Ce chapitre s’intéresse aux liens entre les institutions sociales discriminatoires et l’autonomisation économique des femmes. En s’appuyant sur les données du SIGI Côte d’Ivoire, il dresse un état des lieux des différences entre les femmes et les hommes sur le marché du travail en termes de participation, de secteur d’activité, du type d’emploi et des revenus. Le chapitre s’intéresse également aux disparités existant en matière de propriété et de contrôle des terres agricoles et des biens immobiliers, ainsi qu’en matière de pouvoir décisionnel sur les dépenses et les investissements au sein des ménages. Dans un second temps, l’analyse identifie les normes sociales, attitudes et pratiques discriminatoires qui sont à la source de ces disparités et de ces inégalités. Le chapitre conclut en proposant des recommandations de politiques publiques et des mesures concrètes en vue d’améliorer l’autonomisation économique des femmes et de favoriser une croissance inclusive.
Institutions sociales et égalité femmes-hommes en Côte d’Ivoire
4. L’autonomisation économique des femmes et les normes sociales discriminatoires
Abstract
Points clés
Accès au marché du travail et entrepreneuriat
Les femmes ivoiriennes sont moins susceptibles que les hommes de participer au marché du travail et d’être employées.
Elles sont sous-représentées dans les emplois salariés et majoritaires dans des emplois de statut inférieur, travaillant par exemple à leur compte ou comme travailleuses familiales non rémunérées. Peu de femmes sont salariées et la plupart exercent dans le secteur informel, ce qui les empêche de bénéficier de prestations sociales et de congé maternité.
Les femmes sont concentrées dans des secteurs associés à une faible productivité : 70 % d’entre elles travaillent dans le secteur des services, plus particulièrement dans des domaines tels que le commerce de détail ou l’hébergement, qui ont été gravement touchés par la pandémie de COVID-19. Si l’on exclut le secteur agricole, la moitié des femmes employées travaillent dans le commerce de gros et la vente au détail et 8 % dans le secteur de l’hébergement et des services de restauration.
Certaines normes sociales discriminatoires entravent gravement la participation des femmes au marché du travail :
Les normes sociales légitiment la domination qu’exercent les hommes dans la prise de décisions, ce qui nuit à la capacité d’agir des femmes et à leur participation au marché du travail : 70 % de la population considère que c’est à un homme de décider si une femme est autorisée à travailler en dehors du foyer.
Les normes sociales cantonnent les femmes à la sphère domestique, où elles consacrent quatre fois plus de temps que les hommes au travail domestique et de soin non rémunéré. Les femmes devant tout de même contribuer aux revenus du ménage, elles doivent supporter une charge totale de travail bien plus lourde que les hommes, une fois le travail rémunéré et non rémunéré combinés.
Les normes sociales associent les femmes à certains types de postes, de métiers et de secteurs, ce qui les relèguent à des secteurs mal payés ou à des postes de statut inférieur.
Propriété de biens productifs et leur contrôle
L’amendement récent des principales lois régissant l’accès des femmes aux biens productifs et à leur contrôle1 atteste de l’engagement du gouvernement à assurer l’égalité des droits entre les hommes et les femmes.
Pourtant, le taux de propriété des femmes ivoiriennes demeure très inférieur à celui des hommes. L’écart entre les femmes et les hommes en matière de propriété de terres agricoles s’établit à 20 points de pourcentage, et atteint 38 points de pourcentage parmi la population travaillant dans l’agriculture. En matière de propriété immobilière, l’écart s’établit à 22 points de pourcentage.
Les décisions des ménages relatives aux dépenses et aux investissements continuent d’être du ressort des hommes, ce qui porte atteinte à l’indépendance des femmes et risque de reproduire les inégalités existantes.
Les normes, coutumes et traditions discriminatoires qui légitiment des pratiques discriminatoires en matière de succession ainsi que les attitudes qui s’opposent au droit des femmes d’hériter de biens expliquent le faible taux de propriété de biens chez les femmes.
C’est principalement par l’héritage que se fait l’acquisition foncière. Or les coutumes tendent à empêcher les veuves et les filles d’hériter à parts égales : 35 % des veuves n’ont touché aucune part d’héritage à la mort de leur mari, par rapport à seulement 8 % des veufs.
La tradition veut que ce soient les hommes qui possèdent les biens, et surtout la terre : 36 % de la population estime que les filles ne devraient pas avoir le droit d’hériter de terres.
Les dynamiques au sein des ménages et les rapports de force inégaux entre hommes et femmes, notamment dans le cadre du mariage, limitent les possibilités pour les femmes de posséder des biens. Conformément à la répartition traditionnelle des rôles au sein des ménages et des couples mariés, les femmes sont cantonnées à la sphère domestique tandis que les hommes gèrent les questions économiques et financières. La propriété des biens acquis pendant le mariage revient en priorité aux maris.
La dimension économique est essentielle à l’autonomisation des femmes. Une telle autonomisation correspond à la capacité de participer au marché du travail et de toucher un revenu, ainsi que celle d’avoir accès à des ressources productives – telles que des terres agricoles – et financières, d’en hériter et de les contrôler. En outre, l’autonomisation économique des femmes est liée à une multitude de problématiques, y compris le contrôle de leur temps, de leur vie et de leur corps, ainsi que leur participation aux prise de décisions d’ordre économique, tant à l’intérieur des ménages que dans la sphère publique (ONU-Femmes, 2020[1]). Ainsi, bien que cette autonomisation concerne principalement la capacité des femmes à agir dans le domaine économique, elle ouvre aussi la voie à des changements majeurs dans d’autres dimensions de leurs vies telles que le bien-être, l’autonomisation sociale, la santé et l’éducation (Kabeer, 2015[2] ; Kabeer, 2009[3]).
Le présent chapitre examine dans un premier temps l’accès des femmes ivoiriennes au marché du travail, puis, dans un second temps, leur propriété et contrôle d’actifs et de biens productifs, en particulier de terres agricoles et de biens immobilier. Chaque section commence par une évaluation de la situation des femmes en Côte d’Ivoire et dans les 14 districts du pays, puis analyse le rôle que jouent certaines normes sociales, attitudes et stéréotypes discriminatoires pour expliquer les inégalités constatées. Ces inégalités incluent notamment la marginalisation des femmes sur le marché du travail, leur statut d’emploi inférieur à celui des hommes et leur faible accès à la propriété de biens fonciers et non fonciers.
Les institutions sociales discriminatoires nuisent à la position des femmes ivoiriennes sur le marché du travail et aux chances qui leur sont offertes
L’accès des femmes au marché du travail, et plus précisément à des emplois de qualité, constitue une dimension essentielle de leur autonomisation. En effet, c’est ce qui permet aux femmes de disposer d’un revenu et de contrôler des ressources économiques, ce qui s’accompagne de nombreuses externalités positives. Par exemple, dès lors qu’elles contrôlent leur propre revenu, les femmes ont les moyens de quitter une situation violente dans leur foyer, tandis que le contrôle par les femmes de ressources économiques supplémentaires a pour effet d'accroître les investissements dans l’éducation et la santé des enfants. En outre, ces gains profitent non seulement aux femmes mais à la société tout entière. Les aptitudes innées étant réparties de manière équilibrée entre les femmes et les hommes, les différences entre les femmes et les hommes sur le marché du travail réduisent artificiellement le stock de travailleurs qualifiés disponibles et produisent une allocation inefficiente des travailleurs. De tels déséquilibres freinent l’ensemble de la croissance économique d’un pays donné (Ferrant et Kolev, 2016[4]). À cet égard, la Côte d’Ivoire aurait beaucoup à gagner, sur le plan économique, d’une hausse de la participation des femmes sur le marché du travail, ce qui implique de lutter contre les barrières structurelles qui entretiennent la présence de ces déséquilibres artificiels.
En Côte d’Ivoire, de nombreux textes juridiques, plans d’action et initiatives soutiennent l’autonomisation économique et les droits du travail des femmes. La loi, notamment à travers la Constitution et le Code du travail, garantit l’égalité entre les femmes et les hommes et protègent les droits du travail des femmes. En outre, des plans d’action nationaux, couplés à des unités spécifiquement en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des ministères, attestent de l’engagement de la Côte d’Ivoire à promouvoir l’autonomisation économique des femmes, à garantir la mise en œuvre et l’application des lois, et à placer les opportunités socio-économiques des femmes et des filles au cœur de l’agenda politique du pays (Encadré 4.1).
Encadré 4.1. Lois et politiques publiques favorisant l’autonomisation économique des femmes en Côte d’Ivoire
Lois et instruments juridiques favorisant l’accès égal des femmes à l’emploi
L’accès des femmes au marché du travail et leur droit à une rémunération égale sont garantis par la Constitution et le Code du travail. La Constitution interdit toute discrimination fondée sur le sexe (article 4), prescrit le libre choix de la profession ou de l’emploi et interdit la discrimination à l’embauche fondée sur le sexe, l’appartenance ethnique, les opinions politiques, religieuses ou philosophiques (article 14). Elle prévoit en outre un salaire égal pour un travail de valeur égale et interdit le travail des enfants (articles 15 et 16) (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2016[5] ; Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2020[6]). Le Code du travail réitère la non-discrimination en fonction du sexe dans l’emploi, notamment en ce qui concerne l’embauche, les conditions du contrat de travail, la promotion, la rémunération, la formation professionnelle et la rupture du contrat de travail (article 4). Le Code du travail interdit expressément toute discrimination à l’égard des femmes enceintes et prévoit un congé maternité payé de 14 semaines (articles 23.3 et 23.6). Toutefois, l’accès à certaines professions et leur exercice sont interdits aux femmes (article 11.1) (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2021[7]).
Plans d’action et mécanismes nationaux en faveur de l’égalité des sexes
Dans le but de mettre en œuvre et de garantir l’application de ces lois, l’autonomisation économique des femmes fait partie intégrante de plusieurs plans d’action nationaux, ainsi que des axes de travail et initiatives spécifiques de certains ministères.
Le développement socio-économique du pays pour les années à venir est guidé par le Plan national de développement 2021-2025 et le Cadre de coopération pour le développement durable élaboré par le Gouvernement ivoirien en coopération avec les Nations Unies. Ces stratégies vont de pair et toutes deux mettent l’accent sur l’accélération de la transformation structurelle de l’économie. Elles reconnaissent la nécessité d’une plus grande inclusion socio-économique axée autour d’objectifs spécifiques comme l’accès équitable aux soins de santé et aux services sociaux et la création de davantage de possibilités d’éducation et d’emploi. Ces plans visent à favoriser l’autonomisation des filles et des femmes par l’amélioration de leur accès aux opportunités socio-économiques et technologiques ainsi que par l’élimination et la prévention des violences sexistes (Gouvernement de la Côte d’Ivoire et Nations Unies Côte d’Ivoire, 2021[8]).
L’engagement de la Côte d’Ivoire à promouvoir l’autonomisation économique des femmes se manifeste également par l’existence d’organes ou mécanismes spécialisés tels que la direction de l’entrepreneuriat féminin qui relève du ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, le Fonds d’appui aux femmes de Côte d’Ivoire qui soutient l’entrepreneuriat féminin ivoirien (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2022[9] ; Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2020[10]), ou encore le Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire (COCOFCI) (COCOFCI, s.d.[11]).
