La reprise dans l’Union européenne (UE) et la zone euro a été perturbée par le choc lié aux prix de l’énergie et la crise du coût de la vie qui ont suivi la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Les mesures prises par l’UE ont permis d’éviter une grave récession, mais les perspectives à court terme sont entourées d’incertitudes et de risques à la baisse. L’orientation des politiques monétaires et budgétaires doit rester restrictive pour modérer les tensions inflationnistes sous-jacentes. La viabilité des finances publiques devrait reposer sur des dépenses publiques efficientes et sur une meilleure gouvernance économique. Afin de favoriser les évolutions structurelles, il est nécessaire de réduire encore les obstacles au sein du marché unique et de prévoir des mesures de soutien précoce efficaces en faveur de l’innovation verte.
Études économiques de l’OCDE : Union européenne et zone euro 2023
1. Principaux éclairages sur l’action publique
Abstract
L’Union européenne fait face à des défis majeurs
La pandémie de COVID-19 a soulevé de nombreux problèmes et mis au jour des faiblesses déjà existantes, ce qui a poussé les pouvoirs publics à prendre de nouvelles mesures à l’échelle de l’UE. La reprise consécutive à la pandémie a été interrompue par les perturbations qui touchent actuellement les chaînes d’approvisionnement mondiales, par l’accentuation des tensions sur les marchés de l’énergie et des produits de base, ainsi que par la forte incertitude liée à la guerre d’agression non provoquée menée par la Russie contre l’Ukraine. En raison de ces chocs, principalement externes, l’année 2022 a été particulièrement difficile pour l’Europe. La guerre qui se déroule actuellement sur le sol européen a entraîné une crise humanitaire et a considérablement perturbé l’activité économique. L’inflation dans la zone euro et l’UE a atteint des niveaux qui n’avaient plus été observés depuis des décennies dans les économies avancées, et les tensions commerciales croissantes, conjuguées à des politiques industrielles de plus en plus protectionnistes, mettent en péril l’ordre économique international fondé sur des règles. Face à ces enjeux immédiats, les objectifs à plus long terme, tels que l’atténuation du changement climatique et la transition numérique, risquent d’être relégués à l’arrière-plan.
Les mesures prises par les institutions européennes, tant à l’échelon de l’UE que dans la zone euro, ont été énergiques et novatrices. L’UE continue d’apporter une aide humanitaire, militaire et financière à l’Ukraine, qui s’élève à ce jour à 55 milliards EUR. Dans le contexte de la crise énergétique, elle a en outre réussi à coordonner une riposte efficace et rapide qui a permis de renforcer la sécurité énergétique. La Banque centrale européenne (BCE) a durci sa politique monétaire, quoique tardivement, afin de juguler l’inflation. La Commission européenne a ensuite présenté des propositions de réforme visant à apporter des améliorations de la gouvernance économique essentielles au fonctionnement de l’Union économique et monétaire (UEM). Tous ces efforts ont porté leurs fruits : contrairement à ce qui s’était passé après la crise financière mondiale, la confiance à l’égard de l’UE a été préservée, voire renforcée, et le soutien à la monnaie unique de la zone euro, qui a accueilli en début d’année la Croatie en tant que nouveau membre, s’établit à un niveau record (Graphique 1.1). L’UE et la zone euro sont reconnues par leurs citoyens comme des mécanismes de protection efficaces qui s’avèrent utiles pour faire face à la fois aux risques immédiats et aux enjeux à long terme.
Il se peut toutefois que les enjeux qui se profilent à l’horizon soient aussi importants que ceux auxquels l’UE et la zone euro ont récemment fait face. Au cours de la dernière décennie, les émissions de gaz à effet de serre ont été essentiellement réduites dans les secteurs couverts par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE). Les secteurs non concernés par le SEQE ont en revanche peu contribué à la réduction des émissions. Comme dans d’autres grandes économies, la productivité globale du travail connaît une tendance à la baisse depuis plusieurs décennies. Au sein de l’UE, la croissance de la productivité du travail, qui était montée en flèche en 2021, dans le sillage de la pandémie, est tombée à 0.7 % en 2022.
La politique monétaire doit conserver une orientation restrictive pour faire baisser durablement l’inflation, tout en tenant compte de la stabilité financière. Les politiques budgétaires doivent accompagner la politique monétaire de façon à ce que le dosage des politiques macroéconomiques dans la zone euro soit suffisamment restrictif pour réduire l’inflation. Il convient pour cela de mieux cibler les aides budgétaires et de mettre en œuvre de manière efficace le programme « Next Generation EU » (NGEU), ainsi que les plans nationaux pour la reprise et la résilience (PNRR), afin que la relance budgétaire apportée par les investissements publics supplémentaires ne fasse pas grimper l’inflation à moyen terme. L’architecture institutionnelle de l’UEM doit être renouvelée et l’ensemble complexe des règles budgétaires de l’UE remplacé par un système de gouvernance économique qui améliorera à la fois le respect et l’appropriation nationale des règles.
La poursuite de l’approfondissement du marché unique, qui contribuerait à atténuer les tensions sur les coûts et les prix en accroissant les capacités de production à long terme des pays de l’UE, peut favoriser la stabilisation macroéconomique. Le programme NGEU soutiendra une partie des investissements considérables qui s’imposent pour mettre le marché unique au service des transitions écologique et numérique. L’investissement public devra toutefois s’accompagner d’une augmentation des capitaux privés, et il sera essentiel, pour relever les défis environnementaux, d’alléger les contraintes de financement auxquelles se heurtent en particulier les petites et moyennes entreprises. Il convient en outre de redoubler d’efforts pour lever les obstacles persistants aux échanges de services et accroître la mobilité de la main-d’œuvre. Par ailleurs, l’alignement des règles nationales sur celles de l’UE dans le domaine de l’économie circulaire et de la construction peut directement contribuer à la réalisation des ambitieux objectifs de réduction des émissions.
Outre la garantie de règles du jeu équitables, l’approfondissement du marché unique suppose une politique industrielle bien calibrée à même de favoriser la résilience et de soutenir les capacités de production. Tout nouvel assouplissement des règles relatives aux aides d’État risque de créer des conditions inégales entre les pays, correspondant à l’ampleur des marges de manœuvre budgétaires des différents pays, et non aux synergies et aux coûts d’opportunité. Au lieu de se lancer dans des courses aux subventions préjudiciables, l’UE pourrait privilégier la coopération internationale pour éviter de nouvelles dépendances et unir ses efforts à ceux engagés par les gouvernements et les entreprises en vue d’améliorer la préparation aux risques.
À l’avenir, l’un des principaux enjeux consistera à accélérer les efforts de décarbonation en Europe. Pour ce faire, il faut que tous les secteurs contribuent à la réduction des émissions et que l’agriculture et les transports entrent dans le champ d’application du SEQE. Ces efforts devraient être renforcés par des mesures favorisant la transition vers des énergies plus propres et l’amélioration de l’efficacité énergétique.
Dans ce contexte, les trois principaux messages de la présente Étude sont les suivants :
Les autorités monétaires et budgétaires doivent instaurer des conditions macroéconomiques suffisamment restrictives pour réduire l’inflation et faire en sorte que les anticipations en la matière demeurent fermement ancrées au niveau de l’objectif fixé, soit 2 %. La réforme de la gouvernance économique, qui pourrait contribuer à améliorer les résultats budgétaires, fait partie intégrante de cette action.
Moteur essentiel de la croissance à long terme, le marché unique pourrait être encore considérablement approfondi. Outre le fait qu’il instaure des règles du jeu équitables, il pourrait être mis à profit pour renforcer la résilience. Réduire encore les obstacles actuels aux échanges de services et à la mobilité de la main-d’œuvre, tout en protégeant les droits des travailleurs, permettrait aussi de favoriser les transitions numérique et écologique. Il est indispensable de continuer à lutter contre la corruption et la fraude pour renforcer la confiance dans les institutions publiques.
La transition écologique nécessite de consacrer des efforts supplémentaires à la réduction des émissions et de recourir pour cela à toute la panoplie d’instruments d’atténuation, dont la tarification du carbone et la réglementation. Il faut notamment harmoniser davantage les prix du carbone entre les pays et entre les secteurs, avant de les relever progressivement. Une meilleure intégration des marchés de l’électricité sera en outre essentielle à la transition et à la sécurité énergétiques.
La reprise économique a été lente et inégale
La reprise s’est heurtée à la crise énergétique et à la forte inflation
L’Europe a été durement touchée par la guerre d’agression non provoquée menée par la Russie contre l’Ukraine, ainsi que par la crise énergétique qui s’est ensuivie. Dans le sillage de la pandémie, la croissance a rebondi en 2022, à la faveur des mesures de soutien public aux ménages et aux entreprises, de l’ordre de 1.2 % du PIB de l’UE, des améliorations dans les chaînes d’approvisionnement mondiales et du redressement de la demande lié à la réouverture des économies à l’échelle mondiale. Il n’en reste pas moins que le choc négatif de grande ampleur sur les termes de l’échange qui a fait fortement augmenter les prix des importations, telles que l’énergie, par rapport aux prix des exportations a eu des effets durables et inégaux suivant les pays européens, traduisant des différences en termes de besoins énergétiques et de chaînes d’approvisionnement. Ce choc a entraîné un important transfert de richesse hors de l’Europe (Graphique 1.2), qui a continué d’entamer la croissance économique jusqu’au troisième trimestre, malgré la baisse des importations énergétiques et le recul progressif des prix de l’énergie.
L’économie de l’UE a pu contenir l’effet négatif de la guerre en Ukraine et de la flambée des prix de l’énergie grâce aux mesures coordonnées prises à temps par les pouvoirs publics. Ces mesures ont conduit à une rapide diversification de l’approvisionnement et à une diminution assez importante de la consommation de gaz. La nette détérioration des termes de l’échange en 2021 et 2022 a été plus ample dans l’UE que dans nombre d’économies avancées. Les mesures prises au niveau de l’UE et au plan national ont aidé à renforcer la résilience et à atténuer les effets négatifs de cette dégradation sur le revenu des ménages et les capacités productives. Le reflux progressif des prix de l’énergie a récemment contribué à annuler le choc négatif des termes de l’échange et a réduit les tensions sur les coûts de production.
Sur le plan de la reprise, les économies européennes sont à la traîne d’autres régions (Graphique 1.3). La croissance du PIB a reflué à 3.5 % en 2022 dans l’UE et dans la zone euro, après le rebond consécutif à la pandémie qui avait porté la croissance à plus de 5 % en 2021. La consommation privée continue de faire preuve de résilience, à la faveur d’une amélioration constante de la situation de l’emploi, d’une nouvelle baisse du taux d’épargne et des mesures de soutien budgétaire destinées à atténuer la crise énergétique. Les dépenses de consommation de services ont continué d’augmenter et la consommation de biens durables s’est nettement accrue au second semestre de 2022, signe de la diminution des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement. Jusqu’à présent, la hausse des taux d’intérêt et le niveau d’incertitude élevé ont eu des effets limités sur la formation brute de capital fixe. La contribution de la formation brute de capital fixe à la croissance du PIB a été renforcée par une amélioration de la balance commerciale attribuable au récent recul des prix de l’énergie.
Cette reprise relativement lente tient au choc négatif des termes de l’échange dû à la guerre en Ukraine, ainsi qu’à l’atonie de la consommation privée pendant la majeure partie de la pandémie et à la faiblesse de l’investissement, deux tendances déjà observées avant la guerre. Ainsi qu’il était évoqué dans l’Étude économique de l’OCDE de 2021 consacrée à l’Union européenne (OCDE, 2021[1]), la résurgence de la pandémie à l’automne de 2020 et une nouvelle vague de contaminations durant les premiers mois de 2021 ont amené les pays de l’UE à imposer de nouvelles mesures d’endiguement, lesquelles ont retardé encore la reprise (Graphique 1.4). De même, la faiblesse de l’investissement dans la zone euro peut s’expliquer par la forte chute de l’investissement pendant la première vague de la pandémie de COVID-19, qui a été suivie d’un lent redressement, bien que cette dynamique soit imputable dans une large mesure aux données sur l’investissement relatives à l’Irlande (Graphique 1.5).
La hausse des prix de l’énergie et des produits alimentaires a alimenté l’inflation. Le choc négatif des termes de l’échange, conjugué à la fragmentation des chaînes d’approvisionnement mondiales consécutive à la pandémie, a accentué les tensions sur les prix. Afin de s’acquitter de son mandat de maintien de la stabilité des prix et d’empêcher un désancrage des anticipations d’inflation, la BCE a accéléré le durcissement de sa politique monétaire en juillet 2022, avec la création de l’instrument de protection de la transmission (IPT), relevant ses taux directeurs de 400 points de base en moins de onze mois. Il se peut toutefois que le resserrement monétaire ait été enclenché trop tardivement (Darvas et Martins, 2022[2]). L’augmentation correspondante des taux d’intérêt débiteurs et le durcissement des critères d’octroi de prêts se sont traduits par un ralentissement de l’offre de crédit aux ménages et aux entreprises, ce qui a encore freiné la reprise et aggravé les facteurs de vulnérabilité financière déjà existants (Graphique 1.6).
Le redressement du marché du travail s’est poursuivi en 2022, l’emploi ayant retrouvé son niveau antérieur à la pandémie ; la situation varie toutefois considérablement d’un secteur à l’autre. Le sous-emploi de la main-d’œuvre a sensiblement diminué dans le secteur des technologies de l’information et de la communication et dans celui de la construction, tandis que l’emploi dans le secteur manufacturier et dans certains secteurs de services demeurait inférieur à son niveau d’avant la pandémie. Les tensions observées sur le marché du travail transparaissent dans le taux de chômage, qui s’établit à un niveau historiquement bas, dans l’UE comme dans la zone euro, alors que le taux d’emplois vacants n’a jamais été aussi élevé (Graphique 1.7). Les indicateurs de la croissance des salaires se sont redressés aux troisième et quatrième trimestres de 2022, la plus forte progression en rythme annuel (soit 3.9 %) ayant été enregistrée dans le secteur des services. Compte tenu de la persistance des pénuries de main-d’œuvre dans de nombreux pays, le marché du travail devrait rester tendu. La croissance des salaires nominaux devrait s’accélérer, dans la mesure où les efforts accrus déployés dans le cadre des négociations salariales pour obtenir une compensation de la récente inflation sont susceptibles d’exercer des tensions à la hausse sur les rémunérations. La part de la valeur ajoutée représentée par les salaires et les marges bénéficiaires paraissent proches de leurs moyennes historiques, mais la décomposition du déflateur du PIB laisse entrevoir une augmentation globale des bénéfices unitaires (Graphique 1.8). Bien qu’une pleine compensation de la perte du pouvoir d’achat risque de désancrer les anticipations d’inflation, la hausse des bénéfices unitaires montre que les salaires peuvent encore progresser dans une certaine mesure sans effet inflationniste.
Après avoir été excédentaire pendant une longue période, le solde de la balance courante de la zone euro s’est nettement détérioré, essentiellement du fait de la cherté des importations d’énergie (Graphique 1.9). Par ailleurs, la forte variabilité du niveau de dépendance énergétique et des besoins en énergie a entraîné des divergences dans la dynamique de la balance courante, ce qui a accru les risques de déséquilibres extérieurs dans certains pays (Commission européenne, 2022[3]).
La riposte vigoureuse des pouvoirs publics a permis d’atténuer les conséquences de la crise énergétique
La crise énergétique s’est atténuée en 2023, à la faveur d’une offre plus importante que prévu et d’une demande moins forte qu’attendu. Les entreprises européennes ont fait preuve de résilience durant la crise liée aux prix de l’énergie. La persistance de prix élevés de l’énergie ayant favorisé les changements de combustibles et les gains d’efficacité énergétique, nombre d’entreprises sont parvenues à réduire sensiblement leur consommation de gaz, tout en maintenant un niveau de production élevé. Ainsi, en Allemagne, où environ 60 % des entreprises industrielles utilisent du gaz naturel, 75 % des entreprises tributaires du gaz ont été en mesure de réduire leur consommation sans restreindre leur production, et quelque 40 % des entreprises ont indiqué pouvoir encore abaisser leur consommation (Pittel et Schultz, 2022[4]). La douceur des conditions météorologiques a en outre réduit les besoins de chauffage, ce qui a permis de maintenir les niveaux des stocks 20 % au-dessus de leur moyenne sur longue période à la fin 2022. Du fait de ces évolutions favorables, les prix du gaz et du pétrole ont considérablement diminué (Graphique 1.10). Une éventuelle interdiction durable des importations de gaz russe paraît en outre gérable, dans la mesure où l’intégration des pays européens sur le marché mondial du gaz naturel liquéfié (GNL) progresse (Albrizio et al., 2022[5]). En cas d’absence de gaz russe, l’adhésion au plan de réduction volontaire de la demande de gaz de 15 % contribuerait au remplissage des installations de stockage l’hiver prochain.
L’ajustement opéré pendant la crise énergétique a été facilité par les mesures adaptées prises par les pouvoirs publics à l’échelle de l’UE, notamment en vue d’accroître l’offre et de réduire la demande. Outre les mesures à court terme axées sur l’atténuation des tensions sur les marchés du gaz naturel (Encadré 1.1), la Commission européenne a proposé des mesures concernant d’autres sources d’énergie. Parmi celles-ci figurent le plafonnement des recettes excédentaires résultant de la production d’électricité, un objectif de réduction obligatoire de la demande pendant les heures de pointe et une contribution de solidarité temporaire visant les entreprises liées aux énergies fossiles (Commission européenne, 2022[3]). Ainsi qu’il est expliqué en détail au chapitre 2, certaines de ces mesures ne peuvent pas être suffisamment ciblées ou réduisent les incitations aux économies d’énergie et ne devraient pas être mises en œuvre, du moins pas sous la forme actuellement proposée.
L’UE devrait s’abstenir de mettre en place des mécanismes de plafonnement des prix excessivement généreux, qui devraient, en tout état de cause, être soigneusement conçus afin de réduire autant que possible leurs effets négatifs sur les économies d’énergie. Comme indiqué au chapitre 2, le plafonnement des prix de gros du gaz à l’échelle de l’UE fait partie des mesures prises pour atténuer les effets du niveau élevé des prix de l’énergie. Ce dispositif présente toutefois plusieurs inconvénients. Il pourrait mettre en péril le fonctionnement du marché intérieur de l’énergie et réduire les importations de gaz dans l’UE. Un plafonnement des prix est en outre incompatible avec le système d’échange de quotas d’émission, qui vise à augmenter le coût de l’énergie pour encourager l’investissement dans les énergies renouvelables. Il est important de noter qu’il n’est pas vraiment possible de cibler la réglementation des prix et qu’une telle mesure risque donc d’affaiblir les incitations aux économies d’énergie, ce qui va à l’encontre des efforts déployés à l’échelle de l’UE pour améliorer l’efficacité énergétique.
L’achat commun de gaz est une autre mesure proposée qui consiste à tirer parti du pouvoir d’achat collectif de l’UE en tant que grand importateur de gaz et à empêcher que les entreprises et les pays ne se livrent à des surenchères mutuelles et ne fassent ainsi grimper les prix du gaz. La solution proposée semble toutefois irréalisable d’un point de vue pratique et doit être améliorée (Barnes, 2022[6]). Étant donné que la participation au processus d’agrégation de la demande est obligatoire pour des volumes équivalant à au moins 15 % de l’objectif de remplissage des installations de stockage de gaz (voir plus haut) mais que la participation aux achats communs reste facultative, la quantité de gaz qui sera achetée dans le cadre de ce dispositif demeure incertaine. Il se peut donc que cette mesure ait un effet limité. D’après les estimations de la Commission européenne, le volume maximal de gaz devant être inclus dans le processus d’agrégation de la demande est d’environ 13.5 milliards de m3 (Commission européenne, 2022[7]), soit moins de 4 % de la consommation annuelle totale de gaz de l’UE, qui est supérieure à 400 milliards de m3. Par ailleurs, le mécanisme d’échange de gaz dénommé « Title Transfer Facility » (TTF) constitue un marché de gros opérationnel qui représente déjà de fait le pouvoir d’achat de l’UE. L’outil informatique d’achat commun convenu en décembre 2022 semble, au contraire, faire double emploi avec le rôle des agrégateurs de GNL actuels, tels que les sociétés de négoce, les compagnies pétrolières et gazières, ainsi que les entreprises européennes de services publics qui ont signé des contrats d’achat de GNL à long terme avec des producteurs. En outre, les petits acheteurs, parfois considérés comme les bénéficiaires du dispositif d’achat commun, peuvent déjà conclure des contrats de plus petite taille sur le TTF, et les prix actuels du marché tels qu’ils ressortent des transactions réalisées sur le TTF permettent de fait d’évaluer la demande agrégée. De plus, le nouvel outil d’agrégation de la demande nécessite une lourde évaluation des effets négatifs que les consortiums d’achat pourraient avoir sur la concurrence et impose de larges obligations au secteur gazier en matière de notification, ce qui peut s’avérer peu attrayant aux yeux des grandes entreprises (Hancher et Levitt, 2023[8]).
Encadré 1.1. Mesures prises par l’UE pour atténuer les tensions sur les marchés du gaz naturel
Parallèlement aux mesures structurelles à plus long terme prévues dans le cadre du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » et du plan REPowerEU (chapitre 2), d’autres mesures à court terme ont été prises pour renforcer la résilience des marchés européens du gaz :
Obligation de stockage d’un niveau minimal de gaz : obligation de remplir les réservoirs de gaz à hauteur de 80 % de leur capacité de stockage d’ici à novembre 2022 et à 90 % avant chaque hiver suivant. Plusieurs États membres de l’UE ont adopté une réglementation plus stricte, visant des objectifs de remplissage plus élevés.
Règlement relatif à des mesures coordonnées de réduction de la demande de gaz : réduction volontaire de la demande de gaz entre août 2022 et mars 2024 de 15 % par rapport à la consommation moyenne au cours des cinq années précédentes. L’objectif de réduction pourrait prendre un caractère obligatoire en cas de déclaration d’une alerte de l’Union.
Diplomatie énergétique : l’UE a intensifié ses activités d’ouverture internationale en vue de renforcer ses partenariats énergétiques avec les principaux fournisseurs de gaz naturel et de gaz naturel liquéfié (GNL), dont l’Algérie, l’Azerbaïdjan, les États-Unis et la Norvège.
