Les échanges internationaux vont contribuer de manière déterminante à satisfaire la demande croissante de matières premières critiques, comme les terres rares, le lithium, le cobalt et le nickel, qui sont indispensables à la production d’énergie renouvelable et aux technologies numériques. Cette demande est particulièrement forte à court et moyen termes dans la mesure où il faut du temps pour mettre en exploitation de nouveaux sites d’extraction et pour développer les capacités de recyclage. De fait, entre 2007-09 et 2017-19, la valeur des échanges de matières premières critiques a davantage augmenté que le volume de ces échanges, avec 38 % de croissance contre 31 %. Les échanges totaux de minerais et de minéraux ont progressé de 57 %, en moyenne, quand ceux du lithium enregistraient une hausse spectaculaire de 438 %.
Restrictions à l'exportation de matières premières critiques
Les pays qui imposent des restrictions aux exportations de matières premières pourraient bien compromettre la réalisation des objectifs fixés en matière de neutralité carbone et la transformation numérique nécessaire à la sécurité économique. L’OCDE s’attache à suivre le recours à de telles mesures afin de contribuer à une meilleure compréhension des raisons qui y poussent les pays et des conséquences qui s’ensuivent sur les marchés internationaux.
Messages clés
La mise à jour annuelle de la Base de données de l’OCDE sur les restrictions à l’exportation de matières premières révèle que ces restrictions ont quintuplé depuis que l’Organisation a commencé à réunir des données à leur sujet, en 2009 ; aujourd’hui, 10 % de ces échanges mondiaux font l’objet d’une mesure restrictive au moins. Les restrictions frappant les exportations de minerais et minéraux – soit la partie amont des chaînes d’approvisionnement en matières premières critiques – augmentent plus rapidement en nombre que celles touchant les autres segments de la filière. Les taxes à l’exportation étaient la principale cause du durcissement des restrictions à l’échelle mondiale et le dispositif le plus fréquemment utilisé en 2020. À la différence des restrictions quantitatives, elles ne sont pas interdites de manière générale par les règles de l’OMC.
Avant d’étudier les options fondées sur la coopération propres à faire reculer les restrictions nuisibles, il importe de comprendre pourquoi les pays ont recours à de telles mesures et quels en sont les effets sur leurs partenaires commerciaux.
Les restrictions à l’exportation de matières premières sapent la viabilité économique – et par là même la production – des industries extractives nationales et favorisent les utilisateurs aval établis dans le pays au détriment de ceux qui sont à l’étranger. De fait, elles s’inscrivent souvent dans le cadre de politiques industrielles nationales. Les taxes à l’exportation ou les restrictions quantitatives frappant les exportations – quotas ou interdictions pures et simples – peuvent aussi alimenter une hausse des cours mondiaux de la matière première critique à laquelle elles s’appliquent, à plus forte raison si le pays qui les impose détient une large part du marché correspondant. Ces restrictions incitent par ailleurs d’autres pays producteurs à prendre des mesures analogues, ajoutant une pression à la hausse supplémentaire sur les prix internationaux. Les augmentations en spirale du prix des produits de base qui s’ensuivent sont tout à la fois reflet et cause du durcissement des restrictions à l’exportation de matières premières.
Contexte
Concentration de la production et des échanges
La production et les échanges internationaux de diverses matières premières se sont concentrés autour d’une poignée de sites d’extraction et de traitement qui assurent le plus gros de l’offre mondiale. Le phénomène de concentration, des importations comme des exportations, est particulièrement marqué dans le cas des formes non transformées de lithium, des borates, du cobalt, des métaux précieux à l’état colloïdal, du manganèse et du magnésium.
Inventaire de l'OCDE des restrictions à l'exportation de matières premières industrielles
L'inventaire de l'OCDE des restrictions à l'exportation de matières premières industrielles a pour but d'améliorer la transparence de l'utilisation de ces restrictions à l'exportation. L'inventaire contient des informations sur 80 pays exportateurs et 65 produits. Il s'agit de l'inventaire le plus complet de ce type concernant les minéraux, les métaux et le bois.
Cet outil interactif de visualisation des données comprend un inventaire des mesures restrictives à l'exportation couvertes par l'inventaire pour tous les principaux exportateurs de minerais et sont combinées avec les chiffres de production, les réserves de minerais connues et les flux commerciaux. Essayez-le maintenant pour voir comment se présente le commerce des matières premières dans votre pays. La visualisation du commerce des matières premières représente un sous-ensemble de l'inventaire de l'OCDE des restrictions à l'exportation de matières premières industrielles, qui comprend également 6 produits du bois. Une note méthodologique détaillée pour l'inventaire est également disponible.
Sources des données : Les restrictions à l'exportation sont les restrictions en vigueur entre 2009 et 2022. Les membres de l'OCDE déclarent eux-mêmes les données relatives aux restrictions qu'ils appliquent, tandis que les données relatives aux autres pays exportateurs sont collectées par des experts et vérifiées par la suite par les autorités du pays concerné. Dans les deux cas, seules les données provenant de sources officielles et vérifiées par le Secrétariat de l'OCDE sont incluses dans la base de données.
Les matières premières sont un objet privilégié de la politique industrielle et des rivalités géopolitiques
Eu égard à la spécificité et à la concentration de la production de certaines matières premières, les dynamiques liées au pouvoir de marché peuvent entrer en jeu et être exploitées à des fins économiques ou non, par exemple à travers des restrictions frappant la production ou les échanges. Les matières premières servent, en règle générale, à produire d’autres biens, ce qui signifie qu’elles se situent en amont des chaînes d’approvisionnement nationales et internationales. Par conséquent, toute perturbation ou mesure affectant l’offre peut avoir d’importantes ramifications sur le plan systémique, qui pourront servir de prétexte à des interventions des pouvoirs publics, le plus souvent sous forme de subventions, ainsi qu’à l’imposition de restrictions aux exportations ou aux participations étrangères, dans le but de soutenir les secteurs d’activité nationaux en aval. Pourtant, l’analyse de ces dispositifs au regard de l’efficacité n’est pas concluante. Leur importance systémique fait aussi des matières premières la cible privilégiée des mesures de rétorsion économique et des rivalités politiques.
Publications associées (en anglais)
-
Policy paper29 June 2012