Les fortes hausses des prix de l’énergie et des produits de base et les perturbations des marchés du gaz et du pétrole liées à l’agression de l’Ukraine par la Russie ont déclenché une crise du coût de la vie et créé un risque de pénuries d’énergie. Le ralentissement de la croissance mondiale, les goulets d’étranglement au niveau des chaînes d’approvisionnement et l’incertitude accrue ont affaibli l’activité et les perspectives économiques. La politique monétaire a été durcie pour lutter contre les tensions inflationnistes et devrait rester restrictive. L’orientation expansionniste de la politique budgétaire a aidé à préserver les emplois et les revenus, mais elle a entamé la solidité de la situation budgétaire. Les tensions liées au vieillissement de la population appellent des mesures structurelles visant à améliorer la viabilité des finances publiques. Le marché du travail a enregistré de bons résultats, mais il se heurte à des pénuries chroniques de main-d’œuvre et de compétences. Il peut être utile à cet égard de faciliter l’emploi des mères. L’amélioration du niveau de compétences stimulerait la productivité, qui reste inférieure à la moyenne de l’OCDE. L’économie tchèque reste caractérisée par une forte intensité énergétique, elle est tributaire dans une large mesure du charbon et le niveau des émissions de gaz à effet de serre y est élevé. La crise énergétique actuelle est l’occasion pour le pays de renforcer sa détermination à atteindre ses engagements climatiques.
Études économiques de l’OCDE : République tchèque 2023 (version abrégée)
1. Principaux éclairages sur l’action publique
Abstract
Introduction
L’économie tchèque était bien engagée sur la voie d’une reprise après la crise liée au COVID-19 lorsque, au début de 2022, la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a entraîné de nouvelles difficultés. Les fortes hausses des prix de l’énergie et des produits de base (Graphique 1.1) et les perturbations des importations de gaz et de pétrole en provenance de Russie ont déclenché une crise du coût de la vie et créé un risque de pénuries d’énergie. Le ralentissement de la croissance mondiale, les problèmes persistants dans les chaînes d’approvisionnement mondiales et l’incertitude accrue ont affaibli l’activité. Pour lutter à la fois contre les tensions inflationnistes profondes et diffuses et la hausse des anticipations d’inflation, la banque centrale a relevé ses taux d’intérêt directeurs en temps opportun, durcissant les conditions de financement. La croissance du PIB a nettement marqué le pas (Graphique 1.1).
L’orientation accommodante de la politique budgétaire pendant la pandémie, les mesures prises pour atténuer l’impact du niveau élevé des prix de l’énergie et les problèmes structurels non résolus liés au vieillissement de la population sont autant de facteurs qui ont conduit à une dégradation de la viabilité des finances publiques. La politique budgétaire expansionniste a contribué à préserver les emplois et les revenus, mais elle s’est traduite par un déficit important (Graphique 1.2) et par une augmentation de la dette publique. Plusieurs baisses d’impôt ont aggravé le solde budgétaire structurel et des transferts monétaires non ciblés ont continué d’être accordés aux familles avec enfants et aux retraités (voir Encadré 1.1). La République tchèque a en outre accueilli un grand nombre de réfugiés ukrainiens. Cependant, les dépenses destinées à couvrir le coût des aides financières et des services de base destinés aux réfugiés, ainsi que les engagements à accroître les dépenses de défense, accentuent les tensions budgétaires. Le niveau élevé de l’inflation sous-jacente, la surchauffe du marché du travail et la croissance relativement forte du revenu des ménages sur la période 2020-21 montrent que l’orientation accommodante de la politique macroéconomique dans son ensemble a alimenté les tensions inflationnistes intérieures. La banque centrale n’a pas tardé à amorcer un resserrement de sa politique monétaire, mais les autorités budgétaires ne se sont pas encore engagées sur une trajectoire d’assainissement rigoureuse.
Le marché du travail a enregistré de bons résultats, notamment grâce à l’important soutien apporté par les pouvoirs publics pendant la pandémie, la République tchèque affichant un taux d’emploi très élevé et l’un des taux de chômage les plus bas de l’OCDE. Cela étant, les pénuries chroniques de main-d’œuvre (Graphique 1.3) et de compétences devraient s’aggraver du fait du vieillissement démographique. Un rehaussement du taux d’activité (des groupes sous-représentés en particulier) pourrait renforcer la croissance, les revenus et l’équité. Il pourra être utile à cet égard de réduire l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes et d’accroître le taux d’activité des mères. Une augmentation du taux d’activité des seniors permettrait de limiter l’accentuation des déséquilibres du système de retraite. Relever le niveau des compétences pourrait également stimuler la productivité, qui, après une période de rattrapage remarquable, reste tout de même inférieure à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.3). Une amélioration de l’équité dans les systèmes d’enseignement et de développement des compétences, ainsi que de l’efficacité des programmes de formation tout au long de la vie, contribuerait à remédier aux pénuries de compétences et à dynamiser la croissance. La République tchèque pourrait en outre faire davantage pour attirer et retenir des travailleurs étrangers qualifiés.
La crise énergétique actuelle est l’occasion pour le pays de renforcer sa détermination à concrétiser ses engagements climatiques. L’économie tchèque se caractérise par une forte intensité énergétique, reste dans une large mesure tributaire du charbon et enregistre un niveau élevé d’émissions de gaz à effet de serre (Graphique 1.4). En outre, l’adhésion du public aux objectifs climatiques, quoiqu’en hausse, est relativement faible. Les pouvoirs publics ont mis en place des mesures pour amortir l’impact de l’envolée des prix de l’énergie (notamment du gaz), qui entraînent de véritables difficultés économiques pour de nombreux ménages et entreprises. Il ne faudrait pas pour autant renoncer aux mesures qui visent à encourager les comportements permettant de réaliser des économies d’énergie, ainsi que les investissements dans les sources d’énergie renouvelable et de remplacement. Les ressources considérables mises à disposition au titre du plan de relance de l’UE permettront d’accroître les investissements visant à décarboner l’économie. Un cadre d’action stable, une amélioration du climat de l’investissement et un allégement de la charge réglementaire peuvent aussi contribuer à stimuler l’investissement et à renforcer la croissance de manière durable.
Dans ce contexte, les principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
Un durcissement de la politique macroéconomique s’impose jusqu’à ce que l’inflation et les anticipations d’inflation soient fermement maîtrisées. S’il faut apporter un soutien ciblé, un assainissement budgétaire soutenu est parallèlement nécessaire pour reconstituer des volants de réserves et contribuer à lutter contre l’inflation. Une réforme longuement attendue du système de retraite contribuerait à limiter la forte hausse future des dépenses publiques liées au vieillissement de la population.
Une augmentation du taux d’activité permettrait de remédier aux pénuries chroniques de main-d’œuvre et de soutenir la croissance. L’allongement de la vie active des travailleurs et l’entrée d’un plus grand nombre de mères sur le marché du travail pourraient accroître les revenus. Un renforcement de l’enseignement et des compétences (notamment chez les enfants défavorisés et les adultes peu qualifiés) améliorerait la productivité et rendrait la croissance plus équitable. Il est en outre possible d’améliorer le niveau de compétences de la main-d’œuvre en favorisant, dans le cadre de la politique d’immigration, l’accueil de travailleurs étrangers hautement qualifiés et leur maintien dans l’emploi.
Des mesures visant à réduire la dépendance à l’égard du charbon et les émissions de gaz à effet de serre amélioreraient aussi le bien-être. Une fois que les prix de marché de l’énergie auront fléchi, il faudra s’employer à établir une tarification du carbone plus ambitieuse et plus équitable. Une augmentation des financements publics et une amélioration du climat des affaires stimuleraient les investissements dans les sources d’énergie renouvelables et l’efficacité énergétique. Par ailleurs, des politiques actives du marché du travail visant à aider les travailleurs à rechercher un emploi et à se reconvertir favoriseraient une restructuration écologique.
Encadré 1.1. Principales priorités du gouvernement en matière d’action publique
À la suite des élections législatives d’octobre 2021, un nouveau gouvernement de coalition de centre-droit composé de cinq partis a été formé. Sa priorité actuelle consiste à aider l’économie et la société à faire face à l’augmentation du coût de la vie, à la crise énergétique, au ralentissement de l’économie et aux risques encore présents liés à la pandémie de COVID-19.
Les principales priorités du gouvernement actuel (telles qu’énumérées dans la Déclaration de son programme en janvier 2022) sont les suivantes :
Stabilisation des finances publiques : nécessité de mettre en œuvre une politique budgétaire responsable, notamment à long terme, en réformant et en améliorant les dépenses publiques sans alourdir la charge fiscale pesant sur l’économie.
Union européenne et OTAN : mettre l’accent sur le développement de partenariats stables avec les démocraties du monde entier et sur la protection des droits humains et de la démocratie.
Réforme des retraites : veiller à ce qu’elle soit fondée sur un consensus à l’échelle de la société qui garantirait la sécurité économique de toutes les personnes âgées.
Éducation : améliorer l’éducation et les compétences de tous grâce à des enseignants performants, à de meilleures techniques d’enseignement et à des programmes d’enseignement modernes.
Soutien du libre marché : promouvoir les petites et moyennes entreprises et favoriser la concurrence.
Environnement : reconnaître la nécessité urgente de lutter contre le changement climatique et trouver des solutions permettant de protéger l’environnement.
Logement : mettre en place des mesures visant à favoriser le développement des logements occupés par leurs propriétaires et des logements locatifs, logements sociaux y compris, notamment en accélérant les procédures de délivrance des permis de construire.
Science et recherche : mettre à profit le capital humain de qualité et le potentiel d’innovation dont dispose le pays pour renforcer le soutien à la science et à la recherche.
Administration moderne et transformation numérique : moderniser l’administration publique, la rationaliser et la rendre souple en mobilisant les meilleurs talents pour fournir des services de qualité aux citoyens. Dématérialiser les processus administratifs pour rendre l’administration publique plus efficace et moins coûteuse, et pour lutter plus efficacement contre la corruption.
Responsabilité vis-à-vis des électeurs et culture politique : améliorer la culture politique en choisissant des individus honnêtes, compétents, dignes de confiance et n’ayant aucun conflit d’intérêts, et accroître la transparence du processus politique.
Les perspectives économiques se sont dégradées
L’économie a ralenti et l’inflation a augmenté
La République tchèque a été durement touchée par la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine qui a entraîné une baisse de la demande mondiale, une hausse des prix de l’énergie, des risques de pénuries énergétiques et, plus généralement, une aggravation de l’incertitude. Avant la guerre, la quasi-totalité du gaz naturel était importé de Russie et entrait pour environ un tiers dans la production de chaleur et 8 % dans la production d'électricité. La Russie représentait plus de la moitié des importations de pétrole brut, dont une partie acheminée par l’oléoduc Droujba, non touché par l’embargo pétrolier de l’UE. À la fin de 2022, le total des réserves nationales de gaz représentaient 85 % de la capacité totale, un niveau élevé pour cette période de l’année. Entre octobre et décembre 2022, les Tchèques ont consommé environ 19 % de gaz de moins qu’à la même période des trois dernières années.
L’économie a sensiblement marqué le pas en raison de la hausse des coûts et de l’affaiblissement de la demande intérieure. La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine a accentué les tensions sur les prix de l’énergie et des produits de base. L’augmentation des prix à la consommation a amputé le revenu réel des ménages (Graphique 1.5). Les vives incertitudes liées à la guerre et à la crise énergétique qui se profile ont fortement entamé la confiance des consommateurs et des entreprises (Graphique 1.5), freinant la consommation des ménages et l’investissement privé. Les secteurs de services, comme l’hébergement et la restauration, qui avaient connu un rebond au début de 2022 après la levée des mesures de restriction liées à la pandémie, ont vu leur activité ralentir en raison de l’affaiblissement de la demande et de la hausse du coût des intrants. En revanche, les exportations, qui ont longtemps pâti des perturbations des approvisionnements en matières premières et en composants, se sont redressées au deuxième semestre de 2022 (Graphique 1.5) lorsque les goulets d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement ont commencé à se résorber.
L’inflation s’est hissée à des niveaux très élevés. La hausse des prix à la consommation a atteint un sommet de 18 % en septembre 2022, soit son plus haut niveau depuis près de 30 ans (Graphique 1.6). Le marché du travail demeure tendu (Graphique 1.7) et le taux de chômage, qui s’est établi à 2.1 % au quatrième trimestre de 2022, est le plus faible de la zone OCDE (Graphique 1.7). Comme avant la crise liée au COVID-19, les entreprises tchèques sont de nouveau confrontées à des pénuries de main-d’œuvre dans presque tous les secteurs (Ministry of Finance, 2022a). Les salaires nominaux ont augmenté plus lentement que les prix, et les salaires réels ont fortement diminué (Graphique 1.7). L’afflux de réfugiés ukrainiens a légèrement atténué les tensions sur le marché du travail et, compte tenu de la forte demande de main-d’œuvre, ceux-ci ont facilement trouvé un emploi. À la fin février 2023, plus d’un tiers des réfugiés d’âge actif occupaient un emploi.
La croissance restera modérée et entourée de risques considérables
L’économie est entrée en récession au second semestre de 2022, sur fond de prix élevés de l’énergie, de risque de pénuries d’énergie et de forte incertitude persistante liée à la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine. La croissance annuelle du PIB sera atone en 2023, avant de se redresser en 2024. La consommation privée restera faible en raison du niveau élevé de l’inflation et de la diminution de l’épargne des ménages accumulée pendant la pandémie de COVID-19. L’activité s’accélèrera en 2024 dans un contexte d’atténuation des perturbations de l’offre à l’échelle mondiale. La reprise de la croissance chez les partenaires commerciaux dynamisera les exportations et les échanges. En 2023, l’inflation commencera à diminuer par rapport au niveau élevé auquel elle s’établit actuellement. La croissance des salaires réels deviendra positive en 2024. Néanmoins, les conditions de financement restrictives et le ralentissement de l’investissement public dû à la transition vers le nouveau cadre financier pluriannuel de l’Union européenne pèsera sur la croissance du PIB. Le taux de chômage restera inférieur à 3 %.
Tableau 1.1. Indicateurs et prévisions macroéconomiques
Variation annuelle en pourcentage, en volume (prix de 2015)
2019 |
2020 |
2021 |
Estimations et prévisions |
|||
---|---|---|---|---|---|---|
À prix courants (milliards CZK) |
2022 |
2023 |
2024 |
|||
Produit intérieur brut (PIB) |
5 793.9 |
-5.5 |
3.5 |
2.4 |
0.1 |
2.4 |
Consommation privée |
2 712.0 |
-7.2 |
4.1 |
-0.9 |
-2.7 |
2.4 |
Consommation des administrations publiques |
1 134.5 |
4.2 |
1.4 |
0.7 |
3.0 |
1.2 |
Formation brute de capital fixe |
1 568.2 |
-6.0 |
0.8 |
6.2 |
1.3 |
0.9 |
Demande intérieure finale |
5 414.7 |
-4.5 |
2.5 |
1.4 |
-0.3 |
1.7 |
Variation des stocks1 |
29.8 |
-0.9 |
4.8 |
0.9 |
-0.7 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
5 444.5 |
-5.4 |
7.6 |
2.3 |
-1.0 |
1.6 |
Exportations de biens et de services |
4 284.6 |
-8.1 |
6.8 |
5.7 |
4.2 |
4.1 |
Importations de biens et de services |
3 935.2 |
-8.2 |
13.2 |
5.7 |
2.9 |
3.0 |
Solde extérieur1 |
349.4 |
-0.4 |
-3.6 |
0.2 |
0.9 |
0.8 |
Autres indicateurs (taux de croissance, sauf indication contraire) |
|
|
|
|
|
|
PIB potentiel |
. . |
1.7 |
1.5 |
3.2 |
1.2 |
1.2 |
Écart de production2 |
. . |
-1.1 |
0.9 |
0.1 |
-0.9 |
0.2 |
Employment³ |
. . |
-1.3 |
-0.6 |
-0.5 |
0.1 |
0.0 |
Taux de chômage (% de la population active) |
. . |
2.5 |
2.8 |
2.3 |
2.6 |
2.8 |
Déflateur du PIB |
. . |
4.3 |
3.3 |
8.4 |
9.1 |
4.2 |
Indice des prix à la consommation |
. . |
3.2 |
3.8 |
15.1 |
13.0 |
4.1 |
IPC sous-jacent4 |
. . |
3.6 |
5.0 |
12.2 |
9.5 |
4.1 |
Taux d’épargne des ménages, net (% du revenu disponible) |
. . |
14.7 |
14.8 |
8.3 |
7.9 |
7.6 |
Solde des paiements courants (% du PIB) |
. . |
2.0 |
-0.8 |
-5.9 |
-4.7 |
-5.1 |
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) |
. . |
-5.8 |
-5.1 |
-3.8 |
-4.3 |
-3.7 |
Solde financier primaire sous-jacent des administrations publiques² |
. . |
-2.4 |
-3.5 |
-2.3 |
-1.8 |
-2.4 |
Dette brute des administrations publiques (% du PIB) |
. . |
47.0 |
48.5 |
51.0 |
54.0 |
56.5 |
Dette brute des administrations publiques (au sens de Maastricht, % du PIB) |
. . |
37.6 |
42.0 |
44.5 |
47.5 |
50.0 |
Taux du marché monétaire à trois mois, en moyenne |
. . |
0.9 |
1.1 |
6.3 |
7.1 |
5.5 |
Rendement des obligations d’État à 10 ans, en moyenne |
. . |
1.1 |
1.9 |
4.3 |
5.0 |
3.9 |
1. Contribution aux variations du PIB réel.
2. En pourcentage du PIB potentiel.
3. À la suite du Recensement de la population et du logement de 2021, de nouvelles pondérations démographiques ont été appliquées à compter du 1er trimestre de 2022 dans les statistiques de l’Enquête sur les forces de travail, ce qui a entraîné une baisse sensible du nombre de salariés et de chômeurs. Il y a donc une rupture dans les séries chronologiques et les données ne sont pas directement comparables. Les indicateurs relatifs (taux de chômage ou d’activité par exemple) n’ont pas été affectés par cette modification.
4. Indice des prix à la consommation hors alimentation et énergie.
Source : Calculs de l’OCDE à partir de la base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, n° 112.
