La politique d’immigration du Canada ambitionne de favoriser le développement économique par la sélection d’immigrants à fort capital humain, de regrouper les familles, mais aussi de réagir aux crises qui éclatent à l’étranger et de protéger les populations en danger. Les immigrants de la catégorie économique, sélectionnés pour leurs compétences, constituent de loin le groupe le plus nombreux. Le système d’immigration a fait ses preuves et fonctionne bien. Les résultats sont suivis et les politiques sont ajustées de manière à satisfaire les objectifs du système. Un problème se pose cependant, tant du point de vue du bien-être des immigrés que de la hausse de la productivité : leurs gains initiaux ayant fortement diminué depuis quelques décennies, les immigrés ne parviennent plus à rattraper leurs homologues natifs durant leur vie active. Cette baisse s’explique en grande partie par la baisse des niveaux de maîtrise des langues officielles et par un recul du rendement de l’expérience professionnelle acquise avant l’immigration. Le Canada a réagi en modifiant sa politique d’immigration au fil des ans, de manière à sélectionner les immigrants en fonction de leurs perspectives de gains. La mise en place du système d’Entrée Express en 2015 en est le plus récent exemple. Plusieurs programmes et initiatives en matière d’établissement ont également été créés pour faciliter l’intégration. Ce chapitre s’interroge sur les modifications qu’il serait encore possible d’apporter au système pour en renforcer les avantages.
Études économiques de l'OCDE : Canada 2018
Chapitre 2. Tirer le meilleur parti de l’immigration
Abstract
La politique d’immigration du Canada veut avant tout favoriser le développement économique par la sélection d’immigrants à fort capital humain, regrouper les familles, mais aussi réagir aux crises qui éclatent à l’étranger et protéger les populations en danger (IRCC, 2017[1]). Le gouvernement fédéral fixe des cibles annuelles d’émission de visas de résident permanent en fonction de la répartition et du rythme de l’immigration les plus susceptibles de contribuer à la satisfaction de ces objectifs. Les demandeurs de la catégorie de l’immigration économique sélectionnés pour leurs compétences, ainsi que leurs conjoints et leurs enfants à charge, constituent de loin la plus grande catégorie d’immigrants, suivie par les catégories du regroupement familial, des réfugiés et des circonstances d’ordre humanitaire. L’importance accordée à l’immigration économique est conforme à l’idée qu’elle améliore la qualité et la productivité du bassin de main-d’œuvre canadien sur le long terme et donc le potentiel de croissance (ibid). Outre les avantages économiques et sociaux résultant des objectifs ci-dessus, la politique d’immigration accroît le bien-être en enrichissant la diversité culturelle et l’éventail de biens et services disponibles. En contribuant à une meilleure connaissance des diverses cultures, elle est aussi susceptible d’améliorer les relations internationales.
Le système d’immigration canadien a fait ses preuves à maints égards. À en juger par divers indicateurs, les immigrants et leurs enfants sont mieux intégrés au Canada que dans bon nombre d’autres pays de l’OCDE (OCDE; Union européenne, 2015[2]). La gestion de ce système est efficace. Les résultats sont suivis et les politiques sont ajustées en conséquence, pour veiller à la satisfaction des objectifs fixés. L’immigration est devenue la principale source de croissance démographique, portant la proportion d’immigrants dans la population à un niveau peu dépassé dans la zone OCDE. Elle a contribué au relèvement du niveau d’études de la population d’âge actif, enrichi la diversité culturelle du pays, et contribué au développement des grandes villes, facilitant ainsi les économies d’agglomération. Les enfants d’immigrants réussissent leurs études et trouvent leur place sur le marché du travail. Les immigrants sélectionnés pour leurs compétences sont nettement mieux rémunérés que les autres, signe manifeste de l’efficacité de la sélection pour repérer les immigrants les plus susceptibles de réussir leur intégration dans le marché du travail.
Un problème se pose cependant, du point de vue tant de l’amélioration du bien-être des immigrés que de la hausse de la productivité : depuis quelques décennies, les gains initiaux des immigrants sont en forte baisse par rapport à leurs homologues natifs, même si, en moyenne, les immigrants ont un niveau d’études supérieur. La relative faiblesse de la productivité et des gains des immigrants explique pourquoi les études d’impact de l’immigration sur le PIB par habitant ne parviennent généralement pas à trouver de retombées positives. Le Canada a réagi en modifiant sa politique d’immigration au fil des ans, de manière à sélectionner les immigrants en fonction de leurs perspectives de gains. Il a également créé divers programmes d’établissement et initiatives pour faciliter l’intégration, mais pourrait obtenir de meilleurs résultats en transférant les ressources des moins performants d’entre eux vers les plus fructueux.
Outre la productivité, les diverses retombées économiques de l’immigration et ses conséquences sociales suscitent elles aussi des espoirs et des craintes, sans qu’aucune ne s’avère bien importante. Certains voient en l’immigration une solution au problème du vieillissement de la population canadienne. Toutefois, même un taux d’immigration doublé n’aurait qu’une influence insignifiante sur les proportions respectives de la population d’âge actif et de la population âgée. En même temps, les incidences sur les budgets publics sont modestes à long terme et limitées aux horizons plus rapprochés. Une documentation abondante au sujet des effets de l’immigration sur les salaires des travailleurs nés dans le pays a vu le jour. Bien qu’elle ne soit pas irréfutable, cette documentation constate elle aussi généralement que ces effets sont minimes. De surcroît, l’immigration ne semble pas avoir fragilisé la cohésion sociale au Canada, contrairement à de nombreux autres pays (Picot, 2013[3]).
Après un examen des grandes lignes de la politique migratoire canadienne et de ses retombées démographiques, ce chapitre s’intéresse à l’influence de l’immigration sur le PIB par habitant, sur les salaires des travailleurs nés dans le pays et sur les budgets publics. Les causes de la baisse à long terme des gains des immigrants par rapport à ceux des travailleurs nés dans le pays d’accueil sont abordées dans la deuxième section, suivie d’un examen des mesures susceptibles d’aboutir à une meilleure intégration des immigrants dans le marché du travail, en deux volets : la sélection d’immigrants en fonction de leurs perspectives professionnelles et l’amélioration de l’intégration des immigrants déjà établis au Canada.
Le Canada pratique une politique d’immigration contrôlée
Le Canada suit un modèle d’immigration contrôlée, offrant diverses voies légales aux personnes souhaitant venir vivre dans le pays. Les cibles annuelles d’admissions de résidents sont fixées en fonction de la répartition et du rythme de l’immigration les plus susceptibles de contribuer au bien-être économique et social. Le 1er novembre de chaque année, au plus tard, le ministre chargé de l’immigration doit présenter devant le Parlement un plan exposant les diverses fourchettes d’admissions de résidents permanents visées l’année suivante, globalement et pour chacune des catégories : immigration économique, regroupement familial, personnes protégées et réfugiés. Dans le plan pour 2018, la cible d’admissions est de 310 000 (0.84 % de la population), à 20 000 près, soit légèrement plus qu’en 2016 (296 352) et 2017 (300 000) et 19 % de plus que le contingent moyen sur la période 2006-15 (257 000) (tableau 2.1). Cette cible passera à 340 000 en 2020. La catégorie de l’immigration économique absorbe 57 % des admissions prévues en 2018 (dont deux tiers sont les conjoints et les enfants à charge des demandeurs principaux), celle du regroupement familial en absorbe 28 % (parce qu’il s’agit majoritairement des conjoints et enfants de résidents, qui sont normalement en droit d’immigrer, cette cible est davantage un exercice de prévision de la demande), et celle des réfugiés et des immigrants humanitaires 15 % (tableau 2.1). La proportion d’immigrants de la catégorie économique dans le total a sensiblement augmenté depuis le début des années 1990 et compte aujourd’hui parmi les plus larges des pays de l’OCDE (graphiques 2.1 et 2.2).
Les demandeurs principaux de la catégorie économique, sélectionnés pour leur niveau de compétences relativement élevé, ont tendance à enregistrer une productivité et des gains supérieurs à ceux de la catégorie du regroupement familial et à ceux des réfugiés admis. Ils contribuent donc, comme prévu, davantage au développement économique (graphique 2.3). La catégorie de l’immigration économique sert surtout aussi à répondre aux besoins d’effectifs des employeurs ou à combler les pénuries de main-d’œuvre locales et régionales. Cette immigration se fait principalement par la voie du Programme des candidats des provinces (PCP) (les principaux programmes d’immigration économique permanente sont résumés dans l’encadré 2.1). En règle générale, ces immigrants reçoivent une offre d’emploi avant leur arrivée au Canada. En 2014, leur devenir économique était plus favorable que celui des demandeurs principaux d’autres catégories d’immigration économique, pour les cohortes admises depuis dix ans ou moins, à l’exception des immigrants de la catégorie de l’expérience canadienne. La baisse des gains des demandeurs principaux au titre du PCP appartenant aux cohortes admises depuis plus de dix ans s’explique par les niveaux inférieurs de compétences et d’études des candidats des provinces pendant les premières années du programme.
Tableau 2.1. Niveaux d’immigration
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
|
---|---|---|---|---|---|---|
Admissions |
Cibles |
|||||
Économique |
||||||
Travailleurs très qualifiés (fédéral)1 |
68 795 |
59 999 |
73 700 |
74 900 |
81 400 |
88 000 |
Aides familiaux2 |
27 214 |
18 481 |
18 000 |
17 000 |
14 000 |
5 000 |
Programme des candidats des provinces |
44 535 |
46 169 |
51 000 |
55 000 |
61 000 |
67 800 |
Travailleurs qualifiés et gens d’affaires sélectionnés par le Québec3 |
28 787 |
30 492 |
29 300 |
28 900 |
32 500 |
32 500 |
Autres immigrants économiques4 |
1 036 |
867 |
500 |
1 700 |
2 700 |
2 500 |
Total – Immigration économique |
170 367 |
156 008 |
172 500 |
177 500 |
191 600 |
195 800 |
% du total |
62.7 |
52.6 |
57.5 |
57.3 |
58.1 |
57.6 |
Regroupement familial |
||||||
Époux, conjoints de fait, partenaires conjugaux et enfants |
49 996 |
60 944 |
64 000 |
66 000 |
68 000 |
70 000 |
Parents et grands-parents |
15 489 |
17 039 |
20 000 |
20 000 |
20 500 |
21 000 |
Total – Regroupement familial |
65 485 |
77 983 |
84 000 |
86 000 |
88 500 |
91 000 |
% du total |
24.1 |
26.3 |
28.0 |
27.7 |
26.8 |
26.8 |
Réfugiés et personnes protégées, humanitaire et autres |
35 969 |
62 361 |
43 500 |
46 500 |
49 900 |
53 200 |
% du total |
13.2 |
21.0 |
14.5 |
15.0 |
15.1 |
15.6 |
Total |
271 821 |
296 352 |
300 000 |
310 000 |
330 000 |
340 000 |
1. Comprend le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), le Programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral) et la catégorie de l’expérience canadienne.
2. Comprend les admissions au titre des catégories « garde d’enfants » et « soins aux personnes ayant des besoins médicaux élevés », des programmes pilotes ayant remplacé le Programme des aides familiaux résidants à la fin de 2014.
3. En vertu de l’Accord CanadaQuébec de 1991, le Québec a l’entière responsabilité de sélectionner les immigrants qui s’établiront sur son territoire, à l’exception des demandeurs au titre de la catégorie du regroupement familial et des demandeurs d’asile se trouvant au Canada.
4. Comprend le Programme pilote d’immigration au Canada atlantique et le Programme fédéral d’immigration des gens d’affaires.
Source : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, (2017), « Avis – Renseignements supplémentaires – Plan des niveaux d’immigration pour 2018-2020 » et « Canada’s Immigration System and the Points-based Approach for Human Capital ».
Encadré 2.1. Les principaux programmes d’immigration économique permanente1
Au niveau fédéral
Le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) (TQF). Les candidats sont sélectionnés pour leurs compétences, leur expérience professionnelle et leur capital humain. Des points sont attribués aux candidats selon des critères dont on sait qu’ils facilitent l’adaptation des individus à la vie professionnelle et sociale au Canada, notamment l’âge, la langue et le niveau d’études.
Le Programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral) (TMS). Les personnes ayant reçu une offre d’emploi ou possédant des qualifications canadiennes dans certains métiers spécialisés peuvent être admissibles à la résidence permanente si elles répondent aux critères de langue, de formation et d’expérience professionnelle dans un métier particulier.
La catégorie de l’expérience canadienne (CEC). Ce programme s’adresse aux candidats qui justifient d’au moins une année d’expérience professionnelle dans un métier spécialisé au Canada, et qui maîtrisent suffisamment une langue officielle pour rester au Canada en permanence. Il intéresse les diplômés internationaux d’établissements d’enseignement canadiens qui peuvent acquérir l’expérience professionnelle demandée grâce à un permis de travail post-diplôme.
Le Programme fédéral d’immigration des gens d’affaires (PIGA). Deux programmes acceptent actuellement les nouvelles demandes : le Programme de visa pour démarrage d’entreprise et le Programme d’immigration des travailleurs autonomes. Ils s’adressent aux personnes remplissant les critères d’expérience et capables d’apporter une contribution importante au Canada.
Aides familiaux. Les catégories « garde d’enfants » et « soins aux personnes ayant des besoins médicaux élevés » sont des programmes pilotes introduits à la fin de 2014 pour remplacer le Programme des aides familiaux résidants. Ils ouvrent l’accès à la résidence permanente aux aidants admissibles.
Au niveau provincial/territorial
Les travailleurs qualifiés sélectionnés par le Québec (TQQ) et le Programme d’immigration des gens d’affaires du Québec (PIGAQ). En vertu de l’Accord CanadaQuébec, le Québec a l’entière responsabilité de la sélection des immigrants (à l’exception des demandeurs au titre de la catégorie du regroupement familial et des demandeurs d’asile se trouvant au Canada), mais aussi de la prestation de services d’aide à l’intégration dans la province, moyennant une subvention annuelle du gouvernement fédéral.
Le Programme des candidats des provinces. Neuf provinces et deux des territoires administrent des programmes leur permettant de désigner des personnes pour la résidence permanente en fonction des besoins de la région, dont ceux des employeurs, mais aussi de leur potentiel d’intégration économique.
1. D’après les descriptions données dans IRCC (2017[1]).
Les autorités délivrent également des visas temporaires pour les ressortissants étrangers souhaitant venir étudier ou travailler au Canada pendant une période déterminée. Le nombre de permis d’études émis est monté en flèche ces dernières années (graphique 2.4, partie A). Les filières STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques), qui peuvent favoriser l’innovation si les étudiants internationaux qui les choisissent occupent ensuite des postes dans ces mêmes domaines au Canada, comptent pour 31 % des inscriptions d’étudiants internationaux. Les travailleurs étrangers temporaires peuvent être admis au Canada au titre soit du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), soit du Programme de mobilité internationale (PMI) pour les travailleurs plus qualifiés. Les employeurs peuvent embaucher des travailleurs étrangers au titre du PTET en l’absence de Canadiens qualifiés. Le manque de travailleurs locaux qualifiés doit être confirmé par une Étude d’impact sur le marché du travail (EIMT). Les travailleurs admis au titre du PTET ne peuvent pas changer d’employeur, tandis que le PMI ne demande pas d’EIMT et n’oblige pas les travailleurs à rester auprès du même employeur. Le nombre de visas de travailleurs étrangers temporaires émis a lui aussi considérablement augmenté, signe de la progression du PMI, notamment pour l’emploi post-diplôme et Expérience internationale Canada, qui facilite la mobilité des jeunes adultes de 18 à 35 ans, des conjoints de travailleurs qualifiés et des étudiants (graphique 2.5).
