Ce chapitre présente le cadre juridique et institutionnel français en matière de lutte contre les ingérences étrangères. En particulier, le chapitre détaille les dispositifs pertinents déjà en place et explique comment ce cadre pourrait être renforcé au-delà des actions des services de renseignement par des outils de gouvernance publique permettant de renforcer la transparence de la vie publique en France.
Renforcer la transparence et l’intégrité des activités d’influence étrangère en France
2. Renforcer le dispositif français de lutte contre les ingérences étrangères
Abstract
2.1. L’ingérence étrangère, une priorité du Gouvernement français
Les risques d’ingérences étrangères dans la société et dans le fonctionnement de la démocratie est une priorité du Gouvernement français. L’identification et la caractérisation des buts, des méthodes et des conséquences sur la souveraineté et les intérêts nationaux des ingérences étrangères figurent parmi les enjeux prioritaires de la Stratégie nationale du renseignement (SNR) de 2019 en France (Encadré 2.1).
Encadré 2.1. La Stratégie Nationale du Renseignement (2019)
Élaborée par la coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme (CNRLT), la Stratégie Nationale du Renseignement concerne l’ensemble de la communauté du Renseignement en France. Elle fait l’objet d’un examen interministériel et d’une validation par le Président de la République en Conseil National du Renseignement.
La SNR de 2019 constitue la seconde édition, après une première édition en 2014. Elle distingue quatre enjeux prioritaires :
La menace terroriste.
L’anticipation des crises et des risques de ruptures majeures.
La défense et la promotion des intérêts économiques et industriels de la France.
La lutte contre les menaces transversales.
La SNR souligne notamment les activités « d’ingérence et d’espionnage auxquels se livrent plusieurs puissances étrangères de manière décomplexée [et qui] entraînent des préjudices majeurs pour nos intérêts (politiques, stratégiques, scientifiques…), notre souveraineté et ceux de nos partenaires européens ».
Parmi les formes préoccupantes d’ingérences, la SNR note en particulier « l’acuité et la sophistication des actions de manipulation de l’information, tout particulièrement celles orchestrées par des puissances étrangères hostiles à nos intérêts », et souligne la nécessité d’identifier les acteurs de la menace et leurs cibles, de décrire leurs buts et leurs méthodes, et d’évaluer les conséquences pour la souveraineté et les intérêts de la France, afin d’éclairer la décision politique de réponse à ces agissements hostiles.
Source : SGDSN (2019[1]), La stratégie nationale du renseignement, Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale, https://www.academie-renseignement.gouv.fr/files/piece_jointe_2_strategie_Nationale_du_Renseignement.pdf.
Au cours des dernières années, le sujet s’est imposé comme une problématique majeure d’actualité. L’année 2021 a notamment été marquée par la mise en place d’un plan de sensibilisation contre les ingérences étrangères et l’engagement de travaux de réflexion pour assurer une meilleure transparence des actions d’influence étrangère sur la vie publique (parfois mentionnés dans le débat public comme l’établissement d’un « FARA à la française ») ainsi qu’une meilleure protection des savoirs et des savoir-faire dans l’enseignement supérieur et la recherche scientifique (Délégation parlementaire au renseignement, 2023[2] ; Intelligence Online, 2023[3]). En octobre 2021, une circulaire du gouvernement sur le renforcement de la transparence des actions d’influence étrangère conduites auprès des agents publics de l’État a été transmise aux ministères. Cette circulaire identifie les leviers à mettre en œuvre pour y faire face, à savoir : (i) les standards d’intégrité pertinents en matière de tentative d’influence étrangère pour les plus hauts responsables publics français ; (ii) les procédures d’alerte ; (iii) le renforcement du dispositif de transparence des rapports entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics.