Les femmes continuent d’accuser du retard par rapport aux hommes en matière de participation au marché du travail, de type d’emploi et de niveau de revenu
La participation des femmes ivoiriennes au marché du travail reste faible
Les femmes ont un accès limité au marché du travail en Côte d’Ivoire. En effet, elles sont nettement moins susceptibles de participer au marché du travail2 et d’être employées que les hommes3. Au niveau national, l’Organisation internationale du Travail (OIT) estime qu’en 2021, 46 % des femmes ivoiriennes de plus de 15 ans participent au marché du travail et 44 % sont employée, tandis que 65 % des hommes de plus de 15 ans participent au marché du travail et 63 % sont employés, soit un écart de 19 points de pourcentage (OIT, 2021[12]). À titre de comparaison, l’écart entre les femmes et les hommes en matière de taux d’activité s’élève à 14 points de pourcentage en Afrique subsaharienne. De même, l’écart entre les femmes et les hommes est nettement plus élevé en Côte d’Ivoire que dans des pays voisins comme la Guinée (0 p.p.), le Ghana (8 p.p.) ou le Libéria (10 p.p.). Les données du SIGI Côte d’Ivoire, quant à elles, indiquent que 51 % des femmes participent au marché du travail et 46 % sont employées. Pour les hommes, ces taux s’établissent à 81 % et 77 %, respectivement.
Il existe de fortes disparités géographiques en termes de taux d’activité et d’emploi. Les différences entre les femmes et les hommes sont particulièrement marquées en milieu rural, avec des écarts de 33 points de pourcentage pour le taux d’activité et de 36 points de pourcentage pour le taux d’emploi (Graphique 4.1). De fortes disparités existent également entre les districts. Ainsi, à Abidjan et au Zanzan, environ deux tiers des femmes participent au marché du travail et sont employées. À l’inverse, moins d’un tiers d’entre elles participent au marché du travail et sont employées dans le Woroba et dans la Vallée du Bandama. Les écarts entre les femmes et les hommes sont les plus marqués dans le Woroba, tant en matière de taux d’activité (52 points de pourcentage) qu’en matière de taux d’emploi (56 points de pourcentage), suivi du district des Lagunes où les écarts s’établissent à 48 et 51 points de pourcentage.
Les emplois des femmes sont principalement informels, vulnérables et concentrés dans des secteurs économiques spécifiques
Les femmes sont sous-représentées dans les emplois salariés et sont majoritaires dans des emplois de statut inférieur, par exemple en travaillant à leur compte ou en tant que travailleuses familiales non rémunérées. La part des femmes salariées est inférieure de moitié à celle des hommes (Banque mondiale, 2015[14]). Au niveau national, 15 % des femmes qui travaillent sont salariées, contre 30 % des hommes (Graphique 4.2). Cet écart entre les femmes et les hommes en matière d’emploi salarié est plus marqué dans les zones urbaines (19 % contre 42 %) où l’emploi formel est plus répandu que dans les zones rurales (8 % contre 14 %). À l’inverse, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de travailler soit en tant que travailleuses familiales, soit à leur compte. En milieu rural, par exemple, 29 % des femmes sont des travailleuses familiales non rémunérées contre seulement 9 % des hommes. Les femmes qui travaillent à leur compte se concentrent, quant à elles, en milieu urbain et principalement dans le secteur non agricole (Banque mondiale, 2015[14]). Enfin, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de travailler dans le secteur des services4, plus de deux tiers d’entre elles (70 %) y travaillant. En milieu urbain, cette part atteint 83 %. À l’inverse, les hommes sont plus susceptibles que les femmes de travailler dans l’agriculture et dans l’industrie.
Dans le secteur non agricole, la forte ségrégation horizontale5 se traduit par la concentration des femmes dans des secteurs associés à une faible productivité et des bas salaires. Les femmes sont plus susceptibles que les hommes de travailler dans le secteur du commerce de gros et de détail, de l’hébergement et de la restauration ou dans l’emploi domestique6. En considérant uniquement le secteur non agricole, les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que 49 % des femmes ivoiriennes travaillent dans le secteur du commerce de gros et du détail contre 26 % des hommes, et que 8 % des femmes travaillent dans le secteur de l’hébergement et de la restauration contre 1 % des hommes. Dans 10 des 14 districts du pays, plus de la moitié des femmes qui ne travaillent pas dans l’agriculture sont employées dans les secteurs du commerce de gros et de détail, de l’hébergement et de la restauration ou dans l’emploi domestique (Graphique 4.3). À l’inverse, les hommes sont plus susceptibles que les femmes de travailler dans l’industrie ou dans le secteur de la construction. Cette forte ségrégation horizontale a des conséquences importantes dans la mesure où les femmes ivoiriennes sont surreprésentées dans des secteurs où la valeur ajoutée par travailleur est relativement faible, entraînant des écarts de revenus substantiels entre les femmes et les hommes (Hallward-Driemeier, 2013[15] ; Banque mondiale, 2015[14]). En outre, cette ségrégation horizontale peut engendrer des effets asymétriques dus à la pandémie de COVID-19 (Torres et al., 2021[16] ; WANEP, 2020[17]). Les données d’enquêtes réalisées en 2020 montrent qu’en Côte d’Ivoire, au cours de la pandémie, tant les hommes que les femmes ont subi d’importantes pertes de revenu (75 % pour les premiers, et 76 % pour les secondes). Néanmoins, davantage de femmes (10 %) que d’hommes (6 %) ont déclaré avoir perdu l’intégralité de leur revenu au cours de la crise engendrée par la pandémie (ONU-Femmes, 2020[18]).
La plupart des femmes travaillent dans le secteur informel. L’immense majorité de la population active ivoirienne (94 % des femmes et 80 % des hommes) travaille dans le secteur informel et seulement 30 % des femmes et 50 % des hommes disposent d’un contrat de travail écrit. De même, la plupart des entreprises possédées par les répondants de l’enquête SIGI Côte d’Ivoire sont informelles (voir l’Encadré 4.2 pour en savoir plus sur la mesure de l’économie informelle).
En raison des modalités inhérentes du travail informel, peu de travailleurs ivoiriens ont accès à un congé parental rémunéré. Bien que les femmes salariées soient censées avoir droit à 14 semaines de congé maternité payé (six semaines avant et huit semaines après la naissance de l’enfant en Côte d’Ivoire (CLEISS, 2021[19])), le poids de l’emploi informel implique que seule une faible proportion de femmes déclare avoir accès à un tel congé rémunéré. Les données du SIGI Côte d’Ivoire indiquent que seule une personne sur dix (11 % des hommes et 7 % des femmes) a droit à un congé paternité ou maternité rémunéré7. La proportion de travailleurs bénéficiant d’un congé parental est plus en milieu urbain (15 % des hommes et 9 % des femmes) qu’en milieu rural (6 % des hommes et 2 % des femmes), ce qui souligne les écarts existants entre les zones urbaines et rurales en termes d’emploi formel et salarié.
Encadré 4.2. Mesure de l’économie informelle dans le contexte du SIGI Côte d’Ivoire
Le concept d’économie informelle est très large et reste difficile à mesurer statistiquement, les définitions et les périmètres variant d’un pays à l’autre. Les 15e et 17e Conférences internationales des statisticiens du travail qui se sont respectivement tenues en 1993 et 2003 ont établi des lignes directrices mondiales pour les statistiques de l’emploi dans le secteur informel, notamment en séparant l’emploi total selon deux dimensions : le type d’unité de production et le type d’emploi (OIT, 2013[20]). S’appuyant sur les travaux du Centre de développement de l’OCDE (OCDE/OIT, 2019[21]), le SIGI Côte d’Ivoire analyse le secteur informel sous deux angles distincts :
L’approche basée sur l’emploi : Sur la base des standards statistiques élaborés par l’OIT afin d’identifier l’emploi informel, l’approche utilisée consiste à poser une série de questions permettant de progressivement filtrer les travailleurs informels (OIT, 2013[20]). Un travailleur formel est identifié comme (i) un employé salarié ou un employeur, (ii) dont l’employeur paie des cotisations sociales ou déduit des impôts du salaire, (iii) qui a droit à des congés annuels rémunérés, et (iv) qui a droit à des congés maladie rémunérés.
L’approche basée sur l’entreprise : Les entreprises appartenant aux répondants sont identifiées comme informelles si elles ne sont pas enregistrées auprès de la Caisse nationale de prévoyance sociale et/ou ne paient pas de TVA.
Les femmes gagnent moins que les hommes, ce qui reflète la ségrégation horizontale
En moyenne, les Ivoiriens gagnent plus du double des Ivoiriennes. Au niveau national, ces différences de revenus entre les hommes et les femmes sont statistiquement significatives8. L’écart entre les hommes et les femmes en termes de revenu médian est de 56 %, ce qui signifie que les femmes gagnent 44 % du revenu médian des hommes. Les écarts de revenu entre hommes et femmes sont particulièrement élevés dans certains districts, comme celui des Montagnes où le revenu médian des femmes ne représente que 12 % du revenu des hommes (Graphique 4.4, Partie A).
Les secteurs où les femmes sont sous-représentées sont également ceux où les revenus médians sont les plus haut. Par exemple, les femmes représentent moins de 1 % des travailleurs dans le secteur de la construction, et moins de 12 % des travailleurs dans celui de l’éducation, qui sont parmi les secteurs où les rémunérations sont les plus élevées. À l’inverse, les femmes constituent 98 % et 54 % de la main-d’œuvre employée dans les emplois domestiques et dans le secteur du commerce de gros et de détail, respectivement. Dans ces deux secteurs, le revenu médian mensuel est inférieur au revenu médian mensuel national qui s’établit à 80 000 Francs CFA.
En outre, les écarts de revenu entre les hommes et les femmes sont plus marqués dans les secteurs économiques où les femmes sont surreprésentées. Ainsi, les écarts s’élèvent à 64 % dans l’agriculture et à 70 % dans le secteur du commerce de gros et de détail, deux secteurs qui, à eux deux, représentent près de 60 % de l’emploi des femmes (Graphique 4.4, Partie B). En revanche, le revenu médian des femmes est plus élevé que celui des hommes dans le secteur de l’éducation ainsi que dans celui de l’hébergement et de la restauration. Toutefois, ces secteurs ne représentent que 9 % de l’emploi des femmes.
L’autonomisation économique des femmes est entravée par leur faible pouvoir décisionnel, la répartition inégale du travail non rémunéré et les stéréotypes sur les métiers et secteurs appropriés
Les normes sociales qui légitiment la domination des hommes dans la prise de décisions, y compris quant au choix du travail des femmes, portent atteinte à la capacité d’agir et à la participation au marché du travail de celles-ci
En Côte d’Ivoire, les normes sociales reconnaissent le droit des femmes à travailler, mais conditionnent ce droit au contrôle et à l’accord des hommes. Au niveau national, la majorité de la population (88 %) s’accorde à dire qu’il est parfaitement acceptable qu’une femme ait un emploi à l’extérieur du ménage. Néanmoins, les normes sociales établissent que les hommes sont en droit d’exercer un contrôle sur l’activité économique des femmes : 70 % de la population pense que c’est à un homme de décider si une femme a le droit de travailler en dehors du foyer (Graphique 4.5, Partie A). Dans les districts des Savanes et du Denguélé, plus de 90 % de la population est de cet avis. De même, dans l’ensemble de la Côte d’Ivoire, 87 % de la population considère qu’une femme doit obligatoirement demander à son mari la permission de démarrer une activité commerciale. Les entretiens qualitatifs du SIGI Côte d’Ivoire montrent que ces opinions sont principalement répandues parmi les groupes ethnoculturels et linguistiques des Gour, des Mandé du nord et des Krou établis dans le nord et l’ouest du pays. Dans ces groupes, ce sont les hommes qui décident si les femmes se livrent à une activité économique (Niava et al., 2022[22]).
Outre le contrôle qu’exercent les hommes sur la participation des femmes au marché du travail, les normes sociales font qu’ils sont, en général, les seuls à prendre les décisions importantes au sein du ménage. D’après les données du SIGI Côte d’Ivoire, 87 % de la population pense que c’est aux hommes qu’il revient d’avoir le dernier mot sur les décisions importantes des ménages (voir le Chapitre 2).