Dispositif d’achat commun de gaz : adopté en décembre 2022, il facilitera la coordination des achats de gaz à l’échelon de l’UE selon un processus en deux étapes (Règlement 2022/2576). La première étape nécessite une agrégation de la demande de volumes de gaz équivalents à 15 % du niveau requis pour remplir les installations de stockage d’un pays à hauteur de 90 % de leur capacité, et la seconde consiste en la participation volontaire aux achats communs de gaz.
Renforcement de la solidarité : en décembre 2022, le Conseil de l’UE a adopté de nouvelles règles de partage du gaz naturel entre les pays de l’UE en cas d’urgence. Ces règles ne s’appliqueront que si les États membres n’ont pas conclu d’accords de solidarité bilatéraux spécifiques.
Nouvelles unités flottantes de stockage et de regazéification et extension des terminaux de regazéification existants : grâce à ces mesures, la capacité de regazéification dont disposera l’UE en 2023 sera supérieure de 25 % à celle de 2021, ce qui représente une augmentation d’environ 40 milliards de m3 par an.
Mécanisme de correction du marché (plafonnement des prix de gros du gaz) : les ministres de l’Énergie des pays de l’UE sont parvenus à un accord politique sur un règlement relatif à un mécanisme temporaire qui s’appliquera pendant un an à compter du 15 février 2023. Ce mécanisme établit un plafond de sécurité pour les prix des instruments dérivés TTF (Title Transfer Facility) à expiration la plus proche (front-month) et sera automatiquement activé si le prix de l’instrument dérivé TTF à expiration la plus proche dépasse 180 EUR/MWh pendant trois jours ouvrables ou si le prix de l’instrument dérivé TTF est supérieur de 35 EUR au prix de référence des contrats de GNL et autres contrats sur les marchés mondiaux au cours des trois mêmes jours ouvrables. L’Agence européenne de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) a été chargée de surveiller les événements de correction du marché et de publier un avis indiquant la survenue d’un tel événement.
Source : Agence internationale de l’énergie (2023[9]).
La croissance ralentira en 2023 puis se redressera progressivement en 2024
Même si la bonne tenue des marchés du travail et la baisse de l’inflation globale soutiendront les revenus réels et la consommation privée, la croissance dans la zone euro devrait refluer à 0.9 % en 2023, avant de se redresser progressivement en 2024. Les retombées positives de la baisse des prix de l’énergie et du recul de l’inflation devraient contribuer à améliorer graduellement la dynamique de croissance et porter la croissance annuelle moyenne à 1.5 % en 2024 (Tableau 1.1). Dans l’Union européenne, la croissance suivra une trajectoire comparable et rebondira en 2024 pour s’établir à 1.5 % en glissement annuel, à la faveur d’une consommation privée plus vigoureuse (Tableau 1.2).
L’inflation globale mesurée par les prix à la consommation devrait marquer le pas, tandis que l’inflation sous-jacente devrait persister. Compte tenu de l’envolée des prix de l’énergie en 2022, qui continue de se répercuter sur l’ensemble de l’économie, et de l’enclenchement plus tardif qu’aux États-Unis du resserrement de la politique monétaire, l’inflation globale et l’inflation sous-jacente dans la zone euro devraient rester durablement supérieures à l’objectif. Après avoir atteint 8.3 % en 2022, l’inflation globale annuelle dans la zone euro devrait tomber à 5.8% en 2023 et rester supérieure à 3 % en 2024. L’inflation sous-jacente dans la zone euro, qui n’a cessé d’augmenter tout au long de l’année 2022, devrait refluer à 5.4 % en 2023, puis descendre à 3.6 % en 2024.
Tableau 1.1. Indicateurs et prévisions macroéconomiques pour la zone euro
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023¹ |
2024¹ |
---|---|---|---|---|---|---|
|
Prix courants (milliards EUR) |
Variation annuelle en pourcentage, en volume (aux prix de 2015) |
||||
Produit intérieur brut (PIB) |
11 956.4 |
-6.2 |
5.5 |
3.5 |
0.9 |
1.5 |
Consommation privée |
6363.3 |
-7.8 |
3.7 |
4.4 |
0.2 |
1.5 |
Consommation publique |
2450.2 |
0.9 |
4.4 |
1.3 |
-0.2 |
0.9 |
Formation brute de capital fixe |
2 653.4 |
-6.2 |
3.6 |
3.7 |
0.6 |
1.4 |
Logement |
631.3 |
-3.3 |
7.8 |
1.4 |
. . |
. . |
Demande intérieure finale |
11 466.9 |
-5.6 |
3.8 |
3.5 |
0.2 |
1.4 |
Variation des stocks² |
. . |
-0.3 |
0.3 |
0.3 |
-0.1 |
0.0 |
Demande intérieure totale |
11 551.1 |
-5.8 |
4.1 |
3.8 |
0.0 |
1.4 |
Exportations de biens et de services |
5 738.4 |
-9.4 |
11.1 |
7.3 |
2.1 |
2.9 |
Importations de biens et de services |
5 333.0 |
-8.8 |
8.8 |
8.3 |
0.8 |
2.7 |
Solde extérieur² |
405.4 |
-0.6 |
1.4 |
-0.2 |
0.7 |
0.2 |
Pour mémoire |
|
|
|
|
|
|
PIB potentiel |
1.6 |
1.6 |
1.4 |
1.2 |
1.1 |
|
Écart de production (en % du PIB potentiel) |
-6.4 |
-3.0 |
-1.0 |
-1.3 |
-1.0 |
|
Emploi |
-1.5 |
1.5 |
2.8 |
1.1 |
0.5 |
|
Taux de chômage (% de la population active) |
7.9 |
7.7 |
6.7 |
6.7 |
6.6 |
|
Déflateur du PIB |
1.9 |
2.1 |
4.6 |
5.7 |
3.0 |
|
Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) |
0.3 |
2.5 |
8.3 |
5.8 |
3.2 |
|
IPCH sous-jacent³ |
0.7 |
1.5 |
4.0 |
5.4 |
3.6 |
|
Taux d’épargne des ménages, net (% du revenu disponible) |
13.6 |
11.5 |
7.7¹ |
7.4 |
6.7 |
|
Solde de la balance courante (% du PIB) |
2.6 |
4.2 |
1.2 |
2.4 |
2.6 |
|
Solde budgétaire des administrations publiques (% du PIB) |
-7.1 |
-5.3 |
-3.7 |
-2.9 |
-2.2 |
|
Solde budgétaire sous-jacent des administrations publiques (% du PIB potentiel) |
-2.9 |
-3.5 |
-3.0 |
-2.4 |
-2.1 |
|
Solde budgétaire primaire sous-jacent des administrations publiques (% du PIB potentiel) |
-1.7 |
-2.3 |
-1.5 |
-1.0 |
-0.5 |
|
Dette des administrations publiques, au sens de Maastricht (% du PIB) |
99.3 |
97.3 |
93.2 |
92.3 |
92.0 |
|
Dette nette des administrations publiques (% du PIB) |
75.9 |
70.8 |
57.0 |
56.4 |
56.2 |
|
Taux du marché monétaire à 3 mois, moyenne |
-0.4 |
-0.5 |
0.3 |
3.2 |
3.4 |
|
Rendement des obligations d’État à 10 ans, moyenne |
0.0 |
0.0 |
1.8 |
3.3 |
3.7 |
Note : Les données se rapportent aux pays de la zone euro qui sont également membres de l’OCDE (soit 17 pays).
1. Estimations de l’OCDE.
2. Contribution aux variations du PIB réel.
3. Indice des prix à la consommation hors énergie, alimentation, alcool et tabac.
Source : OCDE, Perspectives économiques de l’OCDE, n° 113 (base de données).
Les risques de divergence par rapport aux prévisions sont orientés à la baisse (Tableau 1.3). Les perturbations causées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie risquent de continuer à peser sur la production mondiale, du fait des incertitudes, des risques persistants pour la sécurité alimentaire et énergétique, ainsi que des ajustements en cours sur les marchés des matières premières à mesure que les effets des plafonnements de prix et des embargos sur les produits énergétiques russes produisent pleinement leurs effets. Le risque de graves pénuries d’énergie durant l’hiver 2023-24 s’est atténué, mais il n’a pas disparu. En 2023, les approvisionnements en provenance de Russie seront certainement minimes par rapport aux volumes importés durant les premiers mois de 2022, et le rebond probable de la demande chinoise va intensifier la concurrence pour une offre mondiale de GNL déjà tendue. Ces facteurs sont susceptibles de tirer encore vers le haut les prix de l’énergie, entraînant à nouveau une flambée des prix à la consommation, ainsi que de nouvelles graves perturbations économiques. Des risques de hausses de prix subsistent également sur les marchés pétroliers, compte tenu des récentes baisses de la production dans les pays exportateurs de pétrole et de l’ampleur des incertitudes concernant la manière dont l’incidence des sanctions occidentales frappant le pétrole et les produits pétroliers russes affectera la demande mondiale.
Tableau 1.2. Indicateurs et prévisions macroéconomiques pour l’Union européenne
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023¹ |
2024¹ |
---|---|---|---|---|---|---|
|
Prix courants (milliards EUR) |
Variation annuelle en pourcentage, en volume (aux prix de 2015) |
||||
Produit intérieur brut (PIB) |
17 856.4 |
-5.9 |
5.6 |
3.6 |
0.9 |
1.5 |
Consommation privée |
9 501.4 |
-7.2 |
4.1 |
4.1 |
-0.1 |
1.6 |
Consommation publique |
3 645.8 |
1.0 |
4.2 |
1.0 |
-0.2 |
1.1 |
Formation brute de capital fixe |
3 944.3 |
-5.5 |
3.9 |
3.9 |
0.6 |
1.4 |
Demande intérieure finale |
17 090.1 |
-5.1 |
4.1 |
3.3 |
0.1 |
1.4 |
Variation des stocks² |
. . |
-0.4 |
0.7 |
0.5 |
. . |
. . |
Demande intérieure totale |
17 225.7 |
-5.4 |
4.8 |
3.8 |
-0.1 |
1.4 |
Exportations de biens et de services |
8 872.3 |
-8.8 |
11.0 |
7.5 |
2.4 |
3.0 |
Importations de biens et de services |
8 243.5 |
-8.2 |
9.9 |
8.2 |
0.9 |
2.7 |
Solde extérieur² |
. . |
-0.6 |
0.9 |
0.0 |
. . |
. . |
Pour mémoire |
|
|
|
|
|
|
PIB potentiel |
1.7 |
1.7 |
1.6 |
1.4 |
1.3 |
|
Écart de production (en % du PIB potentiel) |
-6.0 |
-2.6 |
-0.6 |
-1.2 |
-0.9 |
|
Emploi |
-1.3 |
1.5 |
2.4 |
0.8 |
0.4 |
|
Taux de chômage (% de la population active) |
7.3 |
7.1 |
6.2 |
6.3 |
6.2 |
|
Déflateur du PIB |
2.2 |
2.5 |
5.4 |
6.2 |
3.2 |
|
Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) |
0.6 |
2.8 |
9.1 |
6.7 |
3.4 |
|
IPCH sous-jacent³ |
1.0 |
1.7 |
4.7 |
6.0 |
3.7 |
|
Taux d’épargne des ménages, net (% du revenu disponible) |
13.0 |
10.6 |
7.1¹ |
6.9 |
6.3 |
|
Solde de la balance courante (% du PIB) |
2.8 |
4.0 |
1.2 |
2.4 |
2.6 |
|
Solde budgétaire des administrations publiques (% du PIB) |
-6.9 |
-4.9 |
-3.5 |
-2.9 |
-2.3 |
|
Solde budgétaire sous-jacent des administrations publiques (% du PIB potentiel) |
-2.9 |
-3.3 |
-3.1 |
-2.6 |
-2.2 |
|
Solde budgétaire primaire sous-jacent des administrations publiques (% du PIB potentiel) |
-1.7 |
-2.1 |
-1.6 |
-1.1 |
-0.6 |
|
Dette des administrations publiques, au sens de Maastricht (% du PIB) |
93.5 |
91.3 |
87.4 |
86.9 |
86.7 |
|
Dette nette des administrations publiques (% du PIB) |
69.5 |
64.3 |
52.0 |
51.8 |
51.7 |
|
Taux du marché monétaire à 3 mois, moyenne |
-0.3 |
-0.4 |
1.0 |
3.8 |
3.9 |
Note : Les données se rapportent aux pays de l’Union européenne qui sont également membres de l’OCDE (soit 22 pays).
1. Estimations de l’OCDE.
2. Contribution aux variations du PIB réel.
3. Indice des prix à la consommation hors énergie, alimentation, alcool et tabac.
Source : OCDE, Perspectives économiques de l’OCDE, n° 113 (base de données).
Les tensions commerciales restent une source de préoccupation. Le conflit entre les États-Unis et la Chine se poursuit et la valeur cumulée des importations de marchandises soumises à des restrictions imposées par les économies du G20 s’est accrue, sachant que certains pays ont aussi instauré de nouvelles restrictions aux exportations de produits alimentaires, de nourriture animale et d’engrais. Les risques à moyen terme pesant sur la croissance et l’inflation liés à la fragmentation actuelle des chaînes de valeur mondiales s’accentuent également.
L’ampleur et la durée du resserrement monétaire que les autorités doivent opérer pour faire baisser durablement l’inflation sont incertaines. En cas de persistance des tensions sur les prix ou d’une dérive à la hausse des anticipations d’inflation, la BCE pourrait être contrainte de maintenir ses taux directeurs à un niveau élevé pendant une période plus longue, ce qui freinerait encore la croissance et risquerait de mettre au jour des vulnérabilités du secteur financier. Les établissements bancaires et non bancaires pourraient subir des pertes liées à des défauts de remboursement de prêts ou à des expositions à l’immobilier résidentiel et commercial qui pourraient freiner davantage l’activité économique. À l’inverse, une résolution durable et rapide de la guerre en Ukraine pourrait atténuer les tensions sur les prix de l’énergie et des produits alimentaires. Une reprise vigoureuse de l’activité en Chine pourrait également tirer la demande extérieure vers le haut.
Tableau 1.3. Événements susceptibles de détériorer sensiblement les perspectives
Facteur de vulnérabilité |
Conséquences possibles |
---|---|
La crise énergétique pourrait être ravivée par une hausse de la demande chinoise de GNL ou par des effets fortuits des sanctions occidentales frappant le pétrole russe sur l’offre mondiale. |
Un nouveau choc lié aux prix de l’énergie pourrait entraîner à nouveau une flambée des prix à la consommation, qui nécessiterait un nouveau tour de vis monétaire et freinerait la croissance. |
Les tensions commerciales pourraient continuer de s’accentuer, s’accompagnant d’un élargissement de la portée des restrictions à l’exportation. |
Une fragmentation accrue des chaînes d’approvisionnement mondiales et de nouveaux obstacles aux échanges pèseraient sur la croissance et alimenteraient les tensions inflationnistes. |
Les taux d’intérêt devront peut-être rester à un niveau élevé pendant une période plus longue pour réduire durablement l’inflation. |
Les pertes des établissements bancaires et non bancaires liées à des défauts de remboursement de prêts et à des expositions à l’immobilier pourraient nécessiter des abandons de créances, ce qui limiterait encore le crédit, freinerait la croissance et mettrait au jour des vulnérabilités déjà existantes du secteur financier. |
L’orientation de la politique monétaire est globalement appropriée, mais les risques financiers augmentent
Dans la zone euro, l’inflation globale reste tirée dans une large mesure par des facteurs liés à l’offre (Graphique 1.11). Malgré une hausse des prix de l’énergie plus faible que prévu à la fin de 2022, l’alimentation et l’énergie demeurent les principaux facteurs de contribution à l’inflation globale dans la zone euro. Parallèlement, l’inflation sous-jacente a continué d’augmenter. La proportion de composantes hors alimentation et énergie enregistrant une hausse mensuelle des prix supérieure au niveau tendanciel mensuel observé habituellement s’est accrue en décembre pour s’établir largement au-dessus de 80 %, soit le pourcentage le plus élevé mesuré en 2022 (Commission européenne, 2023[10]). Il n’est toutefois pas simple de déterminer si la hausse de l’inflation est tirée par des facteurs liés à la demande ou à l’offre, sachant que les variations de prix tiennent, dans la plupart des cas, à une combinaison de ces deux types de facteurs, du moins dans les économies de l’OCDE (Barnard et Koh, 2023[11]). La BCE parvient aussi à la conclusion que l’envolée initiale de l’inflation sous-jacente dans la zone euro a été essentiellement induite par l’offre, mais que les facteurs liés à l’offre et à la demande ont joué des rôles assez similaires au cours des derniers mois (Gonçalves et Koester, 2022[12]).
La BCE devrait conserver son approche fondée sur les données
Une fois prise en compte la part de la flambée d’inflation imputable à la demande, l’approche traditionnelle des autorités monétaires consiste à « faire abstraction » des chocs d’offre dont l’effet sur la production potentielle n’est pas jugé durable (Bodenstein, Erceg et Guerrieri, 2008[13]). Les chocs d’offre négatifs liés au niveau élevé des prix de l’énergie et à la guerre pourraient toutefois s’avérer persistants, voire irréversibles, entraînant une réduction durable de la production potentielle. Dans un tel contexte, un resserrement de la politique monétaire s’impose pour ajuster la demande en fonction des capacités de production durablement plus faibles. En outre, et malgré les effets sur la production potentielle, les autorités monétaires devraient intervenir de manière énergique en cas de chocs d’offre susceptibles de désancrer les anticipations d’inflation (Brainard, 2022[14]). Bien que simple en théorie, cette approche est difficile à mettre en œuvre, dans la mesure où il est difficile d’évaluer la production potentielle en temps réel, d’autant plus que l’incertitude est forte et qu’une réaction plus modérée des autorités peut se justifier (Orphanides, 2003[15]).
Dans le contexte actuel, la nécessité d’ancrer les anticipations d’inflation peut être plus impérieuse que les considérations relatives aux effets négatifs sur la production. Lorsque l’inflation est déjà élevée, toute prolongation de la période de forte inflation accroît le risque que les anticipations d’inflation s’ajustent à la hausse, mettant en péril la stabilité des prix à moyen terme (Schnabel, 2022[16]). Bien que les indicateurs fondés sur le marché laissent penser que les anticipations d’inflation restent ancrées, ils semblent signaler une période durable d’inflation supérieure à l’objectif fixé (Graphique 1.12). Les anticipations d’inflation à court terme fondées sur des enquêtes brossent un tableau tout aussi inquiétant. Les anticipations d’inflation des ménages de la zone euro sont orientées à la hausse depuis plusieurs trimestres et celles tirées des enquêtes menées auprès des prévisionnistes professionnels restent tout aussi élevées (Graphique 1.13).
Les effets indirects de l’inflation doivent être réduits autant que possible, car ils risqueraient de prolonger la coûteuse période de désinflation et de déclencher une spirale salaires-prix. À en juger par le passé, les risques semblent limités. La comparaison de 22 épisodes antérieurs comparables au contexte actuel, c’est-à-dire caractérisés par une hausse de l’inflation, une croissance positive des salaires nominaux, une diminution des salaires réels et une baisse du chômage, montre que ces épisodes n’ont, en moyenne, pas donné lieu à une spirale salaires-prix (FMI, 2022[17]). Au contraire, l’inflation a progressivement reflué et le taux de chômage s’est stabilisé à la suite de ces épisodes, principalement sous l’effet du resserrement de la politique monétaire, qui a permis de maîtriser l’inflation. L’épisode consécutif à la pandémie de COVID-19 ne fournit en outre que peu d’éléments laissant penser que la plupart des économies avancées pourraient entrer dans une spirale salaires-prix, tandis que les marges bénéficiaires peuvent avoir augmenté dans certains pays. La corrélation entre la croissance des salaires et l’inflation s’est affaiblie au cours des dernières décennies et d’autres facteurs institutionnels, tels que le pouvoir de fixation des prix important des entreprises, l’effritement du pouvoir de négociation collective et la baisse du taux de syndicalisation, semblent limiter le risque de développement d’une spirale salaires-prix (Boissay et al., 2022[18]).
Il convient toutefois d’émettre plusieurs réserves importantes appelant à continuer de faire preuve de vigilance. Il se peut que les observations faites à partir de données antérieures ne soient pas représentatives de la situation actuelle, notamment si le choc lié au COVID-19 a provoqué une rupture structurelle importante. La variation, selon les pays et dans le temps, de facteurs structurels, tels que le taux de syndicalisation, ainsi que la couverture et la centralisation des négociations salariales, peut influer sur les processus de fixation des salaires. Les pouvoirs publics devront peut-être réagir de manière énergique aux chocs perturbant l’offre, en particulier si l’inflation est élevée et augmente (FMI, 2022[17]). Le risque de spirale salaires-prix dépend également de la manière dont les entreprises et les travailleurs définissent leurs attentes en matière de salaires et de prix. En cas d’anticipations plus adaptatives et rétrospectives, les autorités monétaires devront intervenir de manière plus musclée pour réduire les risques de désancrage des anticipations. Enfin, la stabilité des salaires nominaux à la suite d’un choc inflationniste n’est pas garantie. Les tensions salariales augmentent dans l’ensemble de la zone euro, en particulier dans les pays qui connaissent des pénuries persistantes de main-d’œuvre (l’Allemagne, par exemple) ou qui pratiquent l’indexation semi-automatique des salaires (comme la Belgique et le Luxembourg). La forte inflation a eu un impact tangible sur les derniers accords salariaux conclus en Allemagne (Deutsche Bundesbank, 2023[19]) et devrait se traduire en Belgique par une croissance annuelle des coûts horaires de main-d’œuvre dans le secteur privé de 8.5 % en 2023 (BNB, 2022[20]).
Bien que la balance des risques entourant les perspectives soit devenue plus équilibrée, les risques liés à l’inflation demeurent orientés à la hausse. L’inflation globale a cessé d’augmenter, mais l’inflation sous-jacente dans la zone euro continue de progresser et de se généraliser (Graphique 1.14). L’inflation sous-jacente semble persister malgré le durcissement rapide et considérable des conditions financières, ce qui donne à penser que les variations des taux directeurs dans la zone euro se répercutent rapidement sur les conditions de crédit et les rendements des titres d’emprunt émis sur les marchés (Graphique 1.15). Il se peut que cette persistance de l’inflation sous-jacente reflète les anticipations d’un léger ralentissement économique résultant en partie du recul des prix de l’énergie attribuable au remplacement des importations énergétiques en provenance de Russie mené avec succès.