L’immigration a des conséquences démographiques, mais ne résout pas le problème du vieillissement de la population
L’immigration est devenue la principale source de croissance démographique
Ces dernières décennies, le solde migratoire est devenu la principale source de croissance démographique au Canada (graphique 2.6). La proportion d’immigrants, c’est-à-dire de personnes nées à l’étranger, dans la population totale a augmenté d’un tiers depuis les années 1970 et atteint 21.9 % en 2016. Peu de pays de l’OCDE dépassent ce chiffre (graphique 2.7). Dans le scénario de référence de Statistique Canada, qui suppose un taux annuel d’immigration par millier d’habitants proche des taux récemment enregistrés (soit 8.3), l’immigration devient quasiment la seule source de croissance de la population au début des années 2030, et la proportion d’immigrants dans la population totale atteint 28.2 % en 2036.
L’immigration ralentit le vieillissement de la population, mais les effets sont limités
La population canadienne vieillit vite. Selon le scénario de référence de Statistique Canada, le nombre d’habitants de 65 ans ou plus devrait plus que doubler entre 2011 et 2036, tandis que la population d’âge actif ne connaîtrait qu’une croissance marginale (tableau 2.2). Dans ce scénario, le taux de dépendance économique des personnes âgées est presque multiplié par deux et le taux de dépendance économique global augmente de 30 %. Si le taux d’activité et la croissance de la productivité restaient inchangés, l’augmentation du taux global de dépendance entraînerait une baisse de la croissance annuelle moyenne du PIB par habitant d’un demi-point de pourcentage entre 2011 et 2036.
Tableau 2.2. Structure de la population par âge
2011 et scénario de référence de Statistique Canada pour 20361
Millions |
% de croissance 2011-36 |
|||
---|---|---|---|---|
Groupe d’âge |
2011 |
2036 |
Total |
Moyenne annuelle |
0-14 |
5.6 |
6.9 |
23.2 |
0.8 |
15-24 |
4.6 |
4.9 |
6.9 |
0.3 |
25-64 |
19.1 |
21.6 |
12.7 |
0.5 |
65+ |
4.9 |
10.4 |
111.3 |
3.0 |
Total |
34.3 |
43.8 |
27.8 |
1.0 |
Taux de dépendance économique des personnes âgées2 |
0.26 |
0.48 |
||
Taux global de dépendance3 |
0.79 |
1.03 |
1. Le scénario de référence combine un niveau d’immigration moyen de 8.3 immigrants pour 1 000 habitants, une émigration moyenne, un solde des résidents non permanents diminuant progressivement pour atteindre 0 en 2021, une fécondité moyenne de 1.67 enfant par femme et une croissance moyenne de l’espérance de vie.
2. La population de 65 ans ou plus divisée par la population de 25 à 64 ans.
3. La somme des populations de 0 à 24 ans et de 65 ans ou plus, divisée par la population de 25 à 64 ans.
Source : J.-D. Morency, É. Malenfant et S. MacIsaac (2017), « Immigration et diversité : projections de la population du Canada et de ses régions, 2011 à 2036 », produit no 91-551-X au catalogue de Statistique Canada.
L’immigration est indispensable à la croissance de la population d’âge actif au cours des prochaines décennies. Sans elle, le scénario de référence de Statistique Canada prévoit une diminution de 4.6 % de la population canadienne d’âge actif entre 2011 et 2036 (graphique 2.8). Avec l’immigration, le même scénario de référence prévoit une augmentation de 13 % de la population d’âge actif sur cette période, soit un taux annuel moyen de 0.5 % historiquement bas. En doublant le taux d’immigration du scénario à hypothèse basse (cinq immigrants par millier d’habitants), la croissance de la population d’âge actif passerait de 4 à 17 % pendant cette période.
Cependant, s’il est vrai que l’immigration contribue à ralentir le vieillissement de la population, ses effets sont limités sur la structure de la population par âge étant donné que les immigrants vieillissent eux aussi. Même doublé (de l’hypothèse basse à l’hypothèse haute), le taux d’immigration n’aurait qu’une incidence insignifiante sur les proportions de population d’âge actif et de population âgée, et partant sur le rapport de dépendance économique des personnes âgées pour les deux prochaines décennies (0.54 et 0.47 respectivement, dans les scénarios à hypothèse basse et hypothèse haute) (graphique 2.9). Cette incidence serait même plus limitée dans la durée, lorsque l’augmentation s’est répercutée sur tous les groupes d’âge. Dans le même ordre d’idée, Banerjee et Robson (2009[4]) constatent que même une très forte hausse de l’immigration et des filtres d’âge extrêmes pour sélectionner les jeunes immigrants ne parviendraient qu’à ralentir l’augmentation prochaine du taux de dépendance économique des personnes âgées du Canada. Quand l’immigration est employée pour contrôler ce taux de dépendance, les prévisions démographiques du Canada pour 2058 varient de 60 à plus de 200 millions.
L’immigration relève le nombre de diplômés universitaires, mais la proportion d’immigrants parmi eux n’augmentera pas beaucoup
L’immigration relève le niveau moyen de formation de la population canadienne. La part des individus de 25 à 54 ans ayant une formation universitaire est beaucoup plus élevée parmi les immigrants (47 % en 2016) que parmi la population née dans le pays (28 %), et l’écart s’est creusé avec le temps (graphique 2.10, partie A). La hausse rapide du niveau de formation universitaire des immigrants ne s’explique pas par la supériorité du niveau d’études des nouveaux arrivants – ces niveaux dépassent 50 % depuis de nombreuses années – mais plutôt par le remplacement des vagues précédentes, moins formées, par des vagues plus qualifiées depuis les années 1990 (partie B).
Au cours des deux prochaines décennies, les immigrants contribueront à l’augmentation de la part de la population active (de 25 à 64 ans) ayant fait des études supérieures ; cependant, leur part dans la main-d’œuvre très qualifiée ne devrait pas beaucoup évoluer en raison de la hausse prévue du niveau de formation universitaire de la population née dans le pays (graphique 2.11, partie A). En même temps, selon les prévisions, les immigrants devraient représenter une bien plus grande part de la population active sans formation universitaire, en conséquence du rétrécissement de la part de la population de souche canadienne dans cette catégorie (partie B). Les changements de taux d’immigration n’influent que très peu sur les deux séries de prévisions. Étant donné que davantage d’immigrants, en particulier d’immigrants récents, que d’individus nés dans le pays sont sous-employés (notamment dans le cas des postes à temps partiel) ou surdiplômés (individus très qualifiés occupant des postes peu qualifiés), il y a lieu de s’attendre à ce qu’ils constituent une part importante de la main-d’œuvre relativement peu qualifiée.
Les enfants d’immigrants réussissent bien leurs études. Leurs résultats au PISA sont au même niveau que ceux des enfants nés dans le pays, en tenant compte du milieu socio-économique, tandis que leurs scores sont inférieurs dans la plupart des autres pays (graphique 2.12). En moyenne, les Canadiens de deuxième génération possèdent un niveau d’études supérieur à leurs homologues canadiens de naissance, bien que des différences importantes soient constatées selon l’origine du ou des parents immigrants : les taux de diplômés universitaires sont particulièrement élevés parmi les enfants d’immigrants asiatiques et faibles dans le cas des enfants d’immigrants d’Amérique centrale, des Caraïbes et d’Europe méridionale, ainsi que de la minorité visible noire. On constate, par ailleurs, une mobilité éducative ascendante persistante des enfants d’immigrants issus des familles à faible niveau d’instruction. L’inclusion des Canadiens de deuxième génération dans la population immigrante accentuerait la hausse prévue de la contribution de l’immigration au niveau de formation supérieure du Canada.
L’immigration enrichit la diversité culturelle du Canada
Les origines migratoires ont radicalement changé au cours des dernières décennies, enrichissant la diversité culturelle du Canada. La majorité des immigrants admis avant 1980 étaient originaires d’Europe, tandis que ceux qui sont arrivés entre 2011 et 2016 venaient d’Asie (y compris du Moyen-Orient) (graphique 2.13). Si l’on suppose le maintien des parts enregistrées ces dernières années, il est à prévoir que la proportion de la population venue d’Asie continuera d’augmenter et que l’inverse se produira pour les immigrants originaires d’Europe (graphique 2.14). Ces tendances seront encore plus marquées à Toronto et Vancouver, où la part de la population née en Asie dans le scénario de référence de Statistique Canada devrait augmenter d’environ un tiers et passer à 33 % et 36 % respectivement à l’horizon 2036.
Les effets économiques de l’immigration globale sont modestes
Effets sur le PIB réel par habitant
En réponse à la recommandation du (Conseil consultatif en matière de croissance économique, 2016[5]) de porter l’immigration à 450 000 personnes à l’horizon 2021 et de maintenir cette part de la population constante, El-Assal et Fields (2017[6]) du Conference Board du Canada modélisent les effets économiques d’une telle hausse. Dans ce scénario de forte immigration, l’immigration est portée à 450 000 à l’horizon 2025 (toute date antérieure étant jugée logistiquement impossible) et maintenue à 1.1 % de la population par la suite. Ils modélisent également le scénario du statu quo, dans lequel l’immigration reste à son taux de 2016, soit 0.82 % de la population pour la période 2017-40, ainsi qu’un scénario d’immigration moyenne, dans lequel elle est lentement portée à 350 000 à l’horizon 2020, à 400 000 à l’horizon 2030 et à 450 000 à l’horizon 2040 (0.99 % de la population). Les auteurs supposent que 60 % des immigrants relèvent de la catégorie de l’immigration économique, 28 % de la catégorie du regroupement familial et 12 % de la catégorie des réfugiés, soit la composition moyenne sur la période 2006-15, et que les taux de rémunération et d’emploi des immigrants suivent la même évolution que lors de la période 1991-2014 : les taux de rémunération habituels des immigrants passent d’à peine 40 % de la moyenne canadienne au moment de l’admission à 83 % après 23 ans, les plus hauts salaires correspondant aux immigrants de la catégorie économique et les plus bas aux réfugiés. Les auteurs supposent de surcroît que les taux de rémunération sont liés à la productivité.
Malgré une légère atténuation du recul du nombre de travailleurs par retraité, les scénarios de plus forte immigration aboutissent à un PIB par habitant en 2040 légèrement inférieur par rapport au scénario du statu quo (tableau 2.3). Ce constat s’explique principalement par le fait que les gains des immigrants sont inférieurs à ceux du reste de la population canadienne. Cependant, les immigrants pourraient obtenir d’encore meilleurs résultats s’ils étaient mieux intégrés sur le marché du travail. Telle est la priorité, concluent El-Assal et Fields, et non pas la hausse du niveau d’immigration.
Tableau 2.3. Les retombées des trois scénarios d’immigration du Conference Board en 2040
Canada (fin de 2017) |
Scénario du statu quo |
Scénario d’immigration moyenne |
Scénario d’immigration élevée |
|
---|---|---|---|---|
Immigration (nombre) |
300 000 |
361 824 |
450 000 |
528 468 |
Population (nombre) |
37 079 264 |
44 290 842 |
45 624 736 |
47 929 010 |
PIB réel (millions de CAD de 2007) |
1 836 811 |
2 785 941 |
2 844 593 |
2 924 989 |
PIB réel par habitant (CAD de 2007) |
50 087 |
62 901 |
62 348 |
61 628 |
Différence de PIB réel par habitant par rapport au scénario du statu quo (CAD de 2007) |
n.d. |
n.d. |
-553 |
-1 273 |
Source : K. El-Assal et D. Fields (2017), 450 000 immigrants par année? L’intégration, un facteur déterminant de la croissance, Le Conference Board du Canada.
Un autre facteur, bien que moins important, explique la croissance plus faible du PIB par habitant dans les scénarios de forte immigration : le stock de capital ne suit pas la plus forte croissance de la population, d’où une intensité capitalistique et une productivité du travail légèrement inférieures. Il s’agit ici d’une caractéristique empirique de l’économie canadienne estimée par le Conference Board, que l’on retrouve néanmoins dans les corrélations internationales (Estevão, 2011[7]) et dans d’autres études canadiennes (Fougère, Harvey and Rainville, 2011[8]).
Le modèle du Conference Board, conforme aux textes économiques de manière plus générale, suppose des rendements d’échelle constants (si les facteurs de production sont doublés, la production est elle aussi doublée), à l’inverse de l’hypothèse de rendements d’échelle croissants (si les facteurs de production sont doublés, la production est plus que doublée), très répandue parmi le grand public et certains acteurs politiques. Dans la plus récente grande étude des retombées de l’immigration sur l’économie canadienne (Swan, 1991[9]), le Conseil économique du Canada affirme que, si l’économie a pu être caractérisée par des rendements d’échelle croissants au tout début du développement du Canada, les rendements d’échelle constants sont probablement plus proches de la réalité actuelle. Ce constat, selon le rapport, élimine une motivation économique fondamentale de l’immigration.
Dungan et al. (2013[10]) utilisent un modèle de prévision macroéconomique et concluent également qu’une hausse de l’immigration entraînerait une légère baisse du PIB par habitant étant donné la productivité inférieure des immigrants par rapport aux travailleurs nés dans le pays. Fougère et al. (2011[8]) constatent eux aussi une faible incidence négative sur le PIB du Canada par habitant, même dans le cas de l’immigration très qualifiée.
Ces études présentent des limites méthodologiques, dont la plus importante réside dans l’absence de prise en compte des effets de la deuxième génération. Pourtant, par rapport au reste de la population née dans le pays, les Canadiens de deuxième génération ont des niveaux d’études supérieurs et vivent plus souvent dans les grandes conurbations, dont les résidents bénéficient d’avantages salariaux appréciables. Par conséquent, leurs salaires moyens sont supérieurs même s’ils n’atteignent généralement pas ceux de leurs homologues de souche canadienne à caractéristiques égales (Aydemir and Sweetman, 2008[11]). Ces études ont un autre point faible en ce qu’elles supposent que le devenir professionnel des immigrants n’a pas progressé depuis un certain temps en dépit des réformes dans ce sens. Elles supposent en outre que la composition de l’immigration reste la même alors que les priorités du Canada pourraient changer. Les dépenses occasionnées par la hausse des niveaux d’immigration ne sont pas non plus prises en compte. Compte tenu de ces limites méthodologiques, l’impact des niveaux d’immigration sur le PIB par habitant est sans doute positif, même s’il demeure modeste. Il pourrait même être plus fort encore, et le niveau de revenu et de bien-être des immigrants pourrait être plus élevé encore, si l’on améliorait leur intégration sur le marché du travail.