Plusieurs commissions et missions parlementaires se sont également saisies du sujet, notamment une mission d’information du Sénat sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences (Sénat, 2021[4]), une commission d’enquête de l’Assemblée nationale relatives aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (Assemblée nationale, 2023[5]), la Délégation parlementaire du renseignement à travers son rapport annuel 2023 (Délégation parlementaire au renseignement, 2023[2]), ainsi qu’une Commission d'enquête sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères qui a entamé ses travaux en février 2024. Le Conseil d’État s’intéresse aussi au sujet dans le cadre de son étude annuelle 2024 portant sur le thème de la souveraineté (Conseil d'État, 2023[6]).
Enfin, une proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France, et qui prévoit l’instauration d’un « dispositif législatif rendant obligatoire l’enregistrement des acteurs influant sur la vie publique française pour le compte d’une puissance étrangère » a été déposée à l’Assemblée nationale en février 2024. Cette proposition de loi, en discussion au moment de la publication de ce rapport, s'inspire des dispositifs en vigueur aux États-Unis et au Royaume-Uni (Assemblée nationale, 2024[7]).
2.2. L’ingérence étrangère, un phénomène déjà bien appréhendé par le cadre juridique et les pouvoirs publics en France
La prévention des ingérences étrangères en France repose « sur un cadre juridique pertinent et des institutions efficaces pour lutter contre ce fléau » (Assemblée nationale, 2023[5]). Ce dispositif comprend notamment les institutions précisées dans le Tableau 2.1 et les dispositifs suivants :
Sur le plan pénal, le dispositif de répression des atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation.
Les restrictions posées au financement provenant de l’étranger des partis politiques et des campagnes électorales.
Le dispositif de lutte contre les atteintes à la probité, y compris la corruption, le trafic d’influence, la prise illégale d’intérêts.
Le dispositif de contrôle des investissements étrangers.
Le dispositif de lutte contre les ingérences numériques étrangères.
Le dispositif sur l’encadrement des activités de représentation d’intérêts.
Tableau 2.1. Panorama institutionnel des institutions œuvrant à la prévention et à la lutte contre les ingérences étrangères en France
Institution |
Statut |
Missions principales (pertinentes dans le cadre des ingérences étrangères) |
---|---|---|
Communauté nationale du renseignement |
||
Direction générale de la Sécurité intérieure – DGSI |
Service spécialisé de renseignement français relevant du ministère de l'Intérieur |
La DGSI exerce une compétence générale en renseignement pour lutter contre toutes les activités susceptibles de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation et à la sécurité nationale, notamment la prévention les activités qui s’apparentent à des ingérences de puissances étrangères sur le sol national. |
Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières – DNRED |
Service spécialisé de renseignement français relevant du ministère de l’Économie et des Finances |
La DNRED est chargée de mettre en œuvre la politique du renseignement, du contrôle et de la lutte contre la fraude en matière douanière. |
Tracfin |
Cellule de renseignement financier nationale relevant du ministère de l’Économie et des Finances |
Tracfin concourt au développement d’une économie saine en luttant contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Ses missions prioritaires portent sur (i) la lutte contre la criminalité économique et financière ; (ii) la lutte contre la fraude aux finances publiques, (iii) La défense des intérêts fondamentaux de la Nation |
Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale |
||
Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale – SGDSN |
Service du Premier ministre |
Le SGDSN assiste le Premier ministre dans l’exercice de ses responsabilités en matière de défense et de sécurité nationale. Son champ d’intervention couvre la programmation militaire, la politique de dissuasion, la sécurité intérieure concourant à la sécurité nationale, la sécurité économique et énergétique, la lutte contre le terrorisme et la planification des réponses aux crises. |
Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information – ANSSI |
Service à compétence nationale |
Rattachée au SGDSN, l’ANSSI assure la sécurité des systèmes d’information et la cyberdéfense. |
Service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères – VIGINUM |
Service à compétence nationale |
Service technique et opérationnel de l’État chargé de la vigilance et de la protection contre les ingérences numériques étrangères. |
