Martin Borowiecki
Joaquín Calvo
Federico Giovannelli
Francesco Vanni
Martin Borowiecki
Joaquín Calvo
Federico Giovannelli
Francesco Vanni
Dans son ambitieux Pacte vert, l’UE s’est fixé pour objectif de parvenir à la neutralité carbone en 2050. Sa position de départ est relativement bonne. Elle a su réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) au cours des dix dernières années. De nouveaux efforts sont néanmoins nécessaires pour parvenir à la neutralité carbone. Il s’agit d’élargir le champ d’application des échanges de quotas d’émission à l’agriculture et d’éliminer progressivement les généreuses subventions aux énergies fossiles. Ces efforts devraient être complétés par d’autres mesures pour évoluer vers les énergies propres, à commencer par le renforcement de l’intégration des marchés de l’électricité et l’approfondissement des marchés de capitaux qui assurent les investissements nécessaires dans les nouvelles technologies. L’accélération de la transition écologique aura aussi un coût pour les personnes dont l’emploi aura été supprimé. Favoriser la mobilité des travailleurs et leur formation contribuera à améliorer le redéploiement de la main-d’œuvre et à réduire les coûts de transition.
Au cours des dix dernières années, l’Union européenne (UE) a réduit ses émissions de gaz à effet de serre (GES) en améliorant l’efficacité énergétique et en évoluant progressivement vers des énergies moins polluantes, notamment par le développement des renouvelables. Cela étant, les émissions ont baissé surtout dans les secteurs énergétique et industriels soumis à son système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE). Cela s’explique aussi par le fait que les coûts de réduction des émissions sont plus faibles dans ces secteurs fortement émetteurs. Les secteurs non concernés par le SEQE-UE, en particulier l’agriculture, les bâtiments et les transports, ont peu contribué à la diminution des émissions totales. Pour l’avenir, il conviendra de redoubler d’efforts dans tous les secteurs, mais surtout dans ceux qui échappent au SEQE-UE, pour atteindre l’objectif ambitieux de neutralité carbone à l’horizon 2050. Pour cela, il faudra mobiliser toute la panoplie des mesures d’atténuation, y compris renforcer la tarification du carbone, les subventions aux nouvelles technologies et les mesures réglementaires.
Ce chapitre présente des recommandations pour assurer une réduction effective et équitable des émissions. Pour réussir la transition vers une économie bas carbone, plusieurs difficultés devront être surmontées au niveau des États membres, à celui de l’UE et sur le plan international. Toutefois, il existe également des conditions favorables à cette transition, dans la mesure où la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine a renforcé la dynamique en faveur d’une accélération des investissements dans les énergies propres pour sécuriser les approvisionnements énergétiques. Le présent chapitre se penche sur les réformes du marché intérieur qui sont nécessaires à la réalisation des objectifs de l’UE en matière d’atténuation du changement climatique. Pour une analyse de l’adaptation au changement climatique dans les pays de l’UE, on pourra se reporter aux Examens environnementaux de l’OCDE.
La suite de ce chapitre est structurée comme suit. La première section examine les progrès intervenus par rapport aux nouveaux objectifs chiffrés de réduction des émissions. La suivante présente un tour d’horizon des principales politiques d’atténuation mises au service de la réalisation de ces objectifs. La troisième section analyse des politiques d’atténuation pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 avec un meilleur rapport coût-efficacité, dont l’élargissement du SEQE-UE. La quatrième est consacrée aux politiques ciblant les trois principaux secteurs émetteurs, à savoir l’agriculture, l’énergie et les transports. Enfin, la dernière section analyse les mesures possibles pour réduire les coûts de redéploiement des travailleurs touchés par la transition écologique.
Le principal objectif de la politique climatique de l’UE est de ramener à zéro les émissions nettes de GES à l’horizon 2050 (Commission européenne, 2020[1]). S’y ajoute un objectif intermédiaire de réduction des émissions de GES de 55 % d’ici à 2030 (par rapport à 1990). D’autres objectifs chiffrés consistent à porter la part des renouvelables dans la consommation finale d’énergie à 42.5 % d’ici à 2030, sous réserve de l’adoption de l’accord concernant une Directive révisée sur les énergies renouvelables, et à faire baisser la consommation finale d’énergie d’au moins 11.7 % d’ici à 2030 (par rapport aux prévisions de consommation d’énergie pour 2030 effectuées en 2020).
La position de départ dans la perspective de la réduction des émissions est relativement bonne, l’UE ayant atteint les objectifs climatiques qu’elle s’était fixés pour 2020, y compris ceux de réduction des émissions de GES et d’accroissement de la part des renouvelables dans la consommation finale d’énergie. La baisse des émissions de GES a même atteint 34 % entre 1990 et 2020, ce qui est nettement supérieur à l’objectif de 20 % qui avait été défini (AEE, 2021[2]). De même, la part des renouvelables dans la consommation d’énergie s’est établie à 21.3 % en 2020, alors que l’objectif était de 20 %. Néanmoins, pour atteindre le nouvel objectif plus ambitieux de l’UE, à savoir une baisse de 55 % des émissions de GES d’ici à 2030 (par rapport à 1990), une accélération sensible des efforts de réduction des émissions sera nécessaire (Graphique 2.1). Pour donner une idée des défis à relever, la réalisation de cet objectif à 2030 nécessitera un rythme de diminution des émissions deux fois plus rapide qu’entre 1990 et 2020 (Agence européenne pour l’environnement, 2022[3]). De même, la vitesse de déploiement des moyens de production renouvelable devra tripler par rapport à la période 1990-2020 pour que le nouvel objectif de porter la part des renouvelables dans le mix énergétique à 42.5 % d’ici à 2030 soit atteint (AIE, 2022[4]).
Les secteurs les plus émetteurs sont ceux de l’énergie (production d’électricité et de chaleur, y compris dans l’industrie et les bâtiments), des transports et de l’agriculture ; ils représentent ensemble près de 90 % des émissions totales de GES dans l’UE (Graphique 2.2). Durant les vingt dernières années, c’est dans les secteurs soumis au SEQE-UE, parmi lesquels les industries grosses consommatrices d’énergie et la production d’électricité, que la baisse des émissions a été la plus marquée. Les émissions de GES y ont accusé un recul de 41 % entre 2005 et 2020, qui doit beaucoup au secteur de la production d’électricité. Cela s’explique aussi par le fait que les coûts de réduction des émissions sont plus faibles dans ces secteurs à forte intensité de carbone. À l’inverse, les émissions des transports ont augmenté (sauf durant la pandémie) et celles de l’agriculture sont restées stables (AEE, 2021[7]). Pour que les objectifs d’émission soient atteints, tous les secteurs devront rejeter moins de GES, et la baisse des émissions devra s’accélérer sensiblement dans l’agriculture, les bâtiments et les transports. Une telle accélération pourrait se révéler beaucoup plus difficile en raison du coût plus élevé de la réduction des émissions dans ces trois secteurs.
L’UE a décidé en 2023 de se doter d’un ensemble de politiques de lutte contre le changement climatique plus ambitieuses (Encadré 2.1). Elle fait figure de pionnière en matière de politiques d’atténuation, et elle a mis en place en 2005 ce qui était alors le premier système d’échange de quotas d’émission au monde, et qui reste aujourd’hui encore le plus grand. Outre l’échange de quotas, elle applique tout un ensemble de mesures au service de ces objectifs climatiques, dont des subventions et des dispositions réglementaires. Parmi ces dernières figurent des normes minimales d’efficacité énergétique des bâtiments et des normes d’émissions automobiles plus rigoureuses. La fiscalité relève principalement de la compétence des États membres, mais l’UE prescrit une taxation minimale des produits énergétiques, dont les carburants et les combustibles de chauffage.
Le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » est un ensemble de propositions visant à réviser la législation de l’UE relative au climat en vue d’abaisser les émissions d’au moins 55 % (contre 40 % auparavant) d’ici à 2030 (par rapport à 1990) et d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 (Conseil de l’Union européenne, 2023[8]). L’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 est fixé au niveau de l’UE, mais pour favoriser sa réalisation, le règlement sur la répartition de l’effort assigne aux États membres des objectifs de réduction des émissions à atteindre d’ici à 2030. Le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » prévoit entre autres les mesures suivantes :
L’élargissement du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’UE au transport maritime. Le SEQE s’appliquera à l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre produites lors de voyages à l’intérieur de l’espace économique européen (EEE) et à la moitié de celles produites lors de voyages depuis ou vers l’EEE à destination ou en provenance de pays tiers. La production d’électricité, les industries grosses consommatrices d’énergie et le transport aérien intra-européen sont déjà soumis au SEQE.
Un objectif de réduction des émissions plus ambitieux pour les secteurs et les sources d’émissions visés par le SEQE, correspondant à une diminution de 62 % d’ici à 2030 (par rapport à 2005) contre 43 % selon l’objectif précédent.
La création d’un nouveau système autonome d’échange de quotas d’émission pour l’utilisation de combustibles dans les secteurs de l’industrie, des bâtiments et du transport routier (SEQE 2). L’objectif est de réduire les émissions imputables au transport routier et à la production de chaleur pour le chauffage des bâtiments et les procédés industriels de 42 % d’ici à 2030 (par rapport à 2005). Le prix du carbone devrait être plus bas dans ce nouveau SEQE que dans celui d’origine. La possibilité de fusionner les deux SEQE sera étudiée en 2031.
Des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions pour les secteurs hors SEQE : le règlement sur la répartition de l’effort (RRE) assigne à chaque État membre des objectifs de réduction contraignants à atteindre d’ici à 2030 dans les secteurs non soumis au SEQE. Responsables de près de 60 % des émissions totales de l’UE, les secteurs aujourd’hui hors SEQE comprennent le transport routier, les bâtiments, l’agriculture, la gestion des déchets et les petites industries, encore que les producteurs d’énergies fossiles destinées aux transports et aux bâtiments soient appelés à être intégrés au nouveau système d’échange de quotas d’émission (voir ci-avant). Au niveau de l’UE, l’objectif de réduction des émissions à atteindre dans ces secteurs pour 2030 a été porté de 29 % à 40 % (par rapport à 2005) moyennant une mise à jour des objectifs nationaux. En revanche, aucun objectif de réduction des émissions n’a été assigné à ces secteurs pour après 2030.
Des objectifs plus ambitieux d’absorption nette de CO2 par le secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF). Les absorptions de CO2 par le secteur UTCATF sont prises en compte dans l’objectif global de réduction des émissions défini pour 2030. L’absorption nette visée pour 2030 dans le secteur UTCATF est passée de 225 millions de tonnes (Mt) d’équivalent CO2 à 310 Mt d’équivalent CO2. Les objectifs nationaux d’absorption de CO2 pour 2030 sont donc revus à la hausse.
L’entrée en vigueur, en 2026, d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui appliquera un surcoût à certaines importations à forte intensité de carbone dans l’UE, dont celles d’aluminium, de ciment, d’électricité, d’engrais, d’hydrogène, de fer et d’acier, en fonction de leur teneur en carbone. Les importateurs acquitteront le prix SEQE-UE minoré de tout éventuel prix du carbone payé dans le pays d’origine. LE MACF sera fondé sur le contenu en émissions effectif des biens, déclaré par les importateurs et vérifié par des experts, ce qui permettra de prendre en compte l’effet que les politiques qui ne font pas appel à la tarification ont sur le contenu en émissions.
La suppression progressive des quotas d’émission gratuits pour le secteur de l’aviation d’ici à 2026. Dans les secteurs visés par le MACF aussi, les quotas d’émission gratuits disparaîtront peu à peu entre 2026 et 2034. On attend toujours une décision concernant la suppression de ces quotas d’émission gratuits dans l’industrie et les transports.
La révision de la directive sur la taxation des produits énergétiques, qui entraînera un élargissement de l’assiette de la fiscalité énergétique. Elle prévoit la suppression progressive des exonérations et taux réduits, notamment pour le chauffage au gaz et à la biomasse, et l’intégration dans l’assiette fiscale, d’ici à 2033, des carburants et combustibles destinés à la navigation aérienne et maritime intra-UE. Elle prévoit également l’application de taux minimums d’imposition aux carburants de transport et aux combustibles de chauffage en fonction de leur teneur en énergie et de leurs performances environnementales, les produits fossiles étant les plus lourdement taxés. Jusqu’à présent, la taxation de l’énergie était fonction du volume (voir ci-après). Les discussions se poursuivent dans le cadre du Conseil européen, sachant que la modification de la directive sur la taxation des produits énergétiques ne peut être décidée qu’à l’unanimité.
Le durcissement des normes d’émission automobiles aboutira à l’interdiction, à l’horizon 2035, des ventes de véhicules neufs à moteur thermique, à l’exception de ceux fonctionnant avec des carburants de synthèse produits à partir d’électricité d’origine renouvelable (« e-carburants »). Autrement dit, le niveau d’émission de CO2autorisé pour les véhicules neufs sera abaissé progressivement pour être ramené à zéro après 2035.
Adopté en réponse à la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, le plan RePowerEU vise à rendre l’UE indépendante des combustibles fossiles russes avant 2030 et à renforcer la sécurité énergétique. Il propose une révision de la Facilité de l’UE pour la reprise et la résilience afin de rendre disponibles 225 milliards EUR de prêts non utilisés et 20 milliards EUR d’aides non utilisées. Il comporte deux grands axes :
Une hausse de la part des sources renouvelables dans le mix énergétique de l’UE, qui devra atteindre au moins 42.5 % en 2030. Pour y parvenir, la puissance installée en solaire photovoltaïque et en éolien devra tripler pour passer de 350 GW en 2021 à 1 080 GW en 2030 (600 GW pour le photovoltaïque et 480 GW pour l’éolien).
Des investissements supplémentaires de 245 milliards EUR dans la sécurité énergétique, dont 210 milliards EUR dans les gazoducs, les terminaux méthaniers et le réseau électrique d’ici à 2030.
Source : Conseil européen (2023[8]).
La réalisation des objectifs d’émission plus ambitieux nécessitera de relever la tarification du carbone et de durcir la réglementation. D’après les simulations modélisées pour la présente Étude, et avec les modifications réglementaires supposées, réduire les émissions de GES de 55 % d’ici à 2030 (par rapport à 1990) nécessitera un prix du carbone dans le cadre du SEQE environ cinq fois plus élevé que pour atteindre l’ancien objectif de réduction de 40 %. Le prix SEQE devra ainsi atteindre environ 210 EUR par tonne de CO2 en 2030 (prix de 2023), contre environ 90 EUR par tonne de CO2 à la mi-juin 2023 (Graphique 2.3). Ce renchérissement tient au fait que les nouvelles réductions nécessaires dans les secteurs soumis au SEQE concerneront des activités plus coûteuses à décarboner, les possibilités de réduction des émissions moins coûteuses ayant été épuisées. Une telle hausse du prix du carbone aura aussi un coût économique sur le plan des revenus réels et de la compétitivité (Encadré 2.2). Ces coûts sont néanmoins inévitables pour échapper aux coûts économiques potentiellement beaucoup plus élevés, et non pris en compte dans les simulations, qu’il faudra supporter si l’on ne parvient pas à réduire les émissions mondiales et à contenir le changement climatique.
La tarification du carbone est la meilleure politique de réduction des émissions et la plus efficiente. Il est donc bienvenu que l’UE ait choisi de l’élargir aux transports maritime et routier et aux combustibles de chauffage (voir ci-après). Pour aider à traiter les répercussions de l’augmentation du prix du carbone sur les ménages les plus durement touchés par la transition écologique, les recettes du SEQE sont redistribuées aux pays, notamment via le Fonds social pour le climat (voir ci-après). Cependant, étant donné la nécessité d’accélérer la transition écologique, il ne sera pas possible de parvenir à la neutralité carbone d’ici au milieu du siècle seulement par la tarification du carbone (D’Arcangelo et al., 2022[9]). Comme le montrent les simulations effectuées aux fins de la présente Étude, pour tenir l’objectif plus ambitieux de réduction des émissions d’ici à 2030, il faudra également durcir les normes d’émission automobiles, améliorer le stockage de l’énergie et approfondir l’intégration du marché européen de l’électricité. En complément, des mesures devront être prises au niveau national pour, entre autres, assurer la sortie du charbon (Chateau, Miho et Borowiecki, 2023[10]). À court terme, l’abaissement des obstacles au déploiement des énergies propres, parmi lesquels la lenteur des procédures d’autorisation, peut avoir des retombées considérables. Il est en outre possible de rendre les nouvelles technologies à faibles émissions plus abordables et de doper leur adoption par des subventions, même si celles-ci peuvent être coûteuses et peu efficientes. Par ailleurs, la tarification du carbone peut avoir des répercussions sociales potentiellement importantes, et il est à craindre que son augmentation suscite des réactions politiques hostiles. Pour qu’elle soit mieux acceptée par les citoyens, il est possible d’utiliser ses recettes pour financer des baisses de l’impôt sur le revenu, par exemple (Dechezleprêtre et al., 2022[11]).
Le SEQE est la pierre angulaire de la politique de lutte contre le changement climatique de l’UE en ce qu’il détermine un prix du carbone à partir du jeu des mécanismes du marché et assure des conditions de concurrence entre les pays équitables et compatibles avec le marché unique. En principe, un prix du carbone devrait s’appliquer à toutes les activités polluantes en fonction de leurs incidences environnementales, de façon à égaliser la répartition de l’effort et à harmoniser les incitations marginales en faveur de la réduction des émissions. À l’heure actuelle, le SEQE vise les principaux secteurs émetteurs que sont la production d’électricité, les industries grosses consommatrices d’énergie et l’aviation intra-UE. Son champ d’application sera étendu à l’ensemble des émissions du transport maritime intérieur et à la moitié de celles du transport maritime international, et l’UE se dotera d’un nouveau système d’échange de quotas d’émission qui s’appliquera aux fournisseurs de carburants routiers et de combustibles de chauffage, ainsi qu’aux produits énergétiques destinés à la production de chaleur industrielle qui sont aujourd’hui hors SEQE ; cette évolution va dans le bon sens (Encadré 2.1). C’est pour des raisons historiques que l’échange de quotas d’émission se limite actuellement à l’industrie et à l’énergie, et aucun des grands pays de la planète n’applique d’ailleurs une tarification uniforme du carbone à ce jour. Au moment de la mise en place du SEQE, en 2005, seules les grandes entreprises industrielles et entreprises de services d’utilité publique disposaient de systèmes de suivi et de déclaration permettant de vérifier et de tarifer leurs émissions. Depuis lors, le SEQE a été efficace pour faire baisser les émissions (Dechezleprêtre, Nachtigall et Venmans, 2018[12] ; Bayer et Aklin, 2020[13]).
Le SEQE est aujourd’hui bien établi et largement accepté, ce qui permet de penser qu’il est possible d’y intégrer les combustibles maritimes, les carburants et les combustibles de chauffage, mais aussi d’autres secteurs comme l’agriculture. L’élargissement des échanges de quotas d’émission nécessitera de mettre en place des systèmes de suivi et de déclaration des émissions. Des projets pilotes sont d’ores et déjà menés pour les émissions agricoles produites par les animaux d’élevage, la réhumidification des tourbières et l’agroforesterie (Commission européenne, 2021[14]). Ils pourraient être le point de départ d’un plus large déploiement, même si leur mise en œuvre à plus grande échelle n’est pas simple sur le plan technique. En outre, il faudra du temps pour élargir la tarification du carbone. À court terme, d’autres stratégies pourraient avoir davantage d’impact, comme celles destinées à lever les obstacles à la transition, et notamment au déploiement des énergies propres.
L’élargissement du champ d’application des échanges de quotas d’émission aura aussi un coût. Cela tient au fait que des secteurs comme l’agriculture, les transports et les bâtiments sont difficiles à intégrer dans l’échange de quotas d’émission. Faisant figure d’exception, les fournisseurs de carburants et de combustibles de chauffage verront le SEQE 2 s’appliquer à eux à partir de 2027 (voir Encadré 2.1). Les technologies de réduction des émissions risquent d’être difficilement abordables pour les nombreux petits producteurs visés. Les ménages pâtiraient d’un renchérissement des produits agricoles et énergétiques, même s’ils ne sont pas directement concernés par les échanges de quotas d’émission. Qui plus est, le suivi s’annonce coûteux, vu qu’il n’existe pas actuellement de systèmes de déclaration et de vérification dans ces secteurs. Par ailleurs, si les secteurs actuellement soumis au SEQE ont baissé leurs émissions, c’est aussi parce que les industries fortement consommatrices d’énergie et les centrales électriques fortement émettrices de carbone ont pu le faire à moindre coût. Or, réduire les émissions dans l’agriculture et le secteur des transports pourrait se révéler beaucoup plus difficile parce que plus coûteux. Enfin, une tarification du carbone plus élevée dans ces secteurs aura également un impact sur leur compétitivité.
La définition d’objectifs d’émission chiffrés juridiquement contraignants peut renforcer la redevabilité des autorités publiques (D’Arcangelo et al., 2022[9]). À cet égard, l’objectif de zéro émission nette fixé à l’échelle de l’UE pour le milieu du siècle est à saluer en ce qu’il définit clairement le but à atteindre à long terme par les pouvoirs publics, les ménages et les entreprises. En revanche, les multiples cibles intermédiaires complexes qui se recoupent en partie peuvent être un facteur de ralentissement de la réduction des émissions dans l’UE (voir ci-après). À titre d’exemple, la réalisation de l’objectif fixé pour 2030 en matière de sources d’énergie renouvelables (qui devront alors entrer pour 42.5 % dans la production d’énergie) suppose de recourir à la combustion de biomasse, alors que celle-ci peut être à forte intensité d’émission (Graphique ). Brûler de la biomasse ligneuse rejette immédiatement du CO2 dans l’atmosphère, tandis que le reboisement prend du temps. Cela signifie que l’intensité d’émission de la biomasse dépend du délai nécessaire pour effectuer le reboisement et du type de matière première (Brack, Birdsey et Walker, 2021[15] ; Schnorf et al., 2021[16]).
