Ce chapitre contient une synthèse des conséquences de la pandémie de COVID‑19 sur le secteur des transports, ainsi qu’une description des prinicaples sources d’incertitude qui compromettent actuellement la reprise. Les principaux déterminants de la demande de transport et les externalités qui entravent les efforts déployés pour décarboner le secteur y sont également examinés. L’ampleur de ce défi est exposée dans les grandes lignes, suivi d’un point est fait sur la coopération internationale mise en place pour atteindre les objectifs de décarbonation. Le chapitre se termine sur les priorités à prendre en compte parles ministères des Transports en vue d’honorer les engagements contractés en vertu de l’Accord de Paris.
Perspectives des transports FIT 2023
1. Un redémarrage rapide et de nouvelles incertitudes en perspective pour les transports
Abstract
En résumé
Au cours de la période 2020-22, la pandémie de COVID-19 a poussé les gouvernements du monde entier à imposer des mesures de confinement et des restrictions de déplacement, dont le secteur mondial des transports a pâti en profondeur, quoiqu’il s’en remette finalement plus vite que prévu. Depuis, les modes d’intervention publique ont évolué. Certaines mesures, comme les restrictions de déplacement, ont pris fin. D’autres, comme l’investissement en faveur des mobilités actives, se sont généralisées dans plusieurs régions.
Cependant, en 2022, alors même que la reprise post-COVID s’affermissait, la guerre a éclaté en Ukraine, causant des destructions et des souffrances d’une ampleur inouïe. Cette guerre est allée de pair avec une crise énergétique et d’immenses perturbations dans les chaînes d’approvisionnement. Ces événements perturbateurs ont fait surgir de nouvelles sources d’incertitude pour les usagers et les transporteurs du monde entier et leurs effets subsistent à l’heure où ce rapport est mis sous presse.
Les courbes des produits intérieurs bruts (PIB), l’évolution de la structure des échanges commerciaux et la volatilité des prix de l’énergie laissent deviner l’effet potentiel des événements en cours sur la demande de transport : l’évolution du PIB influe à la fois sur le transport de marchandises et de voyageurs ; le commerce international conditionne les caractéristiques du fret et le niveau de sa demande ; les fluctuations des prix de l’énergie influent les habitudes de déplacement.
La reprise du secteur fait apparaître des vérités qui dérangent : le transport de voyageurs est en plein essor depuis la fin des restrictions sur les déplacements et de nouvelles routes commerciales ont remplacé celles devenues impraticables en raison de la guerre et des sanctions. Pourtant, le secteur reste très largement tributaire des carburants fossiles, ce qui fait persister sa vulnérabilité face aux variations des prix de l’énergie.
La soutenabilité future du secteur des transports dépend, dans une large mesure, de la manière dont il va réagir à la crise structurelle provoquée par le réchauffement planétaire. Étant donné les prévisions de croissance démographique et économique, la demande de transport de marchandises et de voyageurs va également augmenter. Les projections établies par ce rapport montrent que les engagements pris en vue de réduire les émissions de carbone sont insuffisants.
La décarbonation est un défi de grande envergure. La coopération internationale progresse certes, mais doit encore s'accélérer. Dans ce contexte, la question de l’équité dans la réalisation des objectifs climatiques devient encore plus urgente. Dans de nombreux pays, il reste très difficile de concilier les priorités nationales et les engagements contractés en vertu de l’Accord de Paris.
Principaux points à retenir
Le secteur des transports se remet de la pandémie plus vite que prévu, mais se heurte encore à des problèmes de taille.
L’agitation sur les marchés de l’énergie et la crise du coût de la vie compliquent la décarbonation des transports.
Malgré certains progrès, les émissions dues aux transports ne diminueront pas assex dans les années à venir pour qu’il soit possible d’atteindre les objectifs climatiques internationaux.
Il existe des mécanismes utiles aux objectifs de décarbonation, mais leur niveau d’ambition doit être revu à la hausse.
Les pouvoirs publics se doivent de concilier plusieurs priorités tout en respectant les engagements climatiques
Le secteur mondial des transports a redémarré plus vite que prévu au lendemain de la pandémie de COVID‑19, mais d’importants écarts demeurent entre les pays ainsi qu'au sein d'un même pays, écarts qui sont exacerbés par de nouvelles incertitudes.
La demande de transport restera orientée à la hausse sous l’effet de la croissance démographique et économique, rendant la coopération internationale indispensable pour atteindre les objectifs de décarbonation. Dans ce contexte, les ministères des Transports du monde entier seront confrontés à des priorités concurrentes et auront besoin de solutions capables de répondre à de multiples enjeux.
Ce chapitre analyse la reprise observée dans le secteur des transports au sortir de la pandémie de COVID‑19. Il explore la manière dont les déterminants de la demande de transport vont vraisemblablement infléchir cette demande dans le climat économique actuel et compte tenu des nouvelles incertitudes.
Reprise post-pandémie : de nouvelles incertitudes s’installent
Toutes les projections établies sur les tendances futures dans les transports sont sujettes à des incertitudes. La présente édition des Perspectives des transports du FIT ne fait pas exception : elle rend compte des effets attendus et inattendus de la pandémie de COVID‑19 et des perturbations qui se sont ensuivies dans les transports. En 2022, la guerre en Ukraine est venue bouleverser à nouveau l’économie mondiale qui sortait à peine de la crise sanitaire. En dépit de l’instabilité actuelle des échanges commerciaux internationaux et des chaînes d’approvisionnement mondiales, la demande de transport est appelée à progresser fortement sur le long terme du fait de la croissance économique attendue. Les tendances en matière de démographie, de densité de population et d’urbanisation sont à la hausse et joueront un rôle décisif dans l’évolution des activités de transport. D'autres facteurs, notamment les prix de l’énergie, les politiques d'aménagement du territoire et les modifications des comportements, influeront également sur la demande de transport et les choix de mobilité et de déplacement des individus et des entreprises.
Le secteur des transports contribue notablement à augmenter l’accessibilité et a des répercussions importantes sur la situation économique et sociale des individus. Également partie prenante du développement durable mondial, il est un acteur mondial majeur du Programme de développement durable à l’horizon 2030 (Nations Unies, 2015[1]). L’Organisation des Nations Unies définit le développement durable comme étant « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs » (Nations Unies, 2022[2]). La demande de transport augmentant, il sera primordial de satisfaire les besoins de mobilité tout en cherchant des solutions pour faire face à la hausse des émissions de dioxyde de carbone (CO2), à la mauvaise qualité de l’air et à la congestion, et pour améliorer l’accès de tous aux biens, aux services, aux opportunités d'emploi, aux études et aux soins.
Le défi est toutefois colossal. En 2018, le secteur des transports produisait 23 % des émissions mondiales de CO2 liées à la consommation d'énergie (AIE, s.d.[3]) et était celui qui avait le plus recours aux énergies fossiles (AIE, 2022[4]). Dans près de la moitié des pays, il est le secteur le plus émetteur de toute l’économie (Nations Unies, 2021[5]). Or, les transports sont relativement difficiles à décarboner, d’une part car ils sont très dépendants du pétrole, d’autre part parce que les choix individuels de mobilité compliquent l’équation. Les individus continueront de se déplacer, et les marchandises continueront de circuler. Face à la progression de la demande de transport, même en des temps incertains, les dirigeants doivent impérativement agir pour atténuer les émissions du secteur des transports conformément aux objectifs de l’Accord de Paris. Il importe de satisfaire la demande de transport d’une manière juste sur le plan social et environnemental, en réduisant les émissions tout en assurant la circulation des biens et des voyageurs.
La demande de transport évolue principalement en fonction de l’état de l’économie, de la démographie et des marchés de l’énergie. Lorsque l’activité économique et le revenu disponible des ménages augmentent, la demande de transport de voyageurs et de marchandises suit. De même, une croissance de la population se traduit par une demande de transport plus forte. Les phénomènes démographiques associés, comme l’urbanisation ou la modification de la pyramide des âges nationale, se répercutent aussi sur la demande de transport et sur les réponses apportées par les pouvoirs publics. Par ailleurs, les fluctuations des prix de l’énergie ont des conséquences sur les schémas de déplacement et sur les investissements dans des carburants de substitution. La demande de transport est aussi influencée par les progrès technologiques et l’évolution des comportements à long terme. Tous ces facteurs interviennent dans la demande de mobilité. Celle-ci détermine à son tour les décisions de planification et d’investissement relatives aux transports.
Bilan des répercussions de la crise du COVID‑19 sur les transports
La pandémie de COVID‑19 a amené d’importants changements dans les sphères sociale, économique et environnementale. Comme la plupart des secteurs de l’économie, les transports ont été percutés par la crise au niveau de tous les modes. Les mesures de confinement et les autres restrictions de déplacement adoptées au niveau national ou local ont réduit la circulation des biens et des voyageurs de façon totalement inédite. La pandémie a touché tous les modes de transport nationaux et internationaux, des véhicules particuliers et transports publics urbains jusqu’aux autocars, aux trains et aux avions.