Les très fortes incertitudes assombrissent les perspectives. Toute perturbation des approvisionnements énergétiques, notamment en gaz naturel en cas d’épuisement des stocks vers la fin de 2023, pourrait limiter l'activité économique au cours des deux prochaines années. De nouvelles hausses inattendues des prix des produits de base et de l’énergie, une dépréciation forte et brutale de la couronne tchèque et un désancrage des anticipations d’inflation pourraient alimenter les tensions inflationnistes et rendre l’inflation plus durable. Une dégradation de la confiance parmi les partenaires sociaux pourrait déclencher une spirale salaires‑prix. Des tensions sociales causées par des pénuries d’énergie et la hausse des prix de l’énergie pourraient inciter les autorités à adopter une politique budgétaire excessivement accommodante, ce qui alimenterait encore l’inflation et déstabiliserait les finances publiques. Par contre, des récessions plus graves en République tchèque et dans d’autres pays, ainsi qu’une dégradation de la confiance, réduiraient les tensions inflationnistes. Une montée du chômage et des taux d’intérêt pourrait entraîner le défaut de certains débiteurs et freiner la demande. L’apparition d’une nouvelle souche du coronavirus qui appellerait la mise en place de mesures de restriction pourrait en outre brider la croissance.
Tableau 1.2. Événements susceptibles de modifier sensiblement les perspectives
Choc |
Conséquences possibles |
---|---|
Crise énergétique et alimentaire mondiale |
Une intensification des perturbations de l’approvisionnement alimentaire et énergétique entraînerait une nouvelle accélération de l’inflation et une contraction des échanges mondiaux, aboutissant à une grave récession. |
Poursuite de l’exacerbation des tensions géopolitiques |
L’instabilité géopolitique entraînerait une montée des incertitudes et ferait fléchir la demande tant intérieure qu’extérieure, ce qui aurait des conséquences budgétaires négatives. |
Correction majeure des prix des logements et fortes hausses imprévues des taux d’intérêt |
De fortes corrections des prix des logements pourraient mettre au jour des facteurs de vulnérabilité du système financier et entraîner ce faisant une crise dans le secteur qui pourrait se propager à l’économie réelle. En outre, des hausses subites des taux d’intérêt feraient sensiblement augmenter le coût du service de la dette des ménages et des investisseurs fortement endettés, accroissant ainsi le risque de défaut. |
Apparition d’un nouveau variant du COVID-19 résistant aux vaccins |
De nouvelles vagues de contaminations pourraient conduire à la mise en place de nouvelles mesures de freinage et entraîner un affaiblissement de la demande (et de l’offre) intérieure et étrangère. |
Une politique macroéconomique restrictive s’impose
L’orientation de la politique macroéconomique n’a pas permis de freiner l’inflation
L’inflation a augmenté brusquement et s’est enracinée. La forte hausse et la volatilité des prix de l’énergie et des produits alimentaires en provenance de l’étranger n’expliquent qu’en partie l’envolée de l’inflation. Les hausses de prix se sont rapidement propagées et sont devenues généralisées. L’inflation sous-jacente a atteint 14 % en octobre 2022. La République tchèque a enregistré les taux d’inflation sous-jacente (IPCH hors énergie, produits alimentaires, alcool et tabac) les plus élevés de l’UE entre décembre 2021 et octobre 2022. Selon la Banque nationale tchèque (2022a), les prix de plus des deux tiers des composantes du panier sur lequel repose l’IPCH avaient augmenté de plus de 10 % en glissement annuel en juin 2022, ce qui représente la part la plus élevée de l’Union européenne (Graphique 1.8). La contribution des prix des biens et services hors alimentation et énergie à l’inflation globale mesurée par l’IPCH a en outre été l’une des plus importantes enregistrées dans l’UE (Graphique 1.9).
Rétrospectivement, force est de constater que l’orientation de la politique tant budgétaire que monétaire a été excessivement accommodante pendant la période 2020-21. De ce fait, la demande a dépassé les capacités d’offre, ce qui a entraîné de fortes tensions inflationnistes qui se sont traduites par une inflation sous-jacente généralisée et en forte hausse, ainsi que par de vives tensions sur le marché du travail. Malgré un recul annuel moyen du PIB réel de 1 % sur la période 2020-21, les revenus réels des ménages tchèques ont progressé de 2.8 % (Graphique 1.9) sous l’effet des transferts budgétaires et des baisses d’impôt. Cette progression a accentué les tensions du côté de la demande et permis aux entreprises de répercuter la hausse des coûts sur les consommateurs (Czech National Bank, 2022a).
L’orientation de la politique monétaire devrait rester restrictive
Les anticipations d’inflation ont sensiblement augmenté. La plupart des ménages s’attendent à ce que l’inflation continue de grimper au cours des 12 prochains mois (Graphique 1.10). Des enquêtes montrent que les analystes de marché tablaient, entre juin et janvier 2023, sur une inflation d’au moins 2.5 % à un horizon de trois ans, soit un niveau supérieur à l’objectif de 2 % (CNB, 2023, 2022b et 2022f). En revanche, les entreprises sont plus dubitatives quant à la capacité de la Banque nationale tchèque (CNB, Ceská Národní Banka) à maîtriser l’inflation, les anticipations étant de l’ordre de 7 % à un horizon de trois ans (Graphique 1.10; CNB, 2022d).
Face à la hausse des prix et au risque de désancrage des anticipations d’inflation, la CNB a, à juste titre, resserré sa politique monétaire. Entre juin 2021 et juin 2022, elle a relevé son taux directeur pour le porter de 0.25 % à 7 %, avant de faire une pause dans son cycle de resserrement. En août 2022, la CNB a annoncé fonder ses décisions de politique monétaire sur un horizon de 18-24 mois (soit six mois de plus qu’auparavant), avant de ramener cet horizon à 15-21 mois en novembre 2022. Ce déplacement d’horizon est une réaction transitoire du Conseil d’administration de la CNB à l’incertitude liée à la guerre en Ukraine et à ses répercussions. En conséquence, l’objectif d’inflation de 2 % sera atteint à un horizon plus éloigné que celui visé par les autorités avant août 2022.
La CNB est intervenue sur le marché des changes pour réduire la volatilité et atténuer les pressions à la baisse qui s’exercent sur la couronne. Les interventions ont débuté en mars 2022 et se sont intensifiées entre mai et septembre 2022. Entre mai et septembre, la CNB a puisé, au total, 26 milliards d’euros dans ses réserves de devises pour effectuer des opérations de change.
L’orientation de la politique monétaire devrait rester restrictive jusqu’à ce que l’inflation soit fermement engagée sur la voie d’un recul vers l’objectif de 2 %. La gestion des anticipations d’inflation revêt une importance primordiale si les autorités souhaitent éviter un réancrage coûteux des anticipations. La CNB devrait continuer de peser soigneusement à la fois les tensions exercées par l’offre et la demande sur l’inflation et les risques importants qui entourent actuellement les perspectives. Elle devrait renforcer sa communication sur les objectifs annoncés et sur les instruments qu’elle entend utiliser pour les atteindre, afin de donner aux acteurs du marché des orientations claires et simples. Il peut être risqué de réformer la stratégie de communication ou le cadre d’action de la banque centrale dans un contexte d’inflation élevée et de hausse des anticipations d’inflation. Par ailleurs, le taux directeur devrait rester le principal instrument de politique monétaire. Les interventions sur le marché des changes doivent avant tout servir à empêcher toute fluctuation excessive de la couronne. Elles ne sont pas un moyen viable de lutter contre les pressions persistantes à la baisse, sachant surtout que l’écart de taux d’intérêt avec le reste du monde devrait se réduire.
Le secteur financier fait preuve de résilience, mais les risques liés au marché du logement devraient être étroitement surveillés
Le secteur financier tchèque est stable et globalement résilient. Le total des actifs et la rentabilité ont fortement augmenté en 2021 et au premier semestre de 2022. Les banques sont bien capitalisées et disposent d'amples liquidités. Cette situation tient en partie aux retombées favorables que la reprise économique consécutive à la pandémie a eues sur les sociétés non financières, et au très faible taux de défaillances d’entreprises observé en 2021 et au début de 2022. Les tests de résistance menés par la CNB (2022c et 2022e) montrent que, grâce à d’importantes réserves de fonds propres, le secteur bancaire est en mesure d’absorber les chocs et qu’il répondrait aux exigences réglementaires concernant les ratios de fonds propres et de levier même après un choc de grande ampleur.
Les prix des logements ont poursuivi leur hausse rapide au début de 2022 et les biens immobiliers résidentiels sont de plus en plus surévalués. En glissement annuel, les prix de l’immobilier résidentiel ont progressé de 25 % au premier trimestre de 2022. Les prix des logements ont doublé au cours des six dernières années et ont augmenté beaucoup plus vite que les revenus (Graphique 1.11). Selon les estimations de la CNB (2022e), les prix des appartements sont surévalués de l’ordre de 40 à 60 %. La dégradation de l’accessibilité financière des logements a stimulé la demande de prêts de plus en plus démesurés pour permettre l’acquisition de biens immobiliers. Un montant élevé de nouveaux prêts hypothécaires a été enregistré en 2021, les critères d’octroi des crédits étant restés relativement souples entre le second semestre de 2020 et avril 2022. Cela s’explique en partie par l’assouplissement des exigences réglementaires relatives aux prêts hypothécaires individuels. En effet, ces exigences avaient été assouplies par la CNB au début de la crise du coronavirus afin de renforcer la capacité des banques à octroyer des crédits. Durant cette période, le montant des prêts hypothécaires à risque a considérablement augmenté (CNB, 2022c, ESRB, 2022).
Au fil des ans, le secteur bancaire national a vu son activité se concentrer de plus en plus sur les prêts destinés au financement de biens immobiliers. La proportion de prêts au secteur privé non financier a atteint 63 % à la fin de 2021. Par ailleurs, les coefficients implicites de pondération des risques appliqués aux prêts au logement par les banques s’établissent à des niveaux historiquement bas (CNB, 2022c). Le taux d’endettement des ménages tchèques n’est pas très élevé en termes de comparaison internationale. Cela étant, une correction brutale des prix de l’immobilier ou un choc affectant les revenus des ménages mettrait en péril leur capacité de remboursement et pourrait donc avoir un impact systémique sur les volants de fonds propres réglementaires, ainsi que des effets d’entraînement sur la stabilité financière. Sur fond de durcissement des conditions de financement, l’activité de prêts aux ménages pour l’achat d’un logement a commencé à ralentir sensiblement. En décembre 2022, le volume de prêts purement nouveaux destinés à l’achat d’un logement avait diminué de près de 80 % en glissement annuel (CNB, 2023). La forte hausse des prix des logements observée antérieurement, la surévaluation croissante et le ralentissement de l’activité de prêt sont autant de facteurs qui risquent d’engendrer une correction importante des prix à l’avenir.
Pour lutter contre l’accumulation des risques systémiques dans le secteur immobilier, la CNB a réinstauré des limites applicables aux ratios de prêt pour les nouveaux emprunts hypothécaires, et les a durcies. Depuis avril 2022, la quotité de financement (ratio prêt/valeur du bien) de base est plafonnée à 80 %, le ratio dette/revenu à 8.5 fois le revenu annuel net et le ratio service de la dette/revenu à 45 % du revenu mensuel net. Des plafonds plus élevés (quotité de financement maximum de 90 %, ratio dette/revenu maximum de 9.5 fois le revenu annuel et ratio service de la dette/revenu maximum de 50 %) s’appliquent aux demandeurs de prêt de moins de 36 ans. Qui plus est, la modification de la loi relative à la CNB en 2021 a doté la banque centrale de pouvoirs juridiquement contraignants en la matière, ainsi qu’il avait été recommandé dans la précédente Étude économique de l’OCDE consacrée à la République tchèque (OECD, 2020a). Elle devait auparavant se contenter de formuler des recommandations. Une exception générale s’applique toutefois aujourd’hui : les prêteurs peuvent, dans des cas spécifiques, approuver des prêts d’un montant supérieur au plafond fixé, mais ceux-ci ne peuvent dépasser 5 % du volume total des prêts. Afin de surveiller et de maîtriser les risques liés au secteur immobilier au-delà de ce qui est prévu dans les dispositions réglementaires générales, la CNB continue de formuler des recommandations.
Par ailleurs, la CNB a aussi, à juste titre, relevé le taux du volant de fonds propres contracyclique, qui a été porté à 2.5 % à compter d’avril 2023. Elle l’avait abaissé au début de la pandémie, le ramenant de 1.75 % à 0.5 %, afin de soutenir l’activité de prêt des banques. Avec le retour de la croissance du crédit, ce taux réduit n'était plus nécessaire. Parallèlement, la détérioration des perspectives et l’augmentation des incertitudes ont accru les risques de matérialisation des risques de crédit, qui nécessitent de disposer de volants de fonds propres plus importants.
Les risques liés aux déséquilibres observés sur le marché immobilier doivent faire l’objet d’une surveillance étroite, et les mesures macroprudentielles et les plafonds applicables aux prêts hypothécaires doivent être ajustés de manière adéquate, le cas échéant. La CNB tient compte de la situation du marché immobilier pour fixer le taux du volant de fonds propres contracyclique. Toutefois, elle a reconnu que la tendance à la baisse des coefficients de pondération des risques ne reflétait peut-être pas dûment les risques systémiques liés à ce marché (CNB, 2022c). Cette tendance pourrait s’inverser sous l’effet de la dégradation des perspectives économiques et sur fond de matérialisation des risques. Par ailleurs, le durcissement des conditions de financement entraîne un certain essoufflement du marché du logement (CNB, 2022e). Les coefficients de pondération des risques appliqués par les banques n’augmenteront toutefois que lentement. Si les déséquilibres et les risques liés au marché immobilier devaient continuer de s’accentuer, la CNB pourrait envisager d’introduire un coussin pour risque systémique sectoriel, ou encore de fixer des coefficients minimums de pondération des risques.
Les déséquilibres tiennent aussi en partie au caractère limité et au manque d'élasticité de l’offre de logements. Comme évoqué dans l’Étude précédente (OECD, 2020a), la procédure d’obtention des permis de construire est l’un des plus longs et des plus fastidieux qui soient dans la zone OCDE et parmi les pays d’Europe centrale et orientale. Ces retards dans la planification et la délivrance des permis de construire limitent l’offre de biens immobiliers d’habitation, contribuant ainsi à la hausse des prix des logements. De plus, ces longueurs ralentissent l’investissement dans les infrastructures, notamment dans les investissements verts, ce qui a des répercussions sur l’ensemble de l'économie. Pour accélérer et rationaliser les procédures, les autorités sont en train de préparer une refonte complète de la législation et de la réglementation liées aux permis de construire. Faciliter la délivrance des permis de construire et réduire les formalités administratives permettrait de stimuler l’investissement, de libérer le potentiel entrepreneurial et d’accroître les gains de productivité.
Renouer avec une politique budgétaire prudente
L’orientation expansionniste de la politique budgétaire, notamment en 2020 et 2021, a affaibli la situation des finances publiques. Après avoir été légèrement excédentaire en 2019, le solde budgétaire des administrations publiques a affiché un important déficit, de plus de 5 % du PIB, en 2020 et 2021 (Graphique 1.12). La dette publique a augmenté de 12 points de pourcentage, se hissant à 42 % du PIB en 2021, et devrait continuer d’augmenter pour atteindre 50 % en 2024. La politique budgétaire expansionniste a efficacement soutenu l’économie pendant la pandémie de COVID-19 en lui apportant l’impulsion budgétaire nécessaire. Cependant, les mesures prises n’étaient pas toutes bien ciblées ou liées à la pandémie et, malgré le caractère temporaire de cette dernière, certaines mesures ont durablement dégradé le solde budgétaire. L’exemple le plus notable est le train de mesures fiscales (baisse de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et suppression de l’impôt sur les transactions immobilières) qui a été adopté à la fin de 2020 et qui a entraîné une diminution pérenne des recettes fiscales de près de 2 points de PIB (Czech Fiscal Council, 2021).
Dans le contexte difficile actuel, marqué par la guerre en Ukraine et la hausse du coût de la vie, les tensions sur les dépenses publiques se sont accentuées. Conformément aux objectifs de l’OTAN, le gouvernement s’est engagé à augmenter plus rapidement les dépenses de défense qui devraient passer de 1.3 % du PIB actuellement à 2 % d’ici 2024. Les ménages tchèques sont parmi les plus exposés aux prix élevés du gaz et de l’électricité en Europe du fait de la part importante des dépenses d’énergie dans leur consommation totale (Ari et al., 2022). Pour lutter contre le niveau élevé des prix de l’énergie (Graphique 1.13) et d'autres biens services, les autorités ont mis en place plusieurs mesures de soutien (Tableau 1.3). Elles ont notamment renforcé les prestations en espèces et les transferts sociaux en nature destinés à aider les ménages vulnérables. Elles ont également fourni des aides financières supplémentaires aux ménages et aux entreprises fortement touchés par la hausse des prix de l’énergie. Plusieurs mesures liées aux prix ont en outre été mises en place. Parmi celles-ci figurent une aide au paiement de la facture d’énergie à destination des ménages, l’élimination de la taxe routière, un abaissement temporaire des taux des droits d’accise appliqués au gazole et à l’essence et la suppression de la taxe de soutien aux énergies renouvelables.
Dans une perspective de moyen à long terme, la République tchèque est confrontée à de fortes tensions budgétaires qui menacent la viabilité des finances publiques. La Commission européenne et le Conseil budgétaire tchèque ont tous deux exprimé des préoccupations quant à la situation budgétaire du pays (European Commission, 2022a ; Czech Fiscal Council, 2021 et 2022a). Comme dans de nombreuses autres économies de l’OCDE, le vieillissement de la population tchèque entraînera une forte hausse des dépenses publiques de retraite, de santé et de soins de longue durée. Bien que le ratio dette/PIB demeure relativement modéré en comparaison internationale (Graphique 1.12), il devrait augmenter de façon spectaculaire à l’avenir. D’après des scénarios à long terme établis par l’OCDE (Guillemette and Turner, 2021), en l’absence de réformes, la dette publique se hissera à 170 % du PIB en 2060 (Graphique 1.14). En d’autres termes, une augmentation considérable des recettes (représentant jusqu’à 11 points de PIB en 2060) serait nécessaire pour faire face à l’augmentation attendue des dépenses et maintenir le ratio de la dette publique à un niveau constant. Une autre solution consisterait à réduire d’autres programmes de dépenses, au risque de pénaliser l’équité, la productivité et les objectifs climatiques.