ENV-Linkages, modèle mondial dynamique d’équilibre général calculable (EGC) de l’OCDE, est utilisé pour analyser les effets économiques de la mise en œuvre des politiques d’atténuation du changement climatique prévues dans le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » (Chateau, Dellink et Lanzi, 2014[17]). Un scénario « Ajustement à l’objectif 55 », dans lequel les émissions de GES sont abaissées d’au moins 55 % d’ici à 2030 (par rapport à 1990), est comparé à un « Scénario de référence UE 2020 » reposant sur les politiques de 2019, qui prévoyaient une réduction de 40 % de ces mêmes émissions d’ici à 2030 (par rapport à 1990). Une autre comparaison est faite avec un scénario sans action climatique. Les projections réalisées à l’aide du modèle portent sur les évolutions macroéconomiques, sectorielles, énergétiques et des émissions jusqu’en 2035, dans l’UE dans son ensemble et dans cinq économies importantes de l’UE (Allemagne, Espagne, France, Italie et Pologne). Les politiques modélisées reposent sur celles prévues dans le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » de l’UE et sur les politiques nationales décrites dans les plans nationaux énergie-climat. Le modèle inclut également les effets, sur la demande de combustibles fossiles et les prix dans l’UE, de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Il fait aussi l’hypothèse d’une augmentation de l’efficacité énergétique, même s’il ne suppose aucune innovation technologique majeure qui réduirait les coûts des énergies propres. L’emploi y est uniforme, avec des travailleurs ayant un type de compétences, et il est supposé que le redéploiement de la main d’œuvre des secteurs en déclin (production d’électricité d’origine fossile, par exemple) vers les secteurs en croissance (production d’électricité d’origine renouvelable, par exemple) est fluide. Les résultats sont décrits plus en détail dans le document d’information technique préparé pour la présente Étude (Chateau, Miho et Borowiecki, 2023[10]).
Le scénario de référence est étalonné de façon à aboutir à la même réduction des émissions et au même prix du carbone que dans le Scénario de référence UE 2020 (Commission européenne, 2021[18]). Il suppose une baisse des émissions de GES de 42.5 % à l’échelle de l’UE à l’horizon 2030 (par rapport à 1990) en termes nets, c’est-à-dire en incluant celles du secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF). Cela correspond à une baisse des émissions de 40 % (par rapport à 1990) en termes bruts, c’est-à-dire sans celles du secteur UTCATF.
Le scénario « Ajustement à l’objectif 55 » table sur un objectif de réduction des émissions de GES à 2030 plus ambitieux pour les secteurs visés par le SEQE, soit 62 % contre 43 % dans le scénario de référence (par rapport à 2005). Dans les secteurs hors SEQE aussi, l’objectif de réduction à 2030 est plus ambitieux, puisqu’il passe de 29 % dans le scénario de référence à 40 %. La consommation finale d’énergie baisse de 11 % par rapport à 2023, et la part des renouvelables dans le mix énergétique passe de 32.5 % en 2023 à 42.5 % en 2030. Pour atteindre ces objectifs, le modèle prévoit la mise en œuvre de plusieurs instruments d’action reflétant les nouvelles politiques de l’UE : i) l’intégration du transport maritime dans le SEQE-UE, ii) la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) dans les secteurs visés par le SEQE-UE à partir de 2026, iii) un nouveau SEQE 2 pour pour l’utilisation de combustibles dans les secteurs de l’industrie, des bâtiments et du transport routier, et iv) l’application de mesures nationales comme la transposition du règlement sur la répartition de l’effort pour les secteurs hors SEQE (voir ci-avant) et la sortie du charbon en Allemagne, Espagne, France et Italie. Le scénario suppose également qu’un tiers des recettes tirées de la tarification du carbone du SEQE sont utilisés pour financer des investissements dans le réseau électrique, les deux tiers restants étant redistribués aux ménages sous la forme de versements forfaitaires et de subventions pour encourager l’achat de véhicules électriques et la rénovation énergétique des bâtiments.
Dans le scénario « Ajustement à l’objectif 55 », l’UE atteint son objectif de réduction des émissions de GES de 55 % en 2030 (par rapport à 1990) (Tableau 2.1). C’est le résultat, entre autres, d’une diminution plus marquée des émissions dans le secteur de l’électricité grâce à un déploiement accéléré des énergies renouvelables et des efforts accrus d’économies d’énergie dans l’ensemble des secteurs. Une hypothèse importante est que la puissance d’appoint à fournir par des centrales conventionnelles, notamment à gaz, pour suppléer la production renouvelable baissera sensiblement, passant d’environ 40-50 % à 7 % de la production d’électricité totale, grâce à l’amélioration du stockage de l’énergie ainsi que du transport et de la distribution de l’électricité dans l’UE. Les émissions baissent en grande partie sous l’effet de l’amplification de la transition vers les renouvelables en Allemagne et en Espagne. À l’inverse, l’intensité carbone du mix électrique reste plus élevée en Pologne, où la diminution des émissions découle d’améliorations de l’efficacité énergétique (Tableau 2.2).
Scénario de référence |
Scénario « Ajustement à l’objectif 55 » |
Écart par rapport au Scénario de référence (en %) |
|
---|---|---|---|
Émissions et mix énergétique |
|||
Pourcentage de réduction des émissions totales de GES par rapport à 1990 (hors UTCATF) |
-42.4 |
-53.6 |
-11.2* |
Pourcentage de réduction des émissions totales de GES par rapport à 1990 (avec UTCATF) |
-45.4 |
-57.2 |
-11.8* |
Pourcentage de réduction des émissions de GES dans les secteurs soumis au SEQE par rapport à 2005 |
-44.3 |
-59.1 |
-14.8* |
Pourcentage de réduction des émissions de GES dans les secteurs soumis au SEQE 2 par rapport à 2005 |
-33.0 |
-42.2 |
-9.2* |
Pourcentage de réduction des émissions de GES dans les secteurs soumis au RRE par rapport à 2005 |
-29.7 |
-37.5 |
-7.8* |
Émissions de GES par habitant |
5.6 |
4.4 |
-21.5 |
Consommation totale d’énergie finale (en millions de tonnes d’équivalent pétrole) |
1011.6 |
955.5 |
-5.5 |
Production d’électricité (en térawattheures) |
3063.7 |
3650.7 |
19.2 |
Part des renouvelables dans la production d’électricité |
57.1 |
70.3 |
13.2* |
Part des combustibles fossiles dans la production d’électricité |
24.3 |
10.2 |
-14.1* |
Effets macroéconomiques |
|||
Prix du carbone (en EUR aux prix de 2020) dans le SEQE-UE |
30.4 |
177.8 |
485.6 |
PIB réel par habitant (en EUR aux prix de 2014) |
32493.2 |
32157.3 |
-1.0 |
Formation brute de capital fixe réelle (en milliards EUR aux prix de 2014) |
2.3 |
2.3 |
-0.5 |
Consommation privée réelle (en milliards EUR aux prix de 2014) |
9.2 |
9.2 |
-0.5 |
Emplois (en millions) |
212.2 |
211.7 |
-0.2 |
Note : L’astérisque correspond à une valeur exprimée en point de pourcentage. Simulations réalisées à l’aide du modèle ENV-Linkages de l’OCDE. Le tableau montre les résultats d’un scénario intégrant l’application du paquet « Ajustement à l’objectif 55 », ce qui signifie une réduction des émissions nettes de GES de 55 % d’ici à 2030 dans l’UE (par rapport à 1990). Ces résultats sont comparés à ceux du scénario de référence, lequel correspond aux politiques en vigueur en 2019 pour réduire les émissions nettes de GES d’au moins 42.5 % d’ici à 2030 (par rapport à 1990). Dans les pays non membres de l’UE, on suppose que la baisse des émissions est de même ampleur que dans le scénario de référence.
Source : Chateau et al., à paraître.
Comparaison des coûts économiques dans le scénario « Ajustement à l’objectif 55 » et dans le scénario sans action climatique. Dans l’ensemble, les coûts économiques des politiques climatiques sont plus élevés que dans un scénario sans action climatique. Dans un tel scénario, il n’existe pas de système d’échange de quotas d’émission dans le secteur de l’électricité et les industries fortement consommatrices d’énergie, ni de réglementation visant à réduire les émissions dans les secteurs des transports et des bâtiments. Par rapport à ce scénario, les politiques du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » devraient conduire à une perte de PIB par habitant de 1.2 % en 2030. Comme ces politiques sont mises en œuvre progressivement jusqu’en 2030, les projections indiquent que des effets économiques plus marqués se manifestent uniquement après 2030, avec une perte de PIB par habitant de 2.3 % en 2035 (par rapport au scénario sans action climatique).
Comparaison des coûts économiques dans les deux scénarios prévoyant une action climatique. D’après les projections, les mesures du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » entraînent une légère perte de PIB par habitant de 1 % en 2030 par rapport au scénario de référence, qui s’explique par l’augmentation des coûts de production sous l’effet de celle de la tarification du carbone. La perte de revenu est plus marquée dans les pays où l’intensité carbone de la production est aujourd’hui plutôt élevée, à commencer par la Pologne. L’emploi décroît légèrement dans l’ensemble, mais la situation varie selon les pays.
Les effets économiques tiennent déjà compte des avantages découlant de l’utilisation des recettes de la tarification du carbone pour augmenter l’investissement dans la transition énergétique, et notamment dans les réseaux électriques. Sans ces mesures en faveur de la croissance, les effets négatifs des politiques climatiques sur le PIB seraient plus marqués. Les autres risques de divergence à la baisse par rapport aux projections sont notamment une inflation plus élevée que prévu, la poursuite des problèmes au niveau des chaînes d’approvisionnement et des pénuries de main d’œuvre, ainsi qu’une transition énergétique plus lente que prévu. De même, les rigidités du marché du travail devraient accroître les coûts du redéploiement de la main d’œuvre d’un pays ou secteur à un autre, et donc les coûts de la transition écologique.
Avec les mesures du paquet « Ajustement à l’objectif 55 », le relèvement de la tarification du carbone entraînera une perte de compétitivité des industries à forte intensité énergétique, exprimée comme la baisse de leur part de marché sur les marchés mondiaux, et une perte de production brute (par rapport au scénario de référence). Il ressort de projections supplémentaires que le MACF pourrait ne compenser qu’en partie la perte de compétitivité des industries fortement consommatrices d’énergie dans l’UE (Chateau, Miho et Borowiecki, 2023[10]).
Écart par rapport au Scénario de référence (en %)
UE |
DEU |
ESP |
FRA |
ITA |
POL |
|
---|---|---|---|---|---|---|
Diminution totale des émissions de GES |
-11.2* |
-10.5* |
-14.2* |
-4.9* |
-10.0* |
-21.5* |
Émissions de GES par habitant |
-21.5 |
-26.6 |
-19.9 |
-9.4 |
-18.4 |
-33.3 |
Consommation totale d’énergie finale |
-5.5 |
-5.6 |
-8.0 |
-2.0 |
-5.0 |
-11.0 |
Production d’électricité |
19.2 |
29.9 |
7.9 |
17.4 |
16.1 |
31.8 |
Part des renouvelables dans la production d’électricité |
70.3 |
87.2 |
87.4 |
44.2 |
73.9 |
73.0 |
Part des combustibles fossiles dans la production d’électricité |
10.2 |
12.8 |
3.5 |
2.3 |
26.1 |
27.0 |
Part des renouvelables dans la production d’électricité, variation en points de pourcentage par rapport au scénario de référence |
13.2* |
24.9* |
4.9* |
1.1* |
19.9* |
43.2* |
Part des énergies fossiles dans la production d’électricité, variation en points de pourcentage par rapport au scénario de référence |
-14.1* |
-24.9* |
-5.3* |
-2.5* |
-19.9* |
-43.2* |
PIB réel par habitant |
-1.0 |
-1.1 |
-1.1 |
-0.6 |
-1.0 |
-3.0 |
Formation brute de capital fixe réelle |
-0.5 |
-0.5 |
-0.5 |
-0.3 |
-0.6 |
-0.8 |
Consommation privée réelle |
-0.5 |
-0.6 |
-0.3 |
-0.3 |
-0.6 |
-1.8 |
Emploi |
-0.2 |
-0.2 |
-0.2 |
-0.1 |
-0.2 |
-0.8 |
Part de marché des industries fortement consommatrices d’énergie** |
-1.0* |
-0.2* |
-0.1* |
0.1* |
0.0* |
-0.1* |
Production brute réelle des industries fortement consommatrices d’énergie** |
-3.9 |
-2.6 |
-4.9 |
-2.3 |
-2.6 |
-8.7 |
Note : L’astérisque correspond à une valeur exprimée en point de pourcentage. ** Les industries fortement consommatrices d’énergie sont les secteurs de la fabrication de fer et d’acier, de produits chimiques, de pâtes et papiers, de produits minéraux non métalliques et de produits métalliques non ferreux. Simulations réalisées à l’aide du modèle ENV-Linkages de l’OCDE. Le tableau montre les résultats d’un scénario intégrant l’application du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » pour réduire les émissions de 55 % d’ici à 2030 dans l’UE (par rapport à 1990). Ces résultats sont comparés à ceux du scénario de référence, lequel correspond aux politiques en vigueur en 2019 pour réduire les émissions de 42.5 % d’ici à 2030 (par rapport à 1990). Dans les pays non membres de l’UE, on suppose que la baisse des émissions est de même ampleur que dans le scénario de référence.
Source : Chateau et al., à paraître.
L’analyse étudie également l’effet de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine sur la réalisation des objectifs de réduction des émissions. Sans cette guerre, l’UE aurait accès à des combustibles fossiles russes meilleur marché, si bien que le PIB par habitant serait plus élevé de 0.6 % en 2030. Cela étant, les combustibles fossiles font l’objet d’une plus forte demande lorsqu’ils sont bon marché. Dans le cadre du scénario « Ajustement à l’objectif 55 », cette plus forte demande initiale de combustibles fossiles serait synonyme de coûts d’atténuation plus élevés, de sorte que la perte de PIB par habitant (par rapport au scénario de référence) atteindrait 1.2 % sans la guerre en Ukraine, contre 1 % avec cette guerre. Cela révèle tout ce que coûte le fait de retarder l’atténuation du changement climatique.
La structure des cibles intermédiaires assorties de multiples objectifs complique la recherche de solutions fondées sur le marché pour réduire au minimum les coûts d’atténuation. Par exemple, les pays qui ne sont pas sur la bonne voie pour atteindre l’objectif fixé pour 2030 en matière d’énergies renouvelables devront consacrer des investissements supplémentaires à ces énergies. Ces investissements procéderont alors d’une dynamique de développement des énergies renouvelables pour atteindre l’objectif, mais n’obéiront pas à une logique de maîtrise des coûts d’atténuation. Leur montée en puissance risque d’entraîner des pénuries de main-d’œuvre, de composants essentiels et de matières premières indispensables aux énergies renouvelables, comme le lithium, le nickel et le cobalt. En principe, une approche plus rationnelle économiquement consisterait à appliquer une tarification à toutes les émissions et à laisser les forces du marché déterminer la panoplie de solutions technologiques appropriée pour abaisser les émissions au moindre coût. La tarification du carbone laisse le soin aux acteurs qui connaissent le mieux leurs coûts d’atténuation de décider quand et où abaisser leurs émissions (OCDE, 2005[19]).
La tarification du carbone seule ne sera toutefois pas suffisante pour atteindre les objectifs en matière d’émissions. Les multiples défaillances du marché nécessitent de recourir à des stratégies d’atténuation globales faisant appel à des mesures à la fois tarifaires et non tarifaires. Ainsi, des subventions peuvent être nécessaires pour donner un coup de pouce aux nouvelles technologies qui ne sont pas encore rentables, parmi lesquelles le captage du carbone et l’hydrogène vert. Horizon Europe, le programme phare de recherche et développement de l’UE, prévoit de consacrer à ces technologies 95.5 milliards EUR (soit 4.7 % du budget de l’UE sur la période 2021-27). En outre, dans le cadre du financement de l’innovation par les recettes du SEQE, 40 milliards EUR (soit 2 % du budget de l’UE) seront affectés aux technologies bas carbone au travers du Fonds pour l’innovation (en supposant un prix SEQE de 75 EUR par tonne de CO2). En dépit de ces efforts, il ressort des données relatives aux demandes de brevet et au capital-risque destiné aux nouvelles entreprises en rapport avec le climat que l’innovation liée au climat ralentit depuis cinq ans (Cervantes et al., 2023[20]). Cette évolution traduit aussi le fait que le soutien apporté par les pays de l’UE aux énergies renouvelables bénéficie principalement aux filières parvenues à maturité comme la biomasse, le solaire et l’éolien (voir ci-après). Le cadre des aides d’État de l’UE encourage pourtant les pays membres à orienter les subventions vers les nouvelles filières non encore compétitives.
Les fréquents changements de politique peuvent rendre la réalisation des objectifs environnementaux plus coûteuse. L’UE a récemment défini un objectif plus ambitieux de réduction des émissions d’ici à 2050, et cette démarche est à saluer en ce qu’elle trace clairement la voie de cette réduction dans les temps à venir. L’objectif général à l’horizon 2050 est toutefois complété par des objectifs intermédiaires plus rigoureux en matière d’émissions, de renouvelables et d’efficacité énergétique qui doivent être atteints en 2030 (Conseil de l’Union européenne, 2023[8]). À toutes ces modifications des objectifs intermédiaires est venue s’ajouter la crise énergétique mondiale, qui a amené la Commission européenne à appeler à diversifier les approvisionnements en combustibles fossiles et à investir davantage dans les gazoducs et les terminaux méthaniers dans le cadre du plan RePowerEU. Les États membres de l’UE ont agi en ce sens en tenant dûment compte des enjeux de sécurisation des approvisionnements énergétiques et de prévention d’une détérioration de leur compétitivité. L’UE s’efforce d’accélérer le rythme de la transition, ce qui doit être salué. Néanmoins, les changements fréquents de politique peuvent avoir des conséquences sociales négatives compromettant l’acceptation des mesures de politique climatique par la collectivité. Ils risquent en outre de conduire à la mise en place de technologies non optimales dont il faudra ensuite s’accommoder durablement, et qui auront pour effet de renchérir la transition. Ces contradictions et ces modifications fréquentes peuvent nuire à la stabilité et à la prévisibilité de la politique climatique. Or, la stabilité de l’action publique est importante pour attirer les investissements privés nécessaires à la transition écologique.
Il y a un déficit de cohérence de l’action publique en ce que le soutien aux énergies fossiles au niveau national est en contradiction avec les efforts de décarbonation à l’échelle de l’UE. Il existe toujours des mesures qui exemptent des combustibles fossiles en totalité ou en partie de la fiscalité, à l’instar des exonérations dont bénéficient les carburants des transports aériens et maritimes et de la taxation réduite du gaz destiné au chauffage (Graphique 2.5, partie A). La Commission européenne a proposé de réformer les règles de taxation minimale des produits énergétiques en vigueur dans l’UE, notamment s’agissant des combustibles fossiles, afin de stimuler l’amélioration de l’efficacité énergétique et le recours aux énergies durables. Sa proposition prévoit d’éliminer progressivement les exonérations et les taux de taxation réduits pour les combustibles fossiles, et de calculer la fiscalité énergétique non plus en fonction du volume, mais en fonction de la teneur en énergie et des performances environnementales des combustibles, les produits fossiles étant le plus lourdement taxés. Elle prévoit également d’intégrer dans l’assiette de la fiscalité énergétique les carburants et combustibles destinés à la navigation aérienne et maritime, de même que la biomasse. Il est toutefois envisagé que les taux réduits et les exonérations pour le gaz naturel et les produits énergétiques destinés à l’aviation et au transport maritime soient éliminés graduellement pour disparaître complètement en 2033 seulement, ce qui est trop tard pour que cette mesure contribue à la réalisation des ambitieux objectifs de réduction des émissions et d’efficacité énergétique définis pour 2030. Dans l’intervalle, ces dispositions font baisser le tarif effectif du carbone sur les énergies fossiles (Cour des comptes européenne, 2022[21]) (Graphique 2.5, partie B). Cette situation est particulièrement préoccupante lorsque, du fait de ces exonérations et taux réduits, le prix effectif du carbone est inférieur au prix SEQE. En premier lieu, l’UE devrait élargir l’assiette de la fiscalité énergétique en mettant fin progressivement aux taux réduits et exonérations pour aboutir à une taxation uniforme des produits énergétiques fossiles, indépendamment du secteur et de l’usage auxquels ils sont destinés. En second lieu, il conviendrait d’instaurer des taux minimums d’imposition des combustibles fossiles en fonction de leur contenu énergétique et de leurs performances environnementales, comme l’a proposé la Commission européenne. Dans un souci d’efficience et de répartition équitable de l’effort, ces taux minimums devraient être les mêmes dans tous les secteurs hors SEQE. Par la suite, ils pourront être progressivement relevés pour atteindre le niveau de tarification du SEQE si ce n’est pas encore le cas. Ces modifications seront difficiles à faire adopter, dans la mesure où il faut l’unanimité des États membres de l’UE pour modifier la fiscalité de l’énergie.
Outre la tarification du carbone et les subventions, il existe aussi des règlements et des normes fixés par l’UE qui s’appliquent entre autres à l’agriculture, aux transports et aux bâtiments. Dans l’agriculture, la qualité de l’eau et les rejets d’oxyde nitreux liés à l’utilisation d’engrais sont strictement encadrés par la directive « nitrates » et la directive-cadre sur l’eau. Dans les transports, l’UE a annoncé l’arrêt de la vente de moteurs thermiques à l’horizon 2035, les exceptions possibles concernant les véhicules fonctionnant exclusivement avec des carburants de synthèse produits à partir d’électricité d’origine renouvelable (« e-carburants »). Dans le domaine de l’isolation des bâtiments, enfin, la Commission européenne a proposé des normes minimales de performance énergétique pour susciter de nouvelles économies d’énergie essentielles à la réduction des émissions des bâtiments (Conseil de l’Union européenne, 2023[8]).