Il est possible que les retombées de l’immigration sur le PIB par habitant soient plus positives qu’elles ne l’auraient été si la diversité des origines migratoires n’avait pas été enrichie. Alesina et al. (2016[12]) constatent un lien positif significatif entre la diversité (mesurée selon l’indice de concentration de Herfindahl-Hirschmann pour le pays de naissance) de (et issue de) l’immigration qualifiée (éducation universitaire) et le PIB par habitant dans les pays avancés. Ce lien n’est pas retrouvé dans les pays à faible revenu, ni pour la diversité des immigrants peu qualifiés dans les pays à revenu élevé. L’accroissement de la diversité des lieux de naissance des immigrants qualifiés d’un point de pourcentage est corrélé avec une hausse d’environ 2 % du PIB par habitant sur longue période. Les auteurs concluent que leurs résultats résistent à leurs tentatives de prise en compte d’une potentielle causalité inverse et d’une hétérogénéité non détectée des immigrants qualifiés.
Effets sur l’innovation
Bon nombre d’études américaines et européennes constatent que l’augmentation de l’immigration qualifiée, et plus particulièrement du nombre d’immigrants issus des filières STIM, a un effet positif significatif sur les dépôts de brevets. Pour Hunt et Gauthier-Loiselle (2010[13]), par exemple, il y a lieu de prévoir qu’une hausse d’un point de pourcentage de la part de la population américaine composée d’immigrants diplômés de l’enseignement supérieur relèvera le niveau de brevets déposés au niveau des États par habitant, de 9 à 18 %. Cet effet est considérablement plus prononcé que l’augmentation de 8 à 9 % suggérée par le taux de dépôt de brevets différentiel des immigrants observé dans les données au niveau individuel (un immigrant diplômé de l’enseignement supérieur contribue au moins deux fois plus aux dépôts de brevets que son homologue né dans le pays), laissant entrevoir des effets de débordement importants sur les taux de dépôt de brevets des Américains de naissance. La plus forte contribution des immigrants diplômés de l’enseignement supérieur aux dépôts de brevets par rapport à leurs homologues nés dans le pays n’a d’autre explication que la plus grande proportion d’immigrants diplômés en sciences et ingénierie.
Blit et al. (2017[14]) reprennent cette étude pour voir si les mêmes conclusions peuvent être tirées pour le Canada. Ils constatent que l’augmentation de la part d’immigrants diplômés de l’enseignement supérieur dans la population d’une grande ville n’a pas d’effet significatif sur les dépôts de brevets par habitant, même dans les filières STIM. En revanche, l’effet estimé des diplômés de l’enseignement supérieur canadiens de naissance sur les taux de dépôt de brevets est pratiquement le même que dans l’étude de Hunt et Gauthier-Loiselle, ce qui donne à penser que les effets moins prononcés des immigrants au Canada ne sont dus ni à une erreur de mesure, ni à une caractéristique intrinsèque de l’économie ou des secteurs innovants au Canada. Lorsque Blit et al. isolent les effets des immigrants diplômés de l’enseignement supérieur dans une filière STIM qui exercent actuellement un métier dans leur domaine d’études, ils constatent qu’ils sont beaucoup plus prononcés et statistiquement significatifs. Par conséquent, l’incidence limitée semble en grande partie traduire les proportions relativement faibles d’immigrants canadiens employés dans les domaines STIM, y compris parmi ceux qui ont suivi ces filières d’études.
La question cruciale se pose alors de savoir si les obstacles à l’emploi dans les secteurs STIM rencontrés par les immigrants canadiens diplômés de ces filières traduisent des différences de compétences et d’aptitudes ou bien des inefficiences du marché du travail dues à des problèmes d’information dans la recherche d’emploi, à la reconnaissance des diplômes étrangers ou à la discrimination raciale. Blit et al. relèvent une différence fondamentale entre les politiques d’immigration qualifiée des deux pays, à savoir que la grande majorité des immigrants qualifiés aux États-Unis sont admis avec un permis de travail temporaire et le parrainage d’un employeur (en particulier le visa H-1B), tandis que les immigrants qualifiés admis au Canada à titre de résidents permanents n’ont généralement pas encore de contrat de travail. Le système américain a cela d’avantageux que les immigrants ont un emploi immédiatement, mais aussi que seuls les plus aptes sont sélectionnés. En effet, les employeurs sont généralement très bien renseignés sur la productivité des travailleurs étrangers qu’ils parrainent, y compris sur des compétences dont le système de points ne tient pas compte. Blit et al. concluent qu’en insistant davantage sur la signature préalable de contrats de travail pour la sélection d’immigrants, une plus grande proportion d’immigrants diplômés des filières STIM trouveraient des emplois correspondants et contribueraient ainsi davantage à l’innovation.
Dans une étude plus récente, Blit et al. (2018[15]) constatent que les titulaires d’un doctorat dans une filière STIM qui immigrent au Canada et occupent un emploi correspondant contribuent de manière disproportionnée à l’innovation. Les caractéristiques de certaines minorités ethniques (notamment coréennes, japonaises et chinoises) au regard de la formation et de l’emploi – en particulier la proportion d’individus titulaires d’un doctorat dans une filière STIM et travaillant dans le même domaine – jouent pour beaucoup dans leurs taux supérieurs de dépôts de brevets. L’effet des titulaires de doctorat sur les taux de dépôts de brevets est presque entièrement dicté par ceux qui exercent un métier STIM.
Économies d’agglomération
La concentration de population dans les grandes villes et les pôles d’activité peut engendrer des économies d’agglomération et accroître ainsi la productivité (Glaeser, 2010[16]). Revers de la médaille, elle peut entraîner une hausse considérable des prix de l’immobilier et aggraver la congestion, comme dans le cas de Toronto et Vancouver. Les économies d’agglomération sont parfois dues au fait que la densité de population des grandes agglomérations urbaines réduit les dépenses de transport et donne lieu à des marchés du travail plus actifs dans lesquels les compétences spécialisées peuvent être mieux assorties aux emplois, multiplie les externalités de connaissances et diminue les asymétries d’information sur le marché du travail (Ciccone et al., 1996[17]) ; (Greenstone, Hornbeck and Moretti, 2010[18]). La répartition des immigrants du Canada a entraîné l’élargissement des grandes conurbations, où la population est la plus dense, plus que dans le reste du pays ; cet effet est plus particulièrement évident à Toronto et Vancouver (graphique 2.15, parties A et B).
Le flux continu d’immigrants très qualifiés vers les plus grandes agglomérations (graphique 2.15, parties C et D), encore plus prononcé que pour les immigrants en général, s’inscrit dans la logique des économies d’agglomération : ces entrées, au lieu de freiner les entrées ultérieures dans ces grandes villes – ce qui serait le cas si les travailleurs spécialisés venaient compléter des effectifs peu qualifiés ou d’autres facteurs de production fixes – pourraient même les renforcer. Dans bon nombre de métiers et de secteurs spécialisés, le mécanisme voulant que la productivité de chaque individu bénéficie des interactions avec d’autres travailleurs spécialisés employés dans des métiers et des secteurs comparables ou connexes, peut avoir un effet de renforcement (Jones, 1995[19]). Kerr et al. (2017[20]) observent que, dans de nombreuses études américaines, les immigrants très qualifiés dopent la productivité dans les grandes villes et les régions où ils sont concentrés. Ils constatent rarement des conséquences défavorables sur les salaires et l’emploi des travailleurs très qualifiés déjà en place. Ils notent que les effets d’agglomération relèvent beaucoup plus la rémunération des compétences dans certains pays que dans d’autres, et qu’ils engendrent des différences géographiques à l’intérieur d’un même pays.
Kerr et al. font ensuite ressortir que les échanges de services fournis par des travailleurs spécialisés est au cœur du processus d’agglomération. Étant donné que le marché de ces services est international et non pas local, ils peuvent être extrapolés à très grande échelle et accroître ainsi la productivité. Les travailleurs en question partagent les connaissances techniques et les renseignements commerciaux sur leurs réseaux personnels et professionnels, rendus plus efficaces par la proximité physique. Qui plus est, des marchés du travail plus actifs facilitent une spécialisation plus poussée et accroissent ainsi la productivité. L’agglomération intensifie également la présence de facteurs de production et de services spécialisés complémentaires (conseils juridiques, etc.).
Effets sur les échanges
L’immigration ne semble pas avoir une grande influence sur l’intensité des échanges, autre mécanisme potentiel par lequel elle pourrait accroître la productivité. Head et Ries (1998[21]) constatent un lien entre une hausse de l’immigration de 10 % et une hausse de 1 % des exportations canadiennes à destination du pays d’origine de l’immigrant, et de 3 % des importations en provenance de ce pays. Ils concluent en outre que les immigrants qui ont le statut de travailleurs autonomes influent le plus sur les échanges, tandis que l’inverse est vrai pour ceux de la catégorie des entrepreneurs (à l’exception des réfugiés). Des résultats semblables sont observés au niveau provincial (Wagner, Head and Ries, 2002[22]). Partridge et Furtan (2008[23]) obtiennent des résultats similaires, mais constatent également que les nouveaux immigrants ont une influence presque immédiate sur les importations, alors qu’il faut compter au moins cinq ans pour que l’influence sur les exportations soit significative, et jusqu’à 20 ans pour qu’elle soit pleinement ressentie. Des résultats voisins sont observés dans d’autres pays développés (Peri and Requena-Silvente, 2010[24]). Il est à noter que ces résultats concernent les échanges de marchandises. Les échanges de services et les mouvements sur le marché des capitaux pourraient avoir des effets différents.
Effets sur le marché du travail
Les études canadiennes constatent généralement que l’immigration globale n’a aucun ou très peu d’effet négatif sur les taux de salaire des travailleurs canadiens, mais une incidence relativement plus forte sur ceux des autres immigrants (tableau 2.4). Cependant, à l’instar de la majorité des textes publiés dans ce domaine, ces études contiennent des estimations de paramètres qui sont souvent différents les uns des autres, qui ne sont pas comparables et qui peuvent parfois être difficiles à interpréter (encadré 2.2). Qui plus est, les hypothèses sur l’élasticité de la main-d’œuvre disponible et sur la concurrence des immigrants sont souvent irréalistes (il n’est notamment pas tenu compte des immigrants qui, à leur arrivée, prennent des emplois peu qualifiés ne correspondant pas à leur niveau d’études). Par exemple, les estimations d’Aydemir et Borjas (2007[25]) exagèrent l’effet négatif de l’immigration sur les salaires des travailleurs spécialisés nés dans le pays en faisant abstraction du déclassement. Pourtant, le déclassement est très répandu dans tous les pays, y compris au Canada. Par exemple, Frattini et Preston (2013[26]) mettent en évidence le déclassement des immigrants aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne.
Tableau 2.4. Études de l’incidence de l’immigration sur les salaires des travailleurs canadiens
Études canadiennes |
Conclusions |
---|---|
Aydemir et Borjas (2007[25]) |
|
Tu (2010[27]) |
Au niveau national, les grandes entrées d’immigrants qui ont fait suite au changement de politique à la fin des années 1980 n’ont pas eu d’incidences négatives, lors de la décennie suivante, sur les taux de croissance des salaires des travailleurs nés dans le pays. |
Fougère, Harvey et Rainville (2011[8]) |
Les taux de salaire de tous les travailleurs pourraient diminuer de 0.1 % en 2026 et de 0.2 % en 2034 si la proportion d’immigrants dans la population passe de 0.75 % à 1 % à cause d’un afflux supplémentaire d’immigrants très qualifiés. |
Hou et Picot (2014[28]) |
Une hausse de 10 % du niveau d’immigration est corrélée avec un recul de 0.8 % en moyenne du salaire initial des immigrants de sexe masculin, et de 0.3 % pour les femmes. |
Source : H. Zhang (2017), « Economic and Fiscal Impacts of Immigration: the Canadian Evidence », IRCC, Recherche et évaluation, octobre.
Encadré 2.2. Pourquoi les études de l’effet de l’immigration sur les salaires ne parviennent-elles pas aux mêmes conclusions ?
Dustmann, Schönberg et Stuhler (2016[29]) s’interrogent sur les raisons des résultats contradictoires d’études de l’impact de l’immigration sur les salaires partant du même modèle canonique, et tirent des enseignements sur la manière dont ces études devraient être configurées pour obtenir des estimations non biaisées de paramètres utiles pour l’action publique. Toutes partent d’un modèle d’équilibre combinant un ou plusieurs types de main-d’œuvre avec le capital dans une fonction de production à rendements d’échelle constants. Selon ce modèle, le développement de l’offre d’un certain type de main-d’œuvre entraînera la baisse des taux de salaire pour ce même type de main-d’œuvre née dans le pays, dans l’absolu et par rapport aux autres types de main-d’œuvre, mais aussi l’augmentation du produit marginal du capital. Ce modèle explique pourquoi tant de personnes pensent que l’immigration est préjudiciable aux individus dont les compétences se rapprochent le plus de celles des immigrants, mais bénéfique à ceux dont les compétences sont différentes et aux détenteurs de capital. À partir de variantes de ce modèle pour les États-Unis, Borjas (2003[30]) conclut que les salaires des travailleurs nés dans le pays pâtissent de l’immigration, alors que Card (2009[31]) ne constate que des conséquences négligeables et qu’Ottaviani et Peri (2012[32]) discernent des effets positifs. Pour le Canada, Aydemir et Borjas (2007[25]) concluent que l’immigration diminue les salaires moyens à court terme et que, bien qu’il n’y ait pas de retombées sur les salaires moyens à long terme si le stock de capital s’ajuste complètement en fonction de la hausse de l’offre de main-d’œuvre, l’immigration spécialisée pousse à la baisse les salaires des travailleurs spécialisés par rapport aux autres travailleurs nés dans le pays.
Les différentes stratégies empiriques employées dans ces publications aboutissent à des estimations de paramètres qui ne sont pas comparables. Borjas (2003[30]) et Aydemir et Borjas (2007[25]) exploitent les variations de flux d’immigrants dans les classes éducation/expérience au niveau national (« l’approche par classes de compétences au niveau national »), pour obtenir des estimations de l’effet relatif de l’immigration sur les salaires d’un groupe d’expérience par rapport à un autre au sein d’un groupe d’éducation. Card (2001[33]) utilise les variations des entrées d’immigrants par groupes d’éducation et par régions (une « approche mixte »), pour obtenir des estimations de l’effet relatif de l’immigration sur les salaires d’un groupe d’éducation par rapport à un autre. Altonji et Card (1991[34]) emploient quant à eux les variations des flux d’immigration totaux par région (une « approche purement spatiale »).
Les recherches dans ce domaine font généralement deux hypothèses de base irréalistes, qui biaisent les estimations obtenues selon « l’approche par classes de compétences au niveau national » et « l’approche mixte ». Premièrement, on suppose que l’élasticité de l’offre de main-d’œuvre est la même (souvent inélastique) pour tous les différents groupes nés dans le pays. Cela permet aux études de se baser sur les réactions de l’offre de main-d’œuvre. Or l’offre de main-d’œuvre a tendance à être élastique et son élasticité à varier selon les groupes. Dustmann et al. démontrent qu’avec les élasticités de main-d’œuvre particulières aux différents groupes, l’approche « par classes de compétences au niveau national » produit des estimations difficiles à interpréter, tandis que les deux autres approches s’interprètent encore clairement. Deuxièmement, les approches par classes de compétences au niveau national et mixte supposent qu’un immigrant et un natif à niveau d’études et d’expérience égal sont en concurrence. Cependant, de nombreuses données empiriques concourent à indiquer que les immigrants se déclassent à leur arrivée et acceptent des postes occupés par des travailleurs natifs moins qualifiés, qu’ils gagnent moins qu’un travailleur natif à qualification égale et au même âge. Dustmann et al. prouvent, pour les États-Unis, que le déclassement peut exagérer l’effet négatif de l’immigration dans l’approche par classes de compétences au niveau national et dans l’approche mixte. En revanche, les approches qui estiment les incidences totales de l’immigration, comme l’approche purement spatiale, résistent aux effets du déclassement, car elles ne demandent pas de classer les immigrants dans des groupes de compétences. Dustmann et al. font en outre observer que, en conséquence du déclassement, les études qui estiment les paramètres sous-jacents du modèle canonique, par exemple Ottaviano et Peri (2012[32]), sous-estiment l’élasticité de substitution entre immigrants et natifs, ce qui pourrait contribuer à expliquer pourquoi ces études ont tendance à constater des effets positifs sur les salaires.