Sur fond d’inflation très élevée et de dégradation de la situation des finances publiques, les autorités budgétaires devraient soigneusement mettre en balance la nécessité de préserver les niveaux de vie, d’une part, et celle d’éviter tout nouvel effet de relance macroéconomique, d'autre part. Elles devraient resserrer l’orientation de la politique budgétaire de façon à soutenir la politique monétaire dans la lutte contre l’inflation. La politique budgétaire a pour objet de protéger les plus vulnérables, et non d’apporter un soutien généralisé. Toutefois, les mesures récemment adoptées pour lutter contre les prix élevés de l’énergie n’ont pas été bien ciblées, et la tendance au versement de transferts monétaires non ciblés se poursuit. Par exemple, les pensions continuent de faire l’objet d’augmentations discrétionnaires allant au-delà des niveaux prévus par la loi. Par ailleurs, bien que des prestations familiales en espèces généreuses soient déjà offertes, le gouvernement a décidé en 2022 de verser une allocation ponctuelle de 5 000 CZK (200 EUR) par enfant de moins de 18 ans aux familles avec enfants dont le revenu est inférieur à un certain seuil, et cette mesure concerne 90 % des familles.
Tableau 1.3. Mesures prises par le gouvernement pour compenser la hausse des prix de l’énergie
Mesure |
Description |
Montant total (milliards CZK) |
---|---|---|
Exonération de la TVA sur l’électricité et le gaz |
Exonération temporaire entre novembre et décembre 2021. |
5.4 |
Loi sur l’aide aux ménages et aux entrepreneurs |
Aide ciblée sur les personnes durement touchées par la hausse des prix de l’énergie. Les petites et moyennes entreprises ayant vu leurs factures d’énergie augmenter de plus de 100 % peuvent obtenir, pour couvrir leurs dépenses d’exploitation, un prêt garanti par l’État assorti d’un taux d’intérêt de 0 %. |
… |
Aides en espèces en faveur des ménages |
Versement d’une allocation ponctuelle de 5 000 CZK par enfant aux familles dont le revenu annuel brut est inférieur ou égal à 1 million CZK (soit environ 90 % des familles). Augmentation des montants du minimum vital et du minimum de subsistance de 10 % à compter d’avril 2022 et de 8.8 % à compter de juillet 2022. Une nouvelle augmentation (de 5.2 %) est prévue en 2023. Le gouvernement a également augmenté l’allocation logement et modifié ses paramètres. En 2023, l’allocation pour enfant à charge sera relevée de 200 CZK. Les prestations versées aux familles d’accueil augmenteront elles aussi. |
13.6 en 2022 et 7.8 en 2023 |
Réduction des taxes sur les transports et autres mesures similaires |
En 2022, le gouvernement a supprimé la taxe routière sur les voitures, les bus et les camions pesant jusqu’à douze tonnes. L’obligation d’incorporation de biocarburants, plus onéreux, dans l’essence et le gazole a été levée. Réduction temporaire des droits d’accise sur l’essence et le gazole de 1.5 CZK par litre (du 1er juin au 30 septembre 2022). La réduction temporaire des droits d’accise sur le gazole a été prolongée jusqu’à la fin de 2023. |
10.9 en 2022 et 13.8 en 2023 |
Lignes de liquidité |
En juillet 2022, CEZ, la plus grande entreprise de service public du pays, a signé une convention de crédit avec le ministère des Finances pour un montant pouvant aller jusqu’à 3 milliards EUR, ce qui lui apportera les liquidités dont elle a besoin. |
74 |
Tarif d’économie d’énergie et autres aides |
Entre octobre et décembre 2022, les pouvoirs publics ont apporté une aide à tous les ménages subissant le contrecoup des prix élevés de l’énergie, c’est-à-dire à tous les ménages qui utilisent de l’électricité, du gaz, une chaudière domestique ou un système de chauffage central. |
21.9 |
Suppression de la taxe de soutien aux énergies renouvelables |
Le gouvernement va supprimer la taxe de soutien aux sources d’énergie renouvelable (POZE). Cela devrait permettre une économie de 599 CZK par mégawattheure d’électricité consommée par les ménages et les entreprises. |
4.6 en 2022 et 18.4 en 2023 |
Plafonnement des prix de l’énergie |
Les prix de l’énergie seront plafonnés pendant toute l’année 2023. Ce plafond s’appliquera à tous les ménages, aux petites et moyennes entreprises, aux institutions publiques, aux établissements scolaires, aux prestataires de services sociaux et de services de santé, aux opérateurs de transports en commun urbains, ainsi qu’à d’autres entités. Les prix de l’électricité sont plafonnés à 6.05 CZK/kWh, TVA comprise, et s’appliquent à la totalité des usages des consommateurs raccordés en basse tension (ménages, PME, travailleurs indépendants). Pour les petites et moyennes entreprises raccordées en haute et très haute tension, le plafond s’applique à 80 % de la consommation mensuelle la plus élevée d’un mois donné sur les cinq dernières années (ou à 80 % de la consommation réelle au cours d’un mois si celle-ci est supérieure au niveau de consommation de référence). Les prix du gaz sont plafonnés à 3.025 CZK/kWh, TVA comprise, pour les ménages et autres faibles consommateurs dont la consommation ne dépasse pas 630 MWh/an. Pour toutes les petites et moyennes entreprises, le plafond ne s’appliquera qu’à 80 % de la consommation mensuelle la plus élevée d’un mois donné sur les cinq dernières années (ou à 80 % de leur consommation réelle si celle-ci est plus élevée). Les autorités ont également prévu de plafonner les prix de l’électricité et du gaz en 2023 pour les grandes entreprises et les gros consommateurs qui ne sont pas visés par les mesures ciblées sur les PME. |
Environ 83 pour les ménages et les PME et 40 pour les grandes entreprises énergivores |
Aide temporaire aux entreprises pour l’électricité et le gaz |
Les entreprises ayant signé des contrats d’approvisionnement en gaz et dont la consommation annuelle est supérieure à 630 MWh pourront bénéficier de cette aide. Celles qui sont raccordées au réseau d’électricité à haute et très haute tension et qui subissent une perte d’exploitation y auront aussi droit. Au moins 50 % de la perte d’exploitation doit toutefois être due à l’augmentation des prix du gaz naturel et de l’électricité. Cette aide sera fournie à partir de novembre 2022. |
30 |
Les mesures de soutien destinées à lutter contre le niveau élevé des prix de l’énergie devraient être mieux ciblées sur les ménages vulnérables, et les mesures liées aux prix devraient être évitées. Ces aides, qui peuvent être très coûteuses, profitent souvent pour l’essentiel aux ménages à haut revenu, qui sont les plus gros consommateurs. Si des mesures sur les prix sont mises en place, elles devraient être judicieusement conçues de manière à rester strictement temporaires et fonction de l’évolution des prix du marché. Le niveau de plafonnement des prix devrait en outre être suffisamment élevé pour préserver les incitations à adopter des comportements permettant de réaliser des économies d’énergie et à investir dans l’efficacité énergétique. Tout soutien aux entreprises devrait également être temporaire et ciblé sur celles qui auraient été viables dans d’autres circonstances, et comprendre des incitations à réduire la consommation d’énergie. La République tchèque devrait renforcer ses capacités institutionnelles et statistiques afin de mettre en place un système élaboré de transferts et de protection sociale qui soit capable de cibler les populations vulnérables à partir de plusieurs critères. Outre le revenu, d’autres critères pourraient être pris en compte, notamment le lieu d’habitation, la qualité du logement, la composition du ménage et l’accès aux transports publics (OECD, 2022f).
Il faudrait envisager d’agir à la fois sur le plan des dépenses et sur celui des recettes pour réduire le déficit. Les autorités pourraient remédier à la récente baisse structurelle des recettes fiscales, par exemple en rendant l’impôt sur le revenu des personnes physiques plus progressif, afin de combler les déficits futurs attendus dans les budgets publics. Un abaissement du niveau élevé des cotisations de sécurité sociale et un transfert de charge fiscale du travail vers les biens immobiliers, la consommation et les externalités environnementales rendraient en outre la structure fiscale plus favorable à une croissance inclusive et durable. Le ministère des Finances a proposé d’instaurer temporairement une taxe sur les bénéfices exceptionnels – conformément aux orientations de l’UE –, qui s’appliquerait aux bénéfices excédentaires réalisés par les entreprises des secteurs de l’approvisionnement et du négoce énergétique et des combustibles fossiles, ainsi que par les grandes banques. À compter de janvier 2023 et pour une durée de trois ans, la République tchèque imposera une taxe de 60 % sur les bénéfices excédentaires, c’est-à-dire les bénéfices qui dépassent de 20% la moyenne des bénéfices imposables sur la période 2018-21. Taxer les bénéfices exceptionnels excessifs des producteurs d’énergie peut être une mesure acceptable, à condition qu’elle ne décourage pas l’investissement et qu’elle n’exerce pas de tensions supplémentaires sur les prix. Cela dit, une telle taxe affaiblit la sécurité juridique en matière fiscale et pourrait donc dégrader le climat de l’investissement. Les autorités devraient par ailleurs continuer à prendre des engagements et des mesures d’incitation en faveur de la diversification des sources d’énergie et de l’accroissement de l’investissement dans les énergies renouvelables.
Tableau 1.4. La situation budgétaire s’est dégradée
Administrations publiques, en % du PIB
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
|
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Recettes totales |
41.4 |
40.5 |
41.3 |
40.5 |
40.5 |
41.5 |
41.3 |
41.5 |
41.4 |
Impôts |
20.1 |
19.5 |
19.8 |
20.3 |
20.4 |
20.4 |
20.3 |
19.9 |
19.2 |
Cotisations sociales |
14.6 |
14.5 |
14.3 |
14.7 |
14.9 |
15.4 |
15.5 |
15.9 |
16.6 |
Autres recettes |
6.6 |
6.6 |
7.2 |
5.5 |
5.2 |
5.6 |
5.5 |
5.6 |
5.6 |
Dépenses totales |
42.7 |
42.6 |
41.9 |
39.8 |
39.0 |
40.6 |
41.1 |
47.2 |
46.5 |
Protection sociale |
13.8 |
13.4 |
12.9 |
12.7 |
12.3 |
12.4 |
12.5 |
14.3 |
13.6 |
Éducation et santé |
12.1 |
12.1 |
11.9 |
11.4 |
11.5 |
12.1 |
12.4 |
14.4 |
14.9 |
Services généraux des administrations publiques |
5.2 |
5.2 |
4.7 |
4.6 |
4.2 |
4.4 |
4.4 |
4.7 |
4.6 |
Affaires économiques |
5.9 |
6.4 |
6.6 |
6.1 |
5.8 |
5.9 |
6.1 |
7.7 |
7.5 |
Autres1 |
5.6 |
5.6 |
5.8 |
5.1 |
5.2 |
5.8 |
5.7 |
6.1 |
5.8 |
Solde budgétaire |
-1.3 |
-2.1 |
-0.6 |
0.7 |
1.5 |
0.9 |
0.3 |
-5.8 |
-5.1 |
Solde primaire |
-0.2 |
-1.0 |
0.3 |
1.5 |
2.1 |
1.5 |
0.8 |
-5.2 |
-4.5 |
Dette brute |
56.1 |
55.0 |
51.7 |
47.5 |
43.3 |
40.1 |
37.8 |
47.0 |
48.5 |
Dette brute, au sens de Maastricht |
44.4 |
41.9 |
39.7 |
36.6 |
34.2 |
32.0 |
30.0 |
37.6 |
42.0 |
Dette nette |
15.6 |
17.8 |
17.8 |
16.7 |
11.5 |
8.7 |
8.0 |
13.6 |
13.1 |
1. Défense ; ordre et sécurité publics ; logements et équipements collectifs ; loisirs, culture et cultes ; protection de l’environnement.
Source : OCDE, base de données sur les comptes nationaux ; et base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.
Du côté des dépenses, il conviendrait en priorité d’apporter un soutien ciblé aux personnes vulnérables, de relever le niveau de compétences, d’accroître le taux d’activité et de promouvoir les investissements verts et propices aux gains de productivité. Les importants fonds mis à disposition au titre de la Facilité de l’UE pour la reprise et la résilience (29 % du PIB,Encadré 1.2) sont l’occasion d’engager un assainissement plus ambitieux sans que celui-ci ne nuise excessivement à la croissance. La suppression des prestations en espèces injustifiées qui sont versées aux retraités et aux familles pourrait permettre de limiter la hausse des dépenses publiques. L’efficience de la dépense publique peut également être améliorée. Il faudrait poursuivre les réformes du système de retraite et les efforts visant à freiner la hausse d’autres dépenses liées au vieillissement. D’après le modèle à long terme de l’OCDE, une augmentation structurelle des recettes, conjuguée à un recul de l’âge de départ à la retraite, contribuerait grandement à ralentir l’augmentation de la dette publique (Graphique 1.14).
Un cadre budgétaire plus crédible est par ailleurs nécessaire. Le plan actuel à moyen terme qui consiste à maintenir un déficit structurel proche de 3 % jusqu’en 2025 (Ministry of Finance, 2022c ; Czech Fiscal Council, 2022b et 2022d) n’est pas suffisamment ambitieux compte tenu de la dégradation attendue des finances publiques. Depuis l’assouplissement, en 2020, des règles budgétaires décrites en détail dans la précédente Étude économique de l’OCDE (OECD, 2020a), il n’existe pas de cadre crédible permettant de réaliser un assainissement budgétaire important. Bien que la règle de frein à l’endettement ait été maintenue (le ratio dette/PIB étant plafonné à 55 %, après déduction des réserves de trésorerie), la règle de déficit structurel a été assouplie et les autorités ne sont plus tenues de respecter un rythme d’assainissement donné (Czech Fiscal Council, 2022a et 2022c ; Ministry of Finance, 2022c). L’économie tchèque gagnerait à rétablir l’obligation d’amélioration du solde budgétaire structurel de 0.5 point de pourcentage par an jusqu’à ce qu’un objectif prédéterminé soit atteint (déficit structurel de 1 % du PIB, comme avant la modification des règles budgétaires).
Encadré 1.2. Des fonds de l’UE à l’appui d’une reprise résiliente et de la double transition écologique et numérique
La Facilité de l’UE pour la reprise et la résilience (FRR) a été créée pour soutenir la reprise économique après la pandémie et faciliter la transformation écologique et numérique.
La République tchèque devrait recevoir 7 milliards EUR (soit 2.9 % de son PIB de 2021) de subventions, qui seront décaissées d’ici 2026. Outre qu’ils visent à soutenir la double transition climatique et numérique comme on le verra ci-dessous, plusieurs programmes sont également conçus pour renforcer la résilience économique et sociale. Une enveloppe de 222 millions EUR a été prévue pour améliorer l’environnement des entreprises. Un programme de réformes et d'investissements représentant 393 millions EUR contribueront à favoriser l’égalité d’accès à l’éducation, via une amélioration de l’accès à des services abordables de garde d’enfants, un renforcement des aides destinées aux établissements défavorisés et au développement du tutorat pour les enfants risquant l’échec scolaire. Des investissements de 823 millions EUR permettront d'accroître la résilience des services de santé.
Objectifs climatiques
Les fonds de la FRR seront utilisés à hauteur de 42 % pour soutenir les objectifs climatiques de la République tchèque. Un montant de 1.4 milliard EUR servira à financer des programmes de rénovation à grande échelle visant à augmenter l’efficacité énergétique des logements et des bâtiments publics, notamment des structures d’accueil des jeunes enfants et d'aide sociale. La FRR va également permettre de financer la décarbonation du transport par des investissements à hauteur de 1.1 milliard EUR dans les infrastructures ferroviaires et le développement de bornes de recharge électriques et de pistes cyclables. Par ailleurs, une enveloppe de 480 millions EUR sera investie dans l’installation de sources d'énergies renouvelables à l’intention des entreprises et des particuliers. Un montant de 141 millions EUR sera investi dans l’économie circulaire, dont des infrastructures de recyclage et des aides à des solutions relevant de l’économie circulaire et permettant d'économiser l’eau dans les entreprises. Les réformes de la gestion forestière visent à accroître la durabilité des forêts tchèques.
Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, l’UE a lancé son plan REPowerEU pour développer les sources d’énergie renouvelables, promouvoir les mesures en faveur de l’efficacité énergétique et réduire la dépendance à l’égard des combustibles fossiles russes. Ce plan prévoit un supplément de subventions d’un montant de 20 milliards EUR (en plus de la dotation initiale au titre de la FRR) pour accélérer la mise en œuvre des plans d’économies d’énergie et d’atténuation des effets du changement climatique des États membres. Les subventions seront attribuées en tenant compte de la dépendance des États membres à l’égard des combustibles fossiles. Cependant, leur répartition finale reste à déterminer.
Transition numérique
La République tchèque consacrera 22 % des subventions de la FRR pour procéder à des investissements et à des réformes dans plusieurs domaines : compétences, administration électronique, connectivité numérique et transformation numérique des entreprises. Un montant de 585 millions EUR sera consacré à l’équipement numérique des établissements scolaires, à la formation des enseignants, à de nouveaux programmes d’enseignement supérieur dans les domaines du numérique et à des cours d'amélioration des compétences et de recyclage. De plus, 585 millions EUR seront affectés à la transformation numérique et la cybersécurité dans les administrations publiques, le système judiciaire et la santé. Une enveloppe de 650 millions EUR sera investie dans la transformation numérique des entreprises, des pôles européens d’innovation numérique, des installations de test et d’expérimentation de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la production manufacturière les réseaux à très haute capacité et les réseaux 5G.
Source : Commission européenne
Encadré 1.3. Impact potentiel de certaines réformes
Des réformes structurelles peuvent renforcer la croissance économique et les revenus. Le Tableau 1.5 présente une quantification de l’impact que certaines des réformes recommandées dans la présente Étude auraient sur la croissance (il n’est pas possible de quantifier l’impact de toutes les réformes) ; les calculs sont fondés sur le modèle à long terme de l’OCDE et sur les estimations réalisées par l’OCDE du lien entre les réformes et la productivité totale des facteurs, et l’accroissement de l’intensité capitalistique et le taux d’emploi (Égert, 2017). L’analyse donne à penser que si la République tchèque mettait en œuvre la sélection de réformes décrites ci-après, le revenu par habitant pourrait augmenter d’environ 6 % en 10 ans et dans une proportion pouvant aller jusqu’à 17 % en 25 ans. Ces estimations sont fournies à titre indicatif.
