.5 et 12.3 % des émigrés ivoiriens soit deux et cinq points de pourcentage de moins que les natifs. Si la distribution homme‑femme est plus équilibrée pour les professions intermédiaires, elle est davantage inégale pour les professions intellectuelles et scientifiques où on retrouve 10 % des femmes contre 15 % des hommes. 4.5 % des émigrés ivoiriens sont directeurs, cadres ou gérants. 30 % des émigrés ivoiriens occupent ainsi un poste hautement qualifié auxquels les femmes ont relativement moins accès (26 % contre 36 % des hommes).
Viennent ensuite les métiers qualifiés de l’industrie et de l’artisanat, les employés de type administratif et les opérateurs d’usine et assembleurs de machines (respectivement 8.3, 7.5 et 6.3 % des actifs occupés nés en Côte d’Ivoire). Les hommes sont relativement mieux représentés dans les premiers et derniers types de professions que les femmes.
Les professions des travailleurs émigrés ivoiriens diffèrent selon le pays de destination
Cette distribution est davantage contrastée selon les pays de destination, comme présenté dans le Graphique 3.14. C’est en Italie, au Royaume‑Uni et en Belgique que les émigrés ivoiriens occupent le plus des professions qui demandent peu de qualifications : environ un tiers d’entre eux ont une profession élémentaire (37 % en Italie, 36 % au Royaume‑Uni et 30 % en Belgique). En Italie, les émigrés ivoiriens sont plus de la moitié à occuper un poste de services aux particuliers ou une profession élémentaire, un constat qui se maintient sur la période la plus récente entre 2017 et 2020. Très peu accèdent à des professions intellectuelles ou scientifiques (8.7 % en 2015/16 et 5.2 en 2017/20).
Au Canada, en revanche, moins d’un cinquième des émigrés ivoiriens occupent un poste de services aux particuliers et 6 % une profession élémentaire. Plus de la moitié des émigrés ivoiriens occupent des postes hautement qualifiés, notamment, près d’un tiers des émigrés ivoiriens en emploi a une profession intellectuelle et scientifique. Ces derniers résultats peuvent s’expliquer en partie par les besoins de main d’œuvre et donc des politiques mises en place pour la migration de travail. Effectivement, le Canada est le pays de l’OCDE qui accueille le plus grand nombre d’immigrés qualifiés disposant d’un système d’immigration le plus élaboré pour ce faire (OCDE, 2019[3]).
En France, les émigrés ivoiriens occupent le plus des professions de services aux particuliers (28 %). Ils sont 20 % à avoir une profession élémentaire et 32 % à occuper un poste hautement qualifié. D’après les données les plus récentes, ils ont notamment plus souvent une profession intellectuelle ou scientifique que les émigrés de l’UEMOA. La majeure partie des émigrés ivoiriens avec un niveau d’éducation faible occupe une profession élémentaire (45 %) ou de services aux particuliers (34 %) alors qu’ils ne sont plus que 20 et 29 % avec un niveau d’éducation intermédiaire et 6 et 17 % avec un niveau d’éducation élevé comme le montre le Graphique 3.15.
L’acquisition de la nationalité française semble aussi jouer un rôle important dans l’obtention de postes hautement qualifiés pour les émigrés ivoiriens. Les individus avec la nationalité française de naissance sont 40 % à occuper ce type de poste. Ce taux diminue à 26 % pour ceux naturalisés et à 19 % pour ceux qui n’ont pas la nationalité française. Près de deux tiers de ces derniers (63 %) ont une profession élémentaire ou dans les services aux particuliers contre 50 % des naturalisés et moins d’un quart des émigrés ivoiriens français de naissance. Ce résultat ne se retrouve pas pour le temps écoulé sur le territoire français, la distribution par types de professions restant stable selon le temps écoulé depuis l’arrivée des émigrés ivoiriens.
