Le transport non urbain de voyageurs se distingue des modes de mobilité urbaine par des distances plus longues et un nombre de voyageurs plus restreint. L’objet de ce chapitre est d’examiner le rôle déterminant des déplacements interurbains et régionaux dans la réduction des émissions du secteur des transports dans son ensemble. Il met en avant les opoortunités et les défis pour la décarbonation de ce secteur dans un contexte de relance post-Covid-19 et propose des projections de l’évolution du transport non urbain de voyageurs et des émissions associées, et ce, selon trois scénarios différents. Ce chapitre aborde également les répercussions sociales des politiques de décarbonation et souligne les aspects importants à prendre en considération pour une mise en œuvre équitable des mesures adoptées.
Perspectives des transports FIT 2021
4. Transport non urbain de voyageurs : un secteur pivot pour rendre les transports propres
Abstract
En résumé
Le transport non urbain représente 60 % du total des émissions de CO2 imputables à la circulation des voyageurs. Il est plus difficile de décarboner les déplacements effectués par les airs, la route ou le rail, pour relier des villes ou des zones rurales entre elles que de réduire les émissions dues aux déplacements urbains car les distances parcourues sont plus longues et le nombre de voyageurs impliqués moins important. Aucun mode de propulsion bas carbone ne permet encore de remplacer les solutions fossiles de manière pérenne pour la mobilité longue distance.
Dans le secteur du transport non urbain de voyageurs est à un moment clé : faut-il laisser la demande et les émissions continuer d’évoluer dans le même sens ou les dissocier ? La seconde voie permet de garantir l’accès aux opportunités et de soutenir le développement économique tout en réduisant fortement les émissions.
Si le transport non urbain de voyageurs reste sur la trajectoire actuelle (telle que décrite dans le scénario Recover), le niveau des émissions de CO2 aura augmenté d’un quart entre 2015 et 2050, franchissant la barre des 3 milliards de tonnes. Cette croissance tiendra surtout au transport aérien, qui devrait représenter près de 60 % du total des émissions non urbaines à cet horizon.
Une autre voie est toutefois possible, qui pourrait faire reculer les émissions de carbone dues au transport non urbain de voyageurs de pas moins de 57 % entre 2015 et 2050. Elle passe par la mise en œuvre de mesures ambitieuses qui tirent parti du potentiel de décarbonation offert par la reprise post-Covid-19 (scénario Reshape+). Il s’agirait notamment de taxer les émissions de carbone, de verdir le réseau électrique pour pouvoir alimenter les véhicules électriques en énergie propre et de donner la priorité à la durabilité environnementale dans les plans de relance économique.
Le secteur du transport de voyageurs a été profondément ébranlé par la pandémie de Covid-19 : le volume des déplacements non urbains a dégringolé de près de 40 % ; la visioconférence s’est substituée à une part non négligeable des voyages d’affaires internationaux ; et le ralentissement de l’économie s’est assorti d’une baisse temporaire des émissions de CO2. Pour que la reprise soit durable, il conviendrait donc de doper les activités économiques de nature à réduire les émissions liées aux déplacements sur longues distances, par exemple en soutenant l’investissement dans des systèmes de transport aérien moins polluants ou en réduisant les déplacements d’affaires.
Les individus continueront de se déplacer à l’avenir. Même les politiques de décarbonation les plus strictes n’empêcheront pas la demande de transport non urbain de croître d’un peu plus de 100 % d’ici à 2050, d’après les ambitieux scénarios Reshape et Reshape+. C’est à peine moins que les 114 % prévus dans le scénario Recover, fondé sur la poursuite des politiques actuelles. En revanche, des politiques ambitieuses feront chuter les émissions de CO2 en menant à la diffusion de solutions plus durables et à des progrès technologiques, alors que, dans la trajectoire actuelle, ces émissions continueront d’augmenter.
Orientations recommandées
Accroître les prix des transports non urbains à forte intensité de carbone afin de promouvoir les solutions alternatives non polluantes.
Élaborer des plans de relance post-Covid-19 favorisant l’essor des solutions durables de transport non urbain.
Mettre en adéquation les politiques de décarbonation des transports et de l’énergie afin que la réalisation de l’objectif « zéro carbone » dans les transports soit tributaire d’énergies propres.
Rendre obligatoire l’utilisation de carburants de substitution dans le secteur du transport aérien afin d’encourager l’innovation à long terme.
Favoriser la transition vers les solutions de transport routier non urbain à faibles émissions en rendant leur prix abordable et en prenant des dispositions qui renforcent la confiance des consommateurs à l’égard de celles qui polluent moins.
Investir en amont dans le développement technologique, au-delà du simple cadre du secteur du transport, afin de permettre le déploiement à grande échelle des nouvelles technologies nécessaires à une décarbonation générale.
Le transport non urbain correspond à l’ensemble des activités de transport réalisées à l’extérieur des zones urbaines, principalement dans le cadre de déplacements régionaux et interurbains. L’expression « déplacements régionaux » renvoie à l’activité de transport locale couvrant les déplacements à la fois en milieu périurbain et en milieu rural. L’expression « déplacements interurbains » se rapporte quant à elle aux déplacements entre zones urbaines, au niveau national comme international. Selon les modèles du FIT, les modes de déplacement interurbain disponibles sont les transports routier (automobile, autobus et motocycle), ferroviaire, aérien et maritime (transbordeur). Dans le cas des déplacements régionaux, seuls les transports routies et ferroviaires sont pris en compte. Le transport non urbain de voyageurs représente à lui seul 34 % du total des émissions du secteur des transports et 60 % des volumes de CO2 rejetés par le transport de voyageurs. Ses émissions totales en 2015 s’élevaient à 2 482 millions de tonnes de CO2 pour l’équivalent de 32 000 milliards de passagers-kilomètres (pkm) parcourus.
La bataille pour la réduction des émissions du transport de voyageurs se jouera dans le secteur non urbain. Le transport régional et interurbain est fortement tributaire des combustibles fossiles. L’activité du transport non urbain de voyageurs et le volume d’émissions associées devraient repartir à la hausse et continuer de croître, après une baisse significative causée par la pandémie de Covid-19. Les projections du FIT à l’horizon 2050 montrent que le transport non urbain de voyageurs pourrait plus que doubler et les émissions augmenter de 25 %, même si cette croissance ne sera pas aussi forte que prévu en raison des conséquences économiques persistantes sur la demande.
La pandémie a entraîné une baisse de plus d’un tiers de la demande de transport non urbain de voyageurs en 2020. Les restrictions de déplacement et les mesures de confinement mises en place en réaction à la crise auraient donné lieu à une baisse de la demande de déplacements interurbains et régionaux de 38 % en 2020 par rapport aux projections antérieures à la pandémie. Ce phénomène a toutefois frappé plus durement les déplacements internationaux que les déplacements intérieurs. La baisse de la demande s’est également traduite par une réduction sensible du volume d’émissions de CO2, même si cette tendance restera vraisemblablement temporaire. En effet, dans les trois scénarios de modélisation du FIT, le transport non urbain se remettra rapidement des effets de la pandémie de Covid-19.
Grâce à des mesures ambitieuses, les émissions de CO2 du transport régional et interurbain pourraient atteindre 1 070 millions de tonnes en 2050, soit une baisse de 57 % par rapport à 2015
La mise en action de politiques plus intenses permettrait de pérenniser les avancées rendues possible par la pandémie en matière de décarbonation et contribuer à la réduction des émissions de CO2 imputables au transport non urbain. Grâce à des mesures ambitieuses, les émissions de CO2 dues au transport régional et interurbain pourraient atteindre 1 070 millions de tonnes en 2050, soit une baisse de 57 % par rapport à 2015 selon le scénario Reshape+. La reprise consécutive à la pandémie pourrait enclencher une dynamique en faveur de la décarbonation des déplacements interurbains et régionaux. Les pouvoirs publics devraient profiter de cette situation pour élaborer des plans de relance également susceptibles d’accélérer les efforts d’atténuation du changement climatique.
Il faut considérer les questions d’équité lors de l’évaluation des équilibres économiques, sociaux et environnementaux qui sous-tendent la transition vers un transport non urbain plus durable. La réduction des émissions des transports ne peut toutefois se faire au détriment des populations les moins aisées. À titre d’exemple, tous les consommateurs ne bénéficient pas de manière égale des déductions et autres incitations fiscales pour l’achat de véhicules électriques, dans la mesure où, même avec les dispositifs d’aide, les personnes à faible revenu n’auront pas les moyens d’acquérir de tels véhicules. De même, les taxes sur le carbone sont par définition régressives et touchent plus durement les catégories à faible revenu. Les politiques en matière de transport devraient donc veiller à ne pas générer de telles inégalités.
Décarbonation du transport non urbain de voyageurs : l’état des lieux
Le transport non urbain de voyageurs est l’un des secteurs du transport les plus difficiles à décarboner. Il se caractérise généralement par des trajets sur de longues distances et un nombre de voyageurs plus faible, compliquant la mise en œuvre d’une grande partie des solutions de décarbonation applicables à d’autres secteurs. Dans le cas du transport aérien, il n’existe à l’heure actuelle aucune solution de substitution économiquement viable. Le transport ferroviaire ne génère quasiment aucune émission de gaz d’échappement, mais s’appuie sur des infrastructures coûteuses et un taux d’occupation élevé est nécessaire pour justifier les investissements engagés. La disponibilité des bornes de recharge et la capacité limitée des batteries constituent encore des obstacles à une diffusion plus généralisée des véhicules électriques pour les déplacements longue distance. Les véhicules à carburants de substitution comme l’hydrogène présentent les mêmes inconvénients. La mise en action de nouvelles mesures ambitieuses, le développement d’infrastructures et les innovations technologiques peuvent néanmoins contribuer à une décarbonation plus efficace du secteur.
Pour répondre à la demande croissante de mobilité, l’approche traditionnelle a été d’augmenter les capacités du secteur grâce à de nouvelles infrastructures. Cela a toutefois eu pour conséquence une hausse de la congestion, une dégradation de la qualité de l’air et une augmentation des émissions de CO2. Il conviendrait de répondre à cette demande croissante par la mise en action de mesures durables, et notamment selon l’approche « éviter, changer et améliorer ». Ce modèle vise non seulement à réduire la congestion, les émissions et la consommation d’énergie, mais aussi à améliorer la qualité de l’air tout en offrant aux voyageurs une accessibilité accrue.
Les mesures relevant de la stratégie Éviter ont pour objet de réduire les besoins de déplacement ou de permettre des trajets plus courts. À l’intérieur des villes, ces objectifs peuvent être atteints par l’association de politiques d’urbanisme et de planification des transports. Le transport non urbain n’offre généralement pas de telles possibilités. La pandémie de Covid-19 a toutefois montré que de nombreux voyages d’affaires pouvaient être évités ou simplement remplacés par des téléconférences. De la même manière, la pandémie a entraîné un essor du tourisme local et une réduction des distances parcourues par les vacanciers. À condition d’être promues par le secteur du tourisme et les entreprises concernées, ces modifications temporaires des habitudes de déplacement suscitées par la pandémie de Covid-19 pourraient s’inscrire dans la durée.
Les mesures relevant de la stratégie Changer visent à réduire l’empreinte carbone des déplacements grâce à des solutions de substitution moins polluantes, en privilégiant par exemple le transport ferroviaire au transport aérien. Dans le cas des déplacements non urbains, les stratégies « Éviter » et « Changer » vont de pair, dans la mesure où réduire la durée d’un trajet permet également de basculer sur un mode de transport moins polluant.
Les mesures relevant de la stratégie Améliorer ont pour but de renforcer l’efficacité énergétique et de stimuler les performances environnementales par une mise à niveau technologique. Dans le cas du transport aérien, cela inclut l’exploitation de technologies aéronautiques moins polluantes et de carburants d’aviation durables. Par ailleurs, les progrès en matière de moteurs et de groupes motopropulseurs conventionnels, et le développement de technologies visant à une réduction de la masse des véhicules pourraient contribuer à une amélioration de l’efficacité énergétique du transport routier.
Le secteur aérien a pris conscience de la nécessité de réduire ses émissions. L’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) a adopté une nouvelle norme sur les émissions de CO2 des aéronefs (OACI, 2017[1]) et procède à la mise en œuvre d’un Régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (CORSIA) (OACI, 2016[2]). En vertu de ce régime, les transporteurs aériens compenseront collectivement leurs émissions de CO2 au-delà d’un seuil fixé sur la base du niveau moyen des émissions de CO2 en 2019/20. Ce régime deviendra obligatoire en 2026, après une phase d’essai entre 2021 et 2023 et une phase de volontariat entre 2024 et 2026. Quelques exceptions seront néanmoins observées, par exemple pour les pays les moins développés. Suite à la baisse massive de la demande provoquée par la pandémie de Covid-19, le CORSIA a été modifié de sorte à prendre comme référence les émissions de CO2 en 2019 et, à moins d’une reprise rapide consécutive à la crise, les contributions du CORSIA devraient rester limitées au cours de premières années.
La croissance du transport aérien a progressé plus rapidement que le développement d’améliorations environnementales significatives dans le secteur aérien, malgré la mise en service de nouveaux aéronefs moins gourmands en carburant. Les données de l’OACI montrent qu’après une période d’interruption provoquée par la pandémie en 2020 le trafic aérien de voyageurs est reparti à la hausse avec un taux de croissance annuel composé d’environ 6.5 % entre 2010 et 2019 (6 % pour le trafic intérieur et 6.8 % pour le trafic international) (2020[3]). Le transport aérien est voué à devenir le principal mode de transport pour les déplacements interurbains en 2050, enregistrant une croissance de près de 210 % par rapport à 2015.
Les avantages et inconvénients du transport aérien sont loin d’être répartis de façon équitable. La moitié des émissions de CO2 imputables au transport aérien commercial sont générées par seulement 1 % de la population mondiale (Gössling and Humpe, 2020[4]). Alors qu’une petite frange de la population est responsable d’une part importante des émissions liées au transport aérien, leurs effets négatifs affectent l’ensemble de la population. Cette étude montre également que près de 50 % du transport aérien mondial est concentré en Amérique du Nord et en Europe, suivies par la région de l’Asie-Pacifique (32 %). Les autres régions du monde ne représentent que 19 % du transport aérien, bien qu’elles abritent une part bien plus importante de la population mondiale. La baisse des émissions du transport aérien provoquée par la pandémie de Covid-19 pourrait être une occasion permettant aux pouvoirs publics de résorber cette inégalité, en faisant peser une part plus importante des coûts environnementaux sur les passagersprenant fréquemment l’avion.
Le ferroviaire est souvent considéré comme le mode de transport non urbain le plus propre, mais son électrification doit se poursuivre. Bien qu’il s’agisse d’une priorité des pouvoirs publics de nombreux pays, cet objectif est loin d’être atteint (UIC, 2019[5]). Des progrès sensibles ont été réalisés en Europe, la région qui compte l’activité ferroviaire interurbaine la plus importante au monde. Un travail considérable reste encore à réaliser dans les autres régions. Il convient en outre de prendre en considération les émissions tout au long du cycle de vie du transport ferroviaire, y compris les émissions liées aux infrastructures dédiées (AIE, 2019[6]).
