L’Union européenne a accompli des progrès considérables pour ce qui est d’instaurer des cadres complets de gestion axée sur les résultats. Dans le même temps, les systèmes des différentes institutions de l’Union européenne pourraient être consolidés et harmonisés, et un meilleur usage pourrait être fait des informations tirées de ces résultats, à des fins d’apprentissage, de programmation et de planification stratégique.
Examens de l'OCDE sur la coopération pour le développement : Union européenne 2018
Chapitre 6. Résultats, évaluation et apprentissage de l’Union européenne
Gestion axée sur les résultats de développement
Indicateur : Un système de gestion axée sur les résultats est en place
Un nouveau cadre global de gestion axée sur les résultats de développement
Ces trois dernières années, l’Union européenne a mis en place une approche globale des systèmes de gestion axée sur les résultats de développement, notamment en apportant un soutien solide à ses pays partenaires en développement afin de collecter de meilleures statistiques. En 2017, le nouveau Consensus européen pour le développement (Commission européenne, 2017) a engagé les acteurs et les États membres de l’Union européenne à aligner les cadres de résultats sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, utilisant en priorité les cadres de résultats nationaux et les indicateurs relatifs aux Objectifs de développement durable (ODD).
L’examen par les pairs réalisé par le Comité d’aide au développement de l’OCDE (CAD) en 2012 encourageait l’Union européenne à mettre davantage l’accent sur les résultats, notamment en se focalisant sur l’impact et en tirant des enseignements des informations recueillies pour améliorer les performances, sans se limiter à la redevabilité financière. Dans ce contexte, et dans le cadre de la mise en œuvre de son programme pour le changement (Commission européenne, 2011), l’Union européenne a réformé son approche basée sur les résultats en introduisant un nouveau cadre de résultats visant on seulement à améliorer le suivi et la notification, mais aussi la redevabilité, la transparence et la visibilité de la coopération de l’Union européenne à l’appui du développement.
Initialement mis en place par la Direction générale de la coopération internationale et du développement (DG DEVCO) en 2015, le Cadre de résultats de l’Union européenne pour le développement et la coopération internationale a ensuite été adopté par la Direction générale du voisinage et des négociations d’élargissement (DG NEAR) pour les pays voisins de l’Union européenne. La Direction générale pour la protection civile et les opérations d’aide humanitaire européennes (DG ECHO) développe actuellement son propre cadre de résultats, qui fournira une vue d’ensemble de ses réalisations et de ses processus internes au regard des besoins humanitaires et des risques aux à l’échelle mondiale, régionale et nationale.
Le Cadre de résultats de l’Union européenne pour le développement et la coopération internationale s’articule autour de trois niveaux, alignés sur les cadres de résultats de la Banque mondiale et des autres partenaires bilatéraux et multilatéraux (Graphique 6.1). Dans ce système, le niveau 1 présente les réalisations/l’impact en matière de développement au regard des ODD dans les pays partenaires (ex. un retard de croissance persistant) faisant l’objet d’interventions de la part de l’Union européenne et d’autres parties prenantes. Le niveau 2 couvre des produits et effets directs obtenus grâce à des interventions financées par l’Union européenne (ex. le nombre de kilomètres de lignes de transport d’électricité), définissant des indicateurs sur la base des critères des pays partenaires et lorsque possible, d’indicateurs également liés aux ODD employés par d’autres donneurs1. Le niveau 3 porte sur la performance organisationnelle associée aux processus opérationnels de l’Union européenne (ex. le pourcentage de factures réglées sous 30 jours). Afin de faciliter la notification de résultats aux services centraux et sur le terrain (notamment par les partenaires) pour le Cadre de résultats de l’Union européenne pour le développement et la coopération internationale, la Commission a mis en place un nouveau système de gestion de l’information opérationnelle en ligne, dénommé OPSYS. De surcroît, afin d’aider les délégations de l’Union européenne à renforcer la gestion axée sur les résultats, la Commission continue d’établir des contrats avec des experts pour le système de suivi axé sur les résultats, qui fournit une assistance pour (entre autres) résoudre les problèmes, fournir des intrants, suivre les produits et réalisations, et former à la gestion axée sur les résultats.
