Ben Conigrave
OCDE
Études économiques de l'OCDE : Canada 2023
2. La transition du Canada vers la neutralité carbone
Abstract
Le Canada a adopté un plan ambitieux pour ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre (GES) de son économie d’ici à 2050. Cela passera par un changement radical en matière d’atténuation du changement climatique, caractérisé par des économies d’énergie considérables et un remplacement dans la quasi-totalité de l’économie des combustibles fossiles par des énergies propres. Il ne sera pas aisé d’y parvenir tout en réduisant au minimum les effets négatifs induits sur l’activité et le niveau de vie. Le Canada utilise déjà toute une palette d’instruments d’action pour faire avancer sa transition écologique, notamment des systèmes de tarification du carbone, la réglementation, des incitations à investir ainsi que des achats publics de technologies vertes. Nous explorons dans ce chapitre des réformes qui pourraient améliorer l’efficacité globale des politiques climatiques, de sorte que leur mise en œuvre permette de conjuguer des réductions marquées et pérennes des émissions de GES et une croissance économique forte. Comme dans le cadre des efforts importants déployés pour préparer les collectivités aux effets du changement climatique, les provinces et territoires du Canada joueront un rôle clé dans la transition écologique du pays.
Enjeux de la politique climatique du Canada
Des réductions considérables des émissions seront nécessaires pour que le Canada parvienne à la neutralité carbone
Le climat canadien est déjà en train de changer rapidement. On s’attend à un renforcement des effets de la hausse des températures et des phénomènes météorologiques extrêmes connexes au cours des années à venir. Parallèlement aux efforts accomplis pour préparer les collectivités vulnérables aux effets du changement climatique, le Canada devra réduire sensiblement ses émissions de gaz à effet de serre (GES) pour tenir ses engagements climatiques internationaux. En tant que gros producteur de pétrole brut lourd et de gaz naturel, le Canada émet davantage de GES par habitant que la plupart des autres pays de l’OCDE. Les caractéristiques météorologiques et géographiques du Canada expliquent en partie l’ampleur de ses besoins énergétiques, compte tenu de la nécessité de chauffer les logements pendant des hivers rigoureux et de transporter des personnes et des marchandises sur de grandes distances. Cela tire également vers le haut l’intensité d’émission des activités économiques au Canada.
Il n’est pas évident de concevoir des politiques climatiques efficaces dans un pays fédéral où les coûts et les possibilités inhérents à une transition énergétique verte de grande ampleur seront probablement répartis de façon inégale : certaines provinces sont en effet richement dotées en ressources énergétiques fossiles, tandis que d’autres bénéficient d’une hydroélectricité abondante. Le gouvernement du Canada a adopté une stratégie climatique globale, mais pour limiter le coût économique de la réalisation des objectifs fédéraux de réduction des émissions de GES, il faudra aussi que les provinces canadiennes agissent avec détermination. Cela dit, les provinces tournées vers l’avenir ouvrent souvent la voie et jouent un rôle précieux de laboratoire pour d’importantes politiques climatiques nationales. Le système politique fédéral du Canada est donc à la fois une source de possibilités à exploiter et de difficultés à surmonter pour la politique climatique nationale.
Ces dernières années, le Canada a réalisé des progrès en matière de découplage entre les émissions de gaz à effet de serre et la croissance économique. Le remplacement du charbon par le gaz naturel et des énergies renouvelables a contribué à réduire l’intensité d’émission de la production d’électricité au cours des deux dernières décennies (Graphique 2.2, partie A). L’intensité énergétique des activités économiques a également diminué, compte tenu des gains d’efficacité énergétique réalisés au niveau des logements et dans certaines industries lourdes. Ces progrès ont néanmoins été compensés par l’augmentation des émissions liée à la croissance de l’économie canadienne, caractérisée par une intensité d’utilisation des ressources et une intensité énergétique élevées (Graphique 2.2, partie B).
Les autorités ont adopté un nouveau plan climatique, le Plan de réduction des émissions pour 2030, afin d’accélérer la transition du Canada vers la neutralité carbone (ECCC, 2022[1]). Conformément à l’Accord de Paris, le gouvernement fédéral vise à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050. Pour garantir que le Canada reste sur la trajectoire voulue, les autorités ont défini un objectif intermédiaire consistant à réduire les émissions d’au moins 40 % par rapport à leur niveau de 2005 d’ici à 2030 (Graphique 2.3). Ces deux objectifs sont inscrits dans la législation.
Le Plan de réduction des émissions pour 2030 est très ambitieux. La réalisation de son objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 exigera des économies d’énergie considérables et un remplacement dans la quasi-totalité de l’économie des combustibles fossiles par des énergies propres. Les émissions résiduelles devront être piégées et stockées ou compensées par une séquestration du carbone ailleurs. Les ambitions du gouvernement sont étayées par un éventail de plus en plus complet de mesures d’atténuation.
L’énergie est au cœur du défi que doit relever le Canada en matière de politique climatique
Le Canada est à la fois un gros producteur de pétrole et de gaz, et un gros consommateur d’électricité propre. Les exportations de pétrole et de gaz expliquent en partie l’ampleur des émissions imputables à la production, mais la consommation intérieure d’énergie contribue aussi à l’impact environnemental des activités économiques réalisées au Canada. Il est clairement nécessaire de réduire les émissions découlant de la combustion d’énergies fossiles, qui est la source de quatre cinquièmes des émissions de gaz à effet de serre du Canada (Graphique 2.4). Il faut accroître progressivement la production d’énergie verte afin de la substituer à la production d’électricité à forte intensité de carbone dans les provinces qui sont encore tributaires de centrales thermiques classiques, tandis que la réalisation d’économies d’énergie libèrera des capacités pouvant être consacrées à l’électrification de l’industrie, des transports et des bâtiments. Des investissements considérables seront nécessaires pour moderniser les réseaux et les adapter à l’accroissement de la demande d’électricité et de la production de courant à partir de sources d’énergie intermittentes.
Parallèlement aux efforts de décarbonation du réseau électrique, l’adoption à grande échelle de technologies vertes sera indispensable pour réduire la consommation d’énergie et les émissions de carbone des secteurs très polluants. Parmi les technologies qui sont appelées à favoriser la transition du Canada vers la neutralité carbone figurent la production d’électricité d’origine renouvelable, les systèmes de captage du carbone, les véhicules n’émettant aucune émission de gaz d’échappement et les thermopompes électriques économes en énergie pour les bâtiments. Les pouvoirs publics peuvent contribuer de manière importante à réduire les obstacles à la recherche-développement, ainsi que les risques liés aux investissements verts. L’enjeu est de concevoir des politiques qui permettent à la fois de faire diminuer les émissions et de réduire au minimum les coûts induits en matière d’activité économique et de niveau de vie.
Il est important que le Canada dispose de systèmes efficaces de tarification des émissions de gaz à effet de serre pour pouvoir réduire au minimum le coût économique de la transition écologique et exploiter les nouvelles possibilités de croissance. Une décarbonation rapide nécessitera des changements de comportement de la part des entreprises et des ménages ayant des répercussions sur la production et les revenus globaux. Les instruments économiques judicieusement conçus incitent à faire des choix plus écologiques et réduisent au minimum tout autre effet de distorsion induit sur la production et la consommation. Les dispositifs d’atténuation fondés sur les prix sont attrayants en termes d’efficacité, mais ils ont tendance à avoir un effet inégal, non seulement sur les entreprises, en fonction de l’intensité carbone de leur activité, mais aussi sur les ménages, en fonction du contenu en énergie et en émissions de leur consommation. Il convient de gérer les effets redistributifs des dispositifs tels que la tarification du carbone, notamment pour atténuer leur impact sur les ménages à faible revenu.
Nous examinons dans la première section de ce chapitre l’approche pancanadienne de tarification de la pollution par le carbone. Il est recommandé d’y apporter des modifications afin d’améliorer le fonctionnement des systèmes de tarification du carbone. Comme d’autres pays, le Canada a élaboré de nombreux autres instruments d’action pour accélérer la réduction des émissions. En s’appuyant sur la réglementation, sur le soutien à l’innovation et à l’investissement dans les technologies vertes, ainsi que sur d’autres mesures destinées à compléter la tarification des émissions, les pouvoirs publics peuvent agir sur un plus large éventail d’émissions et remédier à d’autres obstacles liés au fonctionnement du marché empêchant de réduire les émissions à faible coût (Tableau 2.1). La deuxième section de ce chapitre porte sur les mesures destinées à décarboner quatre secteurs cruciaux pour parvenir à la neutralité carbone au Canada : l’électricité, le pétrole et le gaz, les transports ainsi que les bâtiments (Graphique 2.5). Ces secteurs sont des contributeurs majeurs aux émissions de gaz à effet de serre du Canada. Ils fournissent également des intrants importants pour la production réalisée dans le reste de l’économie. D’amples réductions des émissions seront nécessaires dans chacun de ces quatre secteurs pour que le Canada puisse atteindre ses objectifs climatiques. Nous n’examinons pas toutes les sources d’émissions de gaz à effet de serre présentes au Canada dans ce chapitre. Nous nous penchons néanmoins sur des instruments tels que les crédits compensatoires de carbone, qui sont susceptibles d’élargir la portée des incitations à l’atténuation des émissions à des activités difficiles à décarboner, telles que l’agriculture et la foresterie. Dans la troisième section de ce chapitre, nous examinons des mesures d’adaptation susceptibles de réduire l’impact du changement climatique au Canada.
Tableau 2.1. Interactions entre les systèmes de tarification du carbone et d’autres instruments fédéraux de politique climatique
Mesure |
Secteurs couverts |
L’instrument considéré s’applique-t-il aux mêmes émissions que les systèmes de tarification du carbone ? |
L’instrument complète-t-il les systèmes de tarification du carbone ? |
---|---|---|---|
Système de crédits compensatoires de carbone Lancé à l’échelle nationale en 2022. |
Agriculture Utilisation des terres |
Non. Vise les émissions imputables au changement d’affectation des terres et à d’autres sources non couvertes par les systèmes de tarification du carbone. |
Oui. Incite à réduire les émissions non couvertes par les systèmes de tarification du carbone. |
Règlement sur l’électricité propre (REP) Proposé. |
Électricité |
Oui. Cet instrument viserait les émissions imputables aux centrales électriques classiques alimentées avec du charbon ou du gaz naturel. |
Cela dépend. Sur les marchés concurrentiels de l’électricité, la répercussion du coût du carbone constitue à elle seule un vecteur de décarbonation, qui limite le besoin de recourir à d’autres outils. La plupart des marchés provinciaux sont néanmoins réglementés, ce qui empêche la répercussion du coût du carbone. Un règlement sur l’électricité propre peut accélérer l’élimination progressive des énergies sales. |
Règlement sur le méthane Règles fédérales en vigueur depuis 2020. |
Pétrole et gaz |
Non. Cible les émissions de méthane imputables au secteur du pétrole et du gaz. |
Oui. En attendant que l’on dispose de meilleures méthodes de suivi des émissions de méthane, ce règlement garantit que les entreprises prennent des mesures adaptées pour réduire au minimum ces émissions. |
Plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier Envisagé. |
Pétrole et gaz |
Oui. Émissions imputables à la combustion d’énergie découlant des activités réalisées en amont du raffinage. Les entreprises pétrolières et gazières acquitteraient des prix du carbone plus élevés que les autres entreprises. Les échanges de crédits seraient restreints. |
Non. Les systèmes d’échange de droits d’émission permettent de réduire les émissions de GES à faible coût lorsque les signaux de prix sont uniformes et que les entreprises des différents secteurs concernés peuvent échanger ces droits entre elles. Un système d’échange de droits d’émission limité à un seul secteur serait moins efficace. |
Aide fiscale en faveur des technologies de captage, d’utilisation et de stockage du carbone (CUSC) Crédit d’impôt fédéral à l’investissement en vigueur depuis 2022. |
Électricité Pétrole et gaz Industrie lourde |
Oui. Émissions imputables à la combustion d’énergie découlant de l’extraction de pétrole et de gaz ainsi que d’autres secteurs. |
Cela dépend. Cette aide vient s’ajouter aux incitations découlant des systèmes de tarification du carbone. L’apprentissage par la pratique a des effets bénéfiques supplémentaires. Néanmoins, le cumul des aides correspondant aux subventions, aux crédits d’impôt, aux systèmes de tarification du carbone et aux crédits octroyés en application du Règlement sur les combustibles propres (RCP) pourrait déboucher sur une rémunération excessive des technologies de CUSC à mesure qu’elles parviennent à maturité. |
Règlement sur les combustibles propres (RCP) En vigueur au niveau national depuis 2022. |
Pétrole et gaz Transports |
Oui. Émissions imputables à la production et à la consommation de carburants, y compris les rejets émis tout le long de la chaîne d’approvisionnement en carburants. |
Oui. Réduit les obstacles à l’élaboration de combustibles à faible teneur en carbone. Néanmoins, la couverture par le RCP du cycle de vie des combustibles – de la production à la distribution – se traduit par un chevauchement avec le cadre de tarification du carbone, ce qui peut entraîner des pertes d’efficience. |
Aide au développement de l’infrastructure de recharge des véhicules électriques (VE) En place. |
Transports |
Oui. Émissions imputables à la combustion d’énergie découlant du transport routier. |
Oui. Sur les nouveaux marchés, le soutien apporté au déploiement de l’infrastructure de recharge renforce la demande de VE. L’offre d’équipements de recharge et la demande de VE sont interdépendantes. |
Modèles de codes nationaux de l’énergie Premier code publié en 2011. |
Bâtiments |
Oui. Émissions directes dues au chauffage au gaz naturel. Émissions indirectes dues à la consommation d’électricité. |
Oui. Remédie aux problèmes informationnels (les acquéreurs de logements sont moins au fait des questions de performances énergétiques que les constructeurs). |
Améliorer les systèmes de tarification du carbone du Canada
La tarification du carbone joue un rôle central dans le plan de réduction des émissions du Canada
Parmi les instruments d’action utilisés pour accélérer la réduction des émissions au Canada, la tarification des émissions de gaz à effet de serre occupe une place centrale dans le plan climatique national. Les systèmes de tarification du carbone peuvent permettre de réduire les émissions à moindre coût que d’autres mécanismes. Judicieusement conçus – de manière à assurer une large couverture des émissions et une uniformité des signaux de prix entre régions et secteurs –, les systèmes de ce type permettent de réduire au minimum les effets de distorsion induits sur le comportement des entreprises et des ménages, en garantissant une neutralité de traitement des émissions, quelle que soit leur origine. Outre le fait qu’ils favorisent la consommation d’énergies plus propres et les économies d’énergie, les systèmes de tarification du carbone améliorent la compétitivité-coût des technologies vertes.
Différents systèmes de tarification du carbone sont en place dans les provinces et territoires canadiens. Cela tient à l’histoire de la tarification du carbone au Canada, qui a débuté avec la mise en place de taxes sur le carbone et de systèmes d’échange de droits d’émission dans les plus grandes provinces du pays, avant qu’une approche pancanadienne ne soit mise en œuvre en 2019. Les trois principales approches de tarification du carbone appliquées dans les provinces et territoires canadiens sont les suivantes :
Les taxes sur le carbone (instruments fondés sur les prix) : ce sont des prélèvements effectués sur les combustibles fossiles. Le taux d’imposition appliqué à chaque type de combustible correspond à un prélèvement fixe par tonne d’équivalent CO2. De la sorte, le taux d’imposition défini pour chaque combustible fossile reflète son empreinte carbone. La Colombie-Britannique fait partie des provinces et territoires dotés d’une taxe sur le carbone.
Systèmes de plafonnement et d’échange de droits d’émission (instruments fondés sur les quantités) : un plafond est défini pour les émissions annuelles de gaz à effet de serre couvertes par le système, puis des quotas dont la somme est égale à ce plafond sont attribués. Les entreprises restituent ensuite les quotas, qu’elles ont obtenus gratuitement ou achetés, correspondant à leurs émissions de l’année. Le Québec est doté d’un système de plafonnement et d’échange lié à celui de la Californie.
Systèmes hybrides composés d’une redevance sur les combustibles et d’un système applicable aux grands émetteurs : un prélèvement est effectué sur les combustibles fossiles (redevance sur les combustibles). Les grands émetteurs exposés aux échanges commerciaux sont exonérés de cette redevance sur les combustibles, mais ils acquittent une taxe, ou restituent des crédits, au titre des émissions excédant des niveaux de référence prédéterminés (système de niveaux de référence et de crédits applicable aux grands émetteurs). Les émetteurs peuvent acheter ces crédits à d’autres entreprises, les obtenir en ramenant leurs émissions en deçà de leur niveau de référence, ou les acquérir sous forme de crédits compensatoires reconnus. Au Canada, les systèmes applicables aux grands émetteurs sont souvent qualifiés de « systèmes de tarification fondés sur le rendement (STFR) ». La plupart des provinces et territoires sont dotés d’un système hybride de ce type (voir, par exemple, l’Encadré 2.1).
Encadré 2.1. Étude de cas : application de la redevance fédérale sur les combustibles et du système provincial de niveaux de référence et de crédits en Alberta
Le système fédéral de tarification de la pollution par le carbone se compose d’une redevance sur les combustibles et d’un système de niveaux de référence et de crédits (connu sous le nom de système fédéral de tarification fondé sur le rendement). L’une des composantes du système fédéral, voire les deux, s’appliquent dans les provinces et territoires qui en font la demande ou qui n’ont pas de système conforme aux normes nationales minimales de rigueur. La redevance fédérale sur les combustibles s’applique dans un grand nombre de provinces et territoires du Canada. Certaines juridictions ont mis en place des systèmes provinciaux de niveaux de référence et de crédits pour protéger les grands émetteurs des pressions concurrentielles susceptibles d’entraîner des fuites de carbone. En Alberta, par exemple, la redevance fédérale sur les combustibles est associée à un programme provincial applicable aux grands émetteurs, appelé Technology Innovation and Emissions Reduction (TIER) Regulation (règlement sur l’innovation technologique et la réduction des émissions). Les exemples suivants montrent comment ces instruments de tarification du carbone s’appliquent aux petits et grands émetteurs en Alberta :
Restaurant (petit émetteur) : L’entreprise s’acquitte de la redevance fédérale sur les combustibles, de manière généralement indirecte, sur le gaz naturel qu’elle utilise pour se chauffer et cuisiner, et sur le gazole consommé par une camionnette destinée à la collecte et à la livraison. En tant que petit émetteur, le restaurant ne participe pas au système de niveaux de référence et de crédits de l’Alberta.
Cimenterie (grand émetteur) : L’usine est un grand émetteur exposé aux échanges commerciaux (qui émet plus de 100 000 tonnes de dioxyde de carbone chaque année). Elle peut donc adhérer au règlement TIER, le système de niveaux de référence et de crédits de l’Alberta. En participant à celui-ci, elle est exonérée du paiement de la redevance fédérale sur les combustibles fossiles utilisés à des fins de production, notamment le charbon brûlé pour chauffer un four à ciment. Mais elle doit se conformer aux obligations prévues par le règlement TIER s’agissant des émissions imputables à la combustion d’énergie et aux procédés industriels qui sont supérieures à sa norme d’intensité d’émission, laquelle est déterminée en fonction des résultats obtenus précédemment par l’usine. En 2022, la cimenterie a dépassé cette norme de 10 000 tonnes. Elle peut combiner des crédits compensatoires et des crédits de rendement (générés par l’installation si elle dépasse sa norme d’intensité d’émission dans l’année de conformité passée ou achetés auprès d’autres entreprises), mais seulement à concurrence de 60 % de l’obligation de conformité, soit pour 6 000 des 10 000 tonnes. Les 4 000 tonnes restantes (la part minimum autorisée en 2022 étant de 40 %) sont soumises au prix du fonds TIER, qui correspond au prix plancher fédéral du carbone (voir ci-après).
Source : Gouvernement de l’Alberta (2020[3]).
Les instruments de tarification des émissions fondés sur les quantités, fondés sur les prix et hybrides présentent différents points forts et points faibles (Encadré 2.2). Dans le cadre de l’approche pancanadienne de tarification de la pollution par le carbone, le gouvernement fédéral fixe des critères minimaux de rigueur nationaux que tous les systèmes doivent respecter. L’objectif est de garantir la comparabilité et l’efficacité des systèmes. Parmi ces critères figure un prix minimum du carbone pour les systèmes fondés sur les prix. Ce prix plancher est passé de 20 CAD en 2019 à 65 CAD en 2023, ce qui a contribué à rehausser le tarif effectif du carbone net moyen dans l’économie canadienne parallèlement à l’élargissement de la couverture des émissions (Graphique 2.6). Le prix minimum du carbone devrait augmenter chaque année, pour atteindre 170 CAD en 2030. Cela porterait les prix du carbone dans les provinces et territoires canadiens dans la fourchette jugée nécessaire pour que les pays restent sur la trajectoire menant à la neutralité carbone au milieu de ce siècle (OCDE, 2021[4]).
Encadré 2.2. Points forts et points faibles des instruments de réduction des émissions fondés sur les quantités et sur les prix
L’application d’instruments fondés sur les quantités consiste à limiter les émissions en définissant un plafond réglementaire. L’échange de quotas d’émission favorise la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au moindre coût. Les systèmes de plafonnement et d’échange offrent davantage de certitude quant à la réduction des émissions, mais les prix des quotas peuvent être volatils. Les quotas sont distribués gratuitement aux entreprises en quantités fixées de manière à favoriser la réduction des émissions de GES sans entraîner un transfert des activités de production et des émissions connexes en dehors du territoire considéré (phénomène qualifié de « fuite de carbone »). Cela exige des informations fiables sur les émissions, sur la capacité des entreprises de décarboner leur production, et sur la mesure dans laquelle les biens locaux entrent en concurrence avec des biens produits à l’étranger. Compte tenu de ces considérations générales, il est difficile d’attribuer gratuitement des quotas tout en préservant les incitations à innover et à réduire les émissions.
Les instruments fondés sur les prix offrent davantage de certitude quant aux coûts du carbone et aux effets induits sur les autres prix, mais les volumes attendus de réduction des émissions sont moins prévisibles que dans les systèmes fondés sur les quantités. En s’appuyant sur une bonne modélisation, il est possible de fixer le prix du carbone à un niveau permettant d’obtenir la réduction voulue des émissions de GES. En pratique, il peut cependant s’avérer difficile de prévoir la réaction des entreprises et des ménages aux redevances sur le carbone et aux autres mesures climatiques.
Les systèmes hybrides, qui sont courants au Canada (Tableau 2.2), présentent à la fois des caractéristiques propres aux instruments fondés sur les prix et aux instruments fondés sur les quantités, ainsi que leurs avantages et inconvénients respectifs. Ainsi, dans le cadre des programmes applicables aux grands émetteurs, les participants sont exonérés de redevance sur les émissions si leur intensité de GES est inférieure à un niveau de référence. Ce type de système est conçu pour protéger les entreprises exposées aux échanges commerciaux des pressions concurrentielles susceptibles de provoquer des fuites de carbone.
Tableau 2.2. Systèmes de tarification du carbone en place dans les provinces et territoires canadiens en 2023
Type de système |
Provinces et territoires |
Part des émissions du Canada en 2019 |
---|---|---|
Taxe sur le carbone |
Colombie-Britannique Territoires du Nord-Ouest |
9 % 0 % |
Système de plafonnement et d’échange |
Québec |
11 % |
Système hybride (redevance sur les combustibles et système de niveaux de référence et de crédits applicable aux grands émetteurs) |
Ontario Alberta Saskatchewan Manitoba Nouveau-Brunswick Nouvelle-Écosse Terre-Neuve-et-Labrador Île-du-Prince-Édouard Yukon Nunavut |
22 % 38 % 10 % 3 % 2 % 2 % 2 % 0 % 0 % 0 % |
Note : L’essentiel des émissions de gaz à effet de serre du Canada est couvert par des systèmes hybrides associant une redevance sur les combustibles et un programme applicable aux grands émetteurs.
Source : Gouvernement du Canada. (2022[5])
Le cadre de tarification du carbone du Canada prescrit d’autres caractéristiques des dispositifs de ses provinces et territoires. Des exigences minimales de rigueur sont définies par rapport à un « filet de sécurité » fédéral – un système hybride constitué d’une redevance sur les combustibles et d’un système applicable aux grands émetteurs. Les critères à satisfaire incluent les éléments suivants (Gouvernement du Canada, 2021[6]) :
Prix minimum du carbone : Le prix du carbone doit être au moins égal au prix plancher fédéral. Les plafonds définis dans le cadre des systèmes de plafonnement et d’échange doivent être suffisamment bas pour permettre une réduction des émissions au moins aussi importante que celle qui résulterait du prix du carbone.