Tableau 1.5. Impact potentiel de certaines réformes structurelles sur le PIB par habitant
Effet à 10 ans |
Effet à 25 ans (jusqu’en 2050) |
|
---|---|---|
Accroître les recettes fiscales, notamment en augmentant la progressivité de l’impôt sur le revenu, en donnant un poids plus grand aux impôts sur l’immobilier et sur la consommation et aux écotaxes, et en réduisant les cotisations de sécurité sociale. |
0.6 % |
0.7 % |
Réduire les inégalités sur le plan scolaire et moderniser l’enseignement et de la formation professionnels (EFP). |
1.3 % |
7.2 % |
Améliorer le climat de l’investissement et l’environnement des entreprises (alléger les formalités administratives, moderniser les procédures de délivrance de permis de construire). |
2.7 % |
6.1 % |
Renforcer les politiques actives du marché du travail. |
0.6 % |
0.7 % |
Continuer d’accroître l’offre de structures d’accueil des jeunes enfants de qualité et d’un prix abordable. |
0.4 % |
0.6 % |
Réformer les retraites (relever l’âge du départ à la retraite) |
0.4 % |
2.0 % |
Ensemble des réformes |
6.0 % |
17.3 % |
Note : Les simulations sont réalisées à partir du modèle à long terme du Département des affaires économiques de l’OCDE et le scénario de référence est celui de politiques inchangées. Les évolutions suivantes concernant les politiques publiques/leurs résultats sont retenues comme hypothèses. La réforme fiscale présuppose une réduction du coin fiscal moyen de 2 points de pourcentage des coûts de main-d’œuvre (la réforme de 2020 impliquait une réduction de 4 points de pourcentage, mais un démantèlement partiel de cette réforme est supposé dans ce scénario). On pose l’hypothèse que la réforme de l’éducation équivaut à une augmentation du nombre moyen d’années de scolarisation de 0.7 année sur 15 ans (permettant de réduire de la moitié l’écart avec le niveau observé actuellement en Allemagne). L’amélioration de l’environnement des entreprises repose sur l’hypothèse que les composantes de l’indicateur de la RMP « Simplification et évaluation de la réglementation » et « Charges administratives sur la création d’entreprises » atteignent le niveau de la moyenne des cinq pays de l’OCDE les mieux classés à un horizon de cinq ans. Les politiques actives du marché du travail sont renforcées pour atteindre le niveau de la moyenne des cinq pays les plus performants de l’OCDE (en % du PIB par habitant et par chômeur). L’accroissement de l’offre de structures d’accueil des jeunes enfants est modélisé selon un relèvement des prestations familiales en nature (en % du PIB) au niveau de la moyenne de l’OCDE. S’agissant de la réforme des retraites, l’âge de la retraite est porté à 67 ans pour les hommes comme pour les femmes d’ici à 2037, et augmente par la suite de la moitié du gain d’espérance de vie attendu.
Source : Calculs de l’OCDE.
Les estimations figurant dans le Tableau 1.6 donnent un chiffrage de l’effet budgétaire direct de certaines des recommandations formulées dans cette Étude et ne tiennent pas compte d'éventuels effets dynamiques. Ces estimations sont fournies à titre indicatif.
Tableau 1.6. Estimation indicative de l’effet budgétaire direct de certaines des réformes recommandées
Réforme |
Effet budgétaire [économies (+)/ coûts (-)] (en % de PIB) |
---|---|
Accroître les recettes fiscales, notamment en augmentant la progressivité de l’impôt sur le revenu, en donnant un poids plus grand aux impôts sur l’immobilier et sur la consommation et aux écotaxes, et en réduisant les cotisations de sécurité sociale. |
+2 % |
Réduire les inégalités sur le plan scolaire et moderniser l’enseignement et la formation professionnels (EFP). |
-0.7 % |
Améliorer le climat de l’investissement et l’environnement des entreprises (alléger les formalités administratives, moderniser les procédures de délivrance de permis de construire). |
Négligeable |
Renforcer les politiques actives du marché du travail. |
-0.2 % |
Continuer d’accroître l’offre de structures d’accueil des jeunes enfants de qualité et d’un prix abordable. |
-0.4 % |
Réformer les retraites (relever l’âge du départ à la retraite) |
+1.3 % (d’ici à 2050) |
Investir dans la transition verte |
-1.3 % à - 2.0 % |
Effet net total des réformes énumérées |
+0.0 % - +0.7 % |
Note : Le coût budgétaire de la réforme de l’éducation est calculé à partir de l’augmentation à long terme du coût de l’éducation estimée à partir du Programme de convergence 2022 de la République tchèque. Le coût budgétaire de la transition verte correspond à l’estimation basse à médiane du coût de l’investissement jusqu’en 2030 telle qu’exposée dans Ščasný et al. (2022). Le coût budgétaire a été ajusté pour tenir compte des fonds de l’UE au titre de la FRR et du plan REPowerEU, ainsi que de l’augmentation prévue du PIB. Le dividende budgétaire de la réforme du régime de retraite est calculé en faisant la différence entre l’augmentation des recettes publiques nécessaire pour assurer la stabilité du ratio dette/PIB dans les scénarios de « référence » et de « réforme des retraites ». Le tableau repose sur les simulations réalisées à l’aide du modèle à long terme du Département des affaires économiques de l’OCDE.
Source : Calculs de l’OCDE.
Garantir la viabilité des finances publiques à long terme
Consolider les recettes publiques
Les efforts déployés pour accroître les recettes fiscales devraient également viser une amélioration de la structure fiscale. Le montant des recettes fiscales perçues, rapportées au PIB, est proche de la moyenne de l’OCDE. Cependant, la République tchèque a davantage recours aux cotisations de sécurité sociale (Graphique 1.15), et s’appuie moins sur l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) et l’imposition du patrimoine que d’autres pays de l’OCDE. Le coin fiscal moyen – l’écart entre la rémunération effectivement perçue par le salarié et son coût pour l’employeur – est élevé en termes de comparaison internationale en raison du niveau élevé des cotisations de sécurité sociale (Graphique 1.16). Les données disponibles montrent que le niveau élevé des coins fiscaux moyens peut alourdir les coûts pour les entreprises et ralentir la croissance (Arnold et al., 2011, Akgun et al., 2017). Abaisser la dépendance à l’égard des cotisations de sécurité sociale et accroître les recettes tirées de la fiscalité du patrimoine et de la fiscalité indirecte, y compris des taxes environnementales, serait un moyen de stimuler durablement la croissance et de rendre les finances publiques moins sensibles au vieillissement de la population. Une réduction du coin fiscal pourrait également contribuer à apaiser les tensions sur le marché du travail en ouvrant des possibilités d’attirer les travailleurs qui se trouvent en marge de ce marché.
La réforme de l’IRPP de 2020 - qui a pris effet en janvier 2021 - a réduit de façon permanente les recettes fiscales. L’idée de retenir le salaire super brut (qui inclut les cotisations patronales de sécurité sociale) comme assiette de l’IRPP applicable au revenu d’activité a été abandonnée. L’assiette est désormais déterminée en fonction du revenu brut puisque le revenu d’activité est imposé sur la base du salaire brut. Le taux unique de l’IRPP fixé précédemment à 15 % (complété par une contribution de solidarité de 7 % pour les très hauts revenus) a été remplacé par un barème d’imposition progressif, avec des taux marginaux de 15 % et 23 %, la deuxième tranche commençant à partir d’un revenu de brut équivalent à quatre fois le salaire moyen (OCDE, 2022). En outre, le crédit d’impôt général a été relevé de 24 % au total et les crédits d’impôt accordés à partir du deuxième enfant de 15 % (OCDE, 2022a). Il en résulte que pour les hauts revenus, le revenu d’activité est effectivement imposé au même taux qu’avant la réforme et que certains types de revenu hors activité – plus-values et revenus locatifs – seront désormais imposés au taux marginal de 23 %. La plupart des contribuables ont vu leur charge fiscale s’alléger. Cependant, la progressivité de l’IRPP demeure faible (Graphique 1.17). Il conviendrait de revenir sur les baisses récentes non financées de l’IRPP pour accroître les recettes en prévision des hausses des dépenses publiques anticipées. Le renforcement de la progressivité, par l’augmentation du nombre de tranches d’imposition conjuguée à un relèvement des taux marginaux d’imposition supérieurs applicables aux hauts revenus, pourrait être une des clés d’un accroissement des recettes tirées de l’IRPP.
Il est possible d’améliorer encore le recouvrement de la TVA, notamment en améliorant le respect des obligations fiscales et en revenant sur les exonérations et allégements accordés ces dernières années. Des progrès satisfaisants ont été enregistrés dans la lutte contre la fraude fiscale, mais l’écart de TVA, soit 11.9 %, demeure supérieur à la moyenne de l’UE qui s’établit à 9.1 % (Graphique 1.18 ; Commission européenne, 2022c). Le projet d’adoption de l’enregistrement électronique des ventes, dont le déploiement a été suspendu pendant la pandémie de coronavirus devrait être complètement abandonné en 2023 en raison, semble-t-il, de la médiocrité des résultats obtenus et de la lourdeur de la charge administrative associée (ministère des Finances, 2022b). Néanmoins, l’effort engagé pour améliorer le respect des obligations fiscales et lutter contre l’évasion et la fraude fiscales doit être poursuivi, notamment à la faveur des possibilités qu’offre la transformation numérique. Si l’on se réfère au ratio des recettes de TVA (OCDE, 2020c et 2022g), il apparaît que la République tchèque abandonne une moindre part de ses recettes potentielles que la moyenne des pays de l’OCDE (41 % contre 44 %) du fait des exonérations, des taux réduits, d’une piètre application de la législation ou du non-respect des obligations en matière de TVA. Toutefois, cette part à légèrement augmenté au cours des trois dernières années, en raison du plus grand nombre d'éléments bénéficiant d'un taux réduit de TVA. Il conviendrait de revenir sur le reclassement, opéré en 2020 (pendant la pandémie), de certains biens et services dans des catégories soumises à des taux réduits de TVA, tels que les services d’hébergement, les manifestations culturelles et sportives et les remontées mécaniques. Globalement, il conviendrait de réduire encore le périmètre des taux réduits de TVA. Il ressort d’observations faites à l’échelle internationale que ces taux réduits sont mal ciblés, dans la mesure où ils profitent davantage, proportionnellement parlant, aux ménages aisés et ne sont pas efficaces en tant qu’instrument de soutien (OCDE, 2020e).
La forte consommation d’énergie et de carburants produit des recettes tirées des taxes environnementales, mais la relative faiblesse des taux n’a pas véritablement d’effet dissuasif sur les auteurs de comportements générateurs de pollution. Il n’y a pas de taxe carbone à proprement parler. Selon les estimations de l’OCDE (2021b et 2022h), la République tchèque ne taxe effectivement (à savoir en prenant en compte les systèmes d’échange de quotas d’émission, les droits d’accise sur les carburants et autres droits d’accise et la taxe carbone) qu’environ 15 % de ses émissions imputables à la consommation d’énergie, à raison de 60 EUR, voire plus, par tonne de CO2. C’est l’un des pourcentages les plus bas de l’OCDE (Graphique 1.19). Comme on le verra plus en détail dans le chapitre 2, une refonte de la structure fiscale permettrait de mieux concilier les objectifs économiques et environnementaux et de contribuer ainsi à la réalisation des objectifs climatiques et à l’atténuation de la pollution atmosphérique. Les prix implicites du carbone sont suffisants dans le secteur routier (indépendamment des réductions temporaires accordées en 2022 et 2023), mais la taxation du gazole est plus faible que celle de l’essence alors que son contenu en carbone est plus élevé. Les taxes sur le gaz naturel, le charbon et d’autres combustibles solides, de même que sur l’électricité, sont faibles, et elles ne sont pas ajustées en fonction de l’inflation. Des exonérations appliquées à divers usages des combustibles réduisent les prix à la consommation finale et les incitations à économiser l’énergie ou à opter pour des combustibles plus propres. Elles concernent par exemple le chauffage résidentiel et le secteur de l’agriculture (OCDE, 2018a). Il conviendrait que la République tchèque établisse un plan de suppression progressive de ces exonérations lorsque l’incertitude qui pèse actuellement se dissipera.
Les recettes totales de l’imposition du patrimoine immobilier, rapportées au PIB, figurent parmi les plus modestes de la zone OCDE (Graphique 1.20). Elles ont été encore amputées du fait de l’abolition de la taxe sur l’acquisition de biens immobiliers à compter de janvier 2021. Comme il en était question dans la précédente Étude économique de l’OCDE (OCDE, 2020a), les municipalités pourraient bénéficier d’une hausse des recettes de l’imposition du patrimoine. Cette imposition fait partie de celles qui ont le moins d’effets de distorsion de la croissance, elle peut aider à mieux surmonter le vieillissement de la population et elle assure des recettes relativement stables, ce qui profite aux administrations locales dont les dépenses sont, pour une large part, non conjoncturelles (Arnold et al., 2011 ; Kim et Vammalle, 2012; Blöchliger, 2015 ; Colin et Brys, 2019). En République tchèque, la fiscalité du patrimoine recouvre un impôt foncier et une taxe sur le bâti, et cette taxe est calculée en fonction de la superficie du bien, et non de sa valeur. Le taux de base est fixé à l’échelon central, mais les municipalités peuvent le relever à concurrence de cinq fois le seuil de non-imposition. Pourtant, la plupart d’entre elles ont tendance à fixer leur propre taux d’imposition local au plus bas niveau, et nombreuses sont celles qui accordent des exonérations, ce qui contribue à réduire encore la base d’imposition (Radvan, 2019). Le calcul de la taxe devrait reposer sur des estimations régulièrement actualisées de la valeur du bien, comme au Danemark, en Espagne, en Estonie et au Royaume-Uni notamment, plutôt que sur la superficie.
Les travailleurs indépendants continuent de bénéficier d’un traitement fiscal favorable, ce qui suscite des interrogations quant à la viabilité et à l’équité du système. Le code des impôts les autorise à opérer une déduction, comprise entre 30 % et 80 % (selon les professions), de leur chiffre d’affaires au titre des coûts pour obtenir un revenu net, de sorte qu’ils sont dispensés de tenir une comptabilité analytique. Le seuil de chiffre d’affaires en deçà duquel une déduction forfaitaire peut être appliquée (en lieu et place de la déduction des frais réels) pour rétrécir la base d’imposition est relativement généreux, ce qui fait baisser les recettes tirées de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. En outre, la base de calcul des cotisations de sécurité sociale est fixée à 50 % de leur résultat net (assorti d’un plancher de 25 % du salaire moyen), ce qui revient concrètement à diminuer le montant global des cotisations acquittées par les travailleurs indépendants par rapport à celles des salariés. Les travailleurs indépendants bénéficient en effet des mêmes droits que les salariés vis-à-vis du système de soins de santé, mais ils contribuent nettement moins à son financement. Ils contribuent aussi moins au système de retraite, ce qui pèse sur les prestations, alors que le caractère très solidaire du système aboutit à une forte redistribution en leur faveur. Selon les estimations de l’OCDE (2020b), un travailleur indépendant percevant un revenu net équivalent à celui d’un travailleur gagnant le salaire moyen peut espérer percevoir 83 % de la retraite de ce dernier alors qu’il ne contribue qu’à hauteur de 67 % des cotisations. Comme préconisé dans l’Examen de l’OCDE des systèmes de retraite (OCDE, 2020b), la base de calcul des cotisations pour les travailleurs indépendants devrait être plus proche de celle des salariés, et représenter par exemple environ 75 % du revenu net.
Faire face à l’augmentation des dépenses publiques de retraite
Du fait du vieillissement rapide de la population, faute de nouvelles réformes, les retraites seront un facteur d’intensification des tensions sur les dépenses publiques à partir de 2030 (Graphique 1.21). Le rapport entre la population âgée (65 ans et plus) et la population d’âge actif (20-64 ans) devrait passer de 34 % à 56 % entre 2020 et 2050 (OCDE, 2021a). Compte tenu du report de l’âge légal de la retraite à 65 ans dans les années à venir, le taux de dépendance économique (rapport entre la population ayant l’âge de la retraite et au-delà et la population d’âge actif) demeurera stable jusqu’en 2035, avant d’augmenter fortement jusqu’aux alentours de 2060 (Graphique 1.22). D’après les simulations réalisées à l’aide d’un modèle de cohorte (OCDE, 2020b), les dépenses de retraite resteront stables, aux environs de 8.5 % du PIB jusqu’en 2030. Elles augmenteront ensuite progressivement pour culminer à 11.9 % du PIB en 2059, avant de décliner de conserve avec la taille de la population âgée (Graphique 1.21).
Le système de retraite tchèque est fortement redistributif. Les pensions de vieillesse se décomposent en une fraction forfaitaire (pension de base) et une fraction basée sur le salaire, assorties d’un plafonnement strict des pensions des hauts salaires qui atténue le lien entre cotisations de retraite et prestations futures. La structure des prestations qui en résulte est très compacte. Les taux de pauvreté parmi les personnes âgées sont bas (Graphique 1.23). Les taux de remplacement nets sont proches de la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.24), mais relativement élevés pour les bas salaires et faibles pour les hauts salaires. A ces derniers, le système offre un taux de rentabilité interne des cotisations versées très bas (OCDE, 2020b). Dans le système de retraite tchèque, les hauts salaires (deux fois le salaire moyen) ont des taux de remplacement très inférieurs aux salaires moyens (46 % contre 65 %), soit un écart très large comparativement aux autres pays (55 % contre 62 % pour la moyenne de l’OCDE).
Pour accroître les taux de remplacement pour les hauts salaires, le dernier Panorama des pensions de l’OCDE (OCDE, 2020b) propose de financer une partie de la composante redistributive du système (à savoir les pensions de base) par des prélèvements généraux, qui pourraient autoriser des taux d’acquisition des droits à la retraite plus élevés, en particulier pour les hauts salaires. En République tchèque, la redistribution s’opère exclusivement au sein du système de retraite car toutes les recettes des régimes de retraite proviennent des cotisations prélevées sur les salaires (à l’exception de transferts budgétaires destinés à combler tout déficit éventuel du système). Un grand nombre de pays préfèrent financer par l’impôt une partie des dépenses de retraite. Le fait de financer par l’impôt certaines composantes du système contribuerait à renforcer le lien entre les cotisations et les prestations versées. De plus, cela pourrait favoriser l’allègement d’une partie du fardeau des cotisations de sécurité sociale obligatoires qui sont très élevées.