Les véhicules de transport routier présentent le potentiel de décarbonation le plus important, mais des obstacles non négligeables restent à franchir. Au cours des dix dernières années, les automobiles et les motocycles ont bénéficié d’avancées technologiques considérables, avec un remplacement des moteurs à combustion interne par des moteurs électriques ou hybrides rechargeables (AIE, 2020[7]). Les progrès restent toutefois lents en raison de la part encore faible des ventes de véhicules moins polluants. L’utilisation de véhicules électriques dans le cadre du transport non urbain pose deux difficultés majeures : l’autonomie des batteries et les infrastructures de recharge. L’autonomie des véhicules électriques demeure bien inférieure à celle des véhicules classiques et les infrastructures de recharge rapide sont particulièrement rares à l’extérieur des villes. Ces infrastructures de recharge sont actuellement déployées le long des principaux axes interurbains, or tant que les autres axes de circulation n’en seront pas équipés, l’utilisation des véhicules électriques pour le transport non urbain restera limitée. Une répartition stratégique de telles infrastructures est donc nécessaire pour accélérer l’adoption des véhicules électriques (Wang et al., 2019[8]; Xie et al., 2018[9]). Ces restrictions s’appliquent également au transport par autobus électrique, même si ce mode de transport est confronté à des difficultés bien plus importantes. D’autres carburants de substitution propres destinés aux véhicules de transport routier (l’hydrogène, par exemple) semblent prometteurs, mais induisent des investissements importants de recherche et développement, ainsi qu’un niveau d’acceptation plus élevé des utilisateurs.
La décarbonation du transport régional est une entreprise de longue haleine. Les services reliant entre eux les habitants de zones rurales font face à des difficultés semblables à celles des axes routiers et ferroviaires reliant les villes. La faible intensité du trafic de voyageurs rend toutefois le développement des infrastructures plus coûteux et donc moins probable. Le parc automobile des zones rurales a également tendance à être plus ancien et plus gourmand en carburant que dans les zones urbaines.
Encadré 4.1. Électrification du transport aérien
Le transport aérien commercial a toujours eu des carburants hydrocarbonés pour source d’énergie. Cette source d’énergie reste à l’heure actuelle la seule qui soit facilement disponible et qui présente une densité énergétique suffisante pour propulser un aéronef au décollage. Cela devrait toutefois évoluer dans les prochaines décennies. Les développements technologiques escomptés dans la conception des aéronefs et des moteurs, ainsi qu’en matière de capacité et de densité des batteries, rendront possible l’utilisation de l’énergie électrique dans le transport aérien (Sehra and Whitlow, 2004[10]). Les modalités précises de l’utilisation de ce type d’énergie restent à déterminer, même si les aéronefs à propulsion électrique hybride et les aéronefs tout électriques semblent les plus prometteurs.
Les aéronefs à propulsion électrique hybride associent la combustion de carburant et une assistance électrique. L’électricité permet donc aux moteurs de fonctionner de manière optimale pour chaque phase de vol. Cette assistance électrique se traduit par une baisse de la consommation générale de carburant, malgré un poids supérieur dû à un moteur plus complexe et aux batteries nécessaires au stockage d’énergie. Les économies d’énergie sont d’autant plus importantes dans le cas des vols court-courriers, pour lesquels les phrases de vol les plus gourmandes en carburant (décollage, montée en altitude et descente) représentent une part importante de la durée totale des vols. Des études récentes estiment que les économies potentielles de carburant des aéronefs à propulsion électrique hybride (et les émissions de CO2 associées) pourraient atteindre 28 % pour les vols régionaux et court-courriers (Zamboni, 2018[11]; Voskuijl, van Bogaert and Rao, 2018[12]).
Les aéronefs tout électriques s’appuient quant à eux uniquement sur l’énergie fournie par des batteries pour voler. Ils requierent des batteries légères et à haute densité énergétique, adaptées à la taille des aéronefs et offrant une autonomie suffisante. Ainsi, un aéronef tout électrique destiné au transport aérien commercial, offrant une portée opérationnelle entre 750 km et 1 100 km et une charge utile de 150 passagers, nécessiterait des batteries d’une densité énergétique plus de trois fois supérieure aux batteries lithium-ion actuelles (Schäfer et al., 2019[13]). Malgré les importantes difficultés techniques auxquelles elles sont confrontées, de nombreuses entreprises développent actuellement des aéronefs tout électriques de différentes tailles.
Le modèle du transport non urbain de voyageurs développé par le FIT établit des hypothèses sur les caractéristiques et les développements technologiques du transport aérien électrique. Des aéronefs à propulsion électrique hybride limitant de 28 % les émissions de CO2 seront disponibles dès 2030 pour des trajets jusqu’à 1 000 km. Des aéronefs tout électriques seront également disponibles dès 2030 mais uniquement pour des trajets inférieurs à 330 km. La portée de ces deux types d’aéronefs augmentera par ailleurs au fil du temps. Le coût du transport aérien électrique (couvrant les aéronefs tout électriques et la composante électrique des aéronefs à propulsion électrique hybride) est indexé sur le coût des carburants conventionnels. En 2030, ce coût sera 2.5 fois plus élevé et baissera sur l’ensemble de la période étudiée si l’on prend en compte les développements technologiques escomptés, sans toutefois jamais atteindre un niveau inférieur à 1.2 fois le coût des carburants conventionnels (la valeur finale dépend du scénario choisi).
Des informations complémentaires sur les aéronefs tout électriques et à propulsion électrique hybride, ainsi que sur d’autres développements technologiques pour la décarbonation du transport aérien, sont disponibles dans le rapport Decarbonising Air Transport: Acting Now for the Future du FIT (À paraître[14]).
Maîtriser la pandémie : Défis et opportunités pour la mobilité non urbaine au sortir de la pandémie de Covid-19
La pandémie de Covid-19 a bouleversé tous les types de mobilité, et plus particulièrement le transport non urbain de voyageurs. Les fermetures de frontières, les injonctions de confinement et les obligations de quarantaine pour les visiteurs étrangers ont créé des obstacles inédits à la mobilité des populations. Le modèle développé par le FIT pour le transport non urbain de voyageurs a été adapté afin de prendre en compte ces évolutions dans le calcul de la demande de déplacements interurbains et régionaux, ainsi que les émissions associées pour 2020. Les résultats ont été validés sur la base de données empiriques chaque fois que cela était possible. Par rapport aux projections de la demande de transport non urbain de personnes en 2020 antérieures à la pandémie, le modèle révèle une baisse significative des déplacements, à hauteur d’environ 40 % (mesurés en passagers-kilomètres). Certains modes de transport enregistrent des baisses plus importantes que d’autres, même si les estimations révèlent que cette baisse est d’au moins 30 % pour tous les modes de transport.
Le ralentissement du transport aérien a été particulièrement brutal. Le nombre de passagers du transport aérien s’est effondré de 60 % en 2020, soit la plus forte baisse annuelle jamais observée (OACI, 2021[15]). Le transport aérien international a chuté de 75 % et même si le transport aérien intérieur a été moins affecté, le nombre de passagers a été divisé par deux. La fermeture des frontières et les mesures de quarantaine imposées aux visiteurs internationaux ont été les deux principaux facteurs de cette baisse, même si les craintes et incertitudes engendrées par la pandémie ont également découragé un grand nombre de voyageurs potentiels (OMT, 2020[16]), au même titre que l’absence de règles universelles.
Le transport aérien a été particulièrement exposé aux pics et accalmies successifs de la pandémie à l’échelle régionale. La nature même du transport aérien international le rend extrêmement sensible aux faits que les vagues successives de la pandémie ont touché les régions du monde à des moments différents, et que les pays ont tous adopté des mesures disparates pour y faire face. La demande en transport aérien de voyageurs a par conséquent connu une quasi-stagnation en avril 2020, après une chute de 94 % par rapport à avril 2019 (IATA, 2020[17]). Certaines restrictions de déplacement et mesures de quarantaine ont été progressivement levées au cours des mois suivants et l’activité aérienne a pu reprendre sur certaines lignes, principalement intérieures. Plusieurs pays ont par ailleurs créé des « couloirs » de déplacement internationaux temporaires, fondés sur des accords bilatéraux. Ces accords convenus entre différents pays permettent aux compagnies aériennes d’exploiter des vols internationaux au départ et à destination de ces pays, et ce, sans aucune ou quasiment aucune restriction. L’objectif est de permettre une reprise des services de transport aérien de voyageurs en toute sécurité, bien que les vols internationaux réguliers restent suspendus en raison de la pandémie.
Le transport ferroviaire a été affecté de façon disproportionnée par la pandémie. L’activité de transport par voie de surface a chuté de 32 % par rapport aux projections du FIT établies avant la pandémie. Le rail et l’autobus obligent les voyageurs à partager un même espace et ont donc été particulièrement délaissés en période de pandémie. À l’inverse, le transport routier individuel, qui offre une protection relative contre le virus, a enregistré une baisse plus limitée. Il n’existe aucun chiffre précis sur la baisse de la demande mondiale pour les voitures particulières, mais le FIT estime cette baisse à 30 %. Le nombre de véhicules transitant par les routes à péage apporte toutefois un éclairage intéressant. Plusieurs exploitants de péages aux États-Unis ont enregistré une chute de 25 à 50 % du nombre de voitures pendant la pandémie (SmartBrief, 2020[18]). En Inde, la National Highway Authority a estimé en mai 2020 que le confinement national imposé au printemps entraînerait une baisse de 17 % du trafic autoroutier interurbain sur l’ensemble de l’année (CRISIL, 2020[19]). La baisse effective est toutefois susceptible d’être plus prononcée, dans la mesure où les différents États ont imposé leurs propres règles et restrictions au cours des mois suivants.
Le transport ferroviaire interurbain a pris en charge un nombre de voyageurs beaucoup plus faible en 2020 qu’en 2019. D’après l’Office britannique de régulation du rail (Office of Rail and Road), 35 millions de trajets ferroviaires de voyageurs ont été réalisés entre avril et juin 2020, soit l’équivalent de seulement 6.4 % de tous les trajets réalisés à la même période en 2019 et le niveau le plus faible enregistré depuis le milieu du xixe siècle (ORR, 2020[20]). Aux États-Unis, les données de l’État de Washington montrent des tendances comparables pour le transport ferroviaire interurbain. Le jour où une injonction de confinement a été prise, les services ferroviaires de transport de voyageurs ont pris en charge 95 % d’utilisateurs en moins que le même jour en 2019 (WSDOT, 2020[21]). Bien que cette injonction eût été levée en juin 2020, le niveau de fréquentation au 1er janvier 2021 était encore 90 % inférieur au même jour un an plus tôt.
La pandémie a provoqué une diminution significative de la demande en transport par autobus interurbain, avec une chute de 36 % de l’activité des autobus selon les estimations du FIT. Les données effectives sont difficiles à obtenir, dans la mesure où le secteur du transport par autobus est moins réglementé et davantage fragmenté que le secteur du transport aérien ou ferroviaire. Les chiffres des immatriculations de nouveaux véhicules offrent toutefois un certain éclairage. En Europe de l’Ouest, les immatriculations d’autocars se sont effondrées de 82 % entre avril et juin 2020, par rapport à la même période en 2019. À l’échelle des pays, cette baisse va de 69 % en France jusqu’à 92 % en Belgique (Sustainable Bus, 2020[22]). Au-delà d’une diminution de la demande des transporteurs par autobus, les fermetures d’usines ont très probablement aussi eu un effet préjudiciable sur les immatriculations.
Encadré 4.2. Une trajectoire à faibles émissions de carbone pour la résilience du secteur du tourisme au lendemain de la crise du Covid-19
En décembre 2019, à l’occasion de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP25), l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) et le FIT ont publié un rapport intitulé « Transport-related CO2 emissions from tourism » (Émissions de CO2 liées aux transports du secteur du tourisme) (OMT, 2019[23]), afin d’apporter des éclairages sur l’évolution de la demande de tourisme et des émissions de CO2, à l’échelle mondiale et d’une région à l’autre entre 2016 et 2030. Les arrivées de touristes nationaux et internationaux devaient respectivement atteindre 15.6 milliards et 1.8 milliard en 2030 (contre 8 milliards et 1.2 milliard en 2016). Il en va de même pour les émissions de CO2, qui devaient augmenter d’au moins 25 % d’ici à 2030 (passant de 1 597 Mt à 1 998 Mt) sur la base d’un scénario d’ambitions inchangées, compliquant la réalisation des objectifs climatiques internationaux pour le secteur.
Une année plus tard, ce secteur traverse la pire crise de son histoire. Les arrivées de touristes internationaux ont chuté de 74 % en raison de la généralisation des restrictions de déplacement et des difficultés socio-économiques, ce qui représente une perte en recettes d’exportation estimée à 1 300 milliards USD et 120 millions d’emplois directs menacés. Les restrictions de déplacement ont été mises en place de manière progressive depuis le début de la pandémie. En mai 2020, les frontières de 75 % des destinations dans le monde étaient ainsi fermées au tourisme international. Les restrictions de déplacement furent ensuite assouplies pour atteindre en novembre 2020 le plus faible taux de fermeture complète des frontières (soit 27 % des destinations dans le monde) avant que la tendance ne reparte à la hausse. Au mois de février 2021, 32 % des frontières étaient toujours fermées, rendant difficile toute anticipation du redressement total des activités touristiques. Les conséquences du Covid‑19 sur les émissions de CO2 liées au transport dans le secteur du tourisme restent encore à déterminer.
Malgré les circonstances, les acteurs du tourisme s’accordent de plus en plus à penser que la résilience du secteur à long terme dépendra de sa capacité à emprunter une trajectoire à faibles émissions, à réduire de moitié ses émissions à l’horizon 2030 et à atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050. La « Vision One Planet pour une reprise responsable du secteur du tourisme » au sortir de la crise de la Covid-19, publiée par l’OMT en juin 2020, souligne l’importance de contrôler et déclarer les émissions de CO2 des activités touristiques de manière régulière et transparente, ainsi que la nécessité d’accélérer la décarbonation de ces activités, y compris en investissant dans le développement de modes de transport à faibles émissions et d’infrastructures plus propres (Programme One Planet de Tourisme Durable, 2020[24]).
Dans les pays comme la République populaire de Chine (l’un des plus importants marchés pour le tourisme intérieur), les investissements dans le développement de lignes ferroviaires à grande vitesse à travers le pays semblent avoir contribué à une reprise plus rapide du tourisme dans certaines destinations habituellement moins prisées (Nankin et Changsha, par exemple) (McKinsey & Company, 2020[25]). Dans le cas de destinations comme l’Écosse, les plans de réduction des émissions et d’orientation des efforts de commercialisation destinés à promouvoir un tourisme responsable (y compris les transports publics et les modes de déplacement actifs) ont été rendus publics dans le contexte de la relance post-Covid-19 (VisitScotland, 2020[26]). En Colombie, le gouvernement a récemment adopté une politique nationale du tourisme érigeant la mesure des émissions de CO2 du secteur du tourisme au rang de facteur prioritaire pour la réalisation des objectifs de sa contribution déterminée au niveau national soumise dans le cadre de l’Accord de Paris (Mincomercio, 2020[27]).