Préservation du signal de prix : Seuls les secteurs présentant un risque de fuite de carbone devraient être intégrés dans les systèmes de niveaux de référence et de crédits applicables aux grands émetteurs, ou se voir attribuer gratuitement des quotas dans le cadre des systèmes de plafonnement et d’échange. Les mesures destinées à neutraliser directement le signal de prix du carbone, telles que les rabais accordés aux points de vente lors des achats de carburant, ne sont pas autorisées. Il convient en outre d’éviter un excédent d’offres de crédits, qui ferait chuter les prix des crédits en dessous du prix minimum du carbone.
Couverture minimale des émissions : Les systèmes doivent couvrir une part des émissions imputables à la combustion d’énergie au moins aussi importante que celle qui serait couverte par le filet de sécurité fédéral. Les programmes relatifs aux grands émetteurs s’appliquent également aux émissions liées aux procédés industriels.
Limitation du recours aux crédits compensatoires : Les crédits compensatoires doivent représenter des réductions d’émissions réelles et pérennes.
Environnement et Changement climatique Canada évalue les systèmes provinciaux de tarification du carbone, afin de déterminer s’ils sont conformes à ces critères minimaux de rigueur ; la prochaine évaluation devrait avoir lieu en 2026. Les provinces et les territoires peuvent choisir d’adopter le filet de sécurité fédéral, au lieu de concevoir leur propre système de tarification du carbone. Le filet de sécurité est imposé, en tout ou partie, dans les juridictions qui ne respectent pas les exigences minimales. D’ici juillet 2023, le filet de sécurité fédéral s’appliquera intégralement dans quatre juridictions (le Manitoba, l’Île-du-Prince-Édouard et les territoires du Yukon et du Nunavut). Par ailleurs, la redevance fédérale sur les combustibles sera associée à un système provincial applicable aux grands émetteurs à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, en Alberta et dans la Saskatchewan. Des systèmes totalement spécifiques à la province ou au territoire considéré sont en place au Nouveau-Brunswick, au Québec, en Colombie-Britannique et dans les Territoires du Nord-Ouest.
Un système fédéral de crédits compensatoires a été lancé en 2022 (Gouvernement du Canada, 2022[7])). Les projets permettant de réduire les émissions nettes donnent droit à des crédits, qui peuvent être échangés avec les entreprises participant aux systèmes de tarification du carbone. Les crédits compensatoires peuvent aussi être utilisés par les entreprises et les administrations publiques sur tout le territoire canadien – par exemple pour respecter les engagements pris en matière de neutralité carbone. Pour l’heure, des crédits peuvent uniquement être générés pour des projets de récupération et de destruction du méthane provenant des sites d’enfouissement. D’autres protocoles sont en cours d’élaboration et pourraient, dans l’avenir, permettre qu’un plus large éventail de projets donne lieu à l’octroi de crédits compensatoires. Conçus pour favoriser la réduction des émissions dans les secteurs d’activité qui ne sont pas encore couverts par les mécanismes de tarification du carbone, comme l’agriculture et la foresterie, les protocoles proposés couvriraient les réductions d’émissions découlant de l’amélioration des systèmes de réfrigération, de la gestion des forêts, du captage direct dans l’air et du stockage du dioxyde de carbone, de la gestion de l’alimentation du bétail et de l’amélioration du stockage du carbone organique dans les sols. L’élargissement progressif de ce système de crédits compensatoires vise à garantir que soient uniquement récompensées les réductions des émissions qui sont réelles, additionnelles, durables et vérifiables. Il sera important que de bons systèmes de gouvernance soient en place pour vérifier les projets donnant lieu à l’octroi de crédits compensatoires et gérer l’offre de crédits.
Les recettes résultant du système fédéral de tarification du carbone sont restituées aux provinces où elles ont été collectées. Les produits directs sont reversés aux gouvernements des provinces et territoires ayant volontairement adopté le système fédéral. S’il s’avère qu’une province ne respecte pas les exigences minimales de rigueur fédérales, 90 % des produits directs de la redevance fédérale sur les combustibles sont restitués aux résidents de la juridiction d’origine sous la forme de transferts forfaitaires trimestriels (Encadré 2.3). Les 10 % restants des produits directs de la redevance fédérale sur les combustibles sont utilisés pour soutenir les petites entreprises et les groupes autochtones. Dans les provinces qui s’avèrent ne pas respecter les critères de rigueur relatifs aux systèmes applicables aux grands émetteurs, les produits du système fédéral de tarification fondé sur le rendement sont restitués par le biais de programmes fédéraux destinés à soutenir les projets de technologie propre dans les secteurs industriels et les projets d’électricité propre.
Les objectifs qui sous-tendent les mécanismes de recyclage des recettes en place au Canada diffèrent de l’un à l’autre. Certains dispositifs provinciaux, tels que celui de la Colombie-Britannique, ont été utilisés pour atténuer l’impact des politiques climatiques sur les ménages à faible revenu tout en renforçant l’adhésion de la population à la tarification du carbone. Par le passé, les recettes de la taxe sur le carbone appliquée en Colombie-Britannique ont été redistribuées sous la forme d’aides aux entreprises, de réductions d’impôt sur le revenu, d’allègements d’impôt foncier accordés aux propriétaires occupants en zone rurale, et de transferts ciblés aux ménages à faible revenu (D’Arcangelo et al., 2022[8]). Au Québec, les recettes provenant de la vente des droits d’émission contribuent à financer des mesures d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de celui-ci.
Encadré 2.3. Atténuer les effets redistributifs du système de tarification du carbone en en recyclant les recettes
Dans les provinces où est imposée la redevance fédérale sur les combustibles, les ménages reçoivent chaque trimestre un transfert forfaitaire qualifié de paiement de l’incitatif à agir pour le climat (PIAC). Les ménages en mesure de réduire leurs dépenses de biens à forte intensité de carbone reçoivent le même PIAC que les autres, bien que celui-ci varie en fonction de la taille du ménage et du nombre d’enfants à charge. Une fois ces prestations prises en compte, on constate que le système de tarification du carbone a le plus souvent un effet bénéfique sur les ménages les moins aisés : les prestations qui leur sont versées sont généralement supérieures au coût du carbone lié à leur consommation. En revanche, l’effet induit sur les ménages à revenu élevé, qui tendent à consommer davantage, est légèrement négatif en moyenne : les prestations sont inférieures au coût du carbone plus élevé lié à leurs dépenses (Graphique 2.7). Sans le PIAC, la charge découlant de la tarification du carbone reposerait en revanche plus lourdement sur les ménages à faible revenu, qui consacrent une part plus importante de leur revenu à l’énergie. Le PIAC renforce sans doute l’adhésion de la population au cadre de tarification du carbone, cette adhésion étant d’autant plus forte pour une politique donnée que cette dernière est considérée comme équitable (Dechezleprêtre et al., 2022[9]). La restitution des recettes au territoire où elles ont été collectées évite en outre une redistribution de revenus entre provinces, qui pénaliserait les régions plus tributaires des combustibles fossiles, où la résistance au système fédéral de tarification du carbone a été la plus forte par le passé.
Les critères de rigueur relatifs aux systèmes de tarification du carbone devront être strictement appliqués
Au cours des dernières années, certains systèmes provinciaux de tarification du carbone ont excessivement contribué à alléger le coût du carbone pour les grands émetteurs. L’accès aux systèmes provinciaux applicables aux grands émetteurs n’est pas toujours limité aux producteurs exposés aux échanges internationaux, alors que les règles fédérales l’exigent. Ainsi, les centrales électriques fonctionnant au gaz naturel participent au système applicable aux grands émetteurs de l’Alberta, alors qu’elles sont préservées de la concurrence du fait de leur éloignement des autres centrales, de la limitation des importations de courant liée aux capacités, et des coûts de transport inhérents à l’importation d’électricité d’autres régions (Olmstead et Yatchew, 2022[11]). L’entrée dans un système applicable aux grands émetteurs réduit le coût du carbone pour les participants et, partant, les incitations à engager des investissements verts majeurs. Pour améliorer l’efficience des systèmes de tarification du carbone, il est important que leur accès soit réservé aux activités véritablement exposées à un risque de fuite de carbone. Certaines provinces représentent une part tellement importante des émissions nationales qu’une application inadéquate des règles de tarification du carbone pourrait être lourde de conséquences sur les progrès accomplis vers la réalisation des objectifs du Canada en matière d’émissions (Graphique 2.8).
Il est possible de continuer à durcir les règles de tarification du carbone
Les critères fédéraux de rigueur plus exigeants en vigueur à partir de 2023 devraient contribuer à combler certaines lacunes antérieures. Outre le fait qu’ils définissent la trajectoire d’augmentation du prix du carbone jusqu’à la fin de 2030 et un niveau de couverture minimale, ces critères renforcés exigent que les programmes applicables aux grands émetteurs couvrent les émissions liées aux procédés industriels (Gouvernement du Canada, 2021[6]). Le gouvernement du Canada a également interdit les rabais accordés aux points de vente influant sur la tarification du carbone. Considérées dans leur ensemble, ces modifications devraient amplifier les signaux de prix du carbone. Ces règles renforcées relatives à la tarification du carbone complètent les efforts déployés de manière plus générale par les autorités fédérales au cours des dernières années pour supprimer progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles (OCDE, 2020[12]).
Dans le prolongement des progrès récemment accomplis, il est possible d’aller plus loin pour harmoniser la rigueur des systèmes provinciaux de tarification du carbone. En effet, les lacunes des critères fédéraux de conception de ces systèmes permettent toujours aux provinces de choisir des catégories d’émissions qui en sont exemptées – comme le carburant diesel utilisé dans les exploitations agricoles ou le carburant d’aviation. Des règles plus strictes pourraient permettre d’harmoniser la couverture des émissions entre provinces. Un objectif à plus long terme devrait consister à élargir cette couverture à des émissions qui sont actuellement en dehors du champ d’application de la plupart des systèmes provinciaux de tarification du carbone, telles que les rejets de méthane imputables aux secteurs pétrolier et gazier (voir ci-dessous). De tels efforts amélioreraient l’efficience du cadre de tarification du carbone à l’échelle nationale.
Il reste beaucoup à faire pour remédier aux importantes différences de conception des systèmes provinciaux applicables aux grands émetteurs. D’après les conclusions d’une évaluation de 2021, les disparités existant en matière de conception de ces systèmes contribuent aux écarts de coût moyen du carbone observés entre provinces pour un même secteur d’activité (Institut canadien pour des choix climatiques, 2021[13]). Les règles nationales autorisent toujours les provinces à définir les critères d’accès à leurs systèmes applicables aux grands émetteurs. Les provinces fixent également des normes d’intensité d’émission qui déterminent la part des émissions des entreprises participantes à laquelle s’applique un prix du carbone. À la différence du système fédéral applicable aux grands émetteurs – dans lequel les normes relatives à de nombreux secteurs sont liées à l’intensité moyenne d’émission des installations fabriquant des produits semblables –, les systèmes provinciaux reposent couramment sur des normes applicables aux entreprises qui sont définies à partir de leurs propres émissions antérieures (Tableau 2.3). Or, une norme fixée à un niveau trop élevé peut réduire les incitations des entreprises ayant une forte intensité d’émission à faire diminuer leurs émissions. Par ailleurs, les installations ayant une faible intensité d’émission sont plus modestement récompensées. Une meilleure approche consiste à prescrire des normes exigeantes dans l’absolu, indépendamment des résultats obtenus précédemment par chaque entreprise en matière d’intensité d’émission. Dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE), les normes reposent pour un produit donné sur les émissions moyennes des 10 % de producteurs qui obtiennent les meilleurs résultats. Pour autant qu’il n’existe aucun obstacle constitutionnel, les autorités pourraient durcir les critères nationaux de rigueur pour rendre obligatoire l’utilisation de telles méthodes dans le cadre des systèmes provinciaux de tarification du carbone. On pourrait adapter les normes appliquées dans d’autres pays lorsqu’il n’existe pour un produit donné qu’un seul producteur au Canada. L’Alberta envisage d’utiliser des normes mondiales dans ce type de situation (Gouvernement de l’Alberta, 2022[14]).
Tableau 2.3. Caractéristiques de certains systèmes de tarification du carbone concernant les grands émetteurs en 2022
État fédéral |
Alberta |
Colombie-Britannique |
Ontario |
Québec |
|
---|---|---|---|---|---|
Nom du système |
Système de tarification fondé sur le rendement (STFR) |
Règlement sur l’innovation technologique et la réduction des émissions (TIER, Technology Innovation and Emissions Reduction) |
Taxe sur le carbone |
Normes de rendement à l’égard des émissions |
Système de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE) |
Type de système |
Système de niveaux de référence et de crédits |
Système de niveaux de référence et de crédits |
Taxe sur le carbone |
Système de niveaux de référence et de crédits |
Système de plafonnement et d’échange |
Seuil d’émission à partir duquel la participation est obligatoire |
50 000 tonnes |
100 000 tonnes |
10 000 tonnes |
50 000 tonnes |
25 000 tonnes |
Avantages d’une participation |
Exonération de redevance sur les combustibles |
Exonération de redevance sur les combustibles |
Allègement de la taxe sur le carbone pour les entreprises ayant une faible intensité d’émission |
Exonération de redevance sur les combustibles |
Participation au marché du carbone |
Comment les niveaux de référence sont-ils définis ? |
Niveaux de référence spécifiquement définis par secteur d’activité |
Niveaux de référence spécifiquement définis par installation ou fondés sur les intensités d’émission les plus faibles |
Application de niveaux de référence sectoriels dans le cadre du programme d’incitation applicable aux grands émetteurs |
Niveaux de référence définis par installation et par secteur |
Niveaux de référence définis essentiellement par installation |
Quel pourcentage des obligations peut être satisfait à l’aide de crédits ? |
Jusqu’à 75 % |
Jusqu’à 60 % |
s.o. |
Pas de crédits compensatoires. Pas de limite relative aux crédits. |
Jusqu’à 8 % pour les crédits compensatoires. |
Dans quel délai peuvent être utilisés les crédits et les quotas ? |
5 ans |
9 ans |
s.o. |
5 ans |
3 ans |
Les volumes des crédits sont-ils limités ou font-ils l’objet d’un prix minimum ? |
✓ Nombre de crédits plafonné. |
s.o. |
s.o. |
✓ Les installations peuvent acquérir des crédits représentant au maximum 5 % du niveau de référence. |
✓ Limitation des crédits pouvant être détenus. Prix minimum. |
Les échanges de crédits sont-ils autorisés ? |
✓ Dans les provinces appliquant le filet de sécurité. |
✓ Uniquement dans la province. |
s.o. |
✓ Uniquement dans la province. |
✓ Dans la province et avec la Californie. |
Note : Le système de tarification fondé sur le rendement (STFR) fédéral fait partie intégrante du « filet de sécurité » fédéral, qui comprend également la redevance fédérale sur les combustibles. Les participants au STFR n’acquittent pas de redevance sur les combustibles pour les émissions inférieures à leur norme d’intensité d’émission. De même, les participants aux systèmes provinciaux de niveaux de référence et de crédits de l’Alberta et de l’Ontario – dans le cadre desquels s’applique aussi la redevance fédérale sur les combustibles – ne paient pas cette redevance pour les émissions inférieures à leur norme d’intensité d’émission. Les paramètres de certains systèmes provinciaux de tarification du carbone devraient être modifiés en 2023, notamment à des fins de mise en conformité avec les critères fédéraux renforcés relatifs aux normes d’intensité d’émission.
Source : Gouvernement de l’Alberta (2020[15]) ; Gouvernement du Canada (2022[16]) ; Partenariat international d’action sur le carbone (ICAP) (2022[17]) ; Gouvernement de l’Ontario (2021[18]) ; Gouvernement de la Colombie-Britannique (2022[19]) ; et Institut canadien pour des choix climatiques (2021[13]).
D’après les lignes directrices fédérales, entre autres mécanismes destinés à améliorer la prévisibilité des prix et la stabilité du marché, les systèmes de niveaux de référence et de crédits devraient intégrer un durcissement des normes d’intensité d’émission pour les grands émetteurs au fil du temps (Gouvernement du Canada, 2021[6]). Une telle approche a déjà été adoptée dans le système fédéral de niveaux de référence et de crédits et dans la plupart des systèmes provinciaux applicables aux grands émetteurs. Le durcissement des normes d’intensité d’émission réduit le risque d’excédent d’offres de crédits, qui peut faire chuter les prix des crédits en dessous du prix plancher national du carbone, contrevenant aux exigences fédérales relatives aux normes d’intensité d’émission. Une diminution progressive des niveaux de référence pourrait permettre d’éviter des augmentations soudaines de coûts susceptibles de pousser les entreprises à délocaliser leurs activités de production à forte intensité de carbone. Dans le même temps, des normes plus strictes garantiraient que les incitations à réduire les émissions se renforcent de manière prévisible au fil du temps. Dans le cadre du SEQE-UE, les valeurs de référence sont actualisées tous les cinq ans, et les normes d’émission sont revues à la baisse chaque année en conséquence entre deux actualisations. Il sera important de faire augmenter par palier les tarifs du carbone, via un durcissement des niveaux de référence et des hausses programmées du prix plancher du carbone, pour favoriser les investissements verts considérables nécessaires à la décarbonation de la production au Canada.
Des règles communes concernant les crédits carbone et un meilleur suivi des crédits sont nécessaires
Une gestion active des marchés de crédits pourrait être nécessaire à la préservation de l’uniformité des signaux de prix du carbone. Dans le cadre des systèmes d’échange de droits d’émission, il est possible de gérer les chocs subis par la demande de crédits d’émission en définissant pour leur prix des valeurs plancher et plafond (autrement dit, un « corridor de prix »). On peut recourir dans la même optique à une gestion active de l’offre de crédits. En Europe, la réserve de stabilité du marché joue le même rôle dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE). Au Canada, des limites relatives au prix ou à l’utilisation des crédits s’appliquent dans certaines provinces. Ainsi, le système québécois de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE) impose un prix de réserve pour les quotas d’émission attribués par voie d’enchères, qui constitue un prix minimal. De tels mécanismes contribuent à éviter une surabondance de crédits, de même que les dispositions limitant la période pendant laquelle les participants peuvent conserver des crédits (Tableau 2.3). Les lignes directrices fédérales mises à jour recommandent que les provinces fixent des limites concernant l’utilisation des crédits et qu’elles établissent des registres de suivi des unités de conformité dans le cadre des systèmes applicables aux grands émetteurs (Gouvernement du Canada, 2021[6]). Les provinces sont tenues de veiller à ce que l’offre de crédits ne dépasse pas la demande, de sorte que les prix des crédits suivent globalement l’évolution du prix minimum du carbone. Il peut toutefois être difficile de surveiller les prix des crédits, ceux-ci n’étant pas communiqués ou rendus publics. Un suivi centralisé de l’offre de crédits et de leur prix faciliterait la gestion des crédits et favoriserait le respect des exigences fédérales relatives aux normes d’intensité d’émission. On pourrait mettre en place un tel suivi en étoffant le rôle du Système de création et de suivi des crédits (SCSC) fédéral.
Une harmonisation de la rigueur des systèmes canadiens de tarification du carbone ouvrirait la voie à une augmentation des échanges de crédits entre juridictions. Les échanges sont pour l’instant limités aux provinces appliquant le « filet de sécurité » (où les participants échangent des crédits d’émission avec des installations situées dans d’autres provinces participantes) et au Québec (où les échanges sont possibles avec la Californie). Le gouvernement fédéral envisage de permettre une augmentation des échanges de crédits entre les provinces dotées de systèmes compatibles – comme toutes les juridictions ayant un système applicable aux grands émetteurs. Cela pourrait ouvrir des possibilités de réduction des émissions à moindre coût au Canada.
Une plus grande confiance dans les prix futurs renforcerait les signaux de prix du carbone
Il est important que la perspective d’une augmentation des prix futurs du carbone suscite la confiance, pour stimuler l’investissement vert. Comme dans d’autres pays, la rigueur des futures politiques climatiques, notamment en matière de tarification du carbone, dépendra des décisions prises par les futurs gouvernements. L’incertitude réglementaire peut amener les entreprises à différer des dépenses en capital volumineuses ou à sous-investir dans les technologies vertes (voir par exemple Berestycki et al. (2022[20])). Le gouvernement fédéral canadien propose d’utiliser le nouveau Fonds de croissance du Canada pour offrir des « contrats sur différence » en vue de réduire l’incertitude qui entoure le coût du carbone. En vertu d’un tel contrat, le gouvernement compenserait le manque à gagner d’une entreprise réalisant un investissement vert majeur si le prix du carbone s’avérait inférieur au niveau prévu. De même, l’entreprise restituerait au gouvernement les gains excédentaires réalisés si le prix du carbone s’avérait supérieur au niveau prévu. Des dispositifs similaires sont utilisés pour favoriser les investissements dans l’électricité propre en éliminant le risque lié à la volatilité des prix du courant électrique, notamment au Royaume-Uni (D’Arcangelo et al. (2022[8]), OCDE (2022[21])). Une fois utilisés concrètement – idéalement d’abord s’agissant d’une palette restreinte d’investissements pour lesquels la réduction des émissions peut être estimée et vérifiée –, les contrats sur différence pour le carbone devraient améliorer le climat de l’investissement pour les technologies vertes au Canada, et favoriser les initiatives d’atténuation des émissions dans les secteurs à forte intensité de carbone. Il faut également assurer la cohérence des messages envoyés par les autorités fédérales et provinciales en matière de politique climatique (Encadré 2.4).
Encadré 2.4. Politique climatique et partage des compétences selon la Constitution du Canada
Il sera essentiel de mettre en cohérence les objectifs climatiques des autorités fédérales et provinciales pour garantir la rapidité et l’efficacité des mesures prises pour atténuer les émissions de gaz à effet de serre (GES). Les investissements verts majeurs, tels que le déploiement de technologies de captage du carbone et de systèmes énergétiques verts, se caractérisent par des dépenses en capital considérables et de longs délais de réalisation. Pour que les projets importants démarrent maintenant, il faut donner aux producteurs des signaux clairs quant à l’orientation future de l’action publique. Or, ces signaux ont été brouillés au cours des dernières années par les divergences d’objectifs climatiques observées entre le gouvernement fédéral canadien et les provinces fortement tributaires des combustibles fossiles – certaines, comme l’Alberta, tirent une proportion importante de leurs recettes des ressources naturelles, en particulier lorsque les cours du pétrole sont élevés (Graphique 2.9).
Les compétences législatives relatives aux politiques publiques de protection de l’environnement, notamment à la politique climatique, sont divisées entre le gouvernement fédéral et les autorités provinciales du Canada. Les progrès accomplis ces dernières années en matière de politique climatique ont été marqués par le renforcement du rôle joué par le gouvernement fédéral, notamment s’agissant de la tarification du carbone et de la réglementation des émissions de méthane provenant de l’extraction de pétrole et de gaz.
Certaines provinces ont activement résisté à cette évolution, estimant que les autorités fédérales outrepassaient leurs pouvoirs dans le domaine de la politique climatique. L’Alberta, la Saskatchewan et l’Ontario ont contesté la constitutionnalité de la Loi fédérale sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, qui fixe des normes nationales minimales de rigueur pour les systèmes de tarification des émissions de gaz à effet de serre. Ces provinces ont fait valoir qu’en adoptant cette loi, le Parlement fédéral était allé au-delà de ses prérogatives. La Cour suprême du Canada a rejeté cet argument en 2021. Une majorité des magistrats de la plus haute juridiction du pays a jugé que le Parlement avait compétence pour adopter cette loi, dans la mesure où elle concernait une question d’intérêt national en vertu des dispositions sur la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada figurant dans l’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Continuer de promouvoir la coopération internationale autour des instruments de réduction des émissions fondés ou non sur les prix
Les risques de fuite de carbone pourraient s’accentuer parallèlement à l’augmentation du coût du carbone au cours des années à venir. Ces risques de fuite de carbone sont plus élevés au Canada, compte tenu de l’absence de tarification des émissions chez certains de ses principaux partenaires commerciaux de la région, et du recours plus important aux mesures de soutien à la technologie aux États-Unis, notamment en vertu de la récente loi sur la réduction de l’inflation (IRA, Inflation Reduction Act). Dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022, le Canada s’est engagé à mettre en place de nouveaux dispositifs importants de soutien à la technologie afin d’atténuer l’impact de l’IRA sur la compétitivité-coûts de l’économie canadienne. Le Canada a également étudié la possibilité de mettre en place des ajustements carbone aux frontières. L’Union européenne mettra progressivement en place un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) à partir d’octobre 2023. Conçu pour réduire l’avantage de coût dont bénéficient les importations à forte intensité de carbone non assujetties à un dispositif rigoureux de tarification des émissions, le MACF vise en outre à encourager une production industrielle plus propre dans les pays non membres de l’UE. Au Canada, la mise en œuvre d’ajustements carbone aux frontières pourrait s’avérer difficile, au moins à court terme. Il faudrait que ces dispositifs tiennent compte des différences marquées existant entre les systèmes provinciaux de tarification du carbone en place au Canada (Boessenkool et al., 2022[24]).