La maîtrise de l’inflation peut en outre occasionner des pertes de production. D’après une analyse des données rétrospectives, tous les épisodes de désinflation importante induite par une banque centrale qui sont survenus après 1950 aux États-Unis, au Canada, en Allemagne ou au Royaume-Uni se sont traduits par un sacrifice économique considérable ou par une récession (Cecchetti et al., 2023[21]). L’analyse du ratio de sacrifice – soit l’augmentation du volant de ressources inutilisées liée à un recul de l’inflation – calculé pour les épisodes de désinflation de grande ampleur survenus aux États-Unis et dans d’autres grandes économies semble indiquer que la désinflation s’accompagne toujours d’une récession, même si les coûts de la désinflation peuvent varier sensiblement d’un épisode à l’autre. La vigueur du marché du travail, caractérisée par un taux de chômage historiquement bas et par un taux d’emplois vacants exceptionnellement élevé, complique encore la désinflation (Graphique 1.16). Cette situation donne à penser que l’activité globale est vigoureuse, du moins compte tenu des contraintes qui pèsent actuellement sur l’offre, mais que l’appariement entre offres et demandes d’emplois est difficile, en raison à la fois des besoins croissants de redéploiement et d’une moindre efficience du processus d’appariement. Dans la mesure où la politique monétaire ne peut influer sur des facteurs structurels tels que le redéploiement de la main-d’œuvre et l’efficience de l’appariement entre offres et demandes d’emplois, une baisse de l’inflation semble peu probable en l’absence d’une hausse proportionnelle du taux de chômage à court terme (Blanchard, Domash et Summers, 2022[22]). Dans le même temps, la dynamique de la courbe de Beveridge dans l’UE pourrait se révéler plus favorable, compte tenu du recours généralisé aux dispositifs de maintien dans l’emploi durant la pandémie (Lam et Solovyeva, 2023[23]).
La BCE devrait rester déterminée à ramener l’inflation vers son objectif en temps opportun afin d’empêcher que l’inflation, actuellement élevée, ne s’enracine dans les anticipations. Elle devra pour cela faire clairement savoir que les tensions inflationnistes risquent de durer plus longtemps que prévu et que l’orientation de la politique monétaire restera restrictive jusqu’à ce qu’une baisse durable de l’inflation soit constatée. La BCE devra continuer de relever ses taux d’intérêt aussi longtemps que nécessaire pour ramener l’inflation sur une trajectoire viable vers l’objectif de 2 %, ce qui suppose un resserrement plus marqué de sa politique monétaire si l’orientation des politiques budgétaires demeure excessivement accommodante. L’action résolue de la BCE a déjà conduit à une hausse considérable des taux directeurs, qui devrait se poursuivre. L’orientation restrictive de la politique monétaire est une bonne chose. Compte tenu de l’incertitude liée à la vitesse à laquelle les relèvements de taux prendront effet et des retombées potentielles de l’action publique menée dans d’autres pays, une approche soigneusement calibrée à partir des premières données disponibles, est appropriée.
L’inflation a des effets redistributifs, mais ceux-ci dépassent le cadre du mandat de la BCE
Le niveau élevé de l’inflation pèse plus fortement sur les ménages à faible revenu. Le choc négatif mondial sur les prix consécutif à l’agression menée par Russie contre l’Ukraine a eu des effets inflationnistes hétérogènes selon les pays et les catégories de ménages. Les effets ont varié d’un pays à l’autre en fonction de l’importance des importations énergétiques russes dans les besoins énergétiques nationaux et de la disponibilité d’autres sources d’énergie. Les variations observées entre les différentes catégories de ménages tiennent pour leur part aux écarts de consommation entre les ménages à faible revenu et ceux à revenu élevé, à la ventilation des biens et services au sein de chaque catégorie de consommation et à la capacité d’amortissement de la hausse du coût de la vie par l’épargne ou l’emprunt (Causa et al., 2022[24])
Après avoir été négligeable entre 2011 et 2021, l’écart de taux d’inflation entre le quintile de revenu inférieur et le quintile de revenu supérieur s’est fortement creusé, passant de 0.1 point de pourcentage en septembre 2021 à 1.9 point de pourcentage en septembre 2022 (Osbat et al., 2022[25]). L’effet de l’inflation sur le pouvoir d’achat du ménage moyen a été principalement induit par les prix de l’énergie et des produits alimentaires (Graphique 1.17, partie A). Les ménages à bas revenu et ceux vivant en zone rurale, ainsi que les personnes âgées, ont été, de manière générale, plus touchés par le choc de prix que le ménage moyen, bien que la perte de pouvoir d’achat de ces catégories ait varié selon les pays (Graphique 1.17, parties B, C, D). Avoir un faible revenu est, dans bien des cas, un facteur de vulnérabilité moins important qu’habiter dans un petit village isolé ou être âgé, qui sont deux facteurs de vulnérabilité majeurs. Les dépenses d’énergie varient en effet de façon plus marquée en fonction du lieu de résidence qu’en fonction du niveau de revenu. En revanche, les dépenses énergétiques ne varient pas systématiquement en fonction de l’âge dans tous les pays. Ainsi, en Espagne, les personnes âgées sont moins touchées par la hausse des prix de l’énergie que les personnes d’âge très actif.
Étant donné que seuls les gouvernements ont pour mandat de s’attaquer aux problèmes de redistribution et disposent des outils nécessaires pour le faire (Schnabel, 2022[16]), la politique de la banque centrale ne peut se substituer à une protection sociale et à d’autres formes d’aide budgétaire efficaces. Doter la banque centrale d’un mandat spécifique lié aux inégalités pourrait en outre mettre en péril son indépendance. La BCE devrait donc continuer de se concentrer sur son objectif principal, à savoir le maintien de la stabilité des prix, et, sans préjudice de cet objectif, sur les autres objectifs énoncés dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
Citons l’exemple du rôle de la BCE dans le soutien à la transition écologique. L’atténuation du changement climatique nécessite avant tout une action des pouvoirs publics. Cependant, dans la mesure où son mandat principal de stabilité des prix le permet, la BCE contribue à cet effort en intégrant les questions relatives au changement climatique dans son cadre de politique monétaire (Encadré 1.2). Cet effort d’intégration des considérations relatives au changement climatique est un projet en cours et pourrait nécessiter des ajustements à mesure que la politique monétaire évolue. Ainsi, la BCE modifie son portefeuille d’obligations d’entreprise en ajustant les réinvestissements des titres arrivant à échéance. La réduction en cours des réinvestissements limitera toutefois la capacité de la BCE à décarboner son portefeuille d’obligations d’entreprise et pourrait devoir être remplacée par une autre approche, qui pourrait s’appuyer sur les actions. De même, on s’attend à ce que les mesures limitant la part des actifs négociables émis par des entités ayant une empreinte carbone élevée qui peuvent être apportés en garantie n’aient, dans un premier temps, qu’une faible incidence sur les contreparties de la BCE (Schnabel, 2023[26]).
Encadré 1.2. Verdir les opérations de politique monétaire de la BCE
Les mesures visant à tenir compte du changement climatique dans les opérations de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) sont conformes au programme d’action pour le climat de la BCE et comprennent des règles relatives aux achats d’obligations d’entreprise, au dispositif de garanties, aux exigences de déclaration et à la gestion des risques. Elles ont pour but de réduire le risque financier lié au changement climatique dans le bilan de l’Eurosystème, favoriser la transparence et soutenir la transition écologique de l’économie. Elles sont mises en œuvre sans préjudice de l’objectif principal de la BCE, à savoir le maintien de la stabilité des prix. Les mesures suivantes ont notamment été adoptées :
Avoirs en obligations d’entreprise : en octobre 2022, la BCE a commencé à décarboner progressivement ses avoirs en obligations d’entreprise en orientant ses portefeuilles vers des émetteurs présentant de faibles émissions de gaz à effet de serre, des objectifs ambitieux de réduction des émissions de carbone et des déclarations satisfaisantes en matière de climat. Cette réorientation passera par le réinvestissement des remboursements considérables attendus au cours des années à venir. Par ailleurs, le volume des achats d’obligations d’entreprise continuera de dépendre uniquement de considérations de politique monétaire.
Dispositif de garanties : avant la fin de 2024, la BCE entend limiter la part des actifs émis par des émetteurs ayant une empreinte carbone élevée qui peuvent être apportés en garantie dans le cadre d’emprunts auprès de la BCE. Cette mesure, qui ne s’appliquera dans un premier temps qu’aux instruments de dette négociables émis par des sociétés non financières, réduira les risques financiers liés au climat dans les opérations de crédit de l’Eurosystème. En outre, l’Eurosystème a commencé en 2022 à tenir compte des risques liés au changement climatique lors de ses révisions des décotes – soit la réduction de la valeur des garanties en fonction de leur niveau de risque – appliquées aux obligations d’entreprise.
Exigences de déclaration en matière climatique applicables aux garanties : une fois que la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises sera mise en œuvre, probablement en 2026, la BCE acceptera en garantie de ses opérations de crédit uniquement des actifs négociables et des créances privées d’entreprises et de débiteurs respectant la CSRD. Cette exigence contribuera à l’amélioration des informations publiées et à la production de meilleures données à l’usage des établissements financiers, des investisseurs et de la société civile. Dans la mesure où une proportion importante des garanties admissibles, comme les titres adossés à des actifs et les obligations sécurisées, n’entrent pas dans le champ d’application de la CSRD, la BCE continuera d’encourager une déclaration plus poussée des données liées au climat.
Évaluation et gestion des risques : la BCE continuera de perfectionner ses outils et capacités d’évaluation des risques liés au climat. D’ici la fin de 2024, l’Eurosystème commencera également à utiliser des normes minimales communes précisant les modalités de l’évaluation des risques liés au climat dans les notations de crédit produites par les banques centrales nationales.
Statistiques sur les risques liés au climat et la finance verte : afin de mieux faire connaître les risques liés au climat dans le secteur financier et de mieux surveiller le développement de la finance verte, la BCE a publié, en janvier 2023, une première série d’indicateurs statistiques liés au climat, comprenant des indicateurs relatifs à la finance durable, aux émissions de carbone et aux risques physiques.
L’effet de ces annonces et mesures se fait déjà sentir sur les marchés obligataires. Ainsi, à la suite de l’annonce du programme d’action climatique de la BCE faite à l’issue de l’évaluation stratégique de sa politique monétaire de 2021, le rendement à l’échéance des obligations vertes éligibles aux opérations de politique monétaire de la BCE a diminué par rapport à celui des obligations conventionnelles équivalentes. Les émissions d’obligations vertes par des entreprises domiciliées dans la zone euro ont en outre augmenté.
Source : Banque centrale européenne (2022[27]) ; et Eliet-Doillet et Maino (2022[28]).
Les mesures non conventionnelles devraient être abandonnées progressivement
Après avoir procédé à des relèvements de taux d’intérêt directeurs, qui restent le principal instrument de définition de l’orientation de la politique monétaire, la BCE a également commencé à réduire progressivement et de manière prévisible son portefeuille d’obligations. Le rythme de réduction a été de 15 milliards EUR par mois en moyenne de mars à juin 2023, puis ce mouvement a été suivi par l’arrêt des réinvestissements au titre du programme d’achats d’actifs de la BCE à compter de juillet 2023. Par ailleurs, la souplesse offerte par le programme d’achats d’urgence face à la pandémie, l’instrument de protection de la transmission et les opérations monétaires sur titres permet à la BCE de réagir rapidement à une éventuelle fragmentation des marchés financiers qui entraverait la transmission de la politique monétaire.
Le retrait du soutien monétaire fourni par les achats massifs d’actifs de la BCE pourrait toutefois comporter certains risques. L’expérience de la Réserve fédérale américaine, qui a commencé à réduire ses achats d’actifs en 2017, montre qu’il n’y a pas eu de diminution correspondante du bilan des banques commerciales, notamment des dépôts bancaires et de l’encours de crédit aux entreprises. Une telle situation pourrait rendre le secteur financier plus sensible aux chocs de liquidité potentiels et nécessiter de nouvelles injections de liquidités de la part de la banque centrale, ce qui s’est produit aux États-Unis lors de l’envolée des taux des prises en pension en septembre 2019 et de la ruée vers les liquidités en mars 2020 (Acharya et al., 2022[29]).
Il convient de surveiller étroitement et de gérer les comportements asymétriques des banques face à l’octroi et au retrait d’un soutien monétaire. Il existe différentes raisons pour lesquelles les banques ne réagissent pas de la même façon à un assouplissement quantitatif – qui semble favoriser une hausse des créances sur les liquidités – et à un resserrement quantitatif – qui ne semble pas se traduire par une réduction de ces créances. Il se peut que, contrairement au resserrement quantitatif, l’assouplissement quantitatif entraîne un accroissement des liquidités sur les marchés, mais qu’il ait aussi d’autres effets venant du signal d’assouplissement de la politique monétaire donné par les autorités alors que les taux se situent à leur plancher effectif. Parmi les autres explications possibles figurent l’aléa moral, les banques comptant sur le fait que la banque centrale interviendra de la même façon que par le passé en cas de tarissement de la liquidité du marché, ou encore l’effet involontaire de la réglementation, sachant que de nouvelles règles peuvent permettre de forcer les banques à conserver des réserves, mais rendre moins coûteux le financement de ces réserves par de nouvelles créances sur les liquidités, telles que des lignes de crédit (Acharya et al., 2022[29]). Il convient donc de surveiller l’écart entre les créances totales sur les liquidités et les réserves totales et, si celui-ci est trop élevé, de gérer son niveau de manière contracyclique.
Le rythme souhaitable du resserrement quantitatif de la BCE et les modalités de sortie des mesures non conventionnelles demeurent incertains. Il est possible que le resserrement quantitatif progresse trop lentement. Relever les taux à court terme sans réduire rapidement le bilan de la banque centrale risque d’accroître l’exposition de cette dernière aux taux d’intérêt et d’entraîner ainsi des pertes sur les positions existantes. En l’absence d’une diminution de la demande induite par une réduction du bilan, il pourrait en outre être nécessaire de relever de manière marquée les taux d’intérêt à court terme (Turner, 2022[30]). Afin de réduire l’incertitude et de limiter les hausses de taux d’intérêt, la BCE pourrait prévoir une stratégie quantifiée d’achats d’actifs à moyen terme, ainsi qu’un dispositif d’intervention pour faire face à des variations importantes ou perturbatrices des taux du marché. Les instruments existants, tels que l’instrument de protection de la transmission, qui vise à éviter une dynamique injustifiée des marchés de capitaux qui mettrait en péril la transmission de la politique monétaire, pourraient être complétés par des dispositifs d’intervention permettant de faire face à d’autres chocs potentiels.
La hausse des taux d’intérêt commence à peser sur l’économie
La hausse des taux d’intérêt directeurs a provoqué un réajustement des prix de différentes catégories d’actifs et s’est traduite par des moins-values latentes considérables sur les portefeuilles d’obligations détenus par les établissements financiers. Bien que, dans l’ensemble, les banques bénéficient généralement de la hausse des taux d’intérêt, leur rentabilité augmentant, ce n’est pas forcément le cas de toutes les banques. À la suite du resserrement de la politique monétaire, des tensions sont apparues dans certains pans du secteur bancaire et pourraient s’intensifier à mesure que la politique monétaire continue de se durcir, en particulier chez les intermédiaires financiers non bancaires, tels que les fonds de pension et les assureurs (Garcia Pascual, Natalucci et Piontek, 2023[31]). L’octroi de prêts bancaires a ralenti dans les pays de la zone euro, du fait de la baisse de l’offre et de la demande. Du côté de l’offre, les banques de la zone euro ont procédé à d’importants remboursements anticipés volontaires de prêts obtenus dans le cadre des opérations ciblées de refinancement à plus long terme entre novembre 2022 et février 2023. Le durcissement des critères d’octroi de prêts s’explique en outre par la perception de risques accrus et par la moindre tolérance des banques à l’égard du risque. La demande de prêts des entreprises a diminué en raison du fléchissement de l’investissement en capital fixe, tandis que celle des ménages a fortement chuté dans les pays de la zone euro. La faiblesse de la demande de prêts des ménages tient à la hausse des taux débiteurs, ainsi qu’au recul de la confiance des consommateurs et à la dégradation des perspectives sur le marché du logement (BCE, 2023[32]).
L’augmentation des taux d’intérêt hypothécaires amplifie la vulnérabilité financière des ménages, surtout dans les pays présentant un niveau élevé d’endettement privé et une forte proportion de prêts hypothécaires à taux variable. Les taux débiteurs des prêts hypothécaires octroyés aux ménages ont continué d’augmenter pour se hisser à plus de 3 % par an en janvier 2023, contre 1.33 % l’année précédente, et les consommateurs s’attendent à ce qu’ils progressent encore au cours des 12 prochains mois. La hausse des taux des nouveaux prêts hypothécaires et le tassement des revenus réels ont entraîné une forte baisse de la demande de prêts hypothécaires. Les effets de la hausse des taux d’intérêt sur le secteur du logement n’ont pas fini de s’intensifier et continueront de peser sur la croissance. Les pressions exercées sur la croissance découleront d’effets négatifs sur l’investissement résidentiel, en particulier dans les pays affichant une proportion élevée de prêts à taux variable, et sur la consommation, via une réduction du revenu disponible et du patrimoine résidentiel. Ces évolutions dans le secteur de l’immobilier résidentiel présentent également des risques pour la stabilité financière. Si la proportion de propriétaires ayant souscrit un emprunt hypothécaire est relativement faible dans les grands pays de la zone euro, la proportion de prêts hypothécaires à taux variable a récemment augmenté (Graphique 1.18, partie A). Cette proportion accrue de prêts hypothécaires à taux variable dénote l’exposition grandissante des ménages de la zone euro à la hausse des taux d’intérêt (Graphique 1.18, partie B).
Les prix des logements dans l’UE se sont bien tenus au premier semestre de 2022 mais ont commencé à reculer dans la plupart des pays de l’Union au dernier trimestre de 2022. Ils ont constamment augmenté depuis la crise de 2013, tendance que la pandémie de COVID-19 a encore accélérée (Graphique 1.19, partie A). Dans un grand nombre de pays, les prix des logements se sont sensiblement dissociés des niveaux des loyers (Graphique 1.19, partie B). D’après la méthodologie utilisée par la Commission, ils sont désormais surévalués dans plus de la moitié des pays de la zone euro (Frayne et al., 2022[33]) et une correction plus importante ne peut être exclue, malgré la situation favorable sur le marché du travail et la récente mise en place de mesures macroprudentielles relatives aux emprunteurs dans de nombreux pays (BCE, 2022[34]). Si la hausse des taux d’intérêt risque de réduire la capacité des ménages à rembourser leurs prêts hypothécaires à taux variable, une correction du marché du logement ferait en revanche baisser la valeur des garanties et obligerait les banques à constituer des provisions pour pertes éventuelles. Il convient donc de surveiller attentivement les risques liés à l’immobilier résidentiel. S’il y a lieu, il faudrait y remédier en renforçant les instruments macroprudentiels, notamment en augmentant les coussins de fonds propres et en durcissant encore les mesures visant les emprunteurs (Valderrama, 2023[35]), tout en évitant les effets procycliques.
Dans certains pays, les ménages comme les entreprises sont fortement endettés et donc vulnérables à une hausse des coûts de financement. Le niveau élevé de la dette des sociétés non financières risque de provoquer une vague de faillites. Le nombre de faillites parmi les entreprises de l’UE a constamment augmenté au quatrième trimestre de 2022. Ce bond s’explique en partie par le redémarrage de l’activité des tribunaux après la pandémie et par la suppression ou le démantèlement progressif des mesures de soutien budgétaire (Graphique 1.20). La situation varie selon les pays, mais la plus forte hausse a été observée dans les secteurs de services, tels que l’hébergement et les transports, en partie du fait de la suppression des aides liées à la pandémie. Par ailleurs, les risques conjoncturels liés à la hausse de l’inflation et au durcissement des conditions de financement dans le secteur de l’immobilier commercial se sont accrus, ce qui pourrait avoir des répercussions systémiques sur le système financier et l’économie réelle (CERS, 2023[36]). Les facteurs cycliques sont quant à eux exacerbés par le développement du commerce électronique, par la demande accrue de souplesse dans les espaces de bureaux à louer due à l’essor des modèles de travail mobiles et hybrides, ainsi que par les politiques liées au climat, telles que le durcissement des normes de construction.
Les instruments macroprudentiels peuvent contribuer à renforcer la résilience face aux risques que les expositions à la dette privée font peser sur le secteur financier. La préservation et la constitution de coussins de fonds propres macroprudentiels pourraient étayer la résilience des banques et des autres établissements de crédit en renforçant leur capacité d’absorption des pertes. Les coussins de fonds propres macroprudentiels devraient être utilisés conjointement avec d’autres instruments, tels que des pratiques de gestion prudente des risques, et fixés en fonction des perspectives macrofinancières et de la situation du secteur bancaire propres à chaque pays afin de limiter les effets procycliques (CERS, 2022[37]). Même dans la phase tardive du cycle financier dans laquelle on se trouve actuellement, les pays présentant des déséquilibres macrofinanciers peuvent relever le niveau des coussins de fonds propres macroprudentiels, en tenant compte des niveaux de fonds propres actuels et de la capacité des banques à réaliser des bénéfices (BCE, 2022[34]). Ainsi, la constitution de nouveaux volants de fonds propres mobilisables, comme le coussin de fonds propres contracyclique, peut être souhaitable si les conditions le permettent. Ces coussins peuvent être immédiatement mobilisés en cas d’évolution défavorable de la situation, améliorant la capacité des autorités à soulager le secteur bancaire.