La baisse des déplacements a entraîné un volume plus faible d’émissions de CO2 en 2020. Les données semblent indiquer que la diminution des émissions liée à la pandémie ne sera que temporaire. Certains rapports préliminaires révèlent toutefois que cette baisse est significative. Aux États-Unis, les émissions de CO2 imputables au secteur du transport ont chuté de 15 % (Rhodium Group, 2021[28]). Le FIT évalue à 36 % la baisse des émissions de CO2 pour le transport non urbain de voyageurs.
Si les politiques restent sur la même trajectoire qu’avant la crise, les émissions de CO2 liées au transport non urbain de voyageurs augmenteront de 45 % entre 2020 et 2025
Les déplacements régionaux et entre les villes ont généré beaucoup moins de CO2 en 2020, mais cette baisse n’était que temporaire. Le FIT estime que les émissions de CO2 du transport non urbain de voyageurs ont baissé de 36 % en 2020. Cette baisse pourrait toutefois avoir été bien plus importante que dans d’autres segments du secteur du transport, étant donné la chute particulièrement brutale de l’activité du transport aérien. Cela n’aura cependant quasiment aucune incidence sur la réalisation des objectifs climatiques, à moins que les pouvoirs publics ne prennent des mesures décisives en ce sens. Si les politiques restent sur la même trajectoire qu’avant la crise (scénario Recover du FIT), les émissions totales de CO2 liées au transport non urbain de voyageurs augmentera de 45 % entre 2020 et 2025.
Comment la pandémie de Covid-19 a modifié les habitudes de déplacement
La crise du Covid-19 pourrait donner lieu à des évolutions positives dans notre façon de nous déplacer et de travailler. Ces évolutions pourraient encore accentuer la réduction des émissions imputables au transport non urbain de voyageurs si les mesures d’action publique adaptées sont mises en œuvre. De nombreuses entreprises ont maintenu leur productivité et leur rentabilité après avoir intégré des solutions technologiques d’information et de communication, et réduit les déplacements d’affaires pendant la pandémie. De la même manière, les évolutions du tourisme international de loisirs pourraient également entraîner une baisse significative des émissions en raison du regain de popularité de solutions locales de substitution.
Une partie des déplacements d’affaires pourrait être remplacée par des réunions à distance ou des téléconférences. Cette tendance pourrait se traduire par une diminution durable des déplacements d’affaires, surtout par transport aérien, actuellement le plus gros générateur de CO2. Fin juillet 2020, les réservations de vols par des entreprises avaient chuté de 97 % par rapport à l’année précédente (Sindreu, 2020[29]). Cette baisse des déplacements d’affaires restera un phénomène temporaire, à moins que des mesures ne soient spécifiquement mises en place pour pérenniser cette tendance. Une évolution des pratiques de travail (développement du télétravail et des téléconférences, par exemple) ou des modèles d’affaires (diversification ou resserrement des chaînes logistiques mondiales et développement des entreprises numériques et du commerce en ligne, par exemple) pourrait contribuer à limiter les émissions sur le long terme (OCDE, 2020[30]). Une diminution des déplacements d’affaires ne signifie toutefois pas nécessairement une diminution des émissions. En effet, si le taux d’occupation minimum est maintenu, les compagnies aériennes continueront vraisemblablement à desservir leurs lignes à la même fréquence. Cela devrait toutefois se traduire par une augmentation des tarifs en classe économique afin de préserver la rentabilité des transporteurs.
Le tourisme de loisirs vers des destinations lointaines pourrait être délaissé au profit de destinations plus proches. Au milieu de l’année 2020, malgré une reprise temporaire du tourisme, de nombreux vacanciers ont privilégié les destinations proches ou sur le territoire national, que ce soit pour des raisons de sécurité ou en raison des restrictions de déplacement. Le tourisme local a également été mis en avant dans le cadre de promotions ou de campagnes publicitaires (Forbes, 2020[31]). Les mesures d’action publique qui sous-tendent de tels changements de comportement pourraient entraîner, selon les régions, une baisse du transport longue distance de voyageurs de 15 à 22 % d’ici à 2030.
Un rebond des voyages n’est pas totalement à exclure. Il est également possible que l’on assiste à un rebond important du secteur. Si les personnes qui n’ont pu voyager en raison de la pandémie estiment qu’il est à nouveau sûr de partir en vacances, elles pourraient être tentées de surcompenser les restrictions de l’année passée. L’apparition dans certaines régions du monde de « vols sans destination » (avec départ et arrivée au même aéroport après quelques heures de vol) en est un bon exemple (The New York Times, 2020[32]). Bien que l’impact de ce type de vols soit minime à l’échelle mondiale, il témoigne de l’envie de nombreuses personnes de pouvoir voyager à nouveau. Ce phénomène pourrait donner lieu à un pic du transport non urbain de voyageurs et par conséquent des émissions de CO2.
La pandémie a eu un effet négatif sur la popularité du transport ferroviaire et par autobus. Même si la pandémie pourrait entraîner une baisse durable des émissions liées au transport aérien, il n’en va pas de même du transport routier et du transport ferroviaire. Les exigences de distanciation physique ont compromis la popularité du transport ferroviaire et par autobus, auquel certains ont privilégié les véhicules de transport individuel comme solution de substitution robuste. Ce changement temporaire pourrait toutefois devenir permanent. L’augmentation des déplacements en véhicules individuels pourrait s’avérer préjudiciable à la décarbonation du transport non urbain de voyageurs. Restaurer la confiance des voyageurs dans le ferroviaire et l’autobus sera une condition essentielle à la réalisation des objectifs de décarbonation au sortir de la pandémie.
La pandémie pourrait accélérer la mise au rebut des aéronefs les plus anciens. Non seulement les aéronefs en fin de vie génèrent des coûts d’exploitation plus importants, mais leur consommation de carburant est également plus élevée. La diminution de la demande provoquée par la propagation du Covid‑19 a entraîné l’immobilisation permanente des appareils les plus anciens. Ce phénomène s’est déjà produit bien avant la crise du Covid-19. D’autres périodes de faible demande, comme la crise financière de 2008 ou les attentats du 11 septembre, ont également donné lieu à des mises au rebut anticipées d’aéronefs, ainsi qu’à la fusion d’entreprises du secteur (Russell, 2020[33]). Air France, par exemple, devait à l’origine retirer ses Airbus A380 de la circulation avant la fin de 2022, or l’entreprise a annoncé en mai 2020 mettre immédiatement hors service l’ensemble de sa flotte d’A380. Ceux-ci seront remplacés par des aéronefs de taille inférieure (Airbus A350 et Boeing 787) et dont l’empreinte environnementale est également plus faible (Air France KLM Group, 2020[34]). La pandémie pourrait ainsi contribuer à persuader les compagnies aériennes de se tourner vers des modèles d’aéronefs plus modernes et moins polluants. Les politiques qui seront mises en œuvre au lendemain de la crise du Covid-19 devront soutenir les innovations technologiques visant à limiter les émissions de CO2 liées au secteur du transport aérien (FIT, 2020[35]).
Le Tableau 4.1 offre un aperçu des répercussions de la pandémie de Covid-19 à court et à long termes, et des défis et opportunités qu’elle entraîne pour la décarbonation du transport non urbain de voyageurs.
Tableau 4.1. Défis et opportunités potentiels pour décarboner les transports non urbains de voyageurs à l’issue de la pandémie de Covid-19
Effets |
Potentielles opportunités pour la décarbonation |
Potentiels défis pour la décarbonation |
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Effets à court terme |
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Changements à long terme/structurels |
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Note : les effets à court terme sont liés aux changements qui, observés pendant la pandémie dans les comportements en matière de mobilité, mettent à mal ou empêchent les efforts de décarbonation. La plupart des opportunités à long tertmes et structurelles reposent sur des politiques de relance bien conçues ; en revanche, les défis compliquent la décarbonation future.
Incidence de la pandémie de Covid-19 sur la décarbonation du transport non urbain de voyageurs
La pandémie a stimulé l’efficacité énergétique des aéronefs et le choix de trajets plus directs. Bien que l’activité de transport aérien redémarre, il faut désormais mobiliser un nombre plus faible d’aéronefs pour répondre à la demande. Les appareils plus anciens et plus gourmands en carburant restent immobilisés au sol. Lorsque la demande aura retrouvé son niveau d’avant la crise, les flottes aériennes ne seront plus constituées que d’aéronefs récents et plus économes en énergie, lesquels sont actuellement en cours de fabrication. L’exploitation d’un nombre plus faible d’aéronefs se traduit également par une réduction de la congestion. Cela permet en outre de limiter les détours et d’assurer des trajets plus directs. Néanmoins, une fois la circulation revenue à son niveau d’avant la pandémie, cette seconde évolution positive pourrait rapidement se dissiper.
Le redressement financier post-Covid-19 pourrait contribuer à assurer la transition vers des transports plus propres. Si la tarification du carbone reste peu élevée, les mesures de relance mises en place par les pouvoirs publics s’avéreront finalement moins efficaces sur le plan environnemental. Les pouvoirs publics pourraient tirer parti de cette période de relance pour encourager l’investissement dans des infrastructures de transport de substitution à faibles émissions de carbone. La tarification du carbone pourrait s’avérer utile à ces fins et même constituer une source de recettes bienvenue pour équilibrer les finances publiques. L’outil de calcul des taxes sur les transports aériens (Aviation Tax Tool) développé par le groupe d’intérêts durables Transport & Environment détermine les recettes potentielles et les émissions évitées lorsqu’un pays ou un groupe de pays impose des taxes sur les carburéacteurs. D’après cet outil, si ces taxes étaient appliquées à partir de 2021 dans l’Union européenne et au Royaume-Uni à hauteur de 0.33 EUR par litre de kérosène, une économie de 99.3 millions de tonnes d’émissions de CO2 pourrait être réalisée sur la période 2021‑30, accompagnée d’une augmentation de 7.2 milliards EUR des recettes rien que pour l’année 2021 (Bannon, 2020[36]).
Les plans de relance et les mesures de renflouement dont bénéficient les compagnies aériennes doivent les contraindre à la réalisation d’objectifs environnementaux. La pandémie de Covid-19 offre aux gouvernements la possibilité de conditionner les mesures de renflouement proposées aux compagnies aériennes, et plusieurs gouvernements ont déjà opté pour cette approche. Le renflouement d’Air France-KLM par la France oblige le transporteur à réduire ses vols intérieurs de 40 %, notamment sur les trajets court-courriers pour lesquels une solution par transport ferroviaire de moins de deux heures et demie est disponible (Cirium, 2020[37]). Le plan de soutien général au secteur aérospatial français prévoit par ailleurs 1.5 milliard EUR pour la recherche et le développement d’un modèle d’aéronef moins polluant (soit un « avion neutre en carbone ») d’ici à 2035 (Morgan, 2020[38]). De même, en Autriche, dans le cadre du renflouement de Deutsche Lufthansa AG, la compagnie aérienne s’est vue imposer un prix minimum du billet et des frais supplémentaires sur les lignes les plus courtes afin de rendre dissuasifs les trajets aériens pouvant être évités (Schwarz-Goerlich, 2020[39]). D’autres gouvernements pourraient ainsi élaborer des plans de renflouement du transport aérien et tirer parti de la crise pour lutter contre le changement climatique.
La sécurité, l’hygiène et la flexibilité sont des conditions essentielles pour inciter les voyageurs à se tourner à nouveau vers le transport ferroviaire et par autobus. Une fois la demande repartie à la hausse après la pandémie, les pouvoirs publics devront prendre des mesures prioritaires visant à garantir que les voyageurs puissent emprunter en toute confiance des modes de transport partagé durables pour leurs déplacements longue distance. Assurer une large promotion des protocoles de sécurité et des procédures sanitaires permettra aux utilisateurs de se sentir plus en sécurité lorsqu’ils partagent un même espace avec d’autres voyageurs. Le déploiement de services numériques capables d’analyser les données de déplacement et d’identifier les périodes de plus faible affluence dans la journée permettra également aux usagers de voyager plus en sécurité dans les transports en commun. La tarification dynamique et une collaboration renforcée entre les différents opérateurs pourraient également s’avérer utiles. Des possibilités de réservations flexibles pourrait en outre contribuer à améliorer l’attractivité du transport ferroviaire ou par autobus par rapport aux voitures particulières.
La décarbonation des véhicules individuels est un facteur déterminant de la décarbonation du transport non urbain de voyageurs. Une part importante des déplacements non urbains sont réalisés en véhicules de transport individuel. Les véhicules électriques ont toutefois été moins utilisés pour les déplacements non urbains en raison de leur faible autonomie et de la disponibilité limitée des bornes de recharge. Les politiques et investissements nécessaires pour résoudre ces difficultés peuvent être directement intégrés aux plans de relance à l’appui non seulement de l’économie, mais aussi de la décarbonation. L’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la France et l’Italie ont toutes adopté des plans de relance incluant des avantages fiscaux pour les consommateurs faisant l’acquisition de véhicules électriques (Bundesamt für Wirtschaft und Ausfuhrkontrolle, 2020[40]) (Service-Public.fr, 2020[41]). Ces incitations ont déjà prouvé leur efficacité. Les ventes de véhicules électriques à batterie et de véhicules électriques hybrides rechargeables en Europe de l’Ouest ont plus que doublé en 2020, alors que les ventes de véhicules à essence ou au diesel se sont effondrées (The New York Times, 2021[42]).
Les plans de relance de l’économie mettant l’accent sur la décarbonation du transport pourraient contribuer à accélérer le rythme de la reprise économique post-Covid-19. Il est possible de stimuler la demande de véhicules électriques grâce à des incitations au secteur manufacturier associées à des avantages fiscaux pour les consommateurs. À court terme, maintenir l’action des pouvoirs publics en faveur d’une mobilité propre devrait contribuer à réduire les risques pour les investissements dans la mobilité électrique. Conserver certaines dérogations pourrait également s’avérer bénéfique pour les parties prenantes attendant le bon moment pour agir. À long terme, comme n’importe quel autre outil d’optimisation de l’efficacité énergétique, la mobilité électrique peut améliorer la productivité économique en réduisant le coût des déplacements et en stimulant l’innovation (FIT, 2020[43]).
Recover, Reshape ou Reshape+ : trois avenirs sont possibles pour le transport non urbain de voyageurs
La présente section examine les trajectoires de développement potentielles de la mobilité régionale et interurbaine à l’horizon 2050, et s’articule autour de trois scénarios : Recover, Reshape et Reshape+. Chacun s’appuie sur la mise en œuvre d’efforts toujours plus ambitieux par les pouvoirs publics dans le but de réduire les émissions de CO2 et d’assurer la décarbonation du transport régional et interurbain. La définition des politiques au cœur de ces scénarios est fondée sur les travaux du FIT, des contributions d’experts (recueillies dans le cadre d’une enquête sur des scénarios d’action publique auprès d’experts de toutes les régions du monde au début de l’année 2020) et les ateliers du FIT organisés pour les initiatives relevant du projet du FIT sur la décarbonation des transports en 2020. Le Tableau 4.3 offre une estimation du niveau d’adoption des mesures envisagées pour chaque scénario. Tous trois intègrent les mêmes hypothèses économiques de base pour refléter les répercussions de la pandémie de Covid-19 : un retard du PIB de cinq ans et des projections des échanges comparées aux niveaux antérieurs à la pandémie.