Lutte contre les atteintes à la probité, y compris la corruption, le trafic d’influence, la prise illégale d’intérêts |
||
Agence française anti-corruption – AFA |
Service à compétence nationale sous l'autorité conjointe des ministres de l'Économie et de la Justice. |
L’AFA contrôle l’existence et l’efficacité des dispositifs anticorruption mis en place par les acteurs publics et les grandes entreprises. Elle publie un plan national de lutte contre la corruption et réalise un état des lieux des dispositifs de prévention de la corruption dans les administrations publiques. |
Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques – CNCCFP |
Autorité administrative indépendante |
La CNCCFP reçoit les comptes de campagne des candidats à toutes les élections et consultations politiques (à l’exception des circonscriptions municipales d’au plus 9 000 habitants) et constate le respect de leurs obligations comptables. |
Haute Autorité pour la transparence de la vie publique – HATVP |
Autorité administrative indépendante |
La HATVP assure la prévention des conflits d’intérêts des responsables publics en contrôlant, pour certains, leur déclaration d’intérêts et de patrimoine, contrôle la mobilité entre secteurs public et privé de certains responsables et agents publics, et administre le registre des représentants d’intérêts. |
Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) |
Service à compétence nationale de la Direction centrale de la Police judiciaire |
L’OCLCIFF effectue des enquêtes dans les domaines de la corruption nationale et internationale, les atteintes à la probité, les infractions au droit des affaires, la fraude fiscale complexe et le blanchiment de ces infractions. Il est amené à enquêter sur des cas éventuels de corruption d’élus par une puissance étrangère. |
Justice |
||
Parquet national financier (PNF) |
Parquet à compétence nationale |
Le PNF est en charge de la grande délinquance économique et financière. Il traite les atteintes aux finances publiques, à la probité, au bon fonctionnement des marchés financiers et au jeu libre de la concurrence. |
Note : ce tableau cite les principales institutions qui sont pertinentes dans le cadre de ce rapport, mais n’a pas vocation à dresser une liste exhaustive des institutions ayant des compétences en matière d’influence étrangère.
Source : élaboration de l'auteur.
2.2.1. Les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation dans le Code pénal
Si la notion « d’ingérence » à proprement parler n’est pas appréhendée en tant que telle par le droit pénal, le phénomène est toutefois bien appréhendé sous l’angle de la répression des atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, qui figurent au titre premier du livre IV du Code pénal, et s’entendent, au sens de l’article 410-1 du Code pénal comme des dommages causés à « son indépendance, [à] l’intégrité de son territoire, [à] sa sécurité, [à] la forme républicaine de ses institutions, [aux] moyens de sa défense et de sa diplomatie, [à] la sauvegarde de sa population en France et à l’étranger, [à] l’équilibre de son milieu naturel et de son environnement et [à] des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique et de son patrimoine culturel » (Article 410-1). Le livre IV du Code pénal relatif aux crimes et aux délits contre la nation, l’État et la paix publique définit également plusieurs infractions susceptibles d’avoir directement trait à l’ingérence d’une puissance étrangère, comme la trahison, l’espionnage ou encore les différentes atteintes à la défense nationale.
2.2.2. L’encadrement du financement des partis politiques et des campagnes électorales
L’encadrement du financement des partis politiques et des campagnes électorales s’inscrit dans le cadre posé par la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique et renforcé par la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) contrôle les comptes de campagne des candidats à toutes les élections et le respect par les partis politiques de leurs obligations comptables. En 2017, des réformes du système de financement politique ont été introduites dans le cadre de la loi sur la confiance dans la vie politique, à la suite de questionnements sur le financement de la campagne présidentielle d’un parti politique français par le biais d’une banque tchéco-russe. Tant pour les campagnes électorales que pour les partis politiques, la loi interdit désormais les prêts de toute personne morale autre que les partis politiques déposant leurs comptes à la CNCCFP et les banques ou sociétés de crédit ayant leur siège social dans l’Espace économique européen (Tableau 2.2). Ainsi les Indicateurs de l’OCDE sur l’intégrité publique indiquent que sur le financement de la vie politique, la France remplit 100 % des critères pour la réglementation, alors que la moyenne de l'OCDE est de 73 % (OCDE, 2023[8]).
