Il est nécessaire de coordonner les politiques de transformation numérique à l’échelle de tous les domaines d’action et de tous les acteurs subissant l’influence de la transformation numérique (et l’influençant à leur tour). Or, les pays citent les problèmes de coordination comme l’un des principaux obstacles à la cohérence et à l’efficacité des politiques numériques (OCDE, 2017[1]), alors même que l’importance de la coordination est parfaitement admise pour d’autres politiques transversales (la politique de l’innovation, par exemple) (OCDE, 2016[2]). La coordination doit être assurée entre un large éventail d’acteurs appartenant à des entités et des niveaux d’administration multiples, mais aussi d’acteurs non gouvernementaux et de partenaires internationaux.
Si une gouvernance bien conçue est fondamentale pour une coordination efficace, il n’existe pas de solution universelle en matière de gouvernance d’une STN. Différentes approches peuvent être nécessaires face, par exemple, aux différences nationales en termes d’institutions, d’organisation administrative, de culture administrative ou de capacités publiques. De plus, les dispositifs de gouvernance ont de fortes chances d’évoluer avec le temps, au gré, par exemple, de changements politiques, de progrès technologiques ou d’évolutions de la constellation des acteurs qui portent la transformation numérique.
Presque tous les pays de l’OCDE sont dotés d’une stratégie numérique nationale, et la plupart d’entre eux ont adopté une solution de gouvernance ; toutefois, la répartition des responsabilités principales s’agissant, par exemple, d’élaborer la stratégie, de la coordonner, de la mettre en œuvre, de la suivre et de l’évaluer diffère nettement d’un pays à l’autre (OCDE, 2017[1]). Des travaux récents de recherche de l’OCDE confirment cette constatation, et distinguent deux grandes démarches de gouvernance en fonction, notamment, de l’acteur chargé de la coordination stratégique. La première démarche consiste à confier cette responsabilité à un niveau élevé (supra-ministériel) ; la deuxième, à la confier à un ou plusieurs ministères. La discussion qui suit ne vise pas à prôner l’une ou l’autre de ces méthodes, mais à décrire les solutions en place à l’heure actuelle.
La première démarche se caractérise par un leadership de haut niveau et par une centralisation des responsabilités en matière de coordination stratégique à l’échelon supra-ministériel, puisqu’elles sont confiées, dans la plupart des cas, au chef du gouvernement (graphique 9.1). Dans le cadre de cette démarche, le chef du gouvernement a aussi tendance à promouvoir activement la stratégie numérique nationale, à l’intérieur du pays et au-delà des frontières. Parmi les pays qui suivent actuellement cette démarche, on peut citer le Mexique et la République slovaque, dont le Premier ministre assume d’importantes responsabilités en matière de numérique, y compris s’agissant de rédiger la stratégie, laquelle est exécutée par le truchement d’un bureau de coordination spécifique. D’autres pays suivent également cette démarche. C’est notamment le cas du Brésil, du Chili, de la Corée, de l’Estonie et du Luxembourg, où certaines fonctions sont assurées par le Premier ministre, notamment la coordination stratégique, mais où les autres ministres jouent néanmoins un rôle important en contribuant aussi bien à l’élaboration de la stratégie qu’à sa mise en œuvre.
Dans tous les pays ayant opté pour une coordination stratégique à haut niveau, les parties prenantes sont associées à l’élaboration de la stratégie, généralement par le truchement d’un bureau de coordination. En général, la coordination opérationnelle qui doit être assurée pour la mise en œuvre de la stratégie est fondée sur un système de référents (par ex. : responsables du numérique) au sein de chaque ministère ou organisme participant à la mise en œuvre. Ces ministères et organismes se chargent généralement aussi de suivre la mise en œuvre et d’en rendre compte au bureau de coordination, lequel assure dans la plupart des cas l’évaluation globale de la stratégie, sous le contrôle général du chef de gouvernement.
Dans les pays qui centralisent la responsabilité de la coordination stratégique au niveau supra-ministériel, le bureau central de coordination peut être le centre de gouvernement (ou y appartenir). Le centre de gouvernement (la Chancellerie allemande, le Bureau du Cabinet britannique ou le Bureau exécutif du Président américain, par exemple) est généralement chargé d’assurer un soutien au plus niveau de l’exécutif (OCDE, 2014[4]). Les centres de gouvernement ont tendance à jouer un rôle moteur en matière de coordination et de priorités stratégiques, ainsi que s’agissant de concevoir des plans d’action en coopération avec les ministères concernés.