L’intégration du secteur financier doit être renforcée
Globalement, les banques européennes détiennent des actifs de bonne qualité, même si les récentes tensions sur les marchés ont entraîné une forte baisse des cours des actions bancaires, alourdissant le coût des augmentations de capital. La récente détérioration des portefeuilles de prêts des banques laisse entrevoir en outre une augmentation du risque de crédit. Jusqu’à une date récente, la hausse des taux d’intérêt a essentiellement accru la rentabilité à court terme, dénotant une augmentation des marges bénéficiaires et des provisions pour pertes sur prêts encore limitées. La rentabilité des banques pourrait toutefois se dégrader si les turbulences sur les marchés s’intensifient et si les menaces pesant sur la qualité des actifs se traduisent par des besoins accrus de provisionnement et par une hausse de l’encours de prêts non performants (Graphique 1.21). Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les prêts aux entreprises fortement consommatrices d’énergie présentent une plus forte probabilité de défaut que les prêts aux autres entreprises. Compte tenu de la hausse des taux d’intérêt, les banques seront également exposées à un risque de crédit plus élevé du fait de leurs expositions aux marchés de l’immobilier résidentiel, dans la mesure où l’inflation amenuise le revenu disponible réel et l’épargne et affaiblit donc encore la capacité des ménages à assurer le service de leur dette (BCE, 2022[34]).
Les politiques relatives au secteur bancaire doivent remédier aux problèmes qui se posent de longue date et répondre aux nouveaux enjeux, tels que la transformation numérique et la transition écologique. Le secteur présente des faiblesses structurelles, notamment un rapport coût-efficacité médiocre, une faible diversification des recettes et des surcapacités dans certains pans du secteur bancaire. L’accélération de la transformation numérique pourrait contribuer à résoudre certains de ces problèmes, au prix toutefois d’une augmentation des risques liés à la cybersécurité (BCE, 2022[34]). Il semblerait qu’un trop grand nombre d’établissements soient moins rentables que leurs concurrents. Ainsi, en 2019, la part de marché des cinq premières banques américaines s’élevait à 43 % des actifs intérieurs totaux, contre 23 % pour les cinq premières banques de la zone euro (Gabrieli, Marionnet et Sammeth, 2021[38]). La consolidation du secteur bancaire via des fusions transnationales pourrait contribuer à améliorer la rentabilité et à réduire la surcapacité du secteur (overbanking). Contrairement à des fusions nationales, des fusions transnationales pourraient amplifier les effets de la diversification géographique et favoriser l’émergence de grandes banques européennes mieux armées pour faire face à la concurrence internationale. De plus, un secteur bancaire consolidé et plus rentable serait mieux à même de financer la transition vers une économie plus verte et de gérer ses expositions liées au climat.
Le système financier de l’UE reste fortement dominé par les banques et fragmenté entre les différents pays, et cette situation ne devrait guère changer à court ou moyen terme. Si deux piliers de l’union bancaire, le Mécanisme de surveillance unique et le Mécanisme de résolution unique, sont en place, le troisième – un dispositif commun de protection des dépôts – n’est pas encore achevé. Les mesures supplémentaires à prendre immédiatement en vue de l’instauration de l’union bancaire englobent le réexamen du cadre pour la gestion des crises bancaires et la garantie des dépôts (Eurogroupe, 2022[39]). La récente proposition de réformer ce cadre, formulée par la Commission (Commission européenne, 2023[40]), constitue donc un pas dans la bonne direction. Il serait en outre possible d’approfondir l’union bancaire en sortant du carcan constitué par les dispositions législatives nationales relatives aux fonds propres et aux liquidités qui s’appliquent aux groupes bancaires transnationaux (Enria, 2022[41]). La réalisation de progrès vers l’union bancaire contribuera en outre à faire avancer le chantier de l’union des marchés des capitaux (Véron, 2014[42]).
Les progrès récemment accomplis sur la voie de l’union bancaire et de l’union des marchés des capitaux ont été limités. Quelques progrès ont été accomplis concernant la gestion des crises bancaires, avec notamment une proposition d’harmonisation de la gestion des défaillances des banques de petite ou moyenne taille et, en parallèle, une évaluation des règles relatives aux aides d’État en faveur des banques à la lumière de la réforme du cadre de gestion des crises. Depuis la réunion de l’Eurogroupe en juin 2022, aucun progrès n’a été accompli s’agissant des autres axes de travail. Quant aux récentes évolutions notables relatives à l’union des marchés des capitaux, des mesures ont été proposées en novembre 2021 pour mettre en place un point d’accès unique européen (ESAP) pour les données financières et un système consolidé de publication post-négociation, ainsi qu’un ensemble de données unique sur les prix et le volume des titres négociés dans l’UE. En décembre 2022, la Commission européenne a présenté, à titre de suivi, des propositions concernant les services de compensation de l’UE, l’harmonisation de certaines règles en matière d’insolvabilité des entreprises et l’allègement de la charge administrative liée à la cotation en bourse des entreprises. Ces mesures sont bienvenues mais doivent s’accompagner d’autres actions audacieuses visant à défragmenter les marchés européens des capitaux, ainsi qu’il était évoqué dans l’Étude économique de l’OCDE de 2021 consacrée à la zone euro (OCDE, 2021[43]). Compte tenu des multiples arbitrages à opérer et de la sensibilité politique de la question, l’achèvement de l’union bancaire et de l’union des marchés de capitaux devrait figurer en bonne place sur la liste des priorités de la prochaine Commission européenne, qui sera formée après les élections du Parlement européen de 2024 (Tableau 1.4).
Tableau 1.4. Mesures monétaires et macroprudentielles prises depuis la précédente Étude
Principales recommandations de l’Étude de 2021 |
Mesures prises depuis 2021 |
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Maintenir une politique monétaire accommodante |
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Conserver une politique monétaire accommodante jusqu’à ce que l’inflation converge nettement vers l’objectif fixé par la BCE. |
Face à la forte progression de l’inflation depuis 2021, la BCE a amorcé une normalisation de sa politique monétaire en décembre 2021 pour faire en sorte que l’inflation revienne vers l’objectif à moyen terme, soit 2 %. Elle a notamment mis fin à ses achats nets d’actifs, relevé ses taux directeurs de 375 points de base au total, modifié les modalités de ses opérations de refinancement à plus long terme et réduit progressivement le portefeuille du programme d’achat d’actifs. |
Au cours de sa prochaine évaluation, la BCE pourrait envisager de passer à un ciblage de l’inflation moyenne au cas où l’objectif d’inflation ne serait pas atteint. |
La prochaine évaluation stratégique est prévue en 2025. |
La levée des mesures financières liées à la pandémie devrait être progressive. Les coussins de fonds propres devraient être reconstitués peu à peu. |
Des vulnérabilités constituant des sources de risque à moyen terme se sont accumulées tout au long de la pandémie ; celles-ci sont liées à l’immobilier résidentiel, ainsi qu’à la forte croissance du crédit et à l’endettement croissant du secteur privé non financier. Afin d’y remédier, à la fin de 2022, un grand nombre de pays participant à la surveillance bancaire européenne ont décidé de conserver ou de reconstituer progressivement des coussins de fonds propres macroprudentiels (un coussin de fonds propres contracyclique et un coussin pour risque systémique sectoriel). |
Faire le point sur l’efficacité des nouveaux outils récemment adoptés et sur la suspension des limites que la BCE s’était imposées à elle-même concernant son programme d’achats d’actifs, et les prolonger si besoin. |
La BCE évalue en permanence l’efficacité des mesures de politique monétaire non conventionnelles. Les achats nets d’actifs ont pris fin au premier semestre de 2022 et la taille du portefeuille de titres détenus dans le cadre du programme d’achat d’actifs diminue progressivement depuis mars 2023, tandis que les réinvestissements au titre de ce dernier cesseront en juillet 2023. |
Renforcer la résilience économique de la zone euro en achevant l’union bancaire et l’union des marchés des capitaux. |
En avril 2023, la Commission européenne avait mené à bien 14 des 16 actions qu’elle s’était engagée à entreprendre dans le plan d’action 2020 pour l’union des marchés des capitaux. En ce qui concerne l’union bancaire, la Commission a proposé, en avril 2023, des modifications du cadre de gestion des crises bancaires et de garantie des dépôts, du règlement sur le mécanisme de résolution unique et de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts. La réforme du cadre de gestion des crises bancaires et de garantie des dépôts vise à améliorer son application, en particulier aux établissements bancaires de petite ou moyenne taille, et à renforcer l’utilisation des filets de sécurité financés par le secteur. |
Les politiques budgétaires doivent devenir suffisamment restrictives
L’environnement économique difficile souligne l’importance que revêt une articulation appropriée des politiques macroéconomiques dans la zone euro. Tandis que la Banque centrale européenne (BCE) durcit sa politique monétaire pour juguler une inflation persistante et historiquement forte, des aides budgétaires sont accordées pour contribuer à amortir l’impact des coûts élevés de l’énergie sur les ménages et les entreprises. Dans le cadre des mesures budgétaires à court terme prises en vue de préserver le niveau de vie des populations, les autorités doivent se garder de stimuler encore la demande de manière persistante dans un contexte de forte inflation, tout en préservant les incitations aux économies d’énergie, et garantir ce faisant la cohérence entre politiques budgétaire et monétaire tout en évitant des effets négatifs sur la viabilité des finances publiques (OCDE, 2022[44]).
Le durcissement des politiques monétaires a entraîné un alourdissement des coûts d’emprunt des entreprises et des ménages, tout en faisant monter les taux d’intérêt de la dette souveraine. Tandis que les coûts de refinancement des États ont augmenté, les écarts de rendement des obligations souveraines sont restés stables pour la plupart des pays, et ont même diminué dans le cas de l’Italie, de la Grèce et des pays de l’UE non membres de la zone euro (Graphique 1.22). Néanmoins, il subsiste un risque que, pour autant que les États continuent d’émettre de nouvelles obligations en sus du simple renouvellement des dettes arrivant à échéance, l’offre excédentaire s’inscrivant dans un contexte de durcissement des conditions financières se traduise par une concurrence plus vive entre les émetteurs pour obtenir les faveurs des investisseurs, ce qui ferait monter encore les rendements des titres d’emprunt souverains (Schroeder et Bouvet, 2023[45]).
Dans l’Union européenne, les ratios d’endettement public ont augmenté à la suite du décaissement des aides sans précédent liées à la pandémie et à la crise énergétique (Graphique 1.23). Dans un premier temps, l’accélération de l’inflation provoquée par les perturbations des chaînes d’approvisionnement ainsi que la hausse des prix de l’énergie et des produits alimentaires a fait diminuer les ratios dette/PIB, en raison d’un effet temporaire de renforcement du PIB nominal. Néanmoins, dans un second temps, le ralentissement de la croissance réelle, l’alourdissement des charges d’intérêts et la dégradation des déficits primaires ont fini par porter les ratios d’endettement public au-dessus des niveaux auxquels ils s’établissaient avant la pandémie.
Les aides budgétaires destinées à amortir l’impact des coûts élevés de l’énergie ont été d’une ampleur considérable et, dans la plupart des cas, non ciblées (Graphique 1.24). Les aides apportées aux consommateurs d’énergie ont représenté plus de 2 % du PIB dans certains pays de l’UE, soit nettement plus que leur niveau médian dans les économies de l’OCDE, qui s’est établi à 0.7 % du produit intérieur brut. Les mesures de soutien liées aux prix, telles que les allègements d’impôt et les prix réduits ou réglementés, ont été prédominantes par rapport aux aides au revenu, et ont été dans une large mesure non ciblées. Les aides au revenu, recouvrant les transferts et les crédits d’impôt accordés aux consommateurs, ont été mieux ciblées sur les ménages vulnérables. Néanmoins, les aides au revenu d’application générale, telles que les subventions au transport individuel accordées aux salariés qui se rendent au travail en véhicule à moteur, ne sont pas rares. Les mesures de soutien liées aux prix sont relativement simples à mettre en place et à présenter au public, mais elles affaiblissent les incitations à réduire la consommation d’énergie, apportent une aide disproportionnée aux ménages aisés et risquent d’accentuer encore le renchérissement de l’énergie et la hausse des prix à la consommation, ainsi que leurs effets redistributifs. Il serait tout à fait rationnel de démanteler progressivement les aides budgétaires massives mises en place. Il pourrait cependant demeurer nécessaire d’apporter un soutien ciblé aux ménages vulnérables qui ne sont pas couverts de manière satisfaisante par le système général de protection sociale, notamment dans la mesure où la vulnérabilité face aux prix élevés de l’énergie dépend également d’autres facteurs que le revenu, comme l’incapacité à rénover les logements énergivores et des besoins énergétiques importants liés à l’âge ou à des facteurs géographiques (Pisu et al., 2023[46]).
Pour garantir un ciblage efficace dans les temps à venir, il pourrait être nécessaire d’améliorer les données administratives disponibles tout en élaborant des mesures ciblées qui aillent au-delà des prestations sociales classiques. La transformation numérique offre l’occasion de concevoir des instruments de ciblage souples fondés sur une collecte et une gestion des données (au moyen de compteurs intelligents, par exemple) mettant à profit les outils numériques innovants mis en place par les administrations fiscales pendant la pandémie de COVID-19 (Causa et al., 2022[24]). Néanmoins, les aides au revenu fondées sur la consommation d’énergie réduisent les incitations à l’économiser. Au fil du temps, il faudrait s’attacher en priorité à investir dans des capacités permettant aux consommateurs vulnérables de se tourner vers des combustibles de substitution. Outre des aides ciblées, il faut adopter des mesures permettant de réorienter la consommation d’énergie vers des sources d’énergie propre, compatibles avec les objectifs de neutralité carbone. Les aides financières axées sur l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements et sur l’utilisation de véhicules utilitaires légers électriques correspondent à deux domaines dans lesquels il est judicieux que les pouvoirs publics interviennent. Pour favoriser l’usage de véhicules écologiques, il est nécessaire de prendre des mesures visant à accélérer le déploiement de la capacité de recharge.
Les investissements publics programmés pourraient être retardés
Le programme « Next Generation EU (NGEU) » offre une occasion historique de renforcer la croissance potentielle et de transformer l’économie, mais sa mise en œuvre pourrait alimenter les tensions inflationnistes. Le principal instrument du programme NGEU adopté en réaction à la pandémie de COVID-19 est la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR), financée grâce à l’émission de dettes communes au niveau de l’UE. Les gouvernements s’efforcent à juste titre de remédier à la crise énergétique en réalisant des investissements publics et en engageant des réformes structurelles décisives, susceptibles de renforcer la croissance potentielle et de contribuer à la concrétisation des transitions écologique et numérique. Néanmoins, les décaissements de fonds liés au programme NGEU et à la FRR devraient rester volumineux jusqu’à la fin du programme, en 2026, et tirer l’investissement public vers le haut. Une mise en œuvre efficace des projets d’investissement et des réformes prévus dans les plans nationaux pour la reprise et la résilience (PNRR) peut contribuer à réduire les tensions inflationnistes, mais ne permettra pas de les éviter complètement. En outre, plusieurs pays de la zone euro ont reporté leurs demandes de décaissement et, pour lever des ambiguïtés, il a fallu clarifier certaines réformes structurelles conditionnant le versement des fonds. Dans d’autres cas, des contrats d’achat ont dû être revus en raison de la forte inflation ou de pénuries de matières premières et de main-d’œuvre. Ces divers retards se sont traduits par une sous-utilisation des fonds en 2021 et 2022 par rapport aux PNRR initiaux, ce qui pourrait s’avérer difficile à corriger et pourrait mettre à rude épreuve la capacité d’absorption des pays bénéficiaires.
L’expérience de l’absorption des fonds de l’UE provenant du cadre financier pluriannuel (CFP) incite à la prudence. À la fin de 2020, 60 % seulement des fonds de l’UE relevant du CFP 2014-20 avaient été absorbés dans les quatre plus grands pays de la zone euro. Au cours de la précédente période budgétaire 2007-13, trois années supplémentaires avaient été nécessaires pour que les taux d’absorption atteignent un niveau proche de 100 %. Étant donné que les fonds disponibles au titre du programme NGEU, qui recouvrent les ressources accessibles aux pays de la zone euro via le FRR, les autres composantes du programme NGEU et le plan REPowerEU, représentent un montant près de quatre fois supérieur à celui des fonds disponibles au titre du CFP normal couvrant la période 2021-27 (Dorrucci et Freier, 2023[47]), il est possible que l’horizon de six ans qui caractérise le FRR ne soit pas suffisant. En outre, la définition des jalons et des cibles énoncée dans le règlement établissant la Facilité pour la reprise et la résilience est axée sur des intrants et des réalisations, telles que des réformes et des plans d’investissement spécifiques, plutôt que sur des indicateurs de résultats (Darvas et Welslau, 2023[48]). Ainsi, il est possible que les jalons et cibles existants ne garantissent pas de manière satisfaisante que la FRR ait un effet positif sur la transition écologique (Hindriks et al., 2022[49]).
Il faut réduire au minimum le risque que le décaissement des fonds du programme NGEU ait un effet stimulant excessif sur l’économie. À court terme, le surcroît de dépenses publiques aura un effet d’accentuation de l’inflation, qui ne sera modéré qu’à moyen terme, lorsque les tensions inflationnistes liées au programme NGEU seront compensées par l’effet désinflationniste de l’augmentation des capacités productives (Bankowski et al., 2022[50]). En outre, les répercussions inflationnistes pourraient être plus notables dans certains pays. Pour éviter ces effets inflationnistes à court terme et étayer le resserrement de la politique monétaire, il faudrait que l’orientation des politiques budgétaires reste suffisamment restrictive. À cet égard, à la suite de l’activation de la clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance (PSC) au cours la période 2020-23, tout retard pris dans la clarification du cadre budgétaire de l’UE risque de contribuer à accentuer l’inflation et à affaiblir le sentiment qu’une stabilisation budgétaire est nécessaire.
Le budget de l’UE (cadre financier pluriannuel) est relativement limité, puisqu’il représente 1 % environ du PIB annuel de l’Union, ce qui n’est pas compatible avec la poursuite des objectifs de stabilisation économique. Quelque deux tiers des recettes versées à ce budget proviennent des budgets nationaux. Le reste vient d’autres sources, comme les droits de douane acquittés sur les biens importés de l’extérieur de l’UE et un petit pourcentage de la taxe sur la valeur ajoutée collectée par chaque pays membre. En principe, le budget de l’UE financé par le cadre financier pluriannuel doit être équilibré. Cependant, certaines activités, comme les 807 milliards EUR affectés au programme NGEU et les 99 milliards EUR alloués à l'instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE), sont financées par l’émission d’euro-obligations. Le budget de l’UE est un moyen d’action essentiel pour favoriser la croissance et la convergence des régions. Ses principaux postes de dépenses – la politique de cohésion et la politique agricole commune (PAC) – auxquelles s’ajoutent pour la période budgétaire en cours les dépenses exceptionnelles liées au programme NGEU - visent explicitement à assurer un développement territorial équilibré, comme on le voit dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée en 2021 à l’Union européenne (OCDE, 2021[1]). (OCDE, 2021[1]).
Une vaste réforme de la gouvernance économique s’impose
Le cadre budgétaire européen a montré certaines limites dans le passé lorsqu’il s’agissait de faire face à la fois à des problèmes de viabilité et de cyclicité dans un cadre fondé sur des règles, comme cela a été évoqué dans l’Étude économique de l’OCDE de 2021 consacrée à la zone euro (OCDE, 2021[43]). Au fil du temps, le pacte de stabilité et de croissance (PSC) a fait l’objet de modifications importantes, destinées à permettre de mieux prendre en compte les besoins de la politique budgétaire, de combler des lacunes en matière de surveillance et d’améliorer sa mise en application. Néanmoins, cette plus grande flexibilité a été obtenue au prix d’une complexité grandissante, marquée par une prolifération des objectifs chiffrés et des procédures. Par ailleurs, le cadre n’a pas empêché une augmentation tendancielle du ratio d’endettement dans la plupart des pays et n’a pas favorisé suffisamment des politiques budgétaires nationales contracycliques. Sur longue période, avant la pandémie, les pays disposant de marges de manœuvre budgétaires tendaient à se caractériser par des écarts de production positifs, ce qui réduisait le besoin de mesures de relance budgétaire. À l’inverse, l’assainissement budgétaire était souvent associé par le passé avec un faible niveau d’investissement public, les pays accordant la priorité aux dépenses courantes, au détriment de la satisfaction des besoins d’investissement.
Le cadre budgétaire européen joue sur la discipline de marché, qui pourrait à son tour le renforcer, notamment par le biais d’une prime sur le risque de crédit. Il a été avancé que dans la pratique, la discipline de marché pourrait être trop faible, permettant aux emprunteurs d’accumuler des dettes qu’ils peinent de plus en plus à rembourser. Selon des recherches récentes fondées sur des données couvrant 71 pays sur la période de 1981 à 2015, les signaux du marché sont plus importants pour la discipline de marché que les règles budgétaires. En outre, dans les pays de l’UE et de l’OCDE, à la différence des économies émergentes, les signaux du marché renforcent généralement la discipline découlant des règles budgétaires (Agnello, Castro et Sousa, 2023[51]).
Point crucial, les règles n’ont été que partiellement respectées (Graphique 1.25) : le taux moyen de conformité aux règles budgétaires de l’ensemble des pays de l’UE entre 1998 et 2019, avant l’activation de la clause dérogatoire générale, était de 64 % pour la règle de déficit et de 71 % pour la règle d’endettement. Comme on pouvait s’y attendre, le taux de conformité était plus faible pour les pays fortement endettés (Larch et al., 2022[52]). Les pays aux taux de conformité plus bas tendaient également être de plus grande taille et à moins à se caractériser par des institutions budgétaires indépendantes nationales existant de longue date (Larch, Malzubris et Santacroce, 2023[53]).