Ces scénarios s’appuient sur le modèle de transport non urbain de voyageurs 2020 du FIT, lequel simule le développement de l’activité des transports, de la répartition modale et des émissions de CO2 dues au transport régional et interurbain à l’horizon 2050 à partir de l’année de référence (2015). L’Encadré 4.3 décrit de manière détaillée le modèle du transport non urbain de personnes élaboré par le FIT, ainsi que les modifications apportées par rapport aux versions précédentes.
Encadré 4.3. Le modèle de transport non urbain de voyageurs 2020 du Forum international des transports
Le modèle de transport non urbain de voyageurs mis au point par le Forum international des transports (FIT) permet d’estimer la demande en transport non urbain de voyageurs à travers le monde. Il segmente le monde en près de 1 200 zones différentes, toutes centrées autour d’un aéroport ou des aéroports d’une même ville. Chaque zone génère deux types d’activité de transport, le transport régional et le transport interurbain (et leurs externalités respectives). L’activité de transport régional se rapporte à toute activité au sein d’une zone déterminée, mais à l’extérieur des aires urbaines (le cas échéant). L’activité de transport interurbain se rapporte à l’activité observée entre différentes zones. Le modèle du FIT donne une estimation du nombre de passagers, du volume de passagers-kilomètres, des combinaisons de modes de transport, de la consommation d’énergie et des émissions de CO2 par mode pour chaque zone et chaque itinéraire entre ces zones. Les modes de transport analysés sont l’aérrien, le ferroviaire, le routier léger (automobile et motocycle), l’autobus et le ferry. La version actuelle du modèle permet une estimation des effets de 17 mesures d’action publique, tendances et développements technologiques. Ceux-ci sont précisés pour chacun des 19 marchés régionaux du monde.
Ce modèle a été développé et présenté pour la première fois par le FIT en 2019, et s’inscrit dans le prolongement du modèle du transport aérien international du FIT. Il est par ailleurs mis à jour et amélioré en permanence. Les nouvelles caractéristiques de l’édition actuelle sont répertoriées dans le
Tableau 4.2 ci-dessous.Le modèle de transport non urbain de voyageurs a également été adapté afin de prendre en compte la baisse de la demande provoquée par la pandémie de Covid-19 en 2020. Les observations recueillies sur le secteur aérien sont utilisées à titre de référence pour déterminer la baisse estimée de la demande pour les différents modes de transport et régions. La demande suit la reprise escomptée du secteur du transport aérien au lendemain de la pandémie, telle que prévue par l’Association du transport aérien international (IATA) et l’OACI. Différentes conséquences de la crise du Covid-19 figurent également parmi les tendances répertoriées.
Tableau 4.2. Récapitulatif des mises à jour du modèle de transport non urbain de voyageurs
Version 2019 |
Version 2021 |
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Intégration complète du transport multimodal |
Le transport multimodal n’est disponbile que pour les déplacements aériens, avec une part de transport de surface au départ et à l’arrivée du trajet. |
Le transport multimodal est disponible pour l’ensemble des trajets, quelle que soit la combinaison modale. |
Transport de voyageurs par ferry |
– |
Le mode de transport de passagers par ferry est inclus dans la composante interurbaine du modèle. |
Politiques de tarification du carbone |
Les politiques de tarification du carbone s’appliquent uniquement au transport aérien. |
Les politiques de tarification du carbone s’appliquent à l’ensemble des modes de transport. |
Intégration des nouvelles technologies aéronautiques |
Les aéronefs tout électriques seront une solution de substitution aux appareils conventionnels à partir de 2040. |
Les aéronefs à propulsion électrique hybride seront une solution de substitution à partir de 2030. Les aéronefs tout électriques seront une solution de substitution à partir de 2040. |
Mise à jour des plans d’infrastructure ferroviaire |
Les développements d’infrastructures ferroviaires sont mis en œuvre s’ils sont jugés bénéfiques suite à une analyse coûts-bénéfices. |
Les développements d’infrastructures du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) sont également pris en compte dans le modèle. |
Les transports aérien et par ferry sont seulement disponibles pour l’activité interurbaine.
Le transport non urbain de voyageurs dans le scénario Recover
Dans le scénario Recover, l’action publique, les priorités d’investissement et les technologies sont abordées de la même manière qu’avant la pandémie. Cette approche façonne ainsi l’avenir du transport non urbain de voyageurs pour la décennie à venir. Les pouvoirs publics s’intéressent en priorité aux activités économiques établies afin de les renforcer et d’accélérer la reprise. L’objectif principal est alors de revenir la situation antérieure à la pandémie. Le scénario Recover constitue une version plus ambitieuse du scénario d’ambitions inchangées décrit dans les Perspectives des transports du FIT 2019.
Les avancées technologiques dont bénéficie le parc de véhicules routiers non urbains sont relativement modestes. De manière générale, le parc automobile et les normes de consommation de carburant associés aux déplacements interurbains et régionaux sont conformes aux hypothèses du scénario des politiques déclarées (STEPS) de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) (AIE, 2020[44]). Les véhicules électriques hybrides et les véhicules électriques à batterie deviennent de plus en plus courants à l’extérieur des villes, même si leur utilisation reste limitée. Le partage de véhicules gagne en popularité mais reste marginal dans le cas des déplacements non urbains.
Les projets de lignes ferroviaires classiques et à grande vitesse planifiés ou en cours de construction sont menés à leur terme. Les pouvoirs publics investissent également dans l’amélioration des services, se traduisant par une augmentation de la fréquence des lignes et de l’offre pour les voyageurs.
La décarbonation du transport aérien ne connaît aucune avancée majeure à court terme. L’efficacité énergétique des aéronefs s’améliore conformément aux tendances antérieures, même si elle est renforcée par la mise hors service d’aéronefs anciens plus polluants. Des évolutions technologiques d’envergure, comme les aéronefs tout électriques ou l’usage généralisé des carburants d’aviation de synthèse, n’apparaissent que vers le milieu du siècle. Des aéronefs hybrides équipés de moteurs à réaction à assistance électrique commencent à être commercialisés au plus tard en 2030, pour ne représenter qu’une part faible mais non négligeable du transport aérien (principalement intérieur) en 2050. La propension des individus à voyager par les airs baisse légèrement dans certaines régions, principalement en raison de préoccupations environnementales.
La tarification du carbone est progressivement appliquée à l’ensemble des modes de transport, jusqu’à atteindre 150 à 250 USD par tonne de CO2 en 2050. Dans le transport aérien, des taxes modérées sur les billets sont introduites et l’utilisation de carburants d’aviation durables devient obligatoire. Les régions développées ont davantage recours à ces dispositifs que d’autres régions du monde. Enfin, la libéralisation du transport aérien (ouverture de l’espace aérien) s’inscrit dans la lignée des tendances antérieures à la pandémie et une meilleure gestion de l’espace aérien permet aux aéronefs d’emprunter des trajectoires de vol plus pertinentes.
Changement de paradigme : le transport non urbain dans le scénario Reshape
Dans le scénario Reshape, les conséquences de la pandémie de Covid-19 sur le transport non urbain de voyageurs s’estompent également de manière progressive jusqu’en 2030, comme dans le scénario Recover. Il s’en distingue toutefois par le fait que les décideurs définissent des objectifs climatiques ambitieux et adoptent des mesures particulièrement contraignantes pour les atteindre. Ces mesures audacieuses ne sont en outre pas uniquement mises en œuvre à l’échelon régional, mais partout à travers le monde. Le scénario Reshape constitue une version plus ambitieuse du scénario d’ambitions élevées décrit dans les Perspectives des transports du FIT 2019.
Les politiques publiques ont un effet négatif sur l’attractivité des déplacements non urbains car elles augmentent les coûts, notamment pour le transport aérien. Le prix du carbone atteint entre USD 300 et 500 en 2050. Parallèlement, des taxes sur les billets allant jusqu’à 30 % sont appliquées au transport aérien. L’utilisation des carburants d’aviation durables augmente grâce à l’adoption de normes strictes les rendant obligatoires, mais gonflant les coûts.
L’électrification du transport non urbain par voie de surface progresse. La part plus élevée de véhicules à faibles émissions dans le parc rend les déplacements interurbains et régionaux plus durables et limite par là même les effets des politiques de tarification du carbone. L’électrification et l’efficacité énergétique des véhicules terrestres s’améliore conformément aux hypothèses du scénario de développement durable (SDS) de l’AIE (AIE, 2020[45]).
Le transport partagé gagne en popularité dans les zones non urbaines, représentant une part plus importante de l’activité totale de transport.
D’importants investissements publics et privés dans le transport ferroviaire permettent d’améliorer les infrastructures, les services et la vitesse d’exploitation. Les nouvelles lignes ferroviaires à très grande vitesse (Maglev) stimulent encore plus la demande de transport ferroviaire interurbain.
La décarbonation du transport aérien s’accélère. L’efficacité énergétique des aéronefs augmente de manière plus soutenue suite au développement anticipé de nouveaux modèles d’aéronefs. Le soutien des pouvoirs publics en matière de recherche et de développement permet une baisse des coûts des carburants d’aviation de synthèse et des aéronefs tout électriques. Les progrès technologiques rendent possible le déploiement d’appareils hybrides disposant d’une autonomie supérieure par rapport au scénario Recover. La propension à voyager par les airs chute encore : partout dans le monde les populations limitent leurs déplacements par transport aérien. L’empreinte carbone du transport aérien rencontrantt une baisse vers le milieu du siècle, cette tendance perd par là même de son importance.
Aller encore plus loin avec le scénario Reshape+
Dans le scénario Reshape+, des mesures sont prises pour pérenniser les avancées réalisées en matière de décarbonation dans le contexte de la pandémie. Comme dans les deux autres scénarios, les conséquences négatives du Covid-19 pour le transport non urbain de voyageurs disparaissent à l’horizon 2030. À l’image de ce qui est observé dans le scénario Reshape, les pouvoirs publics définissent des objectifs ambitieux de décarbonation et mettent en place les mesures nécessaires pour y parvenir. Ils vont même plus loin en saisissant les occasions créées par la pandémie en matière de décarbonation. En faisant coïncider des incitations économiques avec leurs objectifs dans les domaines du climat et de l’équité, ils tirent parti du redémarrage de l’économie pour atteindre la durabilité environnementale et sociale. Pour cela, ils reprennent certaines mesures du scénario Reshape, dont ils durcissent le contenu ou raccourcissent le calendrier de mise en œuvre.
Dans le scénario Reshape, l’évolution du transport non urbain est influencée par différentes tendances exogènes. Le tourisme vers des destinations lointaines recule, les vacanciers privilégiant par exemple les destinations plus proches et les trajets plus courts. Les téléconférences restent courantes après la pandémie, rendant ainsi les déplacements d’affaires moins nécessaires. Ces tendances constituent des effets positifs de la pandémie. Il est toutefois difficile de justifier, dans le cadre d’une analyse exhaustive, que ces tendances sont uniquement positives, dans la mesure où elles sont étroitement liées à une situation économique difficile pour les pays et individus concernés. Elles contribuent malgré tout à soutenir les efforts de décarbonation du secteur du transport non urbain de voyageurs.
Les normes sur les carburants sont fortes. Dans de nombreux pays, l’accès aux programmes d’aide mis en place dans le cadre de la crise du Covid-19 est conditionné à l’utilisation obligatoire d’une part minimale de carburants durables, notamment dans le transport aérien. Ces mesures ont pour effet d’accélérer la généralisation de l’utilisation des carburants de substitution.
Les pouvoirs publics réservent des fonds de relance pour l’investissement dans les infrastructures ferroviaires, accélérant ainsi les améliorations en termes de fréquence et de vitesse d’exploitation des services régionaux et interurbains. De nouvelles solutions de substitution au transport aérien sont ainsi proposées pour les déplacements longue distance, que ce soit au niveau national ou international.
Certaines mesures de relance faisant suite à la crise de Covid-19 ont pour objectif la décarbonation du transport routier. Les subventions et autres incitations proposées pour l’achat de véhicules électriques ou à faibles émissions sont maintenues à plus long terme. Des fonds supplémentaires sont alloués pour permettre le déploiement d’infrastructures de recharge dans davantage de régions, contribuant ainsi à une pénétration accrue et plus rapide des véhicules électriques et à faibles émissions pour les déplacements non urbains. Le scénario Reshape+ estime que d’ici à 2050 leur part aura augmenté de 1 à 5 % de plus que dans les hypothèses de Reshape.
Tableau 4.3. Caractéristiques des scénarios applicables au transport non urbain de voyageurs
Les cases grisées désignent les mesures dont l’application est renforcée dans le scénario Reshape+.