Ces normes sociales restreignent la liberté des femmes quant au choix de leur emploi et obligent un grand nombre d’entre elles à demander la permission avant de travailler. Au niveau national, plus de la moitié des femmes (51 %) déclarent avoir dû demander la permission à une personne de leur ménage ou à un membre de leur famille pour exercer leur emploi principal (Graphique 4.5, Partie B). À l’inverse, seulement 11 % des hommes se sont trouvés dans la même situation. En outre, l’opinions selon laquelle les hommes doivent décident si une femme a le droit de travailler à l’extérieur du foyer est significativement associée à des taux d’activité des femmes plus faibles9.
Le genre, l’état matrimonial, l’éducation et le niveau de richesse constituent des déterminants clés des normes sociales discriminatoires qui légitiment le contrôle exercé par les hommes sur l’activité économique des femmes. En effet, les hommes sont nettement plus susceptibles d’adopter des attitudes qui perpétuent la domination masculine dans la prise de décision et limitent la participation des femmes au marché du travail. L’état matrimonial est également un déterminant fort, les célibataires étant moins susceptibles que les personnes mariées de faire état d’opinions discriminatoires qui s’opposent à la participation des femmes au marché du travail et à leur pourvoir décisionnel. De même, la probabilité d’avoir des attitudes discriminatoires diminue à mesure que le niveau d’instruction augmente. Les personnes avec un niveau d’éducation plus élevé sont plus enclines à trouver acceptable qu’une femme ait un emploi rémunéré hors du foyer et à rejeter l’affirmation selon laquelle c’est aux hommes qu’il revient de décider de l’activité économique d’une femme en dehors du foyer. Cette position s’accentue à mesure que le niveau d’instruction augmente et est la plus marquée parmi les personnes ayant suivi des études secondaires ou universitaires. De même, les individus issus de ménages plus aisés sont plus susceptibles d’être favorables à la participation sans entrave des femmes au marché du travail, cette position étant la plus marquée parmi les individus appartenant aux deux quintiles de richesse les plus élevés10.
Les normes sociales cantonnent les femmes à la sphère domestique, où elles assument la majeure partie du travail domestique et de soin non rémunéré
Les normes sociales cantonnent les femmes à la sphère domestique et à leur rôle de mère et d’épouse. En effet, la grande majorité de la population ivoirienne considère que le travail d’une femme est de s’occuper des enfants et du ménage (88 %) et qu’une femme doit donner la priorité à son rôle de mère et d’épouse et non à sa carrière (80 %). En outre, la moitié de la population ivoirienne pense que les enfants souffriront si leur mère travaille dans un emploi rémunéré, ce qui est du même ordre que la moyenne mondiale (OCDE, 2019[23]).
Ces points de vue établissent une séparation claire et nette entre les hommes et les femmes quant aux rôles qui leurs sont dévolus au sein du foyer. Les normes sociales, en Côte d’Ivoire, établissent que les femmes doivent se charger du travail domestique et de soin non rémunéré, tandis que les hommes sont censés pouvoir au revenu de la famille. La société attend d’eux qu’ils se concentrent exclusivement sur leur emploi rémunéré et qu’ils s’abstiennent de participer aux tâches domestiques, soulignant le poids et le rôle central des normes restrictives de masculinité qui, par ailleurs, restent prévalentes dans le monde entier (OCDE, 2021[24]). Ainsi, en Côte d’Ivoire, 65 % de la population (73 % des hommes et 57 % des femmes) estime que les femmes et les hommes ne devraient pas partager de manière égale les tâches ménagères et les responsabilités de soins. De surcroît, près de la moitié des hommes (47 %) et d’un tiers des femmes (31 %) estiment qu’un homme qui se charge de la plupart des tâches ménagères n’est pas un vrai homme. Dans la lignée de ces résultats, plus de la moitié de la population (70 % des hommes et 38 % des femmes) considère qu’il est normal que les employeurs favorisent les candidats masculins lorsque les emplois sont rares, et les trois quarts de la population estime qu’il est légitime que les hommes gagnent plus que leur femme ou partenaire (83 % des hommes et 68 % des femmes). Ces points de vue sont particulièrement répandus parmi les personnes dépourvues d’éducation formelle et vivant dans des ménages pauvres. Quant aux responsabilités ménagères et domestiques, elles sont très clairement identifiées comme étant du ressort des femmes. La vaste majorité de la population ivoirienne estime en effet que c’est uniquement aux femmes qu’incombe la responsabilité de préparer les repas pour la famille (84 %), d’entretenir la maison (77 %), de faire la lessive (76 %), de nettoyer la salle de bains (73 %), d’entretenir la cour (71 %) et de faire les courses (68 %).
Les normes qui cantonnent les femmes à la sphère domestique et celles qui limitent leur accès au marché du travail se renforcent mutuellement. En effet, les personnes estimant que le rôle d’une femme est de s’occuper des enfants et du foyer et qui sont opposées à l’idée d’un partage égal du travail domestique et de soin non rémunéré entre les hommes et les femmes sont nettement plus enclines à penser qu’il faut donner la priorité aux hommes lorsque les possibilités d’emploi sont limitées11. Les personnes célibataires, celles avec un niveau d’instruction plus élevé, et celles qui appartiennent à des foyers plus aisés sont moins susceptibles d’entretenir des vues discriminatoires qui cantonnent les femmes à la sphère domestique que les individus mariés, moins instruits et appartenant à des ménages plus pauvres12.
Les attitudes et les opinions qui cantonnent les femmes à la sphère domestique sont sources d’inégalités dans la répartition du travail domestique et de soin non rémunéré, dont la charge incombe principalement aux femmes. Ainsi, les femmes ivoiriennes consacrent quatre fois plus de temps que les hommes à des tâches domestiques et de soin non rémunérées13, avec de grands écarts constatés entre les milieux urbains et ruraux ainsi qu’ente les districts. Les districts où les ratios sont les plus élevés sont principalement ruraux. Ce constat tient en partie au fait que dans les districts ruraux, de nombreux ménages ont tendance à être privés d’un accès direct à l’eau et/ou à une source d’énergie moderne pour la cuisson des aliments (telle que l’électricité, le gaz, etc.). Les districts du Woroba, de Gôh-Djiboua et de Savanes illustrent cette dynamique. Dans ces districts, le temps que les femmes consacrent au travail domestique et de soin non rémunéré est sept fois supérieur à celui des hommes (Graphique 4.6, Partie A). En particulier, les femmes consacrent 20 fois plus de temps que les hommes à la collecte de l’eau pour le ménage. Or, ces districts affichent également parmi les plus bas taux d’accès à une source d’eau saine et située sur place. De même, dans le Woroba, où environ la moitié de la population a accès à l’électricité, les femmes passent en moyenne une heure par jour à ramasser du bois de chauffage, contre dix minutes pour les hommes. De manière plus générale, sous l’effet des normes établissant que la place des femmes est au foyer, le travail non rémunéré des femmes est composé principalement de tâches ménagères de base et courantes. En effet, les écarts entre les hommes et les femmes quant au temps consacré au travail non rémunéré sont particulièrement marqués pour des tâches telles que la préparation des repas pour le ménage, s'occuper des enfants, la lessive, les courses ou le ménage (Graphique 4.6, Partie B).
En outre, les femmes supportent une double charge de travail rémunéré et non rémunéré. Au niveau national, les femmes consacrent en moyenne 5.2 heures par jour à des tâches domestiques et de soin non rémunérées, par rapport à 1.3 heure par jour pour les hommes. Néanmoins, les normes sociales continuent d’attendre des femmes qu’elles travaillent et contribuent au revenu du ménage, même si cette activité économique s’effectue sous le contrôle des hommes. Ainsi, les femmes consacrent une partie importante de leur journée à une activité rémunérée, travaillant en moyenne 5.3 heures par jour dans un emploi rémunéré, par rapport à 6.6 heures pour les hommes. La combinaison du travail non rémunéré et du travail rémunéré se traduit par une charge de travail totale des femmes bien plus importante que celle des hommes. En moyenne, les femmes consacrent un peu plus de 10 heures par jour à du travail rémunéré et non rémunéré combiné, contre seulement 8 heures pour les hommes (Graphique 4.7, Partie A). De plus, alors que les femmes consacrent autant de temps au travail rémunéré qu’au travail non rémunéré, les hommes consacrent 80 % de leur temps uniquement au travail rémunéré.
La charge disproportionnée de travail non rémunéré des femmes entrave leur participation pleine et entière au marché du travail. On constate une forte corrélation négative entre le temps que les femmes consacrent à des tâches domestiques et de soin de base14 et la proportion de femmes dans la population active (Graphique 4.7, Partie B). De plus, au-delà de leur participation au marché du travail, le travail non rémunéré qu’assume les femmes entrave également leur façon de travailler. Les résultats du SIGI Côte d’Ivoire montrent que plus de temps consacré par les femmes à des tâches ménagères de base est associé à une présence moindre des femmes dans le secteur formel15. De même, dans tous les districts du pays, on constate que des ratios femmes-hommes plus élevés en matière de temps consacré au travail domestique et de soin non rémunéré (ce qui est signe d’inégalités plus fortes dans la répartition du travail non rémunéré) s’accompagnent d’une plus faible représentation des femmes dans les emplois salariés16. Ces résultats confirment que la charge disproportionnée de travail domestique et de soin non rémunéré que les femmes assument tend à les inciter à rechercher des modalités de travail plus flexibles, parfois à temps partiel ou plus proches de leur domicile, et qui, toutes, se traduisent par leur surreprésentation dans le secteur informel et dans des emplois de statut inférieur. (OCDE, 2021[25] ; Dieterich, Huang et Thomas, 2016[26] ; Kabeer, 2009[3])
Les normes sociales qui cantonnent les femmes à certains types de postes et de professions spécifiques peuvent nuire à leur statut sur le marché du travail
Les préjugés et les stéréotypes concernant les types d’emploi et les métiers susceptibles d’être indiqués ou appropriés pour une femme ou pour un homme tendent à cantonner les femmes à des secteurs ou à des postes spécifiques. En effet, certains emplois sont perçus comme étant plus indiqués pour les femmes que pour les hommes et inversement (voir le Chapitre 3). Par exemple, 64 % de la population considère que la profession de sage-femme n’est approprié que pour une femme tandis que seulement 2 % estime qu’il s’agit d’un emploi uniquement indiqué pour les hommes. De même, 49 % et 43 % de la population estime, respectivement, que les métiers d’employé domestique et de secrétaires ne sont appropriés que pour une femme (Graphique 4.8). À l’inverse, certaines professions comme celles d’agent de police, d’informaticien, d’architecte, d’ingénieur et de médecin tendent à être perçues comme « masculines » : moins de 2 % de la population pense que ces emplois ne conviendraient qu’à une femme. La définition sociale d’un métier et sa caractérisation comme « masculin » ou « féminin » correspond non seulement au sexe auquel ces emplois sont généralement associés, mais aussi à la perception des traits et caractéristiques inhérentes des hommes et des femmes qui font qu’une profession est considérée comme indiquée ou non pour une personne donnée (OCDE, 2021[24] ; Buscatto et Fusulier, 2013[27]). À cet égard, les emplois communément associés à la force physique (comme celui d’agent de police) et ceux qui nécessitent un raisonnement mathématique et une compréhension scientifique sont considérés comme étant plus indiqué pour les hommes, notamment du fait de stéréotypes qui considèrent ces capacités comme des traits plus masculins. À l’inverse, les professions telles que sage-femme, femme de ménage et secrétaire sont considérées comme plus appropriées pour les femmes du fait de leur association avec le soin et l’attention portés aux autres, qui sont généralement considérés comme des traits féminins (OCDE, 2021[24]).