Une politique budgétaire contracyclique devrait soutenir la demande globale en période de fléchissement de l’activité, afin de garantir la viabilité des finances publiques à long terme. En pratique, cependant, les politiques budgétaires ont souvent une orientation procyclique, ce qui se traduit par la constitution de marges de manœuvre budgétaires insuffisantes en période de conjoncture économique favorable et un resserrement budgétaire en période de conjoncture défavorable. La crise financière mondiale de 2008-09 et le début de la pandémie de COVID-19 en 2020 ont été deux périodes marquées par une très forte orientation expansionniste contracyclique des politiques budgétaires, mais la zone euro n’a pas encore connu d’épisode de très fort resserrement budgétaire contracyclique, ni de renforcement important des marges de manœuvre budgétaires en période de conjoncture favorable. L’assainissement procyclique des finances publiques de 2012-13 a eu lieu pendant la crise de la dette souveraine, entraînant une croissance faible, accentuant les tensions sur les marchés et suscitant des préoccupations quant à la soutenabilité de la dette dans certains pays (Graphique 1.26). Cette procyclicité tenait aux choix des gouvernements, à l’accès aux marchés ainsi qu’au respect limité des règles relatives aux objectifs à moyen terme, définis en termes structurels, et au critère des dépenses. La détermination à mener une politique budgétaire contracyclique semble faire défaut dès le départ : si l’on examine les politiques budgétaires ex ante, en utilisant les informations disponibles au moment de la programmation du budget, elles ne semblent être ni procycliques, ni contracycliques (Larch, Orseau et van der Wielen, 2021[54] ; Gootjes et de Haan, 2022[55]). Néanmoins, une source de procyclicité réside dans un optimisme persistant concernant les taux de croissance économique attendus sur lesquels reposent les plans de dépenses budgétaires (Beetsma et al., 2022[56]). La méthode commune utilisée par la Commission européenne pour estimer la production potentielle a également débouché sur d’amples révisions des soldes structurels et, même lorsqu’on examine les valeurs moyennes sur dix ans, de la production potentielle (Barnes et Casey, 2019[57]).
Pour améliorer la gouvernance économique, la Commission a proposé des modifications du cadre budgétaire, qui devraient s’appliquer dès que possible une fois que la clause dérogatoire générale activée en raison de la pandémie cessera de s’appliquer, à la fin de 2023 (Encadré 1.3). Cette proposition constitue une avancée par rapport au cadre actuel, pour au moins deux raisons. Premièrement, elle fonde l’ajustement budgétaire à moyen terme sur une évaluation globale des risques pesant sur la soutenabilité de la dette, dans le cadre de laquelle sont prises en compte des spécificités nationales, notamment des prévisions relatives aux coûts d’emprunt, aux coûts liés au vieillissement démographique et à l’impact global de l’assainissement budgétaire et des réformes structurelles sur la croissance, en lieu et place de simples indicateurs numériques (Blanchard, Sapir et Zettelmeyer, 2022[58]). Elle s’appuie également moins sur des variables non observées comme le solde structurel, et davantage sur des projections à moyen terme. Deuxièmement, les plafonds de dépenses nettes annuelles constituent un objectif opérationnel plus stable que le solde budgétaire corrigé des variations cycliques actuellement utilisé dans le PSC.
Le cadre budgétaire de l’UE est dans une phase de transition. La clause dérogatoire générale du PSC sera désactivée à la fin de 2023, mais le nouveau cadre juridique, qui dépend de l’issue de la procédure de réexamen en cours, n’est pas encore en place. Pour assurer efficacement la transition vers le futur ensemble de règles budgétaires, qui dépendra des négociations entre les pays de l’UE (ECOFIN, 2023[59]), certains éléments de la proposition de réforme de la Commission seront intégrés au cycle de surveillance budgétaire débutant au printemps de 2023 avec la formulation des recommandations budgétaires par pays (Commission européenne, 2023[60]). Les projets de plans budgétaires pour 2024 seront évalués par la Commission à l’automne 2023 sur la base des recommandations budgétaires par pays modifiées du printemps 2023. La Commission a invité les pays membres à présenter des programmes de stabilité ou de convergence contenant leurs plans budgétaires et structurels à moyen terme. De son côté, la Commission intégrera dans ses recommandations budgétaires par pays à la fois des exigences quantitatives et des orientations qualitatives concernant les mesures prévues en matière d’investissement et d’énergie. Les recommandations budgétaires par pays seront également quantifiées en termes de dépenses primaires nettes, comme indiqué dans la proposition de réforme de la Commission, et différenciées en fonction des défis posés par leur dette publique.
Encadré 1.3. La proposition de réforme de la gouvernance économique de la Commission européenne
Outre les valeurs de référence fixées à 3 % et à 60 % du PIB pour le déficit et la dette, respectivement, le cadre de gouvernance budgétaire de l’UE comprend notamment les règles et seuils numériques suivants :
La règle d’un vingtième applicable à la dette : lorsque la dette est supérieure à 60 % du PIB, sa réduction annuelle sur trois ans devrait être d’au moins un vingtième de l’écart entre le niveau de la dette et ce seuil de 60 %.
L’objectif budgétaire à moyen terme (OMT) spécifique à chaque pays : cet objectif de solde budgétaire ne peut être inférieur à -1 % du PIB, en données corrigées des variations conjoncturelles et déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires. L’objectif est révisé tous les trois ans, ou lorsque des réformes structurelles majeures sont mises en œuvre.
Le critère des dépenses : le taux de croissance net des dépenses publiques doit être inférieur ou égal à un taux de croissance économique potentielle à moyen terme, suivant la conformité du pays à son OMT.
La proposition de la Commission vise à renforcer l’orientation à moyen terme des règles, à simplifier le cadre et à améliorer l’appropriation nationale. Elle est axée sur le remplacement du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance par un plan national d’ajustement budgétaire à moyen terme ancré à une analyse de soutenabilité de la dette. Les valeurs de référence fixées à 3 % et à 60 % du PIB pour le déficit et la dette, respectivement, doivent être conservées et intégrées dans le nouveau cadre. En revanche, la règle d’un vingtième relative à la dette, qui s’est avérée difficile à appliquer, ainsi que l’objectif à moyen terme (OMT) de solde structurel et le critère des dépenses fondé sur la croissance potentielle ne seraient plus utilisés.
La Commission proposerait une trajectoire d’ajustement pluriannuelle – qualifiée de « trajectoire technique » – des dépenses primaires nettes (définies comme les dépenses déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes et à l’exclusion des dépenses d’intérêts ainsi que des dépenses conjoncturelles de chômage, de manière que les stabilisateurs automatiques puissent jouer pleinement) pour les pays ayant une dette supérieure à 60 % de leur PIB ou un déficit supérieur à 3 % de leur PIB, d’une durée de quatre à sept ans et fondée sur une méthode existante d’analyse de la soutenabilité de la dette convenue avec les États membres. Ces pays devront ramener leur dette sur une trajectoire descendante plausible au plus tard à l’issue de la période d’ajustement de quatre ans, dans l’hypothèse de politiques inchangées. La trajectoire de référence serait également définie de manière à garantir que le déficit reste inférieur à 3 % du PIB à moyen terme, c’est-à-dire au cours des 10 années consécutives à la période d’ajustement. Pour les pays ayant un déficit inférieur à 3 % du PIB et un ratio dette/PIB inférieur à 60 %, la Commission, au lieu de déterminer une trajectoire technique, calculera le solde primaire structurel nécessaire pour que le déficit reste inférieur à 3 % du produit intérieur brut.
Après avoir examiné la question avec la Commission, chaque pays présenterait un « plan budgétaire et structurel à moyen terme » décrivant ses engagements en matière d’ajustement budgétaire et de réformes structurelles. Afin que l’assainissement budgétaire requis ne puisse pas être concentré en fin de période, l’ajustement annuel moyen prévu dans le plan national ne devrait pas être inférieur à l’effort budgétaire annuel moyen sur l’ensemble de la période d’ajustement. En outre, le ratio dette/PIB à la fin de l’« horizon de planification » doit être inférieur à son niveau initial. Une plus grande flexibilité, prenant la forme d’une trajectoire d’ajustement plus progressive que l’horizon normal de quatre ans, pourrait être envisagée suivant les engagements pris en matière de réformes et d’investissements prioritaires. Pour assurer une égalité de traitement, la Commission évaluerait l’arbitrage à opérer entre les réformes et le rythme de l’ajustement à partir d’un cadre commun défini au niveau de l’UE. La dernière étape du processus résiderait dans l’adoption ou le rejet du plan par le Conseil de l’UE. En l’absence d’accord entre un pays et la Commission, la trajectoire d’ajustement de référence initialement préparée par la Commission serait utilisée aux fins de la surveillance et de l’exécution budgétaires. Les plans budgétaires et structurels nationaux couvriront également les mesures nécessaires pour remédier aux déséquilibres macroéconomiques. En cas de progrès insuffisants, une procédure concernant les déficits excessifs (PDE) serait ouverte contre le pays concerné, et celui-ci se verrait demander de présenter au Conseil un plan budgétaire et structurel révisé.
La PDE continuerait de s’appliquer pour assurer le respect des règles. Pour les pays ayant un déficit supérieur à 3 % du PIB, un ajustement annuel minimal de 0.5 point de PIB est proposé. Pour les pays dont la dette publique est supérieure à 60 % du PIB, la PDE fondée sur la dette serait enclenchée en cas de non-conformité avec la trajectoire de dépenses approuvée. Le non-respect de la trajectoire convenue ou, en cas de circonstances défavorables, avec la trajectoire modifiée, déboucherait sur des sanctions financières, notamment une éventuelle suspension des financements de l’UE, et d’autres sanctions, touchant la réputation. Bien que de nouvelles mesures d’exécution soient envisagées, l’objectif global est de renforcer l’appropriation nationale, lorsque les pays adopteraient leur plan. Aucun changement n’a été proposé concernant le cadre juridique de la Procédure de déséquilibres excessifs.
Source : Commission européenne (2022[61]) ; Commission européenne (2023[62]) ; Commission européenne (2023[63]) ; Darvas (2023[64]) ; et Blanchard, Sapir et Zettelmeyer (2022[58]).
Point important, au cours de la période de transition, les pays se fixeront des objectifs budgétaires dans leurs plans budgétaires à moyen terme, qui constitueront le fondement de leurs propres recommandations budgétaires. La Commission est disposée à proposer des recommandations budgétaires par pays en phase avec les objectifs nationaux, pour autant qu’ils soient conformes aux critères définis dans ses orientations de réforme, notamment qu’ils soient de nature à inscrire le ratio d’endettement public sur une trajectoire descendante (ou à le maintenir à un niveau prudent pour les pays faiblement endettés) ainsi qu’à garantir un déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB à moyen terme (Commission européenne, 2023[60]). Compte tenu du risque que le nouveau cadre budgétaire ne soit pas finalisé au cours de cette législature, cette approche permet une évolution progressive de la surveillance budgétaire. Le nouveau cadre met l’accent sur une perspective pluriannuelle à moyen terme, tout en instaurant des garde-fous communs pour garantir la soutenabilité de la dette, qui visent dans les deux cas à éviter que les efforts budgétaires soient reportés en période de conjoncture favorable. Cela peut contribuer à réduire la procyclicité des politiques budgétaires observée par le passé, suivant les choix qui seront faits lors de la finalisation de la proposition.
Un renforcement des conseils budgétaires pourrait davantage contribuer à améliorer le respect des règles que le recours à des sanctions
D’importants éléments du cadre budgétaire révisé et de ses modalités d’application restent à déterminer. Ainsi, les exigences imposées concernant la trajectoire de référence et les plans budgétaires nationaux à moyen terme peuvent être trop vagues et risquent de s’avérer insuffisantes pour garantir la soutenabilité de la dette. L’ajustement budgétaire a pour objet de garantir à la fois un déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB et l’inscription de la dette sur une « trajectoire descendante plausible » au bout de quatre à sept ans, ce qui peut ne pas être suffisamment ambitieux pour un pays présentant un risque élevé en matière de dette (Blanchard, Sapir et Zettelmeyer, 2022[58]). Malgré les récentes améliorations analytiques dont elle a bénéficié, l’analyse de la soutenabilité de la dette demeure très sensible à des changements modestes d’hypothèses (Comité budgétaire européen, 2022[65]). Un des objectifs de la réforme est de renforcer l’appropriation nationale afin d’améliorer le respect des règles et les résultats budgétaires. Une plus grande adhésion des responsables politiques, des parlements et des citoyens nationaux pourrait contribuer à l’obtention de meilleurs résultats, comme c’est déjà le cas dans de nombreux pays faiblement endettés. Les autorités nationales pourraient jouer un rôle plus actif dans l’élaboration de leur trajectoire d’ajustement, définie d’un commun accord avec la Commission, mais si la proposition de cette dernière décrit avec précision son propre rôle à cet égard, elle est moins spécifique en ce qui concerne le renforcement du rôle des institutions budgétaires indépendantes (IBI) nationales. Il existe donc un risque que les débats nationaux sur l’action publique ne s’inscrivent pas suffisamment dans ce nouveau cadre, ce qui ne serait pas compatible avec l’objectif affiché de renforcement de l’appropriation nationale et du rôle des IBI.
Il est crucial de renforcer les prérogatives des conseils budgétaires nationaux et de les doter de ressources suffisantes pour améliorer l’appropriation nationale (Wyplosz, 2022[66]). Des IBI, telles que les conseils budgétaires, sont essentielles pour établir la crédibilité de la politique budgétaire au niveau national en renforçant la transparence et l’obligation de rendre des comptes. Elles peuvent contribuer à enrichir le débat politique sur les finances publiques et à renforcer la focalisation sur le moyen terme. Les conseils budgétaires efficaces ont un effet mesurable sur la conception et la mise en œuvre de la politique budgétaire. En outre, une plus grande visibilité médiatique des IBI renforce l’efficacité des règles budgétaires, au sens où elle s’accompagne d’un niveau de conformité plus élevé (Mohl et al., 2021[67]).
La surveillance budgétaire pourrait être déléguée en partie du niveau européen au niveau national, à condition qu’un cadre budgétaire adéquat soit en place et que les résultats budgétaires restent satisfaisants (Thygesen et al., 2022[68]). Les évaluations des IBI devraient contribuer au travail d’analyse sur lequel reposera la version initiale de la trajectoire d’ajustement à moyen terme destinée au Conseil de l’UE (ECOFIN), notamment sous la forme d’un suivi ou d’une préparation des hypothèses sous-tendant les prévisions macroéconomiques et l’analyse de la soutenabilité de la dette. La plupart des IBI nationales produisent déjà des analyses de la soutenabilité de la dette et ce rôle peut être encore renforcé (Le réseau des institutions budgétaires indépendantes de l’Union européenne, 2021[69]). Dans le nouveau cadre, les IBI pourraient aussi être chargées d’évaluer les mesures discrétionnaires en matière de recettes. Au début des procédures concernant les déficits excessifs fondées sur le déficit ou sur la dette, les IBI pourraient être chargées d’évaluer les facteurs pertinents propres au pays concerné. Pour que les IBI deviennent des organismes efficaces de surveillance de la gestion macrobudgétaire nationale, des normes minimales concernant leur mandat, leurs ressources, leurs compétences et leur accès à l’information devraient être définies dans la législation de l’UE (Arnold et al., 2022[70]), et mises en œuvre progressivement à partir de l’expérience des IBI et des meilleures pratiques existantes (OCDE, 2014[71]). Faire du Comité budgétaire européen une institution indépendante et le doter de ressources suffisantes contribuerait également à renforcer l’examen des questions budgétaires au niveau européen.
Suivant la proposition de la Commission, le système de sanctions continuerait de s’appliquer, alors que son bilan est médiocre et qu’il est nécessaire de l’améliorer. Certains font parfois valoir qu’il serait possible de renforcer l’application des règles budgétaires en s’appuyant sur d’autres instruments d’action de l’UE, comme sa politique de cohésion (Larch et al., 2022[52]). Le droit de l’UE permet à la Commission de suspendre les versements au titre des Fonds structurels et d’investissement européens en cas d’action insuffisante dans le cadre d’une PDE. Étant donné que les fonds de cohésion représentent une part importante du budget de l’UE, cela pourrait constituer une incitation crédible. Reste qu’en pratique, ces dispositions n’ont jamais débouché sur une perte effective de fonds. De même, l’instauration d’une procédure de vote à la majorité qualifiée inversée en 2011 n’a pas débouché sur l’imposition de sanctions plus spécifiques au titre du PSC. Elle conférait un rôle plus décisif à la Commission en cas de divergence des votes au sein du Conseil, une majorité qualifiée des pays décisionnaires étant requise pour annuler une recommandation de la Commission. On s’attendait à ce que cette innovation se traduise par une mise en œuvre quasi automatique des règles plus strictes du PSC, mais tel n’a pas été le cas (Comité budgétaire européen, 2019[72]). À l’inverse, la Commission a décidé en 2016 de renoncer de facto aux sanctions prévues par le PSC en cas de non-respect des règles qui auraient dû s’appliquer à l’Espagne et au Portugal, en fixant leur niveau à zéro (Larch et al., 2022[52]). Cet épisode était lié à un manque généralisé d’appropriation du PSC, tant de la part des pays que de la Commission, ou au sentiment que les sanctions, même inefficaces, limitaient la souveraineté nationale (Mangov et al., 2019[73]).
Tableau 1.5. Améliorer les dispositions budgétaires européennes
Principales recommandations de l’Étude de 2021 |
Mesures prises depuis 2021 |
---|---|
Évaluer le cadre budgétaire afin de mieux assurer la viabilité des finances publiques, ainsi que de garantir une orientation contracyclique suffisante des politiques budgétaires et une meilleure appropriation des règles. |
En novembre 2022, dans ses orientations pour une réforme du cadre de gouvernance économique, la Commission a passé en revue les principaux problèmes posés par ce cadre, notamment sa complexité, le rythme de réduction de la dette, les incitations aux réformes et à l’investissement, l’appropriation nationale et l’application des règles. |
Améliorer l’élaboration des politiques budgétaires en renforçant le rôle des institutions budgétaires indépendantes (IBI), en améliorant les cadres budgétaires à moyen terme et en envisageant de recourir à des incitations positives. |
Les propositions législatives d’avril 2023 ont esquissé un cadre budgétaire réformé fondé sur des orientations à moyen à terme et l’appropriation nationale. Ce cadre vise à permettre une réduction crédible des niveaux d’endettement élevés et à promouvoir une croissance durable et inclusive, tout en ouvrant la perspective d’un renforcement du rôle des IBI nationales. |
Mettre en œuvre rapidement les plans nationaux pour la reprise et la résilience (PNRR), afin d’engager des réformes structurelles et de réaliser des investissements fondés sur de solides analyses coûts-avantages. |
Les progrès accomplis dans la mise en œuvre des PNRR font l’objet d’un suivi régulier, également dans le contexte du Semestre européen. Le déblocage des fonds correspondant à la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) suit son cours. En mai 2023, 153 milliards EUR au total avaient été décaissés. |
Évaluer rigoureusement l’impact économique de l’instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) et de « Next Generation EU », étant donné qu’ils pourraient utilement nourrir le débat sur l’achèvement de l’architecture de l’Union économique et monétaire (UEM). |
La Commission a évalué l’impact économique de SURE dans ses rapports semestriels et prévoit d’évaluer ce dispositif d’ici au troisième trimestre de 2024, ainsi que l’a recommandé la Cour des comptes européenne (CCE). |
Envisager, par exemple, d’adopter une règle de dépenses ancrée à un objectif de ratio d’endettement. |
Les propositions législatives d’avril 2023 mettent l’accent sur l’évolution des dépenses (déduction faite des mesures budgétaires accroissant ou réduisant les recettes), qui servira de base pour déterminer la trajectoire d’ajustement budgétaire des pays et mener à bien la surveillance budgétaire annuelle. |
Le marché unique doit être protégé et approfondi
Le marché unique a contribué de manière considérable à la croissance économique de l’Union européenne (UE). Selon de récentes estimations, l’effet induit par le marché unique depuis sa création sur le niveau du PIB réel est compris entre 9 % et 12 % (in ’t Veld, 2019[74]) (Lehtimäki et Sondermann, 2020[75]). La mise en œuvre et en application effective des règles du marché unique est également cruciale pour préserver la résilience de l’UE face aux chocs économiques. Néanmoins, il faut poursuivre les efforts déployés pour lever des obstacles persistants, notamment en promouvant les prestations transfrontalières de services (Commission européenne, 2023[76]). Les marchés des services numériques, des services de télécommunications et des services financiers demeurent particulièrement fragmentés (OCDE, 2023[77]).
Améliorer encore la réglementation des marchés de produits permettrait d’approfondir le marché unique
Les indicateurs de réglementation des marchés de produits (RMP) de l’OCDE montrent que les obstacles à la concurrence existant dans les pays de tête de l’UE sont environ aussi modestes que dans les pays de l’OCDE les mieux classés à l’aune de ces indicateurs. La plupart des pays de l’UE obtiennent de bons résultats à cet égard. Néanmoins, les obstacles réglementaires à la concurrence restent importants dans certains États membres, bien qu’ils appartiennent à l’Union européenne depuis des décennies (Graphique 1.27).
Les programmes de réformes actuels, s’ils sont pleinement mis en œuvre, renforceront probablement le marché unique, en particulier dans les pays où la RMP est plus restrictive. Pour bénéficier de la Facilité pour la reprise et la résilience, les pays de l’UE ont soumis à la Commission des plans nationaux pour la reprise et la résilience, dans lesquels ils décrivent leur plan d’investissement et les réformes de leur réglementation s’inscrivant dans le prolongement des recommandations par pays formulées dans le cadre du Semestre européen. Certaines réformes sont directement liées à la RMP, tandis que de nombreux investissements visent à améliorer les infrastructures dans les industries de réseau, dont le cadre réglementaire est évalué par les indicateurs de RMP (Vitale et Terrero, 2022[78]). S’ils sont intégralement mis en œuvre, les plans nationaux pour la reprise et la résilience auront des effets positifs clairs sur les pays qui ont le plus besoin d’améliorer leur RMP (Graphique 1.28).
Les bénéfices potentiels d’une mise en œuvre intégrale des plans nationaux pour la reprise et la résilience laissent à penser que la fragmentation du cadre réglementaire continue d’entraver le commerce numérique. L’indice de restrictivité des échanges de services numériques (IRES numérique) de l’OCDE est resté stable dans les économies développées (Graphique 1.29). Bien que le niveau moyen de restrictivité dans l’Union européenne et la zone euro soit faible par rapport à celui observé dans les autres régions du monde, l’Europe n’améliore pas sa position vis-à-vis d’économies telles que les États-Unis, le Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, le Japon. Ainsi, les pays de l’UE continuent d’appliquer des dispositions qui entravent les échanges de services fondés sur le numérique, telles que des prescriptions de résultats, des limitations du téléchargement et de la diffusion en flux (streaming), ou des restrictions à la publicité en ligne. Malgré la mise en œuvre du règlement général sur la protection des données (RGPD) et du règlement sur le libre flux des données à caractère non personnel, il est également possible que le manque d’harmonisation des exigences en matière de cybersécurité au sein de l’UE entrave la libre circulation des données à caractère non personnel.