Sur la foi de ce qui précède, Dustmann et al. recommandent d’étudier les effets du choc de l’immigration globale (par opposition à l’immigration par groupes) sur les salaires et sur l’emploi des divers groupes de natifs. Cette approche évite la classification erronée des immigrants causée par le déclassement et donne des paramètres d’un intérêt direct et aisément interprétables.
Dans une étude des effets de l’immigration sur les salaires au Royaume-Uni qui évite ces écueils, Dustmann et al. (2013[26]) placent les immigrants à leur position dans la répartition des salaires – non pas dans la répartition de la formation – et estiment les effets totaux (en prévoyant différentes réactions de l’offre de main-d’œuvre). Malgré le niveau d’études nettement supérieur des immigrants par rapport à la population née au Royaume-Uni, les auteurs constatent que l’immigration tire les salaires vers le bas, au-dessous du 20e centile, et contribue à une croissance salariale au-dessus du 40e centile. Ils observent en outre que les effets moyens de l’immigration sur les salaires moyens mesurés sont légèrement positifs. La possibilité que les salaires des immigrants soient inférieurs à leur produit marginal, à cause d’une inadéquation initiale ou d’un déclassement, pourrait expliquer une part importante du gain salarial moyen des natifs. Étant donné que la répartition des immigrants par niveau d’études est comparable au Royaume-Uni et au Canada, et que le déclassement est présent dans les deux pays, il y aurait lieu de s’attendre à des conclusions voisines – que l’immigration a un effet négatif sur la partie inférieure de la répartition des salaires, mais un effet positif sur la partie supérieure – si cette méthode était appliquée aux données canadiennes.
Combler les pénuries de compétences par l’immigration
Les pénuries de compétences se produisent quand la demande de travailleurs pour un métier, une industrie ou une aire géographique est supérieure à l’offre de travailleurs qualifiés au salaire normal. Dans une économie de marché, divers ajustements peuvent combler ces manques : hausse des salaires pour encourager plus de travailleurs à s’installer dans les zones où les pénuries sont les plus graves ; augmentation du nombre de personnes qui obtiennent la qualification nécessaire ; report du départ en retraite de certaines personnes dans ces métiers ; ajustement des techniques de production par les entreprises de manière à économiser sur la main-d’œuvre qualifiée. Une autre solution consiste à augmenter l’immigration de personnes qualifiées.
Picot (2013[3]) fait observer qu’aucune des principales méthodes permettant de cerner les pénuries de compétences causées par les inadéquations de l’offre et de la demande sur le marché du travail n’est très fiable. Bon nombre de ces pénuries sont à court terme, parce qu’elles sont observées au sommet du cycle conjoncturel ou parce que les ajustements dont il est question plus haut les ont éliminées. Les mesures de politique migratoire pour combler ces pénuries prennent parfois une tournure défavorable. À la fin des années 1990, le Canada a sélectionné un nombre important de professionnels de l’informatique et d’ingénieurs pour pallier les pénuries dans ces domaines, mais la bulle technologique a éclaté et les gains de ces immigrants ont été considérablement réduits. Bon nombre ont fini par émigrer. Pour Picot, de manière plus générale, l’immigration est mieux adaptée aux problèmes à long terme qu’aux besoins plus ou moins immédiats. Étant donné que les immigrants viennent normalement au Canada pour s’y installer indéfiniment, il importe plus qu’ils possèdent les compétences nécessaires pour s’adapter aux évolutions économiques dans la durée que pour pallier des pénuries à court terme. Quoi qu’il en soit, la situation prévue du marché du travail doit être (et est) prise en compte lors de la planification des besoins et des catégories d’immigration, afin de limiter le risque que le potentiel de gains des immigrants admis en période de repli de l’activité économique ne subisse un « effet de stigmate » à cause de mauvais résultats initiaux.
L’immigration n’est peut-être pas non plus une bonne solution pour réduire les pénuries de main-d’œuvre anticipées compte tenu des difficultés de projection posées. Les quelques modèles disponibles sont plus adaptés aux « professions qui ne sont pas sujettes à un changement technologique rapide, ou à des changements dans les préférences des consommateurs qui influent sur la main-d’œuvre selon l’industrie. Ce sont cependant souvent les métiers qui subissent en fait ce type d’évolutions structurelles qui se retrouvent en situation de pénurie. » (Picot, 2013, p. 10[3]). Les modèles de projection à long terme, comme celui du Système de projection des professions au Canada (SPPC), sont plus performants à un niveau général de compétences (ex. par niveau d’études). Le modèle du SPPC indique qu’aucune pénurie de compétences générales ne s’annonce au Canada, au moins jusqu’à 2020, mais qu’un surplus de travailleurs peu qualifiés est possible. Il laisse entrevoir que les emplois futurs exigeront de plus en plus un niveau d’études post-secondaire. Cela porte à croire que le parti pris en faveur des immigrants spécialisés dans la politique d’immigration est approprié.
L’incidence budgétaire nette
La plupart des études laissent entendre que l’incidence budgétaire nette de l’immigration, en tenant compte de l’impôt net des transferts, des dépenses de santé, des dépenses d’éducation et d’autres dépenses publiques, est modeste au Canada, tout comme dans la majorité des pays [ (OCDE, 2013[35]); (Picot, 2013[3]); (Kerr and Kerr, 2011[36])]. L’OCDE (2013[35]) estime un effet global négatif limité au Canada (tableau 2.5). À l’inverse du Canada, la contribution des systèmes de pension à l’incidence budgétaire nette est négative dans la plupart des pays parce qu’ils sont principalement financés par l’impôt. Ces estimations excluent une allocation pour les dépenses publiques collectives, qui aggravent l’incidence budgétaire nette de l’immigration de 0.6 % du PIB en moyenne dans les pays de l’OCDE disposant de données.
Tableau 2.5. Incidence budgétaire nette estimée des immigrants, moyenne de 2007-09
En pourcentage du PIB
|
Base |
Base - hors système de retraite |
Base – plus allocation individuelle de budgets dépensés collectivement (sauf défense et services de la dette) |
Base – plus allocation individuelle de budgets dépensés collectivement (sauf défense) |
---|---|---|---|---|
Australie |
0.00 |
0.82 |
.. |
.. |
Autriche |
0.12 |
0.89 |
-0.37 |
-0.80 |
Belgique |
0.76 |
0.96 |
0.06 |
-0.43 |
Canada |
-0.06 |
-0.06 |
.. |
.. |
République tchèque |
-0.01 |
0.07 |
-0.28 |
-0.31 |
Danemark |
0.11 |
0.23 |
-0.31 |
-0.39 |
Estonie |
0.49 |
1.15 |
.. |
.. |
Finlande |
0.16 |
0.02 |
-0.08 |
-0.13 |
France |
-0.52 |
0.30 |
-0.52 |
-0.84 |
Allemagne |
-1.13 |
0.21 |
-1.93 |
-2.32 |
Grèce |
0.98 |
0.86 |
.. |
.. |
Hongrie |
0.08 |
0.12 |
-0.11 |
-0.18 |
Islande |
0.90 |
0.96 |
.. |
.. |
Irlande |
-0.23 |
-0.39 |
-1.23 |
-1.41 |
Italie |
0.98 |
0.91 |
0.97 |
0.61 |
Luxembourg |
2.02 |
2.20 |
0.37 |
0.24 |
Pays-Bas |
0.40 |
0.74 |
-0.01 |
-0.14 |
Norvège |
0.42 |
0.50 |
0.60 |
0.49 |
Pologne |
-0.32 |
0.01 |
-0.42 |
-0.45 |
Portugal |
0.52 |
0.56 |
0.27 |
0.13 |
République slovaque |
-0.06 |
0.04 |
-0.16 |
-0.18 |
Slovénie |
0.76 |
1.00 |
.. |
.. |
Espagne |
0.54 |
0.21 |
0.07 |
-0.05 |
Suède |
0.20 |
0.62 |
-0.37 |
-0.57 |
Suisse |
1.95 |
2.00 |
1.42 |
1.16 |
Royaume-Uni |
0.46 |
1.02 |
-0.01 |
-0.26 |
États-Unis |
0.03 |
-0.51 |
-0.64 |
-1.00 |
Moyenne |
0.35 |
0.57 |
||
Moyenne (2) |
0.30 |
0.49 |
-0.12 |
-0.31 |
Note : La moyenne (2) prend en compte les pays pour lesquels l’allocation individuelle de budgets dépensés collectivement était disponible.
Source : OCDE (2013), Perspectives des migrations internationales 2013, Éditions OCDE, Paris.
En tant que groupe, les immigrants apportent des contributions budgétaires directes nettes (désignant par là l’impôt sur le revenu versé, diminué des transferts publics reçus), bien qu’inférieures à la moyenne canadienne pour les cohortes admises depuis 24 ans ou moins (graphique 2.16). Les contributions budgétaires nettes directes des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique sont nettement supérieures à la fois à celles des autres immigrants et à la moyenne canadienne. Plus ils restent longtemps au Canada, plus les contributions budgétaires directes nettes des immigrants se rapprochent de la moyenne canadienne, bien que la convergence à la baisse des dernières années pour les immigrants spécialisés soit exagérée par l’effondrement, au début des années 2000, du secteur informatique dans lequel bon nombre d’entre eux travaillaient. Globalement, les immigrants représentent des dépenses publiques de santé par habitant plus élevées, en raison principalement d’une plus forte proportion de personnes âgées par rapport au reste de la population canadienne. La différence est toutefois marginale lorsque les chiffres regroupent les immigrants et leurs enfants (graphique 2.17).
Compte tenu des effets limités de l’immigration sur le taux global de dépendance et des différences modestes de contributions budgétaires directes nettes entre les immigrants et les autochtones, l’augmentation des niveaux d’immigration a peu de chances d’atténuer la prochaine détérioration des finances publiques causée par le vieillissement de la population. Il serait beaucoup plus efficace d’actionner d’autres leviers, par exemple d’encourager le report du départ en retraite. Cependant, l’augmentation de la proportion d’immigrants jeunes et qualifiés rendrait l’incidence budgétaire de l’immigration plus favorable.
La Commission australienne de la productivité a décelé un problème (2016[37]) qui concerne sans aucun doute aussi le Canada, à savoir le coût budgétaire net élevé de l’immigration des parents de résidents (par opposition aux super visas, qui leur permettent de vivre au Canada sans accès à l’assurance santé publique et aux transferts sociaux). Ces immigrants ont tendance à peu s’intégrer sur le marché du travail en raison de leur âge et, dans de nombreux cas, de leur niveau insuffisant de français ou d’anglais. Ils sont aussi à un stade de leur vie où ils sollicitent beaucoup les systèmes d’encadrement des personnes âgées, de soins de santé et de sécurité sociale, dont le coût est assumé par le contribuable. Malheureusement, les informations sur ces coûts ne sont pas librement accessibles. La Commission de la productivité estime le coût budgétaire global sur toute la vie (valeur nette actuelle) d’un parent titulaire de visa en 2015/16 à 335 000/410 000 AUD par adulte, soit 2.6 à 3.2 milliards AUD pour les 8 700 parents d’immigrants en Australie. Ce même calcul devrait être effectué pour le Canada.
Les immigrants sont de moins en moins intégrés sur le marché du travail
Leur devenir professionnel a empiré par rapport à celui des travailleurs nés dans le pays
Les taux d’emploi et de chômage des immigrants se sont détériorés entre les années 1970 et le début des années 2000. Par rapport aux taux d’emploi et de chômage des autochtones, ceux des immigrants ont baissé jusqu’au début des années 1990, puis ont quelque peu rebondi vers 2001-05 (tableau 2.6). Au niveau individuel, ces résultats progressent avec la durée de séjour au Canada, bien qu’à un moindre degré pour les femmes que pour les hommes. Les taux d’emploi et de chômage relatifs globaux ont diminué pendant la crise financière mondiale, ce qui est normal en période de repli de l’activité économique, puis en 2016, ils ont remonté à peu près au même niveau que dix ans auparavant (graphique 2.18, parties A et C). Les taux d’emploi et de chômage restent respectivement inférieurs et supérieurs pour les immigrants récents (graphique 2.18, parties B et D) par rapport aux immigrants établis de longue date, mais l’écart s’est resserré. Les tendances sont plus ou moins identiques pour tous les niveaux d’études. Il ressort de cette évolution que les modifications des politiques migratoires pour donner plus de poids aux facteurs déterminants de l’intégration sur le marché du travail ont porté leurs fruits (voir ci-après).
Tableau 2.6. Devenir professionnel des immigrants par rapport à celui des travailleurs nés dans le pays, par cohorte d’admission et nombre d’années depuis l’admission
Nombre d’années au Canada |
|||||
---|---|---|---|---|---|
≤ 5 |
6-10 |
11-15 |
16-20 |
≤ 20 |
|
a) Taux d’emploi par rapport à celui des travailleurs nés dans le pays |
|||||
Femmes |
|||||
1976-80 |
1.09 |
1.11 |
1.08 |
1.05 |
0.94 |
1981-85 |
0.96 |
0.99 |
0.98 |
1.03 |
0.93 |
1986-90 |
0.88 |
0.90 |
0.99 |
1.01 |
|
1991-95 |
0.73 |
0.90 |
0.95 |
||
1996-2000 |
0.77 |
0.91 |
|||
2001-05 |
0.79 |
||||
Hommes |
|||||
1976-80 |
1.03 |
1.06 |
1.06 |
1.05 |
0.99 |
1981-85 |
0.97 |
1.02 |
1.03 |
1.05 |
0.99 |
1986-90 |
0.91 |
0.98 |
1.04 |
1.05 |
|
1991-95 |
0.87 |
1.00 |
1.03 |
||
1996-2000 |
0.93 |
1.03 |
|||
2001-05 |
0.97 |
||||
b) Taux de chômage par rapport à celui des travailleurs nés dans le pays |
|||||
Femmes |
|||||
1976-80 |
1.15 |
1.05 |
1.10 |
1.08 |
0.82 |
1981-85 |
1.40 |
1.40 |
1.30 |
1.08 |
0.90 |
1986-90 |
1.87 |
1.68 |
1.24 |
1.17 |
|
1991-95 |
2.37 |
1.54 |
1.45 |
||
1996-2000 |
2.42 |
1.66 |
|||
2001-05 |
2.62 |
||||
Hommes |
|||||
1976-80 |
0.84 |
0.85 |
0.92 |
0.82 |
0.67 |
1981-85 |
1.27 |
1.14 |
0.96 |
0.77 |
0.75 |
1986-90 |
1.73 |
1.20 |
0.89 |
0.88 |
|
1991-95 |
1.68 |
1.06 |
0.95 |
||
1996-2000 |
1.55 |
1.05 |
|||
2001-05 |
1.60 |
Source : G. Picot et A. Sweetman (2011), « Skillnaden I sysselsättningsgapet mellan Kanada och Sverige », in P.Hojem et M. Ãdahl (dir. pub.), Kanadamodellen: Hur invandring leder till job, FORES, Stockholm.