La suppression progressive de l’allocation de quotas d’émission à titre gratuit renforcerait l’efficacité de la tarification du carbone telle que définie dans le SEQE. De même, l’harmonisation des tarifs effectifs du carbone dans les secteurs et les pays non couverts par le SEQE renforcerait l’efficience économique des politiques publiques et aboutirait à une répartition plus équitable de la charge entre secteurs et entre pays. En outre, l’UE pourrait recourir à un prix interne du carbone (un prix ou une valeur tutélaire) à des fins de budgétisation et de planification, de façon à améliorer le rapport coût-efficacité des mesures budgétaires ayant un impact environnemental. Toutefois, l’atténuation ne se limite pas à la tarification du carbone. Les réglementations et les normes font tout autant partie des outils d’atténuation à la disposition des pouvoirs publics. Dans le secteur financier, par exemple, l’allègement des réglementations trop restrictives pourrait contribuer à orienter les financements privés vers des investissements durables.
En principe, dans les secteurs couverts par le SEQE, le prix du carbone est unifié. Dans le cadre de ce système, les producteurs doivent acheter des quotas couvrant leurs émissions, par le biais d’enchères ou sur le marché du carbone, sur lequel le prix SEQE du carbone est déterminé. Toutefois, l’attribution gratuite de quotas à l’industrie aboutit à un prix effectif du carbone qui est inférieur à celui qui est pratiqué dans le secteur de l’énergie où il n’existe pas d’attributions gratuites, ce qui bloque le signal-prix. Plus précisément, les permis gratuits d’émission reçus par l’industrie ont couvert 94 % des émissions du secteur en 2021. Un système tel que celui-ci réduit les incitations à innover et à investir dans des processus de production plus propres (Dechezleprêtre, Nachtigall et Venmans, 2018[12] ; Commission européenne, 2019[23] ; Pellerin-Carlin et al., 2022[24]). À l’inverse, le secteur de l’énergie doit acheter tous ses permis d’émission par voie d’enchères. L’UE a déjà annoncé la suppression progressive, sur une période de neuf ans d’ici à 2034, des quotas SEQE gratuits pour les secteurs couverts par son Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, notamment l’aluminium, le ciment, l’hydrogène, l’électricité, les engrais, la sidérurgie et l’aciérie. Les installations qui continueront de bénéficier de quotas SEQE gratuits devront respecter un certain nombre de conditions, qui prendront notamment la forme d’audits énergétiques et de plan de neutralité climatique dans certains cas. La suppression des quotas attribués gratuitement à l’industrie permettrait d’harmoniser les prix effectifs du carbone au sein du SEQE.
La raison avancée pour l’attribution de ces quotas à titre gracieux tient au fait que l’industrie est exposée à une concurrence internationale plus forte que les entreprises du secteur de la production d’énergie et pourrait délocaliser sans difficulté sa production en dehors de l’Union européenne, où la tarification du carbone est moins élevée (Graphique 2.6), d’où le risque que les émissions mondiales de gaz à effet de serre augmentent (phénomène dit des fuites de carbone). Avec les quotas gratuits, les entreprises de l’UE les plus efficientes n’ont pas à supporter des coûts plus élevés que leurs concurrents internationaux et bénéficient dans le même temps, à la faveur de la vente de leurs crédits, d’incitations marginales à réduire leurs émissions. La portée des quotas gratuits dans le SEQE-UE, qui ont représenté 43 % du total des quotas annuels du système en 2019, est moins large que dans certains autres systèmes d’échange de quotas d’émission (Commission européenne, 2023[25] ; Cour des comptes européenne, 2020[26]). Ainsi, dans les systèmes d’échange de quotas d’émission de la Corée du Sud et de la région métropolitaine de Tokyo par exemple, la quasi-totalité des quotas d’émission sont attribués à titre gratuit. La part plus faible des quotas gratuits dans le système européen s’explique par le fait que l’attribution est fondée sur le risque de fuite de carbone. Il faut noter que dans le SEQE-UE, tous les secteurs considérés comme exposés à un risque de fuite de carbone sont traités sur un pied d’égalité. Autrement dit, tous les secteurs figurant sur la liste des sources potentielles de fuites de carbone bénéficient de quotas gratuits, quelle que soit leur intensité d’émission ou leur exposition aux échanges. Par contraste, l’État américain de Californie et la province canadienne du Québec attribuent des quotas gratuits en utilisant une approche plus nuancée des risques de fuite de carbone, et la part des quotas gratuits alloués est donc moins importante (California Air Resources Board, 2023[27] ; Ministère de l’Environnement du Québec, 2023[28]). Les secteurs sont divisés en trois catégories (risque faible, modéré ou élevé de fuite de carbone), en fonction de leur intensité d’émission et de leur exposition aux échanges. De ce fait, les quotas gratuits ont représenté en 2019 quelque 25 % du total des quotas d’émission annuels en Californie et 30 % au Québec (Galdi et al., 2020[29]). La part plus faible des quotas gratuits s’explique également par le fait qu’en Californie comme au Québec, le système d’échange de quotas d’émission couvre une proportion plus importante des émissions globales de GES de l’État et de la province (respectivement 75 % et 80 %). À titre de comparaison, 40 % des émissions de GES de l’UE sont couvertes par le SEQE-UE.
Pour éviter les fuites de carbone, la Commission européenne a proposé de remplacer progressivement le système de quotas gratuits par un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) (Encadré 2.3). Un tel mécanisme vise à aligner les prix du carbone des importations sur ceux de la production intérieure, en faisant supporter à l’importateur la différence entre le prix SEQE-UE et le prix du carbone éventuellement payé dans le pays d’origine. Ce système s’appliquerait aux importations d’aluminium, de ciment, d’hydrogène, d’électricité, d’engrais, de fer et d’acier. Une autre solution pourrait consister à mieux cibler les allocations de quotas gratuits en fonction des risques de fuite de carbone, , en classant les secteurs en trois catégories : fortement exposés, modérément exposés ou faiblement exposés comme c’est le cas aux États-Unis et au Canada (voir ci-dessus).
À compter de 2026, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) imposera un surcoût à certaines marchandises à forte intensité de carbone importées dans l’UE et présentant le risque le plus élevé de fuites de carbone. Ces marchandises sont notamment l’aluminium, le ciment, l’électricité, les engrais, l’hydrogène, le fer et l’acier. Les importateurs acquitteront le prix SEQE-UE minoré de tout éventuel prix du carbone payé dans le pays d’origine. Dans la pratique, ces importateurs de marchandises couvertes par le MACF devront acheter des certificats MACF dont le prix correspondra au prix moyen hebdomadaire des quotas du SEQE-UE. LE MACF sera fondé sur le contenu en émissions effectif de certains biens, déclaré par les importateurs et vérifié par des experts, ce qui permettra aussi de prendre en compte l’effet, sur le contenu en émissions, des politiques du pays d’origine qui ne font pas appel à la tarification.
L’UE indique que les mesures ont été conçues de manière à ce que le MACF soit compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (Commission européenne, 2023[30]). Le MACF sera mis en place de façon progressive, à compter de 2026, ce qui permettra aux pays tiers de s’adapter au nouveau cadre d’échanges de l’UE. Pour que les importateurs de l’UE ne soient pas désavantagés par rapport aux producteurs de l’UE, les quotas d’émission gratuits disparaîtront peu à peu des secteurs visés par le MACF au cours d’une période de neuf ans comprise entre 2026 et 2034. Autrement dit, avant la disparition complète des quotas gratuits en 2035, le MACF ne s’appliquera qu’à la part des émissions non couverte par les quotas gratuits relevant du SEQE-UE.
Source : Commission européenne (2023[30])
L’UE ne dispose pas encore de système d’échange de quotas d’émission pour les secteurs hors SEQE, comme les transports et les bâtiments, quand bien même ces derniers représentaient environ 60 % des émissions de l’UE en 2021 (Agence européenne pour l’environnement, 2022[31]). Selon la Directive de l’UE sur le climat, les États membres peuvent, au cours d’une année où ils ne vont pas être en mesure de respecter leur limite d’émission annuelle dans les secteurs hors SEQE, emprunter un nombre limité de permis d’émission (quotas annuels) prélevés sur leur quota global de l’année suivante, utiliser un excédent de quotas d’émission SEQE ou utiliser l’excédent d’absorptions de CO2 générées dans leur secteur des terres et forêts. Les pays qui n’arrivent toujours pas à atteindre leur objectif national de réduction des émissions pour les secteurs hors SEQE-UE sont tenus d’acheter des quotas d’émission annuels de manière bilatérale auprès des pays qui, eux, dépassent leurs objectifs. Toutefois, il n’existe pas de mécanisme communautaire d’échange de quotas d’émission annuels. Jusqu’à présent, seules Malte et l’Allemagne ont dû acheter des quotas pour s’acquitter de leurs obligations, et l’ont fait dans le cadre d’accords bilatéraux avec la Bulgarie, la Hongrie et la République tchèque. Pour sa part, la Suède a retiré du marché ses quotas d’émission excédentaires en 2015, de sorte qu’ils n’ont pu être cédés à des pays moins performants (Appunn, 2019[32]). Le volume très limité d’échanges et l’excédent de quotas d’émission annuels au cours de la période allant jusqu’à 2020 ont maintenu les prix des quotas annuels à un faible niveau. D’ici à 2030, les coûts par tonne de CO2 pourraient être nettement plus élevés que ceux du SEQE-UE si un plus grand nombre de pays n’atteignent pas leurs objectifs plus ambitieux pour 2030, entraînant une pénurie de quotas d’émission (Gores et Graichen, 2021[33]). Faute de mécanisme d’échange de droits d’émission, ces pays pourraient se voir contraints de réduire considérablement leurs émissions dans un laps de temps très court, ce qui risquerait de provoquer des perturbations économiques et sociales. À l’avenir, l’extension en 2027 des échanges de quotas d’émission aux transports et aux bâtiments rendra moins nécessaire la conclusion de pareils accords bilatéraux. Dans l’intervalle, l’UE devrait encourager les pays à échanger leurs quotas d’émission annuels dans les secteurs non couverts par le SEQE, en mettant en place un marché à cette fin. Pour encourager la baisse des émissions dans ces secteurs, une autre solution consiste à compter sur l’échange de crédits d’émission internationaux, mais l’UE a choisi une approche différente avec sa Directive sur le climat.
L’UE dispose également d’un arsenal de pénalités et de sanctions pour encourager ses États membres à respecter leurs obligations de réduction des émissions dans les secteurs hors SEQE. Si, au cours d’une année donnée et malgré les flexibilités susmentionnées, un État membre ne respecte pas son objectif de réduction des émissions de GES dans les secteurs hors SEQE, le volume des émissions excédentaires peut être reporté sur son quota d’émissions de GES de l’année suivant, en étant toutefois multiplié par 1.08. Cela incite donc fortement les États membres à faire en sorte de ne pas se voir appliquer ce facteur de multiplication, car cela rendrait plus difficile à respecter la limite annuelle d’émission fixée pour l’année suivante pour les secteurs hors SEQE. Par ailleurs, la Commission peut demander à un État membre qui n’est pas en bonne voie pour atteindre son objectif de présenter un plan d’action correctif prévoyant d’autres politiques publiques et mesures visant à éviter des émissions excessives à l’avenir. Enfin, en dernier ressort, si un État membre n’atteint toujours pas ses objectifs, la Commission européenne peut engager à son encontre une action devant la Cour de justice de l’Union européenne, qui peut aboutir à des sanctions financières.
L’UE a déjà annoncé la mise en place d’un nouveau système d’échange de quotas d’émission (SEQE 2) pour les carburants et les combustibles de chauffage à compter de 2027. Toutefois, on estime que le prix appliqué dans le cadre de ce système sera différent de celui du SEQE-UE traditionnel (voir ci-après). La fixation d’un prix unique du carbone dans tous les secteurs visés par le système d’échange de quotas d’émission permettrait d’harmoniser les incitations marginales à la réduction des émissions. Ce prix unique devrait ensuite être étendu aux grands émetteurs des secteurs non couverts par le SEQE, comme l’agriculture.
Les prix du carbone hors SEQE varient d’un pays et d’un secteur à l’autre, de sorte que les incitations à la réduction des émissions ne sont pas toutes identiques et que l’efficacité de la politique climatique de l’UE en pâtit. La fiscalité du carbone, à l’instar de celle appliquée aux combustibles fossiles, a une incidence sur le prix effectif du carbone (Graphique 2.7). Toutefois, en général, la fiscalité des combustibles fossiles ne rend compte que de manière imparfaite de leur teneur en carbone. Cela tient au fait que les exonérations et les taux réduits font baisser les taux effectifs d’imposition des carburants aériens et maritimes et du gaz de chauffage, notamment. Il est possible d’accroître l’efficacité de la panoplie de mesures climatiques en harmonisant les prix du carbone et en imposant les activités polluantes à proportion de leurs répercussions sur l’environnement. La mise en place du SEQE-UE 2 pour les carburants et les combustibles de chauffage permettra la définition d’un prix unique du carbone dans ces secteurs, même si ce prix sera inférieur à celui des secteurs couverts par le système traditionnel. Par ailleurs, la Commission européenne a proposé d’élargir l’assiette d’imposition de l’énergie en supprimant progressivement les exonérations fiscales et les taux réduits, et d’instaurer à l’échelle de l’UE des taux minimums d’imposition de l’énergie qui seront fonction du contenu énergétique et des performances environnementales, les combustibles fossiles devant être les plus lourdement taxés. Actuellement, les taux d’imposition minimums sont déterminés en fonction des volumes et ne tiennent pas compte des performances environnementales. Comme indiqué ci-avant, il conviendrait d’élargir l’assiette d’imposition de l’énergie et d’adopter des taux d’imposition minimums pour les combustibles fossiles en fonction de leurs performances environnementales, de préférence identiques pour tous les secteurs afin d’assurer une répartition équitable de la charge. Par la suite, les taux minimums pourront être progressivement relevés. Dans l’idéal, l’UE devrait communiquer des échéances précises en ce qui concerne l’évolution des taux minimums d’imposition, pour permettre aux ménages et aux producteurs de s’adapter au nouveau cadre de la fiscalité des produits énergétiques. Toutefois, la coexistence avec le nouveau système d’échange de quotas d’émission pour les carburants, qui fera augmenter les prix de ces derniers (voir ci-après), constitue une source de préoccupation.
Le budget de l’UE pour la période en cours (2021-27) prévoit 30 % de dépenses en faveur des objectifs climatiques. Dans la pratique, l’UE suit une approche échelonnée pour déterminer si les postes budgétaires contribuent à la réalisation des objectifs climatiques ou les contrecarrent (OCDE, 2016[34] ; Commission européenne, 2011[35]). Cette approche est cependant critiquée, car elle surestimerait la contribution réelle du budget à la réduction des émissions, en particulier en ce qui concerne la politique agricole commune (Cour des comptes européenne, 2022[36]). Les dépenses préjudiciables au climat, notamment, ne sont pas comptabilisées. À titre d’exemple, les paiements directs aux agriculteurs favorisent le drainage des tourbières à des fins agricoles, qui est associé à 20 % de l’ensemble des émissions agricoles (voir ci-après). En outre, l’approche adoptée par l’UE ne permet d’identifier ni les coûts de réduction des émissions dans les programmes financés par l’UE, ni leur rapport coût-efficacité. Pour améliorer le rapport coût-efficacité, l’UE pourrait appliquer un prix interne du carbone (ou un prix/une valeur tutélaire du carbone) à l’ensemble des activités de budgétisation, de planification, de passation de marchés et d’analyse coûts-avantages menées par le secteur public dans le cadre de projets financés par l’UE ayant un impact carbone, comme le fait le Royaume-Uni (Department for Business, 2021[37]). Dans l’idéal, ce prix interne du carbone devrait s’appliquer à toutes les émissions imputables à des dépenses et réglementations de l’UE, y compris aux fonds pour l’agriculture et aux fonds de relance post-pandémie.
La Commission européenne a élaboré un cadre de référence pour la budgétisation verte (GBRF) afin de promouvoir les pratiques en la matière. Le GBRF est actuellement utilisé par 12 États membres. En outre, la Commission fournit un soutien technique à la budgétisation verte à 23 États membres. Cependant, les pays qui ont recours à la budgétisation verte ont adopté des méthodes différentes de détermination de l’impact environnemental de leurs budgets. Cela tient à la diversité des concepts et méthodologies sous-jacents qui sont utilisés pour déterminer les coûts et les avantages environnementaux (Encadré 2.4). Les cadres budgétaires nationaux étant difficiles à modifier, la Commission a proposé à la place de définir des orientations communes. Néanmoins, pour promouvoir les pratiques de budgétisation verte, l’UE devrait instaurer une méthodologie commune pour les pays qui évaluent l’impact de leurs dépenses publiques sur l’environnement, prévoyant notamment un prix interne du carbone à l’échelle communautaire.
En 2020, l’UE a adopté une taxonomie des activités durables sur le plan environnemental, qui répond à plusieurs objectifs écologiques, parmi lesquels la lutte contre le changement climatique. Cette classification comprend notamment les technologies bas carbone, dont celles fondées sur l’énergie solaire et éolienne, mais aussi sur les formes de biomasse à forte teneur en carbone. Cela tient au fait que les critères d’inclusion des activités économiques ne reposent pas sur une approche unique liée à leur intensité carbone. Les activités sont donc traitées sur un pied d’égalité malgré les disparités de pouvoir décarbonant. Plus récemment, l’acte délégué complémentaire relatif aux objectifs climatiques adopté en 2022 a étendu la taxonomie aux activités nucléaires et gazières, en tant que solutions provisoires (Commission européenne, 2023[38]). Depuis 2023, les grandes entreprises de l’UE sont tenues d’indiquer si leurs activités cadrent avec la taxonomie des activités durables. Cette obligation s’appliquera également aux sociétés financières à compter du 1er janvier 2024. Cependant, bien que d’application obligatoire, la Directive sur la publication d’informations non financières s’est révélée inadaptée à l’obtention d’informations fiables et comparables sur l’impact environnemental des entreprises. Autrement dit, les investisseurs disposent rarement des données voulues sur l’impact environnemental des entreprises. Il est donc possible qu’ils n’aient pas une vision juste des coûts futurs et que leurs décisions d’investissement produisent des effets imprévus. Pour remédier à ce problème d’asymétrie de l’information, l’UE a entrepris d’élargir le champ d’application des obligations déclaratives liées à la durabilité à l’ensemble des grandes entreprises ainsi qu’aux petites et moyennes entreprises cotées en bourse à partir de 2024. Cette modification sera opérée progressivement et, en plusieurs étapes : les plus grandes entreprises seront les premières à devoir se conformer aux normes de déclaration, suivies des petites et moyennes entreprises cotées en bourse.
Un autre problème est l’absence de normes de déclaration uniformes, ce qui laisse le champ libre à l’écoblanchiment. Par exemple, environ 40 % des fonds qualifiables de durables ont réalisé au moins 5 % de leurs placements dans les énergies fossiles en 2022 (EUROSIF, 2022[39]). Cette situation est possible, car le cadre en faveur d’une finance durable est toujours en cours d’élaboration. L’UE a déjà adopté des exigences en matière d’information et de déclaration applicables aux entreprises et investisseurs qui interviennent sur les marchés financiers ainsi qu’aux fournisseurs de produits financiers et aux conseillers financiers. La Plateforme sur la finance durable a été créée, en 2020, pour éclairer les décisions de la Commission européenne sur la mise en place du cadre en faveur de la finance durable. Par ailleurs, en 2022, cette dernière a sollicité l’avis des autorités européennes de surveillance sur l’écoblanchiment des acteurs financiers. La même année, l’EFRAG (anciennement Groupe consultatif pour l’information financière en Europe) a défini des normes communes pour la déclaration des émissions de GES et des risques liés au climat des entreprises, ainsi que des normes environnementales et sociales (EFRAG, 2022[40]). La mise en œuvre progressive de telles normes est nécessaire pour permettre aux entreprises de s’adapter au nouveau cadre réglementaire. Pour limiter les coûts de mise en conformité, l’UE devrait veiller à la cohérence et à l’interopérabilité de ses normes avec les normes internationales. Cela nécessitera une coopération avec les parties prenantes (par exemple, les organismes internationaux de comptabilité et les agences de notation) à l’intérieur et en dehors de l’UE, en particulier l’International Sustainability Standards Board (ISSB).
Les entreprises de l’UE sont fortement tributaires du financement par l’endettement, c’est pourquoi le secteur bancaire sera un acteur majeur dans la hausse des investissements en faveur de la transition écologique (Carradori et al., 2023[41]). Ce constat vaut tout particulièrement pour les petites et moyennes entreprises ainsi que pour le secteur du logement, dont les banques financent pour beaucoup les investissements de réduction des émissions. L’UE a déjà adopté des exigences de déclaration et d’information applicables aux banques. Ainsi, en vertu du Règlement sur les exigences de fonds propres et de la Directive sur les fonds propres réglementaires, les prêteurs sont tenus de publier leur exposition aux risques de transition à compter de 2023. Ils doivent ainsi déclarer le montant des prêts accordés aux industries à forte intensité de carbone et au secteur des énergies fossiles ainsi que des obligations et des actions détenues dans ces secteurs et indiquer dans quelle mesure ils financent les émissions directes et indirectes de ces derniers. Dans le cas des prêts hypothécaires, les banques doivent communiquer l’efficacité énergétique de leur portefeuille immobilier. Les nouvelles exigences réglementaires d’information applicables aux banques visent à faire diverger les coûts de financement des projets liés aux énergies fossiles et des investissements durables, au profit de ces derniers.