Les retraites sont indexées à la fois sur l’indice des prix à la consommation (ou sur l’indice du coût de la vie des retraités, si celui-ci est plus élevé) et sur la moitié du taux de croissance réelle des salaires. L’indexation s’opère une fois par an, le 1er janvier. Si l’inflation atteint au moins 5 % depuis la fin de la période de référence précédente, un cycle d’indexation extraordinaire est enclenché en cours d’année. Les retraites ont toutefois été fréquemment relevées au-delà des niveaux prescrits par la loi. Il a par exemple été décidé d’accorder 1000 CZK (soit environ 40 EUR) de plus par mois à tous les retraités âgés de 85 ans et plus à compter de 2019 (ministère des Finances, 2019). En 2019, la composante forfaitaire des prestations de retraite a été portée de 9 % à 10 % du salaire moyen, entraînant une revalorisation globale de 900 CZK (soit 37 EUR) de la pension mensuelle moyenne en 2020. En outre, par mesure de solidarité pendant la pandémie, tous les retraités se sont vu octroyer un versement forfaitaire unique de 5 000 CZK (soit environ 200 EUR) à la fin de 2020. Le coût global des mesures discrétionnaires mentionnées, dont la moitié avec effet permanent, a représenté approximativement 0.5 % du PIB en 2020 (ministère des Finances, 2020 et 2021). Par ailleurs, alors que l’indexation obligatoire des retraites s’est traduite par des hausses sensibles en raison du niveau élevé de l’inflation, les retraités ont reçu 300 CZK (soit 12 EUR) par mois à compter de janvier 2022 en plus de l’indexation obligatoire. A compter de janvier 2023, les retraités - principalement les femmes - commenceront à percevoir une prestation (de 500 CZK par mois) par enfant élevé, qui représentera un coût supplémentaire évalué à quelque 0.3 % du PIB.
Les mesures discrétionnaires destinées à accroître les pensions au-delà de l’indexation obligatoire accentuent la forte hausse des dépenses et pèsent sur la viabilité du régime de retraite. Pour maintenir l’adéquation du niveau des retraites, la priorité devrait plutôt être de s’orienter vers un allongement de la durée de la vie active par un relèvement de l'âge légal de la retraite.
Les travailleurs tchèques partent à la retraite trop tôt. Actuellement, l’âge effectif de sortie du marché du travail est l’un des plus bas de l’OCDE (Graphique 1.25). L’emploi – quoique globalement élevé – diminue fortement après l’âge de 60 ans jusqu’à atteindre un niveau très inférieur à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.26). Les relèvements successifs de l’âge légal de la retraite sont déjà inscrits dans la législation. Pour les hommes, l’âge légal de départ sera de 65 ans en 2030. La République tchèque fait partie des rares pays de l’OCDE qui ont encore des âges de départ à la retraite différents pour les hommes et les femmes, mais pour ces dernières, il est également prévu de reporter l’âge de la retraite de sorte qu’il soit aligné sur celui des hommes en 2037, ce qui est une décision bienvenue. Pourtant, quasiment un tiers des individus prennent leur retraite avant l’âge légal (OCDE, 2020b). À paramètres inchangés, même lorsque l’âge légal de la retraite aura été porté à 65 ans, un départ anticipé restera possible à partir de 60 ans, le risque étant que trop de personnes partent précocement, ce qui entraînerait une baisse des retraites.
Il est primordial d’ajuster encore l’âge de la retraite pour limiter la hausse des dépenses de retraite et contribuer à maintenir l’adéquation des prestations. Le mécanisme automatique d’augmentation de l’âge légal de la retraite a été supprimé en 2017, et un plafond de 65 ans a été instauré. Tous les cinq ans, le ministère du Travail et des Affaires sociales est chargé de rédiger un rapport sur l’espérance de vie et de proposer une modification de l’âge légal de la retraite, à la condition que cette modification permette en moyenne à toute personne de passer un quart de sa vie à la retraite. Aucun changement n’est survenu à la suite de la publication du premier rapport en 2019, et le prochain cycle est programmé en 2024. Dans le cadre de ce mécanisme, l’âge de la retraite pourrait ne pas être repoussé suffisamment et en temps opportun pour permettre de relâcher les tensions à long terme sur les dépenses. La République tchèque devrait (ré-)introduire un lien étroit et automatique entre l’âge de la retraite et l’espérance de vie comme l’ont déjà fait le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Italie, les Pays-Bas et le Portugal. Si par exemple les gains d’espérance de vie étaient répercutés à hauteur des deux tiers environ sur l’âge de la retraite, l’équilibre entre la durée d’activité et la retraite serait rétabli de manière stable (OCDE, 2020b). C’est au nom d’une règle similaire que le Conseil budgétaire tchèque (2021) estime que relier l’âge légal de la retraite à l’espérance de vie permettrait un rééquilibrage du système de retraite à hauteur de 1.1-1.4 % du PIB à compter de 2050 et un abaissement du ratio dette/PIB de 45 points de pourcentage en 2071.
Il conviendrait également de relever, à l’instar de l’âge légal, l’âge minimum pour un départ précoce à la retraite de façon à le porter à 62 ans au moins en 2030, et de faire ensuite en sorte qu’il soit relié à l’espérance de vie. Compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie, 60 ans est un âge trop précoce pour pouvoir prétendre à l’avenir à un départ anticipé à la retraite. Or cet âge de référence contribue à façonner les normes sociales et influe sur les comportements des employés et des employeurs à l’égard du travail des séniors et n’est pas en cohérence avec d’autres efforts déployés pour accroître l’offre de main-d'œuvre des séniors (OCDE, 2020b).
Les mesures prises pour repousser l’âge de la retraite devraient être accompagnées des politiques du marché du travail de nature à favoriser l’employabilité et la demande de main-d'œuvre et à inciter à travailler plus longtemps (OCDE, 2019g). Actuellement, les décotes et les surcotes prévues dans le système des pensions de vieillesse découragent les candidats au départ anticipé et les incitent à différer la cessation d’activité. Pourtant, beaucoup d’entre eux partent tôt et ils sont peu nombreux à reporter leur départ (OCDE, 2020b). Il est probable que les taux de remplacement élevés pour les bas salaires, conjugués au fait que les travailleurs âgés sont moins qualifiés et moins payés que les travailleurs d’âge très actif, atténuent les incitations à travailler plus longtemps. Selon le Tableau de bord sur les travailleurs âgés de l’OCDE 2021, les salaires à temps plein des travailleurs âgés (55-64 ans) en République tchèque sont inférieurs de 5 % à ceux des travailleurs d’âge très actif, alors que dans la zone OCDE, les travailleurs âgés gagnent en moyenne 6 % de plus. Améliorer les compétences des travailleurs âgés, grâce à une formation continue ciblée, comme le recommandait la précédente Étude économique de l'OCDE (OCDE, 2020a), pourrait être un moyen de promouvoir l’allongement de la durée de la vie active.
Tableau 1.7. Recommandations antérieures concernant le renforcement de la viabilité des finances publiques et l’amélioration de la structure fiscale
Recommandations formulées dans les Études précédentes |
Mesures prises |
---|---|
Procéder à un transfert de charge fiscale du travail vers les biens immobiliers, la consommation et la fiscalité environnementale. |
En 2020, l’idée de retenir le salaire super brut a été abandonnée dans le cadre de la réforme de l'impôt sur le revenu des personnes physiques. L’impôt sur les mutations a été supprimé. En conséquence, les recettes fiscales ont reculé, en termes structurels, de 2 points de pourcentage du PIB. La réforme n’était pas financée et, pour partie, elle ne suivait pas la recommandation de l’OCDE. Le déploiement du système d’enregistrement électronique des ventes a été arrêté et le projet abandonné. |
Réduire les avantages associés au travail indépendant en termes de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu des personnes physiques. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Prendre des mesures pour faire en sorte que l’âge de la retraite effectif augmente. Indexer étroitement l’âge de la retraite sur l’espérance de vie. Continuer de veiller à ce que l’indexation des retraites n’aboutisse pas à des problèmes de pauvreté à un âge avancé. Étudier les options disponibles pour diversifier les sources de revenu des retraités. |
Aucune mesure n’a été prise. Le gouvernement a récemment pris des mesures pour améliorer l’adéquation des pensions de retraite en relevant les retraites au-delà des niveaux imposés légalement, sans toutefois s’attaquer aux problèmes de viabilité du système. Le gouvernement est censé réexaminer la situation tous les cinq ans pour déterminer s’il convient ou non de repousser l’âge légal de la retraite (qui est relevé progressivement pour être porté à 65 ans en 2030 pour les hommes, et en 2037 pour les femmes). En 2019, le gouvernement a décidé de ne pas rehausser l’âge légal de la retraite et de réexaminer la question dans cinq ans. |
Introduire une composante carbone dans la fiscalité de l’énergie pour les émissions de carbone non couvertes par le système de l’UE. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Fixer le barème des droits d'accise applicables aux sources d’énergie et produits énergétiques en fonction de leur contenu en carbone et d'autres externalités environnementales, notamment en alourdissant, en termes relatifs, la fiscalité du diesel. Supprimer plusieurs dispositifs d'allègement fiscal visant la consommation de carburants. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Accroître l’efficacité du secteur public
Accroître l’efficacité des administrations publiques peut contribuer à améliorer la viabilité budgétaire et la qualité des services fournis aux citoyens. La taille du secteur public en République tchèque est restée relativement modeste, et bien en-deçà des moyennes de l’OCDE et de l’UE en termes des dépenses des administrations publiques (47 % du PIB en 2020) et d’emploi (16.6 % de l’emploi total). Néanmoins, en dépit de sa taille modeste, l’administration tchèque doit faire face à un certain nombre de défis pour se moderniser et améliorer son efficacité. Elle est, au sein de la zone OCDE, celle qui présente la fragmentation la plus prononcée entre les administrations territoriales et municipales (OCDE, 2020a), ce qui compromet la coordination de l’action publique entre les échelons national et infranational. La gestion de la crise liée au COVID-19 sur la période 2020-21 a également mis en évidence des faiblesses en termes de dialogue avec les citoyens et de réactivité face aux défis à relever.
Le récent examen des politiques publiques en matière de gouvernance publique conduit par l’OCDE en coopération avec le gouvernement tchèque établit que le déficit de capacités de pilotage stratégique et d’alignement sur l’administration centrale ont conduit à une multiplication des stratégies et un manque de cohérence dans la mise en œuvre des politiques. Les décisions stratégiques, la réglementation et les politiques publiques ne sont en outre pas suffisamment fondées sur des données d’observation. Ce constat appelle un renforcement de la coordination stratégique assurée par le cabinet du Premier ministre et un accroissement des capacités d’analyse à l’échelle de l’ensemble des administrations publiques.
La République tchèque a engagé un certain nombre de réformes importantes dans le but d’améliorer l’efficacité des administrations publiques, d’intensifier le dialogue avec les citoyens et l’attention portée aux citoyens, et d’accroître la capacité d’appréhender des problématiques transversales, y compris dans les domaines de la gestion de crise et de la transformation numérique. Elle s’est employée à améliorer les capacités d’analyse, notamment par la création d’une unité spécialisée dans l’analyse du fonctionnement de l’administration au sein du cabinet du Premier ministre. Pour accélérer la transition numérique, les pouvoirs publics mettent en place une nouvelle structure pour la gouvernance numérique, reposant notamment sur la création d’une Agence du numérique. La stratégie de réforme des administrations publiques qui est actuellement mise en œuvre (Pour des administrations publiques à l’écoute des clients à l’horizon 2030) vise à répondre à un certain nombre de problématiques. Parallèlement, on pourrait faire plus pour aligner la stratégie de réforme des administrations publiques sur les priorités gouvernementales du moment, en particulier le renforcement de l’efficacité des administrations publiques, l’amélioration de la gestion du personnel et du recrutement dans la fonction publique et le resserrement de la coopération entre l’administration centrale et les administrations locales.
Depuis 2020, la République tchèque réalise des examens des dépenses dans le but d’analyser systématiquement les dépenses, d’aligner les dépenses sur des priorités gouvernementales qui évoluent et d’optimiser l’utilisation des ressources. Des progrès notables ont été accomplis, dont la traduction concrète a été la mise en place d’un cadre pour l’examen des dépenses et la conduite d’un examen de ce type. L’administration tchèque rencontre toutefois des difficultés lorsqu’il s’agit d’institutionnaliser ces examens des dépenses et d’en accélérer l’utilisation. Elle se heurte en effet à la très faible disponibilité des données sur les résultats, à la piètre qualité des cadres de programmation et de budgétisation axés sur les résultats, à des contraintes de capacités et à la timidité de la collaboration avec les ministères dépensiers. Ces difficultés ne sont pas propres à la République tchèque et de nombreux pays de l’OCDE y sont confrontés (OCDE, 2020e).
A l’avenir, le pays devrait institutionnaliser les examens des dépenses en améliorant l’accessibilité des données grâce à l’utilisation de la budgétisation axée sur les résultats, en prolongeant la phase pilote afin de perfectionner le cadre, en intensifiant les efforts de renforcement des capacités, en mettant en place des incitations à participer aux examens des dépenses et en instituant des dispositifs de saine gouvernance. Se doter d’un cadre solide pour l’examen des dépenses fondé sur les bonnes pratiques de l’OCDE en matière d’examen des dépenses (Tryggvadottir, 2022) sera pour l’administration tchèque un moyen d’être mieux armé pour faire face aux tensions budgétaires naissantes à moyen et long terme et d’être en mesure de mieux réagir à l’évolution des priorités gouvernementales. Une unité ayant pour mission de mener à bien chaque année plusieurs examens des dépenses, afin de contribuer au renforcement des capacités, a été créée en 2023 au sein du ministère des Finances ; c’est une avancée dans la bonne direction.
Lutter contre la corruption pour renforcer l’efficacité des dépenses et des investissements publics
Le renforcement de la gouvernance et de la lutte contre la corruption peut améliorer l’efficacité et l’optimisation des dépenses et des investissements publics. Il est également crucial pour préserver l’attrait de la République tchèque en tant que destination d’investissements directs étrangers (OECD, 2016a ; Blundell-Wignall and Roulet, 2017).
Conformément à la stratégie gouvernementale de lutte contre la corruption pour la période 2018-22 (Government of the Czech Republic, 2018) et au Plan d’action anti-corruption pour 2021-22 (ministère de la Justice, 2020), les autorités ont pour objectif de renforcer la détection de la corruption et de prendre en compte les domaines à risque pour l’intégrité dans lesquels le phénomène de la corruption est encore jugé préoccupant, comme les activités de lobbying et les liens entre les entreprises et les milieux politiques, les conflits d’intérêts et la protection des lanceurs d’alerte. Le gouvernement entend avancer dans le domaine de la prévention d’une accumulation excessive de pouvoir politique, économique et médiatique ; faire respecter les règles applicables aux bénéficiaires effectifs des sociétés qui perçoivent des subventions ou bénéficient d’incitations à l’investissement ou de marchés publics ; et établir des règles claires concernant la structure actionnariale des médias et l’utilisation des fonds publics (Government of the Czech Republic, 2022).
La lutte contre la corruption est bien institutionnalisée en République tchèque et étayée par des documents officiels sur la lutte contre la corruption aussi bien au plus haut niveau qu’aux niveaux opérationnels. Globalement, la qualité du cadre stratégique est bonne. Des défaillances subsistent toutefois dans les domaines de la viabilité financière ainsi que de l’inclusivité et de la transparence des consultations publiques. S’agissant de la viabilité financière, si les administrations dépensières ne font pas état de besoins de financement non couverts, il conviendrait de définir des plans financiers s’inscrivant dans une optique plus prospective et davantage reliés au cadre dépenses à moyen terme. Il serait par ailleurs souhaitable d’avoir plus de détails sur les estimations des dépenses pour chaque plan d’action. Il existe également des possibilités d’amélioration des processus de consultation publique au service de l’élaboration de stratégies plus inclusives et transparentes en faveur de l’intégrité publique. Les processus inter-gouvernementaux et les processus de consultation publique devraient être obligatoires pour toutes les stratégies en faveur de l’intégrité publique, et le fait de publier tous les projets de stratégies et tous les documents à l’appui sur le portail de consultation publique améliorerait la transparence.
Les indicateurs de maîtrise de la corruption et de perception du risque de corruption dans le secteur public donnent à penser que la performance de la République tchèque n’est pas très bonne par rapport à celle de la plupart des pays de l'OCDE (Graphique 1.27). La maîtrise de la corruption s’est améliorée depuis 2012, mais cette progression a marqué le pas ces derniers temps (Graphique 1.27). Selon une étude menée par la Commission européenne (2020), 87 % des citoyens tchèques pensent que la corruption est très répandue dans leur pays, soit un pourcentage nettement supérieur à la moyenne de l’UE (71 %), et ils estiment que les plus corrompus sont les responsables des marchés publics, les partis politiques et les responsables politiques à tous les niveaux d’administration. En outre, pour les personnes interrogées, le nombre de poursuites qui aboutissent n’est pas suffisant pour dissuader ceux qui se livrent à la corruption et la majorité d’entre eux ont le sentiment que les efforts déployés par les pouvoirs publics pour combattre la corruption sont vains.
Le rapport de 2021 sur l’État de droit de la Commission européenne fait état de l’absence de progrès dans la mise en œuvre de la stratégie gouvernementale de lutte contre la corruption pour 2018-22. Il est à noter que la pandémie de COVID-19 a freiné la mise en œuvre des réformes anti-corruption dans certains secteurs, en particulier celui de la santé (Commission européenne, 2021a). De nombreuses initiatives importantes en matière de réforme, concernant notamment les activités de lobbying et la protection des lanceurs d’alerte, sont encore en cours d’examen au Parlement. En ce qui concerne la corruption à haut niveau, des enquêtes et des audits menés aux niveau national et européen sur l’utilisation des fonds de l’UE ont récemment mis en évidence l’existence de conflits d’intérêts impliquant de hauts dirigeants, pour lesquels le Parquet européen a été saisi. Dans une affaire connexe de fraude aux subventions européennes, des enquêteurs nationaux ont récemment préconisé une mise en examen (Commission européenne, 2021a). Il faut donc faire plus pour renforcer l’intégrité publique au sein de tout l’appareil d'État.
Au cours de son quatrième cycle d’évaluation, l’organe de lutte contre la corruption du Conseil de l’Europe, à savoir le Groupe d’États contre la Corruption (GRECO, 2016), avait dressé une liste de 14 recommandations que la République tchèque avait été invitée à mettre en œuvre pour améliorer l’intégrité publique. Il ressortait du rapport de suivi paru deux ans après (GRECO, 2018) que le niveau de conformité de la République tchèque avec ces recommandations était « globalement insuffisant » et cette appréciation a été confirmée deux ans plus tard dans un rapport de suivi à mi-parcours (GRECO, 2020).