Les gains des immigrants ont chuté par rapport à ceux des travailleurs nés dans le pays
Les gains initiaux des immigrants (la moyenne des deux premières années complètes au Canada) ont baissé pour les hommes depuis quelques décennies, mais ils ont légèrement augmenté pour les femmes (graphique 2.19). De nature très cyclique, ils ont dégringolé lors des récessions du début des années 1980, 1990 et 2000, bien que la chute du début des années 2000 ait été plus en rapport avec l’éclatement de la bulle technologique qu’avec la récession, qui fut alors modérée (Picot and Hou, 2009[38]). Si l’on observe des périodes à un stade comparable du cycle conjoncturel, les gains initiaux des immigrants de sexe masculin ont diminué de 9 à 10 % entre les cohortes de 1981 et de 1988, mais ceux des femmes ont augmenté de 14 à 19 %. Depuis, ils ont été stables pour les deux sexes (tableau 2.7). Tandis que les gains du groupe de référence constitué de Canadiens de naissance et d’immigrants admis depuis 10 ans ou plus (9 ans ou plus pour la cohorte de 1988 et 2 ans ou plus pour celle de 1981) n’ont cessé d’augmenter sur toute la période, les gains initiaux par rapport à ceux du groupe de référence ont accusé une chute brutale entre les cohortes d’immigrants de 1981 et de 2010, de 23 à 25 % pour les hommes et de 22 à 24 % pour les femmes.
Tableau 2.7. Revenus initiaux annuels des nouveaux immigrants, et revenus initiaux annuels comparativement à ceux du groupe de référence
Cohorte d’établissement |
|||||
---|---|---|---|---|---|
1981 |
1988 |
1999 |
2006 |
2010 |
|
En dollars constants de 2011 |
|||||
Revenus initiaux |
|||||
Ensemble des nouveaux immigrants |
|||||
Hommes |
38 200 |
34 600 |
34 300 |
33 400 |
34 300 |
Femmes |
18 900 |
21 500 |
20 100 |
20 700 |
21 800 |
Demandeurs principaux, catégorie de l’immigration économique |
|||||
Hommes |
47 800 |
43 100 |
41 400 |
41 100 |
42 100 |
Femmes |
25 200 |
30 000 |
29 000 |
29 200 |
27 900 |
Ratio |
|||||
Revenus initiaux par rapport au groupe de référence |
|||||
Ensemble des nouveaux immigrants |
|||||
Hommes |
0.74 |
0.64 |
0.60 |
0.55 |
0.57 |
Femmes |
0.68 |
0.70 |
0.60 |
0.52 |
0.53 |
Demandeurs principaux, catégorie de l’immigration économique |
|||||
Hommes |
0.93 |
0.80 |
0.73 |
0.68 |
0.70 |
Femmes |
0.90 |
0.98 |
0.81 |
0.73 |
0.68 |
Note : Les nouveaux immigrants comprennent ici les personnes âgées de 20 à 54 ans au moment de l’admission et dont les revenus ont été positifs durant au moins une de leurs deux premières années complètes au Canada. Les revenus initiaux sont les revenus annuels moyens lors des deux premières années complètes passées au Canada, arrondis au plus proche multiple de 100 CAD. Pour les cohortes de 1988, 1999, 2006 et 2010, le groupe de référence comprend les Canadiens de naissance et les immigrants établis au Canada depuis dix ans ou plus (neuf ans ou plus pour la cohorte de 1988). Dans le cas de la cohorte de 1981, le groupe de référence est constitué des Canadiens de naissance et des immigrants établis depuis deux ans ou plus. De ce fait, les revenus initiaux en proportion des revenus du groupe de référence sont quelque peu surestimés pour 1981 par rapport aux autres années.
Source : F. Hou et G. Picot (2016), « Évolution des caractéristiques des immigrants et de leurs revenus initiaux », produit no 11F0019M – no 374 au catalogue de Statistique Canada, à partir de la Base de données longitudinales sur l’immigration de Statistique Canada.
La baisse des gains initiaux des immigrants par rapport aux travailleurs nés dans le pays est plus importante et le niveau relatif de gains est inférieur si l’on tient compte de caractéristiques pertinentes comme l’éducation, l’âge et le lieu de résidence. C’est ainsi que Picot et Sweetman (2012[39]) constatent que les gains initiaux des immigrants de sexe masculin (gains moyens pendant les cinq premières années au Canada) sont passés de 85 % de ceux des Canadiens de naissance à la fin des années 1970, à environ 60 % au début des années 2000 (graphique 2.20). Des tendances comparables ont été observées pour les femmes. Comparativement, les gains non corrigés des hommes sont passés de 90 % à 72 % de ceux des Canadiens de naissance sur la même période. Tandis que les gains corrigés des immigrants se sont rapprochés de ceux des travailleurs nés dans le pays, à caractéristiques égales après 20 années pour la cohorte admise au Canada à la fin des années 1970, le point de départ pour les cohortes admises depuis le début des années 1990 était si bas que leurs gains ont peu de chances de rattraper ceux des Canadiens, à caractéristiques égales, pendant leur vie active.
De manière comparable, les gains des immigrants diplômés de l’enseignement supérieur ont diminué par rapport à ceux de leurs homologues nés dans le pays, au cours des 25 dernières années, qu’ils aient ou non suivi les filières STIM (Picot and Hou, 2018[40]). En tenant compte de la maîtrise d’une langue officielle et du statut de minorité visible, le manque à gagner entre les immigrants et les Canadiens ayant suivi une formation STIM est passé de 10 % en 1985 à 23 % en 2010, et de 15 % à 27 % pour ceux issus d’autres filières. Néanmoins, les immigrants des filières STIM occupant des emplois dans ces mêmes domaines ont obtenu de bien meilleurs résultats : le manque à gagner corrigé n’a augmenté que de 4 % en 1985 à 10 % en 2010 ; l’écart de leurs gains corrigés par rapport à ceux des immigrants issus des filières STIM occupant des postes dans d’autres domaines est passé de 8 % en 1985 à 18 % en 2010. Les immigrants issus des filières STIM semblent avoir le choix entre un poste STIM ou un poste de très mauvaise qualité. Le handicap salarial des immigrants issus des filières STIM qui ne travaillent pas dans ces mêmes domaines ne se retrouve pas chez les travailleurs autochtones dans une situation similaire : ces derniers ne sont pas déclassés et leurs compétences semblent être plus transférables.
La diminution des gains des immigrants est principalement due au changement de pays d’origine et à la baisse des niveaux d’anglais et de français
Pour pouvoir appliquer des politiques qui ambitionnent d’accroître les gains des immigrants, et donc leur contribution au bien-être économique, il est nécessaire de cerner la raison initiale de la détérioration de leurs revenus. La principale cause de la baisse des gains initiaux des immigrants de sexe masculin pendant les années 1970 et 1980 réside dans la diminution de la proportion d’immigrants des pays d’origine traditionnels (Europe occidentale et États-Unis) et dans l’augmentation de la proportion d’immigrants originaires d’Asie, d’Afrique et des Caraïbes (Hou and Picot, 2016[41]). Vient ensuite la détérioration des niveaux d’anglais ou de français, qui compte pour 37 à 43 % dans la réduction des gains. L’autre grande cause est l’évolution des catégories dont est constituée la population d’immigrants, c’est-à-dire la diminution de la part de demandeurs principaux dans la catégorie de l’immigration économique et l’augmentation de la part de réfugiés. Hou et Picot tiennent également compte de l’âge et du niveau d’études à la date d’admission, de la répartition géographique, du taux de chômage régional, et constatent qu’ils ont un effet positif sur les gains initiaux.
Les niveaux d’anglais et de français semblent avoir une incidence directe sur le devenir professionnel et influer sur le rendement des études formelles (Picot et Sweetman, 2012). Les immigrants qui maîtrisent une langue officielle bénéficient d’un plus haut rendement de la formation que ceux qui ont un faible niveau, pour lesquels ce rendement est nul [ (Bonikowska, Green and Riddell, 2008[42]) ; (Ferrer, Green and Riddell, 2006[43]); (Warman, Sweetman and Goldmann, 2015[44])]. Le rendement est particulièrement élevé pour ceux qui ont de plus hauts niveaux de formation (Goldmann, Sweetman and Warman, 2011[45]). Quand les niveaux d’anglais et de français sont pris en compte, aucune différence statistique n’est constatée entre les taux de rendement de la formation des immigrants et ceux des Canadiens de naissance (Ferrer, Green and Riddell, 2006[46]).
La détérioration s’explique par un autre facteur connexe : la diminution du rendement de l’expérience professionnelle acquise avant l’immigration, principalement dans les années 1980 et 1990 (Picot and Sweetman, 2012[39]). Cette expérience était récompensée jusqu’aux années 1970, comme elle l’est pour les Canadiens de naissance. Cependant, le rendement de l’expérience professionnelle à l’étranger est tombé à zéro au moment de la cohorte de 1990-94 pour tous les immigrants, à l’exception des hommes des pays d’origine traditionnels (Aydemir and Skuterud, 2005[47]). Aydemir et Skuterud concluent que, chez les immigrants récents, la baisse du rendement de l’expérience acquise à l’étranger compte pour environ un tiers de la diminution des gains initiaux.
Pour l’heure, rien n’explique cette baisse de la valeur, au Canada, de l’expérience professionnelle à l’étranger. Elle ne semble pas être attribuable au niveau plus faible des compétences cognitives acquises lors de l’expérience à l’étranger, car même quand elles sont prises en compte, les rendements tant de la formation que de l’expérience à l’étranger des immigrants sont inférieurs à ceux de la formation et de l’expérience acquises au Canada, par les immigrants ou les travailleurs nés au Canada (Bonikowska, Green and Riddell, 2008[42]). Autre hypothèse : les employeurs ont du mal à apprécier la valeur de l’expérience professionnelle (et des diplômes) acquise dans un autre contexte professionnel (éducatif) (Liebig and Huddleston, 2014[48]). Autre hypothèse encore : les employeurs sont moins enclins à évaluer l’expérience (et les années de scolarité) à l’étranger compte tenu de l’offre de travailleurs très qualifiés de plus en plus abondante au Canada, mais rien ne semble appuyer cette hypothèse.
Le déclin de gains initiaux des migrants pourrait également être le fait de la baisse subie par toutes les nouvelles cohortes de primo-demandeurs d’emploi, dont l’effet fut le plus prononcé au début des années 1980 et pour les hommes (Picot and Sweetman, 2012[39]). Il a coïncidé avec une augmentation de l’offre de main-d’œuvre en lien avec la démographie de la génération issue du baby-boom et la récession. Si ce facteur en était la cause, il ne fut que temporaire.
L’hétérogénéité des emplois semble elle aussi contribuer au manque à gagner des immigrants par rapport aux travailleurs nés dans le pays, si l’on tient compte de l’âge et du niveau d’études. Skuterud et Su (2012[49]) constatent que jusqu’à la moitié de ce manque à gagner peut être expliquée par la sous-représentation des immigrants aux postes de haute qualité. Cet écart semble témoigner de taux de transition vers des emplois de haute qualité relativement faibles et de taux de transition élevés dans l’autre sens. Les immigrants peinent à passer directement du chômage à des emplois de qualité, ainsi qu’à progresser d’un emploi médiocre à l’autre pour atteindre des postes de qualité. Qui plus est, les inégalités de qualité de l’emploi entre immigrants et travailleurs nés dans le pays ne s’atténuent pas en fonction du temps écoulé depuis l’admission.
Facteur souvent cité comme une cause de la baisse des gains initiaux, il est de plus en plus difficile de faire reconnaître les diplômes étrangers ou d’obtenir une équivalence canadienne. Le rendement des diplômes étrangers n’a toutefois que peu changé (Ferrer and Riddell, 2008[50]) si l’on fait abstraction de l’effondrement de la bulle technologique du début des années 2000, cause de la diminution du rendement de l’enseignement supérieur pour bon nombre d’immigrants (Picot and Hou, 2009[38]). Le rendement de l’enseignement préalable à l’immigration est inférieur pour les immigrants, mais il en a toujours été ainsi (Picot and Sweetman, 2012[39]). En effet, la reconnaissance des diplômes pose des difficultés dans les professions réglementées, qui sont aussi les professions exercées avant l’immigration de 15 % des immigrants de la catégorie économique.
Les gains des nouveaux immigrants diplômés de l’enseignement supérieur par rapport à ceux des travailleurs nés dans le pays, à qualification égale, ont beaucoup plus baissé au Canada qu’aux États-Unis au cours de la période 1980-2005 (Bonikowska, Hou and Picot, 2011[51]). Comparable dans les deux pays en 1980, l’avantage salarial des nouveaux immigrants diplômés de l’enseignement supérieur est considérablement plus élevé aux États-Unis vers l’an 2000. Plusieurs explications plausibles de cette différence se présentent, et qui demandent d’être approfondies :
Une moindre adéquation professionnelle au Canada qu’aux États-Unis : 42 % des immigrants récents au Canada occupent des postes demandant des qualifications inférieures à celles qu’ils possèdent, soit un écart de 19 points de pourcentage par rapport aux Canadiens. Aux États-Unis, la proportion d’immigrants déclassés est de 29 % et l’écart de quatre points de pourcentage.
L’augmentation plus rapide de l’offre d’immigrants très qualifiés au Canada : au cours des années 1990, la part de nouveaux immigrants adultes diplômés de l’enseignement supérieur a augmenté de 25 à 47 % au Canada, mais de 30 à 34 % seulement aux États-Unis.
La baisse des niveaux de langue plus prononcée au Canada qu’aux États-Unis, liée à la plus forte transition, au Canada, vers l’immigration en provenance de pays non traditionnels.
Les effets de sélection : un plus grand nombre d’immigrants aptes choisissent les États-Unis plutôt que le Canada parce que le rendement des compétences y est supérieur (Clarke, Ferrer, Skuterud, 2018) et les employeurs interviennent davantage dans la sélection des immigrants qualifiés.
L’éventuelle baisse de la qualité des diplômes universitaires des nouveaux immigrants peut être plus prononcée au Canada qu’aux États-Unis, compte tenu de la plus forte transition vers des régions d’origine non traditionnelles au Canada.
Les différences dans l’éventail de métiers des immigrants très qualifiés dans les deux pays.
L’écart entre les bas salaires des immigrants et ceux des travailleurs nés dans le pays s’est creusé
Sous l’effet de la détérioration de leurs résultats sur le plan professionnel au cours des dernières décennies, les immigrants sont de plus en plus nombreux à basculer dans une relative pauvreté alors que l’inverse se produit pour les Canadiens de naissance. Les taux de faible revenu (la part de la population dont le revenu disponible est inférieur aux seuils de faible revenu de Statistique Canada) des immigrants ont augmenté de 17 % en 1980, à 22 % en 2005, tandis que les mêmes taux pour les Canadiens ont diminué de 17 à 13 % (Picot and Sweetman, 2012[39]). Dans le droit fil de l’évolution des gains des immigrants, l’augmentation du taux de faible revenu était particulièrement prononcée pour ceux arrivés récemment et concentrée chez les immigrants des nouvelles régions d’origine ; le taux de faible revenu des immigrants des pays d’origine traditionnels a peu augmenté (Picot, Lu and Hou, 2009[52]).