Mesure/Facteur exogène |
Description |
Recover |
Reshape |
Reshape+ |
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Instruments économiques |
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Taxes sur les billets (transport aérien) |
Une taxe en pourcentage est appliquée au prix des billets. |
Les taxes sur les billets varient d’une région à l’autre (3 à 15 %) en 2050. |
Les taxes sur les billets varient d’une région à l’autre (8 à 30 %) en 2050. |
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Tarification du carbone |
Des frais sont appliqués sur les émissions de gaz d’échappement (CO2). |
La tarification du carbone varie d’une région à l’autre, soit de 150 à 250 USD par tonne de CO2 en 2050. |
La tarification du carbone varie d’une région à l’autre, soit de 300 à 500 USD par tonne de CO2 en 2050. |
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Amélioration des infrastructures |
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Développement de la très grande vitesse ferroviaire |
De nouvelles lignes à très grande vitesse ferroviaire sont déployées (Maglev, par exemple). |
La très grande vitesse ferroviaire ne fait l’objet d’aucun nouveau développement. |
Des lignes Maglev sont développées où cela est économiquement rentable. |
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Amélioration des infrastructures ferroviaires |
Des investissements sont réalisés dans les infrastructures ferroviaires existantes, entraînant une augmentation de la fréquence et de la vitesse d’exploitation. |
La fréquence augmente de 50 % (l’année de cette augmentation varie d’une région à l’autre). |
La fréquence et la vitesse d’exploitation augmentent sur l’ensemble des régions (respectivement de 50 % et 20 %). |
La fréquence et la vitesse d’exploitation augmentent plus rapidement sur l’ensemble des régions (respectivement de 50 % et 20 %). |
Instruments réglementaires |
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Carburants de synthèse (transport aérien) |
Les développements technologiques font que la baisse du coût des carburants d’aviation de synthèse est liée au coût des carburants conventionnels. |
Le prix des carburants de synthèse est 3.3 fois supérieur à celui des carburants conventionnels. |
Le prix des carburants de synthèse est 3 fois supérieur à celui des carburants conventionnels. |
|
Normes de carburants durables dans l’aviation |
Les carburants d’aviation durables doivent représenter un taux minimal du volume total de carburant consommé. |
Le taux minimal obligatoire de carburant d’aviation durable varie d’une région à l’autre (5 à 10 %) en 2050. |
Le taux minimal obligatoire de carburant d’aviation durable varie d’une région à l’autre (10 à 25 %) en 2050. |
Le taux minimal obligatoire de carburant d’aviation durable varie d’une région à l’autre (15 à 30 %) en 2050. |
Instruments opérationnels |
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Optimisation du trafic aérien |
Les vols sont davantage alignés sur les itinéraires orthodromiques. |
Les déviations sont réduites de 50 % en 2030. |
Les déviations sont réduites de 50 % en 2020. |
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Stimulation de l’innovation et du progrès |
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Pénétration des véhicules alternatifs ou électriques |
La pénétration des véhicules électriques dans le transport routier non urbain augmente sous l’effet des incitations financières pour l’achat ou l’utilisation de véhicules alternatifs et des investissements dans les infrastructures de recharge. |
La pénétration est conforme au scénario STEPS de l’AIE. |
La pénétration est conforme au scénario SDS de l’AIE. |
La pénétration augmente au-delà du niveau établi dans le scénario SDS de l’AIE. |
Avions à propulsion électrique hybride |
De nouveaux aéronefs à propulsion électrique hybride sont développés. |
Des aéronefs à propulsion électrique hybride sont mis sur le marché à partir de 2030. Ils assurent entre 5 et 7.5 % de l’énergie totale nécessaire, jusqu’à atteindre 20 à 30 % en 2050 en fonction des régions. |
Des aéronefs à propulsion électrique hybride sont mis sur le marché à partir de 2030. Ils assurent entre 7.5 et 10 % de l’énergie totale nécessaire, jusqu’à atteindre 30 à 40 % en 2050 en fonction des régions. |
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Covoiturage/mobilité partagée |
Le taux de remplissage du transport routier non urbain (automobile et autobus) augmente. |
Le pourcentage de trajets partagés sur l’ensemble des déplacements effectués en voiture est de 6.7 %. |
Le pourcentage de trajets partagés sur l’ensemble des déplacements effectués en voiture varie d’une région à l’autre, soit de 13.3 à 20 %. |
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Mobilité-service (MaaS) et services de voyage multimodal |
L’intégration des différents modes de transport est améliorée. Les systèmes de billetterie sont intégrés et le nombre de bornes et terminaux intermodaux augmente. |
Les correspondances entre différents modes de transport sont deux fois plus pénalisantes que sur le même mode de transport. |
Les correspondances entre différents modes de transport ne sont pas plus pénalisantes que sur le même mode de transport. |
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Amélioration de la portée et du coût des avions tout électriques |
De nouveaux aéronefs tout électriques sont développés. |
La portée des aéronefs tout électriques augmente jusqu’à atteindre 1 000 km en 2050. Le coût du transport aérien tout électrique est 1.5 fois supérieur à celui du transport aérien conventionnel. |
La portée des aéronefs tout électriques augmente jusqu’à atteindre 1 500 km en 2050. Le coût du transport aérien tout électrique est 1.2 fois supérieur à celui du transport aérien conventionnel. |
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Facteurs exogènes |
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Véhicules autonomes* |
Des véhicules disposant de capacités autonomes de niveau 5 font leur apparition. Le pourcentage de véhicules autonomes en circulation varie d’une région à l’autre , soit de 0 à 2.5 % pour les automobiles et de 0 à 1.25 % pour les autobus. |
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Baisse du tourisme de loisir longue distance |
La propension des personnes à voyager pour les loisirs sur de longues distances connaît une baisse en raison de la pandémie de Covid-19. |
Aucun |
Aucun |
Le nombre de déplacements longue distance baisse de 15 à 22 % (par rapport à la demande hors facteur exogène) entre 2020 et 2030. Cet effet s’estompe de manière linéaire jusqu’à atteindre 0 % en 2050. |
Baisse des voyages d’affaires due aux téléconférence |
Les déplacements d’affaires sont remplacés par des téléconférences en raison de la pandémie de Covid-19. |
Aucun |
Aucun |
Les voyages par les airs ont baissé de 12.5 % (par rapport à la demande hors facteur exogène) entre 2020 et 2030. Cet effet s’estompe de manière linéaire jusqu’à atteindre 2.5 % en 2050. |
Propension réduite à prendre l’avion |
Une partie de la population évite les voyages par les airs en raison de considérations climatiques. |
Le nombre d’individus voyageant par les airs a baissé de 10 à 15 % dans certaines régions en 2050. |
Le nombre d’individus voyageant par les airs a baissé de 5 à 30 % dans la plupart des régions en 2050. |
Note : les plages de valeurs reflètent les degrés variables de mise en œuvre des mesures d’action publique dans les différentes régions du monde pour chaque scénario.
* Les véhicules autonomes sont pris en compte mais ne constituent un facteur essentiel dans aucun des scénarios. Tous les scénarios s’appuient sur un niveau constant d’introduction de véhicules autonomes de niveau 5. Les Perspectives des transports du FIT 2019 s’intéressaient avant tout aux phénomènes de rupture dans le secteur du transport, y compris relativement aux véhicules autonomes, et proposait une évaluation des scénarios associés.
Demande de transport non urbain de voyageurs : une reprise rapide et une croissance continue
La demande de transport non urbain de voyageurs, mesurée en passagers-kilomètres, correspond à la somme du transport interurbain et régional (périurbain et rural). En 2015, cette demande représentait 32 000 milliards de passagers-kilomètres, sachant qu’un peu plus de la moitié des déplacements (54 %) étaient réalisés entre des villes, et le reste au niveau régional. La part du transport non urbain de voyageurs devrait baisser légèrement au cours des trente prochaines années, passant de 61 % de l’ensemble de l’activité du transport de voyageurs en 2015 à 56 % en 2050.
En niveaux absolus, l’activité de transport non urbain de voyageurs devrait plus que doubler d’ici à 2050 par rapport à 2015. Cette activité augmente de 114 % dans le scénario Recover et de 107 % dans Reshape. Reshape+ limitera l’augmentation de la demande de quatre points supplémentaires (103 %), appuyé par des politiques publiques encourageant la téléconférence et le tourisme de loisirs vers des destinations proches même après la pandémie.
Le transport régional et le transport aérien (et plus particulièrement le transport aérien international) enregistrent la plus forte croissance dans les trois scénarios (Graphique 4.2). La demande en modes de transport par voie de surface reliant les villes restera relativement stable. Les politiques du scénario Recover réduisent la demande en transport interurbain de surface à la fois en valeur absolue et en valeur relative, et ce, principalement en raison de la tarification du carbone. Dans les scénarios Reshape et Reshape+, les progrès des technologies automobiles, l’électrification et les politiques de tarification du carbone permettent d’inverser cette tendance. La croissance démographique et l’économie ont un effet sur les déplacements aussi bien régionaux qu’interurbains, alors que la disponibilité d’infrastructures de transport, ainsi que l’offre et le coût des transports, ont principalement une incidence sur le segment interurbain.
Dans l’hypothèse de Recover, l’activité du transport non urbain de voyageurs attendra 70 000 milliards de passagers-kilomètres en 2050, avec une répartition presque parfaite entre le transport interurbain et le transport régional. Le scénario Recover suppose que les pouvoirs publics et les parties prenantes adoptent des mesures et des politiques visant à permettre un retour à la situation « normale » d’avant-crise. Cela semble toutefois impossible si des actions complémentaires ne sont pas mises en œuvre. La demande régionale augmente plus rapidement, soit à hauteur de 150 %, contre 80 % pour les déplacements interurbains. Malgré la poursuite de l’urbanisation, la population non urbaine va croître en valeur absolue et générer de l’activité de transport. Quasiment aucune politique publique ne cible cependant les déplacements régionaux, contrairement au segment interurbain pour lequel des mesures spécifiques sont adoptées pour réduire directement ou indirectement la demande.
Les politiques mises en action dans le scénario Reshape freinent légèrement la croissance des déplacements régionaux. Les mesures les plus ambitieuses permettent de limiter la croissance de l’activité du transport régional d’un point à l’horizon 2050, avec une demande de transport régional augmentant de 2 500 milliards de passagers-kilomètres de moins que par l’application des politiques du scénario Recover. À l’inverse, la demande de déplacements interurbains reste quasiment identique à son niveau dans le scénario Recover. La répartition modale du scénario Reshape est toutefois différente, dans la mesure où les modes plus respectueux de l’environnement y jouent un rôle plus marqué.
La mise en œuvre des politiques publiques de Reshape+ permet de limiter la croissance des déplacements interurbains. Dans l’hypothèse de Reshape+, la demande de déplacements interurbains croît tous les ans de 1.6 %, pour une augmentation totale de 74 %, soit 7 points de moins que dans les scénarios Recover et Reshape. Il s’agit là d’une conséquence directe de la baisse plus prononcée des déplacements d’affaires et du tourisme de loisirs vers des destinations lointaines, accentuée par des obligations davantage contraignantes en matière de carburants, lesquelles ont pour effet d’augmenter le coût du transport aérien et de contracter encore la demande. Parallèlement, la demande de déplacements régionaux connaît une croissance semblable à celle établie dans le scénario Reshape.
Le transport aérien sera le mode de déplacement prépondérant pour les trajets interurbains
Dans les trois scénarios, le transport aérien devient le principal mode de transport pour les déplacements interurbains. En 2015, les automobiles (et les motocycles) généraient plus de passagers-kilomètres que le transport aérien, soit une part de 44 % contre 40 % pour le transport aérien. L’autobus et le ferroviaire représentaient des parts plus faibles, à hauteur respectivement de 12 % et 3 %. Dans les trois scénarios, le transport aérien compense relativement rapidement les pertes de 2020 dues à la pandémie de Covid-19, s’imposant comme le mode de transport principal sur le marché interurbain en 2030, pour une part de 50 % de l’ensemble des modes de transport dans le scénario Recover, de 45 % dans le scénario Reshape et de 42 % dans le scénario Reshape+.
La demande de déplacements interurbains s’envole dans le scénario Recover, stimulée par le transport aérien. La demande globale devrait croître de 1.7 % par an, pour une augmentation totale de 81 % d’ici à 2050. Le transport aérien représente pas moins de 69 % de l’activité interurbaine totale en passagers-kilomètres. Par rapport à 2015, la demande de transport aérien fait plus que tripler en 2050, pour atteindre 21 600 milliards de passagers-kilomètres. Les politiques mises en œuvre dans le scénario Recover ne sont pas en mesure de freiner la croissance du transport aérien, et notamment du transport aérien international.
Le scénario Recover montre que des mécanismes de tarification de faible ampleur, comme la tarification du carbone ou les taxes sur les billets, n’auront qu’une incidence très limitée sur la trajectoire de croissance du transport aérien, en particulier si l’économie se remet de la pandémie conformément aux prévisions. L’efficacité énergétique renforcée des nouveaux aéronefs permet de faire baisser le prix des billets et de compenser les coûts supplémentaires imposés. Le transport aérien international est le principal moteur de croissance, avec un taux annuel composé de 3.6 %. Cette croissance repose sur le postulat que la pandémie n’affecte pas les accords relatifs à l’ouverture du ciel.
Le ferroviaire devient le mode privilégié pour le transport par voie de surface dans les régions et entre les villes. Le transport routier perd du terrain dans le segment interurbain et ne représente que 21 % de la répartition modale en 2050, soit 12 % pour les véhicules individuels et 9 % pour l’autobus. La part du transport ferroviaire interurbain augmente quant à elle et atteint 9 % en 2050, notamment grâce à sa composante électrique. Le transport ferroviaire interurbain n’est pas concerné par les mécanismes de tarification du carbone, alors que le transport routier devient de plus en plus coûteux en raison de l’adoption particulièrement lente des véhicules de transport routier électriques.
Des politiques adaptées permettent de contenir l’augmentation de la demande en transport aérien. Grâce aux politiques particulièrement ambitieuses du scénario Reshape, et notamment aux mesures visant à alourdir le coût des émissions de CO2 et des vols de manière générale, le transport aérien augmente de 36 points de moins d’ici à 2050 que dans le scénario Recover. Cette augmentation reste néanmoins significative, puisqu’elle atteint 172 %. Cette contraction est davantage flagrante dans le transport aérien intérieur, lequel enregistre un taux de croissance annuel composé de 2 % selon le scénario Reshape contre 2.5 % dans le scénario Recover. Le transport aérien international connaît une croissance plus lente, mais la différence entre les deux scénarios est plus ténue, soit 3.3 % de croissance dans le scénario de Reshape contre 3.6 % dans le scénario Recover. Dans l’ensemble, la demande interurbaine en 2050 est supérieure de 81 % par rapport à l’année de référence dans le scénario de la Reshape, autrement dit un point de moins que dans le scénario Recover.
La perte de croissance dans le transport aérien sous l’effet des politiques de Reshape se fait au profit des différents modes de transport par voie de surface. La demande de transport routier individuel continue de baisser aussi bien en parts qu’en valeur absolue de passagers-kilomètres, jusqu’à ne représenter que 17 % du total de passagers-kilomètres en 2050. Le transport ferroviaire interurbain connaît un essor important et voit sa part plus que quintupler par rapport à 2015. En 2050, le ferroviaire représente 11 % de l’ensemble de l’activité interurbaine. La demande en transport par autobus reste stable, bien qu’elle augmente légèrement en valeur absolue et voie ses parts diminuer. Les principaux facteurs de cette évolution sont, d’une part, la présence accrue de véhicules de transport routier à émissions faibles ou nulles et, d’autre part, le développement des infrastructures ferroviaires dans le scénario Reshape. À mesure que la mobilité neutre en carbone gagne en popularité, les effets des mécanismes de tarification du carbone sur le transport par voie de surface perdent de leur efficacité.
Les politiques et évolutions de Reshape+ limitent encore davantage la croissance du transport aérien. Dans le scénario Reshape+, la croissance du transport aérien est encore inférieure de 21 points par rapport au scénario Reshape et de 57 points par rapport au scénario Recover. Malgré cette maîtrise relative, la demande de transport aérien reste en 2050 plus de 2.5 fois supérieure au niveau de 2015, enregistrant un taux annuel composé de croissance de 2.7 % (1.9 % pour le transport aérien interne et 3 % pour le transport aérien international). Le transport aérien représente ainsi 59 % du volume total de passagers-kilomètres même dans les conditions du scénario Reshape+, auxquels s’ajoutent 20 % pour les véhicules de transport routier individuel, 11 % pour les autobus et enfin 10 % pour le ferroviaire.
Le transport de voyageurs par ferry ne joue qu’un rôle accessoire dans les trois scénarios. Les services de transbordeur ne sont disponibles que dans un nombre limité de régions, caractérisées par la présence de différentes îles proches les unes des autres et où les eaux sont calmes. La majeure partie de l’activité des ferrys observée dans les résultats de modélisation provient de l’Espace économique européen (lequel compte des États côtiers constitués de nombreuses îles, tels que la Grèce, la Norvège, la Suède ou la Croatie) et de la Turquie.