Plusieurs recommandations avaient trait à un renforcement de l’intégrité des parlementaires, mais leur mise en application demeure très timide. Aucune mesure n’a été prise pour améliorer la transparence du processus législatif. Le projet de loi sur la réglementation des activités de lobbying a été soumise au Parlement, mais n’a pas encore été adoptée, et un code de conduite à l’intention des parlementaires, assorti de mesures d’accompagnement est lui aussi dans l’attente d’une éventuelle adoption par la représentation nationale. Il convient de poursuivre l’effort engagé pour améliorer l’intégrité et l’indépendance des juges et des procureurs.
Les autorités devraient aussi intensifier leurs efforts en matière de détection, d’enquêtes et de poursuites dans le cas d’affaires de corruption transnationale en mettant en œuvre la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption (Graphique 1.28). La République tchèque est un pays très exportateur et ses exportations proviennent notamment de secteurs à risque élevé de corruption, comme les machines ou le matériel de défense, et vont également vers des destinations à risque élevé de corruption (OECD, 2017d). Malgré cela, une seule affaire de corruption transnationale a donné lieu à des poursuites. Des progrès ont toutefois été observés. Conformément à une recommandation du groupe de travail de l’OCDE sur la corruption, tous les jugements rendus dans des affaires de corruption transnationale sont automatiquement publiés (OECD, 2021g). Des efforts ont été entrepris pour que les faits de corruption transnationale soient mieux détectés par certains organismes publics clés, en particulier la cellule de renseignement financier. Le Bureau du procureur près la Cour suprême a publié un guide très détaillé portant sur la responsabilité des personnes morales. Cela dit, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour garantir une plus grande indépendance du ministère public, afin qu’aucune considération politique ne vienne interférer avec des enquêtes et des poursuites visant des affaires de corruption transnationale. L’insuffisance des mesures de protection contre les actions discriminatoires ou disciplinaires à l’encontre des lanceurs d’alerte du secteur public comme du secteur privé constitue un autre sujet de préoccupation (Tell ad McDevitt, 2018 ; OECD, 2019f). Une loi visant à transposer les nouvelles normes de l’UE relatives à la protection des lanceurs d’alerte a été approuvée par le gouvernement, ce qui est positif, mais elle n’a pas encore été votée par le Parlement.
S’attaquer aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences récurrentes
Le marché du travail tchèque est vigoureux à de nombreux égards (Graphique 1.29. Le taux d’emploi est comparativement élevé, tandis que le taux de chômage est l’un des plus bas des pays de l’OCDE et qu’il reste faible même en période de crise (Graphique 1.30). La sécurité de l’emploi est donc élevée. Seule une très faible minorité de personnes d’âge actif vivent en situation de pauvreté relative.
Néanmoins, les pénuries de main-d’œuvre constituent depuis longtemps un problème. Après s’être quelque peu assoupli pendant la crise du COVID-19, le marché du travail est de nouveau tendu. Les entreprises se plaignent du manque de main-d'œuvre qui les empêche de se développer. Pour améliorer la situation, il conviendrait d’augmenter le taux d’activité des catégories de population défavorisées (Graphique 1.31), de réduire l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes, et d’inciter davantage de mères à travailler. Par ailleurs, en attirant une main-d'œuvre étrangère qualifiée, la République tchèque donnerait un coup de fouet à sa croissance, tout en relevant les revenus d’activité. Pour attirer les travailleurs étrangers qualifiés, il est crucial d’améliorer la qualité relativement médiocre du revenu d’activité (Graphique 1.29) en investissant davantage dans l’innovation et la R-D, en améliorant l’environnement des entreprises et en progressant dans la chaîne de valeur.
Relever le taux d’emploi des mères
Les mères de jeunes enfants sont très peu nombreuses à travailler en République tchèque. Si le taux d’emploi des femmes est globalement élevé, celui des mères diminue pendant plusieurs années après la naissance de leurs enfants (Graphique 1.32 et Graphique 1.33). Les longues périodes d’absence du marché du travail des femmes en âge de procréer influent sur leur carrière par la suite, et l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est conséquent. Les femmes partent aussi plus tôt à la retraite que les hommes. Des carrières plus courtes, conjuguées à l’écart de rémunération, se traduisent par un risque de pauvreté beaucoup plus élevé pour les femmes au moment de la vieillesse (Graphique 1.34).
La très longue durée du congé parental, associée à des prestations familiales en espèces et des avantages fiscaux relativement généreux (Graphique 1.35) dissuadent les femmes de reprendre le travail. Ainsi, l'un des deux parents – dans la grande majorité des cas la mère (Office of the Government of the Czech Republic, 2021) – peut rester à la maison jusqu’aux trois ans du dernier enfant sans perdre le droit de réintégrer son emploi, et percevoir l’allocation parentale pendant une année supplémentaire. Par ailleurs, le crédit d’impôt pour enfants à charge entraîne une augmentation du taux d’imposition marginal pour les deuxièmes apporteurs de revenu et dissuade donc les parents de reprendre le travail. Les données montrent qu’un congé parental trop long, surtout s’il dépasse deux ans, peut avoir un effet néfaste sur la carrière ultérieure avec un taux d’emploi et des salaires plus faibles (Thévenon and Solaz, 2013). Les mères qui prennent un congé plus court occupent des emplois plus qualifiés par la suite, sans doute en raison des compétences professionnelles plus importantes qu’elles acquièrent et de la dépréciation moindre de leur capital humain pendant leur absence (Pertold-Gebicka, 2020). Un retour à l’emploi plus rapide des mères de famille permettrait donc à la fois d’atténuer les pénuries de main-d’œuvre et de résorber l’écart de rémunération entre hommes et femmes.
Au fil des années, une plus grande souplesse a été accordée pour donner aux parents la possibilité de choisir la durée du congé parental et pour permettre à ceux qui perçoivent une allocation parentale de faire garder leur enfant et ainsi de pouvoir reprendre le travail. Néanmoins, l’absence de réelle flexibilité du travail et d’une offre adaptée d’emplois à temps partiel pèse sur l’emploi des mères de jeunes enfants. Le marché du travail tchèque se caractérise depuis longtemps par un travail à temps partiel moins développé que dans d’autres économies de l’OCDE, même si la part des travailleurs à temps partiel augmente, surtout chez les femmes (Graphique 1.36). L’une des priorités fixées par les pouvoirs publics au titre de la Stratégie en faveur de l’égalité femmes-hommes pour 2021-2030 (Office of the Government of the Czech Republic, 2021) consiste à accroître le recours au travail à temps partiel et à inciter les employeurs à proposer des possibilités de travail flexibles et adaptées aux mères d’enfants d’âge préscolaire. En 2020, le partage de poste a été intégré dans la législation en vue d’inciter davantage de mères de famille à travailler à temps partiel. En 2022, le gouvernement a mis en place de nouvelles incitations destinées aux employeurs, afin qu’ils créent des emplois à temps partiel pour certaines catégories de travailleurs, comme les parents d’enfants de moins de neuf ans. Une plus grande flexibilité des emplois et une meilleure application des droits au travail à temps partiel et à des formules souples de télétravail seraient de nature à faciliter le retour des mères sur le marché du travail. Le recours accru à la flexibilité du travail et au télétravail pendant la pandémie de COVID-19 a peut-être été le déclencheur d’un changement, mais il est encore trop tôt pour déterminer si cela aura un effet positif durable sur l’emploi des mères.
La République tchèque pourrait faire plus pour encourager les pères à s’occuper activement de leurs enfants en bas âge. Si le congé parental et l’allocation parentale ne sont pas réservés à un sexe en particulier, depuis 2010, la proportion d’hommes bénéficiant d’une allocation parentale reste comprise entre 1.5 % et 2 % (Office of the Government of the Czech Republic, 2021). Les raisons évoquées sont la persistance des stéréotypes sexistes et les préoccupations d’ordre financier, deux tiers des hommes interrogés déclarant gagner plus que leur femme (Office of the Government of the Czech Republic, 2021). Le congé paternité — octroyé après la naissance aux pères pour une durée de sept jours calendaires — a été mis en place en 2018. Il a été porté à deux semaines à compter de 2022. Cette mesure va dans le bon sens, mais au total, le congé paternité et le congé parental réservé aux pères restent inférieurs de presque huit semaines à la moyenne de l’OCDE (Graphique 1.37). Pourtant, 40 % seulement des pères tchèques qui peuvent y prétendre ont recours à ce congé, et cette proportion n’a pas augmenté depuis qu’il a été mis en place (Office of the Government of the Czech Republic, 2021). Plusieurs pays de l’OCDE (Luxembourg, Suède, Norvège et Islande), ont réservé une partie du congé parental aux pères, pour une durée comprise entre 12 et 26 semaines à des taux de remplacement (au salaire moyen) allant de 73 à 96 % (OECD, 2021c). Dans ces pays, ces taux de remplacement suffisamment généreux, couplés à la perte du droit au congé pour le couple si le père ne prend pas son congé parental, incitent fortement les pères à rester à la maison plus longtemps pour s’occuper de leur enfant.
L’insuffisance des capacités d’accueil des jeunes enfants freine elle aussi le retour au travail des mères. Le taux d’inscription des enfants de moins de 3 ans dans les structures d’éducation et d’accueil des jeunes enfants est un des plus bas de la zone OCDE (Graphique 1.38). Contribuer à la disponibilité de services d'accueil des jeunes enfants qui soient abordables, accessibles et de haute qualité fait partie des priorités du gouvernement, et le nombre de places disponibles a progressé. Les enfants peuvent être accueillis soit dans des écoles maternelles (sous la compétence du ministère de l’Éducation), soit dans des structures d’accueil collectif (relevant de l’autorité du ministère du Travail et des Affaires sociales). Néanmoins, en dépit des progrès accomplis, la demande enregistrée est de 71 000 places pour des enfants de moins de trois ans dans ces structures, mais elle ne peut être satisfaite qu’à hauteur de quelque 80 % dans les écoles maternelles (64 %) et les structures collectives (17 %). Près de 36 000 demandes de places à l’école maternelle ont été refusées pour l’année scolaire 2019/2020, dont beaucoup pour des enfants de moins de trois ans (Office of the Government of the Czech Republic, 2021). Le nombre de demandes n’équivaut pas au nombre d’enfants, puisque les parents peuvent déposer plusieurs demandes pour un seul enfant, mais le ministère de l’Éducation ne collecte pas de données sur le nombre d’enfants se voyant refuser une place. Il convient de remédier à cette lacune étant donné que le déploiement de capacités d’accueil des jeunes enfants adaptées constitue une priorité stratégique très claire du gouvernement.
Il faut continuer de développer les capacités d’accueil des jeunes enfants. En même temps, il faudrait réduire la durée du congé parental et réduire en proportion les prestations en espèces. En République tchèque, les généreuses prestations en espèces accordées aux familles ayant de jeunes enfants représentent l’essentiel des dépenses publiques au titre des prestations familiales (Graphique 1.35), et elles ont encore augmenté ces dernières années (OECD, 2020a). Le niveau global des prestations en espèces versées aux familles ayant de jeunes enfants, mesuré en proportion du salaire moyen, est le plus élevé de la zone OCDE (Graphique 1.35). A contrario, les dépenses publiques consacrées aux services – éducation et accueil des jeunes enfants et aides à la garde d'enfants – sont faibles. Des dépenses plus importantes pourraient donc être consacrées à l’accroissement des capacités d’accueil des jeunes enfants et au congé parental des pères, tandis que les transferts devraient être mieux ciblés sur les familles en difficulté.
La qualité des services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants est aussi primordiale. Des données internationales montrent que le système d’EAJE constitue un socle crucial pour les apprentissages futurs et un déterminant important de la réussite ultérieure des enfants (OECD, 2021d ; 2018b ; 2017a). L’accès à des services d’EAJE de qualité pour tous renforce l’égalité des chances. C’est peut-être encore plus crucial en République tchèque, où les facteurs socioéconomiques influent fortement sur les résultats scolaires des élèves et les niveaux de formation atteints (OECD, 2019b).
Avec la multiplication des prestataires de services d’EAJE de différents types, il peut devenir difficile d’assurer la qualité de ces services. En particulier, en République tchèque, les écoles maternelles doivent suivre le programme scolaire défini par le ministère de l’Éducation, tandis que les structures d’accueil collectif ne sont pas tenues de respecter un programme pédagogique centralisé, d’où des risques accrus de variations significatives de la qualité des services fournis. En outre, toutes les composantes du secteur ne relèvent pas du même ministère, ce qui complique encore la situation. Les autorités devraient assurer une coordination et un contrôle efficaces des différents prestataires pour garantir la qualité des services fournis, notamment en veillant à ce que les enfants bénéficient des normes minimum en matière de possibilités d’apprentissage et de développement indépendamment du type de structure qu’ils fréquentent. Le secteur gagnerait également à subordonner le recrutement de son personnel à des critères de qualification, tout en lui offrant des possibilités de perfectionnement professionnel et d’évolution de carrière, pour garantir la qualité des services fournis et la satisfaction professionnelle des intervenants (OECD, 2019c et 2019 d).
Tableau 1.8. Recommandations antérieures sur la lutte contre les pénuries de main-d’œuvre
Recommandations formulées dans les Études antérieures |
Mesures prises |
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Continuer à augmenter l’offre de structures d’accueil des jeunes enfants d’un prix abordable. |
C’est une des priorités du gouvernement.
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Réduire la durée maximale du congé parental, et inciter les pères à prendre une part plus importante de ce congé. |
La durée du congé parental n’a pas changé mais le congé paternité — octroyé après la naissance aux pères pour une durée de sept jours calendaires — a été mis en place en 2018, et étendu à deux semaines en 2022. |
Accroître la flexibilité des emplois en faisant mieux appliquer les droits au travail à temps partiel, à des formules souples de télétravail et au partage de poste. |
Le partage de poste a été intégré dans la législation en juin 2020 dans une optique de flexibilisation. |
Attirer et retenir des travailleurs étrangers qualifiés
Confrontés à des pénuries de main-d’œuvre récurrentes et un marché du travail tendu, les employeurs tchèques se sont tournés vers les travailleurs étrangers, d’où une immigration en hausse continue. Entre 2014 et 2021, le nombre d’étrangers titulaires d’un permis de séjour (à titre temporaire ou permanent) a augmenté de 46 % (Graphique 1.39, Ministry of the Interior 2020; 2021). Le nombre de permis initiaux délivrés à des fins d’emploi a augmenté rapidement. En 2019, il était trois fois plus élevé qu’en 2015 et il enregistre aujourd’hui un net rebond après la suspension des nouvelles entrées liée à la pandémie (Graphique 1.39). Pour pallier les pénuries de main-d’œuvre, les employeurs tchèques se tournent de plus en plus vers les immigrés originaires de pays extérieurs à l’Union européenne (ressortissants de pays tiers). Le nombre de ces ressortissants qui sont titulaires d’un permis de travail en République tchèque était supérieur à 150 000 en 2022, contre 16 700 seulement en 2015 (OECD, 2022b). Pourtant, en dépit de besoins de compétences qui ne cessent d’augmenter, 96 % des titulaires de permis de travail (avec un visa pouvant aller jusqu’à 90 jours normalement) et 87 % des titulaires d’une carte d’employé (qui regroupe permis de travail et permis de séjour) exerçaient des emplois peu à moyennement qualifiés en 2019 (Graphique 1.40, OECD, 2022c).
La lente reprise des migrations internationales lors de la reprise économique post-pandémie a aggravé les pénuries de main-d’œuvre et de compétences, et la guerre en Ukraine a accentué les difficultés. Le marché du travail tchèque est fortement tributaire de la main-d’œuvre ukrainienne. En 2021, les Ukrainiens représentaient (au total, y compris ceux qui ne travaillent pas) près d’un tiers de l’ensemble des titulaires de permis de séjour et 45 % des titulaires de permis de séjour délivrés à des ressortissants de pays non membres de l’UE (Ministry of the Interior, 2022a). Avant la guerre, la main-d'œuvre en provenance d’Ukraine était principalement composée d’hommes peu qualifiés, qui travaillaient dans le secteur manufacturier et, pour un grand nombre d’entre eux, en tant que travailleurs temporaires bénéficiant de visas de 90 jours. Lorsque la mobilisation générale a empêché la plupart des hommes âgés de 18 à 60 ans de quitter l’Ukraine, les entrées de travailleurs appartenant à cette catégorie ont cessé. L’afflux massif de réfugiés en provenance d’Ukraine observé ensuite a été surtout constitué de femmes et d’enfants (Encadré 1.4). Nombre de ces réfugiés ont déjà trouvé un emploi, mais ils ne peuvent se substituer aux travailleurs immigrés. Par ailleurs, il n’est pas sûr qu’ils aient la volonté de s’installer et de travailler en République tchèque à long terme.
Les conditions actuelles de délivrance des permis pour les étrangers qui viennent travailler en République tchèque ne permettent pas d’attirer et de retenir des travailleurs étrangers hautement qualifiés. Certaines catégories de travailleurs peuvent bénéficier d’un traitement prioritaire, du traitement simultané des demandes familiales et d’un allègement des formalités administratives, ces catégories étant déterminées en fonction des évaluations d’employeurs et du niveau de qualification des professions. Néanmoins, les conditions de base des permis (durée maximale, interdiction de changer d’emploi, délai accordé pour retrouver un emploi en cas de chômage, durée du séjour avant de pouvoir prétendre au statut de résident permanent) sont les mêmes pour tous les immigrés. La durée des permis est limitée à deux ans pour les immigrés économiques, quel que soit leur niveau de qualification, après quoi ils doivent être renouvelés. Les travailleurs immigrés peuvent prétendre au statut de résident permanent après cinq ans.
