Limiter l’augmentation de la température à 1.5 °C ou 2 °C conformément aux objectifs énoncés dans l’Accord de Paris, requiert une action immédiate et globale, comme souligné récemment dans le sixième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) (Sixième Rapport d’évaluation, GIEC (2023[1])). En absorbant le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre, les gaz à effet de serre (GES) entraînent un réchauffement planétaire, qui cause directement le changement climatique. Alors qu’il en résulte déjà des phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes dans le monde entier, l’intensification du réchauffement planétaire pourrait, à terme, mener à des points de bascule au-delà desquels des changements graves et radicaux pour la société deviendraient irréversibles. Pour faire face à ces menaces, l’Accord de Paris a fixé l’objectif de contenir l’augmentation de la température moyenne mondiale nettement en deçà de 2 °C et, si possible, de la limiter à 1.5 °C, par rapport aux niveaux préindustriels. Même si ces limites venaient à être dépassés, tout degré supplémentaire ferait monter d’un cran les « risques et incidences néfastes projetés ainsi que les pertes et préjudices connexes » (IPCC, 2023[1]).
Pour atteindre cet objectif, plus de 130 pays tentent de parvenir à la neutralité carbone entre 2050 et 2060 (Net Zero Tracker, 2023[2]). Il y aurait toutefois lieu de renforcer ces efforts d’atténuation, vu les écarts persistants en matière de mise en œuvre (c’est-à-dire entre politiques et egagements) et d’ambition (c’est-à-dire entre engagements et zéro émission nette) (IEA, 2022[3]).
Les combinaisons de mesures d’atténuation mises en œuvre dépendent de nombreux facteurs, par exemple du contexte national, des objectifs politiques et des secteurs visés. Certains pays misent principalement sur la tarification carbone ; d’autres davantage sur des instruments comme la règlementation ou le soutien technologique.
Le changement climatique n’est pas la seule externalité à gérer sur la voie de la neutralité carbone. D’autres défaillances du marché et externalités, telles que la dépendance au sentier, les externalités de savoir, les externalités de réseau ou l’apprentissage par la pratique, exigent d’autres instruments, par exemple l’aide directe à la recherche et développement (R&D) ou le soutien aux projets d’adoption d’infrastructures et de technologies et à leur déploiement. Alors que le présent rapport traite principalement des instruments de tarification carbone dans un large éventail de pays, le Forum inclusif de l’OCDE sur les approches d’atténuation des émissions de carbone (Forum inclusif) s’intéresse à l’intégralité des modes d’atténuation du changement climatique (Encadré 1.1).
Le principal intérêt de la tarification carbone est qu’à l’inverse d’autres instruments d’atténuation, elle permet de réduire les émissions avec un bon rapport coût-efficacité et peut augmenter les recettes publiques. Avec la tarification carbone, les émissions diminuent jusqu’au moment où le coût marginal de réduction des émissions est égal au prix du carbone. En décentralisant la prise de décision dans ce domaine, elle corrige l’asymétrie d’information qui existe entre les pouvoirs publics et les pollueurs, de même qu’elle favorise les réductions d’émission à moindre frais. La tarification carbone crée une incitation continue à réduire les émissions tout en limitant les effets rebond (Van Dender et Raj, 2022[4]). Elle est également une source supplémentaire de recettes publiques, contrairement aux instruments non fondés sur un prix.