Certaines restrictions subsistent au sein du marché unique, à la fois du fait des règles de l’UE et des réglementations nationales, illustrant la possibilité de poursuivre l’intégration des marchés dans de nombreux secteurs de services (Graphique 1.30). On peut citer à cet égard les restrictions à l’entrée d’acteurs étrangers dans les secteurs du transport aérien et de la distribution, ainsi que les obligations imposées en matière d’autorisations dans les services juridiques. Entre 2014 et 2021, l’environnement réglementaire de l’Espace économique européen (EEE) est devenu plus libéral dans les secteurs des services de messagerie et des télécommunications, tandis que les progrès accomplis dans les assurances et les autres services financiers ont été limités (Graphique 1.31). En 2021-22, la libéralisation des échanges s’est poursuivie au sein de l’EEE dans les services de distribution, les banques commerciales et les assurances. Les réformes les plus récentes de 2021 ont notamment pris la forme d’une libéralisation des services financiers en Islande et en Finlande et d’une libéralisation des services de distribution en Allemagne.
Un cadre solide relatif aux aides d’État est nécessaire pour préserver l’équité des conditions de concurrence
Les règles applicables aux aides d’État ont été assouplies à plusieurs reprises depuis le début de 2020, cette souplesse ayant été prévue dans le Traité pour remédier à de graves perturbations économiques En application de l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État mis en place en réaction à la pandémie de COVID-19, la Commission a temporairement simplifié et assoupli l’accès aux aides. En outre, à la suite de la guerre d’agression non provoquée menée par la Russie contre l’Ukraine, un encadrement temporaire de crise a élargi le champ des aides pouvant être accordées pour compenser l’augmentation des coûts de l’énergie ainsi que pour favoriser le développement de technologies spécifiques liées aux énergies renouvelables et de décarbonation (Encadré 1.4.).
La souplesse actuelle risque de fausser les conditions de concurrence équitables offertes par le marché unique. En janvier 2023, environ 672 milliards EUR d’aides d’État avaient été approuvés en vertu de cet encadrement temporaire de crise ; elles ont été mises en place essentiellement par des grands pays de l’UE, c’est-à-dire l’Allemagne, la France et l’Italie, qui ont notifié, respectivement, 53 %, 24 % et 7 % du montant total de ces aides (Vestager, 2023[79]). Cela étant, ces sommes incluent entre autres des garanties, ce qui signifie donc que les montants nominaux n’ont pas été entièrement décaissés. Pour évaluer l’impact de l’encadrement temporaire de crise, on peut aussi comparer le montant total des aides notifié ou déclaré en 2020 avec celui notifié ou déclaré en 2019. Premièrement, on observe une hausse du montant des aides, tous les pays en ayant notifié ou déclaré davantage en 2020 qu’en 2019. Deuxièmement, l’aide octroyée en 2020 a eu tendance à augmenter davantage dans les pays où elle était déjà très volumineuse en 2019 (Kleinmann et al., 2023[80]). Une répartition déséquilibrée des aides d’État versées conformément à l’encadrement temporaire de crise et de transition laisserait craindre que les pays disposant des marges de manœuvre budgétaires les plus amples ne soient en mesure d’accorder un soutien excessif, au risque de remettre en cause l’intégrité du marché unique.
Encadré 1.4. Le cadre de l’UE relatif aux aides d’État a été assoupli afin de remédier à de graves perturbations
Les règles de l’UE relatives aux aides d’État régissent l’octroi de ces aides aux entreprises, qu’il s’agisse de subventions directes, d’avantages fiscaux, d’avances remboursables, de garanties, de prêts ou de fonds propres. Ces règles visent à protéger la concurrence et à garantir des conditions de concurrences équitables à toutes les entreprises au sein du marché unique. Pour être conformes aux règles de l’UE, les aides d’État doivent être nécessaires, proportionnées, transparentes, compatibles avec le marché unique et ne pas altérer la concurrence. Les aides d’État peuvent aussi contribuer au développement économique et à la création d’emplois dans les régions en retard de développement (Article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Si la Commission décide qu’une aide d’État est incompatible avec les règles de l’UE, elle enjoint au pays concerné de la recouvrer auprès de son bénéficiaire. Ainsi, Ryanair s’est vu enjoindre en 2019 de restituer une aide d’État de 8.5 millions EUR reçue de l’Association de promotion des flux touristiques et économiques (APFTE) à Montpellier.
Les pays sont tenus de notifier à la Commission toute aide ne satisfaisant pas aux exigences prévues à l’article 108 (4) du TFUE (« règlement d’exemption par catégorie »), et celle-ci les approuve ou non au cas par cas. En vertu du règlement général d’exemption par catégorie, les aides aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux grandes entreprises peuvent bénéficier d’une exemption dans certaines conditions précises, pour autant qu’elles n’excèdent pas certains seuils de notification. Ainsi, les aides à la recherche, au développement et à l’innovation peuvent être autorisées jusqu’à certains seuils et intensités maximales. Les pays peuvent fournir aux entreprises des aides d’État d’un montant limité (qualifiées d’« aides de minimis ») sans notification, à concurrence de 200 000 EUR sur une période de trois ans. .
Pendant la pandémie de COVID-19, la Commission a adopté l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État pour utiliser pleinement les marges de manœuvre offertes par les règles relatives aux aides d’État et soutenir l’économie. Au titre de l’encadrement temporaire, la Commission a approuvé près de 950 mesures nationales (sur plus de 1300 notifiées) en faveur des PME et des grandes entreprises de nombreux secteurs, dont ont notamment bénéficié les exploitants agricoles, les compagnies aériennes et les activités de recherche liées au COVID-19, représentant un montant total proche de 3200 milliards EUR, qui constitue un plafond de dépenses effectives (Commission européenne, 2022[81]).
L’encadrement temporaire de crise a été adopté à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a entraîné une nouvelle augmentation marquée des prix de l’énergie, dont le niveau était déjà élevé. Les nouveaux éléments de l’encadrement visaient à (i) faciliter l’accès aux liquidités des entreprises énergétiques et autres entreprises touchées ; (ii) simplifier les conditions à satisfaire pour pouvoir soutenir les entreprises touchées par le coût élevé de l’énergie ; et (iii) élargir le champ des mesures destinées à favoriser une réduction de la demande d’électricité.
Note : *) Les coûts admissibles sont la différence entre le prix unitaire du gaz naturel et de l’électricité payé par l’entreprise considérée (en tant que consommateur final) chacun des mois écoulés entre le 1er février et le 31 décembre 2022, et deux fois le prix unitaire acquitté en moyenne en 2021.
Source : Commission européenne (2021[82]) ; Commission européenne. (2022[81])
Le cadre juridique de l’UE en vigueur, en particulier les Lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022, autorise déjà les subventions vertes justifiées par des externalités environnementales et la protection du climat (Commission européenne, 2022[83]). La Commission a récemment élargi temporairement, jusqu’à la fin de 2025, par le biais de l’encadrement temporaire de crise et de transition, le champ d’application des dispositions simplifiées en vigueur relatives aux aides d’État à toutes les technologies liées aux énergies renouvelables, a supprimé l’obligation d’organiser des appels d’offres ouverts pour les technologies moins matures (auxquelles elle s’appliquait précédemment en vertu des règles de l’UE) et a encore relevé les seuils de notification des aides d’État (Encadré 1.5). Il faudra évaluer ces mesures et les ajuster, si nécessaire, afin de réduire au minimum leurs effets préjudiciables potentiels sur la concurrence. Plus précisément, la création d’aides à l’investissement vert destinées à empêcher les délocalisations pourrait entraîner des courses aux subventions préjudiciables.
Encadré 1.5. Le plan industriel du pacte vert implique un nouvel assouplissement des règles relatives aux aides d’État
Dans sa communication de février 2023 intitulée « Un plan industriel du pacte vert pour l’ère du zéro émission nette », la Commission fixe pour objectif le renforcement des capacités de production manufacturière neutres en carbone de l’UE et la promotion de l’utilisation de matériaux durables dans la construction et d’autres secteurs. Elle propose également des mesures pour renforcer la compétitivité des secteurs européens neutres en carbone. Ce plan a pour point de départ la nécessité d’accroître massivement le développement technologique ainsi que la fabrication de produits à zéro émission nette, et de renforcer l’approvisionnement en énergie renouvelable au cours de la prochaine décennie. Le plan repose sur quatre piliers : (i) un environnement réglementaire prévisible et simplifié, (ii) un accès plus rapide aux financements ; (iii) les compétences et (iv) des échanges commerciaux ouverts pour des chaînes d’approvisionnement résilientes. Les deux premiers piliers sont ceux qui intéressent le plus directement le marché unique.
Un environnement réglementaire prévisible et simplifié
Pour améliorer l’environnement réglementaire, la Commission a présenté en 2023 trois propositions clés :
Un règlement « zéro émission nette » destiné à soutenir la production industrielle de produits à zéro émission nette et la réalisation de projets stratégiques multinationaux dans ce domaine. Les mesures prises à cet égard consisteront notamment à accélérer les procédures d’autorisation, à simplifier l’identification des projets communs et à élaborer des normes européennes favorisant le déploiement de technologies clés. Le soutien apporté aux projets stratégiques multinationaux vise à garantir que tous les pays puissent développer leurs secteurs innovants.
Un règlement sur les matières premières critiques destiné à garantir l’accès aux matières premières essentielles pour la fabrication de technologies et de produits à zéro émission nette en renforçant le dialogue international et en facilitant l’extraction, la transformation et le recyclage des matières premières, tout en garantissant le respect de normes environnementales strictes.
Une réforme du marché de l’électricité, dans le cadre du plan RePowerEU.
Un accès plus rapide aux financements
Pour accélérer l’accès aux aides financières, la Commission a encore assoupli temporairement les règles relatives aux aides d’État, utilisant la flexibilité prévue dans le Traité pour remédier à de graves perturbations économiques, en passant de l’encadrement de crise temporaire actuel à un encadrement temporaire de crise et de transition. Cet assouplissement vise en particulier à accélérer l’approbation de certaines transactions.
Ce nouvel encadrement élargit le champ d’application des dispositions simplifiées concernant les aides au déploiement des énergies renouvelables à toutes les technologies renouvelables, en supprimant l’obligation d’organiser des appels d’offres ouverts pour les technologies moins matures, et en allongeant les délais d’achèvement des projets qui bénéficient d’aides. Il assouplit également les règles relatives aux aides à la décarbonation des procédés industriels en permettant d’octroyer des aides correspondant à des pourcentages standard des coûts d’investissement, et de fixer des plafonds d’aide plus souples par bénéficiaire pour les régimes remplissant des conditions spécifiques. En outre, il prévoit des régimes renforcés d’aides à l’investissement en faveur de la production de technologies stratégiques à zéro émission nette, ainsi que des aides supplémentaires en faveur de nouveaux projets relatifs aux chaînes de valeur à zéro émission nette stratégiques. Enfin, la Commission a modifié le règlement général d’exemption par catégorie. Les modifications apportées accordent aux pays de l’UE plus de souplesse pour concevoir et mettre en œuvre des mesures d’aide destinées à des secteurs essentiels aux fins de la transition écologique. Elles leur offrent aussi davantage de possibilités d’aider des projets de recherche-développement de type PIIEC. Ces mesures, conjuguées au code de bonnes pratiques relatif aux projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) préparé par la Commission, pourraient également rationaliser et simplifier l’approbation des PIIEC.
Pour éviter une fragmentation du marché unique résultant du niveau variable des aides nationales, la Commission propose également d’accroître les financements au niveau de l’UE via plusieurs canaux :
Le programme InvestEU, qui soutient dans l’UE les investissements publics et privés réalisés dans les technologies à zéro émission nette et l’innovation industrielle et qui est mis en œuvre avec la collaboration de la Banque européenne d’investissement (BEI), du Fonds européen d’investissement (FEI) et d’autres institutions participantes, a débouché jusqu’ici sur des accords de garantie représentant une valeur totale de 21 milliards EUR. Ce programme est ciblé sur les entreprises à moyenne capitalisation et les PME à haut risque qui ne disposent pas de garanties suffisantes, et axé en priorité sur les investissements transnationaux . (Commission européenne, 2023[76])
Le Fonds pour l’innovation soutient les stratégies et les solutions technologiques innovantes réduisant les émissions de carbone dans les secteurs à forte intensité énergétique et renforçant le stockage de l’énergie. La Commission prévoit de lancer à l’automne 2023 un appel d’offres pour soutenir la production d’hydrogène renouvelable, et d’élargir la portée de ce mécanisme de mise en concurrence à d’autres technologies à zéro émission nette, notamment aux batteries et aux électrolyseurs.
À moyen terme, la Commission propose de créer un Fonds de souveraineté européen pour préserver une avance technologique européenne dans les domaines clés liés aux transitions écologique et numérique.
La Commission reconnaît que le plan industriel du pacte vert exigera des investissements privés importants et souligne l’importance que revêt l’achèvement de l’union des marchés des capitaux pour améliorer l’accès aux financements des particuliers et des entreprises.
Source : Commission européenne (2023[84])
L’UE peut contribuer à renforcer la résilience
Les évolutions de l’environnement géopolitique consécutives à la pandémie ainsi que les transitions écologique et numérique conduisent l’UE à reconsidérer son approche de la politique industrielle, en ne la limitant plus à la réglementation d’un grand marché intérieur. La Commission a proposé plusieurs mesures destinées à renforcer la résilience du marché, comme l’instrument du marché unique pour les situations d’urgence garantissant une solidarité entre les États membres en cas de crise future. L’UE continue également d’atténuer ses différentes formes de dépendance stratégique au moyen de nouvelles alliances industrielles et d’efforts accrus en matière de réglementation et de normalisation (Commission européenne, 2021[85]). Ces initiatives vont dans la bonne direction et devraient être poursuivies même s’il convient de déterminer leurs limites avec soins et de préserver une économie ouverte. Les exigences tenant à la résilience économique peuvent justifier l’instauration de procédures communes de passation des marchés, la constitution de réserves stratégiques de produits essentiels, ainsi qu’un meilleur recensement des risques et des réseaux de réponse rapide facilitant la coopérant public-privé en cas de crises. De même, des mesures bien conçues destinées à remédier aux défaillances du marché à l’intérieur ou à l’extérieur de l’UE pourraient être utiles lorsque les avantages qui en découlent sont supérieurs aux coûts. Toutefois, les politiques d’autonomie stratégiques pourraient entraîner des inefficiences dans le domaine des échanges. Ces interventions créent une réorientation des courants d’échanges – à savoir une hausse des échanges au sein de l’UE – qui ne suffit pas à compenser la perte des échanges extérieurs qui en résulte (Bauer, 2022[86]). L’action de l’UE devrait donc continuer d’être guidée par la proportionnalité et par l’adhésion aux principes du multilatéralisme et du libre-échange fondé sur des règles.
Une préoccupation connexe réside dans la possibilité qu’une pénurie de matières premières critiques sape l’autonomie stratégique de l’UE et ralentisse les transitions écologique et numérique. L’Union européenne est fortement tributaire des importations de matières premières nécessaires à la production de batteries et d’éoliennes, notamment de lithium, de nickel et de cobalt pour les batteries, ainsi que de terres rares pour les aimants permanents, et prévoit de diversifier ses importations grâce à de nouveaux accords commerciaux conclus avec l’Australie et le Chili. En outre, les approvisionnements en matières premières critiques au sein de l’UE sont entravés par de longues procédures d’autorisation (Bobba et al., 2020[87]). La Commission européenne a proposé de considérer les projets stratégiques relatifs aux matières premières comme des projets d’intérêt public, et encourage les pays de l’UE à ramener la durée des procédures d’autorisation des projets à deux ans pour les activités d’extraction et à un an pour les activités de transformation et de recyclage (Commission européenne, 2023[88]). Une mise en œuvre rapide de cette proposition permettrait à terme de réduire la dépendance de l’UE à l’égard des importations de matières premières stratégiques.
Le but de la politique industrielle de l’UE devrait être de créer des conditions cadre saines et de faciliter l’adaptation aux évolutions structurelles. Les fonds publics doivent être utilisés de manière proportionnée pour remédier aux défaillances du marché, en vue de susciter des investissements privés supplémentaires, qui n’auraient pas été réalisés en l’absence de ces financements publics (OCDE, 2020[89]). Au lieu d’assouplir les règles relatives aux aides d’État et de multiplier ainsi les risques de distorsions et de fragmentation des marchés, l’UE pourrait tirer parti d’approches communes à plusieurs pays afin d’apporter un soutien accessible à toutes les entreprises du marché unique. Ainsi, les projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) favorisent la mise en commun de ressources publiques nationales dans des domaines où le seul fonctionnement des marchés ne peut déboucher sur des innovations de rupture.
Les PIIEC constituent un vecteur de soutien en plein essor pour les projets dans le domaine de la recherche, du développement et de l’innovation que le secteur privé ne peut financer à lui seul. Ils vont de pair avec des aides d’État assorties de règles spécifiques et se caractérisent par des financements d’une ampleur considérable par rapport à d’autres dispositifs publics de soutien. Ainsi, les trois PIIEC qui avaient été adoptés à la fin de 2021 – un projet sur la microélectronique et deux sur la chaîne de valeur des batteries – mobilisaient près de 8 milliards EUR de fonds publics, auxquels s’ajoutaient 20 milliards EUR de financements privés (Eisl, 2022[90]). Néanmoins, ce cadre pâtit de l’absence d’une large participation des PME et des entreprises de certains pays de l’UE, ce à quoi la Commission a récemment tenté de remédier en modifiant le RGEC. Une autre lacune majeure réside dans le manque de transparence concernant les décisions d’investir des fonds publics et la gouvernance des projets. Les informations disponibles sur les PIIEC existants ne sont pas suffisantes pour permettre de déterminer si les fonds publics sont utilisés de manière efficiente, ou s’ils ont pour effet de fausser la concurrence. Dans les cas de figure où l’intérêt général résidant dans une utilisation efficiente des fonds publics l’emporte sur l’intérêt des entreprises résidant dans une divulgation limitée des informations, celles-ci devraient être rendues publiques de manière accessible et en temps opportun (Poitiers et Weil, 2022[91]).
Il faut nettement améliorer la gouvernance des projets importants d’intérêt européen commun pour renforcer leur coordination et leur harmonisation entre pays, ainsi que l’égalité d’accès des entreprises. Malgré le rôle qu’ils pourraient jouer dans la politique industrielle de l’UE, les PIIEC sont des exercices nationaux, caractérisés par de fortes variations des procédures et des modalités de communication d’informations sur les projets. Cette situation fait peser une charge injustifiée sur les entreprises, qu’une simplification et une harmonisation des règles au niveau de l’Union européenne pourraient contribuer à réduire. Cette évolution aiderait de futurs PIIEC grâce à un forum d’échange permettant de partager les meilleures pratiques nationales. En outre, améliorer le soutien apporté aux entreprises sollicitant l’approbation de PIIEC au niveau de l’UE pourrait contribuer à atténuer les écarts de capacités techniques et administratives entre pays. Ainsi, de tels services de soutien pourraient consister à dispenser des formations sur la rédaction des demandes d’approbation de PIIEC, ainsi qu’à réunir des idées de projet auprès des entreprises et à les conseiller sur la meilleure façon de les faire correspondre aux exigences des projets importants d’intérêt européen commun. Enfin, la Commission doit affecter suffisamment de ressources aux PIIEC, notamment de capacités administratives, pour assurer leur évaluation approfondie et leur mise en œuvre rapide (Eisl, 2022[92]).
L’UE pourrait aussi étoffer les subventions aux activités vertes de recherche-développement et d’innovation ainsi qu’au déploiement des technologies vertes de nouvelle génération en phase de démarrage. Pour ces projets en phase de démarrage, le soutien de l’UE devrait reposer sur des instruments qui soient simples d’un point de vue administratif et permettent également de cibler les aides sur les petites entreprises. Les grandes entreprises peuvent parfois jouer un rôle d’ancrage, mais il importe de veiller à ce que les acteurs de petite taille soient également soutenus, étant donné que les nouvelles solutions technologiques de rupture sont souvent élaborées par de jeunes entreprises. Pour éviter de remettre en cause l’équité des conditions de concurrence au sein du marché unique, il faudrait que ces aides soient attribuées au niveau de l’UE, qu’elles consistent essentiellement en des subventions, et qu’elles soient axées sur les projets technologiques à haut risque en phase de démarrage (Tagliapietra et Veugelers, 2021[93]).
Des mesures autres que les subventions, telles qu’une simplification des règles relatives aux procédures d’autorisation et aux marchés publics écologiques, peuvent contribuer efficacement au développement des technologies vertes. Le règlement temporaire d’urgence adopté en décembre 2022 pour accélérer les procédures d’autorisation relatives aux infrastructures et aux réseaux en matière d’énergie renouvelable (Règlement (UE) 2022/2577), de même que l’accélération des procédures d’autorisation prévue dans les propositions législatives relatives aux matières premières critiques et au « zéro émission nette » de mars 2023, constitue donc une avancée dans la bonne direction. Les marchés publics représentent environ 14 % du PIB de l’UE et une large part du marché dans des domaines comme les transports, la construction et les services de santé. Dans ces secteurs, les décisions d’achat des pouvoirs publics peuvent favoriser l’innovation verte en permettant aux start-ups de réaliser des économies d’échelle (Mazzucato, 2013[94]). De même, en instaurant des exigences de durabilité, l’UE pourrait donner la priorité aux technologies propres conformes aux normes européennes sans recourir à des mesures plus controversées, comme les exigences de contenu local (Kleinmann et al., 2023[80]).