Le cadre général de la politique relative à l’immigration de travail est un système de migrations temporaires soumis à une appréciation de la situation de l'emploi (qui ne permet le recrutement de ressortissants de pays tiers que si les travailleurs résidents/de l’UE ne peuvent pourvoir le poste vacant) et à l’initiative des employeurs, les renouvellements étant soumis aux conditions initiales et avec la possibilité de prétendre au statut de résident permanent. Il n’existe pas de seuil minimal de qualification et les salaires doivent correspondre au minimum national. Les détenteurs d'une carte d'employé ont l’obligation de travailler pendant au moins six mois pour l’employeur correspondant à leur première autorisation d’entrée en République tchèque. Il leur est possible de changer d’employeur au bout de six mois, sous réserve toutefois d’une nouvelle appréciation de la situation de l'emploi et d’une notification du ministère de l’Intérieur. Les titulaires d’une carte d’employé peuvent demander un regroupement familial après six mois de résidence dans le pays, et une fois que les membres de la famille reçoivent leur permis de séjour au titre de ce regroupement, ils peuvent accéder immédiatement au marché du travail. Le délai légal de traitement peut aller jusqu’à 270 jours pour un regroupement familial, mais il est réduit à 180 jours pour la famille des titulaires d’une carte d’employé. En 2022, le délai moyen de traitement était de 100 jours. Les membres des familles des immigrés admis au titre du Programme pour les travailleurs hautement qualifiés ou du Programme pour les personnes occupant des emplois-clés ou les chercheurs ont le droit de demander immédiatement un visa de séjour de longue durée pour raisons familiales de façon à pouvoir les accompagner. Cependant, cela ne leur donne pas accès au marché du travail. Les membres des familles sont tenus d’obtenir un permis de travail auprès du bureau du travail s’ils souhaitent prendre un emploi.
Les conditions applicables aux travailleurs hautement qualifiés en termes de durée des permis et de mobilité sur le marché du travail en République tchèque sont moins favorables que dans les pays voisins et concurrents (Graphique 1.41). Il est probable que les travailleurs très qualifiés choisissent des destinations offrant des conditions plus favorables et où ils peuvent facilement s’installer avec leur famille. De nombreux pays offrent aux immigrés les plus qualifiés un titre de séjour permanent immédiatement, ou tout au moins à la fin du permis de travail temporaire initial ou pendant la durée de validité du premier renouvellement. Les pays voisins de la République tchèque (Allemagne et Pologne) et de nombreux autres pays de l’UE (comme l’Estonie et les Pays-Bas) proposent déjà aux immigrés les plus qualifiés des permis de séjour permanent immédiats, des permis de séjour plus longs (jusqu’à cinq ans), des exemptions par rapport au critère d’appréciation de la situation de l'emploi, un traitement simultané des demandes familiales, des permis de travail immédiats pour les conjoints, un allègement des formalités administratives, des délais de traitement rapides, ainsi que d’autres avantages. À titre de comparaison, tous les postes vacants pour lesquels des employeurs recherchent des immigrés économiques (peu et hautement qualifiés) en République tchèque doivent faire l’objet d’une appréciation préalable de la situation de l'emploi. Ceci s’applique également à tout changement d’emploi ultérieur. Par ailleurs, tous les travailleurs immigrés doivent faire renouveler leur permis à deux reprises au moins avant de pouvoir prétendre au statut de résident permanent (OECD, 2022b).
Pour attirer et retenir des travailleurs immigrés hautement qualifiés, il pourrait être utile d’allonger la durée des permis et d’offrir de meilleures conditions de regroupement familial. Les données disponibles laissent à penser que les immigrés économiques et leurs employeurs souhaiteraient la mise en place de séjours de plus longue durée en République tchèque. En dépit de la durée restreinte de la carte d’employé et de la carte bleue européenne, 65 % des titulaires restent plus de deux ans. Il ressort des données préliminaires du Bureau tchèque du travail que près de la moitié des contrats de travail des ressortissants de pays tiers titulaires d’une carte d’employé sont déjà à durée indéterminée (OECD, 2022b). Une durée de séjour de cinq ans, par exemple, créerait un lien direct entre le séjour temporaire de la personne immigrée et l’obligation de résidence pour obtenir le statut de résident permanent. En outre, un permis de séjour temporaire immédiat qui accorde un droit de travail à tous les membres de la famille qui accompagnent les immigrés hautement qualifiés contribuerait à améliorer le soutien dont ils bénéficient et devrait se traduire par une meilleure intégration sur le marché du travail et un meilleur maintien dans l’emploi.
Pour pouvoir sélectionner et retenir les immigrés offrant le meilleur potentiel en termes d’insertion sur le marché du travail et d’intégration dans la société à long terme, la République tchèque devrait envisager de mettre en œuvre un système à points, conformément à celui qui a été élaboré par le ministère du Travail et des Affaires sociales, avec l’aide de l’OCDE et les financements de la DG Réforme (OECD, 2022c). Ainsi, un niveau élevé en termes de capital humain (âge, langue, niveau d’études, expérience) et de caractéristiques de l’emploi (niveau de qualifications et salaire) déboucherait sur des conditions de permis avantageuses et réduirait les obstacles au séjour de longue durée. Plusieurs pays de l’OCDE ont recours à un système à points pour réussir à attirer et retenir des travailleurs étrangers hautement qualifiés. L’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande proposent un titre de séjour permanent immédiat, tandis que l’Autriche et le Japon utilisent le système à points pour offrir aux immigrés ayant obtenu de bons scores des conditions de permis favorables.
Le système à points est un système de tri qui classe les immigrés en différentes catégories selon la probabilité de leur intégration réussie sur le marché du travail et dans la société tchèque. Il attribue des points aux immigrés hautement qualifiés, à la rémunération élevée et ayant un haut niveau d’études, et offre des avantages aux immigrés ayant acquis des qualifications et une expérience professionnelles en République tchèque. La maîtrise opérationnelle du tchèque permet aussi de gagner des points. Les immigrés plus jeunes sont aussi avantagés dans un tel système, puisqu’ils sont les mieux placés pour s’adapter aux changements futurs et qu’ils peuvent s’acquitter de leurs cotisations fiscales et sociales sur une plus longue période avant de partir à la retraite. L’attribution de points aux jeunes immigrés constitue en outre un mécanisme de correction étant donné que les points accordés au titre d’un niveau élevé de rémunération et d’expérience professionnelle bénéficient de fait aux travailleurs âgés. De la même manière, des points supplémentaires peuvent être attribués à un petit groupe de métiers stratégiques définis par les autorités tchèques.
Cumulés, les points gagnés par les candidats à l’immigration aident les pouvoirs publics tchèques à déterminer quels travailleurs étrangers cibler. Par exemple, comme indiqué dans le rapport OCDE (2022c), les immigrés ayant gagné beaucoup de points pourraient prétendre à des permis de séjour de cinq ans, tandis que ceux qui se trouvent au milieu du classement pourraient prétendre à des permis d’une durée de trois ans. Ces deux catégories d’immigrés devraient également être autorisées à parrainer les membres de leur famille qui les accompagne dès leur première demande, afin d’assurer une transition en douceur vers l’installation et le travail en République tchèque pour l’ensemble de la cellule familiale. Cela étant dit, tout système à points nécessite une évaluation et un ajustement continus, afin d’évoluer en phase avec les besoins du marché du travail et les priorités stratégiques.
Encadré 1.4. Afflux de réfugiés en provenance d’Ukraine : conséquences sur le marché du travail et sur le plan financier
Au début de l’année 2023, le nombre total de déplacements internationaux en provenance d’Ukraine enregistrés depuis l’agression russe contre l’Ukraine le 24 février 2022 s’élevait à 15.5 millions (UNCHR). Bien qu’elle n’ait pas de frontières communes avec l’Ukraine, la République tchèque a enregistré un afflux massif de réfugiés ukrainiens. Début mars 2023, on estime qu’au total près de 496 000 réfugiés avaient été enregistrées au titre de la protection temporaire (UNCHR), ce qui équivaut à 4.7 % environ de la population tchèque totale, soit le ratio le plus élevé en termes relatifs pour l’ensemble des pays d’accueil (Graphique 1.42). Certains réfugiés ukrainiens sont déjà rentrés chez eux.
Selon les données du ministère de l’Intérieur (2022b), un tiers des réfugiés bénéficiant d’une protection temporaire sont des enfants (âgés de 0 à 17 ans), et près des deux tiers sont des adultes d’âge actif (18-64 ans), dont 70 % de femmes. Le ministère de l’Éducation estime qu’un peu plus de 57 000 enfants réfugiés ukrainiens fréquentaient des écoles tchèques fin septembre 2022, y compris des écoles maternelles et des établissements d’enseignement primaire et secondaire. Par ailleurs, 5 500 étudiants ukrainiens suivaient des études supérieures.
Le 4 mars 2022, les États membres de l’Union européenne ont approuvé la mise en application de la Directive relative à la protection temporaire afin de protéger les personnes déplacées en provenance d’Ukraine. Ainsi, les personnes qui ont fui l’Ukraine bénéficient d’un socle minimum de droits essentiels dans tous les pays de l’UE, notamment de l’accès au marché du travail, à l’éducation et aux soins de santé, ainsi que d’une aide financière pour pourvoir à leurs besoins élémentaires et une aide au logement.
En République tchèque, les réfugiés ukrainiens ont accès aux soins de santé, à l’éducation et au logement, les coûts étant pris en charge par l’État. Ils peuvent également prétendre à une aide financière afin de couvrir leurs frais de subsistance quotidiens et d’accéder à un logement, en fonction de leur situation personnelle. Par exemple, une famille réfugiée type (composée d’un adulte et d’un enfant) vivant dans un logement indépendant en République tchèque peut prétendre à une aide de 400 EUR par mois environ. Les ménages tchèques qui accueillent des réfugiés ukrainiens peuvent aussi prétendre à une aide financière de courte durée (120 EUR par mois par personne hébergée). Selon différentes hypothèses, en faisant la somme du coût estimé de l’aide financière et au logement et des estimations de coûts afférents à l’éducation et à la santé, l’OCDE (2022d) a calculé que le coût budgétaire total de l’accueil des réfugiés ukrainiens en 2022 s'élevait à 1.96 milliard EUR en République tchèque, soit 0.7 % environ du PIB.
Le poids financier supporté par la République tchèque est donc élevé par comparaison avec d’autres pays de l’UE, mais ces coûts seront en partie couverts par des fonds communs de l’UE. La Commission européenne a proposé plusieurs mesures financières pour aider à mutualiser les coûts : réorientation de fonds provenant des fonds structurels et d’investissement européens (FSIE), et financements issus du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) et de la tranche 2022 du plan de relance de l’UE (REACT-UE). Au total, on estime que 17 milliards EUR seront débloqués pour aider les États membres de l'UE à accueillir les réfugiés fuyant l'Ukraine. À titre de comparaison, le coût budgétaire estimé total supporté par l’ensemble des pays européens en 2022 s’élève à 27 milliards EUR (OECD, 2022d). Les fonds communs de l’UE couvriront environ deux tiers des coûts supportés par les États membres, mais leur répartition exacte entre les pays bénéficiaires n’a pas encore été déterminée.
Les réfugiés ukrainiens ont le droit de travailler en République tchèque. Au total, 205 000 réfugiés avaient trouvé un emploi sur le marché du travail tchèque entre le début du conflit et la fin février. Fin février 2023, environ 98 000 réfugiés occupaient un emploi, soit plus d’un tiers des réfugiés ukrainiens d’âge actif (Labour Office of the Czech Republic, 2023).
Les tensions existantes sur le marché du travail tchèque facilitent l’intégration des réfugiés nouvellement arrivés, tandis que la diaspora ukrainienne conséquente installée dans le pays peut aussi être très utile aux nouveaux arrivants. Les informations disponibles indiquent que la proportion de réfugiés entrants diplômés de l’enseignement supérieur est plus importante que dans les autres groupes de réfugiés et qu’ils ont en outre un niveau d’études supérieur à celui de la population ukrainienne en général (OECD, 2022e). Néanmoins, la détresse psychologique, le fait que la plupart des réfugiés sont des mères avec leurs enfants et le manque de connaissance du marché du travail et de la langue locale peuvent freiner l’intégration sur le marché du travail. Par ailleurs, une grande incertitude demeure quant à la durée du séjour de ces réfugiés en République tchèque.
Rendre l’enseignement et le développement des compétences plus inclusifs et plus adaptables
Le progrès technologique, les changements à l’œuvre sur le marché du travail et l’évolution de la demande de compétences ouvrent des perspectives et soulèvent des difficultés considérables (OECD 2019e et 2017b). Ces tendances ont probablement été accentuées par la mutation des besoins du marché du travail au cours de la pandémie de coronavirus. Comme d’autres économies de l’OCDE, la République tchèque a connu une hausse de la demande de travailleurs très qualifiés, et celle-ci semble vouée à perdurer. Près de la moitié des emplois actuels (Graphique 1.43) sont exposés à un risque élevé d’automatisation ou susceptibles d’être profondément modifiés par la technologie (Nedelkoska and Quintini, 2018). Le projet KOMPAS a démontré que les travailleurs avec un niveau de qualifications élevé vont continuer à être de plus en plus recherchés sur le marché du travail à moyen ou long terme. D’après le module LEON, composante quantitative du projet KOMPAS, la demande globale de travailleurs diplômés de l’enseignement supérieur devrait progresser de 16 % au cours des cinq prochaines années. Si l’on en croit les prévisions établies à l’aide de ce module, la demande de personnel très diplômé (génie civil, sciences naturelles, par exemple) pourrait bien, dans certaines professions, augmenter de 26 % (OECD, 2022b).
Au fil du temps, de plus en plus de professions exigeront une formation professionnelle et/ou une formation supérieure. Qui plus est, au cours de leur carrière, les travailleurs tchèques seront sans doute amenés à changer d’emploi et d’employeur, et devront se reconvertir. À côté de compétences plus élevées et plus pointues, une maîtrise solide de compétences fondamentales, comme le traitement de l’information, la résolution de problèmes et la communication, peut permettre aux individus de s’adapter plus facilement au changement (OECD, 2017c et 2016b). Aussi est-il indispensable que les systèmes d’enseignement et de développement des compétences dotent les travailleurs d’un ensemble de compétences adapté et leur assurent un accès facile à la formation. Un niveau de qualifications et de compétences plus élevé contribuera par la suite à une meilleure productivité et permettra à l’économie tchèque de progresser le long des chaînes de valeur mondiales. Pour l’heure toutefois, nombreux sont les jeunes tchèques de 15 ans qui visent encore une profession appelée à se raréfier (Graphique 1.44 ; OECD, 2021f).
La République tchèque arrive en bonne position dans différents classements établis au regard des compétences et de la qualité de l’enseignement. Les élèves de 15 ans obtiennent des résultats satisfaisants aux épreuves du PISA, et les adultes affichent un niveau de compétences supérieur à la moyenne OCDE en compréhension de l’écrit, calcul et résolution de problèmes dans des environnements à forte composante technologique (Graphique 1.45). Les données de l’UE révèlent également un solide niveau de compétences numériques de base (European Commission, 2022b). Dans l’ensemble, le niveau de formation est élevé : 92 % des 25-34 ans ont au moins un niveau scolaire de second cycle du secondaire et les sorties prématurées du système scolaire sont relativement rares (OECD, 2021e ; European Commission, 2022b).
Il existe néanmoins des éléments qui font obstacle à la mise à disposition, de façon souple et efficace, des compétences qui répondront aux besoins du marché du travail, aujourd’hui et demain. Les résultats au PISA dénotent une baisse du niveau en mathématiques et en sciences sur les 15 dernières années (Graphique 1.46). Qui plus est, si le niveau global d’instruction est élevé, le pourcentage de diplômés du supérieur parmi la population demeure sensiblement inférieur à celui d’autres pays de l’OCDE, en dépit des progrès accomplis ces dernières années (Graphique 1.47). D’importantes pénuries de main-d’œuvre qualifiée persistent dans les secteurs en croissance. Quoique les actifs aient un bon niveau de compétences numériques de base, l’économie manque de spécialistes des technologies de l’information et des communications (TIC). D’après Eurostat, 76 % des entreprises tchèques déclarent avoir des difficultés à recruter de tels spécialistes, une proportion sans équivalent à l’échelle de l’Union européenne. Le pourcentage de femmes parmi ces spécialistes classe le pays à l’avant-dernier rang à l’échelle de l’UE (European Commission, 2022b). Une étude réalisée par l’OCDE a révélé de graves pénuries de personnel qualifié dans les domaines relevant de la sphère technique, tels que l’ingénierie, la mécanique et la technologie, les mathématiques, ainsi que l’informatique et l’électronique (OECD, 2018c).
Afin de renforcer la résilience de l’éventail de compétences des travailleurs tchèques et faire en sorte que le système de développement des compétences soit plus en phase avec les besoins du marché du travail, la stratégie 2030+ pour l’éducation (Ministry of Education, Youth and Sports, 2020) insiste avec raison sur la réforme du secteur de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP). Cette stratégie vise à reporter le moment de la spécialisation et à réduire le nombre total de branches d’études, à les moderniser et à y introduire davantage d’interdisciplinarité. Les compétences professionnelles et transférables seront renforcées. L’EFP va introduire progressivement des programmes modulaires, mieux adaptés à la formation des adultes. Une part plus importante de l’enseignement (aussi bien théorique que pratique) sera assurée avec le concours des employeurs. Les organisations d’employeurs et les représentants du monde de l’entreprise seront en outre associés plus activement à la définition et à la mise à jour des programmes. Le développement des compétences numériques occupe lui aussi une place de choix dans la stratégie, l’objectif étant de le renforcer à tous les niveaux d’enseignement. La République tchèque entend utiliser les fonds mis à sa disposition au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience de l’Union européenne pour fournir des équipements numériques aux établissements scolaires, renforcer les compétences numériques des enseignants, réviser le programme d’enseignement en informatique et développer la formation aux technologies numériques dans le cadre de la formation tout au long de la vie. Il convient de poursuivre sur cette lancée.
Les résultats satisfaisants dans l’ensemble sur les plans des compétences et de l’instruction masquent néanmoins des inégalités persistantes, en ce sens que la situation socioéconomique des parents exerce une influence notable sur la scolarité des individus (Graphique 1.48). Ces inégalités se répercutent ensuite sur le parcours professionnel et la santé future de chacun (OECD, 2021e). Le taux d’abandon scolaire connaît d’amples variations selon les régions : dans celles qui sont défavorisées, il peut représenter plus du double de la moyenne nationale (6.4 %) (European Commission, 2022b). À cela s’ajoute que 57 % des élèves roms avaient quitté prématurément l’école en 2016 (European Commission, 2022b). Les inégalités sur le plan scolaire peuvent tenir en partie à la faible attractivité de la profession enseignante. Le corps enseignant manque de diversité : la moyenne d’âge est élevée et les effectifs sont composés d’une écrasante majorité de femmes (OECD, 2021e). Les perspectives d’évolution sont limitées et la rémunération est faible (Graphique 1.49), malgré les revalorisations accordées ces dernières années (Ministry of Finance, 2021). D’après les éléments consignés dans les Perspectives de l’OCDE sur les compétences (OECD, 2021f), les enseignants font preuve de moins d’enthousiasme et stimulent moins leurs élèves dans les établissements défavorisés (Graphique 1.50). Le pourcentage d’enseignants formés à travailler dans un cadre multiculturel ou multilingue ou à communiquer avec des personnes issues de cultures ou de pays différents est parmi les plus faibles de l’OCDE (Graphique 1.50). Cette situation ne laisse pas de préoccuper à l’heure où le pays connaît un afflux de réfugiés ukrainiens et ambitionne d’attirer davantage de travailleurs étrangers avec leur famille.