Picot et Lu (2017[53]) constatent que les taux de faible revenu chronique (c’est-à-dire ayant duré au moins cinq années consécutives) des immigrants ont diminué entre 2000 et 2012, bien que moins pour les Canadiens et les immigrants admis au moins 21 ans plus tôt, ce qui a entraîné une hausse des taux de faible revenu chronique relatifs. Les taux de faible revenu chronique les plus élevés concernent les immigrants de 65 ans ou plus, surtout en termes relatifs. Les immigrants d’Asie (à l’exclusion des Philippines) enregistrent des taux de faible revenu chronique bien supérieurs à ceux originaires d’Europe du Nord-Ouest, des Philippines, d’Australie, de Nouvelle-Zélande et des États-Unis. La faible différence actuelle entre le taux de faible revenu chronique des immigrants récents et des plus anciens traduit les améliorations apportées à la sélection. Les taux de faible revenu chronique des immigrants, mais pas des Canadiens de naissance, sont les plus concentrés dans les trois plus grandes villes du Canada (Vancouver, Toronto et Montréal).
Les perspectives professionnelles des enfants d’immigrants à l’âge adulte sont moins favorables que celles des Canadiens, à niveau d’étude égal
Le fait que les Canadiens de première génération et demie et de deuxième génération (admis avant l’âge de 10 ans ou nés au Canada d’au moins un parent étranger, respectivement) sont en moyenne mieux rémunérés que leurs homologues de parents canadiens, est entièrement dû à leur niveau d’études supérieur et à leur plus grande tendance à vivre dans les grandes conurbations, et donc à bénéficier d’une prime au salaire élevée (Aydemir and Sweetman, 2008[11]). Ce constat exprime les résultats de toutes les principales catégories de minorité visible/région d’origine – les minorités non visibles ne subissent pas de handicap salarial lorsque le niveau d’études est pris en compte. Les écarts de gains corrigés sont particulièrement prononcés pour les enfants d’immigrants originaires d’Afrique, d’Asie du Sud-Est, d’Asie occidentale, des pays arabes ou d’Amérique latine. Qui plus est, ces écarts se creusent.
En 2011, les taux d’emploi des Canadiens de première génération et demie sont inférieurs à ceux de leurs homologues de parents canadiens, en dépit du niveau d’études supérieur de ces immigrants. La situation de 2001 était l’inverse, car ce groupe enregistrait alors les taux d’emploi supérieurs. Les hausses des taux d’emploi en fonction du niveau d’études sont plus modestes pour ce groupe que pour leurs homologues de parents canadiens. Lorsque les caractéristiques pertinentes sont prises en compte, les taux d’emploi des immigrants de deuxième génération originaires d’Asie occidentale/des pays arabes et d’Amérique latine diplômés de l’enseignement supérieur sont inférieurs de 26 et 18 points de pourcentage respectivement aux taux de leurs homologues de parents canadiens. Le sous-emploi (ceux qui travaillent moins d’heures qu’ils ne le souhaitent) et le déclassement (les individus très qualifiés qui occupent des postes peu qualifiés) sont également plus répandus parmi les Canadiens de première génération et demie que parmi leurs homologues nés de parents canadiens.
En 2011, les taux de chômage des Canadiens de première génération et demie de sexe masculin étaient inférieurs à ceux de leurs homologues nés de parents canadiens, étant donné leur niveau d’études supérieur. Toutefois, cet écart était moins prononcé qu’en 2001. Les taux de chômage des femmes étaient supérieurs en 2011 à ceux de leurs homologues de parents canadiens, soit l’inverse de la situation en 2001.
Une étude plus approfondie s’impose pour établir les causes des moins bons résultats des Canadiens de première génération et demie et de deuxième génération sur le marché du travail, par rapport à leurs pairs nés de parents canadiens, en tenant compte du niveau d’études et du lieu de résidence.
Mieux intégrer les immigrants sur le marché du travail
Sélectionner les immigrants plus susceptibles de s’intégrer
L’une des premières mesures prises pour faire face à la détérioration des résultats des immigrants sur le marché du travail a consisté à augmenter la proportion d’immigrants de la catégorie économique, de 40 % en 1993 à plus de 60 % à la fin des années 2000 (voir graphique 2.1 plus haut). Les critères de sélection applicables aux immigrants de la catégorie économique ont été également modifiés en faveur de ceux dont les caractéristiques vont de pair avec des gains supérieurs, notamment le niveau d’études, l’âge, le niveau de langue et la profession. La réforme du système de points en 2002 a tout changé. Avant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (2002) (LIPR), ce système avait pour but de sélectionner des immigrants dans les professions en situation de pénurie. Comme nous l’avons vu plus haut, ces pénuries sont difficiles à prévoir et ne durent parfois pas assez longtemps pour que les immigrants restent employés à des postes correspondant à leurs compétences. Par conséquent, trop de poids est donné aux retombées professionnelles à court terme par opposition aux retombées à long terme. La LIPR a modifié le système de points pour le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) qui repose désormais presque entièrement sur des facteurs de capital humain. La liste des professions en demande fut supprimée. Confronté à l’opposition des employeurs, le gouvernement fédéral a adopté une approche hybride en 2008, consistant à associer le système de points d’évaluation du capital humain avec des listes de professions, et donnant la priorité aux emplois réservés. Ces modifications ambitionnaient de répondre aux besoins économiques à long terme en attirant des immigrants dans des métiers spécialisés tout en satisfaisant les demandes du marché du travail à court terme.
Le système de points fut sensiblement durci en 2013. Une plus grande importance était accordée aux tests de langue normalisés et à la reconnaissance des diplômes obtenus avant la migration (selon le système australien). L’expérience professionnelle dans un métier admissible et un emploi réservé ou une place dans un programme de doctorat au Canada faisaient partie des facteurs qui pesaient le plus. Entre autres conséquences, cette réforme a abouti à une brusque augmentation de la proportion d’immigrants de la catégorie de l’expérience canadienne (CEC), dont les gains sont supérieurs à ceux des autres catégories (voir le graphique 2.3 plus haut).
La sélection des immigrants de la catégorie économique a été considérablement améliorée en 2015, avec l’entrée en vigueur de l’Entrée Express. Elle repose sur des systèmes analogues en Nouvelle-Zélande (depuis 2003) et en Australie (depuis 2012), et facilite la sélection des candidats à la résidence permanente qui ont la plus forte chance de réussite économique. L’Entrée Express est un système de gestion électronique des candidatures pour trois programmes d’immigration économique au niveau fédéral : le Programme des travailleurs qualifiés (TQF), le Programme des travailleurs de métiers spécialisés (TMS) et le Programme de la catégorie de l’expérience canadienne (CEC). Un système d’Entrée Express comparable est en place au Québec. Pour être admissible à l’Entrée Express, les candidats doivent remplir les critères d’au moins un de ces programmes. Une fois dans le fichier commun de l’Entrée Express, ils sont notés selon le système de classement global (SCG) d’après leur profil. Les points sont attribués en fonction de leur capital humain et d’autres facteurs. Seuls les candidats les mieux notés sont invités à déposer une demande de résidence permanente. Les demandeurs de résidence permanente devraient donc désormais avoir des niveaux de capital humain plus élevés, puisqu’auparavant, toutes les candidatures étaient traitées en fonction de leur ordre d’arrivée.
La refonte du système de points par le biais du SCG devrait aussi permettre de repérer les candidats qui ont les meilleures perspectives professionnelles à long terme. Elle est le fruit d’une collaboration avec Statistique Canada, basée sur les résultats économiques des immigrants. À chaque facteur de capital humain du SCG correspond une échelle de points pondérée en fonction des données sur les résultats. Pour les candidats qui n’ont pas été désignés par une province ou un territoire, 70 % du maximum de 875 points correspondent aux facteurs de capital humain (tableau 2.8).
Le niveau d’études, le niveau de la première langue officielle et l’âge (les immigrants jeunes ont plus d’expérience professionnelle canadienne potentielle, mieux récompensée que l’expérience professionnelle à l’étranger) sont les plus importants facteurs. La transférabilité des compétences dépend des interactions entre le niveau de la première langue officielle et le niveau d’études, l’expérience professionnelle canadienne et le niveau d’études, et l’expérience professionnelle à l’étranger et le niveau de la première langue officielle. Pour les demandeurs principaux mariés ou qui ont un conjoint de fait, jusqu’à 40 des 500 points possibles pour les facteurs de capital humain autres que la transférabilité des compétences sont basés sur le niveau d’études du conjoint ou du conjoint de fait, ses compétences dans la première langue officielle et son expérience professionnelle canadienne. Le reste des points possibles correspond à d’autres facteurs, dont la désignation par une province ou un territoire, pour laquelle l’intégralité des 600 points est attribuée et, pour les candidats qui ne sont pas désignés, une offre d’emploi, un diplôme de l’enseignement post-secondaire canadien, le niveau de français ou la présence d’un frère ou d’une sœur au Canada.
D’importantes modifications sont apportées aux critères du SCG en novembre 2016, dans le but d’améliorer les résultats économiques à long terme. La plus importante a consisté à réduire le nombre de points attribués à une offre d’emploi, de 600 à 200 pour les postes de cadre supérieur, et à 50 pour tous les autres métiers spécialisés. Il s’agit par là de trouver un meilleur équilibre entre l’adaptabilité aux besoins du marché du travail et le devenir professionnel des immigrants, mais aussi de mieux traduire la valeur empirique de l’emploi. Depuis cette réforme, davantage de candidats justifiant d’un niveau supérieur de compétences et d’études sont invités à déposer une demande de résidence permanente. L’éventail de professions s’améliore lui aussi : les cinq premières professions des demandeurs invités appartiennent à la plus haute catégorie de compétences (Classification nationale des professions A) et un plus grand nombre de candidats occupant des postes STIM sont invités. Après un niveau record de 78 % de candidats invités à déposer une demande de résidence permanente à la suite de l’introduction de l’Entrée Express, la proportion de candidats résidant au Canada est tombée à 50 % dans la première moitié de 2017. On pense que la diminution de la proportion de candidats résidant déjà au Canada se poursuivra à court terme, au fur et à mesure que plus de candidats admissibles au Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) de l’extérieur du Canada seront invités. En dépit des effets de l’Entrée Express sur les niveaux de compétences et la composition de l’immigration économique au Canada, cette tendance pourrait être désavantageuse pour la rémunération des immigrants, étant donné que ceux qui possèdent une expérience professionnelle préalable au Canada sont habituellement plus rémunérés que les autres (voir ci-après).
Le plus grand poids donné à un niveau avancé de maîtrise d’une langue officielle, à la fois directement et par les interactions avec le niveau d’études et l’expérience professionnelle à l’étranger, est très important pour améliorer le devenir professionnel des immigrants. Bon nombre d’études attestent de l’importance d’un bon niveau dans une langue officielle pour pouvoir traduire les diplômes et l’expérience professionnelle à l’étranger en gains. Par exemple, Warman, Sweetman et Goldmann (2015[44]) constatent que les gains augmentent avec le niveau d’anglais. Qui plus est, le rendement des diplômes de l’enseignement post-secondaire sont statistiquement significatifs uniquement pour ceux qui ont un très bon niveau d’anglais ou qui exercent la même profession qu’avant l’immigration. Au sujet des qualifications étrangères sous forme d’expérience professionnelle, Warman et al. constatent par ailleurs que seuls les immigrants qui exercent la même profession qu’avant l’immigration et qui ont un très bon niveau d’anglais bénéficient d’un rendement positif de leur expérience professionnelle potentielle exercée avant l’immigration (laquelle est en relation inverse avec l’âge à la date d’admission).
Ces changements devraient également permettre d’accroître les compétences des immigrants en matière de traitement de l’information puisqu’elles sont assurées sur le marché du travail (et dans l’évaluation PIAAC de l’OCDE) par la maîtrise d’une langue officielle. Il importe d’accroître ces compétences parce qu’elles sont récompensées sur le marché du travail par un rendement qui n’est pas inférieur pour les immigrants par rapport aux Canadiens (Bonikowska, Green and Riddell, 2008[42]). Elles sont moins fortes au Canada qu’en Australie et en Nouvelle-Zélande, pays qui appliquent des politiques d’immigration sélective analogues (tableau 2.9). La différence de résultats entre le Canada d’un côté, et l’Australie et la Nouvelle-Zélande de l’autre, témoigne principalement des moins bonnes notes obtenues par les immigrants qui ont appris la langue de l’évaluation PIAAC comme première ou deuxième langue quand ils étaient
Tableau 2.9. Niveau moyen d’alphabétisation selon l’étude PIAAC, par origine migratoire et langue, et quelques différences de score
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Nés dans le pays |
Nés à l’étranger |
Différence entre nés dans le pays et nés à l’étranger |
Nés dans le pays |
Nés à l’étranger |
Différence nés dans le pays/langue maternelle et nés à l’étranger/langue étrangère |
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Total |
Immigrants récents (dans le pays d’accueil depuis 5 ans ou moins) |
Immigrants établis (dans le pays d’accueil depuis plus de 5 ans) |
Nés dans le pays et langue maternelle |
Nés dans le pays et langue étrangère |
Nés à l’étranger et langue maternelle |
Nés à l’étranger et langue étrangère |
|||
Canada |
279.5 |
255.9 |
248.8 |
257.9 |
23.6 |
279.7 |
278.1 |
268.8 |
249.8 |
29.8 |
Australie |
284.0 |
271.3 |
m |
m |
12.7 |
284.4 |
274.6 |
287.7 |
255.0 |
29.4 |
Nouvelle-Zélande |
282.9 |
275.1 |
269.5 |
277.4 |
7.8 |
284.0 |
258.4 |
289.6 |
261.6 |
22.4 |
Moyenne de l’OCDE |
270.6 |
247.0 |
233.7 |
248.4 |
23.6 |
270.9 |
257.9 |
264.2 |
240.4 |
30.5 |
Canada-Australie |
|
-15.3 |
|
-4.7 |
3.4 |
-18.9 |
-5.2 |
|||
Canada-Nouvelle-Zélande |
|
-19.2 |
-20.7 |
-19.5 |
|
-4.3 |
19.7 |
-20.8 |
-11.8 |
|
Part d’immigrants parlant la langue autochtone |
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Canada |
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25.9 |
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Australie |
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41.8 |
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Nouvelle-Zélande |
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41.3 |
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Part Canada avec AUS |
257.8 |
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Part Canada avec NZL |
257.7 |
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Note : m signifie « manquant », c’est-à-dire que les données concernant les années depuis l’immigration ne sont pas disponibles pour l’Australie. « Langue maternelle » : si la première ou la deuxième langue apprise pendant l’enfance est la même que la langue de l’évaluation, et non pas si la langue a statut de langue officielle. « Langue étrangère » : si la première ou la deuxième langue apprise pendant l’enfance n’est pas la même que la langue de l’évaluation. Ainsi, dans certains cas, « langue étrangère » peut correspondre à des langues minoritaires dans lesquelles l’évaluation n’était pas administrée.