Ainsi, l’UE pourrait également s’efforcer d’obtenir une exemption des dispositions de la Loi américaine sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act ou IRA) adoptée aux États-Unis, relatives aux crédits d’impôt accordés aux acheteurs de véhicules électriques, subordonnés à des exigences de contenu local concernant les composants de batterie et les minerais critiques nécessaires à la fabrication de ces véhicules. Plusieurs possibilités ont été suggérées à cet égard, notamment élargir le périmètre de la définition des accords de libre-échange qui figure dans l’IRA, afin qu’elle recouvre les accords en cours de négociation ou les accords plurilatéraux (Bouët, 2023[95]). Des négociations bilatérales concernant la mise en œuvre de l’IRA se déroulent depuis octobre 2022 et ont déjà produit des résultats, tels qu’un assouplissement des dispositions relatives aux voitures louées en crédit-bail fournies par des entreprises de l’UE.
Éviter une fragmentation du marché pour favoriser l’émergence d’une économie numérique et verte
Pour les transitions numérique et écologique, il est important d’approfondir le marché unique. Une poursuite de l’harmonisation et du renforcement des mécanismes de reconnaissance mutuelle des normes permet aux entreprises de vendre les biens et services qu’elles produisent à l’étranger, et cette concurrence fait diminuer les prix tout en stimulant l’innovation (voir ci-avant). Néanmoins, des obstacles de taille subsistent, notamment la fragmentation des cadres réglementaires applicables aux marchés numériques et à l’économie circulaire.
Le règlement sur les marchés numériques de 2022 habilite la Commission européenne à désigner comme « contrôleurs d’accès » de grandes plateformes en ligne, auxquelles incomberont à ce titre certaines obligations : il leur sera notamment interdit de classer leurs propres services avant ceux de leurs concurrents, et elles seront tenues d’autoriser les utilisateurs à accéder à leurs propres données et à les transférer à des services concurrents. La Commission est également habilitée à mener des enquêtes de marché en lien avec la fonction de contrôleur d’accès exercée par les grandes plateformes en ligne. En cas d’infraction systématique au règlement sur les marchés numériques, la Commission peut imposer des mesures correctives comportementales ou structurelles. Les mesures structurelles peuvent aller jusqu’à contraindre les entreprises visées à céder certaines de leurs activités, voire à imposer le démantèlement des plateformes (Commission européenne, 2022[96]). De fait, dans le domaine couvert par la législation – à savoir les services essentiels offerts par les grandes plateformes en ligne désignées comme contrôleurs d’accès – le règlement sur les marchés numériques réduira la fragmentation de ces marchés car il est interdit aux pays de l’UE d’imposer aux contrôleurs d’accès des obligations supplémentaires ayant le même objet que celui du règlement. Toutefois, le règlement ne s’applique qu’à un nombre limité d’entreprises désignées en tant que contrôleurs d’accès et ne concerne qu’un nombre réduit de services essentiels proposés par les plateformes. Il ne limite donc guère la fragmentation réglementaire dans les domaines d’action situés hors de son champ d’application. De plus, le droit européen de la concurrence et les règles de concurrence nationales continuent de s’appliquer. Ainsi, en Allemagne, les plateformes numériques peuvent faire l’objet de règles de concurrence supplémentaires et plus strictes, pour autant que l’entreprise ait une importance primordiale pour la concurrence s’exerçant sur les différents marchés du pays. Le règlement autorise les autorités allemandes à appliquer selon ses termes ces règles aux entreprises qui ne sont pas des contrôleurs d’accès ou à imposer des obligations supplémentaires aux contrôleurs d’accès. Par conséquent, on voit que les obligations imposées aux plateformes peuvent différer au sein de l’UE. Ces règles variables auxquelles les entreprises doivent se conformer pourraient freiner la croissance des plateformes numériques européennes et ouvrir la voie à l’arbitrage réglementaire. Par conséquent, il est nécessaire d’harmoniser davantage les réglementations nationales relatives aux plateformes en ligne dans les domaines ne relevant pas du champ d’application du règlement sur les services numériques.
Les règles nationales relatives à l’économie circulaire vont souvent à l’encontre des efforts d’harmonisation déployés à l’échelle de l’UE dans son ensemble, comme les normes d’efficacité matérielle relatives aux produits électroniques et aux déchets électroniques. Ainsi, la France a adopté des normes d’efficacité matérielle pour les smartphones malgré les travaux effectués au niveau de l’UE sur les mêmes catégories de produits. Cela peut déboucher sur des incohérences entre les dispositions de l’UE et les mesures nationales. En outre, l’application du droit européen relatif aux déchets électroniques est inégale et varie selon les pays, ce qui entrave la libre circulation des biens et crée de nouveaux coûts administratifs. Ainsi, certains produits électroniques et modules photovoltaïques usagés sont considérés comme des déchets électroniques en Allemagne, ce qui signifie qu’ils ne peuvent être vendus dans d’autres pays de l’UE, même s’il s’y trouve des acheteurs disposés à les réparer pour continuer à les utiliser (Pinto et Renda, 2022[97]).
Dans les temps à venir, il importera de réduire la consommation de matières liée aux appareils électroniques pour la durabilité de la croissance et l’économie circulaire. Afin de faire diminuer la consommation de matières et les effets négatifs des produits sur l’environnement de manière plus générale, la Commission européenne a proposé en 2022 des exigences communes en matière de réparabilité et de réemploi des biens vendus sur le marché unique, notamment des produits électroniques, ainsi qu’une amélioration des informations relatives aux produits via la mise en place d’un passeport numérique de produit (Commission européenne, 2022[98]). Ces exigences communes et ces normes d’efficacité matérielle sont bienvenues. L’UE devrait veiller à ce que les règles et normes nationales relatives à l’efficacité matérielle et aux déchets électroniques soient en phase avec celles de l’UE, afin de garantir des conditions de concurrence équitables. Réduire la consommation de matières facilitera également la transition écologique, sachant que les émissions incorporées dans les appareils électroniques devraient se hisser de 1 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’UE en 2020 à 3 % en 2025 (The Shift Project, 2019[99] ; AIE, 2022[100] ; Freitag et al., 2021[101]).
Pour renforcer la sécurité des approvisionnements en matières premières, il faudra aussi rehausser les taux de recyclage, comme cela est évoqué dans la proposition de règlement de l’UE sur les matières premières critiques (Commission européenne, 2023[88]). Néanmoins, la disparité des règles nationales relatives aux déchets à l’échelle de l’UE entrave le développement de marchés secondaires des matières premières recyclées. Or, ces marchés peuvent réduire les besoins d’extraction de matières premières et les effets connexes sur l’environnement. Ainsi, les divergences entre les normes techniques applicables aux matériaux recyclés font obstacle aux échanges transfrontaliers (Agence européenne pour l’environnement, 2022[102]). En outre, les marchés des matières secondaires sont rarement compatibles avec le jeu de la concurrence en raison de la faiblesse des redevances d’utilisation perçues au titre de la gestion des déchets, puisque seuls quatre pays de l’UE ont mis en place des redevances de recouvrement intégral des coûts s’appliquant également aux coûts environnementaux (Salvetti, 2021[103]). Cela se traduit par de petits marchés fragmentés et des taux de recyclage des déchets très variables selon les pays de l’UE (Graphique 1.32). Il faudrait donc harmoniser les règles relatives aux déchets pour favoriser l’émergence de marchés efficients des matières premières secondaires. Cela passe par l’adoption de normes communes d’écoconception permettant de favoriser le recyclage des matières premières, comme cela avait été indiqué de manière plus détaillée dans l’Étude économique de l’OCDE de 2021 consacrée à l’Union européenne (OCDE, 2021[1]).
Il faut également harmoniser davantage les codes de la construction pour réduire la fragmentation de ces règles entre les pays de l’UE, voire entre régions. Les divergences de normes techniques relatives aux bâtiments réduisent la concurrence et se traduisent par une augmentation des coûts, les architectes, les promoteurs et les constructeurs limitant leurs prestations aux marchés nationaux ou locaux. Une fragmentation similaire prévaut en ce qui concerne les normes relatives aux matériaux de construction (Commission européenne, 2022[104]). Un problème connexe réside dans le manque d’informations sur les matières premières utilisées dans un bâtiment. Or, ces informations sont essentielles pour définir des stratégies de recyclage dans le secteur de la construction. Des passeports matériaux, par exemple, pourraient fournir les spécifications précises des matières premières employées dans un bâtiment, mais leur établissement nécessite l’existence de normes communes relatives aux matériaux de construction (Banque mondiale, 2022[105]). Des normes de construction harmonisées réduiront les coûts de la transition écologique. Les normes d’efficacité énergétique des bâtiments constituent un autre domaine dans lequel une harmonisation plus poussée serait de mise (Chapitre 2).
Il faut également harmoniser davantage les codes de la construction pour réduire la fragmentation de ces règles entre les pays de l’UE, voire entre régions. Les divergences de normes techniques relatives aux bâtiments réduisent la concurrence et se traduisent par une augmentation des coûts, les architectes, les promoteurs et les constructeurs limitant leurs prestations aux marchés nationaux ou locaux. Une fragmentation similaire prévaut en ce qui concerne les normes relatives aux matériaux de construction (Commission européenne, 2022[104]). Un problème connexe réside dans le manque d’informations sur les matières premières utilisées dans un bâtiment. Or, ces informations sont essentielles pour définir des stratégies de recyclage dans le secteur de la construction. Des passeports matériaux, par exemple, pourraient fournir les spécifications précises des matières premières employées dans un bâtiment, mais leur établissement nécessite l’existence de normes communes relatives aux matériaux de construction (Banque mondiale, 2022[105]). Des normes de construction harmonisées réduiront les coûts de la transition écologique. Les normes d’efficacité énergétique des bâtiments constituent un autre domaine dans lequel une harmonisation plus poussée serait de mise (Chapitre 2).
Un renforcement de la mobilité des travailleurs peut atténuer les pénuries de compétences et approfondir le marché unique
La mobilité des travailleurs dans l’UE peut jouer un rôle d’équilibrage pour les marchés du travail nationaux confrontés à un excédent ou à une pénurie de main-d’œuvre. Après avoir diminué pendant la pandémie, la mobilité de la main-d’œuvre s’est redressée en 2021. La catégorie la plus nombreuse en 2021 était celle des travailleurs en mobilité internationale longue, qui comptait environ 8 millions de personnes d’âge actif d’après les données de l’enquête sur les forces de travail, suivie de 2.2 millions de travailleurs détachés et de 1.7 million de travailleurs frontaliers. Environ 81 % des personnes en mobilité internationale au sein de l’UE, soit 6.5 millions d’individus, étaient économiquement actives, alors que le taux d’activité des nationaux s’établissait à 79 % et celui des ressortissants de pays tiers à 70 % (Commission européenne, 2023[106]). Bien que les effectifs de travailleurs en mobilité internationale aient constamment augmenté de 2012 à 2021, les flux internationaux de travailleurs restent trop limités pour réduire sensiblement le chômage dans les pays d’origine (Elsner et Zimmermann, 2016[107]).
Les problèmes subsistants qui entravent la mobilité de la main-d’œuvre au sein de l’UE incluent la reconnaissance des qualifications professionnelles et universitaires entre les pays, qui n’est encore généralement acceptée qu’au cas par cas, ainsi que la diversité linguistique et culturelle, qui pourrait être atténuée au moyen d’un programme renforcé Erasmus+ offrant aux jeunes des ressources d’apprentissage et de formation. De plus, une meilleure portabilité des droits à la retraite et l’exportabilité des prestations de chômage, ainsi que le déploiement complet du système d’échange électronique d’informations sur la sécurité sociale permettraient d’accélérer le calcul des prestations de sécurité sociale auxquelles les travailleurs peuvent prétendre et favoriseraient la mobilité de la main-d’œuvre. Les mesures susceptibles de contribuer à favoriser cette mobilité au sein de l’UE sont examinées plus en détail au chapitre 2 ainsi que dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée en 2021 à la zone euro (OCDE, 2021[43]).
Le détachement de travailleurs dans un autre pays constitue une forme courante de mobilité de courte durée de la main-d’œuvre dans l’UE. Il est cependant quantitativement limité et concentré dans plusieurs pays de l’Union européenne, comme la Pologne, l’Allemagne, la France et la Belgique. En 2021, on comptait environ 2.2 millions de travailleurs détachés et 3.6 millions de détachements de travailleurs dans l’UE, auxquels s’ajoutaient 1.7 million de travailleurs frontaliers (Commission européenne, 2023[106]), qui représentaient dans leur ensemble environ 2 % de l’emploi total dans l’Union européenne. La législation européenne applicable dans ce domaine – c’est-à-dire la directive concernant le détachement de travailleurs et la directive relative à son exécution – vise à garantir une égalité de traitement entre les travailleurs détachés et les travailleurs réguliers dans le pays d’accueil en matière de salaire minimum, de rémunération, de temps de travail et de sécurité. Néanmoins, les entreprises, en particulier les PME, continuent de considérer la charge administrative découlant des règles relatives au détachement de travailleurs comme un des principaux obstacles au marché unique (Eurochambres, 2019[108]). Les formalités administratives à accomplir sont souvent lourdes et la charge réglementaire continue de varier suivant les pays. Les barrières linguistiques et la nécessité de traduire les contrats ainsi que d’autres documents peuvent souvent alourdir encore les coûts. En conséquence, le temps nécessaire pour faire enregistrer un détachement a été récemment estimé à 66 minutes pour l’Autriche et l’Allemagne, à 71 minutes pour l’Italie et à 80 minutes pour la France (Stiftung Familienunternehmen, 2023[109]). Dans la mesure où les entreprises doivent faire enregistrer leurs travailleurs détachés dans le pays d’accueil, la charge découlant de la réglementation nationale pèse principalement sur les entreprises étrangères, et les administrations nationales ne sont guère incitées à améliorer leurs services.
Des règles harmonisées à l’échelle de l’UE dans son ensemble, définissant les exigences normales à satisfaire en matière de documentation et une liste commune d’exemptions, contribueraient à réduire les coûts associés au détachement de travailleurs. De même, fusionner les procédures de demande concernant les travailleurs détachés et les certificats (documents portables A1) requis pour la déclaration des cotisations de sécurité sociale versées en cas d’emploi occupé à l’étranger contribuerait à simplifier les formalités à accomplir pour les détachements de travailleurs. Il pourrait également être envisagé d’exempter davantage de l’application des directives relatives au détachement de travailleurs les emplois de courte durée, correspondant par exemple à des travaux de réparation, des services de maintenance ou des affectations d’urgence.
Tableau 1.6. Soutenir une reprise inclusive dans l’ensemble de l’UE
Principales recommandations de l’Étude de 2021 |
Mesures prises depuis 2021 |
---|---|
Rendre obligatoire l’utilisation d’outils numériques pour fournir des informations sur les produits, y compris sur leurs possibilités de recyclage et de réparation. |
La Commission a proposé en mars 2022 d’instaurer un passeport numérique de produit dans le cadre du nouveau règlement sur l’écoconception pour des produits durables. S’il est adopté, ce nouvel instrument permettra d’accéder sous forme numérique aux informations relatives à la durabilité de tous les produits couverts par le règlement. |
Mener des projets-pilotes pour mettre en place des modèles économiques circulaires innovants, par exemple des systèmes de covoiturage fondés sur les technologies numériques. |
Aucune mesure n’a été prise. |
Élaborer une méthodologie de communication d’informations sur la durabilité d’une sélection de produits et l’intégrer dans la directive de l’UE sur l’écoconception des produits. |
Le règlement sur l’écoconception pour des produits durables est destiné à remplacer la directive sur l’écoconception en vigueur, en élargissant son champ d’application à un plus grand nombre de produits et à davantage d’aspects environnementaux que la seule efficacité énergétique. L’approche actuelle est complétée par des incitations visant à renforcer la demande de produits durables, prenant par exemple la forme de critères obligatoires en matière de marchés publics écologiques. |
Renforcer le cadre de lutte contre la corruption des pays et des institutions de l’UE
La corruption amoindrit l’efficience économique, aboutit à un gaspillage des ressources publiques, creuse les inégalités économiques et sociales et sape la confiance des citoyens dans les institutions publiques (OCDE, 2017[110]). La Commission joue un rôle de premier plan dans la coordination et la promotion de la mise en œuvre d’un cadre de lutte contre la corruption dans l’ensemble des pays de l’UE, en intervenant dans de nombreux domaines tels que le système judiciaire, la lutte contre le blanchiment de capitaux, la protection des lanceurs d’alerte, l’ouverture d’enquêtes et de poursuites dans les affaires de corruption à haut niveau, la transparence et les activités de lobbying (Commission européenne, 2023[111]) (EUCRIM, 2020[112]). S’il y a eu des avancées dans ces domaines, il reste des défis à relever. L’efficacité des cadres législatifs et d’action varie au sein de l’UE et la perception de la corruption est plutôt élevée dans certains pays (Graphique 1.33). Le nouveau paquet contre la corruption (voir plus loin), lancé par la Commission en mai 2023, vise à renforcer encore davantage le cadre de lutte contre la corruption et à harmoniser les règles en vigueur dans les différents pays (Commission européenne, 2023[113]) (Commission européenne, 2023[114]).
Dans le domaine de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, la Commission a proposé quatre actes législatifs en juillet 2021 : un nouveau règlement (RLBC) et une directive (DLBC), un règlement instituant une nouvelle autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et un règlement révisé sur le transfert de fonds étendant les exigences de traçabilité aux crypto-actifs (Commission européenne, 2021[115]). En juin 2022, le Parlement européen et le Conseil de l’UE sont parvenus à un accord politique au sujet du règlement révisé sur le transfert de fonds. Le Conseil a arrêté sa position sur les propositions en ce sens entre juin et décembre 2022, tandis que les commissions compétentes du Parlement européen ont arrêté la leur à la fin du mois de mars 2023, ouvrant ainsi la voie aux négociations en « trilogue » en vue de l’adoption du nouveau « corpus réglementaire de l’UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux » et du Règlement instituant une nouvelle autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux (Graphique 1.34) (Conseil de l'Union européenne, 2022[116]) (EUCRIM, 2022[117]). Les nouvelles mesures proposées prévoient l’extension des obligations en matière de lutte contre le blanchiment aux opérateurs concernés au nom de ressortissants de pays tiers dans le contexte de programmes de résidence par investissement et aux prestataires de services de financement participatif, ainsi que l’extension des exigences de vigilance aux prestataires de services sur crypto-actifs à l’égard de la clientèle lorsqu’ils engagent ou exécutent une transaction à hauteur d’un montant supérieur à 1 000 EUR (Commission européenne, 2021[118]) (Commission européenne, 2021[119]). Enfin, le paquet législatif prévoit des règles plus détaillées et harmonisées relatives aux bénéficiaires effectifs, qui visent à améliorer la transparence grâce à une meilleure identification des structures de propriété et de contrôle complexes et à multiples niveaux. Il contient en outre une disposition empêchant les négociants de biens ou de services d’accepter des paiements en argent liquide de plus de 10 000 EUR pour un achat unique, tout en permettant aux États membres de conserver des plafonds plus bas pour les transactions en numéraire d’un montant élevé . (Commission européenne, 2021[120]).
La nouvelle proposition relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme prévoit l’établissement d’une liste des catégories minimum d’informations que les cellules de renseignement financier (CRF) doivent pouvoir consulter afin d’améliorer leur capacité à conduire des analyses, à diffuser les résultats de leurs évaluations aux autorités d’enquête nationale ou de l’UE compétentes et à répondre aux demandes de renseignements adressées par leurs homologues d’autres pays membres. Les CRF sont des agences nationales centrales communiquant des renseignements financiers aux autorités d’enquête et de poursuite compétentes dans les affaires relatives au blanchiment de capitaux, aux infractions sous-jacentes et au financement du terrorisme. En vertu des nouvelles mesures contenues dans ce paquet, certaines personnes physiques et morales ayant un intérêt légitime, comme les journalistes ou les organisations de la société civile, continueraient d’avoir accès au registre des bénéficiaires effectifs. En application de la 5e directive antiblanchiment, l’accès à ces informations a été accordé à l’ensemble du public. En novembre 2022, la Cour de justice de l’UE a prononcé l’invalidité de cette disposition, au motif qu’elle violait la Charte des droits fondamentaux en matière de protection des données à caractère personnel et de respect de la vie privée (Cour de justice de l’UE, 2022[121]). Les mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux et contre le financement du terrorisme devraient assurer que les utilisateurs agissant contre le blanchiment de capitaux puissent avoir accès aux informations sur la propriété effective des entreprises, tout en définissant des garanties suffisantes de protection des données. Cet aspect devrait être examiné au cours des négociations en « trilogue ».
Jusqu’à présent, la supervision de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme a été assurée au niveau national et s’est caractérisée par une inégalité en termes d’efficacité, de qualité et de ressources (Commission européenne, 2021[122]). La nouvelle autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux dont la création a été proposée coordonnerait les autorités de surveillance nationales afin de garantir l’application uniforme des règles de l’UE et l’élimination des différences entre les pratiques nationales. Elle veillerait au bon fonctionnement du système de surveillance de l’UE, notamment en coordonnant l’entraide judiciaire et les examens thématiques. Elle surveillerait en outre certaines entités du secteur financier (notamment les prestataires de services sur crypto-actifs), et serait dotée de pouvoirs de sanction en cas de manquement aux obligations de lutte contre le blanchiment. Elle possèderait également des pouvoirs de coordination et de surveillance du secteur non-financier. Enfin, elle renforcerait la coopération ainsi que les échanges d’informations entre les cellules de renseignement financier des pays de l’UE. Ces dispositions pourraient améliorer la détection et le traitement des affaires de blanchiment de capitaux majeures, qui concernent souvent plusieurs pays de l’UE, notamment si la nouvelle autorité était pleinement opérationnelle fin 2026. L’autorité exercerait progressivement les compétences de l’Autorité bancaire européenne en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (Commission européenne, 2021[115]).
Il y a eu une amélioration en matière d’enquêtes et de poursuites dans le cadre des affaires de fraude et d’atteinte aux intérêts financiers de l’UE. L’adoption, en 2017, de la directive relative à la lutte contre la fraude pour protéger les intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal (la « directive PIF ») et la modification du « Règlement relatif à l’OLAF » régissant l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) ont renforcé la protection financière du budget de l’UE, comme on l’a vu dans l’Étude économique de l’OCDE consacrée à l’Union européenne parue en 2021 (EUCRIM, 2021[123] ; OCDE, 2021[1]). La directive PIF est un instrument essentiel d’harmonisation du droit pénal entre les pays de l’UE concernant les infractions portant atteinte au budget de l’Union, au sujet desquelles le Parquet européen instruit des enquêtes et en poursuit les auteurs. Le Règlement relatif à l’OLAF modifié contient des dispositions visant à améliorer la coopération entre le Parquet européen et l’OLAF, qui est chargé des enquêtes administratives. Au total, en 2021, à la suite de signalements de l’OLAF, le Parquet européen a ouvert des enquêtes sur des infractions ayant causé un préjudice estimé à 2.2 milliards EUR (OLAF, 2022[124]) (EPPO, 2021[125]).