Les besoins d’investissement dans l’isolation et la rénovation énergétiques des bâtiments pour atteindre les objectifs d’efficacité énergétique sont considérables (voir plus loin). Jusqu’à présent, ces investissements reposent fortement sur les prêts bancaires, souvent étayés par des dispositifs publics de soutien. Pour accroître le rôle des marchés financiers, la Commission européenne a suggéré de créer des normes relatives aux portefeuilles de prêts hypothécaires applicables dans l’ensemble de l’UE à même de promouvoir la titrisation des portefeuilles de prêts hypothécaires. De telles normes porteraient sur l’efficacité énergétique des bâtiments et deviendraient plus strictes au fil du temps, ce qui aboutirait à des normes d’efficacité minimales plus rigoureuses dans l’ensemble de l’UE en 2033. Point important, l’existence de normes communes faciliterait également la titrisation ou l’émission d’instruments financiers et de dette reposant sur des portefeuilles de prêts hypothécaires. Mais, faute de lignes directrices communes sur la définition de ces normes, le risque est d’aboutir à des normes relatives aux portefeuilles de prêts hypothécaires différentes au sein l’UE. Une telle fragmentation entraverait la titrisation et les investissements transfrontières dans la rénovation et l’isolation des bâtiments (Banque centrale européenne, 2023[42]). Pour tirer pleinement parti de la titrisation, l’UE devrait harmoniser les exigences minimales concernant les normes relatives aux portefeuilles de prêts hypothécaires. Ceci permettrait de faciliter les investissements transfrontières des investisseurs institutionnels dans la rénovation des bâtiments dans le contexte de l’union des marchés de capitaux. Renforcer la contribution des marchés financiers à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments aurait également pour effet de réduire la dépendance à l’égard des prêts bancaires et des dispositifs publics de soutien.
La budgétisation verte désigne l’application d’outils budgétaires en vue de contribuer à la réalisation des objectifs climatiques et, plus généralement, environnementaux. En 2022, 24 des 36 pays de l’OCDE avaient déjà mis en œuvre des mesures de budgétisation verte d’après l’Enquête de l’OCDE sur la budgétisation verte (OCDE, 2023[43]). Pour être efficace, la budgétisation verte doit pouvoir s’appuyer sur des cadres stratégiques et budgétaires ainsi que sur des dispositifs institutionnels clairs :
La budgétisation verte est utilisée par 12 pays et incluse, conformément à des dispositions législatives, dans le cadre budgétaire de 11 pays (Autriche, Chili, Corée, Espagne, France, Italie, Luxembourg, Mexique, Pays-Bas, République slovaque et Suède). L’Italie, un pays qui cultive une longue tradition dans ce domaine, a instauré en 2009 des exigences spécifiques en matière de rapports environnementaux portant sur les dépenses budgétaires.
Pour que le cadre de budgétisation verte soit efficace, l’adoption de stratégies nationales de décarbonation est cruciale. Ces dernières années, 20 pays de l’OCDE se sont dotés de stratégies à l’appui de la budgétisation verte.
L’existence d’un dispositif institutionnel clair est essentielle. Dans plusieurs pays (Danemark, Irlande et Mexique, par exemple), l’autorité budgétaire centrale joue un rôle de premier plan, tandis que dans d’autres, cette responsabilité est partagée avec d’autres acteurs, comme le ministère de l’Environnement, ou d’autres organismes publics (comme c’est le cas au Canada, où il est de coutume que les administrations collaborent les unes avec les autres). Dix-huit pays ont créé des entités spécialisées (par exemple, des fonds ou des banques d’investissement vert) chargées d’apporter un éclairage environnemental aux pouvoirs publics.
Les méthodes de budgétisation verte les plus répandues sont les suivantes :
Les analyses coûts-bénéfices environnementaux, qui éclairent la prise de décision budgétaire. Au Royaume-Uni, le Trésor fournit au gouvernement une évaluation globale (le « Livre vert ») des effets sur le climat de l’ensemble des programmes gouvernementaux.
Les évaluations environnementales ex ante et ex post, qui permettent de procéder à des ajustements en cours d’exercice et d’améliorer le contrôle de l’exécution du budget. En Italie, les décisions budgétaires sont étayées par des rapports sur les programmes environnementaux, tant en ce qui concerne l’exécution du budget que les comptes finals.
Les budgets carbone, qui fixent des plafonds d’émission de carbone pour une période donnée. La France a adopté trois budgets carbone depuis 2015. De même, l’Irlande a adopté un budget carbone quinquennal en 2021.
Les bilans carbone, qui fournissent des estimations des émissions de GES associées aux mesures budgétaires. Plusieurs pays de l’OCDE dressent ce type de bilan (Autriche, Canada, Corée, Danemark, Finlande, Irlande, Lituanie, Norvège, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni et Suède).
La cotation environnementale du budget, qui permet de déterminer si les postes budgétaires contribuent à la réalisation des objectifs verts ou y sont préjudiciables. À titre d’exemple, l’Irlande a adopté une approche binaire, selon laquelle le coût total d’une mesure est considéré comme écologique ou non, tandis que l’UE, la France et l’Italie suivent une approche graduelle pour déterminer dans quelle mesure les postes budgétaires sont écologiques.
Le prix interne du carbone, qui est utilisé par un petit nombre de pays pour évaluer le rapport coût-efficacité des mesures budgétaires. À titre d’exemple, le Royaume-Uni utilise un prix interne du carbone (ou valeur du carbone) pour évaluer l’incidence de l’ensemble des dépenses publiques, de la fiscalité et des réglementations sur les émissions de GES.
Parmi les autres instruments figurent les déclarations de budget vert, qui existent notamment en France et en Italie, et les rapports sur l’impact des mesures budgétaires sur les émissions, utilisés entre autres au Danemark. Les formations organisées par l’autorité budgétaire centrale (en Autriche, au Canada, en Colombie, au Danemark, au Mexique et au Portugal, à titre d’exemple), les instructions détaillées figurant dans la circulaire budgétaire publiée chaque année (en France, en Italie, au Luxembourg, au Mexique, en Norvège, au Portugal et en Suède, notamment) et les groupes interinstitutions chargés d’assurer la coordination entre l’administration et les parties prenantes (au Canada, en Colombie, au Danemark, en France et au Mexique, par exemple) sont autant d’initiatives à même de favoriser les activités de budgétisation verte.
Si des progrès notables ont été accomplis en matière de budgétisation verte, il reste des obstacles à surmonter. Les pays ne disposent souvent pas des ressources et des méthodologies nécessaires à la mise en œuvre de la budgétisation verte. Il y a tout lieu de penser que le Pacte vert de l’UE et le soutien technique dont 23 États Membres bénéficient à ce titre en matière de budgétisation verte favorisera le recours à cette pratique dans les pays membres. En outre, le projet collaboratif de Paris de l’OCDE sur la budgétisation verte offre aux pays un cadre favorable à l’échange et à l’harmonisation des pratiques optimales dans ce domaine.
Source : Commission européenne (2022[44]); OCDE (2021[45]); OCDE et Commission européenne (2020[46]); Commission européenne, OCDE et Fonds monétaire international (2021[47]); OCDE (2021[48]); Braendle (2021[49]); et Blazey, A. et M. Lelong (2022[50]).
L’approfondissement de l’union des marchés des capitaux peut stimuler l’investissement privé nécessaire à la transition écologique. La capitalisation boursière est plus faible dans l’UE que dans des économies comparables (Banque mondiale, 2022[51])(Graphique 2.8, partie A). L’inconsistance des marchés des capitaux tient entre autres au rôle limité des investisseurs institutionnels, en particulier des compagnies d’assurance, alors même que l’UE est dotée d’un marché de l’assurance bien développé. Les assureurs investissent principalement dans des obligations d’État et d’entreprise à faible risque. L’investissement en actions, en particulier dans le cas des assureurs de la branche non-vie, est plus faible qu’aux États-Unis (Graphique 2.8, partie B). Cette différence tient notamment à l’existence de règles plus restrictives dans l’UE, qui incitent les compagnies d’assurance à privilégier les obligations d’État sans risque et celles d’émetteurs bien notés. Par exemple, outre leurs obligations de solvabilité, les assureurs doivent respecter un ratio compris entre 22 % et 49 % au titre de l’exigence de capital pour actions. Les placements à long terme en actions sont soumis à une exigence plus faible, de 22 %, même si, compte tenu du caractère excessivement restrictif des critères applicables, seulement 2 % de l’ensemble des placements des assureurs satisferaient cette règle (High Level Forum on the Capital Markets Union, 2020[52]). La Commission européenne a entrepris de réviser les règles de solvabilité, notamment le traitement à réserver à l’exigence de capital pour actions afin de mieux prendre en compte le fait que les investisseurs institutionnels investissent sur le long terme. Cette caractéristique s’accompagne de risques prudentiels, potentiellement moindres dès lors que les risques liés au changement climatique sont bien intégrés. L’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles mène actuellement une analyse de ces enjeux (Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, 2023[53]). La réglementation prudentielle devrait néanmoins garantir une bonne gestion des risques dans le secteur de l’assurance.
La mobilisation de l’épargne des ménages peut soutenir l’investissement. Par exemple, le système de retraite, tout particulièrement s’il s’agit d’un système par capitalisation, peut contribuer à fournir suffisamment de capital-risque à long terme pour favoriser la transition écologique. De nombreux pays de l’UE soumettent les fonds de pension à des restrictions quantitatives qui limitent l’investissement dans des titres non cotés et en capital-risque (OCDE, 2022[54]). Ces restrictions réduisent les possibilités de financement des start-ups, ce qui freine le développement et la commercialisation de nouvelles technologies. Il y a surtout lieu de s’inquiéter de la faiblesse des fonds alloués à la montée en puissance des start-ups innovantes (Graphique 2.9). Si une réglementation prudente est de rigueur pour protéger les cotisations des retraités, les restrictions quantitatives actuellement en place empêchent certainement de recourir davantage aux fonds de pension comme source de financement privée de la transition écologique (OCDE, 2022[55]). Leur assouplissement eu égard aux fonds de pension pourrait donc libérer les investissements dans les technologies vertes. Or, un tel assouplissement soulève des risques prudentiels. D’où la nécessité de garde-fous et d’une réglementation de l’investissement adéquate pour que les organismes de retraite continuent d’agir dans le meilleur intérêt de leurs adhérents (OCDE, 2022[55]). À long terme, il serait possible de soutenir les marchés de capitaux par un développement de la retraite par capitalisation, notamment en rendant automatique l’affiliation aux régimes professionnels, quoique cela relève de la responsabilité des pays de l’UE (High Level Forum on the Capital Markets Union, 2020[52]).
Atteindre les objectifs ambitieux fixés pour la réduction des émissions nécessite une stratégie globale qui permette de relever le défi dans un large éventail de secteurs. L’une des principales difficultés demeure la décarbonation du secteur de l’énergie. La baisse des émissions doit aussi considérablement s’accélérer dans les domaines de l’agriculture et des transports qui ont, jusqu’à présent, peu contribué à la réalisation des objectifs de réduction des émissions.
À partir des années 90, l’UE a réussi à réduire l’intensité d’émission de son secteur de l’agriculture : les émissions agricoles ont augmenté plus lentement que la production, ce qui témoigne d’un découplage entre les premières et la seconde. La baisse des émissions dans les années 90 et 2000 est imputable à la diminution des cheptels, mais aussi à une meilleure utilisation des engrais (OCDE, 2023[56]). Plus récemment, cependant, les progrès se sont interrompus. Les émissions de carbone du secteur de l’agriculture ont à peine diminué au cours de la dernière décennie, ce qui met en évidence les incohérences entre les politiques climatique et agricole de l’UE. L’action climatique est pourtant un objectif essentiel de la Politique agricole commune (PAC) depuis 2013 (Encadré 2.5). En 2014-20, un quart des dépenses au titre de la PAC étaient censées contribuer à l’atténuation du changement climatique et à l’adaptation à ses effets, selon la Commission européenne (2019[57]). Une évaluation de la Cour des comptes européenne (2021[58]) conclut pourtant que les fonds de la PAC affectés à l’action climatique ont peu participé à la réduction des émissions, lesquelles n’ont pas sensiblement évolué depuis 2010. De plus, les pays de l’UE ne prévoient pas de diminutions importantes des émissions dans le secteur agricole d’ici à 2030, et préfèrent se concentrer sur d’autres secteurs (Graphique 2.10). Sur d’autres fronts que celui des émissions, l’agriculture doit également relever des défis environnementaux importants, qui concernent notamment la biodiversité et la qualité de l’eau, de l’air et des sols, comme l’expliquent plus en détail les Études économiques de l’OCDE consacrées à l’Allemagne, au Danemark, à la France, au Royaume-Uni et à la Suède, par exemple (OCDE, 2022[59] ; OCDE, 2021[60] ; OCDE, 2022[61] ; OCDE, 2023[62] ; OCDE, 2023[63]).
Pour la période de financement 2021-27, 387 milliards EUR de fonds publics ont été alloués à la PAC (soit 19 % du budget de l’UE, y compris le financement du plan de relance « Next Generation EU »), dont 75 % au titre du premier pilier et les 25 % restant au titre du second pilier.
Le premier pilier fournit essentiellement des aides directes au revenu des producteurs agricoles. Une petite part (5 %) de ce budget est également utilisée pour intervenir sur certains marchés agricoles en cas de chocs négatifs sur les prix des denrées alimentaires. L’idée qui sous-tend cette approche est que le secteur de l’agriculture est crucial pour l’approvisionnement alimentaire de l’UE. Jusqu’en 2003, les paiements directs aux agriculteurs étaient fondés sur les volumes de production. Depuis, ces paiements fondés sur la production ont été réduits et remplacés par des paiements sur la base des hectares éligibles.
Le deuxième pilier finance les activités de développement rural et, de plus en plus, des objectifs climatiques et environnementaux. Il nécessite un cofinancement de 40 % de la part des États membres.
La Commission européenne effectue le suivi des travaux des agences nationales et rend compte de l’utilisation des fonds de l’UE, tandis que les pays de l’UE sont responsables de l’exécution des paiements et des contrôles auprès des bénéficiaires.
L’action climatique est un objectif central de la PAC depuis 2013, en complément des autres objectifs de maintien des revenus agricoles et de développement rural (Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, 2013[64]). Pour la période 2021-27, environ 40 % des financements de la PAC sont consacrés à l’action climatique, ce qui correspond à 28 % de l’ensemble des dépenses consacrées à l’action climatique dans le budget de l’UE pour 2021-27 (Commission européenne, 2022[65]).
Depuis 2015, un tiers de l’ensemble des paiements directs aux producteurs agricoles au titre du premier pilier (soit 24 % du budget de la PAC) sont conditionnés au respect de pratiques agricoles obligatoires bénéfiques pour le climat et l’environnement (paiements directs verts). Ces pratiques sont notamment : le maintien de prairies permanentes, la diversification des cultures et les pratiques visant à préserver et améliorer la biodiversité des terres arables (cultures fixant l’azote, jachères, cultures dérobées, par exemple).
De plus, tous les paiements directs aux agriculteurs sont conditionnés au respect de certaines normes environnementales et de santé publique (écoconditionnalité).
À compter de 2023, un quart des paiements directs seront versés au titre d’écorégimes afin de renforcer les incitations en faveur de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement, parmi lesquelles l’agriculture biologique.
Quelque 13 % des fonds de développement rural (3.3 % du budget de la PAC) rémunèrent les agriculteurs pour la réalisation de certains objectifs environnementaux allant au-delà des exigences liées aux paiements directs verts et à l’écoconditionnalité. Ces objectifs environnementaux plus ambitieux concernent principalement la biodiversité, l’agriculture biologique et la conservation des particularités du paysage.
Les dépenses directement liées à la réduction des émissions de GES et à la conservation et à la conservation du carbone sont nettement plus faibles, puisqu’elles représentent 0.9 % du budget de la PAC selon les dernières données disponibles pour 2014-20 (Réseau européen de développement rural, 2021[66]).
Source : OCDE (2023[56]), Policies for the Future of Farming and Food in the European Union, OECD Agriculture and Food Policy Reviews, Éditions OCDE, Paris.
Le principe pollueur-payeur s’applique rarement aux émissions imputables aux activités agricoles. La taxation du carbone est peu utilisée, comme en témoigne la faiblesse des prix explicites du carbone. Les droits d’accise sur les carburants, qui représentent une tarification implicite des émissions, couvrent moins de 10 % des émissions de GES du secteur, principalement imputables aux véhicules agricoles qui, en majorité, roulent au gazole (Graphique 2.11). Cependant, les importantes subventions aux combustibles fossiles, sous la forme d’abattements ou d’exonérations sur les droits d’accise sur le gazole, dans le secteur agricole réduisent le prix effectif du carbone (Commission européenne, 2022[67] ; Cour des comptes européenne, 2022[21]). De plus, les émissions d’origine agricole ne relèvent pas du système d’échange de quotas d’émission de l’UE. Par conséquent, la tarification du carbone ne s’applique pas à la plupart des émissions de GES du secteur, à savoir le méthane, principalement émis par le bétail, l’oxyde nitreux des sols, lié à l’utilisation des engrais, et le dioxyde de carbone, issu de l’utilisation des terres. Sans des incitations tarifaires plus fortes à réduire ses émissions, l’agriculture est en voie de devenir l’un des secteurs les plus émetteurs de l’UE d’ici à 2030 (Chateau, Miho et Borowiecki, 2023[10]). Pour que les pollueurs paient leurs émissions, il faudrait supprimer progressivement les subventions aux combustibles fossiles préjudiciables à l’environnement (voir ci-avant).
Ramener les émissions agricoles sur une trajectoire descendante exige, d’abord, de supprimer les subventions aux combustibles fossiles préjudiciables à l’environnement et, ensuite, d’augmenter le prix du carbone. Cette deuxième mesure pourrait nécessiter d’étendre le système d’échange de quotas d’émission au secteur de l’agriculture, comme cela a été annoncé pour les transports et les bâtiments. Cette extension des échanges de quotas d’émission est un processus graduel qui devrait en définitive englober également le secteur de l’agriculture. Une autre solution, non fondée sur les échanges de quotas d’émission, consiste à instaurer une taxe carbone sur les émissions agricoles, comme le prévoient le Danemark et la Nouvelle-Zélande (OCDE, 2022[68]). Cependant la tarification du carbone dans le secteur de l’agriculture pose des problèmes, car elle n’est pas simple à mettre en œuvre sur le plan technique. Il est par exemple difficile de calculer les émissions au niveau des exploitations qu’il faudrait prendre en compte dans le système d’échange de droits d’émission. Il existe déjà, malgré tout, des systèmes pilotes de surveillance des émissions liées à l’élevage, à la réhumidification des tourbières et à l’agroforesterie. Avant l’extension des échanges de quotas d’émission à l’agriculture, des systèmes de surveillance de ce type pourraient être transposés à plus grande échelle et déployés plus largement dans le secteur, quand bien même il est plus ardu de mesurer la baisse des émissions due à l’amélioration des pratiques de gestion des sols (Commission européenne, 2021[14]). L’élargissement des échanges de quotas d’émission exigera de mieux soutenir les agriculteurs pour qu’ils mettent en place des systèmes de surveillance et de déclaration des émissions, en réaffectant certains fonds agricoles à l’aide aux agriculteurs à faible revenu qui, parce qu’ils sont rarement en mesure de répercuter les coûts plus élevés sur les consommateurs, sont les plus vulnérables à la hausse des coûts d’atténuation (voir ci-après). Des enseignements pourraient être tirés de l’expérience de la Nouvelle-Zélande, où les pouvoirs publics et le secteur agricole travaillent ensemble à l’élaboration d’un système de tarification du carbone au niveau des exploitations qui soit applicable aux émissions issues de l’élevage et de l’utilisation d’engrais (Encadré 2.6). Plusieurs garanties, notamment une mise en œuvre progressive et des allocations à titre gratuit, visent à éviter aux agriculteurs d’être surchargés par le nouveau cadre de tarification du carbone. Mais la politique en place est encore expérimentale donc il n’est pas encore possible d’identifier clairement ce qui fonctionne. Qui plus est, il sera plus difficile de déployer ce système de surveillance et de déclaration chez les petits producteurs et les agriculteurs à temps partiel, dont l’exploitation est souvent familiale, et qui manquent de l’expertise nécessaire à l’adoption de telles solutions. La tarification du carbone se heurte également à la vive résistance des entreprises du secteur, qu’il convient de surmonter (D’Arcangelo et al., 2022[9]).
L’élargissement des échanges de quotas d’émission à l’agriculture est également synonyme de coûts. Faire baisser les émissions pourrait s’avérer beaucoup plus ardu dans le secteur agricole que dans ceux de la production d’électricité et de l’industrie, du fait des coûts d’atténuation élevés. Par exemple, une grande partie des exploitations plus petites pourraient ne pas avoir les moyens d’investir dans des technologies et des pratiques d’atténuation. L’UE soutient les activités de réduction des émissions de carbone des agriculteurs, mais les fonds sont limités, avec 0.9 % du budget de la PAC en 2014-20 (voir ci-avant). Dans le même temps, il y aura aussi des coûts sociaux à mesure que les ménages seront touchés par la hausse des prix des produits agricoles.
La Nouvelle-Zélande prévoit de mettre en place une tarification du carbone dans l’agriculture à partir de 2025. Les pouvoirs publics et le secteur agricole travaillent ensemble à l’élaboration d’un système de tarification du carbone au niveau des exploitations qui soit applicable aux émissions issues de l’élevage et de l’utilisation d’engrais. Pour ce faire, des consultations sont en cours sur la tarification, au niveau des exploitations, des émissions imputables aux engrais azotés de synthèse, la reconnaissance de certains types d’absorptions de carbone à compter de 2025 et une taxe carbone au niveau des transformateurs à titre de mesure transitoire si la tarification du carbone au niveau des exploitations ne peut pas être mise en œuvre dès 2025. Si un tel système n’est pas mis en œuvre d’ici à 2025, la loi sur la lutte contre le changement climatique (Climate Change Response Act) dispose que les émissions agricoles seront tarifées dans le cadre du système d’échange de quotas d’émissions.
Les producteurs agricoles devront déclarer les émissions imputables à l’élevage à compter de 2024. Le secteur a déjà l’expérience des déclarations en matière d’émissions : les entreprises de la chaîne d’approvisionnement (transformateurs de viande ou de lait, fabricants et importateurs d’engrais azotés) sont tenues de surveiller et de déclarer leurs émissions agricoles dans le cadre du SEQE. L’existence d’une démarche comptable simplifiée devrait renforcer les incitations à participer au SEQE.