Le transport aérien électrique commercial se développe dans les trois scénarios. Les aéronefs tout électriques et à propulsion électrique hybride commencent à être exploités grâce aux développements technologiques et aux politiques publiques prises pour hypothèses dans l’ensemble des scénarios (pour plus d’informations, voir l’Encadré 4.1). Bien que les aéronefs à propulsion électrique hybride sont sur le marché en 2030 quel que soit le scénario, leur niveau de pénétration varie d’un scénario à l’autre. Les aéronefs tout électriques deviennent commercialement viables vers le milieu du siècle. Les lignes intérieures et les liaisons internationales de courte durée bénéficient d’un déploiement plus rapide et plus étendu des aéronefs électriques, et ce, quel que soit le scénario, en raison des contraintes inhérentes à la taille et au poids des aéronefs.
Une ligne aérienne sur cinq exploitera des aéronefs à propulsion électrique hybride au cours des dix prochaines années, selon le scénario Recover. Même si les aéronefs hybrides seront exploités sur 18 % des liaisons aériennes en 2030, seul 0.6 % de la demande de transport aérien sera couverte par des aéronefs à propulsion électrique hybride cette même année1. En 2050, les aéronefs à propulsion électrique hybride assurent au moins une partie de l’activité de trois lignes aériennes sur cinq. Si les politiques du scénario Recover sont appliquées, la composante électrique ne comptera toutefois que pour 8 % de la demande totale en passagers-kilomètres dans 40 ans. Les aéronefs tout électriques ne feront leur apparition qu’en 2045 et ne seront utilisés que sur 3 % de l’ensemble des lignes aériennes en 2050, soit dans 0.8 % de l’ensemble de l’activité du transport aérien.
Les compagnies aériennes adoptent les aéronefs à propulsion électrique hybride plus rapidement en raison de l’augmentation des prix du carbone et d’une baisse du prix de l’énergie dans le scénario Reshape. Les aéronefs à propulsion électrique hybride assurent une part plus importante des lignes aériennes en 2030, mais leur part en termes de passagers-kilomètres n’est toujours que de 1.7 %. Leur poids plus léger et l’autonomie supérieure de leurs batteries contribuent à l’adoption des aéronefs à propulsion électrique hybride au cours des vingt années suivantes. En 2050, la composante électrique des aéronefs à propulsion électrique hybride assure l’alimentation de 14 % des passagers-kilomètres de l’ensemble du transport aérien dans les conditions du scénario Reshape. Les aéronefs à propulsion électrique hybride sont exploités sur 85 % des segments court-courriers et moyen-courriers, soit l’équivalent de près des deux tiers des vols. Les aéronefs tout électriques souffrent de limitations plus importantes en termes d’autonomie que les aéronefs hybrides et ne sont utilisés que sur 7 % des lignes aériennes, pour une prise en charge de seulement 2.6 % de la demande totale. Aucune différence sensible n’existe entre les aéronefs à propulsion électrique hybride et les aéronefs tout électriques dans les scénarios Reshape et Reshape+ dans la mesure où le cadre réglementaire y est le même. Les répercussions durables de la crise de Covid-19 entraînent une baisse générale de la demande en transport aérien. Cela se traduit par un nombre plus faible d’aéronefs tout électriques et à propulsion électrique en valeur absolue, même si leur part reste la même dans le transport aérien.
Le transport régional augmente plus rapidement que les déplacements interurbains. Sur le plan des services de transport régional, dans les zones rurales et les zones périphériques des agglomérations urbaines (zones périurbaines), les véhicules de transport routier individuel, les autobus et le train sont les seuls moyens de transport disponibles. Les déplacements régionaux correspondent aux déplacements quotidiens des individus vivant dans une zone définie ; ils dépendent donc fortement du PIB et des évolutions démographiques. Dans le scénario Recover, le volume de passagers-kilomètres régionaux augmente de 152 % entre 2015 et 2050. Les véhicules de transport routier individuel représentent 39 % de ces passagers-kilomètres régionaux, soit 4 points de moins que pour l’année de référence. L’activité ferroviaire connaît une croissance importante, au point de tripler en valeur absolue et d’atteindre 42 % en 2050 contre 34 % en 2015. Le transport par autobus, à l’inverse, baisse de 23 % à 19 %.
Dans le scénario Reshape, le recours aux voitures particulières à des fins de mobilité régionale baisse encore davantage. La part des véhicules de transport routier individuel connaît une baisse supplémentaire de 2 points sous l’effet de politiques de décarbonation plus ambitieuses, jusqu’à atteindre 37 % en 2050. Moins affecté par le prix du carbone, le report de la demande en transport qui en découle est absorbé par le rail, représentant 44 % dans la répartition modale. Selon le scénario Reshape, la demande régionale totale augmente de 15 points de moins que dans le scénario Recover jusqu’en 2050. L’évolution du transport régional dans les scénarios Reshape et Reshape+ est la même, dans la mesure où les tendances et les changements de politiques escomptés n’affectent les déplacements régionaux que de manière négligeable.
L’Asie devient le nouveau pôle de l’activité mondiale du transport
L’activité du transport voit son centre de gravité se déplacer à l’échelle mondiale. Historiquement, l’activité du transport non urbain se produisait en majorité dans les pays de l’OCDE. Une évolution a toutefois pu être observée ces dix dernières années et une inversion des rôles devrait avoir lieu d’ici 2050. En 2015, les pays plutôt développés de l’OCDE représentaient 51 % du transport non urbain alors qu’ils n’abritent que 20 % de la population mondiale. En 2050, 67 % des déplacements non urbains auront lieu dans des pays non membres de l’OCDE. L’Asie est la région qui a généré la plus forte demande de transport non urbain en 2015 dans le monde, suivie par les États-Unis et le Canada, et l’Espace économique européen (EEE) et la Turquie. À l’autre extrémité du spectre, l’Afrique subsaharienne, les pays en transition et la région OCDE-Pacifique ont enregistré la plus faible activité de transport non urbain dans le monde en 2015. Font partie des économies en transition les pays de l’ex-Union soviétique et les pays d’Europe du Sud-Est non membres de l’UE. La région OCDE-Pacifique couvre le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Ce basculement se poursuit jusqu’en 2050. Dans les trois scénarios, le transport non urbain augmente de manière plus prononcée en Afrique subsaharienne, en Asie et dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). Dans le scénario de Recover, la demande en Asie aura triplé en 2050. Les hypothèses des deux autres scénarios prévoient une croissance légèrement moins soutenue, même si l’Asie conserve la première place.
La plupart des régions de l’OCDE enregistreront une croissance plus faible des déplacements interurbains et régionaux. Les taux de croissance les plus faibles seront observés aux États-Unis et au Canada, dans l’EEE et en Turquie, et dans la région OCDE-Pacifique. Dans l’ensemble, la croissance escomptée dans les scénarios Reshape et Reshape+ est plus faible pour l’ensemble des régions que dans le scénario Recover, et ce, quelle que soit l’évolution du développement économique. Les États-Unis et le Canada est la seule région à ne pas suivre la tendance générale. Dans le scénario Recover, cette région affiche la deuxième croissance la plus faible d’activité du transport, juste après la région EEE et la Turquie. Toutefois, dans le scénario Reshape, les États-Unis et le Canada est la seule région à enregistrer une activité plus importante que dans le scénario Recover. Cela s’explique par les projets prévus et annoncés de grande vitesse ferroviaire, dans la mesure où ces investissements pourraient augmenter l’activité du transport non urbain de façon plus importante que dans n’importe quelle autre région.
Le trafic interurbain et régional suit un développement différent dans les pays de l’OCDE et dans les pays non membres de l’OCDE. Le transport régional correspond aux activités quotidiennes telles que les déplacements domicile-travail et les déplacements liés aux achats. Ce type de déplacement est moins affecté par la croissance du PIB dans les économies développées (pays de l’OCDE, par exemple) que dans les pays émergents ou en développement. Dans la plupart des pays de l’OCDE, la démographie de ce segment reste également relativement stable, voire baisse, ce qui a pour conséquence que l’activité régionale totale n’enregistre pas de modification significative. La croissance de la demande de transport non urbain de voyageurs dans les pays de l’OCDE est ainsi principalement due au transport interurbain. Les populations et économies déjà grandissantes des pays non membres de l’OCDE, à l’inverse, bénéficieront d’une croissance significative aussi bien du transport régional que du transport interurbain.
Le volume de loin le plus important de déplacements non urbains par individu peut être observé aux États-Unis et au Canada. Dans cette région, en 2015, un individu moyen se sera déplacé neuf fois plus qu’un individu moyen en Asie (voir le Graphique 4.5). Les États-Unis et le Canada sont deux pays particulièrement vastes, et dans les deux cas la majeure partie de l’activité économique est concentrée à l’est et à l’ouest du pays, générant une demande de transport considérable. Leur forte interdépendance économique avec le reste du monde et leur situation géographique font en outre que la plupart des déplacements internationaux impliquent la traversée d’océans. Malgré un écart important, la région EEE et Turquie se place au deuxième rang des déplacements non urbains par habitant. La plupart des autres régions présentent un niveau de demande par habitant quasiment identique. L’Afrique subsaharienne fait toutefois figure d’exception, puisque la distance moyenne parcourue par personne y est bien inférieure à toutes les autres régions. L’OCDE-Pacifique est un cas intéressant, dans la mesure où cette région constituée de pays prospères couvre à la fois des zones faiblement et fortement peuplées. Cette configuration devrait dont générer à la fois des valeurs respectivement faibles et élevées en termes de déplacements non urbains par habitant, et par conséquent s’annuler mutuellement. Par ailleurs, le développement économique de ces pays tendrait à induire des valeurs élevées par habitant, mais le fait que certains pays soient géographiquement isolés limite le nombre de déplacements internationaux effectués par individu.
Les déplacements non urbains par habitant en passagers-kilomètres augmentent dans les trois scénarios. Dans le scénario Recover, c’est l’activité de transport régional et interurbain qui augmente le plus en termes absolus pour la majorité des régions, à l’exception des États-Unis et du Canada, où cette activité augmente davantage par habitant dans le scénario Reshape+. La croissance relative la plus importante peut toutefois être observée en Asie. L’ Afrique subsaharienne et les pays en transition connaissent eux aussi une croissance considérable dans les trois scénarios. Ce sont néanmoins les régions de l’EEE et Turquie et des États-Unis et du Canada qui enregistrent la croissance la plus faible dans les trois scénarios par rapport aux niveaux de 2015.
Émissions de CO2 liées au transport non urbain de voyageurs : découpler les émissions de la demande
Le secteur du transport non urbain de voyageurs se trouve face à un dilemme : faut-il laisser les émissions continuer d’augmenter proportionnellement au PIB ou convient-il de dissocier la croissance économique et les émissions de CO2 ? Malgré la baisse notable du transport non urbain et des émissions associées provoquée par la pandémie de Covid-19, les simulations du FIT laissent penser que les émissions dues au transport non urbain de voyageurs augmenteront à nouveau dans le scénario Recover. Malgré les gains d’efficience réalisés en termes de kilomètres parcourus, la demande devrait augmenter à un rythme bien supérieur. Selon les scénarios Reshape et Reshape+, les émissions pourraient baisser de façon significative en 2050 par rapport à 2015.
Le transport non urbain de voyageurs a généré 2 482 millions de tonnes de CO2 en 2015. Ce volume représente 7.7 % de toutes les émissions de CO2 issues de la combustion de carburant ou 34 % de l’ensemble des émissions imputables aux transports, dont 70 % ont été générées par le transport routier et ferroviaire, pour une proportion égale de déplacements interurbains et régionaux. Le transport aérien, aussi bien intérieur qu’international, a quant à lui généré 725 millions de tonnes de CO2.
Les émissions issues des déplacements non urbains augmenteront de 25 % si les pouvoirs publics adoptent les mêmes mesures qu’avant la pandémie, comme le présuppose le scénario Recover. Le transport régional et le transport aérien international sont les deux plus gros générateurs de CO2, représentant respectivement 35 % et 41 % des émissions en 2050. L’augmentation des émissions est corrélée à l’augmentation de la demande, les politiques de décarbonation se révélant incapables de limiter le volume d’émissions. Les émissions du transport aérien international suivent quasiment la même progression que la demande, jusqu’à atteindre 1 300 millions de tonnes de CO2, soit une multiplication par trois des émissions. L’objectif défini par le secteur du transport aérien de réduire de 50 % le niveau d’émissions entre 2005 et 2050 est encore loin d’être réalisé (ATAG, 2019[46]), puisqu’il correspondrait à une baisse d’environ 200 millions de tonnes de CO2. Le transport aérien intérieur profite davantage de la conversion des aéronefs à des appareils hybrides, avec une augmentation de seulement 70 %. À mesure que le transport aérien deviendra le principal mode de déplacement interurbain, les modes de transport par voie de surface perdront en popularité. Cette baisse de la demande, associée à une efficacité énergétique renforcée des véhicules terrestres, se traduit par une chute significative des émissions. La demande de transport régional va quant à elle connaître une croissance importante, qui se traduira nécessairement par une augmentation des émissions. Les émissions décrites dans le scénario Recover ne sont pas le résultat d’un défaut de mesures d’atténuation, mais plutôt le résultat attendu des politiques et mesures actuelles. Pour atteindre ces niveaux d’émissions estimés, des actions supplémentaires devront être mises en place par les différentes parties prenantes.
L’accélération des avancées technologiques et une diffusion plus large de l’électricité dans le transport aérien permettent de limiter les émissions dans le scénario Reshape. En 2050, les émissions du transport non urbain de voyageurs auront baissé de 55 % par rapport à 2015. Le transport aérien international est le seul segment où les émissions croissent entre 2015 et 2050, de 14 % pour être précis. Les lignes court-courriers et moyen-courriers exploitent presque uniquement des aéronefs tout électriques ou à propulsion électrique hybride, permettant ainsi une baisse des émissions du transport aérien intérieur de 50 %. De même, le transport par voie de surface, aussi bien sur le segment interurbain que régional, tire parti d’une part plus élevée du ferroviaire dans la répartition modale, ainsi que de l’utilisation accrue des véhicules hybrides et électriques sur les routes. Ces deux segments génèrent à eux seuls 73 % de CO2 en moins en 2050 qu’en 2015.
Les mesures adoptées dans le scénario Reshape+ accélèrent encore davantage la réduction des émissions. En 2050, le total des émissions de CO2 liées au transport non urbain de voyageurs serait 57 % moins élevé qu’en 2015 selon le scénario Reshape+. La différence entre les scénarios Reshape et Reshape+ en 2050 est principalement le fait du transport aérien international, qui reste proche des niveaux de 2015 dans le scénario Reshape+, pour une augmentation de seulement 4 %. Les émissions du transport aérien intérieur sont également légèrement plus faibles dans le scénario Reshape+, affichant 2 points de moins que dans le scénario Reshape. La diminution des émissions de CO2 du transport aérien entre ces deux scénarios est la conséquence, d’une part, d’une propension plus faible des individus à prendre l’avion, que ce soit pour des déplacements d’affaires ou du tourisme de loisirs vers des destinations lointaines, et, d’autre part, du renforcement des normes sur les carburants pour le transport aérien. Le transport par voie de surface interurbain devrait quant à lui voir ses émissions de CO2 baisser de 87 % par rapport à 2015.