La coopération future entre le Parquet européen et l’OLAF pourrait améliorer le taux de mise en examen, dans la mesure où le pourcentage d’affaires transmises aux autorités judiciaires nationales ayant donné lieu à une mise en examen est actuellement faible, puisqu’il n’a été que de 35 % entre 2017 et 2021 (OLAF, 2022[124]). Les pouvoirs de l’OLAF se limitant à mener des enquêtes administratives et à formuler des recommandations, le suivi et l’exercice de poursuites pénales restent du ressort des autorités judiciaires nationales. Le renforcement accru de la coopération entre l’OLAF et les acteurs judiciaires des États membres pourrait diminuer le nombre de recommandations de l’OLAF classées sans suite à un stade précoce par les autorités nationales. Par ailleurs, la transposition intégrale de la « directive PIF », qui définit le champ d’action du Parquet européen, doit être achevée au plus vite. Actuellement, les 17 procédures d’infraction en cours concernent principalement la transposition incorrecte de la définition des infractions pénales (à savoir la fraude, la corruption et le détournement de fonds), les sanctions et les délais de prescription (Commission européenne, 2022[126]). En outre, les procédures visant à établir et à finaliser les arrangements de travail bilatéraux entre le Parquet européen et les États non participants (cinq à ce jour) n’avancent pas toutes au même rythme et doivent être accélérées (Commission européenne, 2021[127]).
La surveillance antifraude exercée par l’OLAF est importante, mais les États doivent également améliorer et renforcer leurs capacités nationales dans ce domaine. Le programme de l’Union en matière de lutte contre la fraude, lancé par l’OLAF en 2021, a été créé à cette fin et dispose d’un budget de 181 millions EUR, qui doit être affecté sur la période 2021-27. Le budget de ce programme est consacré aux activités renforçant la coopération et l’assistance entre les autorités nationales, par exemple pour prévenir et détecter les irrégularités douanières (OLAF, 2022[124]). Le soutien de l’OLAF aux administrations des douanes a été particulièrement évident dans les domaines de la transition écologique et du développement durable. La transition écologique étant l’une des priorités absolues de la Commission (chapitre 2) et le montant des fonds de l’UE alloués étant assez important, l’OLAF a mené, en 2021, des enquêtes qui ont contribué à prévenir le commerce illicite de biens préjudiciables à l’environnement, comme les déchets, les pesticides et les gaz, notamment les gaz réfrigérants, qui sont de puissants gaz à effet de serre pour lesquels l’UE a fixé un quota d’importation. En ce qui concerne la protection de la finance verte, l’OLAF a formulé, en 2021, 10 recommandations financières sur le recouvrement de fonds dont les bénéficiaires ont fait un usage abusif. L’inscription de ces derniers sur la liste d’exclusion du système de détection rapide et d’exclusion (EDES) a été proposée (OLAF, 2022[124]).
Le système EDES sert à l’UE à empêcher les personnes ou les entités représentant un risque pour ses intérêts financiers de recevoir des fonds de l’Union. C’est un outil très efficace pour prévenir la fraude, la corruption, la participation à une organisation criminelle ainsi que l’organisation de l’insolvabilité fiscale et la fraude fiscale, comme le non-paiement des impôts ou des cotisations et contributions sociales (OCDE, 2021[128]). Comme la 5e directive antiblanchiment (présentée plus haut), le système EDES a fait l’objet de limitations relatives à la publication d’informations sur les personnes et les entités représentant un risque. Afin de garantir le respect de la Charte des droits fondamentaux en matière de protection des données à caractère personnel, la publication des informations a été limitée aux affaires les plus graves. En outre, le champ d’application du système EDES se limite aux agents économiques qui reçoivent des fonds de l’UE dans le cadre de la gestion directe ou indirecte, soit seulement 24 % du budget de l’UE. La Commission a déjà présenté une proposition de modification du Règlement financier visant à étendre EDES aux financements décaissés dans le cadre de la gestion partagée et de la gestion directe avec les États membres (par exemple, la Facilité pour la reprise et la résilience). Comme l’a recommandé le Parlement européen, les États membres devraient également envisager d’exclure les personnes et entités figurant sur la liste d’exclusion EDES de tout financement tiré sur les budgets des administrations centrales nationales (Commission européenne, 2018[129]) (Commission européenne, 2019[130]) (Parlement européen, 2021[131]) (Cour des comptes européenne, 2022[132]).
Le règlement sur la conditionnalité récemment adopté est un autre instrument visant à protéger les intérêts financiers de l’UE et s’applique à l’ensemble des financements de l’Union. Ce règlement, applicable depuis janvier 2021, établit les critères d’application de différentes mesures budgétaires, comme la suspension des paiements sur le budget de l’UE aux États membres qui portent atteinte aux principes de l’« état de droit », tels que la sécurité juridique, l’indépendance du système judiciaire, la séparation des pouvoirs, la non-discrimination et l’interdiction de l’arbitraire du pouvoir exécutif. Il s’applique lorsque ces violations des principes de l’état de droit portent atteinte ou présentent un risque sérieux de porter atteinte à la bonne gestion financière du budget de l’Union ou à la protection des intérêts financiers de l’Union (Parlement européen, Conseil européen, 2020[133]). En février 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a rejeté les recours formés par deux États membres qui contestaient la conformité du Règlement aux traités de l’UE (Cour de justice de l’UE, 2022[134]). En avril 2022, la Commission a pour la première fois eu officiellement recours au mécanisme du « Règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit » à l’encontre d’un État membre, après avoir constaté des violations des principes de l’UE dans les domaines des marchés publics, de l’efficacité des poursuites et de la lutte contre la corruption (Commission européenne, 2022[135]) (Commission européenne, 2022[136]). En décembre 2022, le Conseil a adopté des mesures ayant pour effet de suspendre 55 % des engagements budgétaires de la Commission avec ce pays (représentant environ 6.3 milliards EUR), concernant trois programmes opérationnels au titre de la politique de cohésion de l’UE et lui a interdit de contracter de nouveaux engagements juridiques avec toute fiducie d’intérêt public (ou toute entité qu’elle détient) lorsque la Commission met en œuvre le budget de l’UE dans le cadre d’un programme en gestion directe ou indirecte (Conseil de l'Union européenne, 2022[137]).
En 2022, la Commission a également formulé des recommandations à l’intention des pays de l’UE dans son rapport annuel sur l’état de droit, dont la lutte contre la corruption est l’un des quatre piliers. Ces recommandations ont pour objectif d’aider les États membres à identifier les domaines où des difficultés persistent et de les encourager à mettre en place les réformes nécessaires pour respecter pleinement les principes de l’« état de droit » de l’UE. Par exemple, des difficultés subsistent concernant la transposition complète et en temps voulu de la directive de 2019 relative à la protection des lanceurs d’alerte, qui vise à renforcer et à harmoniser cette protection dans tous les États membres. La protection des lanceurs d’alerte est une pierre angulaire importante de la lutte contre la corruption de l’UE, mais des procédures d’infraction engagées en janvier 2022 sont toujours en cours, car huit États membres n’ont pas communiqué leurs mesures de transposition complète de la directive. Il est important que le processus de transposition s’accélère (Commission européenne, 2023[138]) (Commission européenne, 2022[139]) (Commission européenne, 2022[140]) (Commission européenne, 2022[141]).
Il reste également des progrès à faire en matière d’enquêtes et de poursuites dans le cadre des affaires de grande corruption (Commission européenne, 2022[136]). La brièveté des délais de prescription et l’inefficacité des procédures de levée d’immunité font partie des facteurs nuisant au règlement des affaires complexes à haut niveau, notamment lorsque ces problèmes se combinent à la lenteur des procédures judiciaires. Il s’ensuit que les résultats de la lutte contre la corruption à haut niveau sont toujours limités dans certains pays de l’UE, qu’il s’agisse des enquêtes ou des condamnations définitives. À l’inverse, l’adoption de bonnes pratiques dans d’autres pays a produit des résultats positifs. Par exemple, l’utilisation d’outils numériques dans le système de justice a permis d’améliorer l’efficacité des procédures judiciaires et d’en raccourcir la durée (Commission européenne, 2022[142]). Par ailleurs, l’allongement des délais de prescription pour les affaires de corruption a diminué le risque d’impunité pour ce type d’infractions (Commission européenne, 2022[143]). Ces résultats ont également été obtenus grâce à la création de commissions d’enquête parlementaires ad hoc, afin d’examiner plus attentivement les affaires de corruption politique, et grâce à la création d’un office central spécialisé chargé d’enquêter sur les affaires de corruption à haut niveau (Commission européenne, 2022[144]) (Commission européenne, 2022[145]). Toutefois, l’engagement des États membres est inégal et une approche plus coordonnée et plus opérationnelle pourrait faciliter les avancées dans ce domaine.
La Commission a lancé un nouveau train de mesures anticorruption en mai 2023 (Commission européenne, 2022[146]) (Commission européenne, 2023[113]) (Commission européenne, 2023[114]). Le Parlement européen et le Conseil de l’UE devront adopter les propositions de nouvelle directive relative à la lutte contre la corruption au moyen du droit pénal afin que cet instrument puisse prendre effet, alors que la mise en place d’un nouveau régime de sanction destiné à cibler la « corruption dans le monde entier » en vertu de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) devra être approuvée par le Conseil de l’UE. Les mesures à l’étude visent à améliorer l’efficacité du cadre de lutte contre la corruption de l’UE, par exemple, en s’attaquant aux obstacles législatifs et opérationnels existants ainsi qu’aux mesures de prévention limitées actuellement en vigueur. L’harmonisation des normes minimales dans les États membres, la définition de règles minimales et le renforcement de la coordination au niveau de l’UE pourraient améliorer l’efficacité des mesures anticorruption dans plusieurs domaines. À cette fin, la directive proposée permettrait de mettre à jour le cadre législatif de l’UE, en incorporant notamment des normes internationales, telles que celles définies dans la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC). L’objectif est d’assurer que toutes les formes de corruption sont érigées en infraction pénale dans l’ensemble des États membres, que les personnes morales peuvent également être tenues pour responsables pour ces infractions, que les circonstances aggravantes et atténuantes applicables sont harmonisées et que les auteurs de ces infractions encourent des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives. La directive proposée met également l’accent sur la prévention et impose aux pays d’évaluer et réduire le risque de corruption, notamment en élaborant leurs propres campagnes d’information et de sensibilisation afin de créer une culture de l’intégrité, mais aussi en faisant appel tant au système de recherche et d’éducation qu’à des programmes impliquant une participation de la société civile. En outre, la proposition vise à renforcer la répression, en prévoyant des règles minimales destinées à réduire les obstacles à des enquêtes et des poursuites efficaces, telles que l’inefficacité des procédures de levée d’immunité ou la brièveté des délais de prescription applicables aux infractions de corruption.
De nouvelles mesures doivent également être adoptées pour renforcer l’intégrité publique au sein des institutions de l’UE. En décembre 2022, un scandale de corruption dû à une absence de contrôles au Parlement européen a mis en évidence les failles du cadre d’intégrité au sein des institutions de l’UE. Les enquêtes ont débouché sur des accusations d’appartenance à une organisation criminelle, de corruption et de blanchiment de capitaux visant plusieurs membres du Parlement européen et d’ONG avec lesquelles ils ont des liens. Ces derniers sont soupçonnés d’avoir reçu des pots-de-vin d’autorités d’États tiers en vue d’influer sur les décisions du Parlement. Des enquêtes sont en cours, mais, en janvier 2023, le Parlement européen a réagi en annonçant de nouvelles mesures et en durcissant les règles existantes sur la transparence et les activités de lobbying. Ainsi, l’obligation de publier des informations sur les rencontres avec des lobbyistes ou des groupes de pression sera étendue à tous les parlementaires et leurs collaborateurs, alors que jusqu’à présent, cette obligation ne concernait que certains eurodéputés (Parlement européen, 2023[147]). Les règles relatives aux allers-retours entre le public et le privé vont être plus strictes et l’accès des anciens députés au Parlement sera limité. Les groupes informels défendant des intérêts extérieurs seront également interdits. Des mesures plus importantes, telles que la création d’un organisme indépendant chargé des questions d’éthique à couvrant l’UE et une enquête sur la corruption au Parlement ont également été annoncées, mais leur mise en place nécessitera plus de temps (Parlement européen, 2022[148]) (Parlement européen, 2022[149]) (Parlement européen, 2023[150]). Malgré ces propositions et ces actions immédiates salutaires, les scandales ont sans doute aggravé le niveau de corruption perçue par les citoyens et les entreprises de l’UE. De même, cela a sans doute ébranlé la confiance dans les institutions publiques de l’UE dans le monde. (Commission européenne, 2022[151]) (Eurofound, 2022[152]). Une analyse approfondie des failles du cadre de l’UE en matière d’intégrité publique et la mise en œuvre rapide des mesures annoncées sont essentielles pour restaurer la confiance dans les institutions européennes.
Tableau 1.7. Recommandations antérieures concernant les politiques de lutte contre la corruption
Principales recommandations de l’Étude de 2021 |
Mesures prises depuis 2021 |
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Renforcer les actions nationales relatives à la lutte contre la corruption et la fraude, notamment en transposant intégralement et en temps voulu les directives en la matière et en développant la coopération avec les organismes de l’UE spécialisés dans cette lutte. |
Le rapport annuel 2022 sur l’état de droit contient des recommandations visant à aider les pays à recenser les domaines dans lesquels des difficultés subsistent et où des réformes sont nécessaires pour combattre la corruption. En mai 2023, la Commission a présenté un ensemble de mesures anticorruption, proposant notamment l’adoption d’une directive relative à la lutte contre la corruption au moyen du droit pénal et d’un régime de sanctions spécifique dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ayant pour but de cibler les actes graves de corruption dans le monde entier. Dix-sept procédures d’infraction ont été ouvertes en 2022 en rapport avec la transposition incorrecte de la « directive PIF ». |
Suspendre les paiements tirés sur le budget de l’UE ou appliquer toute autre mesure en cas de violations importantes de l’état de droit. Évaluer en temps opportun l’efficacité des mesures adoptées et envisager, s’il y a lieu, de durcir ce mécanisme de conditionnalité. |
À la suite de violations, commises dans un pays membre, des principes de l’état de droit ayant porté atteinte au budget de l’UE, le Conseil a adopté, en décembre 2022, des mesures visant à suspendre, à hauteur d’un certain pourcentage, des engagements au titre de certains programmes et à interdire à ce pays de contracter de nouveaux engagements juridiques avec certaines entités. |
Instituer une autorité de surveillance directe indépendante chargée de la lutte contre le blanchiment de capitaux au niveau de l’UE et renforcer la coopération entre les autorités nationales. |
La Commission a proposé quatre actes législatifs en juillet 2021 : un nouveau règlement (RLBC) et une directive (DLBC), un règlement instituant une nouvelle autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux (ALBC) et la refonte du règlement sur le transfert de fonds étendant les exigences de traçabilité aux crypto-actifs. Des négociations en « trilogue » sont en cours concernant ce train de mesures. |
Veiller à la transposition complète et en temps voulu de la « directive sur les lanceurs d’alerte » en droit interne et renforcer la protection des lanceurs d’alerte, y compris en cas de violations du droit interne. |
En janvier 2022, la Commission a envoyé des lettres de mise en demeure à 24 États membres qui n’avaient pas transposé intégralement la « directive sur les lanceurs d’alerte » . Des procédures d’infraction ont été lancées en février 2023 à l’encontre de 8 pays membres en raison de la transposition incorrecte de la directive. |
Tableau 1.8. Recommandations issues du chapitre Principaux éclairages sur l'action publique
Principales conclusions |
Recommandations (Principales recommandations en gras) |
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Réduire durablement l’inflation et préserver la stabilité financière |
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L’inflation s’est généralisée et s’est répandue dans les pays de la zone euro. |
Conserver une orientation restrictive de la politique monétaire, s’il y a lieu et en fonction des données, pour faire en sorte que les anticipations d’inflation restent fermement ancrées et que l’inflation recule durablement pour revenir vers son objectif à moyen terme. Communiquer clairement sur la nécessité de prévenir tout effet de second tour de l’inflation, notamment du fait de l’apparition de spirales salaires-prix et de l’augmentation des marges bénéficiaires. Poursuivre le processus de resserrement quantitatif de manière progressive et prévisible. |
Le relèvement des taux d'intérêt fait augmenter les risques pesant sur la stabilité financière. Les risques sont orientés à la hausse dans les secteurs de l’immobilier commercial et résidentiel, ce qui nuit à la qualité des actifs des banques et du secteur financier non bancaire. |
Continuer de mobiliser les instruments macroprudentiels, notamment les volants de fonds propres contracycliques, pour stimuler la résilience du secteur bancaire. Utiliser des instruments ciblés pour corriger des vulnérabilités individuelles, si besoin. Continuer de gérer les risques financiers au moyen de plans efficaces de surveillance et de résolution. |
Le système bancaire européen n'est pas suffisamment intégré. La surveillance et le contrôle sont fragmentés, et on observe des incohérences entre les cadres d'insolvabilité des différents pays, ce qui fait obstacle à une intégration financière plus poussée. |
Achever la mise en place de l’union bancaire en traitant toutes les questions en suspens selon une approche globale. Harmoniser l’utilisation des systèmes nationaux de garantie des dépôts et les règles de résolution bancaire. |
Améliorer la viabilité budgétaire |
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L’orientation globalement neutre de la politique budgétaire et le report de l’effort budgétaire jusqu’en 2024 atténuent l’effet du resserrement en cours de la politique monétaire. |
Mettre en œuvre une politique budgétaire prudente, compatible avec le retour de l’inflation vers son objectif, tout en veillant à ce que les aides au revenu liées aux prix élevés de l’énergie soient temporaires, ciblées et propres à préserver les incitations à économiser l’énergie. Supprimer progressivement le plafonnement des prix du gaz instauré dans l’UE. Continuer d’apporter un soutien technique pour aider à mettre en œuvre les programmes de dépenses au titre du plan « Next Generation EU ». |
Le Pacte de stabilité et de croissance n’a pas débouché sur une politique budgétaire contracyclique, ni permis d'engager une trajectoire descendante vers des niveaux d’endettement plus prudents. |
Axer à nouveau les règles budgétaires sur la viabilité de la dette et sur des plans de dépenses pluriannuels. Envisager de renforcer le rôle et le cadre institutionnel des IBI dans les différents pays. Faire du Comité budgétaire européen une institution indépendante et le doter de ressources suffisantes. |
Protéger le Marché unique tout en renforçant la résilience et l’autonomie |
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La plupart des aides publiques ne relèvent pas du champ d’application des règles de l’UE en matière d’aides de l’État, qui ont été assouplies pendant la pandémie. |
Protéger le Marché unique et éviter d’assouplir encore les règles applicables aux aides publiques. Améliorer la gouvernance du cadre relatif aux Projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) et accélérer les procédures d'approbation. |
L'ampleur du soutien européen à la production d’énergies renouvelables est considérable. Utiliser efficacement les ressources existantes de l’UE permettrait d’éviter de nouveaux emprunts communs. |
Réorienter les ressources budgétaires communautaires existantes vers le soutien à la R-D verte, à l’innovation et à des aides en phase de démarrage, avec une coordination au niveau de l’UE. Pour garantir une utilisation efficace des fonds du plan « Next Generation UE », mettre l’accent sur des indicateurs de résultats et autoriser une plus grande souplesse dans la mise en œuvre des plans nationaux pour la reprise et la résilience. |
La fragmentation persistante des réglementations et des normes au sein de l’UE freine la double transition numérique et écologique. |
Coordonner l’harmonisation des réglementations nationales et leur alignement sur les règles de l’UE en ce qui concerne la fourniture de services numériques, l’économie circulaire et les codes de construction. Rationaliser les procédures d’autorisation de nouveaux projets dans le domaine des matières premières critiques et des technologies propres. Mettre en place des exigences de durabilité pour donner la priorité aux technologies propres produites selon les normes européennes. Mettre en place des normes d’écoconception harmonisées pour promouvoir l'économie circulaire et le recyclage des matières premières. |
Accroître la mobilité de la main-d'œuvre |
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Les obligations administratives relatives au détachement de travailleurs sont souvent lourdes, et les charges réglementaires et administratives varient toujours d'un pays à l’autre. |
Réduire les coûts de détachement des travailleurs en instaurant un système commun de déclaration à l’échelle de l’UE et en harmonisant les obligations documentaires, y compris les exemptions. |
Renforcer le cadre de lutte contre la corruption |
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La corruption réduit l’efficience économique, entraîne un gaspillage des ressources publiques et sape la confiance des citoyens dans les institutions publiques. |
Continuer de coordonner les efforts nationaux de lutte contre la fraude et la corruption. Harmoniser les normes minimales entre les pays et renforcer les mesures de prévention. |
Les règles visant à protéger les intérêts financiers de l’UE ont été renforcées, mais des difficultés subsistent, notamment en ce qui concerne la transposition des directives et la prévention de la fraude et de la délinquance financière. |
Garantir que les utilisateurs agissant contre le blanchiment de capitaux et contre la fraude puissent avoir accès aux informations sur la propriété effective des entreprises et sur les personnes/entités représentant un risque pour l’intérêt financier de l’Union, tout en définissant des garanties suffisantes de protection des données à caractère personnel en conformité avec la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Étendre la surveillance au titre du système de détection rapide et d’exclusion (EDES) aux opérateurs économiques dans le cadre de la gestion partagée. |
L'absence de contrôles et l’utilisation abusive de ressources au Parlement européen ont mis au jour des défaillances concernant l’intégrité publique et les règles en matière de transparence et d'activités de lobbying. |
Accélérer la mise en place d'un organisme indépendant chargé des questions d’éthique à l’échelle de l’UE et renforcer les règles en matière de transparence et de lobbying régissant les activités des membres du Parlement. |
Références
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