La directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (2006/123/CE), dite directive « services », fait partie des instruments du programme de réformes économiques énoncé dans la stratégie de Lisbonne de 2000, qui visait à faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010 ». Elle a été présentée pour la première fois en 2004 par Frits Bolkestein, alors commissaire européen au marché intérieur. Au terme d’un parcours législatif qui a vu son texte plusieurs fois remanié, elle a finalement été approuvée par le Parlement européen et adoptée par le Conseil le 12 décembre 2006. La directive « services » devait être transposée par tous les États membres de l’UE avant le 28 décembre 2009.
Guichets uniques pour les citoyens et les entreprises
Annexe A. Services transfrontaliers dans l’Union européenne
La directive « services »
Histoire
Objectifs
La stratégie de Lisbonne appelait notamment à avancer à grands pas vers l’achèvement du marché intérieur. Le secteur des services en plein essor laissait entrevoir un gisement d’emplois et de croissance économique qui n’attendait que la libéralisation du marché européen pour se révéler. Un rapport de 2002 de la Commission européenne sur la situation du marché intérieur des services recensait plus de quatre-vingt-dix obstacles au fonctionnement du marché intérieur, qui engendraient des coûts considérables pour les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME) cherchant à développer des activités de services transfrontalières. Les utilisateurs, surtout les consommateurs, restaient eux-aussi pénalisés par des obstacles à la libre circulation des services, l’absence de concurrence maintenant les prix élevés. La directive visait à éliminer plusieurs obstacles juridiques restrictifs afin de favoriser l’activité économique et la concurrence transfrontalières. Plus précisément, elle établissait un cadre juridique qui devait permettre :
pour les entreprises :
d’éliminer les obstacles à la liberté d’établissement des prestataires dans les États membres,
d’éliminer les obstacles à la prestation temporaire de services transfrontaliers,
de simplifier les procédures et formalités encadrant l’établissement dans un autre État membre ;
pour les consommateurs :
de renforcer la protection des consommateurs et des destinataires de services ;
d’améliorer l’information et la transparence sur les activités de services ;
de donner accès à un plus grand choix de services à des prix compétitifs.
Les « guichets uniques »
L’un des mesures phares de la directive « services » visait la simplification administrative par la mise en place, dans chaque État membre, avant décembre 2009, de « guichets uniques », sous la forme de portails en ligne permettant de s’informer sur les exigences juridiques et administratives et d’accomplir les procédures et formalités par voie électronique. Grâce à un tel portail, un prestataire, au lieu de se mettre en contact avec les différentes administrations du pays, s’adresse à un interlocuteur unique pour obtenir toutes les informations nécessaires et accomplir toute la procédure en ligne. Les guichets uniques sont des interfaces entre les entreprises et l’administration et ils font partie des stratégies d’administration en ligne des États membres. Leur mise en œuvre s’est cependant révélée difficile et n’est toujours pas achevée à ce jour. Prenant acte de leur inadéquation avec les besoins réels des entreprises, la Commission et les États membres ont adopté en 2013 une charte des guichets uniques. Celle-ci établit quatre critères à respecter pour évaluer et améliorer les services des guichets uniques, à savoir : qualité et disponibilité des informations, accomplissement en ligne des formalités, accessibilité aux utilisateurs d’autres pays, facilité d’utilisation.
Une première évaluation des guichets uniques a été faite en 2012 à l’occasion du rapport de la Commission sur la mise en œuvre de la directive « services », et a constaté que la plupart des États membres n’avaient pas encore réussi à se conformer à toutes les exigences de la directive.
Une autre évaluation similaire réalisée en 2015 montrait la persistance d’une importante marge d’amélioration pour la mise en œuvre des guichets uniques : le score moyen pour l’accessibilité était de 54 %, certains critères obtenant un score encore plus mauvais, tels celui de l’accessibilité pour les utilisateurs transfrontaliers (41 %). Les guichets uniques obtenaient leurs meilleurs scores sur les critères de la facilité d’utilisation et de l’accomplissement en ligne des formalités (61 %), suivis par la qualité et la disponibilité des informations (57 %).
La charte sur les guichets uniques précisait également que l’évaluation de 2015 ne constituerait pas une échéance finale, mais plutôt une date butoir pour la réalisation de progrès vers des guichets uniques plus complets et plus conviviaux. Compte tenu de l’ampleur de la marge d’amélioration, la Commission continuera à évaluer régulièrement les guichets uniques par la suite, à des intervalles suffisamment longs pour permettre l’inclusion d’améliorations supplémentaires.