Le Canada continue de promouvoir la coopération internationale en vue de s’attaquer à l’enjeu collectif que constitue le changement climatique. La coopération est essentielle pour renforcer les initiatives d’atténuation des émissions à l’échelle mondiale et réduire le coût des mesures d’atténuation dans chaque économie. Les pays comme le Canada, qui sont dotés de cadres d’action climatique évolués, ont également un rôle important à jouer en partageant leurs connaissances et leurs données d’expérience. D’autres pays à structure fédérale pourraient tirer des enseignements de l’élaboration réussie par le Canada d’un cadre national de tarification des émissions, qui tient compte des différences entre les systèmes infranationaux tout en maintenant un prix plancher commun. L’approche pancanadienne de tarification de la pollution par le carbone peut également servir de modèle aux initiatives internationales visant à accroître la proportion d’émissions de gaz à effet de serre assujettie à des instruments de tarification (Parry, 2021[25]).
Le Canada participe en outre activement aux efforts entrepris à l’échelle mondiale pour lutter contre les émissions de méthane (voir ci-dessous) et compte parmi les membres de la plateforme internationale sur la finance durable (IPSF). Le gouvernement fédéral a entrepris l’élaboration d’un cadre de divulgation obligatoire des risques liés au climat, en se fondant sur celui du Groupe de travail international sur la publication d’informations financières relatives au climat. Dans le budget de 2022, le gouvernement a annoncé que les institutions financières sous réglementation fédérale seraient tenues de publier des informations sur le climat à compter de 2024. Cette initiative, qui sera progressivement mise en œuvre, contribuera à attirer des investissements verts dans des secteurs essentiels et à soutenir les efforts internationaux consacrés au renforcement de la finance durable sur le plan environnemental. Le Forum inclusif de l’OCDE sur les approches d’atténuation des émissions de carbone donne au Canada et à d’autres pays l’occasion de partager les expériences acquises avec tout un éventail de politiques climatiques.
Accélérer la décarbonation de l’électricité
La production d’électricité est plus verte au Canada que dans beaucoup d’autres pays de l’OCDE (Graphique 2.10). Certaines provinces, dont le Québec et la Colombie-Britannique, bénéficient d’une importante puissance hydraulique installée. La mise à l’arrêt de centrales au charbon dans l’Ontario (de 2003 à 2014) et l’Alberta (fin prévue en 2023) a contribué à réduire encore plus l’intensité de carbone de la production nationale d’électricité. Les émissions du secteur ont reculé de 41 % au cours de la dernière décennie alors que, sur la même période, la production a augmenté de 12 %. Le gouvernement fédéral s’est fixé pour objectif d’atteindre la neutralité des émissions du secteur de la production d’électricité d’ici 2035.
Les provinces canadiennes ont besoin de nouvelles sources d’électricité décarbonée pour remplacer leurs vieilles centrales à forte intensité d’émission et se préparer à l’augmentation de la demande. Il leur sera difficile de trouver des projets hydroélectriques à faible coût qui soient réalisables (AIE, 2022[26]). A contrario, la production d’électricité renouvelable d’origine éolienne ou solaire est aujourd’hui beaucoup moins chère qu’il y a dix ans, et ce malgré les pressions sur les prix des intrants en 2022 (BloombergNEF, 2022[27]). Les provinces devraient de plus en plus exploiter leur potentiel éolien et solaire dans les années à venir, en comptant notamment sur des appels d’offres en faveur des énergies propres soutenus par les pouvoirs publics. Selon les prévisions de la Régie de l’énergie du Canada (REC), la part du solaire et de l’éolien dans le total de l’électricité produite au Canada devrait passer de 5 % en 2019 à 15 % en 2035. Cela nécessiterait de produire, chaque année pendant 15 ans, un térawattheure (TWh) supplémentaire d’électricité d’origine solaire (soit suffisamment pour alimenter environ 100 000 logements), et 4.2 TWh de plus d’électricité d’origine éolienne. Or, entre 2010 et 2020, les augmentions moyennes annuelles ont été beaucoup plus faibles : 0.2 TWh pour le solaire et 2.7 TWh pour l’éolien.
Le pays a besoin de politiques offrant un bon ratio coût-efficacité pour, à la fois, encourager l’offre d’électricité propre et modérer la demande. Outre la production d’électricité renouvelable, les administrations canadiennes soutiennent la mise au point des petits réacteurs modulaires. Pour ce qui est de la demande, des mesures visant à l’atténuer pendant les périodes de pointe peuvent aider à réduire la puissance installée supplémentaire requise pour électrifier les transports, l’industrie et le chauffage. Il faudra encore de gros investissements dans les réseaux électriques des provinces pour permettre le raccordement de nouvelles sources de demande et de production d’électricité plus intermittente. Dans ce contexte, l’une des priorités évidentes est la recherche de solutions peu coûteuses de stockage de l’électricité à l’échelle régionale.
Une collaboration efficace entre les différents niveaux de l’administration peut contribuer à limiter le coût de la décarbonation de l’électricité. Le gouvernement du Canada influe sur la dynamique des marchés provinciaux de l’électricité à travers les politiques climatiques fédérales – notamment la tarification du carbone et la réglementation des émissions provenant des centrales au charbon. Mais les provinces canadiennes ont la responsabilité de l’élaboration des politiques qui portent sur leurs propres systèmes électriques.
Les obstacles à la concurrence et aux échanges peuvent augmenter le coût de la transition vers les énergies vertes
La concurrence est limitée sur la plupart des marchés provinciaux de l’électricité. Dans les provinces dotées d’une importante puissance hydraulique installée, l’ampleur des infrastructures requises pour la production, le transport et la distribution peut créer des monopoles naturels. Sur ces marchés, la production et le transport sont dominés par une entreprise publique verticalement intégrée (Tableau 2.4). Les prix de gros sont généralement réglementés sur la base du coût de service, qui est faible dans les provinces ou l’hydroélectricité est abondante. Les recettes tirées de la vente à l’exportation à des tarifs plus élevés aident également à soutenir les prix réglementés inférieurs à ceux du marché dont bénéficient les clients dans les grandes provinces exportatrices d’électricité. Le bas niveau des prix locaux profite avant tout aux entreprises énergivores et aux ménages à haut revenu qui consomment beaucoup d’électricité.
Dans la plupart des régions, le total des échanges (intérieurs et internationaux) est faible comparativement à l’offre locale. De plus, les échanges entre provinces canadiennes sont souvent moins importants que les ventes d’électricité sur les marchés des États-Unis. Le petit nombre d’interconnexions limite le transport d’électricité entre l’est et l’ouest du Canada, les provinces ayant tendance à donner la priorité à l’autosuffisance. Au contraire, les grandes provinces exportatrices disposent de bonnes interconnexions avec les marchés voisins des États-Unis, avec des coûts de transport qui peuvent être plus faibles.
Tableau 2.4. Caractéristiques des marchés provinciaux de l’électricité
Principale source d’électricité (2019) |
Production concurrentielle ou réglementée ? |
Propriété publique des principaux producteurs ? (1) |
Indépendance du transport ? |
Prix de détail fixés par le marché ? |
|
---|---|---|---|---|---|
Ontario |
Nucléaire |
Hybride (2) |
Oui |
Oui |
Principalement réglementés sur le marché résidentiel |
Québec |
Hydro |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Colombie-Britannique |
Hydro |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Alberta |
Gaz et charbon |
Concurrence |
Non |
Oui |
Fixés par le marché |
Manitoba |
Hydro |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Saskatchewan |
Charbon et gaz |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Nouvelle-Écosse |
Charbon et gaz |
Réglementation |
Non |
Non |
Réglementation |
Nouveau-Brunswick |
Nucléaire et hydro |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Terre-Neuve-et-Labrador |
Hydro |
Réglementation |
Oui |
Non |
Réglementation |
Île-du-Prince-Édouard |
Éolien |
Réglementation |
Non |
Non |
Réglementation |
Note : (1) Structure d’actionnariat de l’exploitant principal ; (2) Les garanties contractuelles et les prix fixes dont bénéficient les exploitants influent sur les prix de gros. Les utilisateurs finals peuvent choisir d’acheter leur électricité aux tarifs réglementés.
Source : Luu (2016[28]) ; et AIE (2022[26]).
Les avantages des faibles prix réglementés de l’électricité sont contrebalancés par certains inconvénients importants. L’accès à une électricité à bas coût peut favoriser l’utilisation des véhicules et du chauffage électriques, avec des bénéfices environnementaux directs dans les provinces où les centrales sont bas carbone. Mais les mesures efficaces de tarification du carbone appliquées dans les provinces et territoires du Canada augmentent déjà la compétitivité-coûts des technologies vertes, ce qui rend moins nécessaire de recourir à des faibles prix réglementés l’électricité pour stimuler l’investissement vert. De plus, en protégeant les prix locaux des forces du marché, la réglementation en vigueur dans les provinces encourage la surconsommation d’énergie. Du fait de cette surconsommation locale, les provinces sont moins en situation de pouvoir exporter de l’électricité bas carbone vers d’autres marchés, où cette production pourrait remplacer la production fossile et réduire les émissions.
Dans les provinces qui exploitent encore des centrales thermiques fossiles, réglementer lourdement le marché de l’électricité peut aussi empêcher la répercussion du coût du carbone sur les consommateurs d’électricité (Encadré 2.5). Le fait que les exploitants de centrales thermiques conventionnelles bénéficient des systèmes applicables aux grands émetteurs – et qu’ils soient ainsi moins exposés aux coûts du carbone – réduit directement l’impact de la tarification du carbone sur les coûts de production. La répercussion de la hausse des coûts de production (des exploitants plus petits) sur les tarifs de l’électricité est, quant à elle, affaiblie par le lien que la réglementation impose entre les prix de gros et les coûts moyens de fourniture de l’électricité. Au contraire, sur un marché concurrentiel de l’électricité – avec des prix alignés sur le coût de la fourniture de la dernière unité d’électricité au réseau – la répercussion du coût du carbone peut être importante pendant les périodes où l’ajustement de l’offre et de la demande nécessite un appel de puissance fossile (AIE, 2020[29]). Mécanisme très efficace dans un environnement concurrentiel, la répercussion du coût du carbone réduit en théorie les appels de puissance à forte intensité de carbone, améliore la compétitivité-coûts des énergies propres et favorise les économies d’électricité en période de pointe. De tels canaux peuvent ne plus fonctionner sur des marchés très réglementés, et il faut alors recourir à des instruments d’action supplémentaires, plus coûteux, pour stimuler l’investissement dans les énergies propres et encourager l’efficacité énergétique.
Les obstacles implicites aux échanges d’électricité entre provinces pourraient aussi influer sur les coûts de la production et du stockage de l’électricité dans les années à venir. Si la concurrence et le commerce entre provinces sont entravés, il est moins probable que de nouveaux projets de centrales aux énergies propres voient le jour là où les rendements sont les plus élevés. La segmentation des marchés provinciaux de l’électricité pourrait aussi limiter le déploiement des solutions peu coûteuses éventuellement disponibles pour stocker une quantité croissance d’énergie intermittente.
Encadré 2.5. La répercussion du coût du carbone sur les marchés réglementés de l’électricité
Sur des marchés concurrentiels, tarifer le carbone peut être un puissant moyen d’augmenter la rentabilité de l’électricité décarbonée et d’encourager la mise à l’arrêt des centrales les plus polluantes. Une fois en place, une taxe carbone ou un système d’échange de droits d’émission augmentent les coûts des moyens de production traditionnels au charbon ou au gaz naturel. La répercussion de ces coûts est forte, en particulier en période de demande de pointe (Fabra et Reguant, 2014[30]). Tant que des centrales fossiles demeurent raccordées au réseau, les fournisseurs d’électricité renouvelable bénéficient de prix plus élevés. En couplant cela avec des instruments destinés à protéger les fournisseurs bas carbone de la volatilité des prix de gros, on peut encourager l’investissement dans l’éolien et le solaire, et ainsi accélérer la sortie des installations alimentées aux combustibles fossiles très coûteux. C’est ainsi que le Royaume-Uni a procédé pour fermer la plupart de ses centrales au charbon dans les années 2010, avec l’aide d’appels d’offres publiques de déploiement de parcs éoliens (Blanchard et Tirole, 2021[31]). Sur le marché concurrentiel de l’électricité de l’Alberta, la tarification du carbone a augmenté le coût marginal de production de l’électricité au charbon par rapport à celui d’autres sources moins émettrices de carbone, ce qui a progressivement éliminé le charbon du mix électrique ces dernières années (Olmstead et Yatchew, 2022[11]). Ces mêmes forces sont entravées sur les marchés réglementés, tels qu’il en existe dans la plupart des autres provinces canadiennes. La réglementation des appels de puissance et des prix de gros peut réduire la pression concurrentielle de la taxe carbone sur les centrales à forte intensité de carbone. Dans certaines provinces, les groupes de production au charbon et au gaz naturel ont aussi l’avantage de participer à des programmes applicables aux grands émetteurs, qui exonèrent une partie de leurs émissions de la taxe carbone. Dans les provinces où l’électricité est tarifée sur la base du coût de service, cela dilue encore plus l’effet de la tarification du carbone sur les factures d’électricité (Dion, 2018[32]). Dans le même temps, la réglementation des prix de détail peut affaiblir les mesures conçues pour inciter les clients à faire des économies d’énergie (AIE, 2020[29]).
Des mesures d’incitation à la fourniture d’une électricité propre
Une transition à long terme vers une tarification fondée sur le marché pourrait améliorer l’efficience du marché de l’électricité dans les provinces où il est très réglementé. L’exposition aux prix du marché, par exemple grâce à l’augmentation des échanges et de la concurrence, pourrait faire monter les prix de l’électricité dans certaines provinces canadiennes (Luu, 2016[28]). De ce fait, les bénéfices des exploitants des centrales locales augmenteraient eux aussi. La hausse des rendements de l’investissement privé dans la production d’électricité décarbonée, si elle est associée à des dispositifs protégeant de la volatilité des prix, pourrait en retour limiter la nécessité, pour les pouvoirs publics, de prendre des mesures supplémentaires de soutien de l’offre d’électricité renouvelable. Accompagnées d’investissements dans les réseaux et d’avancées vers l’instauration d’une bourse de l’électricité avec les marchés concurrentiels de la région, des réformes engagées par les provinces pour libéraliser leurs marchés de l’électricité pourraient également contribuer à encourager les économies d’énergie et libérer davantage d’électricité propre à destination de l’exportation (Encadré 2.6).
Encadré 2.6. Estimations indicatives de l’effet d’une réforme de la tarification de l’électricité sur la demande résidentielle
Les subventions implicites présentes dans les prix réglementés de l’électricité du Canada favorisent une forte consommation d’électricité dans les logements et les entreprises (Graphique 2.11, parties A et B) (Luu, 2016[28]). Dans les provinces canadiennes où le marché de l’électricité est réglementé et la production hydroélectrique abondante, les prix de l’électricité tendent à être plus bas que sur les marchés concurrentiels du Canada et de certaines régions des États-Unis. Les coûts de l’électricité sont notamment inférieurs pour les clients résidentiels, ce qui a des avantages : une électricité moins coûteuse décourage de se chauffer au gaz naturel – quand cette possibilité existe – et incite à opter pour un véhicule électrique. Mais il existe aussi des inconvénients importants. Une électricité peu chère peut entraîner une surconsommation énergétique et perturber l’allocation des ressources au bénéfice des activités énergivores. Les ménages à haut revenu en profitent le plus. Mettre en commun l’électricité des marchés réglementés et concurrentiels de la région permettrait une transition vers une tarification de l’électricité fondée sur le marché. Aligner les prix sur ceux du marché de gros concurrentiel de l’Alberta augmenterait la facture d’électricité de nombreuses provinces. Les porter au niveau plus élevé des marchés des États-Unis provoquerait de plus grands changements encore (Pineau, 2008[33]).
L’électricité, si elle était tarifée plus cher, serait consommée de façon plus efficiente. Se fondant sur des estimations prudentes de la réponse de la demande à long terme aux prix de l’électricité et sur des hypothèses analogues à celles retenues dans Pineau (2008[33]), la partie C du Graphique 2.11 montre des estimations simplifiées des baisses de consommation d’électricité qui pourraient se produire si la tarification appliquée par les provinces aux consommateurs résidentiels était désormais fondée sur le marché. Ces effets estimés sont les plus marqués dans les provinces où les prix locaux sont actuellement très bas, comme le Québec. Augmenter l’efficacité énergétique libérerait de l’électricité propre pour d’autres usages, notamment les exportations, et pourrait réduire la production plus coûteuse d’électricité fossile dans la région, donc les émissions de gaz à effet de serre (Graphique 2.11, partie D). Les bénéfices environnementaux pourraient être contrebalancés par une transition locale plus lente vers des technologies bas carbone comme les véhicules électriques. De telles effets seraient toutefois atténués par les hausses prévues du prix plancher du carbone et par les mesures de soutien aux véhicules électriques.
Les recettes supplémentaires issues d’une tarification de l’électricité fondée sur le marché pourraient être directement redirigées vers les ménages sous la forme de transferts forfaitaires (Pineau, 2008[33]), comme dans le cas de la redistribution fédérale des recettes provenant de la tarification du carbone dans les provinces ayant adopté le filet de sécurité fédéral. Les montants des rabais seraient, dans l’idéal, décorrélés de la consommation d’électricité des ménages. Cela bénéficierait globalement aux personnes à plus faible revenu, qui dépensent moins pour l’électricité que les ménages aisés (Graphique 2.11, partie E). Les personnes en mesure de consommer moins d’électricité profiteraient également d’une telle mesure : leur facture diminuerait sans que cela ait un impact sur le rabais qui leur est accordé. La partie F du Graphique 2.11 illustre les effets possibles, sur le revenu net, d’une tarification de l’électricité fondée sur le marché, compte tenu des rabais.
L’augmentation des échanges d’électricité entre provinces pourrait accroître la concurrence sur les marchés actuellement dominés par un petit nombre de gros producteurs. Lorsqu’elles envisagent d’intégrer à long terme leurs marchés de l’électricité pour l’instant distincts, les provinces canadiennes pourraient s’inspirer du modèle des bourses de l’électricité mises en place dans d’autres pays de l’OCDE (Encadré 2.7). Augmenter les échanges d’électricité aurait pour avantage supplémentaire de réduire les coûts de stockage dans les régions qui dépendent de plus en plus de sources d’énergie intermittentes. Par exemple, quand des parcs éoliens et solaires ont été déployés, il est moins nécessaire de recourir à des batteries coûteuses si des réservoirs hydrauliques sont utilisés pour équilibrer l’offre et la demande (voir, par exemple, Brinkman et al., (2021[35]), Dolter et Rivers (2018[36])).
Encadré 2.7. Études de cas : les bourses de l’électricité aux États-Unis et en Europe du Nord
Des marchés communs de gros de l’électricité existent dans d’autres pays de l’OCDE. Aux États-Unis, les exploitants de centrales du New Jersey et de Pennsylvanie ont formé en 1927 un réseau interconnecté dénommé « PJM ». Dans le nord de l’Europe, la Norvège s’est associée à la Suède, puis à d’autres pays nordiques, pour former un marché de gros de l’électricité qui s’est ouvert au début des années 1990. Ces deux projets ont donné naissance à des marchés au comptant concurrentiels, avec des prix de gros largement déterminés par le coût marginal – le prix de la dernière unité d’électricité nécessaire pour ajuster l’offre à la demande.
Pour les exploitants de centrales à bas coût, ces marchés peuvent apporter davantage de recettes que les marchés locaux fermés. Cependant, les fournisseurs et les clients doivent faire avec une volatilité des prix supérieure à ce qu’elle serait sur des marchés réglementés. Cette volatilité peut être atténuée au moyen d’instruments financiers, ou de l’intervention directe des gestionnaires du marché. Au sein du réseau PJM, les participants utilisent des contrats à terme et des transactions bilatérales qui réduisent l’exposition des acheteurs aux prix volatils du marché au comptant. De même, les membres de NordPool utilisent des contrats financiers dans un but de gestion des risques et notamment de couverture du risque de prix.
Les pouvoirs publics peuvent prendre des mesures supplémentaires pour protéger les ménages des difficultés rencontrées lorsque les prix de l’électricité sont très élevés. Par exemple, l’administration centrale norvégienne a temporairement appliqué des subventions aux prix pour réduire la pression des coûts sur les ménages en 2022, pendant la crise énergétique.
Source : PJM (2022[37]) ; et Nord Pool (2022[38]).
Accroître les échanges d’électricité entre marchés voisins peut aussi améliorer l’accès à l’électricité propre dans les provinces qui dépendent encore des combustibles fossiles. L’achèvement de la « Boucle de l’Atlantique », qui doit raccorder le Québec aux marchés de l’électricité des provinces de l’Atlantique, vise ce type de gain. Les provinces devraient continuer de mobiliser des efforts bilatéraux pour mettre en commun leur production et investir dans des liaisons de transport transfrontalières lorsque cela est possible compte tenu des contraintes géographiques. Les investissements de l’État fédéral dans les infrastructures soutiennent ce type de projet. La distance entre les marchés influe sur le coût et la viabilité du développement des liaisons de transport entre provinces. Les projets achevés récemment viennent rappeler les coûts d’investissement initiaux nécessaires à l’interconnexion de réseaux. Par exemple, la ligne de transport d’électricité de Birtle, qui s’étend sur 80 km et relie un poste électrique de l’ouest du Manitoba à la frontière entre le Manitoba et la Saskatchewan, est un projet dont le coût a été estimé à 69.3 millions CAD en 2019 (Manitoba Hydro, 2020[39]). Cela représente un coût de près de 900 000 CAD par kilomètre. Et il va sans dire que plus les projets sont vastes et complexes, plus les coûts d’investissement augmentent.
La hausse des coûts de production et de transport dans les années à venir fournira des occasions de réévaluer les politiques de tarification. Pour pouvoir intégrer la production intermittente sans mettre en péril la stabilité des approvisionnements, il faudra des investissements dans les infrastructures de distribution et de stockage. Des travaux de modernisation du réseau de transport sont également nécessaires à l’échelle de tout le pays (AIE, 2022[26]). Cela tirera vers le haut le coût d’acheminement de l’électricité jusqu’aux consommateurs. Les compagnies d’électricité devraient anticiper ces tendances en réévaluant dès à présent les méthodes de tarification inefficaces.
Sans une réforme majeure de la réglementation des marchés provinciaux de l’électricité, des mesures supplémentaires sont nécessaires pour accélérer la décarbonation de l’électricité au Canada. Certaines provinces, parce qu’elles ont moins de possibilités d’accès à des sources d’énergie renouvelables, ont plus de travail à faire que d’autres pour fermer leurs centrales à forte intensité d’émission. Des régions comme la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse dépendent encore fortement de la production d’électricité d’origine fossile (Graphique 2.12). Les réglementations fédérales exigent l’élimination des centrales au charbon d’ici à 2030. Le gaz naturel, en revanche, continuera de faire partie du mix électrique pendant beaucoup plus longtemps. L’Alberta et la Saskatchewan font partie des provinces qui cherchent à remplacer leurs anciens moyens de production au charbon par de nouvelles centrales au gaz. Le raccordement de ces nouvelles centrales limitera la marge de réduction des émissions, à moins que l’on procède ultérieurement à de coûteuses opérations de déploiement de technologies de captage du carbone.
Pour renforcer les signaux indiquant qu’il faut verdir le système électrique du pays, le gouvernement fédéral propose d’introduire un règlement sur l’électricité propre. Ce nouveau règlement imposerait l’abandon, d’ici à 2035, des centrales fossiles sans dispositif de réduction. Comme il est très probable que la réglementation bloque les signaux-prix du carbone sur certains marchés provinciaux de l’électricité, une norme sur l’électricité propre peut utilement contribuer à accélérer la décarbonation du réseau (Shahnazari et al., 2017[40]). Le recours à des certificats négociables peut rendre la mesure plus efficiente. Pour que les moyens de production fondés sur les énergies propres soient déployés là où les rendements sont les plus élevés, la réglementation devrait aussi être conçue pour être neutre, tant du point de vue des sources d’énergie propres que de l’implantation géographique. La mise en œuvre de politiques similaires aux États-Unis nous apprend que des restrictions géographiques peuvent encourager la production locale d’électricité propre, mais aussi accroître les coûts de l’électricité (Carley et al., 2018[41]).