Réduire les inégalités dans le domaine de l’éducation est une priorité de longue date. L’introduction, en 2017, d’une année de scolarité obligatoire avant l’entrée en primaire a permis une avancée à cet égard. Cela étant, renoncer à l’orientation précoce des élèves, corriger les écarts de qualité entre établissements et attirer des enseignants plus compétents dans les écoles défavorisées sont d’autres dispositions à prendre pour renforcer l’égalité des chances entre tous.
L’orientation dans les filières prestigieuses de l’enseignement général intervient très tôt dans la scolarité, dès l’âge de 11-12 ans, âge auquel les élèves peuvent faire le choix d’un cursus long de 8 ans au lycée. Une seconde orientation, aux enjeux bien moindres cependant, intervient à l’âge de 13-14 ans (pour une scolarité de 6 ans au lycée). Les élèves sont admis dans les différentes filières à l’issue d’un examen d’entrée et de tests d’aptitude. Ceux qui obtiennent les meilleurs résultats scolaires optent généralement pour l’enseignement général (lycée). Comme indiqué dans le chapitre spécial sur l’éducation de l’Étude économique de l’OCDE de 2014 (OECD, 2014), il apparaît que le milieu familial compterait davantage que les aptitudes scolaires pour expliquer l’admission dans les cursus les plus prestigieux (Koucký et al., 2004 ; Münich, 2005). Une orientation précoce a, qui plus est, des effets négatifs sur les élèves aiguillés vers les filières moins exigeantes et n’améliore pas les résultats moyens (OECD, 2012). L’existence de ce problème est d’ailleurs reconnue dans la nouvelle stratégie 2030+ pour l’éducation C’est pourquoi il convient de retarder l’orientation, tout en créant des passerelles plus nombreuses entre les différentes filières.
Il est possible de réduire encore les inégalités en atténuant les différences de qualité de l’enseignement entre les établissements scolaires qui sont liées à de fortes disparités régionales (Shewbridge et al., 2016). Les changements récemment apportés au financement des établissements scolaires (primaires et secondaires) devraient permettre de progresser quelque peu dans cette direction, avec la mise en place d’un système de financement fondé sur le nombre de cours effectivement dispensés dans l’établissement plutôt que sur le nombre d’élèves inscrits. De la sorte, les petits établissements comptant moins d’élèves ne sont pas pénalisés par un niveau de financement inférieur. Quoi qu’il en soit, le morcellement prononcé de l’administration territoriale tchèque favorise le maintien de nombreux petits établissements scolaires, même si maintes localités sont confrontées à une diminution de la population en âge d’aller à l’école et ont de plus en plus de peine à entretenir des établissements scolaires d’une taille satisfaisante du point de vue de l’efficience (Shewbridge et al., 2016; OECD, 2020a). Aussi est-il souhaitable de poursuivre la rationalisation du réseau d’établissements scolaires au moyen de regroupements, qui pourraient permettre de réaliser des gains d’efficience et de qualité. Les petits établissements, par exemple, pourraient être encouragés à coopérer en partageant des ressources et services communs. Il pourrait être envisagé d’établir des groupes d’établissements scolaires placés sous une direction commune et partageant le même personnel administratif.
Les formules de calcul des financements sont le moyen le plus couramment utilisé dans les pays de l’OCDE pour allouer des fonds aux établissements d’enseignement (OECD, 2021e). La République tchèque est toutefois l’un des six pays qui font exception à cette règle. Ces formules ont cet avantage que les financements peuvent être affectés explicitement à un domaine stratégique majeur, comme l’aide aux élèves ou établissements défavorisés, identifiés à partir de critères précis. Ces derniers peuvent être fondés sur les caractéristiques des élèves, des établissements et/ou de la population locale. L’intégration de critères explicites et objectifs aux modalités d’attribution des financements destinés aux établissements scolaires, pour cibler les désavantages économiques et autres, pourrait contribuer par conséquent à remédier aux problèmes d’équité. En Australie, par exemple, depuis une réforme récente, le financement des établissements d’enseignement est déterminé par la norme sur les ressources scolaires (SRS, Schooling Resource Standard), qui prévoit l’attribution d’un financement de base par élève et de six dotations complémentaires (« loadings ») ciblées sur différents types de désavantage (handicap, faible maîtrise de l’anglais, Aborigènes et insulaires du Détroit de Torres, désavantage socio-éducatif, localisation de l’établissement et taille de l’établissement). Les critères et les différentes dotations complémentaires sont susceptibles d’évoluer ultérieurement avec les priorités stratégiques du gouvernement.
La répartition inégale des enseignants qualifiés entre les établissements est problématique. Les établissements scolaires défavorisés déclarent plus souvent qu’à leur tour manquer de personnel qualifié ou compétent (Shewbridge et al., 2016 ; Schleicher, 2014). Il n’existe pas, en République tchèque, de programmes ou de mesures d’incitation spécialement prévus pour encourager les enseignants à travailler dans les zones isolées ou en province (Shewbridge et al., 2016). Il conviendrait que le ministère de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sport incite plus activement les enseignants très qualifiés à travailler dans des zones isolées pour contribuer à réduire les écarts au regard de la qualité de l’enseignement scolaire. Il faut pour cela agir sur des facteurs à la fois financiers et non financiers. Les facteurs professionnels ont leur importance, comme la possibilité de prendre davantage de responsabilités et d’accéder à des postes d’influence, les réformes et l’innovation, ainsi que l’acquisition de solides compétences de dirigeant et la mise en place d’une structure collégiale dans le cadre du développement professionnel (Mourshed et al., 2010 ; OECD, 2012 ; Rice, 2010). Le ministère devrait favoriser la création d’un environnement dans lequel les établissements défavorisés puissent attirer à eux les meilleurs éléments en leur offrant de réelles perspectives de carrière, de bonnes conditions de travail et la possibilité de gratifications. La réforme générale du système de carrière des enseignants – toujours dans le cadre de la stratégie 2030+ – serait une mesure utile et cohérente avec cette démarche.
Tableau 1.9. Recommandations antérieures concernant l’éducation et les compétences
Recommandations formulées dans les Études antérieures |
Mesures prises |
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Consacrer davantage de ressources à l’éducation, à la formation, à la reconversion professionnelle et au renforcement des compétences et mieux cibler les désavantages. |
Le financement public de l’éducation a augmenté en proportion du PIB. Depuis le 01/01/2020, les modalités de financement de l’enseignement ont changé : le financement par élève a été remplacé par un montant normatif par chargé d’enseignement, et les établissements reçoivent une somme qui est fonction du nombre de cours dispensés. |
Promouvoir un enseignement souple en matière de formation des adultes, ciblé en particulier sur les travailleurs peu qualifiés. |
Le ministère du Travail et des Affaires sociales est en train de préparer un « plan emploi » qui comprend, entre autres mesures, des aides destinées aux salariés dont l’emploi est menacé par l’adoption de nouvelles technologies ou de nouveaux procédés de fabrication. Le projet d’appui à la formation professionnelle des salariés « POVEZ II » est toujours en cours (depuis le 01/12/2015). La stratégie 2030+ pour l’enseignement accorde une place toute particulière à la réforme du secteur de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP). Cette stratégie vise à reporter le moment de la spécialisation et à réduire le nombre total de branches d’études, à les moderniser et à y introduire davantage d’interdisciplinarité. L’EFP va introduire progressivement des programmes modulaires, mieux adaptés à la formation des adultes. Les organisations d’employeurs et les représentants du monde de l’entreprise seront en outre associés plus activement à la définition et à la mise à jour des programmes. |
Tableau 1.10. Recommandations
PRINCIPALES CONCLUSIONS |
RECOMMANDATIONS (principales recommandations en gras) |
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Faire face au ralentissement de l’activité économique sans aggraver les déséquilibres macroéconomiques |
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L’inflation et les anticipations d'inflation ont très fortement augmenté. L’inflation s’est enracinée à des niveaux élevés, et se généralise. La CNB est intervenue sur le marché des changes pour réduire les fluctuations excessives, mais aussi pour atténuer les pressions à la baisse qui s’exercent sur la couronne. Les interventions ont débuté en janvier 2022 mais se sont intensifiées entre mai et septembre 2022. |
Maintenir une orientation restrictive de la politique monétaire jusqu’à ce que l’inflation soit fermement engagée sur la voie du respect de l’objectif de 2 %. Continuer d'utiliser le taux directeur comme principal instrument de politique monétaire. Utiliser les opérations de change principalement pour atténuer la volatilité sur le marché des changes. |
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Les prix des logements et de l’immobilier résidentiel sont élevés. Le nombre de prêts hypothécaires présentant des caractéristiques de risque a considérablement augmenté. Une correction brutale des prix de l’immobilier ou un choc affectant les revenus des ménages peut avoir des répercussions systémiques, avec des retombées potentielles sur la stabilité financière. |
Suivre de près les risques liés aux déséquilibres observés sur le marché immobilier, et ajuster de manière appropriée les mesures macroprudentielles et les plafonds applicables aux prêts hypothécaires. Envisager de fixer des pondérations de risque minimales ou de mettre en œuvre le volant de fonds propres applicable au risque systémique sectoriel. |
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La politique budgétaire est expansionniste, et la coordination des politiques macroéconomiques est insuffisante. |
Engager un assainissement budgétaire tout en apportant si nécessaire un soutien ciblé aux ménages et aux entreprises. |
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Garantir la viabilité à long terme des finances publiques |
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Le niveau élevé des tensions budgétaires à moyen et long terme (dont celles qui sont liées au vieillissement de la population) menacent la viabilité des finances publiques. Faute de réforme, le ratio dette/PIB va continuer d’augmenter de façon spectaculaire. |
Préparer un plan d'assainissement budgétaire à moyen terme plus ambitieux et plus crédible, prévoyant notamment une trajectoire d'amélioration du solde structurel. |
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Le paquet fiscal de 2020 (modification de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et suppression du droit de timbre sur les transactions immobilières) a entraîné une réduction permanente des recettes fiscales. Les impôts sur le revenu sont peu élevés, et leur progressivité n’est que modeste. |
Renforcer les recettes fiscales, notamment en augmentant la progressivité de l’impôt sur le revenu. |
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Les recettes dépendent fortement des cotisations de sécurité sociale, d’où un coin fiscal élevé. Réduire le poids de la fiscalité directe du travail et augmenter les recettes provenant des impôts sur le patrimoine et des impôts indirects, notamment des écotaxes, pourrait stimuler la croissance de manière durable. |
Mettre en place des impôts immobiliers, des impôts sur la consommation et des écotaxes, et réduire les cotisations de sécurité sociale. |
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L'écart de TVA reste supérieur à la moyenne de l’UE et la part du manque à gagner sur les recettes est probablement en hausse du fait de la moindre discipline fiscale et de l’augmentation du nombre d'articles soumis à des taux de TVA réduits. En particulier, un large éventail de biens et de services sont passés à des taux réduits pendant la pandémie en 2020. |
Élargir progressivement l’assiette de la TVA, notamment en revenant sur les exonérations introduites pendant la pandémie. |
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Les travailleurs indépendants bénéficient d'un traitement fiscal plus avantageux que les salariés, qui se traduit par des cotisations de sécurité sociale nettement plus modestes. |
Réduire les avantages fiscaux dont bénéficient les travailleurs indépendants, notamment en revoyant à la hausse la base de calcul de leurs cotisations de sécurité sociale. |
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La population vieillit rapidement et les dépenses liées à l’âge vont augmenter fortement au cours des prochaines décennies. Quasiment un tiers des individus prennent leur retraite avant l’âge légal. Même lorsque l’âge légal de la retraite sera porté à 65 ans, l’âge de la retraite anticipée restera fixé à 60 ans selon les dispositions actuelles. |
Continuer de relever l’âge légal de la retraite et l’âge minimum de la retraite anticipée, et les lier à l’espérance de vie. |
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Le système de retraite tchèque est fortement redistributif, et la pauvreté au moment de la vieillesse est faible. Toutefois, les taux de remplacement des hauts salaires sont modestes, et le lien entre les cotisations acquittées et les prestations futures est faible, si bien que le taux de rentabilité interne est très faible pour les personnes ayant une rémunération élevée. |
Envisager de financer certaines composantes redistributives du système public de retraite (les retraites de base par exemple) au moyen d’impôts généraux et de réduire les cotisations de sécurité sociale, qui sont lourdes. |
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Accroître l’efficacité des administrations publiques peut contribuer à améliorer la viabilité budgétaire et la qualité des services fournis aux citoyens. En République tchèque, les administrations territoriales et municipales sont parmi les plus fragmentées de la zone OCDE. Les capacités de pilotage stratégique et d’orientation émanant du centre sont insuffisantes. Les décisions stratégiques, la réglementation et les politiques publiques ne sont en outre pas suffisamment fondées sur des données d’observation. |
Renforcer le rôle de coordination stratégique du cabinet du Premier ministre et accroître les capacités d’analyse à tous les niveaux des administrations publiques. Faire une utilisation plus large des examens de dépenses en renforçant les capacités et en améliorant l’accessibilité aux données. |
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S’attaquer aux pénuries récurrentes de main-d'œuvre |
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La maternité a d’importantes conséquences sur la participation des mères au marché du travail. L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est considérable. Les prestations familiales en espèces et les abattements fiscaux sont généreux, mais les aides publiques à la garde d’enfants sont peu élevées, surtout pour les enfants de moins de trois ans. |
Continuer d’accroître l’offre de structures d’accueil des jeunes enfants de qualité et d’un prix abordable. Réduire les prestations familiales en espèces non ciblées et abaisser progressivement la durée maximale du congé parental. |
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Ce sont presque exclusivement les femmes qui assurent le congé parental avec de jeunes enfants, en raison de stéréotypes de genre persistants ainsi que de considérations financières. Au total, le congé paternité et le congé parental réservé aux pères restent courts en comparaison internationale. |
Réserver une partie du congé parental aux pères en assurant des taux de remplacement suffisamment généreux. |
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Les conditions actuelles d’octroi de permis sont restrictives, et ne permettent pas correctement d'attirer et de retenir des travailleurs étrangers hautement qualifiés. Les conditions relatives à la durée des permis et les modalités connexes concernant le regroupement familial et la mobilité sur le marché du travail pour les travailleurs hautement qualifiés sont moins favorables que dans de nombreux pays comparables de l’OCDE. |
Porter à cinq ans la durée des permis de travail initiaux pour les immigrés hautement qualifiés et offrir immédiatement des droits temporaires de séjour et de travail aux membres de leur famille. Envisager de mettre en place un système d’immigration fondé sur des points grâce auxquels des niveaux élevé de capital humain (âge, langue, niveau d’études, expérience) et de caractéristiques professionnelles (niveau de compétence et salaire) permettraient d’obtenir des conditions avantageuses de délivrance de permis. |
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Renforcer les compétences à l’appui d'une croissance plus vigoureuse |
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Les facteurs socioéconomiques ont une influence considérable sur les résultats scolaires et le niveau de formation. Les inégalités trouvent en grande partie leur origine dans les disparités entre établissements scolaires. Nombre d'entre eux sont trop petits pour dispenser un enseignement efficace. |
Introduire dans la formule de financement des établissements scolaires des critères explicites et objectifs (fondés sur les caractéristiques des établissements, des élèves ou de la zone concernée) de façon à lutter plus avant contre les inégalités et les facteurs propres aux milieux défavorisés. Rationaliser le réseau d’établissements scolaires au moyen de regroupements afin de garantir la qualité de l’enseignement dans tous les établissements, et inciter les petits à coopérer et mettre en commun leurs ressources administratives. |
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L’orientation intervient très tôt (à l’âge de 11 ans), et les données montrent que le milieu familial joue un rôle plus important que les compétences scolaires dans l'accès aux filières les plus prestigieuses. De plus, la sélection précoce des élèves a un impact négatif sur ceux qui sont affectés aux filières les moins prestigieuses. |
Retarder l’orientation et multiplier les possibilités de passerelles entre les différentes filières. |
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Les établissements défavorisés sont plus susceptibles de manquer de personnel, et emploient les enseignants les moins expérimentés. |
Offrir aux enseignants de meilleures perspectives de carrière et inciter davantage les enseignants de qualité à travailler dans des zones reculées. |
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Les pénuries de compétences restent importantes dans de nombreux domaines techniques, et l'on manque en particulier de spécialistes des TIC. Outre le besoin de compétences plus fortes et plus spécialisées, de solides compétences fondamentales peuvent assurer la résilience des travailleurs face au changement. L’enseignement devrait permettre aux travailleurs d’acquérir les compétences adéquates et d'accéder facilement à la formation, y compris pour les adultes. |
Moderniser l’enseignement et la formation professionnels (EFP), comme prévu dans la stratégie 2030+ pour l’éducation, en modernisant les programmes, en renforçant les compétences de base, en y associant plus étroitement les employeurs et en l’adaptant mieux à la formation des adultes. |
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Renforcer l’intégrité publique |
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Les indicateurs de maîtrise et de perception des risques de corruption dans le secteur public laissent penser que les résultats de la République tchèque sont moins bons que ceux de pays comparables de l’OCDE. Les citoyens tchèques ont tendance à penser que la corruption est répandue. Le rapport 2021 sur l’État de droit de la Commission européenne relevait l’absence de progrès en la matière. |
Poursuivre les efforts de lutte contre la corruption. |
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Il faudrait améliorer encore l’intégrité publique. |
Adopter des mesures pour renforcer la gestion et la prévention des conflits d’intérêts au sein du Parlement. Améliorer l’intégrité et la transparence des activités de lobbying. |
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Parmi les secteurs exportateurs, on trouve des secteurs à haut risque de corruption transnationale comme les équipements ou le matériel de défense. Jusqu’à présent, une seule affaire de corruption transnationale a donné lieu à des poursuites. |
Poursuivre les efforts pour garantir une plus grande indépendance du parquet et mettre en place une protection appropriée des lanceurs d'alerte contre toute mesure discriminatoire ou disciplinaire. |
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