Les attitudes discriminatoires établissent également que les hommes sont mieux placés que les femmes pour occuper des postes de leadership. Près des deux tiers de la population ivoirienne (80 % des hommes et 43 % des femmes) estime que les hommes ont de meilleures compétences de leadership que les femmes. Plus précisément, 56 % de la population pense que les hommes font de meilleurs gestionnaires d’affaires et une proportion similaire pense qu’ils font de meilleurs dirigeants politiques. À l’inverse, 61 % de la population considère que les femmes sont trop émotives pour devenir des leaders politiques. Les Ivoiriens sont également plus favorables à l’idée d’avoir un homme comme chef plutôt qu’une femme. Au niveau national, 38 % des hommes et 23 % des femmes déclarent préférer travailler pour un homme, contre seulement 4 % des hommes et 13 % des femmes qui disent préférer travailler pour une femme. Les normes restrictives de masculinité et la crainte de la perception sociale jouent un rôle essentiel dans l’explication de ces préférences (OCDE, 2021[24]). En effet, 15 % des hommes craignent que travailler pour une femme menace leur masculinité, la proportion atteignant 31 % dans le district de Sassandra‑Marahoué.
Les attitudes et vues discriminatoires qui cantonnent les femmes à certaines professions peuvent avoir des conséquences majeures, et ce d’autant plus que les emplois jugés comme masculins sont mieux rémunérés et de statut supérieur à ceux traditionnellement occupés par les femmes. En Côte d’Ivoire, les secteurs et les emplois dans lesquels les femmes sont surreprésentées ont tendance à avoir une faible valeur ajoutée et à être d’un statut social inférieur. Ainsi, les femmes ivoiriennes se concentrent notamment dans des professions à faible productivité comme le travail à compte propre dans le secteur informel et tendent à tirer des revenus limités de leurs activités économiques (Banque mondiale, 2015[14] ; Christiaensen et Premand, 2017[28]). Les résultats du SIGI Côte d’Ivoire montrent que l’emploi dans le secteur informel ou dans certaines formes d’emploi vulnérables sont étroitement associés à des niveaux de revenu moins élevés17. Les femmes peuvent aussi avoir du mal à accéder à des emplois qui leur permettraient de vivre décemment. Au niveau national, 23 % des femmes salariées vivent en dessous du seuil de pauvreté international (1,90 USD par jour en parité de pouvoir d’achat), soit quatre points de pourcentage de plus que le taux pour les hommes (OIT, 2021[12]).
Les femmes continuent aussi à être mal représentées au sein des postes de gestion et de leadership. Selon les données du SIGI Côte d’Ivoire, les femmes ivoiriennes ne représentent que 15 % des salariés occupant des postes de direction ou de cadre. L’OIT, de son côté, estime que les femmes ivoiriennes représentent 22 % des personnes aux postes de cadres supérieurs et moyens (OIT, 2021[12]). De même, les femmes ne détiennent que 14 % des sièges à l’Assemblée nationale et 19 % au Sénat, ce qui souligne leur pouvoir de décision limité dans la sphère publique ivoirienne (Parline UIP, 2022[29]). Les attitudes discriminatoires à l’égard des femmes occupant des postes de haut niveau et de prise de décision peuvent limiter, de manière sous‑jacente, la progression de carrière des femmes dès leur plus jeune âge. En effet, les personnes estimant que les hommes ont de meilleures compétences que les femmes en leadership et en gestion sont également plus susceptibles de considérer que les études universitaires sont plus importantes pour les garçons que pour les filles18. Dès lors, quand les parents agissent en fonction de telles convictions discriminatoires, ils tendent à privilégier l’investissement dans l’éducation de leurs fils plutôt que de leurs filles, ce qui a de lourdes conséquences sur les perspectives d’emploi et d’autonomisation économique de celles‑ci (voir le Chapitre 3).
La dynamique intra-ménage et les pratiques en matière de succession limitent l’accès des femmes ivoiriennes aux biens, ce qui entrave leur autonomisation économique
La propriété par les femmes de biens productifs est essentielle à leur autonomisation économique : en effet, les biens possédés peuvent constituer à la fois un moyen de production en soi (par exemple des terres agricoles pour les cultures) ou une garantie nécessaire pour obtenir un financement en vue d’autres activités économiques (par exemple pour une petite entreprise). En Côte d’Ivoire, le secteur agricole continue de représenter près de 20 % du Produit Intérieur Brut (PIB) et 40 % de l’emploi total (Banque mondiale, s.d.[30]). En outre, les petites et moyennes entreprises représentent 98 % des entreprises ivoiriennes. Dans la mesure où elles emploient la plus grande partie de la population, elles constituent la base du tissu économique du pays (Conférence économique africaine, 2020[31] ; Oxford Business Group, 2019[32]). Dans ce contexte, la propriété par les femmes de terres agricoles, ainsi que d’autres avoirs nécessaires à l’obtention de prêts et crédits bancaires, est fondamentale à leur autonomisation économique.
Le lien essentiel entre moyens de subsistance, sécurité alimentaire, nutrition et agriculture place l’accès au foncier et le contrôle des terres au cœur du développement durable et de l’élimination de la pauvreté. À l’aune du changement climatique et des risques accrus d’épisodes climatiques défavorables, comme des sécheresses ou des inondations, l’accès à la propriété de terres par les femmes est une condition essentielle afin de limiter leur vulnérabilité aux effets socio‑économiques de ces événements climatiques. La propriété foncière permet aux femmes propriétaires de devenir des acteurs à part entière de la réponse au danger climatique, de promouvoir activement des mesures d’adaptation au changement climatique et d’en atténuer ses effets, notamment de par leurs connaissances et leur expertise (Merrow, 2020[33] ; Osman-Elasha, s.d.[34]).
La législation joue un rôle fondamental afin de garantir aux femmes le droit de posséder, d’utiliser et de contrôler des biens tels que des terres agricoles ou des biens immobiliers. La Côte d’Ivoire a récemment adopté des réformes juridiques amendant les trois principales lois qui régissent l’accès des femmes aux biens productifs et le contrôle qu’elles exercent dessus, à savoir la loi sur le mariage, la loi relative au domaine foncier rural et la loi relative aux successions (Encadré 4.3). Ces réformes attestent de l’engagement du gouvernement à instaurer un cadre juridique inclusif qui garantisse l’égalité des droits entre les hommes et les femmes.
Encadré 4.3. Lois régissant la propriété de biens et leur contrôle par les femmes en Côte d’Ivoire
Les droits des femmes ivoiriennes de posséder et de contrôler des biens tels que des terres et/ou des biens immobiliers dépendent principalement de trois lois :
La loi relative au domaine foncier rural de 1998, modifiée pour la dernière fois en 2019 (nº 2019-868), accorde aux femmes et aux hommes les mêmes droits en matière d’acquisition de propriété foncière (article 5). La loi reconnaît les droits coutumiers dès lors qu’ils sont conformes à la tradition et qu’ils assurent la transmission paisible de la propriété des terres. Dans ce cas, les autorités locales peuvent délivrer un certificat foncier temporaire. Dans une démarche de formalisation progressive de la propriété foncière, tout titulaire de droits fonciers (légaux ou coutumiers) est tenu de les faire reconnaître officiellement (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2019[35]).
La loi relative aux successions établit les mêmes droits successoraux pour les enfants, indépendamment de leur sexe (article 22) (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 1964[36]). Depuis la réforme de 2019 (n° 2019-573), la loi sanctuarise les parts dévolues au conjoint survivant et aux enfants, le conjoint survivant (souvent la veuve) ayant droit à un quart de la succession (article 26) et les enfants aux trois quarts restants. La loi protège également les veuves du risque d’être expulsées de la maison par la famille du mari décédé (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2019[37]).
Le pouvoir décisionnel et la propriété de biens des femmes mariées sont régis par la loi relative au mariage (n° 2019-570). La révision de la loi de 2019 prévoit que tous les biens acquis, hérités ou gagnés pendant le mariage sont considérés comme des biens communs et peuvent être administrés par l’un ou l’autre des conjoints. Le consentement du conjoint est obligatoire pour les transactions majeures (articles 72, 82 et 83) (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2019[38]).
Le pluralisme juridique, c’est-à-dire la coexistence de lois coutumières et du droit écrit, peut nuire aux droits des femmes. Par exemple, l’incorporation de concepts liés au droit coutumier dans la loi relative au domaine foncier rural est susceptible de maintenir et de perpétuer des inégalités existantes. En effet, il existe un risque que les mécanismes instaurés par la révision de la loi de 2019, qui vise à formaliser la propriété coutumière par la délivrance obligatoire de certificats fonciers, transformés plus tard en actes de propriété privée, excluent les femmes de manière disproportionnée de la procédure de formalisation.
La propriété de biens par les femmes et leur capacité à prendre des décisions au sein du ménage demeurent limitées
La propriété et le contrôle de biens économiques par les femmes sont très faibles par rapport aux hommes
En Côte d’Ivoire, les hommes sont largement plus susceptibles que les femmes de posséder des terres agricoles et des maisons19. Au niveau national, 5 % des femmes possèdent des terres agricoles, contre 25 % des hommes, soit un écart de 20 points de pourcentage. De même, seulement 3 % des femmes possèdent une maison, contre 25 % des hommes, soit un écart de 22 points de pourcentage. En matière de propriété immobilière, on constate de fortes disparités entre hommes et femmes dans tous les districts du pays (sauf à Abidjan et dans le Bas-Sassandra), l’écart atteignant plus de 40 points de pourcentage en faveur des hommes dans des districts comme le Sassandra‑Marahoué, Savanes et Woroba (Graphique 4.9, Partie B).
Les disparités entre les hommes et les femmes en matière de propriété des terres sont plus marquées dans les endroits où une part importante de la population dépend de l’agriculture comme principale source d’emploi. Dans les zones rurales, où 52 % de la main-d’œuvre travaille dans le secteur agricole – et 41 % des femmes – l’écart entre les hommes et les femmes en matière de propriété des terres agricoles atteint 34 points de pourcentage. Bien que cet écart soit systématique dans tous les districts ivoiriens, il est de plus de 20 points de pourcentage dans huit d’entre eux20. Il est particulièrement élevé dans les districts où plus de la moitié de la main-d’œuvre travaille dans le secteur agricole, comme dans celui du Woroba ou des Savanes (Graphique 4.9, Partie A).
Le contrôle exercé par les femmes sur l’utilisation des terres et leur capacité à prendre des décisions quant à leur administration sont également extrêmement limités. Parmi les propriétaires de terres agricoles, quel que soit leur sexe, plus des deux tiers déclarent que seul un homme a le droit de vendre les terres en question. Ils sont 16 % à indiquer que des hommes et des femmes détiennent ce droit de manière conjointe et 6 % déclarent que seules des femmes le détiennent. Ces mêmes disparités entre hommes et femmes sont constatées pour d’autres types de décisions liées à la terre, qu’il s’agisse de la louer, de l’utiliser comme garantie financière ou de faire des choix liés à sa mise en culture (Graphique 4.10, Partie B). Ces différences mettent en exergue l’autonomie limitée dont les femmes disposent quant à l’administration des terres et des biens.