Source : Pareliussen et al. (2022[69])
La restauration des tourbières drainées est un moyen relativement simple de réduire les émissions liées à l’agriculture. Les tourbières drainées représentent 20 % des émissions agricoles de l’UE (soit 3 % de l’ensemble des émissions de l’UE), mais seulement 2 % de la superficie totale des terres cultivées et des prairies de l’UE. L’UE a proposé une nouvelle loi sur la restauration de la nature qui vise à restaurer les écosystèmes endommagés, notamment les tourbières drainées. Cependant, les paiements directs au titre de la PAC continuent d’encourager l’utilisation agricole des tourbières drainées, malgré l’impact négatif sur le climat. Seuls six pays de l’UE ont utilisé les fonds de la PAC pour restaurer des tourbières drainées et l’effort a été trop limité pour avoir un impact significatif sur la baisse des émissions (Cour des comptes européenne, 2021[58]). En 2023, l’UE a instauré de nouvelles règles strictes de protection des zones humides et des tourbières, en conditionnant les paiements directs aux agriculteurs au respect de ces règles (dispositions dites d’écoconditionnalité). Mais la conformité à ces exigences d’écoconditionnalité est faible, tout comme le niveau des pénalités (voir ci-après). C’est pourquoi les paiements directs qui concernent l’utilisation agricole des tourbières drainées devraient être liés à la réhumidification des tourbières.
Les politiques d’atténuation reposent principalement sur des mesures volontaires peu susceptibles de réduire les émissions (Commission européenne, 2017[70]). Les paiements directs verts destinés à inciter les agriculteurs à adopter des pratiques potentiellement climatocompatibles ont un effet limité : l’adoption de pratiques agricoles bénéfiques pour l’environnement n’a été observée que sur 5 % des terres agricoles de l’UE (Cour des comptes européenne, 2017[71]). Ce faible impact s’explique par le manque d’ambition, les exigences écologiques correspondant pour l’essentiel à des pratiques agricoles établies. Autrement dit, les agriculteurs ne sont pas tenus d’introduire de nouvelles pratiques d’atténuation. De même, les mécanismes de paiements agro-environnementaux ne permettent pas d’atteindre les objectifs environnementaux (OCDE, 2023[56]). Les performances sont insuffisantes, car les paiements ne sont pas liés à l’obtention de résultats environnementaux spécifiques. Par exemple, les dispositifs en place soutiennent le développement de l’agriculture biologique, alors l’impact de ces pratiques sur les émissions de gaz à effet de serre n’est pas clair (Cour des comptes européenne, 2021[58]). Pour resserrer le lien entre les paiements et les résultats environnementaux, les réformes de la PAC vont davantage conditionner les paiements directs aux pratiques agricoles bénéfiques pour l’environnement à compter de 2023 (voir ci-après). Pour améliorer encore le rapport coût-efficacité, il conviendrait aussi de conditionner les paiements à la réduction effective des émissions (OCDE, 2022[72]). Mais il est difficile de prévoir des paiements fondés sur les résultats puisque le secteur n’est pas encore doté de systèmes de surveillance et de déclaration des émissions. Dans un premier temps, ces paiements fondés sur les résultats pourraient être instaurés dans les domaines où il est plus facile de mettre en place de tels systèmes de surveillance des émissions, comme la réhumidification des tourbières, l’agroforesterie et l’élevage (voir ci-avant).
Les producteurs agricoles reçoivent des paiements directs à condition qu’ils respectent des pratiques agricoles bénéfiques pour l’environnement. Ces pratiques sont notamment le fait de maintenir une couverture minimale du sol ou de limiter l’utilisation d’engrais azotés. Le non-respect de ces dispositions dites d’écoconditionnalité peut entraîner une réduction des paiements directs, ce qui est un mécanisme efficace de protection de l’environnement. Pour vérifier que les producteurs agricoles sont en conformité, on effectue des contrôles directement sur leurs exploitations. Chaque année, de tels contrôles sur site sont menés sur environ 2 % des exploitations qui sollicitent un soutien au titre de la PAC. Cependant, l’application de la législation environnementale reste insuffisante. Les pénalités sont faibles : elles représentent environ 3 % du montant accordé sous forme de paiements directs (Commission européenne, 2022[73]). Cette faiblesse des sanctions diminue l’effet dissuasif, comme en témoignent les taux élevés d’infraction (Cour des comptes européenne, 2016[74]). De fait, un agriculteur inspecté sur quatre a vu son aide réduite pour non-conformité à la réglementation. Pour encourager une conformité accrue aux pratiques bénéfiques pour l’environnement, il conviendrait de renforcer l’application des dispositions d’écoconditionnalité. En d’autres termes, il faudrait des pénalités plus élevées qui soient fonction des dommages environnementaux résultant de l’infraction (OCDE, 2014[75]).
Il existe des contradictions entre les incitations à réduire les émissions et les incitations à produire de la viande à forte intensité d’émission. L’un des canaux qui empêche activement la baisse des émissions est celui des paiements directs fondés sur le nombre d’animaux (ou paiements couplés). C’est pourquoi la diminution, depuis 2003, des paiements directs fondés sur les volumes de production est une évolution globalement positive. Toutefois, quelque 8 % des paiements directs aux producteurs agricoles continuent de soutenir l’élevage, lequel est responsable de la moitié de l’ensemble des émissions du secteur, même si le cheptel bovin de l’UE a diminué de 2 % entre 2010 et 2020 (Commission européenne, 2018[76] ; Commission européenne, 2023[77]). Les producteurs agricoles peuvent recevoir des paiements couplés quel que soit leur niveau de rentabilité. Les exploitations non rentables bénéficient donc également d’un soutien. Pour la période 2021-27, le plafond des paiements couplés a été porté de 11 % à 13 % des paiements directs, et la part effective des paiements couplés a atteint 11.2 % des paiements directs en 2022 (Commission européenne, 2022[78]). Un tel soutien encourage le maintien d’un cheptel important, parce que les producteurs agricoles recevraient moins de paiements s’ils réduisaient leur nombre d’animaux. La Commission européenne estime que les paiements couplés ont accru la production de viande bovine de 2.4 % et réduit les prix de la viande bovine de 3.9 % entre 2007 et 2015 (Commission européenne, 2018[79]). Cette pratique favorise également l’utilisation des engrais puisque les produits d’origine animale nécessitent plus d’azote que les produits d’origine végétale. Supprimer les soutiens quand le nombre d’animaux d’élevage est élevé pourrait aider à réduire les émissions de GES du secteur agricole (Jansson et al., 2020[80]). Cependant, sans les paiements couplés, il serait difficile de maintenir l’agriculture dans les régions pauvres, et les coûts d’atténuation supplémentaires aggraveraient encore la situation. De plus, supprimer les paiements couplés pourrait faire baisser la production et augmenter le prix de la viande. Un recul de la production de viande ne présenterait aucun risque pour la sécurité alimentaire, car l’UE est autosuffisante dans ce domaine, mais la hausse des prix de la viande pourrait avoir un impact sur les ménages à faible revenu en limitant leur accès à des produits alimentaires abordables (Commission européenne, 2022[81]). C’est pourquoi l’UE devrait supprimer les paiements directs fondés sur le nombre de têtes de bétail, en procédant de façon graduelle afin d’atténuer l’impact sur les prix des denrées alimentaires. Si un tel abandon des paiements couplés n’est pas politiquement envisageable, l’UE devrait s’assurer que ces paiements, a minima, ne se traduisent pas par une expansion du cheptel et qu’ils sont plus ciblés.
Pour réduire les émissions liées à l’élevage, il existe également la directive de l’UE relative aux émissions industrielles, qui réglemente notamment la pollution imputable aux élevages intensifs (oxydes d’azote, méthane et dioxyde de carbone). Cette directive est actuellement en cours de révision, l’objectif étant de durcir les règles et de couvrir plus d’exploitations, en incluant des limites d’émission pour les principaux polluants, ce qui est bienvenu. Néanmoins, une action publique en faveur de la baisse de la production animale, si elle ne s’accompagne pas d’une évolution des comportements de consommation dans l’UE vers des régimes alimentaires moins carnés, pourrait avoir peu d’effet sur les émissions mondiale en raison des fuites de carbone.
Les paiements directs, parce qu’ils sont fonction du nombre d’hectares, subventionnent l’utilisation des terres et le maintien en exploitation d’une surface agricole plus élevée que cela ne serait le cas autrement. À l’heure actuelle, environ 38 % de la superficie totale de l’UE est consacrée à l’agriculture. Les prairies utilisées pour l’élevage à forte intensité d’émission sont particulièrement dépendantes des paiements directs, car elles sont moins productives que les terres arables. Cependant, l’excédent commercial croissant du secteur agricole au cours des deux dernières décennies, qui a atteint 0.3 % du PIB de l’UE en 2021, remet en question les raisons du maintien d’un soutien élevé aux producteurs agricoles (Graphique 2.12). De plus, ce soutien n’est pas ciblé, puisque les propriétaires des exploitations plus grosses et plus productives en bénéficient de manière disproportionnée : 80 % des paiements directs vont ainsi aux 20 % de producteurs agricoles les plus importants (Commission européenne, 2022[82]). Une réduction de ces paiements directs pourrait faire baisser les émissions agricoles liées à l’utilisation des terres (Brady et al., 2017[83]). Les surfaces ainsi libérées pourraient être mises à la disposition du secteur des énergies renouvelables qui a des besoins fonciers importants. Dans le même temps, les paiements directs devraient être dirigés vers les activités d’atténuation des agriculteurs concernés (voir ci-après).
Certaines mesures de réduction des émissions liées à l’agriculture peuvent avoir des conséquences sociales négatives sur les revenus des agriculteurs. Par exemple, réduire les aides directes au revenu fondées sur le nombre d’animaux pourrait toucher les agriculteurs à faible revenu de façon disproportionnée. L’analyse de ces effets sociaux nécessite des données détaillées sur les aides directes au revenu par type d’agriculteur et par groupe de revenus, comme celles que fournit le Réseau d’information comptable agricole de l’UE (voir ci-après). De telles informations permettront de mieux orienter les paiements directs vers les personnes qui en ont besoin et vers celles qui produisent avec moins d’émissions. De la même façon, le fait d’étendre les échanges de quotas d’émission à l’agriculture, comme cette Étude le propose, entraînera des coûts pour les agriculteurs. Il sera nécessaire de déployer des systèmes de surveillance des émissions au niveau des exploitations. Plus important encore, il s’agira également de tarifer les émissions agricoles. Une partie de ces coûts sera répercutée sur les consommateurs sous la forme d’une hausse des prix. Mais il est possible de renforcer le soutien financier des activités de réduction des émissions de carbone des agriculteurs, qui demeure limité, avec 0.9 % du budget de la PAC en 2014-2020 (Réseau européen de développement rural, 2021[66]). Par conséquent, afin de limiter la charge totale qui pèse sur les agriculteurs, l’UE devrait réorienter les fonds de la PAC vers les activités d’atténuation du changement climatique.
Selon les estimations de la Commission européenne, 40 % des dépenses relevant de la PAC entre 2021 et 2027 contribueront à l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ses effets. Les réformes de la PAC se traduiront notamment par une augmentation du financement des mesures volontaires destinées à encourager l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ses effets, ainsi que par des règles obligatoires plus strictes de protection des zones humides et des tourbières. Les efforts d’atténuation du changement climatique s’intensifient grâce à la limitation du travail du sol ainsi que l’interdiction de la conversion, du drainage, du brûlage ou de l’extraction de tourbe. Dans le cadre de la PAC réformée, la Commission européenne procédera également à une évaluation des progrès enregistrés par les pays de l’UE en vue de la réalisation des objectifs climatiques (Encadré 2.7). Les plans stratégiques nationaux de la PAC visent à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à augmenter le captage du carbone en protégeant et en multipliant les puits de carbone, et en s’attaquant aux émissions liées aux engrais minéraux et à l’élevage. Qui plus est, l’absorption du carbone gagne en importance. Un mécanisme volontaire de certification des absorptions de carbone est en cours d’établissement, les pratiques d’absorption du carbone étant financées par Horizon Europe et le Fonds pour l’innovation (voir ci-avant). L’obligation supplémentaire de maintenir des zones non productives sur au moins 3 % des terres arables devrait également contribuer aux absorptions de carbone. De plus, la nouvelle PAC incitera les agriculteurs à stocker le carbone dans les sols et la biomasse et à réduire les émissions sur 35 % de la superficie agricole de l’UE grâce à des pratiques de gestion appropriées, parmi lesquelles la gestion extensive des herbages, l’utilisation d’engrais organiques et l’agroforesterie.
La PAC 2023-27 s’appuie sur un nouveau modèle de gouvernance (nouveau modèle de mise en œuvre) avec un transfert accru des responsabilités aux États membres, qui doit permettre une application plus souple tenant compte du contexte et des besoins locaux. La nouvelle PAC est également plus ambitieuse en termes de développement durable. Elle s’articule autour de dix objectifs spécifiques, parmi lesquels les aides au revenu des agriculteurs, la lutte contre le changement climatique, la conservation du paysage et la biodiversité. C’est également sur ces objectifs que chaque État membre de l’UE s’est appuyé pour construire son Plan stratégique national (PSN) de la PAC. Chaque PSN conjugue un large éventail d’interventions ciblées destinées à répondre aux besoins précis de l’État membre, dans le but d’obtenir des résultats tangibles au regard des objectifs fixés à l’échelle de l’UE, dont le fait de « contribuer à l’atténuation du changement climatique et à l’adaptation à ses effets ».
La nouvelle PAC comprend une nouvelle « architecture verte ». Les exigences de verdissement ont été remplacées par des exigences environnementales obligatoires plus strictes pour ce qui concerne l’écoconformité (conditionnalité renforcée) et des écorégimes ont été mis en place pour encourager l’action climatique et environnementale financée au titre du premier pilier. Les écorégimes sont des mesures volontaires qui récompensent les agriculteurs engagés dans une gestion des terres respectueuse de la nature et climatocompatible. Les actions soutenues sont notamment : l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ses effets, la prévention de la dégradation des sols, la restauration des sols, la protection de la biodiversité, la restauration des habitats ou des espèces, la réduction de l’utilisation des pesticides ou une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, ainsi que l’amélioration du bien-être animal et la résistance aux antimicrobiens. Des règles de cantonnement des dépenses ont également été introduites : 40 % du budget de la PAC devrait concerner le climat, avec au moins 25 % du budget du premier pilier alloué aux écorégimes, et au moins 35 % du budget du second pilier à des mesures en faveur de l’action climatique, de la biodiversité, de l’environnement et du bien-être animal.
La conditionnalité renforcée augmente le volet obligatoire de la PAC en durcissant les normes de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) en lien avec les exigences d’écoconditionnalité et de verdissement. Les États membres disposent d’un degré de flexibilité pour augmenter encore les mesures obligatoires assorties d’une conditionnalité. Les anciennes BCAE sur le maintien de prairies permanentes et l’interdiction de brûler les chaumes ont été modifiées, tandis que de nouvelles règles de conditionnalité relatives au climat ont été ajoutées. L’une d’entre elles est l’exigence de protéger les zones humides et les tourbières.
Autre innovation importante, les PSN comprennent des interventions au titre des deux piliers de la PAC et pas seulement du développement rural comme précédemment. Comme dans le cas des objectifs climatiques, les PSN 2023-27 recouvrent une gamme d’interventions ciblées visant à répondre aux besoins spécifiques du pays concerné. Plus précisément, les pays de l’UE doivent démontrer que leurs interventions contribuent aux ambitions du Pacte vert pour l’Europe. L’objectif est d’orienter davantage les performances sur la base des indicateurs de résultats. Ces indicateurs de résultats, s’ils continuent souvent d’être axés sur les pratiques, sont le signe d’une évolution vers une politique fondée sur les résultats. À cet effet, un ensemble d’indicateurs nouvellement mis en place permet à la Commission européenne de suivre les progrès accomplis au niveau national à l’aide, notamment, de rapports annuels de performance et d’examens semestriels de performance des PSN. Les indicateurs liés au climat sont notamment : les contributions à l’atténuation du changement climatique ; la part des unités d’élevage donnant lieu à un soutien au titre de la réduction des émissions de GES ; et la part des terres pour lesquelles un soutien est accordé en contrepartie de l’engagement à réduire les émissions de GES ou maintenir ou améliorer le stockage du carbone. Les pays de l’UE, quand ils ont soumis leur PSN, ont dû prouver que leurs mesures liées au climat étaient plus ambitieuses que pendant la période de financement précédente (clause de « non-retour en arrière »).
Les PSN ont aussi vocation à soutenir l’adoption de méthodes d’absorption du carbone (ce qu’on appelle « l’agriculture du carbone »), par l’intermédiaire des écorégimes du premier pilier ou par l’intermédiaire des programmes de développement rural du second pilier.
Source : OCDE (2023[56]), Policies for the Future of Farming and Food in the European Union, OECD Agriculture and Food Policy Reviews, Éditions OCDE, Paris.
Cependant, la Commission européenne ne collecte pas de données sur les émissions au niveau des exploitations, qui permettraient un suivi approprié des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur de l’agriculture (OCDE, 2023[56]). De telles données pourraient renforcer la transparence des dépenses de la PAC et de leur impact sur les émissions nettes de gaz à effet de serre. La comptabilité des émissions devrait donc être étendue aux producteurs agricoles, comme le Danemark envisage actuellement de le faire (OCDE, 2022[59]) (voir ci-avant). Dans le cadre de la stratégie « De la ferme à la table », la Commission a proposé en 2022 d’améliorer le suivi des indicateurs environnementaux au niveau des exploitations en transformant l’actuel Réseau d’information comptable agricole en un Réseau d’information sur la durabilité des exploitations agricoles, une évolution bienvenue. De fait, une avancée possible serait de réunir des données sur les émissions dans le cadre du questionnaire du Réseau d’information comptable agricole, qui, chaque année, collecte des données comptables auprès de plus de 80 000 exploitations agricoles de l’UE (Commission européenne, 2021[84]). Dans un premier temps, les agriculteurs à temps partiel pourraient être exclus.
La transition énergétique sera déterminante pour la diminution des émissions globales et la sécurité énergétique. Pour réduire les émissions du secteur de l’énergie, l’UE prévoit de décarboner sa production d’électricité (Commission européenne, 2018[85]). De plus, les consommateurs devront davantage se tourner vers l’électricité. La dynamique est forte, car la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine donne de nouvelles raisons d’accélérer les investissements dans les énergies propres pour assurer les approvisionnements énergétiques.
L’électricité ne représente qu’environ 15 % de l’énergie consommée, ce qui montre que la combustion directe de ressources fossiles est toujours la principale forme de consommation d’énergie (Graphique 2.13). Décarboner plus encore le secteur passe donc par une électrification massive de l’économie et des investissements considérables dans des infrastructures d’approvisionnement et de réseau supplémentaires, ainsi que par le remplacement des centrales fossiles existantes (en particulier à charbon) par des moyens de production plus propres. Cela suppose que les marchés de l’électricité soient mieux intégrés pour que les échanges d’électricité puissent mieux équilibrer l’offre et la demande. De même, il faut des signaux-prix plus forts pour encourager les investissements dans les énergies renouvelables et une réponse plus forte de la demande et s’assurer que certains investissements sont également dirigés vers les groupes d’appoint et les capacités de stockage nécessaires quand l’éolien et le solaire ne produisent pas suffisamment.
Pour l’heure, la vitesse de déploiement des moyens de production renouvelable est insuffisante au regard de l’objectif que l’UE s’est fixé de porter la part des renouvelables dans la production d’électricité à 69 % d’ici à 2030, soit plus du double du chiffre actuel (Commission européenne, 2022[86] ; Commission européenne, 2022[87]). Par rapport à ses performances d’avant 2022, l’UE devra ajouter à son parc de centrales plus de trois fois autant de puissance renouvelable installée par an pour atteindre son objectif (AIE, 2022[4]). En outre, réduire l’intensité carbone de l’électricité a ses limites. Les moyens de production renouvelable ont en effet besoin actuellement d’environ 40 % à 50 % de puissance d’appoint, notamment alimentée au gaz, pour les périodes où l’offre solaire et éolienne est insuffisante, même si, à l’avenir, ce pourcentage pourrait être revu à la baisse par l’augmentation des capacités de stockage et les dispositifs de gestion de la demande (EASE, 2022[88] ; AIE, 2020[89]).
L’investissement dans les énergies renouvelables est encouragé par de généreux dispositifs de soutien public, tels que les tarifs d’achat, qui ont couvert 13 % des factures d’électricité des consommateurs en 2021. Au total, en 2020, les pays de l’UE ont consacré 81 milliards EUR (soit 0.6 % du PIB de l’UE) à ces subventions aux renouvelables, qui ont principalement profité à la biomasse, au solaire et à l’éolien (Graphique 2.14). Jusqu’à un tiers des 800 milliards EUR de fonds de lutte contre la pandémie et des 100 milliards EUR de fonds de cohésion pour la période 2021-27 (soit, chaque année, 0.4 % du PIB de l’UE en 2021) sont destinés à renforcer les dépenses nationales. A contrario, les enchères concurrentielles sont utilisées moins souvent ((ACER), 2022[90] ; AIE, 2020[91]). En 2020, seuls huit pays de l’UE ont organisé des enchères concurrentielles pour l’éolien terrestre et le solaire (Baringa Partners, 2022[92]). Ces enchères mettent en concurrence les entreprises en vue d’attribuer la puissance installée sur la base du prix proposé le plus faible. C’est pourquoi elles favorisent la concurrence et peuvent aider à réduire le coût budgétaire du déploiement des moyens de production renouvelable.