L’emploi de la majorité des émigrés ivoiriens en France se fait sous la forme de contrat à durée indéterminée (CDI) comme c’est le cas pour les natifs. Cependant, ils restent davantage vulnérables que ces derniers dans la mesure où ils sont plus régulièrement en contrat à durée déterminée (14 %, soit 5 points de pourcentage de plus que les natifs) et surtout plus souvent intérimaires (7 % contre 2 % des natifs). Les hommes sont davantage exposés à de tels statuts plus vulnérables : ils sont 10 % à être intérimaires et 14 % indépendants (5 et 4 % pour les femmes).
Aux États-Unis, les émigrés ivoiriens sont surreprésentés dans des types de professions relativement différents comme présenté dans le Graphique 3.16. Ils sont par exemple le plus nombreux dans les professions de transport et de la manutention où on retrouve 14 % des émigrés ivoiriens en emploi soit le double de la proportion des natifs américains actifs occupés. Les hommes y sont largement plus représentés que les femmes (23 % contre 3 % des femmes). L’essentiel des femmes occupent des postes en lien avec les soins de santé : 13.4 % des émigrées ivoiriennes ont une profession des services et des soins aux particuliers, 11.4 % sont des soutiens au personnel soignant et 9.2 % travaillent comme personnel soignant. Elles sont aussi plus d’une sur dix à travailler comme préparatrice alimentaire et commerciale.
L’emploi des émigrés ivoiriens est largement orienté vers les services en France et aux États-Unis
En France et aux États-Unis, sur la période 2017/2020 et 2017/2019, l’activité des émigrés ivoiriens est largement tournée vers les services comme le montre le Graphique 3.17. Dans les deux pays, la part des émigrés en emploi dans le secteur primaire et secondaire ne dépasse pas 10 % ; ils sont essentiellement concentrés dans l’industrie manufacturière et les industries extractives.
En France, les actifs occupés se partagent entre l’administration publique, l’enseignement, la santé et l’action sociale (27.4 %), le commerce, les transports, la restauration et l’hébergement (25.7 %) et les activités spécialisées, scientifiques et techniques et activités de services administratifs (24.8 %). Les femmes sont significativement plus fréquemment dans cette première branche (40 % contre 12 % des hommes) que dans les dernières (respectivement 22 et 19 % des femmes émigrées ivoiriennes en emploi). 78 % des émigrés ivoiriens en France travaillent dans le privé, 16 % dans le public et 6 % auprès de particuliers contre 69.5, 28 et 2.5 % respectivement pour les natifs.
Aux États-Unis, 43 % des émigrés ivoiriens sont dans l’administration publique, l’enseignement, la santé ou l’action sociale. En Italie, le constat est très différent dans la mesure où le premier secteur d’activité des émigrés ivoiriens est l’industrie manufacturière et extractive. 41 % d’entre eux travaillent dans cette branche d’activité. Ils sont 20 points de pourcentage plus souvent dans ce secteur que les natifs. Cependant, 53 % des émigrés ivoiriens sont dans le secteur des services notamment dans le commerce, les transports, l’hébergement et la restauration où 18 % d’entre eux occupent un emploi.
Les descendants d’émigrés ivoiriens ne sont pas particulièrement pénalisés sur le marché du travail
Les individus nés d’au moins un parent émigré ivoirien en France sont encore relativement jeunes ; il est donc difficile de comparer leur intégration économique à celle de ceux dont les parents sont nés en France. En 2017/2020, parmi l’ensemble des personnes d’âge actif ayant au moins un parent né en Côte d’Ivoire, 58 % sont en emploi (voir Tableau 3.2), tandis que 37 % sont inactifs, avec peu de différences entre hommes et femmes. Cependant, en restreignant les descendants d’émigrés ivoiriens aux 25‑64 ans, 75 % d’entre eux sont en emploi, soit un taux similaire à celui observé pour les descendants de natifs mais supérieur à celui des descendants d’au moins un parent immigré en France. L’écart entre hommes et femmes est toutefois plus important : 70 % des femmes sont en emploi contre 81 % des hommes.