Les mesures de distanciation sociale et de confinement ont aussi eu des effets sur la fréquentation des transports publics et les services de mobilité partagée. Les chaînes d’approvisionnement mondiales ont été fortement perturbées et le transport aérien de voyageurs a chuté de 60 % en 2020 (OACI, 2023[6]). L’emploi a été frappé de plein fouet dans tous les secteurs, plus spécialement dans le commerce de détail et le tourisme. Les travailleurs des secteurs informels, qui forment une part non négligeable de la population active dans les pays émergents et en développement, ont été particulièrement touchés ayant moins bénéficié des dispositifs de protection sociale que les travailleurs des secteurs formels de l’économie (Banque mondiale, 2020[7]).
Durant les premiers mois de la pandémie en 2020, les travailleurs assurant des services essentiels étaient soumis a des restrictions et à des options de transport public limitées. Les pouvoirs publics ont réagi immédiatement en autorisant ces employés à utiliser les services de transport disponibles à titre exceptionnel. Les autorités se sont d’abord appliqués à garantir un accès équitable et ininterrompu aux services fondamentaux et d’assurer la circulation des biens essentiels (OCDE, 2023[8]).
Le secteur des transports s’est adapté à ces nouvelles circonstances. Les travailleurs du secteur de la santé ont par exemple bénéficié de trajets gratuits ou à tarif réduit dans les transports publics, en vélo partagé, en taxi et en VTC (véhicule de transport avec chauffeur). De nombreux services de bus et de train ont été maintenus avec des capacités de transport réduites. Un certain nombre de mesures ont été prises durant quelques mois dans les villes afin de libérer de l’espace de voirie pour les piétons et les vélos (OCDE, 2023[8]).
Avec la pandémie, beaucoup de voyageurs ont modifié leurs habitudes de mobilité. Dans un premier temps, ce ne sont pas uniquement des individus mais également des villes et des pays entiers qui ont été mis à l’arrêt, et les chaînes d’approvisionnement ont été mises à rude épreuve. À mesure que les vagues de la pandémie se produisaient les pays se sont efforcés de maintenir ou rétablir les services de transport et de soulager les tensions dans les chaînes d’approvisionnement. Les autorités gouvernementales ont élaboré des mécanismes de financement et des dispositifs de restructuration destinés aux opérateurs de transport afin d’atténuer leurs difficultés financières et de soutenir leurs activités au sortir de la pandémie.
La reprise post-pandémie a été plus rapide que prévu mais des difficultés demeurent
L’édition 2021 des Perspectives des transports du FIT se fondait sur un ensemble de défis et d’opportunités susceptibles d’émerger dans la décarbonation des transports à la suite de la pandémie de COVID‑19. Elle présentait trois scénarios qui évaluaient l’incidence de différentes trajectoires d’action sur la demande de transport, les émissions de gaz à effet de serre, les émissions de polluants locaux, l’accessibilité, la connectivité et la résilience. Les trois scénarios tenaient compte des effets de la pandémie en intégrant des hypothèses sur ses répercussions économiques, les changements de comportement anticipés et l’ampleur de ses conséquences sur l’offre de transport et les schémas de déplacement tant à court qu’à long terme.
La reprise économique après la pandémie a été cependant plus rapide que ce qui avait été estimé. L’édition 2021 des Perspectives des transports du FIT faisait l’hypothèse d’une chute mondiale des échanges commerciaux et des produits intérieurs bruts (PIB) en 2020. Elle considérait ensuite que les pays retrouveraient les années suivantes des taux de croissance du même ordre que ceux figurant dans les prévisions antérieures à la pandémie. À titre d'approximatif les modèles tablaient sur un retard de cinq ans pour les projections des PIB et des échanges par rapport aux niveaux établis avant le COVID‑19 (FIT, 2021[9]). Or, au fil de la pandémie, des solutions ont été trouvées pour permettre aux flux commerciaux de se poursuivre.
En 2021, le PIB de plusieurs pays était déjà revenu à son niveau d’avant la pandémie. Parmi les pays du Groupe des sept (G7), au quatrième trimestre de 2021, le Canada avait dépassé de 0.2 % son niveau de PIB du quatrième trimestre 2019, c'est-à-dire juste avant le COVID‑19. Les États-Unis et la France avaient déjà atteint leurs niveaux de PIB antérieurs à la pandémie au second et au troisième trimestres de 2021, respectivement (OCDE, 2022[10]). Pour le Groupe des vingt (G20), malgré d’importants écarts entre les pays, le PIB du Groupe a retrouvé son niveau d’avant la pandémie au premier trimestre 2021. L’Inde, la République populaire de Chine et la Türkiye ont été les premiers pays du G20 à y parvenir avant la fin de 2020. L’Australie, le Brésil et la Corée sont également revenus à leurs niveaux antérieurs au COVID‑19 au premier trimestre 2021 (OCDE, 2021[11]).
La reprise économique a affiché une belle dynamique en 2021 dans le monde entier. Elle a néanmoins marqué le pas vers la fin de l’année, en partie à cause du variant Delta du coronavirus et des difficultés d’approvisionnement persistantes occasionnées par la pandémie (FMI, 2021[12]). Le Fonds monétaire international (FMI) a révisé à la baisse les prévisions de croissance des économies avancées pour 2021 en raison d’un recul des stocks et d’un essoufflement de la consommation au troisième trimestre. Dans le même temps, le FMI a revu ses chiffres à la hausse pour les économies émergentes à la faveur d’une demande intérieure plus soutenue qu’anticipé. Ces nouvelles données ne correspondaient pas aux hypothèses retenues pour l’édition 2021 des Perspectives des transports du FIT, qui prévoyait une reprise économique plus lente.
Le commerce international et le transport de marchandises sont intrinsèquement liés
Alors que le commerce international avait rebondi avec vigueur après s’être effondré lors de la pandémie, il a plongé à nouveau à la suite du déclenchement de la guerre en Ukraine en 2022. La chute des volumes d’échanges commerciaux due à la crise sanitaire restera dans les annales comme l’une des plus massives jamais enregistrées depuis la Seconde Guerre mondiale (OCDE, 2022[13]). Par son ampleur, elle a égalé celle observée lors de la crise financière mondiale de 2008. Les volumes de fret aérien ont dégringolé de 53 % en avril 2020 dans les pays de l’Union européenne et de 3 % aux États-Unis, par rapport aux niveaux records atteints avant la crise financière de juin 2008 (FIT, 2020[14]).
Du fait des mesures de confinement et des restrictions de déplacement, les transports ont été l’un des secteurs économiques les plus durement frappés. Néanmoins, après un décrochage comparable à celui de la crise financière mondiale de 2008, les échanges sont repartis en flèche en 2021. D’après les données du FIT (FIT, 2022[15]), les volumes de fret maritime et aérien s’étaient totalement rétablis au troisième trimestre 2021. Le Graphique 1.1 et le Graphique 1.2 illustrent la reprise des échanges de marchandises par voie aérienne et maritime pour l’UE et les États-Unis en 2021.
Les échanges n'ont toutefois pas redémarré au même rythme pour tous les produits en 2021. Les chaînes de valeur mondiales sont excessivement tributaires du transport international de conteneurs, qui a continué de se rétablir en 2021. La pandémie a également eu des conséquences inégales sur le commerce selon les pays. Si les exportations ont chuté dans des proportions équivalentes pratiquement partout en 2020, elles ont redémarré à des rythmes beaucoup plus divers, bien plus vite dans les économies plus avancées que dans les économies moins développées (FIT, 2022[15]).
L’explosion des cas de COVID‑19 due au variant Omicron à la fin de l’année 2021 et la guerre en Ukraine début 2022 ont donné un coup d’arrêt à cet élan. Les échanges commerciaux de l’Europe vers le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud (les BRICS) et vers les pays d’Asie ont accusé un net recul au début de la guerre en février 2022. S'agissant de l’UE, les exportations par voie maritime affichaient en mai 2022 une baisse de 5 %, et les importations une hausse de 7 %, par rapport à celles de février 2020. Les échanges mondiaux par voie aérienne ont également commencé à stagner au dernier trimestre 2021 (FIT, 2022[15]).
En mai 2022, les importations de l’UE n’étaient supérieures que de 2 % à celles de février 2020, un piètre résultat par rapport à 2021 (FIT, 2022[15]). En mai 2022, les exportations de l’UE par voie maritime vers les BRICS et l’Asie avaient diminué de 19 % et 16 %, respectivement, tandis que ses importations n’avaient pas radicalement changé. Sans surprise, les échanges de l’UE avec les BRICS et l’Asie par voie aérienne se sont fortement contractés.