Le faible degré de possession et de contrôle sur les terres est particulièrement frappant pour les femmes qui travaillent dans le secteur de l’agriculture. Au niveau national, seules 20 % des femmes qui travaillent dans le secteur agricole possèdent des terres, contre 57 % des hommes qui travaillent dans ce même secteur. Pour ces femmes, les obstacles qui empêchent leur accès à la propriété foncière soulèvent d’importantes difficultés et les mettent dans une situation de vulnérabilité économique. Elles sont fréquemment contraintes de demander l’autorisation d’utiliser une parcelle aux hommes de leur famille ou de leur communauté. Les entretiens qualitatifs menés dans le cadre du SIGI Côte d’Ivoire montrent que les femmes tendent à cultiver de petites parcelles consacrées à des cultures de subsistance afin de produire de la nourriture pour le ménage. Une très nette division des cultures basée sur le genre existe en Côte d’Ivoire : les hommes sèment principalement des cultures de rente, tandis que les femmes cultivent des produits de base comme de la banane plantain, du manioc, de l’huile de palme ou des fruits (Duflo et Udry, 2004[39]). Dans certains cas, il arrive aux femmes de vendre sur le marché l’excédent de leur production, ce qui constitue un petit revenu supplémentaire pour le ménage (Niava et al., 2022[22]). Néanmoins, il semblerait que les petites exploitations agricoles, où les femmes sont majoritairement concentrées, présentent les meilleures perspectives pour la création d’emplois. En particulier, la Banque mondiale, dans un rapport de 2017, indique que la productivité des grandes exploitations agricoles en Côte d’Ivoire n’est pas meilleure que celle des petites (Christiaensen et Premand, 2017[28]).
Même si la propriété de biens par les femmes augmente au cours de leur vie, le creusement des inégalités ne fait que s’accélérer avec l’âge, ce qui se traduit par un fossé de plus en plus marqué entre hommes et femmes en matière de propriété de biens entre les générations ivoiriennes. En général, la propriété de biens tend à augmenter naturellement avec l’âge à mesure que les individus accumulent du capital et libèrent les ressources nécessaires à l’achat de biens tels que des terres, des maisons, etc., ou qu’ils en héritent de leurs parents ou d’autres membres de la famille plus âgés. Cette dynamique se retrouve en Côte d’Ivoire. D’autre part, les inégalités entre hommes et femmes en matière de propriété foncière et de propriété immobilière apparaissent dès le début de la vie adulte et tendent à s’accentuer plus les individus vieillissent (Graphique 4.10, Partie A). Ainsi, en ce qui concerne la propriété immobilière, l’écart entre les hommes et les femmes passe de 11 points de pourcentage chez les personnes âgées de 20 à 24 ans, à 20 points chez celles âgées de 25 à 29 ans, à 39 points chez celles âgées de 65 à 69 ans et à 45 points chez les personnes âgées de plus de 70 ans. Ce creusement des inégalités avec l’âge tend à indiquer que des barrières structurelles (notamment des inégalités dans les pratiques successorales et dans le contrôle des biens au sein du ménage) entravent la capacité des femmes à accéder à la propriété de biens fonciers et immobiliers, et ce tout au long de leur vie.
La possession de documents officiels et formels permettant de prouver la propriété demeure rare, ce qui rend les propriétaires plus vulnérables (notamment les femmes) et les expose à des pratiques illégales comme l’accaparement de terres. Les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que seulement 47 % des propriétaires fonciers agricoles ivoiriens disposent d’un document officiel21 capable de prouver légalement leur propriété des terres. La proportion est similaire chez les hommes et les femmes propriétaires, qu’ils vivent en milieu urbain ou rural. Cette absence de documents officiels rend les propriétaires de terres agricoles vulnérables à plusieurs types risques, y compris l’exercice de pratiques coutumières et traditionnelles au détriment des femmes. Dans nombre de ces cas, la vulnérabilité des femmes est exacerbée par leur manque de moyens pour faire valoir leurs droits. Dans le contexte ivoirien, où le foncier a été au cœur de récents affrontements politiques, ces questions sont fondamentales et peuvent avoir de graves répercussions sur l’autonomisation des femmes. Ainsi, la transformation en cours des droits fonciers traditionnels ou coutumiers en propriété privée formelle, établie par la révision de 2019 de la loi relative au domaine foncier rural, risque d’aggraver encore les écarts entre les sexes en matière de propriété foncière (Encadré 4.3). En effet, dans la mesure où l’occupation coutumière de la terre tend à favoriser les hommes, le processus de formalisation qui a actuellement lieu risque d’exclure les femmes, aggravant ainsi les inégalités existantes en termes de propriété foncière.
Les hommes ont tendance à avoir le dernier mot pour les décisions qui concernent les finances des ménages, y compris les dépenses et les investissements
Le pouvoir décisionnel des femmes sur les achats et les investissements est extrêmement limité (voir le Chapitre 2). Dans plus des deux tiers des ménages ivoiriens, le principal décideur en ce qui concerne les dépenses et les investissements est soit le chef de famille homme, soit un autre membre masculin du ménage (Graphique 4.11). La participation des femmes, seules ou conjointement avec un homme, aux processus de prise de décision dans le ménage reste quant à elle limitée. Malgré une réforme juridique de la loi relative au mariage qui prévoit la gestion conjointe de la famille par le couple plutôt que par le mari seul (Gouvernement de la Côte d’Ivoire, 2019[38]), les femmes ne participent aux décisions d’achat ou de location d’une maison que dans seulement 24 % des ménages du pays. De même, elles ne sont impliquées dans la décision d’achat d’un moyen de transport, comme une voiture ou une moto, que dans seulement 22 % des ménages. Le pouvoir décisionnel des femmes sur les petits achats courants est lui aussi limité (Graphique 4.11) et les hommes dominent les décisions relatives à l’éducation et à la santé des enfants, ce qui souligne les faibles capacités d’agir des femmes (voir le Chapitre 3).
Le niveau d’instruction du chef de ménage semble être un facteur décisif pour expliquer la participation, ou non, des femmes aux processus de prise de décisions au niveau du ménage. En effet, les femmes vivant dans un ménage dont le chef est plus instruit sont plus susceptibles d’être impliquées dans les décisions liées aux dépenses, petites et grandes, du ménage22. Par exemple, dans 27 % des ménages dirigés par un homme ayant fait des études supérieures, les femmes participent aux décisions relatives à l’achat ou à la location d’une maison. En revanche, les femmes ne participent à ce type de décisions que dans seulement 6 % des ménages dirigés par un homme sans éducation formelle. De même, dans 40 % des ménages dirigés par un homme ayant fait des études supérieures, les femmes participent à la décision et au processus d’achat de terres agricoles alors que ce n’est le cas que dans seulement 6 % des ménages dirigés par un homme sans aucune éducation formelle.
Des normes discriminatoires liées aux pratiques successorales et aux dynamiques intra‑ménages sous-tendent l’accès inégale des femmes aux biens
Les coutumes et les traditions qui légitiment des pratiques discriminatoires en matière successorale entravent l’accès des femmes à la propriété de biens
L’acquisition de biens en Côte d’Ivoire, en particulier de terres agricoles, est fortement tributaire de l’héritage et des liens de parenté. Comme dans d’autres pays subsahariens, historiquement, l’obtention de biens et de terres en Côte d’Ivoire se fait par trois voies principales : l’achat, l’héritage ou l’attribution par la famille ou les autorités traditionnelles (OCDE, 2021[25]). Les données du SIGI Côte d’Ivoire soulignent l’importance particulière de l’héritage dans le processus d’acquisition de terres et d’autres biens tels que des maisons. En effet, au niveau national, 44 % des propriétaires fonciers ont acquis les terres par l’héritage et 35 % déclarent qu’elles leur ont été attribuées par leur famille ou une autorité traditionnelle. De même, 25 % des propriétaires de maisons en ont hérité et 20 % déclarent qu’elle leur a été attribuée par leur famille ou une autorité traditionnelle. De plus, l’héritage comme moyen d’acquérir des biens est particulièrement important pour les femmes. En effet, beaucoup plus de femmes propriétaires de terres (50 %) et propriétaires de maisons (41 %) que d’hommes (42 % pour les terres et 23 % pour l’immobilier) sont entrées en possession de leurs terres et de leur maison suite à un héritage. Inversement, une proportion beaucoup plus importante d’hommes propriétaires fonciers (19 %) que de femmes (11 %) ont acheté les terres qu’ils possèdent.
Fort de ce constat, n’importe quel obstacle lié au genre et placé sur l’un des trois principaux moyens d’acquisition des terres (achat, héritage ou attribution) est susceptible de diminuer de manière substantielle la capacité des femmes à acquérir et posséder des terres agricoles. L’introduction d’une nouvelle législation plus équitable régissant la propriété foncière et les droits successoraux a permis de réaliser quelques progrès, en particulier dans les zones rurales. Depuis la modification de la loi relative aux successions en 2019, les parts du conjoint survivant, qu’il s’agisse d’une veuve ou d’un veuf, ainsi que des enfants, sont légalement sanctuarisées : l’article 26 établit qu’un quart de la succession revient automatiquement au conjoint survivant (Encadré 4.3). Pourtant, dans la pratique, il semblerait que dans de nombreux cas, l’héritage de terres par les femmes reste subordonné à l’absence de tout autre héritier masculin. De plus, dans certains cas, même en l’absence de fils dans la famille, les possessions du père décédé tendent à être transmises aux frère du défunt, excluant ainsi l’épouse ou les filles survivantes (FAO, s.d.[40] ; Niava et al., 2022[22]).
En Côte d’Ivoire, les pratiques successorales traditionnelles tendent à exclure systématiquement les femmes des bénéficiaires. Les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que lorsqu’une femme décède, dans 69 % des cas, seuls les hommes du ménage (c’est-à-dire le veuf lui-même et/ou les fils) reçoivent des parts, tandis que dans 23 % des cas les hommes et les femmes du ménage (y compris les filles et/ou autres épouses) reçoivent une part de l’héritage. Ce n’est que dans une très faible proportion des cas que seules les femmes du ménage (6 %) et d’autres membres de la famille (2 %) reçoivent une partie de l’héritage. Autrement dit, seulement 8 % des veufs déclarent avoir été exclus de l’héritage de leur femme décédée. À l’inverse, quand un homme meurt, les veuves indiquent que dans 19 % des cas, seules les femmes ont reçu des parts de l’héritage, et que dans 46 % d’entre eux, l’héritage a été divisé entre les hommes et les femmes du ménage. Par conséquent, dans les 35 % des cas restants, les veuves déclarent avoir été exclues de la succession de leur mari décédé (Graphique 4.12, Partie A).
En outre, même dans les cas où les veuves ou les filles héritent d’une partie de l’héritage, ce sont souvent les hommes qui reçoivent la part principale. Alors que 70 % des veufs déclarent avoir été le principal héritier de leur femme décédée, seulement 48 % des veuves déclarent avoir reçu la part principale de la succession de leur mari. En effet, quand le mari meurt, dans 31 % des cas, les fils ont reçu la part principale de la succession, et dans 17 % des cas, ce sont d’autres membres de la famille qui ont hérité de la part principale (Graphique 4.12, Partie B).
Le contraste frappant entre la situation des veuves et des veufs met en évidence la différence de traitement réservé aux femmes lors du décès de leur mari. À ce titre, les perceptions liées à l’identité et au statut social des femmes mariées jouent un rôle essentiel. Les recherches qualitatives menées dans le cadre du SIGI Côte d’Ivoire soulignent que les femmes mariées sont perçues comme appartenant à deux familles : leur famille d’origine, c’est-à-dire celle de leurs parents, et leur belle-famille, c’est-à-dire celle de leur mari. Toutefois, dans le contexte de l’héritage, les femmes ont tendance à être marginalisées par les deux familles. En effet, dans le cadre d’une succession au sein de la famille d’origine, les membres de celle-ci auront tendance à considérer la femme comme appartenant à sa famille par alliance. À ce titre, elle bénéficie des biens de sa belle-famille et n’a donc pas de raisons d’être incluse dans la succession. Les filles sont donc principalement privées de leur droit successoral de crainte que les biens tombent entre les mains de la famille de son mari. Inversement, il est fréquent que la belle-famille d’une femme mariée continue à la considérer comme appartenant à sa famille d’origine. De leur point de vue, autoriser une femme à hériter des biens de son mari décédé équivaudrait à abandonner tout ou partie du patrimoine à une autre famille ou à un groupe entièrement distinct (Niava et al., 2022[22]).