Tableau 2.2. Tableau récapitulatif des règles de financement privé des partis politiques et des campagnes électorales
Source de financement |
Dons et cotisations |
Prêts et garanties |
|
---|---|---|---|
Personnes physiques |
De nationalité française ou résidant en France |
Autorisés (dans la limite de 7 500 EUR par an pour des partis et de 4 600 EUR par élection pour des candidats) |
Autorisés (dans la limite du taux d’intérêt légal et, pour les partis, de 24 mois et 15 000 EUR, pour les candidats, de 18 mois et du plafond des dépenses de campagne) |
De nationalité étrangère et ne résidant pas en France |
Interdits |
(aucune précision dans les lois et règlements) |
|
Personnes morales |
De droit interne |
Interdits (sauf autres partis) |
Interdits (sauf autres partis et banques) |
De droit étranger (dont États) |
Interdits (même indirectement) |
Interdits (sauf banques domiciliées dans ‘l’UE ou l’EEE) |
Source: Assemblée nationale (2023[5]), Rapport fait au nom de la Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères visant à influencer ou corrompre des relais d’opinion, des dirigeants ou des partis politiques français.
2.2.3. Le dispositif de lutte contre les atteintes à la probité, y compris la corruption, le trafic d’influence, la prise illégale d’intérêts
La lutte contre la corruption en France connaît des avancées décisives à partir des années 1980, avec notamment la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires – qui leur interdit de prendre des intérêts dans une entreprise soumise au contrôle de leur administration – et l’adoption en 1993 de la première loi Sapin, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques. De 2013 à 2017, plusieurs lois vont mettre en place des outils opérationnels pour lutter contre la corruption et promouvoir la transparence de la vie publique :
La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique a imposé à plus de 18 000 responsables publics, élus et non élus, de déposer en ligne à la fois une déclaration de patrimoine et une déclaration d’intérêts auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
La loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière institue le Parquet National Financier et l’Office Central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales, chargés de mener les enquêtes sur les faits de corruption les plus complexes.
La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (Sapin II) exige que les entreprises mettent en place un programme de lutte contre la corruption afin d’identifier et de gérer les risques de corruption. Les acteurs publics sont également tenus de se doter de procédures de prévention des manquements à l’intégrité. La loi crée l’Agence française anticorruption (AFA), prévoit la création d’un « répertoire des représentants d’intérêts » accessible en ligne et mis en œuvre par la HATVP et instaure un régime de protection des lanceurs d’alerte.
La loi n° 2017-1339 de 2017 pour la confiance dans la vie publique renforce les obligations déontologiques des membres du Gouvernement et du parlement et crée des peines obligatoires d’inéligibilité en cas d’infraction à la probité.
2.2.4. Le dispositif de contrôle des investissements étrangers
La France dispose d’un outil de de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) étoffé qui porte sur des secteurs touchant à la défense nationale ou susceptibles de mettre en jeu l'ordre public et des activités essentielles à la garantie des intérêts du pays (encadrés par l’article L. 151-3 du Code monétaire et financier). Concrètement, tout acteur étranger qui souhaite procéder à un investissement dans ces secteurs doit déposer, auprès de la direction générale du Trésor, une demande d’autorisation préalable. L’assimilation d’un IEF à une ingérence étrangère est réalisée « au cas par cas » par le Comité interministériel des investissements étrangers en France (CIIEF), qui rassemble des représentants des administrations pour analyser la sensibilité de l’activité de l’entreprise française par rapport aux enjeux de sécurité nationale.
2.2.5. Le dispositif de lutte contre les ingérences numériques étrangères
La France a créé en juin 2021 une agence nationale de lutte contre les manipulations de l’information en provenance de l’étranger visant à « déstabiliser l’État » (VIGINUM) rattaché au Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN). La mission principale de VIGINUM est de détecter et de caractériser des ingérences numériques étrangères affectant le débat public numérique en France. Pour ce faire, VIGINUM se fonde sur quatre critères juridiques pour caractériser l’ingérence numérique étrangère : (i) l’atteinte potentielle aux intérêts fondamentaux de la Nation ; (ii) l’implication d’un acteur étranger, ce qui ne signifie pas qu’il y ait nécessairement une attribution de l’attaque à un protagoniste désigné ; (iii) un contenu manifestement inexact ou trompeur ; (iv) une diffusion artificielle ou automatisée, massive et délibérée, ou la volonté d’une telle diffusion.