Le COVID-19 a modifié les politiques publiques en matière de commerce et de transport
Les autorités et les entreprises ont mis en place des mesures destinées à atténuer l’impact du COVID‑19, dont certaines sont devenues depuis la règle. Par exemple, la régionalisation des échanges a gagné du terrain depuis la pandémie. Cette tendance a mis en lumière l’avantage relatif d’avoir des chaînes d’approvisionnement plus courtes, plus résilientes. D’après le Forum économique mondial, durant les cinq années ayant précédé la pandémie, la distance moyenne parcourue pondérée par les échanges internationaux avait chuté pour atteindre en 2019 son niveau le plus bas depuis la crise financière mondiale de 2008 (Legge et Lukaszuk, 2021[16]).
Parallèlement à cette régionalisation croissante, la pandémie a révélé la fragilité des chaînes d'approvisionnement mondiales et montré leur vulnérabilité aux perturbations. La fermeture des frontières a provoqué la rupture des chaînes d’approvisionnement internationales et mondiales. Depuis, les pouvoirs publics réfléchissent à des moyens d’augmenter la résilience face à de futures situations d’urgence.
La pandémie a également mis en évidence l’importance du multilatéralisme et de la coopération internationale. La régionalisation a de nouveau gagné du terrain après la pandémie en tant que moyen de protéger les chaînes d'approvisionnement contre de prochaines crises. Considérer les moteurs et les déterminants de l’investissement sur le long terme devient la norme dans la construction de la résilience des chaînes d’approvisionnement (CNUCED, 2022[17]). Se fondant sur ces observations, l’édition 2023 des Perspectives des transports du FIT pose l’hypothèse d’un degré de régionalisation des échanges plus élevé que dans l’édition précédente.
Les mesures de confinement instaurées durant la pandémie ont remis au goût du jour la marche à pied et le vélo dans les villes, un phénomène facilité par différentes initiatives prises par les autorités municipales. Des mesures destinées à encourager la mobilité active des citadins pendant la crise sanitaire ont également été maintenues dans les plans stratégiques à long terme. Par exemple, des places de parking ont été supprimées pour faire de la place aux piétons et aux cyclistes, des cheminements piétons ont été élargis, les cyclistes ont été autorisés à emprunter les couloirs de bus, et des limitations de vitesse ont été mises en place pour les voies partagées (UITP, 2020[18]).
Au total, 1 800 villes dans le monde ont pris des initiatives en faveur des transports non motorisés depuis le début de la pandémie (Goetsch et Peralta Quiros, 2020[19]). Plusieurs villes ont également instauré depuis des journées sans voiture, en plus de restreindre l’accès aux véhicules dans certaines zones pour réduire la circulation motorisée (Shah, Jaya et Piludaria, 2022[20]). La base de données Shifting Streets COVID‑19 Mobility Dataset répertorie les mesures adoptées par plus de 500 villes pour influencer directement l’utilisation de modes de transport non motorisés (marche à pied, vélo et autres) (Combs et Pardo, 2021[21]).
Plusieurs changements pérennes observés dans les schémas de mobilité ouvrent des possibilités de décarbonation que les dirigeants doivent mettre au service de la transition écologique du secteur des transports. Pendant la pandémie, la mobilité virtuelle a progressé grâce à l’augmentation des activités en ligne telles que la téléconférence, l’enseignement à distance, le télétravail et les achats en ligne (de Palma, Vosough et Liao, 2022[22]). Entre autres, le télétravail est une tendance qui s’est bien maintenue dans plusieurs régions même après la levée des restrictions liées au COVID‑19 (OCDE, 2023[8]).
La pandémie a également accentué un phénomène déjà en plein essor : celui de la vente en ligne. Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (2022[23]), la poussée du commerce électronique sous l’effet de la pandémie de COVID‑19 s’est poursuivie en 2021, alors même que de nombreux pays avaient déjà commencé à lever les restrictions. Les plus fortes augmentations des ventes en ligne ont eu lieu dans les pays en développement. Aux Émirats arabes unis, le pourcentage d’internautes ayant fait des achats en ligne est passé de 27 % en 2019 à 63 % en 2020. Il a également triplé dans des pays comme Bahreïn et l’Ouzbékistan. La Grèce a enregistré la plus forte progression (18 %) de tous les pays développés, suivie de la Hongrie, de l’Irlande et de la Roumanie, qui ont tous affiché une hausse de 15 % (CNUCED, 2022[23]).
L’édition 2023 des Perspectives des transports du FIT pose comme hypothèse que le commerce électronique continuera d’augmenter modérément pour atteindre un quart des ventes mondiales au détail en 2025. La montée en puissance du commerce électronique génère une hausse de la demande de transport de marchandises, associée à une augmentation des émissions et de la congestion en l’absence de mesures prises pour décarboner le transport de marchandises.
Un nouveau défi à relever : décarboner en pleine période d’incertitudes
Comme la pandémie de COVID‑19, la guerre en Ukraine bouleverse l’économie mondiale et amène les pays à revoir leurs stratégies. La guerre a des répercussions économiques et humaines, parmi lesquelles le déplacement de millions de voyageurs. Elle a déclenché une crise humanitaire en Ukraine, venant gonfler le nombre déjà record de réfugiés dans le monde (Banque mondiale, 2022[24]) et créant d’énormes tensions dans les relations géopolitiques internationales.
La guerre a contribué à aggraver la situation de l’économie mondiale, principalement en désorganisant encore davantage les chaînes d’approvisionnement, les marchés des produits de base et les prix de l’énergie (Banque mondiale, 2022[25]). Elle devrait se traduire par un ralentissement de la croissance mondiale, une poussée de l’inflation et des niveaux de pauvreté accrus (Banque mondiale, 2022[24]). Bien que ses effets immédiats, en dehors de l’Ukraine, soient ressentis en Europe, les conséquences de la guerre s'étendent à l'échelle planétaire. Le Groupe d’intervention des Nations Unies en cas de crise mondiale estime que 1.6 milliard d’êtres humains dans 94 pays sont menacés à la fois par une crise du coût de la vie, des pénuries alimentaires, un manque de ressources énergétiques, et des troubles sociaux (Nations Unies, 2022[26]), une situation susceptible de rendre extrêmement difficile la mise en œuvre d’objectifs environnementaux. L’édition 2023 des Perspectives des transports du FIT tient compte dans la mesure du possible des incidences actuelles et anticipées de la guerre.
Les soubresauts des marchés de l’énergie pourraient peser sur la décarbonation
La guerre en Ukraine a exacerbé les fragilités des chaînes d’approvisionnement mondiales en énergie qui ne s’étaient pas encore totalement remises des chocs de la pandémie. L’Agence internationale de l'énergie (AIE) a décrit le contexte actuel comme une « véritable tourmente énergétique », due essentiellement au fait que la Russie était le premier exportateur mondial de combustibles fossiles avant le déclenchement de la guerre en Ukraine. La réduction des livraisons vers l’Europe et les sanctions imposées dans la région « sectionnent l’une des principales artères du commerce énergétique mondial » (AIE, 2022[27]).
La guerre a aussi une incidence sur les politiques climatiques dans le monde car elle a fait de la sécurité énergétique une priorité absolue pour de nombreux pays. Les conséquences de la guerre sur le marché mondial de l’énergie ont amené certains pays à revoir leur politique énergétique – par exemple en reportant des objectifs d’élimination progressive des combustibles fossiles (Ember, 2022[28]). Continuer de miser sur les énergies fossiles, risquerait de retarder l’action climatique.
Beaucoup de pays tributaires de la Russie pour leur approvisionnement en énergie fossile n’ont pas de programme établi pour accélérer les investissements dans les énergies propres ou trouver d’autres sources d’énergie. Certains pays et blocs régionaux ont néanmoins pris des mesures pour atténuer les risques de la crise énergétique et faire avancer en même temps leurs objectifs climatiques (Beyer et Molnár, 2022[29]).
Par exemple, en mai 2022, la Commission européenne a publié son plan REPowerEU, qui vise à éliminer progressivement le recours aux énergies fossiles russes d’ici à 2027 et à stimuler la production d’énergie de sources renouvelables et la mise en œuvre de mesures d’efficacité énergétique dans l’UE (CE, 2022[30]). En juillet 2022, l’UE a également adopté son plan pour l’hiver, un accord politique sur une réduction volontaire de 15 % de la demande de gaz naturel durant l’hiver 2022‑23, par rapport à la consommation moyenne des cinq dernières années (Conseil de l’Union européenne, 2022[31]).
Les économies émergentes seront aussi fortement affectées par la hausse des prix de l’énergie et pourraient revoir leurs priorités pour s’assurer un approvisionnement énergétique stable au détriment de leur transition énergétique (Zhang, 2022[32]). Pour continuer à faire avancer la décarbonation des transports, il sera donc nécessaire d’agir sur deux fronts simultanément : la réduction de la dépendance à l’égard des énergies fossiles, et la planification de la sécurité énergétique. Des mesures ciblées et pérennes devront être engagées dans tous les secteurs pour diminuer la dépendance à l’égard des énergies fossiles, et s'accompagner d’une concertation internationale et d’initiatives de coopération en matière de sécurité énergétique.