La Banque européenne d’investissement (BEI) procède à la gestion axée sur les résultats de développement sur la base du Cadre de mesure des résultats (ReM) établi en 2012, lequel est harmonisé avec les cadres de résultats d’autres banques multilatérales de développement. Le ReM se fonde sur trois piliers. Le premier est la cohérence avec le mandat de la BEI et les contributions aux priorités de développement fixées par l’Union européenne et aux objectifs de développement des pays partenaires. Le deuxième porte sur les résultats des interventions de la BEI qui contribuent aux ODD et influent sur les indicateurs convenus avec les pays partenaires (ex. nombre d’emplois créés). Le troisième est la valeur ajoutée financière lorsqu’il s’agit de combler une lacune du marché local au moyen d’une contribution financière déterminée en fonction des options disponibles aux conditions du marché.
Durant l’évaluation du projet, la BEI fixe des cibles pour les produits et réalisations attendus en fonction des objectifs. Durant la période de mise en œuvre, les projets sont notés au regard des trois piliers décrits ci-dessus. À l’achèvement du projet, les performances sont examinées immédiatement, puis trois ans plus tard (BEI, 2017). Le ReM intègre également différents thèmes, comme les questions de genre. Il serait utile pour la BEI de discuter et d’échanger sur ses travaux sur les résultats du développement avec des communautés de pratique plus vastes qui s’interrogent sur la manière d’améliorer les outils d’évaluation, afin de mesurer l’impact du financement mixte et d’autres initiatives du même ordre sur le développement.
L’Union européenne endosse un rôle de premier plan parmi les donneurs pour ce qui est de renforcer la capacité propre des pays à opérer une gestion axée sur les résultats fondée sur de meilleures statistiques. La Commission est le deuxième contributeur le plus important d’aide statistique parmi les membres du CAD, ainsi que le plus gros donneur pour les petits États insulaires en développement et les États fragiles. En collaboration avec Eurostat, elle fournit différents types d’appui à la statistique : systèmes statistiques nationaux ou régionaux (ex. le projet UE-ANASE de renforcement des capacités pour le suivi du processus d’intégration et des statistiques2) ; opérations à grande échelle, notamment recensement de la population ; et statistiques sectorielles dans le domaine de l’éducation, de la santé, etc. (PARIS21, 2017).
L’appui budgétaire de la Commission s’appuie sur un cadre de résultats différent
Les programmes d’appui budgétaire de l’Union européenne constituent un autre système fondé sur les résultats et les performances, puisque les fonds sont versés uniquement lorsque les cibles convenues (lesquelles sont alignées sur les priorités des politiques publiques des pays partenaires) sont atteintes. Concernant l’appui budgétaire général, les indicateurs portent habituellement sur la gestion macroéconomique (ex. part de la dette publique brute dans le produit intérieur brut [PIB]) ; la mobilisation des ressources intérieures (ex. part des recettes dans le PIB) ; la gestion des finances publiques (ex. Indice sur le budget ouvert) ; et la lutte contre la pauvreté (ex. nombre de personnes pauvres).
Les résultats de l’appui budgétaire sectoriel sont plus spécifiquement liés au domaine concerné. Ainsi, trois programmes d’appui budgétaire sectoriel en Bolivie sont axés sur l’eau et l’assainissement ; l’agriculture ; et la lutte contre le trafic de drogues, les indicateurs étant alignés sur les priorités nationales et sur les ODD. Ces indicateurs comprennent le pourcentage de la population raccordée au réseau d’assainissement (ODD 6.2) ; le degré de couverture nationale par des services judiciaires complets et gratuits (ODD 16.3) ; et la quantité de drogue saisie (ODD 16.4). Dans certains cas, les indicateurs convenus avec le gouvernement renvoyaient à des produits facilement réalisables plutôt qu’à des réalisations, pour faciliter le versement des fonds (annexe D). Après chaque versement au titre de l’appui budgétaire, la délégation de l’Union européenne prépare un rapport succinct qu’elle soumet aux services centraux afin d’évaluer les résultats obtenus et de tirer des enseignements pour de futurs contrats. Toutefois, ces résultats étant propres à chaque pays, ils ne sont pas intégrés dans le Cadre de résultats de l’Union européenne pour le développement et la coopération internationale, ni enregistrés dans OPSYS. Par conséquent, il n’est pas possible de déterminer comment les résultats des programmes d’appui budgétaire sont agrégés dans les services centraux et utilisés à des fins d’apprentissage et d’élaboration de la politique publique.
Les acteurs de l’Union européenne pourraient bâtir sur leurs acquis pour poursuivre la consolidation et l’harmonisation des cadres de résultats
Au niveau des pays, les acteurs de l’Union européenne ont accompli des progrès considérables sur le plan de la gestion axée sur les résultats au cours des dernières années. Ils ont mis en place des cadres de résultats adéquats, qui permettent de fixer plus facilement les cibles et prévoient des incitations pour atteindre celles-ci les cibles liées aux ODD et aux priorités nationales. Ce faisant, l’Union européenne suit une recommandation formulée dans l’examen par les pairs de l’Union européenne de 2012, à savoir relier les objectifs des activités avec les stratégies nationales, et procéder à un suivi régulier et utile aux délégations. En outre, les données recueillies à travers le monde par le biais d’OPSYS serviront aux fonctions de gestion et d’évaluation axées sur les résultats, tant au niveau centralisé que décentralisé.
Au niveau institutionnel, cependant, il n’est pas évident que toutes les informations recueillies au siège (notamment s’agissant des résultats de niveau 2 et des résultats de la BEI) contribuent à définir les résultats et tendances généraux, ou à en dégager des facteurs communs de réussite ou d’échec ; cette déconnexion avait déjà été observée lors de l’examen par les pairs de 2012. En particulier, tant que les réalisations de niveau 1 ne seront pas attribuées précisément, il sera impossible de déterminer au niveau institutionnel si les critères utilisés pour juger si les produits réalisés au niveau 2 sont satisfaisants ou non . Qui plus est, faute de références, il est difficile de déterminer les ressources disponibles sont utilisées à bon escient et de transposer les résultats dans l’élaboration de politiques concrètes.
Par conséquent, outre la notification à des fins de redevabilité et de communication, l’Union européenne pourrait faire un meilleur usage des informations sur les résultats dont elle dispose à des fins d’apprentissage, de programmation et de planification stratégique. Dans ce contexte, les acteurs de l’UE pourraient éventuellement tirer des enseignements de l’expérience des banques multilatérales de développement et d’autres membres du CAD pour étudier la possibilité de mettre en place un système permettant de mieux exploiter les informations obtenues sur les résultats (OCDE, 2017).
Par ailleurs, il y a lieu d’harmoniser les indicateurs et de consolider davantage les rapports afin d’améliorer la cohérence et d’alléger la charge administrative3. L’Union européenne pourrait tirer parti d’une approche globale de la gestion axée sur les résultats. Cela vaut pour les différents instruments utilisés par la DG DEVCO, la DG NEAR, la DG ECHO, la BEI et d’autres entités œuvrant à la coopération pour le développement, qui travaillent souvent dans les mêmes pays partenaires, sur les mêmes thématiques et dans les mêmes secteurs. Afin de se prémunir contre une approche trop rigide, l’Union européenne pourrait également veiller à ce que les modèles de gestion axée sur les résultats disposent d’une marge de flexibilité et d’adaptabilité, surtout dans les contextes fragiles. En finalisant l’architecture de son cadre de résultats institutionnel, l’Union européenne pourrait formuler une analyse plus robuste et argumentée de la manière dont ses résultats et réalisations au niveau des pays sont alignés sur les ODD (OCDE, 2017).
Système d’évaluation
Indicateur : Le système d’évaluation est conforme aux principes du CAD en matière d’évaluation
L’Union européenne est en train d‘affiner et de renforcer l’utilité de son système d’évaluation – fondé sur les critères du CAD – en définissant définition de nouvelles lignes directrices et en multipliant les évaluations conjointes. Parallèlement, il conviendrait d’étudier si une approche participative présente de réels avantages comparé à une approche indépendante de l’évaluation.
La Commission a établi de nouvelles lignes directrices sur l’évaluation, mais elle pourrait pousser plus loin l’examen des compromis entre indépendance et appropriation
En 2013, la Commission a instauré le principe « évaluer avant d’agir » pour son système d’évaluation général, y compris pour la coopération pour le développement (Commission européenne, 2013). Cette approche a été parachevée en 2014 et résumée dans « Evaluation matters » comme un ensemble de principes généraux régissant l’évaluation de la coopération opérée par l’Union européenne à l’appui du développement (Service européen pour l’action extérieure, 2014). L’année suivante, le Programme pour une meilleure réglementation a exposé des lignes directrices sur la fourniture d’éléments concrets pour éclairer le processus décisionnel4. À partir de ces lignes directrices, la DG DEVCO et la DG NEAR procèdent à des évaluations sur deux niveaux : évaluations stratégiques centralisées, menées par les services centraux ; et évaluations décentralisées, menées par les délégations. Elles s’appuient sur les critères du CAD en matière de pertinence, d’efficacité, d’efficience, d’impact et de soutenabilité.
Les évaluations centralisées suivent un plan glissant sur cinq ans, couvrant des évaluations géographiques de quatre ou cinq pays ou régions par an, et des évaluations thématiques sur des sujets tels que la résilience, la prévention des conflits, les migrations ou la gouvernance. Les évaluations géographiques sont sélectionnées en fonction de la couverture financière, de la régularité et de la distribution régionale, avec une attention particulière pour les pays fragiles ou touchés par un conflit. Le choix des évaluations thématiques est fondé sur de vastes consultations internes avec les directions thématiques et politiques. Le gros des évaluations est toutefois décentralisé et mené par des délégations ou des unités opérationnelles. Les évaluations portent aussi bien sur de petits projets que sur des dispositifs de grande envergure ; elles doivent comprendre des projets supérieurs à 5 millions EUR (euros) et représentant au moins 50 % du programme pluriannuel du pays ou de l’unité. Les provisions permettant de financer la réalisation de ces évaluations décentralisées sont intégrées dans le coût des programmes et projets. Jusqu’à récemment, les résultats de ces évaluations demeuraient cantonnés aux délégations, mais ils sont désormais placés sur la base de données IT Évaluation (EVAL)5, ce qui permet de les partager avec les services centraux et d’autres délégations. Il n’est pas possible de déterminer clairement comment ces évaluations décentralisées sont exploitées aux fins de l’apprentissage et de la programmation future.
Les unités d’évaluation respectives de la DG DEVCO et de la DG NEAR sont chargées de piloter les évaluations. Cela suppose d’opérer une coordination entre les États membres – et notamment, comme le stipulait l’examen par les pairs de 2012, d’encourager des évaluations conjointes des programmations conjointes. Les évaluations, qui sont généralement fondées sur les informations recueillies au niveau des résultats, sont sous-traitées à des consultants indépendants ayant conclu un accord-cadre par le biais d’un marché public avec le siège ou la délégation. Afin de mener à bien cette tâche, la DG DEVCO dispose de sept gestionnaires d’évaluation au sein de son unité d’évaluation et d’un budget annuel d’environ 3.6 millions EUR. La DG NEAR, quant à elle, dispose de quatre gestionnaires et d’un budget annuel d’environ 2.0 millions EUR.
Afin d’aider les gestionnaires opérationnels à préparer, réaliser et diffuser les évaluations, un Réseau de correspondants en matière d’évaluation, composé d’environ 120 membres du personnel des services de la DG DEVCO et des délégations, a été mis en place en 2013. La DG NEAR a créé un réseau analogue en 2015, qui compte une cinquantaine de personnes dans les services centraux et dans les délégations de l’Union européenne.
À la DG DEVCO, lorsque les évaluations sont finalisées, elles sont soumises au Groupe interservices pour commentaires, aux responsables des unités d’évaluation pour approbation et au commissaire concerné pour avis de non-objection. Les recommandations sont adressées aux services thématiques, qui expriment alors leur accord, leur accord partiel ou leur désaccord, et proposent des mesures à prendre par l’encadrement. Un suivi de ces mesures est effectué un an plus tard et annoncé au Directeur général (Service européen pour l’action extérieure, 2014).
Au sein de la DG NEAR, les rapports finaux d’évaluation sont validés par le Groupe interservices concerné. Un Plan d’action de suivi est établi pour chaque évaluation ; il comprend la liste de recommandations – qui peuvent être acceptées, partiellement acceptées ou rejetées – ainsi que les actions à mettre en œuvre par les services de la Commission. Ce Plan d’action est approuvé par le Directeur général de la DG NEAR avant publication sur le site web de la DG NEAR ; sa mise en œuvre doit faire l’objet d’un suivi un an plus tard.
Le département « Évaluation des opérations » de la BEI procède à des évaluations indépendantes des activités de la Banque, principalement selon un axe thématique ou géographique (généralement par région ou sous-région). Les critères d’évaluation correspondent aux principes définis par le Réseau du CAD sur l’évaluation du développement et adoptés par le Groupe de coopération pour l’évaluation 6des banques multilatérales de développement ; ils mettent l’accent sur les résultats opérationnels, la redevabilité et la transparence. Les rapports d’évaluation sont approuvés par le Conseil d’administration de la BEI plutôt que par la direction de la Banque, ce qui garantit l’indépendance des évaluations (BEI, 2015).
L’examen par les pairs réalisé par le CAD en 2012 exprimait des préoccupations quant à l’indépendance des évaluations de la Commission, parce qu’elles n’étaient pas soumises directement à la haute direction. Depuis, la Commission a adopté une approche plus participative associant le personnel à l’estimation des besoins en termes d’évaluation, à la définition des modalités, ainsi qu’à l’examen des recommandations, afin de maximiser l’intérêt et l’appropriation des évaluations. Bien qu’il n’existe aucune incitation formelle, le personnel est également encouragé user des conclusions des évaluations pour améliorer la programmation. En outre, le calendrier des évaluations est ajusté de manière à cadrer avec l’élaboration des stratégies nationales, rectifier les orientations et améliorer la prise de décisions en cours de projet.
Étant donné qu’un certain nombre d’autres membres du CAD (comme la Suède et les États‑Unis) appliquent également une approche participative de l’évaluation, un partage d’expériences pourrait stimuler les progrès en la matière. Cela vaut particulièrement pour les arbitrages opérés dans le choix d’évaluations plus indépendantes par rapport aux avantages liés à une appropriation plus forte de la part des effectifs opérationnels. Certains donneurs ont ainsi élaboré des modèles hybrides garantissant l’absence de conflits d’intérêt ou exigeant l’intervention d’évaluateurs externes afin de limiter les partis pris et d’accroître le potentiel d’apprentissage fondé sur les évaluations.
Apprentissage institutionnel
Indicateur : Les évaluations et les systèmes de gestion des connaissances sont utilisés comme outils de gestion
Dans l’Union européenne, les évaluations servent de base à l’apprentissage. L’Union européenne dispose également de divers outils et plateformes destinés au partage des connaissances. Des efforts supplémentaires doivent cependant être déployés pour décloisonner les institutions européennes et influencer l’action publique.
Les mécanismes de partage des connaissances se sont multipliés, mais peu d’éléments permettent de déterminer comment l’apprentissage est utilisé
L’examen par les pairs réalisé par le CAD en 2012 a montré que les conclusions des évaluations par l’Union européenne étaient peu utilisées et peu partagées. En conséquence, l’Union européenne a redoublé d’efforts pour diffuser les résultats de l’évaluation, demandant aux gestionnaires d’évaluation de veiller à ce qu’une bonne traduction des connaissances soit disponible (ex. interprétation et relai des résultats de l’évaluation en fonction du public visé), et en intensifiant la coordination entre la DG DEVCO et le Service européen pour l’action extérieure afin de rehausser l’appropriation des résultats de l’évaluation.
Pour chaque évaluation, le gestionnaire prépare désormais systématiquement un plan de communication et de suivi. Les personnels opérationnels clés sont étroitement associé au processus, la logique étant qu’ils sont les mieux placés pour garantir que les recommandations seront mises en œuvre. Le plan de communication porte sur les publics visés (principaux utilisateurs et parties prenantes), les canaux utilisés (ex. courriels, diverses plateformes, médias sociaux et séminaires) et les formats de communication (ex. résumés, notes de gestion et vidéos). Afin de mieux sensibiliser le public aux conclusions, des séminaires publics sont organisés systématiquement à Bruxelles – où des représentants du Parlement européen et des États membres (à travers le Conseil) sont toujours invités – ainsi que dans les pays partenaires.
Outre les enseignements tirés des évaluations, la DG DEVCO a adopté en 2014 sa première Stratégie pour l’apprentissage et le développement des connaissances 2014‑20, accompagnée d’un plan d’action. Les thématiques abordées comprennent l’alignement avec les ODD, les processus organisationnels et les applications informatiques (proposées au moyen de cours en ligne ou cours en groupe, et adaptés à des publics spécifiques). En outre, la Stratégie et le plan d’action introduisent plusieurs plateformes (Evaluation Network Group ; Learn4dev ; capacity4dev ; DEVCO Academy ; European Expert Network on International Cooperation and Development ; et Network on Knowledge Management Correspondence).
Les agents sur le terrain, qui traitent des défis opérationnels au quotidien, n’utilisent pas nécessairement ces plateformes. Ils préfèrent et apprécient les opportunités d’apprentissage sous forme de séminaires tenus à Bruxelles sur des thématiques spécifiques, qui permettent aux délégations de mettre en commun leurs connaissances dans le domaine. La Commission est encouragée à recueillir des retours d’information des effectifs sur le terrain concernant les moyens les plus efficaces et rapides d’apprendre et de partager les connaissances.
Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour influencer l’action publique, défragmenter l’apprentissage et communiquer avec le public
En dehors de la DG DEVCO, les directions et institutions possèdent leur propre système de partage des connaissances et des enseignements, avec toutefois des niveaux d’exhaustivité et de visibilité différents. La DG ECHO dispose d’un système actif de gestion des connaissances, assorti d’un site web dédié aux partenaires, qui donne des liens vers différentes sessions de formation et outils d’apprentissage à distance pour les organisations non gouvernementales (ONG)7. Son Mécanisme de protection civile propose un programme de formation complet et une plateforme d’échange d’information, qui permet aux experts européens de s’informer sur les différents systèmes nationaux d’intervention d’urgence et de protection civile, ainsi que sur les moyens d’améliorer la coordination et l’évaluation des réactions en cas de catastrophe.
D’autres directions, comme la DG NEAR, diffusent des rapports sur le suivi et l’évaluation à des fins d’apprentissage interne, et organisent des séminaires sur les résultats et des discussions thématiques. La BEI partage les enseignements tirés des évaluations et propose au personnel et aux chercheurs des formations, des cours en ligne, des podcasts et des études. Toutefois, ni la DG NEAR ni la BEI n’ont encore établi de stratégie ou de cadre pour le partage des connaissances et l’apprentissage institutionnel en matière de coopération pour le développement.
De manière générale, la DG DEVCO en particulier s’est efforcée de promouvoir la gestion des connaissances et l’apprentissage, en mettant à profit les enseignements pour éclairer l’action publique et les programmes sur le terrain. Elle semble toutefois privilégier l’apprentissage sur les procédures opérationnelles que sur les facteurs propices aux réalisations et à l’impact. En outre, il n’est pas possible de déterminer la manière dont les enseignements tirés des projets et évaluations décentralisés sont systématiquement agrégées pour informer le personnel de l’organisation et les responsables politiques quant aux réussites et aux difficultés communes. Enfin, l’apprentissage reste fragmenté entre les différentes directions. Il manque une approche institutionnelle à l’échelle de l’ensemble de l’Union européenne. Des progrès pourraient donc être accomplis au niveau de l’analyse d’impact, de l’influence sur l’action publique et du regroupement des enseignements tirés entre les différents acteurs de l’Union européenne.
Des progrès pourraient également être réalisés grâce à une communication qui adapte les messages tirés du Cadre de résultats et des évaluations aux décideurs et aux publics ciblés, comme cela avait déjà été relevé dans l’examen par les pairs de 2012. En particulier, alors que les évaluations de la DG DEVCO sont placées sur la base de données ÉVAL aux fins d’une utilisation en interne, elles ne sont pas encore accessibles au grand public. Une culture de la gestion des connaissances plus axée sur la transparence – ce qui implique de communiquer avec le grand public – pourrait être envisagée. Afin d’améliorer la cohérence, la communication, la redevabilité et la transparence, l’Union européenne pourrait se demander comment elle pourrait communiquer sur l’ensemble de sa coopération pour le développement, y compris par le biais de la BEI et d’autres composantes du système de coopération pour le développement de l’Union européenne.
Références
Sources officielles
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BEI (2018a), Rapport annuel 2017 sur les activités de la BEI en Afrique, dans les Caraïbes et le Pacifique ainsi que dans les pays et territoires d’outre-mer, Banque européenne d’investissement, Kirchberg, Luxembourg, http://www.eib.org/attachments/country/if_annual_report_2017_fr.pdf.
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BEI (2015), Rendre compte du passé et en tirer des leçons pour l’avenir : l’évaluation à la BEI, Banque européenne d’investissement, Kirchberg, Luxembourg, http://www.eib.org/attachments/ev/operations_evaluation_fr.pdf.
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Commission européenne (2015c), « Préparatifs en vue du Sommet humanitaire mondial : un partenariat mondial pour une action humanitaire fondée sur des principes et efficace », COM(2015) 419 final, https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52015DC0419&from=EN.
Commission européenne (2014), Learning and Knowledge Development Strategy (LKDS) 2014-2020, https://europa.eu/capacity4dev/km-ks/blog/learning-and-knowledge-development-strategy-europeaid.
Commission européenne (2013), « Renforcer les fondements de la réglementation intelligente – Améliorer l’évaluation », COM(2013) 686 final, http://ec.europa.eu/smart-regulation/docs/com_ 2013_686_fr.pdf.
Commission européenne (2011), « Accroître l’impact de la politique de développement de l’UE : un programme pour le changement », COM(2011) 637 final, https://ec.europa.eu/europeaid/sites/devco/files/publication-agenda-for-change-2006_fr.pdf.
ONU-Commission européenne (2015), Operational conclusions of the 11th annual meeting of the Working Group (Financial and Administrative Framework), Organisation des Nations Unies et Commission européenne, https://ec.europa.eu/europeaid/sites/devco/files/op-conclusions-11th-meeting-wg-fafa_en.pdf.
Service européen pour l’action extérieure (2014), Evaluation Matters – The Evaluation Policy for European Union Development Cooperation, https://ec.europa.eu/europeaid/sites/devco/files /evaluation-matters_en_0.pdf.
Autres sources
OCDE (2017), « Strengthening the results chain: Synthesis of case studies of results-based management by providers », Documents d’orientation de l’OCDE sur le développement, n° 7, Éditions OCDE, Paris, https://www.oecd.org/dac/peer-reviews/results-strengthening-results-chain-discussion-paper.pdf.
PARIS21 (2017), PRESS 2017: Partner Report on Support to Statistics, http://www.paris21.org/sites/default/files/2017-10/PRESS2017_web2.pdf.
Notes
← 1. Les partenaires d’exécution ont désormais l’obligation contractuelle d’opérer un suivi de ces résultats et de les notifier sur la base de ce cadre.
← 2. EU-ASEAN Capacity Building Project for Monitoring Integration Progress and Statistics (COMPASS).
← 3. L’Union européenne publie chaque année plusieurs rapports sur la gestion axée sur les résultats : le Rapport annuel sur la mise en œuvre des instruments de l’Union européenne pour le financement de l’action extérieure, qui intègre depuis 2017 les résultats s’appuyant sur le cadre de résultats de l’Union européenne pour le développement et la coopération internationale ; un rapport annuel sur l’appui budgétaire, établi conjointement par la DG DEVCO et la DG NEAR, qui donne une vue d’ensemble des opérations d’appui budgétaire ; le Rapport annuel sur les politiques de l’Union européenne en matière d’aide humanitaire et leur mise en œuvre par la DG ECHO ; les rapports d’activité annuels établis respectivement par la DG DEVCO, la DG NEAR et la DG ECHO, détaillant les réalisations institutionnelles, la gestion, ainsi que les performances financières et en matière de ressources humaines ; le rapport annuel sur les opérations de la BEI à l’extérieur de l’Union européenne, fondé sur le Cadre de mesure des résultats de la Banque ; et des rapports sur la gestion de l’assistance extérieure et ses indicateurs de performance clés, produits chaque année par chaque délégation de l’Union européenne et qui donnent un aperçu de l’état d’avancement des projets de coopération pour le développement lancés par l’Union européenne.