2.2.6. Le dispositif sur l’encadrement des activités de représentation d’intérêts
En matière de lobbying, le dispositif de la loi Sapin II établit une reconnaissance juridique de l’existence du lobbying (« représentation d’intérêts »), tout en répondant aux risques liés au lobbying à travers l’inscription obligatoire dans un registre rendu public et l’application d’obligations déontologiques pour les lobbyistes. Si les activités de représentation d’intérêts effectuées au nom d’États étrangers n’étaient pas explicitement exclues du cadre légal, ces activités n’étaient, dans la pratique, pas inscrites dans le registre. Depuis la publication et l’entrée en vigueur des nouvelles lignes directrices de la HATVP en octobre 2023, les États tiers doivent être déclarés comme clients des cabinets de conseil effectuant des activités de lobbying.
2.3. Un cadre juridique et institutionnel à renforcer pour mieux appréhender le phénomène sous l’angle de la transparence de la vie publique et des atteintes à la probité
Si la France dispose donc d’un cadre juridique et institutionnel solide pour appréhender les risques d’ingérence étrangère sous différents angles, ce cadre demeure toutefois incomplet. En particulier, les deux rapports parlementaires publiés en 2023 sur ce sujet notent que la lutte contre les ingérences étrangères repose encore trop sur les services de renseignement et les agences qui leur viennent en appui. Parmi les priorités de réforme, ces rapports identifient notamment la transparence sur les liens d’intérêts des personnes physiques ou morales évoluant dans l’espace public et conduisant des activités de représentation d’intérêts et le renforcement du contrôle des mobilités public-privé.
Dans cette perspective, les chapitres suivants fournissent des recommandations sur le renforcement de la transparence des actions d’influence étrangère (chapitre 3) et des standards d’intégrité applicables aux hauts responsables publics français en matière d’influence étrangère (chapitre 4).
Références
[7] Assemblée nationale (2024), Proposition de loi No. 2150 visant à prévenir les ingérences étrangères en France, https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b2150_proposition-loi.
[5] Assemblée nationale (2023), Rapport fait au nom de la Commission d’enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères visant à influencer ou corrompre des relais d’opinion, des dirigeants ou des partis politiques français, https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/ceingeren/l16b1311-t1_rapport-enquete.
[6] Conseil d’État (2023), La souveraineté , nouveau cycle annuel de conférences du Conseil d’État et sujet de l’étude annuelle 2024, https://www.conseil-etat.fr/actualites/la-souverainete-nouveau-cycle-annuel-de-conferences-du-conseil-d-etat-et-sujet-de-l-etude-annuelle-2024.
[2] Délégation parlementaire au renseignement (2023), Rapport de la délégation parlementaire au renseignement relatif à l’activité de la délégation parlementaire au renseignement pour l’année 2022-2023, https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/dpr/l16b1454_rapport-information.pdf.
[3] Intelligence Online (2023), Après Londres, Paris tentée par un vrai modèle FARA pour lutter contre les influences étrangères, https://www.intelligenceonline.fr/renseignement-d-etat/2023/04/05/apres-londres-paris-tentee-par-un-vrai-modele-fara-pour-lutter-contre-les-influences-etrangeres,109930609-art.
[8] OCDE (2023), Indicateurs de l’OCDE sur l’Intégrité Publique. Indicateur « Accountability of Public Policy Making », https://oecd-public-integrity-indicators.org/indicators/1000097?country2=FRA.
[4] Sénat (2021), Rapport No. 873 fait au nom de la mission d’information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences, https://www.senat.fr/rap/r20-873/r20-8731.pdf.
[1] SGDSN (2019), La stratégie nationale du renseignement, Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale, https://www.academie-renseignement.gouv.fr/files/piece_jointe_2_strategie_Nationale_du_Renseignement.pdf.