Les émissions du puits au réservoir gagnent en importance
Les émissions en amont jouent un rôle central dans la décarbonation, dans la mesure où la production de carburant et d’électricité est une production à forte intensité énergétique. Ces émissions indirectes du puits au réservoir représentaient 920 millions de tonnes de CO2 en 2015, lorsque la majorité du transport non urbain de voyageurs répondait à ses besoins énergétiques en tirant parti de carburants hydrocarbonés. Ces émissions proviennent de deux sources différents : le transport de carburants liquides vers les points de consommation et la production d’électricité. La répartition de ces sources varie selon les pays, les années et les scénarios appliqués.
La part des émissions du puits au réservoir dans le total des émissions imputables aux transports devient de plus en plus importante. En 2015, les émissions du puits au réservoir représentaient 27 % de l’ensemble des émissions du transport non urbain de voyageurs. Dans le scénario Recover, cette part reste stable sur les 30 années suivantes. Toutefois, grâce à des mesures ambitieuses, comme dans les scénarios Reshape et Reshape+, la part des émissions du puits au réservoir atteint presque 50 %. Dans la mesure où la nature des émissions dues aux transports évolue et dépend davantage de facteurs en amont, une collaboration étroite entre les secteurs du transport et de l’énergie deviendra de plus en plus décisive pour lutter contre le changement climatique de manière efficace.
La production et le transport d’électricité remplacent la production et le transport de carburants comme principales sources des émissions en amont. En 2015, les émissions du puits au réservoir provenaient presque intégralement de la production et du transport de carburants vers leur point final de consommation. Cela concerne aussi bien le transport aérien que le transport par voie de surface, lequel constituait le principal générateur d’émissions du puits au réservoir en 2015. L’activité de transport par voie de surface régional et interurbain est responsable de 80 % de l’ensemble des émissions en amont du transport non urbain. Dans l’hypothèse de Recover, la majorité des émissions du puits au réservoir seront issues de la production et du transport d’électricité, et cette tendance sera encore plus marquée avec l’application des politiques de Reshape et Reshape+.
Les pays de l’OCDE présentent le plus protentiel de décarbonation
La majeure partie des émissions de CO2 du transport non urbain de voyageurs provenaient des pays de l’OCDE en 2015, ce qui signifie que ce sont justement les pays au plus fort potentiel de décarbonation. Deux régions en particulier ont généré près de 55 % du total des émissions de CO2 du puits au réservoir : la région des États-Unis et du Canada et la région de l’EEE et de la Turquie. L’Asie n’a quant à elle produit que 22 % de ces émissions, malgré une population plus importante.
Suivant les régions, la plus grande partie des émissions dues aux déplacements non urbains sont imputables à différents modes de transport. La région OCDE-Pacifique, rassemblant principalement des États insulaires, est la seule où le transport aérien est responsable de la majorité des émissions. Dans les pays en transition, le transport aérien génère davantage d’émissions que les autres modes de transport, même si cette part demeure inférieure à 50 %. Cela s’explique certainement par la taille même de la région et l’essor du ferroviaire. Dans les autres régions, le transport routier reste le principal déterminant des émissions de CO2. Tel est notamment le cas dans aux États-Unis et au Canada, et en Afrique subsaharienne, où les véhicules de transport routier individuel, les autobus, les trains et les ferrys sont à l’origine d’environ 80 % de l’ensemble des émissions.
Le scénario Recover est le seul dans lequel les émissions non urbaines imputables aux transports augmentent d’ici à 2050. Le volume d’émissions progresse partout, à deux exceptions près : aux États-Unis et aux Canada, et dans l’EEE et en Turquie. En 2015, ces deux régions généraient pourtant la grande majorité des émissions de CO2. Parce qu’elles font partie des régions les plus développées sur le plan économique, elles bénéficient également de manière bien plus importante des améliorations d’efficacité et d’électrification du parc automobile terrestre, associée à la décarbonation du secteur de l’énergie. Toutes les autres régions enregistrent un volume plus élevé d’émissions en 2050, en particulier l’Asie, la région MENA et l’Afrique subsaharienne. Cette dernière affiche d’ailleurs la plus forte croissance relative, avec quasiment un quadruplement des émissions par rapport à 2015. L’Asie connaît de son côté la plus forte croissance en valeur absolue, avec une augmentation de près de 475 millions de tonnes de CO2.
Les mesures établies dans les scénarios Reshape et Reshape+ permettent de réduire les émissions de CO2 imputables aux déplacements non urbains quelle que soit la région. Dans le scénario Reshape, les États-Unis et le Canada, et l’EEE et la Turquie enregistrent également les plus fortes baisses. Les mesures tarifaires (taxes sur les billets, tarification du carbone, etc.) sont plus strictes dans ces régions et redirigent donc la demande vers des modes de transports durables de manière plus marquée, favorisant entre autres l’adoption d’aéronefs à propulsion électrique hybride. Les émissions chutent ainsi au point d’atteindre 25 % du niveau de 2015. L’Afrique subsaharienne est la seule région à connaître une augmentation des émissions de CO2 liées au transport non urbain. La baisse la plus conséquente en termes absolus se produit dans la région des États-Unis et du Canada, puisque ses émissions de CO2 du puits à la roue devraient diminuer de 720 millions de tonnes. Le scénario Reshape+ affiche des valeurs comparables à celles du scénario Reshape, avec des volumes d’émissions légèrement plus faibles.
Les émissions et les habitudes de déplacement sont bouleversées dans les trois scénarios. En 2050, le transport aérien sera responsable de la majorité des émissions de CO2 dans toutes les régions à l’exception de l’Asie et de l’Afrique subsaharienne. Dans le scénario Recover, les émissions en Asie sont réparties à parts égales entre le transport aérien et le transport par voie de surface. Dans les deux autres scénarios, les avancées technologiques associées à des mesures plus ambitieuses détournent la majorité des émissions vers le secteur du transport aérien. À l’inverse, bien que l’Afrique subsaharienne présente quasiment les mêmes volumes d’émissions pour le transport aérien que pour le transport par voie de surface dans les scénarios Reshape et Reshape+, le transport par voie de surface rejette presque 60 % de l’ensemble des émissions liées au transport non urbain dans le scénario Recover.
Les émissions de CO2 par habitant sont bien plus élevées dans les régions les plus riches, et ce, en raison d’un nombre plus important de passagers-kilomètres parcourus. En 2015, un habitant moyen des États-Unis et du Canada produisait plus de 2.5 tonnes d’émissions de CO2 du puits à la roue dans le cadre du transport non urbain de personnes. Un habitant moyen de la région de l’EEE et de la Turquie en générait quant à lui 700 kg, contre 430 kg pour un habitant de la région OCDE-Pacifique. À l’autre extrémité du classement, un habitant moyen d’Afrique subsaharienne produisait uniquement 72 kg de CO2 contre 140 kg pour un habitant moyen d’Asie.
L’écart entre les régions est beaucoup plus important en termes d’émissions de CO2 par habitant qu’en termes de passagers-kilomètres. Ainsi, en 2015, un individu moyen des États-Unis et du Canada avait parcouru neuf fois plus de kilomètres qu’un habitant moyen d’Asie. Dans le cas des émissions de CO2, la différence entre les deux est de plus du double : un voyageur des États-Unis ou du Canada générait 19 fois plus de CO2 que son homologue d’Asie. Ces chiffres sont dus à la part considérable du transport non urbain réalisée par les airs et en automobile dans la première région, et par le ferroviaire ou par autobus dans la seconde région. Bien qu’il s’agisse de cas extrêmes, des écarts comparables peuvent être observés dans la plupart des régions.
Dans le scénario Recover, les émissions moyennes par habitant augmentent dans la plupart des régions. Font toutefois exception les deux régions qui affichaient les plus forts volumes d’émissions en 2015, soit les régions des États-Unis et du Canada et l’EEE et la Turquie. Celles-ci voient en effet leurs émissions par habitant baisser grâce aux investissements existants ou planifiés dans les infrastructures ferroviaires. Leurs niveaux de revenus élevés permettent en outre aux habitants de ces régions de se tourner vers des véhicules individuels à plus faibles émissions. La croissance moins dynamique de l’activité de transport dans ces régions joue également un rôle non négligeable. D’autres régions ne parviennent toutefois pas à découpler l’activité du transport des émissions. En Asie, dans les pays en transition et en Afrique subsaharienne notamment, les émissions croissent ainsi en volume par habitant.
Les mesures adoptées dans les scénarios Reshape et Reshape+ permettent de réduire les émissions par habitant liées aux déplacements non urbains à l’échelle mondiale. Cette baisse est davantage marquée dans les régions les plus développées sur le plan économique. Ainsi, dans le scénario Reshape, la région de l’EEE et de la Turquie parvient à réduire ses émissions par habitant à 17 kg de CO2, soit à un niveau inférieur aux régions OCDE-Pacifique et MENA (respectivement à 225 kg et 190 kg), principalement en raison du haut niveau d’interconnexion des différentes modes de transport par voie de surface. La plus forte baisse, aussi bien en valeur relative qu’absolue, peut être observée aux États-Unis et au Canada, même si cette région présente encore le plus haut volume d’émissions par habitant, à hauteur d’environ 0.5 tonne de CO2 par an. Le transport routier et le secteur de l’énergie étant engagés dans un processus de décarbonation, la plus grande part des émissions sont imputables au transport aérien, même si ce dernier est bien moins polluant qu’en 2015.
Vers une décarbonation juste : réduire les émissions du transport non urbain de voyageurs de manière équitable
Le transport peut avoir un rôle essentiel dans la promotion de l’inclusion sociale et du bien-être. Les politiques de transport (y compris par le biais des mesures de décarbonation) ont une incidence directe sur l’équité, notamment en termes d’accessibilité et de répartition des coûts et avantages entre les populations, et peuvent ainsi avoir une influence sur les bénéfices économiques et sociaux pour les individus. Il est donc essentiel de faire coïncider entre eux les objectifs économiques, de bien-être et de lutte contre le changement climatique. La pandémie de Covid-19 a eu des conséquences désastreuses en matière de mobilité, et par là même sur l’accès à des éléments aussi fondamentaux que l’emploi, les services ou les réseaux d’aide sociale. Pendant la pandémie, les propriétaires d’automobiles disposaient d’un avantage évident en termes d’accessibilité par rapport aux individus qui dépendaient d’autres modes de transport. Même si les distances les plus courtes pouvaient facilement être parcourues à pied ou à vélo, les déplacements interurbains et régionaux des foyers à faible revenu ont été fortement perturbés. Même hors pandémie, les habitudes de déplacement des individus sont contraintes par l’accessibilité financière des différents modes de transport. Les foyers à faible revenu sont moins enclins à voyager par les airs ou à emprunter des lignes ferroviaires à grande vitesse. Ils dépendent en effet souvent des services d’autobus et, dans certaines régions, de trains pour leurs déplacements non urbains.
Les pouvoirs publics doivent soutenir et promouvoir des services de transport longue distance plus efficaces et plus abordables. Les prestataires de services de transport se remettent à grand peine des pertes financières dues à la pandémie et doivent faire face à des coûts d’exploitation élevés et à une fréquentation encore faible. Les pouvoirs publics devront contrôler les déficits de financement. Des renflouements ont été accordés pour le secteur aérien, mais les transporteurs par autobus assurant les déplacements des usagers à faible revenu auront eux aussi besoin d’aides publiques pour maintenir leur activité.
Les projets de transport profitent souvent aux personnes les plus mobiles. Dans une analyse coûts-bénéfices traditionnelle des systèmes de transport, le temps de déplacement économisé constitue le principal avantage estimé pour les utilisateurs. Ces économies profitent généralement à des groupes déjà particulièrement mobiles, mais sont moins susceptibles de représenter un réel avantage pour les groupes dont la mobilité est limitée, comme les personnes âgées, handicapées, à faible revenu ou encore qui ne disposent pas d’un permis de conduire (Lucas, Tyler and Christodoulou, 2009[47]).
Équité environnementale des décisions relatives au transport
Les décisions des pouvoirs publics en matière de transport doivent tenir compte à la fois des objectifs sociaux et environnementaux. La planification de transports durables nécessite souvent certains compromis en termes d’économie, d’environnement et de justice sociale. Les arbitrages entre, d’une part, le développement économique et, d’autre part, les questions d’environnement mais aussi de justice sociale ont fait l’objet d’une attention toute particulière. Or trouver le bon équilibre entre les objectifs environnementaux et les objectifs d’équité semble n’avoir suscité qu’un intérêt limité. L’expression de « justice environnementale » est souvent utilisée pour qualifier l’arbitrage entre ces objectifs spécifiques (Mitchell, 2005[48]). Les politiques de décarbonation du secteur du transport devraient impliquer une mise en œuvre équitable des mesures concernées. La justice environnementale vise à garantir que les effets négatifs des décisions liées au transport sur la santé et l’environnement ne sont pas supportés de façon disproportionnée par les minorités et les groupes à faible revenu (Forkenbrock and Schweitzer, 1999[49]).
Les avancées en faveur de transports durables peuvent profiter à chacun. Afin de réduire les émissions dues aux transports, les gouvernements du monde entier ont mis l’accent sur la promotion des véhicules électriques. Malgré les incitations proposées, ces véhicules continueront d’être plus coûteux que les véhicules à moteur à combustion interne équivalents pour les quatre à six années à venir (Soulopoulos, 2019[50]). Leurs prix élevés les rendent inaccessibles pour de nombreux consommateurs. Les pouvoirs publics doivent donc s’assurer que les progrès environnementaux dans le secteur du transport ne laissent personne de côté. Les crédits d’impôt et autres incitations fiscales visant à encourager l’utilisation de véhicules électriques sont souvent proposées de manière égale à tous les consommateurs, quels que soient leurs revenus. Les avantages sociaux générés par ces dispositifs restent toutefois déséquilibrés. Dans le cas des véhicules électriques, les avantages sociaux incluent notamment un renforcement de la sécurité énergétique, ainsi qu’une baisse des émissions de gaz à effet de serre. Bien que le renforcement de la sécurité énergétique soit un avantage social partagé par tous à l’échelle nationale, l’amélioration de la qualité de l’air n’est pas répartie de manière égale (Skerlos and Winebrake, 2010[51]). Si le crédit d’impôt octroyé pour l’achat d’un véhicule électrique était calculé en fonction des revenus, cela pourrait stimuler la diffusion de ce type de véhicule auprès des groupes à faible revenu et entraîner une répartition plus équilibrée des avantages sociaux qui en découlent.
Améliorer le parc de véhicules partagés et les infrastructures de recharge profite à tous les utilisateurs. Au sortir de la crise du Covid-19, les mesures de relance encourageant la vente de véhicules à faibles émissions et l’investissement dans les infrastructures de recharge devront être axées sur les parcs de véhicules partagés plutôt qu’individuels, et ce, de sorte à atteindre les objectifs environnementaux et d’équité (Buckle et al., 2020[52]; Goetz, 2020[53]). Le transport de demain s’articulera autour de véhicules électriques, partagés et autonomes. Cette évolution sera très largement encouragée par le secteur privé. Compte tenu de ses effets positifs publics et privés, les décideurs devront veiller à ce que la priorité soit donnée à la justice sociale aussi bien pour le secteur public que pour le secteur privé.