Des mesures de soutien des technologies continueront de s’appliquer tandis que la réglementation fédérale devient plus stricte. Ressources naturelles Canada administre un éventail de subventions fédérales destinées à améliorer la compétitivité-coûts de la production d’électricité bas carbone. En 2022, le gouvernement fédéral a lancé une nouvelle initiative proposant aux investisseurs un crédit d’impôt remboursable pouvant aller jusqu’à 30 % des dépenses en capital consacrées au solaire photovoltaïque ou à d’autres systèmes de production.
Les pouvoirs publics devraient également veiller à soutenir de façon appropriée les travailleurs et les communautés sévèrement touchées par l’abandon des centrales au charbon. Le retour d’expérience du Canada et d’autres pays donne à penser que le mieux pour cela est de recourir à la fois à une politique du marché du travail, des investissements territorialisés et des mesures destinées à lever les obstacles à la mobilité géographique (Encadré 2.8).
Encadré 2.8. Soutenir les travailleurs touchés par la fin des centrales au charbon : Alberta, Allemagne et Grèce
L’abandon accéléré des centrales au charbon peut avoir des répercussions économiques et sociales durables sur les communautés et les travailleurs touchés. Les provinces qui n’ont pas encore fermé toutes leurs centrales au charbon – notamment, la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick – peuvent apprendre de l’expérience d’autres régions du Canada et d’autres pays de l’OCDE. Le retour d’expérience de l’Alberta et de l’Allemagne montre que la reconversion, le retour à l’emploi parrainé par l’employeur et l’aide à la réinstallation peuvent atténuer les dommages causés par le déclin rapide d’une filière. L’investissement public, y compris dans des projets liés aux énergies vertes, peut, de son côté, favoriser l’activité et la création d’emplois dans les régions les plus touchées tout en aidant à remplacer les centrales fossiles mises à l’arrêt. C’est en grande partie la stratégie adoptée par la Grèce pour soutenir les travailleurs et les communautés ayant subi l’arrêt de l’extraction de la lignite.
Alberta
La mise à l’arrêt des dernières centrales au charbon de l’Alberta a été planifiée après un changement de gouvernement en 2015. En plus d’indemniser les entreprises touchées par la fermeture forcée de ces installations, l’administration a financé des programmes de transition pour aider les travailleurs. Les aides comprenaient des subventions pour les personnes temporairement sans emploi ou proches de l’âge de la retraite, le remboursement des frais de déménagement, des subventions pour reconversion et l’accès à des conseils en évolution professionnelle. Des comités d’ajustement, composés de représentants des entreprises et des syndicats, ont soutenu individuellement les travailleurs licenciés, notamment en leur donnant accès à des services de retour à l’emploi. Les pertes d’emploi et les impacts économiques plus larges subis par les collectivités concernées ont été en partie compensés par des possibilités d’emploi dans de nouveaux projets d’infrastructure liés à l’énergie et aux transports.
Allemagne
La fin des dernières subventions publiques accordées à la filière du charbon en 2007 a contraint les mines encore exploitées dans la région de la Ruhr à cesser leur activité. De 24 000 personnes, l’effectif du la filière est passé à moins de 4 000 en 2018 quand les dernières mines ont fermé. L’abandon du charbon dans la région a été géré conjointement par les entreprises, les syndicats et les pouvoirs publics. Des transferts d’emploi parrainés par l’employeur et des programmes de reconversion financés par l’État ont aidé les travailleurs du domaine à trouver un nouvel emploi. Des plans de préretraite subventionnés ont été proposés aux personnes proches de l’âge de la retraite. Les travailleurs réorientés vers de nouveaux emplois ont été nombreux à voir leurs revenus d’activité baisser, mais une hausse importante du chômage a été évitée.
Grèce
Le gouvernement de la Grèce prévoit de mettre fin à la production d’électricité à la lignite d’ici 2028. Cela entraînera d’importantes pertes d’emploi en Macédoine-Occidentale, où se situent la plupart des mines de lignite. Un grand nombre des personnes licenciées qui travaillaient dans l’extraction minière ou les secteurs connexes devraient obtenir l’un des emplois créés par les investissements publics dans la région. Les initiatives qui figurent dans le plan grec de développement d’une transition juste prévoient notamment des dépenses en capital dans la production d’électricité au gaz naturel et aux sources renouvelables, ainsi que des investissements dans le tourisme et d’autres secteurs. Des mesures prises au niveau régional soutiennent également les personnes et les entreprises touchées par l’abandon de la lignite.
Source : Jackson et Hussey (2019[43]) ; World Resources Institute (2021[44]) ; OCDE (2023[45]).
Des obstacles réglementaires aux nouveaux projets dans le secteur de l’énergie peuvent réduire les rendements de l’investissement dans l’électricité propre. Des progrès ont été faits dans certaines juridictions pour remédier aux processus d’approbation chronophages. En 2022, la province de Terre-Neuve-et-Labrador a mis fin à une interdiction qui frappait l’éolien extracôtier. L’Ontario, l’Alberta et la Colombie-Britannique ont pris des mesures pour accélérer le processus d’octroi de licence, notamment en coordonnant les processus d’approbation au niveau provincial (voir, par exemple, Gouvernement de l’Ontario, (2019[46])).
Il reste d’importants obstacles qui peuvent ralentir l’expansion de la production d’électricité bas carbone. Certaines provinces continuent d’interdire l’éolien extracôtier (Gouvernement de l’Ontario, 2019[46]). Les exigences quant aux rapports et aux consultations augmentent les coûts des demandes, qui sont déjà importants pour les projets nécessitant des études d’impact exhaustives. Les consultations obligatoires peuvent nécessiter la participation de nombreuses parties prenantes, parmi lesquelles les propriétaires fonciers locaux, les municipalités et les communautés autochtones. Pour obtenir le feu vert, les projets ont parfois besoin de l’approbation des autorités municipales, provinciales et fédérales. Les résultats des processus d’examen, parce qu’ils sont à la discrétion du ministère, peuvent être très incertains. Cela peut avoir une incidence sur le coût de financement du déploiement des énergies propres, en augmentant les rendements nécessaires à la viabilité des projets.
Les pouvoirs publics devraient travailler à réduire les obstacles réglementaires et administratifs inutiles aux investissements dans les énergies renouvelables. Les interdictions provinciales qui frappent l’éolien extracôtier devraient être évitées. L’administration fédérale pourrait s’attacher plus activement à élaborer des lignes directrices ou des modèles de règles que les juridictions infranationales puissent adopter. Il pourrait s’agir, par exemple, de recommander des seuils concernant la taille du projet pour les études d’impact obligatoires. Les provinces devraient également être encouragées à délivrer des approbations préalables aux terrains adaptés à des projets liés aux énergies renouvelables. Les demandes relatives à de tels sites pourraient faire l’objet d’un processus d’examen simplifié, comme cela a été proposé pour les pays d’Europe (Commission européenne, 2022[47]). Les agences fédérales pourraient aider les provinces et les municipalités avec des données normalisées leur permettant d’identifier les terrains où les risques environnementaux sont faibles.
Des politiques pour modérer la demande d’électricité
La transition verte augmentera la demande d’électricité. Stimulée en partie par la hausse des prix du carbone sur les sources fossiles en concurrence, la consommation d’électricité devrait augmenter avec l’électrification de l’industrie, des transports et des bâtiments (Graphique 2.13), une évolution qui viendra s’ajouter aux pressions déjà exercées par la croissance de la population et de l’économie nationales. Selon certaines estimations, la demande d’électricité en 2050 pourrait être jusqu’à 2.1 fois plus élevée qu’aujourd’hui, ce qui exigerait 2.2 à 3.4 fois la puissance installée actuelle (Dion et al., 2022[48]).
Pour maintenir l’efficacité de son système électrique et limiter les augmentations de puissance nécessaires, il sera important que le Canada réduise sa consommation d’électricité de pointe. Les pointes de consommation déterminent à la fois la puissance installée minimale requise pour satisfaire la demande locale et les appels intrajournaliers de puissance plus coûteuse et à forte intensité de carbone.
Pour résister à ces pressions, il sera important que le pays, en plus d’investir dans les systèmes de stockage, ait davantage recours à des mesures de gestion de la demande telles que la tarification dynamique. Beaucoup de provinces proposent une tarification dynamique à leurs clients industriels (33 % de la demande d’électricité en 2020) mais seule l’Ontario a mis en place un tel barème pour les ménages (AIE, 2022[26]). Faire de la tarification dynamique l’option proposée par défaut aux clients résidentiels aiderait à déplacer la consommation vers les périodes creuses. Cela sera d’autant plus crucial quand le déploiement des véhicules électriques augmentera les appels de puissance. De plus, l’utilisation accrue des compteurs intelligents et de la tarification dynamique, ainsi qu’une bonne communication concernant les nouvelles mesures tarifaires, inciterait les utilisateurs à surveiller le coût et la quantité de l’électricité qu’ils consomment. Des prix plus élevés en période de pointe – alignés, dans l’idéal, sur le coût marginal de la production d’électricité – peuvent aider à réduire la consommation totale maximale, donc le besoin d’augmenter la puissance installée. De telles mesures pourraient venir en complément de celles qui visent à réduire la consommation énergétique globale, notamment la tarification du carbone, les normes de performance énergétiques applicables aux appareils et aux bâtiments et les incitations à la rénovation des bâtiments (voir ci-dessous).
Encadré 2.9. Priorités en matière d’atténuation et d’adaptation dans les collectivités autochtones et septentrionales
Réduire la dépendance au diesel et privilégier les solutions énergétiques propres
Plus de 250 communautés canadiennes éloignées ne sont pas raccordées au réseau électrique nord-américain. La plupart se situent dans les territoires du nord du pays et sont autochtones. Les communautés du Canada non raccordées au réseau dépendent principalement de générateurs diesel, des appareils fiables et peu coûteux à installer, dont le combustible, à forte densité énergétique, est facile à stocker. Mais le diesel est également cher, il subit la volatilité des prix du pétrole, et sa combustion rejette beaucoup d’émissions. S’il n’est pas possible en pratique de se passer du diesel dans toutes ces communautés, il est envisageable, dans beaucoup d’endroits, de le compléter avec de l’énergie éolienne ou solaire. Cela permettrait de réduire les coûts d’utilisation et les émissions.
Le Canada dispose d’un éventail de programmes de soutien des énergies propres dans les collectivités autochtones, rurales et éloignées, avec des financements et des formations en faveur de l’efficacité énergétique et du déploiement de moyens de production renouvelable. Par exemple, le programme fédéral Énergie propre pour les collectivités rurales et éloignées sert à financer des projets d’efficacité énergétique, de renforcement des compétences et d’investissement au sein de toutes les collectivités du Canada. Le programme fédéral ARDEC Nord finance des projets liés aux énergies renouvelables, des investissements en faveur de l’efficacité énergétique et le renforcement des compétences au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Nunavik et au Nunatsiavut. Ce soutien fédéral vise notamment la modernisation des éclairages dans les bâtiments de l’administration publique, la rénovation thermique des logements des personnes à faible revenu et l’installation de pompes à chaleur et de petits systèmes d’exploitation des énergies renouvelables, ainsi que des projets de développement des bioénergies dans les collectivités. De telles initiatives aideront à réduire les émissions dues à la consommation d’énergie dans les collectivités éloignées. Indépendamment de cela, l’Initiative autochtone pour réduire la dépendance au diesel (IARDD) est un programme de formation et de financement axé sur les énergies propres, qui soutient des actions climatiques pilotées par les communautés autochtones dans les collectivités éloignées qui utilisent actuellement des combustibles fossiles pour le chauffage et l’électricité.
Préparer les collectivités éloignées du nord du Canada aux changements climatiques
Le climat change rapidement dans le nord du Canada : depuis 1948, les températures y ont augmenté en moyenne trois fois plus vite que la moyenne mondiale. Ce réchauffement a un impact sur la biodiversité ainsi que les sources traditionnelles d’alimentation et les modes de vie des collectivités autochtones des territoires du Nord canadien. Beaucoup de collectivités sont vulnérables face à la montée du niveau de la mer et à l’augmentation des risques d’inondation. La durée réduite de la saison des glaces modifie les possibilités de transport sur routes gelées pendant les hivers plus chauds, un aspect crucial pour ces régions isolées dotées d’un accès limité à des routes permanentes. Les grands axes routiers et les pistes d’aéroport construits sur de la terre gelée subissent déjà des dommages à cause du dégel du pergélisol. Cela peut limiter l’accès des collectivités aux denrées alimentaires, aux combustibles, aux matériaux de construction et aux services essentiels. Les logements et les infrastructures énergétiques sont également vulnérables lorsque le pergélisol fond et se fissure.
Prenant acte des risques pour la santé, le revenu et le bien-être, les pouvoirs publics travaillent avec les collectivités indigènes et éloignées à recenser les risques et mettre en œuvre des plans d’adaptation. Les administrations fédérales et infranationales travaillent ainsi, par exemple, à modifier les normes applicables aux infrastructures de transport pour renforcer la résilience de ces dernières en période hivernale plus chaude, à effectuer un suivi de la température de surface des routes et à renforcer les grands axes routiers endommagés. Des initiatives fédérales telles que le Programme « Se préparer aux changements climatiques dans le Nord » ont soutenu l’élaboration de nouvelles règles de gestion foncière, mesures de prévention de l’érosion côtière et normes contre les inondations pour les collectivités à risque d’inondations. Les connaissances des communautés autochtones, fondées sur leur expérience de l’évolution et de la variabilité des conditions environnementales locales, peuvent aussi aider à trouver des solutions d’adaptation efficaces (OCDE, 2023[49]). Le gouvernement du Canada reconnaît que le fait de soutenir le leadership climatique autochtone et la collaboration au service de l’adaptation sont importants pour le droit à l’autodétermination.
Source : AIE (2022[26]) ; ECCC (2022[50]) ; Indigenous Climate Hub (2022[51]) ; Régie de l’énergie du Canada (2018[52]) ; RCAANC (2022[53]).
Réduire les émissions de la production pétrolière et gazière
Les émissions issues de l’extraction pétrolière et gazière représentaient 27 % des émissions de GES du Canada en 2020, soit plus que celles de n’importe quel autre secteur (Graphique 2.14). La production de sables bitumineux – l’activité du secteur ayant la plus forte intensité de carbone – a augmenté avec les prix du pétrole brut au début des années 2000, ce qui a tiré vers le haut les émissions. Son essor fait plus que compenser l’impact, sur les émissions de GES, de la baisse de l’intensité d’émission des produits pétroliers et gaziers (Encadré 2.10).
Encadré 2.10. Sources d’émissions du secteur pétrolier et gazier au Canada
Des réductions importantes des émissions sont nécessaires dans le secteur du pétrole et du gaz. L’extraction et la valorisation des sables bitumineux produisent beaucoup d’émissions liées à l’utilisation de l’énergie (Graphique 2.15), soit à peine moins de la moitié de l’ensemble des émissions de GES de la production pétrolière et gazière canadienne. De gros volumes de gaz naturel sont brûlés pour produire la vapeur ou l’eau chaude destinée à séparer le bitume des gisements souterrains de sables bitumineux (ce qu’on appelle, l’extraction in-situ). Les sables bitumineux peuvent aussi être directement extraits du sol : généralement moins polluante que l’extraction in-situ, cette extraction dite « en surface » est néanmoins à forte intensité capitalistique et très énergivore, et contribue aux émissions liées à l’utilisation de l’énergie. Les rejets de méthane dus aux fuites mais aussi aux pratiques d’éventage et de torchage du secteur de la production conventionnelle de pétrole et de gaz sont également importants (ECCC, 2022[2]). Au contraire, le raffinage et la distribution des produits pétroliers sont responsables d’une petite partie du total des émissions du secteur.
La modélisation réalisée pour le Plan de réduction des émissions pour 2030 du Canada intègre une réduction de 40 % des émissions du secteur pétrolier et gazier d’ici la fin de cette décennie par rapport aux niveaux de 2019. Le gouvernement fédéral cherche à obtenir de fortes baisses des émissions de GES dans ce secteur sans mettre en péril la compétitivité mondiale de cette industrie clé (ECCC, 2022[55]). Réglementations, mesures de soutien de l’investissement vert et instruments fondés sur le marché doivent être utilisés ensemble de manière efficace pour faire en sorte que les producteurs soient fortement incités à investir dans la décarbonation sans pour autant que cela entraîne la délocalisation des activités pétrolières et gazières dans des juridictions aux politiques climatiques moins strictes. L’utilisation effective de mesures très efficientes telles que la tarification du carbone peut rendre moins nécessaires les instruments de soutien des technologies coûteux sur le plan budgétaire et qui provoquent davantage d’effets de distorsion.
Les réglementations et la tarification du carbone aideront à décarboner la production de pétrole et de gaz tandis que les politiques de transition écologique gagnent en vigueur à l’échelle mondiale. Les perspectives à long terme du secteur pétrolier et gazier du Canada sont liées à la demande mondiale de combustibles fossiles. Sur la base des engagements annoncés, l’AIE prévoit que la demande de gaz et de pétrole pourrait commencer à reculer avant la fin de cette décennie (Graphique 2.16). La Régie de l’énergie du Canada, pour sa part, fait la prévision que la production nationale de pétrole brut pourrait se mettre à baisser au cours de la prochaine décennie (Régie de l’énergie du Canada, 2021[42]) si la demande mondiale ralentit et que les prix baissent. Des prix plus élevés du carbone applicables à une part croissante des émissions auront un fort impact sur les coûts des producteurs de pétrole et de gaz. Les modifications récentes des systèmes de redevances dans certaines provinces influent également, de manière indépendante, sur les rendements des projets pétroliers et gaziers. En 2022, la Colombie-Britannique a mis en place un nouveau régime de redevances, éliminant ainsi sa plus importante subvention implicite aux énergies fossiles – le Deep Well Royalty Program (Gouvernement de la Colombie-Britannique, 2022[56]). Ce nouveau régime a également augmenté le taux minimum de redevance, ce qui promet la récupération d’une part plus importante de la rente générée par les ressources naturelles. D’autres mesures, comme la loi fédérale sur l’évaluation d’impact, sont susceptibles de limiter directement le périmètre des nouveaux projets pétroliers et gaziers à forte intensité d’émission. Cette loi sur l’évaluation d’impact décrit le processus à suivre pour évaluer les effets environnementaux de certains grands projets désignés, dont les projets d’exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux. Elle donne à l’autorité fédérale le pouvoir de bloquer les projets très polluants. De telles mesures pourraient aider à limiter l’accumulation des actifs risquant de se retrouver échoués dans un monde où la règle est la neutralité des émissions.
La production canadienne de sables bitumineux pourrait être particulièrement vulnérable aux effets des politiques de transition verte dans les autres pays. Les coûts d’exploitation sont élevés comparativement à ceux de beaucoup de grands champs pétroliers d’autres pays. Les grands producteurs pétroliers du Moyen-Orient peuvent extraire du pétrole à moindre coût et en rejetant moins d’émissions en amont que les producteurs canadiens de sables bitumineux (Graphique 2.17). Une hausse des coûts de réduction des émissions pourrait contraindre les activités canadiennes les plus polluantes à sortir du marché mondial de l’approvisionnement plus tôt que les installations étrangères concurrentes, en particulier en cas de baisses durables des prix du pétrole (Mercure et al., 2021[58]).
Réduire les émissions de méthane du secteur pétrolier et gazier
Le secteur pétrolier et gazier contribue pour plus d’un tiers aux émissions de méthane du Canada. Améliorer la détection et la réparation des fuites et supprimer les pratiques d’éventage et de torchage de routine peut aider à réduire les émissions de méthane issues de la production conventionnelle de pétrole et de gaz. Des investissements à coût relativement faible – notamment des travaux de maintenance, de remplacement et de modernisation des équipements – peuvent réduire les émissions fugitives et limiter les quantités de méthane émises par l’éventage et le torchage (McKinsey & Company, 2020[59]). Selon certaines estimations, réduire les rejets de méthane pourrait faire plus à court terme que n’importe quelle autre mesure de réduction des émissions de GES dans le secteur de la production de pétrole et de gaz (Gorski et McKenzie, 2022[60]).
À l’appui d’un engagement à contribuer à faire baisser les émissions mondiales de méthane, le gouvernement fédéral canadien s’est fixé comme objectif à l’horizon 2025 de réduire de 40 % à 45 % par rapport à leur niveau de 2012 les émissions de méthane issues de la production de pétrole et de gaz. Il a également annoncé qu’il exigera du secteur pétrolier et gazier qu’il abaisse ses émissions de méthane d’au moins 75 % en 2030 par rapport à la valeur de référence de 2012. Un examen de 2021 a montré que le Canada est sur la bonne trajectoire pour atteindre son objectif intermédiaire. À l’heure actuelle, la réglementation est le principal instrument utilisé par le Canada pour réduire les émissions de méthane. Des règles fédérales fixent les limites relatives à l’éventage – le processus contrôlé qui consiste à éliminer les gaz en le rejetant dans l’atmosphère (ECCC, 2021[61]). Ces limites s’appliquent aux installations en amont qui extraient, traitent et transportent le gaz naturel. Les provinces ont mis en place des règles analogues. Les accords d’équivalence récemment conclus ont confirmé que les règles des provinces sont au moins aussi strictes que les règles fédérales. Le Canada a annoncé un cadre réglementaire pour réduire les émissions de méthane du secteur du pétrole et du gaz de manière à atteindre l’objectif fixé pour 2030. Des règlements fédéraux plus stricts encore devraient être pris en 2023 au sujet du méthane.
Tarifer les émissions de méthane pourrait libérer en partie de l’obligation de recourir à la réglementation et pourrait encourager les mesures de réduction peu coûteuses. Avec de meilleures méthodes d’estimation ou de mesure de ces émissions, il serait plus simple d’imposer une redevance dessus dans le cadre d’un système de tarification du carbone. Le recours à des règlements plus contraignants deviendrait alors moins nécessaire. S’il est important de réglementer afin d’empêcher les pratiques dommageables pour l’environnement, des normes de production trop prescriptives peuvent imposer aux entreprises des coûts plus élevés que les instruments d’action fondés sur le marché pour la réduction des émissions. Des travaux sont en cours pour améliorer le suivi des émissions de méthane, sous-estimées par le passé (ECCC, 2021[61]). Le Canada a beaucoup progressé ces dernières années, au point de devenir l’un des leaders des actions menées pour détecter et limiter les émissions de méthane. Il pourrait continuer de faire fond sur le retour d’expérience des autres pays, en particulier les efforts mobilisés par la Norvège pour améliorer les techniques de mesure et d’estimation des quantités de méthane émises par les installations pétrolières et gazières extracôtières (Encadré 2.11).
Encadré 2.11. Étude de cas – Amélioration du mesurage des émissions de méthane en Norvège
La Norvège a mis en place une interdiction des pratiques de torchage systématique (dans des circonstances non urgentes) en 1971, ainsi qu’une taxe sur les émissions en 1991. Les émissions de méthane restantes issues de l’extraction pétrolière et gazière en amont représentent l'essentiel des émissions de méthane de la Norvège. En 2016, le pays a mené à terme un grand projet d’évaluation des sources d’émission de méthane de l’ensemble de ses installations pétrolières et gazières extracôtières permanentes et des méthodes de quantification de ces émissions, à la suite de quoi il a révisé ses méthodes d’estimation des émissions de méthane.
Les sites équipés de débitmètres mesurent directement le méthane émis par éventage et torchage en cas d’urgence. Cela recouvre environ les deux tiers des émissions de méthane inventoriées. Le dernier tiers est estimé au moyen de modèles de quantification établis par l’autorité de réglementation. En appliquant cette méthode ascendante révisée, la Norvège a effectué des estimations qui se sont révélées inférieures aux précédentes. Des prises de mesures aériennes ont confirmé ces résultats.
Grâce à ses méthodes de quantification de haute qualité, la Norvège peut améliorer en permanence la taxation du méthane rejeté par l’éventage et le torchage d’urgence ou les fuites des opérations pétrolières et gazières conduites sur le plateau continental norvégien. Cela encourage les producteurs à recenser et mettre en œuvre des méthodes peu coûteuses de réduction de leurs émissions.