Les incertitudes économiques liées à la guerre touchent aussi le secteur des transports
L'économie ukrainienne est aujourd’hui en grande souffrance. On estime qu’à la mi‑2022, le montant des dommages causés aux infrastructures, aux bâtiments d’habitation et autres dépassait les 100 milliards d’USD, correspondant à la destruction d’innombrables logements, routes et voies ferroviaires, terres agricoles et autres moyens de production (Kyiv School of Economics, 2022[33]). En dehors de l’Ukraine, l’UE subira vraisemblablement le plus les effets de la guerre en raison de ses liens économiques étroits tant avec la Russie qu’avec l’Ukraine. Selon les prévisions de la Banque mondiale (2022[24]), la production devrait se contracter de 0.2 % dans la région Europe et Asie centrale en 2022.
La guerre en Ukraine contribue au ralentissement de la croissance économique mondiale, principalement à cause des conséquences que la hausse des prix de l’énergie et la diminution de l’offre énergétique ont sur une économie mondiale encore convalescente après la pandémie (AIE, 2022[27] ; Banque mondiale, 2022[25] ; FMI, 2022[34] ; Nations Unies, 2022[35]). De fait, bien que l’OCDE (2022[36]) anticipe une brève amélioration de l’activité économique au lendemain de la pandémie, la croissance de la production mondiale restera atone en 2022 et ralentira encore à 2.2 % en 2023. L’inflation a également flambé dans le monde entier, alimentée par la hausse des prix des produits de base et les perturbations persistantes des chaînes d'approvisionnement.
La pandémie de COVID‑19 a eu un profond impact sur les transports. Les restrictions imposées sur les déplacements ont contraint de nombreuses compagnies aériennes à immobiliser leurs avions. Les transports routiers, fortement tributaires des ressources humaines à différents niveaux, ont aussi souffert de la pandémie. Avec la levée progressive des mesures sanitaires et des restrictions de déplacement, les niveaux du trafic aérien de voyageurs ont commencé à revenir à la normale. Cependant, les perturbations au niveau des chaînes d'approvisionnement mondiales avant le début de la guerre en Ukraine continuaient à avoir des répercussions sur le secteur des transports.
En 2021, le trafic aérien international de voyageurs entre la Russie et le reste du monde représentait 5.2 % du trafic international mondial. La même année, 5.7 % de l’ensemble du trafic aérien européen avait pour origine ou pour destination la Russie, et 3.3 % pour l’Ukraine (IATA, 2022[37]). En mars 2022, 36 pays avaient fermé leur espace aérien aux compagnies aériennes russes. La Russie a interdit à son tour aux avions des compagnies aériennes de la plupart de ces pays de pénétrer dans son espace aérien. Plusieurs compagnies aériennes appartenant à des pays non concernés par les sanctions (en Asie, par exemple) ont également diminué temporairement le nombre de leurs vols en provenance ou à destination de la Russie. La guerre en Ukraine a fait reculer de 2.4 % le trafic aérien international de voyageurs par rapport aux données de 2021.
Celle-ci a également désorganisé l’acheminement de produits essentiels, en particulier alimentaires et énergétiques. La Russie et l’Ukraine sont d'importantes économies agricoles et exportent de grandes quantités de denrées agricoles de base, notamment du blé, du maïs et de l’huile de tournesol (FAO, 2022[38]). L’Ukraine exporte aussi des matières premières, des produits chimiques et de la machinerie. L’UE, premier partenaire commercial de l’Ukraine, pesait pour plus de 40 % dans les échanges ukrainiens en 2019 (CE, 2022[39]). Pour ses activités de transport de marchandises, l’Ukraine utilise tous les modes, mais majoritairement la voie maritime en termes de volumes.
La guerre en Ukraine aura certainement un impact prolongé sur le commerce mondial. Les sanctions imposées en réponse à la guerre ont déstabilisé les échanges et les chaînes d'approvisionnement. Les chaînes de valeur mondiales dépendantes d’intrants russes devraient pâtir de ces perturbations, ce dont pâtiront principalement les économies régionales qui importent ces intrants en grandes quantités (Banque mondiale, 2022[24]). Les pays d’Asie centrale sont extrêmement exposés aux risques de perturbation des chaînes d'approvisionnement compte tenu des restrictions relatives au transit sur les grands axes de transport de marchandises dans la région (FIT, 2022[40]).
La guerre en Ukraine a donné un coup de frein à la reprise du commerce mondial de l’année précédente. Les effets conjugués des fermetures des frontières, des restrictions commerciales et de la hausse des coûts de l’énergie ont modifié sensiblement la structure et le volume des échanges. L’Organisation mondiale du commerce (OMC) a révisé à la baisse les taux d’augmentation des volumes de marchandises échangés, ramenés de 4.7 % à 3 % en 2022 et 3.4 % en 2023 (OMC, 2022[41]). Certaines régions seront plus fortement touchées par la guerre que d'autres.
Tableau 1.1. Volumes des échanges de marchandises, 2018-23
|
Variation annuelle du volume des échanges (%) |
|||||
---|---|---|---|---|---|---|
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
|
Volume des échanges mondiaux de marchandises |
3.0 |
0.2 |
-5.0 |
9.8 |
3.0 |
3.4 |
Exportations |
||||||
Amérique du Nord |
3.8 |
0.3 |
-8.8 |
6.3 |
3.4 |
5.3 |
Amérique du Sud |
-0.9 |
-1.2 |
-4.6 |
6.8 |
-0.3 |
1.8 |
Europe |
1.8 |
0.6 |
-7.8 |
7.9 |
2.9 |
2.7 |
Communauté des États indépendants |
4.0 |
-0.3 |
-1.2 |
1.4 |
4.9 |
2.8 |
Afrique |
3.1 |
-0.3 |
-7.5 |
5.1 |
1.4 |
1.1 |
Moyen-Orient |
4.6 |
-1.9 |
-9.3 |
7.3 |
11.0 |
2.9 |
Asie |
3.7 |
0.9 |
0.5 |
13.8 |
2.0 |
3.5 |
Importations |
||||||
Amérique du Nord |
5.1 |
-0.6 |
-6.1 |
12.6 |
3.9 |
2.5 |
Amérique du Sud |
4.8 |
-1.7 |
-11.2 |
25.8 |
4.8 |
3.1 |
Europe |
1.9 |
0.3 |
-7.3 |
8.1 |
3.7 |
3.3 |
Communauté des États indépendants |
4.0 |
8.3 |
-5.5 |
10.7 |
-12.0 |
-5.2 |
Afrique |
5.4 |
3.0 |
-11.8 |
4.2 |
2.5 |
3.9 |
Moyen-Orient |
-4.1 |
5.2 |
-9.8 |
5.3 |
11.7 |
6.2 |
Asie |
5.0 |
-0.4 |
-1.0 |
11.1 |
2.0 |
4.5 |
Source : OMC (2022[42]).
La Russie et l’Ukraine sont des acteurs majeurs des marchés agroalimentaires puisqu’ils représentent 53 % des échanges mondiaux pour les graines et l’huile de tournesol et 27 % pour le blé (CNUCED, 2022[43]). L’Afrique et le Moyen-Orient seront sans doute les plus pénalisés par la situation car ils importent plus de 50 % de leurs céréales de ces deux pays (OMC, 2022[42]). La hausse des prix devrait en particulier peser lourdement sur les pays à faible revenu importateurs nets de produits alimentaires.
Les prix élevés de l’énergie vont renchérir les prix alimentaires, et également ceux du transport. Le Tableau 1.1 présente les volumes annuels d’échanges de marchandises depuis 2018 publiés par l’OMC et ses projections pour 2022 et 2023. En 2021, toutes les régions ont fortement rebondi après la chute des échanges due à la pandémie. Elles afficheront une croissance minime en 2022 et 2023.
Les projections de l’OCDE (2022[36]) indiquent que, dans la plupart des pays, l’inflation aura atteint un maximum au troisième trimestre 2022 et commencera ensuite à refluer. Ce choc inflationniste touche les marchés de tous les grands produits de base et l’inflation est donc généralisée. Les banques centrales ont réagi par une politique monétaire plus restrictive afin de ramener l’inflation sous les niveaux visés. L'inflation s’est installée dans toutes les régions du monde mais à des degrés variables.
Selon les estimations de l’OCDE, l’inflation annuelle dans les pays de l’OCDE atteindra 6.6 % en 2023, en recul par rapport aux 9.4 % de 2022 (OCDE, 2022[44]). Ce taux devrait redescendre encore à 5.1 % en 2024. Le Royaume-Uni a enregistré une inflation annuelle de 8.9 % en 2022, contre 2.6 % en 2021, l’une des hausses les plus fortes en Europe (OCDE, 2022[36]). Le taux d’inflation annuel de la Türkiye s’établissait à 73.2 % en 2022, un niveau record sur les vingt dernières années (Banque mondiale, 2022[45]). En Chine, l’inflation restera faible et stable, tandis qu’en Inde, elle devrait se maintenir autour de 5 à 6 % en 2023, son niveau habituel.