Les taxes sur le carbone ne doivent pas être préjudiciables aux plus modestes
Les mécanismes de tarification utilisés pour encourager la diminution des émissions peuvent avoir des effets dommageables en termes d’équité. Les effets sur l’équité des taxes sur le carbone ont fait l’objet de nombreux débats depuis leur introduction en tant qu’instrument d’action publique. Les taxes sur le carbone augmentent le coût des transports et entraînent des modifications du choix modal, de la demande en transport de personnes et des flux de circulation sur les réseaux routiers. Dans le cas du transport routier à faibles émissions, ces effets sont particulièrement significatifs (FIT, 2020[54]). Néanmoins, que ce soit en théorie ou en pratique, les taxes sur le carbone et les taxes sur l’énergie s’avèrent régressives et peuvent créer des situations d’inégalité car elles affectent davantage les groupes à faible revenu que les groupes à revenu élevé en valeur relative. Même s’il est parfaitement établi que les taxes sur le carbone contribuent à atténuer les émissions, l’adoption de la tarification du carbone en tant qu’instrument de réduction des émissions a été pour le moins lente et hésitante. Cela tient vraisemblablement au fait que l’application de taxes sur le carbone suscite une certaine réticence en raison de leurs effets de répartition négatifs (Büchs, Bardsley and Duwe, 2011[55]).
Les groupes à faible revenu subissent davantage les effets des fiscalités régressives. Les taxes sur le carbone affectent plus le transport non urbain de voyageurs que d’autres instruments car elles sont souvent définies et appliquées à l’échelle nationale. Les effets de répartition négatifs sont la conséquence de réactions différentes face à une politique uniforme. Ces réactions dépendent ainsi des revenus, des conditions de vie, des préférences et habitudes de consommation, et des groupes socio-économiques (Liang, Wang and Wei, 2013[56]). Même s’il est peu probable que les groupes à faible revenu prennent fréquemment l’avion, ils sont susceptibles d’être davantage exposés à ces taxes que les groupes à revenu élevé, suivant les solutions de substitution auxquelles ils ont accès. La manière dont sont utilisées les recettes générées par les taxes sur le carbone peut s’avérer déterminante afin de garantir que la charge pesant sur les groupes à faible revenu soit réduite, voire supprimée.
La réalisation d’une analyse des effets de répartition avant la mise en oeuvre d’une taxe sur le carbone permettra de mettre à jour les aspects qui suscitent des préoccupations, ainsi que les domaines où des effets sur l’équité sont perçus mais ne revêtent pas une importance particulière. Les mesures tarifaires sur les trajets en avion en sont un bon exemple, dans la mesure où seule une faible partie de la population emprunte la majorité des vols. Aux États-Unis, 12 % de la population a pris l’avion au moins six fois en 2016, ce qui représente 68 % des vols (Rutherford, 2019[57]). En Angleterre, 20 % des vols internationaux ont été pris par seulement 1 % des habitants et plus de 50 % de ces vols ont été pris par 10 % des habitants (Kommenda, 2019[58]). Dans les 26 pays de l’Union européenne, les empreintes carbone du transport aérien augmentent proportionnellement aux dépenses et aux recettes (Ivanova and Wood, 2020[59]). Le recours à des mécanismes de tarification reporte les coûts sur les personnes responsables des émissions, et il y a peu de risques que ces coûts soient régressifs.
Les taxes sur le carbone peuvent être mises en œuvre sans induire d’effets de répartition négatifs. Il existe des exemples probants où ces taxes ont été accompagnées de mesures préférentielles visant à éviter que les groupes à faible revenu n’aient à supporter la charge de ces taxes. Ces mesures peuvent être appliquées sous différentes formes. La Suède, par exemple, a baissé le taux de l’impôt sur le revenu mais augmenté les prélèvements sur les produits énergétiques (Speck, 1999[60]). Au Danemark, les recettes générées par la taxe sur le carbone peuvent être utilisées dans d’autres secteurs en tant qu’aides à l’emploi ou qu’investissements en faveur des économies d’énergie (Wei et al., 2008). Il est essentiel que les pouvoirs publics tiennent compte de tels effets de répartition et mettent en œuvre les mesures nécessaires pour les éviter. Les recettes peuvent par ailleurs être réorientées à destination de groupes ou personnes spécifiques sous forme de versements directs ou de subventions. Des exemptions ou des taux d’imposition réduits à destination de groupes particuliers peuvent également être prévus dès le départ. Toutes ces mesures ont une incidence directe sur l’efficacité des taxes sur le carbone.
Évaluer l’équité du transport non urbain
L’activité annuelle par habitant du transport non urbain connaît une augmentation dans les trois scénarios évalués, comme décrit précédemment dans ce chapitre. Cette augmentation de l’activité par habitant n’est pas en soi synonyme d’une meilleure équité de la situation. Toute évaluation des effets sur l’équité doit examiner de près la répartition de cette activité entre les différentes régions. Le coefficient de Gini est un indicateur permettant de rendre compte de la répartition des revenus. Une valeur de 1 signifie que l’ensemble des revenus sont concentrés sur un seul individu, alors qu’une valeur de 0 indique les revenus sont répartis de manière égale entre tous les individus. Un procédé comparable est également utilisé pour analyser le nombre de passagers-kilomètres par habitant dans les différentes régions. En 2015, le coefficient de Gini était de 0.47. Il sera toutefois inférieur en 2050 dans les trois scénarios, soit 0.36 dans le scénario Recover, 0.38 dans le scénario Reshape et 0.39 dans le scénario Reshape+. Les scénarios Reshape et Reshape+ prennent tous deux en compte des mesures et politiques onéreuses qui pèsent sur le coût des transports. De telles augmentations affectent plus durement les régions aux potentialités économiques limitées. L’écart de demande de déplacements entre régions par habitant se réduit par conséquent entre 2015 et 2050, mais les mécanismes de tarification des scénarios Reshape et Reshape+ font que cette baisse reste plus faible que dans le scénario Recover.
Les émissions de CO2 par habitant issues du transport non urbain sont davantage réparties de manière inégale entre régions que le volume de passagers-kilomètres par habitant en 2015. Le coefficient de Gini pour l’année de référence est de 0.52, contre 0.47 pour les passagers-kilomètres. Le coefficient baisse en 2050 quel que soit le scénario, à environ 0.35. Toutefois, contrairement au volume de passagers-kilomètres, les résultats du scénario Reshape sont légèrement plus équitables. Cela s’explique par le fort impact que peuvent avoir les politiques de décarbonation dans les régions à haut niveau d’émissions.
Orientations recommandées
Le transport non urbain est le parent pauvre des politiques climatiques. Les déplacements interurbains et régionaux sont à l’origine de plus d’un tiers de toutes les émissions imputables aux transports, mais aussi de plus de la moitié du volume total de CO2 rejeté par le transport de personnes. Si rien n’est fait pour réduire l’empreinte carbone du nombre croissant de touristes, de voyageurs indépendants et de navetteurs ruraux, il sera difficile de freiner le changement climatique.
La pandémie de Covid-19 a conduit à une baisse temporaire des émissions liées au transport non urbain de voyageurs, particulièrement issues du transport aérien. Le transport régional et interurbain devrait toutefois repartir à la hausse, pour au moins doubler à l’horizon 2050. Ses émissions augmenteront d’un quart si les politiques actuellement prévues restent inchangées.
Un changement de politique pourrait ouvrir la voie à de nouvelles solutions durables de transport non urbain. Il serait par ailleurs possible de réduire ces émissions de plus de la moitié au cours des 30 prochaines années si la décarbonation permise par la pandémie de Covid-19 peut être pérennisée. Ériger l’investissement dans la décarbonation au rang de priorité des programmes de relance économique permettra de mettre le transport non urbain sur la bonne trajectoire. Les recommandations ci-dessous précisent les mesures essentielles à mettre en œuvre pour atteindre cet objectif.
Accroître les prix des transports non urbains à forte intensité de carbone afin de promouvoir les solutions alternatives non polluantes
Les autorités peuvent définir une taxe sur le carbone et augmenter les prélèvements sur les solutions de transport bénéficiant actuellement de régimes d’imposition réduite ou d’exemption totale. Dans le cas du transport international, ces mécanismes de tarification doivent être appliqués en tenant compte à la fois du pays d’origine et du pays de destination. Cela permettra de réduire les failles et de veiller à ce que les recettes dégagées puissent servir à la décarbonation du secteur du transport. L’augmentation du coût des transports peut avoir pour effet de réduire légèrement la demande si aucune solution de transport de substitution n’existe et permet donc un changement de comportement des populations. La tarification des émissions de carbone du transport facilitera aussi la mise à disposition de solutions plus respectueuses de l’environnement, par exemple en rendant l’aviation plus attractive grâce aux mélanges de carburants plus propres ou aux aéronefs électriques, et en encourageant la mise en action d’autres mesures susceptibles de renforcer la durabilité et l’accessibilité financière des modes de transport existants.
Au-delà d’une tarification du carbone à l’échelle nationale, les pouvoirs publics doivent chercher à conclure des accords bi- ou multilatéraux relativement aux mécanismes de tarification du transport aérien international. La mise en œuvre d’une tarification du carbone efficace sera tributaire de négociations ardues et se heurtera nécessairement à une certaine opposition. Toutefois, le coût de l’inaction sera bien plus élevé, d’une part, que l’application de pénalités aux transports à forte intensité de carbone et, d’autre part, que la promotion de solutions de substitution à faibles émissions.
Élaborer des plans de relance post-Covid-19 qui accélèrent l’essor de transports non urbain durables
Les mesures de relance économique adoptées dans le contexte de la pandémie de Covid-19 doivent être adossées à des conditions environnementales en faveur de transports durables. Les pouvoirs publics doivent donner la priorité à la fabrication et à l’utilisation de véhicules électriques au détriment des véhicules à moteur diesel ou à essence. Ce type d’incitation pourrait viser précisément les grands parcs automobiles utilisés dans le cadre des transports publics et partagés sur le segment non urbain. Cela permettrait d’étendre les avantages liés aux véhicules à faibles émissions au-delà des villes et à des populations autres que les propriétaires de véhicules individuels.
Le renflouement des entreprises de transport peut également être conditionné à la réalisation d’objectifs climatiques définis. Certaines applications concrètes de cette approche contraignante peuvent être observées dans l’écosystème global du transport, mais des exemples plus spécifiques au transport non urbain de voyageurs incluent notamment : l’amélioration de la fréquence et de la qualité d’exploitation des services ferroviaires interurbains et régionaux ; la mise en place d’incitations à destination des compagnies de taxi et des transporteurs par autobus afin de les encourager à se tourner vers des véhicules à émissions faibles ou nulles ; et l’obligation aux compagnies aériennes de limiter les vols court-courriers de sorte à encourager le transport ferroviaire. Les autorités et les entreprises pourraient enfin inciter les employés à réaliser leurs déplacements d’affaires par transport ferroviaire, plutôt que par les airs ou par la route.
Mettre en adéquation les politiques de décarbonation des transports et de l’énergie afin que la réalisation de l’objectif « zéro carbone » dans les transports repose sur des énergies propres
La généralisation de transports faiblement ou non carbonés passe nécessairement par l’accès à une énergie propre, et donc par la décarbonation du secteur de l’énergie. La décarbonation complète du secteur des transports n’est possible que si des plans de relance axés sur le verdissement du réseau électrique et sur l’amélioration des technologies des batteries sont mis en œuvre. La création d’un réseau électrique vert est essentielle, dans la mesure où une part croissante du transport non urbain s’appuiera sur l’électricité. Les véhicules de transport routier électriques, l’électrification continue du feroviaire et la conversion à l’hybride des aéronefs dépendent de l’accès à une électricité propre et auront tous un rôle à jouer dans la réalisation des objectifs de décarbonation.
Rendre obligatoire l’utilisation de carburants de substitution dans le secteur du transport aérien afin d’encourager l’innovation à long terme
Encourager l’adoption de carburants de substitution dans le transport aérien permettrait de réduire les émissions à court terme et de stimuler l’innovation à plus long terme. Au départ, une partie des carburants de substitution serait issue de sources durables, que ce soit sous forme de biocarburants ou de carburants de synthèse eux-mêmes issus de sources durables. Des normes en matière de carburant permettraient d’encourager l’innovation et l’adoption de nouveaux carburants d’aviation durables, à condition que soient également proposées des incitations pour l’amélioration de l’efficacité des aéronefs. De telles mesures auraient à la fois une incidence directe et indirecte sur le coût du transport aérien, qui pourrait à terme réduire la demande.
Favoriser la transition vers les solutions de transport routier non urbain à faibles émissions en rendant leur prix abordable et en prenant des dispositions renforçant la confiance des consommateurs à l’égard de celles qui polluent le moins
Les subventions à l’achat, les crédits d’impôts et autres exemptions peuvent rendre les véhicules électriques et à faibles émissions plus abordables et attrayants pour les consommateurs. Le coût initial plus élevé des véhicules à faibles émissions et le manque d’infrastructures de recharge ont un effet dissuasif pour les utilisateurs potentiels, surtout à l’extérieur de villes. Investir dans l’installation d’infrastructures de recharge rapide le long des axes interurbains contribuerait à faire des véhicules électriques une solution fiable de transport longue distance. Le secteur public pourrait ainsi donner l’exemple en intégrant à son parc automobile des véhicules à faibles émissions et en déployant davantage de bornes de recharge publiques. Le financement de la recherche et du développement de technologies du combustible et de véhicules moins polluants devrait être renforcé afin de contribuer à la réduction des coûts et à l’amélioration des performances.
Investir en amont dans le développement technologique, au-delà du simple cadre du secteur du transport, afin de permettre le déploiement à grande échelle des nouvelles technologies nécessaires à une décarbonation générale
Les politiques encourageant la diffusion de nouveaux véhicules et de nouvelles technologies du combustible ne feront pas avancer la décarbonation si ces développements technologiques ne sont pas disponibles à grande échelle pour répondre à la demande. Des investissements significatifs devront être mis en œuvre dans la recherche et le développement de nouvelles technologies dans les secteurs nouveaux comme existants, de sorte à satisfaire la demande et accélérer leur adoption. Cela concerne notamment le développement de biocarburants innovants, la conception d’aéronefs plus performants et l’amélioration de la capacité des batteries en parallèle d’une réduction de leur coût. Le capital humain nécessaire pour faire face à ces développements devra en outre être formé et mobilisé bien en amont.
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Note
← 1. Les données sont présentées de manière simplifiée afin de montrer l’incidence des aéronefs à propulsion électrique hybride sur la demande totale de transport aérien. La distance totale d’un trajet réalisé par un aéronef à propulsion électrique hybride est constituée de la distance équivalente assurée entièrement par des carburants conventionnels et de la distance équivalente assurée par une alimentation électrique. La somme des deux correspond ainsi à la distance totale du trajet. Cela permet d’évaluer le volume total de voyageurs-kilomètres réalisé par la composante électrique des aéronefs à propulsion électrique hybride.