Ce taux s’améliore avec leur niveau d’étude passant de 72 % avec un niveau d’éducation intermédiaire à 85 % avec un niveau d’éducation supérieur. Ces derniers occupent davantage des postes en adéquation avec leur niveau d’étude. Ils ne sont plus que 18.4 % à avoir un emploi en adéquation avec leurs qualifications quand les descendants de natifs sont 19 % (22 % pour les descendants d’immigrés).
Tableau 3.2. Taux d’emploi des descendants d’immigrés selon l’âge, le genre et le niveau d’éducation et taux de déclassement en France, 2017/20
% de la population entre 25 et 64 ans (et avec un niveau d’étude élevé pour le taux de déclassement)
Taux d’emploi |
Taux de déclassement |
|||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Âge |
Genre |
Niveau d’éducation |
||||||
|
15‑64 ans |
25‑64 ans |
Hommes |
Femmes |
Faible |
Moyen |
Élevé |
|
Au moins un parent émigré ivoirien |
58.1 |
75.4 |
81.3 |
69.8 |
52.1 |
72.3 |
85.2 |
18.4 |
Au moins un parent immigré |
58.1 |
71.0 |
74.6 |
67.7 |
53.7 |
69.6 |
82.6 |
22.1 |
Descendants de natifs |
67.4 |
76.2 |
79.0 |
73.4 |
53.8 |
74.9 |
87.4 |
19.0 |
Source : Enquête emploi en continu de l’Insee (EEC) 2017/20.
Parmi les individus en emploi, ils sont mieux représentés dans les postes hautement qualifiés comme le montre le Graphique 3.18. Effectivement, la moitié de ceux ayant au moins un parent émigré ivoirien occupent un poste de directeur, cadre et gérant, une profession intellectuelle ou une profession intermédiaire. Si les femmes sont moins bien représentées à des postes de direction (2 % contre 12 % des hommes) elles sont plus nombreuses dans les professions intellectuelles ou scientifiques (30 % contre 21 % des hommes). Par ailleurs, ils ne sont plus que 10 % à occuper une profession élémentaire et 19 % à être personnel de services aux particuliers contre 22 et 27 % pour leurs ainés entre 2017 et 2020. Les hommes sont dorénavant davantage représentés dans les professions élémentaires que les femmes. De façon générale, ils sont près de 28 % à travailler dans le secteur public.
Conclusion
L’intégration sur le marché du travail de la diaspora ivoirienne est délicate dans les pays de l’OCDE. Les taux d’activité relativement élevés des émigrés ivoiriens dans ces pays cachent en réalité un taux de chômage plus élevé que celui observé pour l’ensemble des immigrés. Le niveau d’éducation, le lieu des études supérieures, la durée de séjour et l’acquisition de la nationalité sont autant de facteurs déterminant dans l’accès à l’emploi dans ces pays. Cette insertion est d’autant plus difficile pour les femmes nées en Côte d’Ivoire qui doivent ainsi faire face à un double défi, celui d’être une femme sur le marché du travail, d’une part, et celui d’être née à l’étranger, d’autre part. L’essentiel des travailleurs émigrés ivoiriens occupent des postes faiblement qualifiés déclassant une partie non négligeable de la main d’œuvre avec un niveau d’étude élevé. Ils se concentrent essentiellement dans le secteur des services. Leurs enfants nés dans le pays de destination semblent s’insérer de façon similaire que les descendants de natifs, comme c’est notamment le cas en France. Leur accès à l’emploi est ainsi le même que ces derniers mais ils restent plus vulnérables car ils sont plus souvent indépendants ou intérimaires.
Références
[2] OCDE (2020), Perspectives des migrations internationales 2020, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/6b4c9dfc-fr.
[3] OCDE (2019), Recruiting Immigrant Workers: Canada 2019, Recruiting Immigrant Workers, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/4abab00d-en.
[1] Ruggles, S. et al. (2021), IPUMS USA: Version 11.0, https://doi.org/10.18128/D010.V11.0.