La flambée des prix alimentaires renforcera certainement les inégalités de revenu. L’inflation touche en effet plus durement les ménages à faible revenu puisqu’ils consacrent une grande part de leurs dépenses à l’alimentation et à l’énergie (Laborde Debucquet, Lakatos et Martin, 2019[46]). L’instauration de politiques monétaires restrictives et le ralentissement de la demande mondiale feront vraisemblablement reculer l’inflation en 2023, mais elle restera supérieure aux objectifs dans beaucoup de pays. Le Graphique 1.3 présente les prévisions d'inflation annuelle établies pour les années 2022, 2023 et 2024. La Chine et l’Arabie saoudite sont les seuls pays où l’inflation devrait être plus élevée en 2023 qu’en 2022.
Les prix pétroliers étaient en hausse avant la guerre, sous l’effet conjugué de la reprise de la demande mondiale et des incertitudes relatives à l’offre, liées à une production moins élevée que prévu dans les pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole ainsi que dans des pays non-membres mais étroitement associés (OPEP+) (AIE, 2022[47]). La guerre en Ukraine a amené plusieurs pays à interdire les importations de pétrole russe. L’UE a également décrété un embargo sur le pétrole brut russe à compter de décembre 2022. Les prix ont légèrement fléchi depuis grâce à des déstockages coordonnés des États-Unis et de pays membres de l’AIE (AIE, 2022[48]). La volatilité des prix de l’énergie devrait perdurer en 2023 (Banque mondiale, 2022[49]).
Les prix de l’énergie ont des répercussions importantes sur le secteur des transports. Les fluctuations des cours du pétrole se traduisent dans le coût du transport, les niveaux et les comportements d’utilisation, et les investissements dans les énergies renouvelables. Les hausses de prix du pétrole brut se répercutent assez vite sur le prix des carburants à la pompe. Elles renchérissent le coût global des activités de transport, en particulier du transport de marchandises, en augmentant les tarifs du transport de conteneurs. Le gonflement des prix sur tous les marchés peut aussi peser sur le secteur automobile en raison des pénuries et des prix élevés des matières premières composant la plupart des batteries de véhicules, comme le lithium et le cobalt (Coface, 2022[50]).
La flambée des prix de l’énergie risque aussi de toucher directement le marché du transport ferroviaire dans l’UE. L’Association européenne du fret ferroviaire estime que les entreprises de transport ferroviaire de marchandises qui n'ont pas acheté suffisamment d’énergie pour 2022 et 2023 devront faire face à des prix considérablement plus élevés pour leurs prochains achats. Le coût pourrait être répercuté sur les consommateurs, ou bien les entreprises pourraient être contraintes de quitter le marché, ce qui menacerait les progrès du report modal dans le secteur du transport de marchandises (ERFA, 2022[52]).
Le niveau élevé et l’instabilité des prix de l’énergie accroissent aussi temporairement le risque que des investissements soient redirigés vers les industries extractives et les énergies fossiles. Plusieurs pays ont déjà prévu de développer leur production et leurs infrastructures de gaz fossile. Il est primordial que les responsables publics limitent ce risque en déployant davantage d’installations à énergies renouvelables. Cela permettrait d'accélérer la transition vers les énergies propres et d’améliorer la sécurité énergétique des pays dépendants des énergies fossiles russes. Plusieurs pays conscients de ce risque ont mis en œuvre des mesures pour y remédier. Comme le souligne l’édition 2020 des Perspectives énergétiques mondiales (AIE, 2020[53]), la crise de l’énergie amène les pays à prendre des mesures qui accélèrent les investissements dans les énergies renouvelables, et donc la transition écologique.
L’UE et le Royaume-Uni ont annoncé des plans d’action destinés à doper le déploiement des énergies renouvelables (Climate Action Tracker, 2022[54]). Le plan REPowerEU de la Commission européenne propose de rehausser l’objectif de 40 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2030, pour le faire passer à 45 % (CE, 2022[30]). Il comprend également des mesures visant à accélérer la production d’hydrogène vert dans l’UE. De leur côté, l’Allemagne, la Nouvelle-Zélande, l’Irlande, l’Italie et certains États des États-Unis ont abaissé les tarifs des transports publics à titre temporaire afin de décourager l’utilisation des véhicules particuliers et modérer la demande de carburant (Archie, 2022[55] ; Euronews.green, 2022[56] ; NZ Herald, 2022[57]).
Et demain : quels facteurs détermineront la demande future de transport ?
L’augmentation de la population et la croissance économique mondiale vont obliger les responsables des politiques de transport à redoubler d’efforts pour satisfaire la demande de transport supplémentaire qui en découlera. L'évolution de ces facteurs influencera inévitablement la planification des transports et les décisions d’investissement dans ce secteur au cours des prochaines années. Les pouvoirs publics ont deux impératifs à conjuguer : répondre à une demande en hausse, et atteindre les objectifs de réduction des émissions fixés pour le secteur des transports.
Qui dit croissance démographique, dit augmentation de la demande de transport
D'après les prévisions du Département des affaires économiques et sociales de l’Organisation des Nations Unies (DESA ONU) (2022[58]), nous serons 9.7 milliards d’êtres humains sur la planète en 2050 et 10.4 milliards en 2100, contre 8 milliards en 2022. Cette croissance anticipée s’explique par des taux de mortalité en baisse, la structure relativement jeune de la population actuelle, et des taux de fécondité mondiaux stables. Une augmentation rapide de la population génère des besoins de mobilité accrus. Les pouvoirs publics devront veiller à ce que cette hausse de la demande de transport soit satisfaite de façon équitable et respectueuse de l’environnement.
Une part croissante et déjà majoritaire de la population mondiale vit en milieu urbain. En 2050, 2.5 milliards de voyageurs supplémentaires vivront en ville, l’Afrique et l’Asie représentant environ 90 % de cette augmentation (DAES, 2019[59]). L’urbanisation peut aussi entraîner un étalement urbain, qui a des conséquences en termes d’intensification de l’occupation des sols et de dépendance à la voiture (OCDE/FIT, 2022[60]). Plus l’urbanisation progresse, plus le nombre de villes très peuplées augmente. En 2018, la planète comptait 33 villes de plus de 10 millions d’habitants (appelées mégapoles). En 2030, elles seront 43, principalement dans les régions en développement (DAES, 2019[59]). Les autorités auront donc fort à faire pour assurer l’intégration des politiques de transport et d’aménagement du territoire de manière à améliorer l’accès à des transports durables dans les villes et leurs environs.
Au cours des trente prochaines années, la répartition de la population entre les différentes régions du monde va être profondément modifiée, ce qui aura aussi une incidence sur le type et la répartition de la demande de transport. D'après les prévisions du DESA ONU (2022[58]), plus de la moitié de la croissance démographique prévue d’ici à 2050 sera imputable à huit pays : l’Égypte, l’Éthiopie, l’Inde, le Nigéria, le Pakistan, les Philippines, la République démocratique du Congo et la République-Unie de Tanzanie. Durant la même période, 61 pays verront très certainement leur population diminuer de 1 % ou plus. La Bulgarie, la Lettonie, la Lituanie, la Serbie et l’Ukraine devraient enregistrer certains des déclins démographiques relatifs les plus notables d’ici à 2050, à savoir 20 % de moins qu’en 2022, ou davantage. On anticipe également une baisse du nombre d’habitants en Chine en 2023.
La pyramide des âges d’une population influe également sur les décisions publiques en matière de transport. Les pays abritant une population de plus en plus vieillissante doivent adapter leurs systèmes de transport afin de répondre à leurs besoins. D’un autre côté, les pays dans lesquels la population en âge de travailler augmente devront satisfaire la demande croissante de transport. La part de la population âgée de 65 ans et plus passera de 10 % en 2022 à 16 % en 2050 au niveau mondial. Les régions où elle sera la plus élevée en 2050 d'après les classifications des régions du DESA ONU (2022[58]) seront l’Europe et l’Amérique du Nord (27 %) et l’Asie de l’Est et du Sud-Est (26 %). Dans les pays où la part de la population âgée est plus élevée, des mesures devront aussi être prises pour améliorer la viabilité des systèmes de sécurité sociale et de retraite.
La croissance économique s'accompagne d’une hausse de la demande de transport
Dans la plupart des régions du monde, il existe une relation étroite entre le PIB et la demande de transport de marchandises et de voyageurs. Malgré l’incertitude ambiante dans le contexte économique actuel, la croissance économique devrait se maintenir sur le long terme. On s’attend donc à ce que la demande de transport à long terme progresse de manière simultanée avec la croissance économique dans les prochaines années.