Les pratiques en matière de succession qui excluent les veuves et les filles sont perpétuées par des normes sociales et vues discriminatoires estimant que les biens doivent appartenir aux hommes, notamment lorsqu’il s’agit de terres agricoles. Les coutumes relatives à l’héritage varient d’un groupe ethnique à l’autre en Côte d’Ivoire, mais entre un quart et un tiers de la population (principalement des hommes) s’oppose à l’idée d’égalité entre hommes et femmes en matière de droits à la propriété foncière agricole et de pouvoir décisionnel sur celle-ci. Surtout, une large proportion de la population s’oppose au droit des filles à hériter ou au fait qu’elles puissent recevoir les mêmes parts que les fils. En effet, 36 % de la population estime que les filles ne devraient pas avoir le droit d’hériter de terres et 9 % de plus pensent que les filles devraient avoir le droit d’hériter de terres, mais pas à parts égales comparé aux fils (Graphique 4.13, Partie A). Dans le cas de la propriété immobilière, ces proportions sont légèrement moins élevées mais n’en demeurent pas moins importantes (21 % de la population dans le premier cas et 13 % dans le deuxième) (Graphique 4.13, Partie B). Enoutre, ces attitudes discriminatoires quant à l’héritage de terres agricoles par les filles sont particulièrement répandues dans les régions les plus rurales, comme les districts des Savanes et du Denguélé, où la population est à plus de 60 % rurale et où plus de 50 % des habitants travaillent dans le secteur agricole.
Ces normes sociales, opinions et pratiques discriminatoires ont de graves implications et limitent la capacité des femmes à posséder et à contrôler des biens productifs, en particulier des terres agricoles. On constate une étroite corrélation entre les attitudes qui s’opposent au droit des femmes à hériter de biens et qui favorisent les fils par rapport aux filles (ou d’autres hommes de la famille par rapport aux veuves) et la propriété limitée de biens par les femmes. Plus précisément, au niveau des districts, les attitudes discriminatoires qui s’opposent aux droits des filles à hériter de terres ou à recevoir les mêmes parts que les fils sont étroitement associées à des proportion plus faibles de femmes parmi les propriétaires agricoles (Graphique 4.14, Partie A). De même, les attitudes qui s’opposent aux droits des fille à hériter de biens non fonciers (tels que des maisons) sont significativement associées à une plus faible proportion de femmes parmi les propriétaires de maison (Graphique 4.14, Partie B). Cette domination masculine a de profondes répercussions qui vont au-delà du statut économique des femmes : dans des sociétés encore largement agricoles, telle que la Côte d’Ivoire, la terre est un bien fondamental, non seulement de par sa fonction économique mais aussi de par le pouvoir politique et social qu’elle confère à son propriétaire (Binaté Fofana et al., 2015[41]).
La division traditionnelle des rôles au sein du ménage favorise l’acquisition et le contrôle de biens par les hommes mariés au dépend des femmes mariées
La propriété de biens, qu’ils s’agissent de terres agricoles ou de biens immobiliers, varie considérablement selon l’état matrimonial et de manière diamétralement opposée pour les hommes et les femmes. Ainsi, une plus grande part de femmes célibataires que de femmes mariées ou qui cohabitent avec un partenaire sont propriétaires de biens fonciers et immobiliers. La proportion d’hommes propriétaires de biens suit une dynamique opposée : elle est beaucoup plus élevée parmi les hommes mariés ou qui cohabitent avec leur partenaire que pour ceux qui sont célibataires (Graphique 4.15, Partie A). Les données du SIGI Côte d’Ivoire soulignent l’étroite corrélation qui existe entre une plus faible proportion de femmes parmi les propriétaires de terres agricoles et de biens immobiliers et une incidence plus élevée du mariage (Graphique 4.15, Partie B)23.
Le rôle de l’institution du mariage est complexe et peut constituer une entrave supplémentaire à la propriété de biens par les femmes. En effet, la corrélation entre le mariage et une plus faible part de femmes parmi les propriétaires fonciers ou immobiliers suggère que, au sein de l’institution du mariage, la capacité des femmes à être propriétaire est limitée. Cela peut notamment s’expliquer par l’effet de dynamiques intra-ménages et des rapports de force inégaux au sein du couple. En effet, selon les rôles traditionnels des hommes et des femmes, les hommes sont les principaux décideurs et les propriétaires légitimes des biens de la famille. Dès lors, sous l’impulsion de telles normes solidement établies en vertu desquelles la direction du ménage est dévolue exclusivement aux hommes, on constate une tendance à l’accaparement par les hommes de la propriété de biens acquis en tant que couple marié. C’est particulièrement le cas pour les biens qui sont détenus de façon informelle ou pour lesquels il n’existe pas de preuve de propriété officielle. Dans ces cas-là, la propriété semble être automatiquement attribuée aux hommes. À cet égard, les données du SIGI Côte d’Ivoire montrent que 85 % des femmes propriétaires d’une maison possèdent un titre de propriété légal, tandis que seulement 49 % des hommes propriétaires disposent d’un tel titre. Si l’on ajoute à cela le faible taux de propriété de biens immobiliers parmi les femmes, il semblerait que les femmes ne sont en mesure de posséder des biens immobiliers que lorsqu’elles disposent d’une preuve tangible et irréfutable. À l’inverse, les hommes sont en mesure d’être propriétaires d’un bien sans pour autant détenir un document officiel permettant de le prouver légalement.
Néanmoins, si les femmes sont nombreuses à ne pas être les propriétaires officiels de biens fonciers ou immobiliers, il n’en reste pas moins qu’elles semblent conserver un certain degré de contrôle sur ces biens, comme le droit de les vendre ou de les louer, notamment à travers les relations conjugales. Ainsi, bien que seulement 3 % des femmes déclarent être propriétaires d’une maison, 18 % des propriétaires de maisons identifient une ou des femmes comme étant autorisées à vendre les terres. De même, alors que seulement 5 % des femmes ivoiriennes déclarent posséder des terres agricoles, 22 % des propriétaires terriens identifient une ou plusieurs femmes comme en étant autorisées à prendre la décision de vendre le bien.
Conclusion
Malgré l’adoption récente par la Côte d’Ivoire de réformes juridiques destinées à garantir aux femmes des droits du travail égaux, et le renforcement de leur accès à des biens essentiels (terres ou biens immobiliers), de fortes disparités de genre continuent d’entraver leur autonomisation économique pleine et entière. Les femmes continuent d’accuser du retard par rapport aux hommes en matière de participation au marché du travail, de type d’emploi et de niveau de revenu ; leur propriété de biens et leur capacité à prendre des décisions dans le ménage, quant à elles, restent limitées. Au cœur de ces inégalités, des normes, des attitudes et des pratiques sociales discriminatoires entravent la capacité d’agir des femmes sur le plan économique, dictent leur rôle au sein du ménage et de la société et, in fine, perpétuent leur exclusion économique.
Les attitudes et opinions qui cantonnent le rôle des femmes à la sphère domestique se traduisent par une répartition inégale entre les hommes et les femmes du travail domestiques et de soin non rémunéré, dont la charge incombe principalement aux femmes, ce qui limite leurs opportunités sur le marché du travail. Bien que les normes sociales ne s’opposent pas à la participation des femmes à l’activité économique, elles n’en décrètent pas moins que c’est aux hommes de contrôler les modalités de cette participation et aux femmes de leur en demander l’autorisation. Les perceptions qui attribuent aux femmes certains types de postes et de professions exacerbent ces entraves et créent une ségrégation horizontale et verticale importante, reléguant ainsi les femmes à des secteurs économiques à faible valeur ajoutée et à des postes au pouvoir décisionnel limité. En parallèle, les coutumes et traditions qui légitiment des pratiques successorales discriminatoires cimentent l’accès inégal des femmes aux biens productifs. Une part importante de la population estime qu’il est légitime que les biens, et en particulier les terres agricoles, appartiennent aux hommes et que les règles successorales excluent les veuves et les filles des héritiers potentiels, ou du moins ne les mettent pas sur un pied d’égalité avec les fils ou d’autres hommes de la famille.
Or, l’autonomisation économique des femmes peut potentiellement transformer la société dans son ensemble et générer d’importants gains économiques pour tout le pays. Une participation accrue des femmes au marché du travail permettrait de mettre à profit des ressources humaines inexploitées. Des mesures destinées à accroître la présence des femmes dans les domaines des STIM auraient pour effet de réduire la ségrégation horizontale et d’améliorer la qualité de la main-d’œuvre dans les secteurs à forte valeur ajoutée et à fort potentiel de croissance. De même, donner aux femmes le droit et les moyens de posséder des terres et de prendre des décisions agricoles pourrait avoir pour effet d’accroître les revenus des ménages et de générer de multiples externalités positives, comme la hausse des investissements dans l’éducation et la santé des enfants. Néanmoins, tant que les femmes continueront d’être confrontées à des obstacles profondément enracinés qui diminuent leurs chances sur le marché du travail et les empêchent de posséder en leur nom des biens productifs, cette autonomisation économique risque de demeurer un mirage.
Recommandations
Accès au marché du travail et entrepreneuriat
Mettre l’éducation au service de la participation des femmes sur le marché du travail :
Instaurer des séances d’orientation à l’école pour présenter aux jeunes filles des secteurs où les femmes demeurent sous-représentées.
Créer des programmes de mentorat à l’école pour renforcer la confiance en soi des jeunes filles dans des domaines où les garçons prédominent traditionnellement.
Renforcer les programmes existant encourageant la participation et la réussite des filles dans des matières ou filières traditionnellement réservées aux garçons, comme le concours « Miss Mathématique ».
Promouvoir des services d’orientation de carrière pour les jeunes femmes au niveau de l’enseignement supérieur, dans les centres de formation technique et professionnelle ou à l’université, afin de les aider à faire des choix d’études éclairés en fonction de la demande et des débouchés du marché du travail.
Favoriser et soutenir l’entrepreneuriat féminin pour aider les femmes à créer et à développer des entreprises prospères :
Élaborer des programmes de soutien financier adaptés aux besoins des femmes entrepreneurs (Banque mondiale, 2015[14]). Pour être efficaces, ces programmes doivent tenir compte des contraintes spécifiques auxquelles les femmes sont confrontées et s’y adapter. Par exemple, les femmes ont souvent du mal à investir ou à réinvestir dans leur propre entreprise l’argent qu’elles reçoivent ou qu’elles gagnent (Bernhardt et al., 2019[42] ; Boltz, Marazyan et Villar, 2019[43]). Il est fréquent qu’elles subissent davantage de pressions sociales que les hommes pour dépenser de l’argent au profit d’autres membres de la famille et qu’elles disposent de peu de pouvoir de décision au sein du ménage. Pour échapper à ces contraintes, il est possible de d’imaginer des programmes permettant de transférer les fonds vers des comptes mobiles ou des comptes d’épargne individuels à l’insu d’autres membres de la famille, ou faisant usage de transferts en nature plutôt qu’en espèces, adaptés aux besoins commerciaux des femmes (Buvinić et Furst-Nichols, 2016[44]).
Promouvoir des programmes de formation commerciale afin d’améliorer les résultats d’entreprises appartenant à des femmes. Les formations commerciales peuvent potentiellement améliorer les compétences des femmes en gestion d’entreprise, notamment en matière de planification financière et de comptabilité, et augmenter leurs ventes et leur chiffre d’affaires (Valdivia, 2015[45] ; Calderon, Cunha et De Giorgi, 2013[46]). Les programmes à succès comprennent souvent des volets d'acquisition de compétences de la vie courante ou des sessions axées sur les disparités de genre et dont le but est de renforcer la capacité d’agir individuelle et la confiance en soi des femmes (Chang et al., 2020[47] ; Chinen et al., 2017[48] ; Bulte, R. et Vu, 2017[49]).