Du fait de l’assouplissement temporaire des règles relatives aux aides d’État en réaction à la pandémie puis à la crise énergétique, les pays de l’UE peuvent accorder davantage de subventions aux énergies renouvelables. Cette mesure, qui vise à accélérer la transition énergétique, est également une réponse à la hausse des dépenses consacrées aux renouvelables aux États-Unis (Encadré 2.8). Les aides d’État peuvent soutenir le développement et la montée en puissance des technologies à faibles émissions qui ne sont pas encore compétitives, comme le captage et le stockage du carbone (voir ci-après). Le solaire et l’éolien, quand ils n’en étaient qu’à leurs balbutiements et n’étaient pas encore compétitifs en termes de coûts, ont également eu besoin d’un soutien solide. Par la suite, l’électricité des centrales solaires photovoltaïques et éoliennes terrestres est devenue rentable dans la plupart des pays de l’UE au cours de la dernière décennie, donc les subventions publiques telles que les tarifs d’achat ont perdu en utilité. Par ailleurs, les subventions de l’UE, déjà généreuses, présentent des risques. Par exemple, l’assouplissement des règles relatives aux aides d’État risque de fausser le marché unique. Il convient aussi de se demander si les subventions sont efficientes (OCDE, 2005[19]). L’UE prend acte de ces préoccupations et encourage ses pays membres à réduire les subventions en faveur des technologies offrant une bonne compétitivité-coûts (Commission européenne, 2022[94]). Les subventions importantes accordées aux projets solaires et éoliens devraient être progressivement supprimées et redirigées vers des technologies nouvelles qui ne sont pas encore compétitives, comme le captage du carbone et l’hydrogène (AIE, 2022[4]). C’est pourquoi le cadre des aides d’État de l’UE devrait faire en sorte que les aides soient accordées uniquement aux technologies renouvelables qui ne sont pas encore compétitives (chapitre 1). Dans le même temps, un approfondissement des marchés des capitaux pourrait favoriser des percées technologiques (voir ci-avant).
La longueur excessive des procédures d’autorisation ralentit le déploiement des installations qui utilisent les énergies renouvelables (Graphique 2.15). Comme ce sont les pays membres qui ont la responsabilité de ces procédures d’autorisation, l’UE les appelle à simplifier ces procédures ; elle a proposé en outre de déclarer d’intérêt public les projets liés aux énergies renouvelables afin de raccourcir la durée de ces procédures. En outre, la Commission européenne a proposé un texte sur la neutralité des émissions dans l’industrie (Net Zero Industry) en mars 2023. Aux termes de ce texte, les États membres doivent désigner une autorité nationale et l’instituer point de contact unique chargé de veiller à la coordination et la facilitation des procédures d’autorisation (Commission européenne, 2023[95]). Les pays de l’UE devraient chercher à autoriser les éoliennes terrestres et les parcs solaires dans un délai de deux ans et les éoliennes en mer dans un délai de trois ans. La durée des procédures d’autorisation s’explique aussi par le fait que les autorités compétentes manquent de personnel (Commission européenne, 2022[96]). Accélérer le déploiement des installations utilisant les énergies renouvelables passe par la réduction des délais d’autorisation des nouvelles constructions, comme l’ont fait l’Allemagne et l’Espagne en 2023 (AIE, 2022[4]). Pour cela, il convient d’augmenter les ressources des autorités chargées de délivrer les autorisations. De plus, affecter davantage de terres agricoles à des projets liés aux énergies renouvelables permettrait de libérer des espaces importants (voir ci-après). Ces mesures, qui doivent être mises en œuvre par les États membres, sont décrites plus en détail dans les Études économiques de l’OCDE consacrées à l’Allemagne et à la Suède, par exemple (OCDE, 2023[62] ; OCDE, 2023[63]).
En application de leur loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act), les États-Unis vont allouer 38 milliards USD par an au soutien des énergies renouvelables pendant la période 2023 à 2033. Ce montant vient s’ajouter aux 25 milliards USD par an de dépenses consacrées à des programmes liés à l’énergie en vertu de la loi bipartisane sur les infrastructures pour la période 2021-25. Au total, les dépenses engagées au titre de ces deux lois représentent 0.3 % du PIB en 2023, soit la moitié des dépenses consacrées par les pays de l’UE aux subventions aux énergies renouvelables, qui s’élevaient à 0.6 % du PIB en 2020. La loi sur la réduction de l’inflation impose également des règles de contenu national. En pratique, les exigences nationales pourraient être moins strictes puisque des sous-composants peuvent être importés (JDSupra, 2023[97]).
Les États-Unis allouent 5 milliards USD par an au crédit en faveur des véhicules propres. Les consommateurs du pays qui achètent un véhicule électrique neuf peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt pouvant aller jusqu’à 7 500 USD. Cela vaut uniquement pour les voitures produites aux États-Unis, au Canada et au Mexique, et équivaut essentiellement à un droit d’importation d’environ 15 % pour un véhicule électrique d’un prix de 50 000 USD. À titre de comparaison, l’UE impose un droit de douane de 10 % sur les voitures importées.
L’essentiel du soutien public accordé au titre de la loi sur la réduction de l’inflation (25 milliards USD par an) prend la forme de crédits d’impôt. Par exemple, les centrales éoliennes peuvent obtenir un crédit d’impôt de 0.15 USD/kWh. Si 40 % des composants manufacturés des turbines sont produits aux États-Unis, le crédit d’impôt augmente de 10 % (White & Case, 2022[98]).
Source : US Department of Energy (2022[99]) et US Internal Revenue Service (2022[100]).
La question se pose de savoir s’il est techniquement faisable de déployer toutes les centrales renouvelables nécessaires pour atteindre l’objectif. Selon les estimations, décarboner le système électrique suppose que jusqu’à 5 % de la surface terrestre de l’UE soit occupée par des centrales solaires (van de Ven et al., 2021[101]). C’est une surface équivalente aux territoires combinés de la Grèce et de la République tchèque. À cela, il convient d’ajouter les parcs éoliens terrestres et en mer. Réaliser la transition énergétique nécessitera d’accélérer significativement le changement d’affectation des terres, en particulier des terres agricoles. L’opposition locale aux fermes éoliennes terrestres pourrait cependant ralentir ce processus.
Pour que la part de l’électricité renouvelable augmente, il est indispensable de renforcer l’intégration des marchés de gros de l’électricité. Par exemple, les pays disposant d’un surplus d’électricité d’origine éolienne ou solaire peuvent l’exporter pour répondre à la demande d’autres pays où l’offre ne suffit pas. L’insuffisance des interconnexions transfrontalières entrave cependant cette intégration. Cela se traduit par une capacité de transport transfrontalier limitée. Les échanges transfrontaliers d’électricité sont passés de 8 % à 12 % de la consommation énergétique finale entre 2010 et 2015, mais sont restés stables depuis. Le mécanisme pour l’interconnexion en Europe — l’un des principaux instruments que l’UE utilise pour financer les interconnexions — est doté d’un budget de moins de 6 milliards EUR (0.4 % du PIB de l’UE) en 2021-27. Le plan REPowerEU prévoit d’allouer 29 milliards EUR de plus au déploiement d’interconnexions transfrontalières. Plus précisément, les chapitres REPowerEU des plans nationaux de la Facilité pour la reprise et la résilience appellent à investir dans des projets d’infrastructures et d’’interconnexions transfrontalières. Mais les investissements annoncés ou déjà en cours dans de nouvelles lignes de transport pour 2030 ne couvrent que les trois quarts environ des nouvelles interconnexions nécessaires (ENTSO-E, 2022[102] ; ENTSO-E, 2022[103]). Les arguments en faveur d’un financement supplémentaire de la part de l’UE sont solides, étant donné que bon nombre des avantages d’un marché intégré se matérialiseront à l’échelle de l’UE. Une meilleure intégration des marchés de gros de l’électricité peut aider à gérer, avec un bon rapport coût-efficacité, la plus grande variabilité des prix de l’électricité renouvelable. Mais une telle intégration des marchés exige d’investir davantage dans les interconnexions transfrontalières. C’est pourquoi l’UE devrait augmenter les moyens disponibles pour les investissements dans les interconnexions transfrontalières en réorientant des fonds vers le mécanisme pour l’interconnexion en Europe ou REPowerEU.
Les gestionnaires de réseau de transport (GRT) nationaux sont responsables de la planification et de la construction des lignes électriques à l’intérieur des pays et d’un pays à l’autre de l’UE. Mais les plans nationaux d’investissement dans les réseaux ne sont pas cohérents, ce qui limite les capacités de transport transfrontalier (Cour des comptes européenne, 2023[104]) (voir ci-avant). L’UE a pris acte du fait que cette coordination limitée fait obstacle aux investissements dans les infrastructures transfrontalières et commencé à établir une structure de gouvernance paneuropéenne pour la planification et la construction des lignes électriques en 2018. Dans un premier temps, elle a chargé le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité (ENTSO-E) de produire tous les deux ans des plans décennaux de développement du réseau (TYNDP). À l’aide de ces plans, l’ENTSO-E évalue les besoins de l’Europe en matière d’infrastructures de transport de l’électricité, les futurs développements, l’adéquation de l’offre et la résilience du réseau, sur la base des goulets d’étranglement liés aux infrastructures qui ont été recensés. Les efforts destinés à renforcer la coordination s’agissant de la planification des infrastructures de réseau et de l’investissement dans ces infrastructures devraient se poursuivre, en particulier dans le cadre d’une coordination plus étroite entre les GRT. Cela devrait s’accompagner d’un accroissement des ressources et des pouvoirs de l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) de l’UE, l’autorité de surveillance des marchés de l’électricité, aux fins de l’application des règles de l’UE concernant les capacités de transport transfrontalier.
Un autre problème se pose, celui de savoir comment fixer les prix sur un marché de l’électricité concurrentiel où le coût marginal de l’énergie renouvelable est nul. Les marchés de gros journaliers de l’électricité sont fondés sur le prix marginal, c’est-à-dire celui que propose la centrale la plus coûteuse dont on a besoin pour répondre à la demande. Avec la chute des coûts de la production renouvelable, les centrales à gaz sont devenues celles qui fixent les prix. Elles ont des coûts marginaux évidents qui couvrent notamment le combustible fossile qu’elles brûlent. Au contraire, les centrales renouvelables produisent de l’électricité à un coût marginal proche de zéro. Cela signifie que produire un kilowattheure d’électricité de plus est quasiment gratuit une fois les centrales solaires ou éoliennes déployées et mises en service. Cela étant, ces centrales nécessitent beaucoup de capitaux donc leurs coûts fixes sont élevés. La hausse des taux d’intérêt à moyen terme risque d’augmenter encore ces coûts fixes.
Il est donc à prévoir que la transition vers les renouvelables aura des conséquences sur la tarification de l’électricité. Les prix de l’électricité devraient devenir de plus en plus volatils. Ils peuvent descendre à zéro, voire devenir négatifs lorsque les énergies renouvelables sont abondantes. L’inverse se produit lorsque les renouvelables sont rares et que la demande est forte, par exemple pendant la nuit ou l’hiver dans le cas de l’énergie solaire (IRENA, 2017[105]). Une plus grande volatilité des prix peut rendre moins certaines les recettes à long terme dont les exploitants de moyens de production renouvelable ont besoin pour récupérer leurs coûts fixes. Dans une telle situation, les investissements dans les renouvelables pourraient dépendre de plus en plus des marchés avec des contrats d’achat d’électricité à long terme (Barroso et al., 2021[106]). Par exemple, en concluant des accords d’achat d’électricité (AAE) à long terme avec des exploitants de centrales renouvelables, les entreprises fixent la façon dont elles achèteront leur électricité pendant une durée pouvant aller jusqu’à 20 ans : cela les rend moins vulnérables à la volatilité des prix et fournit aux exploitants suffisamment de certitudes concernant leurs recettes pour attirer les investissements. L’UE a proposé de réformer son marché de l’électricité pour renforcer les enchères relatives aux contrats commerciaux à long terme et aux contrats d’écart compensatoire (Encadré 2.9). Dans le cas des contrats d’écart compensatoire, les pouvoirs publics garantissent aux producteurs d’électricité un prix minimum fixe pour la puissance fournie. Cependant, la proposition prévoit une réglementation des prix de détail de l’électricité applicable aux consommateurs en période d’urgence. De plus, les enchères relatives aux contrats d’écart compensatoire fixeraient un prix maximum pour l’électricité sur les marchés de gros, ce qui constituerait dans les faits un plafonnement. Ce type de plafonnement des prix de gros et de détail réduit les incitations à investir dans les renouvelables. C’est pourquoi il est nécessaire de supprimer les obstacles aux contrats d’électricité à long terme, y compris les prix réglementés inférieurs aux prix du marché.
La volatilité des prix pourrait aussi refléter les coûts de la production d’appoint (par exemple, celle des centrales à gaz) nécessaire lorsque l’offre solaire et éolienne est insuffisante. La question se pose de savoir comment rémunérer les fournisseurs de la puissance d’appoint lorsque celle-ci ne sert que si l’électricité d’origine renouvelable vient à manquer. S’assurer qu’il existe des investissements pour financer la construction de moyens de production supplémentaires pourrait nécessiter des marchés à long terme pour la puissance d’appoint, et notamment des systèmes d’enchères.
Les marchés de détail de l’électricité sont fragmentés et suivent les frontières, comme en témoignent les écarts importants des prix de détail d’un pays à l’autre et parfois d’une région d’un pays à l’autre (Cour des comptes européenne, 2023[104]). Dans une certaine mesure, les différences de prix reflètent les taxes et les prélèvements. Mais cette fragmentation est également le signe que les marchés nationaux ne sont toujours pas concurrentiels et restent dominés par des prix de détail de l’électricité réglementés (Graphique 2.16) (AIE, 2020[91]). Un tel système de réglementation des prix de détail réduit l’efficacité du signal-prix, étant donné que les prix de détail reflètent mal la demande du marché (ACER/CEER, 2022[107]). Par conséquent, les exploitants sont moins incités à investir dans des moyens de production d’électricité bas carbone efficaces. De plus, la réglementation des prix de détail n’invite pas à faire des économies d’énergie et décourage les consommateurs de déplacer leur consommation d’électricité des périodes de pointe vers les périodes où les prix sont plus bas. La Directive de l’UE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité exige des pays membres qu’ils suppriment progressivement la réglementation des prix de détail sauf si elle est limitée dans le temps et si elle s’applique aux ménages vulnérables ou en situation de précarité énergétique. Elle dispose également que la protection de ces ménages doit passer avant tout par des mesures sociales ou par tout moyen autre que la réglementation des prix. Intégrer davantage les marchés de gros de l’électricité nécessite des signaux-prix plus forts. Cela suppose également de rendre les marchés nationaux de détail plus concurrentiels, avec une réduction des écarts de prix. De ce fait, l’UE devrait veiller à ce que les pays transposent entièrement la Directive de l’UE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité en supprimant progressivement les prix de détail réglementés. Avec un marché de gros de l’électricité plus intégré, l’UE sera aussi mieux équipée pour affronter la crise énergétique et assurer la sécurité énergétique.
Face à la volatilité accrue des prix et à d’éventuelles conséquences sociales négatives, les pouvoirs publics sont intervenus pour subventionner la consommation de combustibles fossiles et réglementer les prix de détail de l’électricité en 2022. Cependant, ces interventions doivent être évaluées au regard du fonctionnement de marchés de l’électricité intégrés, dont on estime qu’ils ont permis aux consommateurs d’économiser l’équivalent de 2.4 % du PIB par an au cours de la dernière décennie en raison de la baisse des prix de l’électricité ((ACER), 2022[90]). Une aide au revenu spécifiquement destinée aux ménages à faible revenu peut répondre aux préoccupations sociales tout en préservant les incitations en faveur des économies d’énergie, même si ce genre d’aide ciblée s’accompagne aussi de difficultés de mise en œuvre (OCDE, 2023[108]).
Si les marchés de détail de l’électricité ne sont pas plus compétitifs, c’est aussi parce que, dans la plupart des pays de l’UE, la tarification de l’électricité et du gaz manque de transparence. Malgré les réglementations de l’UE appelant les pays à établir des outils en ligne certifiés pour comparer les prix de détail de l’électricité et du gaz, seuls sept membres de l’UE proposent déjà de tels outils (ACER/CEER, 2022[107]). Une tarification plus transparente peut favoriser des marchés de détail plus concurrentiels en encourageant les consommateurs à se tourner vers le fournisseur le moins cher.
En mars 2023, la Commission européenne a proposé de réformer le marché européen de l’électricité en réponse au choc lié aux prix de l’énergie intervenu en 2022. L’objectif est de réduire la volatilité des prix pour les consommateurs, de renforcer la stabilité des prix à long terme et d’encourager les investissements dans les énergies renouvelables.
Prix de détail réglementés pour les ménages et les petites et moyennes entreprises en cas d’urgence.
Les consommateurs devraient avoir le droit de choisir entre des contrats de fixation de prix sûrs et des contrats de fixation dynamique, selon qu’ils sont peu enclins ou très enclins à prendre des risques. Le recours accru à la tarification dynamique vise à encourager le transfert de la demande vers les périodes où les prix de l’électricité sont moins élevés, par exemple la nuit.
Accès renforcé des marchés aux contrats à long terme, notamment les accords d’achat d’électricité (AAE) et les contrats d’écart compensatoire (CEC).
Les États membres fourniraient des garanties publiques pour réduire les risques financiers associés au défaut de paiement, qui constitue souvent un obstacle majeur aux AAE. Les exploitants d’énergies renouvelables qui participent à un appel d’offres public devraient réserver une part de leur production pour la vente dans le cadre d’AAE. De plus, les fournisseurs d’électricité seraient soumis à des obligations de couverture plus strictes, dont on attend également qu’elles stimulent la demande d’AAE.
À travers les CEC, les pouvoirs publics garantissent aux fournisseurs d’électricité un prix minimum. La proposition prévoit des CEC bidirectionnels pour les fournisseurs d’électricité, avec un prix minimum ainsi qu’un prix maximum ou prix plafond, de sorte que toute recette dépassant le plafond devrait être remboursée à l’État. Les CEC s’appliqueraient aux exploitants d’installations solaires, éoliennes, géothermiques, hydrauliques et nucléaires.
Améliorer le fonctionnement du marché de gros de l’électricité à court terme en réduisant la taille minimale des offres émises sur les marchés infrajournaliers et journaliers pour améliorer la liquidité.
Pour améliorer la flexibilité du système électrique, les États membres seraient tenus d’évaluer les besoins de leur système électrique et auraient la possibilité de mettre en place de nouveaux mécanismes de soutien, en particulier pour la réponse de la demande et le stockage.
L’ACER disposerait d’une capacité renforcée de surveillance du fonctionnement du marché de l’énergie. En particulier, la mise à jour du règlement concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (REMIT) garantirait une meilleure qualité des données et consoliderait le rôle de l’ACER dans les enquêtes concernant des cas potentiels d’abus de marché comportant une dimension transfrontalière.
Source : Commission européenne (2023[109]).
La réglementation des prix sur les marchés de gros de l’électricité est une autre question connexe. Au cours de la crise énergétique de 2022, la flambée des prix de l’énergie a pesé sur de nombreux ménages, et réduit leur revenu disponible. Au contraire, cette hausse des prix de gros a permis aux énergéticiens de bénéficier de gains exceptionnels. Une telle situation a conduit les administrations nationales à taxer les bénéfices élevés des entreprises du secteur de l’énergie et à utiliser ces recettes fiscales pour financer les aides énergétiques aux ménages. En décembre 2022, les pays de l’UE sont convenus de plafonner temporairement les recettes des entreprises du secteur énergétique (les recettes provenant des technologies dites inframarginales). Plus précisément, les recettes des producteurs d’électricité non gazière, y compris renouvelable, ont été plafonnées à 180 EUR par mégawattheure sur le marché de gros. Cependant, ces mesures temporaires ont pour inconvénient de créer davantage d’incertitude donc risquent de décourager l’investissement. Le plafonnement des recettes correspond à un impôt de 100 % sur les recettes au-dessus du seuil fixé. En général, un tel impôt sectoriel sur les recettes fausse l’activité. C’est-à-dire que la répartition sectorielle du capital est modifiée par les différences de taux d’imposition entre secteurs. De plus, le plafond ne s’applique qu’aux recettes du marché qui sont au-dessus de 180 EUR par mégawattheure et peut donc augmenter avec la base d’imposition. De ce fait, la charge fiscale pourrait être plus lourde pour les exploitants de grandes centrales renouvelables, ce qui pourrait les désinciter à investir et à se développer (AIE, 2022[4]). Le plafonnement des recettes, explicitement conçu comme une mesure temporaire, sera réexaminé en juin 2023. Pour favoriser les incitations à l’investissement dans la transition écologique, il faut un régime fiscal plus prévisible pour les producteurs d’électricité d’origine renouvelable. Cela suppose que le plafonnement des recettes reste exceptionnel et qu’il soit progressivement supprimé.
Mais s’appuyer davantage sur les renouvelables exige de disposer d’une puissance d’appoint suffisante. Le mix électrique est actuellement composé pour environ 40 % à 50 % de sources d’énergie conventionnelles, notamment le gaz, destinées à fournir la puissance d’appoint quand le solaire et l’éolien ne produisent pas assez d’électricité, par exemple la nuit ou en hiver dans le cas de l’énergie solaire (EASE, 2022[88] ; AIE, 2020[89]). Autrement dit, chaque mégawattheure supplémentaire d’électricité renouvelable nécessite 0.4 à 0.5 mégawattheure d’électricité produite par une centrale d’appoint. Mais la réglementation des prix et les impôts exceptionnels découragent l’investissement dans les moyens de production d’appoint, attendu qu’une fiscalité plus lourde dans le secteur de l’énergie réduit l’incitation à l’investissement. Pour l’heure, la puissance d’appoint continue de provenir principalement des centrales à gaz historiques, avec peu d’investissement dans de nouveaux groupes de production (AIE, 2020[91]). Pour attirer les investissements dans des groupes d’appoint, il faut un signal-prix clair et un environnement stable pour les entreprises (voir ci-avant). Cela étant, intégrer davantage les marchés de l’électricité réduira la puissance d’appoint nécessaire, attendu que l’électricité solaire ou éolienne excédentaire peut être exportée pour répondre à la demande d’autres pays où l’offre est insuffisante.