Si le suivi du méthane a pu si bien progresser en Norvège, c’est en partie parce que la plupart des émissions proviennent d’un nombre relativement restreint de grandes exploitations pétrolières et gazières extracôtières. Au contraire, au Canada, le méthane émis par le secteur pétrolier et gazier provient majoritairement des activités côtières, qui recouvrent un grand nombre d’exploitations. Cela étant, des segments du secteur pétrolier et gazier canadien pourraient s’inspirer de certains aspects de la stratégie mise en œuvre par la Norvège pour améliorer ses estimations des quantités de méthane émises par les installations pétrolières et gazières en amont (AIE, 2020[62]). La tarification des émissions de méthane pourrait prendre le pas sur certains règlements moins efficaces et certains plafonds d’émissions applicables à l’échelle d’une installation.
Source : AIE (2020[62]).
Réduire les émissions de combustion du secteur pétrolier et gazier
La combustion est une source majeure d’émissions de gaz à effet de serre dans le secteur pétrolier et gazier en amont. Plus de la moitié du total des émissions du secteur (54 % en 2020) provient de la production de sables bitumineux, principalement à cause de la combustion de gaz naturel. Réduire ces émissions de combustion nécessitera des sources d’énergie plus propres, une production moins énergivore et de meilleurs systèmes de captage du carbone. Les principaux instruments d’action mis en œuvre par le Canada pour accélérer ces changements sont la tarification du carbone et le soutien de l’investissement dans le captage du carbone.
Propositions de nouveaux systèmes de tarification du carbone dans le secteur pétrolier et gazier
Les émissions de combustion générées par les producteurs de pétrole et de gaz sont couvertes par des systèmes de tarification du carbone qui encouragent l’efficacité énergétique et la transition vers des combustibles à plus faible teneur en carbone. Les niveaux de référence établis dans le cadre des systèmes de niveaux de référence et de crédits déterminent la part des émissions pour laquelle les producteurs paient une redevance, donc également le coût moyen du carbone. Si la possibilité de gagner des crédits de rendement maintient une incitation à réduire les émissions, ces niveaux de référence ont parfois été fixés à des niveaux trop élevés pour entraîner d’importants efforts de décarbonation. Par exemple, dans l’Alberta, en 2020, les installations d’extraction en surface de sables bitumineux ont moins payé de redevances d’émissions de carbone qu’elles n’ont reçu de crédits pour être passées en dessous des niveaux de référence applicables (Ministère de l’Environnement et des Parcs, Province de l’Alberta, 2021[63]). De ce fait, les grands émetteurs ont profité d’un cadre de tarification du carbone conçu pour encourager une production plus verte en augmentant les coûts du carbone.
Le gouvernement fédéral réfléchit actuellement à de nouvelles mesures qui permettraient de remédier à cette prise en compte insuffisante des producteurs de pétrole et de gaz dans les systèmes provinciaux de tarification du carbone (ECCC, 2022[55]). Deux solutions sont examinées :
Appliquer un prix du carbone par secteur. De règlements fédéraux fixeraient des normes strictes d’intensité d’émission applicables aux installations pétrolières et gazières en amont. S’il est nécessaire de viser un objectif global de réduction des émissions à l’échelle de tout le secteur, les installations pétrolières et gazières paieraient pour le carbone un prix plus élevé que les installations d’autres secteurs d’activité. Les échanges de crédits seraient autorisés au sein du secteur pétrolier et gazier, mais pourraient être restreints en dehors de ce secteur.
Appliquer un système de plafonnement et d’échange. Un nouveau système de plafonnement et d’échange s’appliquerait au seul secteur pétrolier et gazier. Une diminution régulière des plafonds permettrait des réductions d’émissions de GES cohérentes avec la trajectoire canadienne vers la neutralité carbone à l’horizon 2050. Les quotas pourraient donner lieu à des échanges avec des entreprises soumises au même système, mais pas avec des entreprises relevant d’autres systèmes de tarification des émissions.
Ces deux solutions feraient en sorte que le secteur pétrolier et gazier contribue directement aux baisses des émissions, plutôt qu’il achète des crédits gagnés dans d’autres secteurs. Cependant, en limitant les échanges de permis et en appliquant au carbone des prix différents selon les émetteurs, aucune de ces propositions ne favoriserait une atténuation efficace, ce qui nécessiterait que des solutions de réduction moins coûteuses soient déployées à tous les niveaux de l’économie plutôt que dans des secteurs spécifiques. Ces deux dispositifs pourraient aussi pâtir d’une volatilité accrue des prix des crédits sous l’effet des chocs mondiaux sur les prix des produits de base, ce qui pourrait modifier la façon dont le public accepte ces nouveaux instruments de tarification du carbone. Les incertitudes croissantes qui entourent l’évolution future des coûts de réduction des émissions pourraient aussi compliquer la prise de décision concernant les investissements verts majeurs. Il vaudrait mieux améliorer les systèmes actuels d’échange de quotas d’émission (voir plus haut) que risquer de mettre à mal le consensus parfois fragile formé autour des politiques climatiques importantes.
Soutenir l’investissement du secteur pétrolier et gazier dans le captage, l’utilisation et le stockage du carbone
Les techniques de captage, d’utilisation et de stockage du carbone (CUSC) devraient contribuer de façon significative à la décarbonation de la production de sables bitumineux (ECCC, 2022[1]). Les administrations fédérales et provinciales financent la recherche-développement et la démonstration des technologies de CUSC. Les investissements dans ces technologies sont également soutenus par des systèmes de crédits compensatoires de carbone, des subventions, des crédits de redevance au niveau provincial et le Règlement sur les combustibles propres du Canada (voir ci-dessous). Destinés à accélérer le déploiement du CUSC, tous ces instruments réduisent les risques d’investissement et augmentent la compétitivité-coûts des technologies en cours de maturation. Ils peuvent aussi atténuer les obstacles au développement de marchés locaux du CUCS, éviter le sous-financement de la R-D dans les technologies vertes, et aider à récupérer les gains de connaissances issus de l’utilisation des techniques de CUSC dans le secteur pétrolier et gazier du Canada.
Il sera important d’examiner les principaux programmes de soutien pour vérifier qu’ils fournissent bien les résultats souhaités aux coûts prévus. Les incitations actuelles prévoient des récompenses plus importantes pour les techniques de réduction des émissions fondées sur le CUSC que pour les autres. En plus de l’incitation habituelle découlant de la tarification du carbone dans les systèmes applicables aux grands émetteurs (valeur de 65 CAD par tonne en 2023), la baisse des émissions du secteur pétrolier et gazier due au CUSC peut rapporter jusqu’à 300 CAD par tonne (indexé sur l’inflation de 2022) dans le cadre du nouveau Règlement sur les combustibles propres. De tels avantages viennent s’ajouter au soutien qu’apporterait une proposition de crédit d’impôt fédéral à l’investissement pour les dépenses consacrées aux technologies de CUSC, estimé à environ 8 milliards CAD d’ici à 2030. Les incitations devraient être revues à la baisse au fil du temps, à mesure que les marchés du CUSC gagneront en maturité et que la compétitivité-coûts s’améliorera. Le crédit d’impôt fédéral à l’investissement proposé est conçu de manière à baisser après 2030. Cela limitera le risque d’excédent d’offres de crédits de carbone, qui pourrait fragiliser les incitations à réduire les émissions dans d’autres secteurs. L’Alberta examine également la façon dont son système de crédits compensatoires récompense les techniques de réduction des émissions par CUSC. En 2022, les installations de CUSC pouvaient obtenir un crédit pour le captage d’une tonne de carbone, et un second pour la séquestration des mêmes émissions (Gouvernement de l’Alberta, 2022[14]). Afin de préserver les signaux-prix du carbone, il convient de réviser régulièrement ces mesures pour maintenir leur cohérence avec les règles fédérales selon lesquelles les crédits compensatoires doivent récompenser des réductions d’émissions « supplémentaires ».
Réduire les émissions imputables au transport routier
Les transports représentaient 25 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du Canada en 2020. Dans la plupart des provinces, il s’agit de la principale source de pollution par le carbone. L’essentiel (plus de 80 %) est imputable au transport routier (Graphique 2.18, partie A). Tant les véhicules de tourisme que les véhicules lourds ont contribué à l’augmentation des émissions résultant de la combustion d’essence et de carburant diesel. Cette évolution a accompagné l’augmentation du recours à l’automobile et l’accroissement du parc de véhicules plus volumineux et moins écoénergétiques, notamment de véhicules utilitaires sport (Graphique 2.18, partie B) (Balyk, Livingston et Hastings-Simon, 2021[64]). Les émissions du transport routier ont augmenté malgré la hausse du coût du carbone et le durcissement des normes applicables aux véhicules. Des progrès rapides sont nécessaires pour réduire les émissions de gaz d’échappement imputables aux camions et aux voitures, notamment parce que la décarbonation des transports aérien et maritime se heurte à des obstacles plus importants (Encadré 2.12). Cela suppose que les pouvoirs publics se focalisent à la fois sur la réduction de l’intensité d’émission du transport routier et du nombre de véhicules-kilomètres parcourus. Au-delà des aides destinées à favoriser l’adoption des véhicules électriques, des mesures visant à améliorer l’accès aux modes actifs de déplacement et aux transports publics, ainsi qu’à réduire la dépendance à l’égard de la voiture, peuvent favoriser des réductions marquées des émissions.
Encadré 2.12. Une ambition à long terme : décarboner les transports aérien et maritime
L’aviation et le transport maritime ont représenté ensemble 6 % des émissions imputables aux transports au Canada en 2019. La réduction des émissions ne va pas de soi dans chacun de ces deux secteurs (FIT, 2021[66]). Les avions et les navires consomment en grande quantité des carburants à forte teneur en carbone et génèrent des émissions qui peuvent s’avérer difficiles à attribuer entre juridictions. Des progrès sont nécessaires en matière de technologies de propulsion et de carburants à faible teneur en carbone afin d’assurer la viabilité commerciale des transports verts pour différents modes de transport aérien et maritime. Les pouvoirs publics peuvent cependant prendre des mesures pour encourager les transporteurs à réaliser des gains d’efficacité énergétique et à adopter des technologies et des carburants à moindre intensité de carbone.
Le Canada envisage de travailler avec des partenaires internationaux sur des objectifs et des mesures de réduction des émissions imputables à l’aviation internationale et à la navigation internationale (ECCC, 2022[1]), sachant qu’aucun de ces deux secteurs n’est explicitement mentionné dans l’Accord de Paris. Un durcissement des normes relatives aux carburants ou aux technologies exigerait une coopération internationale. Par ailleurs, une coopération réglementaire entre les provinces et l’État fédéral pourrait permettre d’élargir la tarification des émissions de carbone découlant des vols intérieurs au Canada. D’autres juridictions ont réussi à obtenir des résultats équivalents : les émissions de l’aviation sont incluses dans le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE) depuis 2012 pour les vols effectués à l’intérieur de l’Espace économique européen (EEE) (FIT, 2021[67]).
Les autorités pourraient s’employer à taxer davantage les carburants utilisés dans les secteurs de l’aviation et du transport maritime (Teusch et Ribansky, 2021[68]) tout en s’efforçant de favoriser le développement et l’adoption de technologies et de carburants à faible intensité d’émission. La Norvège figure parmi les pays qui se sont fixé pour objectif de réduire sensiblement les émissions imputables aux transports intérieurs aérien et maritime. En collaboration avec les compagnies aériennes, l’exploitant d’aéroport norvégien Avinor vise à électrifier tous les vols intérieurs d’ici à 2040 (FIT, 2021[67]). Les pays nordiques recourent également aux marchés publics et à des projets pilotes pour accélérer l’électrification du transport maritime à courte distance, ainsi que pour tester l’utilisation d’hydrogène liquide et d’autres technologies à faible émission de carbone (FIT, 2020[69]).
Source : Forum international des transports (FIT) (2021[66]) ; Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) (2022[1]) ; FIT (2021[67]) ; et FIT. (2020[69])
Décarboner le transport de personnes
Les véhicules de tourisme représentent environ 60 % des émissions imputables au transport routier. Après avoir diminué pendant la pandémie de COVID-19, les émissions dues aux véhicules de tourisme devraient avoir augmenté en 2022, malgré les cours élevés du pétrole pendant la crise énergétique. Le taux de motorisation est élevé au Canada. Les véhicules automobiles tendent à être moins écoénergétiques et à se caractériser par une plus forte intensité d’émission que dans d’autres pays (Régie de l’énergie du Canada, 2019[70]). Cette dépendance relativement forte à l’égard de l’automobile tient à la fois à la géographie du Canada et aux politiques publiques. Les grandes distances qui séparent les villes dans un pays à faible densité de population incitent les Canadiens à circuler en voiture et réduisent la rentabilité des services interurbains d’autobus et de transport ferroviaire. L’étalement des villes, parfois conjugué à une accessibilité limitée des transports en commun, renforce également l’attrait exercé par la détention d’une voiture particulière, de même que la relative faiblesse des taxes sur les carburants et le recours limité aux redevances d’utilisation des routes (Graphique 2.19) (OCDE, 2017[71]). Par rapport à des villes européennes plus compactes, les villes et les bâtiments sont par ailleurs souvent conçus de telle sorte au Canada qu’ils facilitent l’utilisation de grosses voitures.
Un axe essentiel des plans climatiques canadiens, et des analyses du secteur canadien des transports, est de savoir comment verdir les véhicules et les carburants (voir par exemple Balyk, Livingston et Hastings-Simon (2021[64]) et ECCC (2022[1])). L’adoption des véhicules à émissions de gaz d’échappement nulles (véhicules électriques à batterie et véhicules électriques à pile à combustible à hydrogène) sera importante à cet égard. Néanmoins, la lenteur du renouvellement du parc automobile signifie que des véhicules à moteur à combustion interne classiques circuleront encore longtemps après l’entrée en vigueur en 2035 de l’interdiction fédérale proposée de la vente de voitures neuves équipées d’un moteur thermique. D’après des projections réalisées à la demande du gouvernement, les véhicules à moteur à combustion interne devraient représenter 60 % du parc de véhicules légers en 2035 et 10 % en 2050 (Dunsky Energy + Climate, 2022[72]).
Les pouvoirs publics recourent à la fois à la réglementation et à des instruments fondés sur les prix en vue d’accélérer la réduction des émissions de gaz d’échappement. La tarification du carbone constitue une approche essentielle pour dissuader l’utilisation intensive de véhicules à moteur à combustion interne, y compris pour les voitures d’occasion. Une hausse des prix du carbone alourdira le coût des combustibles à base de pétrole (Graphique 2.20). À elle seule, la tarification du carbone peut cependant ne pas suffire à inciter les constructeurs automobiles et les producteurs de carburants à fabriquer des produits plus propres. Compte tenu des économies d’échelle dont bénéficient les entreprises existantes et d’autres obstacles liés au fonctionnement du marché, les nouveaux entrants peuvent avoir du mal à rivaliser avec ces concurrents déjà en place. Ainsi, les entreprises qui réalisent l’extraction du pétrole brut au Canada dominent également le secteur du raffinage. Les entreprises en place ont donc intérêt à s’efforcer de préserver à leurs bénéfices tout le long de la chaîne d’approvisionnement en carburants en résistant à la transformation du secteur. En l’absence d’intervention des pouvoirs publics, les externalités de connaissances susceptibles de découler de l’innovation verte peuvent constituer un obstacle supplémentaire au développement des carburants propres.
Appliquer des normes d’émission strictes aux véhicules à moteur à combustion interne
Des normes plus strictes concernant les véhicules pourraient contribuer à réduire les émissions de gaz d’échappement. Compte tenu de l’impossibilité pratique de réaliser un suivi des émissions des différents types d’automobiles, la réglementation a un rôle à jouer en complément des taxes sur les carburants. Les normes d’émission applicables aux véhicules de tourisme vont se durcir au Canada d’ici à 2026. Depuis 1991, le Canada a officiellement harmonisé ses normes relatives aux véhicules légers avec celles en vigueur aux États-Unis. Cet alignement sur les normes de son principal partenaire commercial contribue à préserver un vaste marché d’exportation pour les constructeurs automobiles canadiens. Il permet également d’éviter une duplication des exigences en matière d’essais de véhicules de part et d’autre de la frontière, et garantit l’accès à des véhicules importés à bas coût (Sharpe, 2018[73]). Par le passé, le Canada a proposé de travailler avec la Californie en vue d’un durcissement des normes (ECCC, 2019[74]). La participation d’autres grands États fédérés américains pourrait améliorer la viabilité d’un tel projet. En revanche, des mesures unilatérales prises par le Canada pourraient remettre en cause les avantages découlant du cadre réglementaire actuel.
Veiller à ce que le règlement sur les combustibles propres ait les effets positifs escomptés
Le gouvernement fédéral s’emploie également à réduire la teneur en carbone des combustibles à base de pétrole et à accélérer le développement d’un secteur local des biocarburants. Le Fonds pour les combustibles propres soutient le développement des biocarburants, notamment du carburant diesel renouvelable et de l’éthanol cellulosique, qui pourraient offrir des moyens de réduction des émissions relativement rapides à adopter. Le nouveau Règlement sur les combustibles propres (RCP) durcit les normes relatives à l’intensité d’émission des combustibles à base de pétrole produits localement ou importés. Les niveaux maximums d’intensité d’émission à respecter diminueront chaque année de 2023 à 2030, permettant une réduction de près de 12 % d’ici à la fin de la décennie.
Les objectifs définis dans le RCP sont fondés sur les émissions rejetées au cours du cycle de vie du combustible, qui inclut les activités de production se déroulant en amont et en aval du raffinage. Les producteurs de combustibles peuvent les atteindre en remplaçant l’essence et le carburant diesel par des biocarburants. Ils peuvent aussi se conformer à leurs obligations en prenant des mesures pour réduire les émissions tout le long de la chaîne d’approvisionnement en combustibles, par exemple en investissant dans le captage du carbone au stade de l’extraction du pétrole et du gaz. Le règlement s’appuie sur un système d’échange de crédits qui offre une certaine flexibilité en matière de conformité, l’objectif étant de réduire le coût économique du dispositif. Ainsi, des producteurs de combustibles peuvent choisir d’acheter des crédits à d’autres entreprises plutôt que de prendre des mesures de réduction de leurs propres émissions qui seraient plus coûteuses. Certaines catégories de combustibles (gazeux et solides) sont exclues du champ d’application du règlement, de même que certains secteurs (comme l’aviation), les exportations et la province productrice de pétrole de Terre-Neuve-et-Labrador.
Les règles intègrent des garde-fous destinés à éviter les écueils auxquels se heurtent couramment les mesures visant à favoriser les biocarburants. Cela vaut notamment pour le risque d’un accroissement des émissions résultant de changements d’affectation des terres. Les émissions peuvent en effet augmenter lorsque des terres agricoles sont réaffectées à la plantation de cultures énergétiques, tandis les nouvelles cultures réalisées dans d’autres zones perturbent des puits de carbone naturels. Les mesures destinées à stimuler la demande de biocarburants peuvent aussi faire monter les prix des produits alimentaires, au bénéfice des propriétaires fonciers et au détriment des consommateurs, notamment des personnes les plus démunies à l’échelle mondiale (Wright, 2014[75]). L’élaboration et la commercialisation de biocarburants de deuxième génération produits à partir de matières telles que des résidus de culture ou des déchets municipaux pourraient atténuer certains de ces écueils. Le RCP dispose que les biocarburants doivent être produits d’une façon qui ne présente pas de risque élevé de changements indirects dans l’utilisation des terres ayant des effets nocifs sur l’environnement, et qu’ils ne doivent pas être produits à partir de cultures spécifiquement plantées à cet effet. D’autres dispositions visent à éviter un redéploiement des livraisons de pétrole brut, consistant à réorienter le pétrole « propre » vers le marché canadien et le pétrole « sale » vers des juridictions étrangères. Si une telle redistribution des approvisionnements se produisait, les normes relatives aux combustibles à faible teneur en carbone pourraient fausser les comportements sans réduire les émissions mondiales de GES. Il est même concevable que ces émissions puissent en fait augmenter, en raison de la reconfiguration du trafic mondial de marchandises.
Ces dispositions, quoique motivées par des intentions louables, risquent d’être difficiles à faire appliquer. Il sera particulièrement délicat de vérifier les procédés de fabrication des combustibles importés, ainsi que leurs effets indirects. Ainsi, en vertu des dispositions incitatives intégrées dans le RCP, les résidus de cultures et les cultures endommagées constituent des charges d’alimentation admissibles, mais pas celles qui ont été intentionnellement altérées. Seule une évaluation systématique de l’impact du dispositif permettra de déterminer s’il fonctionne comme prévu. Elle devrait être réalisée rapidement pour réduire le risque d’effets indésirables.
Les interactions avec les autres instruments d’action publique devraient également être régulièrement évaluées. Les mécanismes d’incitation à la réduction des émissions imputables aux activités réalisées en amont du raffinage du pétrole et du gaz prévus par le RCP – tels que les crédits accordés en cas de captage et de stockage du carbone – pourraient faire baisser les prix des crédits d’émission octroyés dans le cadre des programmes applicables aux grands émetteurs (Pembina Institute, 2022[76]). Il pourrait donc être nécessaire de gérer plus activement les marchés de crédits carbone pour éviter des phénomènes de surabondance de crédits d’émission qui nuiraient aux signaux de prix du carbone. Conjugué aux taxes sur les carburants, le RCP va également modifier les incitations relatives à la réduction des émissions, en portant le tarif effectif du carbone à un niveau plus élevé pour les producteurs de pétrole que pour les entreprises des autres secteurs. En conséquence, les producteurs de carburants, par exemple, pourraient être davantage incités à décarboner leur production que les fabricants de ciment. Cela réduit la probabilité que le jeu des forces du marché amène les entreprises pour lesquelles le coût du carbone est le plus faible à réduire leurs émissions, et nuit à l’efficacité des politiques climatiques.
Réorienter le soutien aux véhicules zéro émission
Les plans climatiques fédéral et provinciaux accordent une grande importance à l’adoption des véhicules zéro émission (VZE), en particulier des véhicules électriques. C’est une bonne chose, car pour atteindre son objectif de neutralité carbone d’ici à 2050, le Canada devra ramener les émissions de gaz d’échappement des véhicules automobiles à un niveau aussi proche que possible de zéro.
Pour le moment, des aides publiques aux VZE se justifient. Si les VZE ne représentent qu’une part modeste de l’ensemble des véhicules automobiles (0.8 % en 2020), les acquisitions de ce type de véhicules progressent (Dunsky Energy + Climate, 2022[72]) : 8 % des voitures neuves vendues au premier semestre de 2022 étaient des VZE (S&P Global Mobility, 2023[77]). L’intervention des pouvoirs publics sur le marché contribue à la résolution d’un problème de coordination bien connu. La demande de véhicules électriques dépend de l’abondance de l’offre et de la disponibilité des infrastructures de recharge. Or, l’offre de VZE et de chargeurs dépend elle-même de la vigueur de la demande.
La promesse d’interdiction des ventes de véhicules à moteur à combustion interne neufs envoie un signal utile. Suivant un projet de mandat fédéral, il serait obligatoire que tous les véhicules légers neufs vendus au Canada soient des VZE en 2035. Un objectif intermédiaire de 60 % pour la proportion de VZE dans les ventes de véhicules neufs en 2030 est compatible avec le scénario de réduction à zéro des émissions nettes de CO2 au niveau mondial (ZEN) publié par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) (AIE, 2022[78]). Les obligations de vente peuvent constituer un moyen efficace d’indiquer à l’avance l’orientation future de la politique climatique aux constructeurs. Elles facilitent en outre les projections relatives aux besoins futurs en infrastructures de recharge. Cela peut stimuler l’offre du secteur privé tout en aidant les autorités locales à anticiper. Compte tenu de la durée de vie moyenne des voitures (environ 12 ans, d’après une estimation récente de S&P Global Mobility concernant les États-Unis (2022[79])) et de l’objectif de décarbonation du réseau électrique canadien d’ici à 2035, il est logique de soutenir aujourd’hui l’adoption des VZE, même dans les provinces où la production d’électricité est encore tributaire des combustibles fossiles.
Il existe déjà des obligations de vente de VZE dans les provinces canadiennes du Québec et de la Colombie-Britannique, ainsi qu’en Californie et dans des pays comme la Chine (Axsen, Plötz et Wolinetz, 2020[80]). D’autres pays de l’OCDE, dont la France, ont annoncé un objectif d’interdiction de la vente de véhicules à moteur à combustion interne neufs dans les années à venir. Une interdiction équivalente doit s’appliquer dans toute l’Union européenne à partir de 2035. Une fois en place, les interdictions de commercialisation de véhicules à moteur à combustion interne auront des conséquences négatives importantes, puisqu’elles entraîneront une diminution des bénéfices de certains constructeurs automobiles, une restriction de l’éventail de choix des consommateurs et, jusqu’à ce que les écarts de coût avec les véhicules à moteur à combustion interne soient comblés, une hausse des prix des voitures neuves. Les options retenues en matière de politiques publiques peuvent toutefois réduire ces effets négatifs. Permettre l’échange des crédits obtenus grâce à la vente de VZE, en particulier, favorisera au départ la fabrication de ce type de véhicules par des constructeurs capables de le faire au moindre coût. À l’échelle mondiale, les difficultés d’approvisionnement (notamment les pénuries de matières premières, comme le lithium et le nickel, nécessaires à la fabrication des batteries pour véhicules électriques) risquent de limiter le taux de pénétration des véhicules électriques au cours de la décennie à venir (AIE, 2022[81]).