Faire en sorte que les mesures de relance économique de l’ère post-COVID-19 profitent aux femmes et s’attaquent aux disparités de genre. Il peut s’agir, entre autres, d’orienter le soutien économique vers des secteurs où l’emploi des femmes est fortement concentré, ou de mettre en place une stratégie d’emploi inclusive qui se concentre sur la qualité et la productivité des emplois (ONU-Femmes, à paraître[50] ; Christiaensen et Premand, 2017[28]). En Côte d’Ivoire, la Chaire UNESCO « Eau, Femmes et Pouvoir de Décisions » a crée la Banque d’Amour et de Solidarité Efficace (BASE), une communauté solidaire d’investissement dans le capital humain pour faire appuyer les populations les plus vulnérables, et notamment les femmes, lors de la pandémie.
S’attaquer aux stéréotypes et biais de genre qui confinent les femmes à des professions et à des postes spécifiques sur le marché du travail :
Élaborer des campagnes en utilisant des moyens de communication de masse et le dialogue communautaire afin d’informer le grand public des avantages de la participation des femmes à la population active, au débat politique et à la prise de décisions politiques.
Veiller à ce que les supports visuels, comme ceux qui figurent dans les manuels scolaires et les fiches d’exercices, ne reproduisent pas de stéréotypes de genre qui associent les femmes à des rôles et à des attributs spécifiques. Avec le temps, les stéréotypes de genre qui façonnent et éclairent des attitudes et des comportements discriminatoires à l’égard des femmes présentes dans des secteurs et à des postes spécifiques peuvent évoluer (Charlesworth et Banaji, 2022[51]) et être déconstruits à force d’informations (van Quaquebeke et Schmerling, 2010[52]). L’utilisation de matériel scolaire où figurent des éléments visuels qui déconstruisent des stéréotypes, comme des photos ou des vidéos qui représentent des femmes et des hommes dans des domaines ou à des tâches traditionnellement dévolues au sexe opposé, peut permettre de mettre à mal des stéréotypes de genre et des comportements sexistes répandus.
Accroître la visibilité des femmes qui occupent des postes de direction et présentes dans des domaines dominés par les hommes. La familiarisation du public à des femmes qui occupent des postes de haut niveau et dans des sphères à prédominance masculine peut faire évoluer les perceptions de la société quant à leurs aptitudes et à leur adéquation à certaines professions. Le fait de voir des femmes qui réussissent, font preuve de confiance en soi et affirment leur indépendance dans des emplois ou des domaines prétendument masculins, peut en amener d’autres à avoir plus confiance en leurs propres compétences (Dasgupta et Asgari, 2004[53] ; Stout et al., 2011[54]). Certaines ressources existantes peuvent faciliter la mise en place de telles mesures, comme par exemple l’annuaire des femmes ivoiriennes cadres de haut niveau établit par le COCOFCI avec l’appui technique de l’INS. De la même manière, le COCOFCI organise, à l’attention des jeunes filles ivoiriennes, des forums axés sur le leadership et comprenant des formations spécifiques, des sessions de coaching et le développement d’un système de mentorat. Des mesures destinées à accroître la représentation et la visibilité des femmes à des postes de direction, telles que des quotas, peuvent également faire évoluer les opinions discriminatoires qu’entretiennent des hommes quant aux compétences de leadership et de gestion des femmes (Beaman et al., 2009[55]).
Reconnaître et mesurer la charge disproportionnée de travail domestique et non rémunéré des femmes qui entrave leur possibilité de participer au marché du travail, et prendre des mesures en vue de l’atténuer et de la redistribuer :
Investir dans des structures d’accueil publiques pour les enfants et inciter les familles à les utiliser. Il peut s’agir, notamment, de services de garderie et de maternelle pour les jeunes enfants, de garde d’enfants après l’école ou de structures d’accueil de jour pour des membres de la famille âgés ou malades.
Investir dans les infrastructures essentielles pour les services de base tels que l’approvisionnement en eau et en électricité, afin de réduire le temps que les femmes et les filles consacrent à certaines tâches ménagères, notamment dans les zones rurales.
Accès aux biens et à leur contrôle
Intégrer dans le cadre statistique national de suivi les trois indicateurs des ODD relatifs à la terre et à l’égalité des sexes (1.4.2, 5.a.1 et 5.a.2).
Renforcer l’application des cadres juridiques existants qui régissent l’accès des femmes à la propriété foncière et aux droits successoraux aux niveaux national et infranational :
Veiller à ce que la transformation en cours des droits fonciers légaux ou coutumiers en propriété privée formelle soit équitable et protège les intérêts des femmes. Des mécanismes doivent être conçus et mis en œuvre afin de veiller à la répartition équitable entre hommes et femmes des titres fonciers créés par la révision de 2019 de la loi relative au domaine foncier rural.
Garantir l’application des dispositions de la loi relative aux successions qui établit l’égalité des droits successoraux pour les enfants indépendamment de leur sexe et qui sanctuarise la part du conjoint survivant en lui attribuant automatiquement un quart de la succession.
Sensibiliser le public aux questions liées aux droits fonciers des femmes, aux droits successoraux et aux ODD :
Fournir aux femmes une aide judiciaire gratuite afin d’améliorer la diffusion des données sur le genre et les droits fonciers.
Appuyer la vulgarisation des textes juridiques notamment auprès des autorités coutumières afin d’améliorer la prise en compte des femmes dans la répartition des ressources foncières au sein des familles.
Organiser des campagnes d’information et de sensibilisation dans les médias (radio et journaux) sur les ressources mises à la disposition des femmes, notamment en ce qui concerne la formalisation des droits fonciers.
Renforcer l’obligation de rendre compte des personnes et des institutions chargées de l’aménagement du territoire, de la délivrance des titres fonciers et de la formalisation des droits fonciers légaux ou coutumiers.
Renforcer les capacités et la position des femmes dans le secteur agricole en améliorant l’accès à l’éducation et à la formation et par des mécanismes de soutien axés sur les cultures de base :
Élaborer des programmes éducatifs et de formation axés sur l’agriculture. L’éducation et les compétences sont des déterminantes clés pour la productivité des travailleurs agricoles indépendants. De faibles niveaux d’instruction et de formation, surtout chez les femmes ivoiriennes, freinent les innovations technologiques et entravent la création de valeur ajoutée dans le secteur agricole. Or des solutions existent, notamment par la réhabilitation des centres nationaux d’éducation et de formations agricoles afin de tirer parti des progrès réalisés dans l’enseignement primaire et améliorer l’offre de connaissances agricoles et de possibilités de formation dans ce domaine.
Mettre en place des programmes de collaboration, de formation et de mentorat, tel que le programme du Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire (COCOFCI, s.d.[11]), et créer des groupes de soutien par les pairs pour les femmes qui travaillent dans le secteur agricole, afin de leur ouvrir l’accès à des marchés plus vastes, de développer des réseaux d’affaires, de leur permettre de profiter des échanges commerciaux intrarégionaux et de connaître les formalités à accomplir afin de vendre leurs produits sur les marchés internationaux.
Cibler en priorité les cultures de base et les petits propriétaires fonciers dans les mécanismes nationaux et infranationaux de soutien à l’agriculture. De récentes études montrent que les petites exploitations agricoles, dans lesquelles les femmes sont surreprésentées, présentent les meilleures perspectives en matière de création d’emploi et ne sont pas nécessairement moins performantes que les grandes exploitations agricoles (Christiaensen et Premand, 2017[28]). Le recentrage de l’action publique sur les petits exploitants qui cultivent des cultures de base aurait pour effet de renforcer les activités agricoles qui comptent pour l’emploi des femmes rurales. En particulier, il existe un potentiel de modernisation important dans les petites exploitations agricoles, y compris par la mécanisation.
Renforcer et élargir l’accès des femmes aux services financiers :
Encourager le développement de services financiers sensibles au genre et orientés vers les activités agricoles dans le secteur privé afin d’améliorer l’accès des femmes aux capitaux et aux financements.
Envisager la mise en place d’incitations pour pousser les établissements bancaires à prioriser le déploiement de services dans les zones et régions mal desservies.
Élaborer des programmes de communication et de sensibilisation fournissant aux coopératives agricoles et aux groupes autonomes de femmes des informations sur l’accès aux services financiers essentiels.
Améliorer la culture financière des femmes rurales par des programmes de formation et des ateliers dédiés et envisager l’intégration obligatoire dans les programmes scolaires du primaire et du secondaire de modules portant sur l’éducation financière.
Références
[14] Banque mondiale (2015), Côte d’Ivoire: From Crisis to Sustained Growth. Systematic Country Diagnositc. Priorities for Ending Poverty and Boosting Shared Prosperity, https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/23106/Cote0d0Ivoire00c0country0diagnostic.pdf?sequence=1&isAllowed=y.
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[18] ONU-Femmes (2020), Enquête rapide sur les effets de la Covid-19 : Une perspective genre. Côte d’Ivoire 2020., https://data.unwomen.org/sites/default/files/documents/Publications/Rapport-final-RGA-CI.pdf.
[1] ONU-Femmes (2020), L’autonomisation économique : quelques faits et chiffres, https://www.unwomen.org/fr/what-we-do/economic-empowerment/facts-and-figures.
[50] ONU-Femmes (à paraître), Au-delà du COVID-19 : Un plan féministe de durabilité et de justice sociale, https://www.unwomen.org/fr/digital-library/publications/2021/12/beyond-covid-19-a-feminist-plan-for-sustainability-and-social-justice#view.
[34] Osman-Elasha, B. (s.d.), Les Femmes ...... dans le contexte des changements climatiques, Chroniques ONU, https://www.un.org/fr/chronicle/article/le-femmes-dans-le-contexte-des-changements-climatiques (consulté le 8 mars 2022).
[32] Oxford Business Group (2019), « Côte d’Ivoire empowers entrepreneurs to boost small businesses », dans The Report : Cote d’Ivoire 2019, Oxford Business Group, https://oxfordbusinessgroup.com/analysis/empowering-entrepreneurs-national-plans-facilitate-growth-small-businesses (consulté le 16 mars 2022).
[29] Parline UIP (2022), Pourcentage de femmes dans les parlements nationaux, https://data.ipu.org/fr/women-ranking?month=3&year=2022.
[54] Stout, J. et al. (2011), « STEMing the tide: Using ingroup experts to inoculate women’s self-concept and professional goals in science, technology, engineering, and mathematics (STEM) », Journal of Personality and Social Psychology, https://www.smash.org/wp-content/uploads/2015/06/steming_the_tide.pdf.
[16] Torres, J. et al. (2021), The impact of the COVID-19 pandemic on women-led businesses., https://iceanet.org/wp-content/uploads/2021/11/Torres.pdf.
[45] Valdivia, M. (2015), « Business training plus for female entrepreneurship? Short and medium-term experimental evidence from Peru », Journal of Development Economics, vol. 113, pp. 33-51., https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0304387814001187.
[52] van Quaquebeke, N. et A. Schmerling (2010), « Wie die bloße abbildung bekannter weiblicher und männlicher führungskräfte unser implizites denken zu führung beeinflusst. [Comment la simple présentation de femmes et d’hommes leaders renommés se répercute sur notre conception implicite du leadership] », Zeitschrift für Arbeits-und Organisationspsychologie, vol. 54/3, pp. 91–104, https://doi.org/10.1026/0932-4089/a000020.
[17] WANEP (2020), Thematic Report, The impact of COVID-19 Pandemic on women: Lessons from the Ebola outbreak in W/Africa, https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/Thematic_Report_Final_-_The_impact_of_COVID-19_on_Women_in_West_Africa.pdf.
Notes
← 1. Loi n°2019- 573 du 26 juin 2019 relative aux successions et Loi n°2019-868 du 14 octobre 2019 modifiant la loi n 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural.