L’intensité carbone de la production d’électricité varie considérablement d’un pays à l’autre de l’UE. Alors que certains pays disposent d’un mix électrique à faible intensité carbone grâce à la part élevée des renouvelables et du nucléaire, plusieurs États membres d’Europe centrale et orientale dépendent fortement du charbon (AEE, 2022[110]). Le charbon demeure la principale source d’émissions du secteur de la production d’électricité, puisqu’il totalise un tiers de l’ensemble des émissions du SEQE-UE (Ember, 2022[111]). Quatre pays de l’UE ont déjà abandonné le charbon, et 14 autres ont annoncé qu’ils le feraient d’ici à 2030. Plusieurs États membres d’Europe centrale et orientale, qui comptent pour environ 45 % du charbon actuellement utilisé dans l’UE, restent engagés dans la production à charbon après 2030 (Ember, 2023[112] ; Réseau action climat Europe, 2023[113]). Pour atteindre son objectif d’émission à l’horizon 2030, l’UE doit accélérer les efforts qu’elle mobilise pour abandonner le charbon (AIE, 2021[114]).
La biomasse est le principal moteur du déploiement des installations renouvelables depuis dix ans : elle représentait près de 60 % des sources d’énergie renouvelables en 2020. Cela témoigne des aides publiques importantes accordées aux projets liés à la biomasse, qui ont reçu près d’un quart du soutien total aux renouvelables dans les pays de l’UE (Graphique 2.14). La biomasse, comme celle des biocarburants, peut être durable lorsqu’elle est produite avec de l’énergie à faibles émissions à partir de déchets et de résidus. Par exemple, en 2021, près de 70 % du carburant diesel et du carburant d’aviation d’origine renouvelable était issu de déchets et de résidus (AIE, 2022[115]). Cependant, certains types de biomasse, comme les granulés de bois, peuvent être 1.8 fois plus émetteurs que le charbon du fait des pertes liées à la combustion et au traitement, en particulier lorsqu’ils sont transportés sur des distances de 145 kilomètres ou plus (Schnorf et al., 2021[16] ; Sterman, Siegel et Rooney-Varga, 2018[116]). En dépit de ces préoccupations, l’UE importe près de 40 % des granulés de bois destinés à sa consommation intérieure, principalement en provenance des États-Unis (Brack, Birdsey et Walker, 2021[15]). Un autre aspect du problème est que la combustion de biomasse ligneuse rejette immédiatement du CO2 dans l’atmosphère, tandis que le reboisement prend du temps. Autrement dit, selon le temps nécessaire pour effectuer le reboisement et le type de matière première utilisée, les émissions peuvent augmenter pendant des décennies avant d’être réabsorbées (IEEP, 2021[117]). La biomasse est aussi associée à une autre externalité environnementale négative, à savoir la dégradation de la biodiversité (AIE, 2022[115]).
La réglementation de l’UE ne décourage pas l’utilisation de la biomasse ligneuse à des fins énergétiques. Le SEQE exclut actuellement les émissions liées à la combustion de biomasse, conformément aux règles internationales de comptabilisation des émissions. En vertu de ces règles, les émissions imputables à l’utilisation de la biomasse ligneuse sont déclarées dans le secteur de l’utilisation des terres (UTCATF) plutôt que dans celui de l’énergie afin d’éviter un double comptage des émissions. Cela signifie que les émissions provenant de la combustion de biomasse sont prises en compte dans les engagements UTCATF nationaux du pays où le bois est récolté. Par conséquent, les émissions imputables à la biomasse ligneuse importée à l’étape de la combustion ne sont pas comptabilisées au niveau de l’UE mais dans le pays exportateur, ce qui conduit à surestimer les progrès accomplis par les pays de l’UE vers la réalisation des objectifs d’émission (Brack, Birdsey et Walker, 2021[15]). La proposition de directive révisée de l’UE sur les énergies renouvelables exige des exploitants de centrales à biomasse qu’ils apportent la preuve que le pays d’origine dispose d’une législation protégeant contre la récolte non durable du bois, et qu’il déclarent les émissions liées à l’exploitation forestière. Cela permettrait aussi de conditionner les aides publiques à la biomasse à des critères de durabilité plus stricts. Cependant, la directive sur les énergies renouvelables et la taxonomie des activités durables sur le plan environnemental continuent d’inclure la biomasse ligneuse. En accord avec ses objectifs de réduction des émissions, l’UE ne devrait pas encourager le soutien public à de la biomasse non durable et pour ce faire adopter la directive révisée sur les énergies renouvelables et veiller à ce que la biomasse non durable soit expressément exclue de la taxonomie des activités durables.
Pour atteindre l’objectif de neutralité des émissions, il est essentiel d’absorber le carbone de l’atmosphère et de réduire les émissions. Cependant, les efforts de captage, de stockage et d’utilisation du carbone restent modestes et concernent presque exclusivement l’agriculture et la foresterie. Dans ces secteurs, les possibilités d’absorber encore davantage de carbone sont limitées, sauf à se lancer dans de grands projets de reboisement et dans la conversion de zones urbaines et bâties en terres agricoles. Dans les autres secteurs, les nouvelles méthodes d’absorption du dioxyde de carbone (CO2) n’ont représenté que 0.1 % du total des absorptions de carbone en 2020 (Smith et al., 2023[118]). On peut citer à titre d’exemple les projets pilotes de stockage du carbone aux États-Unis ou les projets danois et norvégiens en mer du Nord. En 2022, l’UE a proposé un cadre volontaire de certification des absorptions de carbone, mais les marchés de l’absorption du carbone demeurent inexistants. De plus, le déploiement des nouvelles techniques de captage du CO2 ne semble pas occuper une place de premier plan dans la politique d’innovation de l’UE, comme en témoigne le faible niveau de financement (Encadré 2.10) (Philp, 2023[119]). À titre de comparaison, les États-Unis ont étendu les crédits d’impôt prévus par la loi de 2022 sur la réduction de l’inflation afin d’encourager le déploiement des techniques de captage du CO2, en complément du financement de 0.01 % du PIB par an que prévoit la loi sur l’investissement dans les infrastructures et l’emploi (Infrastructure Investment and Jobs Act). Les techniques de captage du CO2 en sont encore à leurs balbutiements et nécessitent des incitations plus fortes. Cela suppose d’étendre les crédits d’impôt au captage du carbone, dans le respect du principe de la neutralité technologique. Une solution plus efficace consisterait à établir des marchés de l’absorption du carbone, en incluant par exemple dans les échanges de droits d’émission le carbone directement capté dans l’air.
Le reboisement, la réhumidification des tourbières et d’autres techniques de gestion des sols peuvent aider à capter le CO2 et à le stocker de façon permanente dans le sol. À l’échelle de l’UE, on estime que le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie) a absorbé environ 230 mégatonnes de CO2 de l’atmosphère en 2020, soit 6 % des émissions totales de GES de l’UE (Agence européenne pour l’environnement, 2022[120]). L’UE s’est fixé, pour l’ensemble de son territoire, un objectif d’absorption par le secteur UTCATF de 310 mégatonnes de CO2 d’ici à 2030, avec un généreux soutien accordé aux pratiques de conservation au titre de la Politique agricole commune (Commission européenne, 2022[121]). Les mécanismes de soutien sont notamment des paiements directs aux agriculteurs et des dispositifs de paiements agro-environnementaux volontaires qui subordonnent le financement à certaines pratiques de conservation. De plus, la Commission européenne a proposé de créer un cadre de l’UE pour les certificats d’absorption du carbone, comme c’est déjà le cas au Royaume-Uni, pour encourager la pratique du captage du carbone (Scottish Forestry, 2022[122]).
Les nouvelles applications déployées dans les secteurs de l’industrie et de l’énergie sont notamment le captage direct dans l’air (CDA) et la bioénergie avec captage et stockage du carbone (BECSC). Comme les technologies de captage du carbone sont encore considérées comme immatures, les pouvoirs publics mettent à disposition des subventions pour soutenir la recherche-développement, les projets pilotes et les premiers projets à grande échelle (AIE, 2022[123]).
Union européenne : l’UE prévoit de consacrer 3.4 milliards EUR entre 2021 et 2030 (soit, chaque année, 0.002 % du PIB de 2021) au soutien des technologies de captage du carbone, dont 3 milliards provenant du Fonds d’innovation de l’UE de 38 milliards EUR et le reste du financement d’Horizon Europe, le programme de l’UE pour la recherche, le développement et l’innovation (Commission européenne, 2022[124] ; Commission européenne, 2023[125]). Le programme Mission sol d’Horizon Europe finance de grands projets d’absorption du carbone dans l’agriculture (ce que l’on appelle l’« agriculture du carbone »). Il existe également des dispositifs nationaux de subventions, comme au Danemark et aux Pays-Bas, même si le financement dans ce cadre reste faible par rapport au soutien apporté aux technologies éoliennes et solaires établies (Graphique 2.14).
Royaume-Uni : la recherche-développement bénéficie d’un soutien de 100 millions GBP (soit, chaque année, 0.003 % du PIB de 2021) entre 2021 et 2024. En 2022, les pouvoirs publics ont lancé des consultations pour élargir aux nouvelles applications telles que la BECSC ou le CDA avec stockage du carbone le système existant de certification des absorptions de carbone dans l’agriculture et la foresterie (Ministère du Commerce, de l’Énergie et de la Stratégie industrielle du Royaume-Uni, 2022[126] ; Ministère du Commerce, de l’Énergie et de la Stratégie industrielle du Royaume-Uni, 2022[127]). Un autre débat porte sur l’extension du système d’échange de quotas d’émission aux absorptions de carbone, l’idée étant d’encourager ces dernières au moyen de contrats garantissant un prix fixe par tonne de CO2 captée (Department for Business, 2022[128]).
États-Unis : la loi de 2021 sur l’investissement dans les infrastructures et l’emploi prévoit environ 12 milliards USD (soit, par an, 0.01 % du PIB de 2021) de soutien à la R-D et de prêts pour les technologies de captage et de stockage du carbone au cours de la période 2021-25. De plus, la loi de 2022 sur la réduction de l’inflation a augmenté les crédits d’impôt pour améliorer la viabilité financière des projets de captage du carbone. Elle a doublé le crédit d’impôt applicable au carbone capté et stocké de façon permanente dans les centrales et les installations industrielles, ce qui le porte à 85 USD par tonne de CO2, et a multiplié par plus de trois celui qui s’applique au CO2 stocké après avoir été directement capté dans l’air (CDA), ce qui l’amène à 180 USD par tonne. Les projets éligibles doivent apporter la preuve d’une capacité de captage et de stockage de 18 750 tonnes par an pour les centrales et de 12 500 tonnes par an pour les installations industrielles. Le seuil de captage ouvrant droit à un crédit d’impôt pour les installations de captage direct dans l’air a été considérablement abaissé, de 100 000 tonnes à 1 000 tonnes par an, ce qui rend l’aide fiscale plus accessible (AIE, 2022[129]).
Améliorer les normes de performance énergétique peut aider à réduire les émissions. C’est le cas, en particulier, des normes d’isolation des bâtiments. Les bâtiments représentent 36 % des émissions de carbone liées à l’énergie dans l’UE (Tsemekidi-Tzeiranaki et al., 2019[130]). Les trois quarts environ sont imputables à l’exploitation des bâtiments, dont le chauffage, ce qui témoigne du fait que les trois quarts du parc de logements de l’UE affichent de mauvaises performances énergétiques. Le marché assure déjà une meilleure isolation dans les climats plus froids. Néanmoins, l’insuffisance de l’isolation signifie que, dans de nombreux pays de l’UE, la consommation d’énergie par habitant est supérieure à ce que leur niveau de revenu laisserait supposer (AIE, 2022[131]).
L’UE s’intéresse à la question de l’efficacité énergétique et accorde des subventions pour améliorer les performances énergétiques et thermiques du parc de logements. Il est aussi possible de remédier aux problèmes d’isolation par la voie réglementaire. Par exemple, la Commission européenne a proposé des normes minimales de performance énergétique plus strictes pour augmenter les économies d’énergie dans les bâtiments. Depuis la mise en place des premières normes minimales de performance énergétique à l’échelle de l’UE en 1993, la consommation d’énergie des bâtiments neufs a diminué : en 2020, elle était inférieure de moitié à celle des bâtiments typiques des années 80 (Commission européenne, 2020[132]). La proposition de renforcement des normes minimales de performance énergétique prévoit que tous les nouveaux bâtiments soient sans émissions à compter de 2028. Plus important encore, elle exigerait également la rénovation du parc de logements existant, avec pour objectif que tous les bâtiments se situent au moins dans la classe de performance énergétique E d’ici à 2033, G étant la classe la plus basse et A la plus élevée. Cela signifie que, d’ici 10 ans, il serait impossible de vendre ou de louer des logements de classe énergétique F ou G. Atteindre cet objectif exigera des pays de l’UE qu’ils investissent massivement dans l’isolation et la rénovation, attendu que quelque 15 % des bâtiments de l’UE sont aujourd’hui dans la classe G (Commission européenne, 2020[132] ; OCDE, 2023[62]). Cependant, l’efficacité d’une telle réglementation est limitée par la réglementation des prix de détail de l’énergie applicables aux ménages, qui réduit l’incitation à faire des économies d’énergie. Des mesures nationales, par exemple des dispositifs d’aide liés au prix de l’énergie, devraient étayer les objectifs communs de l’UE.
Les émissions imputables aux transports sont en hausse depuis quelques années en raison de l’augmentation de l’activité économique et du vieillissement du parc automobile, qui reste fortement dépendant des carburants fossiles (Graphique 2.17, parties A à E). Les émissions ont uniquement diminué pendant la pandémie. L’UE a adopté une mesure de réduction graduelle des émissions de CO2 des véhicules légers, qui doit conduire à des normes de neutralité carbone pour les véhicules neufs à compter de 2035, et proposé une élimination progressive des subventions aux combustibles fossiles d’ici à 2033. Toutefois, de nombreux pays de l’UE maintiennent toujours en place des incitations en faveur du transport routier de personnes, qui vont à l’encontre des efforts de l’UE en faveur de l’environnement, notamment diverses réductions fiscales pour les carburants et des indemnités pour les déplacements domicile-travail (Graphique 2.17, partie F). Par exemple, tous les pays de l’UE appliquent une fiscalité plus avantageuse au gazole qu’à l’essence bien que la teneur en carbone du gazole soit plus élevée (Graphique 2.17, partie G). Le transport aérien et le transport maritime bénéficient également d’exonérations fiscales et de taux réduits d’imposition appliqués aux carburants. Pour faire payer les pollueurs, il faudrait envisager de supprimer plus rapidement les taux réduits et les exonérations prévus pour les combustibles fossiles donc préjudiciables à l’environnement. Cela devrait s’accompagner d’une imposition des carburants fondée sur leur contenu énergétique et leurs performances environnementales.
Le transport routier doit déjà composer avec des prix élevés du carbone, sous la forme de droits d’accise sur les carburants (voir ci-avant). En revanche, les prix des carburants d’aviation et de transport maritime restent trop bas, compte tenu des taux d’imposition réduits et des exonérations fiscales dont ils bénéficient. Pour mieux prendre en compte la teneur en carbone des combustibles fossiles et harmoniser la tarification du carbone entre les différents secteurs et types de consommation d’énergie, l’UE veut mettre en place un nouveau système d’échange de quotas d’émission couvrant les transports, le secteur industriel et le chauffage résidentiel (Encadré 2.11). Un système d’échange de quotas d’émission de cette nature, applicable aux carburants et aux combustibles du secteur résidentiel, a été mis en place avec succès en Allemagne en 2021 (OCDE, 2023[62]). Élargir la tarification du carbone du SEQE aux producteurs de carburants renforcera le signal-prix du carbone et contribuera à orienter les efforts de réduction des émissions vers les activités associées aux coûts de réduction les plus faibles (OCDE, 2022[68]).
L’UE établira un nouveau système d’échange de quotas pour les émissions imputables aux carburants routiers et aux combustibles du bâtiment et de certains procédés industriels, qui ne sont pas couverts par le SEQE existant. Ce nouveau SEQE 2 sera lancé en 2027, ou peut-être un an plus tard si les prix de l’énergie sont exceptionnellement élevés. Il sera distinct de l’actuel SEQE qui concerne les émissions provenant de l’énergie, de l’industrie, du transport maritime ainsi que du transport aérien à l’intérieur de l’UE.
Le SEQE 2 encadrera les fournisseurs de combustibles plutôt que les consommateurs finaux. Néanmoins, il est probable que les producteurs de combustibles répercutent la hausse du coût du carbone sur les consommateurs. Tout comme le SEQE actuel, le SEQE 2 imposera un plafond absolu sur les émissions couvertes, et ce plafond baissera chaque année pour atteindre une réduction des émissions de 42 % en 2030 (par rapport aux niveaux de 2005). Les quotas d’émission seront tous mis aux enchères : il n’y aura pas de quotas gratuits. Le prix du carbone devrait être plus bas dans ce nouveau SEQE 2 que dans celui d’origine. La possibilité de fusionner les deux SEQE sera étudiée en 2031.
Pour atténuer l’impact de la hausse des prix des combustibles sur les ménages, un nouveau Fonds social pour le climat sera créé. Ce Fonds social pour le climat mobilisera 86.7 milliards EUR, dont 25 % cofinancés par les États membres. En complément, les États membres devraient consacrer le reste des recettes provenant des échanges de quotas d’émission à des projets liés au climat et à l’énergie et à la gestion des aspects sociaux de la transition.
Source : Commission européenne (2023[133]).
Les normes d’émission applicables aux véhicules neufs sont une mesure réglementaire importante pour réduire les émissions du transport routier. L’UE a annoncé des normes d’émission plus strictes selon lesquelles les voitures et les utilitaires nouvellement immatriculés à compter de 2035 ne devront pas émettre de CO2. La Commission rédigera une proposition concernant les véhicules immatriculés après 2035 qui ne consomment que des carburants neutres en CO2. En pratique, il s’agit de diminuer progressivement les quantités annuelles d’émissions autorisées pour les véhicules neufs, de sorte qu’après 2035, leurs émissions de CO2 soient réduites à zéro. Cependant, cette mesure réglementaire ne concernera que les voitures neuves. Réduire les émissions globales dans les transports privés pourrait ne pas suffire ; en effet, en raison de l’augmentation de l’âge moyen des voitures, la composition du parc automobile ne change que lentement. Cela pourrait être d’autant plus vrai que la valeur de revente des voitures d’occasion diminuera, ce qui incitera davantage à prolonger la durée de vie du parc automobile existant. Si ce parc se renouvelle si lentement, c’est en raison, notamment, des taxes sur l’achat et l’immatriculation des véhicules qui, souvent, ne tiennent pas compte de l’intensité carbone (ACEA, 2022[134]). Par ailleurs, la production et l’utilisation de véhicules électriques génèrent aussi des émissions si l’on prend en compte le mix électrique, la production et la mise hors service des batteries — même si ces émissions sont bien inférieures à celles qui sont issues de la production et de l’utilisation de véhicules thermiques. Ainsi, l’un des problèmes tient au fait que les voitures électriques produites dans des pays où le mix énergétique est très carboné, parce que dépendant du charbon par exemple, sont à plus forte intensité carbone, même si elles le sont moins que les véhicules thermiques (Graphique 2.18, partie A) (Buberger et al., 2022[135] ; Transport and Environment, 2022[136] ; AIE, 2022[137] ; Bieker, 2021[138]). Pour que le transport routier contribue de manière significative à la réduction des émissions, la fiscalité automobile nationale devrait prendre en compte l’intensité carbone des voitures en circulation ainsi que leurs émissions tout au long de leur cycle de vie, y compris la production et la mise hors service des batteries.
Il convient également de noter la lenteur du déploiement des véhicules électriques, même si la tendance s’accélère depuis 2020. Presque tous les pays de l’UE proposent des subventions directes et des incitations fiscales pour l’achat de véhicules électriques (ACEA, 2022[139]). Les voitures électriques représentaient 18 % des nouvelles ventes en 2021, mais leur part reste faible (environ 3 %) dans le parc automobile (AEE, 2022[140] ; AIE, 2022[141]). Leur prix élevé par rapport aux voitures traditionnelles demeure un obstacle à leur adoption. La lenteur du déploiement des voitures électriques a également pour cause le nombre insuffisant de points de recharge. La densité des bornes de recharge est supérieure dans les pays plus riches d’Europe occidentale, reste essentiellement limitée aux zones urbaines, tandis que les zones rurales où les besoins de voitures particulières sont les plus importants sont mal desservies (Graphique 2.18, partie B) (Wappelhorst, 2021[142] ; Colle, Micallef et Horstead, 2022[143]) À l’avenir, l’adoption des voitures électriques dépendra du nombre d’infrastructures de recharge dans les régions rurales, qui devra être suffisant. La réglementation peut contribuer à encourager le déploiement de bornes de recharge à domicile, en particulier dans les zones rurales où les infrastructures de recharge sont plus éloignées les unes des autres. À cet égard, le Règlement de l’UE sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs propose d’étendre la couverture des points de recharge sur les routes principales. D’ici la fin de 2025, il devrait y avoir sur ces routes des parcs de recharge pour véhicules électriques tous les 60 km au moins. L’UE exige en outre la mise en place d’une infrastructure de recharge dans tous les nouveaux bâtiments résidentiels comportant plus de dix places de stationnement, ce qui est une mesure bienvenue. Enfin, l’adoption des véhicules électriques devrait être soutenue par une imposition plus élevée des combustibles fossiles (voir ci-avant).