Au nombre des mesures axées sur la demande qui visent à accélérer l’adoption des véhicules électriques figurent des politiques d’achats publics, des subventions et des allègements d’impôt accordés en cas d’achat de véhicules électriques, ainsi que des aides relatives aux bornes de recharge. L’administration fédérale offre un rabais de 5 000 CAD à l’achat ou à la location de VZE neufs. En règle générale, ce rabais fédéral peut être cumulé avec les subventions offertes par les provinces (Tableau 2.5).
Tableau 2.5. Sélection de dispositifs d’aide à l’achat de véhicules électriques au Canada
Rabais maximum |
Lié au revenu ? |
Applicable aux véhicules haut de gamme ? |
Applicable aux voitures d’occasion ? |
|
---|---|---|---|---|
Colombie-Britannique CleanBC Go Electric |
4 000 CAD |
Oui |
Non Seuil de prix maximal pour les voitures : 55 000 CAD |
Non |
Québec Roulez vert |
7 000 CAD |
Non |
Non Seuil de prix maximal : 60 000 CAD |
Oui 3 500 CAD |
Nouvelle-Écosse Electrify Nova Scotia Rebate Programme |
3 000 CAD |
Non |
Non Seuil de prix maximal pour les voitures : 55 000 CAD |
Oui 2 000 CAD |
Nouveau-Brunswick Rabais pour véhicules électriques |
5 000 CAD |
Non |
Non Seuil de prix maximal pour les voitures : 55 000 CAD |
Oui 2 500 CAD |
Administration fédérale Programme d’incitatifs pour les véhicules zéro émission (iVZE) |
5 000 CAD |
Non |
Non Seuil de prix maximal pour les voitures : 55 000 CAD |
Non |
Source : CleanBC Go Electric (2022[82]) ; Gouvernement du Québec (2022[83]) ; EV Assist Nova Scotia (2022[84]) ; Énergie NB (2022[85]) ; et Transports Canada (2022[86]).
Tout comme les mesures de soutien axées sur l’offre, celles portant sur la demande devraient être progressivement supprimées à mesure que les marchés deviendront autonomes. Les coûts de réduction des émissions par le biais de programmes de rabais sont, en général, relativement élevés (Encadré 2.13) (Clinton et Steinberg, 2019[87]), en particulier si l’on tient compte de l’atténuation des émissions obtenue grâce à d’autres mesures de lutte contre le changement climatique. Une partie du soutien apporté aux VZE est sans doute capitalisée dans les prix. Des aides sont perçues par des ménages et des entreprises qui auraient acheté des VZE sans assistance. Les coûts d’exploitation moins élevés des véhicules dans les provinces où l’électricité est bon marché constituent déjà une forte incitation, en particulier pour les ménages aisés ayant de faibles contraintes de crédit. Le coût d’entretien des véhicules électriques devrait en outre être inférieur à celui des véhicules à moteur à combustion interne (US Department of Energy, 2022[88]). De même, la hausse du prix du carbone renforcera l’attrait des VZE en renchérissant l’essence et le carburant diesel. Il conviendrait de revoir à la baisse les subventions à mesure que l’augmentation du prix du carbone améliorera la compétitivité-coûts des VZE. La maturation rapide des marchés des VZE dans des provinces comme la Colombie-Britannique et le Québec (Tableau 2.6) pourrait bientôt permettre aux autorités de réduire progressivement les mesures de soutien dans certaines régions du Canada, en particulier à mesure que la disponibilité de modèles de voitures meilleur marché augmentera. C’est ce qui a amené la Norvège à réduire ses incitations en faveur des véhicules électriques (OCDE, 2022[89]), sachant que la plupart des voitures neuves vendues dans le pays sont électriques (Graphique 2.21). Dans l’intervalle, les incitations devraient être réorientées de manière à éviter des effets redistributifs négatifs. En Colombie-Britannique, les acheteurs à revenu élevé bénéficient d’un rabais moins important. Cela favorise l’adoption de VZE par les ménages à revenu faible ou moyen et permet d’éviter que les subventions bénéficient à des ménages aisés qui auraient peut-être acheté des véhicules zéro émission même sans aide (Borenstein et Davis, 2016[90]).
Tableau 2.6. Part des véhicules électriques dans les ventes d’automobiles neuves par province canadienne
Province |
T4 2021 |
T4 2022 |
Variation (en points de %) |
---|---|---|---|
Colombie-Britannique |
15.3 % |
20.1 % |
4.8 |
Québec |
9.8 % |
14.6 % |
4.8 |
Ontario |
4.9 % |
8.3 % |
3.4 |
Alberta |
2.8 % |
4.4 % |
1.6 |
Manitoba |
2.1 % |
3.2 % |
1.1 |
1. Source : S&P Global Mobility. (2023[77])
Encadré 2.13. Estimation indicative du coût d’atténuation des émissions via l’octroi de rabais pour véhicules électriques
Dans certaines provinces, le montant cumulé des rabais offerts par les autorités provinciales et fédérales est élevé. Au Québec, il est possible de recevoir, si l’on bénéficie aussi de la subvention fédérale, 12 000 CAD pour l’achat d’un véhicule léger d’une valeur maximale de 60 000 CAD. Un calcul approximatif permet de mieux cerner le coût de ces incitations par rapport à celui d’autres instruments. D’après les estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), fondées sur les émissions des voitures de taille moyenne sur toute leur durée de vie dans des régions disposant d’une électricité propre, le remplacement d’un véhicule à moteur à combustion interne par un véhicule zéro émission (VZE) pourrait permettre une réduction d’émissions de 32 tonnes de CO2. Si la subvention est de 12 000 CAD, cela se traduit par un coût d’environ 375 CAD par tonne de CO2, c’est-à-dire un niveau bien plus élevé que celui qu’atteindra le prix plancher du carbone au Canada au cours de cette décennie, soit 170 CAD en 2030. Au niveau actuel de ce prix plancher (65 CAD), la tarification du carbone permettrait d’éliminer près de six tonnes de CO2, contre une tonne au moyen de rabais pour VZE représentant le même coût.
Les lacunes des réseaux de recharge des véhicules électriques peuvent faire obstacle à l’adoption de ce type de véhicules. Selon un rapport publié en 2022 qui a été préparé à la demande de Ressources naturelles Canada, le Canada devrait accroître de 43 % le nombre de connecteurs de recharge rapide installés d’ici à 2025 (en le portant de 3 000 à 4 300) pour rester sur une trajectoire compatible avec l’interdiction de la vente de véhicules à moteur à combustion interne neufs en 2035 (Dunsky Energy + Climate, 2022[72]). L’étendue du territoire canadien complique l’équipement du réseau autoroutier en infrastructures de recharge. C’est toutefois dans les villes que la demande de capacités de recharge sera la plus forte. Nombre de personnes finiront par recharger leur véhicule à domicile. En dehors des villes canadiennes les plus denses, la plupart des habitants vivent dans des maisons individuelles, caractérisées par un espace de stationnement qui facilite la recharge à domicile et réduit le besoin de nouvelles infrastructures (Graphique 2.22). Il sera en revanche plus important d’installer des bornes de recharge publiques dans les zones urbaines, où un grand nombre de personnes vivent dans des immeubles à logements multiples.
Les aides publiques fédérales visent à accélérer le déploiement de réseaux de bornes de recharge. Les fournisseurs de bornes de recharge peuvent obtenir des financements directs et des crédits au titre du Règlement sur les combustibles propres (RCP). Les provinces soutiennent elles aussi les projets d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques. L’expérience de pays où le marché des véhicules électriques est plus développé, comme la Norvège, laisse à penser que les exploitants d’infrastructures de recharge installeront de plus en plus de bornes de recharge rapide sans subvention (D’Arcangelo et al., 2022[8]). Les autorités canadiennes ont amélioré les dispositifs d’aide publique, de façon à donner la priorité aux projets moins susceptibles d’attirer des investissements privés non subventionnés et à fournir aux investisseurs potentiels des informations sur la demande future anticipée. Les mesures de soutien relatives aux infrastructures de recharge devraient être complétées par des instruments de réglementation. Certaines municipalités (dont la ville de Vancouver) exigent déjà l’installation d’infrastructures de recharge dans les stations-service et les parcs de stationnement commerciaux. Les codes du bâtiment pourraient en outre imposer l’installation d’infrastructures de recharge pour les bâtiments neufs dotés de places de stationnement hors voirie, ainsi que des rénovations majeures. Les provinces et les municipalités peuvent contribuer à la définition des règles relatives à l’installation, à l’approbation et au partage des coûts des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques dans les immeubles d’habitation. Certains organismes, dont l’Office ontarien du secteur des condominiums (OOSC), ont déjà commencé à le faire (KPMG, 2022[91]).
Mesures de soutien visant à encourager les modes actifs de déplacement et l’usage des transports publics
Il sera essentiel d’adopter des mesures visant à réduire l’utilisation de la voiture pour faire sensiblement diminuer les émissions imputables au transport routier (Institut canadien pour des choix climatiques, 2021[92]). La réduction à long terme du nombre de kilomètres parcourus dépendra de l’accroissement de la compacité des villes et de la densification des réseaux de transport. Une diminution des déplacements en voiture permettrait à la fois de réduire les émissions imputables à la combustion d’essence et de carburant diesel des véhicules à moteur thermique, et les émissions imputables aux équipements automobiles. Les voitures engendrent également d’autres coûts environnementaux, notamment une pollution sonore et atmosphérique, et des coûts non environnementaux, tels que des décès routiers et des embouteillages dans les villes, qui diminueraient aussi en cas de recul de l’utilisation de l’automobile.
La géographie peut constituer un obstacle important à l’augmentation de l’usage des transports publics dans certaines régions du Canada. L’utilisation des transports en commun dans les villes canadiennes a considérablement diminué du fait de la pandémie de COVID-19 et de l’essor du télétravail qui en a découlé. La fréquentation des trains, des bus et des lignes de métro n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant la crise. Les services interurbains d’autobus rencontraient déjà des difficultés importantes avant la pandémie, sachant que les taux de fréquentation et la rentabilité des lignes peu utilisées étaient en baisse (Transports Canada, 2019[93]). Les services ferroviaires qui desservent les régions à faible densité de population présentent également des désavantages en termes de coûts.
Le caractère restrictif des règles d’utilisation du sol entrave la densification et réduit le rendement des investissements dans les infrastructures de transport public. L’accès à l’emploi offert par les transports publics varie selon les villes (Allen et Farber, 2019[94]). À Vancouver, l’intégration de la planification des transports et de l’aménagement du territoire, conjuguée à une politique favorisant la densification des logements autour du réseau de transport en commun, a contribué à l’obtention d’un taux d’utilisation des transports publics plus élevé que dans des régions canadiennes comparables (Huerta Melchor et Lembcke, 2020[95]). Dans l’ensemble, l’accès aux transports publics tend toutefois à être moins bon dans les villes canadiennes que dans les villes européennes, plus compactes et dotées de réseaux routiers plus denses (Wu et al., 2021[96]). Les modes actifs de déplacement comme la marche et le vélo peuvent également être moins pratiques pour se rendre au travail dans les centres urbains très étendus qui caractérisent fréquemment certaines régions d’Amérique du Nord (Graphique 2.23) (OCDE, 2021[97]).
L’une des priorités essentielles consiste à lever les obstacles à la densification des logements dans les zones urbaines situées à proximité des transports publics. L’assouplissement des règles de zonage excessivement restrictives relatives à la hauteur maximale des bâtiments et aux espaces interstitiels, ainsi que d’autres restrictions applicables à la densité, pourrait contribuer indirectement à améliorer la viabilité des lignes urbaines de transport en commun et réduire le besoin de voitures. Cela permettrait en outre de rendre le logement plus abordable et d’améliorer l’accès à l’emploi des ménages à faible revenu. De même, un recours accru aux péages routiers, complété si possible par une réaffectation d’une partie de la voirie urbaine à d’autres modes de transport, pourrait renforcer l’attrait des modes de déplacement actifs et des transports publics dans les villes, ainsi que l’utilisation des services interurbains d’autobus et de transport ferroviaire. Les redevances d’utilisation des routes occuperont une place de plus en plus importante dans les budgets des administrations publiques à mesure que le nombre de véhicules à moteur à combustion interne et les recettes connexes tirées des taxes sur les carburants diminueront. Les recettes des administrations fédérale, provinciales et territoriales liées au transport routier représentent un peu moins de 2 % du PIB national (Transports Canada, 2019[98]), l’essentiel de ces recettes provenant des taxes sur les carburants.
Décarboner le transport routier de marchandises
Environ 40 % des émissions liées au transport routier sont imputables aux véhicules lourds. Au Canada, le transport de marchandises se fait essentiellement par camion (90 % en 2017) (Statistique Canada, 2020[99]). Le rail est un moyen de transport important pour les biens tels que les produits agricoles, mais il représente une plus petite part du transport de marchandises (9 % en 2017), du fait du coût élevé des infrastructures dans les régions vastes et faiblement peuplées. Les volumes de fret routier et les émissions connexes augmenteront parallèlement à l’activité économique. Les instruments utilisés pour décarboner le transport de marchandises et ceux qui sont nécessaires pour réduire les émissions des véhicules de tourisme se recoupent.
Les mesures visant à encourager l’utilisation de moyens de transport de marchandises plus sobres en carbone doivent s’appliquer à différentes technologies. Une des principales difficultés soulevées par la décarbonation du transport routier de marchandises tient au fait qu’à ce jour, aucune technologie ne semble susceptible de régler à elle seule le problème des émissions imputables au fret routier, en particulier dans le secteur du camionnage à longue distance (FIT, 2021[66]). Les deux technologies les plus prometteuses sont les camions électriques à batterie et les camions à pile à combustible à hydrogène. Elles nécessitent toutes deux de nouveaux systèmes de propulsion ainsi que des infrastructures de ravitaillement (BCG, 2021[100]). Il est aussi possible de recourir aux biocarburants pour réduire les émissions en utilisant les camions et les pompes à carburant existants, mais cette technologie reste coûteuse par rapport au diesel. Plusieurs technologies seront probablement déployées pour décarboner le transport routier de marchandises, au moins à court terme (Tableau 2.7). Cela complique la conception des aides publiques. Les mesures neutres sur le plan technologique qui existent déjà, telles que la tarification du carbone, joueront un rôle important à cet égard. Conjuguées au Règlement sur les combustibles propres (RCP), les taxes sur les carburants contribueront à réduire les écarts de coûts et favoriseront la mise au point de carburants et de véhicules plus propres. Le durcissement des normes applicables aux véhicules incitera en outre le secteur à privilégier les véhicules plus écoénergétiques et moins polluants.
Les pouvoirs publics doivent également favoriser la recherche-développement. La taille du territoire canadien augmente le coût du déploiement des infrastructures de recharge et de ravitaillement. Il est néanmoins possible de réduire sensiblement les émissions dans les années à venir en décarbonant la logistique sur les liaisons interurbaines les plus fréquentées du pays (Kayser-Bril et al., 2021[101]). Les administrations publiques devraient collaborer à des projets pilotes axés sur ces liaisons et évaluer les technologies déployées dans d’autres pays de l’OCDE en vue de leur utilisation dans les conditions qui prévalent au Canada, caractérisées notamment par des hivers extrêmement rigoureux dans certaines régions du pays (Encadré 2.14). Elles devraient également continuer de soutenir les technologies émergentes telles que l’hydrogène vert, en veillant à ce que les dispositifs provinciaux s’appuient sur les enseignements tirés dans d’autres juridictions canadiennes et à l’étranger.
Tableau 2.7. Avantages et inconvénients des camions et carburants bas carbone
Technologie |
Avantages |
Inconvénients |
Application possible |
---|---|---|---|
Camions électriques à batterie |
Émissions de carbone potentiellement nulles |
Réduction de la charge utile due à la batterie Perte d’autonomie par temps froid Nécessité de nouveaux camions et d’infrastructures de recharge |
Véhicules de petite taille et d’une charge utile faible, trajets plus courts |
Camions à pile à combustible à hydrogène |
Émissions de carbone potentiellement nulles |
Nécessité de nouveaux camions et d’infrastructures de ravitaillement |
Transport à moyenne et à longue distances, véhicules à usage intensif |
Caténaires |
Technologie éprouvée dans les zones urbaines |
Importants coûts fixes d’investissement dans l’électrification des autoroutes |
Trajets plus longs sur des itinéraires fixes et très fréquentés |
Biocarburant/carburant diesel renouvelable |
Utilisation des camions et des infrastructures de ravitaillement existants |
Émissions liées au changement indirect d’affectation des terres, disponibilité limitée des charges d’alimentation |
Remplacement du carburant diesel dans les camions existants |
Carburant diesel de synthèse (e-diesel) |
Utilisation des camions et des infrastructures de ravitaillement existants |
Pas encore commercialisé, coût prohibitif, production à forte intensité énergétique |
Remplacement du carburant diesel dans les camions existants |
Source : BCG (2021[100]).
Encadré 2.14. Tester les technologies vertes par temps froid au Canada
Le froid extrême influe sur la productivité et le coût des technologies vertes dans certaines régions du Canada. Les pouvoirs publics doivent en tenir compte dans les mesures qu’ils prennent pour réduire les écarts de coûts avec les technologies à plus forte intensité de carbone. Des projets pilotes ou des activités de recherche-développement financées par les pouvoirs publics s’avèrent parfois nécessaires pour que des solutions prêtes à être commercialisées puissent être adaptées aux conditions qui prévalent au Canada :
Camionnage – L’autonomie des véhicules électriques diminue par temps très froid du fait de la chimie de la batterie et de la consommation d’énergie nécessaire au chauffage de la cabine : les camions électriques à batterie pourraient perdre 25 à 35 % de leur autonomie à -20 °C (Sharpe, 2019[102]). En revanche, l’utilisation de caténaires pour électrifier les autoroutes (comme cela se fait pour les tramways urbains) pourrait présenter des avantages au Canada (Kayser-Bril et al., 2021[101]). Des caténaires alimentent déjà en énergie électrique certaines routes en Allemagne et en Suède. Les auteurs d’une récente étude suggèrent de tester des caténaires sur certains itinéraires très fréquentés au Canada, notamment pour voir comment elles résistent au froid extrême en hiver (Kayser-Bril et al., 2021[101]).
Thermopompes – Les thermopompes électriques sont généralement très efficaces pour capter de la chaleur dans l’air extérieur, mais perdent de leur efficacité lorsque les températures sont très basses. Le recours à des thermopompes pour climats froids peut permettre d’y remédier, mais soulève aussi des problèmes d’efficacité (dans la mesure où, la plupart des jours de l’année, il suffirait que les logements soient équipés de systèmes de thermopompe plus légers). D’autres technologies, telles que les thermopompes hybrides associant gaz naturel et électricité, pourraient offrir des solutions plus économiques et moins gourmandes en énergie (AIE, 2019[103]). L’Ontario a récemment mis en place un dispositif de thermopompes hybrides qui sera testé dans différentes conditions climatiques (Gouvernement de l’Ontario, 2022[104]). Ressources naturelles Canada travaille par ailleurs avec le ministère de l’Énergie des États-Unis, son Agence pour la protection de l’environnement (EPA, Environmental Protection Agency) et des fabricants en vue de la mise au point de thermopompes pour climats froids à haut rendement, dans le cadre du défi technologique « Residential Cold-Climate Heat Pumps Technology Challenge » (Département de l’énergie des États-Unis, 2021[105]).
Énergie éolienne – Au Québec et dans les provinces de l’Atlantique, l’énergie éolienne présente des avantages par rapport à l’énergie solaire, puisque la demande d’électricité et la vitesse des vents culminent toutes les deux en hiver. Néanmoins, le rendement des éoliennes normales peut diminuer en cas de froid extrême : l’accumulation de givre augmente la charge sur les rotors et réduit la production d’énergie (Ressources naturelles Canada, 2017[106]). Des accessoires pour éoliennes, tels que des dispositifs de chauffage permettant d’éviter l’accumulation de givre, peuvent améliorer leur fonctionnement par temps très froid.
Améliorer la performance énergétique des bâtiments du Canada
En 2020, les émissions de GES imputables aux logements et aux bâtiments de l’industrie des services représentaient 13 % du total des émissions du Canada. La majeure partie (78 %) provient de la combustion de gaz naturel et de pétrole pour le chauffage des intérieurs et de l’eau. D’une année sur l’autre, les variations météorologiques peuvent modifier considérablement le volume des émissions de GES générées par le secteur des bâtiments, ce qui rend difficiles les comparaisons entre différentes années. Néanmoins, de manière générale, les émissions dues aux logements sont relativement stables depuis 1990. L’expansion du parc de logements a été compensée par l’amélioration de l’efficacité énergétique et la baisse de l’utilisation du mazout pour le chauffage (Graphique 2.24). À l’inverse, l’augmentation de la surface de plancher dans l’industrie des services a contribué à la hausse des émissions attribuables aux bâtiments tertiaires et publics. En 2019, les émissions de GES de l’industrie des services, qui représentaient 53 % du total des émissions du secteur des bâtiments, étaient supérieures à celles des logements (47 %).
Les niveaux élevés de consommation d’énergie du Canada, par rapport à ceux des autres pays froids, témoignent en partie de la dimension de ses logements. De grandes quantités de gaz naturel et d’électricité sont consommées pour alimenter en énergie les maisons et les appartements, qui sont de grande taille par rapport aux logements du reste du monde (Graphique 2.25). La faiblesse des prix favorise également l’utilisation intensive de l’électricité et du gaz naturel. Les systèmes de chauffage au gaz naturel sont chose courante dans les provinces de l’Ouest, où le gaz est très bon marché.
Pour atteindre la neutralité en gaz à effet de serre, les systèmes de chauffage à combustibles fossiles doivent être progressivement abandonnés et la quantité d’énergie consommée dans les bâtiments doit diminuer. Cette évolution sera essentielle, tant pour réduire les émissions générées par le secteur des bâtiments que pour libérer de l’énergie bas carbone au profit d’autres secteurs, comme les transports et l’industrie lourde. L’objectif visé par la stratégie canadienne pour les bâtiments verts est de parvenir à la neutralité en GES des bâtiments à l’horizon 2050. Pour que ce processus reste sur la bonne trajectoire, un objectif intermédiaire a été fixé pour 2030, visant une réduction de 37 % des émissions par rapport à leur niveau de 2005. Bien que le gouvernement fédéral exerce une influence sur la politique infranationale, ce sont les provinces - et dans certains cas, les municipalités - qui sont chargées de réglementer la construction et les bâtiments. Les principaux instruments d’action utilisés pour atteindre les objectifs de réduction de GES diffèrent selon qu’il s’agit de bâtiments neufs ou existants.
Établir des normes de performance énergétique plus strictes pour les bâtiments neufs
Des bâtiments neufs qui sont économes en énergie sont essentiels à la réalisation des objectifs de réduction des émissions dans les décennies à venir. Si la construction de bâtiments se maintenait au rythme enregistré ces dernières années, la part des bâtiments neufs dans le parc immobilier augmenterait rapidement. Des données récentes sur le stock de capital laissent penser qu’en 2050, les bâtiments construits après 2020 pourraient représenter la moitié du stock total. Même si le taux de construction devait ralentir par rapport à celui des dernières années, les nouveaux bâtiments auraient tout de même une grande incidence sur les performances environnementales du secteur. Il est donc d’autant plus important de fixer dès maintenant des normes énergétiques strictes.
Les codes de construction nationaux fixent des exigences de plus en plus strictes en matière d’efficacité énergétique. Le gouvernement fédéral administre un modèle de code énergétique qu’il renforce à intervalles réguliers, le Code national de l’énergie pour les bâtiments (CNEB). La version la plus récente du code (2020) durcit les normes minimales en matière d’efficacité énergétique, tant pour l’enveloppe des bâtiments et la ventilation que pour les systèmes de chauffage de l’eau et des locaux. Le code prévoit également des niveaux d’exigences plus stricts en matière de performance énergétique, que les administrations provinciales ou les constructeurs ont la possibilité d’appliquer. Ceux-ci préfigurent l’orientation future de l’action publique en matière de construction. Le niveau d’exigence le plus strict prévoit des normes compatibles avec les bâtiments neutres en GES (les bâtiments dont l’efficacité énergétique est telle que pour répondre à leurs besoins énergétiques, ils peuvent être entièrement alimentés par des sources renouvelables, générées sur place ou hors site). L’intégration de ces normes dans les codes de construction des provinces permettrait au Canada de se hisser au niveau des pays de l’OCDE (la Norvège, par exemple) qui sont les plus avancés dans le domaine de la performance des bâtiments.