Source : OCDE, base de données de l’Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (2012, 2015).
enfants. Le Canada compte une bien plus forte proportion d’immigrants originaires d’Inde et des Philippines, dont bon nombre seraient classés comme locuteurs natifs de l’anglais par l’étude PIACC, comparativement à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande, qui affichent de bien plus grandes proportions d’immigrants originaires du Royaume-Uni et d’Afrique du Sud (et de Nouvelle-Zélande et d’Australie respectivement), où l’anglais est plus souvent la « langue maternelle », dont la définition est plus exigeante que celle employée dans l’étude PIAAC. Les immigrants de langue étrangère du Canada ont également des niveaux de compétence à l’écrit inférieurs à ceux de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, même si l’écart est moins prononcé. Les résultats de l’étude PIAAC sont meilleurs pour les immigrants au Canada sur un plan : les Canadiens de deuxième génération issus d’un milieu parlant une langue étrangère ont fondamentalement les mêmes notes que les locuteurs natifs, ce qui est loin d’être le cas en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans la plupart des autres pays de l’OCDE. Ils projettent une bonne image du système éducatif canadien, dans lequel le milieu socio-économique influe relativement peu sur les résultats au PISA.
S’il est vrai qu’une expérience professionnelle qualifiée au Canada (Classification nationale des professions O [postes de gestion], A [postes professionnels] et B [emplois techniques et spécialisés]) a plus de poids dans la sélection, comme en attestent les gains nettement supérieurs des immigrants qui en justifient par rapport aux autres (Sweetman and Warman, 2014[54]), la proportion d’immigrants économiques dans cette situation privilégiée a toujours été modeste : 16.9 % des hommes et 15.0 % des femmes de la catégorie de l’immigration économique justifiaient d’une expérience professionnelle qualifiée en 2005-06 (Hou and Bonikowska, 2016[55]). Pourtant, les gains des immigrants ayant une expérience professionnelle qualifiée au Canada sont beaucoup plus élevés. En effet, cette expérience est la principale source de l’avantage salarial des demandeurs principaux de la catégorie de l’expérience canadienne (CEC) sur les autres immigrants : la rémunération hebdomadaire des anciens étudiants internationaux n’est pas supérieure à celle des autres immigrants et leur rémunération horaire ne l’est que très légèrement. L’accès à l’immigration permanente par la voie du Programme des travailleurs étrangers temporaires qualifiés est particulièrement avantageux pour les immigrants d’origine non occidentale et ceux appartenant aux quintiles de revenus supérieurs. Sweetman et Warman (2014[54]) constatent en outre que les anciens travailleurs étrangers temporaires bénéficient d’un rendement positif de leurs années d’expérience professionnelle potentielle à l’étranger, contrairement aux autres immigrants récemment admis, pour qui le rendement est soit nul, soit négatif. Les résultats sont plus mitigés et plus modestes pour les femmes, mais ils restent positifs pour les deux catégories principales de CEC. Ainsi qu’il est observé plus haut, la proportion de candidats résidant au Canada invités par le système Entrée Express était de 50 % en 2017.
Hou et Bonikowska (2016[55]) constatent également que les immigrants justifiant d’une expérience professionnelle qualifiée préalable au Canada bénéficient d’un très grand avantage salarial sur ceux qui sont directement sélectionnés à l’étranger, que la comparaison repose sur l’année d’immigration ou sur l’année d’arrivée (cet avantage n’est pas simplement dû au fait que les travailleurs étrangers temporaires ont travaillé plus longtemps au Canada). Étant donné que moins d’un quart de l’avantage salarial de ces immigrants s’explique par leur plus haut niveau d’études, leur niveau d’anglais supérieur et leur plus forte proportion d’individus des pays d’origine traditionnels, les auteurs concluent que cet avantage est probablement en grande partie attribuable à la sélection institutionnelle sur le marché du travail, pour ce qui est du rôle des employeurs dans la sélection de travailleurs étrangers et du filtrage qui se produit par la suite sur le tas, ainsi qu’à l’auto-sélection parmi les immigrants qualifiés (ceux dont l’expérience en tant que travailleurs étrangers temporaires n’a pas été satisfaisante auront probablement quitté le pays). En revanche, les anciens étudiants internationaux sans expérience professionnelle qualifiée préalable au Canada ne bénéficient que d’un modeste avantage salarial par rapport aux immigrants sélectionnés directement de l’étranger ; cet avantage est entièrement attribuable à leur plus long séjour au Canada. Comme le constatent des études américaines, australiennes et canadiennes antérieures, le parcours éducatif dans le pays d’accueil ne donne pas lieu à un avantage salarial net sauf s’il est validé sur le marché du travail par un poste très qualifié après l’obtention d’un diplôme universitaire. Les immigrants qui ne possèdent qu’une expérience de travail peu qualifié préalable au Canada enregistrent les moins bons résultats, ce qui indique que les types de postes pour lesquels les immigrants potentiels sont sélectionnés dictent leur devenir professionnel à long terme.
Compte tenu de ces résultats, les perspectives de gains des immigrants de la catégorie économique pourraient être plus favorables si l’expérience professionnelle qualifiée au Canada avait encore plus de poids dans la sélection. En même temps, les points attribués pour une offre d’emploi qualifié devraient également dépendre de l’expérience professionnelle qualifiée au Canada, ce qui n’est actuellement pas le cas, étant donné qu’une offre d’emploi sans expérience préalable ne change pas beaucoup la rémunération initiale. De même, les points attribués pour les diplômes de l’enseignement post-secondaire canadiens, introduits en novembre 2016, devraient être subordonnés à une expérience professionnelle préalable au Canada car, sans elle, ces études n’offrent pas un avantage salarial net (ibid.). L’expérience professionnelle canadienne, en plus des diplômes canadiens, facilite la recherche d’emploi. Oreopoulos (2011[56]) observe qu’une licence canadienne ne modifie en rien les chances de décrocher un entretien d’embauche si le candidat ou la candidate possède déjà quatre à six ans d’expérience professionnelle au Canada.
Compte tenu des conclusions dont il est question plus haut, à savoir que les immigrants titulaires d’un doctorat dans une filière STIM et occupant un poste dans le même domaine contribuent de manière disproportionnée à l’innovation (Blit et al., 2018), il serait justifié, d’un point de vue économique, d’accroître le poids donné dans les notes du SCG à une offre d’emploi correspondant aux compétences des candidats titulaires d’un doctorat dans une filière STIM. Cela aurait comme principal avantage de mieux assortir les entreprises et les travailleurs, étant donné que les employeurs sont généralement bien informés sur la productivité des travailleurs étrangers qu’ils aimeraient embaucher, dont un grand nombre auront travaillé pour l’employeur en tant que travailleurs étrangers temporaires.
Sous réserve du perfectionnement des critères pour la reconnaissance des qualifications étrangères par les provinces, les résultats des personnes concernées pourraient également être améliorés si les procédures de sélection tenaient compte de l’écart entre les diplômes étrangers et les conditions d’inscription locales – ce qui est déjà le cas pour certaines professions réglementées avec l’évaluation des diplômes d’études – étant donné que les immigrants dont la profession avant l’immigration est réglementée au Canada bénéficient d’un avantage salarial important s’ils obtiennent un emploi dans cette même profession (Warman, Sweetman and Goldmann, 2015[44]; OCDE, 2016[57]).
Bien que l’Entrée Express soit censée être un système hybride déterminé en même temps par l’offre de migrants et la demande des employeurs, ces derniers l’ont jusqu’à présent moins utilisée que l’on aurait pu le prévoir pour recruter. Les retards de traitement des dossiers, la complexité des démarches administratives et le nombre réduit de points attribués pour une offre d’emploi depuis novembre 2016 (à l’exception des 20 % de demandeurs principaux de la catégorie PCP qui empruntent la voie de l’Entrée Express) expliquent éventuellement ce constat. Certains de ces obstacles ont été réduits. Le délai de traitement des dossiers n’est plus que de six mois, voire moins, dans la majorité des cas, depuis l’introduction de l’Entrée Express, les critères relatifs à l’offre d’emploi sont assouplis par l’introduction de l’exemption d’Étude d’impact sur le marché du travail dans certains cas, et l’offre d’emploi à durée indéterminée est ramenée à un minimum d’un an. Si le système actuel d’attribution de points pour une offre d’emploi continue d’améliorer sérieusement la probabilité d’une invitation à déposer une candidature, le fait de donner encore plus de poids aux candidats qui remplissent les critères d’expérience professionnelle et d’offre d’emploi, comme il est recommandé plus haut, pourrait également aiguiser l’intérêt des employeurs. Le système pourrait également être rendu plus intéressant aux yeux des employeurs en traitant en priorité les candidatures accompagnées d’une offre d’emploi adéquate, comme en Australie, et justifiant d’une expérience professionnelle qualifiée au Canada. Cette mesure a considérablement augmenté la proportion d’immigrants de la catégorie économique ayant une offre d’emploi adéquate en Australie ; elle a en outre contribué à l’amélioration du devenir professionnel des immigrants (van de Ven and Voitchovsky, 2015[58]). D’autres échanges de vues avec les employeurs doivent avoir lieu pour recenser les autres obstacles à l’utilisation afin de les réduire.
Les PCP, d’un autre côté, sont encore déterminés par la demande du marché du travail. Ils n’accordent toutefois pas une grande importance aux facteurs en lien avec la réussite professionnelle à long terme. Des problèmes peuvent se poser pour le reste du Canada quand la demande de compétences spécifiques satisfaite par un PCP s’assèche, comme dans le cas de l’Alberta après la chute des cours du pétrole en 2014. Les immigrants concernés vont chercher du travail ailleurs, mais n’ont pas forcément les compétences requises pour trouver des emplois à la hauteur de leurs qualifications. L’aiguillage des candidats au PCP vers l’Entrée Express permettrait de résoudre en partie ce problème en veillant à ce qu’un plus grand nombre d’entre eux possèdent aussi les niveaux élevés de capital humain nécessaires pour s’adapter facilement aux futurs chocs du marché du travail. Grâce à l’ajout récent d’un volet Entrée Express au Programme des candidats de l’Alberta, l’ensemble des provinces et territoires disposant d’un programme régional participent désormais au système Entrée Express ; il s’agit d’une évolution qu’il convient de saluer.
Améliorer l’efficacité des programmes d’établissement
Les administrations canadiennes financent tout un éventail de programmes pour aider les immigrants à développer leur capital humain et social, afin de bien s’intégrer dans la société canadienne. Les fonds proviennent en grande partie du gouvernement fédéral (945 millions CAD pour l’exercice budgétaire 2015-16). Certains des services d’établissement ainsi financés sont proposés avant l’arrivée, dans le but de bien informer les résidents permanents sélectionnés pour qu’ils puissent prendre des décisions éclairées sur leur nouvelle vie au Canada et mettre en route le processus d’installation ou de réinstallation depuis l’étranger, notamment se préparer à travailler au Canada. Ils comprennent les services d’évaluation des besoins et d’aiguillage, de renseignements et d’orientation, de contacts avec la communauté, et les services relatifs à l’emploi. Ces services sont également proposés aux nouveaux arrivants et aux immigrants admissibles au Canada (graphique 2.21, partie A). L’évaluation linguistique et les cours de langue font également partie des principaux services d’établissement. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) finance en outre divers services indirects et services d’aide (graphique 2.21, partie B), lesquels facilitent la participation aux programmes et favorisent les plans de partenariat communautaire.
Plus de 35 % des immigrants admis au cours des trois dernières années ont utilisé au moins un service d’établissement financé par IRCC dans l’année suivant leur admission (graphique 2.21, partie A). Plus d’un tiers d’entre eux se sont adressés à des services d’aide (graphique 2.21, partie B). Certains services sont beaucoup plus sollicités que d’autres et l’on ignore si ces tendances traduisent des différences de besoins, de disponibilité ou d’autres obstacles. IRCC a toutefois établi que l’éloignement des services par rapport au lieu de résidence des immigrants est un problème et prévoit de réorganiser l’offre de services à Vancouver dans un souci de proximité des immigrants. Certaines contraintes familiales et financières, qui pourraient obliger les immigrants à accepter des « emplois de survie », pourraient aussi expliquer la faible utilisation des services de cours de langue et des services liés à l’emploi par rapport à l’orientation et aux évaluations des besoins, lesquels demandent moins de temps. IRCC doit établir dans quelle mesure les schémas d’utilisation traduisent les besoins et réorienter les ressources si nécessaire. Il serait également utile de s’assurer que tous les nouveaux immigrants sont bien informés sur les services d’établissement disponibles et conseillés sur ceux qui leur seraient le plus utiles. Il pourrait être utile à cet égard de subventionner le développement d’une application qui centraliserait toutes les informations sur les services d’établissement, à l’exemple de la Finlande.
Les cours de langue sont en très grande partie financés par le programme Cours de langue pour les immigrants au Canada (CLIC). Il est gratuit et s’adresse aux résidents permanents dans leur province ou territoire qui n’ont pas la citoyenneté canadienne et qui ont dépassé l’âge minimum de fin de scolarité obligatoire. Les cours sont délivrés par diverses organisations sur l’ensemble du territoire canadien (en dehors du Québec). Il s’agit principalement d’établissements d’enseignement et d’associations sans but lucratif. Les clients peuvent choisir des cours à temps plein ou partiel, en présentiel ou en ligne, pendant la journée, le soir ou en fin de semaine. Les cours sont proposés pour tous les niveaux et couvrent les aspects de la vie au Canada, de la culture canadienne, de la vie civique, de la recherche d’emploi et de la communication transculturelle. Les programmes provinciaux et les programmes d’insertion professionnelle des adultes proposent également des cours de langue.
Le Programme d’établissement prévoit aussi des services de garde d’enfants pour faciliter l’accès aux services directs, y compris l’inscription des nouvelles arrivantes aux cours de langue. IRCC a considérablement investi dans la garde d’enfants pour les nouveaux arrivants et continue d’adapter ces aides au fur et à mesure de l’évolution du profil des intéressés. Les mères immigrantes ont toutefois eu des difficultés à obtenir des places dans les cours de langue et les services de garde d’enfants en même temps. Parce que les places en structure d’accueil des jeunes enfants sont indispensables pour profiter des cours de langue et autres services d’établissement, IRCC a assoupli les conditions en 2016-17, facilitant ainsi l’accès aux services d’établissement pour les réfugiées syriennes. Des ajustements temporaires ont permis de créer des places supplémentaires et de répondre aux besoins d’adultes avec beaucoup d’enfants en bas âge. En complément, les provinces et les territoires appliquent le Cadre multilatéral d’apprentissage et de garde des jeunes enfants de 2017. Certains d’entre eux, dans leurs plans d’investissement sur trois ans, font ressortir les mesures destinées à répondre aux besoins de garde d’enfants des familles immigrantes.
Les ressources pour les cours de langue n’ont pas augmenté suffisamment pour faire face à l’afflux de réfugiés syriens en 2015-16. Il a fallu réorienter des fonds destinés aux cours de langue d’autres immigrants, qui n’ont pas pu aller jusqu’au même niveau que par le passé. Les Niveaux de compétence linguistique canadiens (NCLC) pour lesquels l’aide est proposée – cinq pour les programmes non fédéraux, trois pour CLIC sur une échelle de 12 niveaux – ne sont pas suffisants pour favoriser une bonne intégration sur le marché du travail. À l’avenir, toute augmentation de la proportion d’immigrants n’ayant pas le niveau nécessaire dans une langue officielle doit être accompagnée de fonds supplémentaires suffisants pour éviter de rationner encore les cours de langues d’autres immigrants.