Le transport ferroviaire émet en moyenne moins de carbone par kilomètre que les autres formes de transport de passagers (FIT, 2023[144]). Cependant, le trafic ferroviaire transfrontalier reste peu développé à l’échelle de l’UE, puisqu’il ne représentait que 6 % des services de transport de passagers en 2021. Le chiffre est un peu plus élevé pour le transport de marchandises (Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer, 2022[145]). Cela s’explique par des différences au niveau des normes de sécurité, des systèmes de signalisation, des formalités administratives imposées par la réglementation nationale et d’autres systèmes techniques et administratifs qui entravent le flux des voyageurs ferroviaires internationaux et augmentent le prix des billets. Par exemple, du fait des divergences entre systèmes techniques, l’ouverture d’une liaison transfrontalière impose de commander de nouveaux trains spécialement modifiés en fonction des pays qu’ils doivent traverser. Autre exemple, il existe des règles différentes concernant les freins, qui peuvent donner lieu à de longs contrôles techniques à la frontière, pouvant aller de 50 minutes à 9 heures (Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer, 2022[146]). De plus, les gestionnaires des réseaux ferrés nationaux font payer aux exploitants ferroviaires étrangers la location des locomotives, l’accès aux rails et des frais de stationnement. Ces frais peuvent être plus élevés pour les services transfrontaliers que pour les services nationaux, ce qui augmente les tarifs, crée des obstacles à l’entrée et conduit à une sous-utilisation des infrastructures ferroviaires. Il existe également d’autres problèmes : les frais élevés d’accès au réseau ferré (pouvant aller jusqu’à 40 % du prix du billet), les réglementations nationales qui interdisent le transport de passagers sur les lignes à grande vitesse la nuit, et l’absence d’un système de billetterie uniformisé et transparent en Europe. Tous ces obstacles ont un effet dissuasif sur le transport ferroviaire transfrontalier (Commission européenne, 2021[147]). Pour encourager l’utilisation des trains transfrontaliers et réduire les temps d’attente aux frontières, il faudrait harmoniser les règles techniques nationales et les exigences en matière d’infrastructure. De plus, l’UE devrait veiller à ce que les prix de location des locomotives et les frais ferroviaires soient les mêmes pour les trains nationaux et ceux qui viennent de l’étranger.
La transition écologique aura des coûts sociaux, notamment ceux résultant du redéploiement des travailleurs entre les secteurs ou les régions. Parallèlement, le vieillissement démographique devrait entraîner une réduction de la population active. Il en résultera des pénuries de main-d’œuvre, qui contribueront probablement à fluidifier le processus de réaffectation des travailleurs des secteurs à forte intensité de carbone vers les autres. L’avantage salarial associé aux emplois verts comme ceux d’ingénieurs et d’ouvriers spécialisés du bâtiment peuvent inciter les travailleurs à s’orienter vers ces activités (Graphique 2.19). Les pouvoirs publics peuvent néanmoins contribuer aussi à étayer ce processus. Ils peuvent faire en sorte de réduire les obstacles à la mobilité professionnelle, notamment en veillant à la flexibilité des marchés du travail et du logement. Cela relève essentiellement de la compétence des pays de l’UE, mais celle-ci apporte également un soutien aux régions les plus durement touchées par la décarbonation. Un autre obstacle important à la transition écologique réside dans les pénuries de compétences.
L’impact des politiques de décarbonation varie d’une région à l’autre. Par exemple, on estime que la sortie du charbon devrait entraîner une perte de quelque 160 000 emplois directs dans les régions charbonnières d’ici à 2030 (Alves Dias et al., 2018[150]). Les zones les plus touchées sont situées dans les États membres tels que la République tchèque, la Pologne et la Roumanie, où les régions charbonnières sont déjà confrontées à des taux de chômage élevés. Plus largement, les projections indiquent que la hausse de la tarification du carbone devrait conduire à des pertes d’emplois dans les industries manufacturières fortement consommatrices d’énergie, du fait des coûts de production plus élevés (Chateau, Bibas et Lanzi, 2018[151] ; Chateau, Miho et Borowiecki, 2023[10]). Les pertes d’emplois devraient être plus que compensées par les créations d’emplois dans les secteurs des services de moindre intensité d’émission, en particulier dans les zones urbaines, mais les rigidités du marché du travail pourraient ralentir le redéploiement de la main d’œuvre d’une branche d’activité ou d’une région à une autre. Les autres obstacles au redéploiement de la main-d’œuvre sont notamment les marchés du logement imparfaits et l’inadéquation des compétences (OCDE, 2023[152] ; Borgonovi et al., 2023[153]).
La mobilité de la main-d’œuvre est relativement faible à l’intérieur des pays de l’UE, ce qui ne favorise pas le redéploiement des travailleurs (Graphique 2.20). Outre la question de la mobilité intranationale, celle de la mobilité transfrontalière se pose également. Un des obstacles à la mobilité de la main-d’œuvre réside dans la multitude d’obligations à satisfaire en matière d’autorisation et de certification, qui touchent environ 40 % de la population active européenne (Graphique 2.21). Il a été démontré que ces obstacles à l’accès à certaines professions réduisaient le redéploiement des travailleurs dans les pays de l’UE (Bambalaite, Nicoletti et von Rueden, 2020[154]). Un des sujets de préoccupation réside dans le fait que la reconnaissance des qualifications constitue une barrière beaucoup plus élevée pour les professionnels originaires de pays tiers. Depuis 2018, l’UE impose aux pays d’évaluer la proportionnalité de ces obstacles à l’accès à certaines professions, mais avec un succès limité (Commission européenne, 2021[155]). Les vérifications préalables des qualifications en cas de prestations transfrontalières de services ont été supprimées pour deux cinquièmes de l’ensemble des professions réglementées (Single Market Enforcement Taskforce, 2022[156]). L’UE dispose de plusieurs instruments pour soutenir la mobilité transfrontalière, comme la carte professionnelle européenne, la reconnaissance des qualifications professionnelles fondée sur l’expérience professionnelle et la reconnaissance automatique des qualifications. Néanmoins, la reconnaissance automatique des qualifications n’est autorisée que pour sept professions dans l’ensemble des États membres de l’UE, et aucune ne correspond à des métiers présentant un intérêt pour la transition écologique (comme ceux d’ingénieurs et d’ouvriers du bâtiment) (Commission européenne, 2023[157]). L’absence d’évaluation de la proportionnalité des règles d’accès à certaines professions a conduit la Commission européenne à ouvrir des procédures d’infraction contre 18 États membres en 2021. Alléger les obligations imposées en matière d’autorisation et de certification dans les secteurs présentant un intérêt particulier pour la transition écologique favoriserait les transitions professionnelles. Cela impliquerait de déployer des efforts continus pour réduire les obstacles à l’entrée en réalisant des contrôles de proportionnalité. Une mobilité accrue de la main-d’œuvre européenne contribuerait également à atténuer les pénuries de compétences. D’autres obstacles à la mobilité transfrontalière des travailleurs sont liés aux connaissances linguistiques et aux marchés du logement (voir ci-après).
Le manque de transférabilité des prestations sociales entre pays alourdit les coûts de la mobilité. Ainsi, les prestations de chômage ne sont transférables que pour une durée de trois mois lorsqu’une personne emménage dans un autre pays de l’UE. Cela peut entraver la mobilité transfrontalière, les demandeurs d’emploi étant susceptibles de ne pas avoir suffisamment de temps pour chercher du travail dans les autres pays et trouver un poste correspondant à leurs compétences. Par ailleurs, les aides à la mobilité destinées aux chômeurs, comme les aides au logement, sont rarement transférables, même si l’UE accorde des subventions à la mobilité aux étudiants et aux jeunes travailleurs via le programme Erasmus+ (Commission européenne, 2023[158]). Porter à six mois la durée de versement des prestations à l’étranger pourrait améliorer la mobilité transfrontalière, en particulier des régions relativement pauvres vers les marchés du travail en expansion. La Commission européenne a proposé d’allonger cette durée de trois à six mois et, éventuellement, jusqu’à l’expiration des droits à prestations.
Un autre facteur à l’origine de la faible mobilité géographique réside dans la rigidité des marchés du logement. Dans de nombreux pays de l’UE, l’offre de biens immobiliers d’habitation ne s’ajuste que lentement à la demande, ce qui tient dans une certaine mesure à la multitude de professions réglementées existant dans le secteur de la construction (OCDE, 2021[159]). Réduire le nombre de professions réglementées dans ce secteur pourrait renforcer la flexibilité de l’offre de logements (voir ci-avant). La mobilité géographique est également restreinte par le niveau élevé des coûts de transaction qui caractérise les achats et les ventes de biens immobiliers (Rupert et Wasmer, 2012[160]). L’effet de ces frictions sur le marché du logement est accentué dans les pays de l’UE où les taux d’accession à la propriété sont élevés et les marchés locatifs étroits. Néanmoins, la politique du logement relève de la compétence des pays de l’UE et n’entre donc pas dans le périmètre de ce chapitre (OCDE, 2021[161] ; OCDE, 2022[162] ; OCDE, 2021[163]).
L’UE apporte un soutien aux régions les plus durement touchées par la décarbonation. Le Fonds social européen plus (FSE+) met à la disposition des États membres 99 milliards EUR au cours de la période 2021-27 (soit 4.9 % du budget de l’UE) pour soutenir l’emploi et les compétences et, en particulier, les compétences vertes et les emplois verts. Ces ressources sont complétées par des dépenses au titre de la Facilité pour la reprise et la résilience ainsi que des fonds de la politique de cohésion. En outre, le mécanisme pour une transition juste (MTJ) de 2020 vise à aider les régions les plus touchées à gérer les effets négatifs de la transition écologique, notamment les effets sociaux et les répercussions sur l’emploi. Le MTJ est axé sur les régions dépendantes de la production de combustibles fossiles solides (tels que le charbon, la tourbe et les schistes bitumineux), ainsi que sur les régions tributaires de secteurs à forte intensité de carbone (comme la sidérurgie, la production de ciment ou la fabrication de produits chimiques). Cependant, même s’il est complété par d’autres fonds de la politique de cohésion, les ressources financières modestes du MTJ, limitées à 1 % du budget de l’UE, ne sont pas à la hauteur des vastes ambitions du projet, qui est notamment censé faciliter les transitions sur le marché du travail, la revitalisation économique et l’assainissement des terres dans les régions les plus durement touchées par la transition. Une approche plus efficace consisterait à concentrer l’utilisation des ressources disponibles en vertu du MTJ sur les mesures ayant le plus d’effets sur le redéploiement des travailleurs, notamment les dispositifs de formation, les mécanismes de placement professionnel et les aides à la mobilité (OCDE, 2021[163] ; OCDE, 2023[152] ; OCDE, 2023[62]). Un autre instrument d’action réside dans le Fonds social pour le climat, mis en place pour atténuer les répercussions sociales d’un nouveau système d’échange de quotas d’émission couvrant les bâtiments et le transport routier (Encadré 2.12). Néanmoins, le Fonds social pour le climat ne commencera effectivement à fonctionner qu’en 2026.
L’octroi des financements au titre du Fonds pour une transition juste (FTJ) est subordonné à la présentation de plans territoriaux de transition juste exposant les besoins de financement locaux. Néanmoins, dans quelques régions, il a été établi que l’implication limitée des parties prenantes locales entravait l’identification des zones dans lesquelles les besoins de soutien étaient les plus aigus (CEE Bankwatch Network, 2022[165] ; CEE Bankwatch Network, 2021[166]). Et ce bien que tous les États membres aient adopté la recommandation du Conseil de l’UE de 2022 visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique, qui les invite à garantir une approche englobant l’ensemble de la société. Il est essentiel de continuer d’associer à la fois le secteur privé et les partenaires sociaux à l’élaboration des plans de transition, afin de garantir que les financements soient adaptés aux besoins du marché du travail local, en termes de compétences et de formation par exemple (Cameron et al., 2020[167] ; OCDE, 2021[163]). Pour mieux garantir cette adéquation, on pourrait subordonner les financements à l’évolution de la situation du marché du travail dans les régions touchées — évaluée par exemple à l’aune des transitions d’emploi à emploi, ou des transitions du chômage vers l’emploi — qui résulte de politiques actives du marché du travail financées par le FTJ. En pratique, cela signifierait que les fonds de l’UE seraient uniquement décaissés une fois que diverses valeurs intermédiaires et valeurs cibles correspondant à des résultats spécifiques seraient atteintes. De telles modifications pourraient être envisagées pour le prochain cycle de financement du FTJ au titre du cadre financier pluriannuel postérieur à 2027.
Le MTJ vise à rendre la transition écologique plus inclusive, notamment en aidant les travailleurs des régions les plus durement touchées par les politiques d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre (GES). Un montant de 20.7 milliards EUR (1 % du budget de l’UE) est affecté à ce mécanisme pour la période 2021-27, l’objectif étant de mobiliser 34 milliards EUR de fonds publics et privés supplémentaires :
Le Fonds pour une transition juste (FTJ) apporte 19.3 milliards EUR, complétés par des cofinancements nationaux. Les financements sont axés sur la diversification économique, les politiques sociales et du marché du travail, ainsi que l’assainissement des terres dégradées par l’extraction de charbon, entre autres. Cela se traduira par des investissements dans les petites et moyennes entreprises (PME), les énergies renouvelables, la formation des travailleurs et l’aide à la recherche d’emploi (Commission européenne, 2023[168]).
La facilité de prêt au secteur public reposera sur la conjonction de 1.5 milliard EUR de subventions financées par le budget de l’UE et de 10 milliards EUR de prêts de la Banque européenne d’investissement (BEI).
Le dispositif pour une transition juste mis en place dans le cadre du programme InvestEU fournira 15 milliards EUR de garanties budgétaires de l’UE pour attirer des investissements privés à hauteur de 34 milliards EUR dans le déploiement des énergies renouvelables, l’innovation et la transformation numérique, les PME et les compétences.
À partir de 2026, le Fonds social pour le climat fournira 86.7 milliards EUR (soit 4.3 % du budget de l’UE sur la période 2021-2027) pour remédier aux effets sociaux de l’élargissement du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) aux combustibles de chauffage et aux carburants destinés au transport routier. Le Fonds financera des investissements dans l’efficacité énergétique, la rénovation des bâtiments, les systèmes de chauffage et de refroidissement à faibles émissions, les infrastructures de recharge pour véhicules électriques (ainsi que leur achat) et les transports publics. Le Fonds financera également des aides directes au revenu temporaires destinées aux ménages vulnérables qui sont susceptibles d’être affectées par l’augmentation des prix des carburants destinés au transport routier et des combustibles de chauffage.
Au départ, le Fonds sera financé par 50 millions EUR de recettes provenant de la vente aux enchères de quotas dans le cadre du SEQE en 2026. Une fois que le système d’échange de quotas d’émission applicable aux combustibles de chauffage et aux carburants (SEQE II) sera entré en vigueur en 2027, le Fonds sera financé par la mise aux enchères des quotas du SEQE II pour un montant devant atteindre 65 milliards EUR, complété par 21.7 milliards EUR de contributions nationales. Par la suite, la Commission européenne prévoit de financer le Fonds social pour le climat en s’appuyant sur le cadre financier pluriannuel postérieur à 2027.
Pour recevoir les fonds, les pays de l’UE devront présenter des plans sociaux pour le climat, qui seront évalués par la Commission européenne, et démontrer qu’ils ont atteint les valeurs intermédiaires et les valeurs cibles définies dans leur plan. Ces plans devront être préparés en consultation avec les administrations locales et régionales, les partenaires sociaux ainsi que la société civile.
Source : Commission européenne (2023[169]) et Parlement européen (2022[170]).
Principales conclusions |
RECOMMANDATIONS (Principales recommandations en gras) |
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Pour une atténuation plus efficiente du changement climatique |
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Les disparités de couverture par le SEQE-UE entre les secteurs et les différences observées entre les régimes fiscaux nationaux conduit à une hétérogénéité des incitations à réduire les émissions entre les pays et entre les activités. La fiscalité de l’énergie entretient des inégalités de traitement fiscal entre les secteurs et entre les utilisations de l’énergie. Les taux réduits et les exonérations fiscales applicables aux combustibles fossiles dommageables pour l’environnement, notamment le gaz de chauffage et les carburants aériens et maritimes, continuent de saper les efforts de décarbonation. |
Continuer d’étendre la couverture du SEQE, par exemple à l’agriculture, en mettant en place des systèmes de surveillance et de notification des émissions (par exemple pour les émissions imputables à l’élevage et à l’utilisation d’engrais), et en y intégrant les grandes sources d’émissions. Procéder plus rapidement à la suppression progressive des quotas d’émission gratuits. Réviser la Directive sur la taxation de l’énergie de façon à mettre en place des taux minimums d’imposition des combustibles fossiles en fonction de leur contenu énergétique et de leurs performances environnementales, et élargir la base d’imposition en supprimant progressivement les exonérations et les taux réduits applicables aux combustibles fossiles. Annoncer des calendriers clairs d’évolution des taux minimums d’imposition des combustibles fossiles. |
Avec les différentes politiques budgétaires, les coûts de réduction ne sont pas homogènes dans tous les programmes des pays de l’UE. |
Introduire un prix interne du carbone dans toutes les préparations budgétaires et de planification. |
Il n’y a pas suffisamment de capital-risque pour financer de nouvelles technologies durables. Les obligations déclaratives liées à la durabilité augmenteront les coûts de mise en conformité des entreprises. |
Promouvoir l’Union des marchés des capitaux en réexaminant les lourdeurs réglementaires auxquelles sont confrontés les investisseurs institutionnels. Veiller à la cohérence et à l’interopérabilité des normes de l’UE sur la publication d’informations en matière de durabilité par rapport aux normes internationales. |
Renforcer les mesures d’atténuation dans l’agriculture |
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Les versements directs continuent de promouvoir l’utilisation des tourbières drainées, qui est préjudiciable à l’environnement. Les paiements directs aux producteurs agricoles en fonction du nombre de têtes de bétail ont augmenté. |
Supprimer les aides au drainage des tourbières à des fins agricoles. Supprimer progressivement les paiements directs en cas de cheptel important. |
Les mesures d’atténuation sont facultatives et leur potentiel de réduction des émissions est modeste. |
Subordonner les paiements au titre des programmes agro-environnementaux à la réalisation de réductions d’émissions. |
Les dispositions d’écoconditionnalité sont peu appliquées et peu vérifiées. |
Augmenter le nombre de contrôles sur site et ajuster les sanctions en fonction des dommages causés à l’environnement par les infractions éventuelles. |
Accélérer la réduction des émissions dans l’énergie et les transports |
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Les aides publiques aux énergies renouvelables restent importantes et bénéficient principalement au solaire et à l’éolien, qui sont concurrentiels en termes de coûts. Il est possible de recourir encore davantage à des enchères concurrentielles. |
Veiller à ce que le cadre des aides d’État de l’UE n’autorise les subventions publiques que pour les technologies renouvelables qui ne sont pas encore concurrentielles. |
Les marchés de détail de l’électricité restent fragmentés entre les pays en raison de la réglementation des prix. L’insuffisance des investissements dans les interconnexions transfrontières ralentit l’intégration des marchés de gros de l’électricité. |
Veiller à ce que les pays de l’UE suppriment progressivement les prix de détail réglementés de l’électricité en mettant pleinement en œuvre la Directive de l’UE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité. Développer les investissements dans les interconnexions transfrontières en acheminant des fonds de l’UE vers le mécanisme pour l’interconnexion en Europe. |
Le plafonnement temporaire des recettes des producteurs d’électricité non gazière sur les marchés de gros de l’électricité réduit les incitations à investir. La tarification au coût marginal sur les marchés de gros de l’électricité, ainsi que l’augmentation de la part des énergies renouvelables (dont les coûts marginaux sont très faibles) dans la production d’électricité soulève des problèmes à long terme du point de vue de la rentabilité et de l’investissement sur les marchés de l’électricité. |
Ne pas reconduire le plafonnement temporaire des recettes des producteurs d’électricité non gazière sur les marchés de gros de l’électricité. À plus long terme, envisager de réformer le système de tarification du marché de gros de l’électricité, notamment en s’appuyant davantage sur des contrats à long terme et en organisant des enchères pour la puissance d’appoint conventionnelle. |
La réglementation de l’UE encourage l’utilisation de la biomasse, fortement émettrice, pour produire de l’énergie. |
Veiller à ce que les pays de l’UE ne favorisent pas le recours à une biomasse non durable, en révisant la Directive sur les énergies renouvelables et veillant à ce que la biomasse ligneuse non durable soit retirée de la taxonomie des activités durables. |
Il n’existe pas de marché pour l’absorption du carbone. |
Mettre en place des marchés pour l’absorption du carbone, par exemple en l’intégrant dans les échanges de droits d’émission. |
Le trafic ferroviaire international reste insuffisamment développé. |
Veiller à ne pas établir de discrimination entre les opérateurs nationaux et étrangers concernant les prix de location des locomotives et les redevances ferroviaires. |
Limiter les coûts de redéploiement de la main-d’œuvre induits par la transition écologique. |
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Les obstacles à l’accès à certaines professions réduisent la mobilité de la main-d’œuvre. |
Poursuivre les efforts pour réduire les obstacles à l’accès à certaines professions. |
L’efficience des dépenses est un sujet de préoccupation face à l’afflux de fonds de l’UE au titre du Fonds pour une transition juste. |
Diriger en priorité les financements futurs visant à alléger les conséquences socioéconomiques de la transition écologique sur les aides à la mobilité et la formation, et les subordonner à la situation sur le marché du travail. |
Les prestations de chômage ne sont transférables que pour une durée de trois mois lorsqu’une personne emménage dans un autre pays de l’UE, ce qui n’incite pas à la mobilité transfrontières. |
Envisager de porter à six mois la durée d’indemnisation du chômage en cas d’installation dans un autre pays de l’UE. |
[90] (ACER) (2022), ACER’s final assessment of the EU wholesale electricity market design, Agence de coopération des régulateurs de l’énergie, Ljubljana.
[134] ACEA (2022), CO2-based motor vehicle taxes in the EU, by country, Association des constructeurs européens d’automobiles, https://www.acea.auto/figure/co2-based-motor-vehicle-taxes-in-eu-by-country/ (consulté le 27 janvier 2023).
[139] ACEA (2022), Overview – Electric vehicles: tax benefits & purchase incentives in the European Union (2022), Association des constructeurs européens d’automobiles, Bruxelles, https://www.acea.auto/fact/overview-electric-vehicles-tax-benefits-purchase-incentives-in-the-european-union-2022/ (consulté le 30 janvier 2023).
[107] ACER/CEER (2022), Annual Report on the Results of Monitoring the Internal Electricity and Natural Gas Markets in 2021, Agence de coopération des régulateurs de l’énergie et Conseil des régulateurs européens de l’énergie, Ljubljana, https://www.acer.europa.eu/sites/default/files/documents/Publications/MMR_2021_Energy_Retail_Consumer_Protection_Volume.pdf (consulté le 21 janvier 2023).
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