Avant la guerre en Ukraine, l’OCDE estimait que la reprise économique au sortir de la crise du COVID‑19 se poursuivrait en 2022 et en 2023 (OCDE, 2022[10]). Le maintien des campagnes de vaccination dans le monde, les mesures de soutien macroéconomiques prises dans les grandes économies, et des conditions financières favorables devaient contribuer à cette reprise. Mais la guerre a bridé la croissance mondiale et aggravé les pressions inflationnistes. L’économie planétaire a ainsi été de nouveau frappée par des problèmes d'approvisionnement, alors même que ceux générés par la pandémie commençaient à se dissiper.
Du fait de sa dépendance vis-à-vis du pétrole et du gaz naturel russes, l’UE se révèle très exposée aux répercussions économiques de la guerre en Ukraine. À court et moyen termes, l’Europe ne dispose d’aucune solution de remplacement réaliste pour ses approvisionnements en gaz naturel russe, et les niveaux actuels des prix vont alimenter l’inflation. Si certains pays sont plus dépendants que d’autres du gaz naturel en provenance de Russie, l’interdépendance commerciale des pays de la zone euro laisse présager un ralentissement général (Coface, 2022[50]).
Selon l’OCDE (2022[36]), la croissance est restée atone au second semestre 2022 et devrait fléchir un peu plus en 2023 pour descendre à 2.2 % par an. Par rapport aux prévisions de l’OCDE de décembre 2021, le PIB mondial diminuera de 2.8 milliards d’USD en 2023. L’OCDE anticipe une croissance lente du PIB dans la plupart des économies du G20 en 2022 et 2023. En Europe, la croissance sera vraisemblablement très minime (0.3 %) en 2023.
Tableau 1.2. Prévisions de croissance du produit intérieur brut par région du monde, 2019‑25
Prévision de croissance du PIB (%) |
||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Région |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
Taux de croissance annuel composé 2025-50 |
Europe |
2.2 |
-3.9 |
4.6 |
0.8 |
1.8 |
1.8 |
1.9 |
2.0 |
ENEA |
4.9 |
-2.5 |
8.2 |
3.5 |
4.0 |
3.9 |
3.8 |
2.5 |
LAC |
2.7 |
-19.7 |
2.9 |
2.9 |
3.1 |
2.9 |
2.9 |
2.6 |
MENA |
3.1 |
-13.1 |
5.1 |
3.4 |
3.5 |
3.5 |
3.5 |
3.5 |
SEA |
4.7 |
-6.4 |
2.8 |
4.5 |
4.6 |
4.4 |
4.4 |
3.7 |
SSA |
3.0 |
-9.4 |
4.2 |
3.5 |
2.6 |
4.2 |
4.2 |
4.9 |
SSWA |
6.2 |
-7.8 |
5.2 |
5.6 |
6.2 |
6.0 |
5.9 |
4.7 |
TAP |
2.0 |
-11.6 |
2.8 |
-8.1 |
1.5 |
1.6 |
1.7 |
2.1 |
UCAN |
2.7 |
-2.7 |
3.9 |
1.5 |
1.8 |
1.9 |
1.9 |
2.2 |
Monde |
3.6 |
-5.6 |
5.3 |
2.4 |
3.2 |
3.2 |
3.2 |
2.8 |
Note : ENEA : Asie de l’Est et du Nord-Est. ALC : Amérique latine et Caraïbes. MENA : Moyen-Orient et Afrique du Nord. SEA : Asie du Sud-Est. SSA : Afrique subsaharienne. SSWA : Asie du Sud et du Sud-Ouest. TAP : économies en transition et autres pays d’Asie-Pacifique. UCAN : États-Unis, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande. PIB : produit intérieur brut.
Source : données résultant du modèle ENV-Linkages de l’OCDE, http://www.oecd.org/environment/indicators-modelling-outlooks/modelling.htm.
Au sein de l’UE, le taux de croissance devrait être négatif en Allemagne et en Italie en 2023. Il devrait être très légèrement positif (0.5 %) aux États-Unis en 2023. De même, l’Argentine et le Brésil afficheront une croissance de 0.4 % et 0.85 %, respectivement. L’Arabie saoudite, la Chine, l’Inde et l’Indonésie sont relativement moins touchées, avec des taux de croissance compris entre 4.7 % et 6 % en 2023. Le Tableau 1.2 présente les prévisions de croissance des PIB prises comme hypothèses dans les modèles du FIT pour les différentes régions du monde jusqu’en 2025.
Objectifs de décarbonation : état d’avancement des actions menées au titre de l’Accord de Paris
À l'échelle mondiale, le secteur des transports n’est pas en bonne voie d’atteindre ses objectifs de décarbonation. En 2015, les Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) ont conclu l’Accord de Paris, un traité juridiquement contraignant destiné à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre (GES). En 2022, 193 pays ainsi que l’Union européenne l’avaient ratifié (Nations Unies, 2015[61]). Par cet accord, les pays se sont fixés comme objectif de maintenir le réchauffement de la planète bien en dessous de 2 degrés Celsius (°C) par rapport aux niveaux préindustriels, et de poursuivre les efforts pour limiter à 1.5° C la hausse des températures.
Pour atteindre cet objectif à long terme, les pays entendent stopper dès que possible la hausse des émissions mondiales afin de parvenir à un monde climatiquement neutre d’ici à 2050. L’Accord reconnaît aussi que la décarbonation ne pourra pas se faire au même rythme dans toutes les régions, les Parties devant être guidées par « le principe de l’équité et des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, eu égard aux différentes situations nationales » (Nations Unies, 2015[61]).
Cependant, comme le montre le Graphique 1.4, si l’on se tient uniquement aux engagements pris à ce jour, les émissions mondiales dues aux transports ne reculeront pas suffisamment vite pour permettre d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. De fait, bien que plusieurs régions aient engagé des actions concrètes pour mettre en œuvre leurs ambitions, le maintien de la trajectoire actuelle se traduira par une hausse des émissions de CO2 « du réservoir à la roue » attribuables au secteur des transports tout au long des années 2020, pour s’achever par une légère baisse (de 3 %) en 2050 (Encadré 1.1).
Encadré 1.1. Comptabilisation de toutes les émissions imputables au secteur des transports
La modélisation du présent rapport prend en compte les émissions du réservoir à la roue, c’est-à-dire toutes les émissions dues exclusivement à l’énergie consommée pendant un trajet. Cependant, les activités de transport génèrent aussi d'autres émissions en amont. Les émissions inhérentes à la production de l’énergie ou du carburant utilisé par les parcs de véhicules sont appelées « émissions du puits au réservoir ». Les émissions du puits à la roue sont la somme des émissions du puits au réservoir et du réservoir à la roue, et correspondent aux émissions totales associées à l’activité d’un véhicule.
Comme on le voit sur le Graphique 1.5, les émissions mondiales du puits à la roue étaient 30 % plus élevées que les émissions du réservoir à la roue en 2019. Plus les parcs de véhicules gagneront en efficience, plus la part des émissions du puits au réservoir dépassera celle des émissions du réservoir à la roue dans le total des émissions dues au transport. Les Perspectives des transports du FIT ne prennent en compte que les émissions du réservoir à la roue afin de mettre en évidence des mesures capables d’accélérer la décarbonation dans le secteur des transports. Il n’en reste pas moins indispensable de renforcer la collaboration avec le secteur de l’énergie pour décarboner la production et la distribution des carburants et des énergies si l’on veut atteindre les objectifs climatiques.
Source : FIT (2021[9]).
Les estimations du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) donnent une idée de l’ampleur de la tâche. Pour limiter le réchauffement planétaire moyen à 1.5 °C, il faudra abaisser les émissions totales des transports pour les ramener entre 2 et 3 gigatonnes en 2050 (IPCC Working Group III, 2022[64] ; Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2022[65]). L’analyse du GIEC suggère en outre que le secteur des transports doit être décarboné plus rapidement que les autres – pour réduire les émissions de 70 à 80 % en dessous des niveaux de 2015 – si l'on veut atteindre les niveaux requis par l’Accord de Paris.
L’AIE indique que la décarbonation doit être engagée immédiatement, et qu’il importe d’abaisser dès à présent les émissions de CO2 dues aux transports de 3 % par an jusqu’en 2030 pour parvenir à la neutralité en GES en 2050 (AIE, 2021[66]). Le scénario d’ambitions élevées modélisé pour la présente édition des Perspectives semble montrer que le monde pourrait réduire ses émissions dues aux transports de 80 % d’ici 2050. Il faudra pour cela prendre des mesures plus ambitieuses et agir plus vite, en intervenant à la fois sur le report modal, la gestion de la demande, et l'amélioration des véhicules et des carburants.
Une coopération internationale sera nécessaire pour atteindre des objectifs ambitieux
L’Accord de Paris comporte un mécanisme – les « contributions déterminées au niveau national » (CDN, voir l’encadré 1.2) – par lequel les pays doivent présenter des plans de décarbonation pour leur économie et indiquer comment ils contribueront à la réalisation des objectifs de l’Accord. L’Accord prévoyait que les Parties à la CCNUCC renouvellent leurs CDN tous les cinq ans, faisant ainsi montre d’une ambition croissante et d’objectifs révisés au fil du temps.