Sur les clients des cours de langue subventionnés par IRCC admis entre janvier 2014 et mars 2016, 57 % ont obtenu au moins un NCLC dans une ou plus des quatre compétences, dont 18 % dans les quatre compétences (compréhension orale, expression orale, compréhension écrite, expression écrite). Les immigrants de la catégorie économique ont eu besoin du moins grand nombre d’heures de cours en moyenne pour passer au NCLC supérieur, tandis que les parents/grands-parents (catégorie du regroupement familial) et les réfugiés ont eu besoin du plus grand nombre (graphique 2.22). Les cours en salle de classe ne sont pas toujours la meilleure option pour les personnes âgées. Lorsque d’autres services moins onéreux sont disponibles pour atteindre certains objectifs des clients, par exemple les services de contact avec la communauté pour les parents et grands-parents au lieu des cours de langue plus coûteux, l’élargissement de ces services et la réorientation des ressources économisées vers d’autres clients doivent être envisagés.
Les clients qui ont suivi une formation linguistique axée sur les professions ont le plus de chances d’améliorer leur niveau d’au moins un NCLC et demandent le moins d’heures de cours en moyenne, suivis par ceux qui choisissent les cours de préparation aux examens (graphique 2.23). Les catégories de cours de langue « Besoins du quotidien » et « Général/Tous les autres » enregistrent la plus faible proportion de clients progressant d’au moins un NCLC et demandent le plus d’heures de cours. L’influence de la sélection sur ces résultats est manifeste, mais IRCC devrait tout de même envisager d’augmenter les ressources réservées aux cours les plus performants afin de réduire les temps d’attente. Une réflexion s’impose également sur les moyens de restructurer les cours les moins performants pour améliorer les résultats, par exemple en les adaptant davantage aux besoins des clients. Une plus grande utilisation des cours en ligne, plus facilement adaptables aux besoins individuels que les cours conventionnels, pourrait être utile à cet égard. Plus généralement, les cours de langue doivent être mieux adaptés aux besoins particuliers des clients, y compris en ce qui concerne les formules proposées (salle de classe, cours du soir, internet, etc.). Une plus grande coordination entre les différents niveaux de l’administration est également nécessaire.
L’argument en faveur d’une plus grande concentration des ressources sur la formation linguistique axée sur les professions est d’autant plus valable que les gains potentiels sont considérables. Warman et al. (2015) observent des gains plus élevés chez les immigrants qui ont suivi des cours en préparation pour une profession réglementée au Canada, notamment dans le cas de ceux qui ont un niveau avancé d’anglais. L’avantage salarial est important s’ils exercent la même profession avant et après l’immigration. L’élargissement de l’accès à la formation linguistique axée sur les professions, généralement délivrée sous forme de cours du soir, pourrait être particulièrement avantageux pour les réfugiés qui ne peuvent pas retarder leur activité professionnelle pendant plusieurs années, le temps d’apprendre l’anglais pour répondre à leurs besoins quotidiens.
Les programmes de formation relais, qui combinent des cours de langue axés sur la profession de l’immigrant et les cours requis pour obtenir l’équivalence de leurs qualifications, ont facilité la reconnaissance des qualifications post-secondaires. Ces programmes sont le fruit d’une collaboration avec les professions et les métiers réglementés. Ils sont très importants dans le secteur de la santé, qui compte un grand nombre de professionnels immigrants, mais enregistre un taux élevé d’échec à l’examen pour l’obtention du permis d’exercer (60 %). S’ils étaient élargis, ces programmes de formation relais aideraient un plus grand nombre d’immigrants à travailler dans leurs domaines d’expertise et leur permettraient ainsi d’être plus productifs. Cet élargissement pourrait être en partie rentabilisé en améliorant les critères de reconnaissance et d’harmonisation des qualifications au niveau provincial afin de réduire les obstacles à la mobilité interprovinciale des immigrants dans les professions réglementées.
Les programmes de mentorat sont un moyen prometteur d’aider les immigrants à surmonter le problème de leur sous-représentation dans les emplois à rémunération élevée abordé plus haut (Skuterud and Su, 2012[49]). Ces programmes aident les travailleurs immigrants qualifiés actuellement en poste à rencontrer d’autres personnes dans leur profession, et sont susceptibles de les intégrer dans les réseaux de recherche d’emploi. Ils leur apportent des compétences linguistiques propres à la profession, ainsi que des compétences en littératie et interpersonnelles (y compris le travail d’équipe et la communication orale) adaptées au milieu professionnel canadien, ainsi que des informations sur la culture professionnelle et les attentes de l’employeur. Les programmes administrés par le Toronto Region Immigrant Employment Council (TRIEC) ont donné de particulièrement bons résultats : trois quarts des professionnels immigrants ont trouvé un emploi dans leur domaine en moins d’un an. Le succès de ce modèle lui a valu d’être repris dans d’autres grandes villes du Canada et d’Australie. Les programmes de mentorat rendent également les programmes de formation relais plus efficaces. Une réflexion s’impose sur les moyens de surmonter le principal obstacle à leur élargissement : trouver des personnes pouvant prendre le temps d’être mentors.
La Stratégie d’emploi ciblée pour les nouveaux arrivants, annoncée dans le budget 2017, ambitionne de faciliter la reconnaissance des qualifications étrangères et d’aider les immigrants à obtenir une expérience professionnelle dans leur secteur d’activité au Canada. Elle comprend : des services avant l’arrivée améliorés ; un programme de prêts pour aider à assumer les frais liés à la reconnaissance des qualifications ; de l’aide pour acquérir une première expérience de travail au Canada dans leur profession ou leur domaine de compétence. Plusieurs projets pilotes ont été engagés pour recueillir des données sur les meilleurs modes de collaboration avec les employeurs pour aider les immigrants à obtenir leur première expérience de travail au Canada dans leur profession ou dans leur domaine de compétence.
Pour réduire les obstacles injustifiés à l’obtention d’un permis d’exercer une profession réglementée auxquels se heurtent les immigrants, la création de plusieurs Bureaux de commissaire à l’équité (BCE) dans diverses provinces est une innovation utile. Le premier a vu le jour dans l’Ontario en 2006. Il y examine les règles d’obtention de permis d’exercer pour 40 professions réglementées, afin de s’assurer qu’elles sont transparentes, objectives, impartiales et équitables pour toute personne déposant une demande de permis. Le BCE de l’Ontario exige que les organismes de réglementation des professions examinent eux-mêmes leurs règles, rendent compte de ces examens et soient assujettis à des vérifications de la conformité. Ces vérifications permettent au Bureau de veiller à ce que les organismes de réglementation respectent leurs obligations. Sous la direction du BCE de l’Ontario, les obstacles inutiles qui barraient la route aux candidats ont été supprimés en simplifiant les procédures, en améliorant la communication ou en augmentant le soutien. Par exemple, les avocats formés à l’étranger ne sont plus obligés de faire un stage. Le BCE de l’Ontario a également prêté son soutien à des programmes qui aident les professionnels formés à l’étranger à compléter leurs acquis scolaires et professionnels pour pouvoir obtenir un permis d’exercer dans l’Ontario. Il a en outre publié un guide pour aider les organismes de réglementation à revoir leurs règles d’accès à leurs professions. Des organismes similaires ont été créés au Manitoba, au Québec et en Nouvelle-Écosse. Le Danemark, l’Australie et l’État de New York sont en contact avec le BCE de l’Ontario en vue d’établir eux-mêmes ce type de bureau à l’avenir.
Réduire la discrimination
La discrimination pourrait être une cause de moindres inférieurs pour les immigrants. Même en tenant compte de tous les facteurs non ethniques qui expliquent la rémunération, les immigrants, en particulier ceux qui ont fait des études universitaires, sont moins rémunérés que les Canadiens. Par exemple, Bonikowska et al. (2008) constatent que, bien que le niveau plus faible de compétences à l’écrit des immigrants diplômés de l’enseignement supérieur explique en partie l’écart salarial au Canada, un écart de 50 % persisterait chez les hommes si les compétences étaient relevées aux mêmes niveaux que les Canadiens. Certaines études trouvent des preuves de discrimination contre les demandeurs d’emploi non blancs au Canada. Par exemple, Oreopoulos et Dechief (2012[59]) trouvent des preuves de discrimination contre les demandeurs d’emploi qui portent un nom « étranger » dans la probabilité d’être invités à un entretien d’embauche, même si les candidats en question ont un parcours éducatif et des compétences comparables à ceux qui portent un nom anglais. D’autres études, éventuellement fondées sur des données issues d’échantillons plus importants et comportant plus de variables, sont nécessaires pour déterminer l’étendue et la nature de la discrimination, mais aussi les meilleurs moyens de la combattre.
Les victimes potentielles de la discrimination peuvent demander réparation en vertu de lois anti-discrimination complexes. Les nombreux types de discrimination sont clairement définis, et les personnes sont protégées dans tous les domaines de la vie publique. Cependant, des améliorations sont nécessaires conformément au Migrant Integration Policy Index en ce qui concerne les mécanismes de mise en application de la législation, qui ne sont pas vraiment au service de l’accès des victimes à la justice. Le Canada défend aussi fermement le principe de l’égalité à travers ses organes des droits de l’homme et ses programmes d’équité. Les autorités animent régulièrement des campagnes publiques et un dialogue social autour de la discrimination et du racisme. Des programmes fédéraux d’équité en matière d’emploi sont en place et contrôlés depuis 1986. Le Programme fédéral de stage pour les nouveaux arrivants dans les administrations fédérales, les agences et les organisations privées vise à faciliter l’intégration des immigrants sur le marché du travail, mais les Canadiens de première et de deuxième génération sont quand même sous-représentés dans la fonction publique. Pour obtenir un contrat fédéral, une entreprise doit embaucher une proportion de minorités visibles au moins égale à la proportion de cette minorité dans la population. Ces obligations pourraient être élargies aux domaines couverts dans quelques autres pays, dont l’Australie, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis. Par exemple, une mesure sur le modèle de la Multicultural Access and Equity Policy australienne en 2013, qui exige que toutes les administrations assurent un accès équitable aux services indépendamment de l’appartenance culturelle ou linguistique des clients, pourrait améliorer les résultats.
Faciliter l’intégration des réfugiés sur le marché du travail
La réinstallation, l’établissement et l’intégration des réfugiés posent des difficultés dans la mesure où ils se heurtent souvent à de multiples obstacles à l’intégration, dont le manque de réseaux de relations, l’interruption de leur parcours éducatif, le manque de compétences de base dans l’une ou l’autre langue officielle du Canada, ou des problèmes de santé. Les réfugiés doivent pouvoir parler l’anglais ou le français pour participer pleinement à la vie économique, sociale et culturelle de la nation. IRCC prévoit d’intensifier la collaboration régulière avec les partenaires provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec les prestataires de services, pour suivre l’évolution des besoins et modifier l’offre de cours de langue en conséquence.
L’admission d’un grand nombre de réfugiés syriens au cours des dernières années a entraîné un surcoût pour les provinces et les territoires, qui sont responsables d’assurer l’accès des demandeurs à l’assistance sociale, à l’éducation, aux services de santé temporaires, au logement d’urgence et à l’aide juridique pendant que leur demande est en cours. Le gouvernement fédéral subventionne directement les services de santé temporaires (par le biais du Programme fédéral de santé intérimaire). Dans les cas exceptionnels, il peut fournir une aide supplémentaire à la demande d’une province ou d’un territoire.
Les réfugiés pris en charge par le gouvernement (orientés vers le Canada par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés ou une autre organisation d’aiguillage, et dont la réinstallation est prise en charge par le gouvernement) sont moins rémunérés que les réfugiés parrainés par le secteur privé (pour lesquels un groupe d’individus prennent en charge leurs besoins matériels, sociaux et émotionnels pendant une année après leur arrivée), mais les deux catégories sont moins rémunérées que les autres immigrants et les Canadiens en moyenne (graphique 2.24). On ignore si ces résultats contrastés traduisent les effets de la sélection ou du traitement. Après correction des résultats économiques des réfugiés pour tenir compte des différences de pays d’origine, d’âge au moment de l’immigration, de connaissance d’une langue officielle, de conjoncture économique régionale et de nombre d’années depuis l’admission, Picot, Zhang et Hou (2018[60]) constatent que les gains des réfugiés parrainés par le secteur privé et employés dépassent de 15 à 20 % ceux de leurs homologues pris en charge par le gouvernement durant la première année, puis de 4 à 5 % à la cinquième année, et atteignent le même niveau à la 10e année. Il se dégage de ces résultats que l’avantage traduit les effets du traitement. Un modèle mixte, avec sélection par le gouvernement et administration par le secteur privé est à l’essai pour voir s’il donne de meilleurs résultats. Le cas échéant, il faudra envisager son élargissement.
Recommandations pour tirer le meilleur parti de l’immigration
Sélection des immigrants
Accorder plus d’importance à l’expérience professionnelle canadienne dans la sélection. Attribuer les points pour les études post-secondaires canadiennes et pour une offre d’emploi pertinente en fonction de cette expérience.
Traiter les dossiers de candidature d’immigrants justifiant d’une expérience professionnelle qualifiée au Canada et d’une offre d’emploi adéquate avant les autres, et simplifier les démarches administratives.
Aiguiller plus de candidats au Programme des candidats des provinces vers le système d’Entrée Express du gouvernement fédéral, lequel sélectionne les candidats en fonction de leur niveau de capital humain.
Améliorer les critères de reconnaissance des qualifications étrangères appliqués par les provinces, et tenir compte de l’écart entre les qualifications des demandeurs et les critères en vigueur pour les professions réglementées lors de l’attribution des points.
Donner plus de poids à une offre d’emploi adéquate pour les demandeurs titulaires d’un doctorat dans une filière STIM pour améliorer l’équilibre entreprises/travailleurs, et donc les taux d’emploi et de dépôts de brevets.
Aide à l’établissement
Évaluer dans quelle mesure les schémas d’utilisation des services d’établissement fournis par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) traduisent les besoins et, dans le cas contraire, réorienter les ressources.
Veiller à ce que le financement des cours de langue dans les langues officielles corresponde aux besoins.
Accroître les ressources des programmes de cours de langue plus performants, notamment ceux axés sur les professions, pour réduire les temps d’attente, et examiner les moyens d’améliorer les résultats des programmes moins performants.
Quand d’autres services moins coûteux que les cours de langue conventionnels sont disponibles pour certains clients qui progressent lentement, les élargir et réorienter les ressources économisées vers d’autres clients.
Élargir les programmes de formation relais, qui combinent des cours de langue avancés axés sur la profession de l’immigrant et des cours pour relever leurs qualifications au niveau requis dans les professions réglementées.
Élargir les programmes de mentorat, qui aident les immigrants en poste à développer leurs réseaux de relations professionnelles et à améliorer leurs compétences linguistiques spécialisées, pour faciliter l’obtention d’emplois de bonne qualité.
Élargir le modèle mixte de sélection des réfugiés par le gouvernement et d’administration par le secteur privé si les essais en cours prouvent qu’il améliore les résultats sur le marché du travail.
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