Les provinces doivent adopter rapidement le dernier code de l’énergie
Pour être applicable, le code national de l’énergie doit être intégré aux réglementations des provinces. La plupart des provinces adoptent le code de l’énergie, dans son intégralité ou en partie, ou se dotent à l’échelle locale de règles ayant un effet équivalent. Toutefois, les provinces adoptent souvent la dernière version du code avec beaucoup de retard (Tableau 2.8). Seule une minorité de provinces appliquent le code le plus récent ou ont adopté à l’échelle locale des normes d’une exigence égale ou plus grande. La plupart des provinces appliquent, dans leur intégralité ou en partie, des versions plus anciennes et moins strictes du code, en y apportant souvent des modifications pour tenir compte des contextes locaux (Graphique 2.26). En conséquence, les normes énergétiques des bâtiments varient considérablement d’une région à l’autre du pays.
Tableau 2.8. Adoption des codes nationaux de l’énergie dans certaines provinces
CNEB 2011 |
CNEB 2015 |
CNEB 2017 |
CNEB 2020 |
|
---|---|---|---|---|
Colombie-Britannique |
décembre 2013 |
décembre 2018 |
- |
- |
Alberta |
novembre 2015 |
- |
avril 2019 |
- |
Saskatchewan |
- |
- |
janvier 2019 |
|
Manitoba |
décembre 2014 |
- |
- |
- |
Ontario |
janvier 2014 |
- |
- |
- |
Québec |
- |
juin 2020 |
- |
- |
Nouvelle-Écosse |
décembre 2014 |
avril 2017 |
janvier 2020 |
- |
Note : Le tableau indique la date à laquelle une version donnée du CNEB est entrée en vigueur dans une province donnée. À ce jour, aucune province n’a adopté la version la plus récente du code. Toutefois, le code en vigueur en Colombie-Britannique est au moins aussi strict que la version de 2020 du CNEB.
Source : Ressources naturelles Canada.
Le soutien de l’administration fédérale peut contribuer à accélérer les progrès réalisés par les provinces. Il existe déjà des processus visant à harmoniser les codes de construction en vigueur dans les différentes provinces, en vue notamment de réduire les obstacles aux échanges entre provinces. L’accord de conciliation sur les codes de construction est en place depuis 2019. Il n’existe cependant aucun moyen de contraindre les provinces à adopter la version la plus récente du modèle de code énergétique. Par le passé, d’autres pays fédéraux de l’OCDE (dont les États-Unis) ont eu recours à des financements publics nationaux pour accélérer l’adoption de codes énergétiques (Buildings Codes Assistance Project, 2022[108]). Le Canada, où il est proposé de créer un fonds pour accélérer l’adoption du code de neutralité en GES des bâtiments, envisage de recourir à cette option. Ces financements devraient avoir pour but de combler les déficits de capacités des administrations infranationales, qui retardent l’adoption du code. Le gouvernement fédéral pourrait soutenir la transition vers la version la plus récente du code en subventionnant des formations et en publiant des lignes directrices et des informations destinées à faciliter le respect du code (Lockhart, 2021[109]).
L’abandon progressif du chauffage aux énergies fossiles doit constituer une priorité
Les provinces doivent prendre rapidement des mesures pour rattraper les pays de l’OCDE les plus avancés (comme la Norvège) qui ont déjà adopté des codes de neutralité en GES (OCDE, 2022[89]). Actuellement, seule la Colombie-Britannique s’est engagée à adopter un code de neutralité en GES (à l’horizon 2030). Les autres provinces doivent également prendre des mesures. La priorité immédiate doit être de fixer un calendrier en vue de l’abandon progressif du chauffage au mazout, qui est le mode de chauffage des bâtiments qui génère le plus d’émissions. Dans des pays de l’OCDE comme l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni ou la Suède, les chaudières à mazout sont promises à l’interdiction ou déjà interdites (AIE, 2022[110]). Si la plupart des pays s’attachent à limiter l’installation de systèmes de chauffage à forte intensité d’émissions dans les bâtiments neufs, d’autres, comme la Norvège, exigent également le remplacement des chaudières au mazout dans les bâtiments existants.
Au Canada, le Québec fait partie des rares juridictions à avoir fixé une date butoir pour l’abandon progressif du chauffage au mazout (2030). En raison de la hausse du coût du carbone, le taux d’électrification et l’utilisation des systèmes de chauffage économes en énergie devraient augmenter ailleurs au Canada. Toutefois, sans intervention réglementaire dans les meilleurs délais, des systèmes de chauffage conventionnels à combustibles fossiles continueront d’être installés, ce qui rendrait nécessaires à plus long terme des travaux de rénovation onéreux. Pour parer à cette éventualité, le gouvernement fédéral doit honorer l’engagement qu’il a pris de fixer un calendrier en vue de l’abandon progressif du chauffage aux combustibles fossiles à forte intensité d’émissions.
Accélérer la rénovation des bâtiments existants
La réduction des émissions et de la consommation d’énergie des bâtiments existants constitue un défi difficile à relever. L’âge et la performance énergétique de ces bâtiments varient considérablement à travers le pays (Graphique 2.27). La plupart ont été construits conformément à des exigences de performance énergétique moins strictes que celles de la version actuelle du code énergétique du Canada. Pour chauffer des bâtiments résidentiels construits avant 1960, il peut être nécessaire de consommer près de trois fois plus d’énergie que pour chauffer le même espace dans des logements plus récents (AIE, 2019[111]).
Le rythme auquel les bâtiments sont actuellement rénovés est trop lent pour atteindre les objectifs de réduction des émissions imputables au parc immobilier existant. D’après une étude d’Efficacité énergétique Canada, 0.7 % des logements et 1.4 % des surfaces commerciales sont rénovés chaque année (Haley et Torrie, 2021[107]). Les auteurs de cette étude arrivent à la conclusion qu’à ce rythme, il faudrait environ 140 ans pour rénover les logements et 70 ans pour rénover les autres bâtiments.
Pour accélérer le rythme des rénovations, les autorités fédérales et provinciales accordent des prêts et des subventions et fournissent des conseils sur les moyens d’économiser l’énergie. Au nombre des investissements subventionnés figurent l’isolation des logements, l’étanchéisation à l’air et l’installation de systèmes à énergie renouvelable et de thermopompes électriques. Il existe d’autres programmes, qui sont destinés à soutenir la modernisation des logements des personnes à faible revenu. En complément des prêts et des subventions qu’il octroie, le gouvernement fédéral s’attache à promouvoir la certification de performance énergétique. Grâce au programme Energy Star, les bâtiments les plus performants peuvent bénéficier d’une certification volontaire. Les programmes fédéraux financent également des initiatives en faveur des bioénergies, notamment des systèmes de chauffage urbain alimentés par la biomasse, dans les collectivités autochtones, rurales et éloignées. C’est l’un des axes du programme Énergie propre pour les collectivités rurales et éloignées, qui vise à réduire la dépendance vis-à-vis des énergies fossiles en ce qui concerne le chauffage des communautés non raccordées au réseau (Encadré 2.9).
La panoplie globale des aides fournies par les pouvoirs publics est tout à fait adaptée pour surmonter les obstacles à l’amélioration de l’efficacité énergétique. Les subventions et les prêts peuvent aider les ménages ayant un accès limité au crédit à engager des rénovations qui, à terme, réduisent leur facture énergétique. La fourniture de conseils peut aider les propriétaires à réaliser des investissements rentables dans les économies d’énergie qu’ils auraient eu des difficultés à identifier sans ce soutien. Une certification normalisée de la performance énergétique, appliquée de manière cohérente dans toutes les provinces du Canada, pourrait mieux garantir que le prix des propriétés reflète la qualité de la structure. Elle permettrait de favoriser les rénovations, dans les situations où les intérêts des propriétaires et des occupants sont contradictoires (Gerarden, Newell et Stavins, 2017[112]).
L’orientation de certains dispositifs pourrait être redéfinie. Les prêts et les subventions accordés au titre de l’Initiative pour les maisons plus vertes sont ouverts à tous les ménages, y compris à ceux dont le revenu est élevé. Il est probable que même s’ils ne bénéficiaient pas d’aide, de nombreux ménages aisés entreprendraient des rénovations de manière à économiser l’énergie. Les pouvoirs publics pourraient réduire davantage les émissions en mettant en place des mesures d’incitation plus importantes ciblant les propriétaires à revenu faible ou moyen qui sont plus susceptibles de connaître des contraintes financières. La nouvelle subvention pour la conversion abordable du mazout à la thermopompe du Canada est mieux ciblée que d’autres initiatives. Destiné à accélérer l’abandon progressif des systèmes de chauffage au mazout à forte intensité de carbone, principalement dans les provinces de l’Atlantique, ce programme prévoit l’octroi de subventions pouvant atteindre 5 000 CAD aux ménages à revenu faible ou intermédiaire qui optent pour des thermopompes pour climats froids (Ressources naturelles Canada, 2022[113]). Dans les provinces où le marché de l’électricité est très réglementé, une réforme de la tarification de l’électricité inciterait davantage à économiser l’énergie (voir plus haut) et générerait des ressources qui permettraient de renforcer les aides à la rénovation. De manière générale, les provinces devraient éviter de prendre des mesures de soutien liées à l’énergie temporaires et non ciblées (Encadré 2.15)
L’appui en matière d’efficacité énergétique apporté aux entreprises doit viser à combler les lacunes en matière d’information. Parmi les mesures d’incitation ciblées sur les entreprises figurent les investissements de la Banque des infrastructures du Canada et les dégrèvements fiscaux sur les investissements dans les économies d’énergie accordés en Ontario. Les autorités publiques peuvent jouer un rôle utile en communiquant aux entreprises des informations qui les aideront à investir dans les économies d’énergie. Les petites entreprises en particulier pourraient tirer profit de ce type de soutien : Fortis BC, l’entreprise de services publics réglementée de la Colombie-Britannique, fournit des conseils gratuits aux petites entreprises. De manière générale, les entreprises sont déjà suffisamment encouragées à réduire les coûts imputables à l’énergie qu’elles consomment.
Il est nécessaire de procéder à une analyse plus systématique des incidences des programmes de rénovation. Les autorités publiques doivent évaluer à intervalle régulier les retombées des dispositifs existants pour vérifier qu’ils donnent les résultats escomptés. Des études consacrées à d’anciens dispositifs appliqués dans d’autres pays ont fait ressortir des cas où les coûts des dispositifs de rénovation étaient supérieurs aux avantages qu’ils procuraient (Fowlie, Greenstone et Wolfram, 2018[114]). Il a également été établi que les dispositifs de réhabilitation thermique profitent de manière disproportionnée aux ménages aisés (Borenstein et Davis, 2016[90]). De telles évaluations pourraient être facilitées par la stratégie lancée récemment qui vise à améliorer la modélisation des retombées environnementales des dispositifs du gouvernement fédéral.
Encadré 2.15. Réexaminer les subventions aux factures de services publics : l’allégement du coût de la vie lors de la crise énergétique
Les politiques publiques passées ont affaibli les incitations privées à investir dans l’efficacité énergétique. Pendant la crise énergétique de 2022, plusieurs gouvernements provinciaux ont mis en place des subventions non ciblées visant à protéger les ménages contre les fortes hausses temporaires des prix des combustibles et des factures d’énergie. S’il était nécessaire de soutenir les personnes et les familles vulnérables pour alléger les pressions qui pesaient sur elles du fait du coût de la vie, les subventions ont également profité aux ménages à revenu élevé. Des ressources équivalentes, si elles étaient allouées à des incitations à la rénovation, pourraient avoir une incidence plus durable sur l’accessibilité financière de l’énergie tout en réduisant les émissions liées à la consommation d’énergie.
Réduire les émissions incorporées dans les matériaux de construction
Comme d’autres pays de l’OCDE, le Canada a jusqu’à récemment attaché peu d’importance à la réduction des émissions incorporées (notamment celles qui résultent de la fabrication, du transport et de l’assemblage des matériaux de construction). La fabrication du ciment et de l’acier entraîne une consommation importante de combustibles et génère de grandes quantités d’émissions imputables aux procédés industriels. Les systèmes de tarification du carbone du Canada créent des incitations à réduire ces émissions. Ces incitations se renforceront avec l’augmentation des prix du carbone et le durcissement progressif des normes minimales sur l’intensité des émissions. Les autorités fédérales ont judicieusement entrepris de définir une stratégie plus globale pour la réduction des émissions de carbone incorporées dans les matériaux de construction et les émissions de gaz à effet de serre imputables à l’utilisation continue des bâtiments.
En 2022, le Conseil national de recherches du Canada a publié des lignes directrices nationales en matière d’analyse du cycle de vie de l’ensemble du bâtiment. (Bowick et al., 2022[115]). L’analyse du cycle de vie pourrait améliorer les retombées environnementales des codes du bâtiment du Canada, notamment en permettant de mieux cibler les réglementations sur la rénovation. Plus généralement, l’analyse du cycle de vie facilitera l’évaluation de l’efficacité des politiques publiques en matière de réduction des émissions associées aux bâtiments.
Il convient également de recenser les obstacles réglementaires à une plus grande utilisation des produits de construction bas carbone et récupérés. En garantissant que les codes de construction permettent l’utilisation de solutions de remplacement sûres et à faible teneur en carbone pour remplacer l’acier et le ciment neufs, la récupération des matériaux de construction pourrait être améliorée et la nécessité de produire de nouveaux matériaux réduite. Les achats publics de bâtiments et de matériaux ultra-verts permettront aussi de mettre à l’essai et d’améliorer des produits verts et de créer de nouveaux marchés pour ceux-ci. En 2021, le Canada a fait sien l’engagement de l’Allemagne et du Royaume-Uni, entre autres pays, d’acheter de l’acier et du béton bas carbone (ONUDI, 2021[116]). Grâce à l’électricité bas carbone produite dans de nombreuses provinces et au cadre d’action publique favorable au climat, le Canada est bien placé pour égaler les progrès réalisés dans les pays de l’OCDE les plus avancés en matière de production d’acier vert (Encadré 2.16).
Encadré 2.16. Étude de cas : progrès réalisés en Suède dans la décarbonation de la production de l’acier
En Suède, les aciéristes ont mis au point et testé une technologie utilisant de l’hydrogène vert pour remplacer, dans la production de l’acier, les processus de haut fourneau traditionnels utilisant du coke. Tirant parti de la possibilité d’accéder à une électricité stable et propre peu coûteuse et du soutien des pouvoirs publics, deux projets sont en cours qui visent à développer des capacités industrielles permettant de fabriquer de l’acier à partir de minerai de fer en générant une quantité d’émissions proche de zéro (voir HYBRIT (2022[117])et H2 Green Steel (2022[118])). En complément des efforts internationaux visant à développer les marchés des produits décarbonés, les incitations à diminuer les émissions offertes par le système d’échange de quotas d’émissions de l’UE (SEQE-UE) favorisent une production plus écologique de matériaux de construction tels que l’acier et le ciment. Bien qu’à l’heure actuelle les producteurs d’acier et de ciment reçoivent à titre gratuit l’ensemble des quotas d’émissions qui leur sont alloués, le SEQE-UE incite à réduire leurs émissions les entreprises qui peuvent tirer profit de la vente de quotas à d’autres entreprises.
La disponibilité en grande quantité d’hydroélectricité dans certaines provinces et les programmes pour l’hydrogène vert soutenus par le gouvernement pourraient permettre aux aciéristes du Canada de décarboner considérablement leur production dans les années à venir. Certains sidérurgistes, soutenus par les pouvoirs publics, ont déjà entrepris de mettre au point des installations « prêtes pour l’hydrogène » pour remplacer les hauts fourneaux. En 2022, l’entreprise ArcelorMittal a annoncé avoir testé avec succès, dans son aciérie de Contrecœur (Québec), le remplacement partiel du gaz naturel par de l’hydrogène vert lors de la réduction du minerai de fer (ArcelorMittal, 2022[119]). La hausse des prix du carbone et le durcissement des normes d’intensité d’émissions applicables dans le cadre des programmes conçus pour les gros émetteurs renforceront les incitations à recourir à des méthodes plus écologiques de production des matériaux de construction.
La communauté de l’OCDE de l’action publique dans le domaine de l’acier, et notamment le Comité de l’acier et le Forum mondial sur les surcapacités sidérurgiques, rassemble les gouvernements en vue de répondre aux défis auxquels l’industrie de l’acier est confrontée (OCDE (2022[120]), FMSS (2022[121]) ). Parmi ses contributions récentes sur la décarbonation figurent l’élaboration d’indicateurs clés concernant les progrès réalisés en matière de décarbonation de l’acier et le suivi des projets sidérurgiques bas carbone. Grâce à sa participation aux deux forums cités ci-avant, le Canada est en mesure de soutenir et de tirer partir des efforts de coopération déployés à l’échelle internationale pour favoriser la décarbonation de l’acier.
Source : OCDE (2023[122]).
Réduire le coût du changement climatique
Le climat canadien est déjà en train de changer
La température moyenne observée au Canada a augmenté de 1.9 degré Celsius (°C) entre 1948 et 2021, soit le double du taux moyen de réchauffement de la planète (Bush et Lemmen, 2019[123]). Les températures continueront d’augmenter, et ce même si une action mondiale coordonnée permet de réduire les émissions (Bush et Lemmen, 2019[123]). La hausse des températures constitue une menace pour la santé humaine, la diversité de la flore et de la faune, la résilience des écosystèmes (Conseil des académies canadiennes, 2019[124]) et le bien-être économique.
Comme dans d’autres pays, le changement climatique a renforcé les phénomènes météorologiques extrêmes au Canada. Le pays connaît déjà un plus grand nombre d’épisodes de chaleur extrême, des saisons de couverture de glace plus courtes et une élévation du niveau de la mer (Bush et al., 2022[125]). Ces effets devraient s’intensifier, et leurs coûts devraient s’alourdir du fait de la concentration d’actifs dans des zones sujettes aux catastrophes naturelles (Tableau 2.9).
Les effets du changement climatique seront inégaux, les phénomènes qui se manifestent lentement tels que le dégel du pergélisol et l’élévation du niveau de la mer alourdissant le coût des catastrophes naturelles. Comme d’autres régions situées à des latitudes élevées, le nord du Canada connaît le réchauffement le plus rapide (Bush et al., 2022[125]). Le dégel du pergélisol endommagera les routes et entravera l’accès aux collectivités isolées. Le changement climatique sera également lourd de conséquences pour les provinces comme l’Alberta qui ont subi certains des pires incendies et inondations qu’a connus le Canada (Institut climatique du Canada, 2022[126]). En raison des modifications de la chimie des océans causées par l’absorption du CO2, la pêche pourrait devenir un des secteurs les plus durement touchés. Les changements de disponibilité en eau, ainsi que de rythme saisonnier et de volume des écoulements fluviaux, pourraient affecter la production hydroélectrique. En revanche, les propriétaires de terres agricoles pourraient bénéficier d’un allongement des saisons de croissance et de conditions plus favorables aux cultures à haute valeur ajoutée. Des études récentes laissent à penser qu’à l’échelle de l’économie considérée dans son ensemble, le changement climatique pourrait entraîner d’importantes pertes de revenu au Canada (Encadré 2.17).
Tableau 2.9. Années des sinistres les plus coûteux enregistrés au Canada, sur la base des pertes assurées dues à des catastrophes naturelles
Rang |
Année |
Total des pertes assurées (CAD) |
Événements météorologiques catastrophiques majeurs |
---|---|---|---|
1 |
2016 |
5.4 milliards |
Feu de forêt, Alberta |
2 |
2013 |
3.5 milliards |
Inondations, Alberta et Ontario |
3 |
1998 |
2.6 milliards |
Tempête de verglas, Québec |
4 |
2020 |
2.3 milliards |
Inondations et tempête de grêle, Alberta |
5 |
2018 |
2.2 milliards |
Tempêtes de pluie et de vent, Ontario et Québec |
Note : Ce tableau présente les pertes assurées dues à des catastrophes naturelles. Sont inclus dans le total tous les événements dont le coût était supérieur ou égal à 25 millions CAD. Les événements météorologiques catastrophiques majeurs ayant eu lieu chaque année indiquée sont mentionnés dans la colonne de droite. Les chiffres excluent les coûts non assurés des catastrophes naturelles, qui peuvent être importants (voir, par exemple, Institut canadien pour des choix climatiques (2020[127])).
Source : Bureau d’assurance du Canada (2022[128]).
Encadré 2.17. Projections des conséquences économiques du changement climatique
Les estimations des effets du changement climatique sur l’activité économique sont très incertaines du fait des hypothèses nécessaires à leur établissement. D’après certaines études internationales, il se pourrait que le Canada, en tant que pays du nord à revenu élevé, bénéficie d’un effet positif net modeste du réchauffement planétaire sur son produit intérieur brut. Ces résultats contredisent les conclusions d’études portant spécifiquement sur le Canada. De récentes projections laissent à penser que le changement climatique pourrait entraîner d’importantes pertes de revenu au Canada (Tableau 2.10), surtout si les pouvoirs publics ne prennent aucune mesure préventive (Institut climatique du Canada, 2022[126]).
Tableau 2.10. Estimations récentes de l’effet du changement climatique sur le PIB du Canada
Effet sur le PIB d’un réchauffement de +2 °C d’ici à 2050 |
|
---|---|
Swiss Re Institute (2021) |
-7 % |
Bureau du DPB (2022) |
-2.4 % |
Institut climatique du Canada (2022) |
-2 % |
Kahn et. al. (2019) |
-0.6 % |
Moody’s Analytics (2019) |
+0.2 % |
Note : Les études citées sont de portées différentes, ce qui explique en partie les différences d’ampleur des effets estimés. Le Swiss Re Institute modélise l’effet de la hausse des températures en tenant compte de l’incertitude qui entoure les effets les plus graves ; l’estimation présentée ici correspond au plus extrême des différents scénarios envisagés. Kahn et al. (2019) étudient les effets de divergences des températures et des précipitations par rapport à leur niveau normal sur longue période ; ils estiment leurs effets sur le PIB par habitant. Le Bureau du directeur parlementaire du budget (DPB) modélise les effets de l’augmentation des températures et des précipitations ; ses estimations reposent sur l’hypothèse d’une hausse de la température mondiale limitée à 1.8 degré Celsius. L’Institut climatique du Canada rend compte des effets induits sur la santé, les infrastructures et les secteurs vulnérables aux aléas climatiques. Enfin, Moody’s Analytics analyse les effets liés à l’élévation du niveau de la mer, les répercussions du changement climatique sur la santé humaine, les effets de la chaleur sur la productivité de la main-d’œuvre, ainsi que les effets du changement climatique sur la productivité agricole, le tourisme et l’énergie.
Source : Swiss Re Institute (2021[129]) ; Bureau du directeur parlementaire du budget (DPB) (2022[130]) ; Institut climatique du Canada (2022[126]) ; Moody’s Analytics (2019[131]) ; et Kahn et al. (2019[132]).
Des mesures d’adaptation peuvent permettre de réduire les dommages causés par le changement climatique
Parmi les risques climatiques les plus aigus auxquels le Canada est exposé figurent les dommages susceptibles d’être causés par une accentuation des phénomènes d’inondation, de dégel du pergélisol et de vague de chaleur (Tableau 2.11). C’est dans les régions ayant connu des phénomènes violents ces dernières années que les efforts accomplis pour faire face à ces risques, et réduire les coûts futurs liés au changement climatique, sont les plus rapides. Ainsi, à la suite d’une vague de chaleur sans précédent et d’inondations et de feux de forêt dévastateurs, tous survenus en 2021, la Colombie-Britannique a investi dans la prévention des incendies et la préparation aux inondations. Précédemment, en 2014, la ville de Vancouver avait modifié ses normes de construction pour tenir compte des projections d’élévation du niveau de la mer à l’horizon 2100 (OCDE, 2019[133]). Dans les provinces de l’Atlantique, des travaux de construction d’ouvrages longitudinaux (destinés à prévenir l’érosion par les vagues) et de restauration des plages sont en cours dans les collectivités confrontées à un affaissement des sols. Dans le nord, les pouvoirs publics s’emploient à renforcer les routes endommagées par le dégel du pergélisol.