La Conférence des Parties à la CCNUCC qui s’est tenue à Glasgow (Écosse) en 2021 (COP26) a marqué la fin du premier cycle quinquennal de CDN. Le FIT a analysé les CDN soumis à la COP26 (FIT, 2018[67] ; FIT, 2021[68]) ; il en ressort qu’un certain nombre de pays ont augmenté leurs engagements de décarbonation des transports avant la conférence. Notamment, à la date de la COP26, le nombre de pays mentionnant les transports avait « progressé de 19 points de pourcentage, le nombre de ceux fournissant une liste de mesures avait progressé de 22 points de pourcentage, et le nombre de pays fixant des objectifs avait progressé de 8 points de pourcentage » par rapport aux premières CDN communiquées par les pays (FIT, 2021[68]).
En revanche, à la COP26, les révisions des objectifs globaux de réduction des GES ont été jugés insuffisantes. L’accord conclu à la COP26 impose donc maintenant aux pays de réviser leurs CDN chaque année. L'année suivant la COP26, seulement 32 Parties à la CCNUCC (soit 16 %) ont communiqué une révision de leurs CDN à temps pour la COP27. Certaines de ces Parties n’avaient pas fourni de révision dans les délais pour le cycle précédent. L’ONU relève que les efforts déployés par les pays pour abaisser leurs émissions demeurent encore insuffisants pour limiter à 1.5° C le réchauffement planétaire d’ici la fin du siècle (IPCC Working Group III, 2022[64]).
Encadré 1.2. Suivi des engagements et des mesures pris par les pays dans le domaine climatique
Le FIT a lancé son initiative de décarbonation des transports en 2016, peu après la signature de l’Accord de Paris. Depuis, le Forum suit les documents communiqués par les pays à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Dans ces documents, appelés « contributions déterminées au niveau national » (CDN), les pays énoncent leurs engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Disponible en ligne, l’outil de suivi des CDN pour le transport (Transport NDC Tracker) élaboré par le FIT fournit des informations sur le contenu des CDN en matière de transport.
Outil de suivi des CDN pour le transport élaboré par le FIT : www.itf-oecd.org/ndc-tracker/fr.
Lancé en 2020, le Répertoire d’actions climatiques liées aux transports tenu par le FIT a pour but d’aider les responsables publics à trouver des mesures leur permettant de réduire les émissions de CO2 dues aux transports conformément à leurs ambitions de décarbonation et d’atteindre leurs objectifs climatiques. La CCNUCC a validé le Répertoire, y voyant un outil utile aux décideurs pour définir les mesures envisagées dans leurs CDN révisées ou élaborer des plans nationaux de décarbonation des transports.
Répertoire d’actions climatiques liées aux transports tenu par le FIT : www.itf-oecd.org/tcad.
Les transports sont mentionnés dans 82 % des CDN, mais seulement 18 % d’entre elles énoncent un objectif précis de réduction des émissions pour les transports (FIT, 2023[69]). Au niveau international, pouvoirs publics, entreprises et organisations non gouvernementales travaillent à établir des processus favorisant la collaboration internationale dans le but de surmonter les difficultés communes et de maximiser les avantages retirés par tous de la décarbonation du secteur des transports.
Les champions de haut niveau pour l’action climatique désignés par l’ONU ont élaboré avec le Partenariat de Marrakech un ensemble de feuilles de route de haut niveau (les « Percées ») pour plus de 30 secteurs de l’économie et d’objectifs de transition à atteindre d’ici à 2030 pour rester sur la trajectoire des objectifs de l’Accord de Paris (CCNUCC, 2021[70]).
Les Percées pour l’horizon 2030 fixent des objectifs ambitieux pour le secteur des transports en matière de transition énergétique dans les domaines du transport routier, de l’aviation et du transport maritime, dans le but de créer des économies d'échelle grâce à l’alignement des mesures prises dans les différents pays. Ces objectifs portent expressément sur des évolutions technologiques et non sur l’infléchissement de la demande ou le report modal. Le Tableau 1.3 présente les objectifs définis dans les Percées pour l’horizon 2030 et les orientations recommandées pour faire avancer les politiques des transports.
Tableau 1.3. Objectifs définis dans les Percées pour l’horizon 2030 en matière de décarbonation des transports
Secteur/industrie des transports |
Objectifs définis dans les Percées |
---|---|
Bus à moteur à combustion interne |
Les véhicules à émission zéro (VEZ) représentent 100 % des ventes de bus sur les principaux marchés en 2030 |
Poids lourds à moteur à combustion interne |
Les VEZ représentent 100 % des ventes de poids lourds sur les principaux marchés en 2040 |
Véhicules de transport de voyageurs à moteur à combustion interne |
Les VEZ représentent 100 % des ventes de voitures et de camionnettes sur les principaux marchés en 2035 |
Transports maritimes |
Les carburants à émission zéro représentent 100 % des carburants de transport maritime en 2050 |
Transports aériens |
Les carburants aéronautiques durables représentent 100 % des carburants dans le monde en 2050 |
Note : les quatre principaux marchés sont la République populaire de Chine, l’Union européenne, le Japon et les États-Unis. Les véhicules hybrides ne sont pas inclus dans les objectifs définis pour les véhicules à moteur à combustion interne.
Source : CCNUCC (2021[70]).
Définir les priorités : quelles sont-elles en dehors de la décarbonation des transports ?
La décarbonation du secteur des transports est certes une priorité internationale mais, dans bon nombre de pays, elle n’est qu’une priorité parmi beaucoup d’autres pour les autorités gouvernementales soucieuses d’améliorer la situation économique nationale et la qualité de vie des habitants. Pour de nombreux pays en développement, la réduction des émissions dues aux transports doit être envisagée dans le contexte de leurs autres priorités stratégiques, celles-ci peuvent être, par exemple, d’améliorer la connectivité, la sécurité routière (Encadré 1.3), les réseaux routiers, de développer le numérique et de fournir des transports publics et des infrastructures de transport élémentaires.
Les mesures permettant d'abaisser les émissions de carbone du secteur des transports sont susceptibles d’avoir beaucoup d’autres répercussions positives. Elles peuvent en effet aller dans le sens d’autres objectifs économiques et sociaux – par exemple, une meilleure équité, une plus grande accessibilité, une amélioration de la santé et de la sécurité, une diminution de la pollution atmosphérique et sonore, et une réduction de la congestion – en plus d’accélérer la transition écologique du secteur. Les responsables publics doivent exploiter au maximum les solutions permettant de satisfaire les objectifs globaux du secteur des transports tout en décarbonant l’économie.
Le FIT est également partie prenante du projet intersectoriel EDITS (Energy Demand changes Induced by Technological and Social innovations). Ce projet dessine un scénario de sobriété énergétique pour l’avenir, qui intègre « d’importantes transformations dans les modes de vie, les comportements, les infrastructures et les modèles économiques » visant à réduire la consommation d’énergie mondiale à l’horizon 2050, mais aussi à améliorer l'équité et les résultats obtenus par rapport aux Objectifs de développement durable (Grubler et al., 2018[71]).
Encadré 1.3. Pour des transports à la fois moins polluants et plus sûrs
Les Objectifs de développement durable des Nations Unies font de la sécurité routière une condition préalable du développement durable (UNECE, 2020[72]). Les pouvoirs publics peuvent s’attaquer à ce problème de différentes manières, par exemple en adaptant les infrastructures routières aux normes techniques, en définissant et en appliquant des normes harmonisées en matière de conception des véhicules, en légiférant sur les comportements des usagers de la route, ou en mettant en place des dispositifs d’assistance complets pour les interventions en cas d’accident (OMS, 2021[73]).
À l’heure actuelle, la plupart des décès dus à des accidents de la circulation sont enregistrés dans les pays à revenu faible et intermédiaire (OMS, 2021[73]). L'amélioration de la sécurité routière figure donc parmi les grandes priorités de ces pays. Par diverses interventions, comme la conception d’échangeurs plus sûrs, la limitation de la circulation routière dans les centres-villes, l’expansion des transports publics et la meilleure prise en compte des groupes vulnérables, il est possible de conjuguer sécurité routière et développement durable (ARUP, 2020[74]).
L’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Union européenne se sont toutes fixées un objectif à long terme qu’elles vont s’employer à atteindre, la « Vision zéro », par laquelle elles entendent mettre fin à tous les décès et les dommages corporels graves dus à la circulation routière, tout en augmentant l’accès de tous à des moyens de mobilité sûrs, sains et équitables (Action Vision Zero, s.d.[75] ; CINEA, 2022[76]).
Le développement de la connectivité régionale améliore la résilience et le fonctionnement des marchés
Une meilleure connectivité régionale favorise le développement économique et rend les chaînes d'approvisionnement plus résilientes (CESAP, 2020[77]). L’amélioration de la connectivité grâce au renforcement des réseaux routiers et ferroviaires fait partie des priorités les plus fréquentes à travers le monde. De nouveaux investissements dans des projets de voies express et des couloirs ferroviaires se sont poursuivis après la pandémie.