← 2. Le taux de participation au marché du travail ou taux d’activité est calculé en prenant la population active divisée par la population en âge de travailler (population de plus de 15 ans). La population active englobe à la fois les personnes employées et les chômeurs.
← 3. Les résultats sont basés sur deux modèles de type probit qui mesurent la probabilité d’être sur le marché du travail et d’être salarié. Le sexe est la principale variable indépendante. Les variables de contrôle comprennent le lieu de résidence (urbain/rural), l’état matrimonial, l’âge, le niveau d’instruction, la taille du ménage et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Les coefficients et les effets marginaux du sexe sont significatifs au seuil de 1 %.
← 4. Les résultats sont basés sur trois modèles de type probit qui mesurent la probabilité d’être employé : (i) dans l’agriculture, (ii) dans l’industrie (c’est-à-dire les activités de fabrication, la construction ou le transport et le stockage) et (iii) dans le secteur des services. Le sexe est la principale variable indépendante. Les variables de contrôle comprennent le lieu de résidence (urbain/rural), l’état matrimonial, l’âge, le niveau d’instruction, la taille du ménage et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Les coefficients sont significatifs au seuil de 1 %.
← 5. La ségrégation horizontale fait référence à la concentration des femmes et des hommes dans différents secteurs et professions (EIGE, s.d.[56]).
← 6. Les résultats sont basés sur deux modèles de type probit qui mesurent (i) la probabilité d’être employé dans le secteur du commerce de gros et de détail, dans les secteurs de l’hébergement et de la restauration, ou à titre de travailleur domestique et (ii) la probabilité d’être employé dans les secteurs de l’industrie ou de la construction. Le sexe est la principale variable indépendante. Les variables de contrôle comprennent le lieu de résidence (urbain/rural), l’état matrimonial, l’âge, le niveau d’instruction, la taille du ménage et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Les coefficients et les effets marginaux du sexe sont significatifs au seuil de 1 %.
← 7. L’écart entre la part des hommes et des femmes ayant accès à un congé maternité ou paternité rémunéré n’est pas significatif, alors que l’écart entre la part des populations urbaines et rurales ayant droit à un congé parental rémunéré (paternité et/ou maternité) est significatif au seuil de 1 %.
← 8. Les résultats sont basés sur une régression de type OLS (ordinary least squares ou méthode des moindre carrés), en utilisant comme variable dépendante la valeur logarithmique du revenu tiré de l’emploi. Les variables indépendantes comprennent le type d’emploi, le secteur de l’emploi, le temps consacré au travail domestique et de soin non rémunéré, le sexe, l’appartenance au secteur formel de l’économie et le niveau d’instruction. Les coefficients et les effets marginaux du sexe sont significatifs au seuil de 1 %.
← 9. Les résultats sont basés sur une régression de type OLS au niveau des districts, en utilisant comme variable dépendante la part des femmes parmi la population active. La principale variable indépendante est la part de la population qui estime que c’est aux hommes de décider si une femme a le droit ou non de travailler à l’extérieur du foyer. Les variables de contrôle comprennent le lieu de résidence (urbain/rural), l’âge, le niveau d’instruction de la mère, le niveau d’instruction du père (ayant reçu une forme quelconque d’éducation formelle contre aucune) et la richesse des ménages (mesurée par l’indice de richesse). Le coefficient de la principale variable indépendante est significatif au seuil de 10 %.
← 10. Les résultats sont basés sur trois modèles de type probit où les variables dépendantes sont (i) la part de la population en désaccord ou fortement en désaccord avec l’affirmation « Il est parfaitement acceptable pour une femme de votre famille d’avoir un travail rémunéré en dehors du foyer/de l’entreprise familiale/de la parcelle familial si elle le souhaite » ; (ii) la part de la population fortement en accord ou fortement en accord avec l’affirmation « Les hommes doivent décider si une femme peut travailler en dehors du foyer » ; et (iii) la part de la population en accord ou fortement en accord avec l’affirmation « Si les emplois sont rares, les employeurs doivent embaucher les hommes en priorité ». Les variables indépendantes comprennent le sexe, le lieu de résidence (urbain/rural), l’âge, le niveau d’instruction, l’état matrimonial, la taille du ménage, les districts et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Pour les trois modèles, le fait d’être un homme, d’être marié plutôt que célibataire, et de ne pas avoir reçu d’éducation formelle comparé au fait d’avoir reçu une certaine forme d’éducation secondaire sont tous trois des déterminants significatifs (au seuil de 1 % ou 5 % en fonction des variables). L’appartenance aux quintiles de richesse les plus aisés diminue également la probabilité que les individus défendent des opinions discriminatoires.
← 11. Les résultats sont basés sur deux modèles de type probit mesurant la probabilité de considérer que les employeurs devraient donner la priorité aux hommes lorsque les emplois sont rares. Les principales variables indépendantes sont (i) l’opinion que le rôle d’une femme est de s’occuper des enfants et du foyer et (ii) le désaccord avec l’affirmation selon laquelle les hommes et les femmes devraient se partager à parts égales le travail domestique et de soin non rémunéré. Les variables de contrôle comprennent le sexe, le lieu de résidence, l’âge, le niveau d’instruction, l’état matrimonial, la taille du ménage, les districts et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Le coefficient des principales variables indépendantes est significatif au seuil de 1 %.
← 12. Les résultats sont basés sur deux modèles de type probit qui mesurent (i) la probabilité d’être d’accord ou tout à fait d’accord avec l’affirmation « Le rôle des femmes est de s’occuper du foyer, des enfants et des tâches ménagères », et (ii) la probabilité d’être d’accord ou tout à fait d’accord avec l’affirmation « Les hommes et les femmes doivent partager de manière égale les tâches ménagères et le soin accordé aux enfants si les deux travaillent ». Les variables indépendantes comprennent le sexe, le lieu de résidence (urbain/rural), l’âge, le niveau d’instruction, l’état matrimonial, la taille du ménage, les districts et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Le fait d’être un homme est un déterminant significatif dans le modèle (ii) au seuil de 1 %. Le fait de de ne pas avoir reçu d’éducation formelle comparé au fait d’avoir reçu une certaine forme d’éducation secondaire est un déterminant significatif dans le modèle (i) au seuil de 5 %. Le fait d’être marié plutôt que célibataire est un déterminant significatif dans les modèles (i) et (ii) au seuil de 1 %.
← 13. Dans le cadre du SIGI Côte d’Ivoire, le travail domestique et de soin non rémunéré comprend les tâches suivantes : la préparation des repas, le ménage, la lessive, le nettoyage de la salle de bains/des toilettes, les courses, la collecte de l’eau, la collecte du bois de chauffage, s’occuper des personnes âgées, s’occuper des personnes malades/handicapées, s’occuper des enfants, les réparations dans la maison et l’entretien de la cour.
← 14. Dans le cadre du SIGI Côte d’Ivoire, le travail domestique et de soin non rémunéré de base exclut les réparations dans la maison et l’entretien de la cour, et comprend donc les tâches suivantes : la préparation des repas, le ménage, la lessive, le nettoyage de la salle de bains/des toilettes, les courses, la collecte de l’eau, la collecte du bois de chauffage, s’occuper des personnes âgées, s’occuper de personnes malades/handicapées et s’occuper des enfants.
← 15. Les résultats sont basés sur une régression de type OLS au niveau des districts, en utilisant comme variable dépendante la part des femmes parmi les travailleurs du secteur informel. La principale variable indépendante est le temps consacré par les femmes au travail domestique et de soin non rémunéré. Les variables de contrôle comprennent le taux d’urbanisation, la présence d’enfants au sein des ménages, l’état matrimonial, le niveau d’instruction et la richesse des ménages (mesurée par l’indice de richesse). Le coefficient et les effets marginaux de la principale variable indépendante sont significatifs au seuil de 10 %.
← 16. Les résultats sont basés sur une régression de type OLS au niveau des districts, en utilisant comme variable dépendante la part des femmes parmi les employés salariés. La principale variable indépendante est le ratio femmes-hommes du temps consacré au travail domestique et de soin non rémunéré. Les variables de contrôle comprennent le taux d’urbanisation, la présence d’enfants au sein des ménages, l’état matrimonial, le niveau d’instruction et la richesse des ménages (mesurée par l’indice de richesse). Le coefficient et les effets marginaux de la principale variable indépendante sont significatifs au seuil de 10 %.
← 17. Les résultats sont basés sur une régression de type OLS, en utilisant comme variable dépendante la valeur logarithmique du revenu tiré de l’emploi. Les variables indépendantes comprennent le type d’emploi, le secteur de l’emploi, le temps consacré au travail domestique et de soin non rémunéré, le sexe, l’appartenance au secteur formel de l’économie et le niveau d’instruction. Les coefficients et les effets marginaux pour l’appartenance au secteur formel de l’économie et pour le fait d’être employé comme travailleur domestique sont significatifs au seuil de 1 %.
← 18. Les résultats sont basés sur un modèle de type probit qui mesure la probabilité selon laquelle les personnes pensent que des études universitaires sont plus importantes pour les garçons que pour les filles. La principale variable indépendante est l’opinion que les hommes ont de meilleures compétences en leadership et en gestion que les femmes. Les variables de contrôle comprennent le sexe, le lieu de résidence (urbain/rural), l’âge, le niveau d’instruction, la taille du ménage, les districts et la richesse du ménage (mesurée par l’indice de richesse). Le coefficient de la principale variable indépendante est significatif au seuil de 1 %.
← 19. Les résultats sont basés sur un modèle de type probit qui mesure la probabilité de posséder des terres agricoles. Le sexe est la principale variable indépendante. Les variables de contrôle comprennent le lieu de résidence (urbain/rural), l’état matrimonial, l’âge, l’âge au carré, le secteur d’emploi, le niveau d’instruction, la taille du ménage, les districts et la richesse du ménages (mesurée par l’indice de richesse). Les coefficients et les effets marginaux de la principale variable indépendante sont significatifs au seuil de 1 %.
← 20. Comoé, Denguélé, Gôh-Djiboua, Lagunes, Montagnes, Sassandra-Marahoué, Savanes et Woroba.
← 21. Un certificat ou un titre de propriété, un certificat de propriété coutumière, un certificat de vente ou une preuve de concession temporaire/permanente.
← 22. Les résultats sont basés sur une série de modèles probit, limités aux ménages où des femmes sont présentes et où le chef de ménage est un homme, et mesurant la probabilité qu’un homme seul décide de 12 types de décisions au niveau du ménage. Les variables de contrôle comprennent l’âge du chef de ménage, le type d’emploi qu’il exerce, son niveau d’instruction, la taille du ménage, le lieu de résidence, les districts et la richesse des ménages (mesurée par l’indice de richesse). Pour l’intégralité des 12 types de dépenses et de décisions des ménages, les coefficients et les effets marginaux sont significatifs au seuil de 5 % pour l’instruction du chef de ménage au niveau collège, lycée et enseignement supérieur.
← 23. Les résultats sont basés sur deux régressions de type OLS au niveau des districts, en utilisant come variables dépendantes (i) la part des femmes parmi les propriétaires de terres agricoles et (ii) la part des femmes parmi les propriétaires de maison. Les principales variables indépendantes sont la part de la population qui est mariée pour (i) et la part de la population qui est mariée ou vit en concubinage pour (ii). Les variables de contrôle comprennent le taux d’urbanisation, l’âge, les attitudes à l’égard de la propriété foncière/immobilière par les femmes et la richesse des ménages (mesurée par l’indice de richesse). Dans le modèle (i), les coefficients et effets marginaux de la principale variable indépendante sont significatifs au seuil de 10 %. Dans le modèle (ii), les coefficients et effets marginaux de la principale variable indépendante sont significatifs au seuil de 5 %.