Encadré 2.18. Le Canada finalise sa première stratégie nationale d’adaptation
En novembre 2022, le gouvernement du Canada a publié pour consultation une Stratégie nationale d’adaptation. Ce document, qui doit être finalisé au cours des mois à venir, clarifiera les rôles et les responsabilités en matière d’adaptation des différents niveaux d’administration publique canadiens ainsi que des corps dirigeants autochtones et des acteurs non gouvernementaux. Cette stratégie décrira en outre de façon précise les objectifs du Canada en matière d’adaptation et un cadre d’évaluation permettant de suivre les progrès accomplis en termes d’atténuation des risques liés au climat. La Stratégie nationale d’adaptation devrait être actualisée tous les cinq ans et sera accompagnée de « plans d’action » destinés au gouvernement fédéral, ainsi que de plans d’action bilatéraux associant les pouvoirs publics fédéraux et provinciaux ou territoriaux. Le premier Plan d’action sur l’adaptation du gouvernement fédéral a été publié en novembre 2022. Exposant des mesures axées sur des objectifs prioritaires pour les cinq prochaines années (notamment des initiatives examinées dans ce chapitre), ce plan d’action porte sur les cinq domaines clés visés par la Stratégie nationale d’adaptation : la résilience aux catastrophes, la santé, la biodiversité, l’infrastructure ainsi que l’économie et les travailleurs.
Source : Environnement et Changement climatique Canada (2022[134]).
Dans les autres régions, les avancées ont été plus modestes. Un grand nombre d’administrations infranationales n’ont pas encore mis en œuvre de stratégie d’adaptation ou donné suite aux évaluations des risques (Changing Climate, 2022[135]). Au-delà de la prise en compte des considérations climatiques dans la planification des infrastructures, des efforts concrets doivent être déployés pour intégrer l’adaptation dans l’aménagement du territoire et les codes du bâtiment. Il est important d’agir en ce sens pour dissuader de construire sur des sites dangereux, tout en s’assurant que les personnes exposées à des risques réduisent leur vulnérabilité. Le gouvernement fédéral investit 60 millions CAD sur cinq ans pour accélérer l’utilisation de codes et de normes « tenant compte du climat » pour des infrastructures résilientes. Étant donné que les coûts et les bénéfices potentiels des mesures d’adaptation peuvent différer considérablement suivant leur nature et le lieu où elles sont appliquées (OCDE, 2015[136]), il conviendrait de réaliser des analyses-coûts avantages pour déterminer quelles sont les initiatives prioritaires.
Les initiatives de formation adoptées par l’administration fédérale, telles que le programme Renforcer la capacité et l’expertise régionales en matière d’adaptation (RCERA) de Ressources naturelles Canada, contribuent à combler les déficits de capacité des petites municipalités. Des financements destinés à appuyer les efforts d’adaptation sont par ailleurs mis à la disposition des collectivités locales, notamment via le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes d’Infrastructure Canada, que le gouvernement fédéral s’est engagé à étoffer. Le recours à ce fonds devrait augmenter à mesure que les collectivités passeront de l’évaluation des risques à la mise en œuvre de plans d’adaptation (Institut climatique du Canada, 2022[137]). Un soutien technique peut également aider les autorités locales à évaluer les coûts et les avantages d’autres formes d’investissement dans l’adaptation.
Tableau 2.11. Principaux risques climatiques auxquels le Canada est exposé et exemples de mesures d’adaptation prises par les pouvoirs publics
Risque |
Niveau d’administration |
Exemples de mesures d’adaptation |
---|---|---|
Fortes pluies et inondations |
Local |
Déplacement de résidences (Perth-Andover, Nouveau-Brunswick) Modification du code du bâtiment (Markham, Ontario) |
Élévation du niveau de la mer |
Provincial |
Ouvrages longitudinaux (Île-du-Prince-Édouard) |
Local |
Restauration du littoral (Percé, Québec) |
|
Dégel du pergélisol |
Fédéral-provincial |
Actualisation des normes de construction (administration fédérale et Québec) |
Provincial |
Surveillance de la température du sol (Yukon) Reconstruction des routes en remblai (Territoires du Nord-Ouest) |
|
Vagues de chaleur et incendies |
Provincial |
Renforcement du service de lutte contre les feux de forêt (Colombie-Britannique) Système d’alerte en cas de chaleur (Colombie-Britannique) Renforcement des services de santé d’urgence (Colombie-Britannique) |
Local |
Gestion des forêts urbaines (Halifax, Nouvelle-Écosse) |
|
Effondrement des écosystèmes |
Fédéral |
Migration assistée d’espèces végétales (Environnement et Changement climatique Canada) |
Provincial |
Protection de la ceinture de verdure (Ontario) |
|
Dégradation des pêcheries |
Fédéral |
Études sur l’acidification des océans (Pêches et Océans Canada) |
Note : Les risques sont tirés d’un rapport du Conseil des académies canadiennes préparé à la demande du gouvernement canadien. Entre parenthèses sont mentionnés les administrations et organismes publics ayant pris les mesures d’adaptation adoptées ces dernières années qui sont citées en exemples.
Source : Conseil des académies canadiennes (2019[124]) ; et Le Canada dans un climat en changement (2022[135]).
Informations et travaux de recherche à l’appui des efforts d’adaptation publics et privés
La qualité des informations relatives au changement climatique influe sur la capacité des pouvoirs publics, des entreprises et des individus de se préparer à ce changement et d’atténuer les futurs dommages en résultant. Selon des études antérieures, les services climatiques, les systèmes de prévision et les systèmes d’alerte précoce tendent à se caractériser par des rapports avantages/coûts élevés (OCDE, 2015[136]). Les autorités fédérales du Canada publient des données et des projections climatiques sur les plateformes en ligne Donnéesclimatiques.ca et Scenarios-climatiques.canada.ca. Grâce à une modélisation des risques et à des avis scientifiques actualisés, les autorités provinciales et locales pourront plus facilement repérer les facteurs de vulnérabilité et hiérarchiser leurs priorités en matière d’investissement dans l’adaptation.
Parmi les thèmes de recherche prioritaires recensés dans le rapport de 2020 d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) intitulé Science du climat 2050 figurent les infrastructures naturelles de protection, la conception des communautés et l’impact du changement climatique sur les écosystèmes (ECCC, 2020[138]). Le gouvernement fédéral finance une évaluation nationale de la science du climat, qui fournira de nouvelles données et informations sur les changements climatiques actuels et futurs au Canada et étayera les efforts d’adaptation.
Il est nécessaire d’améliorer la cartographie des inondations pour quantifier et gérer les risques d’inondation (OCDE, 2016[139]), sachant qu’il s’agit de la catastrophe naturelle la plus courante et la plus coûteuse au Canada. Les cartes d’inondation existantes ne sont généralement pas disponibles ou aisément accessibles. En collaboration avec les provinces et territoires, le gouvernement national s’emploiera à cartographier les risques d’inondation dans les zones les plus exposées dans le cadre du Programme d’identification et de cartographie des aléas d’inondation. Les cartes des risques d’inondation contribuent de manière essentielle à l’efficacité de l’aménagement du territoire et des efforts d’adaptation. En principe, les risques d’inondation devraient aussi être portés à la connaissance des acquéreurs potentiels de logements. Or, la communication de ces risques n’est pas obligatoire au Canada (Sécurité publique Canada, 2022[140]). La plupart des ménages vivant dans des zones à haut risque ne sont pas conscients du risque d’inondation auquel ils sont exposés (Sécurité publique Canada, 2022[140]). Une amélioration de la cartographie des risques d’inondation et de la communication de ces risques contribuera à protéger les Canadiens et à réduire l’exposition globale aux risques.
Combler les lacunes en matière d’assurance contre les inondations
Une meilleure quantification des risques d’inondation peut permettre par ailleurs de combler les lacunes observées sur les marchés de l’assurance contre les inondations (OCDE, 2016[139]). Ce type d’assurance n’est pas obligatoire au Canada et n’y est proposé par le secteur de l’assurance que depuis 2015 (Sécurité publique Canada, 2020[141]). Le coût d’une telle assurance pour un bâtiment situé dans une zone inondable est généralement prohibitif. D’après une analyse réalisée par le gouvernement en 2022, les primes fondées sur le risque appliquées dans les zones à haut risque pouvaient atteindre 15 000 CAD pour les seuls avenants d’inondation, en sus des autres coûts d’assurance habitation (Sécurité publique Canada, 2022[140]). Dans la mesure où les ménages les plus exposés ne sont pas assurés contre un tel risque, les pouvoirs publics apportent une aide en cas de catastrophe. Les versements effectués au titre des Accords d’aide financière en cas de catastrophe (AAFCC) – le programme national qui couvre une partie des coûts d’intervention et de rétablissement assumés par les provinces et territoires en cas de catastrophe – ont augmenté ces dernières années (OCDE, 2019[133]). Prenant en quelque sorte la forme d’une assurance subventionnée, les dispositifs publics de secours en cas de catastrophe peuvent indirectement favoriser la poursuite d’une utilisation du sol risquée. D’autres formes d’intervention des pouvoirs publics, portant sur les risques d’inondation et les risques climatiques interdépendants, permettraient probablement d’apporter, à moindre coût, un soutien à ceux qui en ont besoin, tout en encourageant la construction dans des zones plus sûres.
Un groupe de travail sur l’assurance contre les inondations (Sécurité publique Canada, 2022[140]) a récemment confirmé que les lacunes observées sur les marchés canadiens de l’assurance contre les inondations étaient source d’inefficacité. Ce groupe de travail a étudié les régimes d’assurance contre les inondations en vigueur dans d’autres pays. Sachant que de nombreux pays sont confrontés à des problèmes similaires (Graphique 2.28), le Canada peut tirer des enseignements des solutions adoptées ailleurs (Encadré 2.19). Les systèmes qui facilitent l’accès à une large couverture, mettent à profit les capacités du marché privé et favorisent la réduction des risques peuvent permettre d’éviter les problèmes d’inefficacité susceptibles de caractériser les dispositifs entièrement publics d’assurance contre les risques d’inondation.
Encadré 2.19. Régimes d’assurance contre les inondations en place dans d’autres pays de l’OCDE
Aux États-Unis, l’administration fédérale offre une assurance contre les inondations par le biais du Programme national d’assurance contre les inondations (NFIP, National Flood Insurance Program). Des efforts sont accomplis pour intégrer des primes fondées sur le risque dans les polices d’assurance du NFIP et créer des incitations à la réduction des risques et à l’amélioration de l’aménagement du territoire, mais de nombreux souscripteurs continuent de bénéficier d’une couverture assurantielle subventionnée. La couverture du NFIP s’applique uniquement aux collectivités qui mettent en œuvre un ensemble spécifique de normes de gestion des zones inondables. L’administration fédérale dispose ainsi d’un mécanisme lui permettant d’influer sur la gestion des risques d’inondation par les administrations infranationales. Le passage à des primes fondées sur le risque et les nouvelles dispositions législatives reconnaissant l’équivalence de l’assurance privée contre les inondations, lorsqu’elle conditionne l’obtention de prêts hypothécaires bénéficiant d’une garantie fédérale, devraient renforcer dans l’avenir le rôle joué par les marchés de l’assurance privée en matière de prise en charge des risques d’inondation.
Les assureurs privés jouent un rôle plus important au Royaume-Uni et en France. La souscription d’une police d’assurance contre les catastrophes naturelles est encouragée dans ces deux pays. En France, les assureurs privés sont tenus de couvrir le risque d’inondation dans les contrats d’assurance dommages aux biens. Cette couverture est financée par une prime d’assurance additionnelle correspondant à une part fixe des primes versées au titre du contrat, indépendamment de l’exposition au risque du souscripteur. Les assureurs bénéficient quant à eux d’un dispositif de réassurance publique. Cela signifie que les contribuables peuvent être amenés à absorber des pertes, mais ce uniquement si les pertes (réassurées) excèdent la capacité de prise en charge du dispositif de réassurance publique. Dans la mesure où les primes d’assurance ne correspondent pas aux risques d’inondation, il est possible d’assurer à un prix abordable des biens situés dans des zones vulnérables en France. Dans les zones présentant un risque modéré, où la construction est encore autorisée, cela peut fausser les incitations qui s’exercent en matière d’occupation des sols. Cette distorsion potentielle est cependant au moins en partie compensée par la possibilité de réviser à la hausse les franchises appliquées aux zones qui sont confrontées à des sinistres répétés et dont les communes n’ont pas élaboré de plan de prévention des risques.
Au Royaume-Uni, les polices d’assurance dommages aux biens couvrent le risque d’inondation, et les banques exigent souvent que les souscripteurs de prêts hypothécaires soient couverts contre ce risque. Les assureurs sont tenus de cotiser à un régime de réassurance appelé « Flood Re », sous la forme d’un prélèvement sur toutes les polices d’assurance habitation. Le réassureur utilise les fonds réunis par le biais de ce prélèvement, ainsi que les primes de réassurance collectées, afin que les polices d’assurance couvrant des biens à haut risque soient plus abordables. Dans le cadre de ce système, le coût du subventionnement des primes d’assurance versées pour les biens exposés à un risque élevé d’inondation est assumé en partie par les propriétaires de logements situés dans des zones à faible risque. Si les assureurs répercutent en partie le coût du prélèvement destiné à Flood Re, le coût global de l’assurance des biens présentant un faible risque d’inondation est légèrement plus élevé qu’il ne le serait en l’absence de ce dispositif de réassurance. Seuls les logements construits avant 2009 sont couverts par ce système, ce qui dissuade les nouveaux projets immobiliers dans les zones à haut risque. L’objectif visé à terme (à l’horizon 2039) est que Flood Re sorte du marché après avoir ramené le risque correspondant aux biens à haut risque à un niveau tel qu’on puisse leur appliquer des primes d’assurance fondées sur le risque qui soient abordables.
Source : OCDE (2016[139]) ; Caisse centrale de réassurance (CCR) (2015[143]) ; Bureau d’assurance du Canada (2019[144]) ; et Sécurité publique Canada (2022[140]).
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (Principales recommandations en gras) |
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Améliorer l’efficacité de la tarification du carbone |
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La tarification du carbone constitue le principal mécanisme utilisé pour atténuer de manière économiquement efficiente les émissions de gaz à effet de serre (GES) au Canada. L’application prévue d’un prix du carbone plus élevé à une plus large proportion d’émissions est nécessaire pour que le Canada puisse atteindre ses ambitieux objectifs climatiques. L’utilisation dans les systèmes applicables aux grands émetteurs de normes d’intensité d’émission définies à partir des propres émissions antérieures de chaque entreprise constitue une approche incitative moins efficace que la prescription de normes correspondant aux entreprises à faible intensité d’émission. |
Procéder comme prévu aux augmentations de prix du carbone et au durcissement annuel des normes d’intensité d’émission dans le cadre des systèmes fédéral et provinciaux de niveaux de référence et de crédits. Élargir la tarification des émissions à d’autres secteurs et types de gaz à effet de serre. Envisager d’exiger que les normes d’intensité d’émission appliquées dans les systèmes provinciaux de niveaux de référence et de crédits reposent sur des normes spécifiques à un secteur d’activité ou à un produit et définies en fonction des entreprises à faible intensité d’émission. |
La redistribution des recettes provenant de la redevance fédérale sur les combustibles atténue son effet en termes de coûts sur les ménages à faible revenu, tout en préservant les incitations à la réduction des émissions. |
Continuer de prendre en compte les effets redistributifs des politiques climatiques lors de leur conception. |
Les limites fixées en matière d’utilisation des crédits compensatoires diffèrent selon les provinces. Par le passé, ces limites n’ont parfois pas été assez contraignantes pour préserver l’uniformité des signaux de prix du carbone. On ne dispose pas d’informations transparentes sur les prix des crédits dans les systèmes provinciaux. Une augmentation des échanges de crédits carbone entre provinces améliorerait l’efficience de la tarification du carbone. |
Mettre en place un suivi centralisé de l’offre de crédits et de leur prix dans les dispositifs provinciaux. Encourager les échanges de crédits entre systèmes d’échange de droits d’émission compatibles. |
L’incertitude qui entoure les prix futurs du carbone affaiblit les incitations à réaliser les investissements verts indispensables à la décarbonation de l’industrie lourde. |
Mettre à exécution les projets de recours à des mécanismes visant à réduire l’incertitude qui entoure les prix futurs du carbone s’agissant des investissements verts majeurs. |
Une plus grande harmonisation des approches d’atténuation des émissions de carbone entre les pays pourrait contribuer à renforcer les initiatives d’atténuation des émissions à l’échelle mondiale et à atténuer les effets induits sur la compétitivité des pays comme le Canada qui adoptent des politiques climatiques toujours plus rigoureuses. |
Continuer de promouvoir la coopération internationale et le partage de connaissances en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. |
S’attaquer aux obstacles liés au fonctionnement du marché qui entravent le verdissement de l’électricité |
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Des investissements considérables dans les réseaux et les capacités de stockage seront nécessaires pour satisfaire la demande supplémentaire de courant électrique et gérer l’augmentation de l’électricité renouvelable. Le nouveau règlement sur l’électricité propre (REP) qu’il est proposé d’adopter permettrait d’accélérer la transition vers des réseaux entièrement décarbonés, mais à un coût probablement plus élevé que celui que permettrait d’obtenir la tarification du carbone sur des marchés concurrentiels de l’électricité. Une augmentation des échanges d’électricité pourrait faciliter la transition vers une tarification fondée sur le marché et réduire les coûts de stockage de l’énergie intermittente. Le nombre limité d’interconnexions entrave les échanges entre provinces. |
Mettre en application le règlement fédéral sur l’électricité propre (REP) qu’il est proposé d’adopter. Prévoir, à l’échelle des provinces, une transition à long terme vers une tarification de l’électricité fondée sur le jeu du marché, étayée par la mise en commun de leur production avec d’autres provinces et par des investissements fédéraux dans les infrastructures destinés à favoriser le développement des interconnexions. Faciliter l’intégration de sources d’énergie intermittentes dans les réseaux électriques des provinces de l’Atlantique. |
Les processus de demande d’autorisation de projet d’énergie renouvelable peuvent avoir un effet dissuasif sur des investissements importants. |
Éviter d’interdire les projets de production d’énergie éolienne en mer et simplifier les processus d’examen. Fournir des données pour aider les provinces à répertorier les sites adaptés au développement des énergies renouvelables et à les agréer au préalable à cette fin. |
En l’absence d’aides publiques, les pertes d’emploi et de revenu dues au démantèlement rapide des centrales électriques au charbon pourraient être considérables dans certaines communautés. |
Aider, à l’échelle provinciale, les personnes licenciées qui travaillaient dans les filières fossiles en leur proposant des aides à la reconversion et au retour à l’emploi, tout en levant les obstacles à la mobilité géographique de la main-d’œuvre. |
La transition écologique présente des difficultés particulières dans les collectivités autochtones et éloignées du Canada. Divers programmes ont été mis en place pour faciliter l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à celui-ci dans les collectivités non raccordées au réseau. |
Continuer de soutenir les initiatives engagées en faveur de la transition écologique dans les collectivités autochtones et éloignées, ainsi que les projets d’atténuation et d’adaptation portés par les collectivités autochtones. |
Il sera important de prendre des mesures visant à modérer la demande durant les périodes de pointe, afin de réduire autant que possible les capacités de production nécessaires pour satisfaire la demande accrue d’électricité. |
Instaurer une tarification de l’électricité différenciée dans le temps comme option par défaut pour les clients résidentiels sur les marchés provinciaux de l’électricité, à l’aide de compteurs intelligents. |
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (Principales recommandations en gras) |
Veiller à ce que les émissions du secteur du pétrole et du gaz soient considérablement réduites |
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Grâce au règlement sur le méthane, le Canada reste en bonne voie pour réduire les émissions de méthane dues à la production de pétrole et de gaz. |
Poursuivre les efforts déployés dans le but d’améliorer l’estimation et le suivi des émissions de méthane, en vue d’intégrer ce gaz dans les mécanismes de tarification du carbone. |
Le prix du carbone payé par les exploitants de sables bitumineux est trop bas pour permettre d’atteindre les objectifs fédéraux en matière d’émissions de gaz à effet de serre. |
S’attacher à renforcer les signaux de prix en vue de la décarbonation du secteur de l’extraction pétrolière et gazière au moyen des systèmes fédéral et provinciaux existants de tarification du carbone. |
Le chevauchement des systèmes de crédits, des subventions et du crédit d’impôt relatif aux technologies de captage, d’utilisation et de stockage du carbone (CUSC) risque de déboucher sur une rémunération excessive des investissements dans ces technologies à mesure qu’elles s’amélioreront. |
Maintenir les aides à l’investissement dans les technologies de captage et de stockage du carbone et regrouper les subventions comme prévu, lorsque les améliorations technologiques le permettront. |
Réduire les émissions imputables au transport routier |
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Le nouveau Règlement sur les combustibles propres (RCP) peut contribuer au développement d’un marché intérieur des biocarburants et à la réduction des émissions imputables au transport routier. Les règles destinées à empêcher les émissions imputables au changement d’affectation des terres peuvent se révéler difficiles à mettre en œuvre. |
Revoir le RCP afin de s’assurer qu’il produit les résultats escomptés et n’a pas d’effet indésirable. |
Les pouvoirs publics soutiennent l’adoption des véhicules électriques en agissant à la fois sur l’offre et la demande. Les aides sont utiles tant que les marchés sont encore en voie de maturation. |
Maintenir les aides au déploiement d’infrastructures de recharge des véhicules électriques tant que les marchés de ces véhicules sont encore en voie de maturation. Réduire le soutien aux véhicules électriques, notamment les subventions à l’achat et les incitations fiscales, à mesure que les marchés des véhicules électriques se développent. |
Les mesures visant à réduire l’utilisation de la voiture et à favoriser les modes actifs de déplacement et le recours aux transports publics présenteraient des avantages ne se limitant pas à la baisse des émissions. |
Accroître à l’échelle provinciale le recours aux redevances d’utilisation des routes et réduire les contraintes pesant sur l’offre de logements neufs dans les zones urbaines pour améliorer la viabilité de transports publics efficaces et accessibles. |
Les solutions technologiques permettant de décarboner le transport routier de marchandises sont encore en voie de maturation. Il sera probablement nécessaire de faire appel à plusieurs technologies. |
Poursuivre la collaboration avec les États-Unis en vue de durcir les normes d’émission applicables aux véhicules légers et lourds. Favoriser l’installation d’infrastructures de recharge et de ravitaillement le long des itinéraires très fréquentés. Soutenir des études pilotes visant à tester des technologies de camions dans les conditions qui prévalent au Canada. |
Favoriser les bâtiments bas carbone et économes en énergie |
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Les modèles de codes nationaux de l’énergie applicables aux bâtiments continuent de se durcir. Toutefois, la lenteur de l’adoption de ces codes par les provinces risque d’entraîner ultérieurement des coûts de rénovation importants. |
Encourager l’adoption rapide par les provinces de la dernière version du code de l’énergie au moyen d’aides fédérales au renforcement des capacités. |
La plupart des provinces n’envisagent pas d’interdire le chauffage au mazout. Le Canada progresse plus lentement que les pays de tête de l’OCDE sur la voie de l’élimination progressive des systèmes de chauffage à forte intensité d’émission. |
Interdire rapidement l’installation de systèmes de chauffage au mazout dans les habitations, tout en maintenant en place les aides sous conditions de ressources au remplacement des systèmes de chauffage au mazout par des systèmes de substitution propres et économes en énergie. |
Les dispositifs de rénovation énergétique peuvent accélérer l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, mais sont susceptibles de profiter de manière disproportionnée aux ménages aisés. Des informations de meilleure qualité sur les performances énergétiques des bâtiments peuvent renforcer les incitations à rénover les logements et les bâtiments du secteur des services qui présentent une faible efficacité énergétique. |
Accroître les subventions à la rénovation énergétique et les réorienter vers les ménages à revenu faible ou moyen. Développer les programmes de certification des bâtiments. |
Le Canada a commencé à élaborer une stratégie de réduction des émissions liées aux matériaux de construction. |
Recenser et supprimer les obstacles réglementaires à une utilisation accrue de matériaux et produits de construction à faible teneur en carbone. |
Limiter les coûts du changement climatique |
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Le climat canadien est déjà en train de changer. Les inondations représentent la catastrophe naturelle la plus courante et la plus coûteuse au Canada, sachant que les biens à haut risque ne sont souvent pas assurés et que les acquéreurs ne sont pas conscients du risque d’inondation auquel ils sont exposés. |
Améliorer la cartographie des inondations et la communication des risques d’inondation, tout en intégrant les risques liés au climat dans l’aménagement du territoire. Envisager d’adopter des mesures pour renforcer l’offre de polices d’assurance abordables contre les inondations et pour rehausser leur taux de souscription. |
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