Un certain nombre de pays d’Amérique latine, dont l’Argentine, le Brésil, la Colombie et le Mexique, ont affecté des fonds à la remise en état des réseaux ferroviaires et à la construction de nouvelles routes et autoroutes (Ministry of Transport of Argentina, 2020[78] ; Woof, 2020[79] ; Gouvernement mexicain, 2018[80] ; Oxford Business Group, 2017[81]).
Plusieurs pays d’Asie, comme le Bangladesh, le Cambodge, l’Inde, la Malaisie, le Népal, les Philippines et le Viet Nam, travaillent actuellement sur de grands projets de connectivité (FIT, 2022[82] ; FIT, 2022[83]). En Asie, ces projets visent souvent à améliorer la desserte des provinces et des zones isolées à l’intérieur des pays ainsi qu’à développer la connectivité régionale.
L'amélioration de la connectivité fait partie des grandes priorités des pays du nord et du centre de l’Asie. Presque tous les pays de la région s’emploient à renforcer leur réseau routier et ferroviaire afin de faciliter les déplacements des voyageurs et d’accroître les échanges commerciaux (FIT, 2022[84]). Quand les investissements réalisés dans des infrastructures de ce type prennent en compte la dimension écologique, ils limitent le risque de s’enfermer dans une trajectoire très émettrice par des infrastructures à forte intensité en carbone. Les responsables publics devront veiller à ce que ces priorités soient satisfaites d’une manière conforme aux objectifs environnementaux du secteur au niveau mondial.
L’UE souligne également l'importance d’améliorer l’interopérabilité des systèmes ferroviaires nationaux pour renforcer la connectivité (Conseil de l’Union européenne, 2021[85]). Son réseau transeuropéen de transport (RTE‑T) vise à mettre en place un réseau complet, fiable et intégré assurant des liaisons durables dans toute la région (CE, 2021[86]). Les États-Unis ont également réalisé d’importants investissements. Leur loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act) a amené des investissements substantiels dans la connectivité ferroviaire pour le transport de marchandises et de voyageurs ainsi que dans le réseau routier (CleanEnergy.gov, 2022[87] ; US Federal Railroad Administration, 2022[88]).
Les couloirs commerciaux figurent parmi les priorités clés de beaucoup de pays. La facilitation des échanges régionaux est en effet un important facteur de développement économique. En Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique latine, de nombreux pays investissent largement dans des projets de couloirs commerciaux et économiques afin d’améliorer la circulation des marchandises et de réduire les coûts des échanges (BAsD, 2019[89] ; FIT, 2022[83] ; FIT, 2022[82] ; CE, 2013[90] ; Oxford Business Group, 2022[91]). Ces projets visent à remédier aux goulots d’étranglement des infrastructures grâce à des systèmes de transport à grande capacité, en particulier au sortir de la pandémie de COVID‑19. Compte tenu des objectifs environnementaux du secteur des transports, la durabilité doit être au cœur des efforts de développement de ces couloirs.
L’électrification et la modernisation ferroviaire restent inscrites dans les stratégies de décarbonation du secteur des transports dans plusieurs régions. Des pays ont aussi affecté des financements à ces objectifs et à l’extension des réseaux (AIE, 2022[92]), notamment à la création de liaisons ferroviaires à grande vitesse, à la modernisation des voies, et à la modernisation et à l’informatisation des systèmes de signalisation des réseaux ferroviaires de transport de voyageurs et de marchandises. Toutes ces mesures font gagner en efficience et diminuent les émissions de CO2 dues au secteur.
La Chine, les États-Unis, l’Inde et l’UE ont prévu des financements pour électrifier les réseaux existants (AIE, 2022[92] ; The White House, 2021[93]). Dans le transport de voyageurs, une part importante des liaisons ferroviaires sont assurées par des trains à grande vitesse en Chine, en Corée, au Japon et dans l’UE (AIE, 2019[94]). D’importants projets de développement de liaisons ferroviaires à grande vitesse sont également en cours en Australie, en Chine et en Inde.
Une connectivité multimodale fluide contribue à améliorer l’efficience des opérations et diminue les émissions. Beaucoup de pays misent aussi sur le renforcement des fonctions logistiques et la modernisation des plateformes multimodales. Plusieurs économies en développement ou émergentes souffrent de coûts logistiques élevés, dus à une gestion inefficace des transports et des stocks. Pour bon nombre d'économies émergentes, il est urgent d’investir dans l’intégration et l’optimisation des opérations tout le long de la chaîne logistique en améliorant le magasinage et l’entreposage et en informatisant les processus.
La connectivité multimodale est considérée par les pays d’Afrique et d’Asie comme un facteur primordial d’efficience des chaînes d'approvisionnement et de réduction des coûts (Okyere et al., 2019[95] ; FIT, 2022[82] ; FIT, 2022[83]). Le renforcement des transports intermodaux et multimodaux améliore en outre l’accessibilité et la connectivité, et représente une condition préalable au report de la demande de transport vers des modes plus propres.
Améliorer les transports publics, les services partagés et les mobilités actives permettra d’accélérer la décarbonation
Face à une urbanisation rapide et à la hausse continue de la demande de transport, tant de marchandises que de voyageurs, les pouvoirs publics doivent aussi intensifier les investissements dans les infrastructures de transport urbain s’ils veulent répondre à cette demande croissante. L’expansion des zones urbaines, en particulier dans les économies émergentes et en développement, implique de construire des réseaux routiers urbains, des réseaux de transports en commun et des terminaux de transport.
Les villes du monde entier cherchent à s’adapter à la demande accrue de transport par des moyens durables. Elles entreprennent, par exemple, de créer des couloirs de bus à haut niveau de service (BHNS) et des métros légers, ainsi que d’étendre et électrifier les flottes de transports publics. L’aménagement intégré du territoire et le TOD (méthode d’aménagement axé sur les transports collectifs) aident aussi à satisfaire cette hausse de la demande tout en améliorant l’accès et la durabilité de la mobilité urbaine.
Un système intégré, connecté et inclusif de mobilité active contribue notablement à rendre les transports plus propres. Parallèlement à l’amélioration des solutions de transports publics, un grand nombre de pays d’Europe et certains pays d’Asie et d’Amérique latine sont bien décidés à renforcer les infrastructures de mobilité active (Parlement européen, 2020[96] ; UITP, 2020[18]). Ils s’emploient à développer les solutions de mobilité active en améliorant les infrastructures cyclables et les cheminements piétons et en réaffectant l’espace urbain.
Enfin, les ministères des Transports continuent de travailler sur les solutions bas carbone. Il s'agit notamment d’encourager le passage à l’électrique ou à des carburants moins polluants afin de diminuer l’impact climatique du secteur. Les transports étant un facteur de croissance économique et d’inclusion sociale, plusieurs pays restent particulièrement soucieux de veiller à ce qu’il contribue aux progrès dans ces domaines. Néanmoins, du fait du niveau élevé de ses émissions, il faut impérativement s’assurer qu’il fasse sa part dans l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ses effets.
Les économies émergentes et en développement sont confrontées à un double enjeu : elles doivent assurer un accès équitable à des solutions de mobilité abordables et améliorer le transport des marchandises, tout en réduisant au minimum leurs empreintes carbone. Pour atteindre les objectifs de durabilité du secteur des transports, il est nécessaire de prendre en compte tous les effets produits pendant les différentes étapes de la planification, de la conception et de la mise en œuvre des projets et des programmes. Investir dans des technologies et des carburants propres, des flottes de transports publics de haute qualité, des villes bien aménagées et bien desservies, ainsi que des solutions de mobilité active largement accessibles, peut aider les ministères des Transports à atteindre leurs objectifs de développement et en même temps ceux relatifs au climat.
Principaux points à retenir
Le secteur des transports se remet de la pandémie plus vite que prévu, mais se heurte encore à des problèmes de taille.
L’agitation sur les marchés de l’énergie et la crise du coût de la vie compliquent la décarbonation des transports.
Malgré des progrès, les émissions dues aux transports diminueront trop lentement dans les années à venir pour qu’il soit possible d’atteindre les objectifs climatiques internationaux.
Il existe des mécanismes utiles aux objectifs de décarbonation, mais leur niveau d’ambition doit être revu à la hausse.
Les pouvoirs publics se doivent de concilier plusieurs priorités tout en respectant les engagements climatiques.
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[88] US Federal Railroad Administration (2022), Biden Administration Announces Over $368 Million in Grants to Improve Rail Infrastructure, Enhance and Strengthen Supply Chains, https://railroads.dot.gov/newsroom/press-releases/biden-administration-announces-over-368-million-grants-improve-rail-0 (consulté le 5 May 2023).
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[32] Zhang, N. (2022), « How the war in Ukraine affects the fight against climate change », Katoikos World, https://katoikos.world/analysis/how-the-war-in-ukraine-affects-the-fight-against-climate-change.html.