L’évaluation des guichets uniques réalisée en 2017 et rapportée dans le tableau d’affichage du marché unique montre que les résultats sont raisonnablement satisfaisants pour certains d’entre eux (Commission européenne, 2019[1]). Même si les États membres ont amélioré la disponibilité des procédures, qui sont au moins partiellement en ligne, l’accès à partir d’autres États membres pose toujours de gros problèmes, surtout lorsqu’il existe des exigences strictes en matière d’authentification et de signature électronique. Par ailleurs, seul un tiers des guichets uniques fournissent des informations suffisamment détaillées sur les procédures.
Outre les aspects qui seront évalués par la Commission, la charte des guichets uniques invite les États membres à contrôler les performances de leurs guichets uniques en ligne, et à les confronter autant que possible aux besoins réels des entreprises.
Le portail numérique unique
Le 2 octobre 2018, le Parlement européen et le Conseil ont adopté un règlement établissant un portail numérique unique. Ce projet, qui consiste dans les faits en une intégration des guichets uniques existants, est une étape supplémentaire dans la réalisation du marché unique des services.
Le portail numérique unique deviendra le point d’accès à des informations et des démarches en ligne dont les citoyens et les entreprises de l’UE ont besoin pour exercer une activité dans n’importe quel État membre de l’UE. Il sera présenté et mis en avant auprès des citoyens et des entreprises sous la bannière du site « L’Europe est à vous ». Il comprendra des outils de recherche permettant d’obtenir des informations complètes et fiables sur les droits, les règles et les procédures applicables, ainsi que des services d’assistance et de résolution de problèmes. Les utilisateurs pourront effectuer un certain nombre de ces procédures entièrement en ligne, en bénéficiant de l’application du principe « une fois pour toutes ».
D’ici à la fin de 2020, les citoyens et les entreprises qui déménagent dans un autre État membre de l’UE pourront savoir facilement quelles règles s’appliquent et quels sont les services d’assistance disponibles dans leur nouveau lieu de résidence.
À la fin de 2023 au plus tard, ils pourront effectuer un certain nombre de démarches essentielles dans tous les États membres de l’UE sans avoir à remplir des papiers – par exemple, immatriculer un véhicule, ou demander une pension auprès d’un régime de retraite.
Les guichets uniques figurent dans la liste des services d’assistance et de résolution de problèmes établis par des actes contraignants de l’Union et ont donc été intégrés d’emblée au portail numérique unique, comme le portail EURES.
EURES (EURopean Employment Services – services européens de l’emploi) est un réseau de coopération formé par les services publics de l’emploi. Les organisations syndicales et patronales participent également en tant que partenaires. L’objectif du réseau EURES est de faciliter la libre circulation des travailleurs dans l’Espace économique européen (EEE) et la Suisse. Le portail d’EURES offre la possibilité aux demandeurs d’emploi de chercher un travail dans un autre pays, et aux employeurs qui souhaitent recruter à l’étranger de publier des offres d’emploi.
D’autres services d’assistance et de résolution de problèmes proposés par la Commission, par les États membres ou par des opérateurs privés peuvent être ajoutés au portail à condition de remplir les critères énoncés dans le règlement. Les usagers devraient accéder facilement, par l’intermédiaire du portail, aux services suivants :
Le réseau des Centres européens des consommateurs (ECC-Net) des pays de l’UE, d’Islande, de Norvège et du Royaume-Uni, dont la mission est d’informer les consommateurs sur leurs droits, ainsi que de les conseiller juridiquement et de les aider en cas de litige avec un professionnel établi dans un autre pays européen.
Le réseau Enterprise Europe Network (EEN), qui aide les entreprises à innover et à accéder à de nouveaux marchés. Il s’agit du plus grand réseau mondial de soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) qui souhaitent se développer à l’international. Le réseau est actif dans plus de 60 pays et rassemble 3 000 experts de plus de 600 organisations membres, parmi lesquelles des pôles technologiques, des organismes de soutien à l’innovation, des universités et des instituts de recherche, des agences de développement et des chambres de commerce et d’industrie.
Référence
[1] Commission européenne (2019), Single Market Scoreboard: Performance per Governance Tool - Points of Single Contact, https://ec.europa.eu/internal_market/scoreboard/performance_by_governance_tool/points_of_